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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 19 janvier 1866

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1865-1866)

(Présidence de (M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du p21rocès-verbal

(page 219) M. Thienpont, secrétaire., procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Moor, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance publique.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpont. présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Catteau prie la Chambre d'abroger la disposition qui ne permet de compter dans le cens électoral que les contributions directes versées au trésor de l'Etat et celle qui exclut du cens électoral les centimes additionnels perçus sur les contributions directes au profit des provinces et des communes. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal de Givry prie la Chambre d'accorder au sieur Dequanter la concession d'un chemin de fer de Saint-Ghislain à Charleroi, avec embranchement vers Frameries, Mons, Gilly et Lambusart. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Thibessart prie la Chambre de faire contraindre la grande compagnie du Luxembourg à construire l'embranchement de Bastogne parlant de Longlier. »

M. Van Hoordeµ. - Je demande le renvoi de cette requête à la commission des pétitions, avec prière d'en faire l'objet d'un prompt rapport.

- Adopté.

MpVµ. - Comme il y a beaucoup d'autres pétitions analogues, je suppose que l'intention de M. Van Hoorde est de faire la même demande à leur égard.

M. Van Hoordeµ. - Oui, M. le président.

MpVµ. - La même résolution s'étendra donc à ces pétitions.

« Le sieur Mouit demande que son fils François soit exemple, cette année, du service militaire. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Goffin, facteur rural, demande une augmentation de traitement. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent le suffrage universel pour les élections communales et provinciales. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner la proposition de loi apportant une modification aux lois communale et provinciale.


« M. d'Hane, retenu à Anvers par des affaires urgentes, demandé un congé de quelques jours. »

- Ce congé est accordé.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1866

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Administration centrale

Articles 1 à 4

« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.


(page 220) « Art. 2. Traitements des fonctionnaires, employés et gens de service et frais du comité de législation et d'administration générale : fr. 300,684.

« (Une somme de 10,000 fr. pourra être transférée de l'article 2 à l'article 131, Traitements de disponibilité.) »

- Adopté.


« Art. 3. Fournitures de bureau, impressions, achats et réparations de meubles, éclairage et chauffage, menues dépenses ; frais de rédaction et de souscription au Bulletin administratif du ministère de l'intérieur ; matériel du bureau de la librairie : fr. 49,460.

« Charge extraordinaire : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Frais de route et de séjour, courriers extraordinaires : fr. 4,300. »

- Adopté.

Chapitre II. Pensions et secours

Article s 5 à 8

« Art. 5. Pensions. Premier terme des pensions à accorder éventuellement : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Subvention à la caisse centrale de prévoyance des secrétaires communaux ; subvention complémentaire à la même caisse, à laquelle les employés des commissariats d'arrondissement sont affiliés : fr. 27,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Secours à d'anciens employés belges aux Indes, ou à leurs veuves ; charge extraordinaire : fr. 4,094 66. »

- Adopté.


« Art. 8. Secours à d'anciens fonctionnaires et employés, à des veuves et enfants d'employés qui, sans avoir droit à la pension, ont néanmoins des titres à l'obtention d'un secours, à raison de leur position malheureuse : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Statistique générale

Articles 9 à 11

« Art. 9. Frais de bureau et jetons de présence de la commission centrale de statistique. Frais de bureau de commissions provinciales. Vérification des registres de la population : fr. 9,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Frais de rédaction et de publication des travaux du bureau de statistique générale, de la commission centrale et des commissions provinciales : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Frais du recensement général (premier crédit) ; charge extraordinaire : fr. 30,000. »

- Adopté.

Chapitre IV. Frais de l’administration dans les provinces

Articles 12 à 14 (province d’Anvers)

« Art. 12. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 13. Traitement des employés et gens de service : fr. 58,500. »

- Adopté.

« Art. 14. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 15 à 17 (province de Brabant)

« Art. 15. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 16. Traitement des employés et gens de service : fr. 73,500. »

- Adopté.

« Art. 17. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 18 à 20 (province de Flandre occidentale)

« Art. 18. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 19. Traitement des employés et gens de service : fr. 64,000. »

- Adopté.

« Art. 20. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 21 à 23 (province de Flandre orientale)

« Art. 21. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 22. Traitement des employés et gens de service : fr. 70,000. »

- Adopté.

« Art. 23. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 24 à 26 (province de Hainaut)

« Art. 24. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 25. Traitement des employés et gens de service : fr. 73,500. »

- Adopté.

« Art. 26. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 27 à 29 (province de Liège)

« Art. 27. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 28. Traitement des employés et gens de service : fr. 66,000. »

MpVµ. Il y a une modification introduite à cet article ; le gouvernement propose et la section centrale adopte une augmentation de 3,000 fr. comme charge extraordinaire.

- L’article 28, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 29. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 19,500. »

- Adopté.

Articles 30 à 32 (province de Limbourg)

« Art. 30. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 31. Traitement des employés et gens de service : fr. 48,000. »

- Adopté.

« Art. 32. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500.

- Adopté.

Articles 33 à 35 (province de Luxembourg)

« Art. 33. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 34. Traitement des employés et gens de service : fr. 48,000. »

- Adopté.

« Art. 35. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500. »

- Adopté.

Articles 36 à 38 (province de Namur)

« Art. 36. Traitement du gouverneur, des députés du conseil provincial et du greffier provincial : fr. 42,500. »

- Adopté.

« Art. 37. Traitement des employés et gens de service : fr. 54,000. »

- Adopté.

« Art. 38. Frais de route, matériel et dépenses imprévues : fr. 15,500. »

Chapitre V. Frais de l’administration dans les arrondissements

Articles 39 à 42

« Art. 39. Traitement des commissaires d'arrondissement : fr. 189,550. »

- Adopté.


« Art. 40. Emoluments pour frais de bureau : fr. 137,950. »

- Adopté.


« Art. 41. Frais de route et de tournées : fr. 26,000. »

- Adopté.


« Art. 42. Frais d'exploits relatifs aux appels interjetés d'office, en vertu de l'article 7 de la loi du 1er avril 1843 : fr. 500. »

- Adopté.

Chapitre VI. Milice

Articles 43 et 44

« Art. 43. Indemnités des membres des conseils de milice (qu'ils résident ou non au lieu où siège le conseil) et des secrétaires de ces conseils. Frais d'impression et de voyage pour la milice. Vacations des officiers de santé ; frais d'impression des décisions et arrêts en matière de milice : fr. 63,000. »

MpVµ. - Il y a une augmentation de 900 francs ; ce qui porte le chiffre à 63,000 francs.

- L'article 43, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 44. Frais d'impression des listes alphabétiques et des registres d'inscription ; frais de recours en cassation en matière de milice (loi du 18 juin 1849) : fr. 2,100/ »

- Adopté.

Chapitre VII. Garde civique

Articles 45 à 47

« Art. 45. Inspections générales, frais de tournées, d'impression et de fournitures de bureau, et commandants supérieurs : fr. 6,885. »

- Adopté.


« Art. 46. Achat, entretien et réparation des armes et objets d'équipement, magasin central. Frais d'impression des états de signalement et des brevets d'officiers et acquisitions de théories, épinglettes, etc. : fr. 10,000.

« (Une somme de 4,185 francs pourra être transférée de l'article 45 à l'article 46.) »

MpVµ. - Il y a ici une augmentation de 5,000 francs ; ce qui perte le chiffre à 15,000 francs.

- L'article 46, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 47. Personnel du magasin central : fr. 5,520. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Fêtes nationales

Articles 48 et 49

« Art. 48. Frais de célébration des fêtes nationales. Frais d'illumination : fr. 40,000. »

- Adopté.


« Art. 49. Tir national : prix en argent, en armes, en objets d'orfèvrerie, etc. Tirs communaux : subsides pour la construction des cibles et l'encouragement des tirs en province. Personnel du tir et dépenses diverses : fr. 64,000. »

- Adopté.

Chapitre IX. Récompenses honorifiques et pécuniaires

M. Bouvierµ. - J'ai demandé la parole à l'occasion de ce chapitre pour appeler l'attention de M. ministre de l'intérieur sur une catégorie de fonctionnaires qui méritent une récompense honorifique et que l'on n'oublie que trop souvent dans les hautes régions du pouvoir, parce qu'on rencontre chez eux une certaine indépendance de caractère et une délicatesse de sentiment qui ne leur permettent pas de demander ce qui semble devoir leur revenir naturellement ; je veux parler des bourgmestres et surtout des bourgmestres appartenant à de petites localités.

J'en connais et des plus dignes qui ont 30 et 40 années de services publics, accomplis avec le plus rare dévouement et la plus complète abnégation. (Interruption.)

Messieurs, nous sommes au chapitre des récompenses honorifiques. Je crois pouvoir appeler l'attention du gouvernement sur ce point. C'est évidemment mon droit.

M. de Brouckere. - M. Bouvier parle en termes généraux.

M. Mullerµ. - Il fera les recommandations en particulier.

M. Bouvierµ. - Je préfère le faire publiquement,... des hommes qui n'ont le plus souvent accepté ces honorables fonctions que pour se rendre utiles à leurs concitoyens et consacrer leur temps, leurs soins, souvent leur repos à la chose publique ; qui, arrivés au terme de leur modeste carrière, se voient privés de cette marque de distinction, la plus élevée entre toutes, la croix de l'ordre de Léopold qu'ils seraient si fiers et si heureux de recevoir et de porter, laquelle attesterait aux yeux de leurs concitoyens que leur magistrature, résultat des votes libres et indépendants de leurs concitoyens, a été une magistrature toute d'honneur, de probité et de désintéressement qu'ils transmettraient dans ces conditions, pure et intacte, à leurs successeurs.

Je désirerais que tous les bourgmestres, sans exception de parti, qui pendant 35 ans auraient rempli ces utiles fonctions fussent décorés de l'ordre de Léopold. C'est surtout à l'occasion d'un règne qui commence sous des auspices si brillants et si heureux que je voudrais voir inaugurer une pareille mesure, laquelle, j'en suis convaincu, recevrait dans tout le pays un accueil des plus sympathiques et des plus chaleureux.

Article 50

« Art. 50. Médailles ou récompenses pécuniaires pour actes de dévouement, de courage et d'humanité ; impression et calligraphie des diplômes, frais de distribution, etc. : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre X. Légion d’honneur et croix de fer

Articles 51 et 52

« Art. 51. Pensions de 250 francs en faveur des légionnaires, des décorés de la croix de Fer peu favorisés de la fortune ; pensions de 250 francs aux blessés de septembre dont les droits auront été reconnus avant le 1er novembre 1864 ; subsides à leurs veuves ou orphelins ; charge extraordinaire : fr. 220,000.

