(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1861-1862)
(page 1041) (Présidence de M. Vervoort.)
M. de Florisone procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. de Moor donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Florisone présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Les membres de l'administration communale et des habitants de Montaigu demandent que le chemin de fer projeté de Diest à Aerschot passe par Montaigu ou au moins près de cette commune. »
M. Landeloos. - Cette pétition présente un caractère d'une extrême urgence. J'en propose le renvoi à la commission des pétitions, avec demande d’un prompt rapport.
M. Beeckman. - J'appuie cette demande.
- Cette proposition est adoptée.
« Le sieur Colson, ancien directeur de première classe de manutention militaire, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la liquidation de la pension à laquelle, par arrêté royal de 1855, il a été admis à faire valoir ses droits. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur De Beer, ancien militaire, demande une gratification. »
- Même renvoi.
« Les membres du conseil communal de Moerbeke prient la Chambre d'allouer au département des travaux publics la somme nécessaire à l’établissement d'une écluse à sas sur le Moervaert, ou du moins de repousser tout travail d'approfondissement de ce canal. »
M. Van de Woestyne. - J'ai l'honneur de demander le dépôt de cette pétition sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.
- Adopté.
« Le conseil communal de Melle demande des modifications à la loi du 18 février 1845, relative au domicile de secours. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Les membres du conseil communal et des habitants de Peer déclarent adhérer à la pétition ayant pour objet la concession d'un chemin de fer de Liège à Eindhoven par Hasselt, Zonhoven, etc. »
(page 1042) « Même adhésion des membres du conseil communal et d'habitants de Helchteren, Overpelt. »
- Même renvoi.
« Le sieur Bulens demande une loi décrétant la fabrication immédiate d'un nombre suffisant de carabines de précision, pour pouvoir armer tous les Belges capables de manier une arme à feu. »
- Même renvoi.
« Le sieur Vermeulen, ancien garde-convoi au chemin de fer, demande que ses années de service, en qualité de postillon et surveillant à l'administration des postes lui soient comptées pour augmenter sa pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Van Campenhout, ancien surveillant et chef poseur dans l'administration du chemin de fer de l'Etat, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la révision de sa pension. »
- Même renvoi.
« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation du sieur Ch.-H. Debing, à Bilsen. »
- Renvoi à la commission des naturalisations.
« M. de Renesse, obligé de s'absenter, demande un congé. »
- Accordé.
M. le président. - La Chambre passe à la discussion des articles.
« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je pense qu'il avait été convenu, à la fin de la séance d'hier, que je répondrais quelques mots à des demandes de renseignements qui m'avaient été faites par l'honorable M. Wasseige.
L'honorable M. Wasseige a sollicité d'abord que le gouvernement fît à la ville de Namur un large abandon des terrains de ses fortifications.
Cette question est étrangère à mon département. Ce sont les domaines et par conséquent le département des finances qui doivent intervenir. Il me serait impossible d'accorder à l'honorable membre l'objet de sa demande.
L'honorable membre est revenu également sur le projet du chemin de fer de Namur à Landen. Il a demandé que le gouvernement ne préjugeât rien contre cette concession et en faveur de la ligne de Tamines à Landen.
Il est évident, messieurs, que je ne puis rien préjuger. Je répète que j'ignore si c'est sérieusement que l'on poursuit aujourd'hui la confirmation de la concession de la ligne de Tamines à Landen. Jusqu'au moment où il y aura garantie morale et pécuniaire que l'exécution de la ligne de Tamines suivrait l'octroi de la concession, il est évident, dis-je, que la seconde demande, celle relative à la ligne de Namur, reste en suspens ; en d'autres termes que rien n'est préjugé contre la ligne de Namur à Landen.
En troisième et dernier lieu, l'honorable M. Wasseige a invité le gouvernement à s'engager à pétitionner, dans le projet de loi de travaux publics annoncé, de nouveaux crédits pour la canalisation de la Meuse entre Liège et Namur.
Je. ne puis, messieurs, prendre d'engagement de cette nature. Ce que le gouvernement fera dépendra de la situation du trésor. Cette situation doit être envisagée dans son ensemble et au point de vue des divers besoins à satisfaire dans le pays.
Je reconnais toute l'utilité qu'il y aurait à achever le plus prochainement possible la canalisation de la Meuse. Je dois cependant ajouter que lorsque, l'année dernière, le gouvernement a obtenu un premier crédit de 1,600,000 fr. pour la construction de deux barrages en aval de Namur, je ne supposais pas que la ville de Namur serait revenue si promptement à la charge pour demander le complément du crédit.
Je comprends que les riverains et les habitants de Namur soient pressés de voir terminer ces travaux, mais ils doivent se souvenir aussi que le gouvernement a le droit, après avoir fait un premier pas, d'attendre que le moment soit opportun pour proposer de nouvelles allocations.
Je le répète, si la situation du trésor permet qu'on demande le complément des crédits, le gouvernement le fera avec satisfaction ; car il s'agit d'un grand et beau travail.
L'honorable M. Thibaut, dans une séance précédente, a insisté aussi sur la nécessité d'entreprendre promptement les travaux de canalisation de la Meuse entre Namur et la frontière.
Je dois répéter que la canalisation entre Namur et Chokier doit être terminée avant de pouvoir commencer les travaux en amont de Namur.
M. Wasseige. - J'ai demandé le complément des études.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Les études seront complétées. Il n'y a pas de difficulté à cela.
L'honorable M. Dolez a également soulevé, dans la séance d'hier, une question qui offre un grand intérêt pour la ville de Mons.
Les derniers rapports qui achèvent l'instruction en province de cette affaire sont arrivés, et je pourrai m'en occuper très prochainement.
« Art. 2. Traitements des fonctionnaires et employés : fr. 554,410. »
M. H. Dumortier. - Messieurs, le personnel du département des travaux publics se trouve aujourd'hui dispersé dans cinq ou six locaux différents ; il y a l'hôtel Meeus, le Palais ducal ; il y a même des bureaux dans certaines dépendances du Palais du Roi ; il y en a dans l'hôtel de la Place royale.
Les contrôles sont à la station du Nord.
Il y a encore l'hôtel Engler. Je crois que cette dispersion du personnel est très nuisible au service.
Puis quand les membres des Chambres ou d'autres personnes ont un renseignement à demander, on ne sait pas où il faut s'adresser ; on aurait, réellement besoin d'une carte topographique pour se guider.
Puisque j'ai la parole, messieurs, je dirai un mot de la dernière réorganisation du département des travaux publics. Si nos renseignements sont exacts, il a été créé deux ou trois nouvelles divisions ; ainsi la première division qui était sous la direction de M. Fassiaux, se trouvait composée de trois bureaux.
