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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du lundi 24 février 1840
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Présentation de projets de loi
3) Projet de loi sur les chemins vicinaux. Second vote sur les articles.
Plans généraux d’alignement et de délimitation (Lebeau, de Theux, Liedts, Desmet,
de Theux, Milcamps, d’Huart, Cools, de
Garcia, de Theux, de Garcia,
Milcamps, d’Huart), mesures
de publicité et possibilité de réclamation (de Theux, d’Huart, Lebeau, Desmet,
d’Huart, de Theux, Cools, Lebeau, Verhaegen,
Lebeau, de Theux, Verhaegen, Raikem, Verhaegen, de Theux, Raikem, d’Huart, de
Theux, Raikem, Liedts, Raikem, de Theux, F. de Mérode, de Garcia, Cools, de Theux)
(Moniteur belge
n°56 du 25 février 1840)
(Présidence de M.
de Behr)
M. Mast de Vries fait l’appel nominal à 2
heures.
M. B. Dubus lit le procès-verbal de la dernière séance ; la
rédaction en est adoptée.
M. Mast de Vries présente l’analyse des
pièces adressées à la chambre :
PIECES
ADRESSEES A
« Des habitants des communes de Peteghem, Viersel,
Anvers, Elseghem, Burght, Marie Hoorebeke, Wannegemlede, St-Job-in-t Gon,
Borsbeek, Merxem, Leke, Martens, Leedre, Bachte-in-Leerne, Cruybeke, Oycke,
Oudecappelle, Opbrakel, Ninove et Gand demandent le rétablissement de la langue
flamande dans certaines provinces, pour les affaires de la commune et de la
province. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
_________________
« Des habitants d’OOst-Eecloo demandent des
mesures protectrices de l’industrie linière. »
- Renvoyé à MM. les ministres de l’intérieur et des
finances.
_________________
« Des cultivateurs, domiciliés à Zelzaete, dont
les terres qui composent les exploitations sont situées en Hollande se
plaignent des formalités et surtout des impôts arbitraires auxquels ils sont
soumis de la part de l’administration hollandaise dans leur
exploitation. »
- Renvoyé à la commission des pétitions.
PRESENTATION
DE PROJETS DE LOI
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) présente un projet de loi
relatif au tarif de
- Il est donné acte de la présentation du projet et la
chambre le renvoie aux sections.
M.
le ministre de la justice (M. Raikem) – Le Roi m’a chargé de vous présenter deux projets de
loi : l’un est relatif à l’interprétation de la loi de 1817 sur les
successions, et concerne la question de savoir si les anciens gains de survie
coutumiers sont soumis aux droits de succession établis par la loi de
Le deuxième projet a pour but d’autoriser
l’établissement d’un troisième juge d’instruction dans l’arrondissement de
Bruxelles.
Je demanderai que ces deux projets soient renvoyés à
une commission.
- Le renvoi à une commission est ordonné. Cette
commission sera nommée par le bureau.
Second vote
sur les articles
M.
le président – Un article portant
définition des chemins vicinaux a été supprimé dans le premier vote ; cette
suppression est confirmée par un second vote.
Article 1er
« Art.
1er. Dans les communes où il n’existe pas de plans généraux
d’alignement et de délimitation des chemins et sentiers vicinaux, les administrations
communales feront dresser ces plans dans le délai de deux ans, à dater de la
publication de la présente loi.
«
Elles feront, dans le même délai, compléter, ou réviser, s’il y a lieu, les
plans existants. »
M.
Lebeau – Je ne sais pas pourquoi on
a introduit dans la loi les mots « et sentiers vicinaux » ; on
n’attache pas aux chemins vicinaux telle ou telle largeur, il suffit que le
chemin serve à la généralité pour qu’il soit vicinal ; dans la loi française
on ne parle pas des sentiers vicinaux.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – Le projet primitif
contenait une définition très large des chemins vicinaux ; mais la section
centrale a proposé de la supprimer et de comprendre le mot
« sentiers » dans la loi ; je me suis rallié à cette
proposition ; et je crois qu’elle est utile.
M.
Lebeau – Cela ne serait utile
qu’autant que le sentier ne serait pas un chemin pour la généralité. Dans la
loi française, on ne fait pas la distinction que vous voulez établir ;
cette distinction n’est pas nécessaire. Vous n’avez pas introduit le mot
« sentier » dans les autres articles de votre loi, alors vous pourrez
jeter du douter pour savoir s’ils s’appliquent aux sentiers.
M. Liedts – Il peut y avoir de la
différence entre la loi française et la loi belge sur les chemins
vicinaux ; en France les chemins vicinaux sont réputés la propriété de la
commune ; en Belgique, les chemins vicinaux sont plus généralement une
servitude et pour maintenir les servitudes de passage, il me semble utile
de porter sur les plans les sentiers qui ne sont que des servitudes à charge
des riverains. Il importe peu du reste qu’on en fasse mention dans la loi.
M. Desmet – Les chemins vicinaux en Belgique appartiennent à tous et
n’appartiennent à personne. Il n’y a pas d’inconvénient à ajouter le mot
« sentiers » ; mais quand même on ne l’ajouterait pas, les sentiers
ne seraient pas moins compris dans la loi.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – En insérant le mots
« sentiers » dans l’article premier, il est inutile d’en parler dans
les autres articles ; car dans l’article premier, il s’agit des
plans ; dès qu’un chemin sera compris dans les plans, il sera compris dans
les chemins vicinaux, et aucun doute ne sera possible.
M. Milcamps – Je pense qu’on peut supprimer le mot « sentiers »
parce qu’évidemment le nom de chemins vicinaux comprend les sentiers qui
servent la généralité : si l’on voulait faire un changement, ce serait de
dire : « sentiers publics » au lieu de « sentiers
vicinaux ». Un sentier public est accordé à la généralité des habitants et
sous ce rapport, il est assimilé aux chemins vicinaux ; cependant on ne
peut pas en mettre l’entretien à la charge de la commune, car leur entretien
est à charge des riverains. Dans toutes les communes les sentiers sont publics,
et l’expression de « vicinale » ne leur a jamais été appliquée dans
les lois tant anciennes que modernes. Toutefois je ne vois pas de difficulté à
laisser le mot « sentiers » car le plan lui donnera le caractère
qu’il doit avoir pour lever tout doute, mais pour parler le véritable langage
des lois, il vaudrait mieux dire : « sentiers publics. »
La suppression des mots : « et sentiers
vicinaux » est mise aux voix et adoptée.
