(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1867-1868)
(Présidence de M. Dolezµ.)
(page 883) M. Dethuin, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 1/4 heures.
M. Snoy, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
Il présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Delbar demande l'exécution du chemin de fer direct de Bruxelles à Luttre par Waterloo »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les membres du conseil communal et des habitants de Viane demandent l'établissement d'une station à Moerkerke sur la route de Grammont à Enghien. »
- Même renvoi.
« Le sieur Louis Moyaerts, chef de division à la cour des comptes, demande la place de greffier à cette cour. »
- Dépôt au bureau des renseignements.
« M. Lippens, obligé de s'absenter pour des devoirs de famille, demande un congé de quelques jours. »
- Ce congé est accordé,
M. le président. - La discussion générale est ouverte.
M. Van Iseghem. - Messieurs, je regrette vivement que le projet de loi qui nous est soumis ne contienne aucune demande de crédit pour les travaux d'agrandissement de la station principale d'Ostende.
La station est très étroite et l'entrée laisse beaucoup à désirer.
Les manœuvres dans cette station sont excessivement difficiles. En été il y a affluence de voyageurs ; nombre de convois arrivent tous les jours et on est très gêné. En hiver surtout pendant la fermeture de l'Escaut, comme nous avons vu cette année, il n'y a pas de place dans la station, il y a tellement eu d'encombrement que les expéditions se sont faites difficilement et avec les plus grands retards ; l'Etat a dû même payer des indemnités à cause que les marchandises n'ont pu être expédiées à temps.
Il y a deux ans, le gouvernement a lui-même reconnu la nécessité d'agrandir cette station. Il a fait faire un plan qui a été approuvé ; déjà les premières formalités pour l'emprise des terrains ont été remplies. Le gouvernement s'est arrêté, et depuis lors rien ne s'est fait.
Dans quelques jours, une nouvelle ligne sera ouverte entre Ostende et Thourout, cette ligne importante augmentera considérablement le trafic ainsi que le nombre des convois. C'est une raison de plus pour que le gouvernement s'occupe de l'agrandissement de la station. Le démantèlement des fortifications aura lieu sous peu. Le gouvernement a des terrains disponibles, et avant de vendre lesdits terrains, on doit commencer les travaux de la station.
Je prie donc M. le ministre des travaux publics de comprendre, dans la première demande qu'il fera à la législature, le crédit nécessaire pour les travaux de la station d'Ostende, et j'espère que l'honorable ministre pourra me donner une réponse favorable.
Je ne présente pas d'amendement. J'ai confiance dans le gouvernement. J'espère qu'il aura égard aux réclamations que la ville d'Ostende lui a adressées à plusieurs reprises.
Les travaux du débarcadère sont en ce moment en voie de construction et très avancés. Le travail doit être terminé dans le courant de cette année. Il ne s'agit plus que de demander un crédit supplémentaire pour quelques travaux extraordinaires et pour la construction des bâtiments et des bureaux du chemin de fer et de la douane. Pour ce dernier bâtiment, une convention est intervenue entre l'Etat et l'administration communale d'Ostende ; j'engage beaucoup l'honorable ministre des travaux publics à demander, dans le courant de cette session, ce supplément de crédit. J'espère que M le ministre voudra bien me donner une réponse favorable,
M. Lelièvreµ. - A l'occasion du projet de loi en discussion, je dois adresser à M. le ministre des travaux publics une interpellation relative aux intérêts de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter plus spécialement dans cette enceinte. Je désire savoir si le gouvernement se propose d'exécuter le plus tôt possible les travaux relatifs à la canalisation de la Meuse jusqu'à la frontière française. Ces travaux, décrétés depuis longtemps, sont réclamés par les motifs les plus sérieux. Je prie donc M. le ministre de nous dire à quoi en sont les choses concernant cette œuvre importante.
D'un autre côté, une voie ferrée depuis Jemeppe-sur-Sambre jusqu'à la Meuse et passant par Fosses a également été décrétée depuis plusieurs années. Cependant rien ne s'est fait jusqu'à présent. Je désire également obtenir des explications sur un chemin de fer d'une nécessité indispensable et destiné à desservir des localités, situées entre la Sambre et la Meuse, qui, jusqu'à présent, sont dépourvues de voies rapides de communication.
En ce qui concerne le projet de loi, je ne puis que me rallier à des dispositions dont l'utilité ne peut être méconnue et qui procureront de nombreux avantages, non seulement aux populations, mais aux classes laborieuses, auxquelles l'exécution des travaux sera éminemment favorable ; mais dans l'intérêt d'une industrie qui doit être protégée, je demanderai à M. le ministre si, pour les travaux projetés, l'emploi de la pierre bleue, dite granit, ne serait pas préférable à tout autre genre de pierres.
Des hommes de l'art, dont l'opinion mérite d'être examinée, partagent cet avis qui me semble aussi devoir être adopté. Je désire donc que le gouvernement examine sérieusement cette question et la décide d'après les principes de justice et d'équité qui doivent présider à semblable résolution.
Ayant pleine confiance dans M. le ministre des travaux publics, je n'hésite pas à appeler sur ce point son attention particulière.
M. Nélisµ. - Messieurs, la demande de crédits spéciaux pour l'exécution de divers travaux publics, me donne l'occasion, si la Chambre me le permet, d'adresser une demande à l'honorable ministre des travaux publics, relativement au chemin de fer de Bruxelles à Châtelineau, par Luttre.
La loi du 8 juillet 1865 a autorisé le gouvernement à concéder un chemin de fer direct avec embranchements éventuels de Châtelineau à Bruxelles, par Luttre, en réservant l'exploitation à l'Etat.
La concession de ce chemin de fer devait être accordée par adjudication publique sur la quotité du produit brut à attribuer à l'Etat et sur la durée de la concession. Si les soumissions n'étaient pas jugées acceptables, ce chemin de fer devait être construit aux frais du trésor, et dans cette éventualité, un premier crédit de cinq millions était ouvert au département des travaux publics.
Une adjudication publique n'a produit aucun résultat ; aucun soumissionnaire sérieux ne s'est présenté. Dans cette situation, le gouvernement, aux termes de la loi du 8 juillet 1865, est tenu de construire cette voie ferrée à ses frais. Un premier crédit a été voté, les plans du tracé doivent être dressés, rien ne paraît donc s'opposer à ce que l'on mette la main à l'œuvre.
Les populations intéressées à l'exécution de cette ligne s'inquiètent à juste titre ; des articles de journaux, dans un but que je ne veux pas examiner, out répandu le bruit que ce chemin de fer ne s'exécuterait pas ; des pétitions provoquées par la crainte que ces bruits avaient fait naître ont été adressées à M. le ministre des travaux publics et à la Chambre ; ' il est donc urgent que le. gouvernement se prononce.
Les plus graves intérêts sont engagés dans l'exécution de cette voie (page 884) qui mettre en rapport direct la capitale avec le centre industriel le plus > c considérable du pays, en traversant une des contrées les plus riches et les plus peuplées de la Belgique. Les résultats financiers de l'entreprise ne peuvent être douteux, le gouvernement trouvera dans les produits de la ligne non seulement les intérêts, mais encore le remboursement, dans un temps relativement peu éloigné, des capitaux engagés. Rien ne s'oppose donc à ce que l'on commence les travaux, et ce n'est pas sans raison que je viens prier l'honorable ministre de faire connaître à la Chambre et au pays quelles sont les intentions du gouvernement. J'espère que sa réponse sera satisfaisante. Pour rassurer les populations il faut autre chose que des promesses ; il faudrait un commencement d'exécution.
M. de Zerezo de Tejadaµ. - Je lis dans le rapport de la section centrale qu'elle n'a pas cru devoir entrer dans la voie de propositions nouvelles, parce que le véritable état des choses ne lui est pas suffisamment connu et qu'elle eût par conséquent couru le risque de demander trop ou trop peu ; qu'elle s'est renfermée strictement dans les limites du projet de loi qui lui était soumis et n'a entendu les franchir en aucune manière.
« C'est ce même motif, ajoute-t-elle, qui l'a empêchée de prendre en considération la pétition du conseil communal de Brecht, que la Chambre lui a renvoyée par décision du 13 février dernier, et qui a pour objet l'achèvement du canal d'Anvers à Turnhout par Saint-Job in 't Goor. »
Puisque, d'après la déclaration du rapport, cette pétition est déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi qui vous est actuellement soumis, je profite de cette occasion pour en entretenir un instant la Chambre et je n’imiterai pas, à son égard, la prudente réserve et l'extrême discrétion de la section centrale.
Depuis de longues années, la ville de Turnhout et les communes de la Campine, intéressées à la construction du canal dont il s'agit, l'ont réclamé avec de vives instances, parce qu'elles sont convaincues qu'il contribuera puissamment à la prospérité de leur agriculture, de leur industrie et de leur commerce. La loi de 1861 est venue donner une satisfaction à leurs réclamations aussi légitimes que réitérées. La première section du canal, votée à cette époque par la législature, est aujourd'hui complètement achevée, c'est-à-dire l'embranchement de Turnhout à Saint-Job in 't Goor.
Pour compléter et mener à bonne fin cet ouvrage important, auquel se rattache un intérêt vital pour l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter dans cette enceinte, il ne reste plus qu'à construire la deuxième section, c'est-à-dire celle de Saint-Job in 't Goor à Anvers. M. le ministre des financée a déclaré naguère à la section centrale chargée de l'examen du projet de loi relatif à l'emprunt de 60 millions, que le gouvernement compte, avant d'entreprendre de nouveaux travaux, employer les sommes que cet emprunt a rendues disponibles, d'abord aux ouvrages en voie d'exécution et, en deuxième lieu, à ceux qui ont été décrétés. Or, messieurs, parmi les travaux publics qui appartiennent à cette catégorie privilégiée, le canal de Turnhout à Anvers occupe incontestablement un des premiers rangs. Je n'en trouve pas qui ait été à la fois décrété et mis à exécution depuis plus longtemps.
Cependant, messieurs, bien que toutes les emprises aient été faites, bien que tous les terrains nécessaires aient été achetés par le gouvernement jusqu'à Anvers ; bien que, sur les crédits votés par la législature, il reste encore une somme de plus d'un million de francs disponible, il n'est plus fait mention de cette voie de navigation à laquelle se rapportent de si grands intérêts, on n'y fait plus aucune allusion dans les projets des travaux qui doivent être effectués ; on dirait vraiment que le canal de Turnhout à Anvers est entièrement oublié et qu'il n'en a jamais été question.
