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Note d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance
du mercredi 3 mai 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi relatif au droit d’aubaine (Liedts,
Rogier)
3) Motion d’ordre relative au procès-verbal des séances plénières dans
le Moniteur (Jullien,
Liedts)
4) Projet de loi octroyant un crédit au budget des travaux publics pour
le réendiguement de certains polders (Nothomb)
3) Projet de loi portant des modifications au tarif des douanes
(politique commerciale du gouvernement et négociations commerciales avec
Moniteur belge
n°124, du 4 mai 1837)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse fait l’appel nominal à
midi et demi.
M. Kervyn lit le procès-verbal de la
séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des
pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Verslappen,
commis de troisième classe des accises à pied, à Heyst-op-den-Berg,
demande de l’avancement. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
________________
« La dame veuve Fauconnier, à Bruxelles,
renouvelle sa demande d’indemnité du chef des pertes qu’elle a essuyées par
l’agression hollandaise. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du
projet de loi sur les indemnités.
________________
« Des habitants de Santvliet
demandent la prompte adoption du projet de loi relatif aux polders. »
- Renvoi à la commission des polders.
PROJET DE LOI RELATIF AU DROIT
D’AUBAINE
M. Liedts, au nom d’une commission
dépose sur le bureau le rapport sur le projet de loi concernant les aubaines.
- L’impression et la distribution de ce rapport
sont ordonnées.
M. Liedts. - Je demanderai que la
discussion de ce projet ait lieu après la loi sur les douanes ; il intéresse
beaucoup de familles.
M. Rogier. - Je pense qu’il y a des
projets plus urgents que celui- là à discuter, et qui depuis longtemps ont
obtenu la priorité : il y a le projet sur l’indemnité, le projet relatif à la
construction de la digue de Lillo.
M. Liedts. - Pour éviter toute
discussion inutile sur la question de priorité, il faut continuer la
délibération sur la loi actuelle ; on déterminera l’ordre du jour après la loi
de douane. (Adhésion générale.)
MOTION D’ORDRE RELATIVE AU
PROCES-VERBAL DES SEANCES PLENIERES DANS LE MONITEUR
M. Jullien (pour une motion d’ordre.) -
Messieurs, dans la séance d’hier j’ai répondu à l’honorable M. Lardinois sur un
fait personnel ; un de MM. les sténographes a eu la complaisance d’envoyer à
mon banc la réponse qu’il avait recueillie, et voici comment il rendait la
dernière phrase de ce que j’avais dit à M, Lardinois :
« Je vous le demande, messieurs, y a-t-il là
inconvenance parlementaire ? Si cela était, certes, j’en serais bien fâché.
J’ai trop le sentiment des convenances parlementaires pour y manquer vis-à-vis
de mes honorables collègues. »
Car vous savez que M. Lardinois m’avait reproché
une inconvenance parlementaire.
La seule correction que j’ai faite à cette
rédaction a consisté dans l’addition du mot « jamais, » parce que ce
mot était dans mes expressions comme il était dans ma pensée.
De cette manière, on devait lire :
« J’ai trop le sentiment des convenances
parlementaires pour y manquer jamais vis-à-vis de mes collègues. »
Au lieu de cela, on lit :
« J’ai trop le sentiment des convenances
parlementaires pour y manquer souvent vis-à-vis de mes collègues. » (On rit.)
Que des députes se renvoient quelques
plaisanteries, c’est permis ; c’est peut-être utile pour rompre la monotonie de
nos discussions ; mais qu’à l’administration du Moniteur, que nous payons pour rendre un compte fidèle de nos
débats, on se permette de semblables altérations, dans un but injurieux ou
malicieux, voilà ce que je ne puis tolérer. Il est évident que celui qui a
substitué le mot « souvent » au mot « jamais, » a voulu me
faire dire à moi-même que je me permettais quelquefois de pareilles
inconvenances.
Puisque j’ai la parole relativement au Moniteur, j’en dirai encore quelque
chose.
Le Moniteur
ne remplit pas, selon moi, le but que nous nous sommes proposé en le créant. La
manière dont il rend compte de nos discussions est souvent bien, quelquefois
elle est très mal ; cela dépend du sténographe sous la main duquel on tombe. Si
on tombe sous la main de tel ou de tel sténographe, on n’a qu’à se louer de la
manière dont on a été recueilli ; mais si l’on tombe sous la main d’un autre
sténographe, vous trouvez un travail plein de contresens, le travail d’un homme
qui n’a pas compris la question. Voilà ce qui m’est arrivé souvent et ce dont
j’ai entendu d’autres que moi se plaindre.
D’un autre côté, la différence des caractères dont
on se sert en rend quelquefois la lecture tout à fait fatigante. S’agit-il de
l’acceptation d’un legs, de la nomination d’un fonctionnaire public, d’un
manifeste des ministres pour expliquer au pays la manière toute particulière
dont ils protègent l’industrie et le commerce, tout cela est imprimé en gros
caractères, en cicéro, tandis que nos
débats sont imprimés en très petits caractères, en véritables pattes de
mouches, si je puis m’exprimer ainsi.
Ce n’est pas tout. Quand le
sénat est assemblé, on joint deux on trois suppléments au Moniteur, et nos opinions se trouvent perdues an milieu de toutes
ces feuilles. La lecture du Moniteur
ne saurait être attrayante par elle-même ; on devrait par conséquent éviter de
la rendre tout à fait repoussante par la manière dont on l’imprime.
Il y a, messieurs, des améliorations à faire dans
la confection de ce recueil. Si la subvention qu’on lui accorde annuellement
n’est pas suffisante, qu’on l’augmente. Il serait convenable surtout qu’on
agrandît son format.
Je fais la proposition que MM. les questeurs soient
chargés de s’informer de la manière dont l’altération dont je me plains a été
effectuée, et qu’ils rendent compte à la chambre des moyens à mettre en usage
pour parvenir à améliorer l’impression du Moniteur.
M. Liedts, questeur. - Messieurs, je me
charge volontiers du soin de prendre des informations sur la manière dont
l’altération qui vient d’être signalée a été faite ; elle consiste dans la
substitution du mot « souvent » au mot « jamais, » dans une
phrase prononcée par l’honorable M. Jullien.
Mais si cet honorable membre savait ce que c’est
qu’une imprimerie, il comprendrait combien il est facile que de jeunes
compositeurs fassent, sans le vouloir, de semblables substitutions. Je ne puis
imaginer que les sténographes se permettent de pareilles altérations ; si cela
était, je les en blâmerais, et je prendrais des mesures pour qu’à l’avenir il n’y
ait plus lieu à former des plaintes de cette nature.
M. Jullien se plaint aussi de la manière dont les
discours sont reproduits dans le Moniteur
; mais le compte-rendu de nos séances dépend de plusieurs choses.
Notre Moniteur
nous coûte cinquante mille francs par an ; en France le Moniteur coûte 50,000 fr. par mois ; et cependant on s’y plaint
encore, quoiqu’une telle dépense fournisse les moyens de bien faire.
Quant à la rédaction il est peut-être impossible
qu’elle satisfasse toujours les orateurs : rien n’est si capricieux que
l’expression d’un homme qui improvise, et que la manière de rendre la même
pensée ; les idées se présentent dans chaque tête sous des formes différentes,
et de là il en résulte que les sténographes saisissent plus ou moins heureusement
toutes les nuances sous lesquelles les improvisateurs ont prétendu présenter
leurs pensées. Cela est si vrai que tel sténographe recueille à la satisfaction
de certains orateurs et ne recueille pas à la satisfaction d’autres orateurs ;
j’en ai l’expérience, car c’est à moi que l’on s’adresse et c’est moi qui
reçois les plaintes et les éloges.
On aurait un meilleur travail si on augmentait le
personnel du bureau des sténographes, et le personnel des typographes au Moniteur, parce qu’alors on pourrait,
comme en France, procéder à l’impression des discours pendant les séances
mêmes, et les soumettre aux membres pour qu’ils pussent les corriger. Mais pour
arriver à un tel résultat, il faudrait dépenser quarante à cinquante mille
francs par mois, et je doute qu’on veuille y consentir.
Quant aux caractères, si on en employait de plus
gros pour le compte-rendu de nos séances, il faudrait multiplier les
suppléments déjà assez nombreux, et augmenter les inconvénients qu’on a
signalés ce qui ne serait pas un attrait pour faire lire nos discussions.
PROJET DE LOI OCTROYANT UN CREDIT
POUR LE REENDIGUEMENT DE CERTAINS POLDERS
M. Smits dépose sur le bureau de la
chambre, au nom de la commission des polders, le rapport sur les projets de loi
présentés dernièrement par M. le ministre des travaux publics.
M. le ministre des travaux
publics (M. Nothomb). - Je demande la
discussion de ces projets pour samedi.
M. Gendebien. - Après la loi des
douanes.
M. le ministre des travaux
publics (M. Nothomb). - Mais il n’est
pas démontré que la discussion de la loi des douanes sera terminée le 12 de ce
mois ; cependant il y a une condition dans le contrat passé avec les
entrepreneurs, et d’après laquelle il faut qu’une des deux chambres ait voté le
10 mai.
Je crois que le plus prudent est de fixer la
discussion à samedi. Il est possible qu’on ait des éclaircissements à demander
au gouvernement, qu’il y ait un motif de continuer la discussion jusqu’à lundi
; le gouvernement aura ainsi l’intervalle du dimanche pour fournir les
renseignements. Si vous fixez la discussion au lundis, ce sera évidemment trop
rapproché du jour de l’expiration du délai.
- La chambre fixe la discussion à samedi.
PROJET DE LOI PORTANT DES
MODIFICATIONS AU TARIF DES DOUANES
Discussion des modifications
apportées au tableau du tarif
Draps
et casimirs
M. le président. - La chambre, ayant
décidé dans la séance d’hier que la prohibition sur les draps et casimirs
serait levée à partir du premier janvier
M. Lardinois. - La résolution que vous
avez prise dans la séance d’hier ne peut manquer d’avoir des résultats
déplorables pour l’industrie drapière. Le temps vous apprendra quelle en sera
l’étendue. Maintenant il s’agit de rendre le moins profonde possible la plaie
faite à cette industrie.
