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d’intention
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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du lundi 23 février 1835
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre
2) Proposition
de loi relative au paiement de la demi-solde des officiers de la garde civique
(Gendebien)
3)
Proposition de loi relative aux étrangers (de Brouckere,
Corbisier, d’Hoffschmidt)
4)
Proposition de loi relative à l’industrie cotonnière. Prise en considération et
droit d’enquête de la commission d’industrie (Davignon,
Helias d’Huddeghem, Rogier, A. Rodenbach, de Brouckere, Davignon, Dumortier, Zoude, Davignon, Rogier,
de Roo, Desmaisières, A. Rodenbach, Gendebien, de Brouckere, Dumortier, Desmet, Legrelle, Dumortier, Liedts, Rogier, de Roo, Eloy
de Burdinne, Dumortier, de
Brouckere, de Roo, Rogier, de Foere)
5) Projet
de loi portant organisation des communes. Articles additionnels sur les
conditions de nationalité pour être nommé ou présenté par les autorités
communales, le contrôle par la députation permanente et le roi du recours à
l’emprunt, les conditions de cens électoral (Dumortier)
a) Conditions
de nationalité (Belge ou naturalisé) pour être nommé ou présenté par les
autorités communales (Jullien, Legrelle,
Lebeau, Legrelle, Dumortier, Jullien, A. Rodenbach, de Theux, Legrelle, Dumortier, Devaux, Legrelle, Lebeau, Gendebien, Dumortier)
b)
Conditions de cens électoral (Doignon, de Theux)
c)
Autorisation préalable de la députation permanente, du roi ou de la loi pour
recourir à l’emprunt (de Theux, Legrelle,
Jullien, Lebeau, Dumortier, de Theux, Lebeau, Dumortier, Verdussen, Fallon, de Theux, d’Huart, Dumortier, de Theux, d’Huart)
(Moniteur belge n°55, du 24 février 1835)
(Présidence de M. Dubus, vice-président.)
La séance est ouverte à une
heure.
M.
de Renesse fait l’appel nominal.
M.
Brixhe donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. Il est
adopté.
M.
de Renesse fait connaître que les pièces suivantes ont été adressées à
la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur H.-C.
Lambiotte, fils, demande que la chambre invite M. le ministre de l’intérieur à
donner les explications qui lui ont été demandées sur la pétition des habitants
de Barvaux qui réclamaient l’achèvement de la canalisation sur l’Ourthe. (Séance
du 3 juin 1834.) »
______________
« L’administration
communale de Stekem (Flandre orientale) demande à être mise en possession de la
propriété du droit de pêche dans le canal dit Stekensche-Zeede. »
- Renvoi à la commission des
pétitions.
« Le sieur J.
d’Hauregard, négociant à Bruxelles, adresse des observations sur de prétendues
fausses allégations contenues dans la réponse des fabricants de Gand au mémoire
des négociants de Bruxelles. »
« Un grand nombre de
marchands et détaillants des villes de Bruxelles et de Tournay réclament contre
la proposition des représentants des Flandres. »
M.
de Brouckere. - Je crois qu’il n’y a pas de raison pour ne pas envoyer
les pétitions sur l’industrie cotonnière à la commission d’industrie. Je
demande seulement qu’elles soient déposées sur le bureau pendant la discussion
de la prise en considération de la proposition de M. Desmaisières. (Appuyé.)
- Le renvoi des deux dernières
pétitions à la commission chargée d’en faire le rapport est adopté.
(Remarque du webmaster : il ne ressort pas à l’évidence de la
consultation du Moniteur que la proposition de loi se rapporte effectivement à
la garde civique, sinon le discours prononcé par A. Gendebien dans la séance du
20 février 1835)
M. le président. - M. Gendebien a déposé une proposition sur
le bureau dans la séance de samedi. Toutes les sections en ont autorisé la
lecture. La parole est à M. Gendebien.
M.
Gendebien monte à la tribune. - Voici, messieurs, la proposition que
j’ai eu de déposer sur le bureau et dont les sections ont autorisé à
l’unanimité la lecture.
L’autorisation de la prise en
considération ayant été donnée par des sections, les explications mêmes de
considérants qui rappellent les lois antérieures portées sur la matière, et qui
font de ma proposition une espèce de disposition interprétative, me dispensent
de démontrer qu’elle n’a rien inconstitutionnel ni d’inconvenant. J’espère que
la chambre voudra bien passer immédiatement à la prise en considération. (Appuyé.)
- La proposition de M. Gendebien
est prise en considération. Le renvoi de cette proposition à l’examen des
sections est adopté.
Le renvoi de cette proposition à l’examen des
sections est adopté.
L’impression et la
distribution en sont ordonnées.
M.
Dubus, président. - MM. de Brouckere, d’Hoffschmidt et Corbisier ont
également déposé une proposition sur le bureau dans la séance de samedi. Les
sections en ont aussi autorisé à l’unanimité la lecture ; la parole est à M. de
Brouckere, l’un des signataires.
M.
de Brouckere. monte à la tribune, et donne
lecture de cette proposition :
« Léopold, Roi des
Belges,
« A tous présents et à
venir, salut.
« Considérant qu’il
résulte de l’esprit et des termes mêmes de l’arrêté du gouvernement provisoire
du 6 octobre 1830 contenant des mesures relatives aux étrangers, que cet arrêté
n’était que provisoire ;
« Qu’il a dû cesser d’exister
en même temps que les circonstances qui l’ont fait naître ;
« Qu’il importe cependant de
l’abroger formellement, afin de lever le doute qui paraît s’être élevé à cet
égard dans quelques esprits ;
« Nous avons, etc..
« Art. unique.
L’arrêté du gouvernement provisoire en date du 6 octobre 1830, contenant des
mesures relatives aux étrangers, est abrogé et cessera d’avoir ses effets.
« Mandons et ordonnons,
etc... »
« H. de Brouckere, F.
d’Hoffschmidt, Fr. Corbisier. »
M.
de Brouckere. - Messieurs, je dirai de notre proposition ce que l’honorable
M. Gendebien a dit de la sienne. La lecture en a été autorisée par toutes les
sections. Elle est extrêmement simple et motivée par les considérants qui la
précèdent. Si la chambre était d’avis de la prendre en considération
aujourd’hui, je me bornerais à lui en expliquer les motifs, et je
m’abstiendrais de toute autre espèce de développements. Mais si l’assemblée
voulait se livrer à une discussion sur cet objet, je crois qu’il conviendrait
de la remettre à une autre séance, afin de ne pas retarder l’ordre du jour.
Plusieurs voix. - Parlez ! parlez !
M.
de Brouckere. - Voici les motifs qui nous ont engagés, mes honorables
collègues et moi, à déposer cette proposition.
Vous vous rappelez qu’à l’ouverture
de la session le gouvernement nous avait annoncé un projet de loi sur les
étrangers. Plusieurs fois il a réitéré sa promesse de nous présenter ce projet.
Cependant nous l’attendons encore. Il est probable que nous ne pourrons nous en
occuper avant la fin de la session, parce que plusieurs objets très importants
absorberont les moments de la chambre pendant un temps assez long.
Je citerai par exemple les
projets que nous aurons à examiner avant la fin de la session, le budget des
finances, la loi communale qui sera soumise à un second vote, la loi sur les
barrières et la loi sur le mode de renouvellement des chambres. J’ai cru qu’il
était à désirer que, en attendant, l’arrêté du gouvernement provisoire, en date
du 6 octobre 1830, cessât d’avoir son effet.
Un deuxième motif nous a
déterminés. Lors de la discussion du budget de l’intérieur, et dans la séance
du 20 janvier dernier, j’exprimai à la chambre mon opinion sur la non-existence
de l’arrêté du 6 octobre ; je me plaignis de ce que l’ancien cabinet avait
appliqué cet arrêté jusque vers le commencement de l’année 1834. J’énonçai le
voeu que le cabinet nouveau ne marchât pas dans cette voie. M. le ministre de
l’intérieur me répondit alors en ces termes :
« On a parlé de l’arrêté
du 6 octobre 1830, relativement à l’entrée des étrangers en Belgique. On a
demandé si cet arrêté était encore en vigueur. Messieurs, il est de principe
qu’une loi reste en vigueur aussi longtemps qu’elle n’est pas expressément
rapportée, à moins qu’elle ne porte elle-même le terme de sa durée. Je sais
qu’on peut considérer l’arrêté-loi du 6 octobre 1830 comme une mesure de
circonstance. Mais il est à remarquer que plusieurs lois portées dans des
circonstances extraordinaires, et qui paraissaient avoir été motivées sur ces circonstances,
ont cependant reçu une application ultérieure, attendu qu’elles n’avaient pas
été expressément rapportées. »
J’ai cru qu’après une
semblable réponse il était de mon devoir de proposer le retrait de l’arrêté du
6 octobre 1830.
- La proposition de MM. de
Brouckere, Corbisier et d’Hoffschmidt est prise en considération.
- Le renvoi de cette
proposition à l’examen des sections est adopté.
L’impression et la
distribution en sont ordonnées.
Discussion sur la prise en
considération et mode d’examen de la proposition présentée par M. Desmaisières,
au nom des députés des Flandres
M.
Davignon. - Ce qui vient de se passer rendra ma tâche plus facile : il
n’est plus nécessaire, messieurs, que je vous rappelle les termes de l’article
37 de notre règlement : suivant moi, et je crois que telle est aussi votre
opinion, la prise en considération ne préjuge rien ; par là on déclare
seulement qu’il y a lieu à délibérer : certes il n’est personne dans cette
assemblée qui ne reconnaisse que tel est le cas qui se présente aujourd’hui,
Je demande donc que, laissant
intacte la question de principe et le fond même de la proposition, la chambre
décide immédiatement la prise en considération. A mon avis, c’est une marque de
déférence que nous devons à ceux de nos collègues qui ont signé la proposition.
J’ajouterai
cette remarque importante qu’il m’est connu que la plupart de ces honorables
membres, peut-être même tous, ont apposé leur signature dans la persuasion que,
par la proposition, non plus que par la prise en considération, ils ne
contractaient aucun engagement. L’honorable auteur des développements lui-même
est de ce nombre : il a fait plus, messieurs, il a déclaré que le projet
contenait quelques dispositions auxquelles il s’opposerait. Chacun s’est donc
réservé la faculté d’adopter telle modification qui serait jugée nécessaire,
d’adhérer à un changement dans le système de la loi proposée, s’il était démontré
qu’il était vicieux ou contraire à l’intérêt de l’industrie à laquelle ils
veulent porter secours.
A ces motifs de convenance
viennent se joindre des considérations d’ordre public et de haute politique.
Tout se réunit donc, messieurs,
pour nous engager à passer outre sans aucun
discussion, laquelle, d’ailleurs, nous ferait perdre un temps précieux et dont
nous avons un meilleur emploi.
M. Helias d’Huddeghem. - Je n’ai rien à opposer à ce qu’a dit
l’honorable préopinant. J’ajouterai seulement qu’il est à désirer que la
chambre s’occupe le plus tôt possible de l’examen de la proposition de M.
Desmaisières Vous le savez, messieurs, l’urgence en a été démontrée
suffisamment. Depuis que nous avons soumis notre proposition à la chambre,
beaucoup de villes manufacturières de
J’ajouterai que si j’ai apposé
ma signature au projet présenté en faveur de l’industrie cotonnière, je ne me
suis pas cru lié par le projet, en tant que je me propose de démontrer que,
dans un pays comme dans une société, il faut de la réciprocité, et que puisque
- La prise
en considération de la proposition de M. Desmaisières est mise aux voix et
adoptée.
M.
le président. - La chambre désire-t-elle envoyer cette proposition à
l’examen d’une commission ou des sections ?
Plusieurs voix. - Dans les sections.
M.