Et cependant l'ancien ministre des travaux publics, l'honorable M. Vanderstichelen, des bonnes intentions duquel la Campine n'a eu qu'a se louer, a déclaré plus d'une fois aux pétitionnaires, et entre autres dans une dépêche officielle du 31 mars 1867, que l'intention formelle du gouvernement est d'affecter au canal dont il s'agit les fonds mis à sa disposition dans ce but. S'il en est ainsi, pourquoi ne pas avoir compris l'achèvement de cet ouvrage si important dans la série de travaux d'utilité publique pour lesquels on nous propose aujourd'hui de voter des crédits spéciaux ?
Voilà l'interpellation que j'ai l'honneur d'adresser à M. le ministre des travaux publics et à laquelle j'espère qu'il voudra bien me répondre.
Certes je ne désapprouve pas le projet de loi qui tend à ouvrir au gouvernement des crédits dont l'ensemble s'élève à 5,500,000 fr. pour les grandes stations de Bruxelles, Mons, Charleroi, Tournai, Bruges, Courtrai et Liège, ainsi que plusieurs stations secondaires. Je ne m'oppose pas à ce qu'on érige un nouveau palais de justice, à ce que l'on embellisse les palais du Roi. Ces travaux, bien qu'ils soient autant de luxe, comme l'observait l’honorable M. Dumortier dans la séance d'avant-hier, que d'utilité publique, je suis prêt à y donner le concours de mon vote.
Mais pourquoi ne pas avoir rangé parmi eux l'achèvement d'un canal qui a été voté par la législature, qui est réclamé avec tant d'énergie et attendu avec tant d'impatience par les populations intéressées, qui exercerait une influence si décisive sur la richesse publique d'une contrée peu favorisée par la nature, en la reliant directement avec de grands centres commerciaux, qui, en un mot, serait un véritable bienfait pour l'arrondissement que je représente et aussi pour celui d'Anvers ?
Pourquoi, malgré les promesses formelles qui ont été faites, pourquoi, malgré le vote de la Chambre, cet oubli, je dirai même ce dédain de nos intérêts ?
Messieurs, je crois, et vous serez tous de mon avis, je l'espère, qu'il faut, avant tout, de la justice distributive.
De même que tous les citoyens sont égaux devant la loi, de même les arrondissement, bien entendu dans la mesure de leurs besoins, doivent être égaux devant le budget.
Sans quoi, il arriverait que les plus importants d'entre eux, ceux qui disposeraient des plus grandes influences finiraient par attirer tout à eux, au grand préjudice des autres.
Je ne veux pas, aujourd'hui, insister davantage sur l'utilité et la nécessité du canal de Turnhout à Anvers. Je compte revenir sur ce sujet avec de plus amples détails, lors de la discussion du budget dés travaux publics. Je veux me limiter strictement, aujourd'hui, à l'interpellation que j'ai l'honneur d'adresser à M. le ministre des travaux publics et à laquelle, j'espère, il voudra bien répondre.
M. de Macarµ. - Messieurs, le projet de loi actuellement en discussion soulève une question importante pour trois de nos provinces, mais principalement pour celles de Liège et de Hainaut. Il s'agit de l'emploi des pierres bleues et blanches. J'ai été chargé de faire rapport sur cette question par la commission des pétitions et je suis prêt à le faire immédiatement si M. le ministre le juge opportun. Je le ferais notamment si le vote du projet de loi actuellement en discussion engageait en quoi que ce soit le gouvernement à employer la pierre blanche pour la construction du palais de justice de Bruxelles.
Je voudrais faire les mêmes réserves quant à la station de Tournai, mais je crains que la réponse faite à la section centrale n'établisse que là une décision a déjà été prise. Mais, je le répète, si l'honorable ministre des travaux publics ne pouvait me donner une réponse formelle en ce qui concerne le palais de justice de Bruxelles, il serait de mon devoir d'exposer, dès ce moment, les raisons qui me font désirer vivement qu'on donne la préférence à notre industrie indigène.
MtpJµ. - Messieurs, je reconnais volontiers les avantages que l'exploitation des chemins de fer trouverait dans l'agrandissement de la station d'Ostende.
Aussi, serais-je très heureux, pour ma part, de pouvoir acquiescer au désir qu'a manifesté l'honorable bourgmestre d'Ostende. Mais, pour se traduire en fait, dans une foule de situations analogues, notre bon vouloir aurait besoin d'avoir à sa disposition des crédits considérables.
Il faut donc que la ville d'Ostende, comme plusieurs localités importantes, attende que nous ayons les ressources nécessaires à des travaux dont je ne méconnais point, du reste, l'urgence et l'utilité.
Quant au raccordement de la station principale au quai des bateaux à vapeur et aux travaux accessoires que ce travail comporte, une première allocation de 600,000 francs a été votée et est aujourd'hui complètement absorbée.
Il faudra, pour compléter ce travail très urgent, solliciter un nouveau crédit de la législature.
L'honorable M. Lelièvre nous a entretenus de trois objets qui tous ont un intérêt sérieux, et, en premier lieu, des travaux de canalisation de la Meuse.
Un crédit important a été voté pour ce travail.
Des plans ont été établis, et les cahiers de charges sont dressés.
Mais nous savons tous quelles considérations impérieuses ont dans ces derniers temps imposé au gouvernement une très grande réserve dans certaines dépenses. J'espère qu'il nous sera possible de nous départir, dans une certaine mesure, de cette réserve dans peu de temps et que ces travaux pourront recevoir bientôt un commencement d'exécution.
(page 885) Quant au chemin de fer de Jemeppe à la Meuse, j'examinerai avec la plus grande attention la situation des concessionnaires et je prendrai toutes les mesures que cet examen me suggérera.
MM. Lelièvre et de Macar viennent de me recommander d'une manière spéciale l'emploi de la pierre bleue dite petit granit. Une pétition a été adressée à la Chambre par des maîtres de carrière à ce sujet ; je crois qu'il vaudrait mieux ajourner toute discussion sur cette question jusqu'à la présentation du rapport et je puis dire dès maintenant à M. de Macar que le vote de la Chambre ne préjugera rien quant à la suite qui sera donnée à cette question.
M. de Macarµ. - C'est parfait.
MtpJµ. - Quant à M. de Zerezo, je dois lui tenir le même langage que celui que je viens de tenir à M. Lelièvre.
Ici encore un crédit a été voté ; le gouvernement, si mes souvenirs me servent bien, dispose d'un million ; les terrains sont acquis, les plans sont établis ; les cahiers des charges sont dressés, et aussitôt que le gouvernement croira pouvoir disposer sans inconvénient de ce crédit, je serai enchanté, pour mon compte, de donner l'ordre de commencer les travaux.
J'arrive aux observations présentées par M. Nélis ; il y a là une question qui intéresse plusieurs arrondissements et dont le gouvernement s'est toujours préoccupé avec une grande sollicitude.
L'article 2 de la loi du 8 juillet 1865 était ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à concéder un chemin de fer direct, avec embranchement éventuel, de Châtelineau à Bruxelles par Luttre.
« Ce chemin de fer sera exploité par l'Etat.
« La concession en sera accordée en vertu d'une adjudication publique portant sur la quotité du produit brut à attribuer à l'Etat et sur la durée de la concession.
« Si les soumissions ne sont pas jugées acceptables, le chemin de fer sera construit aux frais du trésor. Dans cette éventualité, un premier crédit de cinq millions de francs est ouvert au ministère des travaux publics. »
La loi du 31 mai 1866 vint autoriser le gouvernement à concéder à la société des Bassins Houillers, d'abord, un chemin de fer de ceinture autour de Charleroi et ensuite, en dérogation à l'article de la loi que je viens de citer, la partie de la route de Charleroi à Bruxelles comprise entre Châtelineau et Luttre.
Le gouvernement, dans ces conditions, n'avait plus qu'à se préoccuper de la construction du chemin de fer de Bruxelles à Luttre.
Une première adjudication, dans le sens des prescriptions de la loi, a été tentée au mois de décembre dernier.
Aucun soumissionnaire ne s'est présenté. La raison de ce résultat est tout entière dans l'appréhension que faisait naître dans l'esprit de ceux qui eussent pu y prendre part, la concurrence que pouvait faire éventuellement une société eu construisant certains embranchements, concédés il y a bientôt vingt ans et restés en oubli jusqu'à ce jour.
Nous aurons, le cas échéant, à examiner la valeur de ces concessions. En attendant, nous avons tenté une autre combinaison pour assurer l'exécution de ce chemin de fer. Mais le moment n'est pas veau encore d'en entretenir la Chambre.
Comme cependant il était possible que des obstacles vinssent entraver le succès de cette combinaison, le gouvernement n'a pas voulu retarder l'exécution du chemin de fer de Bruxelles à Luttre et il a pris les dispositions pour commencer immédiatement la construction de cette voie si impatiemment attendue, à l'aide du crédit de 5 millions mis à sa disposition.
Je puis dire à l'honorable M. Nélis que le service des travaux s'organise en ce moment au département des travaux publics, où l'on procède également aux formalités préalables à l'expropriation des terrains.
M. Tack. - J'ai appris avec une vive satisfaction que M. le ministre des travaux publics a compris dans les crédits qu'il demande à la Chambre une première allocation de 200,000 fr. pour l'agrandissement de la station de Courtrai. J'en remercie sincèrement l'honorable ministre.
L'encombrement, dans la station de Courtrai, est considérable. Cet état défectueux des choses a été signalé depuis longtemps au département des travaux publics, et il va nécessairement s'aggraver encore par suite de l'inauguration prochaine de nouvelles lignes qui doivent aboutir à Courtrai.
L'une de ces lignes, celle de Courtrai à Denderleeuw sera inaugurée dans peu de temps ; avant un mois la section de Courtrai à Audenarde sera livrée à l'exploitation.