Mon intention était de
proposer un amendement pour atteindre ce but. Mais je vous avoue que je n’ose
pas prendre sur moi de fixer le taux de l’article du tarif.
J’espère que votre intention n’est pas de sacrifier
l’industrie de Verviers. Je pense donc que vous voudrez bien apporter des
modifications à cet article du tarif, et que la résolution que vous prendrez à
cet égard ne sera que provisoire.
J’aurai le temps d’en référer à ceux qui pourront
me donner des renseignements ; et au deuxième vote, si j’ai une proposition à
faire dans l’intérêt de l’industrie drapière, je ne serai pas forclos ; car,
d’après les sentiments que l’on a exprimés dans la chambre, je ne pense pas que
vous vouliez offrir l’industrie de Verviers en holocauste à l’étranger.
M. le ministre des finances
(M. d'Huart). - Il est d’abord important de faire remarquer à la
chambre que si, comme vient de le dire le préopinant, le vote d’hier sacrifie
l’industrie drapière de Verviers, ce sacrifice ne se réalisera pas demain ou
après-demain, puisque la disposition prise par la chambre ne doit porter ses
effets que dans 19 ou 20 mois, au 1er janvier 1839. Il n’y a donc pas lieu de
tant s’alarmer à présent.
Quant à la suspension du vote définitif sur le
chiffre en discussion que propose M. Lardinois, nous ne nous y opposons pas.
Nous désirons nous-mêmes qu’il n’y ait pas de résolution arrêtée
irrévocablement dès maintenant sur le quantum du droit, et que d’ici au
deuxième vote on ait la possibilité d’user de nouveaux renseignements et de
s’entendre sur ce qui convient le mieux d’adopter.
Nous demandons par conséquent avec l’honorable M.
Lardinois qu’il soit bien entendu que l’adoption du chiffre du projet ne
préjugera rien contre les amendements qui pourraient être adoptés au second vote.
M. Dubus (aîné).
- Je ferai remarquer que cette réserve doit faire partie du vote et être
insérée au procès-verbal.
Je voudrais savoir ensuite si M. le ministre de
l’intérieur ne veut pas formuler la réserve dont il a parlé hier. Au moment où
nous allions passer au vote, il a dit que cette disposition, dont l’effet était
reporté au 1er janvier 1839, était un moyen de négocier. Peut-être donc
conviendrait-il d’insérer dans la loi une condition qui rendrait le succès des
négociations plus certain. Les paroles du ministre ne sont que des paroles. Je
voudrais que la loi dît quelque chose et que le ministre consentît à
subordonner la loi à la condition de réciprocité de la part de
Au reste, c’est une explication que je demande,
afin d’avoir autre chose que de vaines promesses, que de vaines paroles.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Jamais
il n’a été question de subordonner la levée de la prohibition à cette condition
; car s’il s’était agi de cette condition, personne ne se serait opposé à la
levée de la prohibition.
M. Dubus (aîné). Ainsi on renonce à la
condition de réciprocité ?
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M.
de Theux). - Evidemment la levée de la prohibition n’a pas été
subordonnée à la condition de réciprocité.
Quant à la condition que j’ai annoncée, qui était
d’ajouter au droit d’importation le montant de la prime payée à la sortie du
pays de provenance, je demeure dans la même pensée ; si je n’est pas formulé de
proposition aujourd’hui, c’est que j’ai été informé que M. Lardinois devait demander
qu’on réservât le droit d’examiner et de proposer les modifications qu’on
jugerait utile d’apporter au tarir des douanes. Et comme il a été décide que
des modifications pourront être faites au second vote, si on le juge
convenable, j’ai aussi ajourné ma proposition. Si l’honorable M. Lardinois n’en
faisait pas, je me réserve de combler la lacune en ce qui concerne la prime de
restitution.
M. Demonceau.
- Messieurs, dans la séance d’hier, pour obtenir le vote que vous avez émis, M.
le ministre a déclaré qu’il consentirait à élever le taux du droit d’entrée de
manière à atteindre la prime d’exportation payée par le pays de provenance. Le
gouvernement devrait nous dire quel droit il entend proposer pour remplir ce
but. Vous comprenez qu’il est de la plus haute importance pour nous et pour les
industriels de Verviers que nous ne remettions pas au second vote l’examen
d’une question dont nous pouvons nous occuper aujourd’hui, car de cette manière
nous pourrions au second vote revenir sur la décision prise, si nous trouvons
que nous avons commis une erreur.
Je ne partage pas l’opinion de ceux qui veulent
qu’on ajourne au second vote la discussion du taux du droit. Je suis d’accord
avec le gouvernement qu’on peut établir un droit qui balance la prime que
certains pays de provenance accordent à la sortie. Je voudrais savoir quel
chiffre on veut proposer afin d’élever mes calculs.
Je demande donc que le ministre s’explique sur la
question de savoir s’il proposera oui ou non une augmentation de droit pour
atteindre la prime, et quelle sera cette augmentation.
M. Verdussen. - La déclaration qu’a
faite M. le ministre de l’intérieur dans la séance d’hier m’a également frappé.
Je pense qu’il est nécessaire qu’on fixe un chiffre approximatif pour atteindre
le but qu’on se propose, celui d’ajouter au tarif une augmentation de droit
équivalente à la prime payée à la sortie de France. Or, le droit existant
aujourd’hui à l’égard d’autres pays que
On croira peut-être que je
présente un chiffre rond au hasard. Mais ce n’est pas le hasard qui me l’a
fourni. J’ai été frappé d’une observation qui a été faite dans la discussion,
c’est que le drap français, pour être introduit dans notre pays, fait un détour
par un autre pays, pour être importé soit comme drap allemand, soit comme drap
anglais. Si nous doublons le droit de 7 p. c., on ne
pourra pas le faire voyager, parce que les 7 p. c. d’augmentation seraient
absorbés par les voyages, soit d’Allemagne, soit d’Angleterre.
Voilà ce qui m’a décidé à
vous proposer la modification que je viens d’indiquer au tarif do gouvernement,
sauf à examiner plus tard si le droit ainsi doublé est ou non assez élevé pour
balancer la prime d’exportation payée à la sortie de France. De cette manière,
nous n’aurions pas à formuler de réserve pour le second vote, puisqu’on aura
adopté un véritable amendement et que tous les amendements se reproduisent au
second vote, ainsi que les conséquences qui peuvent en découler.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je n’ai
aucune objection à faire à la proposition de l’honorable préopinant. Ainsi que
je l’ai dit hier, j’appuierai toute proposition ayant pour but de neutraliser
les primes reçues à la sortie des pays de provenance ; j’appuie donc la
proposition de M.
Verdussen.
M. Lardinois.
- Je ne sais si M. Demonceau était présent quand j’ai fait mon observation ;
j’ai dit que mon intention était de proposer des modifications à la
tarification actuelle sur les draps et casimirs étrangers. Je n’ai pas voulu
présenter maintenant cet amendement, parce que j’ai besoin de consulter mes
commettants avant de faire une proposition qui pourrait être désapprouvée et
contraire à leur intérêt. Je demande qu’on ne préjuge rien, qu’on puisse
revenir sur la question au second vote afin d’avoir le temps de consulter mes
commettants sur ce qu’il serait convenable de faire dans l’intérêt de leur
industrie, car je ne pense pas que vous vouliez la sacrifier.
M. Demonceau provoque M. le ministre à faire une
proposition quant à la prime payée par certains pays ; je ne m’y oppose pas,
mais quant à la tarification, je pense que le droit doit être uniforme.
M. Desmet. -
Si j’ai voté hier pour la prohibition, ce n’est pas parce que les draps
français reçoivent une prime à la sortie de France, mais parce que, si on la
levait, les fabricants français nous inonderaient de leurs fonds de magasin, et
porteraient ainsi un coup de mort à l’industrie de Verviers. Il n’est pas
nécessaire de discuter la question des primes. J’espère qu’au second vote on
reviendra sur la décision prise hier. Il y a nécessité de maintenir la
prohibition, non seulement parce qu’il y a une crise commerciale, mais parce
qu’il faut éviter que les fabricants français ne jettent sur nos marchés leurs
fonds de magasin, et qu’on ne peut pas savoir maintenant dans quelles
circonstances se trouvera en 1839 l’industrie dont il s’agit.
Il vaut mieux tout réserver
pour le second vote ; pendant l’intervalle qui s’écoulera d’ici là, les députés
des localités intéressées dans la question pourront consulter leurs
commettants.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je ne
veux pas rentrer dans la discussion du fond, je veux seulement faire remarquer
que l’observation de M. Desmet est précisément le principe qu’on voulait faire
prévaloir dans la loi prohibitive des cotons, principe qui a été repoussé.
M. Demonceau. - Messieurs, le système
que j’ai défendu hier était basé sur des calculs que j’avais faits ; je l’ai
défendu de bonne foi. Je me propose de revenir au second vote sur cette
question. Je ne puis désespérer de convaincre ceux qui ont voté contre moi, que
quand on m’aura prouvé la possibilité d’atteindre les draps français avec le
même droit que les draps prussiens. Si on ne s’explique pas formellement à cet
égard, il est impossible de maintenir la décision prise.
J’appuierai la proposition de M. Verdussen, sauf à
revenir sur cette proposition au second vote ; cela vaut mieux que d’attendre
ce second vote pour en formuler une. Car si on ignore absolument ce qu’elle
sera, comment fera-t-on pour répondre aux arguments dont on l’appuiera ? Pour
mon compte, il me sera impossible de répondre séance tenante à des calculs présentés d’une manière plus ou moins spécieuse. Pour moi, je
n’ai pas besoin de consulter mes commettants pour défendre leurs intérêts ; je
ne suis pas ici pour devoir recourir à eux quand j’ai une opinion à émettre.
J’ai prouvé qu’il était impossible d’établir un droit uniforme sans s’exposer à
des représailles de
Voilà donc un nouveau système ; il sera présenté au
second vote.
Je demande qu’on vote un chiffre quelconque, sauf à
revenir sur ce chiffre au vote définitif ; sans cela il n’y aurait pas de
second vote, mais un vote unique.
