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Note d’intention
Chambre des représentants
de Belgique
Séance
du samedi 4 mars 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi portant le budget du département de la guerre pour
l’exercice 1837. Discussion des articles. Cantonnements et logements militaires
(Willmar), marché des lits militaires (Desmaisières), cantonnements et logements militaires
(Willmar, Desmanet de Biesme, Mast de Vries, de Bassompierre,
Desmanet de Biesme, Willmar, Pollénus, Jullien, de Bassompierre, Mast de Vries,
Willmar), organisation de la gendarmerie (Jullien, Willmar), remonte des
chevaux (de Puydt, Willmar, Desmanet de Biesme, Willmar,
(préférence nationale) d’Hoffschmidt, Desmanet de Biesme, Willmar),
frais d’administration (de Bassompierre, Desmaisières), service de santé (Jullien,
Dubus, de Puydt, Dubus,
Desmaisières, de Puydt, Jullien, Desmaisières, de Puydt, Dubus, de
Puydt, Willmar), matériel de l’artillerie (Willmar, Desmaisières),
travaux de fortification (de Puydt), routes dans la
Campine (Mast de Vries, Willmar),
casernement des chevaux (Doignon, Willmar),
aumônerie militaire (Desmet, Willmar),
dépenses imprévues (Willmar, Desmaisières,
Dubus)
3) Projet de loi portant le budget du département des travaux publics
pour l’exercice 1837. Discussion des articles. Personnel de l’administration
centrale (Nothomb, Dubus, Desmet, de Theux, Dubus,
de Theux, Desmet, Nothomb, de Brouckere)
(Moniteur
belge n°64, du 5 mars 1837 et Moniteur belge n°65, du 6 mars 1837)
(Présidence de M.
Fallon, vice-président.)
(Moniteur
belge n°64, du 5 mars 1837) M. de Renesse fait l’appel nominal à midi un quart.
M. Kervyn. lit
le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces
adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Des habitants de la commune d’Eeckeren demandent la prompte adoption par la chambre de la
convention relative à l’endiguement du polder de Lillo. »
- Renvoi à la commission des polders.
________________
« Le sieur Adolphe-Paul Dembinski, né en Lithuanie
(Pologne), lieutenant au 7ème régiment de ligne, demande la
naturalisation. »
- Renvoi au ministre de la justice.
________________
Commission chargée d’examiner la séparation des
hameaux de
PROJET DE LOI PORTANT
LE BUDGET DU DEPARTEMENT DE
Discussion des
articles
Chapitre II. - Soldes et masses de l’armée, frais divers des corps
Section III. - Masses des corps, frais divers et
indemnités
Article
3
M. le président.
- Nous en sommes restés hier à l’article 3 de la section 3 du chapitre II,
masse d’habillement et d’entretien.
Le chiffre primitivement proposé était de fr.
3,651,836 35 c. ; M. le ministre a demandé que l’allocation fût portée à
3,845,115 fr. 35 c.
M. de Puydt avait proposé un amendement à cet
article, mais il a fait de sa proposition un article spécial qui a été renvoyé
à la section centrale.
La section centrale a admis le dernier chiffre
proposé par le gouvernement.
- Le chiffre est mis aux voix et adopté.
Articles 4 et 5
« Art. 4. Masse d’entretien du
harnachement, et ferrure des chevaux : fr. 334,087 50 c. »
- Adopté.
________________
« Art. 5. Masse de renouvellement du
harnachement et de la buffleterie : fr. 170,000. »
- Adopté.
Article 6
« Art. 6. Masse de casernement des chevaux
: fr. 108,197. »
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je pense que cet article devra être ajourné
comme celui de la masse de fourrages, parce que j’ai une réduction à proposer
résultant du cantonnement de deux escadrons de cavalerie ; à moins qu’on ne
veuille voter dès à présent la réduction, qui serait de 3,806 francs, sauf à
revenir au second vote sur cet amendement, s’il y a lieu. Hier, on a ajourné
pour un motif semblable l’article concernant le fourrage ; il conviendrait
peut-être de suivre la même marche.
On me fait observer que le chiffre du fourrage
a été adopté provisoirement, sous réserve de revenir sur ce chiffre. On
pourrait en faire de même pour celui relatif au casernement des chevaux.
M. le président.
- Si M. le ministre persiste dans son amendement, nous pourrons voter le
chiffre ainsi réduit sous la même réserve que l’article concernant la masse de
fourrages.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je persiste dans mon amendement qui consiste en
une réduction de 3,806 fr. pour cantonnement de deux escadrons pendant deux
mois.
- L’article 6 réduit à 104,291 fr. par suite de
l’amendement du ministre de la guerre est adopté sous la réserve indiquée.
Article 7
« Art. 7. Masse de casernement des hommes
: fr. 838,256 45 c. »
M. le président.
- La section centrale dans son premier rapport a proposé de réduire le chiffre de
cet article à 760,000 fr.
Dans un second rapport, elle a proposé le
chiffre de fr. 774,422 85 c. Différence, fr. 63,833 60 c.
M. Desmaisières, rapporteur. - Vous avez renvoyé à la section
centrale les nouvelles pièces communiquées par M. le ministre de la guerre,
relativement au marché passé avec la compagnie Félix Legrand et compagnie. La
section centrale s’est réunie tous les jours pour s’occuper de l’examen de ces
pièces ainsi que de tous les amendements qui lui ont été renvoyés. Nous avons à
peu près terminé notre travail ; il reste quelques points en litige. Lundi
prochain, je pourrai présenter le rapport de la section centrale sur tous les
points ; il y aurait lieu d’ajourner la discussion de l’article 7 jusqu’à lundi.
- L’ajournement de l’art. 7 est prononcé.
Articles 8 à 12
« Art. 8. Frais de route des officiers :
fr. 111,000. »
- Adopté.
________________
« Art. 9. Transports généraux et autres :
fr. 126,500. »
- Adopté.
________________
« Art. 10. Primes de rengagement : fr.
24,000. »
- Adopté.
________________
« Art. 11. Chauffage et éclairage des
corps de garde : fr. 110,000. »
- Adopté.
________________
« Art. 12. Frais de police : fr.
35,000. »
- Adopté.
« Art. 13. Cautionnements, logements avec
nourriture, etc. : fr. 967,476 48 c. »
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je demande la parole pour présenter un
amendement qui a pour objet d’augmenter cet article de 165,723 fr. pour cantonnement
de deux escadrons de cavalerie, et deux mille hommes d’infanterie pendant deux
mois.
M. Desmanet de Biesme. - Maintenant que nous sommes arrivés à l’article des cantonnements, je
voudrais soumettre quelques observations à M. le ministre de la guerre.
Je me suis dans le temps élevé contre ces
cantonnements dans l’intérieur du pays, parce qu’il y avait moyen de placer les
troupes dans les casernes. Cependant je reconnais que dans l’état de
quasi-guerre où nous nous trouvons, dans la nécessité de garder nos frontières,
il est indispensable d’avoir des cantonnements.
Mais je voulais appeler l’attention de M. le
ministre de la guerre sur le mode adopté dans les cantonnements pour la
nourriture du soldat. En France, il reçoit ses rations. Dans notre pays, on a
adopté un autre mode qui est de lui payer 70 centimes par jour qu’il donne à
l’habitant pour le nourrir.
Je ne pense pas que le mode soit favorable à
l’habitant. Cependant il y a à cet égard tant d’opinions divergentes que je
n’oserais pas me prononcer. En France, quand des troupes voyagent ou sont
cantonnées, les soldats reçoivent leurs vivres et font leur ménage eux-mêmes.
L’habitant ne doit leur fournir que le feu et la lumière. En Belgique, en
remettant leurs 70 c. à l’habitant, celui-ci doit leur fournir le feu, la
lumière, le logement et au moins trois repas. Je pense que c’est là une grande
charge pour l’habitant. Cependant j’ai entendu prétendre que les habitants
préféraient ce mode à celui adopté en France parce qu’ils y trouvaient du
profit. Je ne comprends pas pour mon compte qu’on puisse trouver du profit à
loger et nourrir un homme pour 70 c. par jour au prix où sont actuellement les
comestibles.
On m’a dit souvent en combattant ces
raisons (car ce n’est pas la première fois que je les présente), que si les
habitants ne nourrissaient pas les soldats, ils seraient toujours en fait
obligés de leur donner beaucoup de choses, que de cette manière ils les
nourriraient en partie et ne recevraient aucune indemnité. J’y vois cette
différence, c’est que ce que l’habitant donne au-dessus de ce qu’il doit est
regardé comme un bienfait par le soldat qui en devient plus facile, tandis que
quand il peut dire : Pour mes 70 c., vous devez me nourrir, il devient exigeant.
Je ne suis pas fixé, je le répète, sur le mode
qui doit avoir la préférence, ayant entendu des observations pour et contre.
Mais je voudrais, puisque nos troupes doivent encore être cantonnées à la
frontière, et devront malheureusement l’être encore plusieurs années, je
voudrais que M. le ministre prît des informations près des régences sur le
meilleur mode à adopter pour la nourriture des soldats quand ils sont en
cantonnement.
M. Mast
de Vries. - En
fait de cantonnement, je puis dire quelque chose, car j’ai logé des troupes
pendant plusieurs années. Chaque fois que le soldat logé chez l’habitant
recevait ses vivres, il y avait des plaintes extrêmement justes. Le soldat, qui
allait chercher sa viande pour deux jours, la mangeait en un jour, et le second
il se trouvait à la charge de l’habitant. Dans les campagnes, lorsque des
troupes sont en cantonnement, on met 10 ou 15 hommes dans une ferme. Le fermier
qui reçoit 70 centimes par homme et par jour, s’il y met du sien, n’y met pas
grand-chose, car il trouve chez lui une foule de choses.
Et lorsque le soldat ne paie pas, on doit lui
fournir encore à manger. Dans les fermes, il n’y a qu’un seul foyer, et le
soldat s’en empare, de sorte que le paysan n’a pas de quoi préparer ses
aliments. Mais si les troupes doivent nécessairement être cantonnées, et si
vous mettiez la question aux voix, il y aurait unanimité parmi les paysans pour
recevoir les 70 centimes ; ils y perdent moins qu’en ne recevant rien. Dans
tous les cas, il faut veiller aux exigences des soldats.
M. de Bassompierre, commissaire du
Roi. - C’est à
la demande de toutes les autorités locales, pour ainsi dire, que l’on cantonne
les troupes avec logement et nourriture, de préférence au logement avec
distribution des vivres de campagne. Si l’on consultait l’intérêt du
gouvernement, il lui serait plus avantageux de fournir les vivres qui lui
reviennent à 45 centimes la ration, et de payer l’indemnité de 21 centimes pour
logement ; il lui en coûterait en tout 66 centimes au lieu de 70 centimes qui
est le prix payé pour les cantonnements avec nourriture, de sorte donc que si
quelque localité préférait ne donner que le logement avec l’indemnité de 21
centimes, le gouvernement serait bientôt d’accord avec elle.
M. Mast de Vries. - Le soldat qui reçoit les vivres,
ne reçoit que la viande et le pain ; il faut que le paysan fournisse le reste.
Vous savez de plus que jamais la ration n’est complète. J’ai fait plus de
1,500,000 logements, et j’en sais quelque chose.
M. Desmanet de Biesme. - J’ai présenté mes observations avec réserve ; s’il est vrai qu’en
consultant les localités les habitants préfèrent fournir la nourriture, je n’ai
plus rien à dire. J’ai vu en France donner la ration au soldat, et il n’avait
plus rien à exiger ; j’ai demandé pourquoi on ne faisait pas de même chez nous,
les officiers pouvant empêcher les soldats de rien exiger de plus.
Quoi qu’il en soit, je trouve satisfaisantes
les explications données par M. le commissaire du Roi.
M. le ministre de la guerre (M. Willmar). - Je
prends la parole pour rassurer les membres de la chambre qui voient avec peine
le rétablissement des cantonnements. J’ai déjà dit que j’étais en
correspondance avec les régences de quelques villes où les cantonnements
doivent avoir lieu, et cette correspondance a pour but de s’entendre avec elles
pour la construction d’écuries et pour l’appropriation en casernes de locaux
existants ; ainsi la charge de cantonnements ne durera que le temps nécessaire
pour l’exécution des travaux.
J’ai aussi quelques mots à dire relativement à
la répugnance que les localités éprouveraient en général contre les
cantonnements. Hier on a fait entendre que l’intention de cantonner de la
cavalerie avait jeté l’effroi parmi les populations des frontières ; cependant
je déclare que j’ai reçu, il y a plusieurs semaines, des demandes d’un grand
nombre d’habitants de St-Trond, appuyées par la régence de cette ville, et tendant
à leur faire obtenir de la cavalerie en cantonnement. Une semblable demande m’a
été faite aussi par la ville de Marche, qui voudrait aussi avoir en
cantonnement des escadrons de cavalerie ; et à ce propos je répondrai à
l’interpellation qui m’a été faite dernièrement par l’honorable M. Watlet, et qui avait pour objet de demander l’augmentation
du nombre des troupes dans le Luxembourg ; dans les circonstances actuelles,
cette augmentation serait un contre-sens ; ce n’est pas sur ce point que nous
avons à craindre des attaques, et nous devons y laisser le moins de troupes
possibles. Et même à l’avenir, quand notre armée sera sur le pied de paix, on
ne pourra pas encore mettre beaucoup de troupes dans le Luxembourg, province
qui comprend peu de propriétés de l’Etat à garder.
