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Note d’intention
Chambre des représentants
de Belgique
Séance
du mercredi 5 avril 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Naissance princière (Dumortier)
3) Rapport sur la situation du trésor
4) Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du département
des finances, pour le service du bateau à vapeur à la Tête de Flandre
5) Projet de loi relatif à l’impôt sur les eaux-de-vie étrangères
6) Projet de loi relatif au taux de l’intérêt des cautionnements
7) Projets de loi portant des transferts de crédits au budget de la
dette publique
8) Compte spécial des opérations de négociations des bons du trésor pour
1836 (d’Huart)
9) Projet de loi sur la
réciprocité internationale en matière de successions et de donation
10) Fixation de l’ordre des travaux de la chambre. Ecole
militaire ou conseil des mines (de Theux, Dechamps, de Theux, Nothomb, Dubois, de Jaegher, Gendebien, d’Huart, Dubois, Dumortier, Dubus, Gendebien)
11) Motion d’ordre relative à l’état d’avancement du chemin de fer vers
la frontière de France par le Hainaut (Dolez, Dumortier, Gendebien, Nothomb, Dolez, Dumortier,
Rogier, de Theux, Nothomb)
12) Projet de loi portant organisation du conseil des mines. Discussion
générale notamment exploitation directe des mines (de houille) par l’Etat
(proposition Rogier) (Dolez, Milcamps,
Gendebien, Rogier, Nothomb, Dumortier, Pirmez)
(Moniteur belge n°96, du 6 avril 1837)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur belge n°72, du 13 mars 1837) M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et
demi.
M. Verdussen fait l’appel nominal à midi et
demi.
M. Lejeune lit le procès-verbal de la séance
précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Verdussen présente l’analyse des pièces
adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Des
habitants des communes de Lambusart et Wanfercée-Beaulet (Hainaut)
adressent des observations relatives à la loi sur les mines. »
________________
« Des
habitants de la commune de Kansart adressent des observations
sur le même objet. »
________________
- Ces deux
pétitions seront déposées sur le bureau pendant la discussion du projet de loi
sur les mines.
________________
« Le sieur Pierre Verhoost,
ex-milicien, congédié par réforme pour cause d’ophtalmie, demande une pension.
»
________________
« La dame veuve F. Vandenbossche, à Baerdegem, sollicite l’exemption du service de la milice
pour son fils Benoît, milicien de 1836. »
________________
« Le sieur Guillaume Ronmans,
à Reickhem, demande que la chambre fasse cesser les
poursuites qui sont dirigées contre lui par le directeur des domaines pour le
paiement d’une rente dont sa maison est grevée. »
________________
« Le sieur A. Mathieu,
ex-ingénieur-vérificateur du cadastre de la province de Hainaut, réclame le
paiement des indemnités qui lui reviennent du chef de travaux extraordinaires
dont l’exécution lui a été imposée. »
________________
« Les employés de première et deuxième
classe de douanes de contrôle d’Eecloo demandent une
augmentation de traitement. »
________________
« Des propriétaires de voitures et
chevaux de la commune de Lovenjoul réclament le
paiement de qui leur revient du chef de prestations militaires faites à l’armée
belge en 1831. »
________________
« Le sieur Sautter
de Boumont, citoyen de Genève, réclame le paiement de
l’indemnité qui lui revient du chef des pertes essuyées par le bombardement
d’Anvers. »
________________
« L’administration communale de Stabroek
demande qu’il soit alloué à cette commune une somme de 310,000 francs, à titre
d’indemnité, pour l’exercice courant. »
________________
« Le conseil communal de Verviers demande une
loi qui mette à charge de l’Etat d’indemniser ceux qui ont éprouvé des pertes
par la révolution. »
________________
« Des habitants de
________________
« Les habitants des villages d’Ucimond et Botassart (Luxembourg)
demandent que ces villages soient séparés de la commune de Sansanrutz,
et forment une commune séparée. »
________________
« Le conseil communal de la ville d’Ypres
demande la réforme électorale. »
________________
« Le conseil communal de la ville de
Liége fait la même demande. »
________________
- Ces requêtes sont
renvoyées à la commission des pétitions.
________________
Par deux messages
en date du 18 mars dernier, le sénat annonce à la chambre qu’il a adopté le
projet de loi relatif à la circonscription des communes rurales du canton de
Maestricht en deux cantons électoraux, et celui qui contient le budget du
département de la guerre.
- Pris pour
notification
ANNONCE DE
M.
le ministre de la justice (M. Ernst) annonce à la chambre l’heureuse
délivrance de S. M.
- Pris pour
notification.
M. Dumortier. - L’heureux événement qui vient
de nous être signalé, messieurs, est d’une trop haute importance pour le
bonheur de
- La proposition de
M. Dumortier est adoptée.
M.
le président. - D’après les antécédents de la chambre, je pense que cette
députation devra se composer de 12 membres, y compris le président ; de sorte
qu’il y aura 11 membres à nommer par la voie du sort. (Assentiment.)
- Il est procédé au
tirage au sort des membres de la députation ; MM. Dequesne, Polfvliet, Ernst,
F. de Mérode, C. Rodenbach, Brabant, Vilain XIIII, W. de Mérode, David, Devaux
et Rogier, sont désignés pour en faire partie.
- Par message en
date du 31 mars dernier, M. le ministre de l’intérieur et des affaires
étrangères annonce à la chambre qu’un Te Deum sera chanté dimanche, 9 avril, à
deux heures, dans l’église des SS. Michel et Gudule, à l’occasion de la
naissance d’un prince, et que si la chambre le désire, l’escorte d’usage sera
mise à la disposition.
- La chambre décide
qu’elle se rendra en corps au Te Deum.
PIECES ADRESSEES A
MM. Sanfourche-Laporte et Ant. Lalmant font hommage à la chambre des deux volumes de leur
recueil : Les annales de la jurisprudence belge, publiés en 1836.
- Dépôt à la
bibliothèque.
________________
M.
Zoude. s’excuse de ne pouvoir assister à la séance à cause de la mort
de sa soeur.
- Pris pour
information.
________________
M.
Fallon s’excuse de ne pouvoir se rendre à la chambre à cause de la
maladie grave de son fils.
- Pris pour
information.
RAPPORT SUR
M. le ministre des finances (M. d'Huart). monte à
la tribune et donne lecture d’un rapport sur la situation du trésor ; la
chambre en ordonne l’impression et la distribution.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN
CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT DES FINANCES DE 1837, POUR LE
SERVICE DU BATEAU A VAPEUR A
M. le ministre des finances (M. d'Huart) présente
ensuite un projet de loi accordant un crédit supplémentaire de 12,000 fr. au
département des finances, pour le service du bateau à vapeur d’Anvers à Burgt, et à
- La chambre en
ordonne l’impression et la distribution, et, sur la proposition de M. le
ministre, elle renvoie ce projet à la section centrale qui a examiné le budget
des finances comme commission.
PROJET DE LOI RELATIF A
L’IMPOT SUR LES EAUX-DE-VIE ETRANGERES
M. le ministre des finances (M. d'Huart) présente
encore un projet de loi tendant à réduire l’impôt d’accises sur les spiritueux
venant de l’étranger ; la chambre en ordonne l’impression et la distribution
ainsi que le renvoi en sections.
PROJET DE LOI RELATIF AU
TAUX DE L’INTERET DES CAUTIONNEMENTS
M. le ministre des finances (M. d'Huart) donne
lecture d’un projet de loi qui réduit à 4 p. c. l’intérêt des cautionnements
fournis en numéraire en matière d’accises, et de l’exposé des motifs qui
l’accompagne.
- L’impression et
la distribution en sont ordonnées, et, sur la proposition de M. le ministre, le
projet est renvoyé à la commission des finances.
PROJETS DE LOI PORTANT DES
TRANSFERTS DE CREDITS AU BUDGET DE
M. le ministre des finances (M. d'Huart) présente
en outre deux projets de loi opérant des transferts au budget de la dette,
publique des exercices 1835 et 1836 ; la chambre décide que ces projets seront
imprimés et distribués, et, sur la proposition de M. le ministre, elle les
renvoie à la commission qui a examiné le budget des finances.
COMPTE SPECIAL DES
OPERATIONS DE NEGOCIATIONS DES BONS DU TRESOR POUR 1836
M. le ministre des finances (M. d'Huart) soumet
enfin à la chambre, en conformité de l’art. 5 de la loi du 16 février 1833,
n°157, le compte spécial de toutes les opérations relatives à la négociation
des bons du trésor pendant l’année 1836. Ce compte est revêtu du visa et de
l’approbation de la cour des comptes.
Un membre demande l’impression.
M. le ministre des finances (M. d'Huart) trouve
qu’il n’est pas nécessaire de faire imprimer ce rapport qui est assez
volumineux ; les tableaux de chiffres dont il se compose pourraient être
déposés au greffe. La commission des finances à laquelle il propose de renvoyer
le rapport pourrait, dit-il, examiner s’il est utile ou non de l’imprimer.
- La proposition de
M. le ministre des finances est adoptée.
PROJET DE LOI RELATIF A LA RECIPROCITE
INTERNATIONALE EN MATIERE DE SUCCESSIONS ET DE DONATIONS
M.
le ministre de la justice (M. Ernst) dépose un projet de loi sur la
réciprocité internationale en matière de successions et de donation.
- Ce projet est
renvoyé à une commission dont les membres seront nommés par le bureau.
FIXATION DE L’ORDRE DES
TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. le président. - L’ordre du jour
appelle, en premier lieu, la discussion du projet de loi relatif à l’école militaire.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). – Messieurs, M. le ministre de la guerre
désire que la chambre consente à l’ajournement du projet de loi relatif à
l’école militaire. La maladie grave de Mme Willmar empêcherait M. le ministre
d’assister en ce moment à la discussion ; ce motif sera apprécié par la
chambre.