M. Jullien. - L’honorable M. Verdussen
vient d’établir tout à l’heure le calcul du droit qu’il désire voir établir. Il
base son calcul sur l’opinion que, pour pouvoir obtenir la prime d’exportation,
les draps français seraient obligés de faire un détour, soit par mer, soit par
la frontière d’Allemagne. Je pense que c’est une erreur de fait, Je crois que
les draps français n’ont pas besoin de faire ces allées et venues, ces détours,
pour obtenir la prime d’exportation ; qu’ils la reçoivent lors même qu’ils
passent directement de France en Belgique, dès qu’ils justifient qu’ils ont
passé la frontière.
En effet, vous ne pouvez pas avoir oublié que toute
l’argumentation de ceux qui défendent la prohibition était fondée sur cette
supposition toute gratuite que la prime ne se payait pas à la sortie de France
par la frontière belge.
Si ceci n’est pas exact, toute la protection qu’on
veut établir par la prohibition est ruinée de fond en comble ; si les choses ne
se passent pas de cette manière, la prohibition n’est plus qu’un appât pour la
fraude. Je désire qu’on s’en informe ; ceux qui sont habitués à exécuter les
lois de douane, qui en ont la pratique, peuvent nous en dire quelque chose.
Qu’est-ce que le gouvernement a à voir quand il accorde une prime
d’exportation ? Qu’on justifie de la sortie de la marchandise, que ce soit
une restitution ou une prime d’encouragement.
Qu’est-ce que l’exportateur doit constater ? Il
doit constater que la marchandise a été portée à l’étranger. Eh bien, messieurs,
dans la pratique, comment cela se constate-t-il ? Tout uniment par un document
qu’on délivre au dernier bureau de la douane, aussitôt que la marchandise a
passé la ligne séparative des deux pays, et sur lequel on inscrit tout
simplement : « vu passé à l’étranger. » N’allez donc pas croire,
messieurs, que les draps français, si on veut en obtenir la prime, doivent
faire un détour par mer ou par la frontière allemande, pour entrer dans le
royaume ; les draps français entrent frauduleusement en Belgique, sans devoir
faire un détour quelconque, et ils n’en reçoivent pas moins la prime. Voilà, je
crois, la vérité ; si je me trompais, on pourrait rectifier les faits, ou du
moins s’en informer, car c’est sur les faits que repose toute la question. Quoi
qu’il en soit, il est dans la nature des choses que
Vous voyez donc bien,
messieurs, que toute l’argumentation qui repose sur l’assertion qu’avec la
prohibition les fabricants français qui importent frauduleusement des draps en
Belgique ne peuvent pas obtenir la prime, vous voyez, dis-je, que cette
argumentation est tout à fait erronée, puisque le fait qui lui sert de base
n’est pas exact. Maintenant, posez des calculs comme vous l’entendez ; mais au
moins il faut les baser sur les faits, parce qu’il n’y a que les faits qui ne
manquent pas. Si MM. les ministres ou d’autres membres de la chambre, qui
pourraient s’expliquer sur l’objet dont il s’agit avec plus de connaissance des
faits que moi, ont d’autres notions à cet égard, je les invite à les
communiquer à l’assemblée.
M. le président. - Voici l’amendement
de M. Verdussen :
« Draps.
« Draps et casimirs ;
savoir :
« De la valeur de 8 fr., et au-dessous, 100 kil., fr. 85.
« De la valeur de 8 à
16 fr., 100 kil., fr. 150.
« De la valeur de 16 à 25 fr.,
100 kil., fr. 215.
« De la valeur de 25 à 33 fr.,
100 kil., fr. 255.
« De la valeur de 33 fr. et au-dessus, 100 kil., fr. 320.
« Draps et casimirs
d’origine française ou importés de France, le double du tarif qui précède. »
- Cet amendement est appuyé.
Une voix. - Si l’amendement
était adopté, on pourra toujours y revenir au second vote.
M. Dumortier. - Il y aura, dans toute
hypothèse, lieu à revenir sur l’article puisque nous y avons déjà admis une
modification ; du reste, il n’est personne ici qui puisse avoir la prétention
d’improviser des dispositions législatives sur une matière semblable.
M. Demonceau.
- Je désirerais savoir si, en cas de l’adoption de l’amendement de M.
Verdussen, on pourrait également revenir sur la totalité du tarif aussi bien en
ce qui concerne les autres pays qu’en ce qui concerne
Des
membres. - Non ! non :
M. Demonceau. - Je proposerai donc de
doubler le droit pour toutes les provenances ; alors nous pourrons d’ici au
second vote prendre des renseignements qui nous mettent à même d’introduire
alors dans le tarif des modifications convenables.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). -
Messieurs, une semblable proposition est contraire a l’esprit dans lequel le
vote d’hier a été admis : on est simplement convenu hier d’ajouter, pour les
pays qui accordent des primes, le montant de ces primes au droit d’ailleurs
uniforme pour toutes les provenances, mais doubler le droit en général, sans
avoir égard à la prime, c’est ce qui n’est entré dans l’esprit de personne. Je
pense donc que l’amendement de l’honorable préopinant n’a aucune chance d’être
accueilli.
M. le président.
- M. Demonceau propose de doubler le droit pour toutes les provenances ;
désire-t-il ajouter quelque chose pour développer sa proposition ?
M. Demonceau. - J’ai uniquement fait ma
proposition pour qu’on ait le temps de prendre des renseignements et d’établir
des calculs à l’égard des primes d’exportation qui sont accordées par divers
pays important des draps en Belgique, afin de fixer ensuite dans notre tarif
des chiffres tels qu’ils atteignent ces primes et produisent ainsi une
protection suffisante pour notre industrie. Il me semble donc que ma
proposition entre tout à fait dans les vues de M. le ministre, qui veut ajouter
au droit le montant de la prime accordée par chaque pays.
- L’amendement de M. Demonceau est appuyé.
M. le ministre des finances
(M. d'Huart). - Afin de sortir de ce débat et sauf à examiner
les chiffres d’ici au second vote (ce que nous voulons ainsi que l’honorable M,
Lardinois), je proposerai d’ajouter au tarif dans la colonne d’observations,
comme cela s’est fait pour différent autres articles, le libellé suivant :
« Les droits d’entrée ci-contre seront doublés
à l’égard des pays où il se paie des primes d’exportation. »
De cette manière le droit
ne serait pas doublé pour les provenances de pays où il n’existe pas de primes
d’exportation, et il le serait pour les pays qui en accordent, comme
M. de Brouckere.
- Puisqu’il est convenu qu’il y aura une seconde discussion au second vote, il
me semble, messieurs, que ce serait perdre son temps que de prolonger celle-ci
; votons l’amendement de M. le ministre, en ne le considérant toutefois que
comme un amendement provisoire sur lequel nous reviendrons au second vote.
M. Demonceau.
- Je retire mon amendement qui n’avait d’autre but que de nous réserver la
faculté de revenir sur l’article au second vote.
M. Verdussen. - Je retire aussi le mien
; car, en le présentant, je n’avais d’autre but que celui qui sera atteint par
la proposition de M. le ministre.
M. le président. - Je vais mettre aux
voix l’amendement de M. le ministre des finances, mais il est bien entendu
qu’on y reviendra au second vote.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- On peut même insérer cette réserve au procès-verbal.
M. le président. - On l’insèrera.
- La proposition de M. le ministre des finances est
mise aux voix et adoptée.
Ouvrages
de terre
M. le président. - Nous passons à
l’article « Ouvrages de terre » :
« Porcelaines blanches ou teintes sans dorure
: pour 100 kil., droit d’entrée : fr. 25 ; droit
de sortie : 1 fr.
« Porcelaines peintes ou dorées : pour 100 kil., droit d’entrée : fr. 50 ; droit de sortie : fr.
1.
« Faïences de toute espèce sans distinction de
provenance, blanches : pour 100 kil., droit d’entrée :
fr. 10 ; droit de sortie : 60 c..
« Idem, peintes ou imprimées : pour 100 kil., droit d’entrée : fr. 10 ; droit de sortie : 60 c.
« Poteries de terre ou de grès de toute espèce
à la valeur : droit d’entrée : 6 p. c. ; droit de
sortie : 1/2 p. c.
« Creusets, à la valeur : droit d’entrée : 1
p. c. ; droit de sortie : 2 p. c. »
La note
suivante se trouve annexée au tarif :
« Les boissons et liquides non spécialement tarifes
en cruches, tels que les liquides spiritueux, le vinaigre, etc., ne sont pas
soumis à un droit distinct pour les cruches, lorsque le droit dû sur le liquide
s’élève à plus de 5 centimes par litre, et qu’elles en sont remplies en entier.
Les eaux minérales ou tous autres liquides dont le droit serait inférieur à
cette proportion, seront assujettis à un droit séparé pour les vaisseaux qui
les contiennent, et, dans le cas de préemption, le liquide sera considéré comme
compris dans la valeur déclarée de ces vases. »
La section centrale avait d’abord proposé de faire
cesser le droit différentiel sur les porcelaines blanches ou teintes avec ou
sans dorure, d’établir un droit uniforme de 40 francs à l’entrée sur la
porcelaine blanche ou peinte, d’établir un droit de 60 francs sur la porcelaine
peinte ou dorée, de supprimer le droit différentiel sur les faïences, en
admettant pour le reste le chiffre du tarif proposé ; enfin, sur la question
des poteries, elle a accueilli le projet du gouvernement.
MM. Berger, Zoude et d’Hoffschmidt ont fait les
propositions suivantes ; la section centrale propose de les modifier comme suit
:
Propositions de MM. Berger,
Zoude et d’Hoffschmidt, par 100 kil. (entre parenthèses les proposition de la section centrale) :
« Poterie commune : fr. 3 (fr. 5)
« Faïence en terre commune, blanches : fr. 10
(fr. 8)
« Faïence en terre commune, décorées : fr. 20
(fr. 12)
« Faïences en terre de pipe, blanches : fr. 40
(fr. 18)
« Faïences en terre de pipe, décorées : fr. 80
(fr. 27)
« Porcelaines blanches ou teintes : fr. 80
(fr. 60)
« Porcelaines peintes ou dorées : fr. 160 (fr.
80) »
M. Dumortier. - Messieurs, vous
connaissez les propositions primitives de la section centrale, relativement à
l’article en discussion. La section centrale a eu à examiner les propositions
du gouvernement et celles de nos honorables collègues, MM. Berger,
d’Hoffschmidt et Zoude, et elle a pris des conclusions différentes de celles
qu’elle avait présentées d’abord.
