Accueil Séances plénières
Tables
des matières Biographies Livres numérisés
Bibliographie et
liens Note
d’intention
Séance précédente
Séance suivante
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du vendredi 22 janvier 1836
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre
2)
Fixation de l’ordre des travaux de la chambre. Situation de la société
générale, budgets de la justice et des affaires étrangères, péages des routes
et du chemin de fer, personnel de certains tribunaux (de
Behr, de Puydt, Fallon)
3)
Rapports sur des pétitions relatives, notamment, à la prohibition à la sortie
du lin (Dubus, Bekaert, Gendebien, Desmet, Pirmez), aux entraves douanières dans le rayon frontalier (Hye-Hoys, Zoude, de
Renesse, d’Huart), à l’octroi de l’ordre de Léopold aux congressistes qui ont
voté l’exclusion des Orange-Nassau (Dubus), à la
législation sur les poids et mesures (système métrique) (Zoude,
A. Rodenbach, d’Huart), aux
droits sur les poils et les peaux de lapin (Zoude, Lebeau), aux droits sur les charbons de bois (industrie du
fer, forgerie) et/ou à la prohibition sur le minerai de fer (Zoude,
Berger, d’Huart, Zoude,
Nothomb, Berger, Pirson), à la culture de la soie (Zoude),
à l’organisation de l’enseignement universitaire (de
Jaegher, A. Rodenbach, Dumortier,
Verdussen, de Jaegher), aux
encouragements à la pêche nationale (Dubois, A. Rodenbach), à l’insuffisance du personnel de
plusieurs tribunaux (notamment de Charleroi) (Frison, Ernst, de Behr, Gendebien,
Ernst, Gendebien, Ernst, Dumortier, Pirmez, A. Rodenbach, Gendebien, Dubus, Gendebien, Ernst)
4)
Fixation de l’ordre des travaux de la chambre. (A : Situation de la
société générale, B : budgets de la justice et des affaires étrangères ; C
péages des routes et du chemin de fer ; D : personnel de certains
tribunaux) (B et D (de Behr), C (de
Puydt, F. de Mérode), B (Ernst),
C (de Puydt, Gendebien), C, B
et D (Ernst), A (Devaux), A et C (Lebeau), C (de Theux), A et B (d’Huart), B (Bosquet), C et B (Desmet), C (A. Rodenbach, de Theux), D (de Behr, Ernst, Gendebien), A (Devaux), C et B (de Muelenaere),
C (Lebeau), A (Devaux), D (de Theux, Bosquet)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur
belge n°23, du 23 janvier 1836)
M. de Renesse
procède à l’appel nominal à une heure.
M. Schaetzen donne lecture du procès-verbal de la
séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse
fait connaître l’analyse des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Des rouliers de Namur se plaignent des
fermetures multipliées des barrières qui les empêchent de circuler sur les
routes. »
_______________
« Le sieur H. Heyligers,
saunier, à Maeseyck, appelle l’attention du gouvernement sur la fraude du sel
qui se commet par Maestricht. »
_______________
« Le
sieur J.-M. Zélis, à Sittard,
se plaint de ce que les employés des douanes ont fait contre lui un
procès-verbal à une distance de deux lieues de la frontière, pour un transport
de grains. »
_______________
« Le
sieur J.-F. Léonard, instituteur à Charleroy, fait hommage à la chambre de son
ouvrage relatif à l’emploi du poids et de nage dans le commerce de détail.
_______________
- Ces pétitions sont renvoyées à la commission
chargée d’en faire le rapport.
FIXATION DE L’ORDRE DES
TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. de Behr (pour
une motion d’ordre.) - D’après la décision de la chambre, le rapport sur la
banque doit être discuté après le budget de la guerre. Je ferai observer qu’il
y a d’autres objets plus urgents. Le budget de la justice et celui des affaires
étrangères et de la marine me paraissent devoir être mis à l’ordre du jour
avant le rapport concernant la banque. Le budget de la justice comprend les
crédits demandés pour les ateliers des prisons. Le vote de ces crédits ne peut
souffrir de retard. Avec le budget des affaires étrangères, nous avons celui de
la marine qui n’est pas moins urgent que le budget de la guerre.
Indépendamment de ces budgets, nous avons deux
petits projets, l’un relatif à l’augmentation du personnel de la cour de
Bruxelles et l’autre relatif au changement de classement des tribunaux de
Verviers et de Hasselt, qui ne peuvent pas non plus souffrir de retard.
M. de Puydt. - Et
les péages.
M. de Behr. -
J’ajouterai, si l’on veut, la loi des péages.
Je demanderai donc qu’avant le rapport concernant
la banque on mette à l’ordre du jour le projet de loi relatif à l’augmentation
du personnel de la cour de Bruxelles, celui relatif au classement des tribunaux
de Verviers et Hasselt, ensuite le budget de la justice et celui des affaires
étrangères et de la marine.
Lorsqu’on a fixé la discussion du rapport sur la
banque, on voulait que cette discussion eût lieu avant le vote du budget des
voies et moyens ; maintenant que ce budget est traité, je ne vois plus de motif
d’urgence pour maintenir cette décision.
M. de Puydt. - Je
partage l’opinion de l’honorable préopinant. Comme lui, je pense que nous avons
beaucoup de travaux plus importants que la discussion du rapport sur la banque.
Mais parmi les projets qu’il a indiqués, il en est un plus urgent que les
autres, qui doit avoir la priorité ; c’est la loi des péages. Je ne pense pas
que la discussion de cette loi puisse être longue et il est à remarquer qu’un
grand nombre de projets de travaux restent en suspens en l’absence de cette
loi.
Je demande donc qu’on mette d’abord à l’ordre du
jour la loi des péages, et ensuite les projets énumérés par le préopinant.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je ne demande
la parole que pour appuyer ce qu’a dit l’honorable M. de Behr. Je pense qu’avant tout il conviendrait de discuter les
budgets de la justice, des affaires étrangères et de la marine. Car s’ils
n’étaient pas votés à la fin du mois, nous serions obligés de demander des
crédits provisoires, le ministre de la justice pour le service des prisons, et
moi pour la marine.
Il serait à désirer que ces deux budgets, qui ne
sont pas de nature à absorber beaucoup de temps, obtinssent la préférence sur
les autres projets.
M. le président. -
Je vais consulter la chambre sur ces diverses propositions.
M. Fallon. - Je crois
que la chambre ferait bien de surseoir à statuer sur la proposition de M. de
Behr jusqu’à ce que M. le ministre de l’intérieur fût présent, car hier il a
insisté sur la mise à l’ordre du jour de la loi concernant les péages qu’il
regardait comme la plus urgente.
M. le président. -
Si on n’y trouve pas d’opposition, en attendant l’arrivée de M. le ministre de
l’intérieur, nous nous occuperons de l’objet de l’ordre du jour.
RAPPORTS SUR DES PETITIONS
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Le sieur Hemery, né à Douay
(France), et habitant
- Ces deux pétitions, en vertu d’une décision de la
chambre, ont été envoyées directement au ministre de la justice.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Le sieur Tallois, membre du conseil communal
de Ham-sur-Heure, réclame contre l’élection du bourgmestre et d’un asssesseur, qui a eu lieu dans cette commune. »
Le pétitionnaire se plaint de ce que les élections
d’un bourgmestre et d’un échevin n’ont pas été faites régulièrement, que la
liste des électeurs a été dressée sans consulter le conseil communal, et que
lui, en sa qualité de membre de cette administration, n’a pas été convoqué et
qu’il a protesté contre cette élection.
Les principaux motifs de cette protestation sont
que l’on a pris pour base d’inscription les individus payant le cens en 1832,
quoique les rôles de 1833 fussent mis en recouvrement et privassent au moins un
tiers des contribuables de concourir aux choix de ses administrateurs.
Cette pétition étant d’une date ancienne, votre
commission se borne à vous proposer le renvoi au ministre de l’intérieur.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Par pétition du 9 novembre 1833, l’administration communale de
Chapelle-à-Wattines, réclame contre l’arrêté du
gouverneur du Hainaut, qui annule les dernières élections communales. »
Cette administration expose que les irrégularités
commises n’étaient point de nature à les voir annuler par un arrêté de M. le
gouverneur du Hainaut, en date du 8 octobre 1833.
Les irrégularités consistent que dans les
opérations de l’élection du bourgmestre, il se trouvait quatre bulletins
portant Dupire père, et un André Pire, qui avaient
été attribués au sieur Dupire, Pierre-André.
31 suffrages ont été donnés au sieur Dupire, sous la dénomination expresse de Dupire, Pierre-André ;
27 à son compétiteur M. Dubois Philippe, qui s’est
avancé près du bureau, a vérifié les bulletins attribués audit Dupire, et les ayant trouvé en bonnes forme, l’en a
félicité.
Votre commission, pour les mêmes motifs, vous
propose aussi le renvoi au ministre de l’intérieur.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Cinq habitants de Deurne, élus par les
habitants, du conseil communal, le 13 août dernier, se plaignent de ce que les
élections ont été annulées par le gouverneur, et demandent qu’elles soient
maintenues. »
Votre commission propose l’ordre du jour, attendu
que la décision du gouverneur a été rendue dans le cercle de ses attributions
et pour des irrégularités avouées par les pétitionnaires.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Par pétition du 10 janvier 1834, le sieur A.-J. Glineur,
de la commune de Wiheries (Hainaut), réclame pour la
deuxième fois l’intervention de la chambre pour obtenir justice d’une prétendue
destination illégale. »
Le pétitionnaire expose une deuxième fois qu’en sa
qualité de bourgmestre élu du peuple, il n’a pu être suspendu ni destitué par
l’autorité provinciale, et c’est contre cette mesure qu’il prétend illégale qu’il
réclame.
Votre commission vous propose en conséquence les
mêmes conclusions que sur la première pétition, c’est-à-dire le renvoi à M. le
ministre de l’intérieur, mais avec demande d’explication.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Par pétition du 22 mars 1835, le vicomte Dutoict
de Steren Ambacht demande
une augmentation du subside trimestriel qu’il reçoit à titre de traitement
d’attente. »
Le pétitionnaire expose qu’ayant perdu sous le
régime de Napoléon toute sa fortune qu’il évaluait à 300.000 francs, il ne lui
a été accordé sous l’ancien gouvernement qu’une pension provisoire de 500
florins, sous la dénomination de wachtgeld, et que
cette pension est infiniment trop minime.
Il demande en conséquence une augmentation de
pension.
Votre commission propose le dépôt de cette pétition
au bureau des renseignements.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur
- « Par pétition du 9 décembre 11133, plusieurs bateliers se plaignent de
l’élévation du droit de patente. »
« Par pétition du 12 décembre 1833, plusieurs
bateliers d’Ostende demandent la suppression de la patente des bateliers, et
qu’elle soit remplacée par un péage. »
« Par pétition du 20 juin 1834, plusieurs
négociants de Charleroy demandent que M. le ministre des finances présente,
avant la discussion du budget de 1835, un projet de loi de rectification des
patentes, surtout en ce qui concerne les bateliers de
Messieurs, les plaintes des pétitionnaires, n°70,
36 et 562, étant toutes relatives aux droits des patentes des bateliers, qui
ont été diminués par la loi du budget des voies et moyens de 1835, et les
pétitions étant au reste d’une date antérieure à cette loi, ne semblent plus
avoir d’objet.
En conséquence votre commission se borne à vous
proposer le dépôt au bureau des renseignements, comme pouvant contenir des
observations intéressantes pour le commerce.
- Adopté.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Par pétition du 16 mars 1835, le sieur N.J. Verrassel,
notaire apostolique, pour lui et ses co-crédirentiers,
réclame le paiement des rentes créées par la ville de Nivelles et hypothéquées
sur les chaussées construites par ladite ville. »
Différentes pétitions de cette nature ayant été
précédemment renvoyées à M. le ministre de l’intérieur, votre commission
propose la même conclusion à l’égard de celle dont il s’agit.
- Adopté.
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Plusieurs fabricants et marchands de lin de Courtray demandent que le
lin soit prohibé à la sortie. »
Messieurs, cette pétition signée par 53 des plus
respectables fabricants et marchands de lin, de toiles et de serviettes de Courtray,
particulièrement lésés par la libre exportation des lins, vous expose l’état
déplorable de leur commerce et de celui de leur contrée, pour que leurs
intérêts ne soient plus longtemps sacrifiés au faux principe d’une liberté
commerciale mal entendue : le haut prix des lins par les exportations toujours
croissante a porté cette matière première hors de proportion avec leurs
produits et menace ainsi les fabriques de toiles et linge de table d’une ruine
totale, et par conséquent réduira à la plus affreuse misère la majeure partie
de la population.
Comme la question est d’une haute importance pour
ces contrées et que la chambre a déjà renvoyé beaucoup de pétitions semblables
à MM. les ministres des finances, de l’intérieur, et à la commission
d’industrie, votre commission a l’honneur de vous proposer le même renvoi.
M. Dubus. - Je ne sais si la pétition dont il
s’agit mérite d’être recommandée aussi spécialement qu’on le fait. On n’y présente
qu’un côté de la question. On dit que l’industrie linière est importante. Je
pense que l’industrie agricole n’est pas importante et que la prohibition du
lin à la sortie frapperait l’industrie agricole et par suite l’industrie
linière elle-même. Cette pétition a probablement une date ancienne, car depuis
quelque temps la prospérité de l’industrie en faveur de laquelle on réclame
s’est successivement accrue. Je suis persuadé que les prix des lins sont
inférieurs à ce qu’ils étaient à la date de la pétition.
Il a suffi de l’émulation des cultivateurs pour
l’amélioration qu’on a obtenu d’année en année, et cette émulation vaut mieux
que toute mesure de prohibition.
Je pense qu’on doit se borner à ordonner le dépôt
de la pétition des renseignements.
M. Bekaert. - L’industrie en faveur de laquelle réclament les
pétitionnaires est une des plus importantes du pays. Je demande le maintien des
conclusions des pétitions, c’est-à-dire le renvoi à la commission d’industrie,
au ministre de l’intérieur et au ministre des finances. Ce renvoi ne préjugeait
rien. Quand un rapport nous sera fait sur la question, nous verrons jusqu’à
quel point les allégations des pétitionnaires sont fondées et combien il est
important que des mesures soient prises pour relever l’industrie linière qui
est la plus grande souffrance.
M.
Gendebien. - A moins qu’on ne considère comme insignifiant l’appel
qu’on fait aux ministres de s’occuper des questions soulevées par les pétitions
qu’on leur renvoie, vous devez vous abstenir d’ordonner le renvoi de la
pétition dont il s’agit.