Rogier. - Je propose à la chambre d’envoyer en même temps le projet aux
sections et à l’examen spécial de la commission d’industrie qui pourra
continuer les travaux qu’elle a commencés sur cet objet. Une enquête a déjà eu
lieu. La commission d’industrie pourrait y donner suite et fournir les
renseignements qu’elle s’est procurés par ce moyen jusqu’à ce jour. La chambre
a bien sous les yeux les raisons pour ou contre alléguées par les partisans ou
les adversaires du projet. Mais il lui manque des documents officiels. C’est
pour accélérer les travaux et éclairer l’assemblée que je demande le renvoi du
projet à la commission d’industrie.
M. A. Rodenbach. - Je ne pense pas que la
commission d’industrie pût nous apprendre quelque chose de nouveau dans son
second rapport. Son premier rapport nous a été présenté. Je sais bien que l’on
en a discuté la validité, parce qu’il n’avait été fait que par quelques
membres. Mais pourquoi les autres membres de la commission d’industrie ne se
trouvaient-ils pas à leur poste ? Si l’on renvoyait la proposition à la
commission d’industrie, je demanderais qu’elle nous donnât son rapport, non pas
dans six semaines, mais immédiatement.
Voilà 3 ou 4 ans que
l’industrie cotonnière est en souffrance. Les ouvriers sont dans le plus grand
besoin. Dans mon district ils ne gagnent que 75 centimes par jour tandis que
leurs voisins de Lille, de Roubaix, de Turcoing gagnent jusqu’à 3 fr. par jour.
Il est important de remédier à un tel état de choses. Je désire, quel que soit
le mode d’examen de la proposition de M. Desmaisières, qu’il soit fait
promptement.
M. de Brouckere. - La chambre fera à l’égard
de la proposition de l’honorable M. Rogier ce qu’elle jugera à propos de faire.
Il est assez indifférent que l’on renvoie à la commission d’industrie ou non.
La commission d’industrie a déjà examiné la question qui en fait l’objet. Mais
ce serait une chose inusitée que l’envoi simultané d’une proposition à l’examen
d’une commission et des sections. La chambre n’est consultée que sur le renvoi,
soit à une commission, soit aux sections. Au surplus j’ai commencé par déclarer
qu’il m’est indifférent que la proposition de l’honorable M. Rogier soit
adoptée.
Si j’ai demandé la parole,
c’est pour engager la chambre à ordonner l’impression des pièces relatives à
l’enquête qui a été faite par la commission d’industrie.
En supposant qu’elle soit incomplète,
les renseignements qu’elle renferme ne pourront qu’être d’une grande utilité.
Je sais
bien qu’il y aurait lieu dans toute autre occasion d’attendre que l’enquête fût
terminée pour en imprimer le résultat. Mais je crois que l’intention de la
chambre est de faire de la proposition de l’honorable M. Desmaisières l’objet
d’un prompt examen dans les sections, afin que l’assemblée puisse la discuter
le plus tôt possible en connaissance de cause. Il est donc nécessaire que l’on
puisse consulter les renseignements qui sont le résultat de l’enquête, laquelle
est, si je suis bien informé, déjà très avancée.
Je propose donc à la chambre
d’ordonner d’imprimer les renseignements fournis jusqu’à ce jour par l’enquête.
Sans l’adoption de ma proposition, on empêche de donner suite à cette enquête.
M.
Davignon. - Je voulais présenter les mêmes considérations que
l’honorable préopinant. J’aurai l’honneur de faire remarquer que la commission
d’industrie n’a pas fait précisément une enquête, mais une espèce
d’investigation. Elle a eu recours aux lumières de quelques industriels, de
quelques négociants, et leur a posé des questions auxquelles ils ont répondu.
Il dépend de la chambre de prendre à l’égard des documents que la commission a
recueillis telle décision qu’elle jugera convenable. Ils sont en règle à
l’exception d’un seul interrogatoire, celui d’un négociant d’Anvers, qui a été
envoyé à sa révision. Je serai bientôt en mesure de livrer tous les
renseignements de l’investigation. Si la chambre juge qu’elle n’est pas
suffisante, elle pourra charger la commission d’industrie de prendre
ultérieurement tels renseignements qu’elle jugera convenir.
M.
Dumortier. - Je répondrai à M. de Brouckere, qui voit dans le renvoi
simultané de la proposition à une commission et aux sections une chose
inusitée, que c’est au contraire une manière de procéder très usitée. J’appuie
la motion de l’honorable M. Rogier.
Que demande l’honorable M. Rogier ? Il demande une enquête, ce que l’on appelle
en Angleterre une évidence, une démonstration des besoins de l’industrie
cotonnière. C’est ce que les sections ne peuvent faire. Il n’y a qu’une
commission qui soit en position de fournir à la chambre de semblables
renseignements. Comme la commission d’industrie a commencé un travail de ce
genre, c’est elle qui doit le continuer. Ce n’est que lorsque la commission
d’industrie aura fait connaître le résultat de l’enquête que les sections
devront s’occuper de la proposition des députés des Flandres, et voir si elle
est utile ou non, si ses détails sont exagérés, enfin examiner la question sous
toutes ses faces. Je ne puis donc qu’appuyer la demande de renvoi à la
commission d’industrie qui serait chargée de faire une enquête. Je désire également
qu’il lui soit fixé un délai déterminé pour nous soumettre son rapport.
Quant à ce qui est de la
proposition d’enquête, je ferai remarquer que la commission d’industrie n’a pas
été instituée comme commission d’enquête. Tout ce qu’elle fait, comme l’a très
bien dit l’honorable M. Davignon, n’est qu’une simple information et rien de
plus. La preuve, c’est que les industriels de Gand se sont refusés
à se rendre à l’invitation que nous leur avions faite de nous fournir des
renseignements sur l’état de leurs fabriques ; de sorte que, si vous ordonnez
l’impression des documents que la commission possède, vous n’aurez qu’un
travail très imparfait. En second lieu, la proposition de M. Desmaisières ne
rentre pas tout à fait dans l’objet spécial que la commission d’industrie avait
à examiner. Il s’agissait de savoir si l’on adopterait la prohibition des
marchandises manufacturées ou si l’on établirait un droit d’estampille. Telle
était la proposition faite par deux membres de la commission d’industrie au nom
de toute la commission.
M.
Zoude. - Je demande la parole pour un fait personnel.
M.
Dumortier. - J’entends dire que la proposition a été faite par 4
membres. Si j’ai dit qu’il n’y en avait que deux, c’est que je le croyais, et
je n’ai pu m’en assurer au moyen du procès-verbal, puisqu’il ne nous a jamais
été communiqué. Ce qu’il y a de certain, c’est que la commission d’industrie
n’a jamais été réunie pour écouter le rapport qui a été fait en son nom.
M.
Zoude. - Je donne à l’orateur le démenti le plus formel.
M.
Dumortier. - Je le répète, si je me suis trompé sur le nombre des
membres de la commission qui ont présenté une proposition à la chambre, c’est que
le procès-verbal ne nous a jamais été communiqué. J’ai entendu dire que le
projet avait été admis à la majorité de deux voix seulement.
Toujours est-il vrai que l’on
ne peut regarder le projet comme l’oeuvre de la commission.
Maintenant, je reviens à la
question. Je demande pardon à l’assemblée de m’en être écarté, mais j’ai été
obligé de répondre aux interpellations qui m’étaient adressées.
Je dis donc que la commission
d’industrie a fait une investigation sur un ordre de faits différents de ceux
qui vous sont aujourd’hui présentés. En effet, dans la proposition des députés
des Flandres, je vois qu’il est question de modifier le droit sur les cotons en
laine, sur les cotons, blés, sur les nankins, sur la bonneterie et beaucoup
d’autres objets sur lesquels la commission d’industrie n’a pas porté son
investigation. De sorte qu’il lui serait maintenant impossible de faire un
rapport sur tous ces objets.
Il faut que vous la chargiez
de faire de nouvelles investigations. Mais je pense avec l’honorable membre que
nous devons limiter le temps dans lequel les nouvelles investigations et le
rapport devront être faits, afin qu’on ne puisse pas adresser à la commission
d’industrie le reproche de vouloir traîner en longueur l’examen d’une question
qu’il est urgent de décider. Quant à l’impression des documents recueillis
jusqu’à présent par la commission d’industrie, il serait imprudent de
l’ordonner avant que les nouvelles investigations n’aient été terminées, à
moins qu’on ne veuille pas continuer l’enquête, car si vous ordonniez
maintenant cette impression, il serait très facile aux industriels nouvellement
appelés de ne faire que les réponses qu’ils jugeraient convenables, et vous
seriez obligés de faire revenir encore les premiers entendus. On n’en finirait
pas. Je pense donc qu’il faut adopter la proposition de M. Rogier, de renvoyer
la proposition à la commission d’industrie afin de compléter l’enquête, et
ensuite lui ordonner de terminer son enquête et de faire son rapport dans un
délai fixé, et enfin de faire imprimer tous les documents qu’elle aura
recueillis.
M.
A. Rodenbach. - Il n’y a pas eu d’enquête ; il ne pouvait pas y en
avoir sans qu’elle fût ordonnée par la chambre.
M.
Dumortier. - J’ajouterai encore quelques mots. On a reproché à
plusieurs membres de n’avoir pas assisté aux séances dans lesquelles a été
délibéré le rapport dont on a parlé. Comme je me trouve de ce nombre, je crois
devoir me disculper. Je déclare que si je n’ai pas assisté à ces séances, c’est
que j’en ai été empêché par la longue maladie dont j’ai été frappé dans le
courant de l’année dernière. Voilà les motifs qui m’ont éloigné de la
commission d’industrie, et je suis persuadé que les autres membres qui n’ont
pas assisté à ses séances avaient des motifs non moins valables que les miens.
Je sais d’ailleurs que plusieurs étaient dans la même position que moi.
Je dirai, en terminant,
quelques mots sur la manière dont quelques députés se sont exprimés dans cette circonstance.
On est venu vous parler de détresse et de grandes phrases.
M.
A. Rodenbach. - Je demande la parole, puisqu’on parle sur le fond.
M. Dumortier. - Je ferai remarquer que c’est
une manière peu convenable de discuter que de présenter à chaque instant les
ouvriers comme étant dans la détresse, sans que la chose soit prouvée. Ne
prêtons pas des armes aux ennemis de notre révolution, par de vaines
déclamations dans l’intérêt de certaines localités.
M.
le président. - Je ferai observer qu’il ne s’agit ici que de la motion
d’ordre ; je prierai l’honorable orateur de se renfermer dans la question.
M.
Dumortier. - Ce que j’ai dit suffit pour faire connaître mon opinion.
Je déclare cependant que je serai le premier à accorder une élévation de droit
si la nécessité m’en est démontrée.
M. Zoude. - Il m’est pénible, messieurs, de devoir
prendre encore la parole pour repousser les attaques plus que malveillantes du
préopinant. Deux fois la chambre avait reconnu la loyauté de la conduite que
j’avais tenue dans l’occasion qu’on vient de rappeler.
Mais puisqu’il n’a pas plu au
préopinant de croire la chambre et ce que j’ai eu l’honneur de vous dire, il
voudra se rappeler que l’honorable M. Davignon, dans la séance du 24 novembre,
a déclaré qu’interpellé sur la question, il a répondu ne pas pouvoir se rallier
aux propositions du rapport, parce qu’il les trouvait inopportunes, attendu les
négociations entamées avec
Vous voyez donc qu’il s’était
agi de la question des cotons dans le sein de la commission avant que le
rapport fût présenté ; M. Davignon vous en a fait l’aveu le plus positif dans
la séance du 24 novembre.
Quant à l’allégation que deux
membres seulement auraient adhéré au rapport, je la dénie formellement. Trois
membres y ont donné leur adhésion, et si c’était parlementaire, je les
citerais. (Citez-les ! citez-les !)
Ce sont MM. Bekaert, Desmaisières et moi, et je crois qu’il y en avait encore
un quatrième.
Quant aux lenteurs qu’on peut
remarquer dans le travail de la commission, je dirai à l’honorable M. Dumortier
que, depuis douze ou quinze mois, il a entre les mains une pièce dont la
commission avait besoin pour l’examen de la question qui nous occupe, et qu’on
l’a plusieurs fois en vain invité à la rapporter.