Ce qui justifie, messieurs, les nouvelles
conclusions de la section centrale, c’est qu’elle avait été induite en erreur
par l’examen du tarif comparé que le gouvernement lui a fait remettre. Une
faute d’impression existe dans ce tarif, et cette erreur était d’une nature
telle que nous avions dû prendre des résolutions différentes de celles
auxquelles nous nous sommes arrêtés quand l’erreur a été reconnue.
Il semblait d’après le tarif comparatif que nos
poteries de terre et de grès pouvaient entrer en France, moyennant un droit de
53 fr. 90 c. les 100 kilog. ; mais, en réalité, ces
objets sont prohibés à l’entrée en France, et dès lors vous comprenez que nous
ne devions plus admettre la réduction telle qu’elle avait été primitivement
proposée.
Dans l’état actuel des choses, nous avons cru
devoir adopter d’abord la classification proposée par nos honorables collègues
du Luxembourg. Cette classification est différente de celle du gouvernement.
Dans le projet du gouvernement, toutes les
faïences, de quelque nature qu’elles soient, sont confondues, et paient 10
francs lorsqu’elles sont blanches, et 15 fr. lorsqu’elles sont peintes ou
imprimées. La section centrale qui a examiné les propositions de nos honorables
collègues, a reconnu qu’il était juste d’admettre la distinction qu’ils
proposent. En effet, une partie de nos faïences a la pâte rouge après la
cuisson, et une autre, la pâte blanche ; l’on peut dès lors facilement
distinguer ces deux espèces de faïences. D’un autre côté, les faïences ont des
poids différents, et leur valeur est en raison inverse de leur poids. Il est
donc nécessaire d’admettre des droits différents pour les faïences en terre
commune et pour celles en terre de pipe.
Si nous n’avons pas pu admettre les droits proposés
par les députés du Luxembourg, parce qu’ils nous ont paru trop élevés, nous
n’avons pas pu non plus nous rallier à la proposition du gouvernement, parce
qu’elle ne nous a pas offert une protection suffisante pour nos faïenceries.
Les faïences en terre commune nous ont paru pouvoir subir une réduction, tandis
que le droit sur les faïences en terre de pipe nous a paru susceptible d’être
augmenté.
Par ce moyen, messieurs, l’augmentation que nous
proposons pour les faïences en terre de pipe se trouve en quelque sorte
compensée par la diminution que nous proposons sur les faïences en terre commune.
La protection accordée actuellement aux faïences en
terre de pipe est certainement insuffisante ; et il résulte des calculs
auxquels s’est livrée la section centrale que l’Angleterre a introduit en
Belgique, pendant l’année 1834, 332,000 kilogr. de faïence. Or, messieurs, pour se faire une idée de ce que
représentent ces 332,000 kilogr., il est bon de réduire ce chiffre à un nombre déterminé
d’assiettes. C’est une base que l’on peut prendre facilement. A la vérité
l’assiette est précisément l’objet de la moindre valeur, puisque les articles
plus façonnés sont d’un prix infiniment supérieur. Mais il faut prendre une
base quelconque ; et en admettant l’assiette pour base, nous nous sommes
assurés qu’une douzaine d’assiettes anglaises pèse un kilogr.
et demi ; il en résulterait donc que l’Angleterre a
importé en Belgique 2,656,000 assiettes pendant l’année 1834.
Et remarquez, messieurs, qu’il n’y a pas
d’industrie en Belgique qui mérite plus votre protection que celle des
poteries, parce que cette industrie se crée des valeurs avec rien, avec du
limon, avec de la boue ; de manière que tout ce que
Nous nous sommes convaincus que la fabrication de
la faïence beige est aussi avancée que celle de la faïence anglaise et si
celle-ci est préférée à la nôtre, ce n’est guère encore que par un caprice de
la mode. Mais la faïence anglaise est à meilleur compte que la nôtre parce que
l’Angleterre possède de meilleures matières premières, et en beaucoup plus
grand nombre que nous. Il en résulte que nos faïenceries ont nécessairement
besoin de protection, si l’on veut qu’elles subsistent. Or, en admettant la
réduction proposée par le gouvernement, il est clair qu’on ne protégerait
nullement cette industrie.
Le droit actuel qui frappe les faïences en terre de
pipe est de 12 fr. 60c. par 100 kilog. ; or, le
gouvernement propose de réduire ce droit à 10 fr. Déjà, sous l’empire du droit
ancien, l’Angleterre importe annuellement environ 5 millions d’assiettes en
Belgique. Si vous réduisez ce droit d’un quart et au-delà, je ne sais où
s’arrêtera cette importation considérable.
Il s’agit de savoir si nous devons favoriser
l’Angleterre aux dépens de notre propre industrie. Pour mon compte, j’aime
beaucoup l’Angleterre, je considère l’Angleterre comme le pays le plus
industrieux du monde, mais ce n’est pas un motif pour sacrifier notre industrie
à la sienne. Je pense que nous devons avant tout protéger nos faïenceries, et
ne faire à l’Angleterre que les concessions proportionnées à celles qu’elle
nous fait.
Or, il résulte du tableau général de commerce que
l’Angleterre importe annuellement en Belgique pour une valeur de 50 millions,
tandis que
Vous avez entendu tout à l’heure, de la bouche d’un
honorable député d’Anvers, que l’Angleterre frappe chaque jour quelques-uns de
nos fabricats de prohibition. C’est ainsi que la chicorée qui s’exportait en
Angleterre, vient d’être frappée d’un droit qui équivaut à la prohibition ; dès
lors l’exportation n’en est plus possible. Pourquoi donc irions-nous
bénévolement sacrifier, en faveur de l’Angleterre, une industrie aussi
précieuse que celle des faïences, industrie qui, je le répète, produit de
l’argent avec du limon et de la boue.
Cette considération nous a engagés à vous proposer
d’admettre le taux de 18 fr. pour les faïences en pipe de terre, et un droit de
8 fr. pour celles en terre commune. Il y aura donc une véritable compensation.
Je dois faire observer cependant que, quant à
Relativement aux porcelaines, il a été démontré que
Et remarquez, messieurs, que sous l’empire du droit
qui frappe actuellement à l’entrée les porcelaines françaises, un grand nombre
de fabriques se sont établies chez nous. Or, ces fabriques ne pourraient plus
subsister si on adoptait la réduction proposée par le gouvernement. Evidemment
on supprimerait toute espèce de protection en faveur de cette industrie, si
l’on réduisait le droit actuel à 25 fr. En effet, ce serait là une réduction de
quatre centimes par assiette.
Et ce qui prouve que nous devons être réservés en
cette matière, c’est l’examen des tarifs des autres puissances. Ainsi, par
exemple, la porcelaine pour laquelle on demande une réduction de 35 fr. en
faveur de
Le droit que le
gouvernement propose étant de 25 fr., le droit français, qui est de 344, serait
douze fois plus fort si la proposition du gouvernement était admise. Le droit
que vous propose la section centrale est encore six fois moins élevé que le
droit français, Nous avons cru devoir, pour faire cesser toute apparence de
partialité, proposer d’établir le même droit sur toutes les frontières ;
l’Allemagne et l’Angleterre n’en éprouveront pas grand préjudice, car
l’Allemagne ne nous a importé en 1834 que 435 kil. de
porcelaine, et l’Angleterre ne nous en a importé que 5,348 kil. Nulle plainte
ne pourra être élevée de ce chef.
Les droits proposés par la section centrale sont
très modérés ; vous ne pouvez pas vous refuser à les admettre.
Le gouvernement a proposé un droit différent pour
la porcelaine décorée ; il est juste de laisser au pays l’avantage de la
dernière main-d’œuvre ; nous avons admis les échelles proposées par le
gouvernement, mais nous avons porté le droit de 50 à 80, à la moitié de ce que
demandaient MM. Zoude, Berger et d’Hoffschmidt.
M. Berger. - Comme l’honorable M.
Dumortier vient de présenter la plupart des observations que je me proposais de
faire, J’appellerai seulement votre attention sur la situation de cette
industrie dans la province du Luxembourg. Nous avons beaucoup plus de
difficultés à vaincre que les autres localités. En effet, les seuls frais de
transport pour rendre nos produits du Luxembourg sur les marchés de
Si vous supputez les frais de transport de Londres
à Bruxelles et que vous y joigniez le droit d’entrée sur la faïence anglaise,
vous n’aurez pas une somme équivalente aux frais de transport des marchandises
du Luxembourg pour arriver sur les marchés de
Aujourd’hui, ce débouché nous est fermé, il ne nous
reste que les marchés de
Je bornerai là quant à présent mes observations.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je
demande la parole : ce n’est pas pour discuter le rapport sur la proposition de
MM. Berger, Zoude et d’Hoffschmidt, car je n’ai pas eu le temps de le lire, il
vient seulement de nous être remis ; mais je ne veux pas qu’on prenne mon
silence pour une approbation, je déclare que je fais toute réserve pour le
second vote.
M. le président.
- M. Berger se rallie-t-il à la commission ?
M. Berger. - Je maintiens ma
proposition qui n’est qu’une moyenne du tarif prussien. M. Dumortier vous a
fait connaître tous les tarifs des puissances voisines. Il résulte de l’examen
de ces tarifs qu’ils sont tous plus élevés que le nôtre. Dans ces circonstances
nous ne pouvons mieux faire que d’imiter l’exemple de ces puissances. Voyez en
Prusse, en Angleterre, en France, où les tarifs sont plus élevés que chez nous,
les industries si florissantes, tandis que chez nous où les intérêts de
l’industrie ont été sacrifiés dans notre tarif à l’intérêt commercial de
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Je pense avec M. le ministre de l’intérieur qu’il convient, avant de se
prononcer en connaissance de cause, de prendre le temps de lire le rapport qui
vient d’être distribué, sur la proposition de MM. Zoude, Berger et
d’Hoffschmidt. Cependant je présenterai dès maintenant une courte observation.
D’après ce qu’avancent des députés du Luxembourg, le tarif proposé par le
gouvernement va devenir extrêmement nuisible à nos fabricants de faïences, s’il
est adopté. C’est là une grave erreur, car notre proposition est au contraire
essentiellement avantageuse à nos faïences. Il suffit de jeter les yeux sur les
chiffres du tarif, pour le démontrer clairement.
