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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 17 mars 1837

(Moniteur belge n°81, du 22 mars 1837)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Verdussen fait l’appel nominal a une heure.

M. Lejeune lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Verdussen présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« Les administrations communales de diverses communes du Limbourg demandent la construction de différentes routes dans cette province. »


« Le sieur P. Boutquin, à Bruges, ex-exécuteur des arrêts criminels, demande qu’il soit voté au budget une somme pour lui donner un secours alimentaire. »


« Le sieur Matthieu Bertrand, à Huy (Liége), demande le licenciement de son fils, milicien de 1833, qui, de fils unique, est devenu enfant unique par le décès de sa sœur. »


« Des marchands huiliers de l’arrondissement d’Ypres adressent des observations tendant à améliorer la situation des fabriques d’huiles indigènes. »


« Des habitants de la commune d’Auvelais adressent des observations sur la loi relative aux mines. »


- Ces pétitions sont renvoyées à la commission des pétitions, chargée d’en faire le rapport.


« Le sieur P. Diederich, laboureur à Stolzembourg (Luxembourg, réclame de nouveau le paiement de l’indemnité qui lui revient du chef de huit parcelles de près et terres expropriés par l’ancien gouvernement pour l’exploitation de la mine de cuivre de Stolzembourg, »

M. Watlet. - Messieurs, cette dernière pétition est devenue aujourd’hui sans objet ; il n’y a donc pas lieu de la renvoyer à la commission des pétitions.

Voici en peu de mots de quoi il s’agit :

Dans le courant de 1835, P. Diederich et consorts, cultivateurs à Stolzembourg, ont présenté une pétition à la chambre, à l’effet d’obtenir le paiement de plusieurs parcelles de terre labourable, dont ils ont été expropriés sous le gouvernement des Pays Bas, pour l’usage des exploitants de la mine de cuivre à Stolzembourg.

Dans leur nouvelle pétition ils déclarent qu’ils ont appris par les journaux qu’un rapport devait bientôt être fait sur leur première requête, et ils demandent que ce rapport ne tarde pas à être fait.

Or, cette demande est devenue sans objet, puisque le rapport dont il s’agit a été soumis à la chambre dans la séance du 10 décembre 1836. La pétition a été renvoyée à M. le ministre de l’intérieur, mais je pense que c’est M. le ministre des travaux publics qui en est saisi maintenant.

Je demanderai donc que la nouvelle pétition soit renvoyée à M. le ministre des travaux publics, dont je me permettrai d’appeler toute l’attention sur la position des pétitionnaires,

Ce sont de petits laboureurs. Plusieurs d’entre vous, messieurs, ne savent pas ce que sont de petits laboureurs dans le Luxembourg. Ce sont des gens qui ont précisément assez de terres pour cultiver les pommes de terre et le grain dont ils ont besoin pour vivre. Si on les dépouille, sans indemnité, d’une partie de leurs propriétés, on les met hors d’état de pourvoir aux nécessités de la vie. Ils sont obligés dès lors de se faire journaliers ; et quand ils ne trouvent pas d’ouvrage, ils deviennent des mendiants, des vagabonds, et quelquefois pis encore.

M. Mast de Vries. - Si je me lève, c’est simplement pour faire observer que c’est moi qui ai présenté le rapport de la pétition dont parle l’honorable M. Watlet.

- La proposition de M. Watlet est mise aux voix et adoptée. En conséquence, la pétition du sieur P. Diederich, laboureur à Stolzembourg, sera renvoyée à M. le ministre des travaux publics.


Message du sénat annonçant qu’il a adopté le budget du département de l’intérieur pour l’année 1837.


Il est donné lecture d’une lettre adressée à la chambre par M. Gendebien, en réponse à celle que le général Evain a adressée à la chambre sous la date du 12 mars, et qui a été insérée au Moniteur du 16. (Voir notre numéro 77 du 18 mars.)

M. le président. - Je ferai observer que, suivant l’usage, le bureau a porté à la connaissance de la chambre, par voie d’analyse, l’écrit qui a été adressé au président par M. le général Evain, pour être communiqué à l’assemblée. Ainsi le bureau n’a fait que suivre ce qui est prescrit par le règlement et par les antécédents de la chambre.