M. Pollénus. - Je commencerai par remercier M. le ministre
de la guerre de ce qu’il a bien voulu avoir égard aux observations que j’ai
présentées hier relativement aux cantonnements. J’ai entendu avec plaisir, et
j’en prends acte, la déclaration qu’il a faite que les cantonnements ne
seraient que temporaires, et qu’il ne placerait des cantonnements que dans les
communes qui le demanderaient.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar) fait un signe négatif.
M. Pollénus. - Je vois que je n’ai pas trop bien compris :
son intention est donc de placer des cantonnements là où ils seront nécessaires
; dans ce cas je croirais manquer à mon mandat si je ne faisais quelques
réflexions sur cet objet.
S’il m’était démontré que les cantonnements
sont actuellement indispensables, malgré les souffrances éprouvées par le
district de Hasselt par suite des cantonnements militaires, je n’élèverais pas
la voix contre leur rétablissement, parce que ce district consentirait à tous
les sacrifices que la défense de notre indépendance rend nécessaires ; mais
cette nécessité de rétablir les cantonnements à dater du 1er avril ne m’est pas
démontrée, et je prie la chambre de me permettre de lui soumettre quelques
considérations à cet égard.
Vous avez entendu
interpeller le ministre de la guerre par un député de Bruxelles sur l’attitude
de l’armée hollandaise ; et le ministre a été obligé de convenir qu’il ne
savait pas si cette attitude avait changé depuis deux ans ; quand à moi, voisin
de la frontière hollandaise, je n’ai pas appris qu’elle fût dans un état plus
hostile que par le passé. A Hasselt, place entre la frontière de Maestricht et
la frontière hollandaise, au lieu de voir de l’augmentation dans l’armée
hollandaise, on la voit diminuer. (Erratum
au Moniteur belge n°65, du 6 mars 1837 :) Et dans nos places voisines de la frontière hollandaise, à Hasselt par exemple,
aucune précaution extraordinaire n’est prise depuis quelque temps : la
garnison, au lieu d’avoir reçu une augmentation, a été, au contraire diminuée à
tel point qu’elle peut à peine suffire au service de la place. Je conclus de ce
fait que le gouvernement lui-même n’a pas la crainte qu’il cherche à nous
inspirer.
Il est vrai que depuis quelques temps des
pièces d’artillerie, en grand nombre, ont été introduites dans Maestricht ; on
a introduit de cette manière quatre ou cinq batteries, par sections de moitié
ou de quart de batterie, et sur la route comprise dans la convention de
Zonhoven ; cependant, quand je vois le ministre ne pas prendre de précaution
pour augmenter la garnison de Hasselt, je me dis qu’il n’est pas persuadé de
l’approche d’un danger quelconque.
Pour reconnaître l’existence de circonstances
propres à justifier les charges accablantes des cantonnements, il me faudrait
des faits ; mais ces faits ne sont pas articulés.
Si l’on en articulait, je serais le premier à
voter ce que l’on demande. Je vois que la chambre ne partagera pas mon avis ;
toutefois je fais ces observations au ministre pour remplir mon devoir.
Dans le camp de Beverloo
il existe des casernes, des écuries en assez grand nombre ; je prierai M. le
ministre de la guerre de s’assurer s’il ne serait pas possible de placer une
partie de la cavalerie nécessaire, soit au camp de Beverloo,
soit dans les casernes, et de diminuer ainsi la charge accablante des
casernements.
Lorsque le soldat est logé dans les campagnes,
éloigné de ses chefs, le particulier qui le reçoit reçoit
un maître qui lui ravit la paix du foyer.
On vous a présenté le tableau de faits qui
s’étaient passés, il y a deux ans, dans le district de Hasselt ; je crois que
de semblables faits ne se renouvelleront plus. Il y a quelques jours, je me
trouvais dans ce pays ; au seul bruit du renouvellement des cantonnements, tous
les habitants voulaient faire pleuvoir des pétitions sur votre bureau, pour
écarter d’eux le fléau des cantonnements.
M. Jullien. - J’ai aussi entendu
souvent des plaintes contre les cantonnements, et notamment de la part des
habitants qui trouvent les prétentions des soldats exorbitantes.
Il arrive que des soldats demandent pour leurs
70 centimes trois ou quatre fois plus que le cultivateur ne reçoit
d’indemnités.
Cela me conduit à demander à M. le ministre de
la guerre s’il existe soit un arrêté, soit un tarif qui détermine les
obligations de l’habitant vis-à-vis du soldat.
M. de Bassompierre, commissaire du Roi. - Il existe en effet un règlement
qui détermine les obligations des habitants à l’égard des soldats qu’ils ont à
loger et à nourrir : ce règlement, qui est à la connaissance sans doute de
plusieurs membres de la chambre, est un arrêté-loi du mois d’août 1814.
M. Mast de Vries. - Messieurs, je me trouve obligé
de vous entretenir encore quelques instants. Je pense que c’est ici le moment
de vous signaler des vices qui existent dans la disposition des étapes, et à
cet égard j’appelle l’attention
particulière de M. le ministre de la guerre.
Parmi les étapes, je vous en citerai qui sont
tellement mal disposées que le soldat se trouve contraint de faire un jour 2
lieues 1/2 sur une bonne route et l’autre 7 lieues 1/2 dans les sables ; c’est
ce qui arrive aux troupes qui se rendent d’Anvers à Beverloo
: la première étape est à Lierre, et de là elles se rendent à Gheel.
Ce que je vous signale est d’autant plus
déplorable que différentes autorités président aux mouvements des troupes.
L’état-major général donne des ordres aux troupes qui quittent le camp de Beverloo, et les gouverneurs militaires des provinces qui
doivent s’y rendre. De cette manière il arrive que dans certaines localités il
y a encombrement, et les soldats qui arrivent les derniers sont obligés
d’occuper les logements les plus éloignés, et qui sont parfois disséminés sur
une surface de plusieurs lieues ; de là viennent des mésintelligences entre les
autorités civiles et militaires qui, en définitive, ne sont point le fait de
ces dernières.
M. le ministre de la guerre, en obviant aux
faits que je viens d’indiquer, rendra un service signalé aux localités qui
servent d’étapes, ainsi qu’aux militaires qui doivent y séjourner.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je prendrai les observations de l’honorable
préopinant en considération. Je ne puis rendre compte maintenant des
circonstances qui ont pu amener la complication dont il a parlé. Il y a eu, il est vrai, l’année dernière,
de la perturbation dans la marche des troupes à la première période du camp. Il
faut faire attention cependant qu’on ne trouve pas dans certaines parties du
Limbourg et de la provinces d’Anvers des lieux d’étape en aussi grand nombre
qu’on pourrait le vouloir ; on est obligé dès lors à allonger une étape et
à en raccourcir une autre.
J’ai une réponse à faire à l’honorable M.
Pollénus, en ce qui concerne l’entrée de pièces d’artillerie à
Maestricht ; c’est par la Meuse que ces pièces sont entrées dans cette
place ; la Meuse est hors de la surveillance du ministre de la guerre.
J’ai à répondre maintenant à la proposition de
la section centrale, tendant à diviser l’article des cantonnements en trois
autres qui seraient destinés, le premier aux cantonnements, le second aux indemnités
de logement et nourriture, et le troisième aux frais de découches des
gendarmes.
Je n’ai aucune objection à faire contre une
division qui aurait simplement pour résultat de séparer les frais de découchers des gendarmes d’avec les cantonnements, et des
indemnités de logement et de nourriture, mais quant à la séparation des deux
autres articles, elle me paraît devoir entraîner des inconvénients, parce qu’on
l’on n’est pas toujours bien sûr à l’avance du nombre de jours de marche, de
logement et de nourriture, et du nombre de jours de cantonnement.
Je proposerais en conséquence de substituer à
l’amendement de la section centrale celui-ci :
« Art. 13. Cantonnements et indemnités de
logement et de nourriture : fr. 1,063,199 48 c. »
« Art. 14 (nouveau). Frais de découchers des gendarmes : fr. 70,000. »
M. Desmaisières, rapporteur. - Messieurs, la section centrale
n’avait proposé de séparer les indemnités de logement et de nourriture que
parce que cette séparation avait eu lieu au budget de 1835. Le motif que M. le
ministre de la guerre a fait valoir en faveur de la réunion de ces deux
articles de dépense me paraissant très péremptoire, je me rallie
personnellement à l’amendement de M. le ministre.
- Ce chiffre est adopté.
« Art. 14. Frais de découchers
des gendarmes : fr. 70,000. »
M. Jullien. -
J’ai demandé la parole sur cet article, pour reproduire une observation qui a
été faite et qui me paraît assez importante.
Presque tous les ans on se plaint des frais de découchers des gendarmes, parce que cette dépense est cause
de contestations souvent fort sérieuses ; il paraît même que cela donne
lieu à des imputation de faux.
Vous savez que le gendarme, pour
pouvoir obtenir son indemnité à raison d’un service de nuit, doit faire viser
ses feuilles de route par le bourgmestre. Or, il y a des bourgmestres qui, pour
ne pas se déranger la nuit, délivrent des visas de complaisance ; il peut
résulter de là que le service ne se fasse pas.
On nous a toujours promis que cet objet serait
régularisé, lors de l’organisation nouvelle de la gendarmerie ; mais cette
organisation n’arrive pas, et les abus se perpétuent.
Je désirerais savoir si le gouvernement a pris
enfin ou entend prendre des mesures pour faire cesser cet abus.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - J’ai déjà eu l’occasion de déclarer, à propos
d’un autre article, qu’une loi sur l’organisation de la gendarmerie était déjà
l’objet des méditations de M. le ministre de la justice et des miennes, et
qu’on tâcherait de soumettre le projet de loi aux délibérations des chambres
dans le plus bref délai possible.
Je m’assurerai, messieurs, s’il y a moyen de
remédier à l’abus qui a été signalé, mais il est certain qu’il est
indispensable que les gendarmes puissent faire leur service la nuit ; on
conçoit aussi qu’il est assez difficile d’empêcher un bourgmestre de délivrer
un visa d’avance.
On pourra toutefois recommander la surveillance
aux officiers de gendarmerie, quoique cette surveillance ne soit pas très
facile, toutes les brigades de gendarmerie étant dispersées.
- Le chiffre de 70,000 fr. pour frais de
découches des gendarmes est mis aux voix et adopté.
Section II. – Solde des troupes
Article
2
M. le président.
- Nous reprenons la discussion de l’article relatif à la cavalerie qui a été
ajournée jusqu’après l’adoption de l’article que nous venons de voter.
- Le chiffre demandé est de 3,672,963 fr. 75 ;
la section centrale propose une diminution de 50 mille fr.
- Le chiffre ainsi réduit est mis aux voix et
adopté.
Section III. - Masses des corps, frais divers et
indemnités
Article 14
(devenu article 15)
« Art. 14. Remontes : fr. 460,800. »
M. le président.
- M. le ministre a demandé une majoration de 328,000 fr., ce qui porte le
chiffre demandé à 788,800 fr.
La section centrale propose l’adoption de la
majoration.
M. de Puydt a proposé un amendement.
M. de Puydt. - Je le retire, parce que la disposition
proposée existe, et qu’il s’agit maintenant d’en régulariser l’exécution, ce
qui regarde le ministre.
M. le ministre de la guerre (M. Willmar). -
Messieurs, la section centrale fait remarquer dans son rapport que puisqu’on a
été obligé d’évaluer à un dixième la perte annuelle des chevaux, il faut qu’il
y ait eu quelques abus dans les remontes. Je dois faire observer à la chambre
que le chiffre d’un dixième est de beaucoup au-dessous de la réalité. J’ai sous
les yeux un tableau des pertes de chevaux que nous avons éprouvées depuis 1830,
d’où il résulte que la perte annuelle a été d’un septième environ ; dans
d’autres pays, en France, par exemple, on porte toujours la perte annuelle de
chevaux à ce chiffre ; je crois qu’en Allemagne, où l’on soigne davantage la
cavalerie, cette perte est au moins aussi forte. Il ne peut, en effet, en être
autrement ; car lorsqu’un cheval, mis en service à l’âge de 4 ou 5 ans, est
parvenu à 12 ou 13 ans, il a déjà fait un très bon service ; si vous tenez
ensuite compte des maladies auxquelles les chevaux sont beaucoup plus exposés
dans les écuries militaires et dans les cantonnements que lorsqu’ils se
trouvent entre les mains des particuliers, vous reconnaîtrez sans peine que
l’on n’exagère pas en évaluant la perte annuelle à un septième.
Je fais cette observation, parce que je prévois
que nous aurons bientôt à réparer des pertes plus grandes que celles que nous
avons éprouvées jusqu’à présent, et que nous seront conséquemment obligés de
porter aux budgets futurs des sommes plus fortes pour cet objet ; en effet,
messieurs, nous approchons du moment où les chevaux que l’on s’est procurés
dans les premiers temps de la révolution, et dont le nombre est assez grand, devront
être réformés ; à cette époque toutes les remontes n’ont pas pu être faites
avec tous les soins désirables à cause des circonstances.
M. Desmanet de Biesme. - J’ai dit dans la discussion générale que j’étais disposé à majorer le
budget de la guerre, me réservant mon vote pour le détail ; ce chapitre me
semble susceptible d’une réduction, mais surtout d’une meilleure application.