D’autre part, je
pense, messieurs, qu’il conviendrait d’entamer actuellement la discussion de la
loi sur les mines ; chacun de nous a pu se préparer à cette discussion, puisque
le projet est à l’ordre du jour depuis très longtemps. La chambre sera ensuite
saisie sans doute du rapport sur le tarif des douanes ; de cette manière il n’y
aura aucune interruption dans les travaux de l’assemblée.
M. Dechamps. - Messieurs, il est très fâcheux
que quand la chambre est préparée à discuter une loi mise à l’ordre du jour,
des entraves viennent ainsi en ajourner la discussion.
Il est un grand
nombre de membres qui n’ont pas actuellement par devers eux le projet de loi
sur les mines ; il serait donc impossible d’en aborder la discussion en ce
moment.
Je ferai remarquer, messieurs, que le projet de loi d’organisation de
l’école militaire, tel qu’il a été amendé par la section centrale, a des bases
essentiellement différentes de celles du projet primitif du gouvernement. C’est
un projet tout nouveau. D’autre part, le projet tend, dans ses dispositions
fondamentales, à renverser une partie essentielle de la loi organique des
universités de l’Etat, et sous ce rapport il concerne directement M. le
ministre de l’intérieur. Je pense dès lors que puisque ce ministre est présent,
ainsi que M. le rapporteur de la section centrale, nous pouvons aujourd’hui
entamer la discussion générale du projet de loi d’organisation de l’école
militaire.
Je suis persuadé,
pour mon compte, que ce projet soulèvera des objections d’une nature telle que
la chambre, en présence de ces objections, renverra probablement le projet à la
section centrale pour être remanié.
Si nous ajournons
la discussion du projet jusqu’après le vote de la loi sur les mines, et si la
chambre, comme j’en suis persuadé, ordonne le renvoi du projet à la section
centrale, il en résultera que nous aurons perdu un temps précieux.
D’après ces
considérations, je propose tout au moins la discussion générale de la loi
concernant l’école militaire ; car il est essentiel de savoir si M. le ministre
de l’intérieur en particulier adhère au projet de loi de la section centrale,
lequel tend à porter une atteinte très grave à l’existence des universités de
l’Etat.
M. le ministre
de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Messieurs,
l’inconvénient signalé par l’honorable préopinant, en ce qui concerne l’école
militaire, n’existera pas, parce que le ministère est d’accord pour ne pas
porter atteinte à la loi sur les universités. Chacun de vous comprendra,
messieurs, combien il serait fâcheux d’entamer, en l’absence de M. le ministre
de la guerre, la discussion d’un projet de loi relatif à une institution
spéciale qui est entièrement dans les attributions de ce ministère.
Maintenant, en ce
qui concerne la discussion de la loi sur les mines, il est bien entendu que
lorsque j’ai fait la motion d’entamer en ce moment cette discussion, elle ne
serait pas close aujourd’hui : ma motion avait simplement pour objet de faire
entendre les orateurs qui sont préparés à prendre la parole, et je crois que M.
le ministre des travaux publics est de ce nombre.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Messieurs, je suis prêt à prendre la parole, si personne ne la réclame
maintenant ; après m’avoir entendu, la chambre pourra continuer demain la
discussion générale.
M.
Dubois. - Messieurs, c’est pour appuyer la motion que vient de faire
l’honorable M. Dechamps que j’ai demandé la parole.
Il est évident que
dans ce moment nous sommes peu préparés à entamer la discussion de la loi des
mines, tandis que depuis quinze jours nous l’étions pour discuter celle
présentée sur l’école militaire,
Je pense, comme
l’auteur de la motion d’ordre, que la présence du ministre de la guerre n’est
pas ici indispensable ; que celle des ministres présents est suffisante.
Le projet de loi
sur l’école militaire qui vous est soumis, messieurs, ainsi que le déclare dans
son rapport l’honorable rapporteur, n’est l’oeuvre,
ni du ministre de la guerre, ni du ministère, ni de la chambre uniquement celle
de la section centrale, et c’est peut-être au peu de concours qu’ont donné à sa
préparation et à son exécution, et le ministère et les sections, que l’on peut
attribuer les vices nombreux et les inconvénients de la nature la plus grave
que ce projet nous présente.
Pour ma part, j’ai la conviction que le projet tel qu’il nous est
présenté, est inconstitutionnel : inconstitutionnel dans ses bases,
inconstitutionnel dans ses développements et dans ses conséquences ; je
désirerais pouvoir prouver ceci à la chambre.
Si je parvenais à
faire partager cette conviction par vous, messieurs, j’aurais démontré, je
crois, que le projet entier doit être remanié, qu’il doit être reconstruit sur
de nouvelles bases, de commun accord avec les ministres de la guerre et de
l’intérieur.
Il est à craindre,
messieurs, que si nous laissons échapper cette occasion d’établir la situation
légale d’une école militaire, on nous fasse attendre indéfiniment la discussion
d’un projet convenablement rédigé, et qu’on ne prolonge sans limites connues le
régime provisoire qui existe aujourd’hui à l’école militaire et qui constitue
une infraction à nos lois constitutives de l’enseignement.
Je demande donc que
la chambre décide qu’on entendra la discussion générale du projet, mon but
étant de demander son renvoi à une commission chargée de le remanier et de le
mettre en accord avec notre constitution.
M. de Jaegher. - Si je prends la
parole, c’est pour rappeler que la chambre avant sa séparation avait mis à
l’ordre du jour la loi sur les mines. En conséquence les membres de cette
chambre, qui ont l’intention de prendre la parole dans la discussion de cette
loi, ont pu se préparer depuis longtemps. D’ailleurs, les 46 membres qui
étaient présents hier à la séance ont eu connaissance que la loi sur l’école
militaire ne serait pas discutée et qu’on commencerait par la loi sur les
mines.
Du reste, la
proposition de M. Dubois est une déviation de tous les antécédents de la
chambre ; jamais, en effet, on n’a été admis à prouver qu’une loi est
inconstitutionnelle avant même la mise à l’ordre du jour de la même loi.
M. Gendebien. - Messieurs, je ne comprends pas
les orateurs qui proposent de discuter immédiatement le projet de loi
concernant l’école militaire, alors que l’on désire savoir préalablement si M.
le ministre de la guerre se rallie ou non au projet de loi, tel qu’il a été
modifié par la section centrale, tandis qu’ils savent que M. le ministre est absent
et qu’ils en connaissent la triste cause. Il me semble qu’il convient au moins
d’attendre sa présence.
Un autre orateur prétend que le projet est inconstitutionnel ; je ne
veux rien préjuger à cet égard mais c’est encore là un motif pour ne pas aborder
maintenant la discussion ; il faut laisser au ministre le temps de se justifier
du grave reproche qu’on adresse au projet ; c’est encore là, il me semble, une
raison d’ajournement.
Nous connaissons
les tristes motifs pour lesquels le ministre de la guerre ne peut pas assister
à la séance ; il me semble qu’on doit avoir égard à la position fâcheuse dans
laquelle il se trouve.
Rien n’empêche, au
contraire, que l’on ne commence aujourd’hui la discussion de la loi sur les
mines ; je crois que nous arriverons facilement à 4 heures sans que la
discussion générale soit fermée ; nous sommes tous d’accord, à ce qu’il
paraît, sur ce point.
Si on veut remettre
en question ce que je considère comme la base de la loi, je le veux bien ; mais
on ne pourra alors que répéter ce qui a déjà été dit : on n’a qu’à revoir le Moniteur, on y trouvera tout ce qu’on
peut dire sur ce point ; je ne pense pas qu’on puisse rien dire de neuf à cet
égard. On peut donc commencer aujourd’hui la discussion générale de la loi des
mines et la continuer à demain, si la liste des orateurs inscrits est épuisée
avant quatre heures.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- J’avais demandé la parole pour faire la même observation que l’honorable
préopinant, que plusieurs orateurs étant inscrits pour parler dans la
discussion sur la loi des mines, on pouvait commencer dès à présent cette
discussion. J’ajouterai qu’il n’y a aucun espèce d’urgence à discuter la loi
d’organisation de l’école militaire ; cette école peut très bien marcher
quelque temps encore comme elle a marché depuis trois ans. J’engage la chambre
à ne pas prolonger davantage cette discussion de priorité qui ne peut avoir
pour résultat qu’une perte de temps ; le ministre des travaux publics vient de
déclarer qu’il était prêt à parler dans la discussion générale de la loi sur
les mines, si personne ne se présentait pour prendre la parole avant lui.
Vous pouvez donc
ouvrir dès à présent cette discussion,
M.
Dubois. - Je n’insisterai pas davantage sur ma proposition, la chambre
ne me paraissant pas disposée à l’adopter ; mais je crois devoir repousser le
reproche que m’a adressé M. de Jaegher de faire une proposition insolite. M. le
ministre de l’intérieur a dit que le ministre de la guerre n’étant pas présent,
il ne pouvait pas dire s’il se ralliait ou non au projet de la section
centrale. Mais le ministère entier est là, il pourrait bien nous dire s’il se
rallie ou non à un projet qui à mes yeux est inconstitutionnel, à moins qu’il
n’ignore que ce projet existe. S’il en est ainsi, si le ministère n’est pas
plus instruit que cela, je ne m’oppose pas à ce qu’on attende la présence du
ministre de la guerre.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je répondrai à M. Dubois que les membres du
cabinet sont d’accord sur le projet d’organisation de l’école militaire ; nous
ferons connaître l’opinion du ministère quand il en sera temps. Mais il est en
ce moment une autre proposition ; il s’agit de savoir si, par des raisons que
tout le monde apprécie, on abordera la loi sur les mines et ou ajournera
indéfiniment la loi d’organisation de l’école militaire ; c’est cette seule
question qu’il faut décider, et nous n’avons pas à nous expliquer en ce moment
sur autre chose,
M. Dumortier. - Je ne partage pas l’opinion
qu’il faille ajourner indéfiniment la loi d’organisation de l’école militaire.