I es deux premiers bureaux ont été érigés en division. Je ne sais pas jusqu'à quel point il y avait nécessité de faire cette transformation et je serais charmé que l'honorable ministre voulût bien nous donner quelques explications.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Le personnel du département des travaux publics est en effet extrêmement dispersé. Cet état de choses est déplorable et j'ai grand regret de devoir dire qu'il est sans remède. Je devrais avoir un local plus vaste que je n'en puis trouver pour pouvoir y concentrer tout mon personnel. Jusque dans ces derniers temps, il y avait trois locaux : la station du Nord qui renfermait toute l'administration du chemin de fer ; l'hôtel Engler, qui comprenait toute l'administration centrale des ponts et chaussées, et l'hôtel de la place Royale qui comprenait le secrétariat général.
II résultait, messieurs, de l'éloignement de l'administration du chemin de fer que le ministre, se trouvait absolument privé des pièces et des fonctionnaircs dont il a un incessant besoin.
Depuis le matin jusqu'au soir, il se trouvait Place royale, tout à fait seul ; quand il lui fallait quelqu'un ou quelque chose, il n'avait à sa disposition ni fonctionnaires, ni dossiers. Je vous laisse à juger quelles entraves une pareille situation devait apporter dans l'expédition des affaires !
Voici ce qui se passait, par exemple : pour une affaire nouvelle., une requête arrivait au ministre ; la pièce allait, permettez-moi l'expression» au petit bonheur à la station du Nord.
Le directeur, livré à ses propres inspirations, travaillant comme il l'entendait et non comme l'entendait le ministre responsable, préparait l'affaire comme il lui convenait.
Ainsi préparée, elle s'acheminait vers le ministère. Si le ministre n'approuvait pas les propositions telles qu'elles lui étaient présentées, il devait ou renvoyer, ou signer malgré lui, si l'affaire était urgente.
Je le répète, cet état de choses était injustifiable. Il n'y a pas un ministre qui voulût accepter une semblable position, qui voulût rester complètement isolé des agents supérieurs de son administration.
M. Muller. - C'est évident.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Il n'y a pas un des autres départements ministériels où un pareil état de choses existe ; seul, je ne sais pourquoi, le ministre des travaux publics était complètement abandonné à lui-même. Les Chambres ont décrété le déplacement des deux hôtels ministériels, (page 1043) avec leurs dépendances, qui ne se trouvaient pas encore dans la rue de la Loi.
Pour opérer ce déplacement, il faut approprier l'hôtel Engler et déplacer, par conséquent, le personnel qui se trouve dans cet hôtel.
J'ai profité de cette occasion pour transférer une grande partie de l'administration du chemin de fer à l'hôtel même du ministère des travaux publics.
Pour les ponts et chaussées, les affaires qui se traitent sont, en général, ou de grandes affaires, au sujet desquelles les relations personnelles entre le ministre et les chefs de service sont peu nombreuses ; ou de petites affaires, des affaires de détail à l'égard desquelles le ministre n'est pas dans le cas d'intervenir.
Dans ma pensée, on pourra plus tard placer définitivement l'administration centrale des ponts et chaussées à la station du Nord.
Devant louer un hôtel, j'ai loué l'hôtel Meeus, et j'y ai placé tous les agents de l'administration du chemin de fer, que je ne pouvais pas caser auprès de moi ; j'ai fait sortir du local de la Place Royale tous les fonctionnaires et employés dont je pouvais me passer, et j'ai rempli les locaux, laissés vides par eux, de tous les agents de l'administration du chemin de fer avec qui j'ai à conférer à chaque instant.
Ainsi, j'ai placé chez moi le directeur général, le directeur des transports et d'autres directeurs ; le reste a été placé à proximité de la Place Royale, à l'hôtel Meeus.
Lorsque ces deux locaux se sont trouvés remplis, j'ai laissé les autres agents à la station du Nord. Ainsi, j'ai laissé à la station du Nord le contrôle des matières et le contrôle des dépenses.
Je n'ai point d'autres locaux pour le chemin de fer que l'hôtel de la Place Royale, l'hôtel Meeus et la station du Nord. Je n'ai donc pas sept locaux, je n'en ai que trois. J'en aurais sept, que je ne croirais pas avoir de reproche à me faire, puisque ce serait une triste nécessité que je subirais, mais enfin, je n'en ai que trois.
Quant au choix des directions qui ont été laissées à la station du Nord, il était indiqué par l'état même des choses. Quoi qu'en pense l'honorable membre (et j'admets très bien qu'il pense ainsi, car il faut être initié aux besoins journaliers du service pour s'en rendre un compte exact), je n'ai point de rapports suivis avec les contrôles. Les contrôles sont des branches d'administration qui opèrent en dehors du ministre.
Ainsi, messieurs, le contrôle des recettes, qui semble le plus important et avec lequel l'honorable membre pense sans doute que le ministre aurait à entretenir des rapports permanents, quelles sont les occupations de cette branche de service ? C'est principalement de contrôler la gestion des comptables, c'est de s'assurer s'ils ont bien appliqué les tarifs sur lesquels reposent les produits du chemin de fer.
Quant au contrôle de la gestion des comptables, le ministre n'a évidemment pas à intervenir dans ce travail. Et quant à la seconde opération importante du contrôle des recettes, la vérification de la bonne application des tarifs quant aux taxes, ici non plus le ministre n'a pas à intervenir.
Le ministre n'a donc point de rapports de quelque importance (j'entends des rapports personnels obligés) avec cette branche de service.
II me paraît évident que j'ai pris une mesure éminemment utile au service en faisant cesser l'état d'isolement absurde dans lequel le ministre des travaux publics se trouvait.
il y a longtemps que cette mesure eût dû être prise, et si je ne l'ai point adoptée plus tôt, c'est dans un esprit d'économie, mal entendu peut-être ; je regrette de n'avoir pas pris depuis longtemps la résolution que je viens de mettre à exécution, mais je viens d'en dire le motif et l'on reconnaîtra que j'ai été la principale victime de ma tolérance pour la situation défectueuse que j'ai trouvée.
Quanta. la réorganisation que j'ai introduite, elle n'a nullement eu les conséquences que suppose l'honorable préopinant. cette réorganisation consacre surtout une nouvelle répartition des attributions, répartition plus rationnelle selon moi, en ce qu'elle définit d'une manière plus nette qu'auparavant et plus conforme à la responsabilité de chacun les attributions des principaux fonctionnaires.
Quant aux conséquences pécuniaires de la réorganisation, elles sont tout à fait nulles. Cette réorganisation ne coûtera pas un centime au trésor ; et vous pouvez voir, en effet, messieurs, par le budget en discussion que je ne demande rien de plus pour la mise à exécution de la nouvelle organisation de l'administration centrale du chemin de fer.
Je pense, messieurs, que la Chambre ne voudra pas entrer dans des détails qui sont de pure administration intérieure. Cependant, si telle était l'intention de quelques membres, je suis prêt à les suivre sur ce terrain.