Au commencement de 1832, le bataillon du train n’ayant pas assez de chevaux, le
ministre de la guerre autorisa les régiments d’infanterie à acheter chacun 20
chevaux formant les attelages de cinq fourgons destinés aux 4 bataillons et un
pour l’état-major ; chaque général de division reçut les fonds pour acheter 4
chevaux pour son fourgon et 4 pour le fourgon de l’état-major de la division ;
chaque commandant de brigades 2 chevaux ; le nombre total est de plus de 400.
On demande aujourd’hui des fonds pour achat,
pour masses de fourrages, de harnachement, de casernement pour 820 chevaux,
dont 460 pour l’artillerie, 200 pour le train, 160 pour les ambulances ; si on
faisait rentrer les 400 chevaux au bataillon du train après en avoir choisi les
meilleurs pour l’artillerie, on pourrait borner l’achat à 400 pour l’artillerie
; il en résulterait une économie de près d’un demi-million, et le service n’en
souffrirait pas ; il y a des détachements du train dans toutes les provinces.
Ainsi, en même temps qu’on donnerait l’ordre à un officier général de remplir
une mission où un fourgon est nécessaire, on donnerait aussi l’ordre au
commandant du détachement du train de mettre à sa disposition chevaux, fourgons
et hommes ; on en ferait de même pour les régiments, et la mission terminée,
les fourgons rentreraient à leurs compagnies ; il y a des généraux, des
états-majors, des régiments, qui n’ont pas bougé depuis plus de deux ans, où
les chevaux s’usent à ne rien faire. Les fourgons se détériorent, où on les
emploie à un usage étranger au service ; on ferait cesser les récriminations
que ces chevaux servent de chevaux de poste pour lesquels on fait encore payer
l’indemnité. En effet, les chevaux seraient mieux soignés, les fourgons mieux
entretenus, quoique les corps et autres reçoivent 15 ou 30 fr. par moi et par
fourgon, pour l’entretien : on ne doit pas craindre, dans un moment pressant,
le besoin de chevaux d’artillerie ou du train ; en moins de 8 jours, 2,000
pourraient être fournis sur tel point du royaume qu’on voudrait ; en octobre
1830, le marchand de chevaux Vanhaelen a fourni 600
chevaux d’artillerie, les meilleurs qui ont été livrés jusqu’à présent. Cette
considération conduit à faire remarquer qu’on a sans doute perdu de vue que
dans tout le royaume on ne trouverait pas 100 chevaux propres à la cavalerie,
que toutes nos remontes viennent d’outre-Rhin, qu’à la moindre apparence de
guerre, le passage serait interdit, et quand même il resterait libre, il faut
près de trois mois pour adjuger, acheter et fournir les chevaux ; donc les
remontes arriveraient trop tard. D’un autre côté, nos alliés ne peuvent nous
porter aucun secours ;
Cela conduit à examiner s’il n’y
aurait pas moyen de se procurer une réserve de chevaux pour la cavalerie ; j’ai
toujours pensé que quand à la grosse cavalerie cela serait assez facile ; les
chevaux employés pour cette armée ont été dans leur pays employés au tirage et
y sont propres par leur conformation ; si donc à chaque batterie d’artillerie
et au train on plaçait deux chevaux étrangers propres à l’arme des cuirassiers,
en cas d’urgence, on trouverait des chevaux acclimatés dans la force de l’âge,
et on les remplacerait aux batteries par des chevaux indigènes.
Je livre cette réflexion à M. le ministre de la
guerre et le prie de vouloir la méditer.
M. le ministre de la guerre (M. Willmar). - Je
crois, messieurs, que notre armée tout entière devrait être maintenant sur le
pied de rassemblement ; il serait imprudent d’enlever aux régiments
d’infanterie les chevaux d’attelage dont ils disposent. Quant à l’idée d’avoir
en quelque sorte des chevaux à deux mains, qui serviraient à l’attelage et en
même temps aux régiments de cuirassiers, cela pourrait avoir de l’utilité s’il
ne fallait pas dans ce cas leur donner une double instruction, ce qui serait
assez difficile ; d’ailleurs nous serions toujours obligés de chercher ces
chevaux hors du pays, puisque les nôtres en général ne conviennent pas pour la
cavalerie, nous n’avons guère que les chevaux des Ardennes qui puissent être
montés ; et encore y en a-t-il beaucoup qui ne sont pas très propres à cet
usage ; les chevaux des Ardennes sont au contraire d’excellents chevaux de
trait, et je crois que nous pourrons nous abstenir de prendre les chevaux
destinés à l’artillerie, hors du pays.
M. d'Hoffschmidt.
- D’après ce que vient de dire M. le ministre de la guerre, je craindrais bien,
messieurs, qu’il ne se propose pas d’acheter les chevaux de la cavalerie dans le
pays ; il vient de dire que les chevaux des Ardennes ne sont pas propres à la
cavalerie ; je pense qu’il se trompe. M. le ministre en juge peut-être d’après
les acquisitions précédentes ; mais alors les adjudications ont été faites par
trop gros lots, de manière que les petits marchands de chevaux n’ont pu y
prendre part ; elles ont été faites cependant à très bon marché ; aussi les
personnes qui ont obtenu les livraisons qui ont été faites ont dû acheter au
prix de 200 à 250 fr. tous les chevaux qu’ils ont fournis au gouvernement, et
pour ce prix il était naturel qu’ils ne livrassent que des chevaux impropres au
service ; mais si le gouvernement faisait des adjudications dans le Luxembourg
même et par petits lots, de manière à ce que les Luxembourgeois pussent y
prendre part, vous verriez que les chevaux qu’il se procurerait ainsi, seraient
très bons pour la cavalerie légère. Quant aux chevaux de trait, M. le ministre
de la guerre fera très bien de les acheter également dans le Luxembourg ; il
n’est pas douteux que les chevaux ardennais résistent mieux à la fatigue que
les autres.
Messieurs,
le budget de la guerre est une plaie financière pour
Notre province se trouve donc dans cette
position malheureuse, que l’argent en sort sans cesse et que jamais il n’y
rentre, et c’est un fait que le gouvernement ne doit jamais perdre de vue
lorsqu’il peut lui accorder des compensations.
Je demande que M. le ministre de la guerre y
fasse particulièrement attention, à propos de la remonte dont il s’agit, et
fasse acheter le plus grand nombre de chevaux possibles dans le Luxembourg, en
faisant faire les adjudications au chef-lieu de la province, et par petits
lots, afin que les marchands du pays puissent y prendre part.
M. Desmanet de Biesme. - Je persiste à croire que si l’on voulait, on pourrait faire de
notables diminutions sur cette partie du chiffre du budget. Je ne veux pas
entraver le budget. Mais j’appelle sur ces points les méditations de M. le
ministre de la guerre.
M. le ministre a dit que si on faisait venir
des chevaux d’Allemagne pour la cavalerie et pour le train, les chevaux du
train ne seraient pas dressés de manière à servir pour la cavalerie. Mais
faites telle remonte que vous voudrez chaque cavalier n’aura jamais plus que
son cheval. S’il y a la guerre, et que vous perdiez deux ou trois cents chevaux
de grosse artillerie, vous n’aurez pas le moyen de fournir une remonte.
Sans doute les chevaux de train ne seront pas
tout dressés pour la cavalerie. Mais vous les enverrez au dépôt avant de les
envoyer au corps, et là ils pourront se former.
Comme je ne trouve pas qu’il faille faire du
budget de la guerre une affaire provinciale, je dirai quelques mots sur la
demande de M. d’Hoffschmidt. Je pense que les chevaux des Ardennes sont plus
propres au train qu’à la cavalerie.
Si on veut les employer dans la cavalerie, je
ne m’y oppose pas. Mais je trouve qu’il faudrait plutôt avoir un régiment de
chevaux ardennais qu’un escadron de chevaux d’Allemagne et un escadron de
chevaux des Ardennes ; car si les chevaux ardennais souffrent bien la fatigue,
ils ne sont pas aussi maniables que les autres. Je ne crois pas que l’on se
soit bien trouvé jusqu’à présenté de ce mélange.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - On a déjà eu, en grande partie, égard à
l’observation du préopinant, en mettant les chevaux ardennais dans un escadron
à part.
Du reste, les mesures que M. d’Hoffschmidt
propose sont dans l’intention du gouvernement. On comptait faire les
adjudications dans le Luxembourg pour un petit nombre de chevaux à la fois,
afin de faciliter aux marchands du pays le moyen d’y prendre part.
Je reviens sur la proposition de M. Desmanet de
Biesme dont j’apprécie la justesse, et qui tend à ce que les chevaux de la
grosse artillerie puissent servir en même temps pour le train.
Veuillez remarquer que ce qui importe
maintenant, c’est d’avoir des chevaux promptement. Si nous devions tirer des
chevaux d’Allemagne, plusieurs mois s’écouleraient avant que nous les eussions,
tandis que trois semaines après que le budget sera voté, nous aurions des
chevaux en les prenant dans le pays même.
Mais, pour l’avenir, l’observation de M.
Desmanet de Biesme pourra très bien être prise en considération.
- L’article 14 est adopté.
Article 15 (devenu article 15)
« Art. 15. Frais de bureau et
d’administration des corps : fr. 430,000. »
M. de Bassompierre,
commissaire du Roi. - Il est évident que si la somme ainsi réduite par la section centrale
était admis par la chambre, il serait impossible aux corps de faire tout ce que
nécessitent les diverses branches du service. L’honorable rapporteur l’a bien
senti ; car il a dit que cette insuffisance pouvait être couverte par la masse
des recettes imprévues des corps. Mais il me semble que ces recettes imprévues
ne devraient servir qu’à compléter l’allocation à peu près suffisante qui
devrait être accordée.
Il est incontestable que la dépense pour la
gendarmerie a été omise l’an dernier. Ce qui a fait une insuffisance.
Aussi M. le ministre de la guerre vous propose
d’ajouter à la somme de 430,000 fr.
1° Allocation pour la gendarmerie, fr. 11,000
2° Allocation pour le bataillon de l’Escaut,
fr. 2,500
3° Allocation pour le deuxième régiment de
cuirassiers, fr. 6,500.
Total, fr. 450,000. »
M. Desmaisières, rapporteur. - J’ai eu l’honneur de dire dans le
rapport que la section centrale a adopté pour les frais d’administration le
chiffre proposé l’an dernier, parce qu’elle a vu dans les 180,000 fr. de boni
sur la masse des recettes et dépenses au 1er juillet un moyen de pourvoir à
l’insuffisance, s’il y en avait.
Maintenant M. le commissaire du Roi propose une
augmentation de 20,000 fr. Comme il admet le principe de la réduction proposée
par la section centrale, et puisque cette augmentation a pour objet la
gendarmerie qui a été omise l’an dernier, et deux corps qui l’an dernier
n’existaient pas, je ne vois quant à moi personnellement aucun inconvénient à
adopter cette augmentation.
- L’article 15 est adopté avec le chiffre de
450,000 fr.
Chapitre III. - Service de
santé
M. Jullien.
- Mais ce chapitre n’a-t-il pas été renvoyé à la section centrale ?
M. Dubus (aîné).
- Lorsque nous sommes arrivés à l’article des lits militaires, le rapporteur de
la section centrale nous a fait observer que cette section continuait son
travail et que lundi elle pourrait faire son rapport sur plusieurs objets qui
lui sont renvoyés, notamment sur le chapitre du service de santé.
Je crois que M. le ministre de la guerre a
déposé sur le bureau, au commencement de la discussion, les pièces relatives au
service de santé. Il n’y a pas eu de rapports sur ces pièces.
Dans cette situation je ne pense pas que nous
puissions délibérer.
Je demande le renvoi à lundi.
M. de Puydt. - Il me semble qu’il est non
seulement difficile, mais même impossible qu’un rapport soit fait lundi sur cet
objet.
La section centrale, dont je fais partie, n’a
pas encore abordé l’examen des pièces ; ces pièces sont en si grand nombre
qu’il faudrait plusieurs mois pour les examiner en détail.
Pour moi je ne comprends pas comment un rapport
serait présenté avec plusieurs mois. De sorte que s’il fait ajourner le vote du
crédit demandé pour la pharmacie centrale jusqu’à la présentation du rapport de
la section centrale, je considère cet ajournement comme indéfini.
Il y a presque un mètre cube de pièces.
M. Dubus (aîné).
- Je ferai remarquer que je n’ai pas demandé un ajournement indéfini. Mais
lorsqu’une question a été renvoyée à la section centrale, nous devons attendre,
pour nous en occuper, qu’une déclaration officielle nous soit faite au nom de
la section centrale.
M. Desmaisières, rapporteur. - La section centrale a reçu
toutes les pièces relatives au service de sante que le ministre a déposées sur
le bureau ; elles sont très nombreuses, très volumineuses. Il faudrait
nécessairement un très grand travail pour vous faire un rapport sur le contenu
de ces pièces. Mais il serait possible que par un examen superficiel en quelque
sorte la section centrale arrivât (sans que je veuille préjuger ses
propositions) à vous faire, malgré cela, un rapport sans entrer dans le fonds
de la question.
La section centrale doit se réunir de nouveau
lundi. Il serait possible que lundi même elle fît un rapport sommaire dont je
ne puis pas prévoir les conclusions.
M. de Puydt. - Si la section centrale fait un rapport sans
entrer dans le fonds de la question, je ne sais pas trop à quoi servira ce
rapport.
Il me semble que la question est fort simple.
Il me semble que la question est fort simple.