M.
Davignon. - Je dois me justifier de ce que vient de m’attribuer
l’honorable préopinant. Il m’a mal compris. Ce n’est pas dans le sein de la
commission mais dans une conversation particulière que j’ai eu occasion de
parler du rapport de M. Zoude ; et je déclare que je n’ai jamais assisté, dans
la commission d’industrie dont j’ai l’honneur d’être président, à aucune
réunion où la question de l’industrie cotonnière ait été agitée, ayant été
retenu chez moi pendant tout ce temps par une maladie très grave.
Pour donner au rapport qui
vous a été présenté toute la valeur qu’il doit avoir, je ferai remarquer que la
commission était d’abord composée de neuf membres, et que de ces neuf membres
ni M. Brabant qui était absent, ni M. Coghen qui était occupé par la loi sur
les céréales, ni M. Dumortier qui vous a énoncé la cause de son absence, ni M.
de Laminne n’en ont eu connaissance.
M.
Zoude. - M. de Laminne y était.
M.
Davignon. - En effet je me rappelle que M. de Laminne s’est abstenu.
M.
Jullien. - Mais qu’est-ce que cela fait au pays ?
M.
Davignon. - On a invoqué ce rapport comme émanant de la commission
d’industrie. Il faut que le pays sache l’importance que l’on doit y attacher.
Sur la demande de quelques membres, vu l’absence de ceux que je viens de citer,
on adjoignit à la commission MM. d’Huart, Desmaisières, Lardinois et Eloy de
Burdinne. De ces nouveaux membres, à l’exception de M. Desmaisières, aucun n’a
pris part à la discussion de ce rapport. Ces membres sont ici présents ; je les
somme de déclarer si je ne dis pas la vérité. Je saisis du reste cette occasion
pour faire connaître à la chambre que si même je me montre peu disposé à céder
à des prétentions exagérées, je contribuerai volontiers à procurer à
l’industrie cotonnière une protection sage et raisonnée, qui serait reconnue
nécessaire à son bien-être.
On a
proposé de renvoyer à la commission d’industrie le projet présenté par les
députés des Flandres. Je pense que dans la position délicate où se trouve cette
commission, il serait plus convenable de nommer une commission ad hoc. La
commission d’industrie se ferait un devoir de lui communiquer les
renseignements nombreux qu’elle a recueillis, car ce qui a eu lieu n’était pas
une enquête. Une enquête ne pouvait avoir lieu qu’autant qu’elle eût été décrétée
par la chambre.
Si vous voulez une nouvelle
investigation, votre commission d’industrie est toute prête à la faire. Celle
que nous avons faite a été motivée par le renvoi d’une pétition de plusieurs
négociants de Bruxelles qui alléguaient des faits dont il était important de
constater la véracité. La commission d’industrie, voyant dans cette pétition et
dans celle des industriels de Gand des allégations contradictoires, a cru
devoir interpeller les fabricants de calicots d’impression, et quelques-uns des
signataires de la pétition dont je viens de parler. Voilà ce qui a motivé la
conduite de votre commission qu’on a paru vouloir stigmatiser. Je demande que
si une enquête est ordonnée par la chambre, une commission spéciale, nommée par
elle, en soit chargée.
M.
Rogier. - Je serais fâché que ma proposition retardât la discussion
dont il s’agit, car je ne l’avais faite que pour accélérer cette discussion. Je
voulais, avant de l’entamer, réunir le plus de lumières possible. C’est
pourquoi je demandais en même temps le renvoi aux sections et à la commission
d’industrie, afin que cette commission achevât les investigations qu’elle a
commencées et publiât le résultat des renseignements qu’elle aurait recueillis.
Voilà ce que j’ai demandé. Je n’ai pas demandé une nouvelle proposition
relativement au projet de loi, mais seulement la continuation des
investigations et leur publication.
Si la chambre veut ouvrir la
discussion, sans s’entourer de ces documents, elle est libre de procéder ainsi.
Mais je pense que ceux qui voudraient que la chambre procédât de cette manière,
ne veulent pas que la discussion soit aussi prompte que je le désire moi-même.
Je demande que le gouvernement
veuille bien aussi fournir à la chambre différents renseignements que je me
permettrai de lui indiquer, laissant à sa sagesse d’y en ajouter d’autres s’il
le croit nécessaire.
La chambre n’oubliera pas que
déjà le gouvernement est venu au secours de l’industrie cotonnière, en
favorisant la société de commerce créée dans le but de trouver des débouchés
que le pays a perdus en perdant Java. Je ne sais pas quelles sont les
opérations faites par cette société, mais je crois qu’elle a dû faire des
investigations sur les moyens de faire vivifier cette industrie, et qu’elle a
dû faire plusieurs expéditions. Il serait important de connaître quelles ont
été les expéditions entreprises ou proposées par cette société. Je pense que le
gouvernement pourrait publier ces renseignements, attendu que la société est
tenue de rendre compte de ses opérations.
Nous n’avons aucune donnée
officielle sur l’importance des importations de coton brut faites en Belgique
depuis la révolution : Il serait bon que le gouvernement publiât le chiffre des
importations de coton brut faites dans les quatre dernières années qui ont
précédé la révolution et le chiffre des importations faites avant 1830. Si je
dois m’en rapporter aux documents officieux qui m’ont été remis, il en résulte
que les quantités de colon brut importées depuis notre révolution sont
supérieures à celles importées dans un même espace de temps avant la
révolution. Mais, je le répète, je n’ai que des renseignements officieux sur ce
point important de la question.
Il serait
nécessaire de connaître aussi en quoi a consisté l’exportation des fabricats
belges et l’importation des fabricats étrangers. Par le montant des droits
perçus, le gouvernement pourrait indiquer à la chambre la quantité de fabricats
exportés avant la révolution et la quantité de fabricats exportés actuellement.
Il serait bon aussi que le gouvernement fît connaître à la chambre le nombre de
machines à vapeur qui existaient dans le pays avant la révolution et le nombre
actuel. Je voudrais qu’on nous fît connaître quels ont été les effets de la loi
votée dans la session dernière sur l’importation des toiles étrangères, nous
aurions une base pour apprécier les effets d’une loi plus restrictive à l’égard
des cotons étrangers.
S’il était établi que des
droits plus élevés sur les toiles, loin de favoriser cette industrie en Belgique,
lui ont été contraires en favorisant la fraude des toiles étrangères ; si ce
point était établi qu’il entre en fraude plus de toiles étrangères en raison de
la plus grande élévation des droits, je crois que nous pourrions en tirer des
conséquences applicables au projet qui nous est présenté et de nature à nous en
faire prévoir les véritables effets.
Voilà quelques renseignements
qu’il serait, je crois, très opportun de publier et qu’il est facile de
publier. Je pense que le gouvernement est en mesure d’en publier d’autres. Je
voudrais que la commission d’industrie publiât aussi ceux qu’elle a recueillis.
Je ferai remarquer que la
question s’est introduite d’une manière exceptionnelle et extraordinaire ; ce
sont les membres de la députation des Flandres qui se sont portés les avocats
de l’industrie plaignante. La question a été discutée dans les journaux, des
chiffres et des arguments ont été présentés de part et d’autre ; mais cela
s’est passé en dehors du gouvernement, le gouvernement n’a pas encore dit son
mot. Je pense qu’il le dira plus tard. Mais encore serait-il utile qu’il donnât
tous les renseignements que sa position le met à même de recueillir et de
publier.
M. de Roo. - Messieurs, je ne me suis pas opposé à
l’enquête, mais je veux qu’on la fasse sinon légalement, du moins
régulièrement, qu’on écrive à toutes les chambres de commerce du pays pour
qu’elles envoient soit devant la commission d’industrie, soit devant telle
autre commission, un ou deux négociants pour l’expliquer sur la matière. C’est
ainsi qu’on a procédé en France pour la commission d’enquête, et c’est le seul
moyen d’obtenir un bon résultat.
Quant aux négociants de Gand,
ils sont venus deux fois pour être entendus par la commission d’industrie. Mais
la commission n’était pas assemblée. La troisième fois, ils n’ont pas comparu
par les motifs énoncés dans leur mémoire qui a été imprimé. Il n’y a donc pas
de reproche à leur faire.
M.
Desmaisières. - Messieurs, l’honorable membre présidant la commission
d’industrie ayant demandé à ce que la commission d’industrie fût dessaisie de
la question, parce qu’elle était arrivée au dernier terme de discussion
possible dans son, sein, je ne crois pas devoir m’étendre beaucoup sur la
proposition que je vais avoir l’honneur de vous faire. Je saisirai toutefois
cette occasion pour effacer une impression fâcheuse non pas dans cette
enceinte, car il n’y a ici personne qui puisse suspecter les intentions d’aucun
membre de la commission d’industrie ni de la députation des Flandres, mais au
dehors où on a pu penser et où on a dit que la commission d’industrie était
plus ou moins hostile à l’industrie cotonnière. Je prouverai le contraire, non
pas en citant des noms, mais en citant des opinions émises.
La commission est composée de
neuf membres.
Trois se sont déjà ouvertement
et entièrement prononcés en faveur des réclamations de l’industrie cotonnière.
Un quatrième membre se trouve
être le principal auteur de plusieurs rapports de la commission supérieure
d’industrie établie près le ministère de l’intérieur, et tous ces rapports,
l’honorable rapporteur de la commission des pétitions vous en a cité plusieurs
passages, sont très favorables aux demandes des fabricants cotonniers.
Un cinquième se trouve être le
principal négociateur de la création de la société cotonnière, avec garantie de
300,000 fr. contre les pertes, et M. le ministre de l’intérieur d’alors vous a
fait connaître d’ailleurs que cette négociation avait eu lieu en quelque sorte sous
l’influence de la commission spéciale d’industrie.
Un sixième se trouve, par les
fonctions qu’il occupe, le protecteur de l’industrie nationale ; et, certes, on
ne doit pas supposer qu’il viendra s’établir le protecteur de l’industrie
étrangère contre l’industrie nationale.
J’ai même sous les yeux un
mémoire de lui en sa qualité de secrétaire de la chambre de commerce d’Anvers,
et je n’aurai besoin que de vous en lire quelques lignes pour vous prouver que
déjà alors (en 1831) il plaidait chaudement la cause de l’industrie indigène :
« C’est en grande partie
au système prohibitif que l’Angleterre doit le perfectionnement de ses
fabriques, et ce n’est que depuis que ses manufactures n’ont plus de rivales à
redouter, qu’elle commence à proclamer la liberté illimitée, persuadée que
l’application générale de ce système d’économie politique, qu’elle envisageait
naguère comme une théorie dangereuse, lui permettrait aujourd’hui de déverser
partout ses produits manufacturés et de comprimer l’essor des autres. »
Un septième membre de la
commission vous a déjà dit plus d’une fois, et vient de vous dire encore, qu’il
n’avait combattu la mesure que comme inopportune.
Enfin
le huitième membre n’a pas eu occasion encore de se prononcer, et le neuvième a
paru, il est vrai, être d’une opinion contraire à la nôtre, mais c’est par
suite du système général qu’il a adopté ; et il est trop animé d’un véritable
et sincère patriotisme, pour croire qu’il se refuse à admettre une exception à
son principe général, lorsque la nécessité lui en aura été démontrée.
Nous n’avons donc pas peur de
trouver notre opinion en minorité à la commission d’industrie, où j’ai moi-même
voix délibérative, tandis que dans une section centrale je n’aurai que voix
consultative en ma qualité.
D’ailleurs, messieurs, il faut
aussi faire attention que la commission d’industrie est surchargée d’affaires
arriérées. Nous nous sommes réunis samedi dernier et nous avons fait
l’énumération des diverses pétitions qui nous ont été renvoyées par la chambre.
Il y en a sur l’industrie
sétifère, sur les tanneries, les moulins à scier le bois, les faïences, les
ardoises, les tabacs, les tourteaux, la pêche, la navigation, les forte-piano,
etc.