- L’article ainsi amendé est adopté.
« Les plans dressés, complétés
ou révisés en exécution de l’article précédent, indiqueront, outre la largeur
actuelle du chemin, y compris les fossés, la largeur qu’il doit avoir par suite
des recherches et reconnaissances légales, ainsi que la contenance et la
désignation des emprises à faire sur les riverains. »
M.
d’Huart – Je proposerai, messieurs,
d’introduire dans cet article une disposition qu’il a été convenu d’y insérer
lors de la discussion pour le premier vote ; il s’agirait d’ajouter à
la rédaction actuelle les mots suivants :
« Ils contiendront de plus la désignation
prescrite par l’article 12 ci-après. »
L’article 12 exige qu’il soit fait une désignation
spéciale, dans les plans, des communications qui sont à charge des
communes ; lorsque cet article a été discuté, j’ai, en ma qualité de
rapporteur de la section centrale, annoncé qu’il deviendrait convenable
d’ajouter à l’article 2 une disposition semblable à celle que j’ai l’honneur de
cous soumettre en ce moment.
M. Cools – Je ne m’opposerai pas à cette addition, mais je ferai
remarquer que, comme elle n’est que la conséquence d’une disposition de
l’article 12, elle devrait nécessairement disparaître si cette disposition de
l’article 12 n’était pas adoptée.
M.
d’Huart – C’est de droit.
M. de Garcia – Je crois, messieurs, que cet article est encore
incomplet ; voici ce qu’il porte :
« Art. 2. Les plans dressés, complétés ou révisés
en exécution de l’article précédent, indiqueront, outre la largeur actuelle du
chemin, y compris les fossés, la largeur qu’il doit avoir par suite des
recherches et reconnaissances légales, ainsi que la contenance et la
désignation des emprises à faire sur les riverains. »
Je crois que les plans devront aussi indiquer la
largeur nécessaire pour établir une bonne viabilité, et cela ne me paraît pas
assez clairement indiqué dans l’article. En outre je pense qu’il serait bon que
les plans indiquassent aussi les chemins qui seront reconnus inutiles.
Lorsqu’il s’agira d’exécuter la loi, les communes auront des frais énormes à
faire pour donner aux chemins la largeur nécessaire, pour mettre les chemins
dans un bon état de viabilité ; d’un autre côté, plusieurs chemins seront
reconnus inutiles et la vente de ces chemins procurera aux communes des
ressources qui les aideront à améliorer les autres.
D’après ces considérations, je proposerai d’insérer
dans cet article, après les mots : « reconnaissances légales »,
ceux-ci : « et la largeur convenable pour en assurer la bonne
viabilité, ainsi que, etc ». L’on verrait ainsi à quoi se rapportent les
« emprises à faire sur les riverains » ; ces emprises ont
nécessairement pour objet de donner aux chemins la largeur qu’ils doivent avoir
pour être dans un bon état de viabilité, et c’est pour expliquer cela d’une
manière plus claire que je propose l’addition dont je viens de parler ; je
proposerai de plus d’ajouter à l’article la disposition suivante :
« Ces plans indiqueront aussi les suppressions de
chemins ou de parties de chemins qui seront reconnus inutiles à la
circulation. »
Il est hors de doute, messieurs, qu’on en viendra là
forcément, seulement le travail serait incomplet si cela ne se faisait pas dans
les deux ans qui sont donnés pour la confection des plans.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – Je ne pense pas, messieurs,
que l’amendement de M. de Garcia puisse être mis en délibération, car c’est une
matière nouvelle sur laquelle il propose de statuer. Quant au fond je ferai
remarquer qu’il y aurait des inconvénients à multiplier ainsi toutes les
questions ; au moment de la confection des plans, on amènerait
nécessairement par là la confusion dans les opérations des autorités
communales, et il arriverait que pour avoir voulu trop faire, on ne fît rien.
D’ailleurs les dispositions de la loi relatives à la suppression des chemins
inutiles sont suffisantes, elles consacrent des principes dont on pourra tirer parti
plus tard pour obtenir le résultat que l’honorable M. de Garcia a en vue.
M. de Garcia – Je pense, messieurs, que l’article n’est pas clair, et c’est
pour cela que j’ai proposé mon amendement. Si maintenant cet amendement n’est
pas adopté, il aura au moins servi à éclaircir la question de la suppression
des chemins inutiles.
- La question préalable, proposée par M. le ministre
de l'intérieur, est mise aux voix et adoptée.
M.
le président – Il y a maintenant
l’amendement de M. d’Huart.
M. Milcamps – Il me paraît, messieurs, que l’amendement propos par
l’honorable M. d’Huart est tout à fait inutile, que ce serait dire deux fois la
même chose, d’abord dans l’article 2, et ensuite dans l’article 12. Remarquez,
en effet, que l’article 12 dit tout ce qu’il faut faire et que la disposition
proposée par M. d’Huart n’est qu’une répétition de ce que stipule cet article.
M. d’Huart – Je reconnais très
volontiers, messieurs, que la disposition que je propose n’est pas
indispensable, mais vous admettrez avec moi que l’article 2 ne sera pas complet
si vous n’y ajoutez pas cette disposition. L’article 2 est destiné à faire
connaître aux autorités communales ce que les plans doivent renfermer ; il
porte
« Art. 2. Les plans dressé, complétés ou révisés
en exécution de l’article précédent, indiqueront, outre la largeur actuelle du
chemin, y compris les fossés, la largeur qu’il doit avoir par suite des
recherches et reconnaissances légales, ainsi que la contenance et la
désignation des emprises à faire sur les riverains. »
Voilà
différentes indications que les plans doivent contenir, mais il en est une
autre encore, qui ne se trouve mentionnée, pour ainsi dire que d’une manière
incidente dans l’article 12 ; il faudra donc que les autorités aient
toutes les dispositions de la loi présentes à l’esprit pour savoir que
l’article 2 n’est pas complet et qu’il trouve son complément dans une
disposition de l’article 12. La section centrale, messieurs, a pensé qu’il
serait beaucoup mieux d’insérer dans l’article 2 la disposition que j’ai
proposée comme rapporteur de cette section.