Il y a eu ou il n’y a pas eu des abus dans le service de santé. L’examen de
cette question est dans les attributions de l’administration. M. le ministre de
la guerre a déclaré au commencement de la discussion qu’à son arrivée au
ministère, les abus dont le public était si vivement occupé depuis quelque
temps avaient été le premier objet de sa sollicitude, et qu’il avait pris des
dispositions pour en prévenir le retour à l’avenir, s’il est vrai qu’ils aient
existé ; mais, quant aux faits passés, il avait commencé par une investigation
sur ces faits, à s’éclairer lui-même avant de prendre aucune décision. C’est
donc pour le ministre de la guerre une affaire en instruction. Je n’ai jamais
compris comment la chambre pouvait convenablement intervenir dans une affaire
en instruction ; car, qu’il y ait eu on non des abus dans le service de santé,
c’est une affaire qui concerne l’administration de la guerre ; elle ne peut
être détournée de cette juridiction qu’en cas de déni du justice on d’injuste
décision de la part du ministre. Laissez-lui donc achever l’instruction ;
laissez-lui prendre une décision. Quand il l’aura prise, si vous jugez qu’elle
n’est pas conforme à l’équité, vous interviendrez alors ; vous chargerez, si
vous le jugez bon, une commission de l’examen de l’affaire ; vous mettrez la responsabilité du
ministre en jeu. Mais avant tout laissez au ministre de la guerre toute sa
liberté d’action pour l’instruction de l’affaire.
Autrement voyez l’inconvénient :
votre commission recule devant sa besogne, dans l’impossibilité où elle est
d’examiner un nombre considérable de pièces et de juger l’affaire à fond. Et
l’on vient de vous dire que si vous avez dans quelques jours un rapport, il ne
touchera pas au fond de la question, il ne sera que superficiel. Je ne vois
donc pas ce que la chambre aura gagné à suivre une pareille marche.
M. Jullien. - Il y a dans cet incident deux faits
dominants qu’on ne peut pas perdre de vue : Le premier, c’est que vous avez
renvoyé l’examen de l’affaire à la section centrale : voilà un fait qui ne sera
pas contesté ; le deuxième qui ne sera pas contesté non plus, c’est que la
section centrale n’a pas fait son rapport. On peut prévoir ce que sera ce
rapport ou ce qu’il ne sera pas. Mais c’est une discussion oiseuse ou au moins
anticipée, il est certain que nous ne savons pas ce que dira la section
centrale. Maintenant on propose de discuter le chapitre du service de santé
avant que le rapport ne soit fait ; on ne sait si la section centrale sera en
état de faire un rapport sur les pièces qui lui sont renvoyées. Les pièces,
dit-on, sont volumineuses et nombreuses sans doute, on ne pourra pas, en élevant
un incident, vous déterminer à voter sans examen et sans discussion.
Quant à moi, je pense qu’il y a lieu d’adopter
la proposition de l’honorable M. Dubus et d’ajourner la question du service de
santé jusqu’à ce qu’il y ait un rapport de la section centrale.
M. Desmaisières, rapporteur. - L’honorable M. de Puydt a commis
une erreur involontaire, sans doute, lorsqu’il a dit que la section centrale se
serait refusée à l’examen des pièces qui lui ont été transmises. Elle ne s’y
refuse pas. Je n’ai pas dit cela tout à l’heure. Nous ne nous refusons pas à
examiner. Et même la section centrale s’est réunie, depuis 3 jours, pour
l’examen de tous les amendements et de toutes les pièces qui lui ont été
renvoyées par la chambre.
Tout à l’heure, j’ai fait observer que les
pièces étaient nombreuses et volumineuses, et par conséquent, que cela
demanderait de la part de la section centrale un très long travail. Mais, comme
je l’ai dit tout à l’heure, il peut arriver que la section centrale, après un
examen sommaire des pièces, arrive à une proposition quelconque que nous ne
pouvons prévoir encore. Cet examen pourrait avoir lieu lundi et le rapport être
présenté lundi même. Alors on pourrait discuter le chapitre du service de
santé.
M. de Puydt. - Je ne crois pas avoir commis d’erreur. Je
crois plutôt que l’honorable préopinant ne m’a pas compris. Je n’ai pas dit que
la section centrale s’était refusée à faire sa besogne ; j’ai dit seulement
qu’elle avait reculé devant un travail qui paraissait devoir être très long :
ce qui est bien différent. Ce que vient de dire d’ailleurs le préopinant
confirme mon opinion. Il vous a annoncé que la section centrale vous ferait une
proposition qu’il ne peut du reste préciser.
Mais quelle proposition peut vous faire la
section centrale, par suite d’un examen superficiel, et si elle ne connaît pas
tous les faits ? Evidemment ce ne peut être que la proposition de recourir à
une enquête et d’en charger une autre commission. Ce qui prouve l’embarras dans
lequel se trouve la commission actuelle.
M. Jullien. -
On serait embarrassé à moins.
M. de Puydt. - Pour moi je ne crois pas que l’honorable de
la section centrale soit en rien intéressé dans cette affaire. On a pris une
fausse voie. Il ne peut y avoir rien d’offensant pour personne d’en convenir et
de revenir à une marche plus rationnelle.
On a parlé de la clameur publique. Mais nous
savons tous ce que c’est que la clameur publique. Nous en avons tous les jours
des exemples. Nous savons qu’un fait hasardé par un journal, répété par
d’autres comme une certitude, suffit seul pour faire considérer comme coupables
des personnes qui n’étaient rien moins que cela : qui vous dit qu’il n’en soit
pas de même ici ?
Pour ne pas sortit du fait actuel, je vais
mettre sous vos yeux un passage d’un journal de Bruxelles que je n’ai pas
besoin de nommer ; comme ce qu’il rapporte concerne la section centrale, je
suis parfaitement dans la question.
Je lis dans ce journal :
« M. Willmar a refusé de communiquer à la
section centrale les pièces soumises à la commission d’enquête, sous prétexte
qu’il en avait besoin pour préparer les réponses à faire à la chambre. »
Je n’avais pas d’abord fait attention à cet
article le jour où il a paru, parce que je suis accoutumé à voir fort souvent
des journaux avancer des faits inexacts. Mais depuis lors les journaux des
provinces ont répété l’article, l’ont commenté, et sont arrivés à en tirer des
conséquences qui portent atteinte à l’honneur du ministre. Eh bien, le fait est
faux.
Lorsque la section centrale s’est réunie, il y
a plusieurs mois, pour examiner le budget primitif de la guerre, le ministre,
appelée au sein de la section centrale à l’occasion des questions que soulevait
le chapitre du service de santé, a offert de lui-même les pièces qui
concernaient cette affaire, à l’exception du rapport des généraux. La section
centrale n’a pas cru devoir d’entrer dans ces détails. Mais la même section
centrale, s’étant réunie de nouveau pour l’examen du budget supplémentaire, la
question s’est encore présentée, parce qu’il y avait dans ce budget
supplémentaire des amendements concernant le service de santé.
Cette fois, après délibération, nous avons
écrit au ministre pour avoir communication des pièces, mais plutôt dans le but
d’obtenir le rapport des généraux qui nous avait été refusé, que pour avoir les
pièces qui nous avaient d’ailleurs été offertes volontairement et dont nous
n’avions nullement en vue de faire l’examen.
Le ministre répondit qu’il ne
pouvait pas communiquer le rapport des généraux, et que quant aux pièces qu’il
avait soumises à l’examen de la commission des généraux, s’il ne les envoyait
pas immédiatement, c’est parce qu’on était occupé au département de la guerre à
en faire un inventaire ; mais qu’il les adresserait le lendemain ou le
surlendemain, et pour mettre de suite la section à même de juger de
l’importance de ces documents, il lui envoyait préalablement la partie de
l’inventaire qui était terminée, vous voyez donc bien que le ministre n’a pas
refusé les pièces. Cependant le journal le dit positivement.
Les autres journaux répètent cette assertion et
bâtissent là-dessus. Voilà comment naît la clameur publique ! Voilà comment
elle se propage ! C’est à nous à juger jusqu’à quel point elle doit influer sur
notre conduite.
Quant à moi je n’attache pas grande importance
à la clameur publique quand elle est fondée sur des faits légèrement avancés
par les journaux, faits que ne connaissent pas même ceux qui en rendent compte.
M. Dubus (aîné).
- Je ne m’attendais pas à ce que ma proposition rencontrât de l’opposition dans
l’assemblée, et notamment de la part d’un membre de la section centrale. Selon
cet honorable membre, c’est l’affaire du ministre. Le ministre a commencé son
instruction, il faut le laisser continuer son instruction.
Je ne sais si le ministre continue
l’instruction, mais il me semble qu’il a examiné et qu’il a jugé.
Et je crois qu’il a fait plus encore, il a
frappé après avoir jugé. Nous n’avons donc pas à attendre que le ministre ait
terminé l’instruction de cette affaire. De la manière dont s’énonce l’honorable
préopinant, il semble que lui aussi ait jugé. Quant à l’honorable préopinant,
il semble que lui aussi ait jugé. Quant à moi, qui n’a pas jugé, je veux être
mis à même de le faire en mon âme et conscience, non sur la foi d’autrui, mais
sur les éléments qui doivent former la conviction de tout homme consciencieux.
Je n’avais cependant demandé qu’un ajournement à lundi ; et cette ajournement
est naturel, il est commandé par les plus simples convenances. Tout à l’heure,
quand nous en sommes venus à l’article casernement des hommes, qui comprend la
question des lits militaires, uniquement par le motif que des pièces
ultérieures nous avaient été adressées, et renvoyées par nous à la section
centrale pour nous faire un rapport, la chambre a ajourné la discussion à
lundi, parce que M. le rapporteur nous a annoncé que la section centrale
présenterait un rapport sur tous ou presque tous les objets qui lui ont été
renvoyés.
Puisque nous ne pouvons pas voter aujourd’hui
tous les articles du budget de la guerre, et que nous avons déjà renvoyé un
article important de ce budget à lundi, il est également dans les convenances
de renvoyer à lundi l’article dont on veut que nous nous occupions dans ce
moment, puisque vous avez renvoyé aussi à la section centrale les pièces qui
vous ont été remises sur cet article pour qu’elle les examine et fasse un
rapport à la chambre.
Quant à l’impossibilité où serait la section
centrale d’examiner toutes les pièces relatives à cet article, et de faire un
rapport, nous ne pourrons l’apprécier que quand un organe officiel de la
section centrale, et non un membre qui juge avant que la section centrale ait
parlé, viendra nous dire qu’il est impossible à cette section centrale de se
borner à l’examen dont elle a été chargée.
L’honorable membre va plus loin ; on met en
avant que la section centrale pourra faire une proposition ; il répond qu’elle
n’en pourra faire aucune. Ce n’est pas la section centrale qui dit cela. Quand
nous lui avons renvoyé des pièces à examiner, c’est à elle à venir nous dire :
Nous n’avons pas le temps d’examiner ces pièces ; dans l’état actuel de
l’affaire, nous ne pouvons proposer à la chambre aucune résolution sur cette
question.
Que pourrait faire la section centrale, vous
dit l’honorable membre ? Vous proposer une enquête ? Je lui répondrai qu’il
n’en sait rien, que je n’en sais rien non plus, que j’attends une déclaration
sur ce point. Si la section centrale ne peut pas examiner l’affaire, ne
peut-elle pas, comme l’an dernier à propos des lits militaires, présenter une
rédaction qui laisse la question entière ?
La section
centrale peut juger qu’il y a lieu de rédiger l’article concernant le service
de santé de manière à laisser la question entière. L’honorable membre peut-il
savoir d’avance si la section centrale prendra ou non une résolution semblable,
présentera une proposition de cette nature ? Puisque nous avons renvoyé la
question à la section centrale, attendons qu’elle nous fasse un rapport,
attendons jusqu’à lundi, et si la section centrale vous dit qu’elle ne peut
présenter aucune conclusion sur la question, alors seulement la discussion
s’ouvrira sur cet objet ; mais il est inutile de discuter aujourd’hui pour
recommencer la discussion lundi ; c’est pour ce motif que je n’entrerai pas
dans le fond de la question sous aucun rapport, quoique l’honorable membre ait
paru y entrer, et que je me bornerai à demander qu’on attende le rapport de la
section centrale sans rien préjuger sur le parti que la chambre pourra prendre
quand ce rapport lui aura été fait.
M. de Puydt. - Je n’ai demandé la parole que pour faire
observer que je n’ai pas jugé la question. Je l’ai jugée moins que personne,
car je n’ai pas vu une seule pièce, ni un seul article de journal, ni un seul
des imprimés qui ont été distribués ; je ne connais rien du tout à cette
affaire ; je ne connais pour ainsi dire pas ceux qu’elle concerne. J’ai donc pu
parler avec une certaine impartialité des embarras que doit éprouver la section
centrale et que je crois qu’elle éprouve.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je prends la parole pour rectifier un fait
avancé par l’honorable M. Dubus.
Il a dit que le ministre, dans la question dont il s’agit, avait jugé et même
frappé après avoir jugé. La première partie du fait est vraie. Lorsque j’ai eu
l’honneur de me rendre à la section centrale lors de l’examen du budget
primitif, je ne m’étais pas encore suffisamment rendu compte de cette affaire.
C’est au moment même où l’examen du budget supplémentaire à commencé, pendant
que le premier rapport de M. Desmaisières était à mon étude, que mon opinion s’est fixée ; et la mesure à laquelle a fait
allusion l’honorable membre était déjà prise. Elle ne se rattachait d’ailleurs
que d’une manière indirecte à la question du service de santé.