Une première raison, c’est que la chambre est
saisie d’un projet de loi qui a déjà subi la discussion des sections et sur
lequel un rapport pourra être fait incessamment. Ensuite nous ne pouvons pas
adhérer aux conclusions de la commission parce que ce serait préjuger que la
majorité de la chambre donne gain de cause aux pétitionnaires et regarde la
question comme étant de la plus haute importance, ainsi qu’on l’a qualifiée.
Avant de prendre une décision sur une pétition comme celle dont il s’agit, il
faudrait soulever une discussion très longue. Je ne vois pas comment on
pourrait déclarer dès à présent que la prohibition des lins à la sortie serait
utile. Je demande qu’on laisse la question entière.
La chambre en est saisie ; le ministre connaît les
documents relatifs au projet qui sont parvenus à la chambre ; il pourra, comme
les autres membres, prendre au bureau des renseignements connaissance des
autres pièces que la chambre pourrait
recueillir.
Je demande en conséquence le dépôt au bureau des
renseignements.
M. Desmet. -
Messieurs, je crois qu’il y a lieu de s’étonner qu’on veuille traiter si cavalièrement
l’intéressante branche de l’industrie linière ; si j’ai bien saisi la
proposition de l’honorable M. Dubus et qui vient d’être appuyée par l’honorable
M. Gendebien, on voudrait que la pétition dont on vient de faire rapport, soit
uniquement déposée au bureau des renseignements, c’est-à-dire que, ne voulant
pas proposer l’ordre du jour, on désire à peu près obtenir le même résultat en
demandant ce renvoi.
Si bien compris l’honorable député de Tournay (car,
étant dans les tribunes publiques quand il a exposé les motifs de sa
proposition, j’aurais pu avoir mal saisi ses paroles), il paraîtrait que la
vente des lins verts est plus profitable au pays que les bénéfices et les
salaires qui laisseraient la manipulation de la classe de cette précieuse
plante ; peut-être que l’honorable membre ignore que le travail du lin, avant
qu’il soit converti en tissu, quintuple la valeur du lin vert et laisse cet
énorme bénéfice dans le pays au profit de la classe la plus intéressante de la
société, à celui des pauvres ouvriers ; certainement que le lin vert que les
étrangers viennent acheter sur quelques points de nos frontières ne donne pas
le même bénéfice et ne procure pas le même bien-être à la classe pauvre.
Messieurs, on doit aussi
savoir que la proposition qui a été faite à cette chambre pour mettre un
certain droit montant à environ 10 p. c. sur les lins à leur sortie, est encore
pendante ; que le projet de loi qui a été présenté à ce sujet n’a pas encore
été discuté, et s’il a été divisé pour en extraire les dispositions qui
concernaient particulièrement l’entrée des toiles étrangères, il n’a pas été
repoussé ni retiré. La discussion en a été seulement ajournée. Mais, veuillez
remarquer que ce n’est point la prohibition qu’on a demandée dans le projet de
loi, mais uniquement un droit tellement modéré que certainement il ne pourra
aucunement faire tort à la culture du lin : c’est ce que les cultivateurs
devront même reconnaître, comme ceux du pays de Waes, qui est la contrée par
excellence pour la culture du lin, l’ont déjà reconnu, et comme on peut en trouver la preuve dans un
mémoire qui a été publié par un ancien membre du congrès, député du district de
Saint-Nicolas, par lequel on pourra se convaincre que les cultivateurs ne
réclameront pas contre un droit modéré qui serait établi à la sortie des lins
crus.
Messieurs, je pense donc que vous sentirez, comme
moi, tonte l’importance de l’objet de la pétition et que vous la trouverez
digne de la renvoyer aux départements ministériels de l’intérieur et des
finances, et que vous adopterez les conclusions de votre commission de
pétitions.
M. Pirmez. -
Personne ne dit que la question n’est pas importante. C’est parce qu’elle est
importante que nous devons adopter la proposition de M. Dubus, et non renvoyer
la pétition à tant de commissions et de fonctionnaires différents ; car la
chambre aurait l’air d’accorder ce que demandent les pétitionnaires, tandis
qu’en ordonnant le dépôt au bureau des renseignements on laisse la question
indécise.
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- Pour toutes les pétitions de la nature de celle dont il s’agit, on a toujours
ordonné les renvois que propose la commission ; je ne vois pas pourquoi on
ferait une exception pour celle-ci.
- Après une double
épreuve, les conclusions de la commission sont adoptées.
M. Hye-Hoys, rapporteur.
- « Par pétition du 9 avril 2835, le sieur Eug. Spillaert, négociant en houblon, à Poperinghe,
se plaint d’entraves qu’il éprouve, de la part de la douane, dans son commerce
d’exportation de houblons vers
Le pétitionnaire expose qu’il s’est adressé
vainement deux fois au ministre des finances, et toujours réponse aucune, à
l’effet d’obtenir une faveur dont jouissent des individus de la même commune
qui exercent la même profession que lui.
Le pétitionnaire exporte, dit-il, tous ces houblons
en France ; quand il en a payé les droits de sortie au bureau de Poperinghe, lieu de son domicile, il devrait bien pouvoir
circuler franchement et se diriger vers la frontière de France où il paie les
droits d’entrée.
Mais non, la douane lui impose de partir de chez
lui avant le lever du soleil, ou d’y revenir après le coucher, n’étant pas
autorisé comme ses camarades, tellement que ces entraves minutieuses et trop
sévères sont souvent cause qu’il doit coucher hors de son habitation, une et
quelquefois deux nuits avec sa voiture et ses chevaux, ce qui absorbe tout son
bénéfice et finira par le ruiner.
Il déclarer ne jamais avoir été repris en fraude et
se soumet volontiers à la visite de sa voiture par les préposés.
Votre commission pense d’abord que comme Poperinghe est situé dans la ligne, la loi défend de
circuler avant ou après le lever du soleil avec des marchandises sujettes aux
droits ; mais comme le pétitionnaire avance que la douane l’accorde à un grand
nombre de ses collègues, elle prie M. le ministre des finances, en lui
renvoyant cette pétition, de vouloir faire prendre des renseignements afin de
faire justice à l’un comme aux autres.
- Adopté.
M. le président. -
La parole est à M. Zoude, autre rapporteur de la commission.
M. Verdussen. -
Je demande la parole. Messieurs, il est plusieurs pétitions sur lesquelles on a
demande un prompt rapport, et c’est même pour entendre ces rapports qu’on a
décidé que la séance de ce jour serait consacrée aux pétitions. Je ferai
observer que si nous suivons l’ordre des feuilletons nous n’arriverons pas au
but que nous nous sommes proposé. Il faudrait commencer par les pétitions sur
lesquelles la chambre a désiré qu’un prompt rapport fût fait.
M. le président. -
Messieurs les rapporteurs chargés du rapport de ces pétitions sont-ils prêts ?
M. Zoude. - J’ai la
pétition des industriels de Sittard sur laquelle le
rapport est prêt, mais il en est deux autres de propriétaires de bois sur
lesquelles je ne pourrai pas faire le rapport aujourd’hui.
M. Verdussen. -
Si les rapports ne sont pas prêts, je n’insiste pas.
M. Zoude, rapporteur.
- « Par pétition du 12 janvier courant, la régence de la ville de Sittard expose que la défense faite par l’art. 177 de la
loi générale du 26 août 1822, d’avoir ou d’établir des magasins et dépôts de marchandises
soumises aux accises, dans le rayon du territoire réservé des douanes, n’a
jamais été rendue applicable à ladite ville ; que Sittard
ayant une population agglomérée le plus de 2,400 âmes, se trouve bien
évidemment dans l’exception établie par l’art. 278 de la susdite loi générale.
Aussi sous le gouvernement précédent aucun doute ne s’est élevé à cet
égard. »
Les pétitionnaires ajoutent que, comme une suite de
la faculté d’avoir des magasins, les marchands de cette ville ont constamment
obtenu des passavants pour le transport de leurs vins, eaux-de-vie et sel, et
ce, aux termes des articles 165, 166, 167 et 187 de ladite loi, sur la simple
représentation des quittances justificatives de paiement de l’accise : jamais
ils n’ont rencontré à ce sujet aucune difficulté.
Après une paisible jouissance de cette faveur
pendant plus de 13 ans, tant sous le gouvernement hollandais que sous le
gouvernement actuel, le commerce de Sittard ne
s’attendait pas à se la voir enlever ; c’est cependant ce qui vient d’avoir
lieu. M. le directeur des droits d’entrée et de sortie et des accises dans la
province du Limbourg a pris sur lui de faire défense expresse au receveur local
de ne plus délivrer dorénavant aux marchands de Sittard
des passavants pour le transport des marchandises soumises à l’accise, quelle
que puisse être leur destination.
Quelques jours après, cette défense absolue a été
modifiée en ce sens que l’on accorde seulement ces documents pour le transport
de cette espèce de marchandises circulant dans le territoire réservé.
C’est contre cette mesure, qui frappe le commerce
de Sittard d’une stagnation complète, que
l’administration communale s’est fait un devoir de réclamer l’intervention de
la chambre. Elle vous prie de vouloir la faire cesser dans le plus bref délai,
vu que son maintien plus ou moins prolongé doit avoir nécessairement pour
résultat la ruine du commerce de cette ville, et la perte inévitable de
plusieurs familles.
La pétition, dont je viens d’avoir l’honneur de
vous présenter l’analyse, a été renvoyée à votre commission ad hoc, avec
invitation de faire son rapport dans la séance de ce jour.
Je suis chargé de vous présenter le résultat de
l’examen auquel elle s’est livrée.
La seule question que votre commission a cru devoir
se poser est celle-ci : Les marchands autorisés à avoir des magasins et dépôts
de marchandises soumises à l’accise dans le rayon du territoire réservé,
ont-ils, aux termes des dispositions qui régissent la matière, le droit de
faire l’importation de ces marchandises dans l’intérieur du pays ? Et par suite
les employés de la douane sont-ils obligés de leur faire à cet effet la
délivrance des documents nécessaires, sur la simple exhibition des quittances
justificatives du paiement de l’accise ?
Votre commission a examiné cette question avec
toute l’attention dont elle est capable, et que mérite l’importance de l’objet.
Après s’être bien pénétrée de l’esprit de la loi, elle n’a pas hésité un
instant à se prononcer pour la négative.
Non, les marchands qui habitent le territoire réservé,
quoi qu’autorisés à avoir des magasins dans l’étendue de ce même territoire,
n’ont pas le droit, en thèse générale, de faire le transport des marchandises
soumises à l’accise dans l’intérieur du pays, à moins qu’ils ne se trouvent
dans l’un des cas exceptionnels prévus par l’art. 268 de la loi générale ; ils
ont seulement le droit d’en effectuer le transport sur le territoire réservé,
c’est-à-dire de les faire circuler dans l’étendue de ce territoire d’un endroit
à l’autre, et par conséquent les employés de la douane ne peuvent pas faire la
délivrance des passavants pour le transport de ces marchandises vers
l’intérieur.
Pour vous faire partager cette opinion, je me
bornerai à attirer votre attention sur l’article 168 précité, dont le texte est
tellement explicite et clair, qu’il ne peut laisser le moindre doute, Le voici
:
« De même, il ne sera point accordé de
passavant pour le transport du sel, du vin, des boissons distillées, du
vinaigre ou de la bière, dans la distance précitée des frontières de terre vers
l’intérieur, que dans les cas suivants : A. Déménagement ou changement de
domicile. B. De sortie ou transport hors des villes fermées et places fortes,
C. De transport pour compte de fabricants ou négociants qui jouissent d’un
crédit permanent ou à terme. »
Vous voyez, messieurs, que d’après cette
disposition, qui ne prête matière à aucune interprétation, il ne peut jamais
être accordé de passavant, dans le rayon réservé, pour le transport des
marchandises soumises à l’accise, vers l’intérieur, que dans les cas : 1° de
déménagement, 2° de sortie ou transport hors des villes fermées et places
fortes, et 3° de transport pour compte de fabricants ou négociants qui
jouissent d’un crédit permanent ou à terme.
Hors de ces trois cas le transport vers l’intérieur
du pays de ces sortes de marchandises ne peut avoir lieu au moyen de passavants
; l’article précité est positif à cet égard.
L’erreur dans laquelle versent les pétitionnaires
provient de ce qu’ils confondent les dispositions de la loi ayant rapport à la
libre circulation de ces marchandises dans l’étendue du rayon réservé, avec
celles qui sont relatives à la faculté de faire le transport vers l’intérieur
du pays.
Ce qui le prouve c’est que les pétitionnaires
invoquent à l’appui de leur système les articles 165, 166 et 167 de la loi
générale.
En effet aucun de ces articles ne parle du
transport vers l’intérieur du pays des marchandises d’accises. Leurs
dispositions tendent uniquement à prévenir les formalités à remplir, pour
effectuer ce transport, d’un endroit à l’autre, dans le rayon réservé. Pour s’en convaincre on n’a qu’à fixer son
attention sur l’art. 165. « On observera, dit cet article, à l’égard du
transport de ces marchandises sur le
territoire des frontières de terre, dans la distance de l’étranger désignée
à l’art. 177 les dispositions contenues dans les articles suivants. »
Remarquez bien la différence de l’expression dans
cet article avec celle que l’on rencontre à 168. Ici il s’agit du transport à
faire sur le territoire réservé,
c’est-à-dire dans l’étendue même de ce territoire, tandis que dans l’art. 168
il s’agit du transport à faire du rayon réservé vers l’intérieur, pour lequel transport l’article porte défense
bien expresse d’accorder des passavants, à moins que celui qui réclame ces
documents ne se trouve dans l’un des cas exceptionnels y spécifiés.
Il est impossible de donner une autre
interprétation à la disposition prohibitive contenue dans l’article 168,
attendu qu’elle deviendrait sans cela tout à fait sans application. En effet,
si tous ceux qui, d’après la loi, ont la faculté d’avoir et d’établir des
magasins dans le rayon du territoire réservé, obtenaient par cela seul le droit
de se faire délivrer des passavants pour faire le transport des marchandises
soumises à l’accise vers l’intérieur, l’article 168 deviendrait absolument sans
objet.
En résumé donc, la faculté
d’avoir des magasins de marchandises d’accises sur le territoire réservé ne
donne pas par cela seul aux marchands le droit de se faire délivrer des
passavants pour transporter ces marchandises dans l’intérieur du pays. De cette
faculté dérive seulement le droit de faire circuler ces marchandises d’un
endroit à l’autre dans ce rayon même, au moyen des passavants.
