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Note
d’intention
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du lundi 16 septembre 1833
Sommaire
1) Projet de loi portant le budget du département de
l’intérieur pour l’exercice 1833. Discussion des articles. Traitements du
personnel des ponts et chaussées (notamment promotion des ingénieurs) et/ou
entretien des routes (Dubus, Dubus,
Desmet, Rogier), route de Namur à
Luxembourg (d’Hoffschmidt, Teichmann),
affectation de l’excédant du fonds de barrières (Teichmann,
Dubus, Verdussen), route dans
le Luxembourg (d’Hoffschmidt, Rogier),
service de la Meuse dans le Limbourg (Simons, de Longrée, Teichmann, de Theux, Rogier, Olislagers), polders (Verdussen,
Desmet, Teichmann, Dubus, Verdussen, Dubus),
service de la Meuse dans le Limbourg (de Theux, d’Huart, Trentesaux, Rogier, Donny, de
Theux, Dubus, Rogier, Jullien, d’Huart), entretien des
bâtiments de l’Etat (hôtel du ministre des affaires étrangères) (Rogier, Dubus, Rogier,
Nothomb, Dubus, Rogier,
Dumortier, Nothomb, Nothomb), service des mines (Rogier,
Brixhe)
(Moniteur belge n°261, du 18 septembre 1833)
(Présidence de M. Coppieters,
vice-président.)
M. Coppieters, l'un des vice-présidents, monte au fauteuil
avant midi et demi.
M.
de Renesse
fait l’appel nominal ; environ quarante membres sont présents.
A une heure la chambre
est en nombre pour délibérer.
M. Liedts donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
Les pièces adressées à
la chambre sont renvoyées à la commission des pétitions.
M. le président. - Deux propositions ont été déposées sur le
bureau ; elles seront renvoyées devant les sections.
Discussion des articles
Chapitre IX
(devenu chapitre X) - Personnel
M. le président. - Nous sommes parvenus au chapitre VIII
présenté par la section centrale.
M.
Dubus, rapporteur. - Messieurs, dans votre dernière séance vous avez renvoyé à l’examen
de la section centrale les amendements proposés par M. le ministre de
l'intérieur sur les travaux publics. Un de ces amendements consiste dans le
chapitre IX (nouveau), comprenant les traitements des ingénieurs, des
conducteurs permanents, des employés temporaires, des frais de bureau et de
déplacement. Il serait ainsi énoncé :
« Litt. A. Traitements
des ingénieurs : fr. 123,950.
« Litt. B. Frais de
bureau et de déplacement : fr. 54,130.
« Litt. C. Traitements
des conducteurs : fr. 80,850.
« Litt. D. Employés
temporaires : fr. 33,820.
« Total. fr.
292,750. »
Votre section centrale
vous avait proposé d'abord un seul crédit de 230,000 fr, pour le traitement des
ingénieurs, des conducteurs permanents et temporaires, et 50,000 fr. pour frais
de bureau et de déplacement ; et comme la section centrale comprenait dans ces
chiffres les 15,000 fr. pour traitement des gardes-bascules, la totalité de
l’allocation proposée par la section centrale est donc de 264,000 fr. La
différence avec la proposition du gouvernement et de 27,950 fr., comme je
l’avais déjà dit dans la dernière séance.
Pour les traitements des
ingénieurs il est demandé 123,950 fr. D’après les états nominatifs qui avaient
été communiqués à votre section centrale, les traitements des ingénieurs en
activité s’élevaient à 120,330 fr., et elle avait compris cette somme dans son
premier travail.
M. le commissaire du Roi
a communiqué des renseignements sur les mutations survenues dans le corps des
ingénieurs, et sur l’époque à laquelle le traitement de trois ingénieurs a
cessé d’être à la charge du ministère de la guerre.
Calcul fait de ces
mutations, 122,500 fr. seront nécessaires pour payer les ingénieurs pendant
l’exercice 1833. Et comme la section centrale n’a pas cru qu’il fût possible de
toucher aux traitements pour l’exercice courant, elle propose à l’unanimité de
fixer la somme du paragraphe A à 122,500 fr.
M. le commissaire du Roi
s’est rallié à ce chiffre.
Sous litt. B, le
ministre a demandé 54,130 fr. J’ai déjà eu l’honneur de rappeler à la chambre
qu’en 1832 il a été alloué 44,000 fr. ; mais que certains travaux
extraordinaires avaient exigé un crédit supplémentaire de 4,500 fr.,et avaient
porté le chiffre total à 48,500 fr. La section centrale avait cru satisfaire à
tous les besoins au moyen d’une allocation de 50,000 fr. ; c’est ce qu’elle
avait proposé dans le rapport imprimé. Le gouvernement, dans son premier projet
de budget, demandait 48,000 fr. ; dans son second projet de budget, présenté au
mois de juin dernier, il demandait 52,080 fr. Le nouveau travail du
gouvernement, qui a été soumis, en forme de tableau, à votre section centrale,
portait cette somme à 54,130 fr. Il y a eu cette année beaucoup de déplacements
extraordinaires pour les routes ; M. le commissaire du Roi nous a assuré que la
somme de 54,00 fr. serait à peine suffisante ; la section centrale propose la
somme de 52.000 fr. pour frais de bureau et de déplacement.
« C. Traitements
des conducteurs : fr. 80,850. »
« D. Traitements
des employés temporaires : fr. 33,820 fr. »
La section centrale ne
portait ces deux articles que pour un chiffre total de 94,470 fr., ce qui
donnait une différence de 20,200 fr. avec la proposition du gouvernement.
La section centrale
considérait la surveillance temporaire comme s’appliquant seulement à cette
époque de l’année où s’exécutent à la fois plusieurs grands travaux, de manière
que le service des conducteurs dits permanents devenait insuffisant ; partant
de là, elle avait pensé que l’on ne devait comprendre les traitements indiqués
dans les états nominatifs que pour une partie de l’année relativement aux
employés temporaires, et c’est sur cette base qu’elle avait fixé son chiffre ;
mais à son grand étonnement il n’en est pas ainsi. Tous ces aides, dits
temporaires, sont tous permanents sous le rapport du traitement.
On leur paie un
traitement depuis le premier jour de l’année jusqu’au dernier, qu’ils soient,
employés ou non. Il y a 71 conducteurs permanents et 29 conducteurs ou aides
appelés temporaires : en tout 100. 23 de ces conducteurs sont payés par les
provinces et 77 sont payés par le budget de l’Etat. C’est pour effectuer ce
paiement qu'on demande 114,670 fr. D’après ces faits, dont votre section
centrale vient d'avoir connaissance pour la première fois, elle n’a pas cru
qu’il fallait faire deux articles séparés pour les employés, puisqu’ils ne
diffèrent entre eux que de nom. Elle a pensé qu’il fallait faire un seul
article ou littera pour les conducteurs et employés temporaires ; elle persiste
à croire que le chiffre 114,670 fr. est excessif et qu’il n’est pas nécessaire
d’avoir un personnel aussi considérable.
Mais ces employés ont
été payés depuis le 1er janvier, et nous sommes à la fin du neuvième mois de
l’année. Nous avons examiné les mutations survenues dans l’année, et, nous
croyons que le chiffre 112,000 fr. peut suffire. C’est de concert avec M. le
commissaire du Roi, qui a pris part à notre travail, que nous proposons ce
chiffre. Ainsi, au lieu des paragraphes C et D, on en mettra un seul, intitulé
: Conducteurs permanents et employés temporaires.
Le chiffre total du
chap. IX (nouveau) sera, de concert avec M. le commissaire du Roi, 286,500 fr.,
au lieu de 292,750 fr., demandé dans la dernière séance par M. le ministre de
l’intérieur. La différence n’est que de 6.250 fr.
Chapitre VI (devenu chapitre VII) - Ponts et chaussées
M.
Dubus, rapporteur. - Un autre amendement de M. le ministre s’applique au chap VI., proposé par la section centrale.
Le ministre présente le libellé
suivant du chap. VI :
« Art. 1er.
Entretien et réparation des routes : fr 1,320,000.
« Art. 2. Frais
d’exploitation : fr. 15,200.
« Art. 3
Améliorations des routes, construction de routes nouvelles : fr. 602,000.
« Art. 4. Levée des
plans : fr. 27,060
« Total : fr. 1,964,800. »
Sur les articles
premier, second et troisième, la section centrale est d’accord avec M. le
ministre de l’intérieur.
L’amendement porte sur
l’art. 4, levée des plans, travail pour lequel le gouvernement demande 27,060
fr. ; la section centrale accordait 15,000 fr.
Ce crédit ne s’est
élevé, en 1831, qu’à 1,000 fl. ; on l’a porté à 6,000 fl. en 1832, à cause de
la levée extraordinaire des plans qu’exigeait le projet de chemins en fer.
Il ne paraissait pas que
la dépense dût être plus considérable en 1833. La section centrale remarquait
que les routes de seconde classe tombaient à la charge de l’Etat, et qu’elles
devaient augmenter les dépenses de l’article. D’après ces données, elle a
proposé le chiffre de 15,000 fr. M. le commissaire du Roi a fait connaître que
ces 15,000 fr. sont dépensés, et qu’il reste des travaux de même nature à faire
jusqu’à la fin de l’année. De concert avec M. le commissaire du Roi, la section
centrale propose 20,000 fr.