Du reste, loin de m’opposer au renvoi proposé,
puisque le budget ne peut pas être terminé aujourd’hui, je l’appuie ; je désire
que la section centrale nous fasse un rapport et qu’elle jette le plus de
lumière possible sur cette question.
- Le renvoi du chapitre III à lundi est
prononcé.
Chapitre IV. - Ecole militaire
Article unique
« Art. unique. Ecole militaire : fr.
120,000. »
- Adopté.
Chapitre V. - Matériel de
l’artillerie et du génie.
« Art. 1er. Matériel de l’artillerie : fr.
1,209,318. »
La section centrale propose sur ce chapitre une
réduction de 25,000 fr.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je désire que la section centrale veuille bien
retirer cet amendement. Nous avons déjà fondu presque tout le bronze que nous
avions ; il ne nous reste plus en anciennes pièces que quelques modèles qu’il
est utile de conserver. Tout ce dont on pouvait disposer a été employé, et, je
le répète, on tient à conserver les pièces qui restent.
La réduction proposée par la section centrale
devrait donc être abandonnée.
M. Desmaisières, rapporteur. - La section centrale ayant vu
dans le tableau du matériel de l’artillerie qu’il existait dans les arsenaux
des pièces étrangères en bronze, et en ayant calculé le nombre, a vu qu’il y en avait pour cinq ou six fois
autant que ce qu’on demandait au budget ; par suite, elle a cru devoir proposer
une réduction. Les motifs que vient de faire valoir M. le ministre me
paraissent personnellement justes, car je ne parle pas ici au nom de la section
centrale, qui n’a pas été consultée ; je pense qu’il est bon, dans l’intérêt de
l’art de l’artillerie, qu’on conserve ces anciennes pièces comme modèles.
Ainsi, quant à moi personnellement, je retire l’amendement.
- Le chiffre proposé par le gouvernement est adopté.
« Art. 2. Matériel du génie. »
M. le président.
- Le chiffre primitivement demandé était de 1,430,000 fr.
Depuis le ministre a demandé à cet article une
allocation supplémentaire de 1,040,000 fr.
M. de Puydt propose d’augmenter ce chiffre de
460,000 fr.
Voici comme l’article est proposé :
« Pour travaux de défense sur le Demer,
fr. 1,000,000.
« Pour travaux de défense à Lierre, fr.
400,000.
« Pour travaux dans les Flandres, fr.
100,000. »
M. de Puydt. - Je retire mon amendement ; mais tout en le
retirant, je conserve la conviction qui m’a porté à le proposer ; c’est que de
cette manière, non seulement on augmentait les moyens matériels par des
constructions de fortifications, mais ces constructions pouvaient permettre de
diminuer l’effectif des troupes et étaient par conséquent un moyen d’économie.
Mais j’ai eu l’occasion de m’apercevoir que les amendements directement
présentés par des membres de cette chambre n’obtenaient pas grande faveur. Pour
éviter d’être combattu dans la forme, je préfère retirer mon amendement.
M. Mast de Vries. - Je demanderai à M. le ministre
de la guerre si au moyen des allocations demandées pour le matériel du génie on
pourrait continuer les routes commencées dans
Cette année, il y a eu changement ; on a mis
les poudres dans un corps de garde ; mais en cas d’accident il y aurait la plus
grande partie de la ville qui en souffrirait. Ce corps de garde contient 25
milliers de poudre.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je ne conteste certainement pas que des
fortifications plus considérables à Lierre ne donnassent une force plus grande
à notre système défensif ; mais j’ai déjà eu l’occasion de dire plusieurs fois
à la chambre que nous ne nous sommes proposé que de donner à notre armée, et à
tout notre système militaire, l’organisation nécessaire pour repousser une
attaque hollandaise, parce que nous avions aussi à remplir la condition de
ménager, autant qu’il était possible, les intérêts du trésor, et c’est parce
que nous voulions les ménager que nous n’avons proposé au matériel du génie
qu’un seul amendement, cela qui est relatif à la construction de casernes ou
d’écuries dans les localités où il y aurait des cantonnements.
Si des considérations tirées de la nécessité de
la défense ont empêché la construction de certaines routes, il est bien certain
qu’en érigeant Diest en une place d’armes importantes, bien des difficultés
seraient levées relativement à quelques-unes des communications qu’on veut
établir.
Quant à la construction d’un nouveau
magasin à poudre à Lierre, on a porté plusieurs fois au budget de la guerre les
sommes nécessaires pour cet objet ; ce qui a toujours fait aujourd’hui cette
construction, c’est qu’il s’est agi en même temps de fortifier Lierre, et
qu’on voulait faire entrer le magasin à poudre dans le plan général des
fortifications ; ce que l’on pourrait faire maintenant ne serait que provisoire
; je connais les localités de la ville de Lierre ; les poudres y sont dans un
bâtiment isolé, et loin du centre de la ville. Si l’on arrêté un plan de
fortifications pour Lierre, on change le dépôt des poudres.
C’est ici que je présenterai l’amendement que
j’ai annoncé, afin de pouvoir construire des casernes et des écuries dans
certaines villes pour y établir de la cavalerie et de l’infanterie. Cet
amendement consiste en une augmentation de 277,000 fr. sur l’article que nous
discutons.
M. le président. - Cette augmentation portera le
chiffre à 2,747,000 fr.
M. Doignon. -
Voici un amendement qui nous arrive encore à l’improviste, à peine en
avons-nous entendu la lecture. Il me semble qu’il faudrait le renvoyer à la
section centrale.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Je ne m’oppose pas au renvoi. Toutefois j’ai
annoncé hier à l’entrée de la séance l’intention de présenter cet amendement,
et à différentes reprises, j’ai eu l’occasion de le répéter dans le cours de la
discussion.
- La chambre, consultée, n’ordonne pas le
renvoi à la section centrale.
Le chiffre 2,747,000 fr., mis aux voix, est
adopté.
Chapitre VI. - Traitements divers
Article premier
« Art. 1er. Traitements temporaires de
non-activité : fr. 269,817 fr. »
La section centrale propose une réduction de
9,036 fr. 36 c.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - La section centrale demande une réduction de
9,056 fr. ; mais je remarque qu’elle a omis de porter en compte une somme de
7,000 fr. pour les traitements de réforme, somme qui est la conséquence de la
loi de juin 1836. La réduction ne serait plus alors que de 2,036 fr. 35 c. Je
demande le maintien de l’article tel qu’il est.
M. Desmaisières, rapporteur. - L’omission des 7,000 fr. est
réelle.
- Le chiffre de 269,817 fr. 35 c. est adopté.
« Art. 2. Traitements des aumôniers : fr.
17,000. »
M. Desmet. - Je
demanderai que le ministre de la guerre veuille bien s’occuper d’organiser
mieux ce service que nous considérons comme important. On nous a bien dit, dans
les discussions générales, que rien n’était négligé à cet égard ; cependant à
Liége et dans d’autres villes, il n’y a pas d’aumôniers ; comment peut-il en
être ainsi ? est-ce que nos soldats ne sont pas les enfants d’un pays
catholique ? On donne en quelques endroits 200 fr. ou 300 fr. à un vicaire,
pour toute une garnison ; qu’arrive-t-il ? C’est qu’on va le chercher quand il
y a un moribond ; la décence publique empêche qu’il en soit autrement ; mais,
voilà tout, et nos enfants ne reçoivent aucune instruction ; et par conséquent,
aucune des consolations que leur offre leur religion. Il y a un aumônier à
Bruxelles, il est aimé de la garnison ; on va le consulter, et il prouve quel
bien peut faire un aumônier dans nos places. Je prie donc instamment M. le
ministre de la guerre de prendre en considération mes observations et de donner
un aumônier à chaque garnison, et non de prendre un vicaire à 200 ou 300 fr.,
qui ne peut se vouer tout entier à un service qui, je le répète, nous paraît
extrêmement important dans un pays catholique.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Tout ce qui concerne le service religieux est
concerté avec l’évêque, non seulement pour les traitements, mais encore pour le
personnel des aumôniers ; et quand l’autorité supérieure hiérarchique a décidé,
il ne reste rien à faire au ministre de la guerre.
- Le chiffre 17,000 fr. est adopté.
Articles 3 et 4
« Art. 3. Traitements d’employés
temporaires : fr. 54,915 50 c. »
- Adopté.
____________________
« Art. 4. Pensions des militaires décorés
sous l’ancien gouvernement et secours sur le fonds de Waterloo : fr. 33,384 55
c. »
- Adopté.
Chapitre VII. - Dépenses
imprévues
« Art. unique. 107,215 27 c. »
La section centrale propose une réduction de
32,224 fr.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Les observations faires par l’honorable
rapporteur ne me permettent pas de juger suffisamment sur quel objet porte la
diminution. Je vois seulement, dans son rapport, qu’on supprime l’entretien des
fourgons des généraux ; mais cette réduction ne s’élève qu’à 13,666 fr. A la
rigueur, je puis la consentir. Cependant, dans les circonstances où nous
sommes, lorsque nous renforçons l’armée, lorsque nous la mettons sur un pied respectable de défense, nous devons
avoir besoin de dépenses imprévues plus fortes que dans les temps ordinaires ;
quoi qu’il en soit, je consentirai une réduction de 13,666 fr. 44 c. au lieu de
32,224 fr. ; mais je n’en consentirai pas une plus forte.
M. Desmaisières, rapporteur. - Je demanderai à M. le ministre
de la guerre s’il compte encore, comme les années précédentes, prendre sur les
dépenses imprévues les frais de location de l’hôtel de l’état-major général,
ainsi que du logement du gouverneur militaire qui est à Bruxelles ; si ces
dépenses devaient être faites sur le chapitre des dépenses imprévues, la
réduction que nous avons demandée devrait être moindre ; mais je ne crois pas
que cela puisse se faire, puisque la dépense dont il s’agit est bien évidemment
une dépense prévue qui devrait plutôt être imputées sur l’article des
cantonnements. Pour le cas où cela aurait lieu, je demanderai à M. le ministre
s’il serait nécessaire d’augmenter de ce chef le crédit des cantonnements.
M. le
ministre de la guerre (M. Willmar). - Messieurs, le paiement des deux
loyers dont l’honorable rapporteur vient de parler est une chose tout à fait
éventuelle, puisqu’elle peut cesser d’une année à l’autre ; il ne serait, en
effet, pas extraordinaire que le grand quartier-général, au lieu de rester à
Bruxelles, fût transporté à Louvain ou à Malines, comme il l’a encore été.
C’est pour cette raison, messieurs, que les loyers dont il s’agit ont toujours
été payés sur les dépenses imprévues.
Si l’on voulait maintenant faire imputer cette
dépense sur l’article des cantonnements, il est bien certain que cet article
devrait être majoré de la somme qu’elle exige, car l’article des cantonnements
a été établi d’après des éventualités calculées d’avance. Du reste, il me
semble qu’il n’y a aucun inconvénient à ce que la dépense dont il est question
continue à être imputée sur les dépenses imprévues.
M. Desmaisières, rapporteur. - C’est une dépense prévue.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - Elle peut cesser d’avoir lieu.
M. Dubus (aîné).
- Je ne pense pas, messieurs, qu’on puisse régulièrement imputer cette dépense
sur le chapitre des dépenses imprévues, car elle est tellement prévue qu’elle
se fait depuis 1833 ; je conçois fort bien que, la première fois que la
nécessité d’une dépense se présente dans le cours de l’année, après que le
budget a été voté, on l’impute sur le chapitre des dépenses imprévues ; mais si
elle doit se reproduire chaque année, tout éventuelle qu’elle puisse être, dans
ce sens qu’elle sera faite une année dans telle ville, et une autre année dans
telle autre ville, elle n’en est pas moins dès lors une dépense que le ministre
prévoit et pour laquelle il doit demander un crédit spécial.
Je suis très étonné que la cour des comptes
ait, pendant quatre années successives, imputé une semblable dépense sur le
chapitre des dépenses imprévues, car c’est une dépense que le ministre aurait
dû prévoir dans son budget, et s’il avait oublié de l’y porter, il aurait dû
demander un crédit par un projet de loi séparé.
Il y a ici, messieurs, quelque chose de plus
important qu’un chiffre de 4 ou 5,000 fr. il s’agit d’une question de
comptabilité constitutionnelle ; je désirerais donc beaucoup que l’on augmentât,
s’il le faut le chiffre de l’article des cantonnements, et qu’on diminuât d’une
somme égale le crédit pour les dépenses imprévues. Rien n’empêcherait qu’on
diminuât le chiffre des dépenses imprévues au second vote ; nous pourrions
alors augmenter le crédit pour les cantonnements.
M. le président.
- Afin que je puisse mettre la proposition aux voix, je prierai M. le ministre
de la guerre de nous dire quel est le chiffre dont il s’agit.
M. le ministre de la
guerre (M. Willmar). - 8,645 fr. 05 c.
M. le président.
- En retranchant cette somme, ainsi que celle de 13,666 fr. 44 c. à la
réduction de laquelle M. le ministre a consenti, du crédit demandé, le chiffre
de ce crédit se trouverait réduit à 84,702 fr. 66 c.
M. Desmaisières, rapporteur. - Messieurs, dans les budgets
précédents, la chambre a toujours voté les sommes au premier vote avec la
réserve qu’au second vote elles seraient modifiées de manière à produire pour
total du budget une somme ronde ; je pense que telle est encore l’intention de
la chambre ?