Pour faire l’importation dans le pays, la loi prescrit
d’autres conditions, savoir celles énumérées à l’article 168. Si les marchands
du territoire réservé veulent se ménager la faculté de faire des expéditions
vers l’intérieur du pays, il faut absolument qu’ils se conforment aux
formalités requises pour jouir d’un crédit permanent ou à terme ; sans cela ils
doivent se borner au commerce dans l’étendue du territoire réservé.
D’après ces considérations votre commission est
d’avis que bien loin qu’il y eût excès de pouvoir de la part du directeur de la
douane dans le Limbourg, ce fonctionnaire, en faisant la défense dont il
s’agit, n’a fait que se conformer à la loi.
Cependant, comme les pétitionnaires mettent en fait
que, depuis la mise en vigueur de la loi qui régit la matière, l’administration
a constamment accordé aux commerçants de la ville de Sittard
les documents nécessaires pour expédier les marchandises soumises à l’accise
vers l’intérieur du pays ; comme ce fait de la part des fonctionnaires publics
eux-mêmes a nécessairement dû induire en erreur ces commerçants qui, sur la foi
de ce qui s’est constamment pratiqué, ont pu faire des approvisionnements plus
ou moins considérables de ces sortes de marchandises, dans l’espoir de pouvoir
les expédier librement vers l’intérieur ; attendu qu’il paraît juste et
équitable que l’administration, qui est cause de la position fâcheuse dans
laquelle se trouvent ces commerçants, avise aux mesures de procurer aux
intéressés le moyen de se défaire des marchandises qu’ils peuvent avoir
actuellement en magasin ; par ces motifs, la commission vous propose le
renvoi de la pétition au ministre des finances.
M.
de Renesse. - En appuyant la demande de la régence de Sittard, j’aurai l’honneur d’observer à la chambre que
conformément à l’article 178 de la loi générale de 1822, les commerçants de
cette ville ont le droit d’avoir des magasins et des dépôts de sel, vins et
boissons distillées, d’où il résulte qu’il faut aussi leur accorder le moyen de
pouvoir de s’en défaire avec facilité. L’art. 168, qui défend la délivrance des
passavants, ne leur a jamais été appliqué sous le gouvernement hollandais, qui
certes exécutait la loi des douanes avec la plus grande fiscalité.
Ce n’est environ que depuis un mois que M. le
directeur des douanes du Limbourg a jugé nécessaire de donner une autre
interprétation à cette loi, et de comprendre les marchands détaillants de cette
ville dans la mesure exceptionnelle de l’article 168. Si elle reste en vigueur,
elle anéantira entièrement le commerce honnête de la ville de Sittard, pour lequel je demande des mesures moins vexantes
; elle aura pour effet de laisser une mauvaise impression dans l’esprit des
habitants d’un pays, qui, en faisant la révolution avec nous, avait bien le
droit d’espérer un meilleur avenir, et de voir disparaître de nos lois toutes
les dispositions vexantes qui finissent toujours par rendre un gouvernement
odieux. En effet ce district, ainsi que celui de Ruremonde, n’ont obtenu aucun
avantage de la révolution ; ils ont contribué dans presque toutes les charges
extraordinaires, et ils sont encore à en attendre les avantages, puisque
jusqu’à ce jour, malgré les vives réclamations tant des habitants que des
députés, ils n’ont pu obtenir, par des motifs politiques, même la construction
de routes déjà décrétées sous l’ancien gouvernement. Il est enfin temps que le
gouvernement ne perde plus de vue les intérêts lésés de ces districts, que l’on
fasse droit à leurs demandes, et qu’en exécutant des lois fiscales, le
gouvernement tâche de les rendre moins vexantes possibles, et surtout de ne
point dépasser en fiscalité le gouvernement hollandais.
Dans ce but, j’ai l’honneur de demander le renvoi
de cette pétition à M. le ministre des finances ; j’espère qu’il voudra
l’examiner promptement et qu’il trouvera des moyens pour concilier l’intérêt du
trésor avec celui des commerçants de cette ville.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Messieurs, ainsi que l’honorable rapporteur de
la commission vous l’a exposé, la mesure contre laquelle on s’élève est
l’exécution stricte de la loi. Si l’administration des douanes, dans la
province de Limbourg délivrait des passavants, c’était un abus qui pouvait
favoriser la fraude et qu’il fallait faire cesser. On vous a donné lecture de
l’article 168 de la loi générale, et vous avez vu que hors les cas spécifiés
dans cet article l’administration des douanes ne peut délivrer de documents
pour circuler dans l’intérieur. On conçoit facilement l’utilité des
dispositions de la loi de douane. Si l’on continuait, comme on l’a fait à tort
dans le Limbourg, à donner aux marchands de Sittard
des passavants pour aller à l’intérieur, il suffisait que les marchandises
aient été fraudées dans un espace de deux milles mètres sur la frontière pour
que leur entrée fût légale et pour qu’elles puissent parvenir dans tout le
pays. Pour éviter cet abus, la loi a posé des restrictions.
Quand il y a crédit permanent ou à terme on ne
charge les marchandises qu’autant que l’on justifie du paiement des droits ;
quant on charge du sel, par exemple, on apporte la quittance du paiement des
droits et l’administration est alors certaine qu’il n’y a pas eu fraude.
L’art. 168 de la loi générale est fort sage ; il
n’a fait que dicter des mesures contre une fraude très facile dans certaines
localités.
Les pétitionnaires prétendent que le gouvernement
hollandais n’exigeait pas d’eux des passavants : c’est là un point de fait que
je vérifierai. J’examinerai s’il n’y a pas lieu à prendre une mesure
particulière relativement aux marchandises expédiées de Sittard.
Sous ce rapport, je ne m’oppose pas au renvoi de la pétition au ministre des
finances ; je demande au contraire ce renvoi, afin d’examiner les faits cités
par les marchands de Sittard.
- La pétition est renvoyée à M. le ministre des
finances.
_______________
M. Zoude, rapporteur.
- « Le sieur Lutzen, ci-devant curé de Chiny
(Luxembourg), se plaint d’avoir été interdit par le capitulaire du diocèse de
Namur. »
Le pétitionnaire réclame l’intervention de la chambre
pour le faire réintégrer dans les fonctions ecclésiastiques dont il a été
dépouillé par le chef capitulaire du diocèse de Namur.
Votre commission, considérant que l’art. 16 de la
constitution interdit à l’Etat d’intervenir dans la nomination ou l’installation
des ministres d’un culte quelconque, a l’honneur de
vous proposer l’ordre du jour.
- Sur les conclusions de la commission, la chambre
passe à l’ordre du jour.
M. Zoude, rapporteur.
- « Le sieur de Rouw demande que tous les membres du congrès, qui ont voté
l’exclusion des Nassau, soient décorés de l’ordre de Léopold. »
Le pétitionnaire expose à la chambre que la mort ou
l’exil était le sort réservé aux membres du congrès qui ont voté la déchéance
des Nassau, si la fortune trahissant notre cause nous avait ramenés sous le
joug de Guillaume, et c’est pour les récompenser de ce dévouement qu’il demande
que la croix de Léopold leur soit décernée.
Votre commission considérant que s’il y a eu péril
pour les votants, il y a aussi pour eux la gloire d’avoir contribué à
l’indépendance du pays, d’avoir concouru à le doter de la constitution la plus
libérale du monde, et enfin d’avoir appelé au trône un prince éclairé, objet de
l’amour et de la vénération des Belges ; votre commission considérant enfin que
la plus belle récompense que puissent ambitionner les membres du congrès est
celle d’avoir payé un tribut aussi glorieux de dévouement à la patrie, vous
propose le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
M. Dubus (aîné). - Je ne sais à quelle fin
on déposerait cette pétition au bureau des renseignements : la chambre ne peut
conférer la croix de l’ordre de Léopold. Je demande que l’on passe à l’ordre du
jour.
M. Zoude.,
rapporteur. - Le pétitionnaire ne demande pas que la chambre donne des croix,
mais il voudrait qu’elle intervînt pour les faire délivrer.
On ne passe à l’ordre du jour que sur les pétitions
inconvenantes ; mais il n’y a rien d’inconvenant dans la réclamation du
pétitionnaire.
- L’ordre du jour est mis aux voix et adopté.
M.
Zoude, rapporteur. - « Plusieurs marchands de Gand proposent des
modifications à la loi du 21 août 1816 sur les poids et mesures. »
« D’autres marchands de la même ville
adressent la même demande. »
Les pétitionnaires, appréciant les avantages du
nouveau système des poids et mesures, regrettent que par l’ignorance de la plupart
des consommateurs, l’application ne puisse encore en être populaire ; c’est
pourquoi ils demandent à la chambre que la loi du 12 février 1812 soit rendue
de nouveau applicable à
Votre commission a vu avec peine les motifs
allégués par les pétitionnaires, et surtout dans une localité riche où les
écoles gratuites sont si nombreuses et les établissements d’instruction aussi
multipliés, tandis que ce système est familier dans une province pauvre, et
dans laquelle, disait naguère un orateur de cette chambre, on ne rencontrait
par commune que deux personnes sachant lire et écrire, le curé et son
marguillier ; eh bien, messieurs, dans cette province si ignorante, le nouveau
système est non seulement connu, mais en usage depuis nombre d’années, et
pourquoi ? c’est que dans les pauvres écoles de ce
pauvre pays, l’enfant était instruit de la valeur des nouvelles dénominations,
de leur rapport avec les anciennes, et qu’à leur tour, en sortant de l’école,
les enfants enseignaient leurs parents. Avec les mêmes moyens, l’application du
système pourrait devenir vulgaire dans la ville des pétitionnaires, comme elle
l’est d’ailleurs dans beaucoup d’autres localités.
Toutefois, messieurs, comme
un projet de loi sur la matière vous a été présenté par l’honorable M. Seron,
votre commission vous propose le dépôt de ces pétitions au bureau des
renseignements pour y recourir lors de la discussion de ce projet.
M. A. Rodenbach.
- Messieurs, dans les débats qui ont eu lieu naguère sur les poids et mesures,
j’ai demandé la parole ; et si j’ai bonne mémoire, M. le ministre des finances
a déclaré qu’il s’occupait d’un projet pour améliorer la loi concernant le
système métrique.
Vous savez que de nombreuses plaintes vous ont été
adressées sur le système décimal. Sa nomenclature et ses divisions étaient un
obstacle à ce qu’il devînt populaire et aussi utile qu’il devrait l’être. Il me
semble que le dépôt de la pétition au bureau des renseignements ne suffit pas ;
si elle contient de bonnes idées, on peut la renvoyer au ministre des finances.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je demanderai à M. le rapporteur si la
pétition renferme quelques éléments capables de servir à l’examen d’un projet
concernant les poids et mesures. Si elle ne renfermait que des vœux, il serait
inutile de la renvoyer au ministre des finances.
M. Zoude, rapporteur.
- L’une des pétitions est très bien écrite et bien détaillée.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Dans ce cas je ne vois pas d’inconvénient à
adopter la proposition faite par M. A.
Rodenbach. Je me suis engagé à faire réviser la législation sur le
système métrique et à examiner si l’on ne pourrait pas introduire quelques
modifications utiles à ce système : par exemple, si on ne pourrait pas admettre
les divisions par moitié, quart, huitième de certaines mesures, divisions qui
pourraient satisfaire aux désirs manifestés par un très grand nombre de
détaillants. Les pétitions pourraient peut-être me donner d’utiles idées sur ce
point.
- Les pétitions seront déposées au bureau des
renseignements et renvoyés au ministre des finances.
_______________
M. Zoude, rapporteur.
- « Six sauniers de Bruxelles réclament une nouvelle loi sur le
sel. »
Les pétitionnaires réclament avec une nouvelle
instance le projet de loi sur le sel, promis depuis si longtemps, et semblent
accuser le ministère du retard apporté jusqu’ici ; mais un membre de votre
commission des pétitions qui appartient à celle de la révision des lois
financières, nous a déclaré que s’il y avait lieu à reproche, il devait être
adressé à la commission qui, souvent convoquée, s’était réunie assez rarement
en nombre suffisant pour pouvoir délibérer : que s’étant cependant prononcée à
l’unanimité sur les questions principales, on est fondé à espérer que le projet
ne doit plus tarder à être soumis à la chambre.
Votre commission espérant que ces explications
apaiseront la juste impatience des pétitionnaires, a l’honneur de vous proposer
le dépôt de cette pétition au bureau des renseignements.
- Sur les conclusions de la commission, cette
pétition sera déposée au bureau des renseignements.
_______________
M. Zoude, rapporteur.
- « Quatre propriétaires de carrières de pierres de meules demandent la
prohibition des meules étrangères ou bien un droit de 50 p. c. à
l’entrée. »
Les pierres étrangères ne sont admises en France
que par la voie de mer et à un droit assez élevé.
Le tarif protecteur de
M. le ministre de l’intérieur étant en position de
se faire donner des renseignements précis à cet égard, votre commission vous
propose de lui faire renvoi de cette pétition avec invitation d’en faire
rapport à la chambre.
- Sur la proposition de la commission, la chambre
ordonne le renvoi au ministre des finances.
M.
Zoude, rapporteur. « Le sieur Donner, négociant à Bruxelles, par
pétition appuyée par plusieurs fabricants de chapellerie du royaume, demande la
libre sortie des poils de lièvre et de lapin. »
Le pétitionnaire, pour justifier sa demande en ce
qui concerne les poils de lièvre, expose que les peaux venant de l’étranger
procurent par la couperie de leurs poils une
main-d’œuvre qui s’élève de 30 à 50 p. c. de leur valeur, mais que dans
l’intention de favoriser la chapellerie du pays, la sortie de ces poils est
frappée du droit de 101 fr. 58 c. (48 fl. des P.-B.) par 100 kil. Cependant la
chapellerie ne fabriquant plus guère que des chapeaux de soie, et le commerce
n’important plus de peaux que dans la proportion rigoureuse des besoins, force
est à la chapellerie d’employer les poils de qualité secondaire, parce que le
droit de sortie relativement à leur valeur est tellement excessif qu’il est
regardé comme prohibitif, et l’emploi de semblables poils compromet la réputation
de notre chapellerie si avantageusement connue en Europe sous le nom de
chapellerie flamande ; aussi la pétition du sieur Donner, se trouve appuyée de
la signature des principaux fabricant de chapellerie du royaume.