En conséquence les
propositions de votre section centrale sont les suivantes :
« Chapitre IX
(nouveau). Art. unique.
« A. Traitement des
ingénieurs : fr. 122,500.
« B. Frais de
bureau et de déplacement : fr. 52,000.
« C. Traitements
des conducteurs et employés temporaires : fr. 112,000.
« Total : fr.
236,500. »
« Chapitre VI de la
section centrale.
« Art. 1er.
Entretien et réparation des routes : fr. 1,320,000.
« Art. 2. Frais
d'exploitation : fr. 15,200.
« Art. 3.
Amélioration des routes, construction de routes nouvelles : fr. 602,000 fr.
« Art. 4. Levée des
plans : fr ; 20,000.
« Total : fr. 1,957,200. »
Les résolutions de la
section centrale ont été prises à l’unanimité des membres présents.
M. le président met aux voix les paragraphes A, B, C, du
chapitre IX (nouveau). Ils sont adoptés, ainsi que le chapitre lui-même.
Chapitre VI (devenu chapitre VII) - Ponts et chaussées
Article premier
L’article premier du
chapitre VI est mis en délibération. Il est intitulé : Entretien et réparation des
routes, 1,320,000 fr.
M.
Desmet. - Je ne sais si vous avez été
surpris, comme moi, dans la séance de samedi, à la lecture d’un rapport au roi
que le ministre de l’intérieur vous a faite, qui concernait la gratification ou
promotion qu’un arrêté royal a accordée à quinze ingénieurs des ponts et
chaussées. Je l’ai été étrangement, et je me suis demandé avec une certaine
inquiétude que pouvaient être les plans de ceux qui nous gouvernent ? D’un
autre côté on voit qu’ils ne font aucun cas de violer le pacte fondamental, et
d’un autre côté il paraît que l’économie dans les dépenses de l’Etat est le
moindre de leurs soucis ; on dirait qu’ils croient que l’argent des
contribuables n’est qu’à ramasser et qu’ils peuvent le jeter d’après leurs
caprices pour créer des places pour des hommes, dans le seul but d’augmenter le
nombre des créatures.
A entendre M. le
ministre et M. le commissaire du Roi, il faut remplir les cadres du corps des
ponts et chaussées si vous avez besoin ou non de ces employés, et sous le
prétexte de compléter ces cadres, il faut augmenter les traitements sans que
les attributions aient été augmentées ; il faut le faire parce qu’on l’a fait
dans l’armée et parce qu’un traitement de trois à quatre mille francs est trop mesquin
pour un élève de l’école polytechnique ; la convenance exige qu’il en ait un de
cinq à six mille.
Mais quand on parle un
tel langage et qu’on n’a aucunement égard aux fortes contributions qui viennent
tous les jours de plus en plus accabler le peuple, et aux plaintes réitérées de
la nation et de ses représentants, on ferait bien une fois aussi la demande :
quels sont les grands avantages que le corps des ponts et chaussées rend à ce
peuple payant et de quelle utilité importante il est au pays ?
Je crois que si on
devait agiter cette question, on trouverait grand partage d’opinions et que
l’utilité serait fortement contestée, surtout quand on commence à respecter si
peu les règles de l’institution.
L’Angleterre est-elle
moins prospère parce qu’elle n’est point sous l’influence d’un corps des ponts
et chaussées et qu’elle ne doit pas subir son despotisme ? Ce n’est pas à la
direction d’une telle congrégation mais à son système de travaux libres qu’elle
est redevable de son haut degré de puissance et de prospérité. Le gouvernement
anglais a abandonné aux particuliers le soin d’exécuter les routes, les ponts,
les chemins de fer, les canaux, les bassins, les entrepôts, etc., et en peu
d’années pour plus de dix milliards de ces travaux furent entrepris et achevés
; enfin en trente ans le sol britannique, travaillé par l’industrie
particulière sur tous les points, a produit une augmentation de revenus annuels
de deux milliards deux cent cinquante mille francs ; en sorte, que depuis cette
époque plus de 60 milliards ont été dépensés en travaux publics, somme
considérable attachée à ce pays et qu’il ne saurait plus perdre.
L’Angleterre n’est
parvenue à ce grand résultat que parce que son administration publique a eu le
bon esprit de ne pas créer chez elle un corps qui avait la haute main sur tous
les ouvrages publics, et qui formait une espèce d’Etat dans l’Etat même ; elle
a laissé faire les particuliers et, comme je crois que c’est aussi dans
l’intérêt de mon pays et de sa prospérité de laisser faire autant que possible
les particuliers, et de diminuer la domination d’un corps administratif, je
saisis cette occasion pour renouveler les vœux que j’avais faits l’année
dernière, c’est-à-dire que l'entretien des routes pavées et empierrées soit
fait par les teneurs des barrières ; que le cahier des charges de
l’adjudication des barrières contienne la clause qui obligerait chaque teneur
de tenir à ses frais, en bon état d’entretien, la distance de la route sur
laquelle est placée sa barrière.
L’Etat y trouverait une grande
économie, et le pays, le grand avantage d’avoir en tout temps toutes les routes
dans un bon état d’entretien. Il est connu qu’aujourd’hui ce n’est pas ainsi ;
beaucoup de routes ne se trouvent pas continuellement dans cet état d’entretien
qu’elles devraient avoir pour la commodité du roulage ; mais quand chaque
teneur de barrière devra entretenir la distance de sa barrière, et qu’il sera
obligé de faire les réparations dans le moment même que la route l’exige,
jamais la route ne sera laissée un moment en mauvais état.
De même il y aura une
grande économie pour l’Etat ; c’est incontestable. 1° Vous n’aurez pas besoin
de cette masse d’ingénieurs, inspecteurs, conducteurs, piqueurs, etc., qui
enlèvent au pays, comme votre budget en fait foi, pour leur soi-disant
direction et surveillance des routes, des sommes considérables. Toute la
surveillance consistera à veiller si les teneurs de barrières ne se trouvent
pas en défaut de réparer à temps les endroits endommagés, et, en cas de délit,
de le faire faire d’office.
2° On trouvera une
grande diminution dans le taux des réparations. Je crois que, sans risquer de
se tromper, on pourra l’évaluer à la moitié de ce qu’il est aujourd’hui ; car
on sait comment se font généralement les réparations des routes, et comment le
mètre des parties réparées se pratique. Il est connu que le sable joue un grand
rôle dans ces mesurages ; on répare par parties détachées, et on couvre de
sable tout le bloc où se trouvent ces parties détachées, pour le soumettre
entièrement au mètre des agents des ponts et chaussés. Ceci est un échantillon
de la manière dont on trompe l’Etat ; il y en a plusieurs autres que l’on
pourrait citer ; et d’ailleurs on sait combien les réparations sont très
souvent mal exécutées, et dans les mauvaises saisons de l’année ; ce qui est
cause que les réparations ne tiennent qu’un petit temps, et que tous les mois
il faut recommencer de nouveau.
Le mode de faire
entretenir les routes pavées par les teneurs de barrières n’est point de
nouvelle invention ; avant l’administration française de 92, sous le régime des
châtellenies, c’était celui-là qu’on pratiquait pour l'entretien de nos routes
payées. On insérait dans le cahier des charges de l’affermage des barrières que
les teneurs entretiendraient à leurs frais la distance de la route sur laquelle
était placée chaque barrière ; et alors toutes les routes étaient généralement
bien tenues, et les dépenses de l’entretien étaient, à beaucoup près, moindres
qu’aujourd’hui.
Et ce ne pouvait être
autrement ; les teneurs de barrières avaient intérêt de faire les réparations
dans le moment même que le dégât se montrait, et on sait que les grandes
réparations n’ont lieu que quand on laisse accroître l’endommagement, et de
même ils avaient intérêt de fermer les barrières pendant le temps du dégel, où
cependant les plus grands dégâts se commettent aux routes.
Il est évident,
messieurs, que ce mode d’entretien des routes sera entièrement à l’avantage du
public, et procurera une grande économie à l’Etat.
Et
je dois encore le répéter, c’est l’économie dans nos dépenses que nous pouvons pas négliger ; nous devons, au contraire, en
faire le principal objet de notre sollicitude; car, si nous continuons à
avancer dans cette vote désastreuse de dépenses et de majorations de
traitements et que nous n’y mettions pas à temps une barrière, toutes les
administrations vont profiter, ou, pour mieux dire, vont abuser de notre
insouciance et de notre prodigalité. Et certes, ce n’est pas le corps des ponts
et chaussées qui peut se plaindre qu’il ne mange pas assez à la table du
budget, il s’y place sous différentes formes ; par exemple, un inspecteur
reçoit un traitement comme tel, et quand il se met en route, il doit avoir ses
frais de déplacement et de séjour ; un ingénieur de même reçoit le traitement
attaché à ses fonctions, et en sus il touche des frais de levées de plans et en
différentes occasions quelques cents pour cent, qui montent assez haut pendant
l’année, comme nous venons de voir l’exemple de cet ingénieur, ou cet
architecte, qui a touché 1,331 fr. quand la fameuse estrade de 37,966 fr. a été
placée contre le vestibule de l’église du Caudenberg ;
c’est un traitement entier d’un commissaire de district du Luxembourg que cet
ingénieur a gagné par quelques heures de surveillance. Quand on voit une telle
dilapidation des deniers publies, n’est-il pas temps de songer une bonne fois
aux économies et d’engager le gouvernement d’avoir quelque égard à nos
réclamations? Qu’on veuille donc faire l’essai d’entretenir les routes comme je
viens de le proposer, on se convaincra bientôt que l’Etat et le public y
trouveront de grands avantages sous le double rapport d’une grande économie
dans les dépenses annuelles et de la bonne tenue des routes.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - L’honorable orateur s’est livré un peu
tardivement à la critique du personnel de l’administration des ponts et
chaussées ; la chambre n’à pas partagé l’avis de l’honorable membre,
puisqu’elle vient de voter les traitements demandés pour cette administration.