Le droit actuel sur la
faïence est de 6 florins par
Les critiques faites sous ce rapport sont donc
entièrement gratuites.
M. Berger. - M. le ministre des
finances vient de dire que je prétends que le tarif proposé deviendrait ruineux
pour notre industrie, tandis qu’au contraire il lui est beaucoup plus favorable
que le tarif existant. M. le ministre m’a mal compris ; j’ai dit que le tarif
tel qu’il existe était ruineux pour nos faïenceries, et j’ai posé en fait que
sous sa loi actuelle c’était l’Angleterre qui envahissait nos marchés, qui
avait le monopole de la fourniture de la faïence. J’ai prétendu que nos
établissements étaient dans la détresse, qu’il fallait les tirer de leur triste
position.
Quant à la question de savoir si le remède proposé
est efficace, il me sera facile de démontrer que la légère augmentation
proposée est absolument insignifiante et que cette modification ne peut en rien
améliorer la position de nos établissements.
Pour une espèce on propose une majoration, cela est
vrai ; mais on oublie que le même tarif renferme une réduction notable sur les
produits de
Une augmentation semblable est insignifiante, elle
ne peut pas tirer notre industrie de l’état de marasme où elle se trouve ; il
faudrait un droit de 8 à 10 p. c. il ne serait donc pas exorbitant, il se
rapprocherait du droit perçu en Prusse et serait inférieur au tarif français et
au tarif anglais, et protégerait suffisamment notre industrie. Je pense que le
tarif proposé par la section centrale et qui porte la protection à 10 p. c. de
la valeur est admissible ; je ne verrai pas d’inconvénient à m’y rallier.
M. Dumortier. - Dans mon opinion,
j’attache tant de prix à la fabrication de la porcelaine et de la faïence,
fabrication au moyen de laquelle on crée une valeur avec du limon ; j’ai tant
de confiance dans de notre fabrication que si j’avais entrevu la possibilité de
faire adopter un droit plus élevé, je n’aurais pas hésité à le proposer. Je
pense que les droits proposés par la section centrale sont encore trop peu
élevés ; ils ne sont pas suffisants ; mais comme la chambre ne nous paraissait
pas dans l’intention d’adopter des droits élevés, nous avions proposé des
droits modérés dans la crainte de voir rejeter ma proposition.
Relativement à la faïence, la principale différence
entre notre projet et celui du gouvernement, c’est l’adoption de là proposition
de MM. Berger, Zoude et d’Hoffschmidt, consistant à distinguer les faïences cet
deux catégories faïence en terre commune blanche, faïence en terre de pipe
blanche. Les faïences en terre commune ont la pâte rouge avant la cuisson ; les
faïences en terre de pipe ont la pâte blanche avant la cuisson. La première,
qui est la plus commune, est du poids le plus élevé et de la valeur la moins
grande ; l’autre est du poids le moins grand et de la valeur la plus élevée.
Nous avons proposé une réduction de 4 fr. sur la faïence commune et une
augmentation de 4 fr. sur la faïence fine. Je crois que ces propositions sont
raisonnables.
Le droit que propose le gouvernement sur la faïence
blanche ne peut être admis. Il propose une réduction de 2 francs : or, sur 12
francs cela fait 20 p. c. Pouvez-vous admettre une réduction semblable sur une
industrie déjà souffrante ? je ne le pense pas.
Je communiquerai à la chambre des renseignements
curieux sur ce point.
Ayant vu dans les magasins de Bruxelles de la
faïence en terre de pipe, je désirai prendre des informations.
J’ai appris que la faïence blanche en terre de pipe
venant d’Angleterre se vend, la douzaine d’assiettes, 4 francs, tandis que la
faïence blanche en terre de pipe de Tournay, également belle et également
bonne, se vend, la douzaine d’assiettes, 3 francs. Voyez d’après cela combien
est grand l’empire de la mode ; voyez si vous voulez favoriser la faïence
anglaise au préjudice de la faïence tout aussi bonne et tout aussi belle de
notre pays.
Quant aux porcelaines, admettrez-vous la réduction
demandée par le gouvernement sur les porcelaines blanches ? réduction qui n’est
compensée par rien ; car je regarde comme rien l’élévation du droit sur les
porcelaines peintes ou dorées, qui constituent un objet tout à fait minime.
Quel sera le résultat de votre vote ? Vous savez
qu’il y a en ce moment une grande crise commerciale à Limoges parmi les
fabricants de porcelaine ? C’est de Limoges que vient toute la porcelaine
blanche importée dans le pays. Si vous réduisez les droits de 60 à 25 francs,
les fabricants de porcelaines de Limoges, qui ont besoin d’argent et qui savent
que
Remarquez que les fabricants de porcelaine de
Par toutes ces considérations, je pense que les
propositions de la section centrale doivent être adoptées. Je crois que vous
n’en douterez pas lorsque vous aurez jeté les yeux sur le tableau comparatif
présenté par la section centrale. Voici une partie des chiffres de ce tableau :
(Ce tableau,
inséré dans le Moniteur du jour, n’est pas repris dans la présente version
numérisée.)
Remarquez que les droits du
tarif français sont prohibitifs.
Nous avons entendu dans la section centrale un
fabricant de porcelaine de Tournay ; il nous a déclaré que dans les dix
dernières années il n’a pu introduire en France que 600 kilog. de porcelaine de Tournay, ce qui fait par année 60 kilog.,
tandis que
Je le répète, le droit n’est pas assez élevé ; si
je voyais qu’il y eût chance de faire adopter un droit plus élevé, je le
proposerais, parce que je le crois nécessaire ; mais au moins ne doit-on pas
admettre des chiffres moins élevés que ceux proposés par la section centrale.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Il convient de faire la comparaison entre l’importation et l’exportation des
faïences.
En 1834, il en a été importé pour une valeur de fr.
101,315.
Dans la même année, il en a été exporté pour une
valeur de fr. 20,417.
Différence, fr. 80,898, laquelle n’est certes pas
aussi notable qu’on voudrait le prétendre.
M. Dumortier. - Mais les porcelaines
sont imposées au poids et non pas à la valeur.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Oui, mais une commission établie au ministère de l’intérieur a transformé le
poids en valeur sur les états statistiques. Au reste, si l’on conteste le
chiffre, je veux bien le doubler et supposer un moment que cette commission n’a
pas bien évalué.
Je ferai remarquer que les importations sont
exclusivement de faïences peintes, car pour les blanches nous n’avons rien à
craindre de l’étranger ; or, le projet du gouvernement admet une augmentation
du droit actuel sur les faïences peintes, et les propositions de la section
centrale sont en certains cas au-dessous de celles du gouvernement. En effet,
sur les faïences en terre commune blanche, la section centrale propose 8 fr.,
le gouvernement 10 ; sur les faïences de même nature, décorées, la section
centrale propose 12 fr., le gouvernement 15.
Ainsi nous protégeons une
espèce de faïence qui se fabrique principalement dans le pays, au moyen d’un
droit plus élevé que celui proposé par la section centrale elle-même.
M. Dumortier nous a fourni tout à l’heure, sans
s’en apercevoir, un argument très fort contre sa proposition, Il a assuré que
la faïence anglaise se vendait beaucoup plus cher à Bruxelles que la faïence
belge ; eh bien, quelle conclusion faut-il en tirer si ce n’est que nous
pouvons lutter avec avantage contre l’Angleterre ? Quoi qu’il en soit,
l’importation des faïences, en
M. Dubus (aîné). - Les chiffres que
viennent de présenter M. le ministre des finances sont manifestement erronés.
Il a dit que l’importation des faïences en 1834 avait été en tout d’une valeur
de 101,315 fr. Or, d’Angleterre seulement, il nous est venu en 1834 332,000
kilog. de faïence.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- L’Angleterre a importé en 1834 des faïences pour une valeur de 97,712 fr.
M. Dubus (aîné). - Ce serait plus de
trois kilog. pour moins d’un franc, or, 2 douzaines
d’assiettes pèsent 3 kilog. ; on aurait donc pour
moins d’un franc 2 douzaines d’assiettes. Je vous demande d’après cela ce que
signifient les chiffres que vient de présenter M. le ministre. Evidemment on
s’est trompé de plus des cinq sixièmes.
Ce qu’il y a de positif, c’est qu’il a été importé
dans le pays 332,000 kilog. de faïence anglaise
seulement ; importation énorme, car elle représente une quantité de 2,600,000
assiettes.
Le ministre a dit encore : Le tarif que propose la
section centrale est moins favorable que celui du gouvernement, en ce qui
concerne la faïence commune ; c’est en cela qu’il y a erreur.
Eh bien, le même droit sur ta faïence commune et
sur la faïence en terre de pipe, c’est agir en sens inverse de ce qu’il faut
faire. La faïence commune est plus pesante que l’autre, et elle est d’une
valeur moindre. Ce sont deux espèces différentes, et vous ne devez pas hésiter
à en faire deux catégories différentes.
Sous le tarif actuellement en vigueur, c’est la
faïence fine ou en terre de pipe qui s’est emparée de nos marchés. La section
centrale a adopté le chiffre du tarif actuel comme base, et a augmenté de
chiffre pour la faïence fine, de manière cependant à établit un droit à la
valeur très modéré.
Le ministre dit qu’il n’a pas eu le temps de fixer
son opinion sur ce tarif-là ; mais je suis persuadé qu’au second vote il ne
demandera pas la moindre modification aux chiffres de la section centrale.
J’incline même à croire que ce n’est pas assez faire pour l’industrie du pays.
Je dirai un mot sur le chiffre relatif aux
porcelaines.
La fabrication de la porcelaine est ancienne dans
le pays ; elle y a été en prospérité, et elle a eu longtemps son principal
débouché en France. Ce sont les modifications apportées au tarif français qui
lui ont causé le plus grand dommage. En effet, qu’en est-il arrivé ? c’est que cette industrie a été importée elle-même en France
; c’est que des industriels belges ont été établir sur la frontière française
des fabriques de porcelaines, afin d’alimenter la consommation de
Qu’a-t-on opposé à la prohibition française ? un droit très modéré, et tellement modéré qu’il n’empêche
pas les importations. Ce droit est de 60 francs pour 100 kilog.,
et on a importé 50,000 kil, de porcelaines françaises sous ce tarif.
