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d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 23
décembre 1841
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre, notamment pétitions relatives aux droit à
l’entrée de certains produits textiles (rubaneries, passementeries) (Zoude), aux inondations de la Meuse (de
Renesse)
2) Projet de loi ouvrant un crédit provisoire
au département de la guerre pour le mois de janvier 1842. Société pour le
remplacement en matière de milice (Meeus, Brabant, Meeus, Brabant)
3) Projet de loi relatif au contingent de l’armée
pour l’année 1842. Loi sur la milice (de Brouckere)
4) Projet de loi portant le budget du département
de l’intérieur pour l’exercice 1842. Discussion des articles. Indemnités aux
professeurs démissionnés en 1830 (Nothomb, Dedecker), enseignement primaire (Nothomb,
Dedecker, Doignon), droit
d’auteur (de Brouckere), encouragement aux sciences
et aux lettres (Rogier, Nothomb),
bibliothèque royale et dépôt légal (Malou, Dedecker, Nothomb), bibliothèques
des universités (Dumortier, Nothomb,
Raikem, Fleussu, Delfosse, Dumortier, Raikem, Dedecker), encouragement
aux beaux-arts et comptabilité publique (Rogier, Nothomb, Dedecker, de Brouckere, de Foere, Dumortier, Rogier, Nothomb, de Theux), conservatoire
de musique de Bruxelles (Dumortier, Nothomb, Dumortier, de Brouckere, Dumortier, de Brouckere), académie des beaux-arts d’Anvers (Nothomb, Cogels, de Brouckere, Dedecker, Eloy de Burdinne, Rogier, de Theux, Cogels, Dedecker, de Theux, Desmet, Nothomb, de Brouckere), autres académies des beaux-arts (Dedecker, Dumortier, Dechamps, Nothomb, Dolez, de Garcia, de Terbecq, Eloy de Burdinne), école
de gravure de Bruxelles (Rogier, de
Theux), monument de la place des Martyrs (Nothomb,
Rogier), monuments à élever aux grands hommes (Rogier, Nothomb, de Theux), amélioration des chemins vicinaux (Nothomb)
5) Fixation de l’ordre du jour (projet de loi
relatif à l’interprétation de l’article 442 du code de commerce)
(Moniteur
belge n°359, du 25 décembre 1841)
(Présidence de M.
Fallon.)
M. Kervyn fait l'appel nominal à midi et quart et donne
lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
Le même secrétaire présente l'analyse
des pièces adressées à la chambre :
« Le sieur Ch. Gislain, à Jemmapes,
ex-sous-lieutenant de la garde civique,. demande une pension pour cécité contractée au service.
»
- Renvoi à la commission des pétitions.
_______________________
« Le sieur Ch. de Poorter,
aîné, manufacturier en rubaneries, passementeries, etc., à Bruxelles, demande
une augmentation du droit à l'entrée en Belgique sur les produits similaires
venant de France. »
- Sur la proposition de M. Zoude, la commission des pétitions à laquelle cette requête est renvoyée, est
invitée à en faire l'objet d'un prompt rapport.
______________________
« Des habitants de Dutzeelen et Oost-Eecloo demandent la construction du canal de
Zelzaete. »
- Renvoi à la commission chargée
d'examiner le projet de loi.
______________________
« L'administration
communale de Borsheim demande qu'il soit pris des
mesures pour s'opposer aux envahissements de
« La
députation permanente du conseil provincial du Limbourg demande qu'il soit
alloué au budget des travaux publics une somme de 253,000 francs pour
réparations urgentes aux environs de
-
Sur la demande de M.
de Renesse, ces deux pétitions sont renvoyées à M. le ministre des
travaux publics et à la section centrale chargée de l'examen du budget de ce
département.
_______________________
M. le président. - Il va être procédé au tirage au sort
de la grande députation chargée de complimenter S. M. au nom de la chambre à
l'occasion du nouvel an.
Le
sort désigne : MM. Osy, Scheyven, Henot, Peeters, de Baillet, Rogier, Meeus,
Cools, Jonet, B. Dubus et de Theux.
Cette
députation sera, conformément au règlement, présidée par le président de la
chambre.
M. Brabant,
rapporteur. - Messieurs, la section centrale
chargée de l'examen du budget de la guerre vous propose l'adoption du projet de
loi ouvrant au département de la guerre un crédit provisoire de 2 millions de
francs pour faire face aux dépenses d'une partie du mois de janvier 1842.
M. le président. - La chambre désire-t-elle ouvrir
immédiatement la discussion sur ce rapport ? (Oui ! oui !)
- La
discussion générale est ouverte.
M. Meeus. - Messieurs, je demande la parole pour
faire une observation à l'occasion du projet de loi qui est mis en discussion.
Je
m'étais fait inscrire pour parler sur le budget de la guerre ; mais c'était
moins pour parler sur le budget lui-même que pour parler d'un arrêté que la
plupart des membres de cette chambre ignorent sans doute ; il s'agit d'un
arrêté contresigné par M. le ministre de la guerre en date du 14 octobre. Cet
arrêté soulève, dans mon opinion, une question des plus graves, dans l'intérêt
du remplacement auquel lès pères de famille se trouvent si intéressés.
Je
ne sais par quel motif cet arrêté ne se trouve pas inséré au Bulletin des
Lois, et n'a pas figuré au Moniteur.
Je
ne veux pas, messieurs, anticiper sur la discussion
qui s'ouvrira sur cet arrêté à l'occasion du budget de la guerre ; mais je
viens demander que cet arrêté soit inséré dans le Moniteur, afin que
chaque membre de la chambre et du sénat puisse examiner la portée de cet arrêté
et les conséquences qu'il entraîne.
J'attire
de plus l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur cet arrêté. Car il
soulève une question qui rentre entièrement dans ses attributions, c'est-à-dire
une question de milice.
Je ne veux pas, je le répète, anticiper sur la
discussion ; ma proposition se borne à demander au gouvernement la publication
de cet arrêté au Moniteur.
M. Brabant,
rapporteur. -
Messieurs, je vous aurais tout à l'heure entretenus, à
l'occasion du projet de loi sur le contingent, de l'objet qui a donné lieu à la
motion de l'honorable député de Bruxelles.
Deux
sections, en. examinant le budget de la guerre,
avaient appelé l'attention de la section centrale sur la société pour
l'encouragement du service militaire.
La
section centrale avait cru que les explications que cet objet nécessitait se
rapportaient mieux à la loi du contingent qu'à la loi de budget, et on vous
aurait fait rapport de toutes les observations qui ont été présentées, des
diverses pièces qui ont été communiquées à cette occasion, si le temps l'avait
permis, si la loi du contingent n'était pas une loi d'urgence.
Maintenant que la discussion du budget de
la guerre se trouve reportée après les vacances, la section centrale a cru
qu'elle devait différer l'examen des objections soulevées contre la société
pour l'encouragement du service militaire jusqu'à la discussion de ce budget.
Il vous sera fait un rapport supplémentaire sur cet objet.
Il ne nous appartient pas d'ordonner l'insertion
d'un arrêté au Moniteur ; mais, dans tous les cas, il sera imprimé comme
annexe à la suite du rapport dont je viens de vous parler.
M. Meeus. - Messieurs, je sais parfaitement bien
que la section centrale a fait des observations sur l'association pour
l'encouragement du service militaire ; je sais parfaitement bien aussi que
l'arrêté dont il est question est hostile à cette association. Mais ce n'est
pas cette question sur laquelle pour le moment j'appelle l'attention des
membres de la chambre, et celle de M. le ministre de l'intérieur, c'est une
question bien plus élevée que celle-là que je veux soulever ; c'est une
question de milice, c'est une question de remplacement.
Nous
avons bien certainement en Belgique des conditions plus favorables que d'autres
nations par rapport aux impôts financiers ; mais il n'en n'est pas de même de
l'impôt moral qui pèse sur la liberté individuelle, l’impôt de la milice ;
aussi avez-vous compris, messieurs, qu'il fallait autant que possible élargir
les bases du remplacement ; la loi que vous avez votée en 1835 ; l’arrêté de
1837 n'ont pas eu d'autre but. Aujourd'hui cependant l'arrêté dont il est
question, vient rétrécir ces bases. C’est donc sur ce point spécialement que
j'appelle l'attention de la chambre. Encore une fois, cet impôt sur la liberté
individuelle est en Belgique dans une proportion tout autre qu’en France, par
exemple, où sur cinq citoyens appelés à faire partie de l'armée, un cinquième
trouve moyen de se faire remplacer, En Belgique, au contraire, il n'y en a
qu'un sur douze ou treize qui trouve moyen de se faire remplacer.
Dans
cet état de choses, je vous demande, messieurs, si vous ne devez pas porter une
attention toute particulière à un arrêté qui, je le dis hautement, au lieu de
suivre les errements que vous avez posés, que le gouvernement lui-même a posés,
rétrécit les base du remplacement.
J’appelle
donc toute l’attention de la chambre et du ministre de l’intérieur sur cette
question de premier ordre. La question relative à la société pour
l’encouragement du service militaire est aussi, messieurs, une question très
grave sans doute ; et je me réserve, moi qui ai l’honneur de faire partie de
cette société, d’en être le président honoraire, lorsque la discussion relative
à cette société s’élèvera, d’y prendre une très large part.
Mais avant cette question, il y en a une d'une
bien plus grande importance ; c'est celle sur laquelle j'appelle l'attention de
la chambre et du gouvernement.
M. Brabant,
rapporteur. - J'ai eu
tout à l'heure l’honneur de vous faire observer qu'il y aurait un rapport
particulier sur ce point ; et dès lors il me semble qu'on pourrait différer les
observations que l'on a à faire sur cette matière.
M. Meeus. – Je m’étais borné en commençant par
demander simplement l’insertion de l’arrêté en question au Moniteur mais
à l'observation qui a été faite par l'honorable M. Brabant, j’ai dû répondre
quelques mots afin que la chambre connaisse bien ma position et mes intentions.
-
Personne ne demandant plus la parole, on passe à la discussion des articles.
« Art.
1er. Il est ouvert au ministre de la guerre un crédit provisoire de 2,000,000 francs pour faire face aux dépenses d'une partie du
mois de janvier 1842. »
«
Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa
promulgation. »
-
Ces deux articles sont successivement mis aux voix et adoptés.
M. le président. - Il va être passé au vote par appel
nominal sur l'ensemble du projet.
Un membre. - M. le ministre de la guerre n'est pas
ici.
M. le président. - Le bureau a reçu une lettre de M. le
ministre de la guerre. La voici :
« M.
le président,
«
Les circonstances de famille pénibles dans lesquelles je me trouve depuis
plusieurs jours, et qui d'heure en heure le deviennent, davantage, me font
désirer que la chambre veuille bien me dispenser d'assister à ses travaux.
« Si
cependant elle jugeait ma présence nécessaire à la discussion du projet de loi
qui concerne le département de la guerre, je me ferais un devoir de m'y rendre.
« Veuillez,
M ; le président, recevoir l'expression de ma haute considération.
«
Bruxelles, 23 décembre 1841.
«
BUZEN. »
Je
crois qu'on ne juge pas la présence de M. le ministre nécessaire ? (Non !
non !).
M. le secrétaire fait l'appel nominal sur l'ensemble du
projet ; il est adopté à l'unanimité des 63 membres présents. Ces membres sont
: MM. Angillis, Brabant, Cogels, Cools, Coppieters, de Behr, de Brouckere,
Dedecker, de Florisone, de Foere, Malou, Delehaye, Delfosse, de .Meer de
Moorsel, de Muelenaere, de Nef, Huveners, de Potter, de Renesse, de Sécus,
.Desmet, de Terbecq, de Theux, de Villegas, Doignon, Donny, B. Dubus, Duvivier,
Eloi de Burdinne, Fallon, Fleussu, Hye-Hoys, Kervyn, Liedts, Lys, Maertens,
Manilius, Mast de Vries, Meeus, Mercier, Jonet, Nothomb, Peeters, Pirmez,
Henot, Raikem, Rodenbach, Rogier, Scheyven, de Baillet, Sigart, Simons, Smits,
Thienpont, Trentesaux, Osy, Vau Cutsem, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen,
Wallaert, Zoude.
M. Brabant,
rapporteur. -
Messieurs, j'ai un second rapport à faire ; c'est celui qui concerne le projet
de loi fixant le contingent de l'armée pour l'année 1842. Les observations que
j'ai présentées tout à l'heure, en réponse à la motion d'ordre de l'honorable
M. Meeus, me dispensent de rentrer de nouveau dans l'examen de la question que
cet honorable membre a soulevée.
La
section centrale propose, à l'unanimité, l'adoption du projet de loi, qui est
d'ailleurs le même que celui qui a réglé le contingent de 1841.
M. de Brouckere. - Je demanderai si nous pourrons bientôt
nous occuper d'un projet de loi sur la milice.
M. le président. - Deux sections ont demandé que l'on pût
s'occuper de suite de la révision des lois sur la milice. Les observations de ces
deux sections seront l'objet d'un rapport supplémentaire, sur le budget de la
guerre.
-
Les trois articles du projet sont successivement adoptés sans discussion.
Ils
sont ainsi conçus :
« Art.
1er. Le contingent de l'armée pour 1832, est fixé au maximum de 80,000 hommes. »
« Art.
2. Le contingent de sa levée
de 1842 est fixé au maximum de 10,000 hommes, qui sont mis à la disposition du
gouvernement. »
«
Art. 3. La présente loi sera obligatoire à dater du 1er janvier 1842. »
Il
est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi, qui est
adopté a l'unanimité par les 64 membres présents.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DEPARTEMENT DE
L’INTERIEUR POUR L’EXERCICE 1842
Discussion des articles
CHAPITRE XVI – Instruction publique
Enseignement
moyen
Article 5
M. le président. - L'ordre du jour appelle maintenant la
suite de la discussion du budget de l'intérieur.
Nous
en sommes arrivés à l'art. 5 du chap. XVI. Indemnités aux professeurs
démissionnés des athénées et collèges : fr. 5,000. »
La
section centrale propose de rédiger l'article comme suit :
« Indemnités
aux professeurs des athénées et collèges, démissionnés par suite de la
révolution et n'ayant pas acquis depuis une autre position. »
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, la section centrale pense que l'on a méconnu l'esprit de
cette allocation en faisant participer à l'indemnité des professeurs qui n'ont
pas immédiatement été révoqués à la suite de la révolution. Vous voudrez bien
remarquer, messieurs, que cette somme de 5,000 fr. a été partagée entre
14 professeurs et que par conséquent l'indemnité touchée par chacun de ces
professeurs s'élève, en moyenne, qu'à 357 fr. 14 centimes ; certes, ce n’est
pas là une somme considérable.
De
ces 14 professeurs, il en est cinq qui n'ont pas été démissionnés immédiatement
après la révolution. Ils ont perdu leur emploi plus tard, par suite de la
réorganisation des établissements dans lesquels ils avaient été nommés avant la
révolution.