Quant à la critique
relative aux promotions qui ont été faites dans le courant de cette année, et
pour lesquelles il y aura majoration nécessaire au budget de 1834, j’y ai déjà
répondu en prenant la défense de ces promotions ; j’en accepte la
responsabilité, et je renouvellerai cette défense en 1834 s’il est nécessaire.
Je ferai observer qu’il y a une sorte d’exagération à parler ici des impôts
dont on écraserait les contribuables, quand il ne s’agit que d’une dépense de
13,000 fr. L’honorable orateur a cependant fait preuve aussi de sollicitude
pour les fonctionnaires ; dans une de nos dernières séances, il a été un des
plus chauds défenseurs de l’allocation demandée pour les frais de route et de
tournée de MM. les commissaires de district. L’honorable membre est tombé dans
une erreur, que je me hâte de réparer, quand il a fait allusion à la fameuse
estrade, Il a dit que l’ingénieur du gouvernement, ou l’architecte qui avait
surveillé la construction de cette estrade, avait trouvé le moyen de gagner
beaucoup pour un très petit labeur ; je dois dire que cet architecte
n’appartient pas au gouvernement ; que c’est pour éviter le renouvellement des
frais de surveillance des constructions nouvelles que cette année le
gouvernement a chargé un de ses ingénieurs de faire l’estrade.
L’orateur
a présenté ses vues sur la manière d’entretenir les routes: le gouvernement est
disposé à mettre à profit l’expérience des hommes éclairés sur cette matière.
Quoi qu’il en soit, les réflexions de l’honorable membre sont prématurées ;
elles pourront se présenter plus utilement l’année prochaine ; nous nous
réservons de défendre le mode adopté par le gouvernement, de diriger par ses
agents les travaux, et de faire voir que si l’intérêt privé est vivace et entreprenant
en Angleterre, il n’en est pas toujours ainsi chez nous. C’est à ce point que
récemment une route, vivement sollicitée par plusieurs membres de cette
chambre, a été mise en adjudication et n’a pas trouvé d’adjudicataire.
M.
d’Hoffschmidt.
- Une seule route traverse la province de Luxembourg, qui n’a que ce moyen de
communication avec
Les travaux d’entretien
de cette rouste ont été adjugés, en 1827 ou 1828, pour un terme, je crois de 14
ans, à un M. Pescator de Luxembourg, riche banquier
qui paraît se fier sur le puissant crédit de ses débiteurs, pour s’abstenir de
remplir les conditions du contrat d’adjudication en vertu duquel, cependant, il
perçait les fonds de l’Etat.
Je crois devoir
recommander au gouvernement le fait, qui par son importance réclame toute sa
sollicitude. Je l’engage fortement à prendre directement, et le plus tôt
possible, des mesures sévères pour réprimer un abus qui excite, par sa trop
longue durée, le mécontentement et les murmures de tous ceux, qui en ont
connaissance.
M.
Teichmann, commissaire du Roi, a la parole. - Messieurs, dit-il, les
intentions de l’honorable préopinant sont prévenues ; des dispositions
sont prises par le ministre de l’intérieur pour assurer la prompte restauration
de la route dont il s’agit. Si elle est arrivée à un grand degré de
dégradation, la faute n’en est pas aux ingénieurs. Dès le mois de février
dernier, les ingénieurs se sont mis en mesure pour que les travaux puissent
être exécutés par l’entrepreneur. Ce n’est que par des circonstances
particulières quai les dispositions prises par les ingénieurs n’ont pu être
mises à exécution qu’en août dernier.
- Les articles 1 et 2,
mis aux voix, sont adoptés.
L’art. 3 est mis en
délibération.
M. Teichmann, commissaire du Roi. - La loi du 10 août avait accordé
une somme de 610,000 fr. pour l’exécution de différentes routes ; l’expérience
a prouvé que quelques allocations étaient trop élevées et que d’autres étaient
insuffisantes. Nous demandons, afin que le gouvernement puisse disposer des
sommes qui ne seraient pas employées, nous demandons que le titre de l’art. 3
soit ainsi conçu :
« Amélioration des
routes, construction de routes nouvelles, avec faculté, pour le gouvernement,
de disposer des excédants de crédits spéciaux fixés par la loi du 10 août
dernier, pour que ces excédants, puissent être employés en 1833 pour des
travaux d’utilité publique. »
La section centrale a
reconnu la convenance de cette disposition. Je demande que M. le président la
mette aux voix.
M.
Dubus, rapporteur. - La chambre a divisé le crédit de 602,000 fr. en plusieurs
allocations spéciales. Comme aucun transfert ne peut avoir lieu, comme le
ministre ne peut employer les sommes votées que pour les routes auxquelles
elles sont affectées, il s’ensuit qu’elles demeureraient inutiles au
trésor ; cependant il s’agit d’excédants de produits de barrière qui
doivent être appliqués à l’entretien des routes. Considéré de plus qu’une de
ces allocations s’élevant à 120,000 fr. a été réduite, par suite d’une
adjudication, à la somme de 80,000 fr. D’un autre côté, une allocation portée à
40,000 fr., se trouvera insuffisante, les derniers ouragans ayant rendu plus
considérables les travaux à faire pour la route d’Anvers à Gand. La réduction
proposée par M. le commissaire du Roi pourrait remédier à ces
inconvénient. Comme cet amendement n’avait pas été présenté dans la
séance dernière et qu’il n’avait pas été renvoyé à la section centrale, elle
n’a pas cru avoir mandat pour faire un rapport sur cette proposition.
M. le
président. -
Voici, d’après l’amendement, comment le titre de l’art. 3 serait conçu:
« Amélioration des
routes, construction de routes nouvelles, avec faculté au gouvernement de
disposer des excédants de crédits spéciaux fixés par la loi du 10 août dernier.
M. Verdussen. - Il faudrait mettre :
« dépenses imputables sur le produit des barrières. »
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - On pourrait reproduire le libellé du tableau
de la section centrale.
M.
Dubus, rapporteur. - Il ne peut y avoir d’équivoque ; la loi du 10 août ne dispose que
pour les excédants des barrières.
- L’article 3 est
adopté.
« Art. 4. Levée des
plans : fr. 20,000. »
M. d’Hoffschmidt. - Une route que réclame l’intérêt
général, et qui offrirait en même temps des avantages inappréciables à la
partie la plus aride de la province de Luxembourg, est dans ce moment
sollicitée vivement prés du gouvernement : elle établirait une communication
directe entre Liége et le Luxembourg, en passant par Ewailles,
Houffalize et Bastogne.
Je désirerais savoir de
M. le ministre si des fonds sont alloués sur le crédit demandé par l’article en
discussion pour la levée des plans de cette route. Je fais surtout cette
demande à M. le ministre pour l’engager à presser le travail de la levée de ces
plans, dans l’espoir qu’il pourra proposer au budget de 1834 une somme destinée
à l’ouverture de cette route, dont je démontrerai, lors de la discussion de ce
budget, l’utilité et même la nécessité.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - Des instructions ont été données à
l’ingénieur de la province du Luxembourg dans le but de satisfaire aux vœux
d’un grand nombre d’habitants; il sera ainsi répondu à ceux d’un de leurs
représentants.
L’article 4, mis aux
voix, est adopté.
L’ensemble du chapitre,
s’élevant à 1,957,200 fr., est adopté.
Chapitre
VIII - Canaux, ports et côtes, polders
M. le président. - On passe au chapitre VIII du gouvernement,
ainsi conçu : « Navigation intérieure. »
« Art. 1er.
Canaux : fr. 132,400 »
« Art. 2. Ports et côtes : fr. 302,300 »
« Art. 3. Polders : fr. 970,000. »
« Art. 4. Direction : fr. 189,000. »
« Total : fr.
1,593,700. »
La section centrale
propose de le remplacer par le chapitre suivant :
« Canaux. - Ports
et côtes. - Polders. »
« Art. 1er. Frais
d’exploitation des canaux : fr. 28,110 »
« Art. 2. Entretien
des canaux, travaux extraordinaires au canal d’Antoing à Pommeroeul :
fr. 79,340 »
« Art. 3. Ports et
côtes, frais d’exploitation : fr. 11,585 »
« Art. 4. Idem,
entretien : fr. 179,515 »
« Art. 5. Construction
d’une partie de la jetée d’ouest à Ostende : fr.