- La disposition proposée par M. d’Huart est mise aux
voix et adoptée.
L’article est ensuite mis aux voix et adopté.
« Art. 3. Ces plans seront exposés pendant
deux mois au secrétariat de la commune.
« L’exposition sera annoncée par voie de
publication et d’affiches, dans la forme ordinaire et dans un journal de la province
ou de l’arrondissement, s’il en existe. »
M.
le président – M. le ministre de
l'intérieur propose d’ajouter une disposition additionnelle au premier
paragraphe ainsi conçue :
« Pendant ce délai, et sauf ce qui est statué à
l’article 4 à l’égard des propriétaires, tout individu à droit de réclamer en
se conformant à l’article 6. »
M. le ministre propose ensuite une disposition
additionnelle à l’article 4, ainsi conçue :
« Les propriétaires pourront réclamer pendant le
délai de deux mois à partir du jour de l’avertissement. »
Par suite de ces deux dispositions, M. le ministre
propose la suppression de l’article 5.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M.
de Theux) – Messieurs, l’article 6 du
projet du gouvernement était ainsi conçu :
« Pendant le délai déterminé à l’article 4, tout
habitant ou propriétaire forain à le droit de réclamer soit contre les plans
nouveaux, soit contre les rectifications apportées aux plans existants. »
L’article 5 nouveau porte :
« Art. 5. Pendant le délai de deux mois à partir
du jour de l’avertissement donné conformément au mode de publication prescrit
par l’article précédent, tout individu a le droit de réclamer, soit contre les plans
nouveaux, soit contre les rectifications apportées aux plans existants. »
Mais veuillez remarquer que l’article 4 nouveau ne
parle que de l’avertissement à donner aux propriétaires dont les parcelles
doivent être incorporées ou restituées au chemin. Il y a donc une lacune à
l’égard des réclamations à faire d’autres chefs ; c'est pour ce motif que
je propose de faire une distinction entre les réclamations des propriétaires
dont les parcelles doivent être restituées ou incorporées au chemin, et les
réclamations faites des autres chefs qui font l’objet de l'amendement que j’ai
l’honneur de présenter à l’article 3.
Je ferai en outre remarquer que le délai est différent
pour l’une et l’autre catégorie de réclamations. Pour la réclamation qui a sa
source dans l’article 4 le délai court à partir du jour de l’avertissement
donné par les autorités locales aux propriétaires dont les parelles doivent
être restituées ou incorporées au chemin, tandis que pour les réclamations de
la second e partie, le délai court à partir du jour du dépôt du plan.
M. d’Huart – Messieurs, il me paraît que
l’article 5 donne aux individus, autres que les propriétaires, la même faculté
que M. le ministre veut leur attribuer par sa disposition additionnelle à l’article
3 ; il n’y a que cette différence ci, c’est que le délai est encore plus
long dans le système actuel de la loi qu’il ne le serait d’après la disposition
dont il s’agit. Car que porte l’article 5 ? Il porte que « pendant le
délai de deux mois, à partir du jour de l’avertissement donné conformément au
mode de publication prescrit par l’article précédent, tout individu a le droit
de réclamer, soit contre les plans nouveaux, soit contre les rectifications
apportées aux plans existants. »
Or, quand cet avertissement sera-t-il donné aux
propriétaires ? Ce sera après que les plans auront été déposés, et
M ; le ministre veut donner aux individus autres que les propriétaires le
droit de réclamer dans les deux mois qui suivront le dépôt du plan. Le délai,
dans ce système, sera donc moins long que dans le système que la chambre a
adopté au premier vote.
La seule objection qu’on fasse au principe du projet
primitif, c’est que les individus autres que les propriétaires ne connaîtront
pas l’avertissement ; mais il est inutile d’aller au-devant de ce motif.
Ces individus connaîtront le dépôt des plans, et comme l’avertissement ne vient
qu’un mois après que les plans auront été exposés, les mêmes individus auront
trois mois pour réclamer. D’après le système qui a été adopté au premier vote,
un délai plus court que celui de deux mois ne peut être laissé aux personnes
autres que les propriétaires, et il y aura nécessairement un second délai plus
long, parce que l’avertissement à donner aux propriétaires ne viendra jamais
qu’après l’exposition des plans.
Je crois donc que nous pourrions voter les
dispositions qui ont été adoptées lors du premier vote et que nous avons eu le
temps d’étudier. Nous ne sommes pas suffisamment éclairés sur les nouveaux
amendements qui ont pour objet de supprimer un article et d’en modifier deux
autres.
M. Lebeau – Messieurs, on a pensé que l’avertissement donné aux
propriétaires serait la règle, mais évidemment ce sera l’exception, car bien
qu’il y ait un certain nombre de communes, ces emprises sont trop anciennes, ou
elles sont trop peu nombreuses, pour que l’administration ait le pouvoir de les
faire disparaître, ou elle ne peuvent plus être constatées, ce qui est le cas
le plus général pour les communes. Dans d’autres communes, il n’existe pas
d’emprises du tout. Je n’hésite donc pas à dire que généralement il n’y aura
pas d’avertissements dans les communes et que dès lors l’amendement de M. le
ministre de l'intérieur, que je n’avais pas saisi à une première lecture, me
paraît indispensable.
M. Desmet – Messieurs, la nouvelle rédaction de M. le ministre de
l'intérieur est nécessaire. L’article 5 ne concerne que ceux qui ont reçu
l’avertissement. Cependant il faut bien que les individus autres que ceux-ci
aient le droit de réclamer, dès que les plans sont déposés.