Cette
réorganisation est le résultat de la révolution. Il est très probable que sans
cet événement elle n'aurait pas eu lieu ; il est plus probable encore que les
professeurs éliminés ne l'auraient pas été. Aussi, leur démission doit-elle
être considérée comme une conséquence éloignée, si l’on veut, mais toujours
comme une conséquence de la révolution, et dès lors, ils remplissent la
condition attachée à la jouissance de l'indemnité.
Deux
professeurs de cette catégorie touchait une indemnité
depuis trois ans.
C'est
M. de Theux qui le premier a reconnu les titres de ces professeurs à
l'indemnité. M. Rogier a suivi le même système, et je l'ai continué. Ainsi 5
professeurs touchent aujourd'hui une indemnité, tandis que passé 3 ans, M. de
Theux n'en avait admis que deux ; les trois autres ne s’étaient pas présentés,
n'avaient pas fait valoir leurs titres.
Ce
système est, du reste, la conséquence du libellé même qu'on a donné à la
première allocation de ce genre (budget de 1832), libellé ainsi conçu :
« Secours
aux professeurs et régents des collèges qui ont perdu leurs places, par suite
des changements qui ont été introduits dans quelques athénées et
collèges. »
Vous
voyez, messieurs, d'après cette rédaction, que l'on n'a pas méconnu l'esprit dans
lequel l'allocation a été accordée.
On
n'aurait pu sans injustice refuser une indemnité à un professeur, victime d'un
de ces changements, par la seule raison que ce changement avait eu lieu un peu
plus tard.
D'ailleurs,
le gouvernement a eu soin de produire chaque année la liste nominative des
professeurs démissionnés qui avaient touché une indemnité et aucune observation
n'avait été faite jusqu'ici contre l'application du système dont il s'agit.
Je crois, messieurs, qu'il serait peu équitable de
restreindre, par une rédaction semblable à celle qui est proposée,
l'application de cette indemnité, si faible d'ailleurs.
M. Dedecker,
rapporteur. - Je
n'insisterai pas, puisque la somme est minime, et qu'en définitive il s'agit de
personnes qui se trouvent dans une position très fâcheuse. La section centrale
avait seulement cru devoir changer le libellé pour introduire plus de
régularité.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - C'est déjà une chose très rigoureuse que de publier les noms chaque
année.
- Le
chiffre est mis aux voix et adopté.
Article 6
«
Art. 6, Traitement des instituteurs dans les neuf provinces, encouragement,
subsides et secours : fr. 335,000 fr. »
La
section centrale propose de faire, de ce crédit, l'objet de deux articles
distincts, libellés comme suit :
« Art.
6. Traitements des instituteurs dans les neuf provinces, et secours à accorder
à des instituteurs nécessiteux, sans emploi et à des veuves d'instituteurs :
fr. 260,000. »
« Art.
7. Subsides pour constructions, réparations, location et ameublement de maisons
d'école : fr. 75,000 fr. »
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, la section centrale, en proposant cette division, a voulu
avoir une garantie que les 75,000 fr. ne seraient employés que comme subsides
pour la construction, la réparation, la location et l'ameublement de maisons
d'école. Eh bien, messieurs, je puis dire à la chambre qu'il existe une autre
garantie que celle que vous écririez dans la loi, c'est l'application que le
chiffre total a reçue jusqu'aujourd'hui. Loin d'amoindrir le chiffre
spécialement affecté aux constructions de maisons d'école, on a presque
toujours reporté sur ce chiffre les économies qu’on a pu faire sur le littera
A, par suite de mortalité et d'autres chances inhérentes aux personnes. C'est
ainsi que le subside global affecté d'une manière spéciale pendant les trois
années précédentes, aux bâtisses d'écoles, s'élève à 120,000 francs, tandis qu'on a réellement dépensé 127,000 francs.
M. Dedecker,
rapporteur.- D'après
les explications de M. le ministre, la section centrale ne persiste pas dans sa
demande de division.
M. Doignon. - Messieurs, si je vote les crédits
énumérés dans cet article, je dois déclarer que j'entends comme je l'ai encore
entendu hier, que c'est sous toute espèce de réserve.
Mon
intention n'est pas, à l'occasion de cet article, d'anticiper sur des questions
qui touchent à nos libertés constitutionnelles, et de me livrer aujourd’hui à
des discussions qui pourront se reproduire à une autre époque. Ces questions
n'ont pas encore été mises à l'ordre du jour dans cette chambre, et ce n'est
pas incidemment qu'elles pourraient recevoir une solution. La section centrale
elle-même n'en a pas dit un seul mot dans son rapport. Je voterai donc sous
toute réserve, en ce qui concerne spécialement la légalité et la
constitutionalité des concours, et des conditions exigées pour les subventions,
conditions, messieurs, d'après lesquelles, au moyen de l'appât irrésistible des
subsides, le gouvernement finirait par s'immiscer indirectement dans
l'administration intérieure de toutes les institutions libres, et cela à l'aide
surtout du droit qu'il s'attribue d'approuver ou de rejeter leurs budgets de
dépenses et de recettes, droit qu'il étendrait non seulement aux dépenses pour
lesquelles le secours est accordé, mais indistinctement à toutes autres dépenses, comme a toutes les
recettes de chaque établissement.
Je
proteste, comme l'a fait hier mon honorable ami, M. Dumortier, contre un pareil
système ; un contrôle aussi absolu et d'une si haute portée serait une atteinte
évidente à la liberté d'enseignement, il tendrait directement à renouveler sous
d'autres formes le système que le roi Guillaume prétendait introduire dans le
pays.
La
circulaire ministérielle dans laquelle le gouvernement s'attribue ce droit
extraordinaire, est du 31 mars dernier ; elle n'a pas même encore été
communiquée officiellement à la chambre ; je l'ai rencontrée pour la première
fois dans un volume de 300 pages, qui nous a été distribué seulement il y a
quelques jours ; et elle n'est certainement pas connue de la plupart des
membres de cette chambre, de sorte que dans tous les cas il est impossible de
discuter aujourd'hui une question aussi grave. Il me suffit donc aujourd'hui de
faire à cet égard toute espèce de réserve ; notre vote ne préjugera rien.
-
Personne ne demandant plus la parole, le chiffre de 335,000 fr., porté à
l'article 6 du projet du gouvernement, est mis aux voix et adopté.
Article 7
« Art.
7. Subsides pour l'enseignement à donner aux sourds-muets et aveugles :
fr. 20,000. »
-
Adopté.
CHAPITRE XVII
- Lettres, sciences et arts
Article 1
« Art.
1er, Lettres et sciences : fr. 181,000. »
M. de Theux. - Je crois que pour la régularité de la
discussion, il faudrait procéder par division.
M. le président. - Je vais procéder par division.
« Litt.
A. Encouragements, souscriptions et achats : fr. 50,000. »
M. de Brouckere. - Messieurs, je demanderai s'il n'est
pas arrivé une pétition relativement aux droits d'auteur.
M. le président. - Depuis l'ouverture de la session,
aucune pétition n'a été adressée à la chambre sur cet objet.
M. Rogier.- Messieurs, l'année dernière il a été demandé
sur le littera A une augmentation de crédit. Cette augmentation avait pour but
de faire droit à une observation qui avait été présentée l'année précédente par
la section centrale, relativement aux encouragements à donner à la littérature
dramatique. L'augmentation proposée avait donc pour destination des
encouragements à donner à la littérature dramatique. Je demanderai à M. le
ministre de l'intérieur s'il a renoncé à ce genre d'encouragement, ou bien s'il
pense pouvoir en accorder sur l'allocation, telle qu'elle est aujourd’hui
restreinte.
J'ajouterai
deux mots relativement à certains reproches qui paraissent avoir été faits à
l’ancienne administration sur la manière dont il aurait été disposé de
l’allocation Encouragements, souscriptions et achats, en ce qui concerne
les lettres et les arts. Il semblerait que l'ancien ministère aurait abusé de
cet article dans le but de populariser son administration parmi les savants et
les hommes de lettres. Je ne ferai qu'une réponse très courte à ce reproche.
Les
dispositions de mon honorable prédécesseur sur cette allocation s'élevaient au
nombre de 19. ; celles de mon successeur se sont
élevées au nombre de 13, et le nombre des décisions prises par moi, et se
résumant en imputations sur l'article, n'est que de 5. Ainsi, sur 37 décisions
qui ont été prises en faveur de littérateurs et de savants, 19 appartiennent à
mon prédécesseur, 13 à mon successeur, et 5 à mon administration. Peut-être y
a-t-il quelques décisions à prendre par suite de promesses écrites ; mais je ne
crois pas que ces promesses aient été fort nombreuses ; deux ou trois tout au
plus.
Messieurs, je tenais à faire cette observation ;
en ce qui concerne les littérateurs et les savants, si peut-être un reproche
peut m'être adressé, c'est d'avoir été trop sobre de dispositions en faveur de
cette classe de personnes.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je pense, messieurs, que l'article en discussion pourra laisser quelque
latitude en ce qui concerne l'art dramatique.
Quant
aux observations par lesquelles l'honorable M. Rogier a terminé son discours,
lui-même a déjà prévenu la réflexion que j'allais faire : sur les treize
décisions que j'ai prises, il y en a plusieurs qui lui appartiennent, ce sont
des engagements que je n'ai fait qu'exécuter, de sorte qu'on ne peut
entièrement m'attribuer ces treize décisions. Du reste, les reproches dont
l'honorable préopinant a entretenu la chambre ne concernent pas la section
première, lettres et sciences ; nous y reviendrons probablement
quand il s'agira des beaux-arts.
-
Personne ne demandant plus la parole, le chiffre est mis aux voix et adopté.
Littera B et C
« Litt.
B. Académie des sciences
et belles-lettres, 30,000 fr. »
-
Adopté.
« Litt.
C. Observatoire royal de Bruxelles, 22,000 fr. »
-
Adopté.
Lit.
D. Bibliothèque royale,
65,000 fr. »
M. Malou. - Messieurs, j'ai eu plusieurs fois l'occasion de
m'assurer que dans les achats qui ont lieu pour la bibliothèque royale, ne
figurent pas les publications qui se font dans le pays, C'est, sans doute,
l'insuffisance du crédit alloué à cet établissement, qui ne lui permet pas de
se tenir au courant des publications nationales, au moins des plus
essentielles. Pour en citer un exemple, j'ai eu l'occasion de demander à la
bibliothèque royale un recueil périodique dont l'apparition a fait assez grande
sensation ; je veux parler de
Je
soumettrai à la chambre et au gouvernement une idée qui pourrait augmenter
l'importance de ces dépôts littéraires : ce serait de prescrire que tous les
imprimeurs et éditeurs fussent obligés de déposer pour les bibliothèques
publiques un certain nombre d'exemplaires. Ce dépôt est prescrit avec cette
destination en Angleterre, en Allemagne et en France. Je crois que cet impôt
qui pourrait être établi par la loi, ne serait pas très onéreux ; en effet,
pour les ouvrages ordinaires dont les frais de production sont peu élevés, et
qui sont tirés à un grand nombre d'exemplaires, le sacrifice de quelques
exemplaires serait insignifiant. Quant aux ouvrages de luxe, dont le prix de
production est très élevé, il est assez connu que ces publications ne se font
qu'avec le secours du gouvernement. Les souscriptions prises par le
gouvernement ou les subsides accordés par lui indemniseraient suffisamment les
éditeurs de la dépense que leur occasionnerait le dépôt de quelques
exemplaires.
J'appelle sur cette idée l'attention du
gouvernement ; pour qu'elle pût être mise à exécution, il faudrait que la loi
de 1817 fût modifiée.
M. Dedecker,
rapporteur. - J'avais
moi-même, au sein de la section centrale, présenté des observations analogues à
celles de l'honorable M. Malou. La loi du 25 janvier 1817 établit les droits
qui peuvent être exercés dans les Pays-Bas, relativement à l'impression et à la
publication d'ouvrages littéraires et de productions des arts. L’art. 6 de
celle loi est ainsi conçu : « Art. 6. Pour pouvoir réclamer le droit de
copie, dont il est fait mention à l'art. 1 et 2, tout ouvrage de littérature ou
d'art qui sera publié dans les Pays-Bas après la promulgation de la présente
loi, devra, à chaque édition qui en sera faite, et soit qu'il s'agisse d'une
impression primitive ou d'une réimpression, remplir les conditions suivantes,
savoir : a. Que l'ouvrage soit imprimé dans l'une des imprimeries du
royaume ; b. que l'éditeur soit habitant des Pays-Bas, et que son nom,
seul ou réuni à celui du coéditeur étranger, soit imprimé sur la page du titre,
ou, à défaut du titre, à l'endroit de l'ouvrage le plus convenable avec
indication du lieu de son domicile, ainsi que de l'époque de la publication de
l'ouvrage ; c. à chaque édition qui sera faite d'un ouvrage, l'éditeur
en remettra à l'administration communale de son domicile, à l'époque de la
publication ou avant, trois exemplaires, dont l'un portera sur le titre, et à
défaut du titre à la première page, la signature de l'éditeur, la date de la
remise, et une déclaration écrite, datés et signés par un imprimeur habitant
des Pays-Bas, certifiant, avec désignation du lieu, que l'ouvrage est sorti de
ses presses. L’administration communale en donnera récépissé à l'éditeur et
fera sur-le-champ parvenir le tout au département de l'intérieur.»
Messieurs,
ce dépôt légal était ouvert surtout dans l'intérêt des droits de l'auteur ;
mais, on le sait, dans ce pays ces droits sont en général peu contestés pour
les ouvrages originaux d'auteurs belges. La publication, par un autre éditeur,
des ouvrages étrangers réimprimés en Belgique, on ne saurait l'empêcher ; de
même qu'on n'a pas à redouter en général la contrefaçon des ouvrages de fonds.
Il en résulte que la formalité du dépôt n'est remplie par aucun éditeur pour
les réimpressions et est négligée par plusieurs d'entre eux pour les ouvrages
d'auteurs belges. Quant aux ouvrages de cette dernière catégorie, que quelques
éditeurs ont l'habitude de déposer, on ne savait quelle destination leur
donner. Par un arrêté de novembre
Puisque
nous en sommes au litt. Bibliothèque royale, je me permettrai une autre
observation. Lorsque l'Etat a fait l'acquisition de la bibliothèque Van Hulthem, on a assuré, si ma mémoire est fidèle, qu'il y
avait dans ce grand dépôt un grand nombre de doubles, Un membre proposa de les
vendre, un autre fit observer que le gouvernement ne pouvait se faire
brocanteur ; il proposa que le gouvernement organisât l’échange des doubles qui
se trouvent dans tous les dépôts scientifiques du pays. Si le gouvernement
pouvait réussir à amener une transaction de ce genre entre les diverses
collections, ce serait le moyen de les rendre toutes complètes.
J'appelle
l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur ces deux observations.
Du reste, la section centrale avait proposé pour
cette année l'ajournement de la majoration de 5,000 fr. demandée par le
gouvernement, par les motifs que chacun de nous a pu voir dans son rapport.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - On s'est plaint généralement de ce que des ouvrages indispensables, et
surtout les grandes collections d'ouvrages modernes manquent à la bibliothèque
de l'Etat. Cette lacune a été maintes fois signalée par la commission instituée
près de cet établissement. Elle proposait une somme beaucoup plus considérable.