Le second objet de cette pétition concerne let
peaux de lapins, et on fait remarquer à ce sujet une de ces bizarreries qui ne
se rencontrent malheureusement que trop souvent dans le tarif des douanes dont
Cet objet qui paraît minime est cependant digne de
quelque attention. Il n’y a guère qu’un mois, cent mille de ces peaux sont
sorties par une seule expédition, et cependant la couperie
des poils en eût été effectuée dans le pays sans l’excessif droit de sortie.
Des dispositions douanières aussi absurdes ne
doivent pas être tolérées plus longtemps, et la commission prie même le
ministre d’aviser au moyen de faire droit à la juste demande du pétitionnaire ;
c’est pourquoi il a l’honneur de vous proposer de lui faire renvoi de cette
pétition.
M. Lebeau. - Je
demanderai aussi le renvoi de la pétition à la commission d’industrie. Je ferai
à l’occasion de ce mémoire une observation qui n’est pas sans importance ;
c’est qu’il faut se prémunir contre les demandes qui vous sont faites par
beaucoup d’industriels. Dans le cas dont il s’agit, l’exportation des poils de
lièvre et de lapin peut devenir l’objet d’un commerce assez considérable ; eh
bien, c’est d’après les instances des chapeliers que la libre sortie des poils
de lièvre et de lapin a été interdite, et aujourd’hui ce sont les mêmes
chapeliers qui s’associent à la réclamation du sieur Donner, pour que l’on
revienne sur la mesure qui a été prise.
- Le renvoi du ministre de l’intérieur et à la
commission d’industrie est ordonné.
M. Zoude, rapporteur.
- « Des propriétaires de bois d’Echternach, Diekirch, Médernach,
de Marche et de Neufchâteau réclament contre la pétition des maîtres de forges
de Luxembourg ayant pour objet d’élever le droit de sorte des charbons de bois
à 25 p. c. de leur valeur. Les pétitionnaires fondent pour la plupart leur
opposition sur la dépréciation du prix du bois de charbonnage, qui est telle
que, dans des ventes publiques dont ils produisent des extraits authentiques,
la corde de 2 stères et un dixième n’ont été vendus que 2 fr. 45 c. à 2 fr. 66
c., et dans l’arrondissement de Marche, de 1 fr, 50 c. à 2 fr ; que le prix
décroîtrait encore, si la concurrence étrangère était écartée par un droit
considéré comme prohibitif. »
Les pétitionnaires craignent ce fâcheux résultat
avec d’autant plus de raison que la production du pays surpasse de beaucoup les
besoins de la forgerie, non seulement de la forgerie actuelle lorsque la moitié
de ses établissements sont fermés, mais de la forgerie dans ses temps les plus
prospères, lorsque la province comptait 93 usines en activité qui pouvaient
consommer ensemble 568,000 stères de bois ; et, alors encore les maîtres de
forges de France, de Namur et Liége venaient y puiser une partie de leurs approvisionnements.
Il est vrai qu’à raison des chômages auxquels les usines sont forcées par
différentes causes, il y a une diminution dans la consommation des combustibles
; mais cette économie était plus que compensée par les charbons qui
s’expédiaient à destination étrangère à la province.
Or, messieurs, depuis 5 ans la province du
Luxembourg a toujours été en déclinant, à tel point qu’une grande partie de ses
usines est hors d’activité, tandis que celles de Namur et Liége, luttant
péniblement contre les établissements au coak, ont
déserté nos forêts ; en sorte qu’il est exact de dire qu’une quantité
considérable de bois est restée sans emploi et qu’il y a partout des coupes
arriérées.
On n’invoquera pas dans ce pays le défrichement
comme devant apporter une diminution de produits ; car, par la nature de leur
sol, l’immense majorité de nos forêts ne peut changer de destination.
La demande des maîtres de forges ne peut donc être
accueillie et d’autant moins que, quand les propriétaires forestiers se
résigneraient aux plus grands sacrifices, ils ne pourraient fournir qu’une
lueur bien passagère de prospérité à une industrie digne d’un meilleur sort,
mais qui est condamnée, sinon à périr, au moins à végéter dans un état de
langueur constante.
Cependant la nature avait tout fait pour établir le
siège de la forgerie dans le Luxembourg ; d’immenses forêts couvrent son sol
qui n’est guère lui-même qu’un amas inépuisable de minerais de fer ; des chutes
d’eau nombreuses y favorisent les emplacements d’usines. Mais les richesses
n’ont jamais acquis le développement dont elles étaient susceptibles, parce que
les routes y sont restées constamment dans un état complet d’abandon, et que
les éléments de la forgerie se composant de toutes matières pondéreuses, les
frais de transport absorbent la majeure partie de ses produits.
Ces difficultés de
communication sont telles qu’il est souvent arrivé que des fers expédies ont
resté six mois et plus pour parvenir à leur destination et c’est, chargés des
intérêts d’un retard aussi prolongé, de frais de transport excessifs, que les
fers doivent concourir sur les marchés de l’intérieur, avec ceux au coak si voisins, si abondants et d’une production aussi
prodigieuse ; il est évident que cette concurrence ne peut être soutenue que
pour autant que le charbon de bois soit au prix le plus minime, c’est-à-dire à
un prix qui soit la ruine des propriétaires forestiers.
Il est vrai qu’il existe à nos portes un débouché
beaucoup moins difficile et où les besoins sont nombreux ; mais la politique y
a élevé une barrière gardée par une douane prohibitive que l’on tentera en vain
d’abaisser, car derrière elle s’est élevée une ligne d’usines que
C’est donc une triste
vérité que les maîtres de forges du Luxembourg ne peuvent se dissimuler, c’est
que leurs établissements n’ont plus d’avenir, à moins que le gouvernement leur
tende une main secourable en faisant construire des routes et des canaux dans
le pays ; quelques maîtres de forges, et il en est dans cette enceinte, croient
qu’à ce premier moyen le gouvernement pourrait en ajouter un second, celui de
nous associer à la douane allemande, dans l’opinion où sont ces messieurs que
les fontes pourraient obtenir un écoulement facile dans les pays de
l’association. Sous ce dernier rapport, cette question pourrait être du ressort
de la commission d’industrie, c’est pourquoi votre commission vous propose le
double renvoi de ces pétitions à M. le ministre de l'intérieur et à la
commission d’industrie.
M. Berger. -
J’appuie le double renvoi à M. le ministre de l'intérieur et à la commission
d’industrie. Mais je crois qu’il faudrait quelque chose de plus. La question
soulevée par les pétitionnaires est d’une importance telle qu’il serait à
désirer que M. le ministre de l'intérieur voulût bien donner à ce sujet
quelques explications. En effet, les maîtres de forges demandent la prohibition
à la sortie des charbons de bois. C’est là une question très importante pour la
province du Luxembourg. Les propriétaires de bois se sont effrayés de cette
demande ; et les transactions se sont trouvées arrêtées. Il serait
important que le gouvernement rassurât les propriétaires de bois et rendît leur
cours aux transactions qui se traitent dans cette saison. Je demande donc qu’il
soit donné quelques explications.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - La question du droit à la sortie des charbons
de bois concerne le département des finances aussi bien que celui de
l’intérieur ; et je puis dès à présent donner tous les apaisements possibles à
l’honorable préopinant. J’aurai l’honneur de lui dire que le gouvernement n’a
aucunement l’intention de présenter, pour le moment, un projet de loi qui
change le droit de 6 p. c. existant à la sortie des charbons de bois. Je ne
crois pas que de longtemps encore il y ait lieu à changer ces droits. Ce n’est
que depuis peu de temps que les maîtres de forges demandent la prohibition de
la sortie des charbons de bois ; et en quel moment demandent-ils cette
prohibition ? Alors que le gouvernement français vient de faciliter sur
plusieurs points l’entrée en France les fers fabriqués au bois en Belgique. Je
ne pense donc pas qu’il y ait lieu à ce que le gouvernement présente un projet
de loi tendant à augmenter les droits à la sortie des charbons de bois, et
encore moins un projet de loi qui tendrait à prohiber la sortie des charbons.
M. Berger. -
Puisque M. le ministre des finances a donné toutes les explications que je
désirais, je retire ma motion.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M.
Zoude, rapporteur. - « Des propriétaires de minerai, de fer, de Petange, Lingen et Athus, demandent la libre exportation de ces
minerais. »
« Plusieurs exploitant de minerais de fer, de Merch, adressent la même demande. »
D’après ce que votre commission a eu l’honneur de
vous dire de l’état précaire de la forgerie dans le Luxembourg, vous pressentez
son opinion sur la sortie du minerai de fer ; la province en est des plus
richement dotées, et nous croyons les
minerais aussi inépuisables que les bassins houillers de Liége et du
Hainaut. Dès lors, si nous avons cru équitable de permettre la sortie des charbons de bois, nous serons conséquents
avec nous-mêmes, en vous proposant de consentir à la sortie du minerai de fer.
D’ailleurs, la masse des individus qui vivent de leur extraction, lavage et
charriage, est si considérable qu’elle nous fait une loi de fournir ainsi à
leur existence.
L’abondance de ce minerai excède à tel point les
besoins du pays qu’il est des localités où la charrie de 1.200 k. varie de 50
c. à 1 fr., prix qu’elle ne dépasse pas, au dire des pétitionnaires, et il doit
en être ainsi, d’après le nombre d’usines qui sont hors d’activité.
Il est sans doute douloureux de devoir provoquer la
sortie de nos matières premières ; mais dans la position où se trouve le pays,
nous croirions absurde de nous y opposer.
Toutefois, messieurs, pour que cette question soit
plus mûrie encore, nous vous proposons de la renvoyer à la commission
d’industrie et à M. le ministre de l’intérieur,
M.
Nothomb. - Je me bornerai maintenant à appuyer les conclusions de la
commission sur la demande des pétitionnaires. Mais je me propose de déposer
prochainement une proposition tendant à demander un projet de loi sur cet
objet. Il s’agit des intérêts des populations qui fournissaient autrefois le
minerai à
De deux choses l’une : ou il faut rendre à ces
populations le débouché extérieur, en changeant le tarif, ce que vous pouvez
faire ; ou il faut leur rendre le débouché intérieur, en relevant les forges
indigènes, ce qui est hors de votre pouvoir.
Je proposerai à la chambre de faire ce qui est en
son pouvoir c’est-à-dire de lever la prohibition. J’insisterai alors sur les
avantages de cette mesure, qui est absolument sans danger pour les usines
indigènes.
M. Berger. - Je
crois qu’il serait plutôt dans l’intérêt des pétitionnaires que ce fût le
gouvernement qui présentât la loi ; car il est à même de recueillir des
renseignements ; je crois même qu’il en a déjà pris. C’est pour connaître les
intentions du gouvernement à cet égard que je propose de renvoyer la pétition
au ministre de l’intérieur, avec demande d’explications. Si ces explications nous
apprennent que le gouvernement ne compte pas présenter une loi, il sera temps
alors qu’un membre de la chambre use dans ce but de son droit d’initiative.
M.
Nothomb. - J’attendrai volontiers ces explications, moyennant quelles
ne soient pas trop éloignées. Si elles tardaient trop, je les devancerais en
déposant une proposition de loi.
M. Pirson. - Toutes
ces demandes opposées de liberté de sortie et de prohibition vous font voir
combien il serait utile que les douanes française et belge fussent tout à fait
rayées sur la frontière commune à ces deux pays. J’espère que ce jour-là
arrivera.
Maintenant il est certain que de Sedan jusqu’à
Longwy les forges ne peuvent exister qu’avec le bois de notre pays. Ces usines
ne sont en activité que depuis environ 15 ans ; leur établissement n’a été
autorisé qu’à condition qu’elles s’approvisionneraient
du bois de notre pays. En effet nous touchons à une frontière française qui
manque tout à fait de combustibles ; les forges françaises ne peuvent exister
dans cette partie sans prendre du bois chez nous. D’un autre côté nous ne
pouvons trouver de débouché pour les fers du Luxembourg, parce que cette
province est entourée de pays qui ne manquent pas de fer.
Je vois au reste que
- Les conclusions de la commission sont adoptées ;
le renvoi avec demande d’explication à M. le ministre de l'intérieur, proposé
par M. Berger, est en outre adopté.
_______________
M. Zoude.,
rapporteur. - « L’administration du mont-de-piété de Bruxelles, qui
possède des los-renten, demande qu’il lui soit
délivré des coupons portant 5 p. c. d’intérêt. »
« Plusieurs propriétaires et habitants de la
ville d’Anvers se plaignent de l’élévation de la contribution foncière. »
La commission propose le dépôt de ces deux
pétitions au bureau des renseignements.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Zoude, rapporteur.
- L’industrie sétifère aurait été probablement beaucoup mieux appréciée en
Belgique, si le gouvernement avait fait publier les rapports qui lui ont été
présentés, d’abord par notre collègue M. Berger, comme organe de la commission
d’industrie, et puis par la commission spéciale chargée de l’examen des
pépinières mûriers, ; il eût été généralement connu alors que la nature de nos
terres est aussi favorable à cette culture qu’elle l’est en France, que dans
beaucoup de localités elle est supérieure à celles de Prusse, où le mûrier est
si abondant maintenant. On aurait su également que la nourriture du ver à soie
pouvant être assurée chez nous, son éducation devait y prospérer : qui ignore
en effet que la chaleur artificielle maintenue à un égal degré de température
est plus favorable au développement de cet insecte, qu’une atmosphère ardente,
mais sujette à des variations, cause fréquente de maladies qui souvent en
entraînent la destruction.
Pour ce qui est de la qualité des soies indigènes,
on était convaincu depuis longtemps qu’elle ne laissait rien à désirer ; mais
on était dominé par l’idée que nos soies étant une production forcée, le prix
devait en être tellement élevé que la culture en serait plus onéreuse qu’utile
au pays ; aussi la commission du gouvernement, dans son rapport du 29 septembre
1834, convient que l’industrie sétifère ne fait pas de progrès en Belgique, et
elle en attribue la cause à l’insuffisance des moyens protecteurs qui devraient
être longtemps continué, si l’on veut que cette industrie se naturalise en
Belgique.
En effet, la protection accordée à la culture du
mûrier se borne à la distribution assez rare de quelques jeunes plants et à
celle plus rare encore de trois médailles, dont l’une de 500 fl., en faveur de
la plantation la plus productive, une autre de 300 pour la plantation la plus
étendue et enfin une de 100 pour la pépinière la plus nombreuse et de la plus
belle venue. Ces médailles distribuées pour la première fois en 1834 ont été
obtenues par un seul propriétaire.