M. Gendebien. - Messieurs, je n’ai pas entendu inculper le bureau en aucune façon : ce n’est pas au bureau que mon observation fait allusion.

J’ai pensé qu’il n’était pas régulier de faire imprimer et distribuer sans examen préalable une pièce qui nous arrive du dehors, parce que si elle contient une inculpation contre un membre de la chambre, et même contre toute autre personne, comme la défense est de droit, on devrait fournir au membre inculpé le même moyen de se défendre, en faisant imprimer et distribuer sa réponse ; toutes ces pièces dès lors feraient partie de nos archives ; quelle en serait la conséquence ? Je vous l’ai déjà dit.

Je pense, messieurs, que l’on établirait un précédent fâcheux si dans cette circonstance la chambre ne suivait pas à l’égard de ma lettre la marche que je viens d’indiquer. Je me borne, au reste, à demander que ma lettre soit imprimée, non pas pour servir de réponse publique à celle de M. Evain, mais pour qu’il y ait aux archives une pièce qui constate que j’ai répondu, et qui indique où on peut la trouver.

M. F. de Mérode. - Je n’ai qu’une observation à faire : c’est que M. le général Evain n’a pas attaqué, mais s’est défendu.

M. Dubus. - La chambre a ordonné l’impression et la distribution de la défense de M. le général Evain, comme l’appelle M. le comte de Mérode ; mais cette défense, sur quoi porte-t-elle ? Sur un discours qui n’avait reçu de la publicité que par le Moniteur. Il me semble que puisque le général avait la faculté de faire insérer sa réponse au Moniteur, cela pouvait suffire. Mais comme on a pris le parti de faire imprimer et distribuer le mémoire, il me paraît que la lettre de l’honorable M. Gendebien, qui a intérêt à répondre à ce mémoire, doit recevoir la même publicité. Je ne pense pas qu’en cette circonstance la chambre puisse traiter plus favorablement le général Evain qu’un membre de cette assemblée.

- La chambre décide que la lettre de M. Gendebien sera imprimée et distribuée.

RAPPORT SUR UNE CONTESTATION RELATIVE AU CANAL DE MEUSE ET MOSELLE

M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) dépose sur le bureau un rapport sur la contestation relative au canal de Meuse et Moselle.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

Proposition de loi

Dépôt

M. le président. - Une proposition, déposée par M. Lejeune a été renvoyée aux sections pour savoir si elles en autorisent la lecture.

Projet de loi relative à la circonscription des communes rurales du canton de Maestricht en deux cantons électoraux

Vote des articles et sur l'ensemble du projet

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe à la discussion des articles.

Les trois articles dont se compose le projet de loi sont successivement mis aux voix et adoptés sans discussion.

Le projet est ensuite adopté, par appel nominal à l’unanimité des 59 membres présents.

Ordre des travaux de la chambre

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Messieurs, le ministre de la guerre étant obligé de suivre la discussion de son budget devant le sénat, se trouve dans l’impossibilité d’assister à la discussion de la loi d’organisation de l’école militaire. D’autre part la discussion de son budget dans cette chambre a dû lui faire perdre de vue ce projet de loi, et il n’a pas pu l’examiner depuis. Par ces motifs il a exprimé le désir qu’on l’ajournât et qu’on le mît en première ligne à l’ordre du jour après la vacance que la chambre se propose de prendre, car ordinairement elle prend une vacance à Pâques.

M. de Puydt. - Si on pense que la présence du ministre est absolument nécessaire pour la discussion de la loi d’organisation de l’école militaire, je ne m’opposerai pas à la remise proposée. Mais je ferai observer que ce projet est entièrement étranger au ministre de la guerre actuel, car sa présentation date du mois d’avril 1833, d’où il suit que tout autre membre du cabinet aurait pu tout aussi bien soutenir la discussion du projet. Si la chambre en juge néanmoins autrement, je le répète, je ne m’oppose pas à l’ajournement, mais je demanderai que le projet soit le premier à l’ordre du jour après la vacance.