« La somme qui, par suite des décès survenant parmi les pensionnés, deviendra, pour chaque exercice, sans emploi, sur le crédit de 200,000 francs, sera affectée :

« 1° A desservir de nouvelles pensions ;

« 2° A porter à 125 francs les pensions des veuves ;

« 3°A augmenter les pensions des décorés de la croix de Fer et des blessés de septembre non décorés, jusqu'à ce qu'elles atteignent le chiffre maximum de 1,200 fr. ;

« 4° A augmenter les pensions des veuves de décorés de la croix de Fer et de blessés de septembre, proportionnellement à l'augmentation qui sera accordée aux décorés et blessés, jusqu'au chiffre maximum de 400 francs. »

- Adopté.


« Art. 52. Subside au fonds spécial des blessés de septembre et à leurs familles ; charge extraordinaire : fr. 22,000. »

- Adopté.

Chapitre XI. Agriculture

M. Bouvierµ. - Je ne veux pas, à l'occasion du crédit que nous allons voter, faire la guerre ni au conseil supérieur, ni aux commissions provinciales d'agriculture, ni aux comices agricoles, étendus sur toute la surface du royaume, organes trop officiels des besoins et des vœux de l'agriculture ; Dieu m'en garde, messieurs, car je viendrais faire ma (page 222) propre critique, appartenant moi-même à quelque comice agricole. Mais ce que je désirerais vivement, c'est que ces conseils et commissions, ces comices se préoccupassent d'une question palpitante d'intérêt, et pleine d'actualité, l'utilisation des engrais humains.

Dans peu de jours nous serons conviés à voter de grosses sommes contre eus tandis qu'il serait plus profitable de voter pour eux, Permettez-moi quelques courtes observations afin que, sous prétexte d'assainissement, on n'aille pas jeter au loin des millions qu'on peut si facilement ramasser de près.

C’est dans des pays éloignés (que cela ne vous effraye pas, messieurs), entre le 30' et le 50° degré de latitude, que je vais chercher mes exemples et puiser mes arguments ; un pays analogue au nôtre dont l'étendue n'est pas supérieure à celle de la Grande-Bretagne avec une population plus dense, où il n'existe cependant ni comices, ni comités, ni commissions agricoles, pas même l'ombre d'un crédit en faveur de l'agriculture, qui bientôt disparaîtront de nos budgets, parce qu'ils consacrent un système de primes dont elle n'a plus besoin ; un pays où le bétail n'est pas plus connu, et partant le fumier, que le guano, le phosphate, le soufre, le salpêtre, les tourteaux, etc., etc., et cependant ce peuple a depuis 40 siècles pu retirer de ses terres les récoltes les plus abondantes.

Vous me demanderez sur-le-champ le nom de ce peuple étrange et merveilleux, et quels sont ses moyens de production. Eh bien, ce peuple s'appelle le peuple japonais, et ses moyens de fertilisation ne sont autres que les engrais humains. Ce peuple pratique et a toujours respecté cette grande loi de l'agriculture, qui ferme la bouche à bien des conseils, à bien des commissions, à bien des comices, voire même celui auquel j'ai l'honneur d'appartenir ; c'est la loi de la restitution à la terre, sous la forme de déjections humaines. (Interruption.) Ajouterai-je...

M. Orts. - Non ! non ! n'ajoutez rien. (Interruption.)

M. Bouvierµ. - Messieurs, c'est une question très sérieuse. Nous allons voter des millions pour la ville de Bruxelles.

M. Orts. - D'accord, mais gazez un peu.

M. Bouvierµ. -C'est surtout à Bruxelles qu'on a besoin de gaze, pour faire disparaître, ce foyer infect, appelé la Senne.

Ajouterai-je qu'en Chine, où la propriété est tellement divisée que son morcellement réduit les champs à des surfaces de quelques arpents cultivés par les propriétaires eux-mêmes, le principal engrais est la matière fécale que l'on recueille avec le plus grand soin dans les villes, dans les villages et dans tous les lieux habités, jusqu'au milieu des campagnes aussi ? Chaque maison, chaque rue, chaque champ possèdent.de grandes fosses en terre destinées à la recevoir.

A côté des canaux si multipliés eu Chine, vous découvrez des réservoirs destinés à cette même fin.

On ne saurait, dit Isidore Hedde dans son ouvrage contenant la description de l'agriculture en Chine, se faire une idée de toute la sollicitude que le Chinois apporte à recueillir cette précieuse matière, qu'il considère comme l'auxiliaire le plus utile de l'économie domestique, comme le suc nourricier de la terre, le principal agent de son activité et de sa fécondité.

Aussi, l'hospitalité, exercée avec tant de générosité par les Chinois, n'est-elle pas toujours le résultat du seul sentiment de la bienfaisance. Après le séjour de l'étranger chez lui, il calcule son produit sous la forme de la grande loi de la restitution à la terre dont je parlais tout à l'heure. On peut s'assurer, dans l'ouvrage de Voisin, du culte que cette nation industrieuse professe pour l'élément vital de l'agriculture, quand on voit des Chinois, revêtus de beaux babils de soie, suivre, un panier à la main, des buffles et des porcs pour recueillir leur fumier.

C'est en utilisant ces précieuses matières fertilisantes que nous gaspillons en infectant nos villes, que le cultivateur japonais se passe de bétail et de fumier, qu'il entretient l'inépuisable fécondité de son sol, c'est en recueillant avec le plus grand soin toute espèce d'engrais et tout spécialement celui auquel je viens de faire allusion, que la population agricole de la Chine récolte ces précieuses petites feuilles payées au poids de l'or, délices des longues soirées chez les peuples du Nord et ressources abondantes pour le trésor d'Angleterre, qui prélève sur elles des sommes qui se calculent par millions.

C'est, comme vous ne l'ignorez d'ailleurs pas, grâce à ces soins multipliés que nous sommes redevables de ces belles étoiles en soie, nées d'une culture impure, trop prodiguées aujourd'hui, au dire d'un grand procureur général mort récemment en France, sujets féconds de la verve caustique et railleuse des comédies contemporaines.

Le résumé de mon petit speech, le voici : Prière d'un simple député au gouvernement pour qu'il fasse étudier sérieusement et efficacement par tout son état-major agricole la question de savoir comment on peut recueillir, dans les grands centres de population, ce qui constitue des trésors au Japon et en Chine et ce qui, chez nous, offense la vue, révolte l'odorat et engouffre des millions.

M. Jacquemynsµ. - Messieurs, je veux entretenir la Chambre d'un autre sujet, mais qui est toujours relatif à l'agriculture.

Les sommes allouées au budget de l'intérieur en faveur de l'agriculture ont été, à diverses reprises, attaquées dans cette enceinte et notamment dans la séance d'hier.

L'honorable M. Bricoult exprime dans son discours, d'ailleurs très remarquable à beaucoup d'égards, la pensée que l'on pourrait sans inconvénient réduire de moitié les crédits destinés à l'agriculture.

Je ne sais si les paroles de l'honorable orateur n'ont pas, en cette circonstance, dépassé sa pensée.

D'un autre côté, l'honorable M. Vleminckx a apporté à cette tribune un écrit émané d'un village situé à l'extrémité du pays, où l'on croit pouvoir régler tous les intérêts agricoles du royaume, sans aucune intervention du gouvernement. Je ferai remarquer, à cet égard, que l'honorable M. Vleminckx fait exception pour certaines choses. Il ne voudrait pas rayer complètement le. chapitre XI du budget du département de l'intérieur ; il laisserait notamment ce qui a rapport à l'enseignement de l'art vétérinaire. Or cela s'élève à 198,000 francs.

M. Vleminckxµ. - Et l'école de Gembloux.

M. Jacquemynsµ. - Il laisserait l’enseignement vétérinaire qui entre pour 198,000 francs dans les 900,000 francs du budget de l'agriculture ; il laisserait également les fonds destinés à l'école d'agriculture de Gembloux, qui s'élèvent à 124,000 francs. Je pense qu'il laisserait également les fonds destinés à la société d'Horticulture de Bruxelles. Ce n'est pas là un encouragement à l'agriculture, ce sont tout bonnement des fonds destinés à l'embellissement de Bruxelles ; c'est à tel point qu'aucun agriculteur ne demande le maintien du Jardin botanique et qu'il n'est demandé que par la ville de Bruxelles. (Interruption.)

J'ai voté constamment, depuis que je suis à la Chambre, les 24,000 fr. destinés à la société d'Horticulture, mais je ne puis pas admettre que l'on porte cette dépense à la charge de l'agriculture.

L'honorable M. Vleminckx voudrait-il supprimer les 240,000 francs du fonds d'agriculture, parce qu'une société d'assurance remplacerait le gouvernement ? Mais, messieurs, si jamais le fonds d'agriculture a rencontré en sa faveur un argument puissant, c'est bien en ce moment, et si l'on avait constitué, il y a 3 ou 4 ans, une société d'assurance, sur le bétail, cette société serait, aujourd'hui en liquidation ; elle serait complètement ruinée. Admettons qu'une société d'assurance sur le bétail se fût constituée, elle n'aurait en aucune manière rempli les engagements que le gouvernement a contractés dans les derniers temps.

La société aurait payé le bétail qui serait mort après avoir répandu dans tout le pays les germes de la contagion. Que fait le gouvernement ? Il dit : « Vous abattrez le bétail, peu importe qu'il soit malade : dès qu'il est suspect, il doit être abattu et je le payerai. » Le fonds n'est pas établi exclusivement pour indemniser les fermiers des pertes qu'ils subissent, mais il est établi pour que le gouvernement puisse, sans qu'on ait le droit de se plaindre d'une expropriation arbitraire, ordonner l'abattage du bétail dont l'existence serait dangereuse pour le pays.

M. Vleminckxµ. - Je l'ai dit.

M. Jacquemynsµ. - Vous laisseriez donc l'allocation pour le bétail ?

M. Vleminckxµ. - Oui, en cas d'épizootie.

M. Jacquemynsµ. - Ah ! en cas d'épizootie, vous laisseriez les 210,000 francs qui figurent au budget ! J'arrive alors à un chiffre total de 600,000 francs laissé par vous au budget de l'intérieur sur une somme de 900,000 francs.