Mais ces récompenses honorables pour le savant qui
consacre ses veilles au besoin de la célébrité, pour le guerrier comme
témoignage de sa bravoure, pour l’industriel dont les produits exposés
publiquement lui ont mérité cette distinction qui ne peut qu’accroître la
prospérité de ses établissements ; ces récompenses, disons-nous, semblent
devoir être stériles pour les propriétaires fonciers qui veulent être assurés
d’abord de recevoir la valeur locative de leurs terres, et pour le cultivateur
à qui il faut aussi l’indemnité de ses frais de culture ; mais le planteur de
mûrier ne peut rien sans le ver à soie ; loin de cet insecte, le mûrier est
sans valeur, sans utilité ; aussi le planteur doit se charger de son éducation
et en vendre les feuilles à un éducateur, mais on sait qu’en général le riche
propriétaire est peu disposé à prendre ces soins minutieux qui seuls peuvent
assurer une bonne réussite, soins qui exigent des connaissances spéciales que
la commission du gouvernement conseille de prendre dans la lecture de bons
livres, mais que nous croyons plus faciles à acquérir à l’aide d’hommes
instruits qui, joignant l’exemple au précepte, formeront des élèves qui,
planteurs à leur tour, pourront rendre cette industrie populaire.
Cette leçon se donne à Meslin-l’Evêque,
mais elle ne suffit pas ; elle devrait être répétée dans toutes les localités
où le mûrier présente des ressources suffisantes pour y établir une magnanière.
Le gouvernement accorde encore un florin par kilo
de cocon ; mais sa commission spéciale n’a pas beaucoup de foi elle-même dans
cet encouragement comme pouvant être suffisant.
Si nous voulons réussir, nous devons imiter nos
voisins, en employant les mêmes moyens qui ont fait prospérer cette industrie
chez eux.
En France où elle est acclimatée depuis si
longtemps, les mûriers cultivés aux frais de l’Etat sont distribués
gratuitement tous les ans ; des primes sont accordées dans les localités où
cette industrie est naissante, et sous Napoléon des hommes spéciaux étaient
envoyés dans les départements pour aider de leurs conseils et de leurs lumières
les planteurs et les éducateurs ; aussi les produits, qui dans les premières
années de l’empire n’étaient que de 20 à 30 millions, se sont élevé successivement
jusqu’à 100 millions.
En Prusse, le gouvernement distribue les mûriers,
salarie les éducateurs dans toutes les localités où le besoin s’en fait sentir,
et procure, en outre, les instruments à dévider et autres ; et déjà en 1831 on
évaluait la récolte de la soie à 10 millions de fr. ; elle s’est accrue depuis,
et c’est de ce pays que nous tirons la soie pour la confection de ces chapeaux
dont le bon marché a fait presque renoncer à l’usage de ceux en feutre, ce qui
a fait un grand tort à notre chapellerie.
Si nous avons perdu cette fabrication, cherchons à
en indemniser le pays en y favorisant la production de cette matière. Le
gouvernement le peut, et nous croyons qu’à l’instar de
La commission d’agriculture et toute la province de
Liège portent le plus vif intérêt à son établissement, et la commission
d’industrie supérieure, dans son rapport au Roi du 30 janvier 1835, avait déjà
réclamé des encouragements en sa faveur.
Par tous ces motifs, nous avons l’honneur de vous
proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l’intérieur avec
demande d’explications.
- Ces conclusions sont adoptées.
M.
Ullens, rapporteur. - « Par pétition en date du 11 mai 1835, le
sieur L.-A. Warnkœnig, professeur à l’université de
Gand, adresse des observations sur le projet de loi contenant le titre III de l’instruction
publique, présenté par la section centrale. »
La commission, attendu que ce titre III relatif à
l’enseignement supérieur est maintenant converti en loi, propose l’ordre du
jour.
M. de Jaegher.
- M. Warnkœnig est à même de traiter avec
connaissance de cause les questions relatives à toutes les branches
d’enseignement ; il faudrait au moins ordonner le dépôt de la pétition au
bureau des renseignements.
M. A. Rodenbach.
- Puisque la loi est votée, c’est une affaire complètement terminée ; la
pétition est donc sans objet. J’appuie en conséquence l’ordre du jour.
M. Dumortier. -
Je ne puis consentir à l’ordre du jour demandé par la commission, parce qu’il y
a toujours quelque chose d’injurieux dans cette décision.
Plusieurs membres. - Non ! non !
M.
Dumortier. - Dans tous les cas, quelle que soit la manière de voir de
chacun à cet égar., vous penserez avec moi que quoique la loi d’instruction
publique soit votée, il peut se présenter dans la pétition de M. Warnkœnig des renseignements utiles pour d’autres parties
de la législation. Je demande donc que la pétition soit déposée au bureau des
renseignements. Ce n’est pas une demande que l’on vous adresse, ce sont des
considérations qu’une personne a bien voulu vous adresser sur une matière en
discussion. Au lieu de voter l’ordre du jour, vous devriez plutôt adresser des
remerciements à ces personnes. Je m’oppose donc à l’ordre du jour.
M. Verdussen. -
L’honorable préopinant vient vous dire que l’ordre du jour a toujours quelque
chose d’injurieux. Ce n’est nullement mon opinion. Tous les jours on propose
l’ordre du jour à propos de pétitions sur des lois déjà votées. Mais l’on vous
dit qu’ici il n’est pas même question d’une pétition ; ce n’est que sur des
pétitions que l’on devait demander de statuer. Si M. Wanrkoenig
n’a adressé que de simples considérations à la chambre, il n’y avait pas lieu
de renvoyer son mémoire à la commission des pétitions ; il aurait fallu décider
le renvoi au bureau des renseignements ou le dépôt à la bibliothèque.
Le mémoire de M Wanskœnig
nous a été envoyé à l’époque de la discussion du projet de loi d’instruction
publique. Maintenant que le titre III a été voté, il n’y a rien d’injurieux ni
pour les renseignements, ni pour la personne qui les adresse, dans l’ordre du
jour. En conséquence je me prononce pour l’ordre du jour.
M. de Jaegher.
- Je ne ferai qu’une simple question à M. le rapporteur. N’est-il pas question
des jurys d’examen dans le mémoire de M. Warnkœnig ?
Vous savez, messieurs, que cette institution sera soumise à une révision. Le
dépôt au bureau des renseignements dans ce cas ne serait pas sans utilité.
M. A. Rodenbach.
- Pour terminer toute discussion, je propose le dépôt à la bibliothèque.
M. Ullens, rapporteur.
- Je répondrai à l’honorable M. de Jaegher qu’en effet il est question tes
jurys d’examen dans le mémoire de M. Warnkœnig.
- L’ordre du jour proposé par la commission est mis
aux voix et n’est pas adopté.
Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.
_______________
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du 9 mai 1835, la régence de Louvain renouvelle
sa demande que l’université de cette ville soit conservée. »
Ordre du jour.
- Adopté.
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du 11 mai 1835, six armateurs, à Nieuport,
demandent que la chambre adopte une loi qui fixe les primes à allouer aux
différentes branches de la grande pêche nationale. »
La commission conclut au renvoi à la commission spéciale.
M. Dubois. - J’ai
déjà eu l’honneur de démontrer à la chambre combien il était important de
s’occuper de l’objet traité par la pétition des armateurs de Nieuport. Un
projet de loi présenté sur les primes pour la grande pêche par M. le ministre
de l’intérieur a été renvoyé à une commission spéciale. J’ignore à quel point
elle en est de son travail. Cependant, la prochaine discussion du budget de
l’intérieur, où il est proposé des primes à accorder à la grande pêche, rend l’examen
de ce projet indispensable. Depuis cinq ans les armateurs promettent aux
matelots leur part dans des primes pour la pêche. Cette promesse a jusqu’à
présent engagé ces braves gens à entreprendre des expéditions. Il est à
craindre qu’ils ne finissent par se lasser d’attendre. Je demanderai donc à un
membre de la commission si l’examen du projet de loi est avancé.
M. Mast de Vries.
- Comme membre de la commission, je répondrai qu’elle n’est pas encore parvenue
à se réunir.
M. A. Rodenbach.
- La grande pêche est pour nos ports un objet d’une haute importance. Je suis
étonné que la commission n’ait pas été convoquée. Je prie M. le président de
vouloir faire cette convocation, cela est très important. Si l’on tarde plus
longtemps à accorder des encouragements à la pêche nationale, les armateurs
émigreront en France où l’on accorde des primes.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
_______________
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du 4 juillet 1835, le sieur Gilbert-Frère,
instituteur à Bruxelles, demande que le gouvernement emploie la troupe de ligne
à la construction des routes. »
Renvoi au ministre de la guerre.
- Adopté.
_______________
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du … juillet 1835, plusieurs propriétaires et
cultivateurs de la commune de Glin demande un
dégrèvement de contributions. »
Ordre du jour.
- Adopté.
_______________
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du 5 août 1835, le chevalier Lelièvre
de Stanmont, à Namur, demande une loi de censure sur
la presse. »
Ordre du jour.
- Adopté.
M. Ullens, rapporteur.
- « Par pétition en date du 31 juillet 1835, les sieurs-Campion et
Plaisant demandent que la chambre augmente au plus tôt le personnel du tribunal
de Charleroy. »
La commission conclut au renvoi au ministre de la
justice.
M. Frison. -
Messieurs, je viens appuyer le renvoi à M. le ministre de la justice, et
j’espère qu’il fera enfin droit aux demandes de toutes les localités qui
réclament une augmentation de personnel que l’on pourra justifier. Je suis loin
de suspecter les bonnes intentions de M. le ministre, mais je ne puis
m’empêcher de dire que je regarde comme une fin de non-recevoir le retard qu’il
apporte à présenter un projet de loi qui fasse taire toutes les réclamations en
y faisant droit.
Si la cause du tribunal de
Charleroy avait besoin de pétitions pour constater l’insuffisance de son
personnel, vous en recevriez, messieurs, par centaines : mais c’est un fait
qu’il est impossible de contester, et que les tableaux annexées au compte-rendu
par M. le ministre sur l’administration de la justice criminelle en Belgique ne
font que corroborer ; il en ressort que le tribunal de Charleroy est de ceux
qui ont eu à juger en 1883 et 1834 le plus grand nombre d’affaires
correctionnelles. Les affaires civiles ne font que croître chaque jour, et je
ne vous dirai plus la cause de cette augmentation, je vous en ai déjà
entretenus trop de fois.
Je dis donc, messieurs, qu’il est très facile à M.
le ministre d’obtenir les renseignements sur le besoin d’augmenter le personnel
de plusieurs tribunaux ; ceux qui peuvent justifier leur demande ont intérêt à
transmettre leurs tableaux le plus tôt possible, et certes ils, l’ont fait : je
puis affirmer que déjà le 2 août dernier les tableaux de Charleroy pour le
premier semestre de 1835 sont parvenus au ministère : les tribunaux qui ne
peuvent appuyer leurs réclamations, n’adresseront point de pièces
justificatives, quelque délai qu’on leur accorde. Or, que M. le ministre
demande les tableaux dans un délai fatal, et il sera bientôt à même de
satisfaire à un besoin de justice, qui est un droit constitutionnel, et il ne
rejettera pas toujours nos demandes, je le répète, par une espèce de fin de
non-recevoir. Je reviendrai encore sur ce sujet lors de la discussion du budget
du département de la justice.
M. le ministre de la justice
(M. Ernst). - Pour prouver qu’il n’est nullement question de fin de
non-recevoir et que le gouvernement n’est aucunement en demeure d’augmenter le
personnel du tribunal de Charleroy, il suffit de rappeler les faits. La chambre
est saisie d’une proposition tendante à augmenter le
personnel du tribunal de Charleroy. Ainsi il ne faut pas accuser le
gouvernement de n’avoir pas présenté un projet de loi. Indépendamment de cette
proposition, il en a été présenté d’autres pour d’autres tribunaux de première
instance tendant également à en augmenter le personnel. La section centrale,
après avoir examiné toutes ces propositions et pris connaissance de tous les
renseignements qui lui on été fournis spécialement en ce qui concerne le
tribunal de Charleroy, a pensé qu’il ne pouvait pas être statué avant que le
ministre de la justice eût fourni un rapport détaillé.
Je me suis engagé alors à
fournir à la section centrale des tableaux statistiques indiquant les travaux
faits par les tribunaux de
Je tiens à honneur que ce travail soit présenté le
plus tôt possible. Il me semble donc qu’il n’y a pas lieu d’accuser le
gouvernement. Quand le gouvernement fait tout ce qu’il peut, il fait tout ce
qu’il doit. Il n’est donc pas question, je le répète, de fin de non-recevoir.
D’ailleurs, quel intérêt le gouvernement aurait-il
à désirer que le personnel d’un tribunal ne soit pas augmenté ? Si le personnel
du tribunal de Charleroy est augmenté, il aura des nominations à faire. Il
pourra satisfaire aux demandes d’une foule de jeunes gens qui désirent
embrasser la carrière de la magistrature.
M. de Behr. - M.
le ministre de la justice a présenté un projet de loi sur la compétence des
tribunaux en matière civile. Dans ce projet un moyen est indiqué pour évacuer
l’arriéré des tribunaux, Il me semble que ce projet devrait être examiné avant
de statuer sur les différentes propositions pour l’augmentation du personnel de
certains tribunaux.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - Il est vrai, comme vient de le
dire l’honorable préopinant que j’ai eu l’honneur de présenter à la chambre un
projet de loi sur la compétence des tribunaux où il est indiqué un moyen de
vider l’arriéré des causes. Mais ce moyen n’est bon que lorsque l’arriéré tient
à des causes temporaires. J’ai reconnu que quand cet arriéré était dû à des
causes permanentes, il y avait lieu d’augmenter le personnel du tribunal.
Lorsque j’aurai déposé sur le bureau le travail statistique dont j’ai parlé
tout à l’heure, la chambre verra si l’arriéré des causes du tribunal de
Charleroy tient à des suites permanentes. Alors la commission pourra donner
suite au projet dont elle est saisie. Si, au contraire, l’arriéré tient à des
causes temporaires, la commission présentera les conclusions qu’elle jugera
convenable de prendre dans ce cas. De quelque manière que l’on envisage la
question, l’on ne peut faire droit immédiatement à la proposition de
l’honorable M. Frison.