(Non ! non !)
J’ai entendu M. le
ministre des finances dire que l’école militaire marchait très bien, et qu’elle
pourrait continuer à marcher ainsi. La constitution veut que toute instruction
soit réglée par une loi. L’instruction militaire, comme toute autre, doit donc
être ainsi réglée. Si on veut postposer cette loi à celle de la loi des mines,
je ne m’y opposerai pas, mais je demanderai que la loi concernant l’école
militaire soit mise en discussion après celle relative aux mines,
M. Dubus. - Je crois qu’il doit être
bien entendu que la discussion générale ne sera pas close aujourd’hui. Je
n’admets pas que nous devons être prêts à discuter la loi des mines. Quand nous
trouvons inscrits sur notre bulletin d’ordre du jour deux projets de loi aussi
importants que l’organisation de l’école militaire et les mines, nous devons
présumer que le premier donnera lieu à une discussion de plusieurs jours, et
nous ne pouvons pas nous attendre à discuter le second du jour au lendemain. Je
demande donc qu’il soit bien entendu que si la discussion générale sur les mines
est commencée aujourd’hui, elle sera continuée demain.
M. Gendebien. - Je ne veux pas limiter la
discussion générale de la loi des mines à la séance d’aujourd’hui. Je me suis
expliqué assez nettement à cet égard.
- La chambre
consultée donne la priorité à la loi relative aux mines, sur la loi concernant
l’organisation de l’école militaire.
M.
le président. - En conséquence de la décision de la chambre, je mets en
discussion le projet de loi sur les mines qui a été transmis à la chambre par
le sénat.
La commission
propose de l’adopter tel qu’il est proposé.
MOTION D’ORDRE RELATIVE A
L’ETAT D’AVANCEMENT DU CHEMIN DE FER VERS LA FRONTIERE DE FRANCE
M. Dolez. - Messieurs, j’ai demande la parole pour adresser
à M. le ministre des travaux publics une interpellation relativement au chemin
de fer vers la frontière de France par le Hainaut. Cette interpellation m’a été
dictée par l’inaction complète où reste le gouvernement à l’égard de cette
section du chemin de fer ; elle m’a été dictée par le mécontentement que cette
inaction suscite dans le Hainaut et par les plaintes qui m’ont été adressées
par un grand nombre de mes commettants.
Vous savez,
messieurs, que depuis trois ans, la législature a décrété qu’un vaste système
de chemins de fer serait établi aux frais de l’Etat, et que dans ce système une
section serait dirigée vers la frontière de France par le Hainaut. Eh bien,
depuis trois ans nous avons vu successivement le gouvernement procéder aux
travaux des autres directions et laisser dans l’oubli le plus complet la
section vers la frontière de France.
Le Hainaut ne s’est
pas accommodé de cet oubli, et à diverses reprises il a réclamé contre
l’injuste oubli où ses intérêts étaient laissés ; il a envoyé plusieurs
députations au gouvernement, toutes sont retournées avec les assurances les
plus satisfaisantes et les plus complètes de la part des deux ministres qui ont
eu la direction des travaux publics. Mais le Hainaut n’a eu jusqu’ici que des
promesses. Il y a plus, on avait fait un simulacre de commencement d’exécution
; mais bientôt ce simulacre a été abandonné, et l’adjudication d’une certaine
partie des travaux a été annulée. Depuis il n’a plus été aucunement question de
cette section. On se demande dans le Hainaut quelles peuvent être les causes de
ce retard si étrange, il soulève un mécontentement extrêmement sérieux auquel
il est temps que le gouvernement porte attention.
Le ministre ignore
sans doute les suppositions auxquelles on se livre. Il en est une qui met
singulièrement en doute l’autorité qu’il doit avoir sur les agents qui sont
sous sa direction. On prétend, et c’est une version très répandue, que malgré
la bonne volonté du ministre, les agents supérieurs de l’administration du
chemin de fer ne veulent pas donner de décision sur la direction de cette
section, ni mettre le ministre à même d’en prendre une. On dit que le ministre
a demandé des rapports, qu’il ne peut pas obtenir, malgré ses ordres réitérés.
On dit enfin que les directeurs principaux de cette vaste administration, qui
veulent y être omnipotents, agissent ainsi par une sorte de mauvaise humeur,
par suite de la préférence donnée par des autorités provinciales à un projet
autre que celui de MM. Simons et de Ridder.
Vous savez que la
société générale avait fait préparer, à ses frais, un projet de chemin de fer
vers la frontière de France et par le Hainaut.
Les autorités de la province le trouvaient plus conforme à ses intérêts
que celui de MM. Simons et de Ridder. Le ministre a
voulu s’enquérir de la préférence à accorder, il a voulu s’entourer de tous les
renseignements possibles, et il adressé, pour en obtenir, entre autres aux
ingénieurs Simons et de Ridder, pour avoir un rapport
complet. On assure que le ministre ne peut pas obtenir ce rapport ; on dit
qu’on veut réduire le Hainaut à crier merci, et à demander qu’on veuille bien
exécuter le chemin tracé par ces messieurs. L’autre tracé mérite au moins
d’être examiné : je ne dis pas qu’une direction soit meilleure que l’autre ;
mais je demande que M. le ministre hâte la solution d’une question qui
intéresse le Hainaut et le pays tout entier.
Je prie M. le
ministre de vouloir bien nous faire connaître ses intentions à cet égard. En
élevant la voix pour la province du Hainaut, je ne demande pas de faveur, je
réclame un droit et je rappelle M. le ministre à l’exécution d’un devoir,
Le ministre chargé
d’exécuter une loi doit l’exécuter d’une manière tranche et complète. Retarder
l’exécution d’une loi de délai en délai, c’est la méconnaître, ce qu’il
n’appartient pas au ministre de faire.
J’espère que M. le
ministre s’empressera de nous répondre, et que sa réponse sera de nature à
satisfaire les justes réclamations qui se sont élevées dans le Hainaut.
J’attends cette
réponse.
M. Dumortier. - La question soulevée par
l’honorable préopinant intéresse tout le Hainaut. Je conçois la sage lenteur
apportée par le gouvernement dans cette circonstance. Eh effet, plusieurs
points sont en présence qui tous ont des droits égaux à être traversés par le
chemin de fer. Il ne faut pas se dissimuler qu’il est une question qui doit
décider l’opinion du ministre ; c’est celle de savoir le point vers lequel
Si c’est vers
Valenciennes, le district qui a nommé l’honorable préopinant, sera traversé par
le chemin de fer ; si au contraire
Quant à moi,
j’approuve la conduite du gouvernement en cette circonstance ; c’est comme si
on allait faire la route en fer vers
Vous voyez qu’il ne
convient pas de le trop hâter. La question est d’autant plus importante, que si
je suis bien informé, la direction vers Tournay coûterait plusieurs millions de
moins que la direction proposée par M. l’ingénieur Vifquain, et aurait
l’avantage de traverser cinq villes, tandis que l’autre n’en traverserait que
deux ou trois. Ainsi, on ne doit pas se prononcer légèrement sur une question
de cette gravité. Quant à moi, j’insiste pour que le ministre se fasse mettre
tous les tracés sous les yeux, et qu’il examine quel est celui qui présente le
plus d’économies, et en même temps le plus d’avantages au plus grand nombre de
populations et de villes. Je m’en remets volontiers à son jugement sur ce
point, parce que s’il juge les pièces sous les yeux, il me semble que la
question ne peut pas laisser de doute.
Quant au tracé par la direction de Mons, la question est difficile. Il y
a un tracé proposé par l’ingénieur Vifquain, et un autre proposé par les
ingénieurs Simons et de Ridder. Ici encore, si je
suis bien formé, le tracé proposé par les ingénieurs Simons et de Ridder serait de plusieurs millions plus économique que
celui de l’ingénieur Vifquain ; et il aurait ce grand avantage qu’il mettrait
en communication directe plusieurs établissement houillers, Il est vrai que la
proposition de l’ingénieur Vifquain paraît, dit-on, avoir été faite dans
l’intérêt de certaines associations particulières. Mais je ne pense que l’on
veuille jamais soutenir dans cette enceinte que l’intérêt d’association doit
prévaloir sur l’intérêt général.
Pour moi, l’intérêt
général sera toujours mon guide. Si le trajet proposé par les ingénieurs Simons
et de Ridder est plus économique que celui de
l’ingénieur Vifquain, et est avantageux à un plus grand nombre de populations
et à un plus grand nombre d’usines, quand bien même il contrarierait les
intérêts d’une ou deux associations privées, je n’hésiterais pas à lui donner
la préférence.
J’invite M. le
ministre des travaux publics à ne prononcer sur cette question qu’après s’être
entouré de toutes les lumières.
M. Gendebien. - J’aurais désiré, avant qu’un
nouveau membre, surtout de la députation du Hainaut, prit la parole, que le
ministre s’expliquât ; je crois que nous gagnerions du temps.
Si M. le ministre
des travaux publics veut prendre la parole je renoncerai moi-même à parler.