Si nous renvoyons encore à la
commission d’industrie le projet qui vient d’être pris en considération, elle
ne pourra pas s’occuper de tous les objets que je viens d’énumérer.
M. A. Rodenbach. - J’avais demandé la parole
pour parler sur le fond, mais comme le règlement s’y oppose, j’y renonce.
Seulement je prie M. le président, quand les orateurs s’écarteront de la motion
d’ordre, de les rappeler à la question.
M. le président. - L’observation de M. Rodenbach était inutile.
Je pense qu’il est de mon devoir de laisser un orateur prononcer quelques
paroles, pour m’assurer qu’il sort de la question. (Oui ! oui ! c’est juste !)
M.
Gendebien. - Je ne parlerai ni du fond ni de la forme. Je viens
renouveler la demande que j’ai adressée au gouvernement de prendre couleur dans
cette discussion, et de se mettre en mesure de faire un rapport sur la
situation réelle des fabricants et des ouvriers cotonniers, de nous faire un
rapport circonstancié sur la détresse des ouvriers, et d’indiquer les moyens
qu’il croit utile d’employer pour prévenir les malheurs qui nous sont annoncés
par les députés des Flandres. Je ne puis qu’appuyer la proposition de
l’honorable M. Rogier qui a été plus loin que moi, car il a donné des
indications qui peuvent servir de base aux indications à prendre par le
ministère.
Il est indispensable que le
gouvernement nous présente un rapport. Son administration de l’intérieur, son
administration des finances et son administration des douanes le mettent en
mesure de recueillir tous les renseignements désirables.
Je déclare de nouveau au
ministère qu’avant de discuter la question dont on parle depuis deux ans sans
résultat, j’exigerai un rapport.
M. le président. - Quatre motions d’ordre ont été proposées.
L’une par M. Rogier, qui est ainsi conçue : « Je propose que la chambre
invite la commission d’industrie et le ministre à recueillir et communiquer
tous les renseignements tendant à éclairer la discussion sur la proposition de
M. Desmaisières et de ses collègues. »
La seconde motion est de M. de
Brouckere et porte : « L’impression des pièces relatives aux
investigations faites par la commission d’industrie. »
M.
de Brouckere. - Comme ma motion rentre tout à fait dans celle de
l’honorable M. Rogier, je déclare m’y rallier,
M. le président. - La troisième motion est celle de M. Dumortier.
M. Dumortier. - Je me rallie à la proposition
de l’honorable M. Rogier, en y ajoutant néanmoins deux phrases. La première
serait de dire que « la commission d’industrie est invitée à faire un
rapport par voie d’enquête ; » en second lieu, je modifierai la
proposition de l’honorable député de Turnhout, en demandant que la chambre
veuille bien indiquer le terme dans lequel la commission devra faire son
rapport, et je propose qu’il soit fixé à six semaines.
M. le président. - La quatrième proposition est de M. Davignon. Il a proposé que
l’enquête fût confiée à une commission spéciale à laquelle la commission
d’industrie remettrait tous les documents qui sont en sa possession.
M. Desmet. - D’après ce que vient de vous dire M. Davignon,
je n’aurai plus beaucoup à y ajouter ; mais il me semble qu’il faut donner
suite à la première motion de cet honorable membre, celle de faire imprimer les
investigations de la commission d’industrie a faites sur la question
cotonnière, et ensuite d’un mémoire que quelques négociants étrangers et du
pays ont fait arriver à la chambre pour arrêter les mesures de protection que
les fabricants de Gand réclament depuis quatre ans en faveur de leur industrie
; et quand la chambre aura pris communication du résultat des investigations
faites par la commission d’industrie jusqu’à présent, elle verra alors s’il y a
encore nécessité d’en faire d’autres.
C’est à quoi, il me semble, la
chambre doit se borner aujourd’hui, et il n’y a aucune utilité de donner suite
à la proposition de M. Dumortier, qui, d’après moi, ne tend encore une fois
qu’à ajourner la discussion sur la question cotonnière, à laisser souffrir les
malheureux ouvriers qui vous demandent du travail et du pain, et à ne pas venir
au secours d’une industrie qui est en souffrance et qui requiert spontanément
une protection.
M. Legrelle. - J’abonde dans le sens de
l’honorable M. Rogier, mais je ne puis que m’opposer à la proposition de
l’honorable M. Davignon qui tend à nommer une autre commission que celle qui
s’est occupée jusqu’à présent de ces travaux. Ce serait jeter une
déconsidération sur votre commission d’industrie, ce que la chambre, je
l’espère, ne consentira pas à faire.
M. le président. - Il reste encore la motion d’ordre de
l’honorable M. de Roo.
- La motion d’ordre de M.
Rogier est mise aux voix et adoptée.
La motion additionnelle de M.
Dumortier est mise aux voix et n’est pas adoptée.
M. Dumortier. -
Je demande maintenant ce que doit faire la commission d’industrie ? On nous a
contesté le droit d’enquête.
M.
Liedts. - Il semble, à entendre l’honorable M. Dumortier, qu’il attache
beaucoup de prix à l’adoption de sa motion additionnelle. Cela n’aurait servi à
rien. Il aurait fallu une loi pour procéder par voie d’enquête ; il est
impossible de procéder autrement que par une simple information. Que la
commission fasse donc ses opérations et puis ensuite son rapport.
M.
Rogier. - Il faut observer que la chambre consacre en quelque sorte la
marche qu’a suivie la commission et l’invite à continuer cette marche.
M. de
Roo. - Je demande qu’on mette aux voix ma motion d’ordre.
M. Eloy de Burdinne. - Il me semble que
la section centrale doit avoir dans les membres de la commission d’industrie
assez de confiance pour ne pas lui indiquer les personnes qu’elle doit
entendre. Je m’opposerai pour ma part formellement à cette proposition.
M. de
Roo. - Je l’ai faite dans l’intérêt même de la commission d’industrie,
c’est une garantie pour elle.
M.
Eloy de Burdinne. - On désire que l’on termine promptement la question
de l’industrie cotonnière ; en admettant la proposition de l’honorable M.
de Roo, on n’en aura pas fini dans 4 mois.
M. Dumortier. - La proposition de l’honorable
M. de Roo tend à faire entendre par la commission d’industrie des personnes qui
n’auront peut-être pas à donner des renseignements valables et à écarter ceux
qui en pourraient procurer d’excellents. Je la crois donc inadmissible.
Je ne vois pas maintenant la
marche que doit suivre la commission d’industrie. Que fera-t-elle ? Se
bornera-t-elle à donner des renseignements sur les faits qu’on connaît déjà ?
La proposition de l’honorable M. Rogier, bien que je m’y sois rallié, est
incomplète.
L’honorable M. Liedts a fait
en outre observer qu’il fallait une loi pour ordonner l’enquête. Je comprends
bien que jusqu’à ce que vous ayez une loi à cet effet, on pourra faire de
nombreuses objections...
M. le président. - Je ferai observer à l’honorable
orateur que la question est relative à la motion d’ordre de M. de Roo.
M.
Dumortier. - Cette motion est nuisible et je m’y oppose. Mais je
demande encore que doit faire la commission d’industrie ?
M. de Brouckere. - L’honorable M. Dumortier
voudrait que la chambre traçât à la commission d’industrie la marche qu’elle
devra suivre ; je crois que la chambre ne le peut pas et qu’elle doit avoir
confiance en sa commission d’industrie. Remarquez que déjà cette commission a
commencé sinon une enquête, du moins une information. Qu’elle continue comme
elle a commencé ; qu’elle entende qui elle jugera convenable d’entendre,
qu’elle fasse ensuite son rapport. Pour ma part, je crois que la commission
d’industrie fera fort bien ce qu’elle a à faire.
M. de
Roo. - Dans la confiance que la commission agira régulièrement, je
retire ma motion.
M. le président. - L’ordre du jour appelle la discussion
des trois articles additionnels à la loi communale présentés l’un par M.
Doignon, les deux autres par M. Dumortier, rapporteur de la section centrale.
Ces articles ont été imprimés et distribué aux membres.
M. Rogier. - Je prends la parole pour une motion d’ordre.
La chambre vient de reconnaître par son vote qu’il y avait lieu de prendre en
considération la pétition de l’industrie cotonnière. Il est d’autres intérêts
qui méritent également d’être pris en attention sérieuse par la chambre. J’ai
déjà deux fois, depuis l’ouverture de la session, appelé de la chambre sur la
situation du commerce du pays, relativement au transit. J’ai fait remarquer que
nous maintenions l’ancien tarif hollandais du transit en Belgique, alors que
Jusqu’à présent, je n’ai pas
cru devoir imiter quelques-uns de mes honorables collègues en prenant
l’initiative pour la présentation d’un projet de loi.
J’ai demandé si bientôt il en
serait soumis un aux chambres. Le ministère a bien voulu me répondre qu’il n’y
voyait aucun inconvénient et que ce projet serait incessamment soumis à la
législature. Je réitère ici ma demande, à l’effet de savoir si le gouvernement
se propose d’en présenter un dans le plus bref délai ; sinon, je devrai prendre
sur moi de proposer une loi. Je déclare pourtant que je ne prendrai ce parti
que si le gouvernement ne prend pas l’initiative. Je sais que le gouvernement
ne doit pas apporter d’opposition à l’amélioration du tarif du transit. Il y a
urgence, je le déclare, et cela dans l’intérêt le plus cher du commerce, d’en
venir promptement à cette amélioration.
M.
de Foere. - J’ai déposé un projet de loi qui comprend la question dont
vient de parler l’honorable M. Rogier. Ce projet de loi a été pris en considération.
Les développements en ont été imprimés et distribués, et jusqu’à présent le
bureau ne l’a pas envoyé dans les sections. Je demande donc à M. le président
de renvoyer en sections le projet de loi que j’ai eu l’honneur de soumettre à
la chambre sur le commerce en général. Depuis que j’ai présenté ce projet, un
honorable négociant a publié un mémoire qui rentre dans la pensée de ce projet
lui-même ; ce mémoire a été accueilli avec beaucoup de faveur. On a négligé les
intérêts généraux du commerce, et entre-temps il souffre considérablement. Nous
avons décrété la construction d’un chemin de fer, si en même temps vous ne
prenez des mesures pour l’exploiter, vous l’aurez construit pour les étrangers
et c’est vous qui en aurez fait les frais.
M. le président. - Ce projet de loi est au nombre de ceux
qui ont été renvoyés en sections.
M.
de Foere. - Je demande qu’il soit mis à l’ordre du jour dans les
sections.
Discussion des articles
Articles additionnels
M. le président. - Le premier de ces articles, présenté
par M. Dumortier, est ainsi conçu :
« Nul ne peut exercer les
fonctions ou emplois à la nomination ou présentation des autorités communales,
s’il n’est Belge ou naturalisé. »
M.
Dumortier, rapporteur. - Je demande à développer en même temps les
trois articles soumis à la chambre. Messieurs, vous pouvez voir à la lecture de
cet article que c’est presque la reproduction de l’art. 6 de la constitution
qui dit : « Les Belges sont égaux devant la loi, seuls ils sont
admissibles aux emplois civils et militaires, sauf les exceptions qui peuvent
être établies par une loi ou des cas particuliers. »
La section centrale a pensé
nécessaire de reproduire l’article dont je viens avoir l’honneur de donner
lecture. Les autorités communales pourraient se croire autorisées à nommer aux
emplois des personnes qui ne seraient ni Belges, ni naturalisées ; et comme le
gouvernement, dans la loi qui nous occupe, n’a aucune intervention dans les
nominations faites par la régence ; comme les gouverneurs, d’après ces
dispositions, n’ont pas le droit de les annuler, il a semblé à votre section
centrale qu’il serait bien de trancher la question, afin que la députation
provinciale pût annuler les nominations qui seraient faites dans le sens dont
parle l’article additionnel en discussion.