Il n’est donc pas nécessaire de renvoyer la
pétition dont il s’agit en ce moment au département de la justice pour mettre
le ministre en demeure d’y faire droit. Je n’accepterai ce renvoi qu’à titre de
renseignement et comme pouvant être utile sous ce rapport. C’est dans ce sens
que je ne m’oppose pas aux conclusions de la commission.
M.
Gendebien. - M. le ministre de la justice vient de dire que s’il était
reconnu que l’arriéré du tribunal de Charleroy tînt à des causes permanentes,
il y aurait lieu d’en augmenter le personnel. Mais c’est un point qu’il est
impossible de contester. Je l’ai déjà dit, le personnel du tribunal de
Charleroy est le même qu’il était il y a 40 ans, et cependant depuis 15 ans
tout a doublé dans cet arrondissement. Il suffit de consulter le tableau de
l’arriéré des causes pour se convaincre que cet arriéré s’accumule tous les
jours. On n’ignore pas que l’arrondissement de Charleroy a été longtemps
victime de la politique ; il a été longtemps privé de toute espèce de
communication, parce qu’on le considérait comme une barrière dans l’Allemagne
contre les invasions de
Comment voulez-cous que le nombre d’affaires n’ait
pas suivi la même progression ascendante ? Cependant le personnel du tribunal
s’est trouvé réduit par suite de décès à tel point qu’il n’y a pas longtemps ii
n’y avait au tribunal de Charleroy que deux juges assistés de juges suppléants
; pour peu que cela continue, il sera même impossible de se mettre au courant
des affaires en doublant le personnel.
M. le ministre verra bien que l’arriéré tient à des
causes permanentes. Pour moi, j’espère qu’avant dix ans d’ici vous serez
obligés de créer une troisième chambre parce que les affaires iront toujours
croissant. Je le répète, il n’y a pas dans tout le pays un tribunal qui ait
plus besoin d’une augmentation du personnel.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - L’honorable préopinant dit que
le tribunal de Charleroy s’était trouvé réduit un jour à un personnel de deux
juges seulement. Le gouvernement n’a jamais été en retard d’augmenter le
personnel quand cela a dépendu de lui. Il n’y a en ce moment qu’une place
vacante, celle du président, et c’est parce qu’il ne dépend pas du gouvernement
de la remplir. Je rappellerai à la chambre que quand un ancien juge a demandé
sa retraite, le gouvernement s’est montré si désireux d’éviter une lacune qu’en
la lui accordant, il a par le même arrêté nommé son successeur.
L’honorable préopinant a dit que l’arriéré du tribunal
de Charleroy tient à des causes permanentes. Je suis très porté à le croire.
C’est dans ce sens que j’ai parlé après l’honorable M. de Behr. Ces causes
permanentes sont très suffisantes pour nécessiter la création d’une seconde
chambre. Là est toute la question. C’est pour la décider que des renseignements
statistiques seront présentés à la commission. La chambre connaît comme moi,
l’état du tribunal de Charleroy. Mais la commission n’a pas cru ces
renseignements suffisants. En présence de plusieurs demandes, elle n’a pas cru
pouvoir statuer sur l’une sans statuer sur l’autre. C’est dans ce but qu’elle
m’a demandé un travail général.
Ainsi l’honorable préopinant n’a pas besoin de
m’engager à examiner le tableau des affaires du tribunal de Charleroy pour que
je présente un projet de loi. Il pourrait tout au plus m’engager à terminer le
plus tôt possible mes recherches statistiques. Mais, comme je l’ai déjà dit,
cet avertissement serait inutile, attendu que je fais tout ce qu’il dépend de
moi pour en accélérer l’achèvement.
M.
Gendebien. - Il résulte des paroles de l’honorable ministre de la
justice que vous allez soumettre l’augmentation du personnel du tribunal de
Charleroy à des conditions tout à fait indépendantes des motifs qui nécessitent
cette augmentation. De ce qu’il sera ou ne sera pas nécessaire d’augmenter le
personnel de tel tribunal, les droits de celui de Charleroy en seront-ils plus
ou moins fondés ? Tel arrondissement pourrait avoir adressé une demande non justifiée
par la nécessité. Notez que c’est une supposition, je n’entends rien préjuger à
cet égard. Mais quelle lumière pourrez-vous acquérir de l’examen de la demande
de cet arrondissement, qui vous éclaire dans la question du tribunal de
Charleroy ? Je demande que l’on pourvoie au plus nécessaire ; car si la marche
indiquée par M. le ministre est réellement suivie, il eu résultera que si une
demande non justifiable a été adressée par un arrondissement, on fera attendre
le plus longtemps possible les renseignements qu’il aura demandés pour éclairer
la question, et de cette manière la demande très juste du tribunal de Charleroy
souffrira un retard parce qu’une demande non motivée vous aura été adressée.
Je suis persuadé que M. le ministre de la justice
est convaincu comme moi de la nécessité d’augmenter le personnel du tribunal de
Charleroy. Je suis sûr qu’il ne me donnera pas un démenti à cet égard. Je le
prie de me dire si les raisons qu’il donne pour retarder la mesure dont
lui-même reconnaît l’urgence sont valables.
Il suffit, messieurs, d’avoir quelque connaissance
de la marche des tribunaux, il suffit de jeter les yeux sur le tableau des
affaires pour acquérir la conviction que le tribunal de Charleroy ne peut
marcher avec le personnel qu’il a.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - L’honorable M. Gendebien dit
que la question d’augmentation du personnel du tribunal de Charleroy est
indépendante de l’augmentation demandée par d’autres tribunaux. Je ne suis pas
de son avis et je le crois, à cet égard dans une complète erreur.
En effet, pour savoir si le personnel du tribunal
de Charleroy est suffisant ou insuffisant, il ne suffit pas de savoir qu’il y a
arriéré dans l’expédition des affaires. Il faut encore savoir s’il pourrait ne
pas y avoir d’arriéré.
Si l’on fait à Charleroy autant qu’on fait dans
d’autres tribunaux, plus ou moins il faut comparer le tribunal de Charleroy
avec tel ou tel autre tribunal, par exemple avec celui de Tournay. Dans tel
tribunal par exemple, il n’y a que trois audiences par semaine, ailleurs il y
en a cinq ou six. Là les audiences durent trois ou quatre heures, ici deux
heures seulement. Dans tel arrondissement la privation d’un président nuit à la
marche régulière et prompte de la justice. Toutes ces considérations doivent
être appréciées. Je déclare que je ne fais allusion à aucun tribunal :
l’affaire n’est pas instruite, après nous jugerons en connaissance de cause.
L’honorable préopinant me dit que j’ai la
conviction que le tribunal de Charleroy ne peut pas satisfaire aux affaires
portées devant lui, et qu’il faut en augmenter le personnel. Non, messieurs, je
n’ai pas cette conviction, mais je suis disposé à croire que le tribunal de
Charleroy est dans cette situation, parce que beaucoup de personnes en qui j’ai
la plus grande confiance et qui étaient à même de le savoir, me l’ont souvent
assuré. Pour nous engager à faire une dépense, il ne faut pas seulement
supposer un besoin, il faut en avoir la certitude, et cette certitude ne me
sera acquise que par la comparaison des affaires soumises aux différents
tribunaux, et des jugements de toute espèce qu’ils ont rendus.
M. Dumortier. -
J’avais demandé la parole pour présenter une partie des observations qui
viennent d’être faites par M. le ministre de la justice. Je ne suis pas d’avis
qu’il faille accorder à la ville de Charleroy ce qu’elle demande, n’importe ce
qui est connexe ; je pense au contraire que si on veut rendre justice, il faut,
par un seul et même contexte, la rendre en même temps aux tribunaux de Tournay,
Dinant, Verviers, qui réclament avec non moins de
fondement que Charleroy.
On ne s’oppose pas aux augmentations du personnel
des tribunaux dans les hypothèses dont a parlé M. le ministre de la justice et
dont plusieurs sont des réalités. Si nous jetons les yeux sur les
développements de la proposition de M. Frison, nous voyons que les juges de
Charleroy tenaient soigneusement trois audiences civiles et une audience
correctionnelle par semaine, tandis qu’à Tournay le tribunal tient par semaine
quatre ou cinq audiences civiles et une ou deux audiences correctionnels. Les
juges du tribunal de Tournay siègent donc le double des juges de Charleroy.
Cela n’empêche pas que depuis vingt ans un arriéré considérable existe et que
toute l’assiduité du tribunal n’a pas encore pu le faire cesser.
Que le ministre se fasse
rende compte des travaux de chaque tribunal, ce sera un moyen de s’éclairer, et
il ne sera plus si disposé à croire que le tribunal de Charleroy a besoin d’une
augmentation de personnel.
Je voudrais qu’on ne fît aucune augmentation, parce
que je suis certain qu’une fois qu’on sera entré dans cette voie, tous les
tribunaux viendront demander des augmentations de personnel. Mais si on accorde
une augmentation au tribunal de Charleroy, dont l’arrondissement est de 50,000
âmes moindre que celui de Tournay, on me permettra d’élever la voix en faveur
de la ville que je représente, et qui, comme je l’ai déjà dit, a un arriéré
considérable.
Je pense qu’il sera très sage d’attendre la loi
concernant les attributions judiciaires et la loi provinciale, avant de rien
décider sur ces questions. Personne n’ignore que depuis que le premier
président du tribunal de Charleroy, homme très capable, est venu à la cour de
Bruxelles, un vide très grand s’est fait remarquer dans ce tribunal, et pour
combler ce vide, il faut que la loi provinciale soit mise à exécution. Quand
cela sera fait, on verra comment marchera le tribunal avec sous nouveau
président el s’il y a lieu encore d’augmenter le personnel.
M. Pirmez. - Je ne
puis pas comprendre la nécessité de comparer les travaux des divers tribunaux
pour savoir si dans un tribunal le personnel doit être augmenté. Le ministre
doit s’enquérir si dans telle partie du pays la justice est rendue, et si elle
ne l’est pas, faire en sorte qu’elle le soit, sans rechercher si dans d’autres
parties du pays la justice manque.
Je ne pense pas qu’on veuille compter les causes
pour apprécier le travail des tribunaux, car il ne faut pas seulement
considérer le nombre des causes, mais leur nature. Il pourrait se faire que le
tribunal de Charleroy eût à statuer sur la moitié moins de causes que le
tribunal de Tournay, et eût malgré cela besoin d’un personnel plus nombreux.
L’honorable préopinant
disait que le tribunal de Charleroy ne donnait que trois audiences par semaine.
Cela ne prouve pas que ce tribunal soit moins occupé ; cela vient de ce que les
causes exigent un plus long délibéré. La comparaison qu’on veut faire n’amènera
aucun éclaircissement sur la question dont il s’agit.
Si le ministre est persuadé que la justice manque à
Charleroy, comme l’était son prédécesseur, il doit y pourvoir sans chercher à
établir des comparaisons. Si dans d’autres parties du royaume il trouve qu’elle
manque aussi, il doit y pourvoir aussi.
Si les propositions sont faites par des membres,
sans doute chacun viendra parler pour sa chapelle.
M. Dumortier. -
Et vous, vous parlez pour la chapelle de tout le monde.
M. Pirmez. - Sans
doute, le ministre de la justice est plus à même qu’aucun de nous de voir si la
justice est rendue ou non, et son devoir est de la faire rendre là où il est
convaincu qu’elle ne l’est pas.
M.
A. Rodenbach. - La chambre est saisie d’un projet de loi, le ministre
n’a plus qu’à fournir son rapport statistique. C’est à la commission qui est
chargée de ce travail, à s’empresser de voir si le tribunal de Charleroy a
besoin d’une augmentation du personnel. Mais, comme je l’ai déjà dit, nous
devons être très sobres de ces augmentations. On a dit que le tribunal de
Tournay tenait cinq audiences par semaine, tandis que le tribunal de Charleroy
n’en tient que trois. Si vous admettez facilement ces augmentations, les
tribunaux qui ne tiendraient que deux audiences pourraient aussi venir en
demander. Il faut voir si dans ces tribunaux on travaille.
Nous sommes saisis d’un projet de loi qui a pour
but de modifier la compétence des tribunaux. Ce projet va peut-être diminuer de
beaucoup le travail des tribunaux et rendre inutile l’augmentation de leur
personnel. Ainsi il ne faut pas se presser de voter des augmentations, non plus
pour Charleroy que pour les autres tribunaux.
Je ferai observer que Charleroy ne demande pas
seulement une augmentation de juges, mais aussi un changement de classement. Il
faut prendre le temps d’examiner cette double demande. D’autres demandes
semblables ont été faites. Je demande qu’on les ajourne jusqu’après la loi
relative aux attributions parce que je suis persuadé que cette loi permettra de
réduire le nombre des juges.
M. Gendebien. -
Je prends la parole pour la troisième fois ; je prie la chambre de me le
pardonner, je serai très court.
A entendre certains honorables membres, il
semblerait qu’on veut arracher un vote à la chambre. Depuis un an cependant, la
chambre est saisie de la demande du tribunal de Charleroy. On a eu le temps de
se prémunir contre toute espèce de surprise.
On vous a dit qu’à Tournay le tribunal siégeait
cinq et six fois par semaine. A Charleroy il y a quatre audiences civiles
fixes, et le jour d’audience correctionnelle, le tribunal siège le matin et
après-dîner. On tient ensuite audience pour les affaires civiles toutes les
fois qu’on peut disposer d’une journée. Il faudrait connaître la nature des
causes pour apprécier le travail du tribunal de Charleroy. Il y a telle affaire
dont il est saisi depuis deux ou trois ans et sur laquelle il doit revenir dix
ou onze fois pour ordonner des enquêtes et des expertises.
Vous concevrez la
difficulté que présente la solution des questions, quand il s’agit de travaux
d’expertise sous terre, ce qui a lieu dans tous les procès entre exploitants de
mines de houille. Je connais tel procès dont le tribunal de Charleroy est resté
saisi pendant quatre ans. Il y a des enquêtes pour la lecture desquelles il
faudrait trois mois. Ces enquêtes se font encore en dehors des audiences. Je
puis assurer que malgré cela le tribunal de Charleroy siège au moins cinq jours
par semaine, si pas six ; et quand il lui arrive de ne pas siéger le sixième
jour, c’est qu’il y a un nombre de juges employés à des enquêtes ou autres
devoirs et qu’il n’y a pas moyen de composer la chambre.
Qu’on ne vienne donc plus parler de comparaison,
surtout qu’on ne vienne pas comparer le nombre des causes de ce tribunal avec
celui de tel autre tribunal.