Cependant je dois une réponse à l’honorable M. Dumortier. Je ne conçois pas comment il loue la sage lenteur du
ministère, alors que cette sage lenteur est nuisible à l’arrondissement de
Tournay aussi bien qu’à celui de Mons. Car, si on s’était hâté un peu plus
sagement, au lieu de cette sage lenteur, il se pourrait que Tournay eût son
chemin de fer comme Mons.
Je prie cet
honorable orateur de remarquer que dans le projet de chemin de fer de Paris
vers
J’avais reçu aussi de plusieurs électeurs du district de Mons des
invitations réitérées de soutenir leurs réclamations. Je suis charmé d’avoir
laissé à cet égard l’initiative à un honorable collègue, car il aurait pu
paraître que ces réclamations venaient d’un seul côté.
J’appuie de toutes
mes forces les observations qu’il a présentées ; j’invite le ministre à y
répondre d’une manière satisfaisante.
Je n’examinerai pas
s’il est plus avantageux sous le rapport de la dépense que le chemin de fer
passe à Tournay plutôt qu’à Mons, si cette question est prématurée, ainsi que
la question de savoir si une société particulière ou le gouvernement fera le
chemin de fer à Mons ; quant à nous, habitants du Hainaut, nous déclarons qu’il
nous importe peu que ce chemin de fer soit construit par une société
particulière ou par l’Etat, pourvu que le Hainaut en jouisse.
Quel est le tracé
le plus économique et le plus avantageux au trésor ? Cette question est
également prématurée. Je m’abstiendra de répondre sur ce point à M. Dumortier,
jusqu’à ce nous ayons les éléments indispensables pour cette délibération.
J’attendrai la réponse de M. le ministre des travaux publics. J’espère qu’il
comprendra la juste impatience de nos commettants.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- La loi du 1er mai 1834 porte :
« Art. 1er. Il
sera établi dans le royaume un système de chemin de fer, ayant pour point
central Malines, et se dirigeant (…) au midi sur Bruxelles et vers les
frontières de France par le Hainaut. »
« Art. 2.
L’exécution sera faite à charge du trésor public et par les soins du
gouvernement. »
Il y a donc une
question irrévocablement décidée par la loi ; c’est que le chemin de fer par le Hainaut ne sera pas
fait par une société particulière, mais par le gouvernement. Le gouvernement
est tenu d’exécuter la loi quant au Hainaut, comme il l’a exécuté quant aux
sections qui touchent ou traversent d’autres provinces. Si donc le
gouvernement, en partant de Bruxelles pour arriver à la frontière de France, ne
sort pas du Hainaut, il est dans les termes de la loi ; si, au contraire, il
veut arriver à la frontière de France en partant d’un autre point que celui
désigné dans l’article premier, comme le chemin par Gand vers Lille, par
exemple, il faudra une nouvelle loi. Le gouvernement a dit plusieurs fois qu’il
se proposait, d’une part, d’exécuter la loi du 1er mai 1834, en faisant partir
de Bruxelles une section nouvelle du chemin de fer par le Hainaut, et d’établir
un autre embranchement de Gand vers Lille. Nous arriverons donc à la frontière
de France sur deux points ; mais, pour le second embranchement, Il faudra une
loi. Cette loi, je l’espère, pourra vous être prochainement présentée.
Quant à
l’embranchement par le Hainaut, dans la direction de Mons, déjà autorisé par la
loi, une question grave s’est présentée relativement au tracé. Deux directions
ont été proposées. Le gouvernement se propose d’instituer, pour une question
aussi grave, une commission d’enquête ; mais comme cette commission ne peut
opérer, sans avoir des plans, des mémoires, des pièces sous les yeux, j’attends
que toutes ces pièces soient revenues au ministère pour instituer cette
commission : ces pièces ont été envoyées à l’avis des ingénieurs qu’on a nommés
tout à l’heure. Ces ingénieurs n’ont pu encore, en raison de la multiplicité de
leurs travaux, les restituer avec leurs réponses.
J’espère que ces
réponses arriveront prochainement ; alors la commission pourra être utilement
instituée. Je crois qu’il n’y a pas d’autre marche à suivre ; car il serait
inutile d’instituer la commission, n’ayant maintenant aucune pièce à mettre
sous ses yeux.
M. Gendebien. - Il faudrait presser la rentrée
des pièces.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- C’est ce que je ferai, et si la réponse ne m’arrive pas dans un court délai,
j’instituerai la commission en lui remettant les pièces telles quelles.
Mais il faut tenir
compte de la multiplicité des travaux des deux ingénieurs auxquels ces pièces
ont été renvoyées.
Plusieurs voix. - Il faut exercer votre autorité.
M. le ministre des travaux
publics (M. Nothomb). - Puisqu’on me somme en quelque sorte d’user de
l’autorité qu’a le gouvernement envers ses agents, je déclare que si les pièces
ne rentrent pas dans un délai donné, j’instituerai la commission d’enquête qui
opérera d’après les pièces dans l’état où elles seront ; je me bornerai à les
faire rentrer purement et simplement au ministère, Du reste, je le dis avec une
entière conviction : il ne faut pas accuser les deux ingénieurs ; ils n’ont
jamais fait faute au gouvernement, et prochainement, je l’espère, je serai en
possession de leur réponse, et je pourrai utilement et régulièrement instituer
une enquête.
M. Dolez. - Les explications de M. le ministre des travaux
publics me satisfont. D’après les mesures de rigueur qu’il est disposé à
prendre au besoin pour obtenir les renseignements qu’il n’a pu obtenir
jusqu’ici, je ne doute pas que le Hainaut ne soit bientôt doté de
l’embranchement qu’il demande.
M. Dumortier. - J’ai parlé de la sage
lenteur du ministère. Mais ne faut-il pas que le gouvernement sache avant tout
dans quelle direction sera construit le chemin de fer de
M. Dolez. - Mais non !
M. Dumortier. - Alors chacun ira de son côté.
Il faut savoir,
avant de déterminer la direction que vous donnez à votre chemin de fer quelle
direction donne au sien le pays voisin.
M. Rogier. - Un honorable préopinant vient
en quelque sorte d’appeler les rigueurs du ministère sur des fonctionnaires
pour les forcer à produire des pièces qu’il serait en retard d’examiner. Je
crois qu’il aurait injustice à punir des fonctionnaires qui n’ont pas demandé à
être consultés, et qui une fois consultés, ont voulu s’entourer de toutes les
lumières. S’ils ont tardé à terminer leur travail, c’est dans l’intérêt
général. Nous qui représentons l’intérêt général, nous ne pouvons qu’applaudir
à ce retard. Il y aurait injustice à exiger que le travail fût fait plus
promptement que ces ingénieurs ont jugé qu’il peut l’être.
Je demanderai
d’ailleurs à M. le ministre des travaux publics si un rapport n’a pas déjà été
fait par ces fonctionnaires.
Je pense que déjà
un premier rapport a été fait, par ces fonctionnaires, au département de
l’intérieur, et, à cet égard, ils ne devraient pas être exposés à recevoir les
reproches qu’on leur adresse d’une manière trop rigoureuse et assez injuste.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Messieurs, il est important d’exposer les
faits tels qu’ils se sont passés. Personne n’ignore que la société générale
avait conçu le projet de demander la concession du chemin de fer vers Paris,
par deux directions, sur Lille et sur Valenciennes. Ce projet a été abandonné
par suite du vote du sénat, en décembre 1835, sur les péages.
Les trois
ingénieurs mis à la disposition de la société générale, pour s’entendre avec
les ingénieurs français dans l’étude du chemin de fer de Bruxelles à Paris,
n’en ont pas moins continué leur travail ; et ils m’ont fait un premier rapport
en mai 1836, je crois.
J’ai désiré
connaître l’avis des ingénieurs Simons et de Ridder,
tant sur le projet qui m’était présenté que sur les dépenses de son exécution ;
cet avis m’a été remis au mois de septembre ; il était contraire à l’opinion
des trois ingénieurs Vifquain, Noël et Demoor.
Ce n’est pas tout, j’ai voulu consulter ces trois ingénieurs sur
l’opinion de MM. Simons et de Ridder ; je voulais que
la question fût examinée à fond et qu’il y eût contre-débat. J’ai obtenu leur
nouveau rapport au mois de décembre, je pense.
Enfin, j’ai demandé
à MM. Simons et de Ridder s’ils persistaient dans
leur premier plan, et quelles observations ils avaient à faire sur l’avis des
trois ingénieurs ; quoique j’eusse demandé ce dernier rapport dans un bref
délai, il ne m’est pas parvenu lorsque la division des travaux publics était
encore dans mon département.
Etant disposé à présenter
au projet de loi pour la section de Gand à Lille, j’avais invité MM. Simons et
de Ridder à le préparer avec le mémoire à l’appui ;
ils m’avaient promis ce travail dans un temps assez court ; mais depuis que
j’ai abandonné les travaux publics, je n’ai pu suivre cette question, et mon
collègue s’en est occupé avec tout le zèle qu’il porte dans la partie de
l’administration qui lui est confiée.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- L’honorable M. Rogier a bien compris ma pensée. Loin de blâmer les deux
ingénieurs dont j’attends le travail, j’ai soin de dire à la chambre qu’ils
n’avaient fait faute au gouvernement dans aucune circonstance, et que s’il y
avait eu un retard relativement à la présentation de leur réponse, il fallait
l’attribuer à la multiplicité de leurs occupations, et à l’importance même de
la question qu’ils avaient à examiner. Ces deux ingénieurs ont d’ailleurs
rédigé la majeure partie du compte-rendu qui a été distribué tout récemment à
la chambre. Je le répète, M. Rogier a bien compris mes paroles et mes
intentions.
PROJET DE LOI PORTANT
ORGANISATION DU CONSEIL DES MINES
Discussion générale
M.
le président. - Le projet en discussion est celui qui a été amendé par le
sénat. La parole est à M. Dolez.