M. d’Huart – Messieurs, je ne dirai plus
rien contre la proposition ; seulement je tiens à faire observer qu’il
n’était pas nécessaire de bouleverser les articles du projet de loi, et
d’introduire dans l’article 3 la disposition de l’article 5 : on pouvait
conserver les articles tels qu’ils étaient, et se borner à introduire dans
l’article 5 l’amendement que nous discutons, par un simple changement de mots.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – Je n’ai proposé ce
changement que pour plus de clarté ; il faut bien que chaque prescription
se rapporte à l’article qui en pose le principe.
- Personne ne demandant plus la parole, la disposition
additionnelle proposée par M. le ministre de l'intérieur au premier paragraphe
de l’article 3 est mise aux voix et adoptée.
Le second paragraphe de l’article est ensuite adopté.
L’article 3, tel qu’il a été amendé, est adopté.
« Art. 4. Les propriétaires des parcelles
indiquées au plan comme devant être restituées ou incorporées au chemin, seront
avertis du jour du dépôt du plan.
« L’avertissement contiendra la désignation de
ces parcelles et leur sera donné sans frais, au moyen de la signification qui
leur en sera faite, à la requête du collège des bourgmestre et échevins, par
l’officier de police ou le garde champêtre du lieu, soit à personne, soit à
domicile, s’ils habitent la commune. Dans le cas contraire, l’avertissement
sera adressé par la voie de la poste aux lettres, si leur résidence est
connue ; il sera en outre affiché deux fois à huit jours d’intervalle
suivant le mode usité. »
M. le ministre
propose d’ajouter le paragraphe suivant :
« Les propriétaires pourront réclamer dans le
délai de deux mois à partir du jour de l’avertissement. »
M. Cools – Il me semble qu’il y a une
lacune dans le second paragraphe de cet article. Peut-être les explications
qu’on donnera me démontreront-elles qu’elle n’est qu’apparente. Cette lacune
existerait en ce qui concerne les propriétaires n’habitant pas la commune. Tout
est prévu pour les propriétaires qui habitent la commune ; mais pour ceux
qui ne l’habitent pas, voici ce qu’on dit : « Dans le cas contraire,
l’avertissement sera adressé par la voie de la poste aux lettres si leur
résidence est connue ; il sera en outre affiché deux fois à huit jours
d’intervalle suivant le mode usité. »
L’affiche sera ordinairement sans objet pour ceux qui
n’habitent pas la commune. Quant à la notification par la poste aux lettres,
elle a été admise par économie. Mais on n’a aucune garantie que l’avertissement
sera arrivé à l’intéressé. Il importe cependant qu’on ait cette garantie ;
la poste aux lettres ne tient pas note des lettres qu’elle transporte. Le
propriétaire qui aura intérêt à contester les prétentions de la commune pourra
toujours opposer qu’il n’a reçu aucun avertissement. S’il est entendu que les
lettres seront chargées, on aura toute garantie ; cependant il me semble
qu’il serait bon de le dire ; en conséquence, je proposerai d’ajouter les
mots : « au moyen de lettres chargées. »
Quand la lettre est chargée on n’en tient pas
seulement note au bureau d’expédition, mais encore au bureau d’arrivée. Celui
qui reçoit la lettre chargée doit en donner un reçu.
M. Lebeau – Je crois qu’en adoptant cet amendement on exposerait les
communes à des frais assez considérables ; il me semble qu’on se préoccupe
trop de la crainte que le propriétaire n’habitant pas la commune ne soit pas
suffisamment averti. Il le sera par le vote de la loi, et par les règlements
provinciaux. Il a ensuite un métayer ou un locataire qui pourra l’avertir. Je
le répète, c’est pousser trop loin la prévoyance, et charger les communes de
frais qui peuvent être considérables.
M. Cools – Les lettres peuvent ne pas
arriver, sans mauvaise intention ; par exemple à défaut d’une indication
suffisante sur l’adresse.
M. David – Quand on envoie une lettre
chargée, si elle n’arrive pas, que peut-il en résulter ? je ne vois pas la
responsabilité que peut encourir la poste ? La lettre chargée n’est pas
plus sûre qu’une autre.
M. Verhaegen – Il est convenu, sans doute, que c’est sauf rédaction que
l’article dont il s’agit va être voté.
M.
le président – Proposez les changements
que vous jugez convenables.
M.
Verhaegen – Nous devons, je pense, en
faisant une loi, observer les règles de la langue que nous employons.
L’article est ainsi conçu :
« Les propriétaires des parcelles indiquées au
plan comme devant être restituées ou incorporées au chemin, seront avertis du
jour du dépôt du plan. »
Plus le deuxième paragraphe ajoute :
« L’avertissement contiendra la désignation de
ces parcelles, et leur sera donné… »
« leur » devrait se rapporter aux
propriétaires ; mais la langue française ne comporte pas ces constructions.
Il faudrait au lieu des mots « leur sera donné
sans frais » dire : « et sera donné sans frais aux
propriétaires », ou bien encore dire seulement : « et sera donné
sans frais, etc. »
M. Lebeau – Je demande qu’on mette d’abord aux voix l’amendement de M.
Cools qui est discuté, et ensuite, le ferai une observation sur la rédaction.
M.
le président – Il est plus rationnel de la
faire maintenant.
M.
Lebeau – Voici alors comme je
propose de rédiger le deuxième paragraphe de l’article 4.
« L’avertissement contiendra la désignation de
ces parcelles et sera donné sans frais, à la requête du collège des bourgmestre
et échevins, par l’officier de police ou le garde champêtre du lieu, soit à
personne, soit à domicile, si les propriétaires habitent la commune. Dans le
cas contraire, etc. » Comme au projet.
- Cette rédaction est mise aux voix et adoptée.
L’amendement de M. Cools n’est pas adopté.
Le paragraphe additionnel proposé par le ministre est
adopté.
L’ensemble de l’article, tel qu’il a été amendé, est
également adopté.
Article 5 ancien (supprimé)
La suppression de l’article 5 proposée par M. le
ministre de l'intérieur et des affaires étrangères comme conséquence des
amendements qu’il a proposés, est mise aux voix et prononcée.
Articles 5 à 8
M.
le président – L’article 5 étant supprimé,
l’article à mentionner dans l’amendement de M. le ministre de l'intérieur n’est
plus l’article 6 mais l’article 5. (Adhésion).
