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Congrès national
de Belgique
Séance du
vendredi 1er juillet 1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Préliminaires de paix
(les dix-huit articles) (Ch. de Brouckere, Lebeau, Jottrand, Van Snick, Delwarde, Ch. de Brouckere, Van Meenen, Fransman, Blargnies, de Gerlache, Forgeur, Lebeau, Duval de Beaulieu, de Robaulx, P. Claes, Van Snick, Jacques, de Robaulx, Devaux, Duval de Beaulieu, de Robaulx, Barthélemy, Forgeur, Ch. de Brouckere, Van Snick, de Robaulx, Van de Weyer, A. Gendebien, de Robaulx, Ch. de Brouckere, Blargnies, Barthélemy, A. Gendebien, Forgeur, Van Meenen, Van Snick, Devaux, Van Meenen, Lebeau, Van Snick, Jacques, de Robaulx, A. Gendebien, de Gerlache, Ch. de Brouckere, Forgeur, Blargnies, Pirson, Duval de Beaulieu, Destouvelles, de Sécus (père), Ch. Vilain XIIII, de Robaulx, Ch. Vilain XIIII, Rogier, Jaminé)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles,
Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie,
1844, tome 3)
(page 365) Jamais le public n'a montré plus d'empressement : à peine les portes
furent-elles ouvertes que toutes les tribunes et places réservées ont été
envahies. Les tribunes supérieures sont exclusivement remplies de dames.
(Présidence
de M. Raikem, premier vice-président)
La séance
est ouverte à midi.
M. Liedts, secrétaire, donne lecture du procès- verbal ;
il est adopté. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
Un des secrétaires présente
l'analyse des pétitions suivantes :
M. Pacheco-Bermudes demande un secours à titre de prêt pour
subvenir à ses pressants besoins.
M. Eloi de
Burdinne demande la sortie immédiate des avoines.
Trois
distillateurs de Nivelles présentent des obeservations
sur le projet de loi relatif aux distilleries.
- Ces
pièces sont renvoyées à la commission des pétitions.
M. Raikem
(fils) fait hommage au congrès de : Considérations sur l'abolition de la
peine de mort. (P. V.)
-
Dépôt à la bibliothèque. (P. V.)
M. le président – L'ordre du jour est la discussion sur
l’état des négociations.
- La
parole est à M. Jaminé. (M. B., et E., 3 juill.)
M. Charles de Brouckere
– Je demande la parole
pour une motion d'ordre. Messieurs, vous vous rappellerez que par un décret du
2 juin, vous avez autorisé le gouvernement à ouvrir des négociations sur les
questions territoriales, au moyen d'indemnités pécuniaires, et de faire des
propositions dans ce sens. Par l'article 2 du décret, vous stipulez que le
résultat des négociations sera soumis à votre ratification, et que dans tous
les cas un rapport vous serait fait le 30 juin, pour statuer immédiatement si
les négociations seraient rompues ou continuées. Par votre décret
du 4 juin, en élisant pour roi le prince de Saxe-Cobourg, vous avez mis pour
condition expresse à son élection, l'obligation de maintenir l'indépendance et
l'intégrité du territoire ; vous avez ajouté qu'il ne prendrait possession
qu'après avoir juré d'observer la constitution, et par conséquent son article
1er, qui fixe les limites du territoire. Le ministère devait nous faire un
rapport, le 30 juin, sur les négociations. Le
Pendant
deux longs mois j'ai entendu répéter tous les jours que la seule pensée du
ministère, dès sa création, avait été, non pas de faire des actes
d'administration, mais de constituer le pays par des négociations, et, si les
négociations ne réussissaient pas, de recourir à la voie des armes. Vous savez,
messieurs, que le ministère, sans mandat de votre part, a jeté ses vues sur le
prince de Saxe-Cobourg pour lui donner le trône de
Quant à
moi, messieurs, si le ministère ne prend pas de conclusions, je ne vois pas sur
quoi nous pourrions délibérer. Eh ! qu'avons-nous besoin de ministres qui
restent muets quand nous discutons les affaires les plus importantes de l'État
? car je n'aurai besoin que de vous rappeler la conduite du ministre de
l'intérieur, qui reste là comme un terme et sans mot dire quand nous discutons
des projets de loi que lui-même il nous a présentés. Qu'avons-nous besoin,
dis-je, d'un ministre, si, quand il a été chargé de négocier, il se contente de
déposer des pièces authentiques qui résultent des négociations ? Mais les
négociations produisent autre chose que des pièces, il y a des notes échangées
avant, qui en expliquent l'esprit ; ce sont ces notes qu'il faudrait aussi nous
faire connaître. Il faut donc que le ministre qui a négocié, qui seul connaît
le fil des négociations, nous présente, sous sa responsabilité, une résolution
quelconque sur laquelle nous puissions délibérer : cela est d'autant plus
nécessaire, qu'il pourrait y avoir des pièces cachées, qui cependant pourraient
influer sur notre détermination, pièces que le ministre serait bien obligé de
produire si un jour, par suite de ses actes, il était mis en accusation. Je le
déclare donc, si le ministre ne prend pas de conclusions, je considérerai ce
refus comme une défection complète du ministère ; si, au contraire il a envie
de nous faire adopter les dix-huit articles, je dirai qu'il trahit le pays, car
je considère l'acceptation des protocoles comme une trahison qui n'est propre
qu'à arrêter l’élan du pays, à lui faire perdre son indépendance, et à étouffer
la liberté dans toute l'Europe. (Bravo ! bravo !) (M. B., 3
juill.)
M. Lebeau, ministre des affaires
étrangères – Messieurs, ce n'est pas la première fois que le ministre des affaires
étrangères soumet au congrès- le résultat des négociations. Dans une autre
occasion il vous a été fait un rapport sur l'état des négociations diplomatiques, et le ministre
n'a pas conclu, parce que son rapport n'entraînait pas comme conséquence
l'obligation de vous présenter des conclusions. Il n'a pas conclu aujourd’hui
parce qu'il pense que des conclusions sont en dehors des pouvoirs du
gouvernement, puisque les négociations sont sorties du cercle qui nous avait
été tracé. On a dit que le ministère avait négocié sans mandat, lorsque j'ai
envoyé des députés à Londres pour pressentir le prince de Saxe-Cobourg sur ses
dispositions dans le cas ou le congrès l'appellerait au trône. Le ministère,
messieurs, n'a rien fait alors qui ne fût dans ses droits, et je dirai que,
dans le cours des négociations, je pense que l'assentiment du pays, qui n’a
manifesté des inquiétudes que sur leur issue, répond suffisamment aux
inculpations du préopinant. Le ministère n'est pas tenté de s'effacer, comme on
l'a dit, et quand le devoir et les convenances lui permettront de prendre part
à la lutte, il ne reculera pas. Mais il ne croit pas qu'il soit convenable au
ministère du régent de venir proposer de lui donner un successeur. En cette
matière, le congrès est seul en possession de l'initiative. Nous pourrions
l'exercer comme députés ; mais comme ministres, c'est ce que nous ne ferons
pas. On a dit que nous aurions dû présenter des conclusions à la fin de notre
rapport. Le congrès nous a investis du pouvoir d'ouvrir des négociations. Si,
dans les limites des pouvoirs qui nous ont été conférés, il était survenu un
arrangement, qu'on eût consenti à accepter des indemnités pécuniaires que nous
avions l'autorisation d'offrir, alors nous nous serions fait un devoir de
conclure, et le congrès aurait statué. Mais quand les grandes puissances ont
refusé de rien faire dans la limite des pouvoirs qui nous avaient été conférés,
quand on n'a pas voulu accueillir l'offre d’indemnités pécuniaires, le
ministère a dû s'abstenir de conclure, et il s'est abstenu. Il a reçu un
préliminaire de paix, qui, quoi qu'on en dise, n’est pas un protocole ; si
c'eût été un protocole, je l'aurais retourné ; ce sont des propositions que la
conférence adresse au congrès. Je ne veux pas en examiner le mérite, cette
discussion serait prématurée (page 367) en ce moment, et le congrès en
sera seul juge ; mais je n'ai pas cru que le ministère pût être responsable de
ces propositions, et je n'ai pas voulu assumer sur moi une immense
responsabilité en interceptant ce document. C'est sur ce document, que le
ministère n'a pas sollicité, que vous aurez à discuter. Je n'ai rien à dire à
cet égard comme ministre. Comme député, quand le moment sera venu de me
prononcer, je ne reculerai pas. Voilà, messieurs, tout ce que j'avais à dire en
réponse à l’honorable préopinant. On me fait remarquer la qu’il a parlé de
pièces secrètes ; je déclare qu'il n’en existe aucune, je ne connais d'autres
pièces que celles qui vous ont été communiquées. (M. B., 3 juill.)
M.
Jottrand fait
remarquer que ce n'est pas au congrès, mais à M. Lebeau, que les pièces
communiquées ont été adressées. L'honorable membre soutient que la
communication seule de ces pièces ne suffisait pas, qu'il fallait encore
proposer quelque chose pour que le congrès fût saisi et pût discuter. Il cite
les articles du règlement qui tracent la marche à suivre pour saisir le congrès
d'une proposition, et fait remarquer que dans l'espèce rien de semblable n'a
été fait. Il termine en disant : Il m'importe peu que des pièces aient été
remises à M. Lebeau, mais il m’importe que le congrès soit saisi de quelque
chose. Je demande donc au préalable qu'une proposition nous soit faite, et, si
elle est appuyée, qu’elle suive l'ordre ordinaire du renvoi aux sections ou à
une commission ; sans ce préalable, il est impossible de délibérer. (M. B., 3
juill.)