M. Brabant. - Sans doute, messieurs, il est important qu’on fasse sortir l’école militaire du régime provisoire sous lequel elle vit depuis quatre ans, mais cette loi est si importante pour le ministre de la guerre que je ne crois pas qu’il soit convenable de la discuter en son absence ; ce serait d’autant moins convenable que ce projet a été présenté par son prédécesseur et qu’il peut avoir des idées différentes.

La chambre doit connaître quelles sont les intentions du ministre de la guerre, quant à la rédaction du projet ; j’appuie donc la proposition de M. le ministre de l’intérieur, de mettre ce projet de loi à l’ordre du jour immédiatement après la rentrée.

M. le président. - La parole est à M. de Brouckere.

M. de Brouckere. - Je voulais précisément faire les observations que vient de présenter M. Brabant.

M. de Puydt. - On paraît disposé à ajourner le projet ; cependant, je crois utile de faire une observation qui a pour objet de prévenir des objections qui pourraient être faites lors de la discussion. Chacun aura le temps d’y réfléchir d’ici là.

J’ai appris que beaucoup de personnes avaient confondu les règlements de l’ancienne école avec le projet organique, et que ces règlements devaient soulever des objections assez fortes contre des dispositions supposées appartenir aux principes de la loi.

Je dois faire observer que les règlements imprimés à la suite du rapport ne sont là que comme renseignements pour faire connaître le régime actuel de l’école, et qu’ils cesseront leurs effets aussitôt que la loi sera adoptée. Par conséquent les dispositions dont on pourrait avoir à se plaindre n’auront plus alors d’action. Comme la loi renferme dans un article la prévision de règlements à faire pour tout ce qui concerne le régime intérieur de l’école et la distribution du temps, il faudra bien que l’on se conforme en cela aux principes organiques dont nous allons arrêter les bases, et nous n’avons pas besoin pour l’avenir de nous préoccuper de ce qui existait dans le passé.

Je fais cette observation pour qu’on sache bien d’abord que le règlement communiqué n’est qu’un renseignement qui n’a rien de commun avec ce qui est à faire, et pour que chacun comprenne que la loi proposée est conçue dans un autre esprit.

La disposition qui a paru sujette à critique est celle de l’article 22 du règlement de l’ancienne école, relative aux sorties du dimanche. Il y est dit que les dimanches et fêtes la sortie aura toujours lieu d’assez bonne heure, « pour que les élèves puissent entendre la messe, si cela leur convient. » Ces termes, « cela leur convient, ont été étrangement interprétés ; on y a vu un obstacle à l’instruction religieuse, on a supposé des conditions à la libre sortie ; beaucoup de susceptibilités en ont été alarmées.

Je viens donc rassurer ces susceptibilités en déclarant que la loi ne renferme rien de semblable et qu’il dépend de nous de prévenir les inconvénients que l’on pourrait craindre. Moi aussi j’ai des scrupules qui me feraient applaudir à l’objection née de ces termes de l’art. 22 de l’ancien règlement, s’il était maintenu, et les voici : La sortie est libre pour que les élèves aillent entendre la messe, si cela leur convient ; mais je vois là une restriction d’une autre nature : entendre la messe ne s’applique qu’à des catholiques ; or, l’école doit être ouverte aux citoyens de toutes les communions religieuses, et dans un pays où la constitution garantit la liberté des cultes, j’espère bien qu’il ne sera rien stipulé de plus ou de moins pour un culte que pour un autre. Dans ce sens aussi je désapprouverais un article de règlement rédigé comme celui dont on a fait la critique, et le premier je m’opposerais à des principes contraires à la liberté absolue des cultes.

Je réunirai donc mes efforts à ceux des honorables membres auxquels j’ai fait allusion, pour empêcher le retour de toutes dispositions réglementaires ou autres qui porteraient atteinte à la liberté des cultes consacrée par la constitution.

- L’ajournement proposé est adopté.


M. Verdussen. - Il y a quelques mois un de nos honorables collègues annonçait que nous n’aurions pas le budget avant Pâques. Cette prédiction s’est réalisée, car nous voici à Pâques et les budgets sont à peine votés. Ceci prouve la nécessité d’en venir à une mesure pour obvier à un pareil inconvénient. Pendant quatre mois nous n’avons été occupés que de la discussion des budgets ; il est vrai qu’on a intercalé dans cette discussion le vote de quelques petits projets de loi, mais ces projets ne nous ont occupés que pendant très peu de temps.