Quant au second article, dans
la section centrale nous avons cru nécessaire de mettre une borne à la facilité
avec laquelle les communes font des emprunts ; c’est cette facilité d’emprunt,
vous le savez, qui est la base de leur ruine. Voici ce deuxième article :
« Les emprunts votés par
les conseils communaux sont autorisés :
« 1° Par la députation
provinciale, lorsque la commune est libérée de tout emprunt ou dette antérieure
et que l’emprunt nouveau peut être remboursé avec les recettes de l’année ;
« 2° Par le Roi, lorsque
la commune n’est pas libérée d’emprunts ou de dettes antérieures, ou lorsque
l’emprunt ne peut être remboursé que sur les recettes ordinaires de cinq années
ou par l’aliénation des propriétés communales ;
« 3° Par une loi, pour les
communes dont les recettes ordinaires s’élèvent à plus de 100,000 fr.»
D’après la loi, les collèges
sont rééligibles tous les 6 ans, et c’est pour cela qu’il résulte des dangers
contre lesquels il faut se prémunir ; chaque bourgmestre veut laisser un
souvenir de son administration, des traces de son passage ; ainsi, par exemple,
il voudra fonder tel ou tel monument, afin qu’on puisse y mettre son nom. Nous
avons pensé unanimement que l’art. 74 ne suffisait pas pour parer aux
inconvénients qui étaient à craindre. Une disposition vous avait été présentée
à cet égard.
C’est celle qui se trouve à
l’article 132. Par cet article nous vous proposions de dire que, hors le cas de
paiement des dettes antérieures, et de condamnations judiciaires, le conseil ne
pouvait ordonner des emprunts que pour une somme égale au tiers des revenus. La
disposition n’a pas été admise, parce qu’elle est d’une exécution difficile. La
section centrale a cru devoir remplacer cette disposition par un article tiré
de la loi française et en vertu duquel la députation provinciale pourra
autoriser les emprunts, lorsque la commune est libérée de toute dette ou de
tout emprunt, et lorsque l’emprunt nouveau peut être remboursé au moyen des
recettes de l’année. Lorsque la commune n’est pas libérée de dettes ou
d’emprunts, et lorsqu’il faudra 5 ans pour rembourser l’emprunt, ou des
aliénations de propriétés communales, les emprunts devront être approuvés par
le Roi.
Comme l’approbation de
l’aliénation des propriétés communales est laissée au Roi, nous avons cru qu’il
fallait laisser aussi au Roi l’approbation des emprunts dans ce second cas,
puisqu’ils peuvent être couverts par des aliénations ; lorsque les revenus de
la ville s’élèvent à 100,000 fr., nous croyons qu’il fait une loi pour
emprunter.
La commission pense que
l’article qu’elle propose est indispensable si veut empêcher la ruine des
communes : quand des communes sont ruinées, les particuliers en souffrent,
puisque l’Etat est obligé de venir à leur secours.
Quant à l’article nouveau
proposé par M. Doignon, j’aurai l’honneur de dire également sur quels motifs il
repose.
Il n’est que la reproduction
de l’article 5 de la loi électorale. Ayant examine avec soin cet article 5, je
l’ai trouve reproduit dans la loi provinciale, et je présume que c’est par
oubli qu’on ne l’a pas mis dans la loi communale. Une personne opulente pourrait
quelques jours avant l’élection, appliquant ses biens sur la tête d’autres
personnes, introduire beaucoup d’électeurs dans le corps électoral et dominer
ainsi les élections : c’est pour cela que le congrès a pensé qu’il fallait que
le cens fût payé depuis plus d’une année.
Ces considérations doivent
suffire pour justifier la proposition de l’honorable M. Doignon.
Je ferai remarquer que, outre
ces trois propositions, il y en a une autre de M. Pollénus qui a été ajournée.
C’est comme rapporteur de la section
centrale que je présente les deux premiers articles.
- La chambre, consultée,
appuie la proposition faite par M.
Doignon.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je pense que chacun de ces articles doit être mis aux voix séparément.
Je demande que l’on commence
par celui qui est relatif aux fonctions dans les municipalités.
M. le président. - La parole est à M. Lebeau pour une
motion d’ordre.
M. Lebeau.
- Je voulais faire la même demande que vient de faire M. le ministre de
l’intérieur.
Titre II. Des
attributions communales.
Chapitre II. Des
attributions du conseil communal
Article additionnel
M. le président. - Nous allons commencer par l’article
relatif aux fonctions dans les administrations communales.
M.
Jullien. - On vous propose de décider que nul ne sera admissible à exercer
des fonctions ou emplois à la nomination ou à la présentation des autorités
communales, s’il n’est Belge ou naturalisé Belge ; je crois que cette
disposition donne à l’article 6 de la constitution une extension qui pourrait
entraîner bien des inconvénients, et même bien des injustices.
L’article 6 de la constitution
dit dans son troisième paragraphe : « Les Belges sont égaux devant la loi ;
seuls ils sont admissibles aux emplois civils et milliaires, sauf les
exceptions qui peuvent être établies par une loi pour des cas
particuliers. » Là s’est arrêtée la sollicitude du législateur : les
Belges sont admissibles aux emplois civils et militaires. Toutes les fois que
la question s’est présentée, on a considéré qu’il s’agissait des emplois civils
et militaires qui sont des fonctions publiques, et on n’a pas entendu descendre
jusqu’à des manœuvres, c’est-à-dire jusqu’à de simples employés qui ne sont pas
censés exercer des fonctions publiques, ni par conséquent un emploi civil et
militaire. Si vous adoptiez l’article présenté par la section centrale, il
s’ensuivrait que dans une commune on ne pourrait pas nommer un simple messager,
un allumeur de réverbères, un employé de la police. il
y a une multitude de ces fonctions qui ne constituent ni des emplois civils, ni
des emplois militaires.
Si dans un athénée on a besoin
d’un professeur d’anglais ou de français, on ne pourra pas y nommer un Anglais
ou un Français ; il faudra recourir à un Belge ou à un naturalisé.
Un membre. - Pour un professeur d’allemand ce sera la même
chose !
M. Jullien. - Vous le voyez, il y aurait là de
grands inconvénients ; il y aurait plus, il y aurait des injustices. Dans les
communes on peut présumer qu’il s’y trouve une multitude d’individus qui depuis
beaucoup d’années sont dans ces modiques emplois et qui ne savent même pas à
quelle nation ils appartiennent. Pendant 15 ou 20 ans il s’est fait une fusion
entre
Je conclus au rejet de
l’article présenté par la section centrale.
M. Legrelle. - Messieurs, tout en
applaudissant aux intentions qui ont dicté l’article présenté par la section
centrale, je ne pense pas qu’il puisse être adopté s’il faut l’entendre dans le
sens que lui donne l’honorable préopinant. Pour moi, je n’ai jamais voulu
prétendre qu’il faudrait retirer les petits emplois exercés dans les communes
par une multitude d’individus, et qui y sont exercés depuis longtemps. Il est
de fait que dans les régences beaucoup de personnes ont négligé de remplir
certaines formalités pour obtenir la qualité de Belges. Ce que je voudrais,
c’est que désormais on ne donnât aucun emploi, même le plus humble, qu’à des
hommes du pays ; mais il ne faut pas renvoyer les hommes qui actuellement en
sont pourvus, car ce serait les condamner à périr de misère. Considérez de plus
qu’il y a dans les plus minces emplois des individus qui appartiennent au
Brabant septentrional : voudriez-vous les punir de ce qu’ils sont attachés à
« A l’avenir nul ne sera
appelé à exercer des fonctions ou des emplois à la nomination ou à la
présentation des autorités communales, s’il n’est Belge ou naturalisé.
M.
Lebeau. - Je pense que les deux amendements, celui de la section centrale
et celui de M. Legrelle, ne peuvent être admis. Dans plusieurs occasions la
question a déjà été soulevée ; et chaque fois la chambre a exprimé son opinion
sur le sens qu’il fallait attacher à l’art. 6 de la constitution.
Par cet article il est évident
qu’il s’agit de fonctions publiques ; qu’il ne peut s’agir de cette catégorie
d’employés inférieurs dont a parlé tout à l’heure un honorable député de Bruges.. Or, déjà d’après la loi communale elle-même, aucune
fonction publique dans l’administration municipale ne peut être exercée par un
étranger ; car, si je ne me trompe, vous y avez inséré une disposition selon
laquelle nul n’est éligible s’il n’est électeur, et nul n’est électeur s’il
n’est Belge ou naturalisé.
Quant aux fonctions de
secrétaire ou de receveur, lesquelles sont bien des fonctions publiques, l’art.
6 de la constitution s’oppose à ce qu’on nomme des étrangers. C’est qu’en effet
les secrétaires et les receveurs ont la signature, ont le caractère de
fonctionnaire public.
Si c’est dans ce sens que les
amendements sont proposés, ils n’ajoutent rien à la disposition de la
constitution, et je les repousse comme inutiles. Si on les entend dans un autre
sens, et s’ils ajoutent quelque chose à la constitution, je les repousse comme
exorbitants. Il serait étrange que l’on ne pût nommer un messager, un huissier,
un concierge, un allumeur de réverbères, le plus mince copiste, un
expéditionnaire à trois ou quatre cents francs, sans lui faire exhiber son acte
de naissance ou ses lettres de naturalisation. En vérité, ce serait là une
interprétation ridicule de l’art. 6 de la constitution, interprétation qui n’a
jamais été dans l’esprit de ceux qui l’ont faite.
Je le
répète, la disposition proposée est inutile, si elle n’est que la répétition de
l’art. 6 de la constitution ; elle est inutile encore sous un autre rapport.
Insérée dans la loi, elle ne remplirait pas un des buts que l’honorable
rapporteur de la section ventrale croit pouvoir atteindre ; car elle n’aurait
pas plus de sanction que l’art. 6 de la constitution. Il prétend qu’avec cette
disposition, si on méconnaissait la constitution sur ce point, les nominations
seraient nulles et pourraient être annulées par l’autorité provinciale : mais à
moins que ce droit d’annulation ne lui soit formellement donné par la loi, elle
ne peut l’exercer. Une telle attribution ne peut appartenir à l’autorité
provinciale sans une disposition législative expresse. Ainsi, la mesure
présentée, étant sans sanction dans la loi communale, n’amènerait aucun
résultat. D’ailleurs, ce qui est contraire à la constitution est bien
réellement contraire à la loi, et rien dans la disposition proposée n’ajoute à
l’art. 6 de la loi constitutionnelle, si on ne veut arriver aux places les plus
subalternes.
Si je
repousse la proposition de la section centrale, je repousse également celle que
M, Legrelle a faite. Toutes les considérations exposées par l’honorable député
de Bruges s’appliquent aussi aux explications données par le député d’Anvers.
Il serait singulier qu’un homme qui viendrait se fixer en Belgique, qui s’y
marierait, ne pût pas être employé aux fonctions les plus modestes, les plus
humbles qu’une régence peut conférer, ne pût pas être copiste, messager,
huissier de bureau, balayeur, etc.
M.
Legrelle. - Si les distinctions faites par l’honorable préopinant,
relativement aux fonctions publiques et aux fonctions non publiques, sont
admises par la chambre, j’avoue que la proposition de la section centrale
devient inutile. Cette proposition deviendrait même nuisible si elle empêchait
une régence de nommer un balayeur, un allumeur de réverbère,,
un employé dans un octroi : mais s’il en était autrement, si les distinctions
posées n’avaient pas de réalité, il faudrait l’adopter avec la modification que
j’ai présentée.
M.
Dumortier, rapporteur. - Il me semble que l’on a cherché à vous faire
prendre le change sur la portée de la proposition de la section centrale. Mais
en supposant qu’une régence fût dans l’obligation de préférer les Belges aux
étrangers pour les plus minimes emplois, quel si grand malheur y aurait-il à
cela ? Je ne pense pas qu’il manque en Belgique d’hommes qui soient capables de
faire des huissiers, des allumeurs de réverbères, des messagers, même des employés
de l’octroi. Et si vous trouvez des Belges pour remplir de semblables
fonctions, il faut les prendre, car il s’agit de traitements payés sur les
deniers publics et qui appartiennent aux enfants du pays.