M. Van Snick – On demande,
messieurs, si le congrès est saisi : il suffit, pour résoudre l'affirmative, de
lire le procès-verbal de la séance du 28 juin, qui fixe l'ordre du jour
d'aujourd’hui. On y verra que c'est sur la proposition même de M. de Brouckere
qu'il a été décidé que la discussion s'ouvrirait sur l'état des négociations ;
par cette décision le congrès a répondu d'avance aux observations du
préopinant. (M. B., 3 juill.)
M.
Delwarde – Ce que M. Jottrand vient de nous dire est une subtilité. Il était
nécessaire que la conférence de Londres nous envoyât ses propositions par l'intermédiaire de M Lebeau,
elle ne pouvait pas nous les adresser directement ; cela résulte même de la
lettre écrite à M. Lebeau en lui envoyant le document, puisqu'on le charge
expressément de le communiquer à l'une des parties intéressées. Nous
délibérerons donc sur ses propositions comme nous avons toujours délibéré sur
celles qui nous ont été faites. (M. B., 3 juill.)
M.
Charles de Brouckere – Messieurs, il n'a jamais pu entrer dans ma pensée que nous
pussions discuter les dix-huit articles de la conférence sur le rapport qui
nous a été fait, et que vous aviez vous-mêmes fixé au plus tard au 30 juin. Le
ministre nous a dit que le gouvernement devait s'abstenir de conclure ;
cependant le décret du 2 juin porte expressément : « Il sera fait, dans
tous les cas, un rapport à l'assemblée, qui statuera immédiatement. » Vous avez
entendu hier un des commissaires nous dire que dans ce moment la transaction
que nous espérions n'était pas possible, que plus tard peut-être elle le
serait. Mais ce n'était pas au commissaire à nous tenir ce langage, c'est le
ministre des affaires étrangères, seul responsable, qui devait nous dire ce qu'il
pensait des négociations, et s'il fallait ou en espérer quelque fruit ou les
rompre immédiatement. S'il était d'avis de les continuer, il devait nous
demander un temps moral pour cela, et nous dire l'issue probable qu'il
entrevoyait ; dans le cas contraire, il devait nous conseiller une rupture. Il
dit que les dix-huit articles ne sont pas un protocole. Messieurs, le mot de
protocole ne nous effraye pas, nous savons bien que protocole veut dire
procès-verbal ; ce n'est pas le mot, c'est la chose qui nous effraye. Je trouve
dans les dix-huit articles tout ce que contiennent les protocoles, sauf la
dette ; encore dois-je remarquer que le protocole du 20 janvier, contre lequel
précisément M. Lebeau a rédigé la protestation du congrès, ne parle pas de la dette,
il ne règle que les limites ; eh bien, les propositions de la conférence,
contre lesquelles nous avons protesté si haut, sont toujours les mêmes. (M. B.,
3 juill.)
M. Van Meenen – M. Jottrand vous
avait fait remarquer que le congrès n'était saisi d'aucune proposition, et M.
Delwarde a traité ses raisons de pure subtilité. Il a puisé ses preuves dans la
lettre écrite à M. Lebeau, et par laquelle la conférence le charge de
communiquer ses propositions au congrès. Or, voici comment elle est conçue :
« Nous
avons eu l'honneur de recevoir la lettre, en date du 5 juin, que MM. Devaux et
Nothomb nous ont remise de votre part, et nous croyons devoir vous adresser en
réponse les articles ci-joints que la conférence de Londres vient d'arrêter,
pour être communiqués aux deux parties intéressées.
« La
conférence considérera ces articles comme non avenus si le congrès belge les
rejette en tout ou en partie. »
C'est là
ce que M. Delwarde considère comme une proposition de nature à saisir le
congrès ; si cela était ainsi, il faudrait supposer que la conférence (page
368) peut prendre l'initiative gouvernementale vis-à-vis du congrès ; et,
je ne vois pas que nous lui ayons encore reconnu ce droit. Il faut, selon les
formes parlementaires et selon le système du gouvernement représentatif, que
toute proposition donne lieu à une triple responsabilité, la responsabilité de
ceux qui proposent, la responsabilité du congrès par l'adoption ou le rejet, et
la responsabilité de chacun de ses membres par suite de son vote ; personne ne
peut échapper à cette responsabilité. il faut donc qu'une proposition soit
faite : que le ministère la fasse, ou que ce soit un député, peu m'importe,
mais il en faut une. (M. B., 3 juill.)
M. Fransman – Nous sommes engagés dans une route
vicieuse. Il ne s'agit de rien moins que d'accepter ou de refuser les
protocoles. A mon avis il ne s'agit pas de continuer les négociations ; tout
est épuisé maintenant ; que les protocoles soient adressés à M. Lebeau ou à
tout autre, peu importe ; mais ce qu'il importe, c'est de déclarer que nous
n'en voulons pas. Je demande l'ordre du jour sur les propositions de la
conférence. (Appuyé !) (M. B., 3 juill.)
M. Blargnies – J'ai quelques idées à ajouter à
celles qui vous ont été présentées par l'honorable M. Charles de Brouckere. Cet
orateur a tiré argument du décret du 2 juin pour démontrer la nécessité d'un
rapport par le ministère. Je trouve la confirmation de cet argument dans le
décret du 4 juin, qui renferme la nomination de deux commissaires du
gouvernement près la conférence, et charge le ministre des relations
extérieures de l'exécution de ce décret.
La
proposition du rejet et de l'acceptation des préliminaires rentre
nécessairement dans cette exécution ; mais le ministère recule devant la
responsabilité de la combinaison Saxe-Cobourg, maintenant qu'il sent que le
prince ne peut plus venir régner à Bruxelles qu'autant que le congrès aura
adopté les dix-huit articles.
Le
ministère est placé dans cette alternative, , de voir lui échapper sa
combinaison si les dix-huit articles ne sont pas adoptés, et d'assumer sur lui,
en faisant la proposition, une responsabilité, qu'il n'ose pas prendre. Il
abandonne lui-même sa combinaison ; il répudie toute responsabilité à cet
égard.
Le
ministre a dit que la question était en dehors du ministère. Il est bien
certain cependant qu'une proposition de rejet ou d'acceptation de décret est
dans les attributions du pouvoir exécutif. Autrement que serait ce pouvoir ?
Il a dit
qu'il ne s'effacerait jamais devant la nation quand il y aurait nécessité.
Jamais il n’y eut nécessité plus grande. Le ministère est la sentinelle avancée
de la nation ; il est plus à même que
personne de savoir ce qu'il convient de faire. Jamais circonstance ne fut plus
grave ni solennelle.
Le
ministre nous a dit ensuite qu'il ne lui convenait pas de proposer un
successeur à M. le régent. Mais M. le régent n'a qu'un pouvoir provisoire ;
toujours il a été proclamé comme le plus urgent des soins pour un ministère
d'arriver au remplacement de M. le régent.
Le
ministre nous a dit encore qu'il n’avait rien pu faire dans les limites qui lui
ont été données. Qui nous a demandé ce mandat ? Le ministre ; il nous a donc
trompés ; il voulait nous donner un négociateur qui ferait réussir notre
députation dans les négociations qu'elle serait chargée d'entamer. Léopold est
devenu notre négociateur, et cependant nos commissaires sont revenus nous dire
: Nous n'avons pu rien faire dans les limites tracées.
J'appuie la proposition
de M. de Brouckère. (E., 3 juill.)
M. le président – Voici une proposition
qui vient d'être déposée sur le bureau :
« J'ai l'honneur
de proposer au congrès la discussion des dix-huit articles proposés par la
conférence.
« DE
GERLACHE. » (M. B., 3 juill.)
Plusieurs membres, entre
autres M. Forgeur, demandent
la parole. » (M. B., 3 juill.)
M. le président – Le règlement dit que celui qui fait
une proposition a le droit de ma développer, aussitôt après qu'elle est
appuyée. (J. B., 3 juill.)
M. de
Gerlache – Ma proposition n’a pas besoin de développements. L'assemblée jugera
facilement quel est mon but en faisant cette proposition ; c'est de gagner du
temps, que nous perdons en discussions vaines. Je crois qu'il est utile de
discuter ces articles au lieu de discuter des fins de non-recevoir qui ne
mènent à rien. (M. B., 3 juill.)
M. Forgeur – Je demande à parler sur la
proposition de M. de Gerlache pour faire remarquer qu'elle ne répond pas à la
question faite par M. de Brouckere. Remarquez en effet que ce n’est pas un
projet de décret qu'on nous propose, que de nous engager à discuter dix-huit
articles qui arrivent ici par l'intermédiaire du ministre des affaires
étrangères, qui déclare ne pas vouloir les faire siens, et ne pas oser en
assumer la responsabilité (page 369) sur lui. Une telle manière de
procéder ne peut être admise. Si le ministère s'efface, s'il n'ose faire de
proposition, si nous, qu'on nomme minorité, nous trouvons vis-à-vis
d'une majorité qui n'ose pas non plus, qu'alors M. de Gerlache ou tout autre
fasse une proposition ainsi conçue : « Vu les articles de la conférence,
j'en propose l'adoption au congrès ; » alors nous discuterons. Maintenant que
la question est précisée, qu'on fasse la proposition, et nous verrons ce que
nous aurons à faire. (M. B., 3 juill.)