J’avais annoncé, lors de la discussion du budget des voies et moyens, l’intention où j’étais de provoquer la discussion de mon projet concernant le changement de l’année financière ; je réitère ma demande, afin que nous puissions sortir de la voie malencontreuse dans laquelle nous sommes entrés et restés forcément, par suite de l’ouverture ordinaire de nos sessions. Quelle que soit la décision que la chambre prendra, je désire que la question soit vidée ; je demande donc qu’après les projets qui sont aujourd’hui à l’ordre du jour, mon projet y soit également mis.

M. le président. - M. Verdussen demande que son projet sur la fixation de l’année financière soit mis à l’ordre jour après les projets dont l’ordre du jour a été réglé déjà par la chambre.

M. de Brouckere. - Ce qui a engagé l’honorable M. Verdussen demander la mise à l’ordre du jour de son projet, c’est que jusqu’ici les budgets n’ont jamais pu être votés avant le premier janvier. Si les ministres prenaient l’engagement de les présenter, à l’avenir, assez tôt pour qu’ils pussent être votés avant la fin de l’année, les motifs qui ont déterminé l’honorable membre à demander la mise à l’ordre du jour de son projet n’existant plus, sa proposition n’a plus d’importance, et il est inutile de passer son temps à discuter ce projet, surtout si on considère que nous avons un grand nombre de projets importants qui sont en arrière depuis plusieurs années.

Je demande que le ministère veuille réitérer la promesse qu’il a déjà faite de présenter les budgets assez à temps pour qu’ils puissent être votés avant le 1er janvier. Alors je m’opposerai à ce que la proposition de M. Verdussen soit mise à l’ordre du jour.

M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - La loi sur les mines a déjà été mise à l’ordre du jour pour la rentrée, je demande qu’elle soit maintenue.

M. le président. - C’est après les projets déjà mis à l’ordre du jour que M. Verdussen demande que le sien soit inscrit. Nous avons à l’ordre du jour la loi d’organisation de l’école militaire, la loi des mines, et la loi d’indemnité.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - J’ai appris que la section centrale avait terminé son travail sur le projet de loi relatif aux douanes. Ce projet est d’un intérêt si général, il doit exercer une si heureuse influence pour l’extension de nos relations commerciales qu’il est à désirer qu’aussitôt le rapport fait on puisse commencer la discussion. Je demande que quand le rapport sera fait, il puisse être mis à l’ordre du jour au plus tard après la loi des mines.

M. Verdussen. - M. de Brouckere désire que le ministère se prononce sur la présentation future des budgets...

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - J’ai demandé la parole pour cela, voulez-vous me la céder ?

M. Verdussen. - Oui !

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Nous espérons parer aux inconvénients que la proposition de M. Verdussen a en vue de prévenir, soit en convoquant les chambres pendant une courte session extraordinaire, soit en devançant le jour de rigueur de l’ouverture annuelle des sessions. Ainsi nous prenons volontiers l’engagement de présenter les budgets de telle sorte qu’ils puissent être discutés avant le premier janvier prochain. Nous pensons que c’est le véritable moyen de rentrer dans l’ordre constitutionnel.

Il y a deux ans, après les élections de juin, nous avons eu une petite session qui a produit les meilleurs résultats. Nous pourrions avoir une session semblable à partir, je suppose, des premiers jouis du mois d’août jusqu’au 15 septembre, ou bien avancer la session à partir du 1er octobre. A cet égard, le gouvernement ne peut avoir qu’un désir ; c’est de concilier l’intérêt public avec les convenances des membres de la législature. Voilà l’unique condition qui peut diriger le gouvernement dans le choix de l’époque de la réunion législative ; nous comprenons que les membres de la législature ont besoin de quelque temps pour se reposer et vaquer à leurs affaires, et nous nous ferons toujours un devoir de concilier cette considération avec le bien public.

Plusieurs voix. - Il vaut mieux avancer la session.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Si l’ouverture de la session au 1er octobre convient mieux, le gouvernement avisera dans ce sens.