J'ai jeté tantôt un coup d'œil sur le calque que M. le ministre des travaux publics a communiqué à la Chambre et qui est déposé sur le bureau. Ce n'est pas le moment de discuter les dispositions figurées sur ce calque ; au fond, il n'y a là qu'un avant-projet ainsi que M. le ministre des travaux publics m'a fait l'honneur de me le déclarer dans un entretien particulier que j'ai eu avec lui, et qu'il l'a fait également connaître aux délégués de l'administration communale et de la chambre de commerce, qu'il a reçus hier à son audience.
Les questions qui se rattachent à l'adoption d'un plan définitif doivent être traitées ailleurs qu'ici et dans un autre moment. Je n'en occuperai donc pas la Chambre, cependant je tiens à reproduire ici une observation essentielle ; je veux parler de la nécessité, au point de vue des intérêts du commerce de Courtrai, de maintenir du côté de la ville le débarcadère pour les marchandises. Or, d'après l'avant-projet auquel je viens de faire allusion, ce débarcadère serait établi du côté opposé à la ville ; s'il en était ainsi, il en résulterait cette conséquence fâcheuse que tous les transports en destination de Courtrai comme ceux partant de cette station, ou si l'on veut que toutes les matières pondéreuses arrivant à Courtrai ou expédiées de Courtrai, devraient franchir le passage à niveau établi sur la route de Courtrai vers Lille.
Les passages à niveau offrent toujours de graves inconvénients ; il importe évidemment de les éviter autant que possible ; surtout, il ne faut pas y accumuler les obstacles. Les dangers et les inconvénients seraient ici d'autant plus grands que la route qui traverse le chemin de fer présente une rampe assez forte et est extrêmement étroite. En outre, par la combinaison projetée, on oblige le commerce à faire un long détour pour arriver à la station ; je suis convaincu que cela pourra être facilement évité en débarrassant la station de Courtrai du mouvement qui y est étranger.
Je m'explique : La station de Courtrai est devenue un centre extrêmement important où viennent aboutir de nombreuses lignes : celles de Lille, de Tournai, de Bruges, d'Ypres, de Gand et bientôt aussi les voies ferrées de Braine-le-Comte et de Denderleeuw. Tout le trafic de la Flandre occidentale, quand les lignes de Braine-le-Comte et de Denderleeuw seront achevées, va se faire par Courtrai, tout au moins pour ce qui concerne les matières pondéreuses, par exemple : la houille, la chaux, les pierres de taille, etc.
A certains égards, la station de Courtrai est transformée, si je puis m'exprimer ainsi, en une station de formation, ou de triage pour les différentes destinations de la Flandre occidentale ; qu'on isole le mouvement résultant du triage des waggons, au moyen d'une station de formation ou de toute autre installation faite en dehors de la station actuelle et l'on trouvera du côté de la ville une surface suffisante pour y établir le débarcadère des marchandises.
Du moment que la station de Courtrai sera débarrassée du mouvement qui ne lui est pas propre, du moment qu'elle ne servira plus qu'au mouvement des voyageurs et aux chargement et déchargement des marchandises en destination ou partant de Courtrai, l'encombrement aura cessé.
J'insiste donc pour que l'on mette d'abord la main à l'œuvre pour débarrasser la station de Courtrai des manœuvres qui ont pour but la formation des trains ; qu'ensuite on songe à la construction de la gare couverte, dont la haute utilité est reconnue par M. le ministre ; ces travaux peuvent être exécutés sans rien compromettre ; il sera toujours temps de fixer l'emplacement du débarcadère définitif des marchandises.
Je recommande ces objets à l'attention spéciale de M. le ministre des travaux publics. J'espère qu'il pourra être fait droit aux justes réclamations de l'administration communale de Courtrai et de la chambre de commerce. J'en ai pour garant les bonnes dispositions que M. le ministre nous a déjà montrées pour la ville que je représente plus particulièrement dans cette enceinte.
M. Woutersµ. - Messieurs, pas plus que les honorables membres qui viennent de se rasseoir, je ne veux critiquer les divers crédits qui nous sont demandés. Je ne puis cependant m'empêcher d'exprimer la surprise que j'éprouve de ne voir mentionner dans le projet de loi aucune allocation pour l'agrandissement de la station de Louvain. Néanmoins entre tous les travaux d'utilité publique dont l'exécution vous est recommandée, il n'en est guère qui puissent mieux se justifier.
C'est ce que la section centrale elle-même a reconnu, en regrettant qu'aucun crédit n'eût été demandé à ce sujet.
Je ne rappellerai pas en ce moment ce que mes honorables collègues de la députation louvaniste et moi avons dit, dans cette enceinte, sur les changements qu'il convenait d'apporter à la station de Louvain ; je (page 886) crois que ces observations trouveront mieux leur place lors de la discussion du budget des travaux publics. Qu’il me suffise de dire que l’utilité, ou, pour mieux dire, la nécessité de ce travail n’a pas été contestée ; ce qui seul a paralysé jusqu’ici les bonnes intentions du gouvernement, c’est l’état de gêne des finances.
Or, puisque le trésor semble accuser aujourd'hui une situation assez prospère pour qu'elle permette d'ouvrir des crédits jusqu'à concurrence de 5,150,010 francs, j'ai tout lieu de m'étonner que la ville de Louvain n'ait pas été comprise dans ce partage.
Je fais donc, en toute confiance, un appel à la justice, et à l'impartialité de M. le ministre des travaux publics ; alors que les villes de Bruxelles, Tournai, Mons, Bruges, Courtrai et Liège voient leurs demandes accueillies, j'espère qu'il en sera de même des justes réclamations de la ville de Louvain.
Je me réserve de revenir prochainement sur cette question, me bornant, en ce moment, à demander à l'honorable ministre qu'il veuille bien prononcer quelques paroles rassurantes sur ses intentions.
M. Jacobsµ. - Messieurs, je suis charmé d'entendre le chef du département des travaux publics nous annoncer l'exécution plus ou moins prochaine de la section de canal entre Anvers et Saint-Job ; j'en serais plus charmé encore, si plusieurs fois on ne nous avait déjà fait entrevoir cette perspective, sans qu'elle se soit réalisée ; j'espère qu'enfin nous enverrons la réalisation.
Quand, il y a un an, nous avons autorisé la concession de chemins de fer secondaires d'intérêt local, dans les Flandres, le Brabant et le Hainaut, j'ai demandé à l'ancien ministre des travaux publics s'il n'en concéderait pas également dans la province d'Anvers ; il m'a répondu qu'il fallait pour cela qu'il se produisît des demandes de concession.
Depuis lors, MM. Chauchet et Bennert ont sollicité la concession d'un chemin de fer se dirigeant d'Anvers vers la Hollande, bifurquant à Brecht pour aboutir d'un côté à Bréda, de l'autre à Tilbourg.
Le département des travaux publics leur a répondu que, s'ils justifiaient de l'existence d'un capital suffisant, il leur accorderait la concession.
Les concessionnaires ont réalisé le capital ; ils attendent la concession promise.
Le changement qui s'est produit dans le département des travaux publics explique le retard apporté jusqu'à présent ; mais j'espère qu'avant la fin de la session l'honorable M. Jamar voudra bien accorder cette concession de chemin de fer.
C'est un phénomène trop extraordinaire qu'une demande sérieuse de concession en Campine sans réclamation d'un minimum d'intérêt, pour qu'on laisse échapper cet oiseau rare qu'on ne retrouvera plus.
Avant de me rasseoir, je dirai deux mots d'une question qu'ont soulevée dernièrement les honorables MM. Van Overloop et Dumortier ; ils ont fait observer que, pour faciliter les relations entre la Flandre orientale et Anvers, il serait utile d'établir un pont sur l'Escaut.
L'un de ces honorables membres préconisait un pont fixe, l'autre un pont flottant.
Ce ne sont que des idées qui doivent mûrir et faire leur chemin ; j'en joindrai une autre pour qu'elle subisse aussi le contrôle des hommes spéciaux : ne vaudrait-il pas mieux faire passer un tunnel sous l'Escaut comme il en existe un à Londres sous la Tamise ?
C'est l'idée qui satisferait le plus l'élément militaire ; une communication de cette nature serait à l'abri des bombes et des obus ; cela satisferait aussi la navigation qu'un pont pourrait entraver et qui ne rencontrerait dans l'établissement d'un tunnel aucune espèce d'obstacles.
L'avantage des promeneurs serait moins bien sauvegardé, mais c'est là un intérêt accessoire.
Je ne donne pas l'idée comme bonne, je sais que des hommes spéciaux s'en sont préoccupés et l'ont étudiée ; je me borne à demander que dans l'examen qui se fera de la question, dans les régions gouvernementales, on se préoccupe de la possibilité d'établir un tunnel sous l'Escaut en même temps que du pont à jeter au-dessus.
Il est certain que, quelle que soit la nature du mode de communication, les terrains appartenant à l'Etat, tant ceux de la citadelle du Sud sur la rive droite, que ceux de la Tête de Flandre sur la rive gauche, en retireront une plus-value considérable.
C'est encore là, messieurs, une considération à laquelle le gouvernent ne saurait être indifférent.
M. Wasseige. - Je remercie l'honorable ministre des travaux publics des bonnes paroles qu'il a prononcées en répondant à mon collègue de Namur et par lesquelles il a fait espérer que les travaux de canalisation de la Meuse supérieure pourraient bientôt être commencés. Il a parlé des obstacles sérieux qui avaient empêché, jusqu'à ce jour l'exécution d'un vote positif de la Chambre ; je suppose que c'est une allusion à l'état actuel de la Meuse française ; eh bien, je crois être à même d'établir que cet état de la Meuse française n'est pas une raison suffisante pour retarder la canalisation de la Meuse belge ; je. prouverai, je l'espère, que les avantages à retirer de cette amélioration sont tels, qu'ils justifient parfaitement la dépense, sans avoir égard à ce qui existe en France, mais cette démonstration me paraît devoir être mieux placée à la discussion du budget des travaux publics et je me réserve de reprendre la parole à cette occasion.
M. Van Cromphautµ. - Messieurs, je ne puis laisser passer la discussion qui est engagée, sans signaler, à mon tour, à la bienveillante attention de M. le ministre des travaux publics un oubli qui me semble exister dans la demande des crédits spéciaux pour l'exécution de divers travaux d'utilité publique justifiés dans l'exposé des motifs.