- Le chiffre de 84,702 fr. 66 c. est mis aux
voix et adopté.
La proposition de majorer l’article des
cantonnements de la somme de 8,646 fr. 05 c., qui vient d’être réduite du
chapitre des dépenses imprévues, est également mise aux voix et adoptée.
Discussion des
articles
Chapitre I. – Administration centrale
Article 2
(Moniteur belge n°65, du 6 mars 1837) M. le président. - La discussion est
ouverte sur l’article du budget des travaux publics qui concerne les
traitements des employés et gens de service.
Le chiffre de cet article est de 97,250
francs.
M. le ministre propose d’y transférer
10,000 fr. du chapitre des dépenses imprévues, et de le porter en conséquence à
107,250 fr.
La section centrale propose de ne voter
qu’une augmentation de 3,000 fr., ce qui fixerait le chiffre à 100,250.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - Vous vous rappellerez, messieurs, que d’après les
transferts consentis par MM. les ministres de l’intérieur et des finances, il
vous avait été proposé de fixer à 40,000 fr. les dépenses imprévues du
ministère des travaux publics ; je vous propose de réduire les dépenses
imprévues à 30,000 fr., et de reporter les 10,000 fr. restant au chapitre
premier, pour augmentation du personnel de l’administration centrale.
J’avais présenté cette espèce de
transaction pour ne pas changer l’ensemble du budget ; la section centrale a
pensé qu’une augmentation de 3,000 fr. suffirait, de sorte qu’eu égard à
l’ensemble du budget, il y aurait au profit du trésor une réduction de 7,000
fr. Je ne puis consentir à cette réduction, et j’espère par les faits parvenir
à vous convaincre que la somme de 10,000 fr. m’est indispensable pour
constituer le nouveau ministère.
L’administration des travaux publics,
constituée comme ministère spécial, exige-t-elle, quant au personnel, des frais
qu’elle n’exigeait pas lorsqu’elle formait une division d’un autre ministère ?
Je crois qu’il faut répondre affirmativement à cette question. Il ne faut pas
que les partisans de la création d’un ministère spécial se fassent illusion à
cet égard : chaque ministère a des services communes, un secrétariat général,
un indicateur général, une expédition générale, une comptabilité générale, une
surveillance générale du matériel ; chaque division ne forme pour ainsi dire
qu’une branche d’un tronc commun ; aucune division ne peut exister seule, et
par elle-même, mais elles se rattachent toutes aux différentes parties du
service central. C’est ce que la chambre a déjà senti quand elle a accordé une
allocation pour le secrétariat général du nouveau département ; mais,
messieurs, cela ne suffit pas si le secrétaire général ne réunit pas en lui
seul le secrétariat général, l’indicateur général, l’expédition générale, la
comptabilité générale, la surveillance générale du matériel ; le
secrétaire-général ne fait que diriger et surveiller chacune de ces parties,
sans lesquelles il n’y a pas de ministère.
M. le ministre de l'intérieur n’a cru
pouvoir détacher de l’expédition générale de son département que quatre commis
auxquels on peut encore en ajouter deux, mais qui sont aussi employés à des
bureaux spéciaux ; de sorte que ces deux derniers ne sont pas exclusivement
expéditionnaires.
Il n’y a donc à proprement parler que
quatre employés qui devraient constituer l’expédition générale du nouveau
ministère ; ce nombre, messieurs, est insuffisant pour l’expédition des
affaires ; il faut d’ailleurs un chef de l’expédition générale.
M. le ministre de
l'intérieur n’a pu détacher personne de l’indicateur général, qu’il a dû
conserver pour l’ensemble de son ministère, et cependant un indicateur général
est indispensable au nouveau département. Le ministre des finances n’a pu
détacher que le commis chargé au secrétariat général de ce qui concernait les
postes ; ce commis ne peut suffire ; il faut en outre au moins un chef
indicateur.
La section centrale, en allouant une
augmentation de 3,000 fr., a reconnu qu’il faut un chef de l’expédition
générale et un chef de l’indicateur général. Elle alloue à chacun 1,500 fr. ;
ce traitement est trop faible, surtout pour le chef de l’expédition générale.
Cet employé doit être un homme de confiance ; sur lui pèse une certaine
responsabilité, car c’est à lui que le ministre confie momentanément les
ordonnances de paiement et toutes les minutes. La section centrale pense donc
qu’avec 3,000 fr….
M. Dubus
(aîné). - M. le ministre est dans l’erreur. La section centrale n’a pas
entendu accorder un traitement nouveau, mais bien une augmentation de traitement
en faveur de celui des employés actuels qui serait nommé chef de l’expédition
générale.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - Soit, j’accepte la rectification faite par
l’honorable M. Dubus, car cette circonstance m’offrira, à l’appui de ma
proposition, un argument plus convaincant que celui que j’avais d’abord
l’intention de présenter.
Dans la pensée de la section centrale, le
personnel ne recevrait donc pas d’augmentation ; seulement on donnerait à l’un
des employés de l’expédition le titre de chef avec une augmentation de
traitement ; j’en serais donc réduit au personnel actuel qui est tout à fait
insuffisant.
En demandant une majoration de 10,000 fr.,
je ne comptais pas établir cette année une comptabilité générale distincte ; la
somme à cet effet eût été insuffisante, et cependant une comptabilité générale
distincte des comptabilités partielles de chaque division contrôle ces
comptabilités spéciales, et est une véritable garantie pour l’Etat et pour le
ministre.
Avec la somme de 10,000 fr., je comptais
seulement compléter les bureaux de l’expédition générale et de l’indicateur
général, et attacher au secrétariat général un commis qui serait chargé des
arrêtés et des archives, et un autre employé qui aurait dans ses
attributions le matériel du ministère ; j’espère enfin être à même de
remplir les engagements qui ont été pris par mon honorable prédécesseur envers
quelques employés, et augmenter leurs traitements en exécution d’un arrêté qui
a été pris en leur faveur.
La section centrale a critiqué la marche
qui, dit-elle, a été suivie depuis trois ans au ministère de l’intérieur ; elle
a en quelque sorte dénoncé à la chambre les augmentations successives qui ont
été accordées dans ce département.
Je pense, messieurs, que si des
augmentations de traitement ont successivement eu lieu, c’est que mon honorable
prédécesseur a voulu attirer à lui ou conserver des hommes capables ; s’il en
est réellement ainsi, mon prédécesseur a très bien fait.
Messieurs, il y a dans les ministères deux
sortes d’employés bien distincts ; des manœuvres, si vous voulez, et des hommes
de rédaction et d’ordre ; ceux-là sont très rares. Quand on les possède, il
faut chercher à les conserver, il faut leur faire une position telle qu’ils ne
soient pas tentés de quitter le gouvernement.
Je crois, messieurs, qu’il y a
aujourd’hui, de la part des hommes capables qui se trouvent dans les
ministères, à se laisser attirer par des sociétés, des établissements
particuliers ; cette tendance existe, et j’oserais prédire dès aujourd’hui que
le gouvernement aura de la peine à combattre cette tendance.
C’est ainsi, par exemple, que l’année
passée un teneur de livres qui avait 1,500 fr. au ministère de l’intérieur, et qui
était attaché à la division des travaux publics, a renoncé à sa place, parce
que la société de la « mutualité » lui a offert, je ne sais au juste
quel traitement, mais bien certainement un traitement de 3,000 fr., car on lui
a proposé de rester au ministère avec un traitement de 3,000 fr., ce qu’il a
refusé ; j’en conclus qu’il a obtenu de la « mutualité » au moins
cette somme.
Cette même tendance existe dans d’autres
services ressortissant au département des travaux publics. Depuis mon entrée au
ministère trois conducteurs ou sous-ingénieurs des mines ont donné leur
démission, parce qu’ils ont trouvé à se placer plus avantageusement dans des
établissements particuliers.
Ainsi, messieurs, je dirai à mon tour, en
répondant à la critique générale qui a été faite par la section centrale, je
dirai qu’il faut conserver dans l’administration centrale des ministères et
dans tous les services publics des hommes capables, et qu’il faut en effet leur
offrir des positions telles qu’ils ne puissent être tentés d’abandonner le
gouvernement du jour au lendemain.
Le chef de la division des travaux publics
a obtenu, dit-on, une augmentation de traitement ; cette augmentation est
facile à justifier. Il a reçu le traitement auquel il a droit comme ingénieur
en chef, car c’est là son grade dans le corps des ponts et chaussées. On veut
exiger de ce fonctionnaire qu’il consente à être chef de la division des
travaux publics avec un traitement moindre que celui qu’il obtiendrait s’il
était ingénieur en chef de province ; il était donc juste qu’on lui accordât le
traitement correspondant à son grade. C’est ainsi que serait traité un général
ou un colonel qu’on attacherait à l’administration de la guerre ; il est
évident qu’on ne lui donnerait pas de traitement moindre que celui de son
grade.
Le 10 janvier dernier, mon prédécesseur a
signé un arrêté qui accorde le titre de chef de bureau à trois commis de
première classe. Deux de ces commis se trouvent aujourd’hui au ministère des
travaux publics, le troisième est reste au département de l’intérieur. Ce
dernier obtiendra son augmentation de traitement et par cela seul que les deux
autres, à la suite d’un remaniement ministériel, sont passés au département des
travaux publics, ils se verraient privés de l’augmentation de traitement qu’ils
auraient obtenue s’ils étaient restés au ministère de l’intérieur.
Vous voyez, messieurs, dans quelle
singulière position je serais placé à l’égard de ces deux chefs de bureau ; ils
se trouveraient en quelque sorte victimes d’un concours de circonstances.
Ce n’est pas pour de légers motifs que mon
honorable prédécesseur a accordé une augmentation de traitement à ces deux
commis. L’un d’eux est employé depuis 22 ans, il est chargé de ce qu’on appuie
le bureau des routes ; il a dans ses attributions la construction des routes
nouvelles faites aux frais de l’Etat ou de la province, ou par voie de
concession, l’entretien des routes, toutes les questions qui se rattachent aux
barrières, aux ponts à bascule, à la police du roulage ; tout ce qui concerne
la grande voirie. Cet employé, je le répète à 22 ans de service : comme
réellement toutes les attributions qui lui sont confiées constituent un bureau
à part, mon prédécesseur a cru, avec raison qu’il y avait lieu de lui accorder
un titre qu’il avait de fait, celui de chef de bureau, avec un traitement de
4,000 francs.
L’autre employé est docteur en droit
depuis 1826 ; c’était un des élèves les plus distingués de l’université de
Liége. Peut-être avec un peu plus d’audace, un peu moins de timidité, aurait-il
fait une tout autre carrière. Il est entré en 1826 au ministère du waterstaat en 1830 il a obtenu le titre de deuxième commis,
et peu après celui de commis de première classe, avec un traitement de 1,500
florins. Il a dans ses attributions les canaux et rivières à charge de l’Etat,
les demandes en concession de canaux, les mines, les moulins et usines, les
ports et côtes, les phares et fanaux, les chemins de fer aux frais de l’Etat,
et les concessions de chemins de fer.
Toutes ces attributions constituent un bureau
spécial, l’on pourrait même dire que les seules affaires concernant les mines
seraient de nature à former un bureau distinct ; mon prédécesseur a donc pensé
qu’il était juste aussi de donner à cet employé le titre qu’il a de fait.
Eh bien, messieurs, si la chambre pense
qu’il y a lieu de n’allouer au ministre des travaux publics qu’une augmentation
de 3,000 fr., il sera dans l’impossibilité de tenir, envers ces deux employés,
l’engagement qui a été pris par l’arrêté du 10 janvier dernier, engagement rempli
dès à présent envers un troisième employé qui se trouve compris dans le même
arrêté et qui a eu le bonheur de rester au ministère de l’intérieur.
J’ai dit, messieurs, qu’il me serait
impossible d’expédier les affaires avec quatre employés, en leur adjoignant
même momentanément deux commis détachés des bureaux.
En effet, messieurs, j’ai sous les yeux le
relevé des pièces entrées au ministère et des pièces expédiées depuis le 16
janvier dernier jusqu’au 23 février. On a expédié au ministère des travaux publics
(abstraction faite des affaires concernant les postes et la marine), on a
expédié, du 16 janvier au 16 février, 862 pièces du ; 14 février au 25, 552 ;
en moins d’un mois et demi. 1,414 pièces.
On peut donc supposer une expédition de
1,000 dépêches par mois ; je ne parle pas des annexes qui sont nombreuses ;
quatre employés peuvent-ils suffire à ce travail ?
Remarquez encore que deux
ne pourront pas être exclusivement employés au travail matériel ; l’un sera
chef d’expédition, chargé de la surveillance, et un autre collationneur. Ces
quatre employés seraient souvent réduits à deux. Admettons qu’ils soient quatre
et même six, il sera impossible qu’ils expédient mille dépêches par mois avec
les annexes nécessaires. L’indicateur général est une chose essentielle dans un
ministère pour l’ordre et la régularité des affaires, pour la facilité des
recherches. D’après le relevé fait du 16 janvier au 16 février, le nombre de
lettres et dépêches entrées s’élève à 2,591 ; du 17 février au 23 février, il
en est entré 606 ; on peut admettre qu’il entre cent lettres par jour ; cette
fois j’y comprends la poste : certes ce n’est pas trop que de demander deux
hommes pour inscrire ces pièces qui doivent être succinctement analysées. Le
deuxième mois le nombre des pièces entrées a été en augmentant. Ma note
s’arrête au 23 février ; il y a une lacune de huit jours, je croyais que la
discussion ne serait pas remise jusqu’à la séance d’aujourd’hui ; sans avoir
les chiffres sous, les yeux, je puis dire que le nombre de pièces a continué à
suivre une progression ascendante. En résumé, l’augmentation que j’ai demandée
n’est pas une augmentation eu égard à l’ensemble du budget : ne m’accorder que
trois mille fr., c’est proposer au budget des travaux publics, eu égard à son
ensemble, une réduction de sept mille francs. Ces trois mille francs ne
suffisent pas pour constituer les services communs, indispensables dans tout
ministère.
M. Desmet.
- Messieurs, pour répondre à M. le ministre des travaux publics, je ferai
remarquer deux choses. D’abord, c’est que lorsqu’on a distrait du ministère de
l’intérieur les attributions dont on a formé le ministère des travaux publics,
on n’a rien demandé de ce qu’on demande aujourd’hui, et le ministre de
l’intérieur a déclaré qu’aucune affaire n’était en souffrance. Je ferai
remarquer ensuite que toutes les augmentations qui ont été demandées ont pour
but de faire monter les employés en grade. Nous avons fait voir dans notre
rapport que les traitements des employés de ce département étaient de 4, 6 et 8
mille francs. Quand on considère que des juges et des commissaires de district
qui sont constamment occupés, n’ont que deux et trois mille francs de
traitement, on a lieu de s’étonner de voir donner de quatre à huit mille francs
à des employés. Si on continue à marcher dans cette voie, notre budget des
recettes ne pourra bientôt plus suffire.
La section centrale a examiné les demandes
de M. le ministre, elle a pensé qu’il pourrait avoir besoin d’un chef
indicateur et d’un chef expéditionnaire, mais seulement de chefs, et que le
nombre des simples expéditionnaires devait être suffisant, puisque le ministre
de l’intérieur a déclaré que rien n’était en souffrance lorsque les
attributions du ministre des travaux publics faisaient partie de son
département.
Quant à l’augmentation
d’un commis qui était de deuxième classe qu’on a porté à la troisième et pour
lequel on a ensuite pris un arrêté, afin de lui donner 1,600 fr., cela devient
exorbitant.
Quand la division des travaux publics fut
distraite du ministère de l’intérieur pour former un nouveau ministère, il n’y
avait pas de secrétaire particulier, il y avait un chef de division et un
premier commis. Vous aurez un secrétaire des travaux publics et un chef de
division, puis encore un chef de bureau. Vous conviendrez que ce sont là des
augmentations qui ne sont pas motivées. Quand la section centrale a accordé une
augmentation de trois mille je pense qu’on n’a pas à se plaindre. Sans cela, il
n’y aurait pas de raison pour ne pas obtempérer à tontes les demandes non
motivées.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je dois
m’expliquer sur les augmentations de traitement que l’on prétend que le ministre
de l’intérieur n’a cessé d’apporter. Il y a une observation importante à faire.
En 1832, le ministère de l’intérieur a subi le sort des autres départements.
Il a éprouvé des réductions considérables
pour le traitement des employés. Mais bientôt l’expérience a démontré que ces
réductions avaient été excessives et qu’il y avait nécessité de revenir sur le
vote de l’année 1832. C’est ce qui a eu lieu pour tous les départements sans
distinction. Mais, depuis le budget de 1834, il n’y a eu au ministère de
l’intérieur qu’une majoration en 1835 pour le service de la sûreté publique. Il
a été démontré qu’il fallait ajouter un autre employé pour le service des
passeports, qui sous le titre de chef de division reçût cinq mille francs, et
d’autres employés inférieurs, auxquels on donna trois mille francs, ce qui
faisait une augmentation de huit mille francs au budget de 1835 pour le service
de la sûreté publique : y compris les 14 mille francs transférés du ministère
de la justice, le chiffre de l’administration centrale a été porté de 156 à 180
mille francs, En 1836, le chiffre été le même.
Il est très vrai qu’à la fin de l’année
1834, il y a eu une augmentation de traitement pour le directeur du commerce et
les chefs de division, mais cette augmentation a été prise sur la suppression
d’un chef de division qui avait le titre de chef de la comptabilité, et dont
les attributions avaient été réunies à une autre division. C’est dans ce
chiffre que j’ai trouvé le moyen d’augmenter le traitement des employés supérieurs.
Cette augmentation de traitement qu’on a critiquée est cependant facile à
justifier. Au ministère des finances, les employés supérieurs chefs
d’administration ont chacun neuf mille francs d’appointements. Au ministère de
l’intérieur, l’administrateur de la sûreté publique n’a que huit mille
francs ; le directeur du commerce n’a également que huit mille francs ;
les trois autres chefs d’administration n’ont chacun que six mille fr.
Maintenant, il n’en reste plus que deux,
puisque l’un est passé au ministère des travaux publics : le directeur des
cultes, de l’instruction publique et des arts, et le chef de la division des
administrations communales et provinciales et de la comptabilité. Est-ce trop
pour des chefs d’administration qui ont des attributions aussi étendues ?
Maintenant, messieurs, je dis et je répète
que les affaires n’étaient pas en souffrance au ministère de l’intérieur. Mais
il ne s’ensuit pas que les augmentations que j’avais cru devoir accorder à deux
employés dont les attributions sont très étendues, ne fussent pas justifiées.
Quand on a énuméré leurs attributions, on a été étonné de leur étendue ; on
aurait dû être plus étonné encore de la modicité de leur traitement.
On ne peut pas exiger que
des employés qui ne sont pas en évidence, qui n’ont pas pour stimulant
l’honneur d’être à la tête d’une administration, on ne peut pas exiger, dis-je,
que ces employés travaillent gratuitement ou à moitié gratuitement pour le
compte de l’Etat. Indépendamment de cela, mon honorable collègue a fait observer
que la dislocation avait apporté quelques changements du chef des services
communs, et cette observation est restée sans réplique. On dit dans le rapport
qu’il y avait 21 expéditionnaires au ministère de l’intérieur, dont quatre
seulement sont passés aux travaux publics. Il est vrai qu’il y avait 21
expéditionnaires au ministère de l’intérieur, mais quelques-uns étaient chargés
en même temps d’autres affaires, et six de ces employés sont passés au
ministère des travaux publics ; de sorte que sur 21 employés de cette
catégorie, il en est reste 15 au ministère de l’intérieur, Ainsi il n’y a
aucune contradiction dans ces renseignements.
M. Dubus.
- Messieurs, le rapport de la section centrale vous a suffisamment expliqué son
but en proposant de borner à 3,000 fr. l’augmentation demandée pour le présent
exercice par le ministre des travaux publics, augmentation qui, dans les
prévisions du ministre, devra être plus grande pour l’exercice de 1838. C’était
précisément pour mettre une fois un terme à ces augmentations successives de
dépenses pour les frais de l’administration centrale.
Sans doute, nous sommes loin, très loin
des vues d’économie qui dirigeaient le congrès. Il s’est écoulé depuis lors non
pas cinq années, mais cinquante, un demi-siècle ; cependant, tout en consacrant
par nos votes ultérieurs les augmentations accordées depuis cinq ans, est-ce
notre intention d’en accorder chaque année de nouvelles, de manière qu’il n’y
ait pas de terme ?
Voilà comment se présentait la question
devant la section centrale.
A entendre le ministre de l’intérieur,
presque pas d’augmentation n’a été consentie pour l’administration centrale de
son département. Il a débuté par vous dire qu’en 1832 la chambre avait fait
subir aux traitements des employés une réduction excessive, et que c’était
parce que cette réduction avait été reconnue excessive que l’année suivante on
avait accordé une somme plus élevée. Il n’en est rien, cette réduction n’a pas
été excessive et n’a pas été reconnue excessive l’année suivante.
Il y a eu un autre motif pour changer le
chiffre de l’année suivante.
En 1832, le ministre de l’intérieur avait
demandé pour les frais d’administration centrale une somme plus forte que celle
nécessaire pour le personnel de l’administration centrale. C’était afin
d’augmenter les traitements d’un assez bon nombre d’employés. La chambre
réduisit le chiffre. Qu’a fait le ministre ? Il réduisit non la totalité, mais
une partie des augmentations qu’il avait consenties.
Au budget de 1832, d’après l’état des
traitements, leur montant était de 138,000 fr. Le ministre a demandé, en 1833,
143,000 fr. La section centrale a cru qu’on voulait encore augmenter les
traitements, et elle a repoussé l’augmentation. La question a été discutée en
séance publique en juin 1833. Le ministre a insisté pour obtenir les 143,000
fr. pétitionnés ; il a dit qu’il s’agissait, non d’augmenter les traitements,
mais d’augmenter le nombre des employés qui était insuffisant ; il a déclaré
enfin qu’aucune partie de la somme demandée ne servirait à augmenter les
traitements. Si on veut recourir au compte-rendu de la séance, on y trouvera
cette promesse. Cependant, on s’est aperçu qu’indépendamment des 143,000
francs, il y avait des employés payés jusqu’à concurrence de 5 ou 6,000 francs
sur un crédit qui n’avait pas pour objet les dépenses de l’administration
centrale. C’était, je crois, les fonds de l’industrie et du commerce. On a
signalé cet abus et on a demandé que le ministre de l’intérieur le fît cesser.
Le ministre a déclaré que si on voulait voter la somme de 150.000 francs qui
était indispensable pour le personnel de l’administration centrale, cet abus ne
se renouvellerait pas. La chambre par cette considération a voté 150,000 fr.
Au budget de 1834, on a demandé 158,000
fr. et la chambre a voté 156,000 fr. Ainsi encore une augmentation.
Au budget de 1835 d’abord le ministre a
déclaré comme cette fois-ci qu’il était satisfait du crédit de 156 000 fr. voté
les années précédentes et il a demandé le même crédit à 500 fr. Mais il y avait
alors comme il y a aujourd’hui un transfert d’une dépense de l’administration
centrale du ministère de la justice au ministère de l’intérieur, par suite de
ce que l’administration de la sûreté publique passait d’un ministère à l’autre.
Ce transfert eut lieu d’un commun accord entre les deux ministres. Il
s’agissait de 15,000 fr. La chambre voyant les 2 ministres d’accord ne s’occupa
pas de ce transfert, et trouva tout très bien. Ensuite vint la question de
savoir si le transfert était suffisant. Le ministre de l’intérieur déclara
alors que 15,000 fr. ne suffisaient pas pour payer les employés de
l’administration centrale de la sûreté publique, et qu’il fallait 23,000 fr :
eh bien, la chambre s’est laissé entraîner à voter cette augmentation de 9,000
fr. pour l’administration de la sûreté publique. Ce qui a porté la dépense de
l’administration centrale à 180,000 fr., somme qui a été allouée l’année
dernière.
Mais cependant, en comparant le tableau
joint au budget de 1836, on reconnaît qu’il y a eu autre chose que des
augmentations dans le nombre des employés, el qu’il y a eu aussi des
augmentations assez notables de traitement ; ainsi, selon toute apparence, la
promesse d’augmenter le nombre des employés sans augmenter les traitements n’a
pas été observé.
Maintenant, pour le présent exercice, le
ministre de l’intérieur a commencé par déclarer qu’il était satisfait de la
somme de 180,000 fr. Seulement survint un incident, c’est qu’une partie des
attributions du ministère de l’intérieur est passée à un nouveau ministère, au
ministère des travaux publics. Il y a donc à examiner seulement quelle
augmentation de dépenses doit résulter de ce qu’il y a cette année, non un
ministère de plus, mais un secrétaire-général de plus ; car, au ministère de
l’intérieur, il y a deux secrétaires-généraux, et au ministère des travaux
publics il y en a un, tandis que pour les ministères des affaires étrangères et
de l’intérieur il n’y avait que deux secrétaires-généraux.
On a fait remarquer qu’il y avait lieu
d’attacher à chacun des secrétaires-généraux un indicateur général. Nous avons
voté les dépenses nécessaires pour un indicateur général de plus.
Mais, dit-on, il faut un expéditionnaire
de plus. Nous ne comprenons pas cette nécessité. S’il y avait assez
d’expéditionnaires l’an dernier, il doit y en avoir assez cette année. Mais,
dit-on, il n’y a pas assez d’expéditionnaires au ministère des travaux publics
; cela n’est pas notre affaire. Encore une fois (car cela est dans le rapport
de la section centrale) la circonstance que la division des travaux publics, au
lieu d’être au département de l’intérieur, est à un autre département, ne rend
pas nécessaire un expéditionnaire de plus. Si un bureau d’expédition suffisait
pour toutes les affaires du ministère de l’intérieur en novembre dernier, ce
bureau doit suffire pour toutes les affaires, quoiqu’elles soient divisées
entre deux départements différents.
S’il est vrai que le ministre des travaux
publics n’a pas assez d’expéditionnaires, c’est que, sur les 21
expéditionnaires du ministère de l’intérieur, le ministre de l’intérieur en a
trop gardé et n’en a point cédé assez à son collègue. Sur ce point il n’y a
rien à dire ; car, lorsqu’on a voté le budget de l’intérieur, le ministre de
l’intérieur a consenti au transfert de tant au ministère des travaux publics ;
le ministre des travaux publics n’a point élevé de réclamations au sujet de la
quotité du transfert. C’était alors qu’il fallait élever des réclamations ; car
alors la cause était entière, puisqu’on discutait le budget de l’intérieur.
Maintenant il n’y a plus à discuté ; il est voté.
Mais on a dit : « Voilà un bureau
d’expédition séparé en deux. Il faut donc une augmentation de traitement pour
l’employé qui devient chef du bureau d’expédition du ministère des travaux
publics. » Nous avons voté avec le traitement d’un indicateur général la
somme nécessaire pour cette augmentation. En faisant cela, il semble que nous
faisions tout ce que nous devions faire. Mais, ainsi qu’en 1835, il s’est agi
de réaliser en quelque sorte les engagements qu’avait pris le ministre de
l’intérieur en augmentant les traitements et en donnant de l’avancement à
certains employés. Une chose étonnante, c’est que le ministre a choisi le
moment de la transmission de la division des travaux publics à un autre
département pour accorder à des employés une augmentation de titre et de
traitement.
Ces mesures nous paraissent d’autant plus
intempestives qu’il y avait peu de temps que le ministre de l’intérieur avait
présenté son budget. De deux choses l’une : les augmentations avaient été
calculées ou elles ne l’avaient pas été. Si elles avaient été calculées, on
n’aurait pas dû accorder des traitements qui excédassent les sommes calculées ;
si on ne les avait pas calculées, il fallait attendre la discussion et demander
une augmentation de crédit si elle était nécessaire. Il semble singulier
qu’immédiatement après la présentation du budget on prenne des arrêtés pour
accorder des augmentations de traitement et qu’on veuille les considérer comme
nécessaires par cela seul qu’on a pris un arrêté pour les accorder.
Mais voici qui doit être une nouvelle
cause d’augmentation. On a donné le titre de chef de bureau à un employé qui le
réclamait et qui en remplissait les fonctions avec le titre de commis de
première classe. Eh bien, c’est là l’organisation existant depuis la
révolution. Mais les autres commis de première classe, remplissant les
fonctions de chefs de bureau, ne manqueront pas d’invoquer le précédent que
vous venez d’établir, et de réclamer le titre de chef de bureau et par suite
une augmentation de traitement.
Que mon traitement soit
porté de 2,500 à 4,000 fr. Ainsi voilà un avancement, ou la création d’un
nouveau grade dans le ministère de l’intérieur qui, inévitablement, va
entraîner le ministre dans la voie des augmentations.
Sous ce rapport, nous avons repoussé
l’augmentation. Nous avons vu, non seulement une augmentation immédiate de
dépense, mais nous avons vu une augmentation plus grande encore en perspective.
Quant à la comparaison que le ministre de
l’intérieur a faite de ses employés avec ceux du ministère des finances, il y a
longtemps qu’on l’a présentée, et qu’on a fait remarquer que les employés de
l’administration des finances étaient payés dans une proportion plus forte que
les autres ; mais cette observation a été faite dans des sens différents : les
uns l’ont citée pour montrer qu’on accordait trop aux employés des finances, et
les autres pour montrer qu’on n’accordait pas assez aux employés des autres
département administratifs. Si on a l’intention de mettre tous les employés au
niveau de ceux des finances, je ne donnerai pas mon assentiment à ce projet.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je déclare que
mon intention n’a pas été de scruter ce qui s’est fait en 1833 et en 1834 ; ce
n’est pas moi qui ai défendu les budgets de ces exercices, n’étant pas
ministre. Ce n’est pas parce que la sûreté publique passait du département de
la justice à celui de l’intérieur que l’augmentation a eu lieu, c’est parce que
rien n’y était organisé, pas même le bureau relatif aux passeports, et quand
l’administration de la sûreté publique serait restée au département de la
justice, il aurait encore fallu l’augmenter.
Messieurs, il est utile de remonter aux
causes de l’augmentation de dépenses dans le département de l’intérieur.
Personne n’ignore que quand ce département a été organisé à l’époque de la
révolution, ce sont pour la plupart des hommes nouveaux qui ont rempli les
emplois, et que les traitements ont été fixés en raison de la difficulté des
circonstances. Depuis, les attributions du ministère de l’intérieur se sont
successivement augmentées ; les affaires s’y sont multipliées ; les employés y
ont acquis des titres à des majorations de traitement par les services qu’ils
ont rendus, par l’expérience qu’ils ont acquise. Si ces employés avaient été
condamnés à demeurer, à perpétuité, dans l’état provisoire ou ils étaient, ils
se seraient en allés, et l’administration la plus importante du pays aurait été
mal servie.
Dans l’administration des finances, il en
a été tout autrement. Ce sont d’anciens employés qui ont été placés.
L’administration entière y était divisée en plusieurs branches ou directions,
et ces branches, en divisions, en bureaux ; aussi voyez quelle hiérarchie dans
les fonctionnaires de ce département ; on ne trouve pas une semblable
organisation dans l’administration du département de l’intérieur, et par
conséquent elle n’offre pas la même perspective d’avancement.
Cependant, lorsqu’il existe, parmi les
premiers commis, des employés d’un mérite particulier, il faut leur donner la
perspective d’obtenir un jour le titre de chef de bureau : cette émulation est
nécessaire dans l’intérêt même du service. Il faut en outre considérer que dans
ce moment les personnes qui ont de l’expérience dans les affaires trouvent
facilement à se placer dans des entreprises particulières ; et que si l’on
avait suivi le système provisoire créé au commencement de la révolution, tous
les employés ayant quelque mérite auraient quitté l’administration ; alors
comment le ministre aurait-il pu répondre de ce qui se fait dans une
administration aussi étendue ?
L’arrêté que j’ai pris,
en donnant un titre à deux employés, ne faisait qu’un acte de justice ; mais
cet arrêté n’avait pas et ne pouvait avoir pour but de forcer la législature.
Messieurs, malgré les augmentations qui
ont eu lieu, il est de fait que plusieurs employés que j’avais formés ont
quitté le ministère pour aller dans des administrations particulières. Il faut
encore vous dire que le travail de bureau est tellement fatigant, parce qu’il
dure toute l’année sans congé, que beaucoup de jeunes ne peuvent le supporter ;
les uns y contractent des maladies ; les autres même succombent à ce genre de
vie. Oui, messieurs, bon nombre d’employés sont décédés depuis 1830 et d’autres
ont dû quitter leurs fonctions pour cause de santé. Ce sont là des faits.
Il n’y a pas eu prodigalité envers les
employés de mon ministère ; il y a eu plutôt parcimonie. Cependant leur travail
est considérable, et ce travail s’accroît tous les jours avec la richesse du
pays et l’extension des affaires.
M.
Desmet. - Je ne puis laisser passer sous silence une assertion de M. le
ministre de l'intérieur et des affaires étrangères. Il a dit que quand
l’administration de la sûreté publique avait passé au département de
l’intérieur, les bureaux n’y étaient pas organisés ; mais le ministre de la
justice n’a jamais dit cela ; et l’augmentation de 3,000 fr. demandée alors
n’était que pour augmenter des traitements.
On vient de prendre un arrêté ; quelles en
sont les conséquences ? C’est que les premiers et seconds commis voudront
devenir chefs de bureau ; les augmentations de traitements sont rapides, et les
budgets s’accroissent outre mesure ; les employés ne sont jamais satisfaits ;
quand ils ont deux mille francs, ils en veulent trois mille, puis quatre mille
; cependant leur travail exige-t-il les connaissances et les méditations
profondes, nécessaires au magistrat, qui, occupé du matin au soit, ne reçoit
que deux mille francs ?
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - Il n’y a aucune comparaison à faire entre des
magistrats et des employés ; le travail de ceux-ci est de beaucoup plus pénible
; et il n’y a aucun chef de division qui ne consentît à occuper une place de
magistrat, avec un traitement même moindre.
M. de
Brouckere. - Ils ne savent pas ce que c’est que la magistrature !
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - Il y a des docteurs en droit dans les ministères ;
celui dont je parle l’est depuis 1826 ; beaucoup de ses condisciples occupent
de belles positions dans la magistrature amovible ou inamovible. (Bruit, interruption.) Du reste, je ne
fais pas de parallèle, je dis qu’il n’y en a pas à faire. Je ne demande pas
mieux que d’être dispensé des notices biographiques.
En demandant une augmentation cette année,
ce n’est pas à dire que l’on fera des augmentations l’année prochaine ;
j’ignore ce qui arrivera en 1838 ; tout ce que je sais c’est qu’il est
aujourd’hui impossible de constituer le nouveau département sans l’augmentation
demandée. J’ai cherché à démontrer à la chambre qu’il n’avait pas suffi de
séparer purement et simplement la division des travaux publics du ministère de
l’intérieur, pour en faire un ministère à part ; il est évident que l’on n’a
pas pu transférer ce qui appartenait aux services communs, c’est là un fait
positif, impossible à détruire.
On m’a rappelé la déclaration faite par
mon prédécesseur que, lors de la formation du ministère des travaux publics,
aucune affaire ne se trouvait en souffrance au ministère de l’intérieur ; je
crois cette déclaration exacte ; cependant je me trouve dans l’impossibilité de
vous annoncer qu’aucune affaire ne sera en souffrance au ministère des travaux
publics si vous n’augmentez pas le personnel.
On vous a rapportés aux années 1831, 1833
; mais, messieurs, est-ce que depuis lors les travaux publics n’ont pas
singulièrement augmentés ; est-ce qu’ils n’augmentent pas tous les jours ? Les
affaires augmentent, comment voulez-vous que le personnel ne doive pas
augmenter proportionnellement ?
En demandant 10,000 fr., messieurs, il
n’entre pas dans mon intention d’employer immédiatement toute cette somme ; je
ferai d’abord l’indispensable, et j’entends par indispensable la nomination des
deux employés désignés par la section centrale elle-même ; le complément de
l’expédition générale ; la nomination d’un employé chargé du matériel général
du ministère. Je compte aussi pouvoir rempli l’engagement pris par mon
prédécesseur envers les deux employés nommés chefs de bureau. Je ne me propose
donc pas de dépenser légèrement la somme que je demande ; je n’en dépenserai
d’abord qu’une partie, et si je suis arrivé à la fin de l’année sans épuiser
les 10,000 fr., je ne demande pas mieux.
Messieurs, le ministre et les copistes ne
constituent pas un ministère ; il fait, entre les ministre et les copistes, des
hommes spéciaux qui étudient les questions ; les affaires instruites, et les
questions préparées, elles arrivent au ministre. Le ministre est dans
l’impossibilité de faire les travaux par lui-même, d’instruire lui-même les
affaires, d’étudier lui-même toutes les questions ; il ne peut que donner les
indications, et faire travailler ; c’est là, messieurs, la besogne du ministre,
c’est en cela que consiste son intervention dans les bureaux. Il faut donc
qu’il y ait entre lui et les copistes des hommes capables, des hommes d’étude,
des hommes qui, s’ils avaient suivi toute autre carrière, seraient parvenus à
une position tout aussi avantageuse que celle que nous devons pouvoir leur
offrir (et en disant ceci, je n’entends établir aucune comparaison entre des
carrières qui sont dissemblables).
Je vais dire à la chambre comment on
arrive à des économies bien entendues : quand on a dans les ministères des
hommes capables alors les affaires sont bien instruites, alors le gouvernement
ne s’engage pas facilement dans de mauvaises affaires, dans des affaires où un
échec, un procès perdu entraîne des pertes plus considérables que les sommes
qui peuvent résulter de toutes les économies qu’on ferait pendant plusieurs
années sur le personnel. Il faut donc des hommes de talent et de dévouement ;
avec de tels hommes, on fait des économies très grandes.
On a dit que le ministre
des travaux publics possède un pouvoir extraordinaire ; messieurs, pour qu’il
puisse exercer ce pouvoir avec discernement, des hommes capables lui sont
indispensables ; il ne faut donc pas lui refuser de tels hommes, il ne faut pas
les exposer à la tentation de quitter le gouvernement pour se placer dans des
établissements particuliers.
Ainsi, messieurs, si j’ai proposé un autre
principe que le principe de la section centrale, ce n’est pas que je pense
qu’il y aura lieu d’augmenter encore les traitements l’année prochaine, par
exemple ; c’est seulement parce que j’ai voulu dire à la chambre qu’il faut
mettre le gouvernement à même de combattre la tendance qui existe chez les
hommes capables, à se placer ailleurs, où ils pourraient être mieux que dans
les administrations des divers ministères. (Aux
voix ! aux voix !)
M. de
Brouckere. - Je regrette beaucoup que M. le ministre des travaux
publics ait établi des comparaisons si malencontreuses…
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb). - Ce n’est pas moi !
M. de
Brouckere. - M. le ministre vient de dire des choses tout à fait
inexactes ; il a dit qu’il n’y a pas d’hommes capables, qui sont docteurs en
droit depuis 1826, qui n’aient des places excellentes, des places de
conseillers ; je ne sais pas s’il y a un seul conseiller parmi les docteurs de
1826 ; je crois qu’il ne serait pas nécessaire de sortir de cette chambre pour
trouver des hommes très capables qui sont docteurs depuis une époque antérieure
à 1826 et qui cependant n’ont pas pu arriver à la cour d’appel. C’est une chose
très connue que la magistrature est mal payée, et que par conséquent M. le
ministre aurait très bien pu s’abstenir de la comparaison qu’il a faite. (Aux voix ! aux voix !)
- Le chiffre de 107,250 fr., demandé par
M. le ministre, est mis aux voix et adopté.
La séance est levée à 4 heures et demie.