Les articles suivants sont successivement confirmés
par le vote de la chambre
« Art. 6 (devenu l’article 5). Les réclamations
sont adressées au conseil communal ; elles contiennent élection de
domicile dans la commune ; il en est donné récépissé par le secrétaire.
« Si le réclamant n’habite pas la commune, la
notification sera faite au domicile élu »
« Art. 6. L’appel contre les décisions des
conseils communaux est ouvert devant la députation permanente du conseil
communal.
« Il doit être interjeté, à peine de déchéance,
dans le délai de deux mois à partir de la notification de la décision du
conseil communal. »
« Art. 7. L’appel a lieu par requête présentée à
la députation provinciale.
« Le greffier reçoit la requête ; il en
donne récépissé.
« La députation permanente statue, sans recours
ultérieur, dans les trois mois, à dater de la réception de la requête ; sa
décision est notifiée conformément aux articles 4 et 5. »
« Art. 8. Après l’accomplissement des formalités
ci-dessus, les plans sont arrêtés définitivement par la députation permanente.
« Néanmoins, il peuvent toujours être modifiés
par les autorités compétentes, en se conformant aux dispositions des articles
4, 6 et 8. »
- Ces articles sont adoptés sans discussion. »
La chambre passe à l’article 9 ainsi conçu :
« Art. 9. L’ordonnance de la députation
provinciale qui arrête définitivement le plan, ne fait aucun préjudice aux
réclamations de propriété ni aux droits qui en dérivent.
« Les instances auxquelles ces droits donnent
lieu sont instruites et jugées devant les tribunaux comme affaires sommaires et
urgentes.
« Lorsqu’en exécution du plan, il y aura lieu à
expropriation, le plan sera approuvé par arrêté royal, et on se conformera aux
dispositions de la loi du 17 avril 1835, sur l’expropriation pour cause
d’utilité publique. »
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M.
de Theux) – Lorsqu’on a voté l’article
relatif à la prescription, j’ai annoncé à la chambre l’intention de présenter
un amendement à l’article 10, qui devient maintenant l’article 9 pour mettre
les communes à l’abri des réclamations après un certain laps de temps. Je
dépose cet amendement qui consiste à ajouter après le premier paragraphe de
l’article, la disposition suivante :
« Elle (l’ordonnance de la députation
provinciale) servira de titre à la prescription de dix et vingt ans. »
C’est un doute qui sera levé par cette addition. Mais
il est bien entendu que, pour que cette ordonnance puisse servir de titre, il
faut que la possession et les autres conditions exigées pour la possession par
le code civil y soient jointes. J’ai voulu uniquement lever le doute sur la
question de savoir si l’ordonnance de la députation permanente forme un titre
pour obtenir la prescription.
Comme le code civil est interprété par la plupart des
auteurs en ce sens qu’une commune ne peut acquérir une servitude de passage par
prescription, on a pensé que les communes pouvaient être exposées dans un
siècle ou deux à se voir contester la jouissance de tous les droits de
servitude, bien qu’ils fussent portés sur les plans. C’est ce que je voulais
éviter par mon amendement.
M. Verhaegen – Je ne vois aucun inconvénient à admettre une prescription de
dix et vingt ans, alors qu’il y a un véritable titre. Mais l’admettre dans
l’espèce serait chose fort dangereuse. D’après la manière dont les articles
précédents ont été adoptés, alors que vous avez rejeté l’amendement de M.
Cools, quel sera donc le titre, qui servira de base à la prescription. Ce sera
le tableau dressé aux termes des articles que nous venons de voter. Mais
lorsque le propriétaire n’habitera pas la commune, quelle connaissance
aura-t-il de ce tableau ? On dit qu’il en aura connaissance par son
métayer, par son fermier. Mais il peut arriver qu’il y ai négligence de la part
du fermier. Comme vous avez décidé qu’il n’y aurait pas de lettre chargée, vous
n’aurez pas de garantie que la lettre parvienne aux propriétaires, qui
n’habitent pas la commune ; or, la plupart des propriétaires, et surtout
les grands propriétaires, seront dans ce cas. On se trompe quand on pense
qu’ils ont tous dans la commune un métayer ou fermier, qui les préviendra.
Ainsi qui préviendra les propriétaires de bois et de prairies ?
Faites attention, messieurs, qu’il s’agit de trancher
un question de propriété. On veut admettre comme titre de propriété une pièce à
laquelle aucune loi n’a jamais reconnu ce caractère.
Pour qu’un titre puisse être opposé à quelqu’un, pour
prescrire contre lui il fait qu’il y ait concouru. Or, il n’en est pas ainsi
dans le cas qui nous occupe.
On dira que le propriétaire sera censé connaître les
plans. Pour moi, c’est ce que je ne peux admettre.
Par ces motifs, je voterai contre l’amendement.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) – Déjà les motifs d’introduire la proposition présentée par M.
le ministre de l'intérieur vous ont été exposés. Mais un honorable préopinant
vient de dire que, pour que la prescription puisse avoir lieu, il faut que
celui contre qui on prescrit ait concouru au titre. Messieurs, je crois qu’aux
termes du code civil, et même de la législation qui a précédé il y a ici une
erreur ; et, en effet, quand la prescription peut-elle avoir lieu ?
C’est quand on achète de celui qui n’est pas propriétaire ; quand on
achète de celui qui est propriétaire la prescription est inutile ; il y a
transmission de la propriété. Il se trouve que le possesseur actuel d’un
immeuble n’en est pas le propriétaire ; il vend cet immeuble à un tiers de
bonne foi, et ce tiers acquiert la propriété par la prescription de 10 ans
entre présents et de 20 ans entre absents. Ainsi ce motif ne peut être opposé,
en aucune manière, à la proposition de M. le ministre de l'intérieur.
Par suite de ce que le titre qui sert de base à la
prescription de dix ou vingt ans ne doit pas émaner du véritable propriétaire,
nous avons à examiner si, dans le cas qui nous occupe, le plan général peut
être envisagé comme un titre pour la commune à l’effet de servir de base à la
prescription de dix ou vingt ans selon la présence ou l’absence du
propriétaire. Le plan général de la commune désigne tel chemin comme chemin
vicinal ; il regarde le chemin comme appartenant à la commune ; et ce
plan ou ce titre reçoit plus de publicité que les titres qui existent dans les
cas ordinaires ; il peut donc servir à la commune, si elle est en
possession depuis dix ou vingt ans, sans réclamation de la part du
propriétaire.