Il y a tel arrondissement où il n’y a que de très
petites causes, peu importantes et qui ne présentent pas de difficulté, tandis
qu’à Charleroy ce sont des causes d’une valeur considérable. Il n’est pas rare
que ce tribunal ait à prononcer sur une valeur de deux à trois millions. Vous
comprenez qu’on ne décide pas aussi vite une question de cette importance
qu’une affaire où il s’agit de deux à trois cents francs ou de la propriété
d’un mur mitoyen.
On semble induire de mes paroles que nous ne
voulons pas que justice soit faite à tous. Mais, au contraire, que les
tribunaux de Dinant et du Luxembourg se mettent en
mesure de justifier leurs demandes, et si leur affaire est instruite avant
celle de Charleroy, je ne demande pas mieux qu’on leur donne la priorité.
Je ne conçois pas comment on peut retarder l’acte
de justice que réclame le tribunal de Charleroy, sous le prétexte que
l’instruction n’est pas complète par rapport aux autres tribunaux.
Il suffit de considérer l’augmentation successive
des causes soumises au tribunal de Charleroy et la nature de ces causes pour
être convaincu de la nécessité d’augmenter son personnel.
M. Dubus. -
Toute décision sur la question dont il s’agit serait prématurée. Je pense que
ce n’est pas maintenant que nous devons prononcer sur les demandes
d’augmentation de personnel qui ont été faites par certains tribunaux ; c’est
quand la chambre sera saisie de la proposition, que pourront être fournies les
raisons justificatives des demandes faites.
Je remarque seulement que certains honorables
membres veulent, dans cette question, mettre un tribunal seul hors de pair.
On parle toujours en ce sens qu’il n’y a plus de
doute sur la justesse de la demande du tribunal de Charleroy, tandis qu’il en
existe encore sur les demandes d’autres tribunaux.
Je ne pense pas que le
tribunal de Tournay soit en retard de fournir les documents qui lui sont
demandés, ainsi que le ferait supposer ce qu’a dit l’honorable M. Gendebien ;
je suis convaincu que ce retard n’existe pas.
Je crois que le ministre de la justice a pris les
mêmes mesures à l’égard de tous les tribunaux et qu’il s’occupe d’un travail
général ; c’est-à-dire qu’il s’occupe à vérifier les documents qui lui sont
soumis, car il ne fallait pas s’en rapporter à ces documents.
M. le ministre de la justice
(M. Ernst). - C’est ainsi que cela se fait.
M.
Dubus. - Quoique les justiciables de Tournay souffrent, je ne demande
pas que l’on se hâte. Que l’on examine toutes les réclamations, que l’on
vérifie tous les faits allégués ; plus on vérifiera et plus on se convaincra
que la réclamation de la ville de Tournay est fondée.
Je n’avais que ces observations à faire. Je ne
pense pas qu’il y ait lieu à prendre des mesures exceptionnelles relativement
au tribunal de Charleroy.
M. Gendebien. -
Je ne puis me dispenser de faire remarquer que je n’ai pas demandé une mesure
exceptionnelle pour le tribunal de Charleroy. J’ai dit que si l’instruction
était terminée pour le tribunal de Tournay, il fallait délibérer sur la demande
faite par ce tribunal, et que si l’instruction était faite relativement au
tribunal de Charleroy, je ne comprenais pas qu’on ajournât la délibération
concernant sa demande. Je ne veux pas de précipitation ; mais si toutes les
pièces sont prêtes pour Charleroy, il faut s’occuper de Charleroy ; c’est ce
qu’indique le bon sens. S’il est vrai, comme l’a énoncé l’honorable préopinant
que les rapports des divers tribunaux étaient arrivés au ministère de la
justice, alors c’est au ministre qu’il faut adresser des reproches sur les
retards que l’on éprouve.
M. le ministre de la justice
(M. Ernst). - C’est bien à tort que l’honorable préopinant veut me
renvoyer le reproche ; et pour le prouver je n’ai qu’à rappeler ce que j’ai
dit. J’ai fait tous mes efforts pour faire rentrer les documents demandés aux
tribunaux. Mais quelques-uns n’ayant pas un intérêt aussi pressant que celui de
Charleroy, n’ont pas mis le même empressement à m’envoyer leurs rapports. Au
reste, tous les tribunaux ne pouvaient m’envoyer leurs documents avec la même
célérité. Quoi qu’il en soit, je ne comprends pas comment on peut faire des
reproches au ministre relativement à ce qui se passer pour le tribunal de
Charleroy, La chambre est saisie d’une proposition, c’est à elle statuer. Mais
elle demande des renseignements ; si elle veut discuter la demande faite par le
tribunal de Charleroy avec les renseignements qu’elle possède, libre à elle.
Cependant je dis qu’elle fera sagement d’attendre que les renseignements concernant
tous les tribunaux lui soient soumis.
- Le renvoi au ministre de la justice est ordonné.
M. le président. -
Il a été déposé sur le bureau la proposition formulée de M. de Behr.
D’après cette proposition, on discuterait quand la délibération sur le budget
de la guerre serait terminée :
1° Le projet de loi relatif au personnel de la cour
de Bruxelles ;
2° Le projet concernant les tribunaux de Hasselt et
de Verviers ;
3° Le budget de la justice ;
4° Le budget des affaires étrangères et de la
marine.
M.
de Puydt. - Je rappellerai à la chambre que j’ai proposé de mettre à
l’ordre du jour, comme urgent, le projet de loi relatif aux péages, amendé par
le sénat.
M.
de Behr. - Messieurs, je dois vous faire observer que le ministère de
la justice ne peut éprouver de retard dans la discussion de son budget : il
faut qu’il ait des fonds pour continuer les travaux dans les ateliers des prisons.
Le budget du ministère de la marine est tout aussi
urgent que celui de la guerre.
On demande la priorité pour la discussion de la loi
sur les péages ; mais on ne donne aucun motif à l’appui de cette demande : à
moins qu’on ne démontre l’urgence de cette loi, je maintiens la priorité pour
les autres.
M.
F. de Mérode. - Il y a beaucoup de motifs pour donner la priorité à la
loi concernant les péages. C’est une loi d’intérêt général. Je sais bien que
les budgets sont aussi d’intérêt général ; mais on peut les retarder en
accordant des crédits provisoires. Le sénat a fait une modification à la loi
sur les péages, modification qui peut ne pas rencontrer ici de grandes
difficultés à être admise ; en sorte que la loi passerait en une demi-heure,
une heure au plus. Cette loi a été déclarée urgente, elle n’a pas changé de
nature depuis qu’elle vous a été soumise ; dans l’intérêt de l’industrie vous
ferez bien de vous en occuper.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - Sans m’opposer à ce que la loi
sur les péages soit discutée avant les autres, je ne peux m’empêcher de faire
observer que le budget du ministère de la justice est de toute urgence.
L’administration des prisons est la directrice des ateliers établis dans les
maisons de détention ; mais pour faire marcher ces ateliers il faut de
l’argent. Je me trouve déjà dans une position difficile à l’égard de ces
ateliers, et à la fin du mois la position serait des plus difficile
; ou il faudra que le budget de la justice soit voté, ou il faudra des crédits
provisoires.
M. de Puydt. - La
loi concernant les péages intéresse l’industrie d’une manière générale. Il ne
faut pas croire que deux ou trois affaires seulement soient en suspens faute de
loi, il y en a un grand nombre prêtes à être terminées
dans le Hainaut,
Par cela seul qu’un chemin de fer a été projeté
entre Sambre et Meuse, par exemple, de hauts fourneaux ont été construits ; de
tels intérêts ne peuvent pas rester en souffrance.
Quant à ce qui concerne le ministère de la justice
et celui de la marine il est facile d’y satisfaire par un crédit provisoire,
tandis qu’il n’est pas possible de donner satisfaction à l’industrie par une
mesure semblable.
M.
Gendebien. - Comment ne vous apercevez-vous pas que vous n’avez plus de
loi sur les péages et que rigoureusement parlant on ne peut plus rien faire,
car on ne peut pas même instruire une demande. Si une opération est telle que
des intérêts de tiers la compliquent on ne peut pas s’en occuper. Il faut donc
de toute nécessité que l’on porte une loi quelconque sur les concessions de
péages. Je déplore que le sénat ait introduit un amendement dans cette loi ;
mais nous sommes obligés d’examiner promptement cet amendement. Je m’étonne que
l’on vienne demander la priorité pour des lois relatives à des augmentations de
traitements ; je ne comprends pas que l’urgence soit si grande pour un tel
objet : j’ai toujours été de l’avis que la magistrature était
mal rétribuée ; mais le pays ne souffre pas parce que deux tribunaux auront des
salaires moins élevés.
Quand on repousse la réclamation des tribunaux dont
le personnel est insuffisant, comment peut-on faire la
proposition malencontreuse d’augmenter le traitement d’autres tribunaux ?
Je conviens qu’il y a urgence pour les budgets de
la marine et de la justice ; mais je ne vois aucun inconvénient à leur accorder
des crédits provisoires, pour un ou deux mois avant de les discuter.
Je ne comprends pas comment, alors que l’on a eu
tant de peine à sortir de ces crédits provisoires qui étaient si commodes pour
le ministère, on trouve tant de difficultés aujourd’hui à demander un crédit
sur des objets spéciaux, tels que les prisons et le traitement de la marine ;
objets qui ont été déjà soumis à la discussion et qui seraient votés en un
instant. Que l’on demande ces crédits provisoires, ils seront, j’en suis convaincu,
accordés sans discussion.
Remarquez que vous n’avez plus de loi de péages ;
et que par suite, non seulement l’on ne peut plus accorder de concessions, mais
encore que vous compromettez des intérêts de tiers, d’où il résultera des
protestations et des demandes en nullité d’opérations.
N’arrêtez pas ainsi l’élan de l’industrie, qui
s’est relevée, pour ainsi dire, du milieu de nos troubles. On a jeté le
désespoir dans le pays en suspendant cette loi. Hâtez-vous de mettre un terme à
cet état de choses.
M. le ministre de la justice
(M. Ernst). - Je ne vois pas que l’on s’oppose à ce que le projet de
loi sur les péages soit mis à l’ordre du jour avant les projets énoncés dans la
proposition de l’honorable M. de Behr.
Il me semble qu’il sera facile de s’entendre, et je ne crois pas qu’il y ait
une longue discussion sur ce projet de loi.
Quant aux crédits provisoires, personne n’ignore
combien peu ils sont compatibles avec une comptabilité régulière. Ce n’est que dans les cas de nécessité absolue qu’on
doit y avoir recours.
Je pense donc que l’on pourrait, immédiatement
après le vote du budget de la guerre, s’occuper du projet de loi relatif aux
péages et ensuite des budgets de la justice et des affaires étrangères.
L’honorable préopinant a
tort de s’étonner de ce que M. de Behr fait marcher avec le projet de budget du
département de la justice deux autres projets : l’un tendant à changer la
classification des tribunaux de Hasselt et de Verviers, l’autre tendant à
augmenter le personnel de la cour de Bruxelles. C’est que l’honorable M. de
Behr pense que l’adoption de ces deux projets de loi ne rencontrerait pas de
grandes difficultés dans cette assemblée, et que la discussion de deux projets
pouvait influer sur le chiffre du budget du département de la justice.
Si je suis bien informé, la
commission chargée de l’examen du projet de loi relatif au changement de
classification des tribunaux de Hasselt et et de
Verviers, a été unanime pour en proposer l’adoption.
D’autre part je ne comprends pas quelle difficulté
pourrait soulever la proposition d’augmenter le personnel de la cour d’appel de
Bruxelles. L’honorable M. Gendebien sait aussi bien et peut-être mieux que moi,
combien est nécessaire une augmentation de personnel dans cette cour. Dans mon
département, j’ai un procès pendant devant cette cour depuis deux ans ; il est
impossible d’en finir. Presque tout le monde en est là. Il faut attendre quatre
ou cinq ans pour obtenir un arrêt. C’est un vrai déni de justice. La nécessité
de l’augmentation du personnel de cette cour est démontrée par un travail
statistique sur les trois cours d’appel. A cet égard les renseignements sont
complets.
Je ne pense donc pas que ces deux projets de loi
donnent lieu à une longue discussion ; je pense qu’ils pourraient être votés
avec le budget de la justice.
Je demande que la chambre adopte la proposition de
M. de Behr que je modifie en ce sens que la loi des péages serait discutée
immédiatement après le budget de la guerre.
M.
Devaux. - Je rappellerai à l’assemblée une de ses décisions
antérieures. Lorsque vous avez voté le budget des voies et moyens, vous en avez
disjoint un article, sous la condition expresse que vous vous en occuperiez
tout d’abord à la reprise de nos travaux ; c’est ce qui avait été dit en
premier lieu, et ensuite vous avez décidé que vous vous en occuperiez
immédiatement après le budget de la guerre. C’était sous cette condition que
l’on est tombé d’accord pour disjoindre du budget des voies et moyens la
question de la banque. Aujourd’hui il n’est plus question de cela. Vous aviez
pris une décision ; c’est comme si vous n’aviez rien fait. Cependant,
messieurs, la question de la convention de novembre 1833 avec la banque est (la
date nous le dit assez) pendante depuis plus de deux ans : c’est une question
importante ; car il s’agit de 13 millions. Il faut enfin prendre à cet égard
une décision. On ne peut rester plus longtemps dans l’indécision sur ce point.
Maintenez donc votre décision. Votez, s’il le faut, des crédits provisoires ;
mais, je le répète, tenez-vous en à la décision par laquelle vous avez mis la
question de la banque à l’ordre du jour immédiatement après le budget de la
guerre. Car il serait honteux que deux années ne suffissent pas à la chambre
pour se former une opinion sur une telle question.
M.
Lebeau. - je ne puis que m’associer aux observations de l’honorable
préopinant et déplorer l’ajournement dont est frappée la mise à l’ordre du jour
du rapport de la commission spéciale sur les relations de la banque avec le
trésor et sur la convention de novembre 1833. Comme on pourrait croire que j’ai
une espèce d’intérêt particulier, un intérêt de considérations qui me porterait
à insister sur l’urgence de cette discussion, je me bornerai à me référer aux
observations de l’honorable préopinant.
J’ai une autre observation à présenter. J’ai
entendu avancer sans que cela ait été contesté, que la discussion du projet de
loi relatif aux péages ne durerait qu’une demi-heure : oui et non, oui
probablement si le ministère se rallie à l’amendement du sénat, parce qu’alors
toutes les questions que cet amendement aurait pu soulever resteront ajournées.