Il ne faut pas porter la
main de mort sur cette industrie que
Du reste je n’ai pas besoin de justifier l’opinion
de la section centrale relativement à la porcelaine blanche et à la porcelaine
peinte et dorée : les Anglais, les Prussiens, les Français, font une
distinction entre ces porcelaines, et vous ne pouvez hésiter à les imiter.
Je croirais abuser des moments de la chambre si
j’entrais dans de plus longs détails.
M. le ministre des finances
(M. d'Huart). - On parle sans cesse du maintien de ce qui
existe, et on perd de vue en même temps qu’on propose un droit de 27 fr. là où
il n’y en a qu’un de 6 florins ; qu’on ne s’appuie donc pas tant du statu quo,
quand on veut réellement le double des droits qui subsistent, dans la plupart
des cas.
Le fort droit envers
M. Berger. -
Le ministre des finances, en déclarant que nos importations en faïences, en
1834, ne valaient que 100.000 fr., a induit la chambre en erreur ; il ne faut
pas qu’elle reste sous l’impression de cette assertion. D’après le tableau, je
vois qu’il a été introduit 332,000 kilog. de faïence anglaise ; or, une
personne qui a de l’expérience dans cette industrie assure que chaque kilog,
devait valoir 5 fr. environ, parce que la faïence anglaise était fine et peinte
; eh bien, 332,000 kilog., à raison de 5 fr. le kilog., font un million et
demi.
Si une telle masse de marchandise ne valait que
cent mille francs, l’Angleterre n’insisterait pas pour le maintien de la
législation existante, car elle ne se donnerait pas la peine de nous envoyer
des objets de si peu de valeur.
M. Dumortier. - Ce que dit le préopinant
prouve ce que sont les perceptions à la valeur, toutes les déclarations sont
mensongères ; et cela justifie la sage mesure que vous avez prise pour établir,
à l’avenir, les droits au poids pour la bonneterie. Les vérifications
matérielles, celles des nombres, ou des poids, sont toujours les plus sûres
pour éviter la fraude.
Mais, dira-t-on, le droit est au poids ; soit, mais
vous n’ignorez pas que l’on exige en même temps la déclaration de la valeur ;
et par conséquent, on vous a déclaré 100,000 francs au lieu de un million et
demi.
Si l’estimation de 100,000 francs venait du
ministère, cela prouverait bien peu de capacité dans ceux qui l’auraient faite.
M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). -
L’estimation est le résultat des déclarations.
M. Coghen - C’est une erreur !
M. Dumortier. - Il est certain que
l’Angleterre introduit en Belgique pour plus de un million de faïences, ce dont
Vous proposez 80 fr. au lieu de 60 fr. sur les
porcelaines décorées ; si vous voulez supprimer cette différence, j’y consens ;
je ne tiens pas ce droit pour nécessaire ; ce qui est important, c’est
l’augmentation du droit pour les porcelaines blanches.
Il entre 50,000 kilog. de
faïence de terre de pipe ; nous proposons une majoration pour cet objet, mais
nous proposons, par compensation, une diminution sur les faïences communes.
En proposant une réduction
d’un côté, une augmentation de l’autre, nous arrivons, terme moyen, à peu près
au même résultat. Vous pouvez donc admettre la proposition de la section
centrale. Cette proposition est même, je le crains, insuffisante pour protéger
notre industrie faïencière qui paraît vouloir prendre un essor considérable.
Cette industrie est précieuse en ce qu’elle produit
beaucoup de valeurs avec rien. Empêchons donc qu’un million n’aille pas
inutilement de
Les fabricants de porcelaine trouvent que le droit
de 80 fr. ne suffit pas.
M. Fallon. -
Je ne suis pas d’accord avec le ministre des finances. Il reproche à la section
centrale d’avoir majoré le droit sur la porcelaine blanche qui vient de France
; je crois au contraire que le droit sur la porcelaine blanche est diminué de 3
fr. et quelques centimes.
La section centrale a porté un autre chiffre pour
la porcelaine dorée et peinte ; mais elle a fait preuve de modération à cet
égard car le gouvernement français a porté la différence entre la porcelaine
décorée et la porcelaine blanche à trois fois le droit ; de sorte que si on
suivait cette progression, nous devrions porter le droit à 28 fr. La section centrale
ne demande que 80 fr.
M. Coghen -
Messieurs, j’appuie bien volontiers la proposition de la section centrale, bien
que dans mon esprit elle soit insuffisante pour protéger efficacement notre
industrie : la section centrale a proposé une diminution du droit sur les
faïences de terre commune ; cela ne tire pas à grande conséquence, car je ne
pense pas qu’on en importe beaucoup ; mais ce qu’il importe de protéger, ce que
l’on peut fabriquer facilement dans le pays, ce sont les faïences faites de
terre de pipe et surtout des faïences décorées. M. le ministre des finances a
énoncé à cet égard des chiffres qui sont évidemment le résultat d’une erreur de
calcul commise dans les bureaux ; car il est certain que la somme de l’importation
des faïences doit s’élever à 7 ou 800,000 fr. environ ; il est certain aussi
que
Je voterai en faveur de la proposition de la
section centrale.
M. Dubus. - M. le ministre des finances
a reproché au projet de la section centrale de doubler le droit actuel sur
certaines espèces de faïences, tout en le diminuant sur d’autres espèces ; mais
que devons-nous nous proposer en faisant un tarif ? C’est de proportionner le
droit à la valeur des objets ; c’est précisément ce qu’a fait la section
centrale : elle n’a proposé qu’un droit de 8 fr. sur les faïences de terre
communes, blanches, tandis qu’elle a proposé 7 fr. sur les faïences de terre de
pipes décorées ; eh bien, messieurs, je suis convaincu que 8 fr. par cent
kilog. de faïence de terre commune blanche produit,
pour une valeur donnée, un droit plus élevé que celui qui résulte pour une
valeur égale des 27 fr. pour 100 kilog. que nous
proposons d’établir sur les faïences de terre de pipe décorées : tout le monde
peut faire le calcul et se convaincre que ce que j’avance est exact ; dès lors
n’est-il pas évident que le projet du gouvernement qui propose dix francs pour
la première espèce et seulement 15 fr. pour l’autre est tout à fait vicieux.
Je présenterai un simple
aperçu à la chambre pour la convaincre que le droit de 27 fr. est réellement
modique, considérée comme droit protecteur : un honorable député, qui a parlé
avant moi, estimait la faïence décorée 5 fr. le kilog. Je ne l’estimerai que 3
fr., car je suppose qu’une douzaine d’assiettes pèse 1 1/2 kilog.,
et en les évaluant à 4 fr. 30 la douzaine, cela revient à 3 fr. le kilog. ; 3
fr. par kilog. fait 300 fr. pour 100 kilog. Eh bien,
sur une valeur de 300 fr. vous percevriez donc 27 fr., d’après le projet de la
section centrale ; cela reviendrait à 9 p. c. Est-ce là un droit exorbitant
lorsqu’il s’agit de protéger une industrie qui appartient essentiellement au
sol et qui n’emploie que des matières qui sont presque de nulle valeur, alors
que vous êtes en présence d’une importation étrangère qui exploite pour ainsi
dire tout notre marché sans rien laisser à l’industrie du pays ?
Il me semble, messieurs, que cet aperçu démontre à
l’évidence que la proposition de la section centrale est extrêmement modérée,
même pour la catégorie qui a été l’objet des observations de M. le ministre des
finances.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- L’honorable M. Dubus dit, messieurs, que calculer un tarif de manière à
proportionner autant que possible le droit à la valeur des objets, c’est le
perfectionner ; je conviens volontiers qu’ainsi le tarif sera perfectionné en
ce sens que le droit sur certaines espèces de marchandises se trouve diminué ;
mais veuillez remarquer qu’il ne s’importe rien de ces marchandises et que
c’est précisément pour celles dont il s’importe beaucoup que l’on veut doubler
le droit. Savez-vous d’ailleurs ce qui arrivera par suite de l’adoption d’un
grand nombre de catégories ? C’est que si la douane fait son devoir, il faudra
obliger les importateurs à déballer toutes les marchandises pour les examiner
en détail tandis qu’en n’établissant que deux
catégories, comme le propose le gouvernement, il est très facile de les
distinguer, puisqu’il suffit de voir si une faïence est peinte ou décorée ou si
elle est blanche. La proposition de la section centrale, si elle était admise,
pourrait devenir d’une exécution tellement difficile, que le commerce de toutes
les faïences étrangères deviendrait pour ainsi dire impossible ; et cependant
il s’agissait seulement ici de remettre
Un honorable député de Bruxelles a dit tout à
l’heure que les fabricants savent décorer parfaitement la porcelaine en
Belgique, que nous ne le cédons sous ce rapport à aucun autre pays ; mais,
messieurs, si nous avons fait de tels progrès sous l’empire de la législation
actuelle, n’allez pas au-delà ; et si la fabrication de la porcelaine se fait
avantageusement en Belgique, maintenant que le droit est de 30 florins, si
notre industrie est sous ce rapport supérieure à celle des autres pays, laissez
au moins le droit tel qu’il est.
M. Dumortier. - Nous ne demandons pas
de porter ce droit à 80 fr. ; si vous voulez établir un droit uniforme de 60
fr, nous ne nous y opposerons pas.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Mais il faut protéger la décoration.
M. Dumortier. - Ce sont précisément les
porcelaines décorées qui n’entrent pas en Belgique.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Pourquoi proposez-vous alors d’élever les droits actuels sur la porcelaine
dorée ?
M. Dumortier. - C’est vous qui proposez
un droit double pour les porcelaines décorées ; vous proposez 25 francs pour
les blanches, 50 francs pour les décorées ; nous proposons 60 francs pour les
blanches et 80 francs pour les décorées ; ce n’est que 20 francs de plus ; or,
si vous voulez protéger la décoration, vous ne pouvez pas accorder moins.
Remarquez que 60 francs par cent kilog. de porcelaine
n’est pas un droit si considérable, ce n’est que 60 centimes par kilog ; et un
kilog. comprenant six assiettes, ce n’est que 10
centimes par assiette : je vous le demande, messieurs, est-ce là un droit élevé
?