On a agité la question d’ordre du jour pour la rentrée après la vacance, mais il est probable que la chambre tiendra encore quelques séances avant de prendre cette vacance. Si telle est l’intention de la chambre, je proposerai de mettre à l’ordre du jour de demain…

M. de Brouckere. - La loi des mines !

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Non ; la discussion de cette loi serait trop longue, on ne pourrait pas la terminer avant la séparation, il faudrait la scinder ; mais le projet de loi portant un crédit pour la caisse de retraite ne pourrait guère durer qu’une séance ; ce projet est urgent, il se rattache non seulement à des dettes antérieures envers de pauvres fonctionnaires mis à la pension, mais il a aussi pour objet de faire face aux besoins de l’exercice de 1837. Il mérite donc toute la sollicitude de la chambre comme étant très urgent.

Je demanderai qu’on mette ce projet à l’ordre du jour de demain, si tant est que la chambre se réunisse demain.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Comme on a passé en revue les objets les plus urgents, je rappellerai à la chambre un projet de loi également urgent : celui sur le jury ; il est présenté depuis longtemps ; le rapport est fait, et il est très désirable que ce projet de loi puisse être voté dans cette session.

M. Verdussen. - Ce que j’avais à dire en réponse à M. de Brouckere vient encore se confirmer pour ma réponse à faire à M. le ministre des finances.

Je désire infiniment qu’on puisse chaque année voter les budgets au 1er octobre. Mais c’est là une mesure qui dépend essentiellement des ministres ; elle n’est pas prescrite par une loi. Lors donc que des ministres trouveront qu’ils ont intérêt à ne pas convoquer la chambre pour le 1er octobre, nous tomberons dans le dédale dont nous voulons sortir. Par conséquent il faut une mesure législative qui prescrive que le budget sera présenté au commencement de l’année précédant celle à laquelle il s’applique, ou qui change la disposition constitutionnelle.

Quant à ceci, je ne pense pas que ce soit possible. Je crois que l’époque à laquelle nous nous réunissons de droit, doit restée fixée comme elle l’est par la constitution au deuxième mardi de novembre.

Si nous voulons pour cette année ajourner encore une fois ma proposition, la promesse de M. le ministre des finances viendra à s’accomplir pour une année, et l’année prochaine nous nous trouverons au même point qu’à présent. Je demande donc que l’on prenne enfin une mesure, soit prescrivant la présentation des budgets en temps utile et plusieurs mois à l’avance, soit toute autre, comme, par exemple, le changement de l’année financière, ainsi que je l’ai proposé.

M. Dubus (aîné). - Je m’aperçois qu’au lieu de discuter la question, qui est de fixer l’ordre du jour des différents projets de loi, et de donner enfin son tour à la proposition de l’honorable M. Verdussen, on discute le fond même de la proposition. On dit : il ne faut pas la mettre à l’ordre du jour parce que ce serait perdre son temps que de la discuter ; mais ce serait contraire à notre règlement. Lorsqu’une proposition a été faite, appuyée et examinée, l’auteur de la proposition a droit à ce qu’elle soit enfin mise en discussion. Si alors il y a des motifs suffisants pour la rejeter, qu’on la rejette ; mais qu’on ne dise pas qu’on ne doit pas la mettre à l’ordre du jour parce que ce serait perdre son temps que de la discuter.

Puisqu’on a discuté le fond de la question, je dirai un mot seulement en réponse : c’est que l’état normal, d’après la constitution, est que les chambres se réunissent le deuxième mardi de novembre, et ce terme est trop rapproché du 1er janvier pour que nous puissions voter les budgets dans cet intervalle de temps. Mais est-il convenable oui ou non de prendre une mesure législative qui mette l’époque de l’année financière en harmonie avec cette disposition de la constitution qu’on ne peut changer ? Deux moyens se présentent : l’un, que propose l’honorable M. Verdussen ; l’autre, qui serait d’être d’une année en avance pour le vote des budgets.