Je n'ai, du reste, à répondre qu'un mot à l'honorable membre, un seule observation ayant été présentée par lui en ce qui concerne deux divisions nouvelles qu'il croit avoir été créées. Je ferai remarquer, d'abord, qu'il s'agit de directions et non de divisions ; mais je dois ajouter que ces directions ne sont pas des créations nouvelles : ces deux directions ont toujours existé ; seulement leurs attributions respectives, jadis absorbées par la première direction, ont été autrement réparties.
Quant à ce point de détail, je n'ai donc, en réalité, introduit aucune innovation.
J'ai la conviction, messieurs, d'avoir fait, par la réorganisation dont il s'agit, une chose excellente pour l’administration, et je suis persuadé que les meilleurs résultats ne manqueront pas de s'en faire bientôt sentir.
M. H. Dumortier. - J'aime beaucoup, messieurs, que tout discours aboutisse à une conclusion. Or, il me semble que M. le ministre n'a pas du tout conclu. Il a expliqué comment il se fait que son personnel se trouve dispersé. Je reconnais que les locaux lui manquant, il ne peut pas en faire surgir inopinément. Mais ce n'est pas sur ce point qu'ont porté mes observations.
J'ai eu l'honneur de demander à M. le ministre s'il croit qu'il n'y a rien à faire à cet égard, s'il ne serait pas très utile que l'Etat fit les dépenses nécessaires pour que son personnel fût réuni de manière à assurer la régularité et la bonté du service.
Je désirerais que M. le ministre voulût bien nous dire si son intention est de demander des fonds et de prendre des mesures pour remédier à l'état de choses existant.
Il est impossible que M. le ministre ne reconnaisse pas qu'il y a là beaucoup à faire.
Quand une chose est défectueuse, il ne suffit pas de l'expliquer, il faut dire si on le laissera continuer ou si on fera en sorte de le faire cesser.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Si l'on veut une conclusion, je ferai une réponse très catégorique.
Lorsque le transfert du département des travaux publics aura eu lieu dans les nouveaux locaux de la rue Royale, l'éparpillement du personnel sera aussi grande qu'aujourd'hui, malheureusement. D'après les plans sur lesquels ils se construisent, plans limités par la place dont on dispose, les locaux de la rue de la Loi à occuper par le ministère des travaux publics ne devaient contenir que le secrétariat général et quelques places en petit nombre pour certains fonctionnaires.
En supposant qu'on puisse amener dans les nouveaux locaux tout le personnel dont le ministre a besoin, et qui se trouve réuni maintenant Place Royale, la même dispersion existera.
Ce qu'il y aurait à faire ce serait d'acheter quelques maisons du côté opposé de la rue de l'Orangerie, mais cela n'a aucune importance.
Nous commençons à peine à construire, nous faisons des constructions pour lesquelles nous avons des fonds.
Ce n'est pas au moment où nous mettons la main à l'œuvre pour exécuter des travaux qui ont été l'objet d'une instruction complète, pour lesquels des fonds ont été votés, que nous pouvons venir demander de nouveaux crédits pour exécuter d'autres travaux qui ne sont pas étudiés.
Tout ce que j'ai à faire, c'est d'exécuter le plus promptement possible les constructions que vous voyez marcher assez rapidement. La législature, dans l'avenir, verra quelles mesures il y aura à prendre. Quant à moi, je n'ai pas à prévoir de si loin.
- L'article 2 est mis aux voix et adopté.
M. Crombez. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi de dérogation temporaire à l'article 20 de la loi du 15 mai 1846.
- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.
« Art. 3. Frais de route et de séjour du Ministre, des fonctionnaires et employés de l’administration centrale : fr. 554,410. »
- Adopté.
« Art. 4. Traitements et salaires des huissiers, messagers, concierges et gens de service : fr. 52,985. »
- Adopté.
(page 1044) « Art. 5. Matériel, fournitures de bureau, impressions, achats et réparations de meubles, chauffage, éclairage, menues dépenses : fr.50,000. »
- Adopté.
« Art. 6. Honoraires des avocats du département : fr. 30,000. »
- Adopté.
M. Van Renynghe. - Messieurs, vous avez ordonné le dépôt au bureau de la Chambre, pendant la discussion du budget des travaux publics, de la pétition datée de Rousbrugge-Haringhe, le 1er mars de cette année, par laquelle le conseil communal de cette localité importante, chef-lieu de canton, vous prie de porter au budget soumis actuellement à vos délibérations, les sommes nécessaires pour l'élargissement et l'approfondissement de l'Yser, à partir de la Fintelle jusqu'à Rousbrugge.
Ce collège dit, et avec raison, que depuis plus d'un quart de siècle, la Chambre avait entendu, sans y porter remède, les tristes mais justes plaintes des habitants de la vallée de l'Yser, jusqu'au moment où en 1858 elle vota un premier crédit de 500,000 francs, pour améliorer le cours de cette rivière entre Nieuport et la frontière française, tant sous le rapport de la navigation que sous celui des inondations, mais que depuis cette époque non seulement l'on n'a pas exécuté les moindres travaux de la Fintelle à Rousbrugge, mais même que l'on n'a fait aucune étude à cet égard.
L'administration de cette commune croit ne pas devoir énumérer tous les désastres auxquels ont été assujettis les habitants de la vallée de l'Yser et principalement ses administrés, parce que le triste tableau en a souvent été déroulé devant la Chambre des représentants.
Elle ajoute que l'envasement de l'Yser, par suite des nombreuses inondations et du manque d'entretien, devient complet ; que même pendant la saison pluvieuse les bateaux d'une certaine contenance doivent prendre des allèges à partir d'Elsendamme, de manière, dit-elle, que ce qui était autrefois, par sa commune et celles environnantes, une source de richesses, n'est actuellement que la cause de leurs maux et de leurs désastres.
Elle termine en disant que ses habitants n'ont pas d'autre voie facile pour faire écouler les nombreux produits de leur agriculture et qu'elle ne demande pas un privilège, mais un droit.
Messieurs, l'objet de la demande de l'administration communale de Rousbrugge-Haringhe est juste et urgent. C'est pourquoi je pense qu'il est de mon devoir de l'appuyer de toutes mes forces.
Je le recommande donc à M. le ministre des travaux publics d'une manière toute spéciale, en le priant de vouloir bien s'entendre avec la province de Flandre occidentale, afin que les travaux dont il s'agit, réclamés avec tant d'instance et de justice, puissent s'exécuter le plus promptement possible.
Je sais que l'on pourrait m'objecter que les travaux pour favoriser l'écoulement des eaux, en voie d'exécution en aval de la Fintelle, doivent être faits avant que l'on mette la main à ceux qui sont à exécuter en amont de cette écluse. Mais rien n'empêcherait que le gouvernement ordonne les études à faire pour les travaux à effectuer en amont de la Fintelle, afin que tout soit préparé pour mettre la main à l'œuvre dans un délai rapproché.