M. Lebeau, ministre des affaires
étrangères – Messieurs, je viens appuyer la proposition de M. de Gerlache. Il est
facile d'expliquer comment il se fait qu'aucune proposition d'adoption ou de
rejet n'ait été déposée sur le bureau par le ministère. D'abord souvenez-vous
de ce qui s'est passé à la dernière séance, où il a été dit qu'on s'occuperait
aujourd'hui en séance publique des propositions soumises au congrès. Cela
trouve une nouvelle justification dans un antécédent que je dois vous rappeler.
Quand le protocole du 20 janvier vous fut présenté, le ministère prit-il des
conclusions ? Non, et cependant ce protocole fut discuté. Vous décidâtes qu'on
protesterait contre, et une des conséquences de la non-protestation
eût été l'adoption implicite. Voilà, messieurs, comment il est facile
d'expliquer pourquoi je n'ai pas pris de conclusions. Est-ce à dire que le
ministère recule devant cette tâche ? Non, le ministère ne recule pas ; et, je
le déclare hautement, si une proposition n'était pas faite, je n'hésiterais pas
à la faire… (M. B., 3 juill.)
Voix nombreuses partant de tous les points de la salle – Faites-la ! faites-la ! (Interruption
prolongée.) (M. B., 3 juill.)
M. le président – Silence, messieurs ! La parole est à
M. le ministre, il ne doit pas être interrompu ; quand il aura parlé, on aura
la parole pour lui répondre : ainsi le veut le règlement, et je saurai le
maintenir. (M. B., 3 juill.)
M. Alexandre Gendebien
– Je demande la parole.
(M. B., 3 juill.)
M. Lebeau, ministre des affaires étrangères – Pourquoi, dit-on, les ministres
n'osent-ils pas faire de proposition ? Mais si dans la discussion les ministres
émettent leur opinion, y aura-t-il pour le public une grande différence entre
cette opinion et une proposition ? Il y a impossibilité à ce que le ministère
fasse la proposition d'adopter les articles de la conférence, car c'est là une
proposition constituante. Il s'agit en effet de modifier la constitution. (De
toutes parts : Ah ! ah ! ah ! ! !... ).
Telle est ma pensée, à moi ; oui, je le dis, il s'agit de modifier la
constitution. Or, le gouvernement n'a pas le pouvoir constituant. Il n'a que
l'initiative du pouvoir législatif, et je maintiens qu'il n'a pas pu proposer
l'adoption d'une proposition constituante, réservée au congrès souverain. (M.
B., 3 juill.)
M.
le comte Duval de Beaulieu – L'ordre du jour devait être l'examen des articles proposés ;
cet ordre du jour avait été fixé d'après la décision de l'assemblée qui doit
avoir été consignée au procès-verbal. Je voudrais qu'il fût donné lecture du
procès-verbal de la séance d'avant-hier. Je saisis cette occasion pour faire
remarquer que M. Blargnies a mis en avant une erreur qui a échappé à son
attention habituelle.
Le
ministre des affaires étrangères a été en effet chargé de l'exécution du décret
du 4 juin, mais ce décret porte nomination de deux commissaires, MM. Nothomb et
Devaux. Le ministère était chargé du soin d'annoncer cette nomination. (E., 3
juill.)
M. de Robaulx – Je me hâte de répondre à
l'observation de M. Duval, qui est une hérésie constitutionnelle. Suivant lui,
un ministère serait chargé de négocier ; il donnerait des instructions, on les
suivrait, et après tout le ministère ne serait responsable que d'avoir annoncé
sa mission au négociateur qu'il aurait choisi. C'est insoutenable.
Il faut
avouer que l'importance qu'on attache à la teneur du dernier procès-verbal est
d'un bien mauvais augure pour tous ceux qui suivent pas à pas le ministère dans
ses conceptions.
Quoi !
vous avez été chargé de négocier, et l'on vous a tracé les bases de ces
négociations ; on vous a dit : Nous consentons à faire des sacrifices
pécuniaires ; et vous pourriez prétendre que vous n'êtes pas responsable de ces
négociations. C'est qu'il s'agit maintenant de toucher à la constitution.
Prenez-y garde, la constitution, c'est une arche d'alliance ; si vous y
touchez, vous serez frappé de mort. (Sensation). Oui, vous serez frappé
de mort par l'opinion.
Qu'avez-vous
dit dans une précédente séance, lorsqu'on vous interrogeait sur la proposition
de l'honorable M. Van Meenen , sur l'état des négociations ? Vous avez dit,
comme ministre, que les négociations étaient sorties du cercle tracé ? Ainsi,
on a négocié en contravention au décret formel du congrès ; on a reçu réponse à
ces négociations. Je ne veux faire tomber aucun blâme sur les commissaires ;
ils avaient leur ligne tracée dans la lettre qui vous a été lue ; ils ont
produit la réponse qui y a été faite. Ils se sont adressés à chacun des membres
de la conférence ; mais ils n'ont jamais pu être reçus officiellement ; on ne
les a jamais (page 370) désignés que par leur simple nom, de même que M.
Lebeau, sans leur reconnaître aucun caractère diplomatique.
Voyez le
résultat produit par la négociation du ministère. Voici qu'on nous propose de
faire abnégation de tout sentiment d'honneur national. Cette proposition tombe
dans l'assemblée ; où est la main qui l'a lancée ? C'est en vain qu'on la
cherche.
Cette
pièce est comme un monstre, dont personne n'ose se déclarer l'auteur ; c'est
que les négociations n'ont pas eu l'effet attendu ; il y a leurre dans tout
cela.
S'il y
avait eu réponse plus satisfaisante sur nos négociations, le ministère aurait
conclu ; mais il s'agit de changer une partie de la constitution ; personne ne
veut plus prendre cet enfant sous sa protection ; on l'abandonne, on le renie,
et celui qui lui a donné l'être ne veut plus le reconnaître. (On rit).
Peu
m'importe qui fera la proposition ! Le ministère ne pourra échapper à sa responsabilité.
Quand bien même, ce qui n'arrivera pas, je me plais à le croire, quelqu'un dans
l'assemblée se chargerait de présenter et de soutenir ce projet, notre
ministère n'en sera pas moins responsable.
Vous avez
consenti qu'on nous demandât d'abandonner une partie de nos frères. En ne
rejetant pas cette proposition, en ne la renvoyant pas avec indignation, vous
avez assumé cette responsabilité. Quand M. Lebeau attaquait avec tant de
violence le précédent ministère, n'a-t-il pas soutenu qu'il fallait renvoyer
les protocoles. Je le demande à M. Lebeau, n'a-t-il pas admis, n'a-t-il pas
reçu comme ministre cette pièce de la conférence qui reproduit si fidèlement
les protocoles ?
Pourquoi
ne l'avez-vous pas renvoyée ? Vous serez toujours censé l'avoir acceptée. Vous
en avez assumé la responsabilité, vous en subirez les conséquences.
On nous a
dit qu'il était inconvenant pour le ministère de proposer le remplacement du
régent. Lorsqu'il s'est agi de la combinaison de Saxe-Cobourg, qu'a dit M.
Lebeau pour l'appuyer ? Il a dit qu'il fallait éviter de faire planer sur le
régent le soupçon de vouloir se perpétuer aux affaires. Eh bien, celui qui a
mis en avant le premier la proposition du remplacement, pourquoi craint-il de
répéter aujourd'hui le motif qu'il faisait valoir alors ? Au lieu de répondre,
il préfère s'entourer de baïonnettes... (Cris divers ; dénégations d'un
côté, applaudissements aux tribunes.) N'allez pas croire que je veuille
faire allusion à la garde civique qui protège le congrès : je sais que ceux-là
sont citoyens avant tout (M. B., supp., 3 juill.)
M. le président lit l'art. 38 du règlement, ainsi
conçu : « La police de l'assemblée appartient au congrès. Elle est exercée
en son nom par le président, qui donne à la garde de service les ordres
nécessaires. » Il déclare que c'est lui qui a ordonné les mesures de
précaution qui ont été prises. (C., 3
juill.)
M. Claes (de Louvain) – Vous avez bien fait. (C., 3
juill.)
M. de Robaulx – Ce que j'ai voulu dire, en reprochant
au ministère de s'entourer de baïonnettes, c'est qu'il se trouve aujourd'hui
dans Bruxelles une. garnison de 3,000 soldats, pendant que nos frontières sont
dégarnies. (Aux tribunes. Oui, c'est vrai.) Je le répète, je n'ai pas
fait allusion à la garde civique.
On
nous a parlé du protocole du 20 janvier. Que veut-on en conclure ? Depuis
longtemps, je réclamais en vain contre les menées diplomatiques ; ma voix était
méconnue, mais les yeux se sont enfin dessillés. On a protesté, mais sur une
proposition faite par moi-même. J'ai toujours accepté la responsabilité de mes
actes. Si on veut que nous délibérions, il faut un rapport précis du ministre
avec des conclusions ou une proposition sortant de l'assemblée. (M. B., supp.,
3 juill.)
M. Van Snick – On a demandé
qui oserait parmi les députés prendre la responsabilité morale de la
proposition d'adoption des dix-huit articles ; messieurs, je suis ce député, et
je crois faire une bonne action ; j'ai rédigé la proposition, je prie M. le
président d'en donner lecture. (Mouvement). (M. B., 3 juill.)