107,000 »
« Art. 6. Entretien
et reconstruction des digues de l’Escaut, et construction d’aqueducs dans les
polders : fr ; 964,000 »
« Total : fr.
1,369,550 »
Total, fr. 1,369,550
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - Je me rallie à la proposition de la section centrale;
seulement je demanderai qu’on fasse de l’art. 2 l’art. 1er et de l’art. 4
l’art. 3.
M. Simons. - Je ne puis m’empêcher de témoigner mon
étonnement de ce que je ne vois figurer au chapitre VIIl,
intitulé Navigation intérieure, aucun chiffre pour les travaux de défense
contre les eaux de
Pour toutes les
provinces qui ont été dans le cas de réclamer des secours, des allocations plus
ou moins considérables ont été successivement accordées pour des travaux à
exécuter tant dans l’intérêt de la navigation intérieure que pour la
conservation des propriétés menacées d’inondations; tandis que pour la province
du Limbourg aucun crédit quelconque n’a jusqu’à présent été demandé pour cet
objet.
Vous en conclurez sans
doute, messieurs, que les ouvrages de cette nature, dans ma province, se
trouvent dans un état tellement satisfaisant, qu’ils n’exigent aucune dépense.
Il serait à désirer que nous pussions, en réalité, en tirer cette conséquence;
mais il s’en faut de beaucoup. Je puis vous affirmer, sans crainte de m’exposer
à un démenti de la part du gouvernement, qu’en général les ouvrages de défense contre
Des rapports officiels
me sont parvenus de différentes administrations communales, qui me dépeignent
leur position sous les couleurs les plus sombres. En avant de la commune d’Uickhoven, un ouvrage en pierres de taille, qui a coûte des
sommes immenses, menace, faute de réparations, d’une ruine certaine. Il se
trouve miné par les eaux, au point qu’il est impossible qu’il puisse résister
au moindre choc des glaçons. Et savez-vous quelles seront les suites de son
éboulement ? rien moins que la ruine de deux ou trois
communes importantes, dont une grande partie des habitants va être engloutie
dans les eaux, et dont les plus riches campagnes et une masse de bonniers de
pâturages vont être totalement dévastés. Un peu plus loin, près de Maesyck,
Le gouvernement ne peut
pas ignorer ces faits, puisque non seulement des représentations pressantes lui
ont été faites, à différentes reprises à cet égard, mais que même les employés
des ponts et chaussées ont été sur les lieux pour les constater. Que l’on
produise les rapports qui ont été la suite de cette inspection des lieux, et
ils vous donneront la conviction pleine et entière qu’il n’y a pas
d’exagération dans le narré des faits que j’ai eu l’honneur de vous signaler.
On me répondra sans
doute que, d’après les dispositions existantes sur la matière ces sortes de
dépenses sont à la charge des communes et des propriétaires riverains, et
subsidiairement à charge de la province. Je n’ignore pas l’existence de ces
dispositions iniques du roi Guillaume, qui , pour diminuer le chiffre de ses
budgets, a trouvé bon de métamorphoser par un trait de plume en charges locales
une dépense qui, par sa nature, incombe incontestablement à l’Etat ; mais s’il
est constant que ni les propriétaires riverains, ni les communes, ni la
province ne se trouvent en état de faire face à l’énormité de cette dépense, je
pense que c’est le cas ou jamais que le gouvernement vienne au secours d’une localité
aux abois, et qu’elle fasse d’avance exception à une disposition injuste,
arbitrairement imposée aux provinces malgré les protestations les plus
énergiques.
Eh bien, messieurs,
c’est là réellement la position de la province du Limbourg. Si je suis bien
informé, la dépense qu’occasionneront les travaux dépasse les 200,000 fr., et
le gouvernement n’ignore pas que la province n’a absolument aucune ressource
pour y subvenir. Les petits propriétaires riverains préféreraient abandonner
leurs propriétés que de supporter leur part contributoire dans cette charge
énorme; et pour forcer, les communes riveraines à faire face à cette dépense,
il faudrait les assujettir à une taxe municipale qui dépasserait celle établie
dans les principales villes du royaume.
Sous le gouvernement
précédent on a déjà reconnu les grandes difficultés qui seraient la suite de la
mise à exécution dans nos contrées des règlements dont il s’agit ; mais
depuis elles sont considérablement augmentées et devenues insurmontables sans
le secours du gouvernement. En effet, la province a été privée pendant près de
trois ans du produit des péages qui se perçoivent sur cette rivière, et dont le
produit doit servir à faire face jusqu’à un certain point à la dépense dont il
s’agit. Ajoutez à cela que les communes riveraines de
Cependant, la confection
de ces ouvrages est urgente ; elle ne souffre aucun délai, et personnellement
j’ai la conviction intime que si on n’y pourvoit immédiatement et avant la
mauvaise saison, une grande partie des communes riveraines sont menacées d’une
ruine inévitable.
Faut-il maintenant que,
dans cette position, le gouvernement reste spectateur indifférent en présence
d’un danger aussi imminent, auquel une partie d’une province, déjà par trop
malheureuse, se trouve exposée? Je ne le crois pas. Je me persuade au contraire
qu’il est du devoir du ministère de prévenir, par tous les moyens qui sont en
son pouvoir, des suites aussi désastreuses, surtout lorsque, comme dans le cas
présent, d’après les considérations que j’ai fait valoir, on ne peut les
attribuer qu’à la force majeure.
Que
ce soit donc à titre d’obligation, ou à titre de secours, nécessité par un cas
fortuit et par les circonstances politiques, n’importe ; le gouvernement,
auquel le danger est signalé, est obligé par devoir de prendre les mesures les
plus efficaces pour les prévenir, sinon, d’après moi, le cas échéant de la
catastrophe que j’ai lieu de craindre, il ne pourra jamais se justifier. Les
propriétaires de. la province du Limbourg, quoique
sacrifiée par le traité des 24 articles, n’ont pas moins droit à la
conservation de leurs propriétés que ceux des polders, pour lesquels la
législature a voté des sommes énormes !
Je recommande donc
instamment cet objet à la sollicitude du gouvernement. J’adjure M. le ministre
de demander une allocation pour pourvoir immédiatement aux travaux les plus
urgents dont il s’agit : une responsabilité immense pèse sur sa personne.
Qu’il veuille réfléchir sérieusement aux suites désastreuses auxquelles il
expose une population qui n’a déjà que trop à se plaindre d’un état de choses
dont, j’ose le dire, elle seule est la principale victime.
M. de Longrée. - Messieurs, je prends la parole pour appuyer
de toutes mes forces la demande de mon honorable collègue et ami M. Simons,
tendante à ce que le gouvernement alloue des fonds pour exécuter des travaux de
défense contre les dégâts de
Je
vous prie de remarquer, messieurs, que je ne plaide pas seulement les intérêts
des habitants du Limbourg, propriétaires riverains de
Je prie donc M. le
ministre de l’intérieur de prendre la demande de mon honorable collègue et ami
M. Simons, ainsi que la mienne, en sérieuse considération, afin que le gouvernement
accorde les fonds de secours nécessaires pour que l’on puisse commencer sans
délai les travaux à faire aux plus urgentes défenses contre les dégâts de
M.
Teichmann, commissaire du Roi. - Messieurs, les travaux qui sont à exécuter
sur les rives de
Du
reste, le gouvernement s’est fait rendre compte de la situation des choses. Les
faits allégués sont vrais ; si d’ici à l’hiver prochain les travaux nécessaires
ne sont pas faits, les eaux pourront se creuser un passage et causer de grands
dommages. La somme qu’il faudrait dépenser pour empêcher un pareil résultat,
est évaluée à 73,000 fr. Le gouvernement, considérant que les premiers devoirs
à l’égard de ces travaux ce sont ceux imposés aux riverains, et les seconds
ceux imposés à la province du Limbourg, comme gérant la navigation de
Je dois dire cependant
que les désastres qui menacent les propriétés riveraines de
M. de Theux. - Messieurs, je ne pense pas que ce soit le
cas d’appliquer rigoureusement l’arrêté du 17 décembre 1819. Comme on vous l’a
déjà dit, ce n’était que parce que le gouvernement avait abandonné les revenus
de certaines rivières aux provinces, que les provinces devaient supporter les
frais de l’entretien des rives. Or, puisque, par suite des événements de la
guerre, la province du Limbourg est privée de cette espèce de revenus, elle
doit être dégrevée de la charge qui en est la conséquence. Veuillez remarquer
que ce n’était que par mesure d’ordre que le gouvernement avait reporté cet
objet sur les provinces ; mais il n’est pas entré dans ses intentions de leur
faire supporter toute la dépense. En effet, l’art. 7 de l’arrêté du 17 décembre
1819 autorisait les provinces à indiquer au gouvernement les travaux à faire,
et l’art. 15 porte expressément que le gouvernement
pourra mettre à la disposition des provinces les sommes nécessaires pour être
appliqués à ces travaux. On a confié cet objet aux provinces par mesure
d’ordre, je le répète ; car le Roi exprimait la confiance qu’elles
mettraient tous leurs soins à bien employer les revenus provenant de ce chef et
les sommes extraordinaires, les subsides qui leur seraient accordés.