Je pense que pour fixer
avec connaissance de cause la marche du travail, il serait utile de connaître à
peu près l’état de la discussion relativement à l’amendement du sénat. Je ne
crois pas être indiscret en demandant à M. le ministre de l’intérieur de
déclarer dès à présent si le gouvernement se ralliera à l’amendement du sénat.
Dans le cas où le gouvernement s’y rallierait, on pourrait fixer à une
prochaine séance la discussion de la loi des péages, car on pourrait, dans
cette même séance abordez la question de la banque, ou voter des crédits
provisoires si la nécessité en était démontrée.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - J’ai combattu au sénat l’amendement qui
a été adopté, parce qu’il ne m’a pas paru convenable de mettre en quelque sorte
une de nos principales lignes de communication en dehors de la loi,
c’est-à-dire qu’alors que la loi a ordonné l’exécution de certaines ligues de
communication aux frais de l’Etat, et qu’on accorde au gouvernement la faculté
de céder l’exécution des autres lignes, on excepte une seule ligne, sans
pourvoir aux moyens d’exécution.
J’ai en outre combattu l’amendement, parce que je
ne voyais pas quelle circonstances étaient survenues pour faire modifier la
législation en vigueur depuis 4 années, à la satisfaction générale.
Cependant comme je ne veux pas contribuer à
ajourner pour un temps indéfini le commencement de travaux très importants qui
sont sur le point d’être concédés, je déclare que sous ce rapport, quoiqu’avec
regret, je ne ferai pas opposition à l’adoption de l’amendement voté par le
sénat,
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - Un honorable député de Bruges
a manifesté un désir très vif de voir discuter le plus tôt possible la question
relative à la transaction du 8 novembre 1833 avec la banque. Je partage
entièrement le vœu de cet honorable préopinant ; je désire comme lui qu’une
solution soit une bonne fois donnée à cette question. Nous avons nous-mêmes
demandé qu’elle fût mise le plus tôt possible à l’ordre du jour, lorsqu’il
s’est agi de donner à la chambre quelques jours de congé. Mais la discussion du
budget de la guerre a été plus longue que l’on ne pouvait le présumer. Nous
voici bientôt à la fin de janvier, et si la chambre ne s’occupe pas de suite de
la discussion des budgets nous serons dans la nécessité de lui demander des
crédits provisoires. Il reste à voir s’il est préférable d’accorder ces crédits
provisoires ou de voter les budgets des affaires étrangères et de la justice.
Pour moi, quelque désir que j’aie de voir trancher une bonne fois la question
de la banque, comme je suis persuadé que la discussion des budgets des affaires
étrangères et de la justice n’occupera la chambre que pendant peu d’instants,
et guère plus longtemps que la discussion des crédits provisoires, je pense
qu’il est indifférent de voter ces budgets avant de discuter la question de la
banque.
M.
Bosquet. - Après les observations de M. le ministre de la justice, il
me reste peu de chose à dire. Mais comme membre de la commission administrative
de la prison de Vilvorde, je puis confirmer ce qu’il a dit relativement à
l’urgence du vote de son budget dans l’intérêt du service des prisons. Les
services vont être embarrassés ; car il y a des contrats exigeant des paiements
mensuels ; et nous voici arrivés à la fin du mois. Il faut donc ou accorder des
crédits provisoires, ou aborder promptement la discussion du budget de la
justice.
Quant à la question de la banque, comme vient de le
dire M. le ministre des finances, je conçois tout le désir qu’ont certains
membres de cette assemblée de voir cette question évacuée. Dans mon opinion
cette question aurait dû être examinée depuis longtemps. Mais puisqu’elle ne
l’a pas été, je ne vois pas un grand inconvénient à ce qu’elle soit ajournée encore
quelques jours, cinq jours, par exemple. Je ne pense pas que la discussion de
la loi des péages et des budgets des départements de la justice et des affaires
étrangères dure plus longtemps.
M. Desmet. -
Messieurs, quand j’avais demandé la parole, c’était pour combattre l’amendement
que l’honorable ministre de la justice avait fait à la proposition de M. de
Behr et démontrer à M. le ministre qu’il pouvait bien être dans l’erreur quand
il conjecturait que le projet de loi sur le péage n’aurait pas entraîné de
longues discussions.
Mais comme l’honorable ministre de l’intérieur
vient de faire une déclaration qui, je pense, vous aura surpris, je me
bornerais à demander à cet honorable ministre si, en se ralliant au malheureux
amendement du sénat, qui a fait un si mauvais effet dans tout le pays et
surtout dans les Flandres où il a porté l’inquiétude, il compte immédiatement
présenter un projet de loi pour la confection de l’embranchement du chemin de
fer qui de Gand doit se rendre par les Flandres à Lille.
J’aperçois que M. le
ministre ne désire pas me répondre, peut-être ne peut-il pas à cause que
l’étude de cette partie du chemin de fer n’est pas encore achevée et qu’il n’a
pas encore le travail préparatoire. Mais alors, à défaut que nous n’aurons pas
l’intention positive du gouvernement au sujet de l’embranchement qui doit
passer par les Flandres, il est très probable que la discussion sur
l’amendement que le sénat a fait à la loi sur les péages sera très longue et
probablement prendra plus de temps que celle des budgets de la justice et des
affaires étrangères.
Cependant, messieurs, vous ne pouvez mettre en
doute et, comme plusieurs membres l’ont déjà dit, que l’administration des
prisons se trouvera en souffrance, que surtout, pour ce qui concerne les livrances de comestibles dans ces maisons, les entreprises
doivent être payées à la fin de chaque mois, que ce sont ordinairement de
petits livranciers qui ont les entreprises qu’ils ne peuvent donner du crédit,
et se trouveront lésés si le budget de la justice n’est pas voté pour la fin du
mois.
J’appuie donc la
proposition de l’honorable M. de Behr pour qu’immédiatement après le budget de
la guerre, on entame celui de la justice, qui sera suivi de celui des affaires
étrangères ; et qu’immédiatement après le vote de ces deux budgets, on mette à
l’ordre du jour le projet de loi sur les péages amendé par le sénat. Je ne puis
croire que ce peu de jours de retard ne pourra porter quelque préjudice à
l’exécution des travaux publics qui sont à l’instruction ; mais, avant de
finir, j’exprime encore mon désir que M. le ministre de l’intérieur fasse
avancer le travail préparatoire de l’embranchement par les Flandres du chemin
de fer vers
M.
A. Rodenbach. - J’ai à témoigner mon étonnement de ce que M. le
ministre, qui a combattu dans cette enceinte avec beaucoup de talent deux
amendements à peu près semblables à celui qui a été adopté au sénat, qui a
ensuite combattu avec une égale énergie l’amendement adopté par cette
assemblée, vienne maintenant, après avoir déployé un caractère ministériel
aussi étendu, appuyer ce même amendement, attendu que le temps lui manque. Il
cède beaucoup trop facilement à une question de temps. Il y aura une exception
pour la ville de Gand, parce que nous n’aurons pas le temps de faire autrement.
Cette raison n’est pas parlementaire. Je ne puis que m’opposer à une aussi
étrange manière de procéder dans une question qui touche aux intérêts de
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je n’ai pas changé d’opinion. J’ai cru en présence de l’urgence de la loi
dont l’absence paralyse tous les grands travaux par voie de concession, me
prononcer pour l’adoption de l’amendement du sénat, afin de faire cesser le
plus tôt possible cet état de choses. C’est cela seul qui m’a déterminé. Du
reste je n’ai changé en rien ma manière de voir.
M.
de Behr. - Je ne m’opposerai pas a ce que la
discussion de la loi sur les péages soit mise en première ligne. Mais je désire
répondre à une observation de l’honorable M. Gendebien. Il trouve mauvais qu’en traitant la question de
priorité j’ajourne les propositions tendant à augmenter le personnel des autres
tribunaux. Le projet pour lequel j’ai demandé la priorité est terminé quant à
l’examen. Il y a une connexité complète entre ce projet et le budget du
département de la justice. J’ai donc dû demander la discussion préalable de ce
projet. Mais comme je remarque que le rapporteur est absent, et qu’il ne
convient pas de discuter la loi en son absence, je n’insisterai pas sur ma
proposition.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - Je pense que l’honorable M.
Demonceau, averti par la lecture du Moniteur
de ce qui a été dit dans cette enceinte au sujet du projet de loi dont il est
le rapporteur, s’empressera de se rendre à son poste. On pourrait donc fixer
dès à présent la mise en discussion de cette loi, sauf à l’examiner entre les
deux votes de la discussion du budget de la justice.
M.
Gendebien. - Je ne demande pas mieux de voter l’augmentation demandée
pour le tribunal de Bruxelles. Mais il n’y a pas de raison pour ajourner les
autres propositions de même nature. Occupons-nous d’abord du plus pressé,
c’est-à-dire de la loi des péages.
M. Devaux. - Je
ferai remarquer qu’après le vote des budgets de la justice et des affaires
étrangères, l’on pourra présenter en faveur de la discussion immédiate des
budgets des finances et de l’intérieur les mêmes considérations que l’on vient
d’émettre. Elles auront plus de force encore. Si elles sont admises,
spécialement la question de la banque se trouvera ajourné après la discussion
de ces budgets. Peut-être alors sera-t-on pressé par le temps et voudra-t-on
examiner la loi communale. Ainsi une question pendante depuis deux ans se
trouvera retardée d’un an encore, si pas davantage. Cela me paraît déplorable.
Il me semble que l’on pourrait fixer la discussion de la question de la banque
après la loi des péages et accorder des crédits provisoires aux départements de
la justice et des affaires étrangères.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Personne ne
conteste l’urgence de la loi sur les péages. Tout le monde désire que l’on s’en
occupe le plus tôt possible, Si la discussion de cette loi devait être très
courte, comme on paraît le croire, je ne m’opposerais pas à ce qu’elle obtînt
la priorité sur les budgets. Mais je ne partage pas l’opinion de certains membres
de cette assemblée.
L’amendement adopté par le sénat a une portée plus
grande qu’on ne lui donne. Vous vous rappellerez qu’il a été combattu avec
beaucoup de force par M. le ministre de l’intérieur qui le signale comme
destructif de l’industrie. Cet amendement touche à des questions de principe.
C’est sous ce rapport qu’il donnera lieu peut-être dans cette enceinte à de
très longues discussions. C’est ce qui fait aussi que je désirerais que l’on
mît à l’ordre du jour les budgets des départements de la justice et des
affaires étrangères avant la discussion de la loi des péages. La chambre y
gagnerait sous le rapport de l’économie de temps. Il est en effet dans cette
assemblée une foule de membres dont l’opinion n’est pas encore fixée sur la loi
des péages. Ils pourraient dans l’intervalle s’entendre sur le parti qu’ils ont
à prendre au sujet de l’amendement du sénat.
M. Lebeau. - Je ne
comprends pas comment M. le ministre des affaires étrangères présente
l’amendement du sénat comme susceptible d’une aussi longue discussion, comme
présentant de graves questions de principe, tandis que tout à l’heure M. le
ministre de l’intérieur, chef du département dans les attributions duquel tombe
spécialement l’amendement du sénat ainsi que la loi des péages, a déclaré qu’il
se ralliait à la modification adoptée par le sénat. Je me hâte de déclarer dans
quel sens j’ai compris l’adhésion de M. le ministre de l’intérieur.
J’ai parfaitement compris que M. le ministre
maintenait tout entière l’opinion qu’il a soutenue devant les deux chambres en
combattant les divers amendements proposés à la loi de péages. M. le ministre
de l’intérieur a donc reconnu, et il est juge compétent dans cette matière,
plus même que son collègue, que son admission ne préjugeait aucune des
questions sur lesquelles il a une opinion différente du sénat. Il a reconnu que
quand il s’agit d’une loi annale, il ne peut s’agir de présager par là des
questions de principes.
Je pose en fait qu’avec l’adhésion de M. le
ministre de l’intérieur accompagnée des explications qu’il a données sur les
motifs de cette adhésion, il ne peut y avoir matière à discussion sur la loi
des péages. C’est pourquoi je m’interdis toute incursion sur le fond de cet
amendement.
Il est impossible de méconnaître
l’urgence de cette loi. Elle est tellement évidente que, malgré tout le désir
que j’ai de voir enfin discuter le rapport sur la banque, je voterai pour la
priorité en faveur de la loi des péages. Je le déclare franchement, il est
évident que si vous subordonnez la discussion de cette loi à d’autres
discussions dont il est impossible de deviner l’étendue, vous mettez en
interdit toutes les communications projetées et dont les travaux préliminaires
sont achevés. C’est un fait que personne ne peut mettre en doute.
Me résumant et m’appuyant de l’adhésion de M. le
ministre de l’intérieur qui cependant n’a pas changé de manière de voir, je
crois qu’il y a lieu d’accorder la priorité à la loi des péages.
- La chambre décide que la loi des péages sera discutée
après le budget de la guerre.
M. le président. -
Je vais mettre aux voix la proposition de M. de Behr, donnant la priorité aux
budgets sur les deux autres projets.
M. Devaux. - Je
demande qu’on maintienne à l’ordre du jour la discussion du rapport sur la
banque.
M.
le président. - Ce rapport est maintenant à l’ordre du jour. Il s’agit
de savoir si les objets mentionnés dans la proposition de M. de Behr auront la
priorité sur ce rapport.
- La chambre consultée
donne la priorité aux budgets de la justice et des affaires étrangères sur le
rapport concernant la banque.
M. le président. -
Je vais consulter la chambre sur les projets de loi relatifs au personnel de la
cour de Bruxelles, et au classement des tribunaux de Verviers et de Hasselt.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je crois que ces projets ne peuvent pas
avoir la priorité sur les budgets de l’intérieur et des finances. Il est
impossible de paralyser l’administration intérieure pour s’occuper de questions
de cette nature.
M. Bosquet. - Ces
projets n’occuperont guère qu’une demi-séance, et si vous ne les votez pas
avant le budget de la justice auquel ils se rapportent, on devra vous demander
des crédits supplémentaires, à moins qu’on ne s’occupe entre les deux votes du
budget de la justice.
M. Verdussen. -
Le motif d’urgence de ces lois a cessé du moment qu’on a donné la priorité au
budget de la justice.
- La priorité demandée pour les projets de loi
concernant la cour de Bruxelles et les tribunaux de Verviers et de Hasselt
n’est pas adoptée.
- La séance est levée à quatre heures et demie.