SI la proposition de M. Verdussen a quelques inconvénients que l’on a exagérés, le vote des budgets un an à l’avance aurait des inconvénients bien plus graves ; car l’on voterait des dépenses pour des services que l’on ne pourrait connaître à l’avance ; et alors de deux choses l’une : ou on enflerait les chiffres pour des éventualités que l’on ne pourrait prévoir ; ou il faudrait demander chaque année un grand nombre de crédits supplémentaires, inconvénient qui se présente dans un pays voisin.

Je préférerais assurément la proposition de M. Verdussen. Dans tous les cas je répète qu’elle a le droit d’obtenir que la chambre l’examine et la discute. Si les inconvénients de cette proposition sont constatés, elle sera rejetée et il n’en sera plus parlé.

M. de Brouckere. - Il semblerait, d’après ce que vient de dire l’honorable préopinant, que j’ai demandé à la chambre que la proposition de M. Verdussen fût regardée comme non-avenue. Telle n’a pas été mon intention ; et je n’ai rien dit qui pût faire croire à cette intention.

La seule question en discussion est celle de savoir s’il faut que cette proposition soit mise, la première, à l’ordre du jour. Je ne sache pas qu’elle ait un caractère d’urgence telle qu’il faille lui donner le pas sur tout autre projet. Comment cette proposition pourrait-elle être présentée comme urgente, lorsque, pour cette année, nous avons nos apaisements ? car nous voyons, d’après la déclaration formelle du cabinet, que les budgets pourront être discutés et votés pour le 1er janvier. Ainsi, pour cette année, la proposition de M. Verdussen n’est pas urgente. Nous la discuterons plus tard ; mais je soutiens qu’il existe des propositions plus urgentes que celle de M. Verdussen. Voilà tout ce que j’ai dit. Je n’ai pas prétendu contester le droit qu’a cet honorable membre d’exiger que sa proposition vienne à son tour. Seulement je dis que, d’après les circonstances, le tour de sa proposition n’est pas venu. Voilà mon opinion.

Maintenant l’honorable M. Verdussen a dit que si sa proposition n’était pas adoptée, il faudrait prendre une mesure législative pour forcer le gouvernement à présenter les budgets plus tôt qu’il ne le fait. Je crois qu’il est impossible de prendre une telle mesure, parce qu’une loi sans sanction est inefficace ; or je ne crois pas qui y ait de sanction à une semblable mesure ; car si les ministres ne s’y conforment pas, vous ne pouvez les condamner à une amende ou à une autre peine. Il n’y a donc que deux mesures, ou le changement de l’année financière, ou la présentation des budgets par le gouvernement une année avant celle à laquelle ils s’appliquent, pour qu’ils puissent être discutés et votés pour le 1er janvier. Plus tard on verra laquelle vaut le mieux. Pour cette année nous avons nos apaisements ; ainsi la proposition de M. Verdussen n’a rien d’urgent.

M. Donny. - Je pense qu’il est un autre objet plus urgent que la proposition de M. Verdussen et qui ne prendra pas beaucoup de temps. Je veux parler de l’amendement du sénat à une loi importante, celle relative à la sortie des os. C’est un objet vraiment urgent ; et pour preuve je me permettrai de lire quelques lignes d’une lettre qui m’a été écrite à ce sujet :

« Nous espérons qu’après la discussion des budgets, l’on pensera à la loi sur les os. Le retard de la discussion de cette loi nous est on ne peut plus préjudiciable. Jamais à aucune époque les os n’ont été recherchés comme dans ce moment-ci, et, même en les payant à tout prix, on ne peut s’en procurer, J’en connais qui ont été payés à 14 fr. les 100 kilog., ce qui nous oblige d’abandonner notre fabrication de colle du printemps et de chômer pendant 4 à 5 mois de l’année, faute de pouvoir nous procurer les os nécessaires pour notre fabrication. »

Je demanderai que cet amendement soit mis à l’ordre du jour après la discussion du projet de loi relatif à l’école militaire. Je demanderais même que cet amendement fût mis à l’ordre du jour si le rapport était prêt ; comme il ne l’est pas encore, je demande simplement que cet amendement soit mis à l’ordre du jour après le projet de loi relatif à l’école militaire.