Les inconvénients signalés par
M. Jullien ne sont pas si grands qu’on le suppose. Les individus employés
depuis 20 ou 30 ans ne seront pas renvoyés, et je ne comprends pas comment ils
le seraient. Sous le gouvernement précédent, il était expressément ordonné de
ne conférer d’emplois dans les communes qu’aux régnicoles. Dans la ville de
Tournay, beaucoup d’individus ont été obligés de se faire naturaliser pour
conserver les plus minces emplois : depuis 20 ou 30 ans les employés ont donc
dû se faire naturaliser. A une certaine époque cette naturalisation n’a pas été
fort difficile à obtenir ; il suffisait de faire une simple déclaration devant
un commissaire de police.
J’insiste pour que la
proposition de la section centrale soit admise. Il faut que les deniers de
l’Etat paient des hommes du pays ; et je ne vois pas si grand mal à exiger la
naturalisation de ceux qui veulent remplir des fonctions en Belgique. Si la
disposition était inutile, Je ne la défendrais pas. Pourquoi en demandons-nous
l’insertion dans la loi ? Vous dites dans l’art. 20 que, pour être électeur, il
faut être Belge : ainsi, pour être électeur, il faut que l’étranger soit
naturalisé ; alors, comment pourriez-vous dire que, pour avoir la manipulation
de fortes sommes appartenant à une commune, on peut n’être pas Belge ou
naturalisé ?
Il faut être Belge pour
prétendre a être simple électeur, et on pourrait ne
pas être Belge pour être receveur des deniers de la commune, pour être
secrétaire, pour avoir la gestion de sommes considérables appartenant à des
hospices, à l’administration des établissements de bienfaisance. Mais ce serait
là un étrange abus.
Mais, objecte-t-on, votre loi
n’aura pas de sanction : au contraire, elle en aura une formelle. Vous avez
admis par l’art. 84 que la députation provinciale et le Roi pouvaient annuler
les actes des autorités communales quand on violait la loi ; il suit de là que
si le conseil nomme une personne qui ne soit pas dans le cas de l’amendement,
cette nomination sera annulée par la députation provinciale ou par le Roi.
On a recherché l’esprit de la
constitution : je ne crois pas que l’intention du législateur puisse être
méconnue ici. La discussion à laquelle l’article de la constitution a donné
lieu, est remarquable. On a demandé la suppression des mots : « sauf les
exceptions qui pourraient être établies par une loi. » La demande de
suppression a été combattue et rejetée : ainsi on n’a voulu d’exception que
pour des cas particuliers, spéciaux. L’honorable M. Forgeur a parlé dans cette
discussion.
Soyons sévères, a-t-il dit ;
et à l’appui de son opinion il a cité l’exemple de l’Espagne sous
Charles-Quint, exploitée d’une manière si révoltante par des étrangers.. L’histoire lui a fourni d’autres exemples.
Il
reconnaissait que la mesure entraînerait quelques inconvénients, mais ces
inconvénients le touchaient peu et lui paraissaient insuffisants pour
déterminer à ne pas admettre le principe. C’est une chose si naturelle de
n’admettre aux emplois d’un pays que des gens du pays, que des plaintes se sont
élevées en Belgique relativement à la présence d’un trop grand nombre
d’étrangers dans une des branches de l’administration générale.
Je n’examinerai pas jusqu’à
quel point ces plaintes sont fondées mais elles existent, et il faut éviter
qu’elles ne se renouvellent.
On a tellement compris dans le
congrès que la loi qui autoriserait l’admission des étrangers aux emplois
devrait stipuler les cas particuliers auxquels elle s’appliquerait, que
lorsqu’on demanda l’entrée d’officiers étrangers dans l’armée, on voulait dans
le sein du congrès stipuler le nombre et les grades de ces officiers, afin que
le cas particulier fût clairement établi ; ensuite cette proposition fut
écartée.
Le véritable esprit du congrès
a été de vouloir les Belges avant tout, de favoriser les Belges. Voilà l’esprit
qui animait le congrès, et qui, je l’avoue, m’anime encore moi-même. Je ne
pense donc pas que vous puissiez vous dispenser d’adopter la proposition de la
section centrale.
Quant à la modification
proposée par l’honorable M. Legrelle, elle me paraît inutile, et même
dangereuse ;. la loi doit
toujours parler au futur.
M.
Jullien. - Je prie la chambre de vouloir bien faire attention à toute
la portée de l’article proposé par la section centrale ; il est ainsi conçu :
« Nul ne peut exercer les
fonctions ou emplois à la nomination ou présentation des autorités communales,
s’il n’est Belge ou naturalisé. »
Nul ne peut exercer ! Il s’en
suivra que du jour où la disposition aura été promulguée, si l’on découvre dans
une administration municipale un individu qui n’ait pas obtenu de lettres de
naturalisation, alors même qu’il serait attaché à cette administration depuis
20 ou 30 ans, ou davantage encore, il ne pourra plus exercer, il faudra qu’il
s’en aille. Bien plus, il suffira, pour perdre un emploi, que l’on ne puisse
pas établir sa nationalité belge ; en effet, il se trouve toujours des
individus affamés de places ; ils dénonceront celui que l’on ignore appartenir
ou non à la nation belge. Une fois la loi promulguée, il faudra renvoyer tous
ceux qui ne pourront pas produire un certificat d’origine belge ; chose souvent
difficile, surtout à des employés de cette nature, qui ignorent quelquefois
quel est leur lieu de naissance.
Cependant, si vous voulez
prendre place dans la famille européenne, il faut vous conformer à ce qui se
pratique chez toutes les nations civilisées : or, lorsqu’un individu venant de
l’étranger a fixé sa résidence dans un pays, habite une ville depuis longtemps,
y est établi avec sa famille, paie les charges de la cité, jamais on ne fait
difficulté, lorsqu’il inspire la confiance, de lui donner non des emplois
civils ou militaires, mais un emploi comme ceux dont il s’agit dans l’article
en discussion.
Les Belges sont-ils donc
exclus de ces emplois en pays étranger ? Non sans doute. Combien au contraire
n’y a-t-il pas de Belges qui occupent des emplois en France, en Hollande et
dans d’autres pays ? Si les Dumortier de ces pays-là veulent les renvoyer parce
qu’ils ne sont pas Français, Anglais ou Hollandais, ces Belges, réduits à la
misère, eux et leur famille, viendront réclamer à
Veuillez
remarquer que nous n’avons pas de loi de naturalisation ; il y a des individus
qui, depuis quatre ans, sont en instance pour obtenir des lettres de
naturalisation : eh bien, si la loi paraît avant qu’ils les aient obtenues, ils
seront chassés de leurs emplois, c’est une conséquence inévitable du système de
la section centrale.
Il y a dans les ministères des
emplois qu’il est nécessaire de donner à des étrangers, comme ceux de
traducteurs de langues au ministère des affaires étrangères, il doit y avoir
des traducteurs d’allemand.. Si la proposition de la
section centrale est admise, il faudra, pour être conséquent avec son système,
renvoyer ces employés et les remplacer par des nationaux qui ne pourront pas
rendre les mêmes services.
Je crois donc, surtout d’après
les observations de l’honorable M. Lebeau, qui rentrent dans le sens des
miennes, qu’il n’y a pas à hésiter à rejeter l’article proposé.
Je crois me rappeler que déjà,
4 ou 5 fois, il s’est agi d’interpréter les termes de la constitution
« les emplois civils et militaires, » et que l’on a toujours été
d’accord pour n’entendre par là que les véritables fonctions publiques, et non
pas les emplois subalternes.
M. A. Rodenbach. - Je serais assez porté à
voter pour la proposition de la section centrale, parce qu’il me semble que
l’on n’a pas suffisamment répondu à M.
Dumortier. Qu’a dit cet honorable membre ? Que, sous le gouvernement
hollandais, tous les employés, même des régences, même les plus minces
employés, devaient se faire naturaliser ; c’est un fait connu et incontestable.
M. Dumortier a également rappeler qu’en 1814 tous les étrangers qui se
trouvaient en Belgique ont pu se mettre en règle, qu’ils n’avaient qu’à faire
une simple déclaration sans frais au commissariat du district et à la régence
pour être assimilés aux Belges.
Lorsque les Belges sont
obligés de se conformer aux lois et de se conformer aux formalités qu’elles
prescrivent, on peut bien exiger que les étrangers soient contraints de remplir
certaines formalités. A moins que l’on ne réponde d’une manière péremptoire à
ces diverses observations, je croirai devoir voter pour la proposition de la
section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’article 6 de la constitution a donné lieu à deux questions. En premier lieu
cet article est-il applicable aux étrangers qui étaient en fonctions à l’époque
de la promulgation de la constitution ? En deuxième lieu, de quelle espèce sont
les emplois dont on a entendu parler dans cet article ?
En ce qui concerne les
étrangers qui occupaient des emplois publics avant la promulgation de la
constitution, en fait ils n’ont pas été privés de leurs emplois soit
militaires, soit civils. C’est ainsi que le congrès n’a autorisé que plusieurs
mois après la promulgation de la constitution l’admission des officiers
étrangers dans l’armée ; cependant personne n’a soutenu que les officiers
étrangers qui étaient déjà dans l’armée ne pouvaient pas continuer d’y servir.
Il en a été de même pour les autres emplois ; je pourrais en citer un grand
nombre occupés par des étrangers avant la promulgation de la constitution, et
maintenus à ces étrangers sans qu’il y ait eu à cet égard la moindre
réclamation.
Mais, en ce qui concerne les
employés nommés depuis la promulgation de la constitution, qu’a-t-on entendu
par « emplois civils » ? Voilà toute la question.
Peut-on nommer des étrangers
secrétaires de communes, commissaires de police ? (Non, non.) Je ne le pense pas non plus. Déjà plusieurs fois cette
question s’est présentée ; et j’ai cru devoir la résoudre négativement. (Bien, très bien.)
Je conviens avec l’honorable M. Jullien que
certains emplois subalternes ne doivent pas être considérés comme les emplois
civils et militaires dont il est question dans l’art. 6 de la constitution.
Mais il n’est pas douteux que cet article oblige aussi bien les autorités
communales que le gouvernement.
Reste à déterminer quels
emplois les étrangers peuvent occuper. C’est le véritable point de la
difficulté.
M. le président. - M. Legrelle propose une nouvelle
rédaction pour son amendement, qui consiste maintenant à ajouter à la
disposition proposée par la section centrale la clause limitative suivante :
« Cette disposition n’est pas
applicable aux personnes en fonctions avant la promulgation de la
constitution. »
M. Dumortier, rapporteur. - Je crois que
l’honorable M. Jullien n’a pas entendu la réponse que j’ai eu l’honneur de
faire. Sur l’argument que des personnes pourraient être dépossédées d’emplois
qu’elles occupent depuis vingt ou trente ans, j’ai répondu par un fait, à
savoir que, sous le roi Guillaume, tous les fonctionnaires nommés par les
communes ont dû prendre des lettres de naturalisation ou cesser leurs
fonctions. C’est là un fait que personne ne peut contester. A Tournay, j’ai
connu plusieurs Français qui avaient des emplois de la commune ; ils ont dû prendre
des lettres de naturalisation ; c’était une disposition générale, pour
l’exécution de laquelle on était même très sévère.
Vous voyez donc que votre
objection tombe. D’ailleurs, s’il y a doute, rien n’est plus facile que d’y
mettre ordre : adoptez l’amendement de l’honorable M. Legrelle. Alors toutes les personnes employées avant la
promulgation de la constitution seront exclues de la disposition de l’article.
Mais ainsi au moins vous aurez une base ; et il faut une base, vous ne pouvez
pas vous dispenser d’en adopter une.
La règle que vous devez suivre
est tracée par la constitution ; cet article vous prescrit de donner pour les
emplois la préférence aux Belges, lorsqu’ils sont aussi capables que des
étrangers de les remplir.