Je me suis borné à demander une somme de 5,000 fr. Ces 5,000 fr. sont
principalement destinés à procurer à la bibliothèque les grandes collections
d'ouvrages indispensables qui y manquent, et qui manquent également à la
bibliothèque de la ville de Bruxelles ; de sorte que même dans l'hypothèse
supposée par les sections qui ont fait l'objection, la même lacune se
présenterait toujours. Vous savez que la somme allouée pour la bibliothèque
royale a pour objet non seulement les imprimés, mais
encore les estampes, les médailles et les manuscrits. Ainsi la somme proposée
est encore insuffisante, et bien au-dessous des propositions de la commission.
M. Dumortier. - Je suis aussi d'opinion, comme M. le
ministre de l'intérieur, que la somme demandée par le gouvernement pour la
bibliothèque royale est au-dessous des besoins de cet établissement, et qu'il
est indispensable, dans l'intérêt des sciences et des lettres, d'avoir dans la
capitale une bibliothèque publique convenablement dotée où tous les hommes qui
veulent s'adonner aux sciences et aux lettres puissent trouver les matériaux
nécessaires pour leurs travaux. Malheureusement on a adopté un système très
vicieux ; on a créé trois bibliothèques, et à mon avis on a fait en cela une
faute très grave. Nous voyons dans les annexes du rapport de la section
centrale (pages 68 et 69 de ce rapport) qu'il est alloué annuellement 10,000
fr. à la bibliothèque de Liége et 10,000 fr. à la bibliothèque de Gand. En
bien, je vous le demande, ne serait-il pas préférable d'augmenter de cette
somme de 20,000 francs l'allocation destinée à la bibliothèque royale, et
d'avoir ainsi dans la capitale une bibliothèque unique, aussi complète que
possible.
Plusieurs membres. - Et les universités ?
M. Dumortier. - On parle des universités. Mais les
villes qui ont le bonheur de posséder ces établissements, qui sont pour elles
un élément de prospérité, doivent subvenir à de telles dépenses, comme les
autres villes qui ont des bibliothèques, des musées, des cabinets d'histoire
naturelle en font elles-mêmes les frais. Il en était ainsi du temps du roi
Guillaume, et dans les premiers temps de notre émancipation politique. Je dis
que l'Etat devrait se borner à faire les frais d'une seule bibliothèque dans la
capitale, et qu'avec le chemin de fer il serait facile à tous les hommes qui
dans le pays se livrent aux sciences et aux lettres, de se procurer les livres
de cette bibliothèque. D'ailleurs si c'est en vue des universités que l'on fait
des dépenses pour les bibliothèques de Liége et de Gand, je dirai que ce but
n'est pas rempli, car les professeurs des universités de ces deux villes m'ont
souvent dit que ces bibliothèques manquent de la plupart des livres qui leur
sont. nécessaires. On agirait donc mieux dans l'intérêt
des universités en laissant aux villes le soin de pourvoir aux dépenses des
bibliothèques.
Je
persiste à penser que l'Etat ne doit faire de dépenses que pour une seule
bibliothèque dans la capitale.
M. de Behr. - Il faudra alors modifier la loi.
M. Dumortier. – Il ne sera pas nécessaire de modifier
la loi, puisqu'elle met les dépenses du matériel des universités à la charge
des villes. Si l'honorable M. de Behr veut voir le rapport, il y trouvera la
démonstration évidente de ce que je viens de dire.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je pense avec l'honorable préopinant, qu'il ne faut pas donner une trop
grande extension aux bibliothèques qui existent auprès des deux universités de
l'Etat, mais ces universités sont indispensables, et il faut qu'elles soient
entretenues de manière que, pour les diverses sciences qui sont enseignées dans
ces établissements, elles se trouvent toujours au courant des publications. Il
le faut, dans l'intérêt des élèves et surtout des professeurs qui, comme vous
savez, ne sont pas très largement rétribués. Je suis donc d'accord avec le
préopinant, qu'il ne faut pas donner une trop grande extension à ces
bibliothèques, mais il faut, autant que possible, y recevoir les ouvrages qui
sont les auxiliaires indispensables de tout homme qui veut approfondir une
branche quelconque des connaissances humaines. C'est ainsi
que le gouvernement cherche à faire l'application des dix mille francs alloués
à chacune des bibliothèques des deux universités.
M. Raikem. - Après ce que vient de dire M. le
ministre de l'intérieur, j'aurai très peu de chose à ajouter pour répondre au
discours de l'honorable M. Dumortier qui a été totalement dans l'erreur, quand
il a dit que les bibliothèques des universités étaient à la charge des villes.
Pour lui répondre, il me suffira d'une seule chose, c'est de lire l'article 7
de la loi sur l'enseignement qui concerne l'objet dont il a parlé.
Quant
à l'allocation, elle a été portée au budget en vertu de la loi ; l'article est
voté, nous n’avons pas a nous en occuper maintenant.
Voici
ce que porte l'article 7 de la loi de 1835 : « Des subsides seront
accordés aux universités de l'Etat, pour les bibliothèques, les jardins
botaniques, cabinets d’histoire naturelle, les collections et pour subvenir à
tous les besoins de l'instruction ». Voila une charge imposée à l’Etat par
la loi.
Vient
ensuite la charge imposée aux communes. Le 2e alinéa de l'article dont je viens
de parler, porte que les dépenses d'agrandissement, d'amélioration et
d'entretien des bâtiments affectés aux universités sont à la charge des villes
où sont fondés ces établissements.
Vient
le 3e alinéa, portant qu'en cas de contestation sur l'utilité de ces dépenses,
la députation du conseil provincial décide, sauf le recours au Roi.
Vous
voyez qu'il ne s'agit dans la charge imposée aux villes que de
l'agrandissement, 1’entretien et l’amélioration des bâtiments.
L'expression
bâtiments ne comprend pas les bibliothèques ; elles sont comprises
spécialement dans le premier alinéa de l'article. Il y a donc lieu de maintenir
ces allocations, el même de les porter aux budgets subséquents. C'est au
gouvernement à voir ce qui peut être nécessaire aux universités. M. le ministre
s’est expliqué.
Maintenant que l'article est voté, et même
que le chiffre n'est pas contesté, je ne crois pas nécessaire d'entrer dans
plus de détails.
M. Fleussu. - J'ai demandé la parole pour faire les
mêmes observations que l'honorable M. Raikem. Il est évident que la loi a mis à
la charge de l'Etat les deux bibliothèques des universités. Messieurs, depuis
qu'on a voté la loi sur l'instruction supérieure, il serait fort étonnant qu'on
eût porté tous les ans une somme pour cet objet, si tel n'avait pas été le vœu
de la loi.
Je
dirai que la ville de Liége a déjà beaucoup allégé les frais qui incombent à
l'Etat pour cet objet en laissant à l'université la bibliothèque de la ville
qui était passablement riche.
M.
Dumortier me permettra de signaler une contradiction dans laquelle il est
tombé.
Il voudrait que les villes où sont situées les
universités fissent les frais nécessaires pour avoir des bibliothèques
convenables, ensuite il dit que les professeurs se sont adressés à lui pour se
plaindre de ce que le gouvernement ne faisait pas assez pour doter
convenablement ces bibliothèques. De deux choses l'une : on ne peut pas dire
d'un côté que l'Etat ne doit rien faire et de l'autre se plaindre
de ce qu'on ne fait pas assez.
Je m'en réfère, du reste, à ce qu'a dit M. Raikem.
M. Delfosse. - Messieurs, le chiffre porté au budget
pour les universités de l'Etat a été adopté dans la séance d'hier, sans
opposition ; les observations que l'honorable M. Dumortier vient de nous présenter contre cette allocation sont donc sans objet en ce
moment ; elles sont tardives ; j'engage l'honorable M. Dumortier à remettre à
l'année prochaine à la discussion du budget prochain, celles qu'il aurait encore
à faire, alors nous lui répondrons.
M. Dumortier. - Nous parlions de bibliothèques, il y a
connexité entre les bibliothèques des universités et la bibliothèque de l'Etat.
J'engage le gouvernement à prendre en considération mes observations, c'est le
moment le plus favorable pour les présenter.
Ce
qu'a dit l'honorable M, Raikem est la justification de ce que j'ai avancé.
M. Delfosse. - J'ai fait une motion d'ordre, je demande
qu'il y soit donné suite.
M. Dumortier. - Je ne reconnais pas à l'honorable M.
Delfosse le droit de m'interrompre, quand deux orateurs ont parlé sur la même
question dans un autre sens que moi.
M. le président.- M. Dumortier va répondre sur la motion
d'ordre.
M. Dumortier. -Je réponds sur le fond, j'ai répondu à
la motion d'ordre, qu'il y avait connexité entre les deux dépenses. Quand j'ai
engagé le gouvernement à réunir les sommes dépensées pour ces établissements et
à les employer à la bibliothèque de l'Etat, j'étais dans la question. Si je
proposais de supprimer l'allocation votée pour l'université de Liége, M.
Delfosse aurait raison, mais j'engage le gouvernement à examiner mes
observations et à y faire droit. Quoique je puisse déplaire à l'honorable M.
Delfosse en parlant de l'université de Liége, je n'eu suis pas moins dans la
question.
M.
Raikem, comme je le disais, a justifié ce que j'ai eu l'honneur de vous dire.
En effet, que porte la loi qu'il a citée ? Que des subsides seront accordés aux
universités pour bibliothèques, jardins botaniques, etc.
Qu'est-ce
qu'un subside ? c'est un secours, ce n'est pas
l'intégralités de la dépense, et vous la faites incomber tout entière à charge
de l'Etat. On s'est placé dans un système qui n'est pas celui de la loi. Au
lieu d'un secours, d'une charité, on fait donner à l'Etat l’intégralité de la
dépense. Ce n'est pas ce que la loi a voulu.
Qu'a-t-elle
fait ? elle a mis les dépenses matérielles à la charge
des villes, et l'Etat donne un subside, mais non la totalité de la dépense. La
bibliothèque fait partie du. matériel. Le gouvernement
n'intervient que pour un secours. Voilà sa part. Il est absurde de prétendre
que l'Etat doit faire toute la dépense.
Voyez
ce qui se passe, vous avez une bibliothèque nationale à Bruxelles, quel crédit
lui accordez-vous ? 15 mille francs.
Voilà à quoi se borne le chiffre des acquisitions annuelles et dans le
moment où vous n'allouez que 15 mille fr. pour la bibliothèque que vous appelez
nationale, vous allouez 10 mille fr. pour chacun des deux établissements
latéraux. Ce n'est pas comme cela que vous aurez une bibliothèque nationale ;
ce sera en réunissant sur le même établissement les sommes que vous votez pour
les bibliothèques ou en augmentant beaucoup l'allocation pour la bibliothèque
nationale. Il est important, dit-on, que les bibliothèques des universités
aient les ouvrages importants qui paraissent. Mais les villes feront ces
dépenses comme le font nos villes qui n'ont pas l'avantage de recevoir un
subside de l’Etat.
C'est
à tort qu'un honorable préopinant a dit qu'il y avait une contradiction dans
mes paroles, Je me suis plaint et j'ai dit que les professeurs se plaignaient
aussi de la pauvreté de nos bibliothèques, et j'ai tiré la conséquence qu'ils
ne se plaindraient plus s'ils trouvaient dans un seul dépôt tous les ouvrages
dont ils ont besoin. C'est pour cela que j’ai proposé de réunir nos capitaux
pour les appliquer à la bibliothèque nationale.
M. Raikem - L'honorable M. Dumortier dit que le mot
subsides inséré dans la loi signifie secours ; et le secours suivant
l'honorable membre ne devrait consister qu'en une faible subvention qui ne
comprendrait pas tout ce qui est nécessaire pour remplir l’objet de la loi. Ce
n'est pas là le sens que le législateur a attaché a
l'expression subside. Le chapitre est intitulé : des subsides. Les
dépenses à charge des villes sont des subsides d'après l'intitulé du chapitre.
Si on prenait ce mot dans le sens que lui donne M. Dumortier, les villes ne
donneraient que des secours ainsi que l'Etat. Subside ou allocation, quelque
nom qu'on lui donne, cela comprend tout ce qui est nécessaire aux besoins de
l'instruction, Le 1er alinéa porte que des subsides seront accordés aux
universités de l'Etat pour les bibliothèques, les jardins botaniques, les
cabinets d'histoire naturelle, les collections et pour subvenir à tous les
besoins de l'instruction. Or, qui dit tout n'exclut rien. Ainsi,
l'expression subside comprend tout ce
qui est nécessaire annuellement pour les bibliothèques.
Lorsqu'on
se sert de l’expression : pas de redressement de griefs, pas de subsides, on
n'entend pas sans doute parler d'un faible secours à accorder au gouvernement.
Un budget comprend tout ce qui est nécessaire pour couvrir les dépenses qui
sont à la charge de l'Etat. C'est dans le même sens que le mot subside est,
employé dans l'art. 7 de la loi de 1835 ; et pour l'exécution de la loi, il y a
nécessité de porter au budget de l'Etat tout ce qu'exigent les besoins de
l'instruction.
Quant
aux observations de M. Dumortier, il suffit de dire que la loi existe ; s'il
faisait une proposition pour en changer la disposition, c'est alors seulement
qu'il s'agirait de combattre une telle proposition, et de présenter les motifs
qui devraient la faire rejeter.
Dans ce moment, la loi étant formelle, ce serait
un hors d'œuvre.
M. Dedecker,
rapporteur. - Il est
vrai que la loi met à charge de l'Etat les dépenses à faire pour les
bibliothèques des universités. Mais c'est dans la supposition que les
universités auraient une bibliothèque spéciale. Ce n'est pas ce qui est, du
moins pour la ville de Gand. La ville de Gand accorde un subside plus élevé que
celui du gouvernement et les livres achetés avec ces deux subsides sont ajoutés
à l'ancien fonds appartenant à la commune. Si la ville de Gand perd un jour son
université, elle profiterait des achats faits avec le subside du gouvernement.
On le voit donc, messieurs, la question soulevée par l'honorable M. Dumortier
est fort grave.
Du
reste, j'avoue que cette discussion aurait mieux trouve sa place à l'article
concernant les universités.
- Le
chiffre n'est pas contesté.
Le
litt. D est adopté.
Litt. E
« Litt.
E. Publication des chroniques belge inédites, 14,000 fr. »
- Ce
littera est adopté.
L’ensemble
de l'article est adopté.
Article 2
« Art.
2. Beaux arts : fr. 192,000 »
La
section centrale propose une réduction de 18,971 fr., ce qui réduirait le
chiffre à 175,029 fr.
La
chambre décide qu'elle procédera à la discussion par littera.
« Litt.
A. Encouragement, souscription, achats, 60,000 fr. »
M. Rogier. – Messieurs,
il y a quelques observations générales à présenter sur l'article.