En attendant que les travaux indispensables pour obvier à des inondations fréquentes et désastreuses, s'exécutent, ne pourrait-on pas employer une partie du crédit alloué annuellement au budget des travaux publics, en faveur de l'Yser, et en le majorant, pour faciliter la navigation de cette rivière entre la Fintelle et Rousbrugge ?
Je le pense et j'ai l'espoir que M. le ministre des travaux publics sera de mon avis.
La demande de l'administration communale de Rousbrugge mérite d'attirer toute l'attention et toute la sollicitude du gouvernement, car c'est sur ses administrés que pèse le plus lourdement la servitude imposée par la France à la vallée de l'Yser, ce sont eux qui en sont les premières victimes comme étant les plus proches voisins de cet empire. Les eaux surabondantes venant de ce pays non seulement détruisent leurs récoltes, mais encore envasent la rivière qui jadis, par une navigation facile, leur procurait le bien-être.
Je suis persuadé que M. le ministre des travaux publics fera tout son possible pour qu'un si triste état de choses disparaisse et, par conséquent, afin que l'on fasse droit à de justes et urgentes réclamations.
M. de Florisone. - Messieurs, je viens appuyer de tout mon pouvoir la pétition du conseil communal de Rousbrugge-Haringhe, dont mon honorable collègue, M. Van Renynghe, vous a entretenus avant moi. Cette pétition ainsi que celle des conseils communaux de Stavele, Crombeke, Westvleteren que j'ai eu l'honneur de remettre moi-même à M. le ministre des travaux publics, signalent le mauvais état de la partie supérieure de l'Yser, à partir de la Fintelle jusqu'à la frontière française. Ce n'est pas la première fois, messieurs, que ces plaintes si fondées ont été adressées à la Chambre ; pendant longtemps elles se sont produites dans cette enceinte. La loi qui autorise la reprise de l'Yser par l'Etat, les sommes votées, l'amélioration du régime de cette rivière, tant sous le rapport de la navigation que sous celui de l'écoulement des eaux sont venus donner enfin satisfaction aux justes réclamations des localités intéressées. Depuis le vote de la loi, d'importants travaux achevés ou en cours d'exécution ont été entrepris en aval, aux bords de la mer, pour remédier aux inondations si désastreuses pour l'agriculture, et les riverains du bas Yser peuvent espérer que, dans un avenir peu éloigné, ils seront complètement à l'abri du fléau qui venait périodiquement désoler leur vallée.
Mais, messieurs, il n'en est pas ainsi pour la partie supérieure. Les grandes améliorations faites en France aux sources de l'Yser ont aggravé la servitude internationale qui pèse si lourdement sur les populations en amont de la Fintelle. Le dévasement et le redressement des affluents de l'Yser, exécutés dans le département du Nord, le déboisement et la pratique plus générale du drainage, ont eu pour résultat d'amener les eaux françaises sur notre territoire avec une rapidité telle, qu'au moindre orage, l'Yser, trop étroit pour les recevoir, menace par ses crues subites, d'une destruction complète, les propriétés voisines. J'ignore, messieurs, si cette situation nouvelle a suffisamment attiré l'attention du département des travaux publics ; j'insiste auprès de lui pour que les intérêts des riverains du haut Yser ne soient pas négligés.
Le danger des inondations d'été se trouve encore augmenté par l'envasement à peu près complet du lit de l'Yser, envasement qui s'oppose au rapide écoulement des eaux, tandis que l'insuffisance habituelle du mouillage, amenée par le manque d'entretien, interrompt la navigation pendant plusieurs mois de l'année. « Les bateaux d'une certaine contenance, disent les pétitionnaires, qui pouvaient remonter jadis l'Yser jusqu'au pont de Rousbrugge, sont obligés de prendre des allèges à partir d'Elsendamme. » Je n'ai pas besoin, messieurs, de vous faire remarquer le dommage notable qu'occasionne aux communes, situées en amont et Elsendamme le mauvais état de la rivière qui, loin d'être pour elles, comme autrefois, une source de richesse et de prospérité, est devenue une cause de désastres et de ruine. Ces communes demandent, en outre, la construction d'un chemin de halage dont l'absence est une entrave sérieuse à la navigation, déjà si difficile.
Si mes renseignements sont exacts, les travaux à exécuter pour mettre en parfait état de navigabilité la partie de l'Yser de la frontière française à la Fintelle, sont relativement de peu d'importance. Je prie M. le ministre des travaux publics d'ordonner de complètes études à ce sujet. Je suis convaincu que lorsqu'elles seront terminées, il reconnaîtra l'urgente nécessité de prendre les mesures nécessaires pour satisfaire aux légitimes réclamations des habitants riverains de I’Yser, dont je recommande les pétitions à sa bienveillante attention.
M. Beeckman. - Je n'avais pas l'intention de prendre part à la discussion ; je ne me suis décidé qu'à la fin de la séance d'hier ; la Chambre me permettra de rentrer un peu dans la discussion générale, (Interruption.)
C'est pour abréger la discussion ; sans cela je serai obligé de demander la parole sur plusieurs articles.
Les explications que M. le ministre a données sur le chemin de fer d'Aerschot à Diest...
- Plusieurs voix. - Il ne s'agit pas de chemin de fer.
M. le président. - Vous pourrez demander la parole quand nous en serons au chapitre IV, qui est relatif au chemin de fer.
M. Beeckman. - Si la Chambre le préfère, je présenterai mes observations quand nous en serons au chapitre IV. (Oui ! oui !)
M. de Smedt. - Je n'ai qu'un mot à dire pour me joindre aux judicieuses observations des pétitionnaires que viennent d'appuyer l'honorable M. Van Renynghe et l'honorable M. de Florisone, et pour demander aussi que le gouvernement hâte autant que possible les études de ces travaux qui sont d'une utilité incontestable.
J'espère que la réponse de M. le ministre sera satisfaisante.
(page 1045) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - On s'occupe incessamment de ces travaux. Ainsi qu'un honorable membre l'a dit, un crédit se trouve à la disposition du gouvernement.
Ce crédit se compose du crédit alloué par la Chambre et des subsides donnés par la province, par les communes et par les particuliers. Une partie des travaux auxquels ces fonds sont destinés, est déjà exécutée ; d'autres plus importants doivent encore l'être.
L'honorable M. de Florisone m'a spécialement recommandé de faire étudier les travaux d'amélioration qu'il y aurait à faire entre la frontière française et la Fintelle. J'accède volontiers à ce désir.
Ces travaux n'étaient cependant pas compris dans le projet primitif. Mais le crédit alloué a été mis à la disposition du gouvernement d'une manière générale ; il est affecté d'une manière générale aux travaux d'amélioration de l'Yser. Le gouvernement doit donc l'employer au mieux des intérêts publics.
Si, à la suite, des études que je ferai faire dans cette partie nouvelle, il est démontré qu'elle mérite la préférence ou qu'elle doit être mise, pour les travaux d'amélioration, sur la même ligne que les autres parties de l'Yser, la section dont parle l'honorable membre sera améliorée, suivant ce que démontreront les études, concurremment avec les autres sections.