M. Dolez. - La chambre ayant décidé que la proposition de
l’honorable M. Rogier serait jointe à la discussion générale de la loi qui nous
occupe aujourd’hui, c’est pour combattre cette proposition que je prends en ce
moment la parole.
Député d’un
district dont les mines de houille forment la principale industrie, il m’a paru
que c’était un devoir pour moi que d’élever la voie contre une proposition que
l’intéresse d’une manière si puissante et si directe.
Cette question,
selon moi, doit être envisagée sous les rapports :
1° Sous le rapport
de l’industrie en général ;
2° Sous le rapport
de la richesse publique ;
3° Sous le rapport
de l’intérêt des consommateurs ;
4° Sous le rapport
politique.
1° Sous le rapport
de l’industrie en général.
L’adoption du
système proposé aurait pour but de décourager l’industrie.
Il est, messieurs,
une vérité que personne ne conteste, que
Tous nos efforts
doivent donc avoir pour but de favoriser son essor, de lui donner toute
l’extension qu’elle comporte. Mais, en cette matière, les efforts du
gouvernement ne peuvent rien créer par eux-mêmes ; les élans de l’intérêt privé
sont seuls réellement puissants.
C’est donc à
stimuler ces élans que doit toujours tendre notre politique intérieure.
Or, messieurs, en
matière d’industrie, le stimulant le plus sûr est la garantie donnée à tous de
pouvoir recueillir les frais préparés par leurs travaux.
La pensée de M.
Rogier, si elle pouvait être adoptée par vous, renverserait à jamais cette
garantie.
Quelques mots vous
l’auront bientôt démontré.
Depuis plus de
vingt ans, l’industrie charbonnière, qui semble aujourd’hui susciter tant
d’envie, l’industrie charbonnière se trouvait dans la situation la plus
fâcheuse. Presque partout l’exploitation se faisait avec pertes.
Des efforts aussi
ruineux qui persévérants maintinrent seuls en activité, durant cette longue
période, une grande partie de nos charbonnages.
Durant ce temps, et
alors même que l’honorable auteur de la proposition était ministre de
l’intérieur, l’Etat ne pensa point à se faire charbonnier, et je crois qu’il
fit bien !
Mais aujourd’hui,
qu’après de longs jours malheureux apparaissent pour cette industrie quelques
jours de prospérité, l’on voudrait que le gouvernement intervînt, l’on voudrait
qu’il accaparât désormais une industrie laissée aux efforts des particuliers,
tant qu’elle était mauvaise ; on voudrait non seulement qu’il la fermât pour
l’avenir aux intérêts privés, mais qu’il fît même aux droits acquis une
désastreuse concurrence !
Je vous disais que
l’adoption du système proposé paralyserait les efforts de l’industrie…
Ne dirait-il point
en effet aux industries.
Travaillez à créer
une industrie nouvelle…
A améliorer une
industrie ancienne…
Exposez votre
fortune…
Engloutissez-la
peut-être, et avec elle votre existence et celle de vos familles…
Le gouvernement
vous laissera faire.
Mais si la
prospérité vient un jour, le gouvernement voudra y prendre part, ou plutôt il
l’accaparera pour l’avenir ; il la fermera à d’autres industriels ; il
anéantira, s’il le peut, ceux qui la possèdent déjà, par une concurrence
aveugle, capricieuse peut-être ?
Ne serait-ce point
là, messieurs, la conséquence inévitable du système ? Et avais-je tort de vous
dire qu’il répandrait l’alarme et le découragement dans l’industrie ?
L’on me dira
peut-être que la mesure se bornerait aux mines. Je répondrai qu’elle s’y
bornerait aujourd’hui, mais que demain peut-être elle s’étendrait à d’autres.
Il n’est point de pente plus rapide que celle qui conduit de l’erreur à
l’absurde.
2° Sous le rapport
de la richesse publique.
L’adoption de la
proposition de M. Rogier serait nuisible à la richesse publique.
C’est un principe
élémentaire en économie publique que la véritable richesse d’un Etat, n’est
autre que celle des citoyens qui le composent.
Il faut donc pour
accroître la richesse d’un Etat, non point accaparer au profit du gouvernement
les éléments de prospérité que le pays renferme, mais faut en faciliter l’accès
et l’emploi à tous les habitants.
A mesure que leur
fortune grandira, la richesse publique acquerra une nouvelle importance.
L’auteur de la
proposition méconnaît ce principe.
Ce qu’il veut, ce
n’est point un Etat riche de la fortune des citoyens ; ce qu’il veut, c’est un gouvernement qui puisse gagner
par lui-même de quoi se passer de l’or des contribuables. Pensez-vous, messieurs,
qu’un tel système soit bien propre à développer la fortune publique ?...
Poser une semblable
question, c’est la résoudre.
Sous le premier
rapport dans lequel j’ai examiné la question, il y aurait déjà perte pour la
richesse publique, par la défiance qui se répandrait dans l’industrie, et qui
en paralyserait l’essor.
Mais d’autres
inconvénients résulteraient encore. Sans prétendre que l’Etat ne puisse
produire, je dirai qu’il est toujours un mauvais producteur.
Et pour que tout le
monde puisse admettre ma pensée, même l’honorable M. Rogier, je dirai que s’il
n’est point mauvais d’une manière absolue il l’est du moins d’une manière
relative, en ce sens qu’il produit moins bien et à des conditions moins
favorables que les particuliers.
Dans l’espèce qui
nous occupe, sans doute la houille extraite par l’Etat serait aussi bonne que
si elle l’était par des particuliers ; mais comme son extraction lui coûterait
nécessairement plus cher, il en résulterait ou que le prix de vente devrait en
être plus élevé, ou que sa valeur naturelle serait diminuée, puisqu’elle ne
deviendrait utilisable qu’au moyen de frais plus considérable.
Sous ce rapport
encore il y aurait perte pour la richesse publique, puisqu’il y aurait
diminution de la valeur de la richesse naturelle du pays.
N’est-il pas
incontestable en effet que, si vous dépensez 1 fr. 50 c. pour produire une
mesure de houille que vous vendez deux fr., la valeur naturelle de la houille
n’est réellement que de 50 centimes.
Tandis que si cette
même mesure ne vous demande qu’un franc de frais d’extraction et si vous la
vendez deux francs, la valeur naturelle sera d’un franc.
Je le répète donc,
extraire d’une manière plus frayeuse, c’est diminuer
la richesse naturelle du pays, c’est diminuer la fortune publique.
Mais, a dit
honorable M. Rogier dans les développements de sa proposition, le gouvernement
a su prouver qu’il n’exploitait pas plus mal qu’un particulier… Le chemin de
fer est là qui l’atteste.
Peut-être y
aurait-il bien des choses à objecter à ce témoignage ?
Peut-être
pourrait-on vous dire que, livré aux entreprises particulières, le chemin de
fer qui se fait, non point pour rapporter à l’Etat, mais pour faciliter les
transports, mais dans l’intérêt de l’industrie, mais pour accroître la richesse
publique, en venant en aide à la richesse de tous, serait maintenant ouvert de
toutes parts à la circulation.
Peut-être
pourrais-je, moi député de Mons, vous dire que le Hainaut attend encore que
l’on commence l’embranchement qu’on lui destine, qu’il attend même qu’on lui
assigne la direction que ses véritables intérêts réclament, tandis qu’une
entreprise particulière l’en eût depuis longtemps doté…
Peut-être
pourrais-je vous dire enfin qu’il est permis de douter encore que l’Etat ait à
se louer dans quinze ans d’avoir entrepris par lui-même cette vaste
construction.
Mais je ne vous
dirai rien de tout cela.
Je vous répondrai
seulement que votre comparaison est mauvaise.
Sans doute, pour
qui croirait que la houille s’exploite comme un champ se cultive, l’Etat qui a
pu faire un chemin de fer, pourrait être demain un excellent charbonnier.
Mais, pour qui
connaît les détails immenses qu’entraînent de telles exploitations, pour qui
sait qu’il n’y a de bénéfices possibles dans cette industrie qu’au moyen d’une
surveillance de tous les instants, qu’au moyen d’une économie des plus
minutieuses, l’Etat sera toujours un extracteur, et fera des pertes
considérables là où des particuliers réaliseraient d’importants bénéfices.
J’en appelle, à cet
égard, au témoignage de tous ceux d’entre vous qui savent ce que c’est qu’une
exploitation charbonnière.
Mais, dit encore M.
Rogier, les mines non encore concédées équivalent, à ce qu’on présume, à celles
qui sont déjà en extraction.
Or, on évalue,
dit-il, à soixante millions de francs le produit annuel des houilles dans tout
le pays ; en admettant cette base et en supposant un bénéfice de 10 p. c., on
obtient une somme nette de six millions, qui pourrait être ajoutée aux
ressources de l’Etat.
Ce serait un moyen
de diminuer les impôts qui pèsent sur le peuple, et ce moyen ne devrait pas
être le dernier à choisir.
Messieurs à partir
de ce principe, l’Etat doit désormais prendre à lui toutes les industries,
pourvu qu’elles soient productives.
Le ministre des
finances fera la banque.
Le ministre des
travaux publics se fera entrepreneur de constructions.
Le ministre de la
justice aura dans se bureaux des notaires qui recevront les actes, des avocats
qui plaideront, le tout au profit de l’Etat.
Je donne dans
l’absurde, me direz-vous… Je le sais, mais c’est votre principe qui m’y
conduit.
Je puis donc le
proclamer mauvais.