La proposition de la section
centrale est conforme à l’esprit et au teste de la constitution ; elle est
réellement constitutionnelle.
M.
Devaux. - En fait, je dois dire d’abord que l’honorable M. Dumortier se
trompe, et qu’il n’est pas exact de dire que toutes les personnes nommées à des
emplois par les régences ont dû se faire naturaliser sous l’ancien
gouvernement. J’ai connu des personnes qui occupaient depuis 10 ou 15 ans de
tels emplois et qui jamais ne se sont fait naturaliser, Ce ne sont pas en effet
là de véritables emplois publics, comme ceux dont il est question dans
l’article de la constitution, et pour ces emplois ni la raison, ni l’intérêt de
personne ne prescrivaient d’exiger cette formalité.
Il n’y a pas à se demander ce
qu’a voulu le congrès ; l’art. 6 de la constitution est là. On dit : « Le
congrès a voulu ceci.... Le congrès a voulu cela. » Le congrès a voulu
l’art. 6 de la constitution. Je n’en demande pas l’abolition ; mais aussi pourquoi
l’étendre ? pourquoi adopter une disposition
déraisonnable qui serait éludée ? Pourquoi exiger du moindre employé des
lettres de naturalisation ?
Il y a, pour ne pas adopter
cette disposition, une raison particulière à notre pays, c’est que depuis
quatre ans il est impossible de se faire naturaliser Belge. On fera, dira-t-on,
une loi de naturalisation. Quoi qu’il en soit, il est certain que, vu d’une
part les occupations de la chambre, et de l’autre la nécessité d’une loi
puisque la constitution le prescrit, il sera toujours difficile aux étrangers
d’obtenir des lettres de naturalisation. Il convient donc non d’abolir l’art.
6, mais de ne pas l’étendre.
Je ferai remarquer qu’il y a
des communes frontières en rapport avec l’étranger, et auxquelles il est
impossible de se passer d’étrangers. Il y a des communes qui ont des relations
avec l’Allemagne, et auxquelles il est impossible de ne pas employer un
Allemand pour leur correspondance. Il y a des communes qui ont beaucoup de
relations avec l’Angleterre, Ostende par exemple où habitent un grand nombre
d’Anglais ; il peut y avoir dans cette ville telles fonctions à la nomination
de l’autorité communale, qu’il ne soit pas possible de donner à un Belge, pour
lesquelles il faille un Anglais, quelqu’un qui entende et parle parfaitement la
langue anglaise.
L’extension
que l’on propose de donner à la disposition de la constitution pourrait dans
certains cas porter aux communes un préjudice réel ; j’en citerai un exemple
qui est à ma connaissance personnelle. Il y a quelque temps, un Anglais qui
habite
M.
Dumortier, rapporteur. - C’est un contrat à titre onéreux.
M.
Devaux. - Il n’est pas moins vrai qu’il s’agit d’un emploi auquel nomme
la municipalité, et que d’après votre système, on ne pourrait pas accorder un
étranger.
Je pense qu’il n’y a pas de
motifs pour adopter l’extension que l’on propose de donner à l’art. 6 de la
constitution.
M.
Legrelle. - Je pense que nous devons nous en tenir aux termes de l’art.
6 de la constitution ; or, cet article est formel ; il est ainsi conçu :
« … Seuls ils (les
Belges) sont admissibles aux emplois civils et militaires, sauf les exceptions
qui peuvent être établies par une loi, pour des cas particuliers. »
Je vous le demande, cet
article n’est-il pas assez explicite ? Ne dit-il pas que pour occuper des
fonctions conférées par l’autorité communale, l’autorité provinciale, ou le
gouvernement, il faut être Belge ou naturalisé ? Cet article a été adopté par
le congrès, avec parfaite connaissance de cause ; alors il fut bien entendu que
l’on devait, comme on l’a dit, préférer aux étrangers les enfants de la patrie.
C’est à ce sentiment que nous devons maintenant encore nous rallier tous. Reste
la question de savoir si la loi communale doit consacrer une exception à ce
principe.
A cet égard je dois
m’expliquer. Sans doute il serait par trop impolitique de priver de leurs
emplois des étrangers établis depuis longtemps en Belgique et qui depuis
longtemps occupent, de manière à satisfaire la commune, des emplois qui leur
servent à nourrir leur famille tout entière belge ; c’est par ce motif que je
propose par amendement d’ajouter à la proposition de la section centrale la
disposition suivante :
« Cette disposition n’est
pas applicable aux personnes en fonctions avant la promulgation de la
constitution. »
La proposition de la section
centrale n’est pas contraire à la disposition de la constitution ; car l’art. 6
porte que « des exceptions peuvent être établies par une loi » : or,
ici nous faisons une loi, ou une partie de loi.
Le fait qu’a cité l’honorable
M. Devaux ne me paraît pas un argument concluant. Il s’agit là d’un contrat à
titre onéreux, et non d’un emploi communal. Je dirai qu’en faveur du principe,
il vaudrait mieux que la commune fût privée de la donation qu’on voulait fût
faire, que si ses emplois étaient donnés à des étrangers au préjudice des
nationaux.
Je vais plus loin : je dis que
la commune qui a des emplois à donner doit les accorder de préférence aux
individus de la commune, à ceux qui paient les impôts de la commune depuis un
certain nombre d’années. Comme, dans une famille, on préfère ses proches à un
étranger, ainsi une commune doit préférer celui qui l’habite à l’habitant des autres
communes, et l’administration provinciale doit donner à celui qui habite dans
la province même la préférence sur les habitants des autres provinces. C’est
par suite des mêmes principes que vous admettez les Belges aux emplois de
préférence au étrangers. En conséquence j’appuie la
proposition de la section centrale avec la modification que j’ai eu l’honneur
de proposer,
Il est certain que, par
emplois donnés, l’on n’entend pas ceux, par exemple, l’allumeurs
de réverbères.
Un membre. - Mais un copiste !
M.
Legrelle. - Pour un emploi de copiste, si un Belge capable se présente,
je lui donnerai la préférence sur un étranger.
Si vous laisser au
gouvernement la faculté d’employer des étrangers, cette faculté s’étendra
bientôt au-delà des limites posées par la constitution : il pourrait se faire
que le ministère (je ne parle pas du ministère actuel en qui j’ai confiance et
dont je connais le patriotisme, mais comme il ne durera pas toujours, du
ministère qui, un jour ou l’autre, le remplacera), il pourrait, dis-je, se
faire qu’un ministère employât des étrangers ennemis du pays.
Je pense, pour moi, qu’à moins
que l’on ne prouve que nous n’avons plus de Belges
capables, on ne doit pas donner les emplois à des étrangers.
M.
Lebeau. - Je regrette de prolonger cette discussion ; mais j’ai à cœur
de ne pas laisser introduire dans la loi communale une disposition que déjà
l’on a cherché vainement faire prévaloir dans cette chambre, disposition qui ne
ferait pas l’éloge de notre patriotisme, mais qui témoignerait d’un esprit
étroit et mesquin.
Je dois faire remarquer, en ce
moment, un fait assez singulier, c’est que ceux qui vantent tant la sagesse de
l’autorité communale, et s’élèvent contre toute surveillance sur ses actes,
demandent maintenant que, pour elle seule, il soit interdit expressément de
confier des emplois, même subalternes, à d’autres qu’à des Belges.
Je suis fort touché du
patriotisme que montre l’honorable M. Legrelle, et qui le porte à donner pour
les emplois municipaux la préférence non seulement aux nationaux, mais encore
aux habitants de sa province et même de la commune. Mais, si l’honorable M.
Legrelle soutient qu’une bonne et sage administration doit donner pour les
emplois la préférence aux régnicoles, il me semble que ce serait une précaution
injurieuse pour ces régences, dont nous pouvons considérer l’honorable M.
Legrelle comme l’un des organes, que de leur imposer une règle si rigoureuse,
et que vous n’avez imposée ni à la province, ni au gouvernement, ni à la
chambre elle-même, qui devrait cependant à cet égard donner l’exemple, si
l’exemple était si bon.
Si l’on applique cette règle à
la chambre, il faut commencer par congédier MM. les sténographes qui sont des
étrangers et des employés salariés dans le sens que les honorables MM. Legrelle
et Dumortier donnent à l’art. 6 de la constitution.
Le
ministre de la justice peut être dans la nécessité d’avoir un employé étranger
pour la traduction d’une partie des exemplaires du Bulletin officiel en langue allemande. La chambre se trouve dans le
cas d’employer, pour rendre compte de ses séances, des étrangers qui sont
salariés pas l’Etat. Il faudra donc que le ministère, que la chambre emploient
nécessairement des nationaux ; car vous ne pourrez vous dispenser d’imposer au
gouvernement et à vous-même la règle que vous voulez imposer sous ce rapport à
la commune, au nom de la constitution.
Votre proposition n’est pas
compatible avec l’omniscience, l’infaillibilité que vous reconnaissez sans
cesse à l’autorité communale. Vous êtes ici en flagrant délit de contradiction
avec vos propres principes.
Je pense qu’il serait indigne
d’un patriotisme large et éclairé de donner, en adoptant l’amendement proposé
par la section centrale, une mesquine extension à l’art. 6 de la constitution.
Il est certain que, quant à moi, je me propose de le rejeter.
M. le
président. - La
parole est à M. Gendebien.
M.
Gendebien. - J’y renonce, car on a dit tout ce qu’il y avait à dire, Je
ne dirai qu’un mot. Sans adopter en tous points les principes émis par
l’honorable préopinant, je dirai que je considère l’art. 6 de la constitution
comme obligeant les administrations communales et provinciales, le ministère,
enfin tout le monde.
Si vous donnez à cet article
une interprétation dans la loi communale, on ne saura plus comment l’entendre.
Déjà vous ne pouvez pas vous mettre d’accord sur le sens de cet article ;
comment donc interprétera-t-on dans les communes rurales ? Je pense qu’il
convient de laisser les choses comme elles sont. Quant à moi je voterai contre
la proposition de la section centrale, que je considère comme inutile et
dangereuse.
M.
Dumortier, rapporteur. - L’honorable M. Lebeau prétend que nous sommes
en flagrant défit de contradiction, et que la proposition de la section
centrale n’est pas compatible avec l’omniscience, avec l’infaillibilité que,
dit-il, nous reconnaissons d’ordinaire aux autorités communales. Mais comment se
fait-il que M. Lebeau qui, d’ordinaire, trouve que les communes ne sont
capables de rien, les trouve aujourd’hui capables de tout ?
Comment se fait-il que M.
Lebeau qui propose toujours des entraves pour la commune quand il s’agit de ses
rapports avec le gouvernements, veuille ici où il s’agit des droits des
citoyens lui donner toute liberté ? Le délit est donc au moins aussi flagrant
pour vous-même. Je vous renvoie donc votre accusation ; et je la crois un peu
plus fondée chez vous que chez nous.
L’article, dit-on, est
inutile. J’ai déjà dit que si on prouvait qu’il était inutile, je ne m’opposais
pas à ce qu’on ne l’insérât pas dans la loi ; mais s’il est inutile, pourquoi
dans l’art. 20 de la loi communale avez-vous exigé la naturalisation pour les
électeurs ? Pour être électeur, il faudra être Belge on naturalisé ; et pour
les fonctions les plus importantes conférées par la commune, ni l’un ni l’autre
ne sera nécessaire. C’est là une contradiction inadmissible.
- L’article proposé par la
section centrale est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M. le président. - L’article n’étant pas adopté, il n’y a
pas lieu à mettre aux voix la disposition additionnelle proposée par M. Legrelle.
Titre Ier. Du corps municipal.
Chapitre II. Des
élections communales.
Section I. Des électeurs
communaux et des listes électorales
Article additionnel
M. le président. - La chambre passe à l’article nouveau
proposé par M. Doignon, à placer après l’article 21 de la section centrale :
« Les contributions et
patentes ne sont comptées à l’électeur que pour autant qu’il a été imposé ou
patenté pour l’année antérieure à celle dans laquelle l’élection a lieu.
