(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1869-1870)
(Présidence de M. Dolezµ.)
(page 115) M. de Vrintsµ procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart ; il donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.
M. de Rossiusµ présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Des habitants de Wilderen demandent que le chemin vicinal de Léau à Saint-Trond soit déclaré de grande communication. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les secrétaires communaux du canton de Peer demandent que leur avenir soit assuré et que leur traitement soit mis en rapport avec l'importance de leur travail et des services qu'ils rendent aux administrations communales, provinciales et générale. »
« Même demande des secrétaires communaux de l'arrondissement d'Alost et du sieur Nervin, secrétaire de la commune de Naninne. »
- Même renvoi.
« Des habitants d'Iseghem se plaignant que, par délibération du conseil communal du 31 juillet dernier, la danse dans les cabarets et autres lieux publics soit interdite sans une autorisation spéciale de la police locale, demandent une loi qui règle cette matière. »
- Même renvoi.
« Des propriétaires à Stambruges demandent que le gouvernement donne suite au procès-verbal de l'administration communale concernant leurs réclamations à charge de la société du canal de Blaton à Ath, et qu'il leur accorde le pro Deo judiciaire comme partie civile. »
- Même renvoi.
« La veuve de Brule demande que son fils Gustave, milicien de la classe de 1868, qui a été incorporé au 2ème régiment d'artillerie alors qu'il avait droit à une exemption, soit libéré du service. »
- Même renvoi.
« Le sieur Courtier réclame l'intervention de la Chambre pour qu'on lui restitue une somme de 150 francs, déposée par lui à la masse de remplacement lors du rappel de la classe de 1861. »
- Même renvoi.
« Le sieur Van Hoorebeke prie la Chambre de statuer sur sa demande tendante à obtenir le remboursement des retenues faites sur ses appointements, lorsqu'il était attaché au bureau des postes a Gand. »
- Même renvoi.
« Le sieur Druart, né à Farciennes, de père français et de mère belge, demande la naturalisation ordinaire. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation ordinaire du sieur Thorebeke. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« La chambre de commerce et des fabriques de Tournai adresse à la Chambre 120 exemplaires de son Rapport général pour l'année 1868. »
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
« M. le ministre de la justice transmet 2 exemplaires du nouveau volume publié par la commission royale des anciennes lois et ordonnances, comprenant le tome premier de la deuxième série du Recueil des ordonnances de la principauté de Liège. »
- Dépôt à la bibliothèque.
« M. Rogier demande un congé de deux jours pour cause d'indisposition. »
- Accordé.
« M. Carlier demande un congé d'un jour pour affaires urgentes. »
- Adopté.
MpD. - Messieurs, le bureau a reçu la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« J'ai la douleur de vous annoncer la mort de mon vénérable parent M. Lange, décédé inopinément le samedi 27 de ce mois, à 5 heures et demie du soir.
« Le service funèbre, suivi de l'inhumation, sera célébré en l'église des Saints Jean et Nicolas, rue de Brabant, à Saint-Josse-ten-Noode, le mardi 30 novembre à 11 heures. On se réunira à la maison mortuaire, rue des Plantes, 9, à 10 heures et demie.
« J'ai l'honneur, monsieur le président, de vous présenter l'expression de mes sentiments de respect et de haute considération.
« Saint-Josse-ten-Noode, le 29 novembre 1869.
« (Signé) Simon. »
Messieurs, la Chambre n'ayant pas tenu de séance depuis que cette communication nous est parvenue, il vous a été impossible de charger une députation de vous représenter aux funérailles de notre regretté doyen.
Le bureau était convaincu de répondre à vos intentions en se chargeant de ce soin pieux. Il l'a accompli, accompagné d'un grand nombre de nos collègues qui, eux aussi, ont voulu rendre un dernier témoignage d'estime et d'amitié à l'honorable collègue que nous regrettons tous.
J'ai l'honneur, messieurs, de vous proposer d'écrire une lettre de condoléance à la famille de M. Lange. (Marques unanimes d'assentiment.)
Votre décision sera exécutée par le bureau.
M. Lelièvreµ (pour une motion d’ordre). - Il y a un projet de loi présenté depuis longtemps et sur lequel le rapport a été déposé dès le 18 juin 1869, c'est celui concernant la pêche fluviale. Je demande que la Chambre veuille bien ordonner que le projet figure à l'ordre du jour. Son utilité est d'ailleurs incontestable.
M. le président. - Je dois faire remarquer à l'honorable membre que, depuis le dépôt du rapport sur ce projet de loi, M. le ministre de l'intérieur a demandé que sa mise à l'ordre du jour fût momentanément retardée parce qu'il compte déposer incessamment un autre projet de loi présentant une grande connexité avec celui dont M. Lelièvre vient de parler.
M. Lelièvreµ. - En présence des observations de M. le président, je n'insiste pas sur ma motion.
M. Thonissenµ (pour une motion d’ordre). - A la suite de mon rapport sur le projet de loi relatif aux dommages-intérêts et aux visites domiciliaires en matière de presse, déposé le 11 avril 1866, se trouve un tableau statistique indiquant le nombre et les résultats des poursuites pour délits de presse intentées dans la période décennale de 1854 à 1864.
Depuis que ce projet de loi a été mis à l'ordre du jour, l'honorable ministre de la justice m'a communiqué un nouveau tableau renfermant les mêmes renseignements pour les années 1865,1866, 1867 et 1868.
Je viens demander à la Chambre qu'elle ordonne l'impression de ce (page 116) nouveau tableau comme annexe a mon rapport. Elle aura ainsi des renseignements complets pour la période de 1854 à 1868 inclusivement.
- L'impression de ce tableau est ordonnée.
M. Hymans. - J'ai l'honneur de déposer un rapport au nom de la commission qui a examiné le projet de loi portant érection de la commune d'Hofstade.
- Ce rapport sera imprimé et distribué et le projet de loi mis a la suite de l'ordre du jour.
MfFOµ. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi ayant pour objet d'approuver la convention conclue entre le gouvernement et le docteur Berthel-Henry Strousberg, pour la cession des propriétés du domaine de la guerre de la place d'Anvers que le démantèlement de la citadelle du Sud doit rendre disponibles.
M. le président. - Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation de ce projet de loi. La Chambre entend-elle le renvoyer aux sections ou à une commission spéciale ?
- Plusieurs membres. - Aux sections !
MfFOµ. - Je compte que le projet pourra être distribué dès ce soir. Je crois devoir avertir la Chambre que, dès que ses membres auront pu en prendre connaissance, je lui demanderai qu'elle en fixe l'examen en sections à un jour assez rapproché, l'objet de ce projet de loi présentant un certain caractère d'urgence.
Il convient que le Sénat puisse l'examiner dans sa prochaine réunion, afin que nous ne tenions pas trop longtemps en suspens les engagements contractés.
- La Chambre fixe à vendredi prochain l'examen du projet de loi en sections.
M. Muller, rapporteurµ (à la tribune). - Messieurs, la section centrale a terminé ce matin, tantôt même, l'examen des amendements qui se rapportent à l'article 75 du projet de loi sur la milice.
Messieurs, pour ne pas entraver les travaux de la Chambre, j'ai été engagé à vous faire un rapport verbal, tout en vous soumettant la rédaction du nouveau texte libellé par la section centrale. Je réclame un peu d'indulgence pour mes explications du chef de précipitation forcée.
L'honorable M. Coomans a proposé de remplacer au premier paragraphe de l'article 73 les mois « peuvent seuls être », par le mot « seront ».
Il résulterait de cet amendement qu'il n'y aurait plus aucune distinction à établir, pour les congés illimités, entre les différents corps de l'armée, entre l'infanterie de ligne, la cavalerie, l'artillerie, etc.
Or, le rapport de la section centrale, d'accord avec les déclarations du gouvernement, a démontré suffisamment, nous le pensons du moins, que les nécessités militaires exigent impérieusement que le service actif dans certains corps ait une durée plus longue que celle de l'infanterie de ligne. Or, cette différence inévitable, l'honorable M. Coomans la supprime.
Qui peut sérieusement contester qu'il est actuellement indispensable que le cavalier, l'artilleur, etc., doivent, au point de vue de la constitution solide de l'armée, servir plus longtemps que le soldat d'infanterie de ligne.
Je rappelle, au surplus, comme correctif important à cette inégalité, que, dans son rapport, la section centrale a émis, à l'unanimité, l'opinion qu'il est légitime et nécessaire de rémunérer spécialement l'excédant de durée de service qu'impose à certains miliciens, non la voie du sort, mais la désignation d'officiers de l'armée.
La section centrale n'a pas été ébranlée dans cette conviction, et elle a maintenant l'assurance que le gouvernement, dans son projet de rémunération du service des miliciens, tiendra compte de cet excédant de charges supportées par quelques catégories de miliciens.
En examinant le premier paragraphe de l'article 73, j'ai fait remarquer personnellement à la Chambre, il y a quelques jours, que le département de la guerre avait donné à cette disposition une interprétation autre que celle que lui attribuait, en consultant le texte, la section centrale. D'après cette dernière, les trois rappels ne devaient avoir lieu que dans la troisième, la quatrième et la cinquième année. Mais il résulte des explications données par M. le ministre de la guerre au sein de la section centrale et qu'il a appuyées par une citation textuelle de paroles qu'il avait prononcées dans des discours antérieurs au vote de la loi du 5 avril 1868, que dans son système d'organisation militaire les rappels doivent avoir lieu pour l'année active, de deux en deux ans, ou du moins pas durant trois années consécutives.
Toutefois, ce qui a été reconnu unanimement par le gouvernement et par la section centrale, c'est que le texte de l'article, qui est littéralement emprunté à la loi du 5 avril 1868, doit être modifié sur ce point, attendu qu'il ne résulterait nullement de la rédaction admise que la latitude réclamée par M. le ministre de la guerre serait conforme à la loi.
Il est une autre observation que j'ai à présenter a propos du premier paragraphe de l'article 73, dans le but de l'améliorer, la voici ; c'est qu'il ne réglait l'époque du congé illimité que pour l'infanterie et il laissait, pour les autres armes, cette époque à la discrétion du département de la guerre, sauf la limite résultant des crédits annuels du budget.
La section centrale, et le gouvernement, par l'organe de MM. les ministres de l'intérieur et de la guerre, ont reconnu, puisque l'article doit être remanié sous d'autres rapports, qu'il est convenable d'établir, pour les différentes armes, les époques respectives de l'envoi en congé illimité, dans les temps ordinaires et dans les circonstances normales ; de ne pas se borner à régler ce qui concerne l'infanterie de ligne, mais aussi ses deux régiments d'élite, la cavalerie et les autres armes. Nous n'avons guère pu à cet égard qu'adopter les propositions de M. le ministre de la guerre qui les considère comme essentielles, au point de vue militaire.
Il a toujours été entendu, messieurs, dans toute loi de milice, et d'après celle qui nous régit actuellement, que les congés, tant limités qu'illimités, doivent dépendre de la bonne conduite du milicien, et, en second lieu, que jamais l'octroi de ces congés ne peut avoir pour conséquence d'affaiblir la force numérique de l'armée, et de frapper d'impuissance le gouvernement et le département de la guerre, quand, par une cause quelconque, l'indépendance du pays ou l'ordre public peut être compromis.
C'est un point capital qui est constaté nettement dans un paragraphe nouveau, remplaçant le troisième du projet, et qui est rédigé de manière à permettre en même temps, selon les circonstances, d'augmenter la somme des congés généraux ou particuliers, temporaires ou illimités, de telle sorte néanmoins que l'exemption des frères des remplacés ne puisse être compromise par la multiplicité des congés accordés aux remplaçants, restriction proposée avec raison par M. le ministre de l'intérieur, pour faire droit à une observation de l'honorable M. Magherman.
Le second amendement présenté par M. Coomans, supprimait, au dernier paragraphe de l'article 73, les mots : « par un certificat de leur chef de corps constatant qu'ils ont soldé leur dette à la masse. »
Il s'agit ici du mariage, qui ne peut être autorisé actuellement que moyennant un certificat du chef de corps constatant que le soldat a payé sa dette à la masse.
Dans son rapport, la section centrale avait insisté sur la nécessité de mettre le milicien en état d'acquitter facilement l'obligation qui lui est imposée de ce chef. M. le ministre de la guerre a loyalement reconnu qu'il n'en a pas toujours été ainsi, et que l'application rigoureuse des termes critiqués par l'honorable M. Coomans pourrait constituer une injustice ; il a donc pris l'initiative d'une modification qui semble devoir satisfaire l'honorable M. Coomans, en ce sens qu'il sera dit : « par un certificat de leur chef de corps, constatant qu'ils ont soldé leur dette à la masse ou que cette dette ne provient ni d'un fait qui peut lui être reproché, ni de congés exceptionnels qu'il aurait demandés. » Il n'est pas question, dans ce dernier membre de phrase, des congés ordinaires ou normaux, de ceux qui seraient décidés par mesure générale, mais uniquement des congés qui auraient été demandés personnellement par le soldat, dans son intérêt ou dans celui de sa famille.
Il n'est pas juste, en effet, nous a dit l'honorable ministre de la guerre, que si un milicien obtient des congés exceptionnels et ne compte pas, pour cette cause, assez de journées de présence au corps pour apurer sa dette à la masse, il fasse peser sur le trésor public le déficit dont il est l'auteur volontaire.
En ce qui concerne les faits qui peuvent être reprochés aux miliciens et remplaçants, et qui seraient la cause directe du non-apurement de leur dette à la masse, ils devront naturellement avoir le caractère d'une faute inexcusable.
Telles sont, messieurs, les observations dont j'avais à faire précéder le rapport verbal que vous m'avez autorisé à faire. J'oubliais cependant une observation et je l'ajoute avant de terminer ; c'est que M. le ministre de la guerre a insisté pour que les trois rappels n'eussent point tous lieu pour l'armée active dans les trois années qui suivent la date des congés illimités, par le motif que, surtout actuellement, des changements doivent être à prévoir dans l'armement et dans le mode d'exercices et qu'il est indispensable que les soldats ne restent pas les trois dernières années de leur service dans leurs foyers, de manière a être complètement étrangers aux (page 117) perfectionnements et aux améliorations qui seraient reconnus utiles à la consistance et à la solidité de l'armée.
Voici, messieurs, le texte de l'article 73, tel que le propose la section centrale, d'accord avec le gouvernement :
« Les miliciens et remplaçants de la première partie du contingent ont droit à un congé d'un mois par année de service actif.
« Ils sont envoyés en congé illimité, lorsqu'ils ont passé au service actif le temps ci-après désigné :
« Vingt-six mois, s'ils appartiennent à l'infanterie de ligne ;
« Trois ans, s'ils appartiennent au régiment des grenadiers, au régiment des carabiniers, à l'artillerie de siège, au régiment du génie, a la coin pagine des pontonniers ou a celle des artificiers ;
« Quatre ans, s'ils appartiennent aux batteries a cheval, aux batteries montées ou aux escadrons de la cavalerie et du train.
« Ces miliciens et remplaçants peuvent néanmoins être tenus a des rappels sous les armes, savoir :
« Ceux dont le service actif est de vingt-six mois, à trois rappels d'un mois ;
« Ceux dont le service actif est de trois ans, à deux rappels d'un mois ;
« Ceux dont le service actif est de quatre ans, a un rappel d'un mois ;
« Sont dispensés du rappel les hommes mariés de la huitième classe ;
« Les miliciens et remplaçants du contingent de réserve ne sont appelés sous les armes que pour quatre mois pendant la première année, et pour un mois pendant chacune des trois années suivantes ;
« Les congés temporaires et illimités seront refusés à ceux que leur conduite n'en aura pas rendus dignes ;
« Dans des circonstances spéciales, le gouvernement est autorisé à suspendre ou à modifier l'exécution des paragraphes qui précèdent ;
« Les miliciens et remplaçants qui ont achevé leur cinquième, année dans la partie active du contingent ou leur quatrième dans la réserve, peuvent contracter mariage, en prouvant, par un certificat de leur chef de corps, qu'ils ont soldé leur dette à la masse, ou que celle dette ne provient ni de faits qui puissent leur être reprochés, ni de congés exceptionnels qu'ils auraient demandés. »
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M. le président. - Messieurs, la discussion doit s'ouvrir sur les différents articles qui ont été réservés.
Le premier de ces articles est l'article 53.
Vous vous rappelez qu'un amendement avait été présenté par M. Van Humbeeck et un sous-amendement par M. le ministre de l'intérieur ; ces propositions ont été retirées.
Nous ouvrons donc la discussion sur l'article 53 primitif, qui est ainsi conçu :
« Tout individu désigné pour la milice peut se faire remplacer. »
M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Messieurs, je me propose de présenter un amendement à l'article 53. Cet amendement a pour objet de faire déclarer dans la loi que tout milicien qui veut se faire remplacer doit le déclarer d'avance, soit au moment de l'inscription, soit dans le mois de l'inscription, et qu'il faut, dans cette déclaration, qu'il renonce au bénéfice du tirage au sort, c'est-à-dire qu'il s'oblige à se faire remplacer. Il améliorera ainsi la position de ceux qui ne veulent ou ne peuvent pas se faire remplacer.
Les autres parties de l'amendement ne sont que des détails d'exécution.
Messieurs, pour justifier cet amendement, je crois devoir vous rappeler quel est le principe qui domine la loi.
Le service de la milice, autrement dit, le devoir de chaque citoyen de défendre son pays en cas de danger, est un service personnel qui incombe à tous les habitants qui ont atteint un certain âge ; ce devoir ne devrait pas pouvoir se déléguer. Il n'est pas plus possible de déléguer le devoir de servir son pays en cas de danger qu'il ne serait possible de déléguer à un insolvable une dette que l'on aurait contractée.
Il est évident que la nation aurait le droit de refuser d'une façon complète cette délégation, de refuser le pouvoir de se faire remplacer. Cependant, comme le cas de guerre n'est pas l'état normal, comme c'est, au contraire, très heureusement, l'état de paix qui est l'état normal, on a admis que le milicien pourrait se faire remplacer pour la corvée de l'apprentissage militaire. C'est un véritable privilège accordé aux uns et refusé aux autres ; n'est-il pas juste, ne pourrais-je pas dire naturel, que ceux à qui ce privilège est accordé en acceptent d'avance toutes les charges ?
Que celui qui ne veut pas servir en personne se fasse remplacer, mais obligatoirement ; mais que tous ceux, au contraire, qui ne font pas la déclaration dans le délai prescrit par la loi acceptent les résultats du tirage au sort et s'engagent à servir de leur personne si le sort les désigne.
Messieurs, j'ai communiqué ces amendements à un certain nombre de mes collègues et la seule objection sérieuse qui m'ait été faite et à laquelle je vais répondre est celle-ci.
On m'a dit que par mon système on rendrait plus difficile aux gens peu fortunés les moyens de se faire remplacer, qu'il était plus facile de trouver les moyens de fournir un remplaçant après le tirage qu'avant le tirage.
Je n'ai pu, messieurs, partager cet avis.
Les personnes qui se trouvent dans le cas qui m'a été posé comptent, en général, beaucoup sur le sort. Elles ne font pas d'avance les économies qu'elles feraient nécessairement si elles étaient certaines que le sort ne les favoriserait pas.
Il est évident qu'un père de famille sachant qu'à l'âge de 20 ans son fils, s'il tombe au sort, sera obligé de marcher, et qu'en faisant des économies peu importantes il peut réunir les moyens de payer un remplaçant, ce père de famille sera prévoyant ; mais, s'il compte sur le sort, ce qui arrive presque toujours, il y mettra une certaine négligence, et lorsque le moment sera venu, il ne sera pas prêt.
J'ai eu, cette année-ci, dans mon voisinage deux cas de familles qui avaient compté sur des chances favorables.
Malheureusement, le jour du tirage est arrivé et les mauvais numéros sont venus causer des déceptions.
Les moyens de payer des remplaçants n'avaient pas été préparés tandis que si, quelques années auparavant, ces familles s'étaient mises en mesure, elles auraient pu, sans toucher à leurs moyens d'existence, trouver la somme nécessaire, de sorte que l'objection qui m'a été faite me paraît être plutôt en ma faveur que contre moi.
Messieurs, l'amendement est-il de nature à bouleverser l'économie de la loi ? Je ne le pense pas. Je pense, au contraire, que cet amendement est de nature à corriger beaucoup de défauts du remplacement. Je pense que les familles, étant obligées de déclarer d'avance qu'elles fourniront un remplaçant, pourront, pour s'assurer la bonne qualité de ce remplaçant, faire des sacrifices et par conséquent fournir à l'armée une qualité meilleure de remplaçant.
Pour arriver à ce but d'une façon à peu près certaine, j'ai introduit, dans la série d'amendements dont je vais vous donner lecture, une disposition particulière qui donnera, je pense, à cet égard, toute satisfaction d'une part aux familles, d'autre part au ministère de la guerre ; j'ai inscrit comme corollaire de mon amendement le principe que les remplaçants une fois admis par l'autorité militaire et incorporés seraient définitivement incorporés comme le milicien lui-même et que le remplacé serait complètement déchargé de toute responsabilité à l'égard de son remplaçant.
D'autre part, j'ai inséré également, comme corollaire de mon amendement, la stipulation que tous ceux qui négligeraient ou qui refuseraient de faire la déclaration en temps voulu, seraient censés accepter les résultats du tirage au sort et que par conséquent ils ne pourraient plus fournir de remplaçants.
Cependant, comme, dans certaines circonstances tout à fait exceptionnelles, il pourrait y avoir inhumanité à ne pas permettre ce remplacement, j'ai aussi introduit dans mon amendement une disposition qui autorise le gouvernement à permettre le remplacement pour chaque cas spécial.
Messieurs, je vous ai donné les raisons de mon amendement au point de vue de la loi en discussion, je ne suis pas sorti du cercle de cette loi, mais je demanderai maintenant la permission de vous montrer, en dehors de là, que cet amendement serait de nature à améliorer dans une proportion assez notable les charges qui pèsent sur ceux qui ne peuvent pas se faire remplacer.
Supposons une commune ou un canton de milice qui aurait 10 miliciens à fournir et où se trouveraient des personnes en état de se faire remplacer. Il est évident que si celles-ci renoncent aux chances du sort, elles améliorent, dans une proportion très heureuse, la position de ceux qui doivent subir le tirage, et comme ces personnes sont précisément celles qui ont le plus de ressources, il est évident aussi qu'en acceptant pour elles les charges elles diminuent les charges pour les autres.
Eh bien, à défaut d'autres considérations, celle-là seule suffirait pour que mon amendement fût examiné avec toute la bienveillance possible.
Messieurs, je vais donner lecture du texte de mes amendements afin d'en épargner la peine à notre honorable président.
« Art. 53. Tout individu appelé à son âge à faire partie de la milice peut se faire remplacer aux conditions suivantes :
« a. Faire la déclaration de son intention au moment de son inscription ou au plus tard le 31 décembre.
(page 118) « b. Joindre à sa déclaration le certificat de dépôt d'un cautionnement à fixer chaque année par la loi du budget.
« c. Y prendre également l'engagement formel de fournir un remplaçant à l'époque a déterminer chaque année par arrêté royal.
« Art. 53bis. La déclaration ci-dessus implique le renoncement formel de la part de celui qui veut se faire remplacer au bénéfice du tirage au sort. Il est de droit inscrit a la suite des ajournés des années précédentes et son remplaçant est compté dans le contingent à fournir par la commune ou le canton de milice de son domicile.
« Art. 53ter. Dès que le remplaçant est agréé par les autorités compétentes et incorporé, toute responsabilité cesse pour le remplacé. Si ce remplaçant n'est pas fourni à l'époque fixée, l'appelé sera incorporé et devra marcher en personne.
« Art. 53quater. Ceux qui ne font pas la déclaration prescrite à l'article 53 dans le délai fixé, sont censés accepter toutes les chances du sort. Ils ne peuvent plus se faire remplacer, à moins de circonstances exceptionnelles reconnues pour chaque cas particulier par arrêté royal. »
- L'amendement est appuyé ; il fait partie de la discussion.
M. le président. - L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu a parfaitement indiqué quelle est l'objection qu'on peut faire à son amendement. Il nous a appris, en effet, que ceux de ses collègues auxquels il a communiqué cet amendement lui ont dit : Mais vous aggravez la position de ceux qui veulent se faire remplacer.
L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu dit que l'on pourra se préparer longtemps d'avance à faire le remplacement lorsqu'on saura que le remplacement est inévitable.
Cette réponse de l'honorable membre n'est pas péremptoire ; il y a des raisons mathématiques tout autrement décisives que cette appréciation morale.
Aujourd'hui, lorsqu'on se présente au tirage au sort, on a au moins une chance sur deux d'être libéré. Il en résulte que si deux personnes s'associent pour payer le remplaçant de celui que le sort ne favorisera pas, elles se tireront d'affaire avec un seul remplaçant. (Interruption.)
Je dis qu'aujourd'hui on a une chance sur deux pour échapper au service, et que, par conséquent, si l'on s'entend à plusieurs pour que chacun paye la moitié du prix d'un remplaçant avant le tirage, on aura, après le tirage, la somme nécessaire pour pourvoir au remplacement de ceux que le sort n'a pas favorisés. (Interruption.)
C'est une probabilité ; mais cette probabilité, répartie sur beaucoup de miliciens, équivaut à une certitude ; à Bruxelles, où les chances du sort, à cause du grand nombre d'exemptions, sont plus grandes, on peut aujourd'hui pourvoir aux frais du remplacement en payant 450 francs avant le tirage.
Or, la proposition de l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu consiste à doubler la charge de la milice pour ceux qui veulent un remplaçant. Je ne pense pas que cette proposition soit susceptible d'être acceptée par la Chambre.
L'erreur de l'honorable membre vient de ce qu'il suppose toujours que les gens qui se font remplacer ont une fortune telle, qu'on peut les tailler à merci.
Si la discussion était telle, je pourrais peut-être approuver l'amendement de l'honorable membre ; mais cette situation est exactement le contraire de ce qu'il suppose ; il est impossible de faire une loi pour une situation de fantaisie qui ne répond en rien à la situation réelle.
En effet, on sait parfaitement que la très grande majorité des miliciens qui se font remplacer appartiennent à des familles qui ne sont pas dans l'aisance, pour qui ce remplacement est un lourd sacrifice ; vous ne pouvez pas avoir égard à des fortunes exceptionnelles pour établir une taxe qui les grèvera toutes.
Messieurs, je le répète, s'il fallait imposer une taxe pour alléger les charges du service militaire de ceux qui ne peuvent pas se faire remplacer, ce n'est pas uniquement sur ceux qui se font remplacer que pèserait cette taxe, mais surtout sur la généralité des citoyens. Quel que soit le mode de rémunération qui sera adopté, la plus grande partie des ressources sera prise à la généralité des citoyens ; les miliciens ne pourront jamais contribuer que pour une faible part.
Je suis surpris que l'honorable M. Le Hardy ait présenté l'amendement que je discute, car il me parait absolument contraire aux idées économiques qu'il a toujours professées dans cette enceinte.
L'honorable M. Le Hardy de Beaulieu, qui est un adversaire de tout ce qui touche au système militaire, nous a indiqué, à plusieurs reprises, la perte que le service militaire fait subir aux populations par l'interruption de la profession qu'exercent les jeunes gens, Une des grandes causes de perte, selon lui, c'est qu'on empêche ainsi l'éducation professionnelle ou industrielle des jeunes gens qu'on appelle à l'armée.
Mais quel est le remède à ce mal ? C'est précisément le remplacement, parce que ceux qui peuvent se faire remplacer sont ainsi mis à même de continuer les études ou l'apprentissage auquel M. Le Hardy porte tant d'intérêt.
M. Le Hardy, par son amendement, va rendre le remplacement extrêmement difficile ; le résultat en sera de doubler le prix du remplaçant et de diminuer, par conséquent, de moitié au moins le nombre des remplacements.
Il doublera donc le mal que lui-même indique comme étant un vice du système que nous avons proposé. Or, M. Le Hardy de Beaulieu tient si religieusement à ses convictions économiques, qu'il me paraît qu'il suffira de les lui rappeler pour qu'il abandonne l'amendement qu'il a présenté.
M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Je dirai, avant tout, à la Chambre que je n'abandonne aucune de mes convictions économiques.
Au début de cette discussion, j'ai proposé le système de l'enrôlement volontaire. J'ai dit qu'en temps de paix l'armée devait se recruter exclusivement de volontaires.
La Chambre n'a pas admis ce système, elle a adopté le principe du recrutement forcé. Elle cherche aujourd'hui à corriger ce système par le remplacement.
Il nous a été dit, messieurs, dans le cours de cette discussion et dans le cours de la discussion sur l'organisation de l'armée, que le remplaçant à bon marché devait être de la très mauvaise marchandise.
J'ai cru, messieurs, que j'atteindrais le but qu'on se propose en vous soumettant l'amendement dont lecture vous a été donnée.
D'abord un but de justice : celui de diminuer les chances en faveur de ceux qui ne peuvent pas se faire remplacer. Ceux-là aussi ont des apprentissages à faire ; ceux-là sont dans une position bien plus défavorable que ceux qui ont des moyens, même restreints, pour se faire remplacer, et c'est en leur faveur surtout que je propose mon amendement.
Je n'ai pas dissimulé que le remplacement deviendrait plus cher, plus onéreux, mais en même temps, j'ai indiqué le remède, celui de prévoir longtemps d'avance la charge qui devait incomber à la famille et lui donner par conséquent le moyen d'accumuler petit à petit les ressources nécessaires pour y faire face.
Messieurs, devons-nous favoriser le remplacement ? Mais c'est absolument contraire au principe que vous avez admis vous-mêmes. Vous n'avez pas voulu la création d'une armée de volontaires recrutés par l'organe naturel de la société, c'est-à-dire par le gouvernement. Et maintenant vous voulez une armée de volontaires, mais de volontaires recrutés par l'intérêt privé, c'est-à-dire au meilleur marché possible, c'est-à-dire composés en grande partie, comme on l'a dit, d'insolvables de la moralité.
Voilà le système que vient défendre devant vous M. le ministre de l'intérieur.
Messieurs, je le répète encore, au point de vue de la justice, autant que la justice puisse pénétrer dans cette loi de milice, vous devez accepter l'amendement ; et, au point de vue de la bonne composition de l'armée, vous devez encore plus l'accepter.
Il est évident que si j'avais eu une loi à faire d'après mes idées, je n'aurais pas eu besoin de présenter cet amendement. Il n'y aurait dans l'armée, en temps de paix, que des volontaires.
M. Coomans. - Messieurs, je tiens à expliquer très brièvement pourquoi je ne puis pas accepter l'amendement de l'honorable M. Le Hardy.
Je me place en cette matière, comme je m'efforce de le faire dans toutes les autres, au point de vue de la justice, et je m'étonne que la logique éprouvée de l'honorable membre ne se soit pas aperçue que c'est à ce point de vue que l'amendement est inacceptable.
Ainsi qu'on le lui a dit, ainsi que M. le ministre de l'intérieur vient de le répéter, la majorité des remplacés se compose de jeunes gens pauvres. Or, plus vous augmentez la taxe qui pèse sur les remplacés, plus vous accroîtrez celle qui est déjà si lourde aujourd'hui pour la plupart des Belges.
Ah ! j'adopterais cet amendement à cette condition-ci que je signale à l'honorable M. Le Hardy, que la taxe soit proportionnelle. S'il veut prélever une taxe proportionnelle sur les remplacés, j'y consens des deux mains ; je suis prêt à signer avec lui la proposition la plus rigoureuse qu'il pourra faire.
En effet, l'honorable membre sait aussi bien que nous, peut-être mieux que nous, parce qu'il s'est souvent placé au point de vue de la justice dans l'appréciation des choses légales, il sait qu'il est inique de demander un même impôt au pauvre et au riche, et quoi que vous fassiez, votre loi de milice restera atteinte de ce vice fondamental. C'est dans la loi de milice (page 119) seule que vous pratiquez ce détestable principe de l'égalité de l'impôt pour le pauvre comme pour le riche.
Si j'ai bien compris, l'autre jour, l'honorable ministre de l'intérieur, il voudrait que la taxe que lui aussi veut prélever sur le remplacement, fût proportionnée à la fortune des familles. Car l'autre jour, je lui posais le même argument que je soumets à l'honorable M. Le Hardy et, si mes souvenirs sont exacts, M. le ministre m'a répondu : « Mais je ne m'oppose pas à ce que la taxe soit proportionnée à la situation financière des familles, à leur revenu. »
Sur ce terrain-là, je suis prêt a examiner les amendements de l'honorable membre et peut-être à les adopter. Mais, encore, une fois, demander la même charge financière (car il ne s'agit pas d'autre chose) aux pauvres et aux riches, c'est quelque chose non pas d'insoutenable, mais d'abominable. Quoi que vous fassiez, c'est l'esclavage. Vous avez beaucoup parlé de l'égalité de tous les citoyens devant l'urne de la milice, c'est l'inégalité qui est flagrante. Le pauvre n'est pas libre de suivre sa vocation, vous exigez de lui le même impôt, je pense qu'il sera de 1,000 francs ; vous demandez cet impôt au pauvre diable qui n'a pas 100 francs ; vous le demandez, il est vrai, au millionnaire, mais ce n'est pas là de l'égalité.
Si vous demandiez la même, taxe pour toutes les maisons qui existent en Belgique, il n'y aurait pas assez de pavés pour repousser cette proposition.
Je dis, messieurs, que l'amendement de l'honorable M. Le Hardy aggraverait la position de sept miliciens sur dix ; c'est cette considération grave que je soumets avec confiance à la Chambre.
- L'amendement de M. le Hardy de Beaulieu est mis aux voix ; il n'est pas adopté.
L'article 53 du projet primitif est mis aux voix et adopté.
M. le président. - La Chambre passe à l'article 64bis (nouveau) présenté par M. le ministre de l'intérieur et qui est ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à organiser une caisse tontinière pour faciliter le remplacement. »
La section centrale propose d'ajouter, après le mot « organiser », ceux-ci : « par arrêté royal ».
MiPµ. - Messieurs, j'ai fait connaître, dans une précédente séance, en quoi consisterait surtout la caisse que l'article en discussion permet au gouvernement d'organiser. Je remarque dans le rapport de la section centrale un exposé qui diffère légèrement de celui que j'ai soumis à la Chambre. D'après ce système que je crois le meilleur, les fonds doivent être versés dans une caisse, pour en être retirés par les miliciens qui ont tiré un mauvais numéro. Ces miliciens profitent ainsi des parts des jeunes gens décédés et des parts de ceux qui ont tiré de bons numéros.
M. de Naeyerµ. - Les exemptés.
MiPµ. - Je ne puis pas donner ici toutes les règles d'application de la mesure en projet ; mais je veux faire remarquer que, pour que la somme retirée soit plus forte que la somme déposée, il faut évidemment qu'il y ait un assez grand nombre de mises attribuées à des déposants autres que ceux qui les ont faites.
Voilà un point essentiel ; sans cela, les bénéfices se réduisent au seul intérêt.
Il est nécessairement d'autres combinaisons et l'on pourrait établir des tontines dans lesquelles chaque survivant retirerait la mise sans distinction du résultat du tirage au sort.
La section centrale paraît avoir compris celle dont je viens de parler en dernier lieu. Ainsi nous lisons dans le rapport :
« Les survivants des associés à l'époque du tirage se partageront entre eux le fonds commun appartenant à leur classe ; si le fils vient à être désigné pour le service, la famille sera en possession d'un pécule suffisant pour lui choisir un remplaçant ; si ce fils tient à servir personnellement, ou s'il a été favorisé par le sort, sa part proportionnelle dans la tontine restera tout entière aux parents. »
Vous voyez, d'après cette dernière phrase, que la section suppose que l'on restituera leur mise à tous les survivants.
Ce n'est pas ainsi que je l'ai entendu.
Il ne faut restituer la mise qu'à ceux qui auront été désignés par le sort, en leur attribuant la part des décédés et de ceux qui auront tiré un bon numéro.
M. Muller, rapporteurµ. - Il y a différentes combinaisons.
MiPµ. - Evidemment ; la combinaison de la section centrale est admissible en soi ; je ne voulais que faire remarquer qu'elle diffère de celle que j'ai exposée comme étant, selon moi, la meilleure.
- La rédaction proposée par la section centrale est mise aux voix et adoptée.
M. le président. - Nous passons à l'article 73. M. Coomans se rallie-t-il à l'amendement proposé par la section centrale ?
M. Coomans. - M. le président, la première décision de la section centrale est complètement défavorable à ma proposition et je persiste dans mon amendement, avec la certitude qu'il ne sera pas accepté.
Quant au paragraphe final, l'espèce de concession que la section centrale veut bien me faire par l'organe de l'honorable M. Muller me semble illusoire.
J'ai eu en vue le mariage des miliciens immédiatement après leur renvoi en congé illimité ; on me refuse. C'est là une iniquité encore ; je persiste dans ma proposition et vous en ferez ce que vous voudrez.
M. le président. - Il faut donc que je mette aux voix la rédaction primitive avec la modification proposée, par l'honorable. M. Coomans.
M. Mullerµ. - Je crois que la section centrale, d'accord avec le gouvernement, ayant modifié la rédaction de cet article, ce sont les amendements qu'elle a proposés en dernier lieu qui doivent être mis aux voix d'abord, et non l'article primitif, qui était emprunté à la loi du 5 avril 1868.
M. le président. - L'amendement de l'honorable M. Coomans s'écarte le plus de la proposition qui nous est présentée maintenant, et je dois le mettre aux voix d'abord.
Je consulte donc la Chambre sur le paragraphe premier de l'article 73 amendé par M. Coomans.
Ce paragraphe est ainsi conçu :
« Les miliciens ou remplaçants qui ont passé au moins vingt-quatre mois sous les drapeaux, d'après le mode déterminé par le ministre de la guerre, seront envoyés en congé illimité, sous la réserve de leur rappel pendant un mois durant trois années. »
- Ce paragraphe est mis aux voix et rejeté.
M. le président. - J'ai à vous soumettre maintenant l'amendement de la section centrale.
« Les miliciens et remplaçants de la première partie du contingent ont droit à un congé d'un mois par année de service actif.
« Ils sont envoyés en congé illimité, lorsqu'ils ont passé au service actif le temps ci-après désigné :
« Vingt-six mois, s'ils appartiennent à l'infanterie de ligne ;
« Trois ans, s'ils appartiennent au régiment des grenadiers, au régiment des carabiniers, à l'artillerie de siège, au régiment du génie, à la compagnie des pontonniers ou à celle des artificiers ;
« Quatre ans, s'ils appartiennent aux batteries à cheval, aux batteries montées ou aux escadrons de la cavalerie et du train ;
« Ces miliciens et remplaçants peuvent néanmoins être tenus à des rappels sous les armes, savoir :
« Ceux dont le service actif est de vingt-six mois, à trois rappels d'un mois ;
« Ceux dont le service actif est de trois ans, à deux rappels d'un mois ;
« Ceux dont le service actif est de quatre ans, à un rappel d'un mois ;
« Sont dispensés du rappel les hommes mariés de la huitième classe ;
« Les miliciens et remplaçants du contingent de réserve ne sont appelés sous les armes que pour quatre mois pendant la première année, et pour un mois pendant chacune des trois années suivantes ;
« Les congés temporaires et illimités seront refusés à ceux que leur conduite n'en aura pas rendus dignes ;
« Dans des circonstances spéciales, le gouvernement est autorisé à suspendre ou à modifier l'exécution des paragraphes qui précèdent. »
Je crois devoir arrêter ici la lecture de l'amendement, parce que la dernière partie touche à l'amendement de M. Coomans.
- Cette première partie de l'amendement est mise aux voix et adoptée.
M. le président. - Vient maintenant l'amendement de M. Coomans, ainsi conçu :
« Les miliciens et remplaçants peuvent contracter mariage en prouvant qu'ils ont achevé leur cinquième année dans la partie active du contingent, ou leur quatrième dans la réserve. »
M. Kervyn de Lettenhove. - Je demande la parole.
M. le président. - Nous sommes au vote, M. Kervyn.
M. Kervyn de Lettenhove. - Je crois que la Chambre n'a pas entendu se prononcer d'une manière aussi rapide sur une question aussi grave.
M. le président. - La discussion est close, je ne puis vous laisser la parole, M. Kervyn...
(page 120) M. Thibautµ. - La Chambre paît autoriser M. Kervyn à parler.
M. le président. - Sans contredit. La Chambre autorise-t-elle M. Kervyn à parler ?
- Voix à gauche. - Oui ! oui !
M. le président. - Vous avez la parole, M. Kervyn.
M. Kervyn de Lettenhove. - Messieurs, si j'insiste pour prendre la parole, c'est qu'il s'agit d'une question dont la section centrale et la Chambre tout entière ont toujours compris la gravité.
Vous avez sous les yeux, messieurs, le rapport de l'honorable M. Muller qui s'exprime en ces termes :
« Une question grave, quant aux principes et quant aux conséquences à en déduire, a été soulevée dans les termes suivants : Le droit de se marier ne devrait-il pas être consacré en faveur de tous les miliciens qui, n'ayant pas de dettes à leur masse, ont été envoyés en congé illimité ? »
Un de nos honorables collègues, que je regrette de ne pas voir ici, M. Moreau, qui présidait la section centrale, lui avait communiqué une note qui se trouve insérée dans le rapport de M. Muller.
L'honorable M. Moreau disait : « On ne peut, à moins d'absolue nécessité, restreindre le droit naturel de contracter mariage : or, les exigences militaires sur lesquelles on s'appuie pour en étendre, à titre de règle générale, l'interdiction jusqu'aux hommes de la cinquième levée, engendrent des inconvénients plus graves, sous le rapport des mœurs, que ceux que ferait naître, au point de vue de la solidité de l'armée, une prohibition s'arrêtant aux miliciens non encore envoyés en congé illimité. C'est cette dernière limite qui a été adoptée dans plusieurs pays. »
L'honorable M. Moreau, invoquant l'exemple de plusieurs autres pays, faisait remarquer qu'en Bavière, où la durée du service dans l'armée permanente est de six ans, dont trois dans l'armée active et trois dans la réserve, quiconque a satisfait à l'obligation du service dans l'armée active peut se marier sans le consentement de l'autorité militaire.
L'honorable membre, faisait observer encore qu'en Prusse, le milicien est retenu sept ans dans l'armée permanente, et que les hommes des trois premières années sont obligés, sans interruption, à un service actif ; mais qu'après ces trois ans, il n'est soumis, quant au mariage, qu'aux restrictions communes à tous les citoyens.
Enfin il ajoutait qu'en Hollande, la durée du service est de cinq ans, que les miliciens sont tenus sous les armes pendant la première année, sauf exceptions et qu'ils peuvent contracter mariage lorsqu'ils sont pourvus d'une autorisation écrite délivrée par le ministre de la guerre, qui ne l'accorde, à moins de motifs particuliers, qu'à ceux qui ont accompli leur quatrième année de service.
Messieurs, je vous demande la permission d'insister sur les excellentes considérations présentées par l'honorable M. Moreau.
Nous ne pouvons pas oublier devant quelle situation nous nous trouvons. Dans le contingent il y a un tiers d'hommes qui font valoir ou des exemptions légales ou l'incapacité de service ; de sorte que c'est par les deux autres tiers des inscrits que se forme l'armée active. Sur 45,000 inscrits il y en a environ 15,000 qui font valoir les exemptions ou les incapacités dont je parlais tout à l'heure ; et c'est sur les 30,000 hommes formant le surplus qu'on prélève aujourd'hui le contingent, c'est-à-dire que l'Etat en réclame plus d'un tiers.
On ne peut oublier que l'augmentation du contingent constitue une charge nouvelle dont il faut tenir compte dans une large mesure.
La question de l'influence de l'interdiction du mariage sur le développement de la population a été soulevée dans ces dernières années par des hommes d'une haute valeur. En France, notamment, on a fait valoir cette considération que, tandis qu'en Angleterre la population s'accroît à peu près dans une proportion triple et en Prusse dans une proportion double, le développement de la population française se trouve surtout arrêté par la loi du contingent militaire.
M. Michel Chevalier a dit un jour que, dans certaines localités de la France, il fallait jouir d'une exemption légale ou être estropié pour être dispensé du service militaire ; et d'autre part à l'Académie de médecine de Paris, M. Jules Guérin a soutenu dans un mémoire fort intéressant que la loi sur le recrutement de l'armée exerçait une influence toujours de plus en plus marquée sur la décroissance de la population. Ce qui arrive en France se retrouve également en Belgique, et lors de la dernière levée du contingent, il y a eu plusieurs localités où l'on n'a pas pu trouver un nombre suffisant d'hommes réunissant toutes les conditions nécessaires, et l'on a été obligé de remonter à des classes antérieures.
C'est là, messieurs, une situation très sérieuse et très grave. Et lorsqu'on remarque qu'en Belgique, dans certaines localités, la population reste stationnaire ; que l'agriculture se plaint tous les jours davantage du manque de bras et que les mêmes plaintes ne tarderont pas à se produire dans l'industrie, lorsqu'on constate par la statistique que, depuis dix à quinze ans, le nombre des mariages ne s'est presque pas accru et que le nombre des naissances augmente aussi dans de trop faibles proportions, il est impossible de méconnaître qu'on se trouve dans une position qui mérite l'attention la plus profonde.
Puisque nous voulons tous favoriser les progrès de la moralisation et du travail, déclarons sans hésiter qu'il faut en chercher les meilleurs éléments dans la constitution de la famille ; et que, pour arriver à la constitution de la famille, il faut le plus possible encourager le mariage dès que la loi militaire n'y forme pas un obstacle absolu.
Quelle est, messieurs, la présomption qui se réalisera presque toujours ? C'est que le milicien étant retourné chez lui porteur d'un congé illimité, il est probable que son rappel ne formera qu'une exception.
Dans la plupart des cas, cet homme rentrera d'une manière définitive dans la condition civile.
Or, veuillez remarquer, messieurs, que la majeure partie du contingent est composée d'hommes qu'on renverra dans leurs foyers après deux ans et demi de service, il en résulte donc que c'est sur la partie la plus considérable de ce contingent qu'on ferait peser l'interdiction du mariage pendant un terme à peu près égal au temps de service, c'est-à-dire, pendant environ deux ans et demi.
Messieurs, lorsque au mois de décembre 1867, cette question fut portée en France devant le corps législatif, on y invoqua l'opinion du général Changarnier, que toutes les fois que des hommes sont renvoyés en congé illimité, il doit leur être permis de se marier.
L'un des membres les plus influents de cette assemblée, M. Chesnelong fit valoir précisément les mêmes considérations sur lesquelles je m'appuie aujourd'hui ; il s'exprimait en ces termes :
« En entrant dans la réserve, les hommes reprennent la vie civile, sauf les appels en cas de guerre. Ils sont à l'âge où les alliances se préparent. L'interdiction du mariage, en les atteignant dans ces conditions, créerait donc des situations dont le désordre moral et la diminution des naissances illégitimes seraient trop souvent les conséquences forcées. »
Je persiste donc à penser, messieurs, qu'il faut permettre aux hommes qui rentrent dans la vie civile, à ceux pour qui les rappels ne sont que des cas exceptionnels ; il faut leur permettre, dis-je, de prendre part au développement de la population.
On ne peut pas oublier que ce sont les hommes les plus robustes, les meilleurs au point de vue physique et souvent aussi au point de vue moral que le recrutement vient atteindre.
Je suis convaincu qu'en tenant compte de ces deux grands intérêts, la moralité publique et l'extension de la population, vous donnerez à l'Etat plus de force que vous ne pourriez en apporter à l'armée en vous attachant au point de vue exclusif qui domine aujourd'hui.
MgRµ. - Messieurs, j'aurai l'honneur de faire remarquer à la Chambre que le service de la milice en France est infiniment plus lourd qu'en Belgique ; il dure neuf années ; les hommes restent cinq années consécutives sous les armes ; puis ils passent quatre ans dans la réserve, et on peut les rappeler quand on veut.
C'est après six années de service révolues, c'est-à-dire dans les trois dernières années de la réserve seulement, que le mariage leur est permis.
Il est fort douteux qu'on serve les intérêts des miliciens en leur permettant de se marier dès qu'ils vont en congé illimité ; je suis, quant à moi, persuadé du contraire.
Je ferai remarquer, du reste, que cet empêchement apporté à des mariages, très souvent prématurés, est passé dans les mœurs, et qu'en tous cas il n'apporte pas obstacle à l'accroissement de la population ; car, sous ce rapport, la Belgique peut être classée en première ligne. (Interruption.)
L'Angleterre... (Interruption.) En Angleterre, oui, ce sont des volontaires ; mais ce sont des hommes aussi bien constitués que nos miliciens ; par la même raison vous pourriez donc dire que l'armée anglaise, quoique composée de volontaires, constitue un obstacle au développement de la population.
Le soldat peut se marier aujourd'hui chez nous dans la sixième année ; on voudrait que le mariage lui fût permis au bout de la troisième année.
Cela est impossible pour les cavaliers qui, restant quatre ans sous les armes, ne pourraient se marier qu'un an après les fantassins ; il y aurait là une injustice véritable à ajouter à celle qu'on a cru trouver dans la différence de durée du service actif dans les deux armes.
D'autre part, les rappels se feraient avec des difficultés extrêmes. En (page 121) effet, à chaque rappel le département de la guerre serait assailli de réclamations.
Vous avez pu constater que, dans le projet qui vous est soumis, les mariés de la huitième classe ne devront plus rejoindre les drapeaux pour les exercices de campement.
Si nous devions rappeler les trois classes où le mariage est autorisé, nous nous trouverions bientôt en présence de difficultés réelles.
Les réclamations dont vous-mêmes vous seriez assaillis deviendraient tellement nombreuses que vous ne pourriez pas résister aux demandes réitérées qui vous seraient adressées.
M. Coomans. - Je serai très bref. Il me semble que M. le ministre de la guerre commet une erreur en disant que, dans son système, les miliciens pourront se marier après la cinquième année.
Ils pourront se marier, oui, après la cinquième année, en prouvant qu'ils ont acquitté leur dette à la masse. Mais s'ils n'apportent pas ce fameux certificat dont je demande la suppression, vous les retiendrez à l'état de célibat forcé pendant les huit années que vous disposez de nos citoyens.
J'appelle l'attention de M. le ministre sur ce fait. Il pourra donc empêcher pendant huit ans les miliciens de se marier.
Messieurs, vous allez voter sur la proposition la plus grave, selon moi, que la loi contient.
Vous avez toujours affirmé qu'il fallait interdire le mariage aux militaires, parce que le mariage vous semble peu conciliable avec la discipline.
C'est une thèse qui est très discutable, et je vous ai donné souvent la solution en ce qui me concerne.
Mais aujourd'hui vous allez beaucoup plus loin ; vous mettez l'intérêt militaire à part et vous n'exhibez plus que l'intérêt financier.
Qu'est-ce que je vous demande ? C'est qu'après le congé illimité, c'est-à-dire pour le fantassin après vingt-six mois ; pour les autres miliciens parqués dans les armes spéciales après trois ou quatre ans, je demande qu'on les autorise à se marier sans avoir à prouver qu'ils n'ont plus de dette à la masse.
L'intérêt militaire est absent, vous devez le reconnaître. Ce n'est plus qu'un intérêt financier. Vous craignez, et j'ai, sous ce rapport, l'aveu de plusieurs officiers, que les non-valeurs soient trop fortes à la masse quand vous autoriserez le mariage sans apurement préalable de la dette à la masse.
Je ne sais, messieurs, si le déficit serait considérable de ce chef-là ; j'en doute fort, car vous avez bien des moyens de forcer les malheureuses familles à régulariser leur situation vis-à-vis de l'armée. Mais quand il me serait démontré que vous dussiez perdre par là une grosse somme chaque année, je dirais quand même que vous êtes obligés de passer outre et de sacrifier cet intérêt financier à l'intérêt, autrement grand, de l'équité, du droit naturel.
Vous ne pouvez pas vouloir qu'un homme qui involontairement a contracté une dette soit détenu au moins cinq ans, jusqu'à ce qu'il ait apuré cette dette.
Vous ne pouvez pas vouloir que cet homme, qui souvent n'est pas coupable, soit puni pour un acte qui peut n'être pas le résultat de sa négligence.
Mais vous voulez exercer une contrainte morale, la plus dure des contraintes morales contre les endettés involontaires, contre des malheureux qui ne vous ont pas demandé de les héberger dans une caserne, qui ne vous ont demandé qu'une chose : c'est de les laisser tranquilles.
Eh bien, après les avoir expropriés pendant cinq années de leurs biens, de leur liberté, de tout ce que l'homme a de plus cher, après ce temps-là encore, vous venez leur dire : « Vous avez contracté des dettes. Je sais bien que ce n'est pas votre faute ; c'est la nôtre ; les Chambres n'ont pas versé assez d'or dans le budget, mais puisque vous avez cette dette à la niasse, vous ne vous marierez pas, non seulement après avoir obtenu votre congé illimité, non seulement pendant cinq ans, mais pendant huit ans. Vous ne vous marierez pas, parce que vous me devez 30, 40, 50 francs pour lesquels vous êtes forcément en dette. »
Voilà, messieurs, la vérité des choses et vous êtes responsables de cette situation.
L'honorable ministre nous a dit ici comme en section centrale, qu'il fallait empêcher autant que possible le mariage des miliciens, parce que, lors des rappels, on éprouve trop de difficultés de la part des familles et des conseils communaux. C'est possible, je reconnais que ces difficultés se présentent, mais je suis tellement attaché aux principes que j'ai l'honneur de soutenir devant vous, que je vous offre cette transaction-ci : permettez à tous les miliciens qui ont terminé leur service actif de se marier, et moi je vous permets de les rappeler tous sous les armes pendant le nombre d'années que vous jugerez nécessaire.
J'aime mieux violenter pendant un mois ou six semaines un citoyen que de le priver du droit principal qu'a tout homme de se marier. Quand vous forcerez un homme marié à vous suivre au camp ou ailleurs, vous commettrez, selon moi, une injustice ; mais cette injustice sera bien moins forte que celle que vous pratiquez en interdisant son mariage.
Messieurs, j'en ai dit assez. Je suis honteux d'avoir à revenir si souvent sur une question qui me semble aussi lumineusement claire que celle-là.
M. le président. - M. Kervyn, en conséquence des considérations qui viennent d'être émises, me fait parvenir l'amendement suivant :
« Remplacer les mots : lorsqu'ils ont achevé leur cinquième année dans la partie active du contingent, par ceux-ci : lorsqu'ils ont été envoyés en congé illimité. »
M. Kervyn de Lettenhove. - Je désire répondre un seul mot aux observations de l'honorable ministre de la guerre, qui a surtout insisté sur les difficultés des questions de rappel.
Je tiens à faire remarquer que lorsque la section centrale s'est prononcée contre les considérations de l'honorable M. Moreau, c'est précisément parce que nous avions compris alors que les trois rappels devaient avoir lieu pendant trois années consécutives. Or, maintenant la position est complètement changée, et quoi qu'on fasse, les rappels comprendront toujours des hommes mariés. La considération principale qui a guidé la section centrale, lorsqu'elle a prononcé la prohibition du mariage des miliciens, n'existe donc plus avec les nouvelles dispositions qui ont été introduites dans la loi.
MgRµ. - J'aurai l'honneur de vous faire remarquer de nouveau que, lors des rappels il n'y aura de mariés que dans la sixième classe, parce que c'est seulement dans la sixième année qu'on peut se marier ; or, le camp ayant lieu au mois de juin, il y aura nécessairement peu d'hommes mariés, ce ne seront pas pères de famille, s'ils retardent leur mariage jusqu'après le mois de. juin, ils ne seront plus exposés à être rappelés à moins de circonstances graves,
M. Coomans. - Et la masse ?
MgRµ. - Je crois que l'honorable M. Coomans n'a pas bien lu l'amendement de la section centrale ; cet amendement porte bien que les hommes pourront se marier après avoir fourni un certificat du chef de corps, constatant qu'ils ne doivent rien à la masse ; mais il y a un correctif qui devient l'élément principal, puisque, d'après lui, l'autorisation sera accordée si la dette ne provient pas de faits qui peuvent être reprochés au milicien
Comme le dit fort bien M. Coomans, il serait injuste d'empêcher un homme de se marier, parce que le gouvernement lui aurait procuré des habillements sans lui donner les moyens de les payer dans un temps déterminé.
Mais si la dette provient de la faute de l'individu ; s'il a vendu ses effets, s'il les a détériorés volontairement et si, par suite de ces causes, il doit 50 ou 60 francs, il faut que cet homme paye sa dette avant d'obtenir l'autorisation de se marier.
Si l'honorable M. Coomans parvenait à faire accepter ces idées, les hommes ne seraient plus intéressés à conserver leurs effets ; or, il faut que nous ayons, à cet égard, des moyens de contrainte.
Eh bien, il me semble que la concession que j'ai faite avec infiniment de plaisir, du reste, à la section centrale devrait satisfaire complètement l'honorable M. Coomans.
Je dois avouer qu'il y a des pays où l'on permet aux hommes de se marier plus tôt qu'en Belgique. (Interruption.) En Prusse, par exemple ; mais quand on rappelle les Prussiens, ce sont les communes qui nourrissent les familles ; aussi la mise sur pied de rassemblement est-elle très coûteuse.
Après la guerre si courte de 1866, ceux qui connaissent la Prusse savent à quelles souffrances les populations ont été soumises. Voulez-vous la même chose pour la Belgique ? Voulez-vous, lorsqu'on rappellera les classes, imposer aux communes l'entretien des familles ? Il ne suffit pas de dire : En Prusse on permet aux hommes de se marier ; il ne faut pas oublier qu'on indemnise les familles.
Il serait par trop commode de ne considérer que les avantages d'un côté et les inconvénients de l'autre. Quand on compare deux systèmes, il faut les comparer dans leur ensemble, et comme les choses se tiennent ordinairement, il faut accepter tout l'un ou tout l'autre.
(page 122) Je ferai encore remarquer que toutes nos classes de milice, en cas de guerre, ne sont pas dans la même position.
Ainsi, les hommes mariés ou non des 6ème, 7ème et 8ème classes forment, avec les célibataires des 9ème et 10ème classes, les 4ème et 5ème bataillons, qui sont destinés à la garnison d'Anvers, tandis que les hommes non mariés des cinq premières classes constituent les 1er, 2ème et 3ème bataillons des régiments qui doivent tenir la campagne.
Bien qu'on ne puisse avoir des certitudes absolues, il est à présumer cependant que, si la guerre éclate, l'armée en campagne sera plus tôt et plus fortement engagée que les garnisons des places fortes. Dans cette conjoncture, il est avantageux, sous tous les rapports, de ne composer l'armée de campagne que de célibataires ; cela est possible si les miliciens se marient après cinq années de service. Si on leur permet de se marier au bout de vingt-six mois, il y aura beaucoup de mariés dans les rangs de l’armée active et au point de vue de la famille les pertes seront beaucoup plus douloureuses.
M. Coomans. - Nos pères faisaient cela.
MgRµ. - Je répète que, dans un pareil cas, il vaudrait mieux que l'armée de campagne se composât de célibataires que d'hommes mariés.
M. de Theuxµ. - Messieurs, je viens appuyer l'amendement de l'honorable M. Kervyn.
Il me semble que si dans les pays qui ne sont point neutres et qui sont exposés à prendre part à une guerre non seulement défensive ou offensive, on permet le mariage après trois ans de service, je ne vois pas pourquoi, en Belgique, pays parfaitement neutre, où la population devra rarement prendre part à une guerre défensive, on ne permettrait point le mariage.
Les jeunes gens qui seront mariés après les trois années accepteront la responsabilité de la situation.
L'honorable ministre de la guerre nous dit qu'en Prusse les femmes et les enfants doivent être entretenus par la commune. Mais cela existe en Belgique aussi.
Militaires ou non, mariés ou non, les indigents doivent être entretenus par les communes.
C'est un cas comme il s'en présente constamment dans toutes les communes, mais le nombre des familles qui devront être ainsi entretenues par les communes sera très petit.
Les miliciens qui savent qu'ils peuvent être rappelés pendant un mois au camp, pourvoiront à la subsistance de leur famille, mais laissez-leur au moins la faculté de se marier, le droit naturel, le droit civil qui appartient à tout Belge.
C'est déjà beaucoup qu'ils soient privés pendant trois ans de leur liberté sans qu'ils soient privés encore ensuite du droit du père de famille.
Je ne vois pas de motif raisonnable, en tenant compte de la situation faite à la Belgique par les traités, d'insister pour défendre le mariage aux miliciens en congé illimité.
Si l'amendement de l'honorable M. Kervyn n'est pas adopté, je me prononcerai encore pour celui de l'honorable M. Coomans.
Comment ! après cinq ans on interdira encore à un homme l'exercice du droit le plus précieux et cela parce qu'il aura commis la faute bien légère de ne pas satisfaire à sa masse !
Mais les hommes qui commettent des délits ou des crimes peuvent se marier lorsqu'ils sortent de prison et cela sans rien acquitter au trésor, quoique cette dette soit bien autrement sérieuse que celle résultant d'un service obligatoire.
Ainsi, messieurs, on pourra interdire indéfiniment le mariage à un homme qui, pour une cause quelconque, s'est mis dans l'impossibilité de payer sa dette à la masse... C'est exorbitant.
M. Thonissenµ. - Trois mots seulement, messieurs, pour faire connaître les motifs de mon vote.
Je ne suis pas non plus partisan du dernier paragraphe de l'article 73 ; mais ce n'est pas parce que j'y vois un obstacle à l'accroissement normal de la population. Quand on compare le mouvement de la population en Belgique à celui qui s'opère dans d'autres pays, on s'aperçoit que la Belgique marche à peu près au premier rang pour le monde entier, et l'on peut, me semble-t-il, se contenter de cette position incontestablement avantageuse. Ce qui me déplaît dans ce paragraphe, c'est que la restriction qu'il consacre amène de graves inconvénients moraux.
Le milicien qui revient dans sa commune avec un congé illimité y contracte des liaisons, il veut se marier, il en est empêché, et de là résultent des scandales et de nombreux concubinages.
Je reconnais cependant volontiers qu'il y a ici des intérêts considérables à ménager. Nous devons avoir, avant tout, une armée bien organisée ; or, une armée composée en majorité ou seulement en grande partie d'hommes mariés serait une détestable année. A ce point de vue, l'amendement de l'honorable M. Kervyn me paraît aller beaucoup trop loin. Je crois qu'on ne peut pas, sans inconvénient, permettre le mariage après vingt-quatre mois de service ; ce serait dépasser le but que l'on poursuit, non pas au point de vue de la morale, mais au point de vue de l'intérêt militaire qui serait compromis par une telle tolérance.
M. Coomans. - C'est après vingt-six mois...
M. Thonissenµ. - Vingt-six mois, si vous voulez.
Du reste, comment agirait-on en pratique ? Le cavalier reste pendant quatre années au service, les artilleurs également. Le fantassin pourra donc se marier après vingt-six mois, tandis que les cavaliers et les artilleurs n'obtiendront cette autorisation qu'après quatre années. (Interruption.) Dans tous les cas, il y aura inégalité.
M. de Theuxµ. - Il y aura une rémunération.
M. Thonissenµ. - Malgré cette rémunération, mon opinion est qu'on ne peut pas permettre le mariage après un terme de service de vingt-six mois ; sous ce rapport je suis d'accord avec M. le ministre de la guerre ; mais je demanderai à l'honorable ministre s'il ne pourrait pas faire une concession et consentir à laisser remplacer, dans le paragraphe final de l'article 73, les mots : « cinquième année et quatrième année », par ceux-ci : « quatrième année et troisième année ».
Cette concession serait assez importante au point de vue de la morale, au point de vue de la famille, et l'intérêt militaire n'en souffrirait pas sensiblement.
L'honorable ministre autorise le mariage la sixième année. Où serait le grand inconvénient de l'autoriser la cinquième ?
Je sais, par expérience, que, dès l'instant qu'on veut rappeler les hommes mariés, ceux-ci entrent en campagne pour avoir des recommandations, qu'ils mettent en avant jusqu'à leur conseil communal, et qu'ainsi le département de la guerre se trouve assailli de sollicitations de toute nature. Mais on pourrait parer à cet inconvénient en déclarant nettement aux intéressés que, s'ils contractent mariage avant la sixième année, on ne tiendra pas compte de leurs réclamations quand il s'agira de rejoindre l'armée pour les grandes manœuvres.
Je demande donc au gouvernement s'il ne pourrait pas consentir au remplacement des mois « cinquième et quatrième » par « quatrième et troisième ».
MgRµ. - Je ferai remarquer que, dans l'état actuel des choses, on rappelle fort peu d'hommes mariés. Il en serait autrement si la proposition de M. Thonissen était adoptée, puisque la moitié de l'armée serait composée d'hommes mariés.
M. le président. - M. Thonissen dépose-t-il un amendement ?
M. Thonissenµ. - Oui, M. le président.
M. le président. - Voici, messieurs, l'état de la question.
Nous avons d'abord l'amendement de M. Kervyn, lequel s'éloigne le plus de la proposition primitive ; il consiste à dire :
« Les miliciens et remplaçants peuvent contracter mariage lorsqu'ils ont été envoyés en congé illimité. »
Nous avons ensuite la proposition de M. Coomans qui consiste à supprimer du dernier paragraphe de la première rédaction les mots... « en prouvant, par un certificat de leur chef de corps, qu'ils ont soldé leur dette à la masse. »
Nous avons, après cela, la proposition de la section centrale qui consiste à n'admettre l'empêchement au mariage pour cause de dette à la masse qu'autant qu'il résulte du fait personnel du milicien.
Enfin, nous avons la proposition de M. Thonissen, qui consiste à réduire à quatre années le terme de cinq, et à trois années le terme de quatre, proposé par la section centrale.
Je vais mettre d'abord aux voix la proposition de M. Kervyn.
- Plusieurs membres. - L'appel nominal i
M. le président. - M. Moreau vient de me faire parvenir une demande de congé.
- Ce congé est accordé.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'amendement de M. Kervyn.
77 membres y prennent part.
33 répondent oui.
43 répondent non.
1 (M. Thonissen) s'abstient.
En conséquence, la Chambre n'adopte pas.
(page 123) Ont répondu oui :
MM. de Montblanc, de Muelenaere, de Naeyer, de Theux, Gerrits, Guillery, Hagemans, Hayez, Jacobs, Janssens, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lefebvre, Le Hardy de Beaulieu, Magherman, Mulle de Terschueren, Nothomb, Reynaert, Schollaert, Thibaut, Thienpont, Vander Donckt, Vermeire, Vilain XIIII, Visart, Wouters, Beeckman, Coomans, Couvreur, Eugène de Kerckhove, Delaet, Delcour et de Macar.
Ont répondu non :
MM. de Rongé, de Rossius, Descamps, Dethuin, de Vrière, de Vrints, Dewandre, Elias, Frère-Orban, Funck, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Lelièvre, Lesoinne, Lippens, Mouton, Muller, Orts, Pirmez, Tesch, T'Serstevens, Alphonse Vandenpeereboom, Ernest Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Vleminckx, Warocqué, Watteeu, Allard, Ansiau, Bara, Bieswal, Bouvier, Broustin, Bruneau, Castilhon, de Baillet-Latour, de Brouckere, de Kerchove de Denterghem et Dolez.
M. le président. - M. Thonissen est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Thonissenµ. - Ne voulant ni de la tolérance extrême de l'honorable M. Kervyn, ni de l'extrême rigueur du gouvernement, j'ai dû prendre un parti neutre et m'abstenir.
M. le président. - Nous passons maintenant à l'amendement de M. Coomans.
- Plusieurs membres. - L'appel nominal !
M. Delaetµ (sur la position de la question). - Messieurs, je suis disposé à voter l'amendement de l'honorable M. Coomans ; mais je crois qu'il y a dans le texte de cet amendement quelques mots qui pourraient induire la Chambre en erreur, quant à l'amendement de l'honorable. M. Thonissen ; l'amendement de l'honorable M. Coomans laisse subsister les cinq et les trois années de services proposées par la section centrale. Or, l'amendement de l'honorable M. Thonissen a pour but de faire réduire d'une année chacun de ces deux chiffres. La Chambre aurait donc implicitement voté contre l'amendement de l'honorable M. Thonissen, en votant d'abord pour l'amendement de l'honorable. M. Coomans.
M. Coomans. - L'observation me paraît juste ; je n'avais qu'un but : supprimer la contrainte morale exercée sur un milicien pour le payement d'une dette quelconque à la masse, quel que soit du reste le nombre d'années pendant lesquelles le gouvernement juge convenable d'exercer la contrainte par corps sur le milicien.
- Des membres. - Aux voix !
M. Thonissenµ. - Mon amendement est réservé, dans tous les cas.
M. le président. - Cela est entendu.
Je mets aux voix l'amendement de M. Coomans.
- On demande l'appel nominal.
Il est procédé à cette opération.
77 membres y prennent pari.
38 répondent oui.
39 répondent non.
En conséquence, la Chambre n'adopte pas.
Ont répondu oui :
MM. de Montblanc, de Muelenaere, de Naeyer, de Theux, Dewandre, Elias, Gerrits, Guillery, Hagemans, Hayez, Hymans, Jacobs, Janssens, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lefebvre, Le Hardy de Beaulieu, Lelièvre, Magherman, Mulle de Terschueren, Nothomb, Reynaert, Schollaert, Thibaut, Thienpont, Vermeire, Vilain XIIII, Visart, Warocqué, Watteeu, Wouters, Beeckman, Coomans, Couvreur, Eug. de Kerckhove, Delaet, Delcour et de Macar.
Ont répondu non :
MM. de Rongé, de Rossius, Descamps, Dethuin, de Vrière, de Vrints, Frère-Orban, Jacquemyns, Jamar, Jonet, Lesoinne, Lippens, Mouton, Muller, Orts, Pirmez, Tesch, Thonissen, T'Serstevens, Alphonse Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Vleminckx, Allard, Ansiau, Bara, Bieswal, Bouvier, Broustin, Bruneau, Castilhon, de Baillet-Latour, de Brouckere, de Kerchove de Denterghem et Dolez.
M. le président. - Je mets maintenant aux voix le dernier paragraphe de l'article, tel qu'il est amendé par M. Thonissen.
MgR. - Je demande la parole.
M. le président. - Sur la position de la question ?
MgRµ. - Je ne tiens pas a prolonger la discussion ; je n'ai demandé la parole que pour déclarer que le gouvernement se rallie à l'amendement de M. Thonissen.
M. le président. - Je mets donc aux voix la proposition telle que je viens de la lire, modifiée par M. Thonissen et à laquelle le gouvernement se rallie.
- Cette rédaction est adoptée.
Vient maintenant, messieurs, le paragraphe qui avait été omis dans la copie qui avait été d'abord remise au bureau et qui est ainsi conçu :
« Le service des remplaçants ne peut être réduit au-dessous de la limite déterminée par l'article 21ter. »
Ce paragraphe devra être mis avant celui que nous venons de voter.
Je mets ce paragraphe aux voix.
- Adopté.
La Chambre doit maintenant fixer le jour où aura lieu le second vote du projet de loi. Je me suis assuré que le projet de loi, tel qu'il est amendé, pourra être imprimé demain soir. Convient-il à la Chambre de passer au second vote vendredi prochain ?
M. Muller, rapporteurµ. - Messieurs, dans une loi aussi étendue, il peut se trouver, par suite des amendements, des dispositions qui ne concorderaient pas tout à fait entre elles ; certaines rectifications peuvent être reconnues utiles ; je crois donc qu'il serait désirable que M. le ministre de l'intérieur et la section centrale eussent un temps moral pour passer en revue les différentes dispositions du projet qui ont été adoptées.
Je promets, comme rapporteur, d'y travailler immédiatement de manière que la Chambre, puisse le plus tôt possible procéder au vote définitif de la loi ; mais il ne m'est pas possible de lui donner l'assurance que le travail préparatoire de révision sera prêt pour vendredi. .
Je désire donc que la Chambre ne fixe pas à un jour trop rapproché le second vote du projet de loi.
MiPµ. - Nous pourrions peut-être avoir fini le travail de révision pour vendredi.
Je remettrai aujourd'hui à l'honorable rapporteur une grande partie du texte qui a déjà été imprimé il y a longtemps.
La dernière moitié vient d'être faite et je crois que l'honorable rapporteur, qui connaît cette loi mieux que personne pourra terminer pour vendredi.
Je demanderai en même temps que, dans l'impression du projet, on puisse avoir égard aux changements d'articles, comme cela se fait ordinairement. Il y a des articles bis et ter qui doivent être coordonnés.
M. Muller, rapporteurµ. - Je déclare, pour mon compte, que je désire que le second vote n'ait pas lieu dès vendredi.
- Voix nombreuses. - A mardi, à mardi !
M. le président. - La Chambre paraît disposée à remettre à mardi le second vote du projet de loi. Personne ne s'oppose à ce qu'il en soit ainsi ?
- Adopté.
Il nous reste maintenant, messieurs, à fixer notre ordre du jour de demain.
M. le ministre de la justice (M. Bara). - Je crois, messieurs, qu'il n'est pas possible d'aborder dès demain la discussion du projet de loi sur la lettre de change. Nous nous verrions obligés d'interrompre cette discussion pour reprendre mardi le second vote de la loi de la milice.
L'objet de ce projet de loi est trop grave et c'est une matière trop difficile à étudier pour que nous procédions de cette façon.
M. de Theuxµ. - Il s'agit d'une loi extrêmement importante. Je demande qu'il y ait un jour fixé pour la loi sur la milice, pour que tous ceux qui désirent voter puissent être présents. Pour toutes les lois importantes, cela se fait toujours.
M. le président - On pourra ultérieurement fixer le jour du second vote. Quant à présent, il s'agit de fixer la discussion du projet de loi sur la lettre de change avant le second vote du projet de loi sur la milice.
M. de Theuxµ. - Soit !
M. le président. - Nous aurions donc à l'ordre du jour de demain la discussion du budget de la guerre...
M. Vleminckxµ. - Je croyais qu'il avait été entendu qu'avant de voter le budget de la guerre, la Chambre s'occuperait du projet de loi apportant des modifications au régime actuel du service de santé. La discussion de ce projet ne demandera d'ailleurs pas beaucoup de temps.
MfFOµ. - Il est indispensable que l'on vote d'abord le budget.
MiPµ. - Nous approchons de la fin de l'année. Nous avons le budget de la guerre et la loi sur le contingent de l'armée qui doivent être nécessairement votés avant le 1er janvier.
(page 124) M. Vleminckxµ. - M. Vleminckxµ. - Je pense qu'il a été entendu qu'on s'occuperait d'abord du projet de loi sur le service de santé, parce que certains chiffres du budget dépendent du vote ou du rejet de ce projet de loi.
MgRµ. - Il n'y aurait, dans tous les cas, qu'un seul chiffre à changer : celui du service de santé. Si l'on adopte la loi, il y aura une augmentation de quelques milliers de francs pour ce service. Mais il est extrêmement important pour mon département que le budget soit voté avant le 1er janvier.
Je demande donc, qu'on vote d'abord le budget de la guerre et la loi sur le contingent, pour que le Sénat, qui se réunira au commencement du mois prochain, puisse les examiner.
M. le président. - Le projet de loi sur le service de santé viendra immédiatement après, de sorte que ces lois pourront être votées à peu près en même temps.
M. Vleminckxµ. - Dans ce cas, je n'insiste pas.
M. le président. - Nous avons donc à l'ordre du jour de demain : 1° le budget de la guerre ; 2° le projet de loi sur le contingent de l'armée ; 3° le projet de loi sur le service de santé.
- La séance est levée à quatre heures trois quarts.