Vous voulez que
l’Etat devienne industriel, afin de pouvoir subléver
les citoyens des impôts qui les grèvent ; moi, je désire les voir assez riches
pour qu’ils puissent vous les payer sans peine.
Mais, d’ailleurs,
croyez-vous donc que tout soit succès dans cette industrie à laquelle vous
voulez que l’Etat se livre ?
Croyez-vous que
l’Etat n’ait qu’à vouloir pour palper bientôt ces six millions annuels que vous
lui montrez comme un si séduisant appât ?
Savez-vous ce qu’il
en coûte pour établir une seule houillère ?
Vous l’ignorez
peut-être : eh bien, je vais vous le dire.
Avant d’atteindre
la mine, avant de parvenir jusqu’au rocher dans lequel sont intercalées les
couches de houille, il faut souvent traverser le terrain meuble (appelé par les
charbonniers mort terrain) et la nappe d’eau qu’il renferme, cette opération
absorbe ordinairement une dépense de 2 à 3 cent mille francs et souvent il est
arrivé que des sociétés du borinage ont englouti dans cette opération des
sommes plus considérables encore.
Il en est une en ce
moment, si je ne me trompe, qui a dépensé pour cet objet près d’un million de
francs et dont je ne sais si les efforts sont couronnés de succès.
Il en est une
autre, celle dite de la veine à mouches sur Quaregnon, qui y a dépensé sans
succès une somme de sept cent mille francs.
Si l’on est assez
heureux pour ne point rencontrer le terrain inculte, ou si on est parvenu à le
franchir, l’enfoncement du puits d’extraction et du puits aux échelles coûte au
moins de 250 à 280 francs par mètre courant, ce qui, pour trois cent cinquante
à
Les galeries à
travers le rocher ne sont pas moins coûteuses.
La machine à vapeur
pour extraire la houille, et le bâtiment qui la contient, absorbent une somme
de 60 à 100 mille fr.
Une pompe à feu
pour l’extraction des eaux nécessite une dépense de deux cent mille francs,
sans y comprendre le puits sur lequel elle est placée.
A ces dépenses de
premier établissement, il faut joindre les frais d’exploitation, ceux de la
main-d’œuvre, l’éclairage, le bois de construction et d’étayage des travaux,
les cordages, le fer pour l’entretien des machines, la consommation que
celles-ci font d’une partie du charbon extrait, les outils, les constructions
et entretien des chaussées, le personnel de l’administration.
Récapitulez toutes
ces dépenses et vous aurez un aperçu des capitaux immenses qu’engage et
qu’absorbe l’exploitation d’un seul établissement.
Et ne croyez point,
messieurs, qu’un succès certain vienne compenser tant de dépenses... Loin de
là, il n’arrive que trop souvent que les fondateurs d’un établissement
charbonnier se ruinent de la manière la plus complète, et que ceux qui leur
succèdent profitent seuls des dépenses qu’ils avaient faites, en reprenait à
bas prix des travaux organisés à si grands frais.
Et quand notre
gouvernement, rendu par vous spéculateur, viendra vous exposer les pertes qu’il
aura faites, qui lui donnerez-vous pour associé solidaire ?...
Ces mêmes
contribuables dont vous croyez aujourd’hui servir les intérêts.
Sur eux seuls
retomberont des fautes qui ne seront point les leurs. Vous aurez à leur
demander alors, non pas seulement ces contributions dont vous dites que vous
voulez les subléver, mais encore les sommes
nécessaires pour faire face à vos fausses opérations ou aux malheurs dont elles
auront été frappées !
Vous aurez donc
ravi à l’industrie particulière des moyens puissants d’activité nouvelle...
Vous aurez englouti
des capitaux de l’Etat…
Vous aurez aggravé
les charges de la nation et la richesse publique n’en souffrirait pas !!!!
3° Sous le rapport
de l’intérêt des consommateurs.
Messieurs,
l’honorable M. Rogier a appelé à l’appui de sa proposition l’intérêt du
consommateur.
De mon côté, je
crois pouvoir la combattre, au nom de ce même intérêt.
« La formation
de grandes associations, vous a-t-il dit, a fait naître des craintes exagérées
peut-être, mais qui ne sont pas sans quelque fondement, sur la possibilité d’un
vaste monopole, qui pourrait être exercé par ces grandes associations. »
Je regarde, quant à
moi, comme chimériques ces craintes d’un monopole impossible à mes yeux, au
milieu de la multitude d’établissements charbonniers qui existent dans notre
pays ; mais je regarde comme bien plus étrange encore le remède que l’on vous
propose.
En effet,
messieurs, j’avais toujours pensé jusqu’ici que le monopole d’une denrée
devenait plus difficile, à mesure qu’elle était divisée en un plus grand nombre
de détenteurs.
Le remède ou plutôt
le préservatif contre le monopole que votre esprit redoute et devance était
donc, selon moi, de diviser l’extraction de la houille, de multiplier le plus
possible le nombre des concessionnaires.
Je me trompais,
paraît-il : pour empêcher le monopole, il faut élever non pas dix, non pas
cent, mais une seule concurrence.
C’est une
application par analogie de la méthode homoeapathique
! !
La pensée est
réellement heureuse, et l’honorable M. Rogier avait bien raison d’annoncer
qu’elle pourrait paraître nouvelle !
Toutefois,
messieurs, la nouveauté ne me séduit point, et, loin d’être à mes yeux une garantie
contre le monopole, une telle mesure me paraîtrait de nature à le faire naître.
Pour vous le
démontrer, permettez-moi d’emprunter un instant les craintes de l’auteur de la
proposition.
J’admets donc avec
lui que ces grandes compagnies auxquelles il a fait allusion, aient et
réalisent le projet d’accaparer tous les charbonnages existants à l’heure qu’il
est.
J’admets qu’elles
élèvent alors le prix de la houille en dehors de ses justes limites…
Pensez-vous que
l’Etat, placé dans des conditions moins favorables comme extracteur, puisse
apporter un sérieux obstacle à ses projets... ?
Etes-vous certain
qu’il le voudra toujours… ?
N’arrivera-t-il pas
mille circonstances dans lesquelles il ne demandera pas mieux que d’élever
aussi le prix de ses produits ?
Les deux rivaux,
qui n’auront point à craindre l’intervention d’un troisième, ne se mettront-ils
point à faire du monopole à deux ?
Voilà des dangers
sérieux selon moi.
Il en est de plus
graves encore.
Je vous disais tout
à l’heure que je ne partageais point vos craintes sur la possibilité du
monopole des houilles, dans l’état actuel des choses ; mais que votre pensée
soit admise, j’en prendrai de sérieuses inquiétudes.
En effet,
qu’advienne un jour où les chefs de ces grandes compagnies que vous craignez,
auxquelles vous prêtez des pensées de monopole, après avoir réuni dans leurs
mains un grand nombre, si pas la totalité des extractions actuelles,
parviennent, et la chose est possible, à prendre la direction de l’Etat,
n’aurez-vous point, pour me servir d’une expression vulgaire, mais qui peint
bien toute l’imprévoyance du système proposé, n’aurez-vous point enfermé le
loup dans la bergerie !!!
Je vous faisais
entrevoir tout à l’heure la possibilité d’un monopole à demi, nous voici
maintenant au monopole proprement dit.
Vous n’auriez plus
même alors la ressource, d’ailleurs si anti-nationale
à mes yeux, mais qui semble ne pas déplaire à l’auteur de la proposition,
d’ouvrir vos frontières et vos ports aux charbons de l’étranger.
« Votre
gouvernement charbonnier, votre gouvernement marchand ne le voudrait
pas. »
Voilà pour le
monopole.
Vous parlerai-je
maintenant de l’urgence détendre le plus possible le nombre des extractions
charbonnières ?
C’est chose
reconnue et proclamée par tous.
Eh bien, accordez à
l’industrie privée toutes les concessions qu’elle demande à l’heure qu’il est,
et dans trois ans toutes seront en extraction.
Gardez-les pour
l’Etat, et dans cinquante ans vous n’en serez point là. A tous égards, votre
système serait donc contraire aux intérêts du consommateur.
4° Sous le rapport
politique.
Ici encore le
système proposé ne me présente que des inconvénients, que des dangers.
Ils existent pour
notre politique envers l’étranger, comme pour notre politique intérieure.
Pour notre
politique avec l’étranger :
Messieurs, il est
d’une saine politique pour un Etat d’établir ses ressources financières d’une
manière aussi stable que possible ; il l’est surtout de ne point les livrer au
bon ou au mauvais vouloir de l’étranger.
Or si, comme on le
propose, vous veniez à remplacer les ressources que l’Etat trouve dans les
impôts par les produits des mines de houille, il dépendrait de l’étranger
d’appauvrir à son gré notre trésor, et cela au moment où les besoins seraient
les plus urgents.
Qu’un pays voisin
vous ferme ses frontières ; que la guerre survienne et arrête, comme elle le
fait toujours, l’essor de l’industrie, vos établissements chômeront et le
trésor de l’Etat restera vide.
Vos établissements eux-mêmes
par leurs propres besoins augmenteront sa détresse.
En vain
voudrez-vous trouver d’autres ressources, des impôts nouveaux ne s’improvisent
point au jour du danger.
Ils seraient
d’ailleurs mal accueillis par ceux que vous auriez dépouillés de leur
industrie, à prétexte de les rendre plus heureux et plus riches, en
compromettant de les subléver de ces mêmes impôts !
Je ne puis croire d’ailleurs que dans vos traités de commerce avec l’étranger,
vous trouviez beaucoup de facilités et de sympathies pour votre commerce de
houille, quand son produit ne fera que remplacer vos impôts.
Je ne puis croire
qu’un gouvernement consente à des conditions peut-être onéreuses pour ses
administrés, pour subléver les vôtres d’une partie de
leurs charges publiques.