M.
le président – « J'ai l'honneur de proposer au congrès d'adopter le décret
suivant :
« AU NOM DU PEUPLE BELGE,
« Le
congrès décrète qu'il accepte les préliminaires de paix proposés par la
conférence.» (Nouveau mouvement.) (M. B., 3 juill.)
M.
Jacques fait
une proposition semblable ; elle est ainsi conçue :
« Je
propose au congrès national de décréter que les dix-huit articles proposés par
la conférence de Londres soient adoptés comme préliminaires d’un traité de paix
avec
M.
de Robaulx – Je demande à continuer mon discours. (M. B., 3 juill.)
M.
le président et M. Van Snick – Je croyais que vous aviez fini.
(M. B., 3 juill.)
M.
de Robaulx – C'est à l'intention de M. Van Snick de faire une bonne œuvre que je (page
371) dois d'avoir été interrompu ; cela ne m'empêchera pas de faire une
dernière observation : quand courait le bruit que dans le conseil des ministres
il avait été question, à cause du serment du souverain, de modifier la
constitution, le ministre considéra ce bruit comme une calomnie ; aujourd'hui
on ose vous proposer cette modification. Les temps sont changés, mais les
principes resteront. Je proposerai la question préalable sur les propositions de
MM. Van Snick et Jacques. (M. B., 3 juill. et P.V.)
M.
Devaux, ministre d’Etat – Messieurs, quel que soit l'exemple qui m'a été donné, je
n’imiterai pas la violence des termes dont on s'est servi contre le ministère.
Dans une question aussi grave, je conçois toutes les opinions, et je reconnais
qu'elles peuvent être le fruit d'une conviction généreuse autant que
consciencieuse. Mais je pense que c'est mal de mêler à leur expression des
menaces d'animadversion publique et des menaces de mort (murmures),
comme M. de Robaulx a osé le faire ; ces menaces adressées à des hommes qui ne
partagent pas votre opinion, loin de ramener les esprits à celle que vous
soutenez, ne sont même pas un moyen d'émouvoir un homme de conscience. On a
reproché au ministère de n'avoir pas fait de proposition formelle pour accepter
ou pour rejeter les propositions de la conférence. On a prêté au ministère une
opinion qu'il n'a pas énoncée, car on ne sait pas encore son opinion… et je dis
que le ministère ne pouvait pas faire de proposition, non que je partage
l'opinion émise, sans doute par erreur, par M. le ministre des affaires
étrangères, car je ne pense pas qu'il s'agisse de modifier en rien la
constitution ; mais le ministère n'avait pas le droit de faire une proposition,
par cela seul que les négociations avaient dépassé les limites que vous aviez
tracées. On a reproché au ministère de n'avoir pas retourné les propositions,
mais on se méprend. Le ministère était chargé de les présenter au congrès. Ici
il ne pouvait s'agir de les retourner, elles doivent être acceptées ou
rejetées. Quant à l'observation qui a été faite sur la forme de la proposition
de M. de Gerlache, il me semble qu'on a perdu de vue que toutes les
propositions semblables ont été présentées de la même manière, entre autres
celle de l’élection du duc de Nemours et celle de la forme du gouvernement. (Non !/
non !) Je me trompe pour celle du duc de Nemours, mais je ne me
trompe pas certainement pour celle de la monarchie (M. B., 3. juill.)
M.
le comte Duval de Beaulieu, pour un fait personnel –
Je regrette que M. de Robaulx ait facilité pour lui le champ de la
discussion, en me prêtant une opinion que je n'ai pas émise. J'ai parlé d'un
décret, il a cru que j'avais parlé d'un autre. (E., 3 juill.)
M. de Robaulx, pour prouver qu'il n'a dit que la
vérité en soutenant que M. Lebeau avait repoussé comme une calomnie le reproche
d'avoir proposé une modification à la constitution, en conseil des ministres,
lit le passage suivant du rapport fait par M. Lebeau, le 18 mai :
« Vous me
permettrez, messieurs, de répondre à une imputation grave qui a été dirigée
contre moi et qui sans doute ne trouvera pas d'écho » dans cette enceinte. Ce
n'est pas un bruit vague, mes accusateurs ont précisé la date et le lieu. Il a
été dit que, le 11 avril, quelques jours avant le départ de nos commissaires
pour Londres, la question de savoir s'il n'y avait pas lieu de proposer au
congrès de modifier la constitution, notamment dans les dispositions relatives
au serment du roi et à l'étendue territoriale de
M. Barthélemy, ministre de la justice –
Je demande la parole
comme ministre. (M. B., 3 juill.)
M. le président – Sur quoi ? (M. B., 3 juill.)
M.
Barthélemy, ministre de la justice – Pour appuyer la proposition de M. Van
Snick. (M. B., 3 juill.)
M.
Forgeur,
pour une motion
d'ordre – Plusieurs membres étaient inscrits pour obtenir la parole, lorsque M.
Van Snick a improvisé le projet qu'il n'a pas craint de vous soumettre. Je
demande la continuation de la discussion sur la proposition de M. de Brouckere,
parce que j'ai des observations à faire, et qu'on ne peut pas annuler une
discussion par une proposition nouvelle. Il faut qu'une décision soit prise sur
la proposition de (page 372) M.. de Brouckere, avant qu'on s'occupe de
M. Van Snick. (E., 3 juill.)
M. le président – Toute proposition doit être écrite et
déposée sur le bureau. M. de Brouckere ne m'a rien remis. (M. B., 3 juill.)
M. Charles de Brouckere
– Si cette observation
m'avait été faite dès le commencement, j'aurais mis ma proposition par écrit.
(M. B., 3 juill.)
Des voix – Écrivez-la ! écrivez-la ! (M. B.,
3 juill.)
M. le comte Duval de
Beaulieu
réclame la lecture du procès-verbal de la séance du 28. (E., 3 juill.)
M. Van Snick, pour une motion d'ordre – Une
portion de l'assemblée s'est demandé si le congrès était saisi de la discussion
sur les dix-huit articles. J'étais du nombre de ceux qui nous considéraient
bien saisis ; toutefois ma proposition a pour but de satisfaire ceux de nos
collègues qui ne pensent pas comme moi.
On a
demandé au ministre de faire un rapport. Il a répondu qu'il l'avait fait, en
disant que les arrangements pécuniaires n'avaient eu aucun résultat.
Mais,
messieurs, devons-nous, pour retarder la discussion du fond, enjoindre au
ministre de faire un rapport. Est-ce bien là ce que réclame l'état du pays.
Je ne
mets pas en doute que c'est le patriotisme qui conduit la minorité... (Violents
murmures qui interrompent l'orateur.) (E., 3 juill.)
M. le président lui fait observer que jusqu'à
décision il n'y a ni majorité ni minorité. (E., 3 juill.)
M. Van Snick ajoute quelques mots au milieu du bruit. (E., 3
juill.)
M. le président – Voici la proposition de M. Charles de
Brouckere :
« Je
demande que le ministère propose des conclusions, conformément au décret du 2
juin. » (Appuyé.) (M. B., 3 juill.)
M.
le comte d’Arschot – On a demandé depuis longtemps la lecture du
procès-verbal de la séance du 28 qui règle l'ordre du jour d'aujourd'hui. (M.
B., 3 juill.)
M. le président lit le procès-verbal, qui fixe en
effet à vendredi la discussion sur l'état des négociations. (Oh ! oh !)
(M. B., 3 juill.)
M. de Robaulx présente quelques observations sur
l'ordre à suivre entre les diverses propositions : M. de Brouckere, dit-il,
désire que le ministre présente des conclusions à son rapport. M. Van Snick
fait siens les dix-huit articles ; et moi je demande la question préalable sur
la proposition de M. Van Snick. Il faut donc qu'on vide avant tout la question
de M. de Brouckere. Après quoi M. Van Snick viendra développer sa proposition,
sur laquelle j'arriverai, moi, avec la question préalable. (E., 3 juill.)
- Un débat
s'établit entre M. Van
de Weyer, M. Gendebien et M. le président pour
déterminer l'ordre de la discussion. (E., 3 juill.)
M. de Robaulx insiste pour que la parole appartienne à M. de
Brouckere. (E., 3 juill.)
- L'assemblée décide
que la proposition de M. Charles de Brouckere sera discutée avant les autres.
(P. V.)
M. le président – M. Charles de Brouckère a la parole.
(E., 3 juill.)
M. Charles de Brouckere
– Ma proposition est
développée depuis deux heures ; mais je profiterai de l'occasion pour réfuter
les arguments de M. le ministre des affaires étrangères, M. le ministre,
suivant son habitude lorsqu'on lui adresse une interpellation, s'en est référé
à ce qui s'est passé sous le ministère précédent. Il vous a dit que lorsque le
protocole du 20 janvier vous fut communiqué, cette communication ne fut pas
accompagnée de conclusions. Non certainement ; mais pourquoi ? A cette époque
il n'y avait pas de ministère, il n'y avait pas de constitution ; le
gouvernement provisoire seul existait, et il n'avait pas l'initiative de la
proposition des lois. Le ministre doit dire aujourd'hui s'il croit que les
négociations doivent être continuées. M. Van Snick nous a dit : Mais le
ministre vous a fait connaître sa pensée. Non, ce sont ses agents qui sont
montés hier à la tribune. A quoi sert, dit-on, que le ministre fasse une
proposition, puisque dans la discussion il déclare qu'il émettra son opinion ? Lors
de l'élection du prince de Saxe-Cobourg, on nous a invité à des réunions
particulières, nous nous y sommes rendus, et là le ministère, pour en imposer à
nos consciences... (Violents murmures.) Messieurs, je ne cite que des
faits ; oui, pour en imposer à nos consciences, le ministère nous a dit que si
lord Ponsonby avait pu rester deux fois vingt-quatre heures de plus à Londres,
l'affaire du Luxembourg était terminée. On a fait la proposition d'élire le
prince de Saxe-Cobourg ; le ministre a signé la proposition le centième. Il n'y
avait plus de risque à courir de sa part ; dans la discussion il émit son
opinion tout à fait à la fin ; on veut en faire autant aujourd'hui, et c'est ce
que je ne veux pas.