M. Eloy de Burdinne. - Chacun réclame ici l’urgence de différents projets de loi. Je ne doute pas que toutes ces réclamations ne soient jusqu’à un certain point fondées. Mais il est trois projets de loi qui sont particulièrement urgents ; ce sont :

1° Le projet de loi relatif aux mines. Personne n’ignore à quel point l’industrie du pays est portée, combien on fait usage de la houille, et il est à craindre que bientôt on ne puisse s’en procurer pour l’usage domestique.

2° Le projet de loi relatif aux distilleries. Cette loi qui doit accroître les revenus du trésor est d’autant plus nécessaire que vous venez de voter des augmentations au budget de la guerre.

3° La loi des sucres. Dans mon opinion cette loi devrait être votée dans le délai le plus rapproché. Je prie donc la commission chargée du rapport d’activer son travail le plus possible.

Voilà, selon moi, les trois projets de loi qui, s’il était possible, devraient être discutés immédiatement après celui relatif à l’école militaire.

M. Ullens. - Je dois m’opposer à la proposition que fait l’honorable ministre de l’intérieur et des affaires étrangères, d’intercaler la discussion du projet de loi tendant à apporter des modifications au tarif des douanes entre celles de la loi des mines et du projet de loi sur les indemnités.

Adopter cette proposition ce serait, messieurs, consacrer un déni de justice. Il faut que nos malheureux compatriotes qui ont souffert pour la révolution soient enfin tirés de la triste position où ils se trouvent. Je fais un appel à vos sentiments généreux ; ce ne sera pas en vain, j’en ai la confiance.

Je demande le maintien de l’ordre du jour tel qu’il a été précédemment fixé : 1° Le projet de loi relatif à l’école militaire ; 2° La loi des mines ; 3° Le projet de loi sur les indemnités.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Un de nos honorables collègues vient de me prévenir dans la réponse que j’avais à faire ; il a dit que, pour indemniser, il fallait de l’argent ; or, une loi qui doit influer sur nos finances est la loi portant des modifications aux tarifs des douanes ; discutons-la d’abord ; nous discuterons ensuite la loi de l’indemnité. La loi des douanes n’est qu’une loi de réciprocité avec la France ; elle doit obtenir la priorité sous tous les rapports.

M. Desmaisières. - La loi sur les os a été renvoyée à la commission d’industrie, qui l’a considérée comme très urgente. Si le président de cette commission n’avait pas été forcé de s’absenter, le travail serait terminé ; mais aussitôt le retour de l’honorable M. Zoude, vous aurez un rapport, et la loi pourra être discutée.

M. Dubus. - Je remarque que, parmi les projets de loi dont on demande de fixer l’ordre dans lequel ils seront mis en discussion, il s’en trouve dont nous n’avons pas les rapports ; il me paraît qu’il est prématuré de déterminer maintenant l’ordre de leur discussion, puisque cette discussion dépendra de l’époque où les rapports seront présentés, et des circonstances. Le règlement de la chambre prévoit le cas dont il s’agit : c’est lors de la présentation des rapports que la chambre prononce sur l’ordre de leur discussion ; le règlement dit même qu’il doit y avoir trois jours d’intervalle entre la présentation d’un rapport et la discussion de la loi, excepté les cas d’urgence ; mais toujours on ne peut fixer la discussion avant le rapport.

Nous n’avons pas le rapport sur la loi concernant les douanes ; quand nous l’aurons, nous déterminerons, d’après les circonstances, le moment où nous délibérerons sur ce projet ; nous ne pouvons décider maintenant s’il sera discuté avant ou après la loi sur les mines, avant ou après la loi sur les indemnités.

Je demande que l’on fixe l’ordre de la discussion des lois dont les rapports sont présentés.

M. Lardinois. - Vous avez déjà remarqué plusieurs fois que le ministre de l’intérieur a demandé avec une tendre sollicitude la discussion de la loi sur les douanes : il dit qu’elle intéresse nos relations commerciales ; sans doute qu’il n’a pas lu les avis des chambres de commerce ; s’il les avait lus, il verrait que son projet exercerait une influence très fâcheuse sur diverses industries ; aussi j’espère que la chambre en fera justice et ne l’acceptera pas comme il est. Il ne faut pas nous contenter de vaines promesses, et nous laisser aller à des déceptions. La discussion de ce projet nous tiendra peut-être une quinzaine de jours, et le rapport n’étant pas présenté, nous ne devons pas déterminer quand on le discutera.

