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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 7 mars 1871

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1870-1871)

(Présidence de M. Vilain XIIII.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 731) M. Wouters procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Reynaert donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. Wouters présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Des secrétaires communaux dans le canton de Dalhem demandent que l'avenir des secrétaires communaux soit assuré, que leur traitement soit mis en rapport avec l'importance de leur travail et des services qu'ils rendent aux administrations communales, provinciales et générale. »

M. Van Renynghe. - Je demande le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.

- Adopté.


« Le sieur de Paepe appelle l'attention de la Chambre sur la nécessité de changer le mode de nomination des officiers de la garde civique. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des porteurs de contraintes, dans le Luxembourg, se plaignent que leur position n'ait pas été améliorée malgré l'augmentation qui a été votée au budget. »

M. Lelièvre. - J'appuie la pétition et je demande qu'elle soit renvoyée à la commission, avec prière de faire un prompt rapport.

- Adopté.


« Le sieur Colson appelle l'attention de la Chambre sur les mesures à prendre pour l'assainissement des champs de bataille. »

M. Vleminckx. - Je compte interpeller tout à l'heure M. le ministre des affaires étrangères sur cet objet. Je prierai donc la Chambre d'ordonner le dépôt de cette pétition sur le bureau afin qu'on puisse en prendre lecture, s'il y a lieu, à l'occasion de mon interpellation.

- Le dépôt sur le bureau est ordonné.


« Des négociants en charbon à Bruxelles demandent que les canaux embranchements du canal de Charleroi soient, sous le rapport des péages, mis sur la même ligne que les autres voies navigables du pays. »

- Même demande de négociants en charbon à Anvers.

M. Houtart. - Je prie la Chambre de renvoyer cette pétition à la commission permanente de l'industrie avec demande d'un prompt rapport.

- Adopté.


« La dame Boltie, veuve du sieur Lejuste, ancien instituteur communal, prie la Chambre de donner un effet rétroactif au projet de loi établissant une caisse générale de prévoyance des instituteurs primaires. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


« Le conseil communal de Tongerloo demande le maintien des commissaires d'arrondissement. »

« Même demande du conseil communal de Wiekevorst. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget du ministère de l'intérieur.


« Des habitants de Seraing demandent que la loi déclare le cours de gymnastique obligatoire et qu'il fasse désormais partie du programme des établissements soumis à la loi du 23 septembre 1842 ou à celle du 1er juin 1850. »

- Même dépôt.


« M. de Kerckhove, retenu par la maladie de ses enfants, demande un congé. »

- Accordé.


« M. Van Outryve, retenu par un deuil de famille, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.


« M. de Liedekerke, retenu par une indisposition, demande un congé d'un jour. »

- Accordé.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur pour l’exercice 1871

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Administration centrale

Articles 1 à 4

« Art. 1er.. Personnel. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Personnel. Traitements des fonctionnaires, employés, gens de service et gens de peine et frais du comité de législation et d'administration générale : fr. 298,684. »

- Adopté.


« Art. 3. Matériel. Fournitures de bureau, impressions, achats et réparations de meubles, éclairage et chauffage, menues dépenses ; frais de rédaction et de souscription au Bulletin administratif du ministère de l'intérieur ; matériel du bureau de la librairie ; frais de rédaction du recueil et des tables des ouvrages déposés ou déclarés en exécution des conventions internationales : fr. 48,460.

« Charge extraordinaire : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Frais de déplacement. Frais de route et de séjour ; courriers extraordinaires : fr. 4,300. »

- Adopté.

Chapitre II. Pensions et secours

Articles 5 à 7

« Art. 5. Pensions. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 16,000. »

Adopté.


« Art. 6. Subvention à la caisse centrale de prévoyance des secrétaires communaux ; subvention complémentaire à la même caisse, à laquelle les employés des commissariats d'arrondissement sont affiliés : fr. 27,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Secours à d'anciens fonctionnaires et employés, à des veuves et enfants d'employés, qui, sans avoir droit à la pension, ont néanmoins des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Statistique générale

Art. 8 et 9

« Art. 8. Frais de bureau et jetons de présence de la commission centrale de statistique. Frais de bureau des commissions provinciales. Vérification des registres de population : fr. 7,500. »

- Adopté.


« Art. 9. Frais de rédaction et de publication des travaux (page 732) du bureau de statistique générale, de la commission centrale et des commissions provinciales : fr. 10,000. »

- Adopté.

Chapitre IV. Frais de l'administration dans les provinces

Article 10 (province d’Anvers)

« Art. 10. Traitements du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

M. Tesch. - Messieurs, au chapitre des frais d'administration dans les provinces, M. le ministre de l'intérieur propose différentes augmentations ; il demande, pour la province d'Anvers, une augmentation de 2,000 francs ; pour la province de Brabant, 4,900 francs ; pour la province de Hainaut, une augmentation égale ; pour la province de Liège, 4,000 fr. ; pour la province de Namur, également 4,000 francs, en tout 19,800 francs.

Je n'ai pas l'intention de combattre ces augmentations de traitement ; je suppose que la nécessité en a été reconnue par M. le ministre de l'intérieur, et la Chambre accédera à ces propositions d'augmentation.

Mais si ces propositions sont justes, sont légitimes pour ces différentes provinces, je soutiens qu'elles le seraient, à bien plus forte raison, pour le Luxembourg, dont il n'est pas fait mention dans les demandes de M. le ministre de l'intérieur.

En effet, messieurs, de semblables augmentations doivent être examinées, me semble-t-il, à deux points de vue différents : d'abord, au point de vue de la nécessité des services, c'est-à-dire de la besogne qui incombe à chaque gouvernement provincial ; et, en second lieu, au point de vue de la situation, de la position, des droits, de l'ancienneté des employés. C'est, je pense, à ces deux points de vue qu'il faut se placer pour bien juger les propositions qui nous sont faites.

Or, si je me place à ce double point de vue, je ne puis pas m'expliquer, je ne dirai pas l'ostracisme dont a été frappée, mais l'espèce d'oubli dans lequel on laisse la province de Luxembourg.

M. Thonissen. - Il en est de même du Limbourg.

M. Tesch. - Je suis très heureux que l'honorable M. Thonissen veuille bien joindre sa voix à la mienne. Je ne connais pas suffisamment la besogne qui incombe aux employés de l'administration provinciale du Limbourg ni la situation des employés de cette province, pour pouvoir m'en expliquer.

L'honorable membre remplira sans doute, à l'égard du Limbourg, la tâche que je crois, en âme et conscience, devoir remplir à l'égard des employés provinciaux du Luxembourg.

M. Bouvier. - Nous ne sommes pas exclusifs, comme vous voyez.

M. Tesch. - Le motif pour lequel M. le ministre de l'intérieur demande une augmentation de crédit pour différentes provinces est ainsi formulé :

« De notables réformes ont été accomplies en ce sens dans ces dernières années. Mais en même temps que se sont régularisées les simplifications préconisées, des devoirs nouveaux, imposés aux administrations provinciales, soit par l'introduction de lois nouvelles, soit par le développement incessant que la prospérité publique imprime à tous les services, ont eu pour effet d'augmenter le travail des bureaux et l'on peut dire que la suppression des écritures inutiles, pratiquée dans une si large mesure, n'a pas même compensé l'accroissement de besogne résultant de ces deux causes. Ce n'est donc point sans raison que des gouverneurs signalent l'insuffisance du personnel assigné à leurs bureaux.

« La loi sur le temporel du culte, en soumettant au contrôle de la députation permanente les budgets et les comptes des fabriques d'église, fournit aujourd'hui un nouvel et décisif argument à l'appui de leurs réclamations, et le gouvernement ne croit pas pouvoir différer davantage à y donner satisfaction. L'insuffisance des crédits alloués pour le personnel de certaines administrations provinciales est d'ailleurs si manifeste, que des conseils provinciaux n'ont pas hésité à y suppléer par une allocation à charge de la province. »

Comme vous le voyez, messieurs, ce sont des lois nouvelles qui ont principalement déterminé M. le ministre de l'intérieur à venir demander à la Chambre des augmentations de crédit pour certaines provinces.

Eh bien, voyons si ces lois nouvelles agissent différemment sur le travail des administrations provinciales d'Anvers, du Brabant, de Liège et de Namur que sur celui de l'administration provinciale du Luxembourg.

La loi qui est spécialement indiquée comme donnant un accroissement de besogne très considérable est la loi sur le temporel du culte. Eh bien, s'il y a des fabriques d'église dans la province de Namur, il y en a aussi dans le Luxembourg ; si donc l'argument est vrai pour la province de Namur, il l'est aussi pour le Luxembourg. Seulement il serait moins fort pour le Luxembourg si dans cette province il y avait moins de fabriques d'église que dans la province de Namur. Or, c'est précisément le contraire qui est vrai. En effet, dans la province de Namur il y a 442 fabriques d'église et il y en a 482 dans le Luxembourg.

On demande donc une augmentation de crédit pour l'administration provinciale de Namur parce qu'elle aura à vérifier 442 budgets et autant de comptes annuels ; et l'on ne trouve pas nécessaire de demander une augmentation de crédit pour une autre administration provinciale qui aura à en examiner 482, c'est-à-dire que la province où le travail va devenir beaucoup plus considérable n'est l'objet d'aucune proposition ; pour celle au contraire dont la besogne doit devenir moins considérable, on propose une augmentation.

Evidemment, messieurs, le ministre de l'intérieur ne s'est pas suffisamment rendu compte de la situation de ces deux provinces, sinon il aurait reconnu qu'à fortiori il devait proposer pour le Luxembourg ce qu'il demande pour la province de Namur.

Une autre loi imposera un travail considérable aux administrations provinciales : je veux parler de la loi sur les cours d'eau. Or, est-il dans tout le pays une seule province, quelles que soient son étendue et sa richesse, qui, sous le rapport des cours d'eau, soit aussi largement dotée par la nature que le Luxembourg ? Evidemment non.

Voilà donc un accroissement de besogne qui aurait dû déterminer M. le ministre de l'intérieur à nous faire pour le Luxembourg une proposition semblable à celle qu'il a présentée pour quatre autres provinces.

Il est à remarquer que dans la province de Luxembourg il y a moins d'employés ; le nombre des communes y est moins grand, il est vrai ; mais on y trouve des sections de communes beaucoup plus nombreuses qui ont chacune leurs intérêts particuliers et qui donnent plus de travail que les communes constituées isolément.

Si j'examine la question au point de vue des titres des employés, le Luxembourg se trouve dans une position d'infériorité à l'égard des autres provinces.

Je ne veux pas fatiguer la Chambre par des détails ; je me bornerai à dire que dans le Luxembourg, depuis 7, 8 ou 9 ans, la plupart des employés jouissent encore du même traitement et que jamais les fonds alloués n'ont suffi pour l'application de l'arrêté royal de 1864, arrêté qui suppose qu'après un certain temps de service les employés obtiendront le taux moyen ou le maximum de leur traitement.

Or, depuis 1864, la position d'un grand nombre d'employés est restée ce qu'elle était à cette époque.

Je proposerai donc une augmentation de 4,000 francs en faveur des employés de l'administration provinciale du Luxembourg. Je suis disposé à voter une augmentation égale en faveur des autres provinces qui ne sont pas comprises dans la proposition du gouvernement.

M. Demeur. - Messieurs, je crois que le gouvernement a eu raison de proposer à la Chambre d'augmenter le crédit destiné au traitement des employés des administrations provinciales. D'après moi, ce crédit devrait encore être plus élevé.

Que la Chambre me permette de l'entretenir quelques instants de ce qui concerne la province de Brabant. Je tiens en mains le tableau des employés de l'administration de cette province qui sont rémunérés par l'Etat. Or, si je mets leurs traitements en rapport avec leurs années de service, je constate que, dans toute la Belgique, il n'est peut-être pas une seule administration dont les employés soient plus mal rétribués.

Les traitements des employés provinciaux, salariés par le trésor, sont réglés par un arrêté royal de 1864, qui détermine un maximum et un minimum.

Dans le Brabant, la plupart des employés, autres que les chefs de division, n'ont que le minimum du traitement ; quelques-uns seulement ont le traitement maximum. Sur quarante-deux employés et gens de service, il n'y en a que douze qui reçoivent plus de 2,000 francs.

Pour les commis de seconde classe, le traitement minimum est de 1,500 francs et le traitement maximum est de 1,900 francs. J'en vois un qui a vingt-trois ans de service et qui ne reçoit que 1,500 francs de traitement ; un autre a vingt-cinq ans de service et reçoit 1,600 francs par an ! Je demande au gouvernement s'il est possible de réclamer des services sérieux de la part d'employés aussi peu rétribués.

Les commis de troisième classe de cette administration reçoivent au maximum 1,400 francs et au minimum 1,000 francs ; l'un d'eux obtient 1,50 francs après vingt-deux ans de service, un autre 1,400 francs après vingt-trois ans, un autre 1,100 francs après quinze ans, etc. Si je passe aux expéditionnaires, je vois que l'un d'eux, après quatorze ans de service, est (page 733) parvenu à obtenir un traitement de 800 francs ! Voilà, messieurs, ce qui se passe dans la province de Brabant. Je dois reconnaître que la même chose ne se passe pas dans toutes les autres provinces. Déjà, en 1868, un projet d'augmentation avait été présenté pour le Brabant et pour la province de Namur. A cette époque on a refusé de le voter, parce que l'on redoutait des réclamations des autres provinces.

Aujourd'hui, en effet, le gouvernement propose des augmentations analogues pour les provinces de Hainaut, d'Anvers et de Liège, et les autres provinces viennent également réclamer. J'ai entendu M. Tesch élever la voix au nom du Luxembourg, j'ai entendu également M. Thonissen dire que le Limbourg est mal traité. Je ne prétends que les provinces dont se sont occupés ces deux honorables membres sont traitées comme elles devraient l'être ; mais, j'examine la question à un point de vue relatif, au point de vue de la proportion dans laquelle l'allocation que nous allons voter est répartie entre les différentes provinces. Ce sont les provinces de Brabant et de Hainaut qui sont les plus mal traitées.