La
section centrale me paraît professer en matière de comptabilité, pour ce qui
concerne l'administration des beaux-arts, un système tout à fait inadmissible,
contraire à tous les antécédents, qui, s'il était suivi par le ministère,
paralyserait entièrement cette administration dans sa base.
Je
demanderai à M. le ministre de l'intérieur s'il n'a pas d'observation à faire
sur ce nouveau système que la section centrale semble vouloir établir en
matière de comptabilité, relativement à l'administration
des beaux-arts.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, je pense qu'on ne pourrait accepter d'une manière absolue les
observations qui ont été faites par la section centrale, en ce qui
concerne la comptabilité, en matière de beaux-arts. En effet, il en résulterait
que les engagements doivent être tellement circonscrits à l'année pour chaque
ministre, qu'il serait impossible de commander un travail quelconque,
destiné à être fait et par conséquent, payer en deux ou trois ans.
Je
crois, messieurs, qu'il ne faut pas aller jusque là. Mais tout en n'acceptant
pas d'une manière absolue les observations de la section centrale, il y a un
autre écueil qu'il faut éviter. Je comprends qu'à un ministre, à qui on alloue
60,000 fr., il doit être permis de prendre des engagements au-delà de l'année,
de manière à engager, en outre, une somme de 20 mille fr., le tiers de la somme
qu'il s'attend à voir porter au budget de l'année suivante. Mais il ne doit pas
aller plus loin. S'il allait plus loin, il tomberait dans un système tel qu'il
rendrait impossible toute action de la part de ses successeurs.
Ainsi,
messieurs, en annonçant à la section centrale que j'avais un crédit supplémentaire
à demander, j'ai eu soin de déclarer que je tenais, néanmoins, compte sur les
60,000 fr. que vous allez probablement voter pour 1842, de 25,000 fr.
d'engagement, déjà contractés. Je tiens compte de plus du tiers, messieurs ;
mais je ne puis faire davantage. Si je devais reconnaître comme engagée, dès à
présent, une somme plus forte que celle de 25,000 fr., évidemment
l'administration des beaux-arts n'existerait pas pour 1842. Voilà donc,
messieurs, quelle est ma manière de voir pour la comptabilité en matière de
beaux-arts. Le ministre peut prendre des engagements au-delà de l'année, mais
il doit les prendre dans une certaine mesure, il ne doit engager, sur les
années suivantes, qu'un tiers ou un peu plus du subside annuel probable,
c'est-à-dire 20 à 25,000 fr.
Nous
examinerons, quand je présenterai à la chambre la demande de crédits
supplémentaires, jusqu'à quel point le système que j'indique, avec la
restriction que j'y mets, a été suivi. Je ne sais si, dès à présent, nous devons anticiper sur cette discussion.
M. Dedecker,
rapporteur. -
Messieurs, je crois devoir justifier le principe émis par la section centrale
relativement à la comptabilité en matière de beaux-arts.
Vous
vous rappellerez, messieurs, que lorsque la section centrale a été appelée à
émettre ce principe, elle se trouvait frappée d'un abus qui avait été signalé
dans cette administration. M. le ministre de l’intérieur venait d’informer la
section centrale qu’il demanderait un crédit supplémentaire sur cet article.
Déjà quelques-uns des cabinets précédents avaient pris, paraît-il, des
engagements qui excédaient d’une somme assez considérable l’allocation annuelle
portée au budget pour les beaux-arts.
La
section centrale a vu le danger d'un semblable système. Elle a cru devoir
appeler l'attention toute spéciale de la législature sur ce danger, et c’est là
ce qui l’a engagée à formuler sa manière de voir, comme vous l’avez lu dans le
rapport.
Je
conviens cependant, messieurs, qu'il ne faut pas attacher à l'expression de
cette manière de voir toute la rigueur que semblent comporter les termes dont
la section centrale s'est servie. Je conviens que relativement à certaines
parties de l'administration des beaux-arts, il est difficile de rester
entièrement dans le cercle tracé par le budget, et, sur ce point, je partage la
manière de voir de M. le ministre de l’intérieur. Mais, d'un autre côté,
lorsqu'on ne se tient pas rigoureusement au chiffre alloué au budget, il est
impossible de prévenir les abus que déjà nous avons été forcés de vous
signaler, car il n'y a pas moyen de fixer la ligne où l'on doit s'arrêter.
M.
le ministre de l'intérieur nous parle d’une somme de 20 à 25,000 francs. Je
crois qu'il est impossible que l’administration prenne même des engagements
pour cette année. Je dis que la fixation de cette limite étant laissée à
l’arbitraire du gouvernement, les votes de la chambre seront encore méconnus ;
qu’il deviendra inutile de voter tel chiffre par an, que ce chiffre sera
excédé, et qu’on viendra de nouveau vous demander des crédits supplémentaires.
C’est ce que la section centrale a voulu prévenir.
M. de Brouckere – Messieurs, je crois que les
observations de la section centrale sainement interprétés comme elles viennent
de l’être par M. le ministre de l’intérieur, sont fort sages ; mais toutes les
administrations, et je dirai même plus, non seulement l’administration
générale, mais encore l’administration des provinces, ont fait ce qui a été
fait l’année dernière ; c’est-à-dire qu’il se présente des circonstances telles
qu’un ministre, pas plus qu’un autre fonctionnaire qui a des fonds à sa
disposition, ne saurait se dispenser d’échelonner les subsides qu’il accorde.
Il est inutile de citer des exemples, mais on pourrait en citer un très grand
nombre.
Il
doit donc être reconnu que dans certaines circonstances un ministre peut
échelonner sur plusieurs années les subsides qu’il accorde soit à des artistes,
soit à des littérateurs, soit à des personnes qui entreprennent des voyages, et
dans différents autres cas analogues. Mais, comme on l’a fort bien dit, il faut
rester dans certaines bornes. Il faut que le ministre agisse de telle manière
qu’il ne gêne pas l’action de celui qui le remplacera, s’il quitte son
portefeuille.
Plusieurs voix. - C’est assez, nous sommes d’accord.
M. de Brouckere. - J’entends dire sur plusieurs bancs :
nous sommes d’accord. Mais derrière moi, quelqu’un dit : nous ne sommes pas
d’accord. Ce quelqu’un est l’honorable abbé de Foere, qui va tout à l’heure
vous expliquer un nouveau système. (On rit.)
Moi
je défends l’ancien système, le système qui a toujours existé. Je mets en fait,
et il y a ici plusieurs ministres qui peuvent me répondre, je mets en fait que
ce système a toujours existé. C’est qu’il doit exister, mais entendu sainement,
comme l’a expliqué M. le ministre de l’intérieur. Il faut que l’on engage
l’avenir, mais qu’on ne l’engage qu’avec mesure, qu’avec modération, et que
l’on pense à la position que l’on fait à son
successeur, si tant est qu’on doive en avoir un l’année suivante.
Je crois donc que si nous ne sommes pas tous
d’accord, la majeure partie de la chambre entend l’emploi de subside qu’elle
accorde comme je viens de l’expliquer.
M. de Foere. - Messieurs, les honorables préopinants
ont invoqué des antécédents pour défendre leur opinion. Mais il faut justifier
ces antécédents ; si on ne le fait pas, on n'argumente que d'abus. Or, je
soutiens que les antécédents qu'on a invoqués sont des abus.
Le
gouvernement, messieurs, doit s'en tenir aux subsides qui ont été alloués pour
l'année. C'est même un moyen qui vient au secours du ministère. Car à chaque
instant le ministère est assailli par une foule de demandes d’artistes, de littérateurs,
des musiciens pour obtenir des subsides. Lorsque le ministre devra dire que les
subsides ne sont alloués que pour l'année et qu'ils sont épuisés, il pourra
leur faire une réponse à laquelle il n'y aura rien à répliquer.
Si,
au contraire, vous établissez le principe que l'on a défendu, vous en laissez
l'application à l'arbitraire du gouvernement, Vous avez beau dire que le
ministre en usera avec mesure et modération ; ce sont des paroles qui ne sont
pas toujours suivies. C'est ainsi qu'on crée, contre les vraies règles
parlementaires, des établissements avant que les subsides nécessaires aient été
votés Par exemple, sous l'administration précédente, on. a
réorganisé l'académie d'Anvers sur un pied qui devait entraîner beaucoup de
dépenses qui n'ont pas été votées. C'est ainsi que sous l'administration
actuelle, on a créé une académie de médecine sans que la dépense ait été votée.
Je demande si ce n'est pas là exercer une espèce
de violence morale sur la chambre pour
lui faire voter des subsides.
M. Dumortier. - Certainement, messieurs, ce que vient
de dire l'honorable préopinant est fort juste sous le point de vue du droit
rigoureux, mais il faut avouer qu'un semblable système est souvent
impraticable. Comment voulez-vous que le gouvernement puisse commander un
monument de sculpture ou de peinture, s'il ne peut engager que les fonds, votés
pour l'exercice courant ? Evidemment, messieurs, si un semblable système était
rigoureusement établi il y aurait des années où le crédit alloué serait
insuffisant, et où il faudrait renoncer par conséquent soit à commander le
monument que l'on aurait en vue, soit à toute autre dépense. Il faut donc que
le gouvernement ait une certaine latitude, mais il faut aussi qu'il se renferme
dans certaines limites et celles que M. le ministre de l'intérieur a indiquées
me paraissent convenables. Il ne faut pas qu'un ministère, quel qu'il soit,
puisse engager l'avenir au point de ne plus laisser de ressources semblables
pour les exercices futurs. Je sais bien qu'un ministre qui se retire a un
testament politique à faire, mais je voudrais que ce testament n'empêchât pas
le nouveau ministre d'administrer.
Il
est d'ailleurs une considération que l'on ne doit pas perdre de vue et sur
laquelle j'appelle l'attention de M. le ministre. La majeure partie de nos
anciens chefs-d'œuvre de l'art, qui font la gloire de
Messieurs,
j'ai jeté les yeux sur les renseignements qui nous ont été fournis relativement
à l'emploi du subside dont nous nous occupons, et je dois avouer que plusieurs
abus ont été commis dans la répartition de ce subside. Je ne conçois pas, par
exemple, que sur un crédit destiné à des souscriptions et achats, on donne des
subsides à des musiques de villages. Si une fois on entre dans cette voie, il
n'est pas possible de dire où l'on s'arrêtera ; car si l'on donne un subside à
la musique de tel ou de tel village, je ne vois pas pourquoi l'on n'en
donnerait pas aux musiques de tous les villages du pays ; toutes évidemment
auraient les mêmes droits à venir demander un semblable subside, et si l'on
devait satisfaire aux réclamations qui pourraient être faites de ce chef, le
crédit serait bientôt épuisé.
J'ai
vu également avec le plus grand regret que sur ce même crédit on a donné des
suppléments de subside aux conservatoires de musique. Mais, messieurs, les
conservatoires de musique ont déjà au budget des subsides et des subsides qui
vont crescendo d'année en année. Ces subsides devraient bien suffire et
tout à l'heure quand nous en serons là, je m'expliquerai à cet égard.
Je
prie le gouvernement de vouloir employer avec discernement le crédit qui nous
occupe ; bien employé, ce crédit peut être de la plus grande utilité pour le
pays, mais il ne faut pas le gaspiller en subsides donnés à
des sociétés de musique de village et des établissements pour lesquels il y a
déjà des crédits au budget.
M. Rogier. - Il paraît, messieurs, qu'il est
maintenant reconnu par tout le monde que la marche suivie par les
administrations précédentes a été régulière. M. le rapporteur de la section
centrale reconnaît lui-même qu'une application trop rigoureuse des principes
que cette section a posés pourrait paralyser la marche de l’administration. Il
ne faut donc point donner aux observations de la section centrale la portée
qu’elles auraient, si on les prenait à la lettre.
La
marche qui a été suivie par l'administration précédente a été suivie aussi par
l'administration à laquelle elle a succédé. L'honorable M. de Theux, qui est
là, pourra l'attester. Lorsque je suis arrivé aux affaires, j'ai trouvé le
budget des beaux-arts engagé pour des sommes considérables. Je ne l'ai point
trouvé mauvais, j'ai reconnu que c'était là une nécessité de l'administration ;
mais la charge que m'a laissée mon prédécesseur, je l'ai à mon tour, laissé à
celui qui m'a succédé, et je ne pense pas qu'il puisse m'en faire un reproche,
car il sera lui-même dans la nécessité d'en faire autant, si tant est qu'un
successeur lui advienne.
Je
ne citerai, messieurs, que trois ou quatre commandes très importantes dont le
payement devait avoir lieu pendant l'administration qui a suivi celle de
l'honorable M. de Theux. Un tableau avait été commandé, et je dois en féliciter
mon honorable prédécesseur, au peintre Gallait, un
autre, au peintre de Debiefve ; une statue du
chanoine Triest avait également été commandée, et elle devait coûter 75,000
francs.
Pour cette dernière somme seule, si elle avait pu
être imputée sur un seul exercice, il est évident que le crédit alloué n’aurait
pas suffi. D'ailleurs la statue ne pouvait pas être faite dans le courant de
l'année. Il en est de même, messieurs, des tableaux de Gallait
et de Debiefve ; il était impossible d'imputer le
prix de ces deux tableau, qui s'élèvera peut-être à
quarante mille francs sur un seul exercice.
Le budget de 1841, avec lequel nous devions marcher,
était donc déjà fortement grevé ; il était grevé, à tel point que le crédit
supplémentaire demandé par M. le ministre de l'intérieur actuel, sera encore
chargé de ce chef d’une somme de 18 mille francs.
Je demanderai à M. le ministre s'il entend en outre
imputer sur le budget de 1842 une partie des sommes engagées par ses
prédécesseurs, car il ne serait pas juste de recueillir en quelque sorte le
fruit des engagements antérieurs sans en supporter les charges qui en
résultent. Je demande donc à M. le ministre de l'intérieur quelle somme il entend
imputer de ce chef sur le budget de 1842.
Je dois faire observer en outre que l'année dernière
il a été accordé des subsides tout à fait extraordinaires et exceptionnels,
Ainsi, par exemple, un subside de dix mille fr. a été alloué à la ville de Liége
pour l'aider à l'érection de la statue de Grétry ; une autre somme de dix mille
fr. a été accordée à la ville d'Anvers pour l'aider à l'érection de la statue
de Rubens ; au moyen de cette somme de vingt mille fr., nous aurons doté le
pays de deux nouveaux monuments, et je crois, messieurs, que nous avons fait en
cela un très bon marché.
J'ajouterai, messieurs, qu'en raison de ces deux
allocations tout à fait exceptionnelles, il avait été demandé au budget de 1841
une augmentation de crédit ; mais au moment où la chambre devait aller aux voix
sur cette partie du budget, la discussion avait pris un caractère tout
politique, et nous avons cru devoir renoncer à cette augmentation, en faisant
toutefois la réserve expresse que si nous restions au ministère
nous viendrions demander un crédit supplémentaire.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je vous prie, messieurs, de
vouloir bien jeter les yeux sur la page 40 du texte du rapport de l'honorable
M. Dedecker ; vous y verrez que 25,000 fr. sont déjà considérés par moi comme
engagés sur l'exercice 1842.