- La discussion est close.
« Art. 7. Entretien ordinaire et amélioration de routes, et construction de routes nouvelles : fr. 2,836,727. »
M. Wasseige. - Une route royale a été décrétée entre la commune d'Haversin pour aboutir à la route de Liège vers le Gros-Chêne. Au mois de janvier 1861, la première section de cette route a été mise en adjudication par le gouvernement. Je sais que plusieurs pétitions ont dû être adressées, il y a plusieurs mois déjà, à M. le ministre des travaux publics pour demander qu'il hâte autant que possible la mise en adjudication de la seconde section de cette route. Je désirerais que M. le ministre eût la bonté de nous faire savoir à quoi en est cette affaire et s'il y a lieu pour les pétitionnaires d'espérer bientôt la mise en adjudication de cette seconde partie.
Vous comprendrez facilement de quelle utilité est cette seconde section quand vous saurez que c'est celle qui doit relier à la station du chemin de fer plusieurs communes importantes, et qu'aussi longtemps qu'elle ne sera pas construite, la première section ne sert pour ainsi dire pas à ces communes.
Je recommande donc instamment cette affaire à M. le ministre des travaux publics.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Cela dépend absolument des ressources du trésor.
La Chambre sait que nous avons un crédit de 800,000 fr. qui est toujours engagé d'avance ; il ne peut en être autrement. A mesure que des travaux se présentent, ils prennent rang d'inscription soit à raison de leur date, soit à raison de leur importance.
Tout ce que je puis répondre à l'honorable membre, c'est que le travail qu'il recommande sera exécuté le plus promptement possible. Je ne pourrais lui donner une réponse plus précise. Tout dépend des besoins nouveaux et plus urgents qui pourraient se manifester, ainsi que des engagements existants :
M. Wasseige. - Je demanderai à M. le ministre, si ce ne serait pas le cas d'appliquer à cette portion de route une partie du crédit qui a été voté récemment pour les aboutissants aux stations du chemin de fer.
Ces sortes de routes ont été placées dans une catégorie spéciale, et un crédit spécial a été voté. Il est évident, en effet, que les routes qui aboutissent aux stations présentent un degré d'utilité et d'urgence tout à fait exceptionnel.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je regrette de devoir dire que ce crédit est absorbé.
M. Magherman. - Messieurs, j'ai déjà signalé à diverses reprises à la Chambre la nécessité qu'il y a, à mon point de vue, de réunir dans un même crédit l'allocation qui figure au budget de l'intérieur et celle qui est destinée, dans le budget en discussion, à la construction de routes.
En effet, il faut bien le dire et le répéter, il n'y a plus à construire des routes qui soient d'intérêt général.
La grande circulation est absorbée par les chemins de fer. Ce qu'il y a à faire, c'est d'améliorer la voirie vicinale et de faciliter aux communes l'accès des stations de nos chemins de fer ; et lorsqu'on jette un coup d'œil sur les documents statistiques qui nous ont été distribués il y a quelques jours, on voit que, dans ce travail, ne figure pas le moindre bout de route qui soit d'intérêt général.
Nous remarquons, par exemple, que 350,000 fr. sont consacrés à l'ouverture d'une route-avenue de Bruxelles au bois de la Cambre. Je suis loin de blâmer ce subside ; la capitale contribue largement dans les impôts de l'Etat, il est juste qu'elle participe, comme toutes les autres localités, aux subsides. Mais je demande ce qu'il y a d'intérêt général dans cette construction ? C'est un embellissement pour la capitale, mais ce n'est que cela ; les autres localités du pays n'ont aucun intérêt à cette construction.
Il en est de même des routes qui se construisent actuellement aux frais du trésor.
Je voudrais donc que M. le ministre des travaux publics s'entendît avec son collègue de l'intérieur, pour que cette allocation disparût de son budget, sinon en une fois, au moins successivement, et fût reportée au chapitre de la voirie vicinale.
Les travaux de la voirie vicinale se font toujours avec le concours des communes et des provinces. Avec une somme relativement peu élevée, on exécute beaucoup de travaux, tandis qu'il n'en est pas de même pour les travaux qui se construisent aux frais de l'Etat.
L'Etat construit souvent sans l'intervention des provinces et des communes.
Il construit aussi d'une manière plus dispendieuse que ne le font les communes, qui travaillent également sous la direction des ponts et chaussées ; mais leurs ressources étant plus restreintes, elles font leurs travaux avec plus d'économie.
J'appelle toute l'attention de M. le ministre des travaux publics sur ce point. J'espère qu'il parviendra à s'entendre avec son collègue M. le ministre de l'intérieur pour qu'à l'avenir les deux crédits soient réunis en un seul, qui trouverait mieux sa place au budget de l'intérieur.
M. de Naeyer. - Je serais entièrement de l'avis de l'honorable M. Magherman, si le crédit dont il s'agit était destiné exclusivement à la construction de nouvelles routes aux frais du trésor public ; car je pense avec lui qu'aujourd'hui il n'y a plus guère de routes à construire, ayant réellement le caractère de routes de l'Etat sous le rapport des relations qu’elles sont appelées à desservir. L'ancienne classification de routes de l'Etat, de routes des provinces, de routes communales proprement dites, est devenue une espèce d'anachronisme ; elle était basée sur l'importance des relations que les routes étaient appelées à desservir. Or, aujourd'hui, toutes les grandes relations qui s'opéraient autrefois par les routes de l'Etat, sont desservies par le chemin de fer.
Il n'y a pas de doute à cet égard, mais il est bien entendu que ce crédit n'est pas seulement destiné à la construction de nouvelles routes aux frais de l'Etat, mais qu'il est aussi destiné en grande partie à accorder des subsides spéciaux pour des routes qui, rigoureusement parlant, sont communales, mais qui, à raison de certaines circonstances, révèlent un caractère tout spécial d'utilité dont l'appréciation rentre particulièrement dans les attributions du département des travaux publics.
Il a été convenu de mettre dans cette catégorie les routes affluentes au chemin de fer. Elles sont des routes communales sous certains rapports, mais elles ont un caractère d'utilité spéciale parce qu'elles sont destinées à augmenter les recettes des chemins de fer et en même temps à propager autant que possible les bienfaits des voies ferrées dans toute les localités.
Il est déplorable qu'il y ait encore aujourd'hui des stations de chemin de fer qui se trouvent à proximité de centres de population assez importants et qui sont comme si elles n'existaient pas pour ces populations, à défaut de chemins praticables.
Eh bien, il appartient particulièrement au ministre des travaux publics de remédier à cet état de choses.
Il a été toujours entendu qu'il doit être fait usage d'une partie assez considérable de ce crédit pour encourager la construction de routes rentrant dans la catégorie que je viens d'indiquer.