Le
ministère ne peut pas faire de proposition, dit-on, parce que c'est une
question constituante…
M. Lebeau, ministre des affaires étrangères – Je (page 373) me suis trompé.
M. Charles de Brouckere
– Non, messieurs, c'est
une question d'honneur, une question de vie ou de mort pour le pays. Le
ministère doit prendre l'initiative, parce que seul il peut nous fournir des
renseignements exacts sur la situation du pays, sur celle de l’armée. Nous
l'avons assez pressé de mettre le pays en état de prendre l'offensive ; sa
responsabilité est engagée sur ce point. En faisant une proposition
d'acceptation des dix-huit articles, il nous prouvera comment il a usé du
pouvoir. J'insiste sur une conclusion expresse par suite du décret du 2 juin.
(C., 3 juill.)
M. Blargnies – Messieurs, la discussion me force à
modifier mon opinion sur la proposition de M. Charles de Brouckere ; elle tend
à obliger le ministre à faire suivre son rapport d'une proposition formelle
sur les dix-huit articles de la conférence. Il me semble maintenant que cela
est impossible, car il n'est plus libre de choisir entre l’adoption et le refus
des propositions de la conférence. S'il en proposait le rejet, il
compromettrait le sort d'une combinaison qu'il regarde comme le salut du pays.
II ne peut pas en proposer l'adoption, puisqu'en répondant à M. de Brouckere,
il a avoué qu'il ne s'agit de rien moins que de modifier la constitution. (On
rit.) (M. B., 3 juill.)
M. Barthélemy, ministre de la justice –
Messieurs, je suis loin
de répudier ma part de responsabilité pour les négociations qui ont été
entamées. On nous demande un rapport sur ce qui s'est passé à Londres, tant à
l'égard du prince de Saxe-Cobourg qu'à l'égard de la conférence. Eh bien, on
vous a répondu sur le premier point par une lettre du prince qui s'en réfère
aux propositions de la conférence... Qu'a répondu de son côté la conférence aux
propositions qui lui ont été faites ? Elle a répondu par une
contre-proposition que vous connaissez. Qu'avait à faire le ministre ? Ce qu’il
a fait : vous communiquer les préliminaires. C'est à vous maintenant de voir si
vous voulez traiter ou non en acceptant ces préliminaires. Le ministre n'a pu
être que l'intermédiaire entre la conférence et vous, et je ne conçois pas que
l'on puisse discuter là-dessus. Moi qui ne crois pas que les propositions de la
conférence nous entraînent à la violation de la constitution qui permet le
changement des limites au moyen d'une loi, je déclare que j'adhère à la
proposition de M. Van Snick, et je crois que l'adoption seule de ces
propositions peut sauver le pays. (Mouvement.) (M. B., 3 juill.)
M.
Alexandre Gendebien – Je ne peux garder le silence dans cette discussion.
Au
ministère appartiennent les négociations et la charge de nous en faire rapport.
Un traité de la nature de celui qui nous est proposé ne peut nous être soumis
que par un agent responsable. Car autrement à qui le peuple peut-il en demander
compte ?
M.
Blargnies nous a dit tout à l'heure que le ministère ne pouvait plus nous faire
de proposition du moment qu'il avouait que l'acceptation des dix-huit articles
était une modification à la constitution. Je dois, à cette occasion, rappeler
les paroles de M. Lebeau lui-même, prononcées dans un autre temps. Notre
collègue, M. Forgeur, demandait au ministre s'il prenait sur lui la
responsabilité d'une cession de territoire ; et M. Lebeau répondait que dans
les négociations officieuses à Londres, jamais l'intégrité du territoire
n'avait été mise en doute. Il finissait en disant que la pensée d'une violation
de la constitution, sous le rapport de l'intégrité du territoire, serait chez
lui, comme député et comme ministre, non seulement une faiblesse, mais un parjure.
Je conçois donc qu'aujourd'hui M. Lebeau ne veuille pas,
ostensiblement du moins, se rendre coupable d'un parjure. (E., 3 juill.)
M.
Forgeur – Sur
la question qui nous préoccupe tous, le moment n'est pas encore venu de traiter
le fond. Je m'occuperai seulement de la forme.
Le congrès
peut-il prendre résolution sur un traité, sans l'intervention du ministère,
alors que toutes les négociations ont été dirigées par lui, et que pas un
membre du congrès ne connaît ni l'état réel des négociations, ni nos rapports
avec l'extérieur, ni notre situation à l'intérieur ?
L'article
68 de la constitution à la main, M. Forgeur établit que le traité dont il
s'agit rentre dans la nature de ceux qui appartiennent nécessairement aux
ministres et engagent leur responsabilité. Et en effet, continue-t-il, est-ce
l'honorable M. Van Snick ou bien l'honorable M. Jacques qui peuvent nous fixer
sur l'urgence plus ou moins grande d'accepter la honte des dix-huit articles ?
Savent-ils même si leurs propositions peuvent être présentées ? Et par exemple,
pendant que M. Van Snick s'engage si inconsidérément dans cette voie, il ne
songe pas que le ministère, usant de ses droits, pourrait à l'instant même
prendre une mesure opposée qui rendrait sa proposition inutile ; et tandis
qu'on vient nous convier à discuter la proposition de MM. Van Snick et Jacques,
n'est-il pas possible que, par un simple coup d'œil sur ce qui se passe à
l'extérieur, nous trouvions que nous n'avons pas besoin de nous précipiter si
aveuglément dans les filets de
Mais ils
se taisent, et se bornent à dire, l'un qu'il voit une violation à la
constitution là où l'autre n'en voit pas.
De la
part de nos deux collègues MM. Van Snick et Jacques, il y a dans leur
proposition légèreté et témérité. Il faut du moins que ces deux membres du
congrès sachent qu'en tous cas ils ne mettront pas la responsabilité des
ministres à l'abri. J'en ai dit assez. (E., 3 juill.)
M. Van Meenen – Il me semble que
la discussion se réduit à une question bien simple : Le ministère doit-il ou ne
doit-il pas faire connaître le résultat des négociations ?
Je ne vois
pas ce qui peut empêcher les ministres de s'expliquer. Sans aucun doute, beaucoup
de lumières seront jetées sur notre situation par les explications des
ministres ; seuls ils peuvent nous donner des renseignements sur notre
position, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. (E., 3 juill.)
M. Van Snick combat la
proposition de M. Charles de Brouckere. (M. B., 3 juill.)
M.
Devaux, ministre d’Etat – Peut-on forcer le ministère à exercer l'initiative ? Pas plus
que le ministère ne peut y forcer le congrès. Que deviendrait la responsabilité
du ministère s'il se trouvait contraint dans son action ?
Le
congrès a posé des limites que le ministère ne peut pas plus dépasser ici qu'à
Londres. (E, 3 juill.)
M. Van Meenen – Il s'agit de
savoir si le ministère doit nous présenter des conclusions formelles sur
l'acceptation ou le rejet ; en lui accordant certains droits, par votre
décision du commencement de juin, vous ne lui avez pas enlevé les attributions
qu'il tient de la constitution.
Si nous
allions, ce que je ne suppose pas, adopter les dix-huit articles, et que cela
ne plût pas aux ministres, ils pourraient ou ne pas se considérer lié par notre
décision, ou bien leur responsabilité se trouverait couverte.
On ne peut
contester que le ministre ayant dans ses attributions les relations extérieures
doit avoir une opinion et des conclusions à émettre. (E, 3 juill.)
M. Lebeau, ministre des affaires
étrangères – Si, dans le cercle des limites circonscrites par le congrès, et dont les
commissaires du gouvernement ne pouvaient pas s'éloigner, on eût donné la
faculté de traiter d'une manière quelconque, on eût fait alors des
stipulations, et le ministre, en supposant que les sacrifices pécuniaires
eussent été admis, aurait été dans la nécessité de vous présenter un projet de
décret, afin que vous décidassiez si les offres pécuniaires avaient été
exagérées et si le trésor public avait été grevé d'une charge trop forte : les
commissaires n'ont pas pu procéder par voie d'arrangement à prendre moyennant
des indemnités en argent ; et persuadés que, rédigées sous ce point de vue, la
conférence n'aurait admis aucune de leurs notes, ils se sont bien garder d'en
présenter aucune. Les négociations, en un mot, placées par vous-mêmes sur un
terrain dont elles ne pouvaient être déplacées, n'ont abouti à rien. Rien n'est
donc de nature à être soumis à votre ratification. (E., 3 juill.)
M. le président – Personne ne demandant plus la parole,
je vais mettre aux voix la proposition de M. Charles de Brouckere ; elle est
ainsi conçue :
« Je
demande que le ministère propose des conclusions, conformément au décret du 2
juin. »
Je
vais mettre cette proposition aux voix, (L'appel nominal ! l'appel
nominal !) (E, 3 juill.)