Pour notre
politique intérieure :
Le système proposé
serait dangereux pour nos libertés.
Quelle arme ne
serait-ce point entre les mains de ministres mal intentionnés que ces vastes
établissements industriels répandus dans un grand nombre de localités !
Que d’électeurs ne
tiendraient-ils point sous leur dépendance absolue, non seulement par le grand
nombre d’emplois qu’ils auraient à conférer, mais par les préférences qu’ils
accorderaient à ceux qui auraient besoin des produits des établissements de
l’Etat, pour alimenter leur propre industrie, et qui mériteraient cette
préférence par un dévouement aveugle aux volontés du pouvoir !
Enfin, messieurs,
le système que je repousse ferait naître dans les provinces qu’il frapperait de
justes mécontentements.
L’industrie d’un
peuple fait partie de ses mœurs, et les mœurs d’un peuple ne se froissent point
impunément.
Or, messieurs, les
habitants du Hainaut, habitués depuis des siècles à voir les mines de houille
concédées à l’industrie privée, ne verraient sûrement point avec indifférence
l’Etat les confisquer à son profil.
Et celles de nos
provinces que la nature a dotées de ces richesses souterraines, les
verraient-elles sans mécontentement servir, non plus à augmenter leur
prospérité, mais à subléver les autres provinces
d’une partie des impôts qu’elles payaient à l’Etat ?....
Je pourrais
continuer encore, mais il me tarde d’en finir, craignant déjà d’avoir abusé de
vos instants, de votre attention.
Je crois d’ailleurs
vous avoir suffisamment prouvé que de toutes parts des dangers aussi sérieux
qu’incontestables entourent le système sur lequel on a appelé votre attention.
Vous ne croirez
donc ni devoir introduire dans la loi qui vous occupe, ni retarder l’adoption
de cette loi pour vous consacrer à la longue étude d’une question dont la saine
raison fait dès à présent justice.
La loi des mines
est impatiemment attendue, vous ne pouvez la faire désirer plus longtemps.
Il importe à notre
industrie, si vous ne voulez point en arrêter l’essor, au lieu de la seconder,
de livrer bientôt à l’activité privée toutes les concessions qu’elle demande.
De toutes parts
s’élèvent des usines de toutes espèces, qui vont absorber chaque jour une
énorme quantité de charbon.
Si vous tardez
encore, dans trois ans vous les verrez languir, chômer peut-être, à défaut du
combustible qui doit leur donner la vie.
Pour moi,
messieurs, pour éviter ces dangers, pour répondre aux besoins de notre
industrie, pour obéir à la voix de ma conviction, je voterai contre la
proposition de M. Rogier.
M. le président. - La chambre ayant
réuni à la discussion de la loi sur les mines la proposition de M, Rogier, je
crois devoir en rappeler les termes :
« Serait-il de
l’intérêt général que le gouvernement se réservât de disposer, pour le compte
du domaine, des mines de houille non encore concédées ?
« Je demande
qu’une commission spéciale soit nommée à l’effet d’examiner cette question, à
moins que le gouvernement ne juge à propos de nommer lui-même une commission
d’enquête. »
M. Milcamps. - Messieurs, le renvoi qui nous est
fait par le sénat du projet de loi sur les mines, et la proposition de
l’honorable M. Rogier, nous ramènent à de graves discussions.
A qui appartiennent
les mines ? Peut-on conférer au gouvernement le droit de les faire exploiter au
profit du domaine ? Le gouvernement est-il un bon constructeur des produits ?
Telles sont les questions que le projet de loi et la proposition de M. Rogier
font naturellement naître sur ces questions, je ne présenterai que des
considérations générales.
La législation des
différents Etats de l’Europe en matière des milles est connue ; je crois devoir
me borner à rappeler celle qui a régi
En Hainaut, les
seigneurs hauts justiciers avaient le droit exclusif d’exploiter, soit par
eux-mêmes, soit par leurs concessionnaires, les mines de houille qui se
trouvaient dans leurs hautes justices.
Dans le pays de
Liége, aux seuls propriétaires de la surface appartenait le droit d’ouvrir et d’exploiter
les mines de houille ; seulement on y admettait l’action de conquête qui avait
pour objet l’adjudication des veines de houille recouvertes par les eaux
souterraines et devenues par là inexploitables, et cette adjudication avait
pour but de rendre ces veines à l’exploitation.
Dans le Limbourg il
paraît que le maître du fonds était maître des mines et qu’il ne pouvait les
perdre que par saisie.
Dans le Luxembourg
et le comté de Namur, on voit qu’il y avait amalgame du droit régalien et du
droit du propriétaire du fonds, particulièrement en ce qui concerne les mines
de fer.
A cette législation
a succédé celle de la loi du 28 juillet 1791.
Dans la discussion
de cette loi on examina sous tous les rapports la question de savoir si les
mines étaient des propriétés domaniales, et après avoir été soumises à
l’épreuve du droit naturel, du droit public et de la législation de presque
tous les peuples de l’Europe, elle fut résolue de la manière suivante :
« Les mines et
minières tant métalliques que non-métalliques, ainsi que les bitumes, charbons
de terre ou de pierres et de pyrites, sont à la disposition de la nation, en ce
sens que ces substances ne pourront être exploitées que de son consentement et
sous sa surveillance, à la charge d’indemniser, d’après les règles qui seront
prescrites, les propriétaires de la surface qui jouiront en outre de celles de
ces mines qui pourront être exploitées ou à tranchées ouvertes ou avec fosse et
lumière jusqu’à
Après une
expérience de 15 années, la révision de la loi de 1791 devint indispensable ;
on s’en occupa en 1810.
Mais en 1810 le
code civil régissait
Un des principes du
code civil, l’art. 552, dispose que « la propriété du sol emporte la
propriété du dessus ou du dessous. Le propriétaire peut faire au-dessous toutes
les constructions et fouilles qu’il jugera à propos, et tirer de ces fouilles
tous les produits qu’elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant
des lois et règlements relatifs aux mines et des lois et règlements de police.
»
M. Portalis,
orateur du gouvernement, disait : « Comme il est des propriétés d’une telle
nature que l’intérêt particulier peut se trouver facilement et fréquemment en
opposition avec l’intérêt général dans la manière d’user de ces propriétés, on
a fait des lois et des règlements pour en diriger l’usage. Tels sont les
domaines qui consistent en mines, en forêts, et en d’autres objets pareils, et
qui ont dans tous les temps fixé l’attention du législateur. »
C’est en présence
des dispositions que je viens de rappeler qu’on discuta la loi de 1810.
De cette
discussion, il découle qu’on semblait admettre le principe que les mines
appartiennent à l’Etat ; mais pour ne point violer l’article 552 du code civil,
on s’abstint de le déclarer. On ne renouvela point la disposition de la loi de
1791, portant que : « les mines sont à la disposition de la nation. » Mais
on prit une résolution équivalente, qui fut érigée en loi, et qui porte : « Les
mines ne peuvent être exploitées qu’en vertu d’un acte de concession délibéré
en conseil d’Etat. Cet acte règle les droits du propriétaire de la surface, et
donne la propriété de la mine, laquelle est dès lors disponible et
transmissible comme tous autres biens. »
Si cette loi
n’accordait aucune préférence au propriétaire de la surface pour l’exploitation
de la mine, elle posait du moins à son profit le principe d’indemnité ; elle
n’en déterminait pas, comme le fait notre projet de loi, la quotité ; elle en
abandonnait le règlement à l’acte de concession, et je ne sais si, par notre
projet, la loi de 1810 sera en ce point améliorée.
Voici maintenant
comment M. le rapporteur de la commission d’administration intérieure du corps
législatif, dans la séance du 31 avril 1810, cherchait à justifier que le
projet de loi de 1810 ne violait pas l’art. 552 de code civil :
« L’opinion de
votre commission, disait M. le rapporteur, est que la propriété des mines est à
l’Etat.
« Elle présume
que le projet l’eût dit nettement s’il eût précédé le code civil.
« Le déclarer
positivement, c’eût été blesser une de ses dispositions fondamentales.
« Attaquer la
loi civile est toujours une chose fâcheuse ; c’est ce que l’on a voulu éviter,
et l’on a bien fait.
« La propriété
du sol emporte la propriété du dessus et du dessous.
« Prononcer que les
mines sont des propriétés domaniales, c’eût été annuler l’art. 552, et non le
modifier.
« La reconnaissance
formelle des droits du propriétaire est une modification qui concilie le code
et le projet. »
L’honorable M.
Rogier ne manquera pas sans doute d’invoquer l’opinion de cette commission,
pour établir que les mines étant à l’Etat, on peut conférer au gouvernement le
droit de les exploiter au profit du domaine. Seulement il demandera la
reconnaissance formelle du droit du propriétaire de la surface quant à
l’indemnité.
Cependant,
messieurs, je n’admets point le principe général et absolu que les mines sont à
l’Etat.
Nous devons
reconnaître que « la libre et tranquille jouissance des biens que l’on possède
est le droit de tout peuple qui n’est point esclave ; chaque citoyen doit
garder sa propriété sans trouble ; cette propriété ne doit jamais recevoir
d’atteinte, et elle doit être assurée comme la constitution même de l’Etat. »
Tel est le langage des jurisconsultes et des publicistes.
Mais ils
conviennent qu’il y a des cas ou l’on peut avec avantage intervenir entre le
particulier et sa propriété. C’est ainsi, dit Jean-Baptiste Say, que la crainte
de provoquer le desséchement des cours d’eau, ou la nécessité de procurer à la
société des bois de marine ou de charpente dont on ne saurait se passer, fait
tolérer des règlements relatifs à la coupe des forêts particulières, et que la
crainte de perdre les minerais qu’enferme le sol impose quelquefois au gouvernement
l’obligation de se mêler de l’exploitation des mines.