M. Hye-Hoys. - On m’a fait l’honneur de me nommer rapporteur du projet de loi sur les douanes ; mais comme je n’ai reçu les pièces et les documents que depuis très peu de temps, mon travail n’est pas terminé. Je ferai mon rapport après les vacances de Pâques.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il ne faut pas s’étonner si M. le ministre de l'intérieur insiste pour avoir un rapport sur la loi des douanes ; c’est là, messieurs, une question d’honneur et de loyauté pour le gouvernement.

La France nous a fait des concessions dans ses relations commerciales ; il faut que nous la suivions dans la voie où elle est entrée, pour parvenir à l’abaissement réciproque et successif des tarifs entre les deux pays. Si nous opposons l’inertie à l’impulsion qu’elle a prise, elle ne sera pas encouragée à avancer dans la voie ouverte ; elle pourra bien, au contraire, rétrograder. Les discussions qui ont eu lieu récemment au sein des chambres françaises sont là pour nous en donner l’indice. On fait des objections contre notre projet de loi sur les douanes ; mais avant tout, qu’on présente le rapport à la chambre, et nous verrons ensuite par la discussion, mais seulement alors, si les mesures proposées ne sont pas dans l’intérêt véritable du pays.

Je le répète, la discussion prompte de la loi dont il s’agit est pour la Belgique une question d’honneur et de loyauté envers une nation avec laquelle nous avons le plus grand intérêt à étendre nos relations commerciales. Cette considération mérite toute l’attention de la chambre parce qu’elle est tout à fait puisée dans l’intérêt du pays.

Il n’y a, du reste, rien d’extraordinaire à demander maintenant la fixation de l’ordre de la discussion de la loi des douanes, puisque le rapport en sera préparé avant la fin des courtes vacances que vous allez prendre.

M. Lardinois. - Je ne m’oppose pas à la discussion du projet de loi ; je désire même qu’on le discute le plus tôt possible, parce que j’espère que la chambre en fera bonne justice. C’est, dit-on, une question d’honneur ! C’est une question de diplomatie. La France provoque notre gouvernement à faire des concessions préjudiciables à notre industrie.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Vous discutez le fond.

M. Lardinois. - La France n’a fait aucun pas en avant ; elle devrait faire des pas de géant pour arriver au niveau de notre système douanier qui est très libéral, tandis que le système de la France est restrictif et prohibitif,

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il ne faut pas oublier ce que la France a fait pour les fers et pour les toiles ; cela est plus important qu’on ne le pense.

M. A. Rodenbach. - Je pense que, immédiatement après la loi sur les mines, nous devons discuter le projet de loi sur les douanes. Je sais bien que dans ce projet il y a des articles qui ne sont pas tout à fait favorables à la Belgique, mais il y en a qui sont vraiment utiles ; la discussion nous apprendra ce qu’il faut adopter ou améliorer, et je demande que cette discussion soit prochaine.

M. Seron. - Ce que nous avons à fixer maintenant, c’est le jour où nous reviendrons ici.

M. Gendebien. - Sans quoi vous vous trouverez dans la position de fixer le moment du retour quand il n’y aura plus personne pour prendre une détermination.

- La chambre décide qu’elle se réunira le 4 avril prochain.

La chambre décide ensuite que le premier objet dont elle s’occupera, à son retour, est le projet de loi concernant l’école militaire, et que le second est le projet sur les mines.

M. Gendebien. - Restons-en là, nous avons de quoi commencer avec ces deux lois ; nous verrons après de quelles lois il conviendra de nous occuper.

M. le président. - M. le ministre de l'intérieur demande la loi sur les douanes ; M. Ullens demande la loi sur les indemnités ; M. le ministre de la justice demande la loi sur le jury ; M. Donny, la loi sur les os ; M. Eloy de Burdinne, la loi sur les distilleries et sur les sucres.

De toutes parts. - Nous verrons ! nous verrons à la rentrée !

(Remarque du webmaster : pas d’indication de l’heure où la séance est levée.)