Ces 25,000 fr. proviennent en majeure partie
d'engagements antérieurs à mon administration. Il m'est impossible de les
détailler maintenant, mais j'en joindrai l'état aux autres pièces qui
accompagneront la demande d'un crédit supplémentaire.
Je n'entends donc pas liquider le passé tellement à
mon bénéfice que rien ne reste engagé sur 1842. Je m'applique à moi-même le
système que j'ai exposé, sur l'interpellation qui m'était faite, le système sur
lequel nous paraissons tous d'accord, à savoir que le ministre ayant
l'administration des beaux-arts dans ses attributions et à qui on alloue 60,000
fr. par an pour cette branche du service public, se trouve dans cette
position-ci.
Il est à présumer que sur les 60,000 fr. qui lui ont
été alloués pour l'année courante, il y a déjà 20 ou 25,000 fr. d'engagés ; par
compensation il lui est également permis de prendre des engagements jusqu'à
concurrence d'une somme semblable, sur l'année suivante.
Mais, messieurs, comme j'ai eu l'honneur de le dire
au commencement de cette discussion, n'anticipons pas. Il est impossible
d'examiner en ce moment jusqu'à quel point mon prédécesseur s'est tenu dans les
limites que je viens d'indiquer. C'est ce que nous examinerons quand nous
aurons à discuter la demande de crédit supplémentaire qui sera faite à la
chambre.
Je suis tellement de bonne foi, je veux tellement
user de franchise dans cette question, que je m'engage à ne pas faire
d'imputation nouvelle sur le crédit qui nous occupe, à ne pas contracter
d'engagement nouveau sur ce crédit, jusqu'à ce que vous ayez voté le crédit
supplémentaire qui vous sera demandé. Ainsi, le chiffre de 60,000 fr., restera
dans l'état où il se trouve maintenant, à moins toutefois, que le vote du
crédit supplémentaire, dont il s'agit, ne soit renvoyé à une époque trop
éloignée. Mais je suppose que ce crédit pourra être voté avant le 20 février ;
il vous sera demandé, dès votre rentrée.
Je ne veux pas, messieurs, aller
plus loin ; je ne veux créer de prévention contre personne ; c'est pour cela
que je m'abstiens d'anticiper. Il me suffit d'avoir bien précisé ma position
personnelle. Lorsque je suis arrivé au ministère, j'ai trouvé le crédit alloué
pour 1841, à peu près épuisé. J'ai dépensé 18,000 fr. pour l'année courante,
mais sur ce 18,000 fr. à peu près 12,000 fr. ont été accordés comme
continuation de subside à des élèves, de sorte que la somme dépensée par moi se
trouve singulièrement restreinte.
Si je fais cette observation, messieurs, ce n'est
pas pour blesser mon honorable prédécesseur, mais c'est pour que ma position
vis-à-vis des artistes soit bien connue.
Le système qu'on vous a exposé est tellement vrai,
tellement nécessaire, qu'il s'applique à d'autres branches d'administration
publiques : les barrières, par exemple. Les routes se font en plusieurs années
; eh bien, il est admis qu'un ministre peut, dans certaines limites, engager
les fonds des barrières de l'année suivante. Il est impossible qu'on procède
autrement, si l'on ne veut pas ne faire qu'une route ou deux par an. Si mes
souvenirs sont exacts, j'ai laissé à mon successeur plus de 400,000 fr. environ
de libre sur l'année 1840, la somme totale ne dépassait pas 800,000 fr. ; j'ai
quitté le ministère au mois d'avril de cette année, je crois même que mon
successeur m'a rendu cette justice de reconnaître ce que j'avance.
Je pense que ce que l’on peut
pour les routes, au sujet du fonds des barrières, on doit le faire aussi pour
les beaux-arts.
M. de Theux. -
Messieurs, puisque mon nom a été invoqué dans cette discussion, je demande à
pouvoir dire deux mots. Je fais connaître très volontiers que j'ai suivi les
errements qui ont été signalés par plusieurs orateurs comme une nécessité
d'administration ; je ne pense pas m'être jamais écarté de cette règle, je
crois n'avoir jamais engagé que modérément l'avenir, Je ne puis me rappeler
quel était l’état de la situation des fonds, tant à mon entrée qu’à ma sortie
du ministère, je m’en rapporte entièrement à cet égard aux faits que pourra
signaler M. le ministre de l’intérieur dans le projet de crédit supplémentaire
qu’il a annoncé.
- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre
est mis aux voix et adopté.
« Litt. B. Conservatoire de musique de
Bruxelles, 35,000 fr. »
M. Dumortier - Messieurs, je ne pense pas
qu'on vienne nous proposer sérieusement une augmentation de subsides pour le
conservatoire de musique de Bruxelles. Il n'est pas d'année qu'on n'ait voté
une augmentation en faveur de cet établissement.
Des voix. - Il n'en a pas obtenu pour cette
année-ci.
M. Dumortier - Il en avait été proposé une,
mais elle a été retirée provisoirement par le ministre, ainsi que toutes les
autres majorations concernant les beaux-arts.
Il est temps que le conservatoire sache une bonne
fois que la chambre est enfin décidée à s'arrêter dans
cette voie progressive de dépenses. Je ne vois pas, depuis que le subside
primitif a été augmenté d'un tiers, que le conservatoire de Bruxelles ait
produit plus de merveilles qu'auparavant ; il me semble que les choses n'en
vont pas mieux.
Je désirerais donc connaître les
motifs qui ont porté le gouvernement à proposer cette majoration.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, l'honorable
préopinant a eu soin de rappeler lui-même que, l'année dernière, une
augmentation avait été demandée : La chose n'a donc pas été discutée, et l'on
ne peut pas dans ce qui s'est passé l'année dernière, trouver un préjugé contre
ce que l'on peut faire en ce moment.
Ce serait une erreur, messieurs, de considérer
l'institution dont il s'agit comme une institution locale ; cette institution,
on peut le dire, appartient véritablement à la majeure partie du pays.
Plus de 300 élèves reçoivent gratuitement
l'instruction au conservatoire ; dans ce nombre, la moitié environ se compose
d'étrangers à la ville de Bruxelles.
De toutes les provinces du royaume les jeunes
artistes viennent s'y perfectionner. Aussi son influence favorable se fait-elle
sentir dans le pays entier.
C’est du conservatoire de Bruxelles que sont sortis
presque tous ces artistes qui se font applaudir dans toutes les capitales de
l'Europe, et font avouer partout que, pour le mérite et le nombre des
instrumentistes, aucun pays ne peut être mis en parallèle.
Néanmoins, cet établissement présente des lacunes.
Une de ces lacunes consiste dans l'absence d'un cours de déclamation et de
prononciation ; c'est un semblable cours qu'on voudrait adjoindre à l'établissement, c'est pour cet objet principalement qu'une
augmentation de subside nous avait été proposée l’année dernière, et que le
gouvernement vous l’a proposé de nouveau cette année.
M. Dumortier. - Messieurs, les motifs qui
viennent d'être indiqués, par M. le ministre de l'intérieur, m'engageront à
voter contre l'allocation. J'ai de la sympathie pour le conservatoire de
musique de Bruxelles ; j'ai voté pendant longtemps toutes les majorations qui
ont été proposées en sa faveur, mais je ne veux pas faire de ce conservatoire
une académie de comédiens. Or, c'est à quoi tendrait le supplément de crédit
qu'on demande. Je voterai donc contre cette majoration.
Je ferai d'ailleurs remarquer que le conservatoire
de Bruxelles ne figure pas seulement à l'article que nous discutons en ce
moment, on le retrouve encore, si j'ai bon souvenir, à deux ou trois places
dans les encouragements.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) – Accidentellement.
M. Dumortier. - Ces accidents se présentent
tous les ans.
Je le répète, messieurs, il faut en finir une bonne
fois avec ces majorations. Je ne prétends pas que le conservatoire de Bruxelles
ne rende pas des services à
M. de Brouckere. - Messieurs, je voterai pour l'augmentation demandée en faveur du
conservatoire de Bruxelles, et je dois avouer que si je conçois que tout le
monde ne soit pas de mon opinion, je ne conçois pas que ce soit par le motif
que vient d'alléguer l'honorable M. Dumortier.
Messieurs, l'honorable membre a appelé le
conservatoire de Bruxelles une académie de comédiens...
M. Dumortier. - Pardon ; j'ai dit qu’il le
deviendrait, si la majoration était accordée.
M. de Brouckere. - Vous avez dit que des explications données par M. le ministre de
l'intérieur, il résultait qu'on voulait faire du conservatoire une académie de
comédiens. Eh bien, il est certain que le conservatoire de Bruxelles ne mérite
pas cette dénomination, et j'ajoute, sans crainte d'être démenti par qui que ce
soit, qu'il n’entre dans les intentions de personne d'en faire une académie de
comédiens.
Il est très vrai que du conservatoire de Bruxelles
comme de tous les conservatoires possibles, il est sorti des élèves qui se
destinaient à l’art dramatique ; mais je ne pense pas qu'il entre dans les
intentions de l'honorable M. Dumortier de mettre pour condition à l'admission
des jeunes gens dans un conservatoire, l'engagement à prendre par eux de ne
jamais se livrer à l'art dramatique ; cet art n'est pas prohibé en Belgique, et
je ne pense pas que personne veuille l'y prohiber. Il est sorti du
conservatoire de musique des artistes qui se sont destinés à toutes les
branches auxquelles on est propre en sortant d'un pareil établissement, et je
crois pouvoir dire que le nombre de ceux qui ont embrassé la carrière
dramatique est le moins grand. Il en serait autrement, que ce ne serait pas un
motif pour rejeter le crédit qu'on nous demande.
Mais, dit-on, un cours de déclamation n'est bon que
pour des comédiens. Eh bien, c'est là une erreur, et une erreur grave ; ce
cours est nécessaire pour tous les élèves qui veulent apprendre à bien chanter,
peu importe où ils chanteront, que ce soit dans un salon, ou au spectacle, ou à
l'église ; il faut, pour bien chanter, avoir suivi un cours de déclamation,
j'en appelle à tous ceux qui sont à même de porter un jugement sur cette matière.
M. Dumortier. - Messieurs, je ne veux pas
qu'on fasse du conservatoire de Bruxelles une succursale du conservatoire de
Paris. Le conservatoire de Paris est institué, principalement pour former des
artistes dramatiques ; le conservatoire de Bruxelles, au contraire, a été
exclusivement fondé pour former des artistes musiciens, des chanteurs, des
exécutants. S'il s'agissait de modeler le conservatoire de Bruxelles sur le
conservatoire de Paris ; s'il s'agissait de le destiner à former des comédiens,
le but primitif de l'institution serait complètement dénaturé ; et bien, moi,
je ne veux pas que ce but soit dénaturé ; je veux que les pères de famille qui
envoient leurs enfants au conservatoire, sachent pourquoi ils les y envoient.
L’honorable préopinant dit qu'un cours de déclamation
est nécessaire au conservatoire ; je voudrais bien qu'il me dît si celui qui
joue de la clarinette, par exemple, doit savoir bien déclamer. (Hilarité générale
partagée par l'orateur.)
M. de Brouckere. - Mais c'est pour le chant.
M. Dumortier. - Eh bien, il est constant que
la déclamation est encore un chose inutile pour
chanter ; celui qui chante ne déclame pas, il chante, il est inutile qu'il
apprenne à déclamer.
M. de Brouckere. - Messieurs, je vous l'avoue, la plaisanterie de l'honorable Dumortier
n'est pas mauvaise ; un chanteur ne doit pas savoir déclamer ; mais à coup sûr
ce n'est pas dans ce que j'ai dit que l'honorable membre a puisé la nécessité
de faire valoir cette plaisanterie.
J’ai dit, et je répète, que tous les élèves qui se
destinent à l'étude approfondie du chant, doivent avoir suivi un cours de
déclamation. Si l'honorable M. Dumortier, veut que j'ajoute une nouvelle
considération, je lui dirai que cela est plus nécessaire en Belgique qu'à Paris
; car en Belgique, on n'a pas en général la prononciation très pure. Il est
bien plus nécessaire qu'on donne des leçons de prononciation et de déclamation
à des élèves venant de localités où l'on parle le flamand, que cela n'est
nécessaire à Paris. Je me bornerai à cette seule réflexion.
- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre
de 35,000 fr., demandé par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.
Littera C
« Litt C.
Conservatoire de musique de Liége : fr. 12,000. »
- Adopté.
M. le président. - Nous passons aux littera D et E.
« D. Académie royale des beaux-arts d'Anvers,
subside annuel : fr. 25,000. »
« Subside pour l'agrandissement des locaux
(2/5) : fr. 6,000
« E. Académies et écoles des beaux-arts autres
que l'académie d'Anvers : fr. 25,000. »
« Total : fr. 56,000. »
Il y a sur ces deux articles une augmentation de
19,000 fr. ; la section centrale propose de réduire de 16,600 fr. le crédit ordinaire
porté pour l'académie d'Anvers, et d'augmenter de 3,500 fr. le subside proposé
au litt. E, etc., de sorte que les crédits portés sous les deux littera
seraient respectivement de :
Litt. D, fr. 14,400
Litt. E, fr. 28,000
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Si je m'empresse de prendre la
parole, c'est pour faire quelques observations tendant à bien poser la
question. La section centrale n'a pas contesté la justice et l'utilité du
subside, mais il lui a paru que l'engagement avait été pris irrégulièrement et
que d'un autre côté une loi spéciale était nécessaire. C'est sur ce dernier
point que je vais un moment arrêter l'attention de la chambre.
Une loi spéciale est-elle nécessaire comme le pense
la section centrale pour porter le subside de l'académie d'Anvers à 25 mille
francs ? Oui, si vous voulez faire de ce subside une obligation permanente de
l'Etat, lier indéfiniment l'avenir. Mais si vous n'entendez voter le subside
que pour l'année qui va s'ouvrir, sauf à renouveler chaque année la discussion,
si vous jugez convenable de remettre chaque année le subside en question, vous
n'avez pas besoin de loi spéciale, la loi du budget suffit. Voilà donc la
distinction que je crois devoir faire. La section centrale a raison en disant
qu'il faut une loi spéciale, si elle suppose que le gouvernement demande le
subside comme une obligation tellement indéfinie qu'on ne puisse plus, à
l'occasion du budget, renouveler la discussion. Mais ce n'est pas dans un sens
aussi absolu, aussi indéfini que le subside est demandé. Le gouvernement a
confiance dans les chambres, et la ville d'Anvers compte sur la bienveillance
des chambres ; nous nous contentons du vote au budget sauf à courir toutes les
chances de la discussion annuelle, c'est-à-dire que l'académie d'Anvers se
trouvera dans la même position que beaucoup d'autres établissements qui ne sont
pas fondés par une loi. Si malheureusement dans les développements du budget,
il se trouve un mot qui donnerait une plus grande portée au vote que nous vous
demandons, je consens à le retrancher.
Le développement porte Académie royale des
beaux-arts d’Anvers, Subside annuel.
Mettons au lieu de cela : Subside pour l'année
1842.