Depuis plusieurs années déjà, les populeuses communes de Hamme, Waesmunster, Moerseke et Grimberghen réclament avec instance l'établissement d'une station dans cette dernière commune, entre Termonde et Zele.
Ces communes comptent une population réunie de plus de 22,000 habitants, sans parler de celle de Tamise, de la ville de Lokeren et d'une partie de Zele qui ont un intérêt direct dans l'érection de cette station.
Vous savez, messieurs, que le commerce, l'industrie, l'agriculture et la richesse de cette partie du pays ont une importance réelle.
La station la plus rapprochée est celle de Termonde. Or, pour traverser cette ville, on rencontre deux ponts tournants, sur l'Escaut et sur la Dendre, souvent ouverts pour livrer passage aux bateaux, pendant vingt et trente minutes. Il en résulte que les voyageurs arrivent souvent trop tard pour le départ du tran, ce qui donne lieu à une perte de temps très préjudiciable.
En présence de la création de tant de halles et de petites stations dans des localités de moindre importance, il serait juste d'accorder sans retard le même bienfait aux habitants dont je défends les intérêts.
Non seulement on rendrait un immense service à ces populations actives, mais le trésor public y trouverait un très grand avantage, et on serait étonné du mouvement qui se développerait bientôt dans cette nouvelle station.
L'année dernière, une députation composée de bourgmestres et de quelques membres de la chambre de commerce de Termonde, ont eu l'honneur d'avoir une audience de M. le ministre Vanderstichelen, qui a daigné reconnaître alors la justice des considérations qu'on a fait valoir, et il n'a eu d'autre objection à faire à l'érection de cette station, que l'insuffisance des ressources de son département.
Cet honorable ministre a ajouté qu'il tâcherait de trouver ce crédit à la première occasion.
Il est inutile d'entrer dans d'autres détails pour fore comprendre la haute utilité de la station que je préconise, et dont la dépense ne serait pas élevée.
Je demande à l'honorable M. Jamar de vouloir prendre en considération les motifs que je viens de développer brièvement en faveur de ma motion, et j'espère que l'honorable ministre daignera répondre quelques mots de nature à satisfaire les intéressés dans un bref délai.
M. Bouvierµ. - Je ne réclamerai rien, messieurs, en faveur de l'arrondissement qui m'a envoyé dans celle enceinte.
Je crois que toutes les observations concernant les intérêts locaux trouveront mieux leur place lorsque nous serons arrivés à la discussion du budget des travaux publics.
Je rentre donc, messieurs, dans la discussion du projet de loi qui est soumis à nos délibérations.
Je désirerais savoir si le gouvernement est décidé à vendre les terrains occupés aujourd'hui par la station du Midi, lorsque la nouvelle station remplacera l'ancienne.
Comme cette installation aura lieu dans la présente année, le gouvernement compte-t-il procéder immédiatement après à cette vente ?
Il serait bon, messieurs, que le public fût averti, afin qu'il se préparât à faire des acquisitions.
La vente de ces terrains immédiatement après l'installation de la nouvelle station ferait profiter le trésor des intérêts d'un capital considérable. Je demande donc à M. le ministre des travaux publics de vouloir bien nous donner quelques explications à cet égard.
(page 887) MtpJµ. - Messieurs, je ne puis que confirmer à l'honorable M. Tack ce que je lui ai dit hier. Je désire de tout mon cœur qu'un accord puisse s'établir entre le département des travaux publics et l'administration communale de Courtrai pour concilier à la fois les intérêts de l'exploitation et les in érêts de la ville, et je ferai tous mes efforts pour arriver à ce résultat.
Quant à la station de Louvain, il en est comme à Ostende.
Il y a là des travaux qu'il serait très utile de faire et notamment la construction d'une gare couverte qui est décidée en principe depuis longtemps et a fait l'objet d'une convention entre le département des travaux publics et la compagnie du Grand-Central.
Aussitôt que les ressources du trésor permettront de consacrer une somme importante au parachèvement de nos chemins de fer, la station de Louvain recevra sa part dans le crédit qui pourra être alloué au département des travaux publics.
Quant à la concession sollicitée par MM. Chauchet et Bennert, dont a parlé l'honorable M. Jacobs, je serai probablement, lors de la discussion de mon budget, en situation de donner à l'honorable membre les renseignements qu'il désire.
L'établissement d'un passage sous l'Escaut est un travail dont personne ne méconnaît la haute utilité. Mais je ne puis que répéter à l'honorable M. Jacobs ce que mon honorable collègue M. le ministre de laà guerre lui a dit, qu'il y avait lieu d'examiner la question avec une grande sollicitude.
L'honorable M. Van Cromphaut a parlé d'une station entre Termonde et Zele. La construction de cette station est décidée en principe. Mais je dois, comme mon honorable prédécesseur, lui dire qu'il faut patienter également jusqu'au moment où nous aurons les ressources nécessaires pour mettre ce projet à exécution.
Quant aux terrains de la station actuelle du Midi, aussitôt qu'ils seront libres, ils seront remis à l'administration des domaines et le gouvernement prendra les résolutions que le soin de ses intérêts lui dictera.
- La discussion générale est close.
« Art. 1er. Des crédits spéciaux, jusqu'à concurrence de cinq millions trois cent cinquante mille francs (fr. 5,350,000) sont ouverts au gouvernement, pour l'exécution des travaux ci-après, savoir :
« Au ministère des travaux publics
« 1° Continuation des travaux de la station de Bruxelles (Midi) : fr. 1,000,000
- Adopté.
« 2° Etablissement d'une station définitive à Tournai : fr. 500,000. »
M. Dumortier. - Messieurs, si j'envisage dans son ensemble le projet de loi qui nous est présenté, il me semble que la Belgique est une nation bien pécunieuse et que l'or y afflue de tous les côtés. En effet, en additionnant les crédits qui vont être dépensés pour des constructions que l'on peut dire de luxe, je trouve que rien que pour les six stations de Bruxelles, de Mons, de Bruges, de Liège, de Charleroi et de Tournai, on va dépenser une somme de 18 millions de francs.
Est-ce là, je le demande, un emploi sérieux des deniers publics ?
M. Lebeau. - Pas pour les stations.
M. Dumortier. - Pour les stations : Bruxelles, 5,000,000 ; Mons, 1,200,000 ; Bruges, 2,000,000 ; Liège, 3,800,000 ; Charleroi, 3,000,000 ; Tournai, 2,500,000. Voilà, avec les chiffres additionnels, grosso modo, 18 millions de francs pour six stations, c'est-à-dire qu'en moyenne, c'est 3 millions par station.
Eh bien, je me demande si une société particulière dépenserait trois millions de francs par station. Je me demande ensuite où l'on s'arrêtera dans la voie des dépenses de ce genre. Quand vous aurez achevé les stations dont il s'agit dans le projet de loi, vous en avez encore vingt ou vingt-cinq autres. Si vous faites de pareilles dépenses, la dette publique s'accroîtra dans une proportion effrayante. Dans le cours de cette session, l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu a parlé de la dette publique ; je pense pour mon compte que les emprunts ne doivent pas se faire pour des objets qui ne rapportent rien. Il faut de bonnes stations pour le public, mais il est inutile de faire des bâtiments de luxe pour MM. les ingénieurs et employés.
Ainsi, messieurs, à Tournai il est question de créer une station de près d'un kilomètre de longueur ayant au-delà de 14 hectares. Je demande si cela est raisonnable. A quoi sert d'enlever des terres à l'agriculture et de faire toutes ces énormes dépenses ? Est-ce là ce que dit le projet de loi ? « Crédits spéciaux pour divers travaux d'utilité publique. »
Je me demande si c'est là de l'utilité publique. Je me demande si les sociétés concessionnaires de chemins de fer font des palais.
Elles font des stations très convenables, très commodes pour le public, mais en évitant toutes ces folles dépenses. Je regarde les bureaux du ministère des travaux publics comme étant très souvent la source de dépenses énormes et comme ne s'occupant pas du tout des intérêts du publiv. J'en ai pour preuve ce que l'on veut faire à Tournai.
La ville de Tournai a une station intérieure arrivant jusqu'au centre de la ville.
C'est là, messieurs, il faut en convenir, tout ce qu'il y a de plus commode pour la population. (Interruption.)
On dit à côté de moi : « C'est une station à rebroussement. » Eh bien, messieurs, ce sont incontestablement là les meilleures stations pour les habitants, puisqu'elles se trouvent en quelque sorte à leur porte, tandis que les stations de passage n'arrivent jamais dans l'intérieur des villes.
Allez demander à l'ancien ministre des travaux publics s'il entend supprimer la station à rebroussement de la ville de Gand.
MaeVSµ. - Cela dépend.
M. Dumortier. - C'est-à-dire que vous aurez une échappatoire parce que vous êtes député de Gand. Là vous trouvez que la station à rebroussement est bonne.
Pourquoi ne la trouvez-vous pas aussi bonne à Tournai ? Pourquoi avez-vous deux poids et deux mesures ? C'est parce qu'à Gand la station à rebroussement est nécessaire à votre élection.
S'il y a une station à rebroussement mauvaise en Belgique, c'est celle de Gand ; je n'en demande pas la destruction, loin de là, mais elle est mauvaise parce qu'elle est éloignée de près d'une lieue du centre de la ville ; car Gand est une ville très grande, puisque Charles-Quint disait : « Je mettrai Paris dans mon Gand. »
Quand on veut arriver au cœur d'une ville, il y a un détour.
MaeVSµ. - Excepté à Tournai.
M. Dumortier. - Je ne comprends pas.
MaeVSµ. - Je veux dire qu'à Tournai la station à passage direct est aussi près du cœur de la ville que l'autre.
M. Dumortier. - Comment ! vous soutiendrez qu'une station placée en dehors d'une ville est aussi près du cœur de la ville qu'une station qui pénètre dans la ville ?
C'est comme si vous disiez que votre cœur serait aussi près de votre corps s'il était placé en dehors de votre corps.
Toutes les stations de Bruxelles sont à rebroussement. Il en est de même de toutes les stations de Paris.
M. Orts. - Ce n'est pas la faute des députés de Bruxelles si les stations de la capitale sont à rebroussement.
Nous n'avons cessé de demander une station centrale.
M. Dumortier. - Je suis aussi d'avis qu'il devrait y avoir une station centrale à Bruxelles, car il est un fait démontré, c'est que plus une station pénètre dans l'intérieur d'une ville, plus elle est utile à ceux qui y descendent et qui y montent en convoi.
Quand une station est au cœur d'une ville, non pas comme le veut M. le ministre des affaires étrangères, elle est bien plus utile à ceux qui y descendent et qui y montent en convoi.
Messieurs, quand il y a 25 ans, on a fait les stations de Tournai et de Gand, que disait le gouvernement ? Il disait : Je mets la station en plein champ et si vous voulez avoir une station intérieure, vous payerez la différence. La ville de Tournai a payé 200,000 francs pour avoir une station intérieure.
Eh bien, c'est cette station qui existe depuis 25 ans, que l'on veut détruire.
Or, qu'est-il arrivé ? Toutes les rues qui aboutissent à la station se sont peuplées de maisons de commerce et d'établissements.
Est-ce que ceux qui se sont établis là sur la foi publique, ne méritent aucune sympathie ? Avez-vous le droit de les exproprier pour faire des ouvrages inconsidérés et impossibles ?
Il y a, messieurs, une chose de laquelle il faut tenir compte en toute circonstance, c'est la foi publique. Quand des habitants sont venus fonder des établissements commerciaux dans toutes les rues aboutissant à la station, vous ne pouvez établir la station dans une situation tout à fait différente.
(page 888) Du reste, c'est là une véritable expropriation qui n'a pas pour cause l'utilité publique, mais bien l'inutilité publique.
Ainsi, tout déplacement de stations fait naître des expropriations et lèse une foule de citoyens.
On dit : La station de Tournai est à rebroussement ; mais les meilleures stations sont les stations à rebroussement, alors surtout que ces stations ne causent pas de retards.
On parlera des stations à rebroussement tout à l'heure, permettez-moi donc de vous dire une grande vérité, les stations à rebroussement ont été autrefois un véritable obstacle ; quand le train arrivait, on devait mettre la locomotive sur une plate-forme, la faire tourner et venir reprendre la queue du train ; il y avait là une perte de temps de 7 à 10 minutes.
Mais cet inconvénient existe-t-il encore ? Nullement, dans chaque station il y a toujours, de toute nécessité, une locomotive de secours pour les cas d'accidents et qui chauffe toujours. Eh bien, qu'arrive-t-il ? Quand un train arrive, la locomotive de secours va se mettre à la queue du convoi et elle y est attachée avant que les voyageurs soient descendus de leur voiture.
Ainsi ne venez plus nous parler des retards que fait naître la station à rebroussement. L'expression de station à rebroussement n'est plus aujourd'hui que le pont aux ânes au moyen duquel on veut détruire ces stations.
D'un autre côté l'avantage des stations à rebroussement est incontestable ; en effet il est de l'intérêt d'une ville d'avoir sa station à l'intérieur et Tournai a fait une dépense de 200,000 fr. pour avoir sa station dans ces conditions.
Messieurs, j'ai parcouru presque toute l'Europe, eh bien, je n'ai jamais vu une seule entrée de ville par un chemin de fer comparable à celle de Tournai. Les beaux quais de l'Escaut et toutes les grandes artères de la ville se rendent à la station ; l'aspect en est magnifique, il n'y en a pas non plus de plus favorable aux habitants, puisque toutes les grandes artères convergent vers l'Escaut et la station.
Mais, dit-on, la station de Tournai est trop étroite, soit ; mais élargissez-la ; si vous l'élargissez sur l'emplacement où elle se trouve, vous ne faites ni plus ni moins qu'une économie de 2 millions.
Le déplacement de la station coûtera 2 1/2 millions, c'est le chiffre accusé dans le rapport, mais je suis convaincu que la dépense sera beaucoup plus élevée ; or, il est un fait certain, c'est qu'on pourrait élargir la station de Tournai avec une somme qui n'excéderait pas 250,000 francs.
Ajoutez-y certaines constructions et vous arrivez facilement à faire deux millions d'économie. Quel serait donc l'avantage qu'il pourrait y avoir pour les habitants, pour l'exploitation, à mettre la station à l'extérieur ?
D'abord, ici encore la station de Tournai n'est plus ce qu'elle était autrefois : avant que les murs de cette ville fussent démolis, l'entrée de la station présentait de grands dangers, parce qu'on ne pouvait y arriver que par deux portes ; mais depuis la démolition des murs, ii n'en est plus ainsi ; et ce qui prouve que, dans le principe, l'honorable M Vanderstichelen n'était pas du tout favorable au déplacement de la station, c'est que, il n'y a pas quatre ans, il acquérait encore du bureau de bienfaisance de Tournai un hectare à un hectare et demi pour agrandir la station et qu'il y faisait établir de nouvelles voies et qu'il créait une station de marchandises à côté de la station des voyageurs, ce qui, en Angleterre, est considéré comme la perfection au point de vue des facilités de l'exploitation.
Er, en effet, messieurs, quand vous avez une station de marchandises à côté de la station des voyageurs, celle-ci n'est plus encombrée par la formation des trains et l'on n'y est pas exposé à des accidents quotidiens.
Cet avantage, nous le possédons à Tournai, et l'on ne pourra pas prétendre que la station était trop étroite puisqu'elle possédait cinq voies ferrées, tandis que dans la station du nord à Bruxelles, la plus importante du pays, il n'y en a que quatre.
Et si vous aviez voulu reculer un peu, c'est-à dire de 100 à 150 mètres, vous auriez pu donner à la station assez de développement pour y établir au moins huit voies pour les voyageurs. Vous auriez eu ainsi une station aussi spacieuse que les besoins des services pouvaient l'exiger et vous auriez économisé au moins deux millions, tout en réalisant ce grand avantage de maintenir la station au centre des populations. Au lieu de cela vous allez reporter la station à un kilomètre plus loin et vous allez exproprier tous les habitants qui se sont établis depuis de longues années aux abords de la station et qui, ayant créé des établissements commerciaux sur la foi publique, me semblent mériter un peu vos sympathies.
Maintenant, je me suis demandé comment ce déplacement de la station est né ; et j'ai trouvé la réponse à cette question dans une lettre de l'administration communale de Tournai, en date du 20 juin 1864, c'est-à-dire vers l'époque où l'honorable M. Vanderstichelen faisait l'acquisition de terrains dont je parlais tout à l'heure en vue de l'agrandissement de la station actuelle. Cette lettre du 20 juin 1864 qui se trouve imprimée à la suite du projet de déplacement de la station et qui était adressée à M. le ministre des travaux publics, porte ce qui suit :
« Afin d'arrêter les études relatives au plan d'agrandissement de la ville que nous aurons l'honneur de vous soumettre prochainement, nous venons vous prier, M. le ministre, de vouloir bien nous donner connaissance des études de votre département concernant le déplacement de la station. Ces documents nous sont indispensables pour faire concorder nos projets d'agrandissement avec l'emplacement de la nouvelle station dont vous allez doter notre ville. »
Voilà ce que je trouve relativement à cela, c'est d'abord une demande de la ville de Tournai. Peu de temps après paraît une brochure que je tiens en main et qui est accompagnée d'un plan. Vous y voyez une station de près d'un kilomètre qui vient se placer parallèlement aux murs de la ville de Tournai et qui vient par conséquent intercepter toute communication entre la ville de Tournai et l'extérieur. C'est ce plan que le gouvernement s'empresse d'admettre en principe.
Les portes du Château et de Morelle sont interceptées ; la grande commune de Kain et toutes les communes du côté de Mourcourt sont coupées et les habitants ne peuvent plus entrer en ville, si ce n'est en passant soit au-dessus, soit autour de la station, soit au moyen de passages à niveau.
Ce n'est pas tout : deux lignes de chemin de fer viennent intercepter les communications, et nous sommes menacés d'un troisième chemin de fer, celui d'Anvers à Douai ; de telle manière que la ville de Tournai sera presque tout entière cernée de chemins de fer.
je ne me plains pas de l'existence de ces chemins de fer, mais je me plains que la direction qu'on leur a donnée fasse que la ville entière de Tournai soit cernée par ces voies de communication.
Quant aux niveaux, il y a un pont sur l'Escaut ; ce pont mène de Tournai vers la France ; eh bien, il est élevé à une hauteur telle, qu'il faut nécessairement, pour y passer, établir tous ces chemins de fer en remblai ; et déjà, vu les nivellements qui ont été donnés au dehors de la porte de Morelle, sont de 2 à 3 mètres au-dessus de la voie.
Il arrive donc que toutes les habitations déjà construites vont être enterrées de deux à trois mètres et que vous aurez là une muraille qui s'élèvera à cinq mètres et qui s'établira autour de la ville. Ainsi, vous aurez démoli les fortifications de la ville de Tournai pour y substituer un mur de ceinture.
Eh bien, je le demande, est-il possible de traiter une ville de telle façon ? N'est-ce pas le comble de la sottise ? Ainsi vous aurez établi aux portes d'une ville un chemin en remblai de 5 à 6 mètres de hauteur, et vous prétendez que vous n'avez pas intercepté les communications de la ville tout entière ! Mais un pareil état de choses est vraiment intolérable.
Vous voulez, comme me le dit mon honorable ami, M. Tack, établir autour de la ville une véritable muraille de la Chine.
Je crois que si l'on voulait faire un pareil cadeau à la ville de Charleroi, l'honorable M. Pirmez n'aurait pas assez de paroles énergiques pour réclamer contre un pareil état de choses.
Que diriez-vous, par exemple, si à Bruxelles, on venait, le long du canal à la porte de Ninove, dans les champs voisins établir, à 10 mètres, un chemin de fer ? Il est évident que vous auriez intercepté toute espèce de communication.
Que dirait l'honorable député de Gand, que dirait l'honorable bourgmestre de Gand, si l'on proposait semblable mesure pour leur ville ? Ils s'y opposeraient de toutes leurs forces, et ils auraient mille fois raison.
Il n'est pas permis à MM. les ingénieurs de traiter une ville avec une pareille légèreté.
Qu'on fasse des travaux, je le veux bien, mais tout au moins qu'on prenne en considération la position des villes.
Messieurs, il est un point d'une haute importance pour la ville de Tournai, c'est la canalisation du bras de l'Escaut qui est connu sous le nom de petite rivière.
(page 889) Il est évident que l'avenir tout entier de la ville de Tournai dépend de l'exécution de ce travail. D'un autre côté, messieurs, ce travail est indispensable pour la navigation de l'Escaut.
Depuis que la France a détourné les eaux de la Scarpe qui est un affluent de l'Escaut, pour les jeter dans la Lys, il faut absolument, si vous voulez continuer la navigation depuis le bassin de Mons jusqu'à Gand, prendre des mesures pour empêcher le manque d'eau pendant les jours de sécheresse de l'été.
Si la petite rivière n'existait pas, il faudrait la créer. D'un autre côté, messieurs, autant cette petite rivière est utile à la navigation de l'Escaut, autant elle peut devenir utile à l'intérêt de la prospérité de la ville de Tournai, pourvu que le long de ses quais il se trouve des terrains pour y établir des manufactures. Que faut il pour assurer cette prospérité ? De l'eau et du charbon.
Eh bien, si vous aviez la petite rivière canalisée, vous auriez de l'eau et du charbon à pied d'œuvre. Alors, si la station n'est pas déplacée et qu'ainsi les terrains qui longent le canal de ceinture puissent être livrés à l'industrie, les manufactures se multiplieraient et la ville de Tournai s'agrandirait considérablement. C'est ce qui arrive à Gand, où l'eau ne manque pas et où les charbons arrivent facilement à pied d'œuvre.
Je le répète, messieurs, il n'y a qu'un moyen de faciliter la prospérité de la ville de Tournai, c'est la canalisation de la petite rivière et il n'est pas douteux que le gouvernement l'entreprendra. Cela doit inévitablement être fait.
Mais puisque cela doit être fait, pourquoi en construisant une station d'un kilomètre et une voie sur un remblai de 15 pieds le long de ses rives, empêcher la ville de Tournai de profiter des avantages de cette canalisation ?
Or, quand vous aurez établi auprès de cette rivière canalisée une station d'un kilomètre et des remblais de 10, 15 et 20 pieds de hauteur, n'aurez-vous pas intercepté complètement toute espèce de communication, et les manufactures pourront-elles encore venir s'établir à Tournai ? Evidemment vous aurez empêché ce développement manufacturier.
Dès lors, vous condamnez la ville de Tournai à rester perpétuellement dans l'état où elle se trouve aujourd'hui.
Cette ville peut grandir énormément par la démolition de ses fortifications.
Il est évident que vous détruisez cette possibilité en allant élever des murs à 100 mètres plus loin.
Je dis donc, messieurs, qu'il est impossible d'admettre le déplacement de la station.
J'ai dit tout à l'heure qu'en 1864 il n'était point question du déplacement de la station, et effectivement en recourant au Moniteur j'y trouve ceci :
Dans la séance du 18 mars 1864, il y a eu hier quatre ans, l'honorable M. Allard, par suite de la loi concédant le chemin de fer de Tournai à Lille, demandait au ministre des travaux publics si l'on n'agrandirait pas la station de Tournai qui est insuffisante..
Il ajoutait : « Il est nécessaire de prendre dès à présent des dispositions pour agrandir cette station. »
Que répondait l'honorable M. Vanderstichelen ?
« En ce qui concerne la station de Tournai, je ne puis que répéter en séance publique ce que j'ai dit aux honorables députés de Tournai dans mon cabinet, c'est que la situation nouvelle amènerait inévitablement l'agrandissement de la station de Tournai, et que le moment serait venu de faire à Tournai un établissement définitif et complet. »
Ainsi, messieurs, il ne s'agissait, il y a quatre ans, que de l'agrandissement de la station de Tournai, et rien n'est plus facile que de l'agrandir. Je le répète, l'agrandissement de la station de Tournai, tout en conservant tous les droits acquis, amènerait pour le trésor public une économie de plus de 2 millions. Mais cela n'a pas satisfait tout le monde. Il y a à Tournai des personnes que les lauriers de M. Hausmann empêchent de dormir et qui s'imaginent pouvoir faire dans Tournai les travaux qu'on fait à Paris, oubliant qu'il s'agit d'une ville qui a un budget de 300,000 à 350,000 fr.
On s'est donc imaginé de déplacer la station afin d'arriver à percer 10 ou 12 rues sur la rive gauche de l'Escaut, là où l'on a cru que l'on allait faire l'embellissement de la ville. Qu'en est-il arrivé ? C'est que ces beaux projets ne peuvent s'exécuter. La ville a contracté un emprunt qui est absorbé ; elle a fait des dépenses qui ont absorbé tout son présent et elle est dans l'impossibilité financière de faire les travaux qui nécessiterait le déplacement de la station, à moins que le gouvernement ne veuille faire ces travaux à ses dépens, et je ne pense pas que le gouvernement veuille le faire. Car le gouvernement ne peut percer des rues dans Tournai. Or, à l'endroit où vous voulez faire la station, il n'y a pas de rue qui aboutisse.
M. le ministre de la justice (M. Bara). - Nous n'allons pas discuter ici les intérêts communaux de Tournai.
M. Dumortier. - J'aime à discuter tout, parce que tout se lie. Je dis qu'il suffit de jeter les yeux sur le plan qui est là pour s'assurer qu'il n'y a pas de moyens de communication qui aboutissent à l'endroit où l'on peut établir la station, de manière qu'il faudra percer plusieurs rues.
L'honorable M. Allard a fait, sous ce rapport, un projet beaucoup plus simple et qui est préférable à tous ceux qui ont été soumis au conseil communal. Mais il n'en est pas moins vrai que ce projet repose sur des percées. Eh bien, que va-t-il arriver ? Nécessairement on ne fait pas de percées sans argent. Il faut percer trois rues. Il faut pour cela de l'argent, où le trouverez-vous ? Est-ce le gouvernenmnt qui percera ces rues ? Et s'il ne le fait pas, on ne pourra arriver à la station, parce que vous n'aurez pas de rues pour y aboutir.
Oh ! si vous voulez mettre le trésor public à la disposition de la ville de Tournai, je conçois qu'elle fasse de grandes choses. Car ce sont de grandes choses qu'il s'agit de faire et je pourrais, s'il est nécessaire, expliquer tout le secret de cette affaire.
- Plusieurs membres. - Dites-le !
M. le président. - J'engage l'orateur à ne pas sortir de la question.
M. Dumortier. - Messieurs, quand on établit une station près d'une ville et non plus dans une ville, la première chose qu'il faut, c'est de pouvoir y arriver, de pouvoir y aboutir. Eh bien, il n'y a pas de rue dans cette direction ; ce sont de vastes terrains, je le reconnais ; mais il n'y a pas de rues pour aboutir à la station. Comment donc faire ? Evidemment, il faudra en créer. Il faudra des expropriations. Or, on s'imagine qu'on bâtira beaucoup. Eh bien, qu'est-il arrivé ? La ville a mis en vente les terrains des fortifications et elle n'a pu les vendre, et on a fait à Tournai de si beaux projets que si on devait les exécuter on devrait bâtir au delà de 2,000 maisons, ce qui, au chiffre très modéré de 15,000 francs, ferait une dépense totale de 30 millions ! Je dis qu'on ruine les habitants de Tournai, qu'on enlève à cette ville l'espace, premier besoin pour s'étendre, et qu'on empêche le développement des fabriques, tout cela pour servir la sotte vanité de quelques individus. Déjà tous les habitants qui voulaient établir des manufactures autour de la petite rivière, voyant que les terrains vont être pris pour la station et que le quartier sera inabordable par suite de remblais, que feront-ils ? Ils iront s'établir dans d'autres villes et l'honorable M. Bara sait parfaitement que ses cousins ne pouvant pas établir leurs manufactures à Tournai, sont allés s'établir à Ath. Voilà comment vous sacrifiez tout l'avenir de Tournai.
Je dis, messieurs, qu'il serait bien plus simple de laisser la station où elle est et de donner l'agrandissement dont parlait l'honorable M. Vanderstichelen en 1864.
Il y aurait là 2 millions d'économie. Mais si le gouvernement voulait à toute force jeter ces 2 millions et demi et déplacer la station, ce contre quoi je proteste, je demande du moins qu'au lieu de faire une station parallèle à la ville on fasse une station perpendiculaire aux murs de la ville, de manière à permettre l'agrandissement de la ville et l'établissement de manufactures le long de la petite rivière canalisée et à ne pas intercepter les routes qui aboutissent à Tournai.
Messieurs, il n'est pas possible de venir établir une sorte de mur d'enceinte à 100 mètres de la ville et d'empêcher toutes les communications ; cela est impossible ! Vous ne pouvez pas immoler une ville aux fantaisies de quelques ingénieurs et à la folie de quelques habitants. Si vous faites une station perpendiculaire, du moins vous permettrez à la ville de s'agrandir et vous favoriserez les manufactures.
La ville de Tournai étouffe dans son enceinte. J'ai demandé et obtenu, il y a dix ans, la démolition des fortifications, mais je n'ai pas prévu alors qu'on établirait aujourd'hui, cent mètres plus loin, un nouveau mur d'enceinte. J'ai voulu le développement des manufactures, et je demande à M. Bara si les travaux que l'on veut faire ne viendront pas empêcher l'agrandissement de la ville de Tournai, lui enlever l'espace dont elle a besoin.
La ville de Tournai est située comme Bruxelles, moitié sur la hauteur, moitié sur des terrains bas ; les manufactures ne peuvent pas s'établir dans la partie supérieure et c'est dans la partie inférieure, où (page 890) elles devraient se multiplier, qu'on vient vinculer et restreindre la ville. Je dis que ceux qui font ce travail seront maudits par la postérité.
M. le président. - Voici, messieurs, l'amendement présenté par l'honorable M. Dumortier :
« La station de Tournai sera faite de manière à ne pas intercepter les communications à niveau de la ville avec l'extérieur. »
L'amendement est appuyé, il fait partie de la discussion.
MtpJµ. - Messieurs, la mauvaise humeur qu'inspire à l'honorable M. Dumortier...
M. Dumortier. - Il n'y a pas de mauvaise humeur, mais une conviction profonde.
MtpJµ. - Je crois pouvoir répéter sans hésiter que la mauvaise humeur qui perce dans le discours de l'honorable M. Dumortier et que lui inspire le déplacement de la station de Tournai, lui a suggéré, au début de son discours, quelques réflexions chagrines qui ont trouvé peu d'écho dans la Chambre, sur l'inutilité des dépenses que nous faisons pour les bâtiments des stations.
Je ne veux, pour preuve du peu de fondement de cette appréciation, que les nombreuses réclamations qui se sont produites tout à l'heure et auxquelles je serais très heureux de pouvoir faire droit si le trésor était assez pécunieux, pour employer l'expression de l'honorable M. Dumortier.
Je m'attendais un peu, je l'avoue, messieurs, à entendre l'honorable M. Dumortier reproduire dans cette discussion les récriminations si vives qu'à trois ou quatre reprises il a fait entendre dans cette enceinte.
Mais il m'était impossible de croire, après les déclarations si catégoriques de mon honorable prédécesseur, qu'il pût rester un doute dans l'esprit de l'honorable membre sur la solution que le gouvernement, est décidé à donner à cette question et dont le crédit pétitionné aujourd'hui permet de commencer l'exécution.
Ni les observations présentées au sujet de déplacement de la station de Tournai par mon honorable prédécesseur, ni les considérations si nettes et si précises qu'il a présentées à la Chambre pour justifier une résolution qui concilie à la fois les intérêts du trésor, les nécessités de l'exploitation et j'ajoute, sans crainte, les aspirations d'une notable majorité de la population tournaisienne...
M. Dumortier. - Pas du tout.
MtpJµ. - ... tout cela n'a pu affaiblir, dans l'esprit de l'honorable M, Dumortier, la répulsion profonde qu'il éprouve pour ce projet et qui s'est traduite en critiques très vives.
Il semble vraiment, à entendre l'honorable M. Dumortier, qu'il y ait en quelque sorte un concert établi pour amener la ruine de la ville de Tournai, entre le gouvernement, l'administration communale, ces affreux ingénieurs, en un mot, entre tous ceux qui ont pour mission de sauvegarder les intérêts de la cité de Tournai et qui n'ont rien tant à cœur que de remplir honnêtement et utilement leur devoir.
Messieurs, l'honorable M. Dumortier a reproduit presque mot à mot tous les arguments qu'a trois ou quatre reprises il a développés dans la Chambre.
Je suis sans illusion sur le résultat de ce débat. Je ne serai pas plus heureux que mon honorable prédécesseur. Je ne convaincrai pas l'honorable membre.
Cependant j'ai à cœur de répondre en quelques mots à ses arguments et d'indiquer à la Chambre d'une manière très concise ce qui a amené le gouvernement à prendre la décision qu'il entend maintenir.
La station de Tournai est établie dans des conditions extrêmement défectueuses eu égard à l'importance du trafic qui s'y opère.
Elle pèche à la fois par défaut d'espace et par les dispositions d'ensemble.
L'accession des lignes concédées de Péruwelz à Tournai, d'Anvers à Douai, ainsi que du chemin de fer de raccordement des fours à chaux devait aggraver cette situation fâcheuse et créer à l'exploitation des difficultés insurmontables.
Aussi, comme l'a rappelé tout à l'heure l'honorable M. Dumortier, dès le mois de mars 1864, l'honorable M. Allard a appelé l'attention du gouvernement sur la nécessité d'agrandir la station de Tournai et l'honorable M. Vanderstichelen, n'hésitant pas à reconnaître la nécessité de cet agrandissement, déclarait que le moment était venu de créer à Tournai un établissement définitif et complet.
Les paroles de M. Allard aussi bien que la réponse que lui fit M. Vanderstichelen, témoignent qu'il n'y avait dans l'esprit, ni du ministre des travaux publics ni du député de Tournai, aucun parti pris de déplacer la station.
Il s'agissait tout simplement d'étudier dans quelle condition l'agrandissement de cette station pouvait le mieux s'accomplir.
Les études faites dans ce but firent reconnaître qu'il fallait remanier la station actuelle de fond en comble et la reporter (erratum, page 899) de 200 mètres en arrière.
Il fallait déplacer et éloigner notablement le point de bifurcation de la ligne de Jurbise, construire deux ou trois kilomètres de voies nouvelles, établir un nouveau pont sur l'Escaut, et après tous ces sacrifices, aboutir à n'avoir qu'une station entachée d'un vice radical, celui du rebroussement.
Permettez-moi, messieurs, une petite digression sur les stations a rebroussement, qui font l'admiration de M. Dumortier, admiration qu'il est, je pense, le seul à éprouver dans cette enceinte.
Il n'a pas dépendu des députés de Bruxelles, par exemple, de changer leur station à rebroussement contre une station à trajet direct.
Pour M. Dumortier tout est dit, du moment qu'il y a dans les stations une locomotive de secours : le convoi arrive, dit-il, et laisse sa locomotive en arrière, l'autre s'attelle, et c'est admirable.
Si l'on veut entrer un peu plus avant dans certaines conditions nécessaires de l'exploitation, on reconnaît que les vices principaux des stations à rebroussement ne consistent pas seulement dans ces changements de locomotives.
Je ferai remarquer cependant, en passant, que l'exploitation serait bien onéreuse s'il fallait avoir un double personnel et un nombre de machines double pour outiller les stations à rebroussement.
Mais eu dehors de ces inconvénients, il est un point sur lequel j'appelle l'attention de la Chambre.
L'organisation des voitures dans un train n'est pas chose de pure fantaisie ; il y a là un agencement déterminé qui augmente les conditions de sécurité et de commodité pour les voyageurs. Lorsque le train arrive dans une station à rebroussement, il faut, pour maintenir cet agencement, se livrer à des manœuvres très compliquées et souvent dangereuses.
M. Dumortier. - Il n'y en a jamais.
MtpJµ. - Quand un argument gêne M. Dumortier, il en fait bon marché, mais mon dernier argument n'en garde pas moins sa valeur.
Ces inconvénients sont si sérieux, quoi qu'en dise M. Dumortier, que partout où existent des stations à rebroussement on s'est décidé à faire, au prix de grands sacrifices, des voies de raccordement qui permettent, à certains trains spéciaux, de laisser de côté les stations à rebroussement ; il en est ainsi à Gand et à Verviers
S'il fallait un exemple très concluant des inconvénients que pourrait présenter, pour Tournai même, une station à rebroussement, je le chercherais à Amiens.
Sur la ligne de Paris à Lille, la compagnie du Nord ne fait plus desservir Amiens par ses trains express pour éviter les inconvénients de cette station qui eu à rebroussement. Les voyageurs pour Amiens, descendent à Longueau.
M. Dumortier. - Il y a deux lieues.
MtpJµ. - On laisse Amiens en dehors, et les voyageurs pour Amiens y sont ramenés par un train de banlieue.
Ce vice du rebroussement ne pouvant être corrigé que par le déplacement de la station, ce déplacement fut résolu par le département des travaux publics et dès le mois de juillet 1864, le département fit parvenir à l'administration communale de Tournai un avant-projet de la station future, dont l'emplacement avait été déterminé par le ministre des travaux publics, en dehors de toute intervention de l'administration communale.
Cet avant-projet, messieurs, eut, aux yeux de l’administration communale de Tournai, le défaut qu'il a aux yeux de l'honorable M. Dumortier et qui n'existe plus aujourd'hui : il compromettait la communication avec l'extérieur, par suite de deux passages à niveau, inconvénient grave, dont beaucoup de villes souffrent et dont l'agglomération bruxelloise souffre tout particulièrement.
L'administration communale de Tournai, plus heureuse en cela que celle de la capitale, fit des observations au département des travaux publics ; et, pour éviter à la ville de Tournai les inconvénients des passages à niveau, mon honorable prédécesseur se décida à faire des dépenses très considérables qui lui ont permis de substituer, dans le projet définitif, des passages en viaduc aux passages à niveau ; de (page 891) telle façon que toutes les observations de l'honorable M Dumortier sur les entraves apportées par les passages à niveau sont sans fondement.
Le département des travaux publics ayant fait droit aux observations de l'administration communale de Tournai, celle-ci s'empressa d'adopter le projet ainsi modifié et cette adoption eut lieu, si mes souvenirs me servent bien, sinon à l'unanimité des membres, du moins à une très forte majorité, 15 voix contre 5 et 1 abstention, je pense.
Depuis cette époque, le département des travaux publics et l'administration communale de Tournai ont toujours marché dans le plus parfait accord pour arrêter toutes les dispositions, qui devaient assurer la meilleure exécution possible du projet adopté.
Pour la ville de Tournai, messieurs, ce projet se lie à tout un ensemble de rues, de places, de boulevards, qui doivent donner la vie et la prospérité à un quartier en quelque sorte déshérité aujourd'hui.
Quoi qu'en pense l'honorable M. Dumortier, il y a là également pour l'industrie le point de départ d'une ère nouvelle, car elle trouvera, dans ces terrains transformés, des emplacements admirables, reliés non seulement à la nouvelle station, mais encore à la petite rivière dont le département des travaux publics a décidé en principe la canalisation et l'amélioration.
Je reconnais, à la vérité, messieurs, que le déplacement de la station de Tournai pourra léser certains intérêts qui ont leur siège dans le voisinage de la station ; mais, si respectables qu'ils soient, ils ne sauraient être un obstacle à l'exécution d'un travail que commande d'une manière impérieuse l'intérêt général.
La nouvelle station, messieurs, occupera une superficie de douze hectares ; elle sera établie en partie sur les terrains rendus libres par le démantèlement de la place et sera mise en communication avec la ville par des voies dont les profils et les tracés sont extrêmement satisfaisants.
On s'est surtout attaché à conserver intactes les communications entre la ville et l'extérieur.
C'est ainsi que le projet a été étudié de manière à faire passer le chemin de Renaix et la route d'Audenarde à travers le chemin de fer au moyen de viaducs.
Ces observations auront, je l'espère, démontré à la Chambre que le projet qui lui est soumis concilie à la fois, comme je l'ai dit tout à l'heure, les intérêts du trésor, les nécessités de l'exploitation et l'intérêt bien entendu de la population tournaisienne.
M. Dumortier. - Il ne m'est pas possible, messieurs, de garder le silence quand j'entends M. le ministre des travaux publics nous dire que son projet donne satisfaction aux intérêts bien entendus de la population de Tournai, alors que nous avons reçu plusieurs pétitions couvertes de nombreuses signatures protestant énergiquement contre le déplacement de la station. Ceux-là savent très bien que leurs intérêts sont lésés et certainement, quand ils viennent ici réclamer contre ce déplacement, ils savent combien ce fatal projet est nuisible à la ville.
M. le ministre des travaux publics dit que la station sera établie de telle manière qu'au passage des deux portes il sera construit un tunnel ; or, pour que vous fassiez cela, il faut de toute nécessité que votre station soit élevée d'au moins 15 pieds au-dessus du sol, et dès lors la continuation de la voie, soit pour entrer en ville, soit pour en sortir, sera de 15 pieds plus élevée que le niveau actuel ; donc toute la ville de Tournai sera cernée d'un mur continu de 15 à 20 pieds...
MtpJµ. - Permettez-moi de vous faire une observation. L'une des routes qui traversent le chemin en viaduc passe au-dessus du chemin de fer, et cette seule indication vous prouve que la muraille continue dont vous parlez n'existe pas.
M. Dumortier. - Il n'en est pas moins vrai que votre continuation du chemin de fer sera de 15 à 20 pieds au-dessus du sol actuel.
Ainsi, vous allez entourer la ville de Tournai d'un mur de circonvallation ! et vous venez dire qu'on pourra établir des manufactures ! Il n'en est rien. Vous avez pour vous la force, la force brutale qui vient frapper la ville de Tournai dans son avenir.
Oui, vous aurez à Tournai des boulevards, mais comme à Malines, sans voyageurs, sans habitants. Tournai n'est pas une ville à boulevards, c'est une ville à manufactures, et il serait de l'intérêt du gouvernement de seconder le courage et l'énergie dés habitants dans cette voie et non d'y apporter des obstacles.
Je dis que l'intérêt de la ville de Tournai est entièrement sacrifié par les travaux qu'on veut y faire. Vous en serez convaincus, dès qu'on mettra la main à l'œuvre : il y aura une protestation unanime des habitants. Cette protestation ne s'est pas fait entendre jusqu'ici, parce qu'on a cru à Tournai que le projet était entièrement abandonné ; mais une fois qu'il sera mis à exécution, il y aura un toile général d'indignation contre une pareille mesure, parce qu'il n'est pas permis d'infliger à une ville un traitement semblable.
- La discussion est close.
M. le président. - L'amendement de M. Dumortier doit être considéré comme une disposition additionnelle au paragraphe 2 du projet.
M. Dumortier. - Je retire ma proposition.
- Le paragraphe 2 de l'article premier est mis aux voix et adopté.
« 3°. Etablissement d'une station définitive à Charleroi, ou, au besoin, travaux de nivellement des terrains des fortifications de cette ville : fr. 500,000. »
Les mots en italique forment une addition proposée par la section centrale.
M. Dewandreµ. - Messieurs, je suis l'un des auteurs de la proposition qui a été admise par la section centrale et qui aurait permis au gouvernement d'appliquer une partie des 500,000 fr. dont il s'agit, à des travaux de nivellement des terrains des fortifications de Charleroi.
Lorsque cette proposition a été faite, il y a environ un mois, les populations ouvrières des environs de Charleroi se trouvaient dans une situation très pénible ; et la proposition dont il s'agit avait pour but de permettre au gouvernement de donner, au besoin, du travail à ces populations.
Cette situation ne s'est pas sensiblement améliorée, mais la saison qui s'ouvre présentant plus de facilité aux ouvriers pour se procurer de l'ouvrage, nous ne pensons pas que le gouvernement puisse encore avoir besoin de la faculté que nous voulions lui attribuer par le libellé que nous donnions au paragraphe.
Nous avons donc, mes collègues et moi, cru pouvoir renoncer à la proposition que nous avions faite et je viens, au nom de la section centrale que j'ai consultée, déclarer qu'elle retire l'amendement que nous lui avions proposé et qu'elle avait adopté.
Puisque j'ai la parole, j'en profiterai pour demander à M. le ministre des travaux publics quand il compte pouvoir faire commencer, les travaux de la station de Charleroi.
Il y a bientôt 25 ans que la ville de Charleroi attend l'exécution de cette station. Je sais que les plans sont faits et définitivement arrêtés et que l'adjudication de la construction du bâtiment de la station a été approuvée, mais je demande à M. le ministre si l'entrepreneur va immédiatement recevoir l'ordre de commencer les travaux.
Il y a encore un point sur lequel je désire attirer l'attention de l'honorable ministre des travaux publics.
Des deux côtés de la station de Charleroi se trouvent deux routes très fréquentées et !je viens de constater, par l'examen des plans, que ces routes, qui sont déjà traversées par les deux voies principales du chemin de fer, seront encore coupées par deux voies accessoires. De sorte que chacune de ces routes sera traversée par quatre voies.
M. le ministre des travaux publics vient de constater lui-même les graves inconvénients des passages à niveau.
Je crois qu'il est très facile, à Charleroi, de remplacer ces passages à niveau par des viaducs.
J'attire sur ce point toute l'attention de M. le ministre et j'espère que l'étude qu'il fera de la question lui permettra de la résoudre pour Charleroi comme il l'a résolue pour Tournai.
MtpJµ. - Je m'engage bien volontiers à faire un examen attentif et sérieux de la question des passages à niveau et de leur remplacement.
Quant aux travaux de la station de Charleroi, ils seront commencés immédiatement.
- Le paragraphe 3 est adopté.
« 4°. Continuation des travaux de la station de Mons : fr. 700,000. »
- Adopté.
« 5° Continuation des travaux de la station de Bruges : fr. 200,000. »
M. de Vrièreµ. - Je remercie M. le ministre des travaux publics pour l'amendement qu'il a introduit au projet en faveur de la station de Bruges, cet amendement permettra de donner la priorité aux travaux nécessaires pour remédier à l'un des inconvénients les plus graves qui résultent de l'exiguïté de cette station. Cependant, je prie M, le ministre de vouloir bien me dire s'il est bien entendu que la résolution qu'il a prise, et à laquelle tout le monde applaudira, ne modifie en rien le plan d'ensemble des travaux qui a été communiqué à l'administration communale.
(page 892) MtpJµ. - Messieurs, j'ai été très heureux de pouvoir accéder au désir de la ville de Bruges, en faisant commencer immédiatement les travaux de la station, par l'agencement des voies.
Mais l'honorable M. de Vrière peut être rassuré, l'ordre des travaux ne change en rien le plan d'ensemble arrêté par le département des travaux publics pour la station de Bruges.
- Le paragraphe est adopté.
« 6° Agrandissement de la station de Courtrai : fr. 200,000. »
- Adopté.
« 7° Continuation des travaux à la station de Liège : fr. 300,000. »
M. Mullerµ. - Messieurs, dans cette somme de 300,000 francs proposée pour la station de Liège, il y a un chiffre qui doit être consacré à l'établissement d'une passerelle. L'absence de cette passerelle cause un grand préjudice à une partie des habitants de Liège dont les communications avec le centre de la ville sont interrompues.
Je demande à M. le ministre des travaux publics si nous pouvons compter que, dès cette année, cette passerelle sera soit mise en adjudication, soit exécutée.
MtpJµ. - Messieurs, le département des travaux publics a hésité quelque temps s'il donnerait la préférence à un passage souterrain ou à une passerelle. C'est depuis quelques semaines seulement qu'à la demande de l'administration communale de Liège, nous avons décidé l'établissement d'une passerelle ; on se livre aux études nécessaires et dès qu'elles seront terminées, on mettra la main à l'œuvre.
- Le paragraphe 7 est adopté.
« 8° Travaux divers de parachèvement sur l'ensemble du réseau : fr. 250,000. »
- Adopté.
« Au ministère de la justice
« 9°. Continuation des travaux de construction d'un palais de justice, à Bruxelles : fr. 1,000,000. »
- Adopté.
« Au ministère de l’intérieur
« 10°. Continuation des travaux au palais du Roi : fr. 500,000. »
- Adopté.
« Ensemble : fr. 5,350,000. »
- Adopté.
« Art. 2. Ces crédits seront couverts au moyen des ressources ordinaires et extraordinaires des exercices 1867 et 1868. »
- Adopté.
« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »
- Adopté.
M. Snoy. - Messieurs, j'ai entendu avec grand plaisir la réponse de M. le ministre des travaux publics à l'interpellation de mon honorable collègue M. Nélis. Je ne doute pas que M. le ministre des travaux publics ne désire sincèrement arriver à une solution prochaine, mais, instruit par l'expérience, je suis décidé à repousser par mes votes toute demande de crédit pour travaux publics, aussi longtemps que les cinq millions votés il y a trois ans pour commencer les travaux du chemin de fer de Bruxelles à Luttre, n'auront pas reçu leur destination.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.
73 membres prennent part au vote.
71 votent pour le projet.
2 votent contre.
En conséquence le projet de loi est adopté ; il sera transmis au Sénat.
Ont voté l'adoption :
MM. De Fré, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, Eugène de Kerckhove, Delcour, de Macar, de Muelenaere, de Naeyer, de Rongé, de Rossius, Descamps, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, de Zerezo de Tejada, d'Ursel, Elias, Frère-Orban, Funck, Guillery, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, Jouret, Lange, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lelièvre, Liénart, Magherman, Mascart, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Tack, Thienpont, Thonissen, Van Cromphaut, Alphonse Vandenpeereboom, Ernest Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vleminckx, Wasseige, Watteeu, Wouters, Allard, Anspach, Bara, Bouvier-Evenepoel, Broustin, Bruneau, Crombez, de Brouckere et Dolez.
Ont voté le rejet :
MM. Dumortier et Snoy.
La Chambre fixe de la manière suivante l'ordre du jour de demain :
Feuilletons de pétitions, n°8 et 9 (n°87 et 93).
Feuilletons de naturalisation, n°1 et 2.
Demande de naturalisation du sieur de Fraiture (n°97, IX).
Modifications des dispositions qui régissent le service de la dette publique (n°61).
Suppression du timbrage des billets au porteur (n°113).
Suppression des impôts des bateliers (n°116).
Elle décide ensuite que le budget de l'intérieur figurera en tête de l'ordre du jour de mardi.
- La séance est levée à 4 heures et demie.