La
nature des dégâts dont
M. le commissaire du Roi
a parlé des rives de l’Escaut. Certes, je suis loin de le nier, les
propriétaires riverains de l’Escaut ont éprouvé de grands malheurs ; mais aussi
on se rappelle que c’est au moyen de fonds fournis par le gouvernement que se
font les réparations des rives de l’Escaut ; c’est encore ce qui doit avoir
lieu pour les rives de
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Le gouvernement n’ignorait pas la
situation déplorable ou se trouvait un assez grand nombre de riverains de
Il est certain,
messieurs, qu’aux termes de l’arrêté du 17 décembre 1819, les revenus de
M. Olislagers. - J’appuie les observations qui
ont été présentées à la chambre par mes honorables collègues de la province du
Limbourg. Tout ce qu’ils ont dit est de la plus grande exactitude. Lors de la
cession qui fut faite à la province sous le roi Guillaume, on ne lui a pas
laissé les fonds nécessaires pour exécuter les travaux dont il s’agit. Il y a
quarante ans qu’ils restent abandonnés, et les riverains se trouvent dans
l’impossibilité la plus absolue de faire face à cette dépense.
- Les articles de la
section centrale, avec l’interversion proposée par M. le ministre de
l’intérieur, sont successivement mis aux voix et adoptés jusques et y compris
le cinquième.
M. le président se dispose à mettre aux voix l’art. 6.
M. Verdussen. - Nous n’avons à nous occuper que pour la
forme de cet article, ainsi que du précédent, parce que le principe a déjà été
admis par la loi du 10 août. Cependant, je dois faire remarquer qu’il y a ici
une différence de 6,000 fr. avec la somme allouée pour le même objet dans la
loi que je viens de citer, et où il est porté 970,000 fr. Ces 6,000 fr. forment
la part des agents chargés de la surveillance des travaux. Je propose
d’ajouter, pour rétablir l’harmonie entre les deux dispositions :
« indépendamment des 6,000 fr. pour frais de surveillance compris dans la
loi du 10 août 1833. »
M. Desmet. - Je voudrais savoir de M. le commissaire du
Roi quand les travaux de la fermeture de la coupure de Burght
seront terminés. Les journaux ont parlé d’un procès qui se serait élevé à cet
égard entre l’entrepreneur et le gouvernement. Je désirerais qu’on voulût bien
me dire combien ces travaux devront coûter encore.
M. Teichmann, commissaire du Roi. - Les travaux pour la fermeture de
la coupure de Burght ont été adjugés pour 500,000 fr.
Depuis qu’on a mis la main à l’œuvre, il a été nécessaire de rompre
l’engagement avec le premier entrepreneur et de contracter avec un autre un
marché qui assure à ces ouvrages beaucoup de promptitude. Il est impossible de
fixer un chiffre déterminé, parce qu’on ne peut prévoir l’issue du procès
soulevé par l’entrepreneur.
M. Dubus, rapporteur. - Je ne suis pas convaincu de
l’utilité de l’addition proposée par M. Verdussen, et je ne crois pas qu’elle
atteindrait le but qui il se propose. Les frais de surveillance sont évidemment
compris dans l’allocation que nous avons votée au commencement de cette séance
pour le personnel des ingénieurs, conducteurs et aides temporaires. Il est vrai
que si l’article demeure tel qu’il est proposé par la section centrale, il
présentera un chiffre différent de celui arrêté dans la loi du 10 août
dernier ; mais cette loi s’appliquait aux crédits provisoires, tandis que
maintenant nous votons un budget, c’est-à-dire une loi définitive, et le
chiffre de la loi se trouverait réduit par le fait de cette loi même. Avec le
crédit que nous avons déjà adopté et celui que nous allons adopter, le
gouvernement aura de quoi payer les frais de surveillance. Si l’on adopte la
proposition de M. Verdussen, le gouvernement pourra, outre ces deux sommes,
employer encore 6,000 fr. pour les agents chargés de surveiller les travaux.
M.
Verdussen.
- Je persiste à maintenir mon amendement, parce que la disposition dont il
s’agit est intitulée et libellée de même que celle de la loi du 10 août. Si
l’on n’explique pas la différence du chiffre, le gouvernement aura lieu de
croire que le crédit primitif qui était de 970,000 fr. a été réduit à 964.000
fr. Je ferai remarquer qu’il s’écoulera un laps de temps assez considérable
avant que la loi du budget soit promulguée, et d’ici là le gouvernement
pourrait faire usage du crédit de 6,000 fr.
M.
Dubus, rapporteur. - L’honorable préopinant dit que le gouvernement pourra croire qu’un
crédit, qui avait été d’abord porté à 970,000 fr., est maintenant réduit à
964,000 ; mais il n’y a aucun inconvénient à ce que le gouvernement croie
cela. Du reste, la différence provient de ce que le gouvernement avait compris
une partie du personnel dans le matériel; maintenant l’art. 6 qui nous occupe
ne contient que le matériel.
- L’art. 6, proposé par
la section centrale, est mis aux voix et adopté.
M. le président. - M. de Theux propose un article additionnel
ainsi conçu :
« 73,000 fr. pour
la réparation des rives de
M. de Theux. - Messieurs, j’ai déjà développé
mon amendement. Je l’ai rédigé sur le texte de la loi du 6 octobre, qui a
accordé au gouvernement un crédit supplémentaire de 300,000 fl. pour faire face
aux réparations des digues des polders de la rive droite et de la rive gauche
de l’Escaut, sauf le recours du gouvernement contre les propriétaires
riverains, s’il y a lieu. Vous remarquerez, messieurs, que je n’ai pas dit
contre les propriétaires, pour que le gouvernement puisse exercer aussi son
recours contre les communes et la province.
Je disais, tout à
l’heure, qu’il y avait les mêmes motifs pour accorder un subside à l’effet de
faire les travaux nécessaires aux rives de
Ici l’obligation des
propriétaires riverains de
M. d’Huart. - Je crois cette proposition trop grave pour
que nous puissions prendre une décision à l’instant même. il
me semble nécessaire de la renvoyer eu sections. On a fait une comparaison
entre les rives de l’Escaut et celles de
M. Trentesaux. - Il est toujours dangereux d’improviser de
telles dépenses. Je demande que cet objet soit ajourné jusqu’au budget de 1834,
qui ne tardera pas à être discuté.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - La proposition de M. Trentesaux
est tout à fait inadmissible, attendu qu’il s’agit de travaux d’une grande
urgence.
Quant à celle de M.
d’Huart, si le gouvernement ne se réservait pas un recours contre qui de droit,
je concevrais qu’on demandât le renvoi ; mais comme la somme ne sera
employée qu’à titre d’avance, qu’il y a déjà un antécédent pour les rives de
l’Escaut, et que la somme n’est pas considérable eu égard aux dégâts qui sont
considérables, et aux dangers qui sont prochains, je crois que la chambre
pourrait passer au vote immédiat. Cependant nous ne nous opposons pas au renvoi
à la section centrale.
M. Donny. - Il ne me semble pas que nous
puissions considérer cette dépense comme une avance à faire. Pour que ce
paiement eût réellement la nature d’une avance, il faudrait que ceux qui
seraient tenus au remboursement s’y obligeassent dès aujourd’hui sous cette
condition : c’est une dépense pure et simple que vous allez faire, avec la
chance de la recouvrer. Je crois, comme M. d’Huart, qu’il convient de renvoyer
la question à l’examen des sections. Mais, je ne pense pas qu’on puisse
l’ajourner jusqu’au budget de 1834. Les travaux paraissent urgents, et leur
adjudication doit avoir lieu avant l’hiver, ce qui serait impossible si l’on
adoptait la proposition de M. Trentesaux.
M. de Theux. - Je ne m’attendais pas à faire ma
proposition aujourd’hui, parce que je croyais que le gouvernement aurait pris
l’initiative. Je ne m’oppose nullement au renvoi à la section centrale ;
mais je désire éviter le circuit des sections, parce que, autrement, le subside
ne serait accordé que trop tard.
M. Donny a pensé que
ceci ne serait pas une avance ; je crois qu’il se trompe : puisqu’il y a
contestation sur la nature de la dépense, il appartient au gouvernement de
réserver son recours contre qui de droit. D’ailleurs ces travaux sont d’une
extrême urgence : si on les négligeait, et que de cette négligence il
résultât une perte énorme, le gouvernement aurait de graves reproches à se
faire. Il a toutes garanties en mettant « sauf recours, s’il y a
lieu. » J’appuierai le renvoi à la section centrale ; seulement, je
demanderai qu’elle veuille bien faire son rapport avant la fin de la discussion
du budget de l’intérieur.
M. Dubus, rapporteur. - Il me semble que la question
d’urgence doit exercer une grande influence sur l’opinion de l’assemblée. J’ai
entendu dire qu’il y avait des dangers imminents ; mais puisque le gouvernement
n’a pas pris l’initiative et qu’il a déclaré que, si on faisait une proposition
à cet égard, il voulait bien l’accepter, je doute qu’il se soit assuré du fait.
Quoi qu’il en soit, je désirerais qu’il voulût bien nous donner les
renseignements nécessaires ; car la section centrale, si on lui renvoie la
proposition, en aura besoin pour être à même de faire un rapport.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - J’ai déjà déclaré que les
réparations dont il s’agit étaient urgentes ; que le gouvernement avait reçu à
cet égard un rapport d’un de ses agents, et que s’il n’avait pas pris
l’initiative, c’est parce que dans son opinion les dépenses à faire ne le
concernaient pas ; mais il s’est associé à la proposition.