Si vous admettiez le projet du gouvernement, ce
droit ne serait plus pour les porcelaines blanches que de 2 1/2 c. par assiette
; cela est évidemment trop faible. On dit qu’il n’entre pas de porcelaine
blanche : mais, messieurs, le pays en est rempli ; jusqu’aux encriers que vous
avez devant vous sont en porcelaine de France.
Je pense qu’il est
nécessaire de protéger notre fabrication, et que si nous adoptons la réduction
du droit, proposée par le gouvernement, nous ouvrons nos portes à toutes les
productions étrangères et nous ruinons notre propre industrie.
M. le ministre des finances a dit qu’il n’entre pas
en Belgique de faïence de terre commune, c’est là une erreur ; il en entre
certainement et il en entrera beaucoup plus encore lorsque les droits seront
réduits.
Je pense, messieurs, que le tarif de la section
centrale est de nature à être admis par les hommes les plus modérés ; quant à
moi, je voudrais que les droits fussent plus élevés.
M. Devaux. - Je crois, messieurs, qu’il
y a une grande erreur dans l’évaluation qui a été faite du poids des faïences ;
les faïences anglaises, ou je me trompe fort, sont beaucoup plus pesantes que
les faïences du pays.
M. Dumortier. - C’est l’inverse.
M. Devaux. - Tout au moins il n’est pas
exact de dire qu’une douzaine ne pèse qu’un kilog. et demi ; je ne veux rien
affirmer, mais d’en avoir vu très souvent, j’évaluerais les assiettes anglaises
au double du poids qu’on leur attribue ; s’il en était ainsi, cela changerait
tout à fait la proportion du droit, puisque alors les 27 francs, au lieu de
tomber sur une valeur de 300 francs, comme l’évaluait mon honorable voisin,
tomberaient sur une valeur de 150 francs,et que le droit serait ainsi de 20
p.c. au lieu d’être de 10. Tout dépend donc du poids, à l’égard duquel je crois
fortement qu’on s’est trompé. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier. - Je dois assurer à
l’honorable préopinant qu’il est complètement dans l’erreur quand il pense que
les assiettes anglaises sont plus pesantes que celles de notre pays, c’est
l’inverse, les assiettes belges pèsent beaucoup plus que les anglaises qui sont
beaucoup plus minces.
- La discussion est close.
M. le président. - Je vais d’abord
mettre aux voix les diverses propositions faites par M. Berger, Zoude et
d’Hoffschmidt. La chambre entend sans doute voter ces propositions
collectivement. (Oui ! oui !)
Les propositions de MM. Berger, Zoude et
d’Hoffschmidt sont mises aux voix et ne sont pas adoptées.
Les propositions de la section centrale sont
ensuite mises aux voix et adoptées.
« Creusets : 1 p c. à l’entrée ; 2 p. c. à la
sortie. »
- Adopté.
M. le président. - « Pierres.
Ardoises pour toiture sans distinction d’origine, polies à écrire ou encadrées
: 4 fr. à l’entrée, et fr, 0,30 à la sortie par mille. »
La section centrale propose 5 fr. à l’entrée et fr.
0,40 à la sortie. Elle ajoute de plus au libellé de l’article, la note qui suit
:
« Cette disposition n’aura d’effet qu’à parti du
1er janvier 1838. »
M. le président. - Divers amendements
ont été déposés, voici d’abord celui de M.
Pirson :
« Je propose d’ajourner tout changement à la
loi de douanes relativement aux ardoises.
« Le principal motif de l’ajournement que je
propose, est que, sans de nouvelles communications, il est impossible que les
propriétaires de nos ardoisières puissent rivaliser avec les propriétaire
d’ardoisières en France, qu’au moyen des droits existants.
« Mais des communications commencent à
s’exécuter, d’autres n’existent encore qu’en projet. Dans très peu de temps, si
les travaux sont poussés avec activité, il sera possible de diminuer les droits
d’entrée, mais jusque là il y aurait grande imprudence de toucher à ce qui
existe, parce que la réduction plus ou moins forte des droits, doit résulter du
prix de transport qui résultera lui-même de la bonne et complète exécution des
communications. »
La parole est à M. Pirson pour développer son
amendement.
M. Pirson. - Messieurs,
Les carrières de Fumay sur
On eut recours au premier moyen, et voici à quelle
occasion :
Lorsque la banque fut dépositaire des fonds
nationales dont le roi Guillaume s’était emparé, elle fit la spéculation de
rouvrir des carrières d’ardoises dans les brûlis de Couvin sur la ligne de
Fumay à gauche de
Aussi longtemps que les produits de ces carrières
ne pourront être transportés par de bonnes routes, il est nécessaire de
maintenir les droits existants à l’entrée en Belgique des ardoises françaises.
Toutefois je voterai avec empressement la réduction
de ces droits aussitôt l’achèvement de ces routes. C’est d’abord celle de
Bouillon qui vient enfin d’être adjugée après cinq années de sollicitations de
ma part et de celle d’un grand nombre de pétitionnaires ; M. le ministre de
l’intérieur ne pourrait me démentir. Il sait bien maintenant, et M. d’Huart
aussi, ministre des finances, que, si j’avais été écouté, au lieu de dépenser
un million pour faire six lieues de route à travers des précipices et les Alpes
des Ardennes, nous jouirions depuis deux ou trois ans de la route de Bouillon,
et de l’embranchement de Neupont à Beauraing qui est une nécessité pour le transport des
ardoises du Luxembourg au port de Dinant. Mais un intérêt particulier l’a
emporté jusqu’ici, et le ministère a été entretenu dans l’erreur par un esprit
de camaraderie dont je n’accuse point cependant les bureaux du ministère, mais
bien les intermédiaires ; heureusement cet intérêt particulier vient de cesser.
Rien ne s’opposera donc maintenant à ce que M. le
ministre des travaux publics ordonne au plus tôt la levée du plan de la route à
faire de Wellin à Beauraing.
Il y a moins de deux lieues en pays de plaine. Tous
les matériaux gisent à main d’oeuvre. Ce morceau de route ne coûtera pas 90
mille francs.
Tout le monde sait que c’est le retour à charge des
voituriers qui procure le bon marché des transports.
Eh bien, les voituriers qui amènent des ardoises à
Dinant ne pourraient trouver toujours à charger des marchandises en retour,
mais bien de la chaux qui servira à l’engrais des terres des Ardennes. C’est
incroyable, l’effet qu’elle produit sur un sol schisteux.
Falmignoul, Beauraing, Pondrome auront de grands dépôts de chaux.
Messieurs, les propriétaires des ardoisières du
Luxembourg vous ont distribué un mémoire concis et bien exact sur leur
position.
Rien de plus vrai que ce qu’ils vous disent du
transit accordé par
D’après toutes ces considérations, je vous propose,
messieurs, d’ajourner tout changement au tarif des douanes à l’entrée en
Belgique des ardoises françaises jusqu’après la confection de la route de
Bouillon et l’embranchement de Wellin à Beauraing ; vous ne pouvez arrêter et suspendre tout à coup
les exploitations du Luxembourg : c’est cependant ce qui arriverait. Mais je le
répète, aussitôt les travaux finis, je voterai pour la diminution de ces droits
; l’intérêt des consommateurs et celui de plusieurs de mes concitoyens à Dinant
la réclament. Je veux que les ardoises de Fumay restent en concurrence avec les
nôtres ; c’est le seul moyen d’être juste envers tout le monde et en même temps
de satisfaire au vœu des consommateurs.
Si la chambre n’entend point ajourner une réduction
de droits sur les ardoises françaises, j’aurai l’honneur de lui observer que ce
n’est point au 1er janvier 1838 qu’il faudra rendre la mesure exécutoire, mais
bien au 1er janvier 1840, parce que c’est à cette époque seulement que nous
pouvons voir achevées les routes qui viennent à l’instant d’être mises en
adjudication et celles qui n’existent qu’en projet.
A cette époque aussi les propriétaires
d’ardoisières du Luxembourg pourront extraire à meilleur compte ; ils auront
formé des ouvriers du pays, tandis qu’aujourd’hui ils sont obligés de payer
chèrement des ouvriers français qui ne se sont déplacés que pour obtenir de
grands avantages ; il en est ainsi de tous les établissements nouveaux.
Il y a aussi du schiste ardoisier dans le canton de
Gedinne, province de Namur, toujours sur la même
ligne de Fumay à Herbeumont ; je suis persuadé
qu’aussitôt la route de Bouillon achevée on ouvrira de nouvelles carrières dans
cette partie. On fera aussi, j’espère, dans quelque temps un petit embranchement
qui, passant par Gedinne, se dirigera par Bohan vers
Mézières. Alors et seulement alors cette contrée oubliée, négligée de tous les
gouvernements qui se sont succédé, s’apercevra qu’elle appartient à une famille
où règne la fraternité.
Elle se compose, cette contrée, du ci-devant duché
de Bouillon et de plusieurs enclaves du Luxembourg et du pays de Liége ; elle
n’a jamais eu de représentant directs.
Les députés du Luxembourg, selon M. Zoude, ne la
connaissent même pas. Point d’hommes influents parmi ses habitants ; ma voix
seule n’a pas produit d’effet jusqu’à présent, Mais un meilleur avenir se
présente, et je remercie le gouvernement de ce qu’il vient de faire pour ce
malheureux pays.
Je déclare en terminant que je me rallie à la
proposition de quelques-uns de mes collègues qui demandent de substituer
l’époque du 1er janvier 1840 à celle du 1er janvier 1838 pour la perception du
droit.
M. le président.
- Voici un amendement proposé par MM. Zoude, Watlet, Jadot et Berger :
« Nous avons l’honneur de proposer à la
chambre de substituer l’époque du 1er janvier 1838, pour la perception du droit
sur les ardoises, tel qu’il est établi par la section centrale. »
La parole est à M. Zoude, pour développer son
amendement.
M. Zoude. - La section centrale, en
bornant sa réserve au premier janvier 1838, s’était persuadé que les routes qui
doivent favoriser d’abord de nos ardoisières, pourraient être achevées en 1837.