Si la ville d'Anvers veut avoir une plus grande
garantie, si elle veut avoir la garantie d'une loi spéciale, engageant
indéfiniment l'Etat, nous discuterons cette loi, si elle est présentée. Pour le
moment nous nous contentons des subsides accordés comme
vous en accordez à d'autres établissements non constitués par des lois
spéciales.
M. Cogels. - Vous n’ignorez pas, messieurs, que la 6° section m'a nommé son
rapporteur pour le budget de l'intérieur et pour celui des finances. Les
sections centrales de ces budgets étaient présidées, la première par
l’honorable M. de Behr, la seconde par l'honorable M. Dubus.
Ceci vous fera comprendre comment l'examen des deux
budgets a dû se faire, en, partie, simultanément, et l'obligation où je me suis
trouvé, de me rendre là où ma présence était jugée la plus utile.
L'examen du chapitre dont nous allons nous occuper a
eu lieu, si je ne me trompe, au moment où la section centrale du budget des
finances arrêtait définitivement son rapport. C'est ce qui m'a empêché
d'assister aux discussions auxquelles cet examen a donné lieu.
A la lecture du rapport que vous avez sous les yeux,
je demandai quelques explications à mes honorables collègues, et ce ne fut
qu'après avoir acquis la certitude que, loin de vouloir refuser définitivement
l'allocation demandée pour notre académie des beaux-arts, on voulait en
assurer le service annuel par une loi, ce ne fut, dis-je qu'après avoir acquis
cette certitude que je me ralliai à 1'opinion de l'unanimité des membres
présents lors de la discussion.
Cette opinion, messieurs, a été fort mal interprétée
dans le public, et par quelques journaux. Comme il n'arrive que trop souvent,
on a jugé avant d'entendre, et ici encore l'esprit de parti n'a pas été sans quelqu'influence.
Il eût suffi cependant d'une simple réflexion pour
saisir du premier coup d'œil le véritable esprit qui avait dirigé la section
centrale.
Pouvait-on croire en effet que moi, député d’Anvers,
j’aurais donné ma voix à la suppression définitive d’un modique subside de
25,000 qui paraît indispensable pour rendre tout son éclat à une institution
qui, depuis plusieurs siècles, a fait la gloire de ma ville natale, de tout le
pays ; qui lui a fourni, et lui fournit encore ses plus belles illustrations ?
Oui, messieurs, c'est cette célèbre école flamande qui forme le plus beau fleuron
de notre couronne. Et l'on a pu croire que la section centrale eût l'intention
de se refuser, à en soutenir l'éclat par un faible sacrifice de 25,000 fr. !
Taudis qu'elle venait d'accorder à Bruxelles :
24,000 fr. pour sa société d'horticulture.
40,000 pour son musée de l'industrie.
25,000 pour son athénée.
30,000 pour son académie des sciences.
60,000 pour la bibliothèque royale.
35,000 pour son conservatoire de musique.
35,000 pour son école de gravure.
Tandis que Gand et Liége obtenaient plus de 600,000
fr. pour leurs universités ;
Que Namur et Tournai en obtenaient près de 40,000
pour leurs deux athénées !
Non, messieurs, la section centrale n'a pas été
guidée en cette circonstance par un étroit esprit d'économie ; elle n'a été
guidée que par des considérations purement législatives, et qui ont été fort
mal appréciées au dehors par des hommes qui n'ont pas voulu se donner la peine
d'étudier le véritable état de la question.
Ce qui avait frappé surtout la section centrale,
c'était la trop grande élasticité donnée par le ministre précédent au crédit
qui lui avait été ouvert pour encouragements et achats ; c'était l'emploi mal
calculé d'une grande partie de ce crédit.
Qu'il me soit permis de dire encore quelques mots
sur cette question déjà longuement discutée. Vous aurez pu remarquer, en effet,
messieurs, que les dépenses déjà faites dès les deux premiers mois de cette
année, et avant que le budget ne fût voté, ont excédé de beaucoup le crédit que
la chambre a alloué définitivement, et qu’à moins d’accorder un crédit
supplémentaire d'une somme au moins égale pour l'exercice de 1841, vous
mettriez le ministre actuel dans la dure nécessité de fermer complètement sa
porte aux artistes, de refuser toute espèce d'encouragement nouveau dans le
cours de l'exercice de 1842. Si l'on donnait à un ministre le pouvoir d’engager
l'avenir, de contracter des obligations à terme en dehors des bornes qui lui
sont prescrites, l'intervention de la législature deviendrait complètement
inutile, nos votes seraient une vraie lettre morte.
Loin de moi, messieurs, de vouloir inculper ici les
intentions de l'honorable M. Rogier. Je connais toute sa sollicitude pour les
beaux-arts, je sais tout ce qu'il a fait pour notre Académie ; sans être son
ami politique, je suis prêt à lui rendre justice là où elle lui appartient ;
mais l'honorable député d'Anvers reconnaîtra avec moi qu’en cette circonstance
l'amour des beaux-arts l'a emporté sur les règles d'une sage administration.
Maintenant, d'après les explications que vient de
donner M. le ministre, je ne doute pas que mes honorables collègues de la
section centrale ne s'empressent de voter le subside demandé par le
gouvernement. J'ai comme lui toute confiance dans la bienveillance, je dirai
plus, dans l'équité de la chambre pour les exercices subséquents. Je suis
convaincu qu'à moins de circonstances tout-à-fait désastreuses, elle ne
refusera pas à l'institution qui a répandu le plus de lustre sur le pays un
faible subside de 25,000 fr., tandis que des établissements fort
utiles sans doute, mais bien moins célèbres, participent si largement dans les crédits votés annuellement.
M. de Brouckere. - Si le discours de l'honorable préopinant n’avait pas été pas été écrit,
il se serait sans doute abstenu de prononcer la dernière partie, car nous
avions eu une discussion à propos du littera A sur les prétendus abus dont il
vient de parler et il a été dit que cette discussion serait complétée quand M.
le ministre de l'intérieur présenterait la demande de crédits supplémentaires.
Il eût été convenable, de la part de l’honorable
préopinant, de s’abstenir de ne pas recommencer une discussion qui déjà une
fois avait eu lieu et qui recommencera en janvier. Cette discussion a été
ajournée et le ministre de l’intérieur a voulu qu’aucune prévention ne s’élevât
sur le fond même de la question. J’aurais désiré que tous les orateurs
imitassent la discrétion du ministre de l’intérieur.
Maintenant après ce qui a été dit par le ministre et
par M. Cogels, qui faisait partie de la section centrale,,
j’ai lieu de croire que le chiffre pétitionné pour l’académie d’Anvers ne sera
plus contesté. En effet, les observations faites par la section centrale
avaient particulièrement pour objet la comptabilité ; c'est-à-dire qu'elle se
basait particulièrement sur ce point que le ministre paraissait avoir engagé
l'Etat à tout jamais et que la section centrale estime que le ministre n'aurait
dû s'engager que pour un an.
Il a été répondu par le ministre de l'intérieur et
par M. Cogels lui-même, je vous prie de le remarquer, que l'augmentation dont a
joui l'académie d'Anvers jusqu’à présent est le résultat d’un arrêté date du 9
août 1840. Une session toute entière a eu lieu depuis l'apparition de cet
arrêté, qui a été publié et était à la connaissance de tout le monde. Il n'a
été l'objet d'aucune critique. Pourquoi ? parce qu’on
sentait très bien que l’organisation de 1817 ne pouvait plus suffire. En effet,
l’académie d’Anvers, telle qu'elle existait, a été organisée en 1817, en vertu
d'un arrêté du roi Guillaume. Pourquoi cet arrêté du 9 août 1840 n'a-t-il pas
été critiqué ? Parce que tout le monde savait que cette académie présentait
dans l'enseignement des lacunes qu'il était urgent de combler. Eh bien, quoique
cet arrêté daté d'août 1840, il n'a reçu d'exécution qu'il y a fort peu de
jours. C'est jeudi dernier, jour anniversaire de la naissance du Roi, que
l’académie a été inaugurée. C'est pendant la cérémonie de l’inauguration qu'est
arrivée à Anvers la nouvelle que la section centrale proposait de réduire le
crédit demandé par le gouvernement eu faveur de l’académie. Je ne vous dirai
pas l'impression fâcheuse qu'a produite cette nouvelle. On le conçoit
facilement. Je puis assurer que cela a donné des craintes sérieuses à toute la
population d'Anvers.
Un membre. - Oh ! oh !
M. de Brouckere. - Des oh ! oh ! ne
prouvent rien ; je dis, et je défie que l'on me démentisse, que cette nouvelle
a donné des craintes sérieuses a toute la population d'Anvers.
Je ferai remarquer que tandis que les villes de Gand
et de Liége possèdent chacune une cour d'appel et une université, l’une une
école du génie civil, l'autre une école des mines, la ville d’Anvers ne possède
aucun grand établissement, excepté son académie. Croiriez-vous que la province
d'Anvers ne possède pas un seul collège
subsidié par l'Etat ? Croiriez-vous plus encore ? qu'il
n'y a pas une province qui, proportion gardée, reçoive moins de subsides pour
ses écoles primaires ? Elle ne réclame point ; elle vous demande seulement
de subsidier son académie. Comment vous le demande-t-elle ? En faisant
elle-même d'immenses sacrifices. Je vais vous le démontrer. Quand on a dû bâtir
un palais de justice à Gand, il a été accordé un subside. De quelle somme ? De 300,000 fr. La ville d'Anvers a
reconstruit son musée et son académie ; elle a dépensé ainsi près de 400,000
fr. Quel subside a-t-elle reçu ? 30,000 fr. de 1'Etat ; 30,000 fr. de la
province, payables en cinq ans ; elle a supporté tous les autres frais qui, je
le répète, s'élèvent à 400,000 fr. L'Etat donnant un subside de 25,000 fr., la
ville a promis un subside de pareille somme
Je crois que d’après ces considérations on
reconnaîtra qu’il y aurait injustice à ne pas accorder à l’académie d’Anvers la
somme de 25,000 fr. qui lui a été donnée par arrêté royal. Voyez quelles
conséquences aurait ce refus d’allocation. Tous les professeurs sont nommés ;
ils sont installés ; ils sont entrés en fonctions. Plusieurs sont venus de
villes éloignées. Je citerai un nom connu de tous ceux qui s'intéressent aux
arts : M. de Jonghe a quitté Courtray pour
être professeur à l’académie d’Anvers avec un très modique traitement ; et
quand il n’y a que 50,000 fr. pour un établissement aussi vaste que celui
d’Anvers, il ne peut pas y avoir de très forts traitements. Le plus élevé est
de 4,000 fr.
Quant à la forme, on vous a dit : Mais le
gouvernement n’a pas le droit d'organiser un semblable établissement ; il n’a
pas le droit d’accorder un subside annuel. Sans vouloir approfondir cette
question qui nous conduirait peut-être très loin, permettez-moi de vous dire
que jamais on ne s'est montrer si pointilleux. Jamais
on n'est venu vous dire : Présentez-nous une loi pour l'organisation du
conservatoire de musique de Bruxelles, du conservatoire de musique de Liége, de
l'école de gravure de Bruxelles. Permettez-moi de vous lire les premiers
articles de l'arrêté royal pris le 25 juillet 1836, sur la proposition de M. de
Theux, arrêté non pas qui réorganise, mais qui institue une école-atelier de
gravure ; ils sont ainsi conçus : « Art.1er. Il est établi à Bruxelles une
école-atelier de gravure, sous la haute direction et la surveillance de notre
ministre de l'intérieur. Art. 2. Le ministre de l'intérieur nomme et révoque
les professeurs et fixe leurs traitements. Art. 3. Tout ce qui concerne le
matériel de l'école-atelier est confié, à forfait, à un administrateur. Art. 4.
Il y a près de l'école un commissaire du gouvernement sous le titre
d'inspecteur. L'inspecteur est chargé de l'exécution des règlements,
etc. » L'arrêté se compose de treize articles. Tous les ans vous votez
pour cet établissement une allocation de 20,000 fr., ce que je suis loin de
critiquer. Je veux seulement vous dire que ce qui a été fait pour l'académie
d'Anvers a été fait en maintes occasions, en faveur de maintes autres villes,
sans qu'il y ait eu la moindre réclamation. On a créé des conservatoires de
musique ; on a créé une école de gravure. Chaque année, on propose pour ces
établissements un crédit au budget ; chaque année, nous le votons. Il en sera
de même pour l'académie d'Anvers, avec la différence, je vous prie de le
remarquer, qu'il ne s'agit pas d'un établissement nouveau, mais d'un
établissement ancien, qui compte quatre siècles d'existence, qui a été réorganisé
comme il devait l'être, comme les besoins de l'enseignement le réclamaient
impérieusement, quoiqu'une extrême économie, je puis le dire, ait présidé à
cette réorganisation.
Je bornerai là mes observations, et je le répète,
elles me paraissent tellement péremptoires que je ne concevrais pas que la
demande faite par le ministre pour l'académie d'Anvers pût être contestée.
Il reste entendu que le subside
que vous allouerez ne liera pas plus la législature pour l'avenir que ceux que
vous allouez pour les conservatoires de musique et pour l'école de gravure.
M. Dedecker, rapporteur. - Je regrette sincèrement que la section centrale ait fort innocemment
troublé la joie unanime causée à la ville d'Anvers par la réorganisation de son
académie des beaux-arts. La faute n'en est pas à la section centrale, mais à
ceux qui, par des motifs que je n'examinerai pas, ont dénaturé la portée et le
caractère de sa décision. Vous avez pu remarquer que la section centrale ne
s'est pas prononcée sur le fond du subside. Je dirai plus, elle est pleine de
sympathie pour un établissement qui a rendu des services au pays et pour l'art
dont il est destiné à rehausser l'éclat en Belgique. C'est l'académie d'Anvers,
surtout depuis sa réorganisation par M. Van Brée, qui
a produit ces artistes qui font la gloire de la nouvelle école flamande. Chacun
de nous connaît ces circonstances. Ainsi donc, la question n'est pas là.
Voici quelle a été la position de la section
centrale ; elle a constaté que M. Rogier, par son arrêté du 29 août 1840,avait triplé le subside dont jouissait l'académie d'Anvers,
puisqu'il l'avait porté de 8,400 fr. à 25,000 fr. Elle a considéré comme un
précédent dangereux une telle augmentation de subside faite sans l'aveu de la
législature. Maintenant que l'honorable M. de Theux ait aussi, par arrêté, créé
l'école de gravure, c'est fort possible ; la section centrale n'a voulu ni
récriminer ni faire l'apologie, de tel ou tel ministre ; l'intérêt du trésor et
du pays a été le seul mobile de toutes ses décisions.