Pour arriver à le constater, je n'ai trouvé qu'un seul moyen ; je ne puis pas déterminer quel est le travail qui se fait dans l'administration de chaque province, mais j'ai pris comme mesure le nombre des habitants et le nombre des communes de chaque province.

En tenant compte des allocations nouvelles proposées, le Brabant obtient, pour ce service, fr. 0,006 par habitant, tandis que la province d'Anvers, par exemple, obtient fr. 0,129 ; la province de Limbourg, qui réclame, obtient fr. 0,243 par habitant, et la province de Luxembourg, qui réclame aussi, obtient fr. 0,24.

Si j'examine la question d'après le nombre des communes de chaque province, je trouve que le Brabant reçoit 231 francs par commune, tandis que la province d'Anvers obtient presque le double, soit 406 francs. Le Brabant est, avec le Hainaut, nonobstant les augmentations proposées, la plus mal traitée de toutes les provinces. Cela résulte de la statistique que j'ai dressée et que je demande la permission de faire insérer aux Annales [reprise en note de bas de page et non reprise dans la présente version numérisée].

Messieurs, je l'ai déjà dit : l'augmentation qui nous est proposée n'est pas suffisamment importante. Cependant, je n'en proposerai pas de supérieure, et voici pourquoi :

Je suis d'avis, comme l'honorable M. Pirmez l'a dit dans une discussion précédente, qu'il est possible d'arriver à une amélioration de la situation par un procédé autre que l'augmentation de la somme allouée ici.

Le procédé est bien simple, il a été indiqué souvent, et la Chambre elle-même l'a déjà préconisé : c'est la diminution du nombre des employés, combinée avec l'augmentation des heures de travail. Je dois dire qu'à Bruxelles, les heures de travail de l'administration provinciale me paraissent trop peu nombreuses.

Les bureaux s'ouvrent à 9 heures et se ferment à 3 heures. Il est évident que les personnes employées dans cette administration pourraient travailler plus longtemps ; la besogne qu'elles font pourrait être faite par un plus petit nombre de personnes, et ces personnes pourraient être mieux rémunérées.

Je suis d'avis aussi que la Chambre devrait, en votant le crédit, demander à M. le ministre de l'intérieur que, dans un temps plus ou moins rapproché, il nous communique la répartition qui sera faite des crédits alloués,

Il s'agit de savoir comment se fera la répartition, quel sera l'emploi des sommes que l'on demande. Dans ma pensée, et c'est aussi celle qui a été exprimée dans le rapport de la section centrale, ces sommes doivent être allouées aux employés inférieurs.

J'ai signalé tout à l'heure les traitements qui sont attribués à ces employés ; ceux-ci sont absolument trop peu rétribués. On ne peut admettre qu'avec un traitement qui va de 800 francs à 1,500 francs, des hommes qui ont de nombreuses années de service, qui ont peut-être femme et enfants, puissent vivre à Bruxelles. Car, remarquez-le, les réclamations pour le Brabant sont d'autant plus justes qu'à Bruxelles, la vie est beaucoup plus chère qu'à Hasselt et à Arlon.

Si les employés supérieurs peuvent jusqu'à un certain point se tirer d'affaire, il est absolument impossible que les employés inférieurs vivent avec le traitement qui leur est alloué.

Aussi pour obtenir la certitude que les sommes que nous allons voter serviront à améliorer la position des employés inférieurs, je me propose de réclamer en temps opportun le relevé de l'emploi qui sera fait des augmentations demandées.

M. Thonissen. - Messieurs, j'appuie les observations présentées par l'honorable M. Tesch, et quand nous arriverons à l'article 29 du budget, je proposerai, pour la province de Limbourg un amendement analogue à celui qu'il a présenté pour la province de Luxembourg. Seulement je ne demanderai pas une augmentation de 4,000 francs ; je ne réclamerai pour le Limbourg qu'une augmentation de 2,000 francs.

L'honorable M. Tesch a parfaitement plaidé sa cause, et tout ce qu'il a dit du Luxembourg s'applique incontestablement à la province de Limbourg. J'invoquerai pour le Limbourg une seule considération spéciale. Un arrêté royal du 13 juillet 1864, organique du personnel des administrations provinciales, fixe le maximum et le minimum du traitement des employés, depuis les chefs de division jusqu'aux expéditionnaires.

Tous obtiennent naturellement le minimum ; mais aussi, d'après le même arrêté, tous doivent pouvoir obtenir, après un certain nombre d'années, soit le traitement moyen, soit le traitement maximum afférent à leur grade.

La section centrale a prouvé que les dispositions de l'arrêté royal du 13 juillet 1864 sont impossibles à réaliser avec les crédits actuels, dans les provinces d'Anvers, de Brabant, de Hainaut, de Liège et de Namur. Elle propose, en conséquence, d'accorder une augmentation de 2,000 francs pour Anvers, de 4,900 francs pour le Brabant, de 4,900 francs pour le Hainaut, de 4,000 francs pour Liège, et de 4,000 francs pour Namur.

Or, messieurs, dans la province de Limbourg, on rencontre la même insuffisance. Là aussi, il faudra majorer le crédit, à moins qu'on ne veuille que, pour le Limbourg seul, l'arrêté du 15 juillet 1864 reste une lettre morte. Là aussi on ne saurait pas actuellement accorder aux employés le traitement moyen. Des documents officiels, transmis à l'honorable ministre de l'intérieur par la députation permanente établissent cette insuffisance à la dernière évidence.

M. Vermeire. - Qu'est-ce que cela prouve ? Je demande la parole.

M. Thonissen. - Messieurs, l'argumentation est excessivement simple. Je ne demande que l'égalité pour toutes les provinces, et si M. Vermeire me prouve que la province qu'il représente se trouve dans les mêmes conditions que le Limbourg, je tiendrai pour elle le même langage et je voterai le même amendement.

Encore une fois, voici l'argument qu'on fait valoir. On dit qu'avec les sommes actuellement portées au budget, il est impossible d'exécuter l'arrêté royal du 15 juillet 1864, organique des administrations provinciales. On admet ce fait pour les provinces de Brabant, de Liège, de Namur, d'Anvers et de Hainaut. Or, il en est absolument de même pour le Limbourg et le Luxembourg, Pourquoi donc ces deux provinces n'obtiendraient-elles pas une augmentation d'allocation comme les autres provinces ? Je ne demande rien, absolument rien que l'égalité.

L'honorable M. Demeur n'a pas précisément combattu l'amendement présenté par M. Tesch et celui que, plus tard, je présenterai de mon côté ; mais il a fait valoir certaines considérations qui pourraient faire sur la Chambre une impression défavorable. Il prend pour base le nombre d'habitants des provinces et il en conclut que le travail administratif augmente ou diminue constamment avec le chiffre de la population. Cette base n'est pas toujours vraie.

Il y a, par exemple, un bureau de bienfaisance dans une commune de 300 habitants comme dans une commune de 1,000 habitants ; il y a une école dans une commune de 500 habitants comme dans une commune de 1,300 habitants.

Il y a, d'autre part, des communes très étendues quoique peu peuplées, et ces communes ont à former, chaque année, une foule de demandes relatives à la voirie vicinale. Ce n'est donc pas toujours le nombre des habitants qui détermine le nombre des demandes administratives.

(page 734) D’ailleurs, ce sont là des considérations accessoires. Comme je l'ai dit plus haut, l'honorable M. Tesch et moi, nous ne demandons que l'application d'un principe d'égalité. Nous voulons uniquement que les diverses provinces soient traitées les unes comme les autres.

M. Lelièvre. - L'augmentation proposée par le gouvernement en ce qui concerne les employés du gouvernement provincial de Namur n'étant pas combattue, je. ne puis qu'appuyer la proposition de M. le ministre de l'intérieur relativement à une allocation dont l'insuffisance est reconnue depuis longtemps.

Je ne crois donc devoir ajouter aucune observation à cet égard.

Quant aux greffiers provinciaux, M. le ministre a reconnu, dans une dépêche adressée à la section centrale, que le traitement de ces fonctionnaires devait être augmenté. En effet, il est certain que la rémunération actuelle n'est pas en rapport avec l'importance de la besogne et du travail imposés aux greffiers. On est généralement d'accord à cet égard. J'engage donc M. le ministre à ne pas tarder à présenter un projet de loi rétribuant plus convenablement des fonctionnaires chargés d'une mission très délicate et très difficile qui exige des soins multipliés et continus.

M. Vermeire. - Messieurs, il est très facile de demander des augmentations pour les employés ; on peut se faire ainsi beaucoup d'amis ; mais il n'y a pas que des employés dans le pays, il y a aussi les contribuables qui doivent payer, et je pense qu'on peut bien parler des contribuables également.

Lorsque nous examinons les budgets, nous trouvons des augmentations considérables et si les employés provinciaux, comme les employés du gouvernement, croient ne pas être suffisamment rétribués, ce que je ne veux pas examiner ici, je dois cependant faire remarquer que lorsqu'un emploi devient vacant, il y a dix, vingt, trente solliciteurs pour l'obtenir.

Je dis, messieurs, que si l'on veut entrer dans la voie de l'augmentation des traitements en vue d'assurer l'existence des employés et l'entretien de leur famille, il faudrait faire une enquête, non pas seulement en ce qui concerne les employés des gouvernements provinciaux, mais aussi au sujet des employés de l'Etat ; en agissant ainsi, on établirait un droit à l'existence, ce qui serait la consécration d'un principe entaché de socialisme.

Je dis donc, messieurs, que cette considération que les employés ne peuvent pas subsister, ne me touche guère. Elle me touche d'autant moins que, comme je l'ai dit tantôt, les emplois du gouvernement sont fortement courus.

Je pense, messieurs, que le gouvernement aurait tort d'augmenter encore les émoluments des employés provinciaux ; et je regrette, pour ma part, qu'il soit déjà entré dans cette voie. Je voudrais que le gouvernement, en présence d'impôts considérables qui frappent les populations et qui, dans un avenir prochain, les frappera encore davantage à cause de l'accroissement de nos dépenses militaires, fût d'avis qu'il est enfin temps de porter la plus grande économie dans les dépenses publiques.

Je demande donc que le gouvernement, au lieu d'augmenter les dépenses, les restreigne dans la mesure du possible.

M. Boulenger. - Je crois devoir appuyer les observations présentées par M. Demeur au point de vue d'une augmentation à donner aux employés des gouvernements provinciaux du Brabant et du Hainaut. Les raisons qu'il a données sont excellentes, et M. Thonissen ne les a pas détruites, en disant qu'il n'y a qu'une école et qu'un bureau de bienfaisance dans chaque commune ; qu'il n'y a pas à s'arrêter à la base indiquée par l'honorable député de Bruxelles.

La population, au contraire, doit être prise en considération, car non seulement dans le Brabant et surtout dans le Hainaut, il y a des communes très populeuses qui comptent 3, 4, 5 et même 6 écoles, mais les occupations des gouvernements provinciaux ont surtout leur cause dans l'exécution de la loi de milice et les opérations de la milice sont en rapport avec la population.

A côté de toutes ces raisons, il y en a une autre qui est à la connaissance du gouvernement et que je me fais un devoir d'indiquer à la Chambre : la province de Hainaut porte à son budget, depuis trois ans, un chiffre de 7,500 francs pour indemniser les employés du gouvernement provincial ; c'est témoigner d'une façon claire et indiscutable le besoin dans lequel se trouvent ces employés.

L'augmentation proposée n'est que de 4,900 fr. ; il résulte de là qu'il s'en faut de 2,000 francs que les employés du gouvernement provincial du Hainaut reçoivent le traitement auquel ils ont droit. A ce sujet, je ferai remarquer à la Chambre qu'il est au moins anomal que des employés de l'Etat reçoivent un subside ou un traitement de la province.

Pareille manière de faire me paraît excessivement irrégulière ; les employés de l'Etat doivent être rétribués par l'Etat et les employés des provinces par les provinces, car il est impossible que des êtres moraux rétribuent les employés d'autres êtres moraux.

Il me paraît donc indispensable que la province de Hainaut cesse d'être obligée, comme elle l'est depuis trois ans, de rétribuer les employés du gouvernement provincial et que le budget de l'Etat y pourvoie.

Je crois devoir m'arrêter aussi à une autre observation produite dans la section centrale et consignée dans le rapport, observation qui a provoqué une explication de la part de l'honorable M. Lelièvre. Je ne puis pas partager les appréciations de M. Lelièvre ni celles du gouvernement quant aux traitements qui sont alloués aux greffiers provinciaux. Si mes souvenirs sont exacts, ces traitements sont de 5,500 francs. Eh bien, j'estime qu'eu égard aux traitements qu'on donne aux fonctionnaires de l'administration de l'Etat, 5,500 francs sont une rémunération très respectable,

Mais un point qui a échappé au gouvernement et à la section centrale, c'est la position des membres des députations permanentes. N’est-il pas réellement étonnant que les membres des députations permanentes aient en tout et pour tout 3,300 francs de traitement ? Ce ne sont pas des fonctionnaires, ce sont des magistrats et des magistrats créés par l'élection à un double degré ; leurs travaux exigent non seulement une grande rectitude de jugement, une honnêteté indiscutable, mais encore des connaissances juridiques.

Eh bien, messieurs, à l'heure qu'il est le traitement qui leur est attribué est de 3,300 francs, le même traitement que le plus modeste juge de paix.

Les membres des députations permanentes exercent une magistrature excessivement importante, non seulement en matière de milice où ils touchent à la liberté des citoyens, non seulement en matière de propriété dans les questions de mines où ils prennent des décisions en première instance, mais encore en matière politique, où ils prennent des résolutions qui intéressent tous les citoyens.

Faut-il encore faire remarquer, comme on le dit à côté de moi, que les fonctions de conseiller de la députation permanente ne peuvent être cumulées avec presque aucune autre fonction, avec presque aucune profession, notamment avec la profession d'avocat ?

Ces considérations, messieurs, doivent vous toucher, et il me paraît que l'on doit mettre la situation des membres des députations permanentes tout d'abord en harmonie avec celle des greffiers, qui ne sont que les instruments des députations.

Le gouvernement ne peut pas et ne doit pas perdre de vue que le temps que les conseillers donnent à la chose publique est aussi très considérable dans certaines provinces.

Dans le Hainaut, par exemple, ils siègent trois fois par semaine et ils expédient de 15,000 à 20,000 affaires par an.

J'appelle donc la sérieuse attention du gouvernement sur ce point. S'il ne lui est pas possible de faire droit à mes observations dans le présent exercice, j'espère qu'il voudra bien y pourvoir au prochain budget. S'il ne le faisait pas, j'userais alors de mon initiative pour traduire en fait mes observations et réparer ce que je considère comme une injustice.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Messieurs, la pensée exprimée par l'honorable M. Demeur est, depuis longtemps, celle de la Chambre et du gouvernement : c'est qu'il importe, le plus possible, de réduire partout le nombre des employés el, en exigeant d'eux un travail sérieux, d'attacher à ce travail une rémunération plus considérable.

C'était la pensée, messieurs, qui a inspiré l'arrêté royal du 15 juillet 1864. Néanmoins, dès ce moment, des objections se sont produites à différentes reprises, et l'on n'a pas tardé à reconnaître que le surcroît de la besogne administrative était, dans certaines provinces, si considérable que les réductions que l'on espérait obtenir par ce moyen n'étaient pas réalisables.

Depuis lors, la loi sur le temporel des cultes et plus récemment la loi sur la milice ont, dans de fortes proportions, augmenté le travail des employés provinciaux.

Je reconnais toutefois qu'en ce moment encore il y a des améliorations à introduire. On peut réclamer plus de travail des employés provinciaux ; mais pour que ce travail soit plus complet et plus satisfaisant, il faut que l'on puisse exiger, chez l'employé, à la fois plus de capacité et plus de zèle, et dès lors il faut améliorer sa position financière.

J'admets volontiers avec l'honorable représentant de Bruxelles que, dans plusieurs provinces, la situation de ces employés est des plus pénibles et des plus malheureuses.

C'est surtout au nom des provinces de Brabant et de Hainaut que des observations ont été présentées tout à l'heure dans un sens auquel je (page735) m'associe volontiers, Les honorables préopinants voudront bien reconnaître que ce sont précisément ces deux provinces qui obtiendront le supplément d'allocation le plus considérable, puisqu'il s’élève pour l'une et pour l'autre à 4,000 francs.

J'ajouterai qu'en ce qui touche l'administration centrale, j'ai moi-même introduit le même principe ; et, depuis que j'ai l'honneur de diriger le département de l'intérieur, les employés d'un ordre inférieur ont obtenu une amélioration de position considérable à la condition de fournir, je ne dirai pas un travail plus sérieux, mais un travail plus prolongé. J'ai cru ainsi servir tout à la fois leurs intérêts et celui de l'Etat. La même règle, je n'en doute pas, sera suivie par les administrations provinciales.

Messieurs, de nouvelles réclamations se sont produites aujourd'hui. L'honorable M. Tesch, au nom de la province de Luxembourg ; l'honorable M. Thonissen, au nom de celle du Limbourg, ont fait valoir les motifs de ces réclamations.

L'honorable M. Tesch, notamment, a comparé la situation faite dans le budget actuel à la province de Namur avec celle qui, d'après lui, doit être faite à la province de Luxembourg.

Je ne crois pas, messieurs, que cette assimilation puisse complètement se justifier. En effet, il y a, dans la province de Namur, plus d'employés que dans la province de Luxembourg, et lorsqu'on compare l'une et l'autre province, on remarque que le nombre des communes dans la province de Namur excède d'un tiers celui des communes de la province de Luxembourg.

Quant au budget provincial, il dépasse de moitié celui du Limbourg et il est supérieur de plus d'un tiers a celui du Luxembourg.

Il faut reconnaître cependant, messieurs, que dans le Limbourg comme dans le Luxembourg, l'administration provinciale est chargée d'affaires nombreuses et difficiles : d'un côté, les défrichements ; d'un autre côté, les biens que possèdent un grand nombre de communes, la surveillance qu'à raison de ces circonstances mêmes il convient d'exercer sur les administrations communales. Tous ces intérêts, toutes ces questions, dans le Limbourg comme dans le Luxembourg, constituent une besogne administrative considérable.

J'ajouterai que si, au moment où. le budget de l'intérieur a été présenté à la Chambre, c'est-à-dire au mois d'août 1870, j'ai cru qu'il était du devoir du gouvernement de se placer au point de vue qu'indiquait tout à l'heure l'honorable M. Vermeire, c'est-à-dire à raison des circonstances que nous traversions, de nous renfermer dans la plus sévère économie, je pense qu'aujourd'hui ces circonstances sont bien moins rigoureuses.

Eu égard à ces considérations et à celles que les honorables MM. Tesch et Thonissen ont développées, le gouvernement peut accepter un amendement qui, pour chacune de ces provinces, augmenterait l'allocation proposée d'une somme de 2,000 francs.

Quant à l'opinion qui a été exprimée par l'honorable M. Boulenger, au sujet de la position des greffiers provinciaux, je ne saurais m'y associer.

Depuis bien longtemps une assimilation a été établie entre la position des greffiers provinciaux et celle de certains magistrats judiciaires ; et, bien que, depuis quelques années, la position de ceux-ci ait été améliorée, toutes les réclamations faites jusqu'à ce jour par les greffiers provinciaux n'en ont pas moins été écartées.

Le gouvernement continuera donc à rechercher, lors de la formation du prochain budget, s'il n'y a pas lieu d'améliorer la position des greffiers provinciaux. A cette occasion, le gouvernement pèsera aussi les considérations que l'honorable M. Boulenger a fait valoir en faveur des membres des députations permanentes.

M. De Lehaye, rapporteur. - Messieurs, le nombre et les traitements des employés provinciaux sont réglés par un arrêté royal de 1864. Cet arrêté a été pris sous l'administration de l'honorable M. Vandenpeereboom, et il faut le dire, cette disposition a été un véritable bienfait pour les employés.

Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur que, si la Chambre vote les augmentations proposées, ce sera en vertu de l'arrêté de 1864 qu'il en fera la répartition ; à mon avis, un nouvel arrêté devra intervenir, l'arrêté actuel déterminant le nombre des employés et le taux de leur traitement.

Un honorable député de Mons a parlé des greffiers provinciaux et des membres des députations permanentes ; il pense que le traitement des greffiers provinciaux n'est plus en rapport avec leur besogne actuelle. Je crois aussi que le traitement des membres des députations permanentes devrait être augmenté, mais ce traitement est réglé par une loi spéciale. Ce n'est donc pas à l'occasion du budget qu'on pourrait modifier cette position. Je fais, quant à présent, mes réserves.

Je ne pense pas, comme l'honorable député de Mons, qu'il faille mettre sur la même ligne les greffiers provinciaux et les membres des députations permanentes. Les greffiers ont une besogne beaucoup plus étendue. Du reste, je n'insiste pas sur ce point, et lorsque nous serons saisis d'un projet de loi, je m'expliquerai.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Messieurs, il est bien entendu que ce sont les employés inférieurs qui les premiers devront prendre part aux augmentations que la Chambre voudra bien voter. (Oui ! oui !) La position de ces employés est si peu satisfaisante qu'il est indispensable et véritablement urgent de l'améliorer.

M. Tesch. - M. le ministre de l'intérieur propose de réduire à 2,000 francs l'augmentation de 4,000 francs que j'ai demandée pour les employés de l'administration provinciale du Luxembourg. Je dois insister sur ma proposition. Je répondrai quelques mots aux observations que M. le ministre de l'intérieur a présentées.

Il m'a reproché d'assimiler complètement la province de Luxembourg à celle de Namur, et il a fait observer qu'il y avait de notables différences. Mais cette assimilation absolue, je ne l'ai pas faite et il est à remarquer que le budget de la province de Namur comprend, pour le personnel des fonctionnaires provinciaux, une allocation de 58,000 fr., tandis que celle du Luxembourg n'a, de ce chef, que 48,000 francs.

L'honorable ministre a dit aussi que, dans la province de Namur, le nombre des communes était beaucoup plus grand que dans celle de Luxembourg. Matériellement, cela est vrai ; mais quand on se rend compte de la manière dont les communes sont constituées dans le Luxembourg, on voit que bien souvent une commune du Luxembourg donne trois ou quatre fois autant de besogne qu'une commune de la province de Namur, et cela se comprend : dans la province de Luxembourg, les communes se composent de deux, trois, quatre, cinq et six sections, et chaque section dans la réalité compose une commune.

Ainsi, que la Chambre me permette de citer un fait que je connais très bien personnellement. La commune que j'habite a six sections. Eh bien, il y a là six budgets différents, chaque section à ses écoles, son église, ses propriétés particulières, ses dépenses particulières, ses revenus particuliers, ses bois.

Les unes tirent tout ce qui est nécessaire pour le budget, d'impositions personnelles, d'autres de propriétés qu'elles possèdent ; ce sont donc autant de communes qu'il y a de sections de communes, et sous ce rapport la besogne est aussi grande et même plus grande qu'elle ne peut l'être dans la province de Namur.

Il n'y a pas de province où les communes sont constituées comme dans le Luxembourg et par conséquent où il y ait autant de travail.

C'est ce qui explique ce fait que j'ai cité tantôt que, s'il n'y a, dans le Luxembourg, que deux cents et des communes et qu'il y en a trois cents et des dans la province de Namur, il y a cependant 482 paroisses dans la province de Luxembourg, tandis qu'il n'y en a que 442 dans la province de Namur.

Du moment donc qu'on demande une augmentation de l'allocation en raison de la loi sur le temporel des cultes, qui va imposer aux administrations provinciales une besogne très grande, la raison est bien plus impérieuse pour la province de Luxembourg que pour toute autre province du pays.

Je persiste donc dans mon amendement, qui est justifié tant au point de vue des nécessités du service qu'au point de vue des droits des fonctionnaires de l'administration provinciale.

M. Vandenpeereboom. - Messieurs, je ne m'oppose pas aux augmentations qui nous sont demandées pour frais d'administration dans les différentes provinces. Mais je dois faire observer à la Chambre que, si en 1864, on n'a pas porté le nombre des employés provinciaux à' un chiffre plus élevé, c'est parce qu'alors la Chambre avait témoigné le désir de voir réduire autant que possible le nombre des fonctionnaires et de voir améliorer leur position. J'avais pris l'engagement vis-à-vis de la Chambre de suivre les indications qu'elle avait données à ce sujet et je crois avoir rempli ce devoir en diminuant le nombre d'employés du ministère de l'intérieur, des gouvernements provinciaux, etc. Mais, depuis, d'après ce qu'on nous dit, de nouveaux besoins se sont manifestés : s'il en est ainsi, il est parfaitement juste qu'on y donne satisfaction et qu'on augmente, s'il le faut, le nombre d'employés.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Du moins, dans la plupart des cas, il ne pourra être réduit.

M. Vandenpeereboom. - On dérogera donc à l'arrêté organique qui a été fait en 1864. Je ferai à ce sujet une observation qui a déjà été produite à la Chambre et à laquelle M. le ministre n'a pas répondu. Je tiens essentiellement à ce que l'arrêté de 1864 qui doit être revu, ne le (page 736) soit que par un autre arrêté ; en d'autres termes, je demande qu'on ne laisse pas à l'arbitraire des administrations le soin de répartir les nouveaux crédits dans telles limites qu'elles jugeraient convenables. Je demande qu'on suive les principes qui ont été adoptés en 1864, c'est-à-dire qu'on attache, ce qui n'était pas auparavant, un traitement bien déterminé à chaque grade en fixant un maximum, un médium et un minimum de manière que du moment que l'on atteint un nombre déterminé d'années de service on soit certain d'obtenir un traitement déterminé. C'est là, selon moi, une question administrative très importante ; elle est de nature à empêcher l'arbitraire, le favoritisme, bien involontaire, je le yeux bien.

Mais souvent dans certaines fonctions on est entouré d'influences particulières, et on se trouve entraîné à accorder un peu plus à l'un, un peu moins à l'autre.

Je ne fais ici allusion à personne, je parle en règle générale. Mais je dis que ces préférences excitent un grand mécontentement dans les administrations. Lorsque chacun sait à quoi s'en tenir, tout le monde est satisfait et il n'y a pas de réclamation.

En un mot je demande qu'il en soit dans les administrations civiles, et notamment dans les administrations provinciales, comme dans l'armée, de même que celui qui reçoit l'épaulette de colonel est certain d'avoir le traitement de son grade, de même celui qui est promu au grade de chef de division doit être certain d'avoir le traitement attaché à ce grade.

M. Tesch. - Cela est impossible dans le Luxembourg ; les employés ne peuvent y obtenir le traitement moyen auquel ils ont droit, en vertu de l'arrêté, après un certain nombre d'années de service.

M. Vandenpeereboom. - S'il y a un gouvernement provincial quelconque où les employés ne sont pas rétribués conformément à l'arrêté royal, M. le ministre doit demander une nouvelle augmentation de crédit. Il faut que le chef de bureau qui a' droit à un traitement de 3,500 francs obtienne ce traitement en entrant en fonctions ; et si l'arrêté dit qu'après tant d'années de service, il a droit à une augmentation de 400 francs, il faut que cette augmentation lui soit accordée. Je le répète, si les crédits portes au budget sont insuffisants pour exécuter l'arrêté royal, il faut demander une augmentation de crédit.

M. Tesch. - Il ne faut donc pas un nouvel arrêté, mais il faut de l'argent pour exécuter celui qui existe.

M. Bouvier. - L'honorable M. Vandenpeereboom vient d'émettre une opinion que nous partageons, c'est-à-dire qu'il faut augmenter les traitements, tout en forçant la besogne. Ce principe a également été développé par l'honorable M. Kervyn. Mais quand il s'agit de traduire en fait, en écus en un mot, les actes ne répondent plus aux paroles, c'est-à-dire que la moyenne des traitements des fonctionnaires provinciaux n'a pas été en augmentant, bien que la somme de la besogne administrative ait toujours subi un accroissement soutenu.

Ainsi, on a invoqué dans la loi de budget, pour motiver l'augmentation du chiffre de l'allocation, la loi sur le temporel des cultes. Il y en a bien d'autres qui ont occasionné un surcroît de travail aux employés provinciaux.

Ainsi, M. le ministre de l'intérieur vous a parlé de la loi sur la milice, des bourses d'étude, etc., lois qui donnent lieu à des détails administratifs compliqués et considérables. Donc, surcroît de travail.

Vous avez, dans le Luxembourg, un genre d'affaires dont on n'a pas encore parlé, je veux faire allusion au droit d'affouage qui existe dans beaucoup de communes et sections de communes. La répartition de ce droit donne souvent lieu à de graves difficultés qui doivent être résolues au gouvernement provincial.

De là encore une fois une augmentation de travail qui, en stricte justice, justifie une augmentation de traitement. Le chiffre de 4,000 francs sollicité par mon honorable collègue M. Tesch ne me paraît nullement exagéré.

Je me rallie à celui qui vous est proposé avec l'espoir fondé que la Chambre tiendra compte des considérations dans lesquelles l'honorable M. Tesch est entré pour démontrer l'urgente nécessité de cette augmentation du crédit. M. le ministre l'admet pour moitié, mais j'espère que la Chambre se montrera, je ne dis pas généreuse, mais équitable et qu'elle ne voudra pas marchander, quand mon honorable collègue et moi montrons tant de modération.

M. De Lehaye, rapporteur. - L'arrêté de 1864 avait un double but : le premier, c'était de soustraire les employés à l'arbitraire ; le second était de nous soustraire nous-mêmes à toute demande d'augmentation de traitement. C'était un bienfait.

D'après les observations faites par l'honorable M. Vandenpeereboom, auteur de l'arrêté, il faudrait que le ministère ne fît autre chose qu'exécuter cet arrêté, c'est-à-dire que du moment où, en vertu de cet arrêté, un employé aurait droit à une augmentation de traitement, le gouvernement devrait venir demander le crédit nécessaire pour payer cette augmentation.

Je suis aussi de cet avis ; il importe que l'on ne porte pas au budget des augmentations, si ce n'est en vertu de cet arrêté. De cette manière, nous n'aurons à nous prononcer chaque année que sur des demandes d'augmentations nouvelles, résultant de l'application de l'arrêté.

M. Muller. - Je désirerais, messieurs, demander un supplément d'explication à l'honorable ministre de l'intérieur relativement à la déclaration qu'il a faite tantôt qu'il ne s'agissait pas d'augmenter le nombre des employés des administrations provinciales, mais plutôt et exclusivement d'améliorer leur position financière. J'accueille avec satisfaction cette résolution, mais je ferai remarquer qu'elle est diamétralement opposée à ce que M. le ministre a écrit dans la note adressée à la section centrale, et qui doit être, sous ce rapport, considérée comme non avenue.

Je crois que le nombre actuel des employés provinciaux est suffisant.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - L'insuffisance a été surtout invoquée dans les provinces de Hainaut et de Namur.

M. Muller. - Les observations contenues dans la note de M. le ministre s'appliquent à toutes les provinces. Voici ce que porte cette note :

« Restreindre le nombre des emplois et augmenter les traitements de manière à proportionner pour chacun la rémunération à la somme de travail exigée, tel a été le but de la réorganisation des bureaux provinciaux.

« Cependant, dès son origine, l'arrêté royal de 1864 donna lieu, dans plusieurs provinces, à des réclamations.

« Des gouverneurs s'élevèrent, avec une insistance convaincue, contre la réduction du personnel de leurs bureaux et s'attachèrent à démontrer la nécessité de rétablir les cadres primitifs, pour assurer la régularité du service. »

Et plus loin, M. le ministre, en émettant quelques considérations sur les écritures que va entraîner le contrôle des budgets des fabriques d'église, ajoute ce qui suit :

« Ce n'est donc point sans raison que des gouverneurs signalent l'insuffisance du personnel assigné à leurs bureaux. »

Eh bien, j'avoue, messieurs, que j'avais lu ces passages avec peu de satisfaction et, je le répète, j'aime beaucoup mieux la déclaration corrective que vient de faire M. le ministre. Je ne désire qu'une chose, c'est qu'il s'y tienne, dans l'intérêt bien entendu du personnel des administrations provinciales.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Comme j'ai eu l'honneur de le dire à la Chambre, le gouvernement désire surtout qu'en améliorant la position des employés, on puisse réclamer d'eux plus de zèle, et il faut en même temps que, lorsque des places deviendront vacantes, on puisse plus aisément trouver des hommes convenables pour les remplir. Aussi d'une manière générale, avons-nous insisté pour que l'on cherchât, autant que cela était possible, à diminuer le nombre des employés, même de ceux dont l'existence est consacrée par le règlement de 1864.

Déjà dans deux provinces, la Flandre orientale et la Flandre occidentale, on a pu non seulement ne pas augmenter les cadres, mais même les faire descendre au-dessous des anciens chiffres et faire exécuter le travail par un nombre d'employés inférieur à celui qui a été déterminé en 1864.

Il en est résulté qu'à la fin de l'année, on a pu, grâce à de persévérants efforts, constater un excédant qui, à l'avenir, pourrait être utilement consacré à améliorer la position de certains employés.

J'espère qu'en appliquant le même système à d'autres administrations provinciales, nous parviendrons à obtenir un travail aussi consciencieux et même plus rapide sans augmenter le nombre des employés, mais en leur accordant une position pécuniaire plus satisfaisante.

Je dois cependant reconnaître que quelques gouverneurs de provinces ont fait remarquer que la loi sur le temporel des cultes et la loi sur la milice ont amené un travail si considérable qu'ils seraient peut-être obligés de demander que l'on modifiât l'état de choses existant aujourd'hui et que l'on augmentât de. deux ou de trois le nombre des employés ; mais je persiste à déclarer, au nom du gouvernement, que tous nos efforts tendront à ne pas accroître le personnel et à réclamer des fonctionnaires provinciaux, en échange de la position meilleure que nous voulons leur offrir, un travail plus considérable.

Je crois que ce sont là les meilleures traditions ; que c'est là la voie dans laquelle nous devons entrer ; et ce qui affermit le gouvernement dans sa résolution, ce sont les encouragements qu'il a trouvés dans l'opinion de tous les membres qui ont pris part à cette discussion.

(page 737) - L'article 10 est adopté.

Articles 11 et 12

« Art. 11. Traitements des employés et gens de service : (erratum, page 756) fr. 60,500. »

- Adopté.


« Art. 12. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 13 à 15 (province de Brabant)

« Art. 13. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 14. Traitement des employés et gens de service : fr. 73,500. »

- Adopté.


« Art. 15. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 16 à 18 (province de Flandre occidentale)

« Art. 16. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 17. Traitement des employés et gens de service : fr. 64,000. »

- Adopté.


« Art. 18. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 19 à 21 (province de Flandre orientale)

« Art. 19. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 20. Traitement des employés et gens de service : fr. 74,800. »

- Adopté.


« Art. 21. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 22 à 24 (province de Hainaut)

« Art. 22. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 23. Traitement des employés et gens de service : (erratum, page 756) fr. 78,400. »

- Adopté.


« Art. 24. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 25 à 27 (province de Liège)

« Art. 25. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 26. Traitement des employés et gens de service : (erratum, page 756) fr. 70,000. »

- Adopté.


« Art. 27. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 28 à 30 (province de Limbourg)

« Art. 28. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 29. Traitement des employés et gens de service : fr. 48,000. »

M. le président. - M. Thonissen a proposé, par un amendement auquel M. le ministre de l’intérieur s’est rallié, de porter le chiffre à 50,000. »

- Ce chiffre est adopté.


« Art. 30. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500.

« Charge extraordinaire : fr. 1,035 55. »

- Adopté.

Articles 31 à 33 (province de Luxembourg)

« Art. 31. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 32. Traitement des employés et gens de service : fr. 48,000. »

M. le président. - M. Tesch propose d'augmenter le chiffre de 4,000 francs. M. le ministre de l'intérieur ne consent qu'à une augmentation de 2,000 francs.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Je suis d'avis, messieurs, que les titres de la province de Limbourg sont égaux à ceux de la province de Luxembourg. On a fait dans mes bureaux des recherches au sujet desquelles je crois Inutile d'entrer dans de nouvelles explications, mais je crois manifester des intentions conciliantes en proposant le même chiffre pour les deux provinces.

M. le président. - M. Tesch maintient-il sa proposition ?

M. Tesch. - Oui, M. le président. Il y a vingt-cinq employés au gouvernement de la province de Luxembourg. Une augmentation de 2,000 fr. cela fait moins de 100 francs par employé.

- Il est procédé au vote, par assis et levé, sur la proposition de M. Tesch.

Cette proposition est adoptée.

En conséquence, le chiffre est porté à 52,000 francs.


« Art. 33. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500. »

- Adopté.

Articles 34 à 36 (Province de Namur)

« Art. 34. Traitements du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.


« Art. 35. Traitements des employés et gens de service : (erratum, page 756) fr. 58,000. »

- Adopté.


« Art. 36. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500. »

- Adopté.

Motion d'ordre relative à la situation sanitaire après la bataille de Sedan

M. Vleminckx. - Messieurs, au commencement de la séance, à l'occasion d'une pétition qui nous était arrivée sur la situation du champ de bataille de Sedan, j'avais déclaré que j'interpellerais sur ce point M. le ministre des affaires étrangères dès qu'il serait entré dans cette enceinte. L'honorable ministre vient de me demander de remettre mon interpellation à demain.

Je fais cette déclaration à la Chambre, parce que plusieurs de mes honorables collègues ont fait connaître qu'ils attachaient aux explications ministérielles une grande importance.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Si M. Vleminckx désirait une explication immédiate, je pourrais la lui donner.

M. Vleminckx. - C'est à M. le ministre des affaires étrangères qu'il y a trois ou quatre semaines, j'ai adressé une demande de renseignements qui devaient venir de l'étranger ; c'est de lui que je désire les obtenir.

Chapitre V. Frais de l'administration dans les arrondissements

Article 37

« Art. 37. Traitements des commissaires d'arrondissement : fr. 192,800. »

M. de Zerezo de Tejada. - Je suis heureux de voir que le gouvernement propose d'élever de la troisième classe à la deuxième trois commissariats d'arrondissement, parmi lesquels figure celui de Turnhout.

Tout en approuvant, dans son ensemble, la mesure qu'il nous a soumise, je me bornerai à en apprécier la justice et l'opportunité pour autant qu'elle se rapporte au commissariat de Turnhout.

Comme j'ai l'honneur de représenter cet arrondissement, je connais naturellement mieux sa situation que celle des deux autres qui sont également en cause.

Messieurs, lorsque au vote du budget de l'intérieur pour l'exercice 1867 on a fait passer de la troisième classe à la deuxième les commissariats d'arrondissement de Dinant et de Nivelles, on eût sagement fait, selon moi, d'accordé la même faveur à celui de Turnhout.

Ce dernier, à la vérité, est inférieur aux deux autres sous le rapport du nombre des communes, mais en revanche il l'emporte de beaucoup sur celui de Dinant par la population et sur celui de Nivelles par l'étendue territoriale.

Messieurs, si, à première vue, le nombre des communes paraît être une des bases essentielles dont il importe, de tenir compte dans le classement des commissariats, il est certain néanmoins que cet élément devient secondaire lorsqu'on le compare avec celui qui représente l'importance administrative des diverses localités du ressort.

Il est incontestable, en effet, qu'une seule commune peut exiger de la part du fonctionnaire qui a un district sous sa juridiction, une somme d'informations, d'études, de correspondances et de travaux de toutes espèces plus considérable que n'en demandent la surveillance et la direction de plusieurs autres communes réunies, mais moins peuplées ou placées dans d'autres conditions.

Or, précisément cette complication d'intérêts et de détails renaissant sans cesse, se rencontre dans l'arrondissement de Turnhout, et fait que, (page 738) sous le rapport de l'importance administrative, il dépasse ceux de Dinant et de Nivelles.

Comme le fait très justement remarquer une pétition qui a été adressée à M. le ministre de l'intérieur en 1867, la gestion des bruyères entraîne à elle seule, en Campine, de nombreuses écritures, et un grand supplément de sujets d'instruction usuelle. Elle donne lieu à des adjudications, défrichements, boisements, extractions de tourbe, ventes de gazons et de jonchée, et location de droits de chasse et dépêche.

Ces huit spécialités d'affaires, ainsi que le contrôle des placements de fonds, qui en sont la conséquence, se rapportent, comme le dit la même pétition, non seulement aux communes, mais aux bureaux de bienfaisance, aux hospices et aux fabriques d'église.

Un fait qui vous étonnera peut-être, c'est qu'il résulte du recueil des procès-verbaux des décisions de la députation permanente d'Anvers, que le commissariat de Turnhout traite à lui seul un chiffre d'affaires presque aussi élevé que les deux commissariats de Malines et d'Anvers réunis.

Certes il est naturel qu'un arrondissement qui a pour chef-lieu une des principales villes du Royaume, une ville qui est notre métropole commerciale, possède un commissariat d'arrondissement de première classe, mais est-il juste, d'autre part, que celui de Turnhout, centre d'occupations si multiples et si variées, continue à figurer dans la troisième classe ; et n'est-il pas temps de faire cesser Cette anomalie ?

Cette anomalie, messieurs, l'honorable M. Rogier semblait déjà la reconnaître lors de la discussion de son budget en 1859. Aussi, cet honorable ministre n'a pas entretenu la Chambre à cette époque des commissariats de Dinant et de Nivelles, qui, depuis, ont été cependant élevés à la seconde classe, mais il lui a signalé, au contraire, celui de Turnhout comme méritant une situation meilleure. Et l'appréciation de l'honorable M. Rogier a, selon moi, une grande valeur, car en sa double qualité d'ancien député de l'arrondissement de Turnhout et d'ancien gouverneur de la province d'Anvers, il était plus que personne à même de connaître l'importance administrative de ce commissariat.

Il a réclamé en faveur de ce dernier un supplément de traitement et une indemnité du chef de frais de bureau. cette proposition a été adoptée par la législature ; et ce point mérite d'être pris en considération, car il constitue une espèce de reconnaissance tacite des titres et des droits que possède le commissariat de Turnhout à occuper un rang supérieur à celui qui lui a été assigné jusqu'à présent.

Je dois ajouter que l'allocation dont il s'agit n'a, du reste, été qu'illusoire. Elle a été payée pendant trois ans, je pense ; mais en 1864, lorsque |es émoluments de tous les commissaires d'arrondissement du royaume ont été augmentés, le traitement complémentaire dont jouissait celui de Turnhout a été supprimé sans motifs ; de sorte que, seul parmi ses collègues, il n'a pas vu améliorer sa position puisqu'on lui retirait d'une main ce qu'on lui accordait de l'autre.

Et pourtant lorsqu'on considère que les objets de première nécessité et surtout les logements sont à des prix plus élevés à Turnhout que dans la plupart des arrondissements de troisième et même de deuxième classe et que, d'autre part, le travail qui incombe au commissaire y est beaucoup plus considérable, on ne peut que regretter 'l'économie qui a été réalisée en 1864 par le trésor.

Je dis, messieurs, que le travail qui incombe à cet honorable fonctionnaire est plus considérable ; cela résulte d'abord du grand nombre d'affaires qu'il manie, et, en second lieu, de l'usage de la langue flamande qui est de règle comme de droit en Campine. Il s'agit donc pour lui de traduire dans cet idiome une foule de pièces primitivement rédigées en français avant de les faire parvenir à celles des administrations communales qui veillent, à juste titre, que leur correspondance se fasse dans leur langue maternelle.

En outre, les dictionnaires, les répertoires, les traités d'administration étant presque toujours écrits en français, il s'ensuit qu'ils ne peuvent pas toujours être utilement consultés dans un pays de langue flamande et que c'est au commissaire qu'il appartient de parer à cet inconvénient et de suppléer à cette lacune par les renseignements qu'il est continuellement appelé à fournir.

Pour me résumer, messieurs, je vous ferai remarquer que d'après la triple base, le nombre de communes, le chiffre de la population et l'étendue territoriale, qui a été suivie pour le classement de 1849, le commissariat de Turnhout se trouve au douzième rang, tandis que celui de Mons ne jure qu'au quinzième et que cependant celui-ci a été élevé à la seconde classe dès 1849.

Il résulte de cette circonstance et des considérations que je viens d'avoir l'honneur de vous exposer, qu'à son grand détriment le commissariat de Turnhout n'occupe pas la place qui lui revient légitimement, et c'est pour ce motif que je prie instamment la Chambre de vouloir bien adopter la proposition qui lui a été faite par le gouvernement et à laquelle la section centrale a donné son adhésion, c'est-à-dire l'élévation du commissariat de Turnhout à la seconde classe.

- La discussion est close.

L'article 37 est adopté.

Articles 38 à 40

« Art. 38. Emoluments pour frais de bureau : fr. 144,700. »

- Adopté.


« Art. 39. Frais de route et de tournées : fr. 26,000. »

- Adopté.


« Art. 40. Révision des listes électorales ; exécution des articles 12, 15 et 43 de la loi du 5 mai 1869. : fr. 500. »

Chapitre VI. Milice

Articles 41 et 42

M. le président. - La section centrale propose de rédiger ainsi qu'il suit les articles 41 et 42 :

« Art. 41. Indemnité aux membres des conseils de milice, aux commissaires d'arrondissement, ainsi qu'aux secrétaires nommés en exécution des articles 18 et 35 de la loi du 3 juin 1870. Vacations des médecins ou chirurgiens, frais de route et de séjour pour les opérations de la levée de la milice : fr. 70,000. »

« Art. 42. Registres, certificats ou autres imprimés nécessaires pour l'exécution de la loi du 3 juin 1870. Matériel indispensable aux opérations de la milice. Frais de recours en cassation. Publication des décisions et arrêts en matière de milice. Achat d'ouvrages concernant la milice : fr. 30,000. »

- Les deux articles 41 et 42, ainsi modifiés, sont successivement mis aux voix et adoptés.

Chapitre VII. Garde civique

Articles 43 à 45

« Art. 43. Inspection générale ; indemnités spéciales ; dépenses d'impression et de fournitures de bureau ; frais divers relatifs au service de la garde civique : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 44. Achat, entretien et réparation des armes et objets d'équipement, magasin central. Frais d'impression des états de signalement et des brevets d'officiers et acquisition de théories, épinglettes, etc. : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 45. Personnel du magasin central : fr. 3,520. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Fêtes nationales

Articles 46 et 47

« Art. 46. Frais de célébration des fêtes nationales. - Frais d'illumination : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 47. Tir national : prix en argent, en arme», en objets d'orfèvrerie, etc. Subsides pour la construction de tirs et l'encouragement des tirs à la cible dans les villes ou communes. Personnel du tir et dépenses diverses : fr. 64,000. »

- Adopté.

Chapitre IX. Décoration civique et récompenses pécuniaires

Article 48

« Art. 48. Décoration civique ou récompenses pécuniaires pour actes de dévouement, de courage et d'humanité ; impression et calligraphie des diplômes, frais de distribution, etc. : fr. 15,000. »

- Adopté.

Chapitre X. Légion d'honneur et croix de Fer

Article 49

« Art. 49. Pensions en faveur des décorés de la croix de Fer ; des blessés dont les titres auront été reconnus avant le 1er novembre 1864 ; subsides à leurs veuves ou orphelins ; pensions de 250 francs en faveur des légionnaires ; subsides de 200 francs aux veuves de légionnaires qui n'ont pas été pensionnés ; charge extraordinaire : fr. 200,000. »

- Adopté.

(page 739) M. le président. - L'article 49 est suivi de la note ci-après :

« La somme qui, par suite des décès survenant parmi les pensionnés deviendra, pour chaque exercice, sans emploi sur le crédit de 200,000 francs, sera affectée :

« 1° A desservir de nouvelles pensions ;

« 2° A augmenter les pensions des décorés de la croix de Fer et des blessés de septembre non décorés, jusqu'à ce qu'elles atteignent le chiffre maximum de 1,200 francs ;

« 3° A augmenter les pensions des veuves de décorés de la croix de Fer et de blessés de septembre, proportionnellement à l'augmentation qui sera accordée aux décorés et blessés, jusqu'au chiffre maximum de 400 francs. »

La section centrale propose de rédiger la note ainsi qu'il suit :

« 1° A desservir de nouvelles pensions ;

« 2° à augmenter la pension des décorés de la croix de Fer jusqu'à ce qu'elle atteigne le maximum de 1,200 francs et celle des blessés de septembre, non décorés, jusqu'à ce qu'elle atteigne le maximum de 400 francs ;

« 3° à augmenter les pensions des veuves et des décorés de la croix de Fer et des blessés de septembre, proportionnellement à l'augmentation qui sera accordée aux décorés et blessés au chiffre maximum de 400 francs pour les premières et au chiffre maximum de 300 francs pour les dernières. »

- Le n° 1° est adopté.

Le n° 2°, tel qu'il est libellé par la section centrale, est ensuite adopté.

La discussion est ouverte sur le n° 3°, tel qu'il est libellé par la section centrale.

M. Vandenpeereboom. - Si je comprends bien l'amendement de la section centrale, elle persiste à croire qu'il n'y a plus lieu d'accorder de nouvelles pensions à des blessés. Or, il me semble que s'il en est ainsi, il faudra changer la rédaction que la section centrale propose.

Ainsi, il est dit :

« 1° A desservir de nouvelles pensions. »

Cela est général ; cela peut s'appliquer aux décorés et aux blessés.

Le n° 2° porte :

« 2° A augmenter la pension des décorés de la croix de Fer jusqu'à ce qu'elle atteigne le maximum de 1,200 francs, et celle des blessés de septembre non décorés, jusqu'à ce qu'elle atteigne le maximum de 400 francs. »

Il doit être bien entendu que la décision prise antérieurement de ne plus accorder de nouvelles pensions à des blessés de septembre est maintenue.

M. De Lehaye, rapporteur. - Messieurs, il est incontestable que l'opinion de la section centrale est celle que vient d'énoncer l'honorable préopinant ; mais je crois que le changement de libellé indiqué par l'honorable membre n'est pas nécessaire.

Les blessés qui ne jouissent pas aujourd'hui d'une pension ne peuvent plus en obtenir. C'est en vertu de la loi de 1862 qu'il leur est interdit de prendre une part de l'allocation portée au budget. Par conséquent, il est inutile de faire une restriction à cet égard, attendu qu'elle est faite par la loi elle-même. II est donc impossible désormais d'accorder une pension à des blessés qui ne figureraient pas déjà au budget.

Si parmi ceux qui n'ont point de pensions il en est qui ont besoin d'un secours, c'est à l'article suivant qu'il faudra prendre la somme nécessaire, mais nullement sur la somme allouée aux décorés et aux blessés.

- L'article est adopté.

Article 50

« Art. 50. Subside au fonds spécial des blessés de septembre et à leurs familles ; charge extraordinaire : fr. 22,000. »

- Adopté.

Chapitre XI. Agriculture

Article 51

« Art. 51. Indemnités pour bestiaux abattus : fr. 240,000.

« (Une somme de 40,000 francs pourra être transférée de l'article 51 aux articles 53 et 54.) »

M. le président. - La section centrale propose de modifier le libellé de cet article.

Elle propose de dire : « Une somme de 40,000 francs pourra être transférée de l'article 51 aux articles 53 et 54, pour autant que cette somme reste disponible après le payement des indemnités. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Articles 52 à 54

« Art. 52. Service vétérinaire ; police sanitaire ; bourses : fr. 60,000. »

- Adopté.


« Art. 53. Amélioration des races d'animaux domestiques : fr. 85,000. »

- Adopté.


« Art. 54. Conseil supérieur et commissions provinciales d'agriculture ; traitements et indemnités des secrétaires du conseil supérieur et des commissions provinciales d'agriculture ; subsides pour concours et expositions ; encouragements aux sociétés et aux comices agricoles ; encouragements aux publications agricoles et horticoles ; frais résultant de la collation des décorations agricoles ; frais de missions ayant pour objet l'intérêt de l'agriculture et de l'horticulture ; dépenses diverses : fr. 140,700. »

- Adopté.

Article 55

« Art. 55. Personnel de l'institut agricole et des écoles d'horticulture de l'Etat ; traitements de disponibilité : fr. 70,500. »

M. Drubbel.- Messieurs, j'ai annoncé, dans une précédente séance, que j'aurais des explications à demander à M. le ministre de l'intérieur, au sujet de l'école d'horticulture de l'Etat à Gand.

Comme vous le savez, messieurs, l'école d'horticulture de l'Etat est annexée au brillant établissement privé de M. Van Houtte à Gentbrugge.

Cette année-ci, les cours ne se sont pas ouverts, parce que le gouvernement s'est trouvé dans la nécessité de rompre avec le directeur de cet établissement.

De là les bruits qui circulaient à Gand que le gouvernement songeait à transférer cette école dans une autre localité. Emu de ces bruits, je m'adressai à M. le ministre de l'intérieur, qui me rassura à cet égard ; je saisis alors cette occasion et je pris la liberté de lui communiquer une idée qui m'avait été suggérée par un honorable professeur de l'université de Gand d'annexer cette école au Jardin Botanique, c'est-à-dire à l'université. Il me semblait à moi que tout devait être profit dans cette nouvelle organisation et qu'il valait mieux que l'école subsistât par elle-même, relevant directement de l'Etat, au lieu d'être annexée à un établissement particulier dont les intérêts pouvaient parfois être contradictoires.

En conséquence je pris la liberté, je le répète, de remettre à M. le ministre de l'intérieur une note renseignant les moyens de réaliser cette idée. Il devait en résulter, d'après l'auteur de la note et d'après moi, non seulement une économie, mais une plus grande prospérité pour l'établissement lui-même.

Je demanderai donc à M. le ministre s'il a examiné cette proposition ; je lui demanderai également si, d'une façon générale, le gouvernement a pris une décision au sujet de l'école d'horticulture et plus spécialement si l'école sera conservée à Gand, ou s'il est aucunement question de la transférer dans une autre-localité.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - A coup sûr, messieurs, le gouvernement ne pouvait pas songer à enlever à la ville de Gand, qu'on a souvent nommée la cité de Flore, un établissement à la possession duquel elle a tant de titres. Mais il est vrai que l'établissement public qui était réuni jusqu'à ce moment à un établissement particulier, qui formait l'annexe d'une spéculation privée, n'a pas répondu aux espérances du gouvernement. Depuis plusieurs années, des difficultés nombreuses se sont élevées, et tout récemment, j'ai été obligé de rompre le contrat qui confiait la direction de l'établissement horticole de l'Etat à un jardinier, M. Van Houtte. Mais il est évident que la rupture de ce contrat ne peut pas entraîner un instant, je le répète, chez le gouvernement la pensée de placer ailleurs cette école horticole, et j'ai eu moi-même l'honneur de demander un rapport développé à un professeur de l'université de Gand dont l'autorité en cette matière est considérable.

Il me semble évident, après avoir pris connaissance de ce rapport, qu'aucune mesure meilleure ne saurait être prise que de réunir cet établissement horticole au Jardin Botanique de Gand. On aurait là, à la fois, sous le rapport du matériel et du personnel, toutes les garanties désirables. Il importe, selon moi, que les élèves jardiniers qui appartiennent non seulement à la Belgique, mais qui nous viennent aussi en grand nombre de l'étranger, trouvent, à côté de l'enseignement pratique, des notions scientifiques qui assurent à leur avenir, à leur position, à leurs travaux, quelque chose de supérieur à un simple travail manuel. Je crois que c'est par la double action de l'influence du personnel de l'université et des ressources que présente le Jardin Botanique de cette ville qu'on peut espérer d'atteindre le mieux ce résultat.

Si la Chambre s'associe à cette opinion, l'un des premiers devoirs du gouvernement sera d'exécuter cette pensée et de transférer l'établissement horticole, jusqu'à ce moment confié au sieur Van Houtte, au Jardin botanique de Gand. J'espère que, par cette amélioration qui sera considérable, nous parviendrons à donner un lustre nouveau à un enseignement qui, en Belgique, et à Gand notamment, a fait des progrès si notables, si dignes d'être encouragés.

(page 740) M. Vandenpeereboom. - L'honorable ministre de l'intérieur vient de nous dire que l'établissement d'horticulture de Gand n'a pas répondu aux espérances du gouvernement. Je ne sais pas ce qui a pu se passer depuis quelques années ; mais pendant fort longtemps, j'ai entendu dire que cet établissement répondait, au contraire, à l'attente du gouvernement. Les rapports que l'on faisait étaient très favorables. Il est sorti de cette école beaucoup d'élèves distingués, qui sont fort recherchés. Aux cours pratiques étaient d'ailleurs annexés des cours théoriques. L'établissement semblait donc bien marcher.

Je ne puis contester ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur, parce que je ne sais ce qui peut s'être passé depuis lors. Je ne puis pas juger si oui ou non cet établissement a démérité et s'il y a des motifs pour le supprimer. Mais j'ai reçu avec satisfaction l'assurance que vient de donner le gouvernement que l'école d'horticulture de Gand ne sera pas supprimée.

Je tiens encore plus aux choses qu'aux hommes. Je suppose que le gouvernement n'a pas retiré l'adoption, si je puis parler ainsi, de l'école de M. Van Houtte, sans certaines raisons. Mais je désire en tout cas, et j'en ai maintenant presque la certitude, que l’enseignement horticole continue à être donné.

J'ai cependant, messieurs, certaines réserves à faire contre l'idée qui vient d'être émise par l'honorable ministre de l'intérieur et par l'honorable M. Drubbel. Il est possible que l'adjonction de l'école d'horticulture au Jardin Botanique de Gand puisse se faire ; mais il est impossible que la Chambre donne, dès aujourd'hui, son adhésion à ce projet ; il faut savoir de quelle manière cela pourra se faire, combien cela coûtera, comment on logera les élèves : tout cela demande un examen.

L'honorable ministre nous a dit : Si la Chambre partage cet avis, je passerai outre. Je pense que la Chambré n'a pas, en ce moment, à émettre un avis ; il faut un projet arrêté. Lorsque M. le ministre présentera ce projet, il nous dira sans doute pourquoi il a réalisé le contrat.

Je ne critique rien, je ne demande pas même d'explications immédiates, mais je crois qu'en temps et lieu, il faudra dire pourquoi l'on fait ce changement et comment on le fera. Jusque-là nous ne pouvons pas même donner un conseil au gouvernement. Le gouvernement doit conserver sa pleine responsabilité et la Chambre son entière liberté.

M. Kervyn de Volkaersbeke. - L'honorable ministre de l'intérieur vient de nous dire que l'école d'horticulture sera maintenue à Gand. Dans une séance précédente, sur une interpellation que j'ai eu l'honneur de lui adresserai à bien voulu m'assurer que la ville de Gand conserverait cet établissement et je n'ai pas besoin d'ajouter que cette déclaration a calmé les inquiétudes que de faux bruits avaient fait naître.

Aujourd'hui, l'honorable ministre annonce un nouveau projet : l'école d'horticulture ne sera plus annexée à l'établissement de M. Van Houtte ; mais le gouvernement se propose de la déplacer et d'en faire une annexe de l'université. Je n'ai point à examiner l'utilité de cette mesure.

Cependant, messieurs, je tiens à constater que si cette école a acquis une réputation européenne, c'est à son excellent enseignement qu'elle la doit. Eh bien, je demanderai à M. le ministre de l'intérieur s'il entre dans les intentions du gouvernement de conserver également le corps professoral, qui a si dignement et si complètement répondu à son attente ? (Interruption.)

Je ne cite aucun nom ; je veux seulement rappeler à la Chambre les services rendus par le corps. professoral et je demande au gouvernement s'il entre dans ses intentions de le maintenir ? Il me semble que la ville de Gand doit être éclairée à cet égard, car l'école d'horticulture est une de ses plus belles gloires et elle en est fière à juste titre.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Le gouvernement et les Chambres ont donné divers gages de sympathie à l'école de Gentbrugge. Son existence a été consacrée par la loi de 1860, par un arrêté royal et par un arrêté ministériel. Il est incontestable que l'établissement de M. Van Houtte jouit d'une réputation européenne ; il a formé un grand nombre de bons élèves, il a compté d'excellents professeurs ; mais d'un autre côté, il n'est pas moins vrai que l'établissement n'a plus offert les mêmes garanties ni les mêmes succès dans ces dernières années.

D'excellents professeurs ont quitté cet établissement. Il y a eu des conflits entre, la commission de surveillance et le directeur, et cet établissement qui était florissant il y a quelques années, s'est trouvé à peu près complètement annihilé. Je demande à la Chambre de lui en donner la preuve par quelques chiffres.

Il y a quelques années, il y avait dans cet établissement vingt élèves, ce qui n'était déjà pas considérable.

En 1868, ce nombre est descendu à 13 ; en 1869, il n'était plus que de 8 et l'année dernière, il était réduit à 7.

Voilà donc une situation déplorable pour un établissement de l’Etat qui a été consacré par des votes de la législature et par plusieurs mesires importantes que je viens de rappeler.

La commission de surveillance, l'administration provinciale et toutes les autorités consultées ont été unanimes à déclarer qu'il y avait, pour le gouvernement, un devoir urgent de mettre un terme à cet état de choses.

C'est à ce point de vue que je me suis placé en dénonçant à M. Van Houtte la rupture du contrat et ce sera en me préoccupant des intérêts de l'enseignement horticole dont l'honorable M. Vandenpeereboom a fait ressortir l'importance, que j'ouvrirai des négociations avec l'université de Gand pour transférer cet enseignement au Jardin Botanique, où l'on pourra utiliser l'expérience des professeurs actuels et profiter aussi de celle des hommes éminents qui font partie du personnel de l'université de Gand.

Je n'entends pas du reste engager le moins du monde la responsabilité de la Chambre dans les mesures que le gouvernement prendra, et lorsque tout à l'heure j'ai fait allusion à l'appui sympathique que j'espérais rencontrer, c'était surtout au point de vue de cet enseignement horticole qui, à faut ne pas l'oublier, est une des gloires de là Belgique.

- L'article est adopté.

Articles 56 à 60

« Art. 56. Matériel des établissements d'enseignement agricole et horticole ; frais des commissions de surveillance et des jurys ; bourses ; frais de conférences agricoles et horticoles : fr. 71,000. »

- Adopté.


« Art. 57. Personnel du service des défrichements en Campine ; charge extraordinaire : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 58. Mesures relatives aux défrichements, dépenses et indemnités nécessitées par le contrôlé établi pour assurer l'exécution de la loi du 25 mars 1847. Pépinières d'arbres forestiers ; charge extraordinaire : fr. 27,000. »

- Adopté.


« Art. 59. Personnel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat ; frais de la commission de surveillance : fr. 62,000. »

- Adopté.


« Art. 60. Matériel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat ; bourses ; jury vétérinaire : fr. 69, 800. »

- Adopté.

Article 61

« Art. 61. Jardin Botanique : frais du personnel, du matériel et de culture ; réparation et entretien des bâtiments : fr. 36,000. »

M. Vleminckx. - Messieurs, si je ne me trompe, la section centrale désire qu'on ajoute au libellé les mots suivants :

« L'herbier de M. Martius et les collections végétales de l'Etat qui ne sont pas utilisées dans des établissements d'instruction publique seront réunis au Jardin Botanique. »

Je ne pense pas que la section centrale insiste pour que cette déclaration soit mise dans le libellé. Voici pourquoi.

Est-on bien sûr qu'il y ait assez de place au Jardin Botanique, pour y mettre non seulement les collections de M. Martius, mais celles qui ne peuvent pas être utilisées pour l'enseignement ?

Quant à moi, je n'en sais rien.

Vous vous engagez, en votant cette déclaration, à faire dèes dépenses pour une institution dont vous ne pouvez connaître dès à présent le montant.

D'ailleurs, c'est là une question d'un ordre purement administratif et dont la législature n'a pas à s'occuper. L'administration peut vouloir réunir aujourd'hui ces collections au Jardin Botanique, mais demain l'intérêt de l'Etat peut exiger qu'elles soient placées ailleurs.

M. le président. - Je ferai observer à M. Vleminckx que la proposition a été faite dans la section centrale, mais que celle-ci ne propose pas de l'adopter.

M. Vleminckx. - Pardon ; je lis dans le rapport :

« Et pour qu'à cet égard il n'y ait plus aucun doute, la section centrale propose d'insérer dans la colonne d'observations la note suivante :

« L'herbier de M. Martius et les collections végétales de l'Etat qui ne sont pas utilisées dans des établissements d'instruction publique seront réunis au Jardin Botanique. »

D'un autre côté, la destination définitive du Jardin Botanique n’est pas encore décidée.

(page 741) Je demande donc que l'observation proposée par la section centrale ne soit pas inscrite au budget. Je le répète, si l'herbier de Martius et d'autres encore peuvent être placés au Jardin Botanique, je ne demande pas mieux qu'on ne les y place, mais il n'est pas prouvé que cela est possible sans constructions nouvelles, sans dépenses nouvelles dont la hauteur nous est inconnue. Et vous ne pouvez pas par une simple note insérée au budget, à côté du libellé, engager le gouvernement et le pays dans une charge qui peut être considérable.

M. Dumortier. - La proposition de M. Vleminckx ne peut pas être acceptée par la Chambre.

Voici les faits : d'abord, lorsque l'herbier Martius a été acheté, l'Etat n'était pas encore en possession du Jardin Botanique. La loi portant l'acquisition du Jardin Botanique s'est faite sous le ministère précédent, par M. Pirmez, un mois ou deux après l'acquisition de l'herbier Martius.

L'herbier acheté, il fallait le payer et il fallait pour cela rattacher cette dépense à un poste du budget. On ne pouvait pas la rattacher au poste du Jardin Botanique, attendu que le poste du Jardin Botanique était, à cette époque, une subvention à la société propriétaire et que c'eût été faire cadeau de l'herbier à la société.

Dès lors, il a fallu rattacher cette dépense à un autre article du budget et on l'a rattachée à l'article : « Archives de l'Etat. » (Interruption.)

C'est positif. Mais quand nous sommes arrivés à la discussion, j'ai fait remarquer à la Chambre que l'herbier ne pouvait pas être réuni à des archives, et comme il y avait un poste pour le musée d'histoire naturelle, on l'a fait figurer là. Mais il a été formellement stipulé dans la discussion que cela ne préjugeait en rien la disposition définitive de l'herbier. Les rapports sur l'acquisition du Jardin Botanique faits à la Chambre et au Sénat déclarent tous deux que l'herbier doit être réuni au Jardin des plantes.

Tout le monde comprend, en effet, qu'un herbier n'a d'autre place que le Jardin botanique.

M. Boucquéau. - Et le musée ?

M. Dumortier. - Oh ! le musée.

M. Boucquéau. - Les trois règnes doivent y être.

M. Dumortier. - Peut-on mettre un herbier avec des fossiles et des bêtes ? On met les plantes avec les plantes et les bêtes avec les bêtes.

Voilà, messieurs, ce qui se fait dans tous les pays ; voilà ce qui est conforme au plus vulgaire bon sens.

La raison veut que les collections végétales soient réunies où se trouvent les végétaux et je vois que l'honorable M. Vleminckx, qui est président de l'académie de médecine, reconnaît que cela est conforme aux convenances.

Comment voulez-vous étudier une science si vous n'avez pas sous la main tous les éléments qui s'y rapportent, si vous devez chercher les plantes vivantes d'un côté, les plantes sèches d'un autre côté ? Cela n'est évidemment pas possible.

Une question de légalité a été cependant soulevée : on a prétendu que comme les fonds consacrés à l'acquisition de l'herbier Martius avaient été votés au poste « Musée d'histoire naturelle », c'était là que l'herbier devait être placé. Ce serait une chose souverainement ridicule, et c'est pour trancher cette question de légalité que la section centrale a proposé d'ajouter au budget la note dont M. le président vient de donner lecture et que j'adjure la Chambre d'adopter, à moins que M. le ministre de l'intérieur ne se croie autorisé à opérer le transfert de lui-même.

Je passe à la seconde objection : On demande si le Jardin Botanique a des locaux suffisants pour recevoir l'herbier Martius et les autres herbiers qui n'appartiennent pas aux universités de l'Etat et aux écoles spéciales ; car il ne peut pas être question d'enlever aux universités de Gand et de Liège et à l'école de Gembloux les collections de botanique qu'elles possèdent.

La capitale a le droit d'avoir un Jardin Botanique complet comme on en trouve dans toutes les grandes capitales : Paris, Londres, Vienne, Berlin, etc. La seule question à résoudre est donc de savoir si notre Jardin Botanique possède les locaux suffisants pour contenir les collections qui doivent nécessairement y trouver place, les herbiers de Martius, de Lejeune, de Scheidweiler, de Polart de Canivri, etc.

Eh bien, je puis déclarer que notre Jardin Botanique contient deux ou trois fois autant de locaux qu'il en faut. Sous ce rapport donc, aucune difficulté n'est à redouter. L'honorable M. Warocqué, membre comme moi de la commission du Jardin Botanique, pourra, s'il est nécessaire, confirmer cette assertion.

Je pense donc, messieurs, que nous devons respecter la pensée qui a dicté l'acquisition du Jardin Botanique. On a voulu faire quelque chose de grand dans la capitale. Or, cela n'est possible qu'à la condition de réunir dans un même local tout ce qui a trait à la botanique.

J'engage donc la Chambre à voter la proposition de la section centrale. à n'y a aucun motif sérieux de s'y opposer puisque, je le répète, le Jardin Botanique de Bruxelles possède deux ou trois fois autant de locaux qu'il en faut pour recevoir les collections dont il s'agit. Si cependant M. le ministre de l'intérieur déclarait qu'il est prêt à réunir ces herbiers au jardin, dans ce cas je n'en verrais pas la nécessité.

M. De Lehaye, rapporteur. - Je ne puisque me référer à ce que vient de dire l'honorable M. Dumortier. La section centrale n'a eu qu'un but ; c'était d'enlever au musée d'histoire naturelle l'herbier Martius, parce que ce n'est évidemment point là sa place. Comme l'a dit l'honorable M. Dumortier, il faut que le Jardin Botanique, propriété de l'Etat, réponde à sa haute destination. Il faut donc que tout ce qui a trait à la science botanique soit réuni au Jardin Botanique. Par notre proposition, nous voulons calmer des craintes qui se sont répandues dans la capitale ; nous voulons répondre à l'appréhension de voir sacrifier le magnifique panorama de ce jardin. C'est dans ce but que nous avons proposé l'insertion de la note dont il vient d'être question.

Maintenant, si le gouvernement partage l'avis de la section centrale et s'il consent à faire transférer immédiatement l'herbier Martius au Jardin Botanique, cette note deviendrait tout à fait inutile. Il serait même préférable qu'on pût se dispenser de l'insérer, attendu que le budget étant annuel, il faudrait reproduire cette note au budget futur.

Mais il doit être bien entendu que tous les herbiers qui ne sont pas à la disposition des universités de l'Etat devront être transférés au Jardin Botanique.

M. Pirmez. - Messieurs, il appartient au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour l'administration des collections qui sont la propriété de l'Etat. Ces mesures ne peuvent être permanentes. Elles peuvent changer d'après les circonstances, d'après les locaux disponibles. Il ne me paraît pas que la Chambre doive à cet égard lier le gouvernement. Nous devons laisser au gouvernement la liberté et la responsabilité des mesures qu'il a à prendre à ce sujet.

Je fais cette observation parce qu'il me paraît imprudent d'attacher le Jardin Botanique à une destination définitive.

Lorsqu'on a fait l'acquisition du Jardin Botanique, on ne s'est pas fixé d'une manière irrévocable sur sa destination. Le gouvernement devrait faire connaître ses intentions à la Chambre. Aussi, je saisis cette occasion pour demander à M. le ministre de l'intérieur s'il a étudié la question et quelles sont ses intentions à l'égard du Jardin Botanique.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Messieurs,' une question s'est présentée tout d'abord : c'est celle de savoir si le Jardin Botanique est assez étendu pour recevoir l'herbier de Martius.

Je n'hésite pas à croire que le Jardin Botanique peut suffire à cette destination, à la condition que ce jardin conservera le caractère qui lui a été primitivement attribué.

Il s'est agi, dans ces derniers temps, de modifier le Jardin Botanique, d'introduire dans le matériel des bâtiments certains changements importants, de déplacer les serres, d'en modifier les dimensions et l'étendue.

Le gouvernement considère le Jardin Botanique comme une des plus belles institutions de la capitale, et je crois qu'on ne pourrait le modifier, sans en dénaturer le caractère, ce qui serait profondément regrettable.

Je pense donc qu'il faut que le Jardin Botanique reste ce qu'il est aujourd'hui.

Tout récemment, j'ai été amené à reconnaître que le crédit inscrit d'abord au budget était insuffisant pour atteindre ce but. A la fin de 1870, une convention provisoire avait été conclue ; on a donc fait une expérience, et c'est à la suite de cette expérience que je viens demander à la Chambre un crédit de 49,000 francs, dont 45,000 comme allocation ordinaire, et 4,000 comme allocation temporaire.

Le crédit extraordinaire se justifie parfaitement. Il est hors de doute que, dans ce moment-ci, le Jardin Botanique se trouve dans un très grand état de délabrement. Je ne veux pas rechercher, messieurs, comment les choses se sont passées ; mais il est certain qu'un grand nombre de plantes ont été vendues, que les plates-bandes sont tout à fait dégarnies et que, pour placer le jardin dans un état convenable, il faudra faire des dépenses qu'on ne peut pas appeler des dépenses ordinaires, mais des dépenses extraordinaires. C'est à ce point de vue que se justifie le crédit spécial de 4,000 francs, qui serait inscrit au budget comme crédit extraordinaire.

Je pense, messieurs, que si le Jardin Botanique, grâce a une (page 742) administration intelligente, parvient ainsi à répondra à ce qu'on est en droit d'exiger d'un établissement situé au centre de la capitale, s'il possède des collections scientifiques importantes, et si tout à côté l'organisation de la Flore végétale répond également a ce que le gouvernement et la Chambre se proposent, cet établissement méritera la sollicitude du pays tout entier.

Placé au centre de la capitale, dans une situation admirable, il restera le but du mouvement des étrangers, du mouvement des nombreux visiteurs qui se porteront sans cesse de ce côté pour admirer et son site et ses richesses.

On y rencontrera a la fois l'enseignement scientifique et l'enseignement pratique ; à côté de collections scientifiques spéciales, on aura le spectacle des travaux que s'imposent nos horticulteurs pour témoigner qu'ils comprennent l'importance de la mission qui leur est confiée.

Cette tâche, messieurs, nous chercherons à la réaliser et j'espère que la Chambre n'hésitera pas à voter ce crédit de 49,000 francs, qui n'est guère, je le répète, que la reproduction de celui qui a été voté l'année dernière en vertu de la convention conclue à cette époque et dont l'expérience a déjà démontré l'utilité et même la nécessité.

M. Orts. - L'opinion qui vient d'être émise par mon honorable collègue et ami M. Pirmez, me force à formuler des réserves au sujet des obligations que la convention à laquelle il a été fait allusion impose au gouvernement.

Je ne crois pas, messieurs, qu'il soit exact de dire que le gouvernement est parfaitement libre de donner au Jardin Botanique de Bruxelles une destination autre que celle qu'elle a aujourd'hui. Je ne crois pas que le gouvernement soit libre de supprimer le Jardin Botanique comme établissement consacré à l'étude de la science, ni comme jardin accessible, dans une certaine mesure et à titre de lieu de promenade, au public.

Le Jardin Botanique a fait l'objet d'une convention entre trois parties contractantes : l'Etat d'un côté, la ville de Bruxelles de l'autre et la société entre les mains de laquelle se trouvait le Jardin Botanique à cette époque. Si mes souvenirs sont exacts, il a été, de la part de la ville de Bruxelles, formellement entendu que son adhésion à cette convention était subordonnée au maintien du Jardin Botanique à sa destination scientifique et d'agrément et de plus au maintien du magnifique panorama qui constitue incontestablement l'un des grands intérêts de cet établissement.

Je pense donc que c'est dans ces conditions que la convention doit être exécutée.

M. Pirmez. - Il est évident, messieurs, que lorsque j'ai dit que le gouvernement était absolument libre de faire ce qu'il voulait, je n'ai pas entendu porter atteinte à la convention qui a été faite.

M. Orts a cru devoir faire des réserves sur la manière dont doit être interprétée cette convention ; je crois, messieurs, qu'il suffit, pour lever tout doute, d'examiner le texte, qui est très formel.

M. Orts. - La convention dit que le. jardin sera conservé à sa destination actuelle.

M. Pirmez. - C'est inexact. Il faut conserver le jardin à une destination publique et ne pas supprimer le panorama. Mais le gouvernement est parfaitement maître de consacrer les locaux qui servent aujourd'hui de serre,, aux expositions ou à ce que l'on a appelé le palais des beaux-arts. (Interruption.) Je ne dis pas qu'il faut le faire, mais je dis que le gouvernement a le droit de le faire.

Je sais très bien que quand le jardin a été acheté, on a voulu imposer au gouvernement toutes sortes de conditions. La société elle-même a voulu imposer au gouvernement certaines conditions, ce que j'ai toujours refusé d'admettre, parce que j'aurais plutôt rompu le contrat que d'admettre qu'une société particulière vînt dicter des lois au gouvernement. Deux réserves seulement ont été faites ; c'est qu'on ne ferait pas du Jardin Botanique une spéculation de terrains à bâtir, mais qu'on lui conserverait une destination publique ; c'est ensuite qu'on ne détruirait pas le panorama. Mais je ne sais pas pourquoi si, après examen, l'on trouvait qu'on peut construire, dans le prolongement du bâtiment et en élevant le sol, une salle qui servirait aux réunions publiques et qui, avec les salles déjà existantes, constituerait un local suffisant pour y faire les expositions de tableaux, l'Etat ne pourrait pas le faire ou pourquoi la ville de Bruxelles y ferait opposition.

Je crois que la ville de Bruxelles doit tenir à avoir un palais des beaux-arts, et à l'avoir dans la situation la plus centrale possible. Or, à cet égard le Jardin Botanique constitue un emplacement admirable. (Interruption.)

Je ne dis pas qu'il faut réaliser ce projet ; mais je crois qu'il est prudent qu'on ne se lie pas et que le gouvernement conserve à cet égard la plénitude de ses droits pour faire ce que l'avenir dira être le meilleur et le plus avantageux aux sciences, aux arts, à tous ces grands intérêts auxquels il est chargé de veiller.

M. Dumortier. - Je crois que l'honorable M. Pirmez ne se rappelle pas complètement les faits qui se sont passés. Ce qu'il vient d'indiquer appartient réellement à la première phase de l'acquisition du Jardin Botanique. Mais les choses ont été tout à fait transformées dans la seconde phase et alors elles sont complètement entrées dans la voie que vient d'indiquer l'honorable M. Orts.

Voici les faits :

Il fallait à l'Etat, pour acquérir le Jardin Botanique, l'assentiment d'abord des actionnaires, en second lieu l'assentiment de la ville, en troisième lieu l'assentiment des Chambres. L'Etat faisait là une magnifique opération, puisqu'il achetait un terrain dont on offrait 6 millions pour le prix d'un million ; il acquérait, pour cette modique somme, un terrain de cinq hectares et demi situé au milieu de la capitale.

J'avais alors l'honneur d'être commissaire du gouvernement près du Jardin Botanique, et je me suis mis en rapport, à ce sujet, avec l'honorable M. Frère, ministre des finances et avec l'honorable M. Pirmez, ministre de l'intérieur. Comment les faits se sont-ils passés ?

A la première réunion des actionnaires, on est venu dire qu'il était question de supprimer les magnifique serres qui forment le plus beau panorama de Bruxelles. Vous savez que ces serres sont une des plus magnifiques choses qui existent en Belgique. Vous avez, à Bruxelles, comme le disait Victor Hugo, deux choses incomparables que. vous ne retrouverez nulle part : c'est la Grand-Place et c'est le Jardin Botanique. Ce sont les deux joyaux, les deux bijoux de la capitale.

Aussi, tous les actionnaires, en entendant dire qu'il était question de supprimer les serres, déclarèrent-ils qu'ils refusaient de les vendre. On alla aux voix et la vente fut rejetée. Heureusement on n'était pas en nombre pour délibérer.

Une seconde réunion eut lieu. J'ai commencé la seconde phase, et alors l'honorable M. Pirmez, tout en maintenant le principe qu'il vient d'indiquer tout à l'heure, qu'une, société ne peut pas imposer des lois au gouvernement, écrivit une lettre que je n'ai pas en ce moment sous les yeux, mais que vous trouverez imprimée dans les documents de la Chambre et dans laquelle il déclarait de la manière la plus formelle que le Jardin botanique conserverait sa destination actuelle et que 1e panorama, c'est-à-dire les magnifiques serres, seraient conservées. La lettre est jointe à mon rapport.

M. Pirmez. - Le panorama, oui ; mais la destination actuelle, non.

M. Dumortier. - Cela se trouve tout au long dans votre lettre. Qu'entendez-vous par le panorama ? Evidemment ce sont les grandes serres. Eh bien, si vous conservez les serres, évidemment vous conservez le Jardin Botanique. Cela est clair.

Maintenant, peut-il entrer dans la pensée de quelqu'un de supprimer ce qui fait la beauté de la capitale ? Cela me paraît impossible. Eh bien, le Jardin Botanique de Bruxelles est un monument, une véritable merveille, qui n'a son pareil dans aucune capitale du monde, et la suppression de ce monument serait une véritable dégradation.

J'arrive à la deuxième réunion. Là nous obtînmes un vote approbatif au moyen de la lettre de M. le ministre de l'intérieur ; mais la résistance était encore telle, que la majorité n'a été que de six voix sur deux cents votants, tellement les habitants de Bruxelles étaient opposés à la suppression du Jardin Botanique.

On disait : Nous vous faisons un cadeau, nous vous donnons pour un million ce qui vaut six millions, mais il faut que le jardin soit conservé. Quant à moi, je félicite l'honorable M. Kervyn de la déclaration qu'il a faite à cet égard. Vous avez un monument qui n'existe dans aucune capitale et vous saurez le conserver. Vous ne céderez pas à la pression de quelques hommes qui voudraient s'en emparer pour faire leurs petites affaires.

Ceci posé, nous comprenons, messieurs, combien il est indispensable de réunir dans cet établissement toutes les richesses de la science botanique, et l'herbier de Martius et l'herbier de Lejeune, l'herbier de Scheidweiler, l'herbier de Pollart de Canivri et les autres disséminés dans diverses établissements étrangers à la botanique.

Il faut faire dans notre capitale quelque chose qui soit à la hauteur de la science.

Je pense donc que la Chambre ne peut pas se refuser à voter le libellé proposé par la section centrale, à moins que M. le ministre ne déclare que ce libellé est inutile.

M. Vandenpeereboom. - Je suis disposé à voter le crédit demandé, pour le service du Jardin Botanique ; cependant je crois qu'il est impossible, (page 743) après le discours de l'honorable M. Dumortier, qu'il ne s'élève pas une voix pour conserver les droits du gouvernement et les droits de la Chambre.

Nous ne pouvons pas nous engager à ce que la propriété achetée par le gouvernement doive servir à tout jamais de Jardin Botanique et ne puisse, à une époque quelconque, recevoir une autre destination.

Quant à ce que l'honorable M. Dumortier a dit de la beauté du panorama, cela est tout à fait indépendant de la destination de la propriété. Je demanderai si le panorama n'existerait plus, si l'aspect serait moins beau parce que, au lieu d'avoir dans les serres des plantes, on y aurait de bons tableaux ?

Que veut-on ? Qu'a-t-on stipulé dans toutes les conventions ? C'est la conservation du point de vue.

Quant à l'établissement scientifique en lui-même, je crois qu'en général on y a attaché une importance beaucoup plus secondaire dans le public.

Dans mon opinion, il n'y a pas d'endroit qui convienne mieux pour établir un palais des beaux-arts que l'emplacement du Jardin Botanique actuel.

On peut, en y ajoutant quelques constructions et en conservant l'aspect général, y placer des statues, y ouvrir des expositions.

Il n'y a pas de situation plus centrale et où il soit possible de faire un palais des beaux-arts à moins de frais.

Mais on finira par le placer à un quart de lieue de Bruxelles et l'on sera obligé, pour y aller, d'avoir un chemin de fer américain.

Or, il importe que le palais des beaux-arts soit, autant que possible, au centre de la capitale.

Quant au Jardin Botanique, il importe peu, au point de vue scientifique, qu'il soit au centre. Il vaudrait même mieux, à certains égards, qu'il fût un peu à l'écart.

Les savants comme l'honorable M. Dumortier, qui vont au Jardin Botanique, peuvent y être dérangés par le bruit des voitures, par la circulation des personnes, par les jeux des enfants ; ils pourraient même étudier d'une manière plus fructueuse, si le Jardin Botanique était établi, je suppose, au bois de la Cambre.

Je ne veux pas engager le gouvernement à préjuger la question en ce moment, mais je demande que le gouvernement ne se lie pas d'une manière définitive.

On a nommé une commission, si je ne me trompe, pour étudier tout ce qui concerne la question du palais des beaux-arts.

En attendant, je voterai le crédit, et j'en voterai probablement encore plusieurs autres, par cela même qu'une commission est saisie de la question ; mais je suis persuadé que cette commission et celle qui sera peut-être appelée après elle à se prononcer sur le même point seront obligées de reconnaître qu'il n'y a pas d'emplacement plus convenable pour un palais des beaux-arts que le Jardin Botanique.

Mon but est donc de faire mes réserves et d'engager le gouvernement à ne pas se lier en cette matière.

M. Dumortier. - Messieurs, ma réponse à l'honorable M. Vandenpeereboom sera très facile. C'est que si les idées qu'il a émises dans le discours qu'il vient de prononcer avaient été indiquées lors de l'acquisition du Jardin Botanique, l'Etat n'aurait jamais eu cet établissement. La société l'a vendu sur la foi que jamais le gouvernement n'en changerait la destination. Et vous voudriez faire disparaître cette condition et dire a la ville de Bruxelles et aux 400 vendeurs : Nous allons établir le Jardin Botanique au bois de la Cambre.

Je dis, messieurs, que ce serait manquer à l'engagement pris à la foi promise.

Que vient-on nous dire ?

Les serres serviront à la création de salles pour les expositions triennales, c'est-à-dire que tous les trois ans, on s'en servira pendant trois mois. Et, pendant deux ans et neuf mois, on aura donc des locaux vides ! Ce sera fort beau et fort édifiant.

Un palais des beaux- arts, messieurs, doit pouvoir servir à toutes les destinations possibles, mais vous vous imaginez que vous pouvez faire une exposition dans des serres chaudes ! Y pensez-vous ? Est-ce qu'on a jamais mis des tableaux dans des serres chaudes ? On mettra probablement alors les plantes dans le palais des beaux-arts. (Interruption.)

Oh ! je trouve qu'il y a bien lieu de rire et je ris avec vous.

Je dis donc qu'il faut laisser chaque chose à sa destination.

Vous êtes en possession à Bruxelles d'une vraie merveille ; ce palais de cristal, dominé par cette coupole en bronze, est une chose sans égale que vous devez respecter par patriotisme et par amour de la capitale. S'il vous faut un palais des beaux-arts, cherchez un emplacement, mais ne venez pas détruire ici pour rebâtir ailleurs.

M. Vandenpeereboom nous dit qu'on peut mettre le Jardin Botanique au bois de la Cambre. Je vous dirai : Mettez-y votre palais des beaux-arts.

Le Jardin Botanique, outre l'avantage de ses collections, est une promenade ; tout Bruxelles se porte vers cet établissement. Et vous voudriez le supprimer ! Mais ce serait essentiellement déraisonnable. Restons dans les termes des contrats, respectons la volonté des vendeurs et les engagements que nous avons pris et ne détruisons pas la plus belle chose de la capitale.

M. Vleminckx. - Un mot encore.

La ville de Bruxelles est désormais sans Jardin Botanique puisque ce jardin est devenu la propriété de l'Etat.

Je demande si les collections qui s'y trouvent pourront, comme dans le passé, servir à l'enseignement des élèves de l'université libre ?

M. Anspach. - Le gouvernement a pris vis-à-vis de la ville de Bruxelles et vis-à-vis des actionnaires deux engagements : celui d'affecter le Jardin Botanique à une destination publique et celui de conserver le panorama. Et lorsqu'on lui a demandé s'il tiendrait compte de l'intérêt qu'il y a de posséder, à Bruxelles, un établissement scientifique de premier ordre, il a répondu que le gouvernement ne songerait jamais a détruire le Jardin Botanique, mais il n'a pas voulu prendre d'engagement quant à la destination à donner à cet établissement.

Je ne puis, disait-il, lier mes successeurs en décidant qu'à tout jamais le Jardin Botanique resterait dans l'emplacement où il se trouve aujourd'hui. Qu'il suffise à la ville de Bruxelles de savoir que cette acquisition sera faite dans un but d'utilité publique et que jamais le panorama ne pourra être amoindri.

Il semble aujourd'hui que si l'on faisait une exposition de tableaux dans ce jardin tout serait perdu... (Interruption.) M. Dumortier croit que ce serait la perte du Jardin Botanique.

Mais tous ceux qui connaissent ce local savent qu'il suffit amplement à sa destination actuelle, qu'il contient des salles dont l'ancienne société a de tout temps tiré parti dans un but tout autre que la botanique. Il y a à des salles qui ne sont pas le moins du monde nécessaires à la culture des fleurs et qui se trouvent précisément en arrière des serres.

C'est là qu'a eu lieu la dernière exposition triennale des beaux-arts et lorsque le gouvernement s'est décidé à dépenser les sommes nécessaires, non seulement pour acquérir le Jardin Botanique, mais encore pour y faire les reconstructions que son état de délabrement rend indispensables, il a toujours été entendu, par tous ceux qui ont été mêlés à cette affaire, qu'on prolongerait, derrière les serres de gauche, le bâtiment qui se trouve derrière les serres de droite.

Cette adjonction serait peu coûteuse et permettrait d'y faire les expositions triennales sans nuire en rien aux intérêts de l'horticulture et de la botanique. Lorsque la commission dont je suis le président et que mon honorable ami, M. Vandenpeereboom, a un peu maltraitée...

M. Vandenpeereboom. - J'ai parlé des commissions en général.

M. Anspach. - J'espère que, par exception, celle-ci ne justifiera pas les critiques générales de mon honorable ami.

Lorsque, dis-je, cette commission s'est réunie, elle a eu nécessairement à examiner, tout d'abord, la question de savoir où aurait lieu l'exposition triennale de l'année prochaine.

Quelque activité que l'on mette à l'étude de la question de l'édification d'un palais des beaux-arts, il est absolument impossible que ce palais soit construit pour 1872. En supposant que tout le monde fût, dès a présent, d'accord sur l'emplacement, il serait encore physiquement impossible de faire, pour l'année prochaine, les constructions et d'y installer quoi que ce soit.

Dans cet état de choses, nous avons immédiatement dit au gouvernement : Permettez-nous tout au moins d'assurer le service pour l'exposition de 1872, de faire, dès à présent, les appropriations les plus indispensables qui ont été, de tout temps, prévues au Jardin Botanique. Cette demande a été adressée par la commission à M. le ministre de l'intérieur et j'espère qu'une réponse favorable viendra nous tirer d'embarras quant à l'exposition prochaine. C'est là un point dont l'importance n'échappera à personne ; car, messieurs, l'intérêt artistique est chez nous un intérêt de premier ordre. Il importe de fournir périodiquement à nos artistes le moyen de se produire et la ville de Bruxelles doit particulièrement tenir à ce que ce grand intérêt soit parfaitement sauvegardé.

J'espère apprendre de M. le ministre de l'intérieur qu'il n'a point perdu de vue cet objet et qu'il nous donnera satisfaction, sans rien préjuger, (page 744) d'ailleurs, quant à la destination future du Jardin Botanique, destination à laquelle il n'est nullement question aujourd'hui de toucher.

M. Bouvier. - Je ne puis qu'applaudir au langage et a la conduite de M. le ministre de l'intérieur.

- Voix à droite. - Oh ! oh ! (Interruption.)

M. Bouvier. - Une fois n'est pas coutume, comme vous l'a parfaitement démontré l'honorable M. Dumortier. Il y a deux monuments remarquables entre tous à Bruxelles, c'est l'hôtel de ville avec la place qui le complète et le Jardin Botanique avec son splendide panorama.

Or, messieurs, vous le gâteriez complètement, si vous y construisiez un palais des beaux-arts. Je ne veux pas dire qu'on a l'habitude à Bruxelles de gâter les édifices ; mais j'espère bien que le Jardin Botanique restera tel qu'il est et qu'on ne changera pas sa destination.

Ainsi que l'a rappelé l'honorable M. Dumortier, ce Jardin Botanique appartenait à certaines familles de Bruxelles qui en étaient actionnaires. Eh bien, dans la pensée de tous les actionnaires (je puis en parler en parfaite connaissance de cause), le Jardin devait conserver sa destination primitive, et je ne crains pas d'affirmer que pas un d'eux n'eût consenti à céder cette propriété à l'Etat, s'il avait été question de la modifier.

Je dis donc que transformer un édifice de ce genre ne serait pas seulement un acte de vandalisme, ce serait encore méconnaître la pensée qui a présidé à la cession qui en a été faite à l'Etat.

M. Dumortier. -Je ne serai pas long, car je viens me rallier complètement à ce que vient de dire l'honorable M. Bouvier. Je répondrai un mot à l'honorable m. Anspach.

J'ai fait mesurer avec le plus grand soin toutes les exèdres élevées contre les grandes serres du Jardin à la dernière exposition qui a eu lieu à Bruxelles ; or, il résulte de cette étude attentive que toutes les serres actuelles avec leurs salons seraient encore trop petites de 1,500 mètres carrés pour faire l'exposition des beaux-arts.

J'ajouterai que si la grande salle dont parle l'honorable M. Anspach était construite, cette salle n'aurait que 400 et quelques mètres ; or, il s'en faudrait encore de 1,100 mètres pour que nous fussions à même d'y faire une exposition. Voilà la vérité.

Maintenant, je termine en répétant le mot qu'a employé tout à l'heure l'honorable M. Bouvier. Oui, on commettrait un véritable acte de vandalisme en détruisant ce qui fait la gloire de la capitale. Messieurs, ne détruisons pas ce que nous avons de beau ; conservons-le et améliorons-Je, si l'on veut et si c'est possible.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Messieurs, d'après la convention qui a été conclue par le gouvernement et d'après le rapport que l'honorable M. Dumortier a présenté à cette occasion, il est évident qu'il a été formellement entendu que le Jardin Botanique conserverait son caractère d'affectation publique.

Il est également incontestable que la pensée de tout le monde, et cela a été rappelé dans le rapport de l'honorable M. Dumortier, était de conserver le panorama qu'on y admire.

Le gouvernement, à coup sûr, a le droit de modifier, tôt ou tard, la destination des bâtiments. Mais la question est de savoir si le gouvernement agirait sagement en en modifiant le caractère.

Il est évident que le jour où l'on transformerait le Jardin Botanique en palais des beaux-arts, les serres devraient disparaître, et le monument perdrait ainsi son caractère.

Les grandes salles qui deviendraient disponibles, c'est-à-dire la rotonde et la salle qui se trouve à gauche de la rotonde, seraient insuffisantes pour les expositions. J'ajoute que la salle qui viendrait se placer à la droite de la rotonde offrirait également des dimensions trop restreintes pour qu'elle pût exercer une influence sur l'organisation des expositions.

Il est pour moi incontestable que lors même que l'on ferait sortir du Jardin Botanique toutes les collections de plantes qui s'y trouvent, on se verrait encore réduit à élever tout à côté une vaste baraque.

Telle est la situation exacte des choses, et la Chambre comprendra avec quelle hésitation le gouvernement arriverait à prendre cette mesure, qui, pour être efficace, devrait commencer par la transformation du caractère architectural du Jardin Botanique, caractère auquel tous les orateurs, ce me semble, ont rendu unanimement hommage.

Quanta la question que m'a adressée M. Vleminckx, je ne m'en rends pas bien compte. Evidemment il n'est pas entré dans sa pensée de considérer le Jardin Botanique, établissement de l'Etat, comme annexe de l'université de Bruxelles, établissement essentiellement libre. S'il s'agit au contraire de faciliter, pour l'université de Bruxelles et pour tous les savants, les moyens de développer la science botanique, le gouvernement prendra à cet égard, j'en donne l'assurance à l'honorable membre, toutes les mesures nécessaires, en tant qu'elles pourront se combiner avec le règlement d'organisation même du Jardin.

Je crois, messieurs, avoir répondu d'une manière complète et satisfaisante à toutes les questions qui m'ont été posées.

M. Vleminckx. - Il est bien entendu que le jardin et les serres seront disposés de telle sorte que l'enseignement scientifique y soit facilité.

M. Kervyn de Lettenhove, ministre de l'intérieur. - Il m'est impossible de prendre un engagement à cet égard. Une commission existe ; des conservateurs capables seront choisis ; ce sera à la commission, ce sera à ces savants à présider à une organisation qui doit évidemment présenter un caractère essentiellement scientifique.

M. De Lehaye, rapporteur. - Il est bien entendu que, par suite de la déclaration faite par M. le ministre de l'intérieur, le libellé qu'on voulait introduire dans la colonne d'observations vient à tomber, attendu que les herbiers auxquels ce libellé faisait allusion seront transférés au Jardin Botanique.

M. le président. - Je mets aux voix le chiffre proposé par M. le ministre ; il est de 49,000 francs, 45,000 francs à l'ordinaire et 4,000 francs à l'extraordinaire.

- Ce chiffre est adopté.

La séance est levée à 5 heures.