Je pourrais encore citer les routes que j'appellerai transversales et qui ont pour objet de relier entre elles les routes de l'Etat. Ici encore, l'intervention de l'Etat au moyen de subsides tout spéciaux est encore justifiée, et je sais que depuis quelques années une partie du crédit dont il s'agit a été employée dans ce sens.
Sous ce rapport, il me semble que son maintien peut se justifier. Mais s'il devait être question de l'employer pour la plus grande partie à la construction de nouvelles routes aux frais du trésor public, je me rallierais entièrement aux observations de l'honorable M. Magherman.
L'emploi de ce crédit me paraît encore justifié pour la construction de routes dans des localités qui ne sent pas encore dotées de chemins de fer.
Je crois que là les routes pavées sont encore le grand moyen de (page 1046) communication pour ces localités et il me paraît équitable de leur venir spécialement en aide sous ce rapport.
- L’article est adopté.
« Art. 8. Plantations nouvelles sur les routes : fr. 41,000. »
- Adopté.
« Art. 9. Entretien et réparation des palais, hôtels, édifices et monuments appartenant à l'Etat : fr. 41,000. »
- Adopté.
« Art. 10. Travaux extraordinaires d'amélioration à exécuter aux hôtels du ministère des affaires étrangères. »
- Adopté.
« Art. 11. Travaux d'entretien ordinaire et extraordinaire, et dépenses d'exploitation des canaux et rivières : fr. 780,800.
« Charge extraordinaire : fr. 137,500. »
- Adopté.
« Art. 12. Meuse dans les provinces de Namur, de Liége et de Limbourg ; charge extraordinaire : fr. 187,000. »
M. Thibaut. - Messieurs, je ne ferai pas, en ce moment du moins un nouvel effort pour obtenir, en faveur de la canalisation de la Meuse des déclarations plus favorables que celles qui ont été donné au commencement de cette séance. Mais si la Chambre le permet, je demanderai au gouvernement, qui sans doute ne voudrait pas s'exposer au reproche d'agir arbitrairement, quels sont les principes d’après lesquels il élabore les projets de travaux publics surtout en ce qui concerneles voies navigables.
L'honorable M. Vanderstichelen a dit un jour, répondant aux honorables députés de Charleroi, que le gouvernement donnait la préférence aux travaux qu'il appelait travaux de de création sur les travaux d’amélioration. Il en conclut alors qu'il valait mieux créer une Meuse navigable qu'élargir le canal de Charleroi.
Dans une autre occasion, messieurs, le gouvernement pour justifier cette fois l'approfondissement de la Sambre, déclarait que lorsque l'industrie des transports par eau était menacée dans son existence, par la construction d'un chemin de fer, il fallait s'empresser d'exécuter les travaux nécessaires pour mettre le batelage en position de soutenir la concurrence avec la voie ferrée.
Le gouvernement avait sans aucun doute raison dans les deux cas et la Chambre lui a donné son adhésion complète.
Ainsi le gouvernement et la Chambre ont reconnu qu'en ce qui concerne les divers travaux destinés à faciliter les relations commerciales et le transport des marchandises, il y a pour les uns un droit à la préférence et que parmi ceux-ci il en est qui ont un droit à la priorité.
Le droit à la préférence appartient à certains travaux d'après la distinction, que je rappelais tantôt, entre les travaux de création et les travaux d'amélioration. Parmi les travaux de création, le droit à la priorité appartient à ceux dont dépend le sort d'un industrie importante.
J'espère, messieurs, que ce sera d'après ces règles formulées par le gouvernement et acceptées par la Chambre, que M. le ministre établira le projet de loi dont il a parlé dans la séance d'hier.
Maintenant, messieurs, je dois dire quelques mots relativement au crédit demandé pour travaux d'amélioration à exécuter en amont de l'embouchure de la Sambre. Je crains que ce crédit ne soit insuffisant.
Vis-à-vis de Bouvignes, il s'agit d'exécuter des travaux importants dont aucun ne peut être ajourné.
L'établissement du chemin de fer a, en cet endroit, considérablement rétréci le lit de la Meuse. Les grandes eaux de cet hiver, rencontrant dans leur cours un nouvel obstacle, formé par les remblais du chemin de fer, ont causé, comme on devait s'y attendre, de graves perturbations dans les passes navigables.
Lorsque, au commencement de février, les premiers trains de bateaux, en remonte vers la France, arrivèrent à Bouvignes, ils furent arrêtés par des amas de gravier, et par des courants d'une impétuosité incroyable. Il me suffira de vous dire, messieurs, pour vous donner une idée de l'état de la Meuse, qu'on attela 18 chevaux au premier train qui devait franchir cette passe.
Eh bien, quoique les eaux fussent encore presque au niveau du chemin de halage, le fond était tellement exhaussé et le courant tellement rapide, que 46 chevaux furent lancés dans le fleuve avec les hommes qui les montaient, que l'on dut couper les cordes et laisser aller les bateaux à la dérive.
Un nouvel essai fut tenté avec un seul bateau halé par 20 chevaux, et il n'eut pas plus de succès.
Il fallut, messieurs, que les bateliers se résignassent à diminuer d'un tiers la charge de leur bateau et à n'en faire remonter qu'un seul à la fois.
Ce n'est pas tout.
Le halage se fait de Namur à Bouvignes par la rive gauche de la Meuse, de Bouvignes à Dinant, par la rive droite, et au-dessus de Dinant par la rive gauche. De sorte que les bateaux étant arrivés près de Bouvignes, on doit dételer les chevaux qui vont passer la Meuse à Dinant pour venir rejoindre les bateaux en face de Bouvignes, sur l'autre rive.
Tout cela cause à la marche des bateaux un jour de retard, et pour chaque train, c'est une perte de 240 fr. au moins.
Messieurs, je me reprocherais de ne pas saisir l'occasion de rendre justice aux ingénieurs chargés du service de la Meuse ; ils font tout ce qui leur est possible pour améliorer la passe navigable de Bouvignes, mais ils n'ont pas à leur disposition d'instruments convenables.
D'ailleurs, aussi longtemps que des perrés ne seront pas établis, la Meuse charriera constamment du gravier, et de nouveaux amas se formeront presque aussi rapidement qu'on les enlèvera. Il est indispensable de recourir à l'emploi d'un bateau dragueur à vapeur, et de construire les percés dont je viens de parler.
Mais il ne suffit pas de rétablir la passe ordinaire du côté droit de la rivière. Il faut nécessairement éviter au halage cet immense inconvénient de passer d'une rive à l'autre. Et pour cela, il faut creuser un chenal du côté gauche de la Meuse, et, construire un chemin de halage depuis Bouvignes jusqu'à Dinant sur la riche gauche.
Le crédit demandé, par le gouvernement suffira-t-il pour ces. divers travaux ? J'ai des doutes très sérieux à cet égard.
J'engage donc M. le ministre, s'il n'a pas la certitude de pouvoir conduire ces divers travaux à bonne fin, au moyen de la somme portée au projet de budget, de proposer une augmentation.