« Le possesseur à titre
successif est seul excepté de cette condition. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Cette disposition me paraît très bonne en elle-même, mais il me semble qu’il
ne suffit pas que l’électeur ait été imposé ou patenté dans l’année antérieure,
il faut aussi qu’il ait payé l’intégralité du cens. En conséquence, je
proposerai de rédiger ainsi l’article :
« Les contributions et
patentes ne sont comptées à l’électeur que pour autant qu’il ait payé le cens
pour l’année antérieure à celle dans laquelle l’élection a lieu. »
- L’amendement de M. le
ministre de l’intérieur est mis aux voix et adopté ;. il fera suite au n°21 de la section centrale.
Titre II. Des
attributions communales.
Chapitre II. Des attributions
du conseil communal
Article additionnel
M. le
président. - La
chambre passe à l’art..., proposé par la section centrale ; il est ainsi conçu
:
« Les emprunts votés par
les conseils communaux sont autorisés :
« 1° Par la députation
provinciale, lorsque la commune est libérée de tout emprunt ou dette antérieure
et que l’emprunt nouveau peut être remboursé avec les recettes de l’année ;
« 2° Par le Roi, lorsque
la commune n’est pas libérée d’emprunts ou de dettes antérieures, ou lorsque
l’emprunt ne peut être remboursé que sur les recettes ordinaires de cinq années
ou par l’aliénation des propriétés communales ;
« 3° Par une loi, pour
les communes dont les recettes ordinaires s’élèvent à plus de 100,000
francs. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je crois qu’il faut ajourner au deuxième vote la discussion de cet article,
attendu que déjà dans l’art. 74 on a voté une disposition relative aux
emprunts.
M.
Legrelle. - Il faut que toute disposition nouvelle soit soumise à
l’épreuve d’un deuxième vote, et si vous ne discutez pas maintenant l’article
dont il s’agit, en réalité il n’y aura pas pour cet article de deuxième vote.
Je crois qu’il suffira que M
le ministre ne se rallie pas à la proposition de la section centrale ; alors on
pourra au deuxième vote revenir sur cet article ; ainsi M. le ministre aura
atteint le but qu’il se propose.
M. Jullien. - L’honorable ministre de l’intérieur
vient de citer l’art. 74 qui traite des emprunts ; il en est également question
dans la disposition finale de l’art. 131, portant qu’il ne pourra être établi
aucune imposition ni voté aucun emprunt que du consentement du Roi et de l’avis
de la députation provinciale.
Dans l’article dont on
s’occupe maintenant, vous établissez trois catégories d’emprunt : la première
catégorie traite d’emprunts autorisés par la députation provinciale, lorsque la
commune est libérée de tout emprunt ou dette antérieure et que l’emprunt
nouveau peut être remboursé avec les recettes de l’année. Je ne vois pas
d’inconvénient à renvoyer au second vote la discussion de cette proposition de
la section centrale ; mais si vous vous en occupez maintenant, il faut la
mettre en harmonie avec la disposition déjà adoptée.
M. Lebeau. - Je crois qu’il est impossible de
voter actuellement sur la proposition présentée par l’honorable M. Dumortier au
nom de la section centrale par les raisons qu’ont exposées M. le ministre de
l’intérieur et l’honorable M. Jullien.
Tout ce qui concerne les
emprunts des villes a été voté par la chambre. Vouloir faire voter une clause
relative aux emprunts c’est engager la chambre à revenir sur une question jugée
et qui ne peut être modifiée qu’au second vole, en supposant encore que les
dispositions relatives aux emprunts aient été amendées dans la première
discussion. Car il a été statué dans le commencement de la loi communale que les proposition de la section centrale auxquelles le
gouvernement se rallierait seraient considérées comme propositions privatives.
Voilà les précédents de la chambre et l’obligation que nous impose votre
règlement.
Quant à l’argument présenté
par M. Legrelle qui regarde comme inadmissible la discussion de l’amendement au
second vote, parce que le règlement exige que toute proposition soit soumise au
double vote, cet argument ne prouve rien, parce qu’il prouve trop. Il s’en
suivrait que l’on ne pourrait présenter au second vote un seul amendement
nouveau, puisqu’un tel amendement ne saurait être voté qu’une fois. L’art. 45
du règlement est positif sur ce point.
Je demande la question
préalable sur la proposition de la section centrale.
M. Dumortier, rapporteur. - Je ne puis admettre
la question préalable. La conclusion de l’honorable M. Lebeau est contraire aux
motifs dont il l’a fait précéder. Il vous dit : On discutera votre proposition
au second. Il m’importe peu, pour moi que les propositions de la section
centrale soient discutées au second vote ou au premier. Mais la question
préalable tendrait à décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer. Cependant je
crois que la proposition de la section centrale mérite toute votre attention.
Je m’oppose donc à la question préalable.
La facilité d’opérer des
emprunts est une des choses les plus ruineuses pour les villes. Lorsque la
révolution de 89 éclata, la plupart des villes de France étaient à la veille de
faire banqueroute, et cela par la facilité trop grande qui leur était laissée
pour faire des emprunts. Nous marcherons dans la même voie qui amènera les
mêmes résultats. Il faut que des mesures prises à temps remédient à cet état de
choses.
L’honorable M. Jullien a
indiqué le deuxième paragraphe de l’art. 13, comme devant pourvoir à cet objet.
Je lui ferai remarquer qu’il a été écarté par la chambre.
Il me semble que ce qu’il y a
de mieux à faire serait de mettre immédiatement en discussion l’article de la
section centrale.
J’inviterais M. le ministre de
l’intérieur à ne pas s’y rallier, afin que l’on pût revenir sur cette
discussion au second vote. Il est nécessaire, je le répète, que l’on prenne une
mesure à l’égard des emprunts des villes.
Le section centrale a cru devoir proposer
l’art. 40 de la loi française d’attributions communales.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’essentiel est que la proposition de la section centrale puisse être
discutée. Il est incontestable qu’elle pourra l’être au second vote. En voici
la preuve péremptoire : c’est que l’art.
Ainsi, sans violer le
règlement, l’on pourrait au second vote discuter la proposition de la section
centrale, tandis que je ne pense pas que le règlement permette de procéder à
cette discussion actuellement.
J’appuierai la question
préalable et j’appellerai l’attention de la chambre sur ces deux points.
Le n°3 de l’article nouveau
serait applicable à 17 villes du royaume. C’est un renseignement que je me suis
procuré et que j’ai cru devoir communiquer à la chambre, afin qu’elle puisse
former son opinion sur la portée de ce numéro. Elle aura à examiner si
l’intervention du pouvoir législatif ne serait pas trop souvent requise.
En second lieu, je ferai
remarquer que les numéros 1° et 2° ne sont pas en harmonie. Dans le premier
numéro, la députation provinciale est appelée à autoriser les emprunts dont le
montant ne dépasse pas le revenu d’une année, et le deuxième numéro autorise le
pouvoir royal à donner cette approbation dans le cas où l’emprunt égalerait le
revenu de 5 années.
Au surplus, c’est le numéro 3°
qui est le plus digne de l’attention réfléchie de la chambre. Il s’agira de
savoir s’il y a lieu de placer 17 villes du royaume dans une position
exceptionnelle.
M. Lebeau. - Je persiste à demander la question
préalable, à laquelle M. le ministre de l’intérieur vient de se rallier, non dans
l’intention d’exclure la discussion de la proposition de la section centrale au
second vote ; car si telle était mon intention, je le dirais, attendu que je ne
veux tendre de piège à personne, pas même à l’honorable préopinant dont je
combats la motion.
Il me semble que, maintenant
qu’il a été prouvé que l’article
Le meilleur moyen d’abréger
nos discussions, c’est de nous en tenir à la stricte observation de notre
règlement. Il est impossible, sans violer le règlement, de voter aujourd’hui
sur la proposition de M. Dumortier, puisque le système des emprunts est complet
dans le premier voie de la loi communale. Il ne peut donc être question de rien
proposer à cet égard, sans engager implicitement l’assemblée de revenir dès
aujourd’hui sur sa première décision. Tel est le sens de la question préalable
que j’ai proposée.
M. Dumortier, rapporteur. - Je commencerai par
repousser l’insinuation de l’honorable préopinant. Il semblerait que j’ai voulu
tendre des pièges à l’assemblée. Je n’ai jamais tendu de pièges, pas plus à M.
Lebeau qu’à toute autre personne.
Je persiste à demander la
discussion immédiate de la proposition de la section centrale. Si la chambre
adoptait la question préalable, lorsqu’au second vote nous viendrons présenter
notre proposition, on nous dirait : ce qui est relatif aux emprunts des
communes n’a pas été amendé. Vous ne pouvez faire une proposition toute
nouvelle. Il fallait la soumettre à un premier vote.
Je crois que personne ne
s’élève contre la question en elle-même. C’est une question de temps. Eh bien,
je propose, moi, puisqu’il nous reste une heure de délibération de nous occuper
de vider la question. Nous aurons ainsi utilisé les moments de l’assemblée.
M. Verdussen. - Comme l’a dit
l’honorable rapporteur de la section centrale, on peut élever le règlement
contre la proposition, lorsqu’il s’agira au second vote d’introduire une
disposition tout à fait nouvelle. S’il ne s’agissait que de l’autorisation de
la députation permanente ou du Roi, point de doute que ce serait au second vote
qu’on pourrait introduire ces amendements. Mais ici il est question d’une
disposition toute nouvelle tendant à faire intervenir le pouvoir législatif
pour autoriser certaine catégorie de communes à contracter des emprunts. C’est
donc un système tout nouveau, et c’est pour cela qu’on pourra faire des
difficultés lors du second vote.
M. Fallon. - Cela dépend de la majorité. Si la
majorité dit que c’est contraire au règlement, Vous ne pouvez lutter contre
elle. Je crois que l’on doit commencer par discuter cette proposition qui est
toute nouvelle ; c’est une disposition qui n’a pas encore paru, et qui aux
termes du règlement doit être soumise au premier et au second vote.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Pour qu’il n’y ait pas de surprise, on peut mettre au procès-verbal que la
chambre a décidé que cette proposition serait remise au second vote.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je
crois que c’est de droit que, d’après l’art. 45 du règlement, on peut proposer
l’article au second vote. Voici l’art. 45 :
« Lorsque des amendements ont
été adoptés ou des articles d’une proposition rejetés, le vote sur l’ensemble
aura lieu dans une autre séance que celle où les derniers articles auront été
votés. Il s’écoulera au moins un jour entre ces deux séances.
« Dans la
seconde, seront soumis à une discussion et à un vote définitif les amendements
adoptés et les articles rejetés.
« Il en sera de même des
amendements qui seront motivés sur cette adoption ou ce rejet. Tous amendements
étrangers à ces deux points sont interdits. » Il est à remarquer que, dans le
premier vote, il a été question d’un article relatif aux emprunts qui a été
rejeté ; ainsi, dans le second voie, on a le droit de produire un article sur
la même question.
M. Dumortier, rapporteur. - Si c’est une simple
question d’ajournement, je ne m’y oppose pas. Ne vaudrait-il pas mieux nous en
occuper demain ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Il y a plusieurs choses fort importantes qu’on doit mettre à l’ordre du jour
de demain : 1° un projet de loi sur la milice adopté par le sénat ; 2° un petit
projet sur les pensions civiles, et ultérieurement le rapport des pétitions, de
telle manière que si on fait passer demain un bon nombre de pétitions, il ne
sera pas essentiel de s’en occuper vendredi, et on pourra poursuivre le budget
du ministère des finances sans désemparer.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Si on met à l’ordre du jour de
demain les projets dont vient de parler M. le ministre de l’intérieur, je pense
qu’on n’entend pas voter tous ces projets avant le budget du ministère des
finances. (Non ! non !) Je demande
qu’on fixe la discussion générale de ce budget à après-demain. (Oui ! oui !)
- La séance est levée à 4
heures et demie.