Maintenant le propriétaire, que pourrait-il venir
prétendre ? Il pourrait soutenir que le chemin tel qu’il est indiqué sur
le plan forme en tout ou en partie sa propriété. Le cas qui arrivera le plus
ordinairement sera celui où il y aura doute sur le point de savoir si telle
portion de terrain compris dans le chemin en faisait partie, ou si cette
portion de terrain appartenait au riverain ; et le propriétaire pourra
toujours réclamer en temps utile. D’abord les plans sont publics ; en
second lieu, il n’est guère à craindre que les lettres ne parviennent pas à
leur adresse ou que les propriétaires ne soient pas avertis. Ils ont des
personnes sur les lieux ; il y a des affiches et des avertissements ;
et du reste, je crois que les autorités communales rempliront leurs devoirs.
Ce serait un cas très rare celui où les avertissements
ne parviendraient pas : on fait les lois pour les cas ordinaires, et on
n’en fait pas pour les cas exceptionnels ; car sans cela on ne pourrait
porter aucune loi.
Dans cette situation on peut regarder le plan comme un
titre propre à établir la prescription de 10 ou
de 20 ans. Non seulement il faudra ce titre, il faudra encore bonne foi
de la part de l’autorité communale, il faudra en outre une possession ;
or, la possession est un fait patent. Si même il arrivait par extraordinaire
que le propriétaire étranger à la commune n’eût pas reçu l’avertissement, au
moins la possession paisible, continuée pendant 10 ou 20 ans ne peut, dans les
cas ordinaires, échapper à sa connaissance. Je crois donc que l’on peut
introduire la disposition qui établit la prescription par 10 ou 20 ans.
Plus on s’éloignera de la date du plan et plus sera
douteuse la question de savoir si telle parcelle appartient à la commune ou au
riverain ; par la disposition proposée on atteindra le but que se propose
toute bonne loi, qui est d’empêcher, autant que possible, les procès.
M. Verhaegen – Je ne puis considérer comme sérieuse la réponse du ministre
de la justice. J’ai dit et je maintiens que pour qu’il y ait un tire, il faut
le concours de deux personnes. Si la personne qui veut prescrire peut, à elle
seule, faire le titre, le fait seul de l’occupation suffit ; si le titre
ne doit émaner que de la personne dont émane le fait de la possession, ne
parlez plus de titre, il est une superfétation. Le tableau ou le plan de la
commune, qu’est-ce qu’il est ? il est un fait de l’administration
communale si vous considérez cela comme titre, eh bien, ce sera la commune qui
se sera fait un titre. Nul ne peut créer un titre pour lui-même. On déclare que
le tableau sera considéré comme un titre ; mais on le dit parce qu’on veut
une fiction ; puisque vous déclarez que le plan sera titre ; il ne
l’est donc pas naturellement ; mais prenez garde, toute fiction est
dangereuse.
Si vous voulez faire une exception à la règle
concernant les titres, pourquoi la commune prescrirait-elle pour 10 ou 20 ans,
tandis que la prescription générale est de 30 ans ?
Maintenant on dit que le propriétaire sera informé ;
que ce sera le cas ordinaire ; qu’il ne faut pas s’occuper des cas
extraordinaires ; eh bien, je pense que le cas ordinaire est celui où le
propriétaire n’habite pas la commune, et où il ne sera pas informé : Si la
commune disait qu’elle ne sait pas où demeure le propriétaire, que lui
objecteriez-vous ?
Si l’on veut du système que l’on propose, autant vous
dire simplement que la commune aura la prescription par 10 et 20 ans.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – Si l’opinion de ceux qui
prétendent que les communes ne peuvent acquérir par la prescription de 10 ou 20
ans prévalait, vous mettriez les communes dans l’impossibilité de conserver les
chemins vicinaux qu’elles peuvent avoir acquis anciennement à titre de
servitude, car après un laps de temps les communes seront dépourvues de titres,
puisque les titres s’effacent et se perdent par le temps, ou elles seront dans
l’impossibilité de prouver qu’elles avaient acquis ces servitudes anciennement
par la prescription.
On dit que nous introduisons une fiction dans la
loi : nous avons voulu trancher un doute, celui de savoir si l’approbation
donnée par la députation permanente forme un titre ; nous pensons que cette
approbation doit former nu titre, et avec plus de fondement qu’un acte privé
qui désigne un droit de passage quelconque, par cette raison que les plans sont
exposés en public. Il suit en effet de cette exposition que chacun peut faire
ses réclamations, et comme ils reçoivent la sanction de l’autorité supérieure,
ils peuvent former titre, mieux encore, il nous semble, que ceux qui n’ont pas
reçu cette sanction, ni aucune publicité.
La disposition dont il s’agit, je l’ai annoncée quand
on a discuté l’article 11 de la section centrale qui permettait aux commune
d’acquérir une servitude par voie de prescription ; mais comme cette
manière d’acquérir présentait quelque difficulté, pour ôter tout embarras, j’ai
proposé l’amendement en délibération.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) – Le préopinant a objecté contre la disposition présentée par
le ministre de l’intérieur, qu’on ne peut se faire un titre à soi-même, et que
la commune s’en ferait un : remarquez que ce n’est pas la commune qui
s’établit un titre à elle-même, que le plan doit être arrêté par ordonnance de
la députation provinciale ; que c’est cet arrêté qui sera le titre pour la
prescription de 10 ou 20 ans.
Or, si un titre qui peut rester ignoré peut servir de
base à la prescription de 10 ou 20 ans, à plus forte raison une ordonnance de
la députation permanente, publiée de la manière prescrite par la loi, et qui ne
peut guère être ignorée que dans des cas très rares, à plus forte raison,
dis-je, une semblable ordonnance peut-elle servir de base à cette prescription.