M. Jullien. - Il me semble que ces
explications ne sont pas suffisantes. Si les travaux sont aussi urgents et le
danger aussi imminent qu’on le dit, il a dû exister entre le gouvernement et le
chef-lieu de la province une correspondance pour faire exécuter les travaux. Eh
bien ! dans cette position, je ne comprends pas
comment la province, qui dans tous les cas doit s’associer aux dépenses, n’ait
pas fait faire les travaux, puisqu’elle en avait les moyens. La question de
savoir par qui les frais seront payés n’est qu’une question secondaire ; la
première question c’est celle d’aviser au moyen d’empêcher l’invasion des eaux
de
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Si d’autres explications sont
nécessaires, elles pourront être données à la section centrale.
Quant à la dernière
interpellation qui m’a été faite, je répondrai que la province du Limbourg a refusé
de faire les réparations parce que depuis trois ans elle n’avait perçu aucun
revenu.
M. d’Huart. - J’avais d’abord demandé le
renvoi aux sections ; mais puisqu’on croit que cela ferait perdre du
temps, je consens au renvoi à la section centrale.
- La chambre, consultée,
renvoie la proposition de M. de Theux à la section centrale.
Chapitre VIII (bis) (devenus chapitre IX) - Hôtels, édifices et
bâtiments de l’Etat.
Le gouvernement demande
68,700 fr. ; la section centrale accorde 22,500 fr.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - Messieurs, je ne puis aucunement me rallier
à la diminution proposée par la section centrale; je pense que la chambre
partagera bientôt mon opinion.
Il est deux diminutions
que le ministre peut consentir ; elles s’élèvent ensemble à 353 fr., ce
qui réduirait le chiffre du chap. VIII à 66,400 fr. Cette réduction provient de
la suppression de deux sommes qui en effet ne doivent plus figurer dans ce
chapitre. La première était pour payer un conducteur qui a été repris dans la
masse du personnel des ponts et chaussées ; la seconde, pour des contributions
qui ne sont pas à la charge de l’Etat.
Il a été demandé 42,000
fr. pour reconstruire l’aile du bâtiment incendié, latérale à l’hôtel du
ministère des affaires étrangères. La section centrale n’a pas reconnu
l’urgence de ces travaux, que nous croyons, nous, facile à démontrer. Le
bâtiment dont il s’agit est resté en ruine depuis la révolution. Tandis que la
plupart des particuliers ont fait disparaître les traces de l’attaque des
Hollandais, le gouvernement s’est montré plus négligent que le reste du pays ;
c’est un mauvais exemple qu’il a donné aux habitants, et un triste spectacle
qu’il offre aux étrangers. Indépendamment de ces raisons, en quelque sorte
politiques, il y s des raisons d’économie en faveur de la demande qui vous est
faite. C’est que plus on retardera les réparations, plus elles seront
coûteuses. En outre, vous avez déjà remarqué que, en l’absence de locaux suffisants,
il est nécessaire d’allouer des frais de loyer à plusieurs ministres. Bien que
la section centrale ait jugé que le local actuel pouvait suffire, la chambre
n’a pas partagé cet avis, et dernièrement elle a accordé une indemnité au
ministre des affaires étrangères.
En deuxième lieu, il
faut que le gouvernement prenne à loyer un hôtel pour l’administration de
l’instruction publique. J’ai déjà démontré qu’il était impossible que cette
administration passât au ministère de l’intérieur puisqu’il ne reste à ce
dernier ministre qu’une chambre à coucher et trois salons, dont deux sont
occupés souvent par des commissions.
La
section centrale s’est élevée contre la dépense qui provient du loyer de
l’hôtel destiné à l’état-major de la garde civique. Eh bien ! si, au moyen des 42,000 fr. que nous demandons, le local du
ministère des affaires étrangères pouvait être agrandi, voici ce qui pourrait
arriver : le ministre de l’intérieur se transporterait à l’hôtel des affaires
étrangères. Il y aurait alors 1° logement pour le ministre; 2° emplacement pour
les bureaux de l’administration de l’instruction publique ; 3° emplacement pour
le grand état-major de la garde civique : en tout, une économie annuelle de
12,000 fr. ; n’est-ce pas un bel et bon intérêt des 42,000 fr. que nous
demandons? Je ferai observer que si la chambre nous refusait l’allocation pour
cette année, nous serions obligés d’en demander une plus forte pour l’année
prochaine, des détériorations plus considérables exigeant des réparations plus
coûteuses.
M.
Dubus, rapporteur. - La raison principale de la différence qui se trouve entre le chiffre
du gouvernement et celui de la section centrale, c’est que nous n’avons pas cru
à la nécessité d’employer dés à présent 42,000 fr. à la reconstruction de
l’aile de bâtiment attenant à l’hôtel du ministère des affaires étrangères.
Le ministre insiste et
fait valoir l’état déplorable des bâtiments, offrant aux étrangers un triste
aspect ; et la preuve que le gouvernement est plus négligent que les citoyens à
réparer les vestiges des attaques des Hollandais. Cette première considération
doit être écartée ; car lorsqu’on aura fait la réparation dont il s’agit, on
n’aura pas pour cela fait disparaître les ruines les plus apparentes : vous
savez tous que c’est l’hôtel Torrington qui présente l’aspect le plus
déplorable, et ce n’est pas cet hôtel que l’on se propose de reconstruire.
Il existe une difficulté
entre le gouvernement et le propriétaire de cet hôtel. Le propriétaire prétend
que des indemnités lui sont dues, que le gouvernement doit reprendre les ruines
et lui payer le prix de l’hôtel. S’il n’y a pas un arrangement quelconque, il
pourra y avoir procès, et si le gouvernement succombe, il devra reconstruire
tout l’hôtel. Alors, messieurs, on pourrait se repentir d’avoir réparé
isolément une aile du bâtiment, lorsqu’un peu plus tard on n’aurait pu faire
qu’une seule et même construction de cette partie et de l’hôtel tout entier. Il
nous a semblé, lors des observations qui nous ont été soumises par le
gouvernement, qu’il entrait dans les idées du gouvernement de posséder l’hôtel
Torrington et de construire sur le tout.
Maintenant je m’étonne que ce soit au commencement de l’hiver qu’on
veuille procéder à des travaux de ce genre. Ici je ferai une remarque, c’est en
quelque sorte la question des frais de représentation qui s’agite devant vous
encore une fois, bien qu’elle ait été bien décidément tranchée par la majorité
de cette chambre ; car d’abord, l’unique motif du gouvernement pour reconstruire
ce bâtiment, était d’y placer les bureaux du ministère des affaires étrangères,
afin de réserver l’hôtel pour le ministre. Sans doute, lorsqu’on voulait des
frais de représentation pour le ministre, il fallait bien lui donner un
logement magnifique où il put faire, comme on le disait, les honneurs du pays.
Le logement du ministre des affaires étrangères est déjà plus vaste que
celui des autres ministres, et lorsque la chambre a alloué des frais de
logement au ministre des affaires étrangères, c’est qu’on nous a affirmé que
dans le fait il n’avait pas été logé à l’hôtel; c’est qu’on nous a affirmé que
le logement n’était pas meublé, qu’il manquait même de rideaux, et qu’il
fallait que l’ameublement fût complet avant que le ministre l’habitât. Telles
ont été les raisons auxquelles la chambre s’est rendue.
Toujours est-il que l’hôtel, dans son état actuel, est plus que
suffisant pour le logement du ministre des affaires étrangères. Tous les
bureaux se composent de 15 employés ; jugez s’il est si difficile après de
trouver une place pour le ministre dans un bâtiment aussi vaste.
Maintenant il s’agirait de rendre
l’hôtel assez spacieux pour placer les bureaux qui sont rue de
On ajoute qu’il y aurait économie à faire cette année des réparations
qui deviendraient plus coûteuses l’année prochaine. Mais, messieurs, voilà
trois ans que le bâtiment dont il s’agit est dans le même état ; trois hivers
ne l’ont pas fait tomber, celui de 1833 n’y réussira pas davantage ; il
n’y aura donc aucun inconvénient à attendre.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Lorsque le gouvernement
a demandé 42,000 fr., il était mu par un motif d’économie. Si maintenant une
proposition de la nature de celle de M. Dubus venait à être présentée, le
gouvernement ne serait pas éloigné de l’admettre ; mais je doute que
l’honorable membre veuille en appuyer le résultat. Il faudrait, dans cette
hypothèse, reconstruire l’hôtel tout entier, et alors ce serait 100 ou 200,000
fr. que nous aurions à vous demander. En attendant, messieurs, permettez-moi
d’insister sur les motifs que j’ai déjà fait valoir.
Nous avons dit que les vrais principes d’économie exigeaient que le
gouvernement s’y prît à temps pour faire les réparations nécessaires. Cette
opinion est confirmée par tous les hommes de l’art. Je n’ai pas dit cependant
que nous allions reconstruire immédiatement cet hôtel ; malheureusement la
saison est trop avancée pour que l’on puisse espérer d’achever la
reconstruction avant l’hiver ; mais on pourra tout au moins mettre les travaux en adjudication.