On procède
à l'appel nominal ; 184 membres répondent : 55 votent pour, 129 contre
; eu conséquence, la proposition est rejetée. (P. V.)
Ont voté pour
: MM. Thonus, Geudens, Jaminé, de Schiervel, de Tiecken de Terhove, Ooms,
le baron d'Huart, Vergauwen-Goethals, Jean-Baptiste Gendebien, Camille de Smet,
Le Bègue, Charles Coppens, Jottrand, Seron, Beaucarne, de Roo, Watlet, le comte
de Robiano, Frison, Van der Looy, Henri de Brouckere, l'abbé Van de Kerchove, Bredart, Pirson, Drèze,
Alexandre Gendebien, le baron de Meer de Moorsel, Claes (d’Anvers), de Robaulx,
Nalinne, Masbourg, Collet, Eugène de Smet, Charles de Brouckere, Rosseeuw, Bischoff, Gelders, Van
Meenen, d’Elhoungne, Davignon, Alexandre Rodenbach, Van de Weyer, Isidore
Fallon, Wannaar, Defacqz, Teuwens, Meeûs, l'abbé Dehaerne, Liedts, Raikem,
Speelman-Rooman, Dams... (C. 3 juill.)
M. le président donne lecture d'une proposition ainsi
conçue :
« AU NOM
DU PEUPLE BELGE,
« Le
congrès national
« Voulant
pourvoir éventuellement au sort des habitants des territoires contestés, si les
négociations à ouvrir avec
« Décrète
:
« Art.
1er. Pendant cinq ans, à partir de l'évacuation de tout territoire
contesté, ceux de ses habitants qui voudront s'établir en Belgique conserveront
de plein droit, sur leur déclaration, la qualité de Belge. »
« Art.
2. Il sera formé un fonds d'indemnité destiné à compenser le dommage que
pourrait occasionner à chacun de ses habitants son changement de résidence, et
à lui procurer des moyens d’établissement en Belgique. »
« Art.
3. Une première somme de trois millions de florins est affectée à cette destination.
L'emploi en sera régularisé par une loi ultérieure,
« Art.
4. Charge le pouvoir exécutif, etc.
« Bruxelles,
le 1er juillet 1831. "
Cette
proposition porte les signatures suivantes :
« Baron
DE WOELMONT, Baron JOSEPH D'HOOGHVORST, Baron OSY, Baron DE SÉCUS, D'HANIS VAN
CANNART, G. DE JONGHE, ÉMILE D'OULTREMONT, GÉRARD LE GR ELLE, Comte D'ARSCHOT,
J. N. F. DE BEHR, Marquis RODRIGUEZ D'EVORA y VEGA, Marquis DE RODES, Comte
DUVAL DE BEAULIEU, J. DE DECKER, DU BOIS, H. ZOUDE (de Saint-Hubert), F. DE
SÉCUS, V AN HOOBROUCK DE MOOREGHEM, HIP. VILAIN XIIII, F. DE COPPIN,
BARTHÉLEMY, G. MARCQ, E. C. DE GERLACHE, Vicomte DE JONGIIE, Comte F. DE
MÉRODE.» (C., 5 juill., et A. C.)
M. Van Snick, développant sa proposition – Messieurs,
nous voici à la dernière phase de révolution ; moment suprême, et qui, par un
concours de circonstances tel que n'en présentent point les fastes de
l'histoire, va décider à la fois du sort de notre belle patrie, et peut-être de
la destinée des nations......
Quelle
plus effrayante, quelle plus redoutable responsabilité a jamais pesé sur des
têtes humaines ? A nos bulletins sont attachés la paix ou la guerre ;
peut-être le repos ou le bouleversement du monde...
Ce n'est
donc pas devant
Toutefois,
messieurs, avant d'émettre mon opinion sur les propositions des cinq
puissances, j'éprouve le besoin de reporter un instant mes regards en arrière,
et de vous soumettre quelques réflexions, qui, j'ose le croire, ne vous
paraîtront pas déplacées.
Messieurs,
nous avons siégé pendant de longs mois, sans qu'il fût question parmi nous ni
de majorité, ni de minorité, et encore moins d'une opposition. Quoiqu'il
y ait eu de tout temps un pouvoir exécutif et des ministres, le lendemain de la
solution des plus graves questions, toutes les différences d'opinion
disparaissaient : le libéralisme, le patriotisme dont nous avions tous fait
preuve, ne nous permettaient pas de suspecter la pureté des intentions, la
sincérité de la conviction de qui que ce fût. Toute divergence d'opinion
doit disparaître, avait dit le président du congrès, lors de l'élection du
duc de Nemours : le congrès souverain a prononcé. De toutes parts on
applaudit à ces paroles pleines de sagesse du citoyen vertueux que les
représentants de la nation ont placé depuis au sommet de l'édifice social ;
tous sentaient alors, qu'à peine d'anarchie, à peine de voir les Belges
s'égorger bientôt les uns les autres, force devait rester aux décrets du
congrès.
La
minorité d'aujourd'hui, puisqu'on est convenu d'appeler de ce nom l'opinion qui
succombe, et sur ce point je ne veux rien préjuger ; la minorité d'aujourd'hui,
dis-je, sera juste comme celle de janvier ; comme celle-ci, elle restera l'âme
de l'ordre et des lois, qui sont son propre ouvrage.
Je viens à
ma proposition, et déclare accepter, comme les préliminaires de la paix
à intervenir entre
Voici les
motifs de cette détermination. Je me suis dit : Que me suis-je proposé en m'associant
dès le premier jour à notre révolution ? D'aider au renversement d'un
gouvernement imposé par la force et devenu odieux et tyrannique ; d'affranchir
mon pays d'une domination étrangère et humiliante ; de le dégrever du poids
accablant d'une dette dont on l'avait si iniquement chargé ; de conquérir pour
notre Belgique une existence parmi les nations, d'assurer son indépendance et
de lui garantir pour jamais la jouissance d'institutions libérales, telles
que les réclament chez (page 376) tous les peuples les progrès toujours
croissants de la raison humaine. Voilà quelle a été ma pensée en septembre, je
n'en ai point eu d'autre. Jamais je n'ai songé pour
Il
n'appartient point à des révolutionnaires soulevés au nom de la justice et
de l'équité, d'en méconnaître et d'en violer les premiers devoirs.
Voilà,
messieurs, et je suis heureux d'avoir ici l'occasion de faire de nouveau ma
profession de foi, voilà comment j'entends le libéralisme, voilà comment je
suis libéral.
D'autres
membres sans doute entreront dans le détail des propositions. Pour moi,
messiers, il m'a suffi de motiver mon vote sur leur ensemble, et de vous
exposer les raisons qui me font saisir avec empressement l'occasion d'entamer
avec
Je sais,
messieurs, qu'on va crier aux protocoles ; que ce mot, dont on connaît l'effet
magique sur vos esprits, sera de nouveau mille et mille fois répété dans cette
discussion ; on rappellera nos réclamations, nos protestations : mais ce soin
est tout à fait inutile, nous les avons toutes présentes à la mémoire, et tous
nous serions prêts à les renouveler s'il nous en arrivait de nouveaux.
Mais je
vous le demande, messieurs : si, au lieu des protocoles, ou des décisions
prétendûment souveraines qu'ils contenaient, les puissances, se bornant comme
aujourd'hui au rôle de conciliateur que vous leur avez reconnu, ne vous
avaient adressé que des propositions, auriez-vous protesté ? Non, me
répondez-vous tous. nous les aurions reçues pour en discuter le mérite et
l’admissibilité. Voilà ce que vous auriez fait : j'en appelle à vos
protestations elles-mêmes. Distinguons si nous sommes de bonne foi, les
propositions des protocoles ; et comme nous avons renvoyé les uns avec la juste
indignation qu'ils devaient faire naître dans nos âmes, examinons et discutons
les autres avec le calme, la modération et la réflexion qui conviennent à une
assemblée au sein de laquelle s'agitent les destinées du monde.
Élèvera-t-on
la question de constitutionnalité ? Deux mots suffiront pour y répondre :
le Limbourg nous reste ; au moyen des enclaves à échanger, nous conservons le
Limbourg, et tous nos devoirs sont conciliés.
Messieurs,
en janvier j'étais d'une opinion opposée aux hommes qui se trouvaient au
pouvoir : aujourd'hui, peut-être, mon opinion sera conforme à celle des députés-ministres ; mais en janvier comme aujourd'hui, je
n'ai vu, je n'ai consulté que la raison, la justice et l'intérêt bien entendu
de ce peuple, qui, après neuf mois de la plus orageuse des existences, soupire
après le repos et demande à grands cris de clore la révolution. J’ai dit. (M.
B., supp., 3 juill.)
M. Jacques expose les motifs de sa proposition.
(M. B., 3 juill.)
M.
de Robaulx développant la sienne tendant à faire prononcer la question
préalable – Messieurs, M. Van Snick s'est placé devant le tribunal de
l'univers ; je le laisserai donc en présence des juges qu'il s'est donnés, sans
trop savoir cependant si, plus que moi, ils s'occuperont de sa proposition.
Celle que
je vous soumets est une déclaration de non. lieu, c'est une déclaration pour
repousser des propositions antinationales et antipopulaires. Il faut le dire,
les propositions qui vous sont soumises sont faites dans le but unique de
détruire la constitution dont vous jouissiez à peine, et qu'on est impatient de
démolir, bien que vous veniez en quelque sorte de la créer, de l'édifier.