On dit, messieurs, que c’est une innovation ;
mais si la loi était claire et précise, sur ce point il serait fort inutile de
porter une disposition telle que celle que propose M. le ministre de
l'intérieur.
Remarquez, messieurs, que si l’on prolongeait le temps
nécessaire pour la prescription, ou si on laissait indécise la question de
savoir si les communes peuvent prescrire les limites des chemins vicinaux, ce
serait faire naître beaucoup de procès : lorsque les ordonnances sont
encore présentes, lorsqu’il ne s’est pas écoulé 10 ou 20 ans, depuis leur
publication, on peut plus facilement constater les droits, soit de la commune,
soit des propriétaires qui réclameraient des portions de terrains considérées comme
faisant partie des chemins ; mais plus vous vous éloignez du moment de
l’approbation des plans, plus les questions de propriété qui pourraient être
douteuses deviendront difficiles à résoudre ; aussi, messieurs, a-t-on
toujours considéré la prescription comme la patronne du genre humain, et je
crois qu’il faut principalement appliquer cette prescription au cas dont nous
nous occupons, car il faut autant qu’il est en nous éviter des procès aux
communes.
Je crois donc, messieurs, que nous devons adopter la
disposition proposée par M. le ministre de l'intérieur.
M. d’Huart – Je viens, ainsi que
l’honorable M. Verhaegen, m’opposer à l’amendement de M. le ministre de
l'intérieur.
D’après cet amendement, l’ordonnance de la députation
des états qui approuve le plan, c’est-à-dire le plan lui-même, formera pour la
commune un titre au moyen duquel, au bout de 10 ou de 20 ans, suivant que la
personne intéressée habite ou soit absente, la commune aura acquis la
prescription. En matière ordinaire on ne l’acquiert qu’après trente ans, et ici
on permettrait à la commune de l’obtenir en dix ans, alors qu’il n’y aurait pas
même eu prise de possession (dénégation
de la part de MM. les ministres de la justice et de l’intérieur). C’est là un
point, messieurs, sur lequel j’appelle toute votre attention.
D’après les premiers articles que nous venons de
voter, on dressera les plans, on y déterminera la largeur que les chemins ont
qu’ils doivent avoir, d’après ces recherches et les reconnaissances qui auront
été faites ; je suppose qu’un chemin qui a
Quoi qu’il en soit, messieurs, lorsque pour les
matières ordinaires la prescription ne peut s’acquérir qu’au bout de 30 ans de
possession, il serait singulier de donner aux communes le moyen de l’acquérir
en dix ans, surtout qu’une simple lettre jetée à la poste suffirait pour faire
prendre date cet égard. Il me semble, en
tout cas, que nous ne devrions pas modifier aussi légèrement le code civil dans
ce qui touche aux questions de propriété.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères
(M. de Theux) – J’avais donné des
explications à la chambre en déposant mon amendement, j’avais dit
qu’indépendamment du titre résultant de l’approbation des plans par la
députation, il faudrait de plus le fait de la possession, et cela est clair,
messieurs ; lorsque vous ne dérogez point au code civil d’une manière
formelle, les dispositions de ce code demeurent subsistantes ; or, que
faut-il pour jouir du bénéfice de la prescription aux termes du code
civil ? Il faut la bonne foi et la possession ; il faudra donc, dans
le cas actuel, comme dans tous les autres, la bonne foi et la possession, il
faudra de plus un titre, qui est l’approbation du plan par la députation
provinciale.
On a dit, messieurs, que nous dérogeons au droit
commun d’après lequel il faut 30 ans pour acquérir par prescription. Veuillez
remarquer que lorsque le code civil exige 30 ans, il suppose qu’il n’y ait
aucun titre ; il suffirait que les habitants d’une commune eussent passé
pendant 30 ans sur une propriété pour que la commune ait acquis un chemin, si
tant est que le code civil permît d’acquérir la servitude de chemins par
prescription, mais je pense que le code civil ne le permet pas, et c’est
précisément pour obvier à cet inconvénient que j’ai proposé mon
amendement ; sans cela les communes seraient à perpétuité tenues de
conserver les titres en vertu desquels ils possèdent leurs chemins, ce qui est
impossible.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) – M. le ministre de l'intérieur a déjà répondu à l’observation
de l’honorable député de Virton que les propriétaires pourraient se voir privés
d’une partie de leur propriété par la prescription ; alors qu’ils
n’auraient pu remarquer aucune prise de possession ; je ferai seulement
remarquer à cet égard qu’il faut non seulement une possession mais encore une
possession non équivoque. Ainsi donc dans le cas supposé par l’honorable député
de Virton non seulement il n’y aurait pas lieu à prescription en dix ou vingt
ans, mais il n’y aurait pas même lieu à prescription au bout de trente ans,
puisqu’il suppose une possession équivoque, tandis qu’aux termes du code civil
il faut une possession non équivoque.
On a dit, messieurs, que l’ordonnance de la députation
provinciale qui approuve le plan ne peut être invoqué comme un titre par les
communes. Que fait cette ordonnance ? Elle déclare qu’un chemin vicinal
est la propriété de la commune ou que la commune a le droit de jouir d’un
chemin vicinal à titre de servitude.
Eh bien, un acte semblable à l’égard duquel on
provoque les réclamations des intéressés, ne doit-il point avoir autant d’effet
qu’un acte de translation de propriété de la part de celui qui n’est pas
propriétaire, fait devant notaire et qui n’est soumis à aucune publicité ?
Ainsi, messieurs, pour acquérir par prescription en
vertu de la disposition proposée par M. le ministre de l'intérieur, il faudra
non seulement l’ordonnance de la députation provinciale, il faudra encore une
possession non équivoque, il faudra en outre la bonne foi ; je crois donc
que cette disposition rendra de véritables services aux communes sans qu’elle
puisse nuire à qui que ce soit.
M. Liedts – J’ai peu de choses à
ajouter, messieurs, à ce que les deux honorables ministres de la justice et de
l'intérieur et des affaires étrangères viennent de dire ; j’adopterai la
disposition telle que M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères
l’a proposée ; elle tend à combler une lacune que je crois avoir signalée
dans la première discussion, et telle qu’elle est maintenant rédigée, elle
évite un inconvénient que l’on avait trouvé dans ma proposition, laquelle était
peut être trop générale.