Mais celles qui sont les plus essentielles viennent
à peine d’être adjugées, et je ne crains pas d’invoquer le témoignage de M. le
ministre des travaux publics pour assurer que ces routes ne pourraient être
achevées que vers la fin de 1839 ; je rentre donc dans les intentions de la
section centrale, en vous demandant de reporter le délai au premier janvier
1840.
Messieurs, un coin de cette province, si longtemps
abandonnée, commençait à prospérer sous la protection de vos lois, lorsque le
projet qui nous occupe est venu jeter la consternation parmi toutes les
exploitations ardoisières ; un cri d’alarme a retenti bientôt dans la province,
et il a trouvé de l’écho partout ; c’est que la sympathie unit les malheureux.
Personne, messieurs, n’ignore maintenant les
ressources abondantes que la province de Luxembourg peut fournir au royaume,
mais elles sont restées presque stériles jusqu’ici par l’insouciance des divers
gouvernements qui nous ont régis.
La nature a eu beau être libérale envers nous,
l’art n’a presque jamais aidé à nous faire jouir de ses bienfaits.
Notre pays est un diminutif de
Eh bien, messieurs, si vous repoussez notre
amendement, vous nous replongez, quant aux ardoises, dans cet état d’abandon
dont le gouvernement cherche cependant à nous faire sortir.
Cet amendement n’est pas dans l’intérêt seul de la
province, mais dans celui de
Eh bien, messieurs, lorsqu’en retirant la protection
dont nous jouissons, vous aurez ruiné nos exploitants, le pays sera livré au
monopole de Fumay qui, se trouvant sans concurrent, vous fera payer les
ardoises au taux qu’il lui plaira, et la chose est d’autant plus facile que là
il n’y a plus le moindre besoin de débouchés à l’étranger, car à peine peut-on
y suffire aux demandes de l’intérieur, et il est exact de dire qu’il sac reste
pas d’ardoise sur place à Fumay.
Cette situation heureuse est due aux travaux assez
récents de nouvelles routes, et notamment au canal des Ardennes avec lequel il
communique par
Il est donc vrai de dire qu’il ne nous reste plus
guère que le marché de
Ce sont des travaux coûteux que l’on fait à présent
pour évacuer les eaux, c’est de l’emploi même de machines à feu dont on parle
et dans l’essor que prennent les exploitations, on a fait venir à prix élevés,
des refendeurs de Fumay qui commencent à faire des élèves dans le pays ;
et c’est au milieu de ces sacrifices, de ces efforts de tout genre qu’une
mesure fatale viendrait nous menacer de l’anéantissement en livrant le pays à
la discrétion de l’étranger et pour des ardoises inférieures en qualité à
celles que nous produisons.
Pour en fournir la preuve,
je n’invoquerai pas le témoignage de nos savants tels que Cauchy, Teichmann et
de quelques autres, mais j’en appellerai à celui du gouvernement français lui-même
qui ordonne l’emploi de nos ardoises dans les constructions qui se font aux
frais de l’Etat dans les départements qui nous avoisinent et dans celui des
Ardennes même où sont les carrières de Fumay. J’en ai la preuve en mains et
j’offre de la déposer sur le bureau.
J’espère que la chambre et le gouvernement
lui-même, déterminés par les considérations que j’ai l’honneur de vous
soumettre, admettront notre amendement qui consiste à adopter le droit proposé
par la section centrale de 5 fr. par mille ardoises, mais à partir seulement du
1er janvier 1840.
M. le président.
- M. Berger propose de réduire 20 centimes le droit à la sortie des ardoises
par mille.
M. Berger. - Messieurs, je ne pense pas
que ma proposition puisse rencontrer la moindre objection. Vous savez,
messieurs, que le droit de sortie sur les produits de nos ardoisières n’est pas
perçu à titre d’impôt, mais seulement à titre de balance, pour que le
gouvernement soit toujours à même d’avoir des renseignements sur nos
exportations. Cependant, comme le droit qu’on propose serait encore onéreux,
par rapport aux ouvriers de nos ardoisières, j’ai cru devoir prier la chambre
de réduire ce droit à 20 centimes.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Messieurs, je ne m’oppose pas à l’amendement de M. Berger ; car il importe
peu que le droit de sortie sur nos ardoises soit de 40 ou de 20 centimes par
mille, puisque ce n’est qu’un droit de balance.
Je crois devoir rappeler ici à la chambre ce qui
s’est passé à l’occasion des négociations relativement aux ardoises ; ce sont
des propriétaires d’ardoisières du Luxembourg qui ont importuné le
gouvernement, c’est le mot, pour obtenir qu’une réciprocité parfaite s’établit
entre
Et maintenant que nous venons vous proposer de
répondre à ce résultat par une légère concession, on s’y oppose. On ne veut
admettre aucune espèce de réduction sur l’entrée en Belgique des ardoises
françaises, tandis que
Messieurs, on a beaucoup parlé dans cette
discussion de la nécessité d’établir la réciprocité de droit par rapport aux
articles que nous avons déjà votés. Je suis surpris que les honorables membres
qui ont pris part, dans ce sens, à la discussion, n’aient pas également demandé
sur l’article « ardoises » cette
réciprocité. Mais loin de là, les ardoises belges entrent en France à raison de
deux francs le mille, tandis que nous proposons un droit de 4 francs à l’entrée
des ardoises françaises en Belgique ; et l’on trouve que ce droit est encore
insuffisant. Que nos adversaires reconnaissent donc de bonne foi, que ce
système de réciprocité, comme ils l’entendaient sur d’autres articles, ne peut
être appliqué en principe ; si nous l’admettions, par exemple, en ce qui
concerne la matière qui nous occupe, évidemment nos ardoisiers ne pourraient
plus continuer leurs exploitations.
La section centrale, au
lieu d’abaisser le droit à 4 fr., propose de le fixer à 5 fr. ; je ne vois pas
grand inconvénient à cette augmentation d’un franc sur un mille d’ardoises et
je n’y formerai pas une vive opposition ; mais on nous renvoie à l’an 40, avec
cet amendement. (On rit.) Tantôt, il
a déjà fallu ajourner l’exécution d’une mesure jusqu’en 1839, pourquoi sur une
disposition analogue nous renvoyer plus loin encore. Le délai qu’on réclame est
beaucoup trop long, même d’après les motifs sur lesquels ou l’appuie.
En effet, on demande que l’abaissement du droit de
6 à 5 fr. ne soit exécutoire qu’en 1840, parce que, dit-on, seulement alors,
l’achèvement des communications permettra aux ardoisiers du Luxembourg
d’arriver à moins de frais à
M. Zoude. -
M. le ministre vient de parler de la réciprocité que nous avons souvent
invoquée, et il nous a dit que
Quant à l’époque à laquelle il convient de rendre
la mesure exécutoire, j’ai répondrai à M. le ministre des finances qu’ayant
demandé à M. le ministre des travaux publics quand la communication serait
achevée, il m’a répondu que ce serait dans deux ans ; par conséquent, dans le
courant de 1839. Ainsi, en demandant que la mesure à prendre ne soit exécutoire
qu’au premier janvier 1840, je précise l’époque à laquelle la route sera
ouverte.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M.
de Theux). - Je demande la parole pour répondre à l’observation
de M. Zoude. Il vient de dire
que la réduction de droit accordée par
Quant à la hauteur du droit, je ferai observer
qu’en admettant le prix de 16 fr. les 4 fr. de droit proposés feront encore 25
p. c. ; ce qui est déjà un très beau droit.
M. Pirson. - Je ferai une observation
sur l’abaissement du droit de sortie accordé par
Quant au droit de transit sur
Ils s’entendaient, je le
répète, avec Fumay pour avoir un simulacre de transit et introduire en
Belgique, par ce moyen, et vous fournir des ardoises de Fumay. Je connais les
localités et les individus, on ne peut pas me tromper. Je n’aurais pas dit
cela, si on ne m’y avait pas forcé, car je n’aime pas les questions de
personnes.
Nous serons bientôt d’accord avec le gouvernement,
puisqu’il ne s’agit plus que d’une année de retard. Si M. le ministre des
travaux publics prend l’engagement de livrer à la circulation la route de
Bouillon pour le 1er janvier 1839, je ne verrai pas d’inconvénient à rendre la
disposition exécutoire à cette époque. Il ne s’agit plus que du plus ou moins
d’élévation du droit, de savoir si on adoptera le chiffre de 4 fr. ou celui de
5 : du reste on est à peu près d’accord.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Il est possible que ce soit par erreur ou par d’autres motifs que je ne
rechercherai pas, que la demande du transit des ardoises belges par
Quant au délai demandé, je ferai connaître à la
chambre que la route de Beauraing à Bouillon est adjugée de manière que les
ouvrages d’art soient terminés pour le 1er octobre 1838, les terrassements
achevés pour le 1er janvier 1839, et la route livrée à la circulation au 1er
novembre 1839.
D’après ces renseignements
que je viens de me procurer au ministère des travaux publics, le délai que
j’avais cru trop long, en admettant même l’opinion qu’il fût nécessaire d’en
accorder un, semblerait avoir été bien combiné par les auteurs de l’amendement,
car d’après ces mêmes renseignements la route de Bastogne à Bouillon sera
également livrée à la circulation, seulement le 1er novembre 1839.
Je me suis fait un devoir, messieurs, de
communiquer ces détails à la chambre, parce qu’il n’entre jamais dans mon
intention de l’induire en erreur. J’étais mal informé tout à l’heure.
M. Dumortier. - Je pense que nous
n’avons pas obtenu une trop grande concession de
Le transit par
Maintenant de quoi s’agit-il ? Il s’agit de savoir
quand la réduction qu’on vous propose sera exécutable.
Ceci est une question de temps : si la route peut
être achevée pour le premier janvier 1839, l’amendement du ministre doit être
admis ; mais si elle ne peut être livrée à la circulation que le premier
janvier 1840, vous devez admettre l’amendement du député du Luxembourg. Je
pense qu’il est inutile d’en dire davantage. (Aux voix, aux voix !)
- La fixation du droit à 5 fr. est mise aux voix et
adoptée.
L’ajournement de l’exécution de cette mesure à 1840
est adopté.
L’ensemble de la disposition est également adopté.
La séance est levée à 4 heures et quart.