L'adhésion aux dix-huit articles, qui ne sont à mes yeux que les protocoles,
tend évidemment à changer l'article 1er de cette constitution. Et, remarquez-le
bien. la constitution n'a pas fait
D’ailleurs,
messieurs, ayons-nous le droit d'aliéner ce que la révolution a conquis ? Avons-nous
le droit de dire à telle population qui s'est jointe à nous : Nous vous
séparons de nous, vous n’êtes plus Belges, nous vous livrons aux bourreaux ! (Bravos
dans les tribunes.) Au 1er' février, vous avez rejeté le protocole du 20
janvier ; aujourd'hui, vous démentiriez cette conduite, et le seul acte
vigoureux que nous ayons fait est non seulement remis en question, mais encore
on vous demande de le révoquer. Lorsqu'on discuta l’article 3 qui figurait dans
le projet de décret du 2 juin, n'avez-vous pas repoussé l'idée d'une garnison
mixte dans Maestricht ; pour cette décision, il y a eu unanimité : je me
trompe, messieurs, unanimité moins une voix, moins la voix d'un des membres
auteurs de la proposition. Croyez-vous que le roi de Hollande vous abandonne
jamais Maestricht, point trop important pour elle comme position militaire et
commerciale ? Souvenons-nous maintenant des faits qui se sont passés dans cette
enceinte, lors de l'installation de cet honorable homme que tous nos vœux ont
appelé au pouvoir. M. le régent a juré de maintenir l'intégrité du territoire
; ce serment a eu lieu d'une manière bien solennelle, puisqu'il a répété : de
maintenir l'intégrité. Vous voulez lui donner un démenti ; vous voulez le
forcer à se retirer, parce que vous savez bien qu'il voudra tenir son serment.
Dans la proclamation adressée aux Luxembourgeois, il leur a dit : « qu'ils ne
seraient jamais abandonnés par
Ainsi, on
a voulu du même coup mutiler le congrès, et fausser les dispositions prises par
l'assemblée ; car les votes des députés des provinces que vous déclarerez
n'avoir pas cessé d'appartenir à
La
constitution modifiée, changée sur un point, on vous demandera à la changer sur
un autre, dans quinze jours peut-être on vous proposera de révoquer le fameux
arrêté d'exclusion. Cette prévision est triste, d'un funeste augure pour le
pays, mais malheureusement elle est inséparable de ma conviction. Je déclare
donc que je ne consentirai jamais à donner mon vote à des propositions qui
blessent l'honneur national. Remarquez aussi que la conférence, devant laquelle
on prétend que nous devons nous incliner, veut attaquer non seulement la
révolution belge, mais plutôt la révolution de juillet ; car c'est
M. le président, après avoir longtemps réclamé le silence,
déclare que si le bruit se renouvelle, il suspendra la séance. (M. B., 3
juill.)
(page
378) M. Alexandre Gendebien
demande que M. de
Gerlache développe sa proposition, et que M. de Sécus (père) développe
également celle qui a été déposée pour le fonds d'indemnité de trois millions
de florins. (E., 3 juill.)
M. de
Gerlache – J'ai retiré ma proposition. (E.,3 juill.)
M.
Charles de Brouckere – Reste alors celle de l'honorable M. de Sécus. Des membres ont
fait une proposition qui ne devait être que la conséquence de celles de MM. Van
Snick et Jacques. La proposition de M. de Sécus et de nos autre collègues, qui
en bonne logique ne devait pas être présentée maintenant, a été jetée dans la
discussion pour exercer une influence sur cette discussion ; je demande donc
qu'elle soit développée. (E., 3 juill.)
M.
Forgeur parle
dans le même sens. Il insiste sur ce point que, comme la proposition est faite,
elle doit être développée de suite, puisque l'adoption de la question
préalable, par exemple annihilerait cette même proposition. C'est à dessein,
dit l' orateur, à dessein, oui, messieurs, à dessein qu'elle a été rédigée ;
nous devons connaître les motifs qui ont guidé les honorables rédacteurs ; ces
motifs pourront peut-être jeter la lumière sur le point qui nous occupe, de
savoir si nous adopterons ou non la question préalable. (E., 3 juill.)
M.
Blargnies et M. Pirson appuient la demande de
M. de Brouckere, qui est combattue par M.
le comte Duval de Beaulieu et M. Destouvelles. (M. B., 3 juill.)
M. le baron de Sécus (père) déclare que sa
proposition n'a pas eu pour but d'influencer la discussion, ni de provoquer à
la cession des territoires ; c'est une proposition purement éventuelle et tout
hypothétique. (M, B., 3 juill.)
M. Frison demande l'impression immédiate de
cette proposition. (E., 3 juill.)
-
L'impression immédiate et le renvoi aux sections sont ordonnés. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII répond à un fait personnel que lui a
imputé M. de Robaulx en développant sa demande de la question préalable. Ce
fait est que M. Vilain XIIII aurait été le seul qui aurait voté, lors du décret
du 2 juin, pour qu'une garnison prussienne fût mise à Maestricht. (M. B., 3
juill.)
M. de Robaulx – Quand j'ai parlé de votre vote, je
n'ai entendu citer qu'un fait sans vous en faire un reproche. Quoiqu'on soit
seul à voter contre tous, on peut bien émettre un vote très consciencieux, Il
m'arrive souvent de voter seul ou avec M. Seron (on rit) contre tous, et
ma conscience n'en est pas moins tranquille. (M. B., 3 juill.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII – Je croyais avoir entendu le mot de
honte. C’est pour cela que j'avais voulu m'expliquer. Au reste, le vote
que j'émis alors je l'émettrai encore aujourd'hui. Trop heureux si le prince de
Saxe-Cobourg pouvait accepter la couronne à la seule condition d'avoir garnison
prussienne à Maestricht. Je voulus ce jour-là poser mon ultimatum, il
sera encore le mien aujourd'hui. Puisque j’ai la parole, je dirai que je
voterai contre la question préalable proposée par M. de Robaulx, parce que je
n'aime pas les fins de non-recevoir, et quand arrivera la question du fond, je
voterai contres les propositions de la conférence. D'ailleurs, je crois que
rien ne nous empêche de discuter la proposition de M. Van Snick ; et quand elle
violerait la constitution, nous sommes constituants, et nous pouvons la
changer. (A ces mots une explosion de huées extraordinaire part des
tribunes publiques et cause une longue interruption. -, le silence se
rétablit.) L'honorable membre persiste dans ce qu'il a avancé, il déclare que
quoique le congrès ait décrété la monarchie, rien ne l'empêcherait aujourd'hui,
s'il le voulait, de proclamer la république. (M. B., 3 juill., et E. 4 juill.)
M. Charles Rogier demande qu'après les huées qui se
sont fait entendre, on fasse évacuer les tribunes. (M. B., 3 juill.)
M. le président – L'article 40 du règlement porte :
« Pendant tout le cours de la séance les
personnes placées dans les tribunes se tiennent découvertes et en silence.
« Tout
personne qui donne des marques d’approbation ou d'improbation est sur-le-champ
exclue des tribunes par ordre du président.
« Tout
individu qui trouble les délibérations est traduit sans délai, s'il y a lieu,
devant l’autorité compétente. »
Cet article est la loi de l'assemblée ; elle avait le droit
de l'imposer aux tribunes. Si les tribunes ne la respectaient pas, elles
manqueraient au congrès, et les bons citoyens ne lui manqueront jamais. (Bravos ! bravos !)
((M. B., 3 juill.)
- La
discussion s'ouvre sur la question préalable. (P. V.)
M. Jaminé – Messieurs, l'œuvre la moins
imparfaite du congrès est la constitution. Si d'autres actes émanés du sein de
cette assemblée ont donné lieu à de nombreuses critiques, la critique a respecté
la constitution.
(page
379) Après avoir fait la part du souverain appelé un jour à régner sur
Vous avez
fini par fixer les limites du pays qui venait de secouer le joug de
Dans cette
fixation, vous avez pris pour boussole la séparation faite par le gouvernement
hollandais lui-même entre les provinces du Nord et les provinces du Midi. Vous
n'avez pas oublié que, dans les provinces dites du Midi, les habitants avaient
pris une part plus ou moins grande à la révolution.
Cette
constitution n'a pu recevoir sa pleine et entière exécution.
La
révolution belge fut condamnée par toutes les puissances,
Notre
constitution libérale consterna les mêmes puissances.
Il fallut
arrêter la révolution et détruire la constitution.
Vous savez
quelles trames furent ourdies, quels efforts furent tentés pour nous imposer
une restauration.
Ces
intrigues, ces efforts étant restés sans résultat, la diplomatie se chargea
d'atteindre ce but ; elle se présenta comme médiatrice.
Nous eûmes
le malheur de nous laisser enlacer dans ses filets ; l'élan révolutionnaire fut
arrêté. Ce premier point obtenu, la diplomatie, de médiatrice qu'elle était,
s'érigea en juge.
Nous
assistâmes de loin aux conférences, et tandis que nous pâlissions sur des
projets de loi, de bien minime importance en comparaison de graves questions
que nous seuls avions le droit de traiter, la diplomatie nous condamna sans
nous avoir entendus.