M. Vleminckxµ. - Pour 1866.

M. Jacquemynsµ. - Nous sommes déjà bien près de nous entendre.

En théorie, absolument parlant, je suis autant que personne adversaire de toute intervention de l'Etat en agriculture.

Je pense que l'Etat doit éviter autant que possible d'intervenir en faveur d'aucune industrie, en faveur des sciences et en faveur de l'agriculture en particulier. Quand il intervient dans toutes ces choses, il cesse de gouverner, il devient autre chose que gouvernement. Mais d'un autre côté, messieurs, j'ai un si ardent désir de voir se réaliser tous les progrès, que je fais volontiers le sacrifice de ce principe, de cette théorie, si séduisante qu'elle puisse être d'ailleurs, lorsque je ne vois pas d'autre moyen de réaliser le progrès qu'avec le concours de l'Etat, ou plutôt (page 223) lorsque le concours de l'Etat doit hâter le progrès et que les particuliers ne se présentent pas pour remplacer l’Etat.

Qu'ont dit, dans cette enceinte, ceux qui attaquent avec le plus de violence certains chiffres du budget de l'agriculture ? Hier encore l'honorable M. Bricoult demandait que les économies qu'on ferait d'un côté fussent appliquées à d'autres choses. Ceux qui ont le plus critiqué certains chapitres du budget de l'agriculture sont les premiers à demander que le gouvernement intervienne plus activement en faveur de la voirie vicinale.

M. Bouvierµ. - Il n'y a pas de privilège là.

M. Jacquemynsµ. - Y en a-t-il ailleurs ?

M. Bouvierµ. - Les gros sont privilégiés aux dépens des petits.

M. Jacquemynsµ. - J'attendrai que vous m'en ayez donné la preuve pour me jauger à votre avis.

On nous cite pour exemple l'Angleterre. Eu Angleterre, le gouvernement ne fait absolument rien en faveur de l'agriculture, nous dit-on, et pourtant c'est là que l'agriculture prospère le plus. Je pourrais demander d'abord depuis quelle époque l'agriculture progresse tant en Angleterre. Je crois que les progrès rapides de l'Angleterre en agriculture ne remontent pas du tout à l'adoption du principe de non intervention ; ils sont de beaucoup postérieurs. Mais puisque mes honorables amis se donnent la peine de passer la Manche pour chercher des exemples à nous citer, qu'ils aient la complaisance de pousser jusqu'au delà du canal Saint-Georges et ils trouveront exactement les mêmes principes appliqués en Irlande.

Or, est-ce qu'en Irlande l'agriculture est si avancée ? est-ce qu'on s'y trouve si bien du principe de non-intervention ? et pourquoi d'ailleurs nous comparer exclusivement à la Grande-Bretagne ? n'y a-t-il pas d'autres pays en Europe dont la législation ressemble plus à la nôtre, dont la position de fortune et la position sous le rapport des frontières ressemble plus à la nôtre que celle de l'Angleterre ?

Sur le continent, lorsqu'on renonce d'une manière absolue à toute action sur l'agriculture, l'agriculture s'endort et ne fait rien. Je citerai pour exemple la France, sous le gouvernement de Louis XIV. Après les grandes guerres de cette époque, un proche parent du roi apporta sur la table royale un pain fait avec ce qu'il y avait de plus abject, un pain qu'il nous répugnerait de donner à notre bétail. Il le présenta au roi, en disant : Voilà, Sire, ce que votre peuple mange ! On plaignit les agriculteurs, on plaignit le peuple, mais on ne fit rien pour l'agriculture et le second empire trouva cette industrie encore dans un état d'infériorité déplorable. Le second empire a, en peu de temps, réalisé des progrès qui nous imposent une grande vigilance si nous n'entendons nous laisser dépasser.

On nous cite toujours l'exemple de l'Angleterre, mais l'Angleterre ne fait rien pour la voirie vicinale. Si vous voulez suivre l'exemple de l'Angleterre, ne le suivez pas à demi ; vous n'obtiendrez pas les résultats qu'on obtient en Angleterre parce que vous suivrez son exemple en un point déterminé ; pour aboutir il faudrait imiter toute la législation anglaise. Or, le gouvernement anglais ne fait rien pour la voirie vicinale, mais la propriété territoriale est imposée de 25 p. c. de son revenu en faveur de la création et de l'entretien des routes, de la taxe des pauvres et d'autres taxes locales. MM. les propriétaires sont-ils fort désireux après cela d'imiter encore le système anglais, c'est-à-dire, de consacrer 25 p. c. de la valeur locative de leurs propriétés à des charges publiques ?

J'admets l'intervention de l'Etat en agriculture, non pour créer des privilèges, on me trouvera toujours hostile aux privilèges, mais pour créer une intervention loyale qui ne puisse tourner en particulier à l'avantage exclusif de personne. Mais de ce que je désire l'intervention du gouvernement jusqu'à un certain point il ne s'ensuit pas que je sois tenu d'approuver tout ce qu'on ferait pour encourager l'agriculture.

Ainsi je me garde bien de me constituer 'apologiste de l'achat d'instruments agricoles que faisait le gouvernement. Lorsque l'Etat s'est fait constructeur de machines, on a fait en son nom un très grand nombre d'instruments agricoles.

Parmi ces instruments fournis aux agriculteurs sous le patronage du gouvernement, j'en ai souvent cherché de bons...

M. Bouvierµ. - Et vous n'en avez pas trouvé.

M. Jacquemynsµ. - Et je n'en ai pas trouvé un seul, pas un qui fût régulièrement employé.

On a fait venir de l'étranger des machines ; mais c'est souvent pour encourager quelque constructeur et nullement pour encourager l'agriculture.

Voilà ce qui s'appelle une protection purement individuelle. On remarque en ce moment, à l'institut agricole de Gembloux, une collection incroyable d'instruments aratoires et l'on en attend encore.

M. Eliasµ. - Ils viennent de Liège.

M. Jacquemynsµ. - Eh bien, je demande qu'on les envoie tous à Gembloux ; ils serviront admirablement à chauffer les salles de l'institut agricole pendant l'hiver.

J'ai parcouru, à différentes reprises, cette collection d'instruments, et ce n'est que très exceptionnellement que je suis parvenu à en trouver un qui fût susceptible de quelque emploi.

M. Bouvierµ. - Voilà le concours que nous critiquons.

M. Jacquemynsµ. - Ce concours, je ne l'approuve pas plus que personne. Quand il s'est agi du concours du gouvernement pour le maintien d'un haras qui devait coûter 100,000 francs, je n'ai pas pris la défense de cette mesure ; pourquoi ? Parce que je trouvais que c'était un encouragement mal conçu ; parce que, tout en désirant que le gouvernement concoure aux progrès de l'agriculture, je demande qu'il ne dépense pas plus qu'il ne faut.

Maintenant quant à la distribution de graines...

M. Bouvierµ. - Ah ! ah !

M. Jacquemynsµ. - Cela vous tient donc bien à cœur ? Eh bien, savez-vous combien le gouvernement dépense pour distribution de graines ? Mais, messieurs, depuis quelques années, je crois que le gouvernement n'a rien dépensé, absolument rien.

M. Bouvierµ. - Tant mieux !

M. Jacquemynsµ. - Je crois qu'il serait fort difficile de dépenser plus de 300 à 400 francs par an pour ces graines : et je demande qu'on ne discute pas trop longtemps sur un pareil objet, car nous aurions bientôt absorbé une somme beaucoup plus considérable par le temps que nous aurions consacré à cette discussion.

Cependant, je me permettrai de citer un cas où l'intervention du gouvernement a été éminemment utile. Ainsi la serradelle, que le gouvernement a introduite en Belgique, à très peu de frais, a produit des résultats très remarquables ; et c'est évidemment à l'intervention de l'Etat que nous devons cette excellente culture.

Je parle, messieurs, de l'intervention du gouvernement dans les affaires de l'agriculture, dans un moment où, plus qu'en aucun autre, on devrait approuver son action ; c'est-à-dire dans un moment où l'action du gouvernement a préservé jusqu'à présent notre pays de l'invasion de la peste bovine.

M. Bouvierµ. - Nous ne critiquons pas cela.

M. Vleminckxµ. - Certainement non.

M. Mullerµ. - C'est un tout autre ordre d'idées.

M. Bouvierµ. - II s'agit ici d'un intérêt public, général.

M. Jacquemynsµ. - Mais, je répète que tout ce qui est encouragement en faveur des particuliers, je n'y tiens pas le moins du monde je le critique avec vous.

M. Bricoultµ et M. Vleminckxµ. - Nous sommes donc d'accord.

M. M. Jacquemynsµ. - J'en suis enchanté. Ainsi, vous êtes d'accord avec moi qu'il y a lieu de maintenir l'allocation de neuf cent mille francs demandée en faveur de l'agriculture.

M. Vleminckxµ et M. Bricoultµ. - Non ! non !

M. Jacquemynsµ. - Quelles sont donc les parties de cette allocation que vous combattez ? J'ai cru un moment que nous étions d'accord sur tous les points, et j'allais cesser de parler. Mais il paraît que je me suis trompé.

Une partie de l'allocation a été plus spécialement critiquée et je pense que c'est sur celle-là qu'on désire revenir ; elle a pour objet l'amélioration de nos animaux domestiques en exécution des règlements provinciaux sur la matière.

M. Bricoultµ. - En effet, c'est là ce que nous critiquons.

M. Jacquemynsµ. - Quant aux règlements provinciaux sur la matière, je n'en suis certainement pas partisan.

M. Bricoultµ. - A la bonne heure !

M. Jacquemynsµ. - Je n'en suis pas plus partisan que l'honorable M. Bricoult ; mais, après tout, si dans certaines provinces on en est partisan, bien que dans d'autres on ne les admette pas, y a-t-il lieu pour le gouvernement et pour la Chambre de forcer en quelque sorte la main aux autorités provinciales et de leur imposer le choix des moyens qu'elles désirent employer pour encourager l'agriculture ? Depuis un grand nombre d'années, on a déclaré qu'on n'accorderait de subsides qu'aux provinces qui auront des règlements.

Je crois que c'est là un abus. Mais je crois aussi que ne donner de (page 224) subsides qu'aux provinces qui n'auront pas de règlements provinciaux, je crois, dis-je, que ce serait un abus non moins grave.

M. Vleminckxµ. - Ce que nous critiquons, c'est le principe même sur lequel les règlements sont basés, c’est-à-dire l'introduction de reproducteurs.

M. Jacquemynsµ. - Je suis encore parfaitement d'accord avec vous. Ainsi, j'admets parfaitement que l'introduction de reproducteurs étrangers ne peut être utile que d'une manière tout à fait exceptionnelle.

Ils n'ont certainement pas rendu les services qu'on attendait d'eux ; il en est ainsi surtout des reproducteurs de la race bovine : on a consacré des sommes considérables à introduire des types reproducteurs de la race bovine dans le pays, on a cherché à remplacer en quelque sorte les reproducteurs de race indigène par des reproducteurs de race anglaise. et il s'est trouvé que, malgré ce travail continu, le nombre des reproducteurs étrangers ne s'est presque pas augmenté. Ce n'est que d'une manière très exceptionnelle qu'on rencontre les reproducteurs anglais dans le pays.

Je verrais sans regret que le gouvernement cessât de faire des sacrifices pécuniaires pour l'introduction de ces reproducteurs ; mais d'un autre côté, je ne comprends pas qu'en principe on condamne toute espèce d'intervention du gouvernement en faveur de l'agriculture.

Je demande que le gouvernement continue à faire des sacrifices dans l’'intérêt de l’agriculture lorsque ces sacrifices sont justifiés. Ainsi, je crois avec l'honorable M. Bricoult qu'il y aurait lieu de supprimer les 93,000 francs qui figurent au budget pour l'amélioration de nos animaux domestiques de races étrangères ; mais je voudrais avec lui que cette somme fût consacrée à l'allocation de primes pour les concours d'animaux reproducteurs.

M. Vleminckxµ. - Que les propriétaires eux-mêmes fassent cela. Que les sociétés agricoles fassent comme les sociétés scientifiques.

M. Jacquemynsµ. - L'honorable M. Vleminckx demande que les sociétés d'agriculture organisent, à leurs frais exclusifs, des concours agricoles. Je serai parfaitement de son avis quand le gouvernement n'interviendra plus en faveur d'autres industries ; quand il cessera d'encourager les beaux-arts, d'accorder 751,000 fr., pour l'encouragement des beaux-arts ; quand il cessera de payer un million pour les chemins de fer concédés ; quand il cessera de payer des consuls dans toutes les parties du monde, dans l'intérêt du commerce ; quand il cessera de payer pour les chambres de commerce et qu'il laissera ce soin aux commerçants eux-mêmes.

Lorsque le gouvernement cessera de payer 74,000 fr. pour la bibliothèque royale, et que les savants entretiendront cette bibliothèque eux-mêmes ; lorsque enfin le gouvernement cessera de payer 5 millions et des centaines de mille francs pour le clergé, et que les fidèles payeront eux-mêmes leurs prêtres ; après cela, j'admettrai parfaitement qu'on supprime les fonds destinés à l'agriculture. Car le même principe qui veut qu'on supprime complètement l'intervention de l'Etat dans l'industrie agricole, veut aussi qu'on supprime, en règle générale, l'intervention de l'Etat dans toutes ces autres choses ; alors je voterai la suppression des subsides en faveur de l'agriculture ; mais jusque-là, je crois qu'une industrie qui occupe les deux tiers de notre population, une industrie qui a besoin de progrès, une industrie qui se trouve momentanément dans une position difficile ; je crois que cette industrie a droit à quelques encouragements du gouvernement, et qu'on est mal venu à dire qu'elle doit faire tout par elle-même et qu'elle ne doit rien attendre dû gouvernement.

M. Thonissenµ. - Messieurs, représentant d'un arrondissement à peu près exclusivement agricole, je viens, à mon tour, féliciter l'honorable ministre de l'intérieur des mesures promptes et énergiques qu'il a prises pour opposer une barrière efficace à l'invasion de la peste bovine. Je me plais à reconnaître que c'est grâce à ces mesures, et à ces mesures seules, que nos étables ont été préservées du fléau qui sévit si cruellement en Hollande et surtout en Angleterre.

Aussi n'est-ce pas à titre de critique, mais uniquement dans un but d'intérêt général, que je me permets de faire une demande à l'honorable chef du département de l'intérieur.

D'après des renseignements que je dois croire fondés, la France, qui a pris les mêmes mesures que nous, a réussi, comme nous, à éteindre sur son territoire tous les foyers d'infection qui s'y étaient manifestés.

Si ce fait est réel, on pourrait, je pense, autoriser l'entrée du bétail par la frontière française.

Il importe, en effet, de ne pas se faire illusion. Jusqu'ici, il est vrai, la prohibition à l'entrée n'a pas exercé une influence sensible sur le prix du bétail ; mais cette situation favorable ne peut pas se prolonger ; elle cessera dans un délai très rapproché.

Je ne vous citerai qu'un seul fait. Les distilleries de Hasselt renferment plus de quatre mille bœufs, et ce bétail considérable est renouvelé trois ou quatre fois par an. Jusqu'ici le plus grand nombre de ces bœufs a été fourni par la Hollande, la Prusse et la France ; tandis que, aussi longtemps que la prohibition à l'entrée subsistera, il devra être exclusivement fourni par l'agriculture indigène, Faites le même calcul pour toutes les distilleries du pays ; joignez-y ce fait que, dans les dernières années, la valeur du bétail importé s'est élevée de dix-huit à vingt millions de francs, et vous serez convaincus que, dans un délai très rapproché, nous serons en présence sinon d'une disette, au moins d'une grande rareté du bétail.

Dans ces conditions, je le répète, je voudrais savoir si l'honorable ministre de l'intérieur ne pourrait pas autoriser l'entrée du bétail par la frontière française.

La France, comme nous, a fermé son territoire au bétail étranger, et à l'heure qu'il est, il n'existe plus dans ce pays un seul foyer d'infection.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, comme vient de le dire l'honorable M. Thonissen, les mesures prises par le gouvernement ont jusqu'ici contribué largement à préserver nos étables du fléau de la peste bovine qui exerce de cruels ravages en Angleterre et en Hollande ; mais si jusqu'à présent nous avons été à peu près préservés du fléau, nous ne pouvons pas encore être trop rassurés.

Depuis quelques jours, l'agriculture belge est menacée de nouveau d'un danger immense. La peste bovine a fait invasion dans le Brabant septentrional, et de nouveaux cas se manifestent dans notre pays même.

Aujourd'hui encore j'ai reçu avis qu'un nouveau cas s'était manifesté à Anvers.

Le gouvernement continuera de prendre toutes les précautions qui sont en son pouvoir pour combattre le fléau ; mais d'un autre côté, il doit être secondé par les autorités locales et par les particuliers ; malheureusement il n'en est pas toujours ainsi.

Les chefs de certaines administrations communales négligent d'exécuter les instructions qui leur ont été données, on délivre des certificats de complaisance, on tolère des marchés interdits. On ne surveille pas le bétail, et c'est en partie à cette incurie coupable, que nous devons la réapparition du fléau.

Je crois pouvoir déclarer ici que le gouvernement continuera à faire son devoir et à prendre toutes les mesures qu'il jugera utiles ; mais, si par suite du fait, de la négligence ou de l'incurie des autorités locales ou des particuliers, la peste bovine faisait de grands progrès, le gouvernement serait forcé de renoncer à l'allocation des indemnités pour bestiaux abattus ; cette perspective sera peut-être propre à stimuler les administrations locales et les particuliers et à les déterminer à prêter leur concours au gouvernement.

Les faits que je viens de signaler permettront à l'honorable M. Thonissen de comprendre qu'il serait imprudent de modifier, pour le moment, les mesures qui ont été prises jusqu'à présent.

Mais sans la circonstance que je viens d'indiquer, il est probable que j'aurais proposé à l'assemblée de lever l'interdiction de l'entrée du bétail par une partie de nos frontières de l'est et du midi, par la frontière de France et par la frontière de Prusse ; mais dans le moment actuel, une responsabilité immense pèse sur le gouvernement, et je crois que nous ne pouvons pas nous départir des mesures qui ont été prises, tant que la situation ne sera pas meilleure.

Du reste, dans peu de jours, j'aurai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi tendant à accorder au gouvernement les pouvoirs nécessaires pour prendre de nouvelles mesures ayant pour but de combattre le fléau.

Messieurs, puisque j'ai la parole, je répondrai quelques mois aux orateurs qui ont parlé sur le chapitre de l'agriculture dans la séance d'hier et dans celle d'aujourd'hui.

Tout le monde demande qu'on retire à l'agriculture toute protection...

M. Bouvierµ. - La protection.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'honorable M. Bouvier, qui m'interrompt, se montre cette année le plus grand adversaire des encouragements accordés sur le budget à l'agriculture, mais il y a peu de temps l'honorable membre en était le plus chaud défenseur.

Il est vrai qu'il s'agissait alors de la distribution de la chaux à prix réduit ! Quoi qu'il en soit, je prie la Chambre de remarquer que le gouvernement (page 225) est entré très largement dans la voie qu'on lui indique. Comparez le budget de l'agriculture de 1866 au budget de l'agriculture d'il y a une dizaine d'années, et vous verrez qu'il y a entre ces deux budgets une différence considérable.

Depuis que j'ai eu l'honneur de diriger le département de l'intérieur, j'ai diminué ce budget d'une manière fort notable.

C'est ainsi que j'ai proposé la suppression du haras de l'Etat, ainsi que la suppression de la distribution de la chaux à prix réduit ; j'ai proposé encore de supprimer le service du drainage. Enfin, l'ensemble des crédits demandés pour l'agriculture, au budget de 18660, présente une diminution sur celui de 1865 de 111,080 francs.

J'accepte toujours avec reconnaissance les conseils qu'on veut bien me donner ; mais il me serait assez difficile de comprendre quels seraient les articles un peu notables du budget qu'on pourrait encore supprimer ou réduire.

Le premier article concerne les indemnités pour bestiaux abattus. Qui songe à réduire ou à supprimer ce chiffre ?

Eh bien, ce chiffre forme à peu près un quart de l'allocation totale du budget de l'agriculture. II comporte 240,000 fr. et le budget total n'est que d'un million.

Veut-on supprimer le service de l'école vétérinaire ?

M. Bouvierµ. - Non.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Evidemment non.

Un article auquel on voudrait peut-être faire des réductions est. celui qui concerne l'amélioration de nos races d'animaux domestiques et l'exécution des règlements provinciaux sur la matière.

M. Bouvierµ. - C'est cela.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Est-ce le seul chiffre qu'on croie susceptible d'être réduit ?

M. Bouvierµ. - C'est un des chiffres.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Il s'agit d'une somme de 95,300 fr. en tout.

Sans vouloir prendre ici la défense de tous les règlements provinciaux, je dois cependant faire remarquer, avec l'honorable M. Jacquemyns, qu'il faut bien permettre aux conseils provinciaux qui connaissent les intérêts agricoles tout aussi bien que beaucoup d'entre nous, de décider quels sont les moyens les plus utiles et les meilleurs, de venir en aide à l'agriculture, et quels sont, si je puis parler ainsi, les nécessités de leurs localités.

Dans ce crédit de 93,500 fr. auquel on fait si fort la guerre, figurent plusieurs objets. Il s'agit entre autres de l'achat d'animaux de race perfectionnée, de race anglaise.

Vous dites : Il ne faut pas que le gouvernement fasse ces achats. Le gouvernement ne doit-il pas prêter son concours et accorder des subsides aux députations permanentes qui, dans la mesure qu'elles le jugent utile, achètent des animaux de race perfectionnée ?

M. Bouvierµ. - Ce sont des rosses. (Interruption.)

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, je m'étonne de cette assertion de la part de l'honorable M. Bouvier qui, à peu près tous les huit jours, m'écrit des recommandations, afin que je mette des petits cochons de race anglaise à la disposition de certains habitants de l'arrondissement de Virton. (Interruption.)

Il ne se passe pas de mois, presque pas de semaine, sans que l'honorable M. Bouvier s'adresse au ministre de l'intérieur et dans les termes les plus touchants, les plus pathétiques, pour obtenir les petites bêtes de race perfectionnée dont je viens de parler. Je suis persuadé que l'honorable M. Bouvier ne me démentira pas.

M. Bouvierµ. - Non ! je vous répondrai.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Eh bien, c'est sur cet article 55 du budget que sont imputées les dépenses pour l'achat de ces animaux domestiques réclamés par l'honorable M. Bouvier.

Messieurs, je le demande, alors que le gouvernement se montre si bienveillant pour tous les intérêts, comme vous l'a dit tantôt l'honorable M. Jacquemyns, alors qu'on inscrit au budget des sommes considérables pour les beaux-arts, pour les sciences, pour les académies, pour l'industrie, alors que nous venons vous demander un crédit de 600,000 francs pour l'exposition universelle, industrielle et artistique, de Paris, l'on viendrait ici chicaner quelques bribes à l'agriculture, qui est l'industrie de la majorité des habitants !

S'il s'agissait de dépenses importantes, s'il s'agissait d'une situation exagérée, je serais le premier à vous seconderai j'ai prouvé que j'avais su prendre l'initiative îles mesures de réduction quand elles étaient justifiées. Mais aujourd'hui qu'il s'agit de quelques miettes, de dépenses minimes qui sont utiles, réellement utiles au point de vue agricole, je ne vois pas pourquoi l'on voudrait retirer tout d'un coup des crédits qui sont déjà si considérablement réduits.

Messieurs, un honorable orateur, dans la séance d'hier, l'honorable M. Bricoult, qui parle de ces questions en parfaite connaissance de cause, a conseillé au gouvernement deux choses sur lesquelles nous sommes parfaitement d'accord. Il nous a dit : Avant tout, améliorez la voirie vicinale et propagez l'instruction primaire dans nos campagnes.

Messieurs, sur ce terrain, je suis parfaitement d'accord avec l'honorable membre, mais il nous rendra cette justice, et reconnaîtra que le gouvernement marche dans cette voie. Il y a quelques mois à peine, indépendamment des crédits ordinaires annuels demandés pour la voirie vicinale, nous avons obtenu de la Chambre un crédit extraordinaire de deux millions.

Quant à l'instruction primaire, je crois qu'il est parfaitement inutile de rappeler à la Chambre ce que le cabinet actuel a fait. On sait les développements considérables que nous avons cherché à donner à cette branche de service et la Chambre n'ignore pas que le gouvernement trouvera toujours de l'argent pour assurer à l'instruction primaire des ressources reconnues nécessaires.

M. Bouvierµ. - J'ai deux mots à répondre à M. le ministre de l'intérieur, qui a voulu me mettre en contradiction avec moi-même.

D'abord je dirai que ce que j'ai demandé en ce qui concerne la chaux, je ne l'ai nullement demandé dans l'intérêt de mon arrondissement. Jamais l'arrondissement de Virton n'a obtenu un hectolitre de chaux.

J'ai signé l'amendement qui a été présenté par les honorables MM. de Moor, Van Hoorde et Orban, qui demandaient au gouvernement la chaux à prix réduit, parce qu'il s'agissait des intérêts du Luxembourg. Je voyais d'un autre côté que l'on accordait des primes à la pêche, pour Ostende, Blankenberghe, et partout ailleurs, et j'aurais eu mauvaise grâce, en présence de ces subsides inscrits au budget, de ne pas demander ma part du gâteau. Je n'eusse pas fait, dans cette circonstance, ce qu'un député doit faire, défendre les intérêts de son arrondissement alors que, chez nous, l'on disait : Vous votez des subsides en faveur de la pèche et nous n'obtenons rien. Le budget a donc deux poids et deux justices ; il y a deux espèces de morales.

M. Coomans. - Il y en a bien quatre. (Interruption.)

M. Bouvierµ. - A votre point de vue clérical, oui ; à. mon point de vue libéral, non.

M. le ministre a parlé avec beaucoup d'esprit, je l'avoue, des petits cochons. Je leur ai toujours porté, dit-il, beaucoup d'intérêt et il n'est pas de semaine que, dans des termes touchants, éloquents même, ajoute-t-il, je ne demande au département de l'intérieur de ces petits animaux pour mon arrondissement.

Eh bien, M. le ministre, faites disparaître ce subside et alors on n'enverra plus de mon arrondissement des lettres pour obtenir une part dans la distribution de ces petits animaux ; si ce subside n'existait pas, le département de l'intérieur ne recevrait pas de milliers de lettres chaque année, et moi je n'aurais pas à y répondre, besogne qui, je dois l'avouer, bien que j'aime à rendre service à mes commettants, est fort ennuyeuse.

M. Mullerµ. - Je demande simplement à adresser une interpellation au gouvernement. Le libellé du paragraphe porte : « amélioration de nos races d'animaux domestiques ; exécution des règlements provinciaux sur la matière. »

Je désire savoir si, après les observations qui ont été échangées l'année dernière entre plusieurs membres et M. le ministre de l'intérieur, il entend encore faire dépendre de l'existence de certains règlements l'application des subsides.

L'année dernière, il n'y avait pas eu de réponse positive à cet égard et comme on maintient, au libellé, les mots : « exécution des règlements provinciaux sur la matière », je désire savoir si ces mots ne doivent pas être supprimés ou s'ils ont une signification semblable à celle qu'ils avaient l’année dernière.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, dans le rapport déposé sur le bureau de la Chambre, il était dit, si j'ai bonne mémoire, et dans tous les cas, je déclare que le gouvernement ne refuse pas d'accorder des subsides aux provinces qui se borneraient a instituer des concours sans réglementer en même temps les conditions que doivent réunir les reproducteurs, etc.

Projet de loi relatif à une convention formant annexe au traité conclu avec les Pays-Bas le 12 mai 1863

Dépôt

M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier), dépose une convention formant annexe au traité avec les Pays-Bas, du 12 mai 1863.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de cette convention et la renvoie à l'examen des sections.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1866

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XI. Agriculture

M. de Moorµ. - Il y a quelques instants, l'honorable M. Thonissen demandait au gouvernement de vouloir autoriser l'entrée du bétail français en Belgique.

M. Thonissenµ. - Je n'ai pas demandé cela ; je me suis borné à poser la question de savoir si on ne pourrait pas prendre cette mesurent.

M. de Moorµ. - Je viens, moi, demander que M. le ministre de l'intérieur veuille bien agir comme on agit en France. Le 6 décembre dernier, le gouvernement français a interdit l'entrée de tous les quadrupèdes autres que le cheval, le mulet, l'âne et le chien.

Je demande que le gouvernement, envers lequel nous sommes très reconnaissants, nous Luxembourgeois, des mesures énergiques et sages qu'il a prises dans l'intérêt général et de l'agriculture, je demande que le gouvernement veuille bien suivre l'exemple que nous donne la France et fermer nos frontières à tout ce qui pourrait introduire chez nous le fléau contagieux.

Nous avons un immense intérêt à conserver l'une de nos principales richesses, je dirai presque notre seule richesse : l'élève des races bovine, ovine et porcine, et nous sommes intimement convaincus que les mesures que prend le gouvernement, il les prend dans l'intérêt général du pays, auquel il cherche à éviter un désastre incalculable.

Je crois devoir appeler son attention la plus sérieuse sur la pétition du conseil communal de Bertrix, pétition analysée à notre séance d'hier.

Que M. le ministre de l'intérieur redouble de sévérité et il aura des titres plus grands encore à la reconnaissance du pays tout entier et du Luxembourg tout particulièrement.

M. Van Overloopµ. - La Chambre s'étant, grâce à l'intérêt que leur porte l'honorable député de Virton, occupé des cochons sains, je nie permettrai d'adresser à l'honorable ministre de l'intérieur une question relative aux cochons malades.

Eu Allemagne, dit-on, les cochons sont attaqués de l'horrible maladie des trichines. Si ce que la presse nous apprend à cet égard est exact, si effectivement la maladie des trichines se communique aux hommes et entraîne habituellement la mort, je crois qu'il est du devoir le plus impérieux du gouvernement, qui prend tant de mesures pour empêcher la propagation de la peste bovine, ce dont je le félicite, de prendre des mesures plus énergiques encore pour prévenir que la maladie des trichines ne pénètre en Belgique et n'y cause les mêmes ravages qu'en Allemagne.

J'espère que l'honorable ministre de l'intérieur s'empressera de nous faire connaître ce qu'il se propose de faire.

(page 231) M. Coomans. - Messieurs, le joyeux débat qui vient d'avoir lieu entre M. le ministre de l'intérieur et M. Bouvier, a soulevé une sorte de question de principe sur laquelle je désire m'expliquer un instant. D'après l'honorable ministre de l'intérieur, un député qui ne vote pas ou qui n'approuve pas les subsides n'aurait pas le droit d'en demander une part au gouvernement pour son district, bien entendu. Je ne puis pas admettre cet aphorisme. J'en parle avec un parfait désintéressement ; il y a de très longues années que je ne demande pas un sou au gouvernement, il est vrai que je n'en obtiens rien, ce qui est assez naturel, mais ce n'est pas une raison pour que je ne me préoccupe pas de la question des subsides ; je suis d'autant plus en droit de m'en préoccuper que je n'y ai aucun intérêt.

Il y a quelques années la Chambre a voté un subside d'un gros million, à distribuer entre les industriels dans l'embarras. J'avais combattu ce subside. Peu de jours après, un industriel de mon arrondissement vient me prier d'intervenir pour lui faire obtenir sa part. Je m'assure qu'il pourrait, au besoin, rembourser, selon les conditions stipulées, le subside qui lui aurait été prêté et je me rends au ministère de l'intérieur, la conscience très nette, pour appuyer la demande de cet industriel. - Le chef de service me regarde d'un air étonné et me dit : « Mais c'est singulier, vous avez voté contre le subside et vous venez en demander votre part. » Je lui répondis : « Oui, j'ai parlé contre, je n'étais pas parmi les voteurs, mais je serai parmi les payeurs et cette circonstance m'autorise à demander la part de mon arrondissement. » J'ai vu en cette circonstance que dans les régions ministérielles il était passé à l'état d'axiome que se sont les voteurs des subsides qui doivent obtenir la préférence lorsqu'il s'agit de les distribuer. Je dis, moi, que quand un subside est voté il appartient à la généralité des Belges et que, quel que soit le vote d'un député, il a le droit d'intervenir dans la distribution des subsides.

Je plains M. Bouvier de s'être donné tant de peines pour obtenir quelques petites bêtes du gouvernement, qui dispose de tant de bêtes, ce que je regrette beaucoup ; mais enfin, l'honorable M. Bouvier était dans son droit et je conclus, comme morale de cette histoire, que le mieux sera de supprimer tous les subsides, à commencer par le million qui figure au chapitre de l'agriculture. Je tire cette conclusion bien qu'on m'ait appelé, souvent, ce dont je suis fier : « le député des paysans. »

(page 226) M. Delaetµ. - Je dois demander une explication à M. le ministre de l'intérieur sur une phrase que je n'ai pas bien comprise lorsqu'il s'est agi de la peste bovine. Il a dit, si je l'ai bien entendu, qu'il y a déjà plusieurs refus de concours de la part d'administrations communales, et que si ces refus de concours devaient devenir plus fréquents, le gouvernement aurait à proposer à la Chambre de supprimer toutes les indemnités.

Je crois que M. le ministre a outre-passé sa pensée ; car, loin d'atteindre le but qu'il a en vue, par cette déclaration, loin de faire cesser les refus de concours, sa manière aurait plutôt pour résultat de les généraliser.

En effet, si les indemnités étaient complètement supprimées, la suppression frapperait également les administrations communales qui se sont donné beaucoup de peines pour seconder le gouvernement et celles qui auraient refusé leur concours.

Je pense que la pensée de l'honorable ministre de l'intérieur ne peut être aussi absolue que semble le faire croire la phrase qu'il a prononcée tout à l'heure.

C'est tout ce que j'avais à dire.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, l'honorable M. Van Overloop me demande si le gouvernement a pris quelques précautions pour préserver le pays de la maladie des trichines.

Cette maladie, si j'ai bonne mémoire, a été signalée aux consommateurs. Cependant comme le mal semble s'étendre et se rapprocher, j'ai l'intention de consulter l'un ou l'autre corps savant sut cette question, soit le comité supérieur d'hygiène, soit l'Académie de médecine et peut-être tous les deux.

M. Davidµ. - Il faut le faire de suite.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, si je me suis exprimé comme vient de le dire l'honorable M. Delaet, je suis allé au delà de ma pensée.

J'ai voulu dire que si la peste bovine faisait des progrès et se généralisait, que si elle prenait une extension analogue à celle qu'elle a prise dans d'autres pays, le gouvernement et la Chambre seraient dans l'impossibilité de payer les indemnités pour le bétail qu'il faudrait sacrifier.

Si, par exemple, nous étions dans la situation où se trouve aujourd'hui l'Angleterre qui perd du bétail pour plusieurs millions par semaine, il est évident que l'Etat devrait renoncer au système des indemnités, et c'est là que nous arriverions peut-être, si tout le inonde ne se hâte de prêter son concours au gouvernement et de suivre avec soin les instructions données par l'administration supérieure.

Le gouvernement doit se borner à prescrire des mesures, et si on ne les exécute pas avec vigilance, le pays sera bientôt envahi. Je reconnais, du reste, que quelques administrations communales font leur devoir ; elles prennent toutes les précautions possibles pour aider le gouvernement, mais c'est malheureusement là l'exception.

Messieurs, en répondant tantôt à M. Bouvier, j'ai riposté à une attaque un peu risquée qu'il m'a lancée en se servant d'un mot peu propre que je ne veux pas répéter. Je lui ait dit que lui, qui combattait le crédit destiné à acheter des animaux de race anglaise, ne pourrait plus venir réclamer des animaux de l'espèce que vous savez, si le crédit était supprimé, mais je n'ai jamais pensé ni dit ici, comme l'insinue l'honorable M. Coomans, que les députés qui auraient voté contre un crédit ne pourraient obtenir sur ce crédit aucun subside pour leur arrondissement.

M. Coomans. - Cela m'a été dit dans vos bureaux.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Cela est absurde. Permettez-moi de croire qu'aucun cabinet ne refuserait un subside à un arrondissement parce que le représentant de cet arrondissement aurait voté contre un crédit demandé. Je ne comprends pas comment une pareille idée a pu venir à l'esprit d'un homme aussi sérieux que l'honorable M. Coomans.

M. Bouvierµ. - C'est une exagération.

M. Vleminckxµ. - Messieurs, je croirais manquer à mon devoir si je ne remerciais pas l'honorable ministre de l'intérieur de l'énergie avec laquelle il nous a préservés de la peste bovine. Je reconnais hautement ici que les mesures auxquelles il a eu recours sont les seules véritablement efficaces, et y persévérer, est pour lui un devoir. Seules elles peuvent nous épargner de grands dangers et de grands malheurs.

Messieurs, j'ai quelques mots à répondre à l'honorable M. Jacquemyns. L'honorable membre me paraît avoir parlé avec un peu trop de dédain de l'association des cultivateurs de Ghistelles. Il me semble pourtant qu'il est tout près de s'entendre avec eux, et il aurait dû bien plutôt les encourager que les combattre.

Comme l'honorable M. Jacquemyns, cette association ne demande pour l'agriculture que la protection qui lui est rigoureusement nécessaire, ni plus ni moins.

Pour mon compte, j'ai été étonné d'entendre l'honorable M. Jacquemyns me reprocher de ne pas vouloir maintenir au budget les 240,000 fr. pour l'abattage d'animaux malades, qui y sont inscrits pour 1866. J'ai expressément réservé l'intervention du gouvernement pour le cas d'épizootie. En dehors de ce cas, je ne puis admettre que le gouvernement doive octroyer des indemnités pour abattage.

J'ai appris avec plaisir que l'honorable ministre de l'intérieur, qui a déjà restreint, la protection dans une certaine mesure, continuera à marcher dans cette voie, en ne donnant des encouragements que là où ils seront rigoureusement nécessaires.

Je crois comme la plupart de vous, par exemple, messieurs, qu'il pourrait facilement se passer désormais du soin de faire choix de reproducteurs. Voilà 25 ou 30 ans que cela dure et les résultats obtenus sont à peu près nuls. C'est l'intérêt des agriculteurs qu'il faut mettre en cause, et cet intérêt-là les portera à acheter des reproducteurs quand ils le jugeront utile.

Messieurs, en toute chose la liberté vaut mieux que la protection. La Belgique le sait bien mieux qu'aucun autre pays. La liberté a enfanté (page 227) chez nous des choses merveilleuses. La protection en matière d'industrie surtout n’a jamais produit que des avortons.

- La discussion est close.

Articles 53 et 54

« Art. 53. Indemnité pour bestiaux abattus : fr. 240,000. »

- Adopté.


« Art. 54. Service vétérinaire ; bourses : fr. 60,000. »

- Adopté.

Articles 55 et 56

« Art. 55. Amélioration de nos races d'animaux domestiques : exécution des règlements provinciaux sur la matière : fr. 93,500. »

MpVµ. - Messieurs, il est parvenu au bureau un amendement consistant à remplacer les articles 55 et 56 par le libellé suivant.

« Amélioration de la race chevaline indigène ; traitements et indemnités des commissions d'agriculture ; subsides pour concours et expositions, aux sociétés et aux comices agricoles : fr. 100,000.

« (Signé) Bouvier, de Naeyer, Le Hardy, Vleminckx, Bricoult, Couvreur. »

L'amendement consiste à faire des articles 55 et 56 un seul article ; on attache à ce libellé le chiffre de 100,000 fr. Quant au chiffre de 144,700 francs, qui figure dans l'article 56, on le reporte à la voirie vicinale.

Cet amendement a été suffisamment développé ; il est signé par plus de cinq membres de l'assemblée, il fait donc partie de la discussion.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je ne puis me rallier à l'amendement qui vient d'être proposé, pour plusieurs motifs ; d'abord cet amendement ex abrupto vient détruire, sans examen, pour ainsi dire, plusieurs institutions qui existent depuis longtemps. (Interruption.)

Si j'ai bien compris, il s'agirait de supprimer quoi ? Le conseil supérieur d'agriculture ? La commission d'agriculture ? (Nouvelle interruption.) Pas les commissions provinciales, soit ; vous le voyez l'amendement n'est pas compris... Mais on demande tout au moins que l'on désorganise les comices agricoles, les sociétés d'agriculteurs ; en un mot, on vous propose de désorganiser tout le service agricole qui a été créé à si grand-peine et qui fonctionne réellement bien.

L'honorable M. Bricoult se plaint de ce que les comices agricoles rendent peu de services ; cela dépend ; dans certaines provinces ils rendent des services réels et beaucoup de cultivateurs en font partie. Je comprends que dans la province que représente plus spécialement l'honorable membre et où l'on s'occupe surtout d'intérêts industriels, on s'intéresse peu aux comices agricoles ; mais il n'en est pas de même partout. Je ne sais si l'amendement propose de supprimer autre chose encore, car je n'ai pu en saisir la portée à une seule lecture.

Ou propose, messieurs, de reporter à l'article « voirie vicinale » l'économie à faire. Les dépenses pour l'amélioration de la voirie vicinale sont des dépenses fort utiles sans doute, mais je vous prie de remarquer que l’année dernière, le gouvernement vous a demandé pour la voirie vicinale 2 millions qui, avec les subsides provinciaux et communaux, représentent une somme de 6 à 7 millions.

Lorsque le gouvernement a invité les conseils provinciaux à voter la dépense qui leur incombait, les députations ont répondu qu'il faudrait deux ou trois ans aux provinces pour fournir leur part. Je crois donc qu'il serait inutile, quant à présent, d'augmenter ce crédit. Quand il sera épuisé, le gouvernement demandera de nouvelles ressources. Proposer de nouveaux crédits est aujourd'hui une espèce de fanfaronnade, puisqu'on se trouverait dans l'impossibilité de les employer immédiatement.

Je prie la Chambre de ne pas admettre l'amendement proposé et qui, se produisant au dernier moment, pourrait désorganiser un grand nombre de services utiles. D'habitude, pour la plus petite question on demande des rapports, des enquêtes et aujourd'hui, M. Bouvier propose de supprimer, sans examen, pour ainsi dire, plusieurs services importants !

Je demande donc que la Chambre ne suive pas l'honorable membre dans cette voie ; s'il y a des réductions à faire, je ne demande pas mieux que de les faire, et mon passé présente, à cet égard, des garanties pour l'avenir. J'ai proposé à la Chambre de supprimer le haras...

M. Wasseige. - Ce n'est pas ce que vous avez fait de mieux.

- Voix nombreuses. - Si, si.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - M. Wasseige exprime des regrets sur la tombe de cette institution ; cela va de soi. M. Wasseige représente la province de Namur, et M. Bouvier verse des larmes parce que le gouvernement n'est plus marchand de chaux ; M. Bouvier représente Virton !! Mais la Chambre, j'eu suis convaincu, approuve ces suppressions, comme elle a approuve celle du service du drainage que j'ai proposé.

Du reste, quand il sera possible de faire d'autres réductions, je les ferai bien volontiers, mais je demande qu'on ne vienne pas brusquement renverser toute une organisation élaborée à grand-peine et qui fonctionne régulièrement.

M. Bouvierµ. - L'honorable ministre de l'intérieur vient de déclarer que, selon lui, par l'amendement que nous proposons, nous désorganisons les différent services qui sont inscrits au chapitre IX. Mais nous ne supprimons pas tout le chiffre : nous laissons à sa disposition une somme encore assez ronde, assez importante même. Nous ne voulons en aucune façon désorganiser les services qui fonctionnent utilement, et qui pourront probablement disparaître plus tard. Mais nous voulons des réductions sérieuses ; en cela nous sommes les interprètes des sentiments d'une grande partie de la Chambre. L'honorable ministre nous a rappelé que l'année dernière nous avons déjà supprimé le haras, et que la dépense qui était consacrée à cette institution, quoique reportée à la voirie vicinale, n'a pas trouvé d'emploi. Nous le regrettons. Votre argument, si j'ai bien saisi votre pensée consiste à dire : La voirie n'ayant pas besoin de subsides, vous ne voulez pas de cet argent, les conseils provinciaux ne nous suivant pas dans cette partie de dépensées qui lui incombent.

Vous ne voulez pas de nos offres qui profiteraient aux grands et aux petits cultivateurs, surtout aux petits, et, j'entre ici dans le système développé par M. Coomans, qui dit qu'il représenté tout spécialement les paysans.

Nous le confierons à M. le ministre des finances qui se plaint que nous faisons appel trop fréquent au trésor. Cette somme viendra en aide à deux arrondissements, Maeseyck et Virton, privés jusqu'à ce jour de chemin de fer.

L'honorable ministre se plaignant aussi qu'il n'a pu étudier notre amendement, je demande qu'il soit imprimé afin que demain on puisse en aborder la discussion.

M. Mullerµ. - Je demanderai qu'on veuille bien relire le libellé de l'amendement qu'on nous propose.

MpVµ. - Le voici : « Remplacer les article 55 et 56 par le libellé suivant :

« Amélioration de la race chevaline indigène, traitement et indemnités des commissions d'agriculture, subsides pour concours et expositions aux sociétés et aux comices agricoles : fr. 100,000. »

M. Bouvierµ. - Il faut biffer la dernière partie de l'amendement portant transfert de la somme de 114,100 fr. au chapitre de la voirie vicinale.

M. Jacquemynsµ. - Si la discussion de la proposition de l'honorable M. Bouvier devait être remise jusqu'à demain, je ne prendrais pas la parole aujourd'hui ; mais je ne comprends réellement pas comment l'honorable, membre entend l'action du gouvernement sur l'agriculture : d'un côté, il demande en faveur de l'agriculture une protection incroyable, une protection qui pourrait entraîner le gouvernement à des dépenses considérables, et d'un autre côté il condamne l'intervention du gouvernement dans les affaires de l'agriculture. Il demande que le gouvernement s'immisce dans des travaux immenses pour procurer à l'agriculture des engrais à meilleur compte qu'aujourd'hui.

Or, c'est là une intervention qui, en réalité, constituerait une espèce de prime en faveur de certains groupes d'agriculteurs seulement, et qui occasionnerait des dépenses considérables au gouvernement. Les engrais que sont-ils, messieurs ? Mais c'est tout bonnement une matière première pour l'agriculture ; or, pourquoi faut-il faire des dépenses plutôt en faveur de l'agriculture qu'en faveur de toute autre industrie pour procurer à meilleur compte à quelques-uns une de leurs matières premières ? Si l'agriculture est intéressée à ce que les engrais de nos villes soient recueillis, qu'elle se charge elle-même de le faire ; que des sociétés s'organisent dans ce but. Mais le gouvernement n'a évidemment rien à voir là-dedans.

Ainsi, d'un côté l'honorable M. Bouvier demande au gouvernement de s'engager dans des dépenses considérables pour favoriser l'agriculture dans les environs d'une grande ville, de la capitale.

M. Bouvierµ. - Je demande la parole.

M. Jacquemynsµ. - Je dis que si le gouvernement intervient dans les travaux d'assainissement de la ville de Bruxelles dans le but de fournir des engrais à meilleur compte, il est clair que ces engrais seront (page 228) mis exclusivement à la disposition des cultivateurs dans un certain rayon ; et que le gouvernement aura ainsi créé un privilège en faveur de quelques individus seulement.

£t, d'un autre côté, l'honorable M. Bouvier demande qu'on réduise les dépenses qu'on fait pour les comices agricoles. Je veux bien admettre que les comices agricoles, dans certaines localités, ne rendent pas tous les services qu'on peut en attendre ; mais ce sont là de regrettables exceptions ; et parce que, dans certaines localités, ces institutions laissent à désirer, s'ensuit-il qu'il faille réduire considérablement les subsides qui leur sont alloués ?

Il en est d'autres qui sont éminemment utiles, et notamment dans la Flandre orientale, il y a 2,500 agriculteurs qui font partie de la société agricole ; les divers comices ou sections qui la composent se réunissent régulièrement et s'occupent sérieusement.

Les comices agricoles bien constitués établissent des points de contact entre les différents agriculteurs, les tirent de l'isolement pour les réunir dans un but de progrès auquel contribuent encore dans une large mesure les conférences qu'ils établissent ; et il serait à désirer qu'il en fût de même dans toutes les provinces. Rien ne l'empêche. Si vous allez leur enlever les faibles subsides dont ils jouissent, vous affaiblirez considérablement leur organisation et je suis persuadé que vous aurez lieu de regretter de ne les avoir pas plutôt développés.

M. Kervyn de Lettenhove. - J'ai une simple observation à présenter : il faut que la Chambre vote en connaissance de cause ; il importe donc que les auteurs de l'amendement veuillent bien préciser les points sur lesquels portent les suppressions de crédits qu'il tend à réaliser. C'est ce que je viens leur demander.

M. Bouvierµ. - Je crois que l'honorable M. Jacquemyns n'a pas bien saisi mon argumentation relative à la question des engrais humains. J'ai dit, et je demande pardon à la Chambre de devoir me répéter, que je désirerais, à l'occasion du projet de loi sur l'assainissement de la ville de Bruxelles, dont elle aura à s'occuper bientôt, que le gouvernement fît étudier la question à laquelle l'honorable membre fait allusion ; qu'on ne laissât pas disparaître en pure perte des engrais qu'il serait si utile, si profitable, j'ajoute si indispensable, de rendre à l'agriculture comme cela se pratique dans les contrées lointaines dont j'ai parlé, engrais entraînés aujourd'hui dans les rivières en les empoisonnant. Je suis loin d'accorder des primes à cet effet, ce chapitre en renferme déjà un trop grand luxe que je désire voir disparaître et l'époque, je le pressens, n'en est pas éloignée,

M. Mullerµ. - Après avoir entendu la seconde lecture de l'amendement, je dois dire que j'y remarque une grande inconséquence.

Les honorables auteurs de cet amendement partent du principe qu'il est certains encouragements que le gouvernement ne doit pas accorder : Ainsi ils condamnent les encouragements pour l'introduction de races étrangères d'animaux domestiques ; et, en même temps ils maintiennent les encouragements en faveur de la race chevaline. C'est là une véritable inconséquence.

M. Bouvierµ. - Il faut une juste mesure en tout.

M. Mullerµ. - Il me paraît évident que si vous ne voulez plus d'encouragements en faveur des races bovine, ovine et porcine, vous devez rejeter aussi toute espèce d'encouragement en faveur de la race chevaline. L'amendement ne me paraît pas admissible : il faut nécessairement qu'on nous mette à même de voter une disposition qui consacre un principe.

- La discussion est close.

La proposition de renvoyer le vote à demain n'est pas adoptée.

L'amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

Le chiffre proposé par le gouvernement à l'article 55 est mis aux voix et adopté.

Article 56 à 63

« Art. 56. Conseil supérieur et commissions provinciales d'agriculture ; traitements et indemnités des secrétaires du conseil supérieur et des commissions provinciales d'agriculture ; subsides pour concours et expositions ; encouragements aux sociétés et aux comices agricoles ; achats d'instruments aratoires nouveaux, destinés à servir de modèles ou à être distribués aux commissions d'agriculture, aux comices et sociétés d'agriculture ; achat de graines nouvelles, à répartir par l'intermédiaire des commissions d'agriculture ; dépenses diverses : fr. 144,700. »

- Adopté


« Art. 57. Enseignement professionnel de l'agriculture et de l'horticulture ; personnel de l’institut agricole et des écoles d'horticulture de l'Etat ; matériel de ces établissements ; bourses ; traitements de disponibilité, frais de conférences agricoles et horticoles, et subside pour une école forestière : fr. 124,000. »

- Adopté.


« Art. 58. Personnel du service des défrichements en Campine ; charge extraordinaire ; fr. 23,670. »

- Adopté.


« Art. 59. Mesures relatives aux défrichements, dépenses et indemnités nécessitées par le contrôle établi pour assurer l'exécution de la loi du 25 mars 1847. Pépinières d'arbres forestiers ; charge extraordinaire : fr. 27,000. »

- Adopté.


« Art. 60. Personnel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat : fr. 67,600. »

MpVµ. - Le gouvernement, d'accord avec la section centrale, propose de transférer de l'article 61 à l'article 60 une somme de 1,400 francs, et d'ajouter au libellé de l'art. 60 les mots : « Frais de la commission de surveillance ».

- L'article 60, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 61. Matériel de l'école de médecine vétérinaire de l'Etat ; bourses ; jury vétérinaire : fr. 71,200. »

MpVµ. - Cet article doit être diminué d'une somme de 1,400 francs, qui vient d'être transférée à l'article 60 ; ce qui réduit le chiffre à 69,800 francs.

- L'article 61, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 62. Subside à la Société royale d'horticulture de Bruxelles : fr. 24,000. »

- Adopté.


« Art. 63. Traitements de disponibilité du personnel du haras de l'Etat ; charge extraordinaire : fr. 35,620. »

- Adopté.

M. Vleminckxµ. - Messieurs, on me sollicite de dire quelques mots, en réponse à la demande faite par l'honorable M. Van Overloop, au sujet de la maladie des trichines.

MpVµ. - Nous sommes au haras.

M. Vleminckxµ. - Il faut bien, si l'on veut m'entendre, que je puisse parler maintenant de cet objet ; nous allons sortir du chapitre de l'agriculture. (Parlez !)

M. le ministre de l'intérieur vous a dit tout à l'heure qu'il consulterait l'Académie royale de médecine ou le conseil supérieur d'hygiène, ou les deux institutions à la fois, sur la maladie dont il est ici question ; je crois qu'il fera fort bien. Je ferai remarquer néanmoins que l'Académie de médecine s'en est occupée déjà de manière à rassurer les populations.

Messieurs, ce qu'on appelle la maladie des trichines n'est pas propre à l'homme, mais une affection qui nous est communiquée par l'espèce porcine.

En Belgique, nous ne la connaissons véritablement pas, et il est probable que nous ne la connaîtrons jamais, si nous continuons à vivre comme nous avons vécu jusqu'ici.

Qu'est-ce qui la provoque ? C'est l'introduction de certains animalcules dans l'économie en mangeant du porc non cuit. Cet usage est assez généralement répandu dans certaines parties de l'Allemagne. Il n'en est pas de même en Belgique, où à très peu d'exceptions près on fait usage de la viande de porc cuite. Que l'on continue à ne manger que du porc parfaitement cuit, c'est-à-dire de la viande porcine dont l'albumine est tout à fait coagulée, et il est plus que probable que nous n'aurons pas à constater des cas de maladies dues à la présence de trichines. C'est tout ce que je puis dire à ce sujet à la Chambre.

Chapitre XII. Voirie vicinale et hygiène publique

Article 64

« Art. 64. Encouragements divers pour l'amélioration de la voirie vicinale et pour les améliorations qui intéressent l'hygiène publique ; inspection des chemins vicinaux, des cours d'eau et de l'agriculture ; indemnités aux commissaires voyers : fr. 1,165,550. »

(page 229) M. Wasseige. - Messieurs, à l'occasion du crédit destiné à la voirie vicinale, j'aurai l'honneur de faire à l'honorable ministre de l'intérieur une recommandation que je me suis permis de lui adresser déjà précédemment.

D'après les règles suivies au département de l'intérieur, les subsides ne sont accordés aux communes que pour construction de nouveaux chemins vicinaux. Je pense que c'est là un mauvais précédent, et que cette manière d'agir n'est ni convenable ni juste.

Dans nos provinces wallonnes surtout et certainement dans les provinces de Liège, de Luxembourg et de Namur, les chemins vicinaux ont une très grande étendue et la plupart sont déjà mis en bon état de viabilité ; qu'arrive-t-il alors ? C'est que si l'on exige des communes, pour avoir part aux faveurs du gouvernement, qu'elles construisent des routes nouvelles, elles négligent l'entretien des chemins qu'elles ont construits à grands frais et que, par cela même, les chemins se détruisent complètement et rapidement. Ce résultat va à rencontre des intentions du gouvernement, c'est-à-dire que son système trop absolu empêche l'amélioration réelle de la voirie vicinale.

Je pense donc qu'il serait très utile et très juste que le gouvernement accordât des subsides pour réparation et entretien des chemins existants.

Je dis que cela serait très juste, car il serait souverainement inique que les communes qui, à l'aide de grands sacrifices se sont créé un réseau de communications presque complet et par cela même d'un entretien très dispendieux, se vissent privées de tout subside, tandis que les communes négligentes et paresseuses auraient seules part à toutes les faveurs du gouvernement.

J'engage donc vivement l'honorable ministre de l'intérieur à ne pas s'en tenir strictement à ses anciens errements et à accorder des encouragements, même aux communes qui lui en demanderont pour entretenir des chemins déjà construits.

S'il en était autrement, je me verrais forcé d'user de mon initiative parlementaire et de présenter un amendement dans ce sens au budget prochain.

- L'article 64 est adopté,

Chapitre XIII. Industrie

Articles 65 à 71

« Art. 65. Frais du conseil supérieur de l'industrie et du commerce ; traitement de l'inspecteur pour les affaires d'industrie et du secrétaire du conseil : fr. 12,500. »

- Adopté.


« Art. 66. Enseignement professionnel : Ecoles industrielles, ateliers d'apprentissage : fr. 197,300. »

- Adopté.


« Art. 67. Achat de modèles et de métiers perfectionnés ; voyages et missions ; publications utiles et souscriptions ; prix ou récompenses pour des ouvrages, mémoires, etc., traitant de questions de technologie, de droit ou d'économie industrielle ; subsides en faveur d'industries nouvelles ; frais relatifs aux caisses de prévoyance et aux sociétés de secours mutuels, et dépenses de la commission permanente instituée pour faciliter l'examen des affaires qui se rattachent à ces associations ; encouragement à la société de pisciculture de Belgique ; frais résultant de la collation des décorations industrielles ; traitement du secrétaire de la commission permanente pour les sociétés de secours mutuels : fr. 17,450.

« Charge extraordinaire : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 68. Indemnités des greffiers des conseils de prud'hommes : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 69. Frais de publication du Recueil officiel des brevets d'invention ; traitement du rédacteur du recueil : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 70. Musée de l’industrie. Traitement du personnel : fr. 21,650. »

- Adopté.


« Art. 71. Musée de l’industrie. Matériel et frais divers : fr. 17,450. »

- Adopté.

Chapitre XIV. Poids et mesures

Articles 72 à 74

« Art. 72. Traitement des vérificateurs : fr. 53,800. »

- Adopté.


« Art. 73. Frais de bureau et de tournées et frais de la commission des poids et mesures : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art. 74. Matériel : fr. 2,000. »

- Adopté.

Chapitre XV. Instruction publique. Enseignement supérieur

MpVµ. - La parole est à M. Bouvier.

M. Bouvierµ. - J'ai demandé la parole sur la chapitre concernant l'enseignement moyen.

MpVµ. - Nous sommes à l'enseignement supérieur.

M. Bouvierµ. - Je parlerai sur le chapitre XVI.

Article 75 à 77

« Art. 75. Dépenses du conseil de perfectionnement de l'enseignement supérieur : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 76. Traitement des fonctionnaires et employés des deux universités de l'Etat : fr. 738,950. »

- Adopté.


« Art. 77. Bourses. Matériel des universités : fr. 143,710.

« Charge extraordinaire : fr. 11,250. »

- Adopté.

Article 78

« Art. 78. Frais de route et de séjour, indemnités de séance des membres des jurys d'examen pour les grades académiques, pour le titre de gradué en lettres et pour le grade de professeur agrégé de l'enseignement moyen de l'un et de l'autre degré, et pour le diplôme de capacité relatif à l'enseignement de la langue flamande, de la langue allemande et de la langue anglaise, et pour le diplôme de capacité à délivrer aux élèves de la première commerciale et industrielle des athénées ; salaire des huissiers des jurys, et matériel : fr. 175,225. »

MpVµ. - M. le ministre de l'intérieur a proposé par amendement de porter ce chiffre à 185,000 francs.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Messieurs, lorsque le budget a été présenté à la Chambre, le chiffre porté à cet article était de 175,225 fr. Depuis lors, il a été constaté que le chiffre pour frais de route et de séjour des membres des jurys devait être majoré.

Depuis quelque temps, le nombre des jurys a été augmenté, l'institution du diplôme de capacité pour les professeurs de langues vivantes a nécessité entre autres la création d'un jury spécial.

D'un autre côté, le nombre de candidats qui se présentent aux examens augmente et les séances des jurys sont plus nombreuses. Les crédits primitivement demandés sont donc insuffisants. Pour l'année 1865, le crédit voté sera insuffisant, et le gouvernement sera oblige de vous demander un crédit supplémentaire.

C'est pour prévenir cette insuffisance de ressource en 1866, que j'ai proposé d'augmenter le crédit et de le porter à 185,000 fr.

- Le chiffre de 185,000 francs est mis aux voix et adopté.

Articles 79 et 80

« Art. 79. Dépenses du concours universitaire. Frais de publication et d'impression des Annales des universités de Belgique : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 80. Subsides pour encourager.la publication des travaux des membres du corps professoral universitaire et pour subvenir aux frais des missions ayant principalement pour objet l'intérêt de cet enseignement : fr. 12,000. »

- Adopté.


- Des membres : A demain.

(page 230) M. Orts (pour une motion d’ordre). - Dans une séance précédente, à la demande de l’honorable M. Kervyn, j'avais promis de faire publier, au Moniteur, les chiffres constatant la population de chacun de nos arrondissements électoraux au 1er janvier 1865.

Je n'ai pu remplir cette promesse, parce que, vérification faite, j'ai trouvé ces chiffres imprimés au Moniteur, numéro du 12 juin 1865. Je ne pense pas que la Chambre tienne à ce que je fasse réimprimer ce numéro. Cependant si telle était son intention, je m'empresserais de la satisfaire.

- Des membres. - Non ! non !

- La séance est levée a quatre heures trois quarts.