On a avancé, malgré mes dénégations,
que le local du ministère de l’intérieur était suffisant pour tous les bureaux,
et qu’on aurait pu y placer ceux de l’instruction publique. Eh bien ! messieurs, au besoin, je soumettrais à une enquête le local
de la rue de
Il y restait libre un seul petit salon qui maintenant est occupé par le
nouvel employé du commerce et de l’industrie, et ce petit salon que l’on tenait
en réserve pour les grandes occasions (on
rit) a cessé par là d’être disponible.
Je vous ai déjà développé les motifs d’économie en faveur de notre
demande ; j’ajouterai qu’il pourrait arriver cette circonstance où il fallût
accorder des frais de logement au ministre de l’intérieur. Un ministre qui ne
serait pas célibataire ne pourrait pas se loger à l’hôtel qui lui est destiné
maintenant.
M.
Nothomb. - Je
crois que ce n’est plus qu’une question de temps qui nous divise. Il faut
savoir s’il y a économie à commencer les travaux cette année, ou s’il vaut
mieux les ajourner à l’année prochaine. Quant à moi, je sais qu’il y aurait
économie à ne pas retarder davantage les réparations. Il y a deux ans, l’état
des murailles du bâtiment était tel qu’on aurait pu le faire reconstruire avec
30,000 fr. Aujourd’hui, et par suite de l’hiver, il faut 42 mille francs ; je
vais jusqu’à dire que, s’il reste encore dans cet état d’abandon, on ne pourra
bientôt plus tirer aucun parti des matériaux, et après cet hiver il faudra tout
reconstruire, à partir des fondements.
M. Dubus est dans l’erreur lorsqu’il suppose qu’un hiver de plus ne
ferait rien ; un hiver de plus rendrait les dépenses plus considérables.
On a dit que le gouvernement, devenant propriétaire de hôtel Torrington,
pourrait construire sur le tout et sur un plan nouveau. Mais on oublie qu’il
devrait se conformer au plan tracé par la régence, et qu’il ne pourrait rien
changer qu’à la distribution intérieure du bâtiment qu’il devrait approprier à
sa nouvelle destination. Mais la façade devrait rester la même.
La question qui nous occupe n’offre aucun rapport avec celle des frais
de représentation et, à l’égard de cette dernière, vous n’avez rien préjugé que
pour cette année ; vous avez pris les circonstances en considération et
vous avez voté ; mais elle se présentera de nouveau lorsqu’il y aura un
véritable corps diplomatique à Bruxelles, et peut-être que, tenant compte des
nouvelles circonstances, vous prendrez une détermination différente.
M. Dumortier. - Je demande la parole.
M.
Nothomb. - La
question actuelle n’a de rapport qu’avec les frais de logement. On vous a, en
effet, démontré que la disposition du local ne laissait pas de place pour le
ministre, et qu’en conséquence, il y avait pour lui une indemnité de logement.
Enfin il s’est agi de permuter avec le ministre de l’intérieur. Il y a
un an et demi que l’on avait conçu ce projet. Mais le ministre de l’intérieur,
ayant reconnu l’impossibilité de placer des bureaux nombreux dans l’hôtel qu’on
lui proposait, a refusé.
Toute la question est donc maintenant de savoir s’il n’y aurait pas
augmentation de dépenses à ajourner les réparations nécessaires ; or, il
m’est démontré que les dépenses augmenteront avec le retard que vous
apporterez.
Vous savez, messieurs, que la
régence de Bruxelles a le droit de forcer les propriétaires dont les massons
menacent ruine à les construire ; eh bien, si elle venait à s’adresser au
propriétaire de l’hôtel Torrington, ne pourrait-il pas lui répondre : Que ne
commencez-vous par le gouvernement lui-même ? Voyez, il n’a pas assez de
confiance en lui-même pour se livrer à une entreprise de ce genre ; je
suis autorisé à ne faire aucune réparation tant qu’il ne m’en donnera pas
l’impulsion et l’exemple.
La difficulté qui s’est élevée entre le gouvernement et le propriétaire
dont il s’agit, n’est pas de nature à occuper la chambre. Sa maison a été
détruite par un cas de guerre, en sorte qu’il ne peut invoquer la loi sur les
indemnités après un pillage ; il semble l’avoir reconnu lui-même, et c’est ce
qui explique son retard ou peut-être son désistement dans cette affaire.
En résumé, messieurs, nous trouverons une grande économie à commencer
les réparations cette année.
M.
Dubus, rapporteur. - Il me paraît que l’honorable préopinant n’est pas d’accord avec M.
le ministre de l’intérieur. En effet, d’après les explications du ministre, il
m’a semblé qu’il reconnaissait lui-même l’impossibilité d’opérer la
reconstruction du bâtiment avant l’entrée de l’hiver; et dès lors tous les
motifs d’urgence qu’on a invoqués viennent à tomber devant cet aveu. Pourquoi
donc maintenant grossir à plaisir le chiffre du budget de 1833, et ne pas
renvoyer les dépenses non urgentes au budget de 1834?
Quant à la difficulté qui s’est élevée entre le gouvernement et le
propriétaire de l’hôtel, il résulterait des explications données à la section
centrale que le gouvernement pourrait devenir par la suite maître du bâtiment
tout entier ; et il a paru plus raisonnable d’attendre, pour reconstruire,
que le terrain et les ruines fussent définitivement acquis à l’un des
deux ; il y aurait eu, assurément, plus de motifs de faire disparaître des
ruines considérables que de d’en réparer de petites.
Quoi qu’il en soit, messieurs, la question qui s’agite maintenant, c’est
celle des frais de représentation que le gouvernement s’obstine à ne pas
regarder comme jugée.
Enfin on a parlé de la régence : la régence, messieurs, n’est
autorisée par aucune loi à obliger un propriétaire à reconstruire sa
maison ; elle peut seulement obliger un propriétaire à se clore chez lui,
mais voilà tout.
Je persiste à demander le renvoi de la dépense au budget prochain.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Rogier) - J’ai regretté tout à l’heure que la demande
de crédit ait dû être faite tardivement, parce qu’il est à craindre que nous ne
puissions pas mettre la main à l’œuvre avant le printemps prochain ; mais
nous ferons ce que nous pourrons pour commencer cette année même, et d’ailleurs
nous pourrons toujours gagner du temps, car l’adjudication des travaux sera
faire plus tôt, et nous obtiendrons des conditions plus avantageuses si
l’entrepreneur a tout l’hiver pour préparer ses travaux, et s’il peut aussi
ménager ce qui peut encore servir dans les ruines.
Je ferai remarquer que la question ne doit pas se compliquer de
l’éventualité de la possession de l’hôtel Torrington par le gouvernement ;
il y aura deux modes d’architecture à suivre, et les réparations que nous vous
proposons n’empêcheront en rien la reconstruction de l’hôtel.
Je vois que la résistance vient surtout de ce que l’on crains le vote
n’entraîne la nécessité de frais de représentation. Mais il faut avouer que
cette crainte n’est pas suffisante pour faire rejeter l’allocation ; car,
enfin, par cela même que l’on viendrait chaque année vous demander ces frais,
vous seriez appelés à les contrôler, si vous ne voulez pas que le ministre des affaires
étrangères soit grandement logé, vous l’inviterez à passer par exemple à
l’hôtel du ministre de l’intérieur. Je répète que rien ne me semble s’opposer à
ce que le ministre de l’intérieur vienne à se transporter à l’hôtel dont il
s’agit, avec l’administration d’instruction publique et le grand état-major de
la garde civique.
M. Dumortier. - A voir comment y va M. le
ministre de l'intérieur, on dirait qu’il se trouve près d’ici, dans le Parc,
une mine d’or, où l’on peut puiser sans qu’il en coûte rien. Dans toutes les
sections centrales, nous avons unanimement manifesté le désir de rejeter toute
dépense qui n’est pas rigoureusement nécessaire ; eh bien, malgré cela le
ministre majore tous les crédits. Il semble avoir perdu de vue que si les
dépenses restent les mêmes, il faudra pour y faire face, établir de nouvelles
contributions, lorsque nous devoir serait de les réduire.
Le bâtiment qu’on nous propose de
reconstruire est attenant à l’hôtel Torrington ; or, on ne pourrait
procéder à sa réparation sans commencer d’abord par reconstruire le mur
mitoyen. Si une fois la première dépense est faite, qui sait jusqu’où elle
ira ? Je me trompe, elle est justifiée par cette appétence ministérielle
d’obtenir des frais de représentation. Vous avez entendu tout à l’heure M.
Nothomb, qui siffle maintenant si gracieusement entre ses dents…
M.
Nothomb. -
J’écoute, et votre observation n’est ni exacte ni parlementaire.