Nous
crûmes prendre notre revanche en nous moquant un peu de l'histoire des
protocoles, mais cela ne nous empêchait pas de rester dans un provisoire très
doux, très agréable, je veux le croire, pour ceux qui ont de gros appointements
à toucher ; mais pernicieux, mais mortel pour ceux qui n'ont que leur commerce,
leur industrie, leurs bras pour se procurer des moyens d'existence.
Pour
sortir du provisoire, on nous présenta le duc de Nemours pour roi. Il fut élu.
La députation d'alors revint de Paris, avec de belles phrases et des
protestations d'amitié de la part du roi de France.
Cette
élection manquée, on demanda un délai pour négocier. Le délai fut accordé.
Les
négociations n'ayant conduit qu'à l'émission d'une demi-douzaine de nouveaux
protocoles, dignes rejetons du protocole-mère du 20
janvier, on demanda encore un délai ; il fut accordé.
C'est sans
doute une mauvaise plaisanterie que de nous comparer à une illustre assemblée,
dont l'énergie fera l'admiration de la postérité, car nous sommes les gens les
plus traitables du monde ; on n'a qu'à nous parler avec un peu de douceur et
d'aménité pour obtenir de nous tout ce qu'on exige.
Étions-nous
cependant bien d'intention d'agir, lorsqu'on vint nous, proposer une
combinaison qui ne pouvait manquer de réussir ? Je n'ose encore le
croire ; mais enfin nous manifestâmes le désir de terminer, mais en conservant
la constitution intacte.
Il y
eut appel des protocoles. Prenez le duc de Saxe-Cobourg, nous dit-on, il
plaidera votre cause et il la gagnera.
Nous
l'avons élu.
L'avocat a
fait son possible, je n'en doute pas, mais il a perdu son procès.
Comment
plaider en effet un appel devant les mêmes juges qui nous ont condamné en première
instance !
Qu'avons-nous
demandé et constamment demandé, les yeux toujours fixés sur cette
constitution, qui devait nous servir de règle de conduite ?
La rive
gauche de l'Escaut ;
Le
Luxembourg ;
La
province de Limbourg en entier.
Je laisse
de côté la rive gauche de l'Escaut. Il se peut que, dans l'idée d'un grand
nombre de membres du congrès, elle ne fasse pas partie du territoire belge. Il
m'en restera assez pour soutenir que nous ne sommes guère plus avancés qu'avant
l’élection.
Lorsque
nous nous occupions du décret sur cette élection, on nous déclara que la
diplomatie avait fait un pas immense ; que quant au Luxembourg, c'était une
question à peu près terminée ; et que, pour ce qui regardait le Limbourg, on en
viendrait facilement à bout.
On n'eut
besoin que d'attendre jusqu'au 21 juin pour savoir que, le 6 du même mois, le
roi de Hollande avait notifié « qu'il était difficile de concevoir qu'il pût
être question de négociations relativement au Luxembourg ; que le duché était
d'une valeur inappréciable à ses yeux, et qu'on avait flatté les Belges d'un
espoir illusoire. »
A la même
époque on apprit que la conférence (page 380) de Londres maintiendrait
toujours le protocole du 20 janvier.
La
diplomatie, comme on voit, avait fait des pas de géant. La diplomatie a-t-elle
produit davantage aujourd'hui ?
Je devrais
ici confronter le texte du protocole de janvier avec le dernier protocole, pour
prouver à l'évidence qu'il n'y a aucun changement ; mais déjà on vous l'a
prouvé, déjà les journaux ont fait ce travail ; je m'en dispenserai.
Cependant
je ferai remarquer que l'article 4 du vingt-sixième protocole contient, au
premier aspect, relativement à Maestricht, quelque chose de nouveau, mais que
réellement cela se trouve déjà dans le protocole du 20 janvier. Seulement il
est à observer avec quelle sollicitude la conférence craint de se départir de
son œuvre principale.
Il n'y a
réellement de changements que relativement à la dette ; mais la décision de la
conférence était tellement inique, tellement ridicule à cet égard, que déjà
longtemps avant l'élection elle était revenue sur cette décision.
Donc pas
de changements.
Mais nous
échangerons contre le Limbourg ce que nous posséderons sur le territoire
hollandais ! S'il était prouvé que nous avions les possessions, notez-le bien
(quant à moi, le parti est pris, il ne m'est pas permis de changer d'avis) ,
alors il y aurait une excuse pour adopter les articles proposés ; mais tout
repose sur de vagues explications.
Les
négociations n'ont produit autre chose que de faire vingt-cinq protocoles en un
seul.
Que ceux
qui en veulent commencent par anéantir la constitution ; pour moi, avant
d'entrer dans cette enceinte, j'ai fait serment de la maintenir ; je ne
fausserai pas ce serment. Dans la séance du 1er juin, M. Lebeau prononça ces
paroles remarquables et comme député et comme ministre. « On fait un
appel au ministère pour qu'il défende l'intégrité du territoire ; mais on
oublie que nous sommes liés comme ministres et comme députés, et que si nous
cédions sur ce point, ce ne serait pas seulement une faiblesse, ce serait un
parjure. »
Je suis de
l'avis de M. Lebeau.
On
souscrirait aux conditions ! Arrachez donc de l'histoire, car ce que nous avons
fait, messieurs, est déjà de l'histoire ; arrachez de ses pages les belles
protestations d'honneur, de dignité, d'indépendance. Sachez-le bien, c'est un
député qui l'a dit : La perte de l'honneur pour une nation, comme pour un
homme, c'est la mort. Jamais, de mon consentement,
Les
considérations que j'ai fait valoir, messieurs, sont puissantes ; en voici de
plus puissantes encore.
Supposons,
en nous flattant d'un vain espoir, que le roi Guillaume, disposé à traiter avec
ses anciens sujets, qu'il intitule encore de rebelles, cède à
Il n'est
pas question d'évacuer Venloo momentanément ; Venloo est condamné à subir le
joug. Lisez la pensée du ministère dans le Moniteur du 30 juin (Cet article, dû à Jean-Baptiste
Nothomb, est repris en note de bas de page dans l’ouvrage de E. HUYTTENS), et vous en serez convaincus.
Cette
ville cependant, vous l'avez excitée à se (page 381) joindre au
mouvement. Ses habitants, aussi bons patriotes que vous, vous avez cru devoir
les stimuler en leur envoyant quelques grenades. Cette ville, ces habitants
figurent dans notre constitution.
Les
libéraux, les honnêtes gens de tous les pays se sont élevés avec indignation
contre ces vils marchés d'âmes ; et vous, libéraux par excellence, vous,
honnêtes gens de
Personne
ne sera recherché pour ses opinions politiques. Qui vous le dit ? Ceux qui vous ont
toujours ; ceux qui vous trompent encore.
Et si
l'élite de la population de Venloo abandonne ses foyers, et que vous voyiez un
de ces exilés traîner une misérable existence sur la terre étrangère, ne
sentiriez-vous pas là quelque chose qui vous inquiéterait, qui vous
tourmenterait ? Je n’ai pas fait d'appel aux habitants de Venloo ; je ; n’ai pas
coopéré à la confection de la constitution. Eh bien, moi, député belge, je
serais bourrelé de remords ; la vie me serait à charge ; je verrais alors errer
sur les lèvres de chacun de mes semblables ce sarcasme sanglant : Il était
du congrès, il a vendu ses frètes !
Mais on
les indemnisera ! Vous croyez donc il faire tout avec de l'or ? Je suis un de
ces gens que vous pouvez céder, Combien me donnerez-vous pour ma clientèle ?
Combien me donnerez-vous pour mon état ? Croyez-vous qu'avec une poignée d'or
vous puissiez me racheter le sol sur lequel je suis né, mes amis, ma famille,
toutes mes affections ?.. Gardez votre or ; il est vil à mes yeux ! (Vifs
applaudissements.)
Et ne
voit-on pas enfin où l'on veut en venir ? L'organe du ministère, le
Moniteur, nous a dit : Il n'y a plus d'intervention, il y a médiation. Je
veux l'admettre pour un moment. Mais il est donc bien entendu que des
négociations, de nouvelles négociations seront ouvertes ; et si une seule des
parties, car malheureusement tout potentat se croit intéressé à se mêler de nos
affaires, si une seule des parties refuse, rien ne sera fait. Mais alors la
face de l'Europe sera changée, mais alors le mois de juillet, m'entendez-vous,
messieurs ? le mois de juillet sera passé ; la révolution française aura été
étouffée sous des guirlandes de fleurs... on étouffera la vôtre sous la
mitraille.
Messieurs,
il est une nation au nom de laquelle on s'inclinera un jour avec respect, qui a
les yeux ouverts sur nous. Elle s'imagine, dit-on, que nous serons constitués
(on ne lui a pas dit que nous serions avilis) ; que si nous étions constitués,
la diplomatie interviendrait pour la secourir. Ne se trompe-t-elle pas ? Qu'a
fait la diplomatie pour les patriotes d'Italie ? Il n'était pas question là de
soutenir la révolution, mais seulement d'arrêter les bourreaux. Eh bien, les
corps des patriotes italiens palpitent encore aux crochets des gibets du duc (page
382) de Modène. La guerre générale donc, s'il faut en passer par là ! A mon
avis, ce sera le réveil de peuples et le signal de leur émancipation. (Ce
discours, plusieurs fois interrompu par les bravos et les applaudissements
partis de la salle et des tribunes, fait la plus vive impression sur
l’assemblée.) (M. B., supp., et I., 3 juill.)
- La
séance est levée à quatre heures, et la continuation renvoyée à demain, à onze
heures. (P. V.)