On sent, en effet,
ajoute-t-il, que si la manière d’exploiter restait entièrement libre, un défaut
d’intelligence, une avidité trop impatiente, ou des capitaux insuffisants
pourraient conseiller à un propriétaire des fouilles superficielles qui
épuiseraient les portions les plus apparentes et souvent les moins fécondes
d’une veine, et feraient perdre la trace des plus riches filons. Quelquefois
une veille minérale passe au-dessous du sol de plusieurs propriétaires, mais
l’accès n’en est praticable que par une seule propriété ; il faut bien, dans ce
cas, vaincre la volonté d’un propriétaire récalcitrant et déterminer le mode
d’exploitation. Encore, dit Say, n’oserais-je répondre qu’il ne fût préférable
de respecter son travers, et que la société ne gagnât davantage à maintenir
inviolablement les droits d’un propriétaire qu’à jouir de quelques mines de
plus.
Vous le voyez,
messieurs, ce n’est que la crainte de perdre les minerais qu’enferme le sol, et
l’intérêt de conserver un genre de richesses précieux sous tant de rapports à
tous les membres de l’Etat, qui puisse autoriser la puissance publique à se
mêler de l’exploitation des mines ; c’était cette crainte qui dans le pays de
Liége, où la mine appartenait au propriétaire de la surface, faisait néanmoins
adjuger à des tiers les veines de houille recouvertes par les eaux
souterraines.
Cette réflexion me
fait arriver à la proposition de M.
Rogier.
Ce n’est pas la crainte
de perdre les minerais qui a motivé cette proposition. Ce sont les
circonstances graves dans lesquelles nous sommes. Depuis que la houille a
acquis un si grand prix, une valeur si élevée, il s’est formé dans le pays de
grandes associations pour exploiter à leur profit cette matière précieuse. Ce
sont deux faits d’une haute gravité, d’une grande importance et sur lesquels
cet honorable membre croit que l’attention sérieuse du pays et du gouvernement
doit se porter. Ces circonstances lui paraissent si graves qu’il nous soumet la
question de savoir s’il ne serait pas convenable à l’intérêt général que le
gouvernement se réservât le droit de faire exploiter au profit du domaine les
mines de houille non encore concédées ?
Sans doute, si la
proposition de M. Rogier mérite l’attention sérieuse du pays et du
gouvernement, ce n’est et ce ne peut être que sous le rapport de l’existence
des grandes associations qui lui paraissent destinées à envahir l’industrie.
Si l’on a toujours
vu avec défaveur accorder quelquefois à des particuliers, mais surtout à des
compagnies de commerce, le droit exclusif d’acheter et de vendre certaines
denrées, il faut craindre que de puissantes associations ne s’arrogent un
pareil droit. Le gouvernement se trouverait, vis-à-vis de ces associations,
dans une position bien plus fâcheuse que vis-à-vis des compagnies auxquelles il
accorderait le privilège d’exploiter.
En matière de
privilèges le gouvernement peut déterminer les conditions de jouissance, les
prix, etc., et mettre ainsi des bornes à la faveur accordée aux producteurs
tandis que les grandes associations, auxquelles M. Rogier fait allusion,
seraient maîtresse de leurs prix.
Je ne sais si les
grandes associations qui se sont formées dans notre pays, sont destinées à
envahir l’industrie, j’ai beaucoup de doute à cet égard ; s’il en devait être
ainsi, ce serait un mal. Mais le remède proposé par M. Rogier, de faire le
gouvernement constructeur des produits, serait-il salutaire ?
Vous savez ce que
pensent les économistes des efforts de l’Etat pour créer des produits ; ils
ont, selon Jean-Baptiste Say, l’inconvénient de nuire à l’industrie des
particuliers, non des particuliers qui travaillent avec lui et qui s’arrangent
pour ne rien perdre, mais à l’industrie des particuliers qui sont ses
concurrents.
L’Etat est un
agriculteur, un manufacturier, un négociant qui a trop d’argent à sa
disposition, et qui n’est pas assez intéressé au succès de ses entreprises. Il
peut consentir à vendre un produit au-dessous du prix courant et recommencer
sur le même pied, parce que la perte qui en résulte ne sort pas de la poche de
celui qui dirige l’opération. Il peut consommer, produire, accaparer en peu de
temps une quantité de produits telle, que la proportion qui s’établit
naturellement entre le prix des choses soit violemment dérangée. Or, tout
changement brusque dans le prix des choses est funeste.
A cette opinion des économistes on opposera des faits appuyés de
l’expérience ; je veux dire l’exploitation de la mine de Kerkraede
et le chemin de fer.
Il ne me paraît pas
qu’on puisse rien en conclure ; la mine de Kerkraede
appartient au gouvernement ; elle est en état d’exploitation : le gouvernement
exploite sa chose ; il ne nuit point à l’industrie des particuliers ; mais la
proposition de M. Rogier a pour objet la recherche et la découverte de toutes
les mines non encore concédées ; il s’agit de les faire exploiter au profit du
domaine ; il veut donner un concurrent envahisseur à l’industrie en général. Le
gouvernement serait ainsi la plus puissante des associations.
On ne peut, ce me
semble, rien conclure non plus de l’exploitation de chemins de fer. Il n’y a
pas d’analogie ; les grands chemins publics, et j’y comprends les chemins de
fer que le gouvernement exécute en ce moment, ont toujours été considérés comme
n’appartenant à personne, parce que l’usage en est commun à tous, et c’est
parce qu’ils n’appartiennent à personne et que l’usage en est commun à tous que
la propriété doit en appartenir à l’Etat.
Je voterai contre
la proposition de M. Rogier.
M. le président. - La parole est à M. Lehoye.
M. Gendebien. - Je demande que la discussion
soit renvoyée à demain. Il n’y a pas 30 membres dans la salle. On ne peut pas
continuer la discussion devant les banquettes pour que demain on vienne voter
sans y avoir assisté.
M. Rogier. - Dans les renseignements
donnés à la chambre par le ministre des travaux publics, on indique bien le
nombre des concessions demandées, mais on n’indique pas leur étendue. C’est un
point important sur lequel le ministre a promis de fournir des renseignements
ultérieurs. Je demanderai si M. le ministre pourra nous fournir dans le courant
de la discussion les renseignements que je vais préciser ; je désirerais qu’il
nous donnât un tableau renfermant 1° le nom et la commune sur laquelle la mine
est située ; 2° le nom et le domicile des demandeurs en concession ; 3° la date
de la demande ; 4° l’étendue de la demande. Je pense que le ministre sera à même
de fournir ce tableau qui, je crois, sera très utile pour la discussion. Les
renseignements fournis s’arrêtent à l’année 1834.
Je pense qu’il
serait utile de les compléter jusqu’à l’année actuelle. Si de nouvelles
demandes ont été faites, qu’il en soit fait un tableau supplémentaire. Je le
prie de nous dire s’il peut nous fournir le tableau que je viens d’indiquer.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Messieurs, j’ai toujours regardé comme très important de remplir la lacune
qui existait dans les renseignements que j’ai fournis, c’est-à-dire de faire
une nouvelle colonne dans laquelle serait indiquée l’étendue des terrains
demandés en concession. Mais je ne comprends pas l’utilité des nouveaux
renseignements que demande le préopinant. Je ne sais jusqu’à quel point je
serais en état de dresser le tableau qu’il demande. Mais quant à la lacune que
j’ai signalée dans le résumé dont j’ai accompagné les tableaux que j’ai
fournis, elle est remplie : je tiens en main les tableaux ainsi complétés.
M.
Rogier. - Les renseignements qui ont été imprimés sont vagues. On
indique bien le nombre des concessions, mais on se tait sur les autres
renseignements ; on renvoie à des tableaux manuscrits. Il paraît qu’on a reculé
devant les frais d’impression de tous les tableaux fournis par le ministre. Je
ne demande pas que cette impression ait lieu, c’est pour y suppléer que j’ai
fait ma proposition.
Il est de toute
nécessité que nous ayons les renseignements que je demande, et qui doivent
faire la base de la discussion de ma proposition.
A cette occasion, je crois devoir rappeler à la chambre, ainsi que vient
de le faire M. le vice-président, les termes dans lesquels ma proposition a été
présentée, afin que mes adversaires ne prennent pas pour une proposition
directe et formelle ce qui n’est qu’une simple investigation.
J’ai demandé que la
chambre examinât jusqu’à quel point il serait de l’intérêt général que le
gouvernement exploitât pour compte du domaine les mines de houille non encore
concédées ; j’ai demandé qu’une enquête fût faite sur cette question.
Je désirerais que
mes adversaires se renfermassent dans ma proposition. C’est un avertissement
que j’ai cru devoir donner en passant.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- La demande de l’honorable préopinant reviendrait à faire réimprimer les
tableaux. Je ne pourrais pas les réduire à des termes plus succincts. Ce n’est
pas du reste très volumineux ; la chambre pourrait en ordonner l’impression.
M. Dumortier. - J’avais demandé la parole pour
proposer l’impression des pièces, ce que vient de faire M. le ministre des
travaux publics.
M.
Pirmez. - Les tableaux dont on demande l’impression n’apprendront rien
; car, depuis qu’ils ont été dressés, de nouvelles demandes en concession ont
été faites, et il s’en fait tous les jours.
M.
Rogier. - Il faudrait y ajouter toutes les demandes faites jusqu’à ce
jour.
- La discussion est
renvoyée à demain.
La séance est levée
à 4 heures.