L'honorable ministre de l'intérieur a parfaitement
compris les intentions de la section centrale, et je l'en remercie ; cependant
il a établi une distinction qu'il serait dangereux d'admettre. M. le ministre
vous a dit : Si vous voulez prendre un engagement permanent et sans terme, il
faut un projet de loi spécial ; mais si vous ne voulez voter le subside que
pour un an, alors un simple article de budget suffit. Cet article du budget ne
lie pas la chambre, qui a chaque année le droit de le réduire. En droit strict,
une telle distinction peut se justifier ; mais il faut avouer, qu'en fait un
chiffre annuel porté au budget n'en sera pas moins permanent ; car après la
réorganisation complète de l'académie d'Anvers, il sera de toute impossibilité
aux législatures futures de revenir sur
la décision que vous aurez prise.
Une autre considération a encore frappé votre
section centrale, c'est que, pour doter l'établissement d'Anvers, on a distrait
du chiffre destiné à subsidier les autres établissements du pays une somme de
3,590 fr. Votre section centrale a pensé que, tout en favorisant d'une manière
légale l'institution d'Anvers, il ne convenait pas de la favoriser aux dépens
d'autres institutions, également recommandables sous tous les rapports.
Je pense que ces explications suffiront pour faire
voir clairement à la chambre et au pays (puisqu'on a parlé de la presse et de
toute une population en émoi) que les intentions de la section centrale ont été
pures, qu'elle a voulu seulement introduire plus de régularité dans
l'administration, sans s'occuper de ce qui a été fait par les ministres
antérieurs, et sans critiquer au fond l'emploi du subside porté au budget par
M. Rogier, dans l'intérêt d'un établissement avec lequel nous
sympathisons tous.
M. Eloy de Burdinne. - L'honorable M. de Brouckere vous a dit que lorsqu'on était occupé à
fêter à Anvers l'anniversaire du Roi, on avait appris que la section centrale
avait en quelque sorte ajourné le crédit pour
l'académie d'Anvers, et que toute la population en avait été en émoi.
M. de Brouckere. - Je le répète encore.
M. Eloy de Burdinne. - Sur cette remarque, c'est moi qui ai proféré les mots oh ! oh ! (On rit.)
Sans doute, j'ai pu m'en étonner ; car il n'y a que des académiciens qui fêtent
l'inauguration d'une académie ; or je ne savais pas que la ville d'Anvers fût
peuplée d'académiciens. (Hilarité
générale.)
Je passe au second point traité par l'honorable M.
de Brouckere ; il a dit qu'on faisait des sacrifices pour Bruxelles et autres
villes et qu'on ne faisait rien pour Anvers.
Vraiment, cette pauvre ville d'Anvers est bien à
plaindre. Comment, on ne fait rien pour Anvers ? Mais n'a-t-on pas voté et ne
vote-t-on pas tous les ans 650,000 fr. pour le péage sur l'Escaut ? Et pour qui
le fait-on, s'il vous plait ? C'est bien pour la pauvre ville d'Anvers, la
malheureuse ville d'Anvers.
Plusieurs membres. - C'est pour le pays.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, les sommes que la chambre a votées pour
favoriser la navigation même transatlantique, je crois qu'Anvers en aura sa
bonne part.
Il y a bien autre chose, messieurs. En faveur des
pauvres raffineurs de sucre d'Amers, l'Etat fait un sacrifice de 2 à 3 millions
pour le moins.
Je pourrais vous citer, messieurs, bien d'autres
sacrifices faits en faveur de la ville d'Anvers, mais je crois que ceci suffit
pour vous prouver que la ville d'Anvers a des défenseurs dans cette enceinte et
que nous sommes portés à faire de grands sacrifices pour
elle.
M. Rogier. - Messieurs, j'ai déjà eu l'honneur de défendre la ville d'Anvers contre
plusieurs des imputations qui viennent d'être reproduites par l'honorable M.
Eloy de Burdinne.
Il vient cependant d'articuler un nouveau grief ;
c'est que le pays ferait pour elle le sacrifice du remboursement du péage sur
l'Escaut. Jusqu'ici, messieurs, je ne sache pas qu'un centime du remboursement
du péage sur l'Escaut soit entré dans les caisses de la ville d'Anvers. J'ai
toujours pensé que l'Escaut n'était pas un fleuve appartenant à la ville
d'Anvers, mais un fleuve appartenant au pays tout entier, et que si Anvers a le
tort aux yeux de l'honorable M. Eloy, d'être située sur ce fleuve, ce ne doit
pas être, aux yeux de la chambre, un grief pour cette ville.
Dans tous les cas la question du remboursement du
péage sur l'Escaut n'a aucune d'espèce de rapport direct ni indirect avec
l'académie des beaux-arts d'Anvers ; c'est donc à ce seul point de la
discussion que je m'arrêterai pour le moment, sauf à défendre de nouveau
Anvers, s'il y a lieu lorsque viendront la loi pour le remboursement du péage
sur l'Escaut et le rapport de la section centrale sur la navigation transatlantique.
Messieurs, j'ignore pourquoi la section centrale du
budget de 1842 s'est montrée plus difficile que la section centrale du budget
de
Il n'y a donc pas à prétexter ici cause d'ignorance.
L'arrêté était parfaitement connu de tous les membres de cette chambre, et
cependant l'année dernière aucune observation n'a été faite.
Cette année, il paraît qu'il y avait parti pris pour
critiquer tout ce qui avait été fait l'année précédente. Cet esprit de critique
ressort de plusieurs passages du rapport de la section centrale. Je sais fort
bien que dans la chambre on n'a pas insisté sur la défense des opinions et des
principes émis dans le rapport. J'aurais voulu une discussion sérieuse et
approfondie sur les allégations et les attaques indirectes contenues dans le
rapport ; mais l'occasion ne s'en est pas offerte.
Eh bien ! je dis que s'il y
avait eu lieu d'attaquer l'arrêté du 29 août 1840, on aurait dû le faire
l'année dernière. Or, mon adversaire politique, comme vient de se proclamer
l'honorable M. Cogels, n'a rien dit de ce chef. Dans la discussion du budget de
1841, il n'a rien dit de l'arrêté. Et cependant, l'allocation existait déjà ;
si on n'en a pas disposé, s'il n'y a pas eu d'imputation sur l'exercice 1841,
c'est que les arrangements à prendre avec la ville d'Anvers n'auront pu avoir
lieu à temps. Mais si ces arrangements avaient eu lieu au mois de janvier dernier,
par exemple, il n'y a pas de doute que l'allocation aurait dû être prise sur le
budget de 1841.
Messieurs, quant au droit d'augmenter, par arrêtés,
l'allocation pour l'académie royale des beaux-arts d'Anvers, je crois qu'on ne
pourrait pas le contester, sans se mettre en contradiction ouverte avec tous
les antécédents et avec les principes mêmes posés dans certaines parties du
rapport de la section centrale.
Ainsi, la section centrale loue le ministère qui
nous a précédés d'une allocation accordée à l'industrie cotonnière. Cette
allocation devait se reproduire sur plusieurs exercices et lier l'avenir.
Cependant la section centrale n'a que des éloges à donner à ce mode
d'imputation.
L'honorable M. de Theux a établi une école de
gravure, il n'a pas augmenté le subside d'une école de gravure existante, mais
il a créé une institution toute nouvelle. Aux budgets suivants, les sommes
nécessaires à cette école ont été allouées sans observation aucune.
Il y a plus, l'honorable ministre de l'intérieur a
créé, et je l'en félicite, une académie de médecine, institution toute
nouvelle, et qui doit donner lieu à des dépenses ; car toutes les améliorations
se résolvent toujours, en définitive, en dépenses. Eh bien, est-ce que la
section centrale a critiqué le mode suivi pour la création de cette institution
toute nouvelle ? Non ; la section centrale a approuvé cet. acte
en portant l'académie à l'article du service de santé. Mais, quant à la
nécessité, pour le ministère, de rester dans des règles sévères de comptabilité,
il n'en est pas dit un mot.
Quand, au contraire, il s'est agi de l'académie
d'Anvers, d'un acte remontant au ministère précédent, on montre la plus grande
rigueur, rigueur à laquelle l'honorable M. Cogels a dû s'associer en sa
qualité d'adversaire politique.
M. Cogels. - Je demande la parole pour un fait personnel.
M. Dedecker. - Je la demande aussi.
M. Rogier. - Messieurs, on dit que l'on a pour l'académie d'Anvers la plus grande
sollicitude ; une sollicitude telle que l'on veut lui garantir le subside, non
en vertu d'un arrêté royal plus ou moins susceptible de révocation, mais en
vertu d'une loi.
Il faudra une loi pour augmenter le subside de
l'académie des beaux-arts d'Anvers.
Ainsi, pour augmenter le subside de l'académie
royale de Bruxelles, pour augmenter le subside du conservatoire, de la
bibliothèque, de l'école de gravure et tous les subsides du monde, il ne faut
pas de loi, et cependant on porte aussi à ces divers établissements une grande
sollicitude. Mais pour l'académie royale des beaux-arts d'Anvers, c'est bien
autre chose ; le zèle est si grand, la sollicitude tellement particulière, que
défense est faite d'augmenter le subside qu'on lui accorde, sans une loi.
Eh bien ! je le demande,
n'y a-t-il pas des intentions hostiles dans cette manière d'envisager les
choses ? Et puis-je donner un autre sens à l'opinion de la section centrale.
Je soutiens en définitive que l'arrêté royal a été
pris dans toutes les limites constitutionnelles, conformément aux antécédents,
à des exemples donnés et par mes prédécesseurs et par mes successeurs. Je
soutiens qu'il ne fallait pas une loi pour augmenter ce subside ou que, s'il
fallait une loi, il en fallait également une pour toutes les allocations de
même nature destinées à des établissements de même genre.
L'allocation, messieurs, n'étant pas contestée au
fond, chacun reconnaissant que pour un établissement de l'importance de
l'académie des beaux-arts d'Anvers, un subside annuel de 25,000 fr. n’a rien
d'exagéré, je n'ai rien à ajouter pour le défendre.
M. de Theux. -
C'est bien à tort, messieurs, que mon nom a été cité dans cette discussion. Ce
qui s'est passé à l'égard de la création d'une école de gravure n'a rien de
commun ni avec la création d'une académie de médecine, ni avec la
réorganisation de l'académie d'Anvers. Peu de mots suffiront pour le prouver.
M. de Brouckere. - On ne vous fait pas un grief de cette création. Quant à moi, je vous en
félicite.
M. de Theux. - Je
veux rétablir les faits.
Je dis donc, messieurs, qu'il n’y a absolument
aucune argumentation à tirer des faits que j'ai posés, et en voici les motifs.
L'école de gravure n'a été créée par arrêté royal
qu'après l'allocation du subside par les deux chambres. Le fait est exact ; on
peut le constater. Il était entendu dans les deux chambres que l'école de
gravure serait organisée par le gouvernement ; le subside avait été voté dans
cette intention.
Je dis donc qu'on ne peut pas argumenter de ce
précédent, qui n'a rien de commun avec les actes posés.
Je n'entends pas prendre part à la discussion relativement
à l'arrêté sur la réorganisation de l'académie d'Anvers. Je dirai seulement
qu'en règle générale et pour conserver toutes les convenances, lorsque l'on veut créer un établissement qui entraîne de la dépense, il est
nécessaire de saisir, au préalable, la législature d'une demande de fonds, soit
au budget, soit dans un projet de loi spécial.
M. Cogels. - Je ne me suis point posé comme l'adversaire politique de M. Rogier. J'ai dit que
sans être l'ami politique de l'honorable M. Rogier, je savais lui rendre
justice là où elle lui appartenait. Il y a là une grande différence. Je
déclare, du reste, que dans le vote que j'ai émis à la section centrale, je
n'ai été guidé par aucun motif politique, par aucun esprit d'hostilité personnelle
à l'honorable député d'Anvers. J'ai cru mieux assurer le subside réclamé par
notre académie des beaux-arts ; en rendre le vote annuel obligatoire. Si je me
suis trompé sur les conséquences de mon vote, ce qui ne m'est nullement
démontré, je ne puis faire qu'une chose ; demander pardon
de mon inexpérience.
M. Dedecker, rapporteur. - Messieurs, quand nous avons commencé la discussion des articles. j'ai demandé la parole pour donner quelques explications sur
les intentions de la section centrale, qui avaient été attaquées dans une
séance précédente par l'honorable M. Rogier. Alors l'honorable M. Lebeau m'a
interrompu pour me dire que personne n'avait attaqué les intentions de la
section centrale.
Cette fois on a fait des insinuations plus directes,
plus personnelles ; ou plutôt elles ne sont pas personnelles, car l'honorable
M. Rogier n'a attaqué que le rapport, dont toutes les pages révèlent une pensée
hostile à lui. Messieurs, le rapport de la section centrale, je l'ai rédigé,
mais il a été lu devant tous les membres de la section centrale ; il est donc
l'œuvre de toute la section centrale, et par conséquent les reproches de
l'honorable M. Rogier s'adressent non pas seulement à moi, mais ils s'adressent
aussi à tous mes estimables collègues de la section centrale, Je dois donc, en
leur nom et en mon nom, protester de toutes mes forces contre les insinuations
de cet honorable membre. Je le répète, nous n'ayons entendu jeter du blâme sur
qui que ce soit.
Voyez, messieurs, comme M. Rogier est inconséquent,
dans ses accusations ? Dans la séance de vendredi dernier, mon honorable
adversaire a vu dans le refus fait par la section centrale d'allouer les
100,000 fr. demandés pour encourager la navigation entre
M. de Theux. - On
a voulu me faire une part dans les critiques de la section centrale ; comme je
n'ai lu dans le rapport de cette section aucun fait qui me concernât, vous me
permettrez, messieurs, de ne pas accepter la part qu'on
veut me faire dans les critiques dont il s'agit. (La clôture ! La clôture !)
M. Desmet. - Je désire éclaircir un seul point. Si nous donnons à l'académie
d'Anvers le subside de 25,000 fr. qui est demandé, nous enlevons aux autres
académies 3,500 fr… (La clôture ! La
clôture !)
M. Dechamps. - Je demande à pouvoir dire deux mots... (Aux voix ! Aux voix !)
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je renouvellerai une
observation que j'ai déjà faite plusieurs fois ; c'est que j'espère trouver sur
l'ensemble des divers littera dont se compose l'article la somme de 3,500 fr. dont il s'agit. Cela pour cette année
seulement.
M. de Brouckere. - Messieurs, je n'ai pas l'habitude de m'opposer à la clôture ; j'ai
toujours été des premiers à désirer que les discussions ne se prolongent pas
outre mesure ; je serais encore disposé à renoncer à la parole, mais on a
avancé ici des faits qui sont tellement éloignés de la vérité, qu'il serait
très fâcheux qu'on ne pût pas y répondre. Ainsi, par exemple, quand
l'honorable M. de Burdinne a parlé de la prospérité des raffineries d'Anvers,
il était à cent lieues de la vérité.
M. Dumortier. - S'il ne s'agit que de clore
la discussion sur le crédit demandé pour l'académie d'Anvers, je ne m'y
opposerai pas ; mais je demande qu'on ne close pas la discussion sur les autres
parties de l'article.
Plusieurs membres. - Il ne s'agit que du littera
D.
M. Eloy de Burdinne. - L'honorable M. de Brouckere paraît avoir d'excellentes choses à dire.
Je désire qu'on l'entende et que je puisse lui répondre.