M. Dumortier. - J’ai la parole, et c’est votre
interruption qui n’est pas parlementaire… Vous avez entendu M. Nothomb vous
dire que la question des frais de représentations n’avait été jugée que pour
cette année. J’espère bien, moi, qu’elle l’a été pour tout l’avenir, et il y
aurait impudence à reproduire une pareille demande lorsque la chambre s’est si
unanimement prononcée contre elle. Ce n’est pas lorsque l’Etat est dans une
situation malheureuse, lorsqu’il faut recourir à des emprunts, qu’il faut
employer l’argent des contribuables â faire danser la diplomatie. (On rit.) Vous voulez, dites-vous, faire
les honneurs du pays ; mais nous, nous avons une autre manière de comprendre
l’honneur national : l’honneur national se défend et se protège par les
armes ; vengez donc nos affronts du mois d’août, et vous n’aurez pas besoin de
frais de représentation.
Je vois avec peine que le gouvernement voudrait déployer le luxe des
monarchies absolues. Il est d’origine révolutionnaire; qu’il ne l’oublie jamais,
et qu’il rejette toutes les dépenses futiles et ridicules qui grèvent l’Etat
sans rien ajouter à la gloire du pays.
J’ajouterai quelques mots, Puisque
l’on met toujours en avant la nécessité de faire les honneurs du pays,
rappelez-vous que l’on a majoré de 300,000 fr. la liste civile, pour mettre le
souverain à même de faire ces honneurs dont on parle tant. Il ne faut donc pas
faire double envoi ; aussi je repousserai l’allocation de toute mon énergie.
Je vous rappellerai encore que M. le ministre de l’intérieur a avoué
lui-même que l’année était trop avancée pour opérer les travaux, et que j’ai
déjà démontré dans une précédente séance qu’en plaçant les bureaux au deuxième
étage, il y aurait dans l’hôtel assez de place pour tout le monde.
Enfin, messieurs, il paraîtrait que le mot économie à plusieurs
acceptions différentes ; c’est au nom de l’économie que nous demandons qu’on
réduise les dépenses, c’est au nom de l’économie que le ministre veut qu’on les
augmente. Il y a ici deux acceptions qui se heurtent ; vous jugerez
, messieurs, celle qui convient le mieux dans cette circonstance.
M.
Nothomb. - Il
est très vrai que le mot économie a deux sens. C’est au nom de l’économie que
nous demandons que le gouvernement soit autorisé à mettre cette année la
reconstruction du bâtiment en adjudication, et qu’il fasse procéder aux travaux
s’il est possible ; c’est au nom de l’économie que nous vous proposons cette
dépense. Je vous ai cité des faits, messieurs, et ma conviction repose sur
l’avis de personnes auxquelles je m’en référerais très volontiers. L’honorable
préopinant a insisté sur le rapprochement qui a été fait entre la question des
frais de représentation et la question qui nous occupe. J’ai déclaré déjà
qu’elles étaient totalement étrangères l’une à l’autre, d’autant plus que,
d’après le projet qui existe, le ministère des affaires étrangères pourrait
être transporté ailleurs, en sorte que la dépense se trouverait faite au profit
d’un autre ministre.
Vous le voyez donc, les réflexions politiques auxquelles le préopinant a
jugé à propos de s’abandonner sont tout à fait en dehors de cette discussion.
Oui, sans doute, le gouvernement a une origine toute
populaire, je le reconnais avec lui ; mais quelle que soit son origine, si le
bâtiment dont il s’agit est entièrement détruit, il faudra qu’il le
reconstruise en entier. C’est là une nécessité à laquelle son origine ne peut
pas le soustraire. (On rit).
Plusieurs
membres. - Aux
voix ! aux voix!
- Le chiffre proposé par le gouvernement est mis aux voix et n’est pas
adopté.
Le chiffre de la section centrale est adopté.
Chapitre IX (devenu chapitre XI) -
Service des mines
Le gouvernement demande 85,400 fr. La section centrale accorde 80,000
fr.
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier) - Le ministre se fait un devoir de
réclamer les sommes nécessaires au service ; c’est ce qu’il a fait
jusqu’ici.
On lui a reproché de ne pas exercer une surveillance assez active dans
les mines : c’est parce qu’il a trouvé que le personnel des conducteurs ne
suffisait pas, qu’il a demandé une majoration ; toutefois, comme l’année
est très avancée, et qu’il peut, à la rigueur, se dispenser de nommer en ce
moment de nouveaux conducteurs, il peut se rallier à la proposition de la section
centrale.
M. Brixhe. - Un écrivain, Adisson,
a dit quelque part : « Permettez-moi de répéter tous les jours la
même chose à un homme pendant qu’il déjeune, et je m’engage à lui persuader ce
que je voudrai. »
De même, si tous les jours, et sans rencontrer de contradicteur on nous
répète que l’utilité de l’administration des mines n’est pas démontrée, il
pourrait arriver, peut-être à tort, qu’un certain nombre de personnes
acceptassent cette opinion.
Un honorable collègue nous a dit il y a quelques jours, et l’on a répété
plusieurs fois depuis trois ans, que la nécessité de l’administration des mines
n’est pas encore bien démontrée. En effet, oubliant les considérations qui ont
été alléguées en 1791 et en 1810 par les législateurs et les administrateurs
les plus distingués de ces deux époques, en France, pour motiver l’institution
de l’administration des mines, quelques personnes prévenues, peut-être même à
leur insu, ou peu pénétrées des enseignements de l’économie politique, vont
répétant ce principe, sage réellement quand il est vu dans son vrai jour,
savoir : « En matière d’industrie, laissez faire ; rapportez-vous-en à
l’intérêt privé. » Or, comme l’exploitation des mines est aussi une
industrie, et une industrie d’ordre majeur, elle doit donc, comme toutes
autres, dans le même système, être livrée complètement aux spéculations de
l’intérêt privé et être dispensée de toute surveillance administrative.
Tous d’accord sur le principe du laissez-faire en matière d’industrie en
général, les économistes, messieurs, n’osent cependant se prononcer d’une
manière positive sur l’utilité de son application aux mines.
Mes fonctions dans l’administration des mines depuis treize années,
jusqu’en 1830, m’ont donné souvent l’occasion de réfléchir sur la question de
savoir si ce principe est réellement applicable à l’exploitation des mines.
Voici donc la différence essentielle qui, ce me semble, se présente entre
l’industrie manufacturière et agricole et l’industrie purement minérale : c’est
que d’un côté la terre produira toujours annuellement et presque à volonté,
suivant certains travaux et règles, des bois de construction, du lin, du coton,
des herbages, des céréales pour les bestiaux à laine, etc., etc. De fausses
spéculations dans l’exploitation de ces diverses branches ne peuvent produire
que des maux partiels et minimes, d’où peut même résulter la ruine de quelques
cultivateurs ou industriels hasardeux ou irréfléchis ; mais on sent aisément
que l’industrie en général ne peut souffrir de quelques fausses spéculations,
ni manquer des matières premières nécessaires à son activité. Ainsi donc on
peut sans inconvénient, et même avec avantage, abandonner à l’intérêt privé
toute l’industrie manufacturière et agricole.
Mais il n’en est pas de même de l’industrie minérale, puisque les mines
ne se reproduisent pas. Une fois exploitées, elles sont épuisées pour toujours.
De là la nécessité de soumettre les mines à un système d’aménagement qui nous
permette de jouir de leurs produits aujourd’hui, dans cinquante ans, enfin
aussi longtemps que la prévoyance humaine peut en assurer l’accès profitable.
Veuillez remarquer, messieurs, que dans l’exploitation des mines deux
intérêts sont perpétuellement en présence et se combattent sans cesse : ce
sont, d’une part, l’intérêt privé, qui veut jouir immédiatement, réaliser au
plus tôt la valeur des mines en en sacrifiant souvent la durée pour l’avenir;
et, d’autre part, l’intérêt public , qui veut que les produits de mines soient
livrés dès à présent à l’industrie, aux consommateurs, en raison de leurs
besoins, tout en ménageant, par des règles de travaux d’art, les moyens de
conserver à nos successeurs, à nos derniers neveux, la jouissance de la part
qui leur appartient dans les richesses dont la nature a favorisé notre sol.
Sans houille et sans fer, point de civilisation ; et ce n’est point là
un paradoxe. Tâchons donc d’être ménagers de ces éléments de prospérité et
puisque les mines ne se reproduisent pas, évitons que l’intérêt privé,
débarrassé de l’intervention de l’intérêt public par les soins de
l’administration, ne renouvelle la fable de la poule aux oeufs d’or et celle du
sauvage qui abat l’arbre pour en cueillir le fruit. C’est là l’écueil que
l’Angleterre n’a pas su éviter, et dont elle ne tardera pas à ressentir la
fâcheuse influence.
Que si l’administration des mines n’atteignait pas réellement le but de
son institution, il faudrait la faire strictement rentrer dans sa voie propre,
et prendre, s’il y a lieu, les mesures convenables pour que tous ses agents
remplissent ponctuellement les devoirs que les lois et règlements leur
imposent.
Je voterai donc pour le chiffre proposé par le ministre pour le service
des mines, et je voterai également à l’occasion toute allocation tendant à
perfectionner cette branche de l’administration publique. Je dirai en terminant
que, comme intéressé dans plusieurs exploitations de mines, je verrai, avec une
vive peine, ainsi que la totalité des exploitants, s’il en était question, que
l’administration ne pût plus exercer sa surveillance d’aménagement, de
conservation et de sûreté. (Aux voix !
aux voix !)
- Le chiffre de la section centrale est mis aux voix et adopté.
La séance est levée à 4 heures et quart.