Je l'y invite, d'une manière d'autant plus pressante, qu'en divers endroits il y a des réparations et des travaux de dragage urgents à exécuter. Et il serait extrêmement fâcheux qu'ils dussent être ajournés, fauté d'un crédit suffisant au budget.
M. Dautrebande. - Messieurs, à la séance d'avant-hier, l'honorable ministre des travaux publics a répondu avec une parfaite lucidité et beaucoup de talent à toutes les questions et demandes qui lui ont été faites par mes honorables collègues, sur les travaux urgents à faire exécuter dans l'intérêt du pays.
II m'a paru que les réponses et les promesses de l'honorable ministre ont satisfait les membres de cette Chambre sur presque toutes les demandes qu'ils lui ont faites. J'éprouve le regret de devoir dire qu'il ne peut en être ainsi, pour mes honorables collègues, qui tiennent à voir construire prochainement la canalisation de la Meuse.
L'honorable ministre, tout en faisant connaître combien il est partisan de ce travail important, n'a pas caché à la Chambre, qu'il ne demandera un crédit pour le faire construire, que lorsque la position du trésor le permettra ; cette déclaration jointe à celle que l'honorable ministre a faite à la séance d'hier, qu'il se proposait de présenter à la session prochaine un projet de loi, comprenant divers travaux, me donne à penser que celui dont je viens de parler n'y sera pas compris. Agir ainsi serait ajourner indéfiniment un travail très important dans l'intérêt du pays. Vous comprenez, messieurs, combien il est de mon devoir de demander à M. le ministre de vouloir comprendre dans le projet dont je viens de parler, une partie de la canalisation de la Meuse.
Je crois inutile, messieurs, de vous faire ici un nouvel exposé de cette urgence, ce serait abuser de la complaisance de la Chambre, et répéter les démonstrations qui ont eu lieu l'année derrière à ce sujet. Je me bornerai donc à vous dire que vous n’ignorez pas, messieurs, que les sommes considérables dépensées dans l'amélioration de la navigation de la Meuse, sont à peu près sans valeur tant qu'elle ne sera pas achevée (au moins de Chokier jusqu'à Namur).
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, les (page 1047) honorables membres qui prennent successivement la parole semblent ne pas se douter de la position dans laquelle se trouve le gouvernement quant aux crédits qu'ils sollicitent. Le complément des travaux de la canalisation de la Meuse doit coûter, si ma mémoire est fidèle, environ six millions. Si je venais demander ce crédit, en laissant de côté une foule d'autres travaux qu'il serait facile d'énumérer, par exemple le chemin de fer de Bruxelles à Louvain, que diraient les députés de Bruxelles, les députés de Louvain, les députés de toute la province de Brabant, les députés, en un mot, de tous les arrondissements intéressés aux travaux qui auraient été négligés ? Il est constaté, dès aujourd'hui, que pour achever la canalisation de la Dendre dans des conditions sérieuses, pour faire de la Dendre une voie de navigation convenable il faut dépenser 7 millions, c'est-à-dire qu'il y a une insuffisance de 5 millions sur les fonds votés.
Est-ce que les contrées que la Dendre traverse verraient avec plaisir qu'on n'affectât aucune somme à la continuation de la canalisation de la Dendre ? Est-ce que les populations qui attendent depuis si longtemps le chemin de fer de Beaume à Marchienne seraient fort satisfaites d'être négligées pour la Meuse ? «
Le gouvernement doit, je le répète, envisager la situation dans son ensemble. Si des fonds, je suppose, deviennent disponibles, il faut que le gouvernement les répartisse d'une manière équitable entre les divers points du pays où il y a des besoins sérieux à satisfaire.
Je demande qu'on laisse au gouvernement plus de liberté pour faire cet examen d'ensemble et pour juger s'il lui est permis, dans la situation actuelle du trésor, de proposer de nouveaux crédits à la Chambre.
Je déclare encore qu'il me serait beaucoup plus agréable de proposer de nouveaux crédits qu'à la Chambre de les voter. Un ministre recherche naturellement à grossir autant que possible le nombre des mesures fécondes qu'il a contribué à faire décréter.
Mais le gouvernement ne peut pas faire tout ce qu'il voudrait faire ; il faut être raisonnable ; il ne faut pas demander au gouvernement d'excéder les bornes de la prudence et de manquer aux règles de la justice distributive.
Répondant maintenant quelques mots à l'honorable M. Thibaut, je lui dirai que je n'ai pas de motifs de croire que la somme de 175,000 francs demandée pour travaux à faire entre Dinant et Bouvignes soit insuffisante ; la somme qui a été indiquée comme nécessaire par les ingénieurs, a été acceptée par moi sans réduction.
Les observations qui ont été présentées par l'honorable M. Thibaut seront mises sous les yeux des ingénieurs, Si ces observations sont de nature à faire modifier leurs propositions, la décision finale du département sera conforme au désir qu'a exprimé l'honorable membre. S'il y a désaccord, une instruction ultérieure établira qui a raison.
Si le crédit est insuffisant, on demandera un complément. Les travaux à faire consistent, ainsi que l'honorable M. Thibaut l'a rappelé, dans la construction d'un chemin de halage et dans l'établissement d'une passe.
M. H. Dumortier. - Messieurs, j'appuie les considérations que vient de faire valoir M. le ministre des travaux publics, en opposition avec ces demandes de dépenses extraordinaires à la Meuse qui ne finissent jamais.
Si vous croyez de votre devoir de demander sans cesse, il est de notre devoir de résister à ces exigences qui n'ont ni terme ni fin, et de ne pas blesser les règles de la justice distributive.
Du reste, je ne m'associe pas à ce système qui consiste à faire une comparaison entre les diverses localités, au point de vue des travaux publics ; cette considération me paraît mesquine. Nous devons travailler dans l'intérêt général.
Dans toutes les circonstances où l'on viendra nous demander des dépenses raisonnables et compatibles avec l'état du trésor, pour une voie navigable aussi importante que la Meuse, je ne serai pas le dernier à y donner mon adhésion ; mais je trouve que les représentants des localités que traverse la Meuse sont un peu exigeants dans leurs demandes ; déjà, si je ne me trompe, 40 millions ont été consacrés à la Meuse, tandis qu'on a voté, il y a 12 ou 15 ans, un misérable crédit, je dis misérable par comparaison, pour l'amélioration du régime de l'Escaut ; eh bien, on n'a pas encore dépensé, si je ne me trompe, 3,000 francs sur ce crédit ; et cependant l'importance de cette voie est aussi grande que celle de la Meuse...
M. Muller. - Les 40 millions sont dans votre imagination.
M. H. Dumortier. - Rabattez-en une dizaine de millions ; il en restera suffisamment.
M. Muller. - Vous n'en rabattez pas encore assez.
M. H. Dumortier. - Qu'importe quelques millions de plus ou de moins ! la somme réellement dépensée n'en est pas moins énorme, et je répète que M. le ministre des travaux publics a raison de ne pas se laisser entraîner par ces exigences qui ne font que croître à mesure qu'on les satisfait.