- La discussion est close.
Le litt. D est mis aux voix et adopté avec le
chiffre de 31,000 fr.
« Litt. E. Académies et écoles des beaux-arts,
autres que l'académie d'Anvers, 25,000. »
La section centrale propose le chiffre de 28,500 fr.
M. Dedecker, rapporteur. - Je dois faire remarquer à la chambre que la section centrale ne propose
pas ici une majoration ; le chiffre de 28,500 fr. est celui des années
précédentes, dont le gouvernement avait distrait 3,500 fr. pour l'académie
d'Anvers.
M. Dumortier. - Messieurs, je ne me suis pas
opposé à la majoration demandée pour l'académie des beaux-arts d'Anvers ; je
suis convaincu que les fonds destinés aux beaux-arts sont les fonds les mieux
employés du budget, car les beaux-arts sont une des plus belles gloires de
M. Dechamps. -Messieurs, il est une observation que je voulais faire tout a l'heure, lorsqu'il s'agissait de l'Académie d'Anvers, et
qui trouve ici parfaitement sa place. J'ai été loin de m'opposer à l'adoption
du chiffre demandé pour l'académie d'Anvers. Je n'ai que des éloges à adresser
au ministre qui a réorganisé cette académie ; mais, messieurs, cette
observation, je ne la fais que sous une réserve, c'est que la réorganisation de
l'académie d'Anvers ne puisse pas nuire à la réorganisation de l'académie
royale de la capitale.
Messieurs, je crains une chose, c'est qu'on ne
veuille faire d'Anvers la seule métropole artistique du royaume, et je crois
que ce serait là entrer dans une mauvaise voie. En fait d'art, messieurs, je
suis partisan de la centralisation ; si la centralisation est utile quelque part,
je pense que c'est surtout dans les beaux-arts.
Messieurs, les autres villes du royaume, par exemple
Tournay, dont vient de parler l’honorable M. Dumortier, Liége, Gand, ont aussi
des droits à faire valoir ; je craindrais qu'on en vînt à éparpiller ainsi les
artistes dans toutes les villes du pays, au lieu de les réunir dans la
capitale, ce qui vaudrait infiniment mieux.
Je pense que
la capitale possède les éléments nécessaires pour réorganiser son académie sur
un pied semblable à celui sur lequel on vient de réorganiser l'académie
d'Anvers. C'est sous cette réserve que j'ai adopté le crédit destiné à cette
dernière. J'engage le gouvernement à méditer ce point et à faire en sorte que
la capitale ne se trouve pas, sous le rapport des beaux-arts, dans une position
complètement secondaire.
M. le président. - Il paraît que la majoration proposée par la section centrale sur le
crédit en discussion, était subordonnée à l'adoption de sa proposition,
relativement au crédit demandé pour l'académie d'Anvers. Ce crédit ayant été
adopté, la section centrale renonce probablement à la majoration qu'elle
proposait sur le littera qui nous occupe en ce moment.
M. Dedecker,
rapporteur. - Oui, M. le président, si, comme il
l'a déclaré tout-à-l'heure, M. le ministre parvient à trouver ces 3,500 fr. sur
l'ensemble de l'article.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - C'est ainsi, messieurs, que je
l'entends.
L’intention du gouvernement est de s'occuper de la
réorganisation, du complément à donner à l'académie de Bruxelles. Des
ouvertures ont été faites à cet égard à l'administration communale de la
capitale.
Quant à la demande qui a été faite pour l'académie
de Tournay, cette demande est en instruction ; et j'ignore encore quel en sera
le résultat. Cependant, pour y faire droit en 1842, il faudrait que le gouvernement parvînt à faire une économie sur d'autres lettres de cet
article, qui offre à la vérité quelque latitude.
M. Dolez. - Messieurs, il doit exister de la part de l'administration communale de
Mons une réclamation analogue à celle qui a été faite par la ville de Tournay.
Je comprends comme l'honorable M. Dechamps qu'il
importe autant que possible d'établir la centralisation dans les arts ; je
crois que c'est là le seul moyen de produire de grandes choses.
Mais à côté des écoles supérieures il importe aussi
qu'il y ait des académies plus modestes où les jeunes gens puissent recevoir
les premiers principes. Ces établissements plus modestes, que désirent posséder
plusieurs de nos villes, n'en sont pas moins d'une grande
utilité. Je recommande cet objet à l'attention du gouvernement.
M. de
Garcia. - Je ferai la même observation pour la ville de
Namur, qui doit également avoir adressé une réclamation au gouvernement pour
obtenir un subside.
M. de Terbecq. - Je demande la même faveur pour la ville de Termonde.
M. Eloy de Burdinne. - Et moi, je demande un subside pour une académie d'agronomie à Waremme.
(On rit.)
- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre
est mis aux voix et adopté.
Littera F
« Litt. F. - Pensions instituées en faveur des
lauréats, par arrêté royal du 13 avril 1817 : fr. 5,000. »
- Adopté.
« Litt. G. – Ecole de gravure de Bruxelles :
fr. 20,000. »
M. Rogier. - Messieurs. l'honorable M. de Theux a dit tout
à l'heure qu'avant d'instituer l'école de gravure de Bruxelles, il en avait
fait la proposition dans le budget. Je viens de compulser les projets de
budgets de 1835 et 1836 ; ni dans l'un ni dans l'autre de ces projets, il n'est
question de l'école de gravure.
M. de Theux. -
C'est lors de la discussion même du budget que la demande a été faite et
accordée.
- Le chiffre est mis aux voix et adopté.
Littera H
« Litt. H. - Musée d'armes, d'armures et
d'antiquités : fr. 10,000. «
- Adopté.
Article 3
Art. 3. Exposition triennale des beaux-arts à
Bruxelles : fr. 20,000. »
- Adopté.
« Art. 4. Monument de la place des Martyrs :
fr. 12,000 fr. »
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, la section centrale dit qu'elle
n'alloue ce chiffre qu'à la condition que ce soit décidément le dernier. Je
n'ai pas eu connaissance de cette réserve, et je dois déclarer qu'il m'est
impossible de l'accepter. Il faudra encore porter un crédit de ce chef au
budget de 1843 et à celui de 1844.
Mon honorable prédécesseur, par une convention en
date du 10 avril
J'ajouterai que mon honorable
prédécesseur, lors de la discussion du budget de 1841, avait annoncé
l'intention où il était de faire exécuter ces bas-reliefs.
M. Rogier. - Messieurs, mes souvenirs ne sont pas assez présents sur cette affaire,
pour pouvoir dire que M. le ministre de l'intérieur a mal expliqué la
convention qui a été passée avec l'artiste chargé de l'exécution du monument ;
cependant, si je ne me trompe, un dernier crédit de 12,000 fr. devait figurer
au budget de 1842 : cette somme devait suffire ; du moins, mes souvenirs me
tromperaient complètement, s'il n'en était pas ainsi. Ce serait donc un point à
examiner, et pour ma part je n'accepte qu'avec des réserves l'observation du
ministre.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je n'y attache pas d'autre
importance ; c'est un fait que je constate ; cet article figurera encore aux
budgets futurs. C'est la seule observation que j'aie à faire.
- Personne ne demandant plus la parole, le chiffre
de 12,000 fr est mis aux voix et adopté.
« Art. 5. Monuments à élever aux grands hommes
de
La section centrale propose l'ajournement de ce
crédit.
M. le président. - Personne ne demandant la parole, je vais mettre l'article aux voix.
M. Rogier. - Est-ce que M. le ministre n'a rien à dire pour défendre sa proposition
?
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je demande la parole.
Messieurs, je crois devoir persister dans la
demande. Que dire en faveur de cette proposition ? N'est-ce pas une chose
comprise, sentie par nous tous ?
Les provinces ont déjà pris en quelque sorte
l'initiative vis-à-vis de l'Etat. Des sociétés en ont fait autant. Le conseil
provincial de
A Bruxelles, l'on a ouvert une souscription qui
s'étendra probablement au pays tout entier pour ériger une statue à Vésale. La
ville de Bruxelles et la province prêteront probablement leur concours à la
société ; on sollicite également celui de l'Etat.
Si le gouvernement n'obtient pas la somme demandée,
il est probable, plus que probable que tous les efforts faits par les
particuliers, par les villes et par les provinces, seront perdus.
Messieurs,
Il faut que
Je crois, messieurs, que c'est remplir. en quelque sorte un devoir envers les hommes qui ont honoré
notre pays, c'est donner satisfaction à un sentiment bien légitime de
nationalité, que de mettre le gouvernement à même de
prêter son concours aux provinces, aux villes, aux sociétés qui ont pris
l'initiative vis-à-vis de lui.
M. de Theux. -
Messieurs, le projet d'ériger des monuments aux hommes qui ont illustré
M. Cools. - L'ajournement est le rejet du chiffre ; c'est donc le chiffre qu'il
faut mettre au voix. (C'est juste !)
M. le président. Je mets aux voix le chiffre.
- Une double épreuve par assis et levé est douteuse.
Deux épreuves étant douteuses, il est procédé à
l'appel nominal.
67 membres répondent à l'appel.
38 disent oui.
29 disent non.
En conséquence l'article est adopté.
Ont répondu oui : MM. Cogels, Coghen, Cools,
Coppieters, Dechamps, Dedecker, de Muelenaere, de Renesse, de Sécus,
Desmaisières, Devaux, de Villegas, Dolez, Donny, B. Dubus, Dumortier, Duvivier,
Fleussu, Lebeau, Liedts, Lys, Maertens, Meeus, Mercier, Jonet, Nothomb, Pirmez,
Raymaeckers, Rogier, de Baillet, Sigart, Smits, Trentesaux, Troye, Van Cutsem,
Vandenhove, Van Volxem, Fallon.
Ont répondu non : MM. Brabant, de Behr, de
Florisone, de Garcia, Malou, De Man d'Attenrode, de Meer de Moorsel, de Nef,
Huveners, de Potter, Desmet, de Terbecq, de Theux, Doignon, Eloy de Burdinne, Hye-Hoys, Kervyn, Mast de Vries, Peeters, Henot, Raikem,
Scheyven, Simons, Thienpont, Osy, Vandenbossche, Vanderbelen, Wallaert et
Zoude.
Article 6
« Art. 6. Subsides aux villes et communes dont
les ressources sont insuffisantes pour la conservation des monuments, et
commission royale des monuments : fr. 36,000. »
- Adopté.
CHAPITRE XVIII
Article unique
« Art. unique.
Dépenses imprévues, 18,000 fr. au lieu de 20,000 francs, par suite du transfert
de 2,000 francs de cet article à l'article 4 du chap. 1er. »
- Adopté.
M. le président. - Deux amendements ont été adoptés : une réduction de trois mille francs
a été opérée à l'art. 2 du chapitre Ier, et l'art. 2
du chapitre XIV relatif aux 400 mille fr. destinés à la navigation
transatlantique a été ajourné.
M. le ministre persiste-t-il dans ses propositions ?
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je ne crois pas devoir
insister.
M. le président. – Dès lors il n'y a pas d'inconvénient à procéder séance tenante au vote
définitif du budget.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb)
- Le libellé de 1'article 1er du
chap. IV doit être changé ; on a omis de le faire dans le cours de la
discussion. Il porte : « Subsides aux communes, à titre
d'encouragement pour l'amélioration des chemins vicinaux. » Si on ne le
changeait pas, il lierait tellement le gouvernement qu'il ne pourrait accorder
de subsides sur ce crédit qu'aux communes, et n'en pourrait accorder aucun aux
provinces ou aux sociétés. Ce sont ces observations qui ont été faites par la
section centrale, et, d'accord avec le gouvernement, le libellé devait être
modifié comme suit : « Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie
vicinale. »
- Cette modification est adoptée.
Vote
sur les articles et sur l’ensemble du projet de loi
M. le président. L'art. 1er de la loi est ainsi conçu :
« Le budget du département de l'intérieur pour l'exercice
1842 est fixé, à la somme de 4,783,562 fr. 95 c.,
conformément au tableau annexé à la présente loi. »
- Adopté.
« Art. 2. La présente loi est obligatoire le
lendemain de sa promulgation. »
- Adopté.
Il est procédé à l'appel nominal sur l'ensemble de
la loi.
66 membres ont répondu à l'appel.
65 membres ont répondu oui.
1 membre, M. Eloy de Burdinne, a répondu non.
Le projet de loi est adopté ; il sera transmis au
sénat.
Ont répondu oui : MM. Cogels, Coghen, Cools,
Coppieters, de Behr, Dechamps, Dedecker, de Florisone, de Garcia de la Vega,
Malou, De Man d'Attenrode, de Meer de Moorsel, de Muelenaere, de Nef, Huveners,
de Potter, de Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux,
Devaux, de Villegas, Doignon, Dolez, Donny, B. Dubus, Dumortier, Duvivier,
Fleussu, Hye-Hoys, Kervyn, Lebeau, Liedts, Lys, Maertens, Mast de Vries, Meeus,
Mercier, Jonet, Nothomb, Pirmez, Henot, Raikem, Raymaeckers, Rodenbach, Rogier,
Scheyven, de Baillet, Sigart, Simons, Smits, Thienpont, Trentesaux, Troye, Osy,
Van Cutsem, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Van Volxem, Wallaert, Zoude
et Fallon.
FIXATION
DE L’ORDRE DU JOUR
M. le président. - Je prie la chambre de fixer le jour où elle se propose de se réunir de
nouveau.
- La chambre décide qu’elle s’ajourne au 11 janvier.
M. le président. - Vous ne pourrez avoir le rapport
supplémentaire sur le budget de la guerre pour le jour de la rentrée, car on ne
s’en occupera qu’alors. Qu’est-ce que la chambre veut mettre à l’ordre du jour
?
M. Rodenbach. - Dans ce cas, je demande qu’on veuille
s’occuper des pétitions qui, depuis longtemps, sont dans les cartons de la
chambre, ainsi que des demandes en naturalisation.
M. de Garcia. - Je propose de mettre à l’ordre du jour les
deux projets de loi d’interprétation, dont les rapports sont faits et qui sont
très urgents.
M. le président. - Ce sont les projets de loi relatifs à
l’interprétation de l’article 442 du commerce et à l’application du décret sur
les cantonnements. Ces deux projets sont urgents, car le pouvoir judiciaire se
trouve arrêté par leur défaut.
M. le ministre de la
justice (M. Van Volxem) - Je ne
peux pas me rallier au projet sur les cantonnements, présenté antérieurement.
J’ai soumis un rapport au Roi, pour présenter à la chambre un projet contraire
à celui dont elle est saisie.
M. le président. - Mais vous ne faites aucune objection
relativement au projet de loi relatif à l’interprétation de l’article 442 du
code de commerce.
M. le ministre de la
justice (M. Van Volxem) - Non,
M. le président.
M. le président. - En conséquence, l’ordre du jour du mardi 11
janvier est fixé comme suit :
Rapport des pétitions ;
naturalisations ; discussion du projet de loi interprétatif de l’article 442 du
code de commerce ; discussion du budget de la guerre.
- La séance est levée à 4
heures un quart.