J’avais fait remarquer à la chambre que si l’on
n’admettait pas la prescription acquisitive des chemins vicinaux et des
servitudes vicinales au profit des communes, les propriétaires riverains
auraient pu, plus tard, supprimer ces chemins, puisque toutes les communes sont
dans l’impossibilité de reproduire les titres en vertu desquels ces chemins
leur appartiennent, et qu’elles pourraient ainsi se voir enlever une partie de
leurs communications, surtout si l’on remarque que les servitudes de passage
sont imprescriptibles d’après le code civil. On fit observer alors que beaucoup
de propriétaires laissent passer à travers leurs bois et leurs terres parce
qu’ils savent qu’il ne peut jamais résister de là un titre pour la commune,
mais que s’ils pouvaient prévoir qu’un jour on se prévaudrait de ce passage
pour le maintenir à tout jamais, ces propriétaires n’agiraient plus avec la
même tolérance au grand détriment des habitants des campagnes à qui ces
communications sont aujourd’hui fort utiles. Cette observation était fondée,
messieurs, mais aujourd’hui l’inconvénient disparaît, puisque la disposition de
M. le ministre ne s’applique qu’aux seules communications vicinales qui sont
portées sur les plans publiquement exposés, contre lesquels tous les intéressés
peuvent réclamer et qui doivent être approuvés par la députation permanente.
Il faut en outre, pour que ces chemins puissent être
acquis à la commune par prescription, que ceux qui y auraient un droit de
propriété gardent pendant dix ans s’ils sont présents, et pendant 20 ans, s’ils sont absents, un
silence absolu relativement à la déclaration de la députation qui approuve le
plan, car pendant ce délai, tous ceux qui croiraient que l’on fait à tort
passer un chemin sur leur propriété peuvent recourir aux tribunaux.
J’avoue, messieurs, que si nous considérions la chose
comme des juristes, les plans dressés par les communes ne pourraient pas être
invoqués comme un titre proprement dit dans le sens du code civil, puisque
personne ne peut se créer un titre à soi-même. M. le ministre de la justice a
beau dire que c’est la députation permanente qui donne en quelque sorte ce titre
aux communes, puisque c’est elle qui arrête définitivement les plans ;
toute la hiérarchie administrative est une et indivisible, depuis la commune
jusqu’au pouvoir royal, de sorte que lorsque la commune arrête le plan et que
la députation permanente l’approuve, ce n’en est pas moins l’autorité
administrative qui se crée un titre à elle-même, titre dans lequel elle donne
comme chemin vicinal telle ou telle communication. Mais nous ne sommes pas
appelés à considérer la disposition comme jurisconsulte, nous devons voir s’il
y a utilité publique à l’admettre, et cette utilité publique est palpable. Je
crois que si vous ne mettez pas cette disposition dans la loi, vous exposez
beaucoup de communes à perdre, après un certain laps de temps, un bonne partie
de leurs communications vicinales, pour les voir incorporer aux propriétés
riveraines.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) – Messieurs, je me serai mal expliqué, ou l’honorable
préopinant m’aura mal compris. Je n’ai pas supposé, comme l’honorable membre le
pense, que le plan formait un titre dans le sens de la loi actuellement en
vigueur. La présente loi aurait été dans ce cas absolument inutile, et il
aurait été superflu de l’appuyer.
Mais j’ai simplement comparé le titre émané de
l’autorité administrative à celui qui est émané d’un non propriétaire, non pas
dans le but d’établir la prescription aux termes de la loi actuelle, mais pour
exposer les motifs qui militent en faveur de la disposition proposée par M. le
ministre de l'intérieur.
- L’amendement de M. le ministre de l'intérieur est
mis aux voix et adopté.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux) – Messieurs, j’ai aussi
annoncé, lors du premier vote, qu’il serait nécessaire que les plans approuvés
par la députation permanente fussent déposés au greffe du conseil provincial et
au commissariat d’arrondissement. Il peut arriver qu’une commune perde ses
plans, ou que l’administration communale ait intérêt à les écarter. Je crois
qu’il serait très utile qu’un double du plan fût déposé au greffe du
gouvernement provincial, ainsi qu’au commissariat d’arrondissement. Il en
résultera cet avantage, que les propriétaires, au lieu de se rendre eux-mêmes
dans les communes, pourront consulter le plan au chef-lieu de la province ou de
l’arrondissement. Je proposerai donc cette disposition additionnelle qui serait
placée immédiatement après l’amendement qui vient d’être adopté :
« Un
double des tableaux approuvés par la députation permanente sera déposé au
greffe du gouvernement provincial et au commissariat d’arrondissement. »
M. F. de Mérode – Mais si cette dépense était onéreuse pour les communes, ne
pourrait-on pas se borner à deux expéditions du plan ?
M. de Garcia – Je ferai observer que les registres de l’état civil ne sont
rédigés qu’en double ; une double expédition dans l’espèce me paraît
suffisante.
M. Cools – Je crois que deux plans suffiront, l’un pour la commune et
l’autre pour la députation permanente. Je puis invoquer mon expérience
personnelle. Dans
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères
(M. de Theux) – Si l’on pense que trois
expéditions des plans doivent entraîner une dépense trop forte pour les
communes, je consens volontiers à ce qu’un double soit seulement déposé au
gouvernement provincial.
M. le
président – Par suite, l’amendement de
M. le ministre de l'intérieur serait ainsi conçu :
« Un double des tableaux approuvés par la
députation permanente sera déposé au greffe du gouvernement provincial. »
- Cet amendement est adopté.
Les deux premiers paragraphes de l’article sont mis
aux voix et adoptés.
M.
le président – M. le ministre de
l'intérieur propose de détacher les deux derniers paragraphes du même article,
pour en faire un nouveau.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M.
de Theux) – Comme il y a un changement
de rédaction dans le premier paragraphe, on pourrait faire imprimer
l’amendement pour demain.
M.
le président – L’amendement sera imprimé
et distribué.
La séance est levée à 4 heures ¾.