M. Muller. - Quand on attaque, il faut être exact.
M. H. Dumortier. - Puisque j'ai la parole, je désire ajouter une observation relative à un autre objet. Il s'agit de réclamations fort justes qui sont faites par des bateliers qui transportent de la houille en Hollande.
J'ai pris personnellement des renseignements qui m'ont confirmé dans l'opinion que ces réclamations sout fondées. Voici ce qui arrive :
Les bateaux qui transportent de la houille en Hollande, doivent, quand ils entrent sur le territoire hollandais, subir des visites, des expertises, et parfois assez souvent même un déchargement.
Vous comprenez combien cet usage, qu'on pourrait qualifier de barbare à l'époque où nous vivons, apporte d'entraves au commerce ; les bateaux prussiens lorsqu'ils entrent sur le territoire hollandais, ne sont soumis à aucune entrave de ce genre...
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Les bateaux belges n'ont pas à subir un autre régime que les bateaux prussiens ; c'est le même régime.
M. Muller. - Mais le régime est mauvais.
M. H. Dumortier. - Voici, je pense, la cause de la différence du régime : c'est que les bateaux prussiens sont jaugés.
M. H. Dumortier. - L'échelle prussienne n'est pas l'échelle métrique.
M. H. Dumortier. - Si le gouvernement voulait prendre l'initiative pour que les bateaux belges fussent jaugés comme les bateaux prussiens, je pense qu'il pourrait ainsi, en une seule fois, faire disparaître les entraves qui existent pour le commerce.
Si, au contraire, il faut s'en rapporter aux bateliers du soin de faire jauger leurs bateaux, cet état de choses pourra durer longtemps.
J'appelle sur ce point la sérieuse attention du gouvernement.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Les cas ont été très rares. Ce n'est pas un usage, mais l'exception.
M. H. Dumortier. - Ainsi, il y en a eu.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Rogier). - Oui, mais très rarement.
- L'article est adopté.
« Art. 13. Canal de Liège à Maestricht ; charge extraordinaire : fr. 7,300. »
- Adopté.
« Art. 14. Canal de Maestricht à Bois-le-Duc, charge extraordinaire : fr. 30,300. »
- Adopté.
« Art. 15. Canal de jonction de la Meuse à l'Escaut ; charge extraordinaire : fr. 31,400. »
- Adopté.
« Art. 16. Canal d'embranchement vers le camp de Beverloo ; charge extraordinaire : fr. 13,000. »
- Adopté.
« Art. 17. Canal d'embranchement vers Hasselt ; charge extraordinaire : fr. 40,500. »
- Adopté.
« Art. 18. Canal d'embranchement vers Turnhout ; charge extraordinaire : fr. 4,100. »
- Adopté.
« Art. 19. Sambre canalisée ; charge extraordinaire : fr. 41,000. »
- Adopté.
« Art. 20. Canal de Charleroi à Bruxelles ; charge extraordinaire : fr. 25,200. »
- Adopté.
« Art. 21. Escaut ; charge extraordinaire : fr. 29,200. »
M. de Mérode-Westerloo. - Messieurs, j'ai cherché en vain dans la section troisième du budget qui nous occupe, au paragraphe : Bassin de l'Escaut, l'article relatif aux frais d'entretien de la rivière la Grande-Nèthe ; elle seule n'y figure point. Est-ce un oubli ou bien ce crédit se (page 1048) trouve-t-il confondu avec un autre ? M. le ministre voudra bien m’éclairer là-dessus, car la décroissance du chiffre du crédit en question, au budget de 1861 ferait croire à sa suppression, que je ne pourrais m'expliquer.
Toutefois, un objet plus important m'engage à prendre aujourd'hui la parole.
Dans la séance du 13 décembre 1860, lors de la discussion de son dernier budget, M. le ministre des travaux publics me répondait :
« Je suis parfaitement d'accord avec l'honorable membre que la Nèthe a droit à une part de crédit, mais elle n'a droit qu'à cette part. Si maintenant le crédit mis à la disposition de mon département est absorbé par les travaux qui sont en cours d'exécution, il y aura à voir s'il convient de s'arrêter. Si, au contraire, ce crédit laisse un excédant, évidemment rien ne s'opposera à ce que les travaux soient poursuivis jusqu'à concurrence de la somme votée, ainsi que j'ai eu l'honneur de le déclarer hier à la Chambre. »
Ces paroles, messieurs, devaient avoir un fâcheux retentissement, qui en effet se produisit au sein du conseil provincial de la province d'Anvers, lors de sa dernière réunion, en juillet 1861. Des récriminations assez vives s'y firent jour et une adresse, votée à l'unanimité, fut envoyée à M. le ministre des travaux publics par l'intermédiaire de la députation permanente.
Dans cette adresse, le conseil provincial rappelle tous les précédents de cette ancienne question et insiste principalement, et avec raison, sur le contrat intervenu entre l'Etat et la province d'Anvers et traduit dans l'article premier de la loi du 8 mars 1858, dont j'ai cité les termes formels l'année dernière. Ce contrat est bilatéral.
Si la province, dont les offres sont acceptés par l'Etat, s'y engage à verser dans ses caisses pour un travail déterminé, clairement défini, une somme de 222,500 fr., le gouvernement, de son côté, déclarait se charger de l'exécution des travaux à entreprendre dans le but d'améliorer, au double point de vue de la navigation et de l'écoulement des eaux, le régime de la grande Nèthe.
Et remarquez-le, messieurs, cette contribution spéciale de la province, des communes et des propriétaires riverains aux travaux d'une rivière reprise par l'Etat est tout à fait exceptionnelle.
Nous ne trouvons plus d'exemple de semblable application de la loi du 10 septembre 1807 que dans celle qui a décrété l'exécution du canal de Zelzaete à la mer du Nord, le 20 juin 1842 et qui, jusqu'ici, est restée lettre morte, la Chambre ayant manifesté ses intentions à cet égard par le vote de la loi du 3 mars 1859, portant abrogation des dispositions législatives sur le concours des propriétés riveraines aux frais de construction du canal de jonction de la Meuse à l'Escaut avec ses embranchements.
Je puis donc soutenir, avec fondement, que les ressources exceptionnelles, appliquées aux travaux de la Nèthe, exigent de la part du gouvernement leur exécution d'autant plus prompte et plus complète que les sacrifices imposés par la loi sont plus lourds pour les habitants de la contrée que parcourt la rivière et pour la province tout entière, qui ne verserait son dernier cinquième, et avec raison, que lorsqu'elle aurait la garantie du parfait achèvement des travaux convenus.
Ici vient se placer, messieurs, un dernier motif, un motif d'équité. La Nèthe est pour un groupe de population assez nombreux, privé des bénéfices du chemin de fer concédé de Louvain à Herenthals, la seