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Note d’intention
Chambre des représentants
de Belgique
Séance
du vendredi 3 février 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment pétitions relatives à
l’élection (contestée) de Corneli (Simons, Pollénus, Jadot) et au conseil des
mines (Eloy de Burdinne)
2) Proposition de loi relative à la comptabilité de l’Etat (Donny)
3) Projet de loi relatif à la libre introduction des machines
4) Projet de loi relatif au droit des barrières (+police de roulage).
a) Rapport sur des pétitions (C. Vuylsteke, Frison, de Brouckere, Nothomb, A. Rodenbach, Gendebien, Stas de Volder)
b) Discussion générale (Frison, Nothomb, A. Rodenbach, Pirmez, (+organisation de la poste) Desmet,
Lebeau, Andries, de Puydt, Pirmez, Scheyven, Verdussen,
(répartition du produit des barrières) Gendebien, de Theux, Eloy de Burdinne, Van Hoobrouck, Verdussen, Trentesaux, Gendebien, de Theux, Verdussen, Gendebien, Rogier, A. Rodenbach, Eloy de Burdinne)
c) Discussion des articles. Compétences des tribunaux en matière de
répression des infractions à la police de la route (Pollénus,
Nothomb, Dubus, d’Hoffschmidt, (risque de refus de sanction royale à
une loi) Nothomb, Pollénus,
Pirson, d’Hoffschmidt, Dubus,
d’Hoffschmidt), caractère temporaire de la loi (Lebeau, Nothomb, Gendebien), emplacement des barrières (Van Hoobrouck, Nothomb),
caractère temporaire de la loi (Rogier, Dubus,
Lebeau, F. de Mérode, Gendebien)
5) Fixation de l’ordre des travaux de la chambre (Dubus,
de Theux, Gendebien, Rogier, Raikem)
(Moniteur belge n°35, du 4 février 1837)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et
quart.
M.
Kervyn lit le procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces
adressées à la chambre.
« Des électeurs et habitants notables de Sittard réclament en faveur de l’élection de M. Corneli,
élu par le district de Maestricht. »
_______________
« Plusieurs
propriétaires de Liége adressent des observations sur le projet sur les
mines. »
_______________
« Des maréchaux-ferrants, cloutiers et
fabricants du canton de Grevenmacher, renouvellent leur demande en diminution
des droits d’entrée sur la houille de
_______________
« Des sauniers de Gand adressent des
observations sur le projet de loi sur les sels. »
_______________
« Deux fabricants de sucre indigène
adressent des observations sur les modifications proposées aux lois sur les
mines. »
_______________
« Le sieur J.-B. Deville, distillateur à Eerneghem, adresse des observations sur la modification
proposée à la loi des distilleries. »
_______________
M. de Jaegher annonce par lettre qu’une
indisposition l’empêche d’assister, pour le moment, aux séances de l’assemblée.
- Pris pour
notification.
M.
Simons. - Je demande que la pétition concernant l’élection de M.
Corneli soit renvoyée à la commission chargée de la vérification des pouvoirs
de ce député.
Je ferai observer,
à cette occasion, qu’il serait nécessaire qu’un rapport nous fût présenté à cet
égard le plus promptement possible ; il y a déjà 3 semaines que la commission
est saisie des pièces relatives à l’élection de M. Corneli.
M. Pollénus. - Je n’ai rien à dire contre la
proposition de l’honorable préopinant, si elle tend seulement au renvoi de la
pétition à la commission ; mais si, à ce renvoi, l’honorable membre attachait
une invitation plus ou moins directe à la commission de faire une nouvelle
enquête sur les faits relatés dans la pétition, je croirais alors devoir
m’opposer à la proposition de M. Simons.
Mais je ne pense
pas que telle soit l’intention de l’honorable préopinant, ni de la commission ;
car vous vous rappellerez, messieurs, que le retard apporté à la vérification
des pouvoirs de M. Corneli provient uniquement des informations qu’a cru devoir
prendre la commission relativement à la liste des électeurs ; or, ce point me
paraît devoir être hors de contestation, puisque cette liste est devenue
définitive. Si la chambre renvoyait la nouvelle pétition à la commission
celle-ci ne doit donc pas se croire obligée à faire une nouvelle enquête, ce
qui produirait de nouveaux retards qu’il importe de prévenir.
M. Simons. - En demandant le renvoi de
la pétition à la commission, je n’ai eu nullement l’intention de provoquer une
enquête sur les faits dont il s’agit ; je trouve au contraire qu’il est très
dangereux de provoquer une enquête sur les faits que la pétition avance, sans
les appuyer d’aucune preuve.
Mon intention a
donc été tout à fait opposée à celle que l’honorable préopinant a paru me
prêter.
S’il y avait lieu à
établir une enquête, ce serait la chambre et non la commission qui devrait
l’ordonner ; aussi je pense que les informations qui ont été prises par la
commission ne se rapportent pas aux faits signalés dans la pétition, mais se
rapportent uniquement aux formalités de l’élection.
Je demande que la
chambre veuille bien inviter la commission à nous présenter son rapport.
M.
Jadot. - La commission a renvoyé à M. le ministre de l'intérieur les
pièces concernant l’élection de M. Corneli à l’effet d’obtenir des
renseignements ; les pièces ne sont pas encore revenues ; dès qu’elles
rentreront, la commission fera et présentera son rapport.
M.
Simons. - Je désire savoir si les renseignements que la commission a
demandés à M. le ministre de l’intérieur se rapportent aux faits signalés dans
la pétition, ou simplement aux formalités de l’élection de M. Corneli ! (L’ordre du jour ! l’ordre du jour !)
- Cet incident n’a
pas de suite.
La pétition
relative aux distilleries est renvoyée à la commission spéciale des
distilleries ; la pétition concernant les sucres est renvoyée à la commission
spéciale chargée de l’examen de la question des sucres ; la pétition ayant pour
objet le sel est renvoyée à l’examen de la section centrale chargée de l’examen
du projet de loi sur le sel. Les autres pétitions sont renvoyées à la
commission des pétitions.
M. Eloy de
Burdinne. - Je demande que la
pétition concernant les mines soit imprimée dans le Moniteur, de même que la chambre l’a ordonné pour d’autres
pétitions concernant le même objet.
- L’impression est
ordonnée.
PROPOSITION DE LOI RELATIVE
A
M.
Donny (pour une motion d’ordre.) - Messieurs, lorsque la chambre a décidé,
il y a quelques semaines, qu’on mettrait à l’ordre du jour dans les sections la
proposition que j’ai eu l’honneur de soumettre à l’assemblée, pour régler le
mode de reddition des comptes de l’Etat, j’ai fait observer que j’avais
quelques modifications à apporter à mon projet, et j’ai en même temps pris
l’engagement de m’occuper immédiatement de cet objet.
J’ai rempli cet
engagement, messieurs, et je puis présenter mon travail modifié.
Je propose que la
chambre en ordonne l’impression, et que la distribution en soit faite à tous
les membres de l’assemblée.
- Cette proposition
est adoptée.
M.
le président. - Les sections sont maintenant saisies de l’examen de ce
projet ; elles pourront en même temps examiner les modifications que propose
l’auteur du projet.
PROJET DE LOI RELATIF A
Second vote des articles et
vote sur l’ensemble du projet
L’amendement
introduit dans l’art. 3 lors du premier vote est mis aux voix et définitivement
adopté.
Il est procédé au
vote par appel nominal sur l’ensemble de la loi.
Le projet de loi
est adopté à l’unanimité des 61 membres qui ont répondu à l’appel nominal.
Un membre (M. de
Muelenaere) s’est abstenu, parce qu’il n’a pas assisté à la discussion.
Rapports sur des pétitions
M.
le président. - La chambre a invité la commission à faire un rapport
sur les pétitions qui ont quelque connexité avec la loi sur les barrières. En
conséquence, si M. le rapporteur est préparé, je lui accorderai la parole.
M. C.
Vuylsteke, au nom de la commission
des pétitions, présente le rapport suivant. - Messieurs, la commission des
pétitions m’a chargé de faire un rapport sur une pétition des voituriers de
Jumet. L’urgence d’un prompt rapport a été décidée en la séance du 28 janvier
dernier.
Les pétitionnaires
demandent la révocation de l’arrêté du 28 décembre 1836, et le maintien de
l’arrêté préexistant du 31 mars 1833, accordant aux voituriers de roulage, et
aux messageries, de transports des charges plus fortes que celles qui sont
fixées par le décret du 25 juin 1806.
A l’appui de leur
demande, les pétitionnaires, au nombre d’environ 150, disent que le droit que
leur accordait l’arrêté du 30 mars 1833, avait ranimé le roulage, avait mis les
rouliers en état de soutenir la concurrence avec les autres moyens de transport
plus favorisés, et leur avait procuré les moyens d’une honnête subsistance à
eux et aux nombreuses professions qui se rattachent au roulage ; mais que
l’arrêté du 28 décembre dernier va anéantir complètement cette industrie,
augmentera le chauffage, rendra les routes désertes et ruinera une masse de
voituriers ; que cet arrêté n’est porté que dans l’intérêt des entrepreneurs et
nullement pour empêcher les détériorations des routes qui, disent-ils, sont
dans un bon état de réparations, et qu’en supposant que ces détériorations
subsistent, elles ne pourraient absorber le produit du droit de barrière s’il
était uniquement employé à l’entretien des routes. Ils disent, au surplus, que
les entrepreneurs ont contracté sous l’empire de l’arrêté du 30 mars 1833, dont
ils pouvaient calculer les conséquences.
Messieurs, la
question est de la plus haute importance ; de sa solution dépend l’existence
d’un nombre indéfini de nos commettants.
La commission n’a pu se convaincre que la détérioration des routes, là
où elle existe, provînt uniquement de la surcharge accordée, surtout en
présence de l’arrêté du 30 mars 1833, et alors qu’on y trouve le considérant
suivant : « Considérant qu’il résulte des rapports qui nous sont faits sur
la situation actuelle des routes, qu’il est possible d’accueillir favorablement
les requêtes qui nous sont présentées, en accordant, à titre d’essai et pour un
an, l’autorisation demandée, etc. » Cet arrêté a donc été précédé d’une
enquête ; le gouvernement a su ce qu’il faisait. L’autorisation a été accordée
à titre d’essai. Eh bien cet essai a été favorable aux voituriers, car les
dispositions dudit arrêté ont été maintenues par trois arrêtés subséquents,
portant la date du 16 avril 1834, du 16 février 1835 et du 9 mars 1836.
Une considération a frappé la commission, celle
que, sous l’empire du décret de 1806, il n’existait pas de droit de barrière,
au lieu qu’à présent les voituriers paient largement des détériorations que le
roulage occasionne aux routes.
Les motifs que les
pétitionnaires ont fait valoir à l’appui de leur demande, ont semblé à la
commission dignes de fixer l’attention du gouvernement ; en conséquence elle
vous propose le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics,
avec demande d’explications.
M.
Frison. - Mais il y a aussi la pétition des habitants de Gosselies, sur
le roulage.
M. C. Vuylsteke. - Je n’ai pas été chargé par la commission des pétitions de faire un
rapport sur cette requête.
M. de Brouckere. - Il y a une
pétition sur le roulage adressée à la chambre, et beaucoup plus développée que
celle dont on vient de nous entretenir ; elle est des habitants de Gosselies,
près Charleroy.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- M. le rapporteur vient de conclure au renvoi de la pétition au ministère avec
demande d’explication ; ce renvoi est inutile, parce que je donnerai les
explications que l’on demande lors de la discussion de la loi concernant les
barrières.
M. A. Rodenbach. - J’avais demandé la parole,
mais puisque M. le ministre promet de donner des explications, je n’ai plus
rien dire.
M. Gendebien. - Il y a une réclamation faite
par un M. Wallez, je crois, sur les routes ; je crois
qu’il y a urgence d’examiner la pétition qu’il nous a adressée, parce qu’il est
menacé de poursuites. Si le ministre connaissait les faits, je présume qu’il
arrêterait lui-même les poursuites.
M. Hye-Hoys. - C’est M. de Jaegher qui
est chargé du rapport sur les pétitions relatives aux routes ou au roulage.
M.
Verrue-Lafrancq. - M. de Jaegher est souffrant, et retenu chez lui ; il
m’a remis les rapports qu’il avait préparés.
M. Stas de Volder. - Si la
chambre le désire, je présenterai le rapport sur la pétition dont vient de
parler M. Gendebien.
M.
le président. - Vous avez la parole.
M. Stas de Volder. - Par
pétition datée de Bruxelles, le 2 février 1836, le sieur Wattez,
adjudicataire du droit de perception de diverses barrières, demande que la
chambre intervienne pour lui faire obtenir des indemnités de ce chef.
Le pétitionnaire
fait valoir en faveur de sa réclamation, qui porte sur plusieurs barrières, des
événements de force majeure provenant d’inondations et de mauvais état de
routes devenues impraticables, des passages de troupes qui empêchaient les
communications, et enfin une diminution de deux tiers au tarif du droit de
navigation sur le canal de Charleroy, qui a fait un tort considérable à deux de
ses recettes dans cette direction.
La commission des
pétitions, prenant en considération toutes ces circonstances, qui paraissent
militer en faveur du réclamant, propose le renvoi de la pétition du sieur Wattez à M. le ministre des finances, avec demande
d’explications.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je voudrais savoir si le pétitionnaire
s’est déjà adressé à M. le ministre des finances.
M. Stas de Volder. - Oui, il
s’est déjà adressé à ce ministre.
- Le renvoi au
ministre des finances, avec demande d’explications, est ordonné.
Discussion générale
M.
Frison. - Messieurs, vous venez d’entendre les conclusions de la
commission des pétitions sur les plaintes élevées par un grand nombre de
voituriers, contre l’arrête royal du 28 décembre dernier, qui apporte des
modifications au chargement des voitures ; je ne combats pas le renvoi proposé
à M. le ministre des travaux publics, mais je doute que cette seule mesure soit
de nature à apporter du soulagement à une industrie souffrante. Je viens donc
vous soumettre quelques considérations sur le roulage, qui tombe en décadence
depuis plusieurs années et qui cependant mérite toute la sollicitude des
chambres et du gouvernement ; ce n’est pas la première fois que des
industriels, des commerçants, des cultivateurs, font entendre leurs doléances ;
elles ont obtenu l’honneur du dépôt au bureau des renseignements ou du renvoi
au ministre ; c’est là qu’elles reposent en paix d’un sommeil non troublé. Ce
n’est pas la première fois que leurs intérêts ont été défendus à cette tribune
par plusieurs de nos honorables collègues, parmi lesquels je citerai les
honorables MM. Gendebien et A. Rodenbach ; j’ai quelquefois joint ma faible
voix à la leur, et nos efforts n’ont point amélioré la position des voituriers.
Serai-je plus heureux aujourd’hui ? C’est ce qu’il est difficile d’espérer.
Je reconnaîtrai
d’abord, messieurs, que l’industrie du roulage a été frappée d’un coup mortel
par des canaux et des chemins de fer ; je ne prétends point dire pour cela qu’il
n’eût point fallu creuser de canaux, ni construire de chemins de fer ; telle
n’est pas ma pensée, car je reconnais l’utilité de toutes les communications
qui doivent concourir à amener le développement et le progrès de l’industrie,
le plus bas prix possible dans le transport de nos matières premières et de nos
produits fabriqués, et nous mettre ainsi à même de lutter avantageusement avec
l’étranger. Mais s’il est un moyen de faire droit à des plaintes que nous
entendons si souvent, la chambre doit-elle le rejeter ? S’il est un moyen de
soutenir ou de relever, pour mieux dire, le roulage, la chambre et le
gouvernement ne doivent-ils pas l’adopter ?
Après l’Angleterre,
Tant d’avantages
réunis doivent fixer l’attention des chambres et du gouvernement, qui ne
sauraient trop encourager les voituriers dans ce moment surtout où ils sont
menacés d’une ruine totale par la construction des chemins de fer et où ils ont
une lutte inégale à soutenir contre le voiturage par eau, qui paraît plus
favorable, puisque l’on a diminué le droit de navigation sur plusieurs de nos
canaux. Dans ces circonstances qu’a-t-on fait pour le roulage ? Un arrêté royal
du 30 mars 1836 accordait un surcroît de charge de 1,900 kil. ; c’était une
amélioration sans doute, et l’on devait en rendre grâces au gouvernement, qui
s’est bientôt ravisé de cet acte et vient de l’abroger ; mais là ne devait pas
s’arrêter la protection ; les voituriers sont restés sujets à l’arbitraire des employés
subalternes des ponts et chaussées ; à chaque instant, pour la moindre
surcharge, les préposés aux bascules dressent des procès-verbaux qui frappent
les voitures de 25 à 100 francs d’amende et davantage ; un voiturier est-il
soupçonné en surcharge loin d’une bascule on cube son chargement, opération
tout à fait arbitraire et contre laquelle il est impossible au conducteur de
réclamer : en effet, je défie le mathématicien le plus habile d’établir, non
pas exactement, mais même à quelques cents kilog. près, le poids d’une voiture
de houille, tant à cause de la forme irrégulière du chariot qu’à cause de la
différence de pesanteur spécifique des diverses espèces de charbon. Que l’on
supprime donc ces ponts à bascule et surtout cette opération du cubage, contre
lesquels on s’est déjà récrié tant de fois. Que l’arrête du 28 décembre dernier
par lequel se trouve abrogé celui du 30 mars 1835, soit rapporté. Que l’on
établisse autant que possible la concurrence entre le roulage, les chemins de
fer et les canaux.
Plus on favorisera
l’industrie du roulage, plus le chauffage se transportera à bon marché à
Bruxelles et dans les Flandres. Quand on considère les entraves apportées au
voiturage par terre, quand on considère l’impôt élevé qui frappe la houille à
l’entrée à Bruxelles (2 fr. 40 par mille livres poids ancien), on ne doit point
s’étonner que le chauffage soit sans prix dans la capitale. Que l’on ne vienne
plus dire qu’un chargement plus fort que celui autorisé aujourd’hui détériorera
les routes ; il est reconnu que les roues à jantes larges, à voies inégales, ne
sauraient leur nuire. Que l’on veuille bien se convaincre que dans le Brabant
et le Hainaut, les communications pavées n’ont jamais été dans un état aussi
satisfaisant qu’en ce moment. Une seule route du Hainaut est dans le
délabrement le plus complet, celle de Seneffe à Mont-St-Jean ; mais il faut en
attribuer la cause au peu de solidité du fond et peut-être aussi à ce que les
réparations ne se font pas en temps utile, plutôt qu’à la surcharge permise
jusqu’à ce jour.
Si l’on considère
d’un autre côté, messieurs, le rapport intime qui existe entre le roulage et
l’agriculture, on fera peut être moins de difficulté de faire droit aux
plaintes des voituriers : il n’est pas si loin de nous le temps où plus de
3,000 chevaux parcouraient les routes du Hainaut et du Brabant : aujourd’hui à
peine en reste-t-il 500 ; les fermiers trouvaient à vendre avantageusement les
chevaux de forte race qui servent au roulage ; ils se défaisaient avec bénéfice
de l’avoine, des féveroles, des pailles nécessaires à ces animaux. Ces
considérations les portaient à donner un prix élevé de leurs fermes ; les
voituriers eux-mêmes louaient des terres à des prix exorbitants ; la prospérité
du roulage n’était donc pas étrangère à la hausse des taux que nous avons pu
reconnaître depuis quelque temps. Dans la seule commune que j’habite, le nombre
des voituriers est réduit à moins d’un dixième de ce qu’il était autrefois ; il
va sans dire que toutes les industries qui dépendent du roulage, les maréchaux,
les charrons, les aubergistes ont souffert dans la même proportion.
La taxe des
barrières est portée au budget des voies et moyens pour 2,250,000 fr. ; en
déduisant les sommes affectées à la réparation et à l’entretien des routes, il
reste, année commune, un excédant de 600 mille francs ; supprimer un pareil
revenu, qui sert à l’ouverture des communications nouvelles, ou qui est proposé
par certains honorables membres, si je ne me trompe, comme garantie des
emprunts que l’on pourrait contracter pour percer des routes nouvelles, voilà
une demande qui serait peut être mal accueillie, messieurs ; cependant cet
impôt n’existe pas en France, et en Belgique il serait facile de le remplacer,
ou de le représenter même par une somme plus forte, tout en offrant en même
temps une grande facilité de recouvrement. Il est probable que, pendant
longtemps encore, nos impôts iront toujours à 80 millions de francs ; ajoutez 3
centimes par franc aux contributions directes et indirectes, et vous aurez
2,400,000 francs à dépenser annuellement à l’entretien des routes existantes, à
la construction de routes nouvelles, ou à offrir en garantie des capitaux que
l’on voudrait emprunter à cet effet. Songez, messieurs, que beaucoup de nos
provinces et surtout le Brabant et le Hainaut doivent une grande partie de
leurs routes à un semblable moyen qui n’a soulevé aucune plainte. Cette
proposition me paraît au moins aussi fondée que celle de surcharger les
patentes, que vous avez adoptée dernièrement pour parvenir à l’abolition du
droit de poinçonnage.
Je me résume donc,
messieurs, et je dis que l’on peut facilement apporter du soulagement au
roulage :
1° En permettant un
chargement plus fort, tel que celui autorisé par l’arrêté royal du 30 mars 1833
;
2° En supprimant
les ponts à bascule et l’opération du cubage ;
3° En abolissant le
droit de barrière, remplacé par le mode que je viens d’indiquer.
Je n’en ferai pas la proposition formelle, tant j’ai crainte de ne pas
voir mes idées accueillies ; mais je vous prie, messieurs, d’en faire l’objet
de vos méditations.
Je ne dirai plus
qu’un mot sur l’arrête royal du 28 décembre dernier ; les fermiers des
barrières ont calculé le prix de leur adjudication d’après l’arrêté du 30 mars
1833 permettant un surcroît de charge de 1,900 kil. ; cette disposition
nécessitait l’attelage de 6 chevaux en tout temps et de 8 pour gravir les
montagnes ; le chargement permis actuellement n’exige plus que 4 chevaux et 6
dans les montagnes ; la suppression du cinquième cheval présente une perte de
15 centimes, du sixième 20 centimes, et des septième et huitième un franc à
chaque barrière. Supposez seulement une perte réelle moyenne de 60 centimes à
chaque barrière, et dites-moi si le gouvernement n’a pas apporté de changement
à la condition des fermiers des barrières. Il eût tout au moins dû retarder
jusqu’au 1er avril prochain la publication de cet arrêté du 28 décembre 1836.
Il me surprendrait peu que les fermiers des barrières adressassent de ce chef
des demandes d’indemnités au gouvernement. J’ai dit.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Messieurs, je m’attacherai à faire connaître à la chambre les motifs qui ont
engagé le gouvernement, par son arrêté du 28 décembre, à rapporter celui du 31
mars 1833, pour remettre en vigueur le décret du 23 juin 1806.
Vous vous rappelez
que dans la discussion qui a eu lieu, il y a un an, dans les deux chambres, sur
la taxe des barrières, beaucoup d’honorables membres ont signalé le mauvais
état des routes, en l’attribuant principalement à la tolérance qui résultait de
l’arrêté, alors existant, du 31 mars 1833. L’on n’a pas hésité à regarder cet
arrêté comme la cause principale de l’excessive dégradation des routes, surtout
dans le Brabant. Le ministre de l’intérieur a fait une sorte d’enquête dans le
pays ; et c’est à la suite de renseignements recueillis dans toutes les
provinces que, acquérant lui-même la conviction exprimée dans l’une et l’autre
chambre, il a pris l’arrêté du 28 décembre dernier ; mesure conservatrice qui
vous est en ce moment dénoncée par plusieurs pétitions.
Cette mesure
a-t-elle changé la condition des entrepreneurs de l’entretien des routes ? En
général, non, messieurs ; le dire, c’est se tromper sur la nature des baux qui
sont passés pour l’entretien des routes ; ce ne sont pas des marchés à forfait,
l’entrepreneur ne fournit qu’une quantité déterminée de matériaux ; mais il ne
s’engage pas à entretenir la route, quoi qu’il advienne. C’est en ce sens
qu’ont été passés les baux en 1835 pour une durée de 3 années. Ainsi
l’entrepreneur n’est tenu qu’à fournir une certaine quantité de pavés, de
pierres, quantité présumée nécessaire pour l’entretien des routes. Si cette
quantité est insuffisante, c’est au gouvernement à faire les travaux
supplémentaires. C’est en effet ce qui est arrivé l’année dernière. Les
prévisions qui avaient servi de base à la rédaction des marchés ont
malheureusement été dépassées.
Le gouvernement a
dû suppléer, en travaux extraordinaires, une somme de 154,040 fr. 14 c.
Je ne veux pas
dire, messieurs, qu’il faille mettre sur le compte des détériorations résultant
du surcroît des chargements l’augmentation de la dépense montant, comme je
viens de le dire, à 154,000 fr. environ ; mais la majeure partie de cette
dépense extraordinaire a été absorbée par le Brabant, où l’on a donné un
supplément de 51,000 fr., c’est-à-dire le tiers de la somme ; par le Hainaut,
où l’on a dépensé 28,000 fr. Quant au Luxembourg, où l’on a dépensé 50,000 fr.,
c’est parce que la route principale y a été construite avec de mauvais
matériaux. Toutefois il faut attribuer plus de la moitié de la dépense
supplémentaire aux détériorations causées par la tolérance résultant de
l’arrêté de mars 1833.
Cet hiver s’est
annoncé comme celui de l’année dernière, par des alternatives de gelées et de
dégels ; dès lors le ministre de l’intérieur a pensé qu’il ne devait pas
laisser courir aux routes le même danger qu’elles avaient couru l’année
dernière. On allait jusqu’à lui annoncer que trois hivers successifs, avec des
alternatives de gelées et de dégels, seraient funestes à l’existence même de
certaines routes. Ce sont ces faits qui ont motivé la mesure prise le 28
décembre.
Cependant cette
mesure n’est pas définitive ; le gouvernement s’est réservé d’en prendre
d’autres, et de les prendre prochainement.
L’arrêté renferme
la réserve suivante : « Nous nous réservons d’accorder au roulage
plus de facilité pour la saison d’été. »
Ainsi le gouvernement n’a pas statué d’une manière absolue et
irrévocable, il n’a entendu que prévenir un mal qui lui semblait prochain, et
qui n’eût été que la répétition de ce que nous avons vu l’hiver dernier ; il a
désiré ne pas se retrouver dans la nécessité de faire une dépense
supplémentaire d’au moins 80,000 fr.
Cet arrêté
change-t-il la condition des fermiers des barrières ? Je réponds encore
négativement. Si les chevaux attelés aux voitures sont en moins grand nombre,
il y a plus de voyages, et par conséquent compensation.
Les fermiers ont
contracté, au reste, sans qu’il résultât pour eux un droit acquis de l’arrêté
du 31 mars 1833. Les droits du gouvernement restaient saufs, le gouvernement
conservait de droit de faire les règlements qu’il jugerait nécessaires, la
police du roulage n’a pu être engagée.
Aujourd’hui les
fermiers de barrière ne pourraient faire dériver du changement qui a été fait
un droit à une indemnité quelconque.
En résumé, le
gouvernement a pu prendre l’arrêté du 28 décembre ; il a usé de son droit,
parce qu’il y avait nécessité qu’il en usât. Des faits de notoriété publique
l’y obligeaient ; la résolution n’est pas absolue ; elle sera modifiée dès que
la saison le permettra, et le roulage sera traité plus favorablement.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, je pense que le
vice que j’ai signalé l’année dernière est la véritable cause de la
détérioration des routes. J’ai dit que lors du dégel les agents des ponts et
chaussées doivent faire des rapports à l’ingénieur en chef de la province. Il
faut un temps moral pour que ces rapports nous parviennent.
L’ingénieur doit
ensuite s’adresser au gouverneur, lequel doit donner des ordres aux
commissaires de district pour la fermeture des barrières. Pour cela, il faut
beaucoup de temps, et avant qu’on n’ait envoyé ces vélocipèdes, qui souvent ne
vont pas très vite, les routes ont le temps de se dégrader.
Voilà la véritable
cause de la dégradation de nos routes, elle n’est pas dans la surcharge de
mille kilogrammes. Ce n’est pas la première fois que je signale ce vice
administratif. Toux ceux qui connaissent l’intérieur du pays sont unanimes pour
reconnaître que c’est là le motif pour lequel nos routes sont dégradées.
J’engage M. le ministre à apporter des améliorations dans ce service, à faire
cesser les lenteurs que je viens de signaler ; c’est là une question qui mérite
de sa part un sérieux examen.
Le moment n’était
pas opportun pour rendre l’arrêté du 28 septembre. Depuis le gouvernement
hollandais, le roulage est l’industrie dont l’état a été le moins prospère et
empire tous les jours par suite de la construction des chemins de fer. Le
moment était donc inopportun pour rendre un pareil arrêté.
On se plaint généralement dans les Flandres de l’augmentation de 20 p.
c. qu’a éprouvée la houille. Vous voulez qu’on produise des fabricats à bon
marché, afin de trouver des débouchés, afin de soutenir la concurrence avec les
Anglais. Je vous ferai observer qu’en Angleterre le combustible est à très bon
marché, tandis qu’il est très cher nous. Pour la moitié de
Au lieu de rendre
un arrêté qui, en entravant le roulage, doit avoir pour résultat d’augmenter le
prix de la houille, on aurait dû nous présenter un nouveau tarif pour l’entrée
de la houille anglaise. Le droit actuel est exorbitant ; il est de 14 fr. par
mille kilogrammes.
Je sais qu’un
projet est préparé au ministère, dans lequel on propose de réduire ce droit à 4
ou 5 fr. Si ce projet n’est pas bientôt présenté à la chambre, je prendrai
l’initiative. Plusieurs membres m’ont dit qu’ils appuieraient ma proposition.
Revenant à l’arrêté
pris, je répète en terminant qu’il ruine le roulage. Depuis un ou deux ans, on
a accordé d’immenses avantages au transport par la navigation, le péage sur le
canal de Charleroy a été diminué ; et tandis qu’on accorde des faveurs à
l’industrie de la navigation, on impose des surcroîts d’impôt et des entraves à
l’industrie du roulage.
Lorsque
l’inspecteur-général des ponts et chaussées siégeait dans cette chambre, il
nous a dit que la surcharge de mille kilogrammes par chariot ne pouvait pas
nuire aux routes. Il faudrait faire une nouvelle enquête et demander si la
principale camuse des dégradations des routes n’est pas dans les lenteurs
qu’éprouve la fermeture des barrières. J’engage le gouvernement à prendre en
considération la position des rouliers et à ne pas l’aggraver. Partout ils sont
dans la misère, et ils ont besoin de la protection du gouvernement.
M.
Pirmez. - Lorsqu’on s’est plaint du mauvais état des routes, on l’a
attribué à ce qu’elles étaient beaucoup parcourues. Je répondrai que le mauvais
état vient de ce que les routes les plus parcourues ne sont pas réparées en
raison de l’activité qui y règne, c’est-à-dire qu’on n’y fait pas de dépenses
de réparation en proportion de ce qu’elles produisent.
L’arrêté qui vient
de paraître me semble la conséquence naturelle de l’emprunt de 6 millions. Cet
emprunt devait emporter avec soi, ou la dégradation des routes les plus parcourues,
ou une élévation du droit de barrière, ou une diminution de charge. Mais les
conséquences de ces trois choses sont exactement les mêmes, soit que vous
laissiez dégrader les routes, que vous diminuiez la charge, ou que vous
augmentiez le droit de barrière, vous augmentez le prix du transport. C’était
là le résultat nécessaire de l’emprunt. Si vous affectiez aux réparations des
routes les plus parcourues des sommes proportionnées à ce qu’elles produisent,
elles pourraient supporter la charge.
Soyez persuadés que cette loi d’emprunt de six millions est considérée
par les localités qui en souffrent comme une grande injustice. Lors de la
discussion de cette loi, on vous a dit que la province du Hainaut n’avait cessé
de réclamer contre une pareille mesure pendant longues années, que c’avait été
son principal grief contre le gouvernement hollandais. Je pense que déjà cette
année les états du Hainaut ont fait une adresse au gouvernement pour démontrer
combien était injuste un pareil état de choses.
Si vous n’aviez pas
ce système, dont les Hollandais vous ont donné l’idée lorsqu’ils ont fait
construire des routes en Hollande aux frais de
Voilà ce que
j’avais à dire contre l’arrêté.
M.
Desmet. - Mon intention n’était pas de critiquer la mesure que vient de
prendre le gouvernement, parce que je pense que le vice existe non dans la
mesure, mais dans l’exécution des règlements par ses agents, en ce qu’on laisse
souvent passer des chariots trop chargés. La même chose se passe quand les
barrières sont fermées pour cause de dégel. On sait qu’en payant on pourra se
faire ouvrir les barrières, et de grands dégâts se font ainsi sur les routes.
L’honorable M.
Frison a appelé l’attention du gouvernement sur le roulage.
Il y a des contrées
qui sont tout à fait dépendantes du roulage ; il y a une partie des Flandres,
par exemple, où il n’y a ni canal ni chemin de fer ; les transports ne se font
que par le roulage. Sur l’Escaut et le canal d’Antoing, il y a monopole, et les
frais de transport du charbon sont de 50 p. c. de la valeur ; et le charbon est
augmenté non pas dans le prix coté, mais en ce que les mesures sont diminuées
d’un dixième. On paraît vous donner le charbon au même prix, mais on vous en
donne un dixième de moins ; c’est par suite du monopole du transport que le
charbon est devenu si cher dans nos contrées.
Je dois encore
appeler l’attention du gouvernement sur un objet qui me paraît des plus
importants, ce sont les messageries. On leur fait payer, outre le droit de
barrière, une contribution au profit des maîtres de poste. Je ne conçois pas
pourquoi on leur fait payer cette contribution, car les messageries sont plus
utiles que les postes, et je crois que l’impôt qu’on prélève sur les
messageries est très contraire à l’esprit de notre constitution ; je prie donc
les ministres de prendre en considération l’observation que je viens de faire.
A cet égard, je saisis l’occasion pour signaler une vexation fiscale qui se
commet dans notre pays, en exécutant rigoureusement l’arrêté du 25 prairial an
IX. A tout instant vous voyez des gendarmes faire des fouilles dans les
voitures publiques, arrêter des piétons, les fouiller, et s’ils trouvent sur
eux une seule lettre, dresser procès-verbal. Plus de 50 procès-verbaux de
contravention de ce genre ont été déférés au tribunal de Gand pendant l’année
dernière. Je dois dire qu’ils ont été acquittés.
Vous pouvez juger
du tort qui peut résulter pour le gouvernement de renouveler les vexations qui
se pratiquaient sous Guillaume. Le commerce est très intéressé à ce que ces
vexations cessent. A Alost, presque toutes les heures il part une diligence pour
Gand ou Bruxelles, et en deux ou trois heures on peut y faire parvenir une
lettre. Eh bien, non ; on est obligé de mettre sa lettre à la poste, et elle ne
parviendra qu’au bout de 24 heures.
Une personne tombe malade, il est nécessaire d’en avertir quelqu’un au
plus tôt ; par les diligences on pourrait le faire en deux ou trois heures ;
pas du tout, il faut se servir de la poste, et l’avis ne parviendra que dans 24
heures. Le marché des huiles s’y tient le samedi à midi ; en mettant une lettre
à la diligence, on pourrait connaître les prix à Bruxelles en trois heures ; il
faut encore mettre sa lettre à la poste et subir un retard de 24 heures.
Toutes ces
vexations se commettent en vertu d’un simple arrêté du 27 prairial an IX, et
font grand tort au gouvernement. Je demande que le ministre des finances
revienne là-dessus. On permet bien aux diligences le transport des feuilles
périodiques.
Il y a autant
d’utilité au transport des lettres qu’au transport des journaux.
Je demande donc que
l’on mette un terme à un état de choses qui fait le plus grand tort au
gouvernement.
J’espère que le
ministre des finances ne tardera pas à faire contremander ses ordres sur
l’exécution du vexatoire arrêté des conseils, et si les gendarmes ou les
employés du fisc l’ont fait de leur propre mouvement et sans ordres, je ne puis
trop l’engager à en ordonner la défense, car je ne puis assez répéter que ces
fiscalités vexatoires font un tort extrême au gouvernement et prêtent des armes
aux ennemis de l’ordre actuel des choses.
M.
Lebeau. - Il s’agit, messieurs, de la loi des barrières, sur laquelle
j’ai quelques mots à dire. Mon intention n’est pas, à ce propos, de parler du
chemin de fer, du monopole de la poste ni de l’emprunt de 6 millions ; car il
me semble que tout cela est plus ou moins étranger à la discussion actuelle.
Mais je ne puis laisser passer ce qui a été dit sur une mesure qu’a prise le
gouvernement relativement à la police du roulage.
Le gouvernement est
tour a tour assailli de réclamations de diverses natures, selon que certains
intérêts sont successivement lésés.
Lorsque la
détérioration des routes a été reprochée au gouvernement, non seulement dans
les chambres, mais encore dans la plupart des journaux, on a dit que c’était en
grande partie à l’arrêté du 31 mars 1833 qu’il fallait attribuer cette
dégradation.
On a aussi, dans la
circonstance, rappelé au gouvernement que c’était un devoir pour lui d’exercer
une surveillance beaucoup plus active sur l’administration des ponts à bascule.
On attachait alors une très grande importance à ces mesures, que l’on regarde
maintenant comme portant un préjudice notable à l’état des routes.
Je conçois que M.
Frison ne sente pas très vivement les inconvénients qui ont été signalés, parce
que, dans sa province de Hainaut, les routes sont généralement pavées. Mais,
dans les diverses provinces où les routes sont en cailloutis, sont empierrées,
il est impossible de concevoir le maintien des routes en bon état (quelques
efforts que fasse dans ce but le gouvernement) avec le système de roulage admis
en 1833.
Il a été fait
là-dessus une enquête générale, sévère et minutieuse, à laquelle, quoi qu’on en
ait pu dire, les entrepreneurs n’ont pris aucune part, parce que cela ne les
regardait pas. Ce sont le corps des ponts et chaussées, les administrations
locales et les chefs des administrations provinciales qui ont été chargés de
diriger et de faire cette enquête ; et l’on a reconnu non seulement la
nécessité, mais encore l’urgence de rapporter l’arrêté de 1833, pour les
provinces surtout où les routes sont en cailloutis. Je pourrais citer, outre la
province de Namur, la province de Liége et une partie de la province de
Brabant.
Le système de
roulage doit être nécessairement combiné avec l’état de solidité des routes, avec
le système de réparation et d’entretien des routes.
Je conçois jusqu’à
certain point la justice des réclamations du préopinant lorsqu’il parle du
système du routage relativement aux routes pavées. Mais il n’en est pas de même
relativement aux routes en cailloutis ; et il y en a beaucoup dans le pays.
En Angleterre, où
presque toutes les routes sont empierrées, la tolérance du roulage est loin
d’aller au point où la porte l’arrêté du 31 mars 1833, et où la porte même
l’arrêté de 1836.
J’ai parcouru une
partie de l’Angleterre à diverses époques. Je n’y ai vu que des routes
empierrées. Mais je n’ai jamais vu sur ces routes ni chariots, ni charrettes,
ni diligences dont la dimension ou le poids approchât le moins du monde du
poids des diligences et des chariots du pays. Il n’est pas un Anglais qui
comprenne que l’on puisse maintenir les routes dans un état de viabilité
convenable avec la charge des voitures tolérée sur les routes du pays.
Quant aux ponts à
bascules dont un préopinant voudrait la suppression, je dois dire que
généralement on réclame au contraire, de la part de l’autorité, une
surveillance plus sérieuse. On réclame une position un peu meilleure pour les
tenants de ponts à bascule, qui journellement sont exposés à des tentatives de
corruption de la part du roulage.
Je ne dirai rien
d’un vœu sur lequel un préopinant n’a pas insisté, mais qu’il a émis pour la
suppression du droit de barrières, citant à cet égard l’exemple de
On se préoccupe
beaucoup ici de l’intérêt du roulage ; mais il faut aussi penser à l’intérêt du
voyageur et du consommateur. Lorsque les routes sont mauvaises, le roulier peut
faire un bénéfice plus considérable ; il peut demander un prix plus élevé. Qui
en souffre ? Evidemment le consommateur. Plus les routes sont mauvaises, plus
le transport coûte cher, et plus il est lent. Il ne faut pas penser seulement
aux rouliers, car nous sommes ici pour penser un peu à tout le monde. J’appelle
l’attention de la chambre sur l’intérêt du consommateur, sur l’intérêt du
commerce : il réclame le maintien en bon état des routes.
On vous a parlé de
la lenteur avec laquelle on procédait parfois à l’interruption des
communications, à la clôture des barrières. Cette lenteur est naturelle. Il est
très naturel lorsqu’il est question de prendre une mesure qui porte un
préjudice notable au commerce et qui est toujours l’objet de vives
réclamations, que le gouvernement hésite, éprouve quelques scrupules, et veuille,
avant de prendre une telle mesure, s’assurer si elle est nécessaire ; car une
interruption des communications pendant 8 jours seulement jette la perturbation
dans les relations commerciales. La précipitation donnerait lieu à de bien
d’autres reproches que ceux que l’on adresse au gouvernement au sujet de son
hésitation en présence de la nécessité à laquelle il se trouve réduit.
Je ne puis donc
m’associer aux reproches faits au gouvernement à l’occasion de l’arrêté qui
abroge celui de 1833, en ce qui concerne le système de roulage sur les
communications publiques.
On a aussi accusé
le gouvernement de ne pas faire assez pour la réparation des routes. J’ignore
comment les choses se passent ailleurs. Mais je sais que dans plusieurs
provinces le devis des réparations à faire est porté par les entrepreneurs,
sans autres limites que les besoins des routes.
Quelles que soient
les clauses du bail des entrepreneurs, je n’ai jamais entendu dire que le
gouvernement ne les ait pas approuvées. Aucun fait de cette nature n’est à ma
connaissance. Le gouvernement ne néglige donc rien pour la réparation des
routes.
Je persiste à croire qu’il n’y a pas de reproches à adresser à
l’administration au sujet des réparations et de l’entretien des routes. Si le
gouvernement ne réussit pas toujours, il faut tenir compte des années
exceptionnelles que nous avons eues, des hivers désastreux que nous avons vus
depuis quelques années.
S’il y a des vices
encore dans l’entretien des routes, ils sont, à mon avis, dans le système du
roulage, auquel on n’a pas complètement remédié par les dispositions de
l’arrêté contre lequel on s’est élevé.
M. Andries. - J’ai peu de choses à dire
après ce qu’ont dit les préopinants.
J’attirerai
l’attention de M. le ministre des travaux publies sur les plantations ; car
elles sont très négligées dans ma province.
Si l’on vendait à
temps les arbres abattus sur les routes, cette vente pourrait produire quelque
chose. Au lieu de cela, je ne sais pourquoi l’on ne vend ces arbres que quand
ils sont pourris. De telle sorte que cette vente ne rapporte rien.
De même les
branches élaguées ne rapportent également rien, parce qu’on les laisse au bord
des routes où elles sont volées. J’ai la même observation à faire sur les grès
de rebut ; on les laisse sur les routes, et ils sont volés. Au lieu de cela on
pourrait les accorder à des communes qui en feraient un bon usage pour la
réparation de leurs routes.
Je voudrais que le
gouvernement exploitât les plantations comme le propriétaire le plus riche et
en même temps le plus intelligent du pays ; il faut qu’il donne l’exempte en
cette matière.
M. de Puydt. - Je ne puis passer sous
silence, messieurs, une observation qui a été faite par un honorable préopinant
relativement à l’emprunt de 6 millions, auquel il attribue le mauvais état des
routes ; Je répondrai à cette assertion par un calcul extrêmement simple :
avant que l’emprunt de 6 millions ne fût voté, la somme affectée annuellement à
l’entretien des routes, et qui était prélevée sur le produit des barrières,
s’élevait à 1,300,000 fr. ; depuis que l’emprunt a été voté, la somme affectée
à l’entretien des routes et qui est également prélevée sur le produit des
barrières, est encore de 1,300,000 fr. ; l’année avant l’emprunt il y a eu un
excédant de 864,000 fr. employé à la construction de routes nouvelles ; depuis
l’emprunt il y a encore eu un excédant de 729,000 fr. employé de même à la
construction de nouvelles routes ; indépendamment de cet excédant qu’on pourrait,
si on le voulait, employer à l’entretien des routes, il y a une somme de 200 et
quelques mille francs qui est consacrée au paiement des intérêts et à
l’amortissement de l’emprunt de 6 millions. Vous voyez donc, messieurs, que la
somme qui est réservée à l’amortissement et au paiement des intérêts de
transport ne peut exercer aucune influence, quelle qu’elle soit, sur
l’entretien des routes, puisqu’elle ne diminue en aucune manière la somme qui
est destinée à cet entretien. Il me semble, messieurs, que ces faits détruisent
complètement les arguments de l’honorable membre auquel je réponds.
M. Pirmez. - Ce que j’ai dit de
l’emprunt de 6 millions s’appliquait plutôt au système qui a fait recourir à cet
emprunt, qu’a l’emprunt lui-même ; peu importent dès lors les calculs que vient
de vous présenter l’honorable préopinant. Le système que j’ai attaqué, c’est
celui de ne pas consacrer exclusivement à l’entretien de chaque route les
produits de cette route ; il résulte de ce système que les routes du Hainaut
qui produisent le plus, n’ont jamais été en aussi bon état que celles des
autres provinces. C’est là, messieurs, ce qui, sous le gouvernement hollandais
comme sous le gouvernement actuel, a soulevé les plus grandes réclamations.
M. Scheyven. - Messieurs, mon intention, en
prenant la parole, n’est pas de m’opposer à l’adoption du projet de loi, mais
d’appeler l’attention du ministre des travaux publics sur le mauvais état de quelques-unes
de nos routes de gravier.
Je citerai la route
de première classe de Maestricht vers Wezel, et
l’embranchement fait il y a 3 ou 4 ans autour du rayon de Maestricht, province
de Limbourg ; cette route ressemble plutôt à un mauvais chemin vicinal qu’à une
grande route.
L’on attribue
généralement le mauvais état de nos routes de cette espèce à deux causes, au
mode de construction et au défaut d’entretien. Il paraît que dans la
construction de nos routes le gravier qu’on emploie n’est pas placé à une
profondeur suffisante ou en d’autres termes qu’on n’emploie pas assez de
gravier, en second lieu, qu’on n’emploie pas de cylindre pour raffermir les
routes, et enfin, qu’on ne les rend pas assez bombées.
L’on s’est souvent demandé pourquoi le gouvernement n’ordonnait pas de
suivre le mode de construction adopté en Prusse, qui, à ce qu’il semble, est
très simple. Quoi qu’il en soit, il est incontestable que les routes sont de
beaucoup meilleures en Prusse que chez nous, qu’elles y sont plus raffermies le
jour même de l’achèvement qu’ici après 4 ou 5 ans d’existence ; je pense donc
que le gouvernement ferait sagement d’envoyer un ingénieur dans ce pays pour
voir la manière dont les routes y sont construites, afin de l’adopter pour les
nôtres, surtout dans un moment où il s’agit de créer de nouvelles voies de
communication, car les faits sont là pour prouver la supériorité sur celles qui
existent chez nous.
La seconde cause
est le défaut d’entretien. Il est de fait que pour conserver une route bonne,
il faut réparer sur-le-champ les plus petites dégradations ; sans cela l’eau y
reste, amollit le terrain, et les roues des voitures ou chariots s’enfoncent et
font des ornières ; c’est ainsi que j’ai vu il n’y a pas un mois encore, sur la
route de Maestricht que j’ai citée, des ornières d’une profondeur d’un
demi-pied au moins. Pour y porter remède, il faut absolument augmenter le
nombre des cantonniers, et les charger de réparer journellement les moindres
détériorations et remplir les creux qu’ils y remarquent : de cette manière les
routes seront toujours en bon état, et on évitera de grandes réparations qui
toujours sont très coûteuses.
M. Verdussen. - Je crois, messieurs,
que plusieurs orateurs s’écartent de la question, et rentrent tout à fait dans
la discussion du budget de l’intérieur ; il s’agit aujourd’hui de savoir s’il
convient de percevoir le droit de barrière comme jadis, ou s’il faut en
diminue, ou augmenter le taux ; voilà toute la question ; d’honorables
préopinants viennent de faire des observations qui trouveront leur place quand
il s’agira de discuter le chapitre du budget de l’intérieur qui concerne les
travaux publics : c’est ainsi que M. Desmet a parlé des postes, des
messageries, disant qu’il faut laisser passer les lettres qui sont transportées
par les diligences, invitant, ce me semble, le gouvernement à fermer les yeux
sur la violation de la loi ; ce sont là des questions qui ne doivent pas être
traitées aujourd’hui et sur lesquelles il y aurait beaucoup à dire si on
voulait les approfondir.
Je demande,
messieurs, qu’on rentre dans la question.
M. Gendebien. - Je ne sais, messieurs, si
j’essuierai le reproche de m’écarter de la question, mais je déclare que je
n’ai l’intention de parler que sur le droit de barrière.
Chaque année j’ai
réclamé contre le mauvais système du droit des barrières ; j’ai dit et répété
chaque année que dans un pays industriel et agricole, dans un pays de transit comme
le nôtre, il fallait diminuer le droit de barrière autant que possible, et même
le faire disparaître totalement. Quand il s’est agi du transit dans cette
assemblée, beaucoup d’honorables membres étaient très disposés à dispenser le
transit de tout droit et même de tous frais de transports faits par le chemin
de fer ; car la proposition a été faite, lors de la discussion de la loi
relative au chemin de fer, de ne rien percevoir, non seulement à titre de droit
de barrière, mais même comme frais de transport par le chemin de fer.
Eh bien, messieurs,
si alors on était disposé à faire une semblable faveur aux marchandises
étrangères, il faut l’accorder également, et à plus forte raison, à vos propres
marchandises.
Je crois,
messieurs, qu’en matière de barrières le seul bon système est de ne rien
percevoir sur les grandes routes, non pas que je veuille établir un principe
absolu pour tous les pays ; je parle seulement pour
L’honorable M.
Frison vous a fait voir tout à l’heure qu’au moyen de 3 centimes additionnels sur
les contributions ordinaires, il y aurait de quoi pourvoir à l’entretien des
routes, et qu’il y aurait le même excédant qu’aujourd’hui. De cette manière,
messieurs, vous cesseriez d’avoir des frais de perception, vous cesseriez
d’avoir une administration très coûteuse ; ces frais de perception je ne sais
jusqu’où ils peuvent monter ; mais veuillez remarquer que celui qui entreprend
à ses risques et périls de percevoir le droit de barrière, doit être dédommagé,
par de gros bénéfices, des éventualités de pertes auxquelles il s’expose.
Ensuite jugez, messieurs, ce que doit coûter un homme placé à chaque lieue de
distance pour percevoir les droits de barrières, et cela sur toutes les routes
! Eh bien, messieurs, en remplaçant le droit de barrière par quelques légers
centimes additionnels, vous économiseriez au profit des consommateurs les gros
bénéfices qu’il faut donner maintenant aux entrepreneurs, et toutes les sommes
qu’il faut payer aux nombreux percepteurs, dont plusieurs, sur certaines
routes, perçoivent à peine de quoi les payer, de manière que l’impôt sur ces
routes se trouve entièrement absorbé par les percepteurs.
C’est une injustice
faite au pays, messieurs, que de faire payer aux matières pondéreuses, telles
que le fer, la houille, les pierres, le même droit qu’aux marchandises
précieuses. Vous faites payer pour mille kilog. de charbon ou de fer qui est
acheminé vers un port ou une frontière quelconque le même droit que pour mille
kilog de telle ou telle autre marchandise qui vaut mille fois plus ; cela
est-il juste ? A l’égard de l’étranger favorisé par les lois de transit, c’est
une iniquité ; à l’égard de l’intérieur, c’est, au moins, une répartition mal
faite, un impôt mal assis.
Qu’on en revienne
une bonne fois, messieurs, aux idées simples en administration ; qu’on
établisse à charge des consommateurs 3 centimes additionnels sur les
contributions ordinaires, comme l’a proposé M. Frison, et on aura non seulement
de quoi pourvoir à l’entretien des routes, mais encore les bénéfices que font
aujourd’hui les entrepreneurs.
Puisque j’ai
prononcé le mot bénéfice, je ne puis me dispenser de dire encore un mot du
bénéfice qu’on prélève dans les provinces industrielles sur l’impôt des
barrières pour faire ailleurs des routes qui ne sont pour ainsi dire que des
routes d’agrément, je dirai presque des routes de luxe : vous chargez
l’industrie de quelques parties du royaume pour l’agrément, pour le luxe de
quelques autres parties Voyez, messieurs, quelle injustice !
Comme le disait un
honorable préopinant, un des griefs de la province du Hainaut contre le
gouvernement hollandais, c’était cet impôt qu’on prélevait sur le Hainaut et le
Brabant pour favoriser les autres provinces ; il a été l’objet des plus vives
et des plus constantes réclamations ; comme le disait l’honorable M. Pirmez,
dès la première réunion des états provinciaux du Hainaut, ils ont élevé la voix
contre l’injustice que j’ai tant de fois signalée, et leurs réclamations
deviendront d’autant plus vives qu’elles sont mieux fondées. Eh bien, messieurs,
pour couper court à toutes ces réclamations, faisons ce qu’a proposé M. Frison,
faisons une chose juste et utile pour tout le monde. Qui pourra s’en plaindre ?
Veuillez calculer,
messieurs, la différence qu’il y a pour les consommateurs entre trois centimes
additionnels sur les contributions ordinaires et le droit actuel des barrières.
Ce droit ne s’élève pas à trois centimes additionnels sur toutes les
contributions, mais peut-être à 15 p. c. ; car remarquez bien qu’il ne fournit
pas seulement le produit net, mais qu’il doit aussi fournir de quoi donner aux
fermiers de barrières des bénéfices considérables qui les dédommagent, Comme je
l’ai déjà dit, des chances de pertes auxquelles ils sont exposés, de quoi payer
les percepteurs qui, dans telles parties de telles provinces, où les barrières
rapportent beaucoup, sont très bien payés ou doivent être doublés, tandis que
dans telle autre localité le produit est si peu de chose, que souvent, en
certaines saisons, il ne rapporte pas même assez pour fournir à leur
traitement.
Eh bien, ce sont
les contribuables qui paient toutes ces charges, toutes ces anomalies ; et il
n’y a pas d’exagération, quand je dis qu’au lieu de coûter trois centimes
additionnels aux contributions, les barrières coûtent à chaque habitant du pays
15 centimes additionnels.
J’ai donc des
motifs légitimes d’espoir, qu’on arrivera un jour à simplifier cette partie de
l’administration. Aussi je n’y renoncerai jamais.
Un honorable membre
a dit qu’il fallait bien se garder de supprimer les barrières, comme on l’a
fait en France ; que les routes en France étaient dans un mauvais état, et
qu’il n’y avait pas de roulier dans ce pays qui ne consentît très volontiers à
payer un droit de barrière, pour avoir de bonnes routes.
Cet argument,
messieurs, ne prouve rien contre la proposition que j’ai faite chaque année ;
il ne prouve qu’une chose : c’est que le gouvernement français néglige
l’entretien de ses routes ; elles ne seraient pas mieux entretenues si on y
payait un droit de barrière. Le mauvais état des routes en France tient à un
vice d’administration, à un système de dilapidation d’intrigues et de monopole.
De tout temps,
alors même qu’on faisait payer les barrières en France, les routes principales,
parcourues par le chef de l’Etat et par les hauts fonctionnaires, et celles
qui, dans les départements, étaient présumées devoir être parcourues par le
préfet, étaient les seules qui fussent à peu près bien entretenues ; les autres
ont toujours été négligées ; cet état de choses, je le répète, tient à un vice
essentiel dans l’administration française qu’on ne rencontre heureusement pas
encore chez nous. Messieurs, dès l’instant que la chambre porte à son budget
une somme nécessaire avec une affectation spéciale pour l’entretien, je
voudrais bien savoir comment un ministre s’y prendrait pour se justifier,
lorsqu’on viendrait se plaindre du mauvais état des routes. Que ce produit
arrive des fermiers des barrières, ou que cette allocation procède de centimes
additionnels ou pris sur le principal des contribution, générales ; du moment
que les fonds sont faits, y a-t-il un ministre qui osât ne pas entretenir les
routes ?
Eh bien,
aujourd’hui nous avons ce système de barrières. Est-ce que toutes les routes
sont en bon état ? Un honorable préopinant vient de vous parler d’ornières d’un
demi-pied, d’une route tout à fait labourée. Un autre membre vous a dénoncé le
mauvais état de la route de Nivelles au Mont-St-Jean. Je dirai, quant à moi,
que la route d’ici à Charleroy n’est pas constamment bonne, il s’en faut de
beaucoup.
Cet état de choses
ne tient donc pas au système des barrières ; et s’il est vrai qu’en France les
rouliers consentissent volontiers à payer des barrières pour avoir de
meilleures routes, quel langage doivent donc tenir les rouliers en Belgique,
qui sont obligés de payer des droits de barrières exorbitants et qui ont de
mauvaises routes à parcourir dans certaines localités !
Vous voyez donc que
l’argument d’un honorable préopinant ne signifie rien, ne répond à rien.
J’espère,
messieurs, et il en est temps encore pour cette année, j’espère que M. le
ministre des travaux publics réfléchira aux observations que je viens de faire
et qui sont à peu de chose près la répétition de celles que j’ai faites les
années précédentes.
Pour moi, je suis
décidé à voter perpétuellement contre toute espèce d’impôt des barrières, et je
désire que mes honorables collègues en fassent autant.
On s’est plaint,
messieurs, d’un arrêté du mois de décembre dernier, qui a changé l’état des
choses établi par un arrêté de 1833, relativement à la surcharge qu’on
considère aujourd’hui comme étant de nature à détruire les routes.
Messieurs, il est
fort difficile de concilier à cet égard tous les intérêts, les intérêts du
trésor et ceux des voituriers. Je ne vois d’autre moyen de sortir de cet
embarras, qu’en supprimant le droit des barrières. Dès l’instant que vous ne
forcerez plus les voituriers à payer cet impôt énorme, ils n’auront plus le
droit de se plaindre lorsqu’il sera interdit de prendre des surcharges : et
vous aurez, sur la différence des frais d’entretien résultant de la surcharge,
un bénéfice tel qu’en y ajoutant peu de chose, vous pourrez entretenir les
routes en bon état. Ainsi, tout en conciliant les différents intérêts, vous
trouverez encore une nouvelle cause d’économie dans la mesure que je propose.
Sans vouloir
m’étendre davantage sur ce sujet, ne connaissant pas assez l’état réel des
choses, je me borne à la recommander à l’attention du gouvernement, et je ne
dirai plus que peu de mots pour relever ce qui a été dit par deux honorables
préopinants.
Un honorable membre
a dit que l’arrêté qui a supprimé le surcroît des charges avait été porté en
faveur des entrepreneurs de l’entretien des routes.
Le ministre des
travaux publics a répondu que cela était impossible, parce qu’ils n’avaient pas
de baux à forfait ; il a ajouté qu’ils étaient chargés de fournir certaines
quantités de pavés, de sable, et certaines quantités de main-d’œuvre ; que
lorsqu’il y avait un surcroît de dépense, il était à la charge du gouvernement
; que dès lors ils n’avaient aucun intérêt dans la question. Le ministre a dit
enfin que cela était si vrai, que le gouvernement a été obligé, l’année
dernière, d’augmenter de 150,000 fr. le crédit primitivement affecté à
l’entretien des routes.
L’honorable M.
Lebeau, à son tour, est venu vous dire qu’on avait tort d’adresser des
reproches au gouvernement, à raison du défaut d’entretien des routes, parce que
les entrepreneurs étaient chargés, non pas de faire tel ou tel travail, comme
l’avait dit M. le ministre, mais bien d’entretenir les routes en bon état,
conformément à des cahiers des charges ; que souvent l’état des routes était
vérifié, et que de nombreux procès-verbaux étaient dressés dès que les routes
n’étaient pas en bon état d’entretien.
Il me semble qu’il
y a un peu de contradiction entre l’assertion de M. Lebeau et celle de M. le
ministre des travaux publics ; je ne puis, quant à moi, concilier ces deux
opinions, et à cet égard je demande une explication, me réservant
ultérieurement de tirer les conséquences de la solution qui sera donnée à mon
observation.
Messieurs, on vous
a parlé de diligences et de postes ; quoique cet objet sorte de la discussion,
je dirai à cette occasion que j’ai toujours été choqué de la mesure qui fait
payer aux entrepreneurs de diligences 25 centimes par cheval, au profit des
maîtres de poste. Je n’ai cessé de réclamer contre cet abus, et je saisis cette
occasion de renouveler mes doléances, Je considère cette mesure comme un
privilège à charge des personnes qui vont en diligence, et en faveur de celles
qui vont en poste ; et si l’on impose ceux qui vont en diligence au profit de
ceux qui vont en poste, je ne vois pas de raison pour ne pas imposer les
piétons en faveur de ceux qui vont en diligence.
Je ne m’étendrai
point sur ce point, sur lequel, au reste, j’aurai occasion de revenir ; mais ce
sujet me rappelle que ceux qui voyagent en diligence ont un autre grief à
adresser au gouvernement : c’est qu’à chaque instant les entrepreneurs des
diligences sont arrêtés aux ponts à bascule, et mis en contravention sous
prétexte de surcharges.
Dernièrement une
personne eut occasion de parcourir la route de Bruxelles à Mons ; c’était le
jour où l’on avait fermé les barrières. La diligence a été arrêtée à chaque
pont à bascule : discussion d’un quart d’heure à chaque pont, et retard d’une
heure pour les voyageurs. Cependant la diligence n’était pas au complet quant
au personnel ; il manquait deux voyageurs ; le bagage était peu considérable ;
il n’y avait pas de marchandises, car la personne dont je parle a vérifié la
chose à Mons ; néanmoins le conducteur avait beau dire que, n’ayant pas de
marchandises, il ne pouvait diminuer le poids de la voiture, puisqu’il ne
pouvait laisser en route les voyageurs qu’il s’était engagé à conduire à Mons
au plus loin ; ces observations très justes n’ont été prises en aucune
considération ; le conducteur a été forcé de subir un procès-verbal à chaque
pont à bascule.
Voilà une vexation
qui tend à augmenter les charges et les désagréments pour ceux qui vont en
diligence.
Je vous le demande,
messieurs, est-il nécessaire d’être aussi rigoureux à l’égard des diligences ?
Quel mal peuvent-elles faire sur une grande route, dès l’instant qu’elles ne
transportent pas de marchandises ? Hors du temps de fermeture des barrières,
quel inconvénient peut-il y avoir à laisser surcharger les diligences attelées
de trois chevaux, par exemple ? Cependant il n’est pour ainsi dire pas de
voyage où on ne les fait passer sur chacun des ponts à bascule qui se trouvent
sur la route, et à chaque instant on les met en contravention ; mais on a bien
soin de ne faire subir aucune de ces mesures vexatoires à ceux qui voyagent en
poste à six chevaux.
J’ai oublié de
dire, en parlant tout à l’heure du surcroît de charge, qu’il y a une différence
à faire, quant à la nature des routes, pour autoriser ou pour défendre la
surcharge ; car il est incontestable que les routes composées de gravier ou
cailloutis doivent, surtout dans les grandes pluies, se détériorer beaucoup
plus vite et plus facilement que les routes pavées. Qu’on fasse au moins cette
distinction, et s’il est vrai qu’il peut y avoir des inconvénients en ce qui
concerne les routes construites de la première manière, qu’on n’étende pas au
moins l’interdiction aux routes de la deuxième espèce, où la surcharge ne doit
pas faire craindre de dégradations ; car les routes les plus fréquentées par
les fortes charges sont construites en pavés de grandes dimensions et très
solides. Au dire de quelques honorables membres qui habitent certaines parties
de ces grandes routes où les voituriers se plaignent le plus, la surcharge n’a
nullement contribué à la détérioration de ces routes.
Je crois, messieurs, avoir répondu aux principales objections que je me
proposais de rencontrer.
Je me résume, en
disant : Pour faire disparaître toutes les plaintes, à commencer par celles du
Hainaut et du Brabant qui ne tarderont pas à surgir et qui, si vous n’y portez
remède, s’envenimeront tous les ans ; pour faire disparaître les plaintes
fondées, à mon avis, des voituriers sur toutes les routes construites avec de
gros pavés ; pour mettre un terme à la surcharge que vous faites peser
inutilement sur tous les consommateurs ; pour faire une économie dans l’intérêt
de tous les genres de consommateurs ; pour favoriser l’industrie et le commerce
; enfin pour diminuer la besogne du département de l’intérieur qui en a déjà
assez sans celle-là, je prie le gouvernement d’examiner, de méditer cette
question, s’il n’est pas plus utile à l’Etat, aux consommateurs, à l’industrie
et au commerce, de supprimer que de maintenir le droit de barrière ; je prie M.
le ministre d’y donner toute son attention ; quant à moi, j’ai la pleine
conviction qu’il serait plus utile de supprimer cet impôt.
(Moniteur belge n°36, du 5 février 1837)
M. le ministre de l'intérieur et des
affaires étrangères (M. de Theux). - Messieurs, je pense qu’il n’est
pas difficile de mettre d’accord M. le ministre des travaux publics et M.
Lebeau sur les clauses du cahier des charges. Il faut distinguer entre le
simple entretien et la fourniture de pavés neufs, ou le relevé de certaines
parties de route qui sont spécialement déterminées dans le cahier des charges
où l’on porte le nombre des pavés à fournir et le métré des parties de route
qui devront être relevées par les entrepreneurs. Peut-être reste-t-il encore
une autre différence pour les routes empierrées. Là il n’y a pas de pavés à
fournir ni à relever. Voilà de quelle manière les deux opinions se concilient
parfaitement.
Je ne reviendrai
pas sur les dispositions de l’arrêté qu’on a critiqué. Il était urgent ; mais
il n’est pas définitif, il peut recevoir telles modifications que l’expérience
permettra d’introduire. Je ferai seulement cette observation générale qu’il est
extrêmement essentiel, que les routes ne soient pas dégradées dès l’entrée de
l’hiver, parce que ces dégradations font sentir leurs effets pendant plusieurs
mois, jusqu’à la saison où les réparations peuvent être exécutées.
Remarquez que la
restriction apportée au gros roulage semble apporter quelque préjudice aux
rouliers ; il est évident que les dégradations qu’éprouvent les routes portent
préjudice à tous ceux qui doivent circuler sur ces routes, nuisent aux
transports de toute espèce à cause de la lenteur de la circulation, et
dégradent considérablement les voitures ; mais le gros roulage même ne souffre
pas moins des détériorations considérables qu’éprouvent les routes, puisqu’il
en résulte la nécessité d’augmenter le nombre des chevaux.
En principe, il
vaut mieux ne pas s’exposer à voir dégrader considérablement les routes, et
pour cela il vaut mieux accorder un peu moins de tolérance pour la charge.
Cependant l’arrêté indique assez qu’il est susceptible de modifications. C’est
ce qu’on fera pour la bonne saison où il y a moins de danger à permettre la
surcharge.
Chacun sait qu’à la
fin de la saison de l’année dernière, il y a eu des pluies continuelles, que la
gelée a été prématurée, et qu’il était tombé de la neige en abondance, qu’un
dégel prochain était à prévoir, et qu’il eût été suivi de dégradations
considérables sur les principales routes si on n’avait pris des mesures
nécessaires : cette mesure de conservation n’a pas été la seule, il a été
recommandé de prendre toutes les précautions nécessaires pour assurer en temps
opportun la fermeture des barrières. Aussitôt que la gelée s’est annoncée,
l’attention de MM. les gouverneurs a été appelée sur ce point.
L’honorable orateur
qui a parlé le dernier s’est prononcé contre le principe même du droit de
barrière. Si sa doctrine se présente d’abord sous un rapport spécieux, en y
réfléchissant davantage on voit cependant que cette théorie serait réellement
nuisible.
Par le droit de
barrière vous obtenez un excédant qui nous permet de créer des routes dans les
diverses localités qui en manquent. Remarquez que les routes nouvelles en
apportant la prospérité dans les localités qu’elles traversent, tournent aussi
à l’avantage des localités qui en sont le mieux pourvues, en ce que les
produits de l’industrie, qui sont plus abondants dans les localités le mieux
pourvues de route, sont plus facilement transportés dans toutes les parties du
royaume. Plus les communications augmentent, plus les localités riches en
profitent.
D’autre part, si on
supprimait le droit de barrière, vous n’auriez plus de demandes en concession
pour des constructions de routes. Cependant il est impossible que l’Etat se
charge de l’exécution de toutes les routes à ses frais. Il faut absolument
maintenir le droit de péage afin de vivifier le système des concessions. C’est
avec le concours des efforts de l’industrie privée qu’on doit espérer d’obtenir
un système de communication complet. Certainement, avec la loi de l’emprunt de
six millions,
On a signalé que dans certaines localités le système de droit de
barrière était onéreux, vu le peu de produits du droit et la dépense de la
perception. On ne peut pas s’arrêter à ces faits isolés, il faut considérer la
taxe des barrières dans son ensemble. On sent qu’il n’est pas nécessaire qu’un
même individu soit constamment préposé à la perception, c’est souvent quelqu’un
de sa famille qui se présente pour percevoir ; de sorte que la perception est
moins onéreuse qu’on ne le suppose : il n’y a pas lieu d’établir des calculs en
supposant des traitements d’agents spéciaux exclusivement employés à la
perception de la taxe ; la plupart du temps elle se fait sans une perte trop
notable de temps pour les percepteurs.
Je pense qu’il est
inutile de discuter davantage le principe du droit, la chambre ne se montrant
pas disposée à le supprimer.
(Moniteur belge n°36, du 5 février 1837)
M. Eloy de Burdinne. - J’ai demandé la parole pour réfuter quelques
honorables préopinants qui voudraient voir disparaître la taxe sur les routes.
Pour moi, je pense que l’impôt le plus justement réparti est celui qui se
perçoit sur les barrières. Un des honorable préopinants d’après les calculs
qu’il a faits, croit qu’on pourrait faire l’entretien des routes moyennant
trois centimes additionnels dont on frapperait l’impôt foncier.
M.
Frison. - Non ! non ! tous les impôts.
M. Eloy de Burdinne. - Ah ! ce serait trois centimes additionnels sur
tous les impôts. De cette manière le calcul est moins inexact que je ne pensais
; mais je dis encore que ce ne sera pas avec trois centimes additionnels que
vous parviendrez à faire face à l’entretien des routes ; il faudra au moins six
centimes pour faire une somme d’environ 14 à 15 cent mille francs.
Veuillez remarquer,
au reste, que l’impôt de barrière n’atteint pas seulement celui qui use les
routes, mais pèse principalement sur ceux qui les parcourent sans les dégrader.
C’est ainsi que l’étranger, voyageant en poste, paie un impôt à l’Etat sans
dégrader en aucune manière nos routes. Ainsi donc cet impôt est en grande
partie supporté par le luxe, et en cela, je ne m’oppose nullement à ce que le
luxe soit taxé.
Je conçois fort
bien que les localités qui sont dotées de bonnes communications trouvent très
convenable qu’on supprime le droit de barrière. Il n’en est pas de même pour
les localités qui en manquent. Si ces localités ont contribué à la construction
de routes et de canaux ailleurs, sans doute il est bien juste qu’aujourd’hui on
vienne leur rendre les avances qu’elles ont faites dans le temps pour créer des
communications ailleurs. Ces localités qui manquent de routes ne trouvent ni
injuste ni incommode le paiement des droits de barrière, elles demandent que le
gouvernement leur construise des routes à ce prix ; elles vont même plus loin,
elles offrent des subsides au gouvernement pour qu’il les dote de
communications.
Par ces motifs je
prierai le gouvernement de ne pas consentir à la suppression du droit de
barrière pour le remplacer par des centimes additionnels sur tous les autres
impôts,
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur. - Messieurs, comme l’honorable préopinant, je ne
pense pas qu’il soit bien convenable de supprimer le droit de barrière. Je ne
sais pas d’ailleurs si vous pourriez le faire. Vous avez concédé des
constructions de route à des administrations et à des sociétés avec le droit de
percevoir une taxe. Si vous supprimiez le droit de barrière sur les routes de
l’Etat, il en résulterait une grande disparate dans la législation, au profit
de certaines localités, tandis que certaines autres resteraient chargées du droit
sur les routes concédées avec cette charge.
Je ne pense pas
qu’il serait utile au pays que ce fût le trésor qui se chargeât de l’entretien
des routes. Voyez ce qui se passe où le droit de barrière n’existe pas. On vous
a cité
A présent je ne
saurais croire non plus, comme M. Gendebien, qu’il soit utile de supprimer
cette taxe.
Il est évident que
les routes multipliées dans un pays permettent d’établir un plus grand nombre
d’usines et de fabriques. Dès lors la concurrence qui résulte de cet état de
choses tourne évidemment à l’avantage du consommateur. La facilité d’amener les
produits au foyer de consommation, sans en augmenter considérablement la valeur
réelle, est avantageuse au consommateur, surtout lorsque ces produits ne sont
pas consommés d’une manière improductive, et deviennent eux-mêmes des matières
premières pour des fabrications nouvelles.
Je crois également
que l’excédant du produit des barrières doit être employé à la construction de
routes nouvelles. Je ne saurais partager l’opinion de M. Gendebien que ces routes
nouvelles ne sont pas utiles à la généralité. Les routes nouvelles favorisent
l’industrie, le commerce et l’agriculture, et par conséquent développent des
produits nouveaux et augmentent les sources de la richesse nationale.
Il est impossible
qu’il se développe sur un point quelconque des éléments de prospérité sans
rejaillir sur d’autres localités. Le bien-être se développe-t-il quelque part ?
Il se propage instantanément jusqu’aux dernières extrémités du royaume.
Je crois donc qu’il
est utile, nécessaire même, de maintenir le droit de barrière, et d’employer
l’excédant du droit de barrière à la construction de routes nouvelles, Ce n’est
pas lorsque le besoin de communications nouvelles se fait si vivement sentir,
lorsque toutes les administrations mettent tant de zèle à la construction de
routes nouvelles, que vous voudrez vous priver d’une pareille ressource.
Vous-mêmes avez reconnu l’utilité de routes nouvelles lorsque vous avez voté un
emprunt de 6 millions avec cette destination.
A cette occasion je
me permettrai de demander à M. le ministre des travaux publics ou à M. le
ministre de l’intérieur quelle destination il donne à cette somme. Si je ne me
trompe, il y a peu de chose de fait. Ce n’est pas pour que ces 6 millions
restent improductifs dans les caisses de l’Etat, ou qu’ils ne reçoivent pas la
destination que vous leur avez donnée, que vous avez voté cet emprunt.
Dans le district
que j’ai l’honneur de représenter, il y a une route dont la construction est
demandée avec instance ; c’est une route de Saint-Nicolas à Kildrecht.
Le gouvernement en avait décidé la construction avant 1830 ; elle a été
réclamée depuis 5 ans ; le conseil provincial de
Je ne sais pas si le gouvernement a fait quelque chose pour le Limbourg
et le Luxembourg. Ces provinces où, faute de communications, tant de richesses
restent enfouies et stériles. Mais je crois que rien ou bien peu de chose a été
fait.
Je demanderai aussi
à M. le ministre des travaux publics de s’expliquer sur une difficulté qui se
présente à chaque instant sur l’interprétation du droit de barrière à percevoir
aux différents poteaux.
D’après la loi de
mars 1833, le droit doit se percevoir au poteau même, et devient illégale
lorsque le droit est perçu à plus de
Jusqu’où le fermier
a-t-il le droit de percevoir le droit de barrière ? Si un embranchement aboutit
immédiatement après le poteau, le fermier doit-il percevoir également le droit
de barrière ?
M. Verdussen. - Quoique je pense que la
question de la suppression ou du maintien du droit de barrière appartient
plutôt à la discussion du budget des voies et moyens, je ne puis pas laisser
sans réponse les paroles prononcées par M. Gendebien et qui sembleraient tendre
à provoquer la suppression du droit de barrière. Si je ne me suis pas mépris
sur le sens des paroles de l’honorable préopinant, d’après lui l’impôt des
barrières pèserait principalement sur les provinces qui produisent la houille.
Eh bien ! c’est là une erreur capitale ; car tous les frais d’extraction de la
houille, y compris le droit de barrières, sont payés par le consommateur, rien
que par le consommateur.
Il y a deux espèces
de consommateurs : le consommateur de l’intérieur et le consommateur de
l’extérieur. Si le consommateur est étranger, c’est l’étranger qui paie à
Ce n’est que quand toutes les provinces du royaume seront aussi bien
partagées les unes que les autres, sous le rapport de leurs communications,
qu’il pourra être question de supprimer le droit de barrière. Mais il y aurait
erreur, il y aurait injustice à faire peser sur la totalité de la population
belge, par 3 centimes additionnels à tous les impôts, le droit actuel des
barrières ; car celui qui ne consommerait pas la houille en paierait les frais
de transport.
Si la houille
restait invendue, si la vente en était retardée, on pourrait admettre la
proposition de M. Gendebien.
Mais, loin de là ; car tous les jours on demande de nouvelles concessions.
Toute la houille est enlevée. Le prix augmente constamment, la houille produite
ne suffit pas à la consommation.
D’après ces
considérations, je crois que le ministère doit y regarder à deux fois avant de
proposer la suppression du droit des barrières, et que s’il la proposait, il
doit s’attendre à trouver dans cette assemblée des membres qui ne partagent pas
l’opinion de M. Gendebien.
M. Trentesaux. - Il n’y a pas
d’impôt contre lequel on ne puisse faire d’objection. Je crois que tous les
impôts sont mauvais, et l’impôt des barrières comme les autres. Cependant je
n’en demanderai pas la suppression, mais je crois qu’il serait possible d’y
apporter une modification ; ce serait dans ce sens : d’une part les chevaux de
selle et les voitures suspendues, de l’autre les voitures non suspendues. Je
voudrais d’une part la taxe existante pour les chevaux de selle et les voitures
suspendues, et j’établirais d’autre part une diminution de la quotité du droit
en faveur des voitures non suspendues.
Je ne fais point de
proposition formelle. Mais je demande que l’opinion que j’émets soit prise en
considération par le gouvernement et par les chambres pour les années à venir.
Vous comprenez quel motif me fait parler de la sorte. C’est en faveur du
roulage qui, en vérité, mérite une attention sérieuse.
M. Gendebien. - Le ministre vous a dit que ma
proposition était spécieuse, que le résultat en serait très nuisible pour le
complément nécessaire à donner à toutes les nouvelles routes.
Plusieurs autres
orateurs qui probablement n’ont pas prêté d’attention à mes paroles ont versé
dans la même erreur. Ils ont supposé que je voulais la suppression de toute
allocation pour l’entretien des routes et pour le complément nécessaire aux
nouvelles routes.
Or, messieurs, je
crois avoir clairement et nettement dit le contraire. J’ai dit qu’en percevant
trois centimes sur nos contributions on aurait suivant les calculs de M.
Frison, 2 millions 400 mille francs pour revenu des barrières. Et comme notre
budget des voies et moyens est de 84 millions, les trois centimes additionnels
produiraient 2 millions 520 mille francs, tandis que vous ne recevez, par le
droit de barrière, que 2 millions 250 mille francs ; ainsi, les 3 centimes
donneraient un avantage de 270 mille francs, et une recette faite sans frais
pour le trésor, sans surcharge pour les contribuables. Messieurs, j’ai dit tout
à l’heure que la manière de percevoir l’impôt des barrières entraînait une
dépense telle que l’impôt était plus que doublé ; et sans revenir sur tout ce
que j’ai dit pour le démontrer, je vous ferai remarquer de nouveau qu’à chaque
barrière il doit y avoir un percepteur, et qu’il y a même des barrières où il y
en a deux ; que dans les parties du royaume où le revenu des barrière est considérable,
les frais de perception sont supportables et ne sont pas en disproportion avec
les recettes ; mais que, dans l’immense majorité des parties pavées du pays,
les frais de perception ne sont en aucune façon en rapport avec la perception ;
de sorte que sur certaines routes et dans certaines saisons, le tenant de
barrière reçoit à peine de quoi solder le traitement que lui donne le fermier
des barrières.
Je disais d’une
autre part que vous faisiez supporter au contribuable la totalité du bénéfice que
le fermier des barrières doit faire nécessairement, bénéfice qui doit être
considérable pour le dédommager des pertes éventuelles et des chances
aléatoires de pareilles entreprises ; et l’on n’a pas répondu un seul mot à
toutes ces observations, qui sont la base de ma proposition qu’on s’est
contenté de qualifier de spécieuse.
M. Eloy de Burdinne
a dit que ceux qui avaient des routes suffisantes pouvaient désirer la
suppression du droit de barrière, mais que ceux qui n’ont pas assez de routes
dans leurs contrées n’étaient pas du même avis, qu’il fallait percevoir l’impôt
des barrières pour compléter le système des routes.
Eh bien, messieurs,
j’ai démontré qu’en supprimant le droit de barrière on avait 270 mille francs
de plus pour la confection de nouvelles routes tout en diminuant la charge des
contribuables de 100 p. c.
M. Verdussen a
versé dans la même erreur que M. le ministre de l'intérieur et M. Eloy de
Burdinne. Il a cru que j’avais dit que le droit de barrière restait tout entier
à la charge de la province du Hainaut, et qu’il en résultait une surcharge
inique ; il a été facile de broder une réponse sur cette thèse. J’ai dit que
tandis qu’on cherchait, par des primes à encourager toutes les industries, même
le trafic des denrées étrangères, on surchargeait l’industrie du Hainaut de
toute espèce d’entraves et de taxes.
J’ai dit que l’on
surchargeait le droit de barrière sur les routes utiles au commerce et à
l’industrie pour faire et entretenir des routes de luxe, pour des routes qui ne
sont d’aucune utilité pour l’industrie.
On a dit que c’est
toujours le consommateur qui paie l’impôt des barrières ; pour le prouver on a
ajouté qu’il y avait deux espèces de consommateur, le consommateur belge et le
consommateur étranger. Personne n’a jamais songé à contester cette vérité. La
question est de savoir s’il ne convient pas d’alléger de moitié l’impôt des
barrières qui pèse sur le contribuable belge et de diminuer les charges
inutiles qui pèsent sur nos marchandises qui se consomment à l’étranger.
Pourquoi ne pas
faciliter le débit de nos denrées ? Pourquoi ne pas faciliter le transit si
chaudement défendu dans d’autres occasions. M. Verdussen a bien voulu que les
marchandises en transit ne payassent rien sur le chemin de fer, c’est-à-dire
que le consommateur d’Allemagne et des pays voisins fussent allégés de tous
droits, non seulement de transit et de barrières, mais même de tous frais de
transport. Pour être conséquent avec vous-mêmes, pourquoi ne voulez-vous pas
traiter avec autant de faveur les marchandises du pays que les marchandises
étrangères ? Si en faveur du transit, vous voulez faciliter l’arrivée, au
meilleur marché possible, des marchandises exotiques et indigènes sur nos ports
et à nos frontières, faites en faveur des routes ce que vous avez voulu faire
pour le chemin de fer.
L’honorable M.
Trentesaux, tout en disant qu’il n’adopterait pas ma proposition, a soumis une
observation à la chambre ; eh bien, je dirai à M. Trentesaux qu’il se trompe
s’il espère trouver dans sa proposition une compensation pour le rejet de ma
proposition ; je l’avertis qu’il ne sera pas plus heureux que moi, attendu que
pendant deux années successives j’ai proposé la même chose. J’ai demandé que
l’on fît payer les voitures suspendues plus que les voitures non suspendues. J’ai
proposé un allégement pour l’industrie et pour compensation une légère
augmentation sur l’impôt à charge des transports de luxe.
J’ai soutenu cette
thèse à deux reprises différentes, et si je n’y suis pas revenu cette année,
c’est que je l’ai cru inutile, et n’ai pas voulu faire perdre du temps à la
chambre au sujet d’une demi-mesure que je n’avais proposée que subsidiairement.
Je me réserve de
développer ultérieurement, quand le temps en sera venu, tout ce qui concerne
les théories erronées que l’on a exposées, au lieu de me répondre.
Tout à l’heure,
j’avais dit que les observations du ministre des travaux publics se trouvaient
en contradiction avec celles de M. Lebeau, ou plutôt c’est ce qu’a dit M.
Lebeau après le ministre des travaux publics qui est inconciliable. J’ai
demandé des explications sur ce point. Le cahier des charges que m’a remis le
ministre des travaux publics prouve que c’est M. Lebeau qui s’est trompé.
D’après le cahier des charges, ce n’est pas l’entretien des routes en bon état,
ainsi que l’avait dit M. Lebeau, qui est passé en adjudication ; c’est la
fourniture des matériaux, et un certain travail divisé en catégories
d’entretien ordinaire, extraordinaire, et en travail à neuf, toujours en mètres
carrés.
Puisque je m’étais réservé de tirer argument de cette contradiction si
elle n’était pas expliquée, j’ai dû dire de quel côté était, selon moi,
l’erreur, afin qu’on pût me répliquer, si j’étais moi-même en erreur.
Mais ceci me
fournit une observation. On m’a assuré que pour les routes qui sont beaucoup
fréquentées et très fatiguées par la circulation de matières pondéreuses, on
mettait en adjudication trop peu de travaux et trop peu de matériaux ; tandis
que pour d’autres routes, moins fatiguées par la circulation, on mettait en
adjudication des travaux et des matériaux trop considérables ; de sorte que là
la répartition est insuffisante, et ici elle est trop abondante : je demanderai
des explications sur ce fait à M. le ministre des travaux publics, n’ayant pu
vérifier moi-même ces renseignements.
(Moniteur belge n°36, du 5
février 1837) M. le ministre de
l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Je répondrai à
l’honorable préopinant que déjà l’attention de l’administration supérieure a
été appelée sur l’égalité proportionnelle relativement à l’entretien des routes
du royaume ; et c’est pour ce motif que les cahiers des charges dressés par les
ingénieurs des ponts et chaussées des provinces passent au conseil central des
ponts et chaussées.
Répondant à
l’interpellation du rapporteur de la section centrale, je dirai que plusieurs
routes dont les projets étaient complètement préparés ont été autorisées par
arrêté du Roi ; plusieurs autres projets de route sont en état de recevoir
prochainement une décision finale ; de telle manière que l’on a été loin de
rester dans le repos au sujet de l’exécution de la loi relative à l’emprunt de
six millions, Cependant cette exécution sera plus complète dans le courant de
l’année, surtout de la prochaine, lorsque les provinces auront eu le temps de
prêter leur concours pour les routes réclamées dans les diverses localités.
(Moniteur
belge n°35, du 4 février 1837) M. Verdussen.
- Je demande la parole pour un fait personnel. M. Gendebien s’est trompé quand
il m’a fait dire que je ne voulais pas de péage sur les routes de fer pour les
marchandises étrangères ; je n’ai rien dit de semblable.
M. Gendebien. - Je n’ai entendu en aucune façon
faire de cette discussion une question de personnes ; M. Verdussen peut en être
convaincu. Mais si ce n’est pas lui qui a émis l’opinion que j’ai rappelée, ce
sont au moins plusieurs des députés d’Anvers.
M.
Rogier. - Cela n’est pas exact.
M. Gendebien. -
Cette théorie a été développée. Il serait facile de le prouver et je me réserve
d’en administrer les preuves par les passages des nombreux discours qui ont été
prononcés lors de la discussion de la loi du chemin de fer. Je me souviens très
bien de l’avoir réfutée en disant que si vous vouliez accorder cette faveur aux
marchandises étrangères, il fallait commencer par l’accorder aux marchandises
du pays.
M. A. Rodenbach. - On m’a dit qu’aujourd’hui,
dans la confection ou la réparation des routes on employait moins de pavés
qu’autrefois ; qu’ainsi, il y avait des intervalles entre les pavés ; que dans
ces intervalles où l’on doit mettre du sable, on ne mettrait que de la terre
jaune, qui se réduit en boue, et qui rend les routes impraticables. Un député
des environs de Menin a vu sur des routes plusieurs chariots de pavés qui
n’avaient pas été employés, parce qu’on écarte les uns des autres ceux que l’on
met place ; ce vice de constructions occasionne des dégâts, des détériorations
(La clôture ! là clôture !)
M. Eloy de
Burdinne. - Je demande aussi la
parole pour un fait personnel. (Bruit.)
J’ai été nommé, je dois répondre.
J’aurais désiré
faire une seule observation. (Aux voix !
aux voix !)
- La clôture est
mise aux voix et prononcée.
M.
le président. - La commission qui a présenté son, rapport sur la
requête des habitants de Jumet, a conclu au renvoi de cette requête à M. le
ministre des travaux publics avec demande d’explications. Je vais consulter
l’assemblée à cet égard.
- Les conclusions
de la commission sont adoptées.
Discussion des articles
Article premier et article
additionnel
M.
le président. - La discussion est ouverte sur l’art. 1er de la loi
relative aux barrières ; il est ainsi conçu
« Art. 1er. La taxe
des barrières continuera d’être perçue, à partir du 1er avril 1837, à minuit,
conformément aux lois du 18 mars 1835 (Bulletin
officiel, n°262, 263 et 264) et à la loi du 12 mars 1834 (Bulletin officiel, n°205).
M. Pollénus. - Messieurs, la marche suivie pour
la répression des délits de barrière présente plusieurs inconvénients qui
résultent en partie de ce que les amendes mobiles sont établies sur une trop
large échelle et les amendes fixes un peu trop élevées, d’où il arrive que très
souvent des contraventions d’une importance très minime sont portées devant les
tribunaux correctionnels, ce qui entraîne des frais très considérables : il y
aurait moyen de remédier à cet inconvénient en abaissant le maximum des amendes
mobiles et le taux des amendes fixes, et en déférant alors les délits de
barrières aux tribunaux de simple police, comme, dans plusieurs circonstances
et notamment lors de la discussion du budget de la justice, on a reconnu qu’il
conviendrait de le faire. Tout le monde connaît en effet l’encombrement
d’affaires qu’il y a dans quelques tribunaux de première instance, comme tout
le monde convient aussi que les attributions des tribunaux de simple police
sont beaucoup trop restreintes.
C’est en partant de
ces considérations, messieurs, que nous avons formulé, mon honorable collègue
M. Bernard Dubus et moi, un amendement ou disposition additionnelle ainsi
conçue :
« Les
contraventions aux art. 3, 7, 9, 10, 11 et 13 de la loi du 18 mars 1833
(Bulletin, n°283), seront poursuivies et jugées comme contraventions de simple
police, sans préjudice à l’application du code pénal s’il y a lieu.
« Les
procès-verbaux seront transmis au fonctionnaire chargé du ministère public près
le tribunal de simple police. »
J’ai un mot à dire
pour justifier la dernière disposition : La loi de 1833 prescrit que les
procès-verbaux, quelque minime que soit l’amende, doivent toujours être
transmis aux tribunaux de première instance ; du moment que la chambre aurait
reconnu qu’il y a lieu de déférer les contraventions de barrière aux tribunaux
de simple police, il serait tout simple de leur faire transmettre aussi les
procès-verbaux qui constatent ces contraventions : la dernière disposition est
donc la conséquence de la première.
- L’article premier
est mis aux voix et adopté.
M. le président. - « Art. 2. Le
droit de barrière ne sera perçu qu’aux endroits déterminés par le tableau joint
à la présente loi, qui sera exécutoire le jour de sa promulgation et qui
cessera ses effets le premier avril 1838 à minuit. »
M. Pollénus. - La disposition que j’ai présentée
trouverait sa place après l’article premier.
M. le président. - La proposition de M.
Pollénus est-elle appuyée ?
- La proposition
est appuyée.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- L’amendement consacrerait une innovation très importante, et une telle
disposition ne peut pas s’improviser ; je crois qu’il y aurait lieu à ajourner
cet amendement pour laisser au gouvernement le temps de voir jusqu’à quel point
les inconvénients qui ont été signalés par son auteur se sont reproduits ; si
la disposition présente réellement des avantages, le gouvernement s’empressera
d’en faire l’objet d’une addition à la loi, lorsqu’il la soumettra de nouveau
l’année prochaine à vos délibérations ; je crois qu’il n’y a pas péril en la
demeure et qu’on peut très bien adopter l’ajournement.
M. Dubus (aîné). - Je ne pense pas, messieurs,
qu’il y ait des avantages à ajourner la proposition ; je crois, au contraire,
qu’il y en a à l’admettre dès à présent ; car si la chambre l’adoptait
aujourd’hui, elle pourrait toujours y revenir au second vote, et d’ici là on
aurait le temps de l’examiner aussi mûrement qu’on le désirerait, tandis que si
on l’écartait, on ne pourrait plus la reprendre, à moins d’en faire l’objet
d’une loi spéciale. Je ne comprends pas d’ailleurs quel inconvénient il
pourrait y avoir à adopter la proposition ; j’ai sous les yeux les art. 12 et
13 de la loi du 18 mars 1833 dont le premier est ainsi conçu :
« Toute
contravention aux articles 5, 7, 9, 10 et 11 sera punie d’une amende
équivalente à 30 fois le droit exigible, sans préjudice du paiement du
droit. »
Eh bien, messieurs,
le droit ne dépasse ordinairement pas 30 centimes ; ce n’est que dans des cas
très rares qu’il peut s’élever jusqu’à 30 centimes, et alors même le chiffre
total de l’amende ne surpasse pas 15 fr. ; ces sortes de contraventions sont
donc réellement du ressort des tribunaux de simple police ; cependant, d’après
l’art. 11, c’est aux tribunaux ordinaires et aux procureurs du Roi près de ces
tribunaux que doivent être renvoyés les procès-verbaux constatant des
contraventions en matière de droit de barrière.
Voici ce que dit
l’art. 13 :
« Toute
violence qui aurait pour objet d’empêcher la perception du droit sera punie
d’une amende de deux à vingt francs, sans préjudice de l’application du code
pénal, s’il y a lieu. »
Vous savez qu’on
applique très rarement le maximum de l’amende : ainsi, dans l’échelle de 2 à 20
fr. sauf peut-être un exemple sur cent, on demeure toujours au-dessous de 16
fr., et par conséquent il n’y aurait encore aucun inconvénient à déférer aux
tribunaux de simple police les faits prévus par l’article 14.
L’obligation de
porter les contestations relatives aux droits de barrière devant les tribunaux
correctionnels occasionne des déplacements et des frais sans nombre aux
contrevenants, au point que la somme qu’ils paieraient, étant jugés par les
tribunaux de simple police, se trouve quelquefois triplée, même décuplée, par
suite de l’intervention des tribunaux correctionnels.
La mesure qui vous est proposée aujourd’hui est la même que celle qui a
déjà été adoptée par la chambre dans la loi communale lorsqu’elle a décidé que
toutes les contraventions aux règlements communaux seront de la compétence des
tribunaux de simple police ; M. Pollénus a choisi précisément les mêmes termes
dont la chambre s’est servie dans la loi communale ; on n’a pas trouvé alors
que la mesure présentait des inconvénients ;
on a jugé, au contraire, qu’elle offrait des avantages : si cela est
vrai pour les contraventions aux règlements communaux, parce que les peines
comminées contre ces contraventions sont généralement minimes, il doit en être
de même et à plus forte raison pour les contraventions à la loi des barrières
où les peines sont plus minimes encore.
J’appuie donc de
tout mon pouvoir la proposition de M. Pollénus, en faisant d’ailleurs remarquer
à la chambre que s’il y avait lieu de regretter de l’avoir adoptée, on pourrait
toujours la rejeter au second vote.
M. d'Hoffschmidt. - M. le ministre des
travaux publics vous propose, messieurs, d’ajourner la proposition, parce que,
dit-il, il doit pouvoir l’examiner à loisir ; il a ajouté, je pense, que d’ici
à l’année prochaine le ministre examinerait la question, pour en faire lui-même
l’objet d’une proposition. Si l’ajournement proposé par M. le ministre des
travaux publics était admis par la chambre, j’appellerais l’attention du
gouvernement sur un autre système : ce serait de faire juger les délits de
barrière par les députations provinciales ; je crois que ce système serait
préférable à celui de M. Pollénus, en ce que les procès-verbaux dressés pour
défaut de paiement du droit de barrières sont toujours d’une minime importance,
d’où il résulte que les particuliers, pour ne pas plaider, doivent s’y résigner
même quand ils ne sont pas coupables ; car on ne plaide pas pour échapper à une
légère surtaxe. En effet, dans de semblables procès, celui qui gagne perd
encore beaucoup.
Je crois que si le jugement de ces sortes de matières était déféré aux
députations provinciales il en résulterait des avantages, non seulement pour
les particuliers, mais aussi pour le gouvernement qui doit aujourd’hui faire
beaucoup de frais pour soutenir des procès de peu d’importance.
La constitution ne
s’oppose nullement au système que je mets en avant, car l’art. 92 ne parle que
des contestations relatives aux droits civils, qui doivent être déférées aux
tribunaux, et je pense qu’en matière d’impôt, cet article n’est nullement
applicable ; c’est dans ce sens qu’on l’a expliqué dans une précédente séance
et dans plusieurs autres occasions.
Si donc
l’ajournement proposé par le ministre des travaux publics est prononcé par la
chambre, j’appellerai l’attention du ministre des travaux publics sur la
question de savoir s’il ne conviendrait pas de déférer aux députations
provinciales, le jugement sur les délits relatifs aux droits de barrière.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Je conviens qu’au premier abord la proposition qu’on vient de soumettre à
l’assemblée paraît très acceptable ; mais, d’un autre côté, ma responsabilité
personnelle ne me permet pas d’y adhérer, sans en connaître toute la portée.
Je ne pense pas que
d’ici au second vote je sois en position de me procurer assez de renseignements
pour que je puisse déclarer que l’innovation ne présente aucun genre
d’inconvénient.
Et voyez, messieurs,
dans quelle position je puis me trouver.
Je ne pourrais me
dispenser de proposer au Roi de sanctionner la loi, alors même que l’amendement
aurait été adopté, et que je n’aurais pas eu tous mes apaisements ; si par
l’adoption de cette proposition additionnelle, je ne croyais pas devoir
soumettre la loi à la sanction royale, je me trouverais sans loi sur les
barrières.
Je prie donc la
chambre d’avoir égard à l’alternative où je serais placé, relativement à la
sanction de la loi en discussion.
M. Pollénus. - Messieurs, je pense que le temps
qui s’écoulera d’ici au second vote de la loi en discussion suffit, pour que
chacun de nous puisse méditer et saisir avec certitude la portée de
l’amendement que j’ai eu l’honneur de proposer.
Je ferai observer
que l’idée de cet amendement n’est pas bien neuve ; je rappellerai que j’ai
déjà annoncé l’année dernière que je formulerais pour 1837 une disposition
semblable à celle que je viens de soumettre. Si l’on n’a pas perdu de vue les observations
énoncées dans le rapport de la section centrale du budget de la justice, on se
souviendra que déjà cette section centrale a reconnu qu’il y avait un grand
nombre d’affaires de nature à devoir être attribuées aux juges de simple
police, en les contraventions, en ce qui concerne l’impôt des barrières.
Je dis donc que
l’idée de mon amendement n’a rien qui doive effrayer, et déjà l’honorable M.
Dubus est entré dans des développements pour faire comprendre toutes les
conséquences de cet amendement, qui consisteront à simplifier la marche de la
justice et à diminuer les frais qu’entraînent les contraventions de l’espèce.
M. d’Hoffschmidt a
mis en avant une autre idée ; cet honorable membre pense qu’il serait plus
convenable d’attribuer les contestations de cette nature aux députations des
états qu’au pouvoir judiciaire.
J’ai déjà fait
connaître à la chambre que le principal motif qui avait dicté mon amendement
était le désir de simplifier les poursuites qui ont lieu de ce chef, de
prévenir de grands embarras et d’éviter des frais aux contrevenants.
Si maintenant la
chambre croyait devoir attribuer la connaissance de ces sortes d’affaires aux
députations des états, les inconvénients auxquels nous cherchons à porter
remède seraient bien plus grands ; les distances à parcourir par les
contrevenants deviendraient bien plus étendues, et au lieu de trouver un juge
dans chaque arrondissement, ils n’en trouveraient qu’un seul dans toute la
province.
Voilà un premier
inconvénient. En voici un autre c’est que les formes de l’administration se
prêtent difficilement au contentieux.
Lorsqu’il y aura
des contradictions sur quelques faits (car ces faits peuvent varier, et même
varier beaucoup), de quelle manière reconnaîtra-t-on ces faits ? Entendra-t-on
des témoins ? Il faudra aussi établir des formes de procédure à suivre devant
les députations des états.
Dois-je rappeler
ici que M. le ministre des finances avait proposé un nouvel ordre de choses
pour la perception de la sixième base de la contribution personnelle ? Eh bien,
la chambre a vu alors quels embarras seraient résultés du nouveau système qu’on
voulait introduire en ces sortes de matière, en attribuant à l’autorité
administrative ce qui jusqu’ici a été du ressort du pouvoir judiciaire.
Or, tous ces embarras existeraient dans l’application de l’idée qui a
été mise en avant par l’honorable M. d’Hoffschmidt ; idée qui me paraît
présenter plus d’inconvénients que d’avantages ; et en ce sens elle serait
opposée à mon amendement. Car quel est le but de la disposition que j’ai
présentée ? C’est d’avoir une décision sans frais, une décision qui n’entraîne
par de longueur.
Ce qui prouve
d’ailleurs que dans notre pays on reconnaît l’avantage de saisir de ces sortes
d’affaires les tribunaux plutôt que les autorités administratives, c’est
qu’autrefois la connaissance de ces affaires était attribuée au pouvoir
administratif, soit aux conseils de préfecture, soit aux commissaires de
district ; mais on a bientôt reconnu les inconvénients de ce système, et l’on
est revenu à celui qui est en vigueur aujourd’hui.
Je finirai par une
dernière considération : c’est que des délits plus ou moins connexes
accompagnent souvent les contraventions. Je suppose, par exemple, qu’une légère
injure accompagne le défaut de rétribution du droit de barrière. Quelle
autorité jugerait en ce cas ? Serait-ce l’administration ? Mais elle n’est pas
compétente pour juger un fait qui, par sa nature, rentre dans la catégorie des
délits ordinaires.
Il y aurait donc
inconvénient et inconvénient incontestable, dès qu’on reconnaît qu’en matière
d’administration il n’existe pas des formes garantissantes
pour guider le contentieux.
M. Pirson. - Je voulais répondre à
l’honorable M. d’Hoffschmidt ; M. Pollénus me semble avoir réfuté les observations
de cet honorable membre ; que la chambre me permette cependant de dire quelques
mots.
J’appuie de toutes
mes forces l’amendement de M. Pollénus et je consens bien volontiers à assumer
la responsabilité de mon vote à cet égard.
La chose me paraît
si claire, si simple que je ne vois pas que l’amendement puisse exiger une
longue discussion pour qu’on en sente tous les avantages.
Je ne puis donner
mon assentiment à la proposition de M. d’Hoffschmidt, parce que nous avons
supprimé le contentieux administratif qui exigeait un conseil d’Etat, et, pour
ma part, je ne veux pas rétablir ce contentieux administratif.
M. d'Hoffschmidt. - Messieurs, je n’ai pas
proposé d’amendement. Si j’ai mis en avant l’idée d’un nouveau système, ce
n’était que pour le cas où l’ajournement de la proposition de M. Pollénus
serait prononcé, car alors M. le ministre des travaux publics aurait le temps
de méditer les observations que j’ai eu l’honneur de soumettre à l’assemblée.
Je répondrai cependant
quelques mots à l’honorable M. Pollénus.
Cet honorable
membre prétend qu’il n’y a pas de formes de procédure prescrites pour les
députations des états, en ce qui concerne les jugements de l’espèce. Mais,
messieurs, la députation jugera en ces sortes de matières, comme elle juge pour
toutes les autres, c’est-à-dire sur le vu des pièces qui lui seront produites.
Cette marche, me
semble-il, ne doit pas entraîner d’inconvénients.
Je rappellerai
d’ailleurs que l’application de ce système a été réclamée par des pétitions
adressées à la chambre. L’année dernière, j’ai eu l’honneur d’être rapporteur
de la loi sur les barrières ; j’ai eu alors sous les yeux cinq ou six pétitions
qui demandaient que les contestations de l’espèce fussent déférées à la
députation des états ; il y en avait une, entre autre, de la province de Namur
qui signalait les inconvénients résultant de ce que les tribunaux étaient
appelés à juger, en matière d’impôt de barrières.
Qui ne sait en effet que ces inconvénients se font sentir tous les jours
? Il n’est pas rare, par exemple, de voir un voiturier condamné à payer
indûment un accroissement de droit de barrière, parce qu’un cantonnier a fait
un procès-verbal à sa charge. Et pourquoi le plus souvent dresse-t-il ce
procès-verbal ? Parce que le voiturier ne s’est pas arrêté à son cabaret, et
parce qu’il sait bien que ce voiturier ne manquera pas de payer un franc ou 50
centimes pour éviter un procès avec le gouvernement.
Or, si ces délits
de cette nature étaient déférés à la députation des états, les plaidoiries sa
feraient sans frais, et les injustices que je viens de signaler ne se
répéteraient plus.
Le système présenté
par M. Pollénus vaut mieux que celui qui existe ; car l’application de ce
système entraînerait toujours moins de frais ; ce ne serait que pour arriver
plus sûrement au but que veut atteindre l’honorable membre que je voudrais
déférer la connaissance des faits relatifs au prélèvement de l’impôt barrière
aux députations : en effet, le recours aux députations se fera toujours sans
frais, tandis que le recours aux tribunaux de simple police entraînera souvent
une dépense plus ou moins forte.
Je le répète, mon
intention n’est pas de présenter un amendement en ce moment. Je demande
seulement que le gouvernement, dans le cas où l’amendement de M. Pollénus
serait ajourné, envisage ma proposition, comme celle de l’honorable membre ; et
qu’il examine s’il n’y aurait pas moyen de l’introduire dans la loi pour
l’année prochaine.
M. Dubus. - Messieurs, j’ai un mot à dire sur
les observations de l’honorable préopinant relativement à l’extension de la
compétence des députations des conseils provinciaux.
Dans mon opinion,
messieurs, cette extension n’est pas désirable et ne peut pas avoir lieu.
L’honorable
préopinant a parlé de la compétence des députations des conseils provinciaux en
matière d’impôt. Je ferai remarquer qu’ici la question n’est pas de savoir si
le contribuable doit ou ne doit pas l’impôt ; mais la question, est de savoir
s’il a, ou non, commis une contravention ; nous ne sommes pas proprement en
matière d’impôt, mais bien en matière pénale. L’on ne sera pas plus fondé à
déférer aux députations des états les contraventions en matière d’impôt des
barrières, qu’on ne le serait à attribuer aux mêmes corps les contraventions à
toute autre loi fiscale.
Même en matière
d’impôt, alors que les députations des états seraient compétentes pour
prononcer sur la cotisation d’un contribuable, elles ne le seraient plus pour
prononcer sur la contravention qu’on soutiendrait avoir été commise par ce
contribuable à la loi.
Les contraventions,
messieurs, doivent être renvoyées aux différents degrés des tribunaux.
Je ferai remarquer,
à cette occasion, que le gouvernement français avait établi la compétence des
conseils de préfecture pour les contraventions à la police de roulage, et pour
celles au règlement de la grande voirie ; et qu’il a été jugé sous l’empire de
la loi fondamentale de 1815 que ces contraventions appartenaient désormais à la
compétence des tribunaux ordinaires. En vertu de la jurisprudence de la cour de
cassation, les députations des états ont dû se dessaisir de toutes ces affaires
qui ont été renvoyées aux tribunaux.
Quant à la proposition en elle-même, j’ajouterai une considération à
celles qui ont été déjà présentées pour la développer : c’est que dans la
plupart des cas, ce sont les tribunaux de police qui sont compétents. Je vous
ai dit qu’il était rare que le droit excédât 50 centimes. En effet, pour un
chariot à quatre roues, attelé de quatre chevaux, le droit n’est que de 50
centimes ; eh bien, alors l’amende, qui est 30 fois le droit, n’est encore que
de 15 fr. Vous pouvez considérer comme certain que presque tous les cas seront
dans ces limités. L’art. 12 de la loi du 18 mars 1833 fixe l’amende en cas de
contravention, et l’art. 14 dit, il est vrai, que le procès-verbal constatant
la contravention sera transmis au procureur du Roi, près le tribunal de
première instance, mais pour que l’affaire soit portée devant le juge
compétent, c’est-à-dire devant le tribunal de simple police, si l’affaire est
de la compétence de ce tribunal.
S’il arrive
fréquemment qu’on saisisse les tribunaux ordinaires, c’est qu’on ne fait pas le
calcul par lequel on pourrait voir que le résultat de l’amende ne peut pas
excéder 15 fr. D’après les règles de la compétence, dans la plupart des cas, ce
sont les tribunaux de police qu’on doit saisir. Y aurait-il alors des
inconvénients à décider qu’ils connaîtront de tous les cas
L’art. 13 établit
pour l’amende une échelle de 2 à 20 fr. Le vice est dans cette échelle dont le
maximum se trouve trop élevé de quelques francs ; il n’y a pas de doute
cependant que pour les cas prévus par cet article, on renverra au tribunal de
simple police.
M. d'Hoffschmidt. - Ce qu’a dit l’honorable
préopinant serait juste s’il n’avait pas confondu deux lois différentes, l’une
qui est relative à l’impôt des barrières et l’autre qui concerne la police du
roulage. Ce sont les cas prévus par cette dernière qui sont de la compétence
des tribunaux. Mais ici il ne s’agit que de la loi sur l’impôt des barrières et
les cas qu’elle prévient peuvent constitutionnellement être déférés à la
députation des états, puisqu’il s’agit d’un impôt. Je pense que l’honorable
préopinant s’est trompé quand il a pensé que mon amendement ne pouvait pas être
inséré dans la loi des barrières. Tout ce qu’a dit à ce propos l’honorable
membre, ainsi que ce que m’a répondu M. Pollénus, se rattache à la police du roulage
dont il n’est pas question et non à la loi sur l’impôt des barrières que nous
discutons.
- L’ajournement
proposé est mis aux voix Il est rejeté.
La proposition de
M. Pollénus est mise aux voix et adoptée. Elle fera l’objet de l’art. 2 de la
loi en discussion.
Article
2 (devenu article 3)
« Art. 2 (du
projet devenant l’art. 3). Le droit de barrière ne sera perçu qu’aux endroits
déterminés par le tableau joint à la présente loi qui sera exécutoire le jour
de sa promulgation et qui cessera ses effets le 1er avril 1838 à minuit. »
M.
Lebeau. - Messieurs, nous consacrons tous les ans au moins une séance,
quelquefois plusieurs jours de discussion spéciale sur le droit de barrière. Je
conçois qu’avant que la législation sur les barrières eût subi une révision, on
lui ait conservé un caractère temporaire ; mais aujourd’hui je demanderai au
ministère s’il verrait de l’inconvénient à retrancher de l’article la
disposition suivante, qui rend la loi actuelle purement temporaire : « Et
qui cessera ses effets le 1er avril 1838 à minuit. »
Je demanderai si on
ne pourrait pas faire rentrer la loi des barrières dans le droit commun, dans
la règle de toutes les lois d’impôt qui sont exécutoires jusqu’à révision, et
qui cependant n’en sont pas moins annales, en ce sens que chaque fois que vous
votez le budget des voies et moyens, vous avez le droit de faire subir aux
dispositions législatives en matière d’impôt telles modifications que vous
jugez convenables.
J’ai remarqué
quelque chose d’assez bizarre, dans cette discussion, c’est que nous avons
remis en question le droit de barrière, alors que dans la discussion du budget
des voies et moyens, vous avez maintenu l’impôt pour 1837, et que vous en aviez
fait figurer le produit dans les revenus de l’Etat pour l’année. On peut dire
que la question était décidée, et que ce que nous faisons ici est un véritable
double emploi.
Ce que vous faites pour l’impôt de barrière, vous ne le faites pour
aucun des autres impôts qui ont avec celui-là le plus d’analogie : les péages
sur les canaux, par exemple, ne sont pas soumis à une révision spéciale chaque
année. Je pense qu’on économiserait les moments de la chambre, tout en laissant
à chaque membre la faculté de proposer chaque année à cette loi les modifications
qu’il jugerait nécessaires, si on donnait à la loi sur les barrières le
caractère qu’on donne à toutes les lois fiscales.
Si la loi des
barrières avait ce caractère, et il n’est pas une des observations qui ont été
présentées aujourd’hui, qui ne pût être émise avec la même efficacité, avec les
mêmes développements, lors de la discussion des voies et moyens. Il y aurait
ceci de bizarre du moins qu’aujourd’hui vous n’auriez pu sans inconséquence,
sans exposer l’administration à un déficit considérable, vous prononcer contre
l’existence du droit de barrière, car vous avez inséré le produit à concurrence
de 2 millions parmi les ressources de l’Etat.
J’appelle donc
l’attention du gouvernement sur cette question. Je n’en ferais pas l’objet d’un
amendement, si cela rencontrait une trop vive opposition, parce que j’ai cœur de ne pas prolonger cette discussion qui
a déjà dépassé ses limites naturelles, mais si elle ne devait pas rencontrer
trop d’opposition, je déposerais une proposition. Je demande que le gouvernement
veuille bien s’expliquer.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Si un amendement était déposé, je ne m’opposerais pas à son adoption.
M.
Lebeau. - Dans ce cas, je propose de supprimer de l’article 2 ces mots
: « et qui cessera ses effets le 1er avril 1838 à minuit. »
De cette manière,
la loi de barrières rentrera dans le droit commun de toutes les lois fiscales.
Elle ne cesse pas pour cela d’être temporaire ; par cela seul qu’elle est
fiscale, elle est nécessairement annale.
M. Gendebien. - Je ne pense pas
qu’après la discussion assez longue qui vient d’avoir lieu, une discussion nouvelle
puisse s’établir sur la question de savoir si on rendra définitive une loi qui,
par sa nature, est essentiellement temporaire. L’honorable préopinant vient de
le reconnaître lui-même. Laissons donc les choses comme elles sont, et que
l’année prochaine, le ministère, s’il le juge à propos, nous fasse une
proposition formelle dans le sens de celle du préopinant ; on pourra la
discuter dans les sections et la voter en connaissance de cause. On ne peut pas
décider une question semblable à l’improviste sur un amendement jeté à la fin
d’une discussion. Je pense qu’il y a lieu d’ajourner la question à l’année
prochaine.
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur. - Je conçois l’avantage qu’il y aurait à déclarer
la loi définitive. Le trésor aurait un véritable intérêt, en ce que les
barrières pouvant être adjugées pour plusieurs années, le seraient à un prix
plus élevé.
Plusieurs voix. - Non ! non ! c’est impossible.
M. Van Hoobrouck de Fiennes, rapporteur. - Mais je crois que le caractère de la loi sur
les barrières ne permet pas de rendre cette loi définitive. Cette proposition a
déjà été faite il y a trois on quatre ans et on a reconnu qu’il y aurait des
inconvénients à l’adopter à cause des nombreuses plaintes que soulevait cette
loi. Les défectuosités qu’elle contient n’ont pas permis de la rendre
définitive.
J’avais demandé la
parole pour répéter l’interpellation que j’avais adressée au ministre et à
laquelle il n’a pas répondu.
L’art. 2 porte :
« Le droit de barrière ne sera perçu qu’aux endroits déterminés par le
tableau joint à la présente loi qui sera exécutoire, etc. »
D’après cet
article, le droit de barrière ne pourrait être perçu qu’en dedans de la
tolérance déterminée par la loi. Mais cette tolérance est assez élastique, elle
a quelquefois plus de deux mille mètres. Il paraîtrait que l’administration a
toute latitude pour placer le poteau de barrière. D’après l’art. 2, la
perception ne peut avoir lieu qu’au poteau, et d’après la loi le poteau doit
être éclairé depuis le coucher jusqu’au lever du soleil, et l’article 3 porte
qu’aucune perception ne peut avoir lieu à plus de
Il me semble qu’une
demi-lieue de tolérance est suffisante et qu’elle doit s’arrêter là. Quand vous
aurez accordé une demi-lieue, accorderez-vous encore les vingt mètres pour la
perception au-delà du poteau ? Je désire que le ministre s’explique.
Tous les ans des
variations sont introduites dans le tableau qui accompagne la loi. Cette année
on a été fidèle aux précédents. J’ai demandé à cet égard des explications au
ministère. On m’a répondu que cette interprétation était toujours donnée en
faveur de l’extension de la tolérance pour augmenter le produit des barrières.
Je suis loin de déverser du blâme sur l’homme si capable qui dirige la
division des travaux publics au ministère qui porte ce nom. Ses intentions sont
bonnes, il a été préoccupé des intérêts du trésor ; mais il ne faut pas avoir
en vue seulement les intérêts du trésor ; il faut aussi songer aux intérêts des
contribuables. Il ne faut pas rendre les lois impopulaires ; or, c’est le
rendre impopulaires que prendre des mesures qui soulèvent tant de réclamations.
Si je ne me trompe, il y a des centaines de réclamations au ministère des
travaux publics.
Je ne m’élève pas
contre les barrières établies à proximité des villes. Cela peut être considéré
comme un impôt de luxe à l’égard des habitants qui se promènent en dehors des
portes. Mais ce qui n’est pas un impôt de luxe, c’est le droit de barrières
dont est frappé le cultivateur qui apporte des denrées à la ville, droit qui
est perçu pour un usage restreint de la route.
En tout cas il
m’est impossible de proposer des changements au tableau, Il faudrait pour cela
avoir des connaissances topographiques que je n’ai pas.
Mais je proposerai
un changement dans la tolérance de la barrière de Beveren près d’Audenaerde sur
la route de Courtray, et de porter cette tolérance de
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- La distance en principe d’une barrière à l’autre est de
C’est ainsi que le
changement dont on vient de parler et qui concerne la ville d’Audenaerde, a été
fait sur l’avis des ingénieurs et sur le rapport du gouverneur.
J’ai sous les yeux
le rapport, en date du 24 octobre dernier, et je crois que le changement dont
il s’agit peut même être avantageux aux habitants d’Audenaerde ; car le poteau
pourra être placé à une distance plus étendue de la ville ; les habitants
pourront peut-être circuler dans un circuit plus considérable sans rencontrer
de barrière.
Maintenant on vous
a parlé de cette tolérance comme si elle était extrêmement étendue, comme si
elle excédait même la distance légale des barrières entre elles. J’ai sous les
yeux un relevé des tolérances les plus considérables. Les tolérances de 1,500 à
Province d’Anvers,
0
Province du
Brabant, 0
Province de Flandre
occidentale, 4
Province de Flandre
orientale, 3
Province de
Hainaut, 1
Province de Liége,
0
Province de
Limbourg, 8
Province de
Luxembourg, 4
Province de Namur,
0
C’est dans les deux
provinces du Limbourg et du Luxembourg que l’on trouve le plus de tolérances
étendues ; la raison en est simple, c’est qu’il est difficile de trouver les
habitations où doivent être placés les poteaux. Par exemple, deux tolérances de
1,500 à
Maintenant voici
les modifications qui vous sont soumises en ce moment. On vous en propose 15,
indiquées aux tableaux annexés au projet. Je pourrais les justifier toutes, si
tant était que la chambre pût s’occuper de détails de ce genre. En voici le
relevé par province :
Province d’Anvers,
1
Province du
Brabant, 1
Province de Flandre
occidentale, 1
Province de Flandre
orientale, 3
Province de
Hainaut, 2
Province de Liége,
2
Province de
Limbourg, 1
Province de
Luxembourg, 4
Province de Namur,
0.
Ainsi sur les 568 barrières du royaume on ne vous propose que 15
modifications, 7 barrières nouvelles ont été établies sur des routes
nouvellement construites.
J’ajouterai deux
mots encore, c’est que les propriétaires des usines et les cultivateurs
trouvent des garanties dans la loi même. L’art. 7 de la loi du 18 mars 1833
exempte à la barrière la plus rapprochée de la ville ceux qui y transportent
des légumes, des fourrages verts, du beurre et du laitage. Vous voyez que la
loi elle-même protège le cultivateur. Vous voyez que la loi elle-même protège
le cultivateur. Le paragraphe 14 de l’art. 7 exempte aussi dans un rayon de
Il me semble que la
loi a assez fait pour l’agriculture et l’industrie en accordant des exemptions
aussi étendues.
M.
Rogier. - J’ai demandé la parole pour appuyer l’amendement de
l’honorable M. Lebeau. Cet
amendement présenté comme nouveau par d’honorables préopinants ne l’est pas du
tout. La proposition faite par M. Lebeau a été faite, il y a un an, il y a deux
ans. Il y a deux ans, j’ai fait la proposition de donner à la loi des barrières
le même caractère qu’à toutes les autres lois d’impôt, de la rendre perpétuelle
jusqu’à nouvelle disposition.
Remarquez que cette
loi a sur toutes les autres le privilège d’être discutée chaque année dans son
principe et dans ses conséquences. A force d’élaborer et de réviser cette loi,
on est parvenu à ne plus y introduire qu’un ou deux amendements chaque année.
Témoin, cette année, l’amendement proposé par M. Pollénus ; chaque année des
amendements sont reproduits et discutés. Ce n’est pas un motif suffisant pour
placer la loi des barrières dans une position exceptionnelle, relativement aux
autres lois.
S’il y a des abus,
rien n’empêchera d’y porter remède au moyen d’amendements introduits dans le
budget des voies et moyens, comme on peut le faire pour l’enregistrement, les
postes, les douanes, l’impôt personnel, l’impôt foncier ; c’est là que ces
amendements ont leur place. Mais de grâce finissons-en avec la loi des
barrières qui chaque année absorbe deux ou trois de nos séances.
Il y a une objection que l’on pourrait faire, mais à laquelle il est
facile de répondre. Ce serait relativement au tableau pour le changement de
barrières et le placement de barrières nouvelles par suite de la construction
de routes nouvelles. Mais on pourrait joindre ce tableau au budget, et dire
dans le budget que le droit sera perçu conformément à ce tableau. On pourrait
faire au sujet de ce tableau les observations que l’on présente dans cette
discussion.
Il est singulier
qu’il nous soit aussi difficile de faire une loi qui ait un caractère
définitif. C’est ainsi qu’une loi contre laquelle il n’y avait aucune
objection, celle concernant l’entrée libre des mécaniques et ustensiles,
ignorés en Belgique, a été limitée à 3 ans de durée, terme après lequel elle
devra être soumise à une révision. Nous avons ainsi un grand nombre de lois qui
ne sont pas définitives, je ne vois pas que dans les autres pays il en soit
ainsi. Quand vous faites une loi, si vous la trouvez mauvaise rejetez-la ; si
vous la trouvez bonne, adoptez-la, mais définitivement.
Ces observations
s’appliquent particulièrement à la loi des barrières que l’on discute chaque
année, et maintenant pour la septième fois. Je demande qu’elle soit définitive
comme les autres lois d’impôt.
M. Dubus (aîné). - Je m’oppose à l’amendement
proposé par l’honorable député de Bruxelles. Je ne crois pas qu’il y ait lieu à
faire de la loi des barrières une loi perpétuelle.
Si on le veut, que
l’on discute, que l’on examine ; mais que l’on ne donne pas un caractère
perpétuel à une loi non seulement qui n’a pas été discutée article par article,
mais dont on n’a pas même demandé une simple lecture.
Ce serait un
scandale par trop grand ; je ne crois pas qu’on veuille le donner au pays.
Chaque année, dit le
préopinant, on fait des amendements à la loi des barrières ; et pour mettre un
terme à ces amendements, il propose de la rendre perpétuelle ; c’est-à-dire
qu’il propose de vous dépouiller de vos droits à l’améliorer. Mais puisque vous
reconnaissez qu’il y a chaque année quelque chose à faire, est-ce un motif de
vous mettre dans l’impuissance de l’amender à l’avenir ? Je ne comprends pas la
manière de raisonner de l’auteur de la proposition.
Mais, dit
l’honorable préopinant, vous avez, à l’occasion de la loi des voies et moyens,
un moyen de réviser la loi des barrières, rien n’est plus commode que ce renvoi
d’une loi à une autre d’une occasion à une autre ; car quand vient la loi des
voies et moyens, si on propose des amendements à une loi fiscale, on vous dit :
Ne compliquez pas la discussion ; cela viendra quand on discutera la loi
spéciale à cet impôt. Et maintenant qu’il s’agit d’une loi spéciale, de la loi
des barrières, on nous dit : Votez-la toujours, vous pourrez la modifier quand
viendra la loi des voies et moyens.
N’avait-on pas
proposé, lors de la délibération sur le voies et moyens, des modifications sur
les distilleries, sur l’impôt personnel ; eh bien on a séparé ces discussions
spéciales de la discussion des voies et moyens ; comment peut-on venir nous
actuellement que l’on modifiera la loi des barrières à l’occasion du budget des
voies et moyens ?
Vous n’avez pas
encore voté la loi des barrières comme permanente ; si vous voulez la rendre
définitive, il faut la voter article par article ; car pour rendre une loi
permanente, il faut y insérer toutes les dispositions qui la complètent. Je
veux bien voter de confiance, pour un an, la loi qui n’a pas encore été
examinée, et celle dont il s’agit est dans ce cas.
J’ai lu tous les
procès-verbaux des sections ; eh bien, je me suis assuré que pas une section
n’a porté son examen sur la loi qu’il faut proroger. Dans une des sessions
précédentes, il est vrai, on a examiné le droit de barrière d’une manière
générale ; mais on n’a pas examiné les dispositions organiques qui sont dans
les lois de 1831, 1832 et 1833. Si le gouvernement avait proposé de rendre ces
lois définitives, personne de vous ne doute que les sections n’eussent examiné
ces lois, partie par partie, et qu’une foule d’amendements auraient été présentés
: maintenant comment peut-on vouloir escamoter cet examen par une simple
disposition qui prorogerait indéfiniment l’exécution des lois et qui ôterait à
la chambre la faculté d’y rien changer ?
Je crois me rappeler que le gouvernement, il y a quelques années, avait
proposé de donner aux lois sur les barrières une durée de trois années, et
qu’on ne l’a pas voulu. On a représenté que, pour leur donner une telle durée,
il fallait les examiner en détail ; et comme on n’avait eu qu’une ou deux
séances pour les voter, on a fait remarquer que ces séances ne suffisaient pas
pour savoir s’il fallait donner une aussi longue durée à cette législation ; et
maintenant, en une séance, on propose de la voter à toujours !
Au reste, messieurs,
veut-on que ces lois soient perpétuelles, je ne m’y opposerai pas si on consent
à prendre le temps de les examiner ; mais alors que les lois de 1833 soient
mises en discussion article par article, afin que les membres de cette
assemblée, qui auraient des modifications à proposer, puissent les préparer.
J’en fais la proposition formelle, j’en ai le droit ; j’invoque l’article de la
constitution qui dit que les lois sont votées article par article ; je veux que
l’on délibère sur chacune des dispositions qu’il s’agit de rendre perpétuelle.
M.
Lebeau. - Je regrette d’être obligé de prolonger la discussion à propos
d’une question aussi simple, et qui rencontre des difficultés auxquelles je ne
m’attendais pas, et qui me paraissent très frivoles.
Je ne vois pas
d’autre avantage dans le système proposé par le préopinant que le plaisir de
discuter tous les ans la loi des barrières, sans profit aucun ; et je vous
avouerai que les scrupules de l’honorable membre sont de telle nature que je ne
puis y rien comprendre. A l’entendre, il semblerait que la loi des barrières
nous serait tombée du ciel sans que nous ayons eu autre chose à faire que de
l’enregistrer dans notre code fiscal ;
mais oublie-t-on que la loi sur les barrières a été votée article par
article par le congrès ; et qu’indépendamment de ce que le congrès a fait le
décret organique, les législateurs de 1833 l’ont votée article par article,
comme le veut la constitution.
Si pour proroger
une loi fiscale il faut voter chaque année ses dispositions, je demanderai
pourquoi, lorsque l’on vote le budget des voies et moyens, on n’exige pas le
vote, article par article, des lois sur l’enregistrement, sur les successions,
sur les patentes, sur l’impôt foncier, sur la contribution personnelle ? Qu’on
ne vienne pas dire que la loi sur les barrières est arrivée ici d’une manière
subreptice et n’ait subi aucune discussion, puisqu’elle a été discutée article
par article deux fois dans deux sessions, et qu’on s’en est occupé dans toutes les
autres.
Une fin de
non-recevoir repousse notre proposition, a dit un honorable membre : on ne peut
modifier les tarifs en discutant le budget des voies et moyens ; la petite loi
sur l’impôt personnel et la loi sur les distilleries en sont un exemple ; mais
ce que l’on a fait pour ces lois que l’on a disjointes du budget des voies et
moyens, on pourra le faire pour la modification qu’on proposerait à la loi sur
les barrières.
Si chaque loi fiscale, bien qu’existante, doit être votée article par
article, sous peine de commettre une inconstitutionnalité, vous allez vous en
rendre coupable en votant la loi actuelle pour neuf mois, puisque vous la votez
globalement, aussi bien que si vous la votiez jusqu’à révocation.
Toutefois, où sont
les imperfections de la loi des barrières ? qui vous en a signalé ? Les ponts
et chaussées, les autorités provinciales, les corps judiciaires, qui appliquent
cette loi, quels vices lui ont-ils reconnus ? Excepté quelques intérêts locaux
qui se sont fait entendre, elle n’a été l’objet d’aucune réclamation. Je ne
vois pas pourquoi vous mettriez la loi des barrières dans une autre catégorie
que les lois des successions, de l’enregistrement, d’impôt direct, etc., qui
toutes sont permanentes. Je ne vois dans la proposition que l’on fait que le
plaisir d’avoir une double discussion, chaque année, sur l’impôt des barrières.
Je ne modifierai
pas mon amendement et je le maintiens tel que je l’ai proposé.
M. F. de Mérode. - On a parlé
d’escamoter la discussion de la loi sur les barrières ; ce que je vois qu’on
escamote ici, c’est autre chose : on escamote les lois importantes que nous
avons à faire en rendant interminables des débats sur les plus simples
questions. C’est aujourd’hui pour la septième fois que l’on vote la loi sur les
barrières, loi qui a été longuement élaborée ; est-il donc si nécessaire de
passer encore un long temps sur les dispositions qu’elle renferme ? Je pense
que s’il y a des changements à y introduire, on pourra le faire quand nous serons
à la loi des voies et moyens ; je ne vois pas pourquoi elle aurait le privilège
d’être annuelle, tandis que les autres sont perpétuelles.
M. Gendebien. - Tout ce qu’ont dit les
préopinants, à l’escamotage près, dont a parlé M. de Mérode, pourrait être fort
juste, si la loi des barrières était perpétuelle, et si quelqu’un dans cette
assemblée proposait de la discuter de nouveau. La loi proposée par le
gouvernement tendait à rendre exécutoire pendant une année encore, une loi qui
dans l’origine n’avait été faite que pour une année. Or, je vous le demande,
messieurs, ne serait-ce pas, contre les intentions de l’auteur de l’amendement,
sans doute, et de ceux qui le soutiennent, ne serait-ce pas un escamotage que
de venir, à la fin de la discussion, donner le caractère de perpétuité à une
loi qui n’a qu’un caractère annal, et que le gouvernement ne vous a demandé de
proroger que pour un an. Le gouvernement ne peut, sans s’associer à une
véritable surprise, adhérer à l’amendement de M, Lebeau.
Il manque à la loi
pour être définitivement loi, son caractère essentielle, son caractère de
perpétuité ; une loi est essentiellement perpétuelle de sa nature et vous ne
pouvez lui donner ce caractère de loi que M Lebeau vous demande de lui donner, sans la discuter article par article. Ce
serait une surprise de la part du gouvernement, ce serait un piège tendu à la
bonne foi de la chambre pour éviter toute discussion dans les sections et venir
ici faire donner le caractère de perpétuité à des dispositions qui ne l’ont pas
; ce serait en quelque sorte escamoter la loi.
Non, messieurs,
vous ne consacrerez pas un pareil antécédent, c’est impossible.
M. Lebeau a dit :
Où sont les réclamations ? Qui est-ce qui réclame ? Si M. Lebeau était plus
souvent parmi nous, à son poste, il connaîtrait le grand nombre de pétitions
qui nous sont adressées pour demander des modifications à la loi, il saurait
qu’elles sont couvertes de plus de 40,000 ou 50,000 signatures ; que M. Lebeau
se rende au greffe, il y trouvera ces pétitions et le grand nombre de
signatures respectables dont elles sont couvertes.
Que le gouvernement
nous propose l’année prochaine une loi définitive, nous la discuterons alors
comme telle, jusqu’ici elle n’a jamais été examinée que comme disposition
transitoire, annale, et il serait imprudent de lui donner ainsi, à
l’improviste, un caractère définitif.
Du reste, quel
avantage prétend-on tirer de la proposition ? M. Rogier qui veut rendre la loi
définitive, pour couper court à tous les amendements, à toutes les discussions,
a été obligé immédiatement après de reconnaître que chaque année on pourrait
introduire des amendements dans la loi des voies et moyens ; eh bien,
messieurs, pour éviter ces éternelles discussions, il n’y a qu’un moyen, c’est
de donner une bonne fois, à la loi, toute la perfection qu’elle réclame et de
la rendre alors définitive ; qu’on nous propose donc une loi permanente ; alors
nous l’examinerons avec toute l’attention que mérite une loi définitive, nous
examinerons en même temps les nombreuses pétitions qui se rapportent à la
matière et qui, je le répète, sont couvertes de 40 à 50,000 signatures ; nous
agirons en connaissance de cause, et nous ferons enfin justice à tous.
- La première
partie de l’art. 2, jusqu’aux mots : « Qui sera exécutoire le jour de la
promulgation » est mise aux voix et adoptée.
La seconde partie
de l’article est ensuite mise aux voix et adoptée.
L’ensemble de
l’art. 2 est également mis aux voix et adopté.
Le second vote de
la loi aura lieu lundi.
M. Dubus (pour une motion d’ordre).
- S’il convenait à la chambre de fixer la séance de demain à deux heures, les
commissions auraient le temps de travailler ; je dois dire à la chambre que,
notamment la commission des finances est chargée d’un travail si considérable
qu’elle aura encore beaucoup à faire avant de pouvoir le terminer ; je dois
demander qu’on lui laisse le temps de s’en occuper. Il suffirait que la séance
commençât demain à deux heures. Nous pourrions toujours entendre les rapports
de pétitions et quant aux objets plus importants qui se trouvent à l’ordre du
jour, on pourrait s’en occuper lundi.
(Moniteur belge n°36, du 5 février 1837)
M. le ministre de l'intérieur et des
affaires étrangères (M. de Theux). - Je pense, messieurs, que le
rapport sur le budget de l’intérieur sera distribué demain matin ; si la
chambre n’y voyait pas d’inconvénient, j’aurais l’honneur de lui proposer de
fixer la discussion de ce budget à lundi ou mardi.
Quant au budget de
la guerre, la discussion n’en pourra pas encore avoir lieu, le ministre de la
guerre se trouvant indisposé au point de ne pouvoir sortir.
(Moniteur
belge n°35, du 4 février 1837) M. Gendebien.
- Il faudrait aussi s’occuper sans délai des projets de loi accordant des
naturalisations ; ces projets sont prêts, et il suffira d’un instant pour les
voter. Je demande aussi qu’on fasse demain le rapport sur les pétitions qui ont
été déclarées urgentes par la chambre.
- La chambre,
consultée, décide qu’elle se réunira demain à deux heures en séance publique,
pour entendre des rapports de pétitions, entre autres de celles qui ont été
reconnues urgentes, et pour s’occuper des projets de lois accordant la
naturalisation aux personnes dont les demandes ont été précédemment prises en
considération.
M.
Rogier. - Il ne suffit pas d’avoir fixé l’ordre du jour de demain, il
faudrait aussi fixer celui de lundi et de mardi : on est toujours dans
l’incertitude sur les questions que nous aurons à examiner, et de cette manière
il est impossible de se préparer à la discussion.
- La discussion du
budget de l’intérieur est mise à l’ordre du jour de lundi.
M.
Raikem. - On pourrait également discuter le budget de la dette publique
et des dotations.
- Ce budget est
également mis à l’ordre du jour de lundi.
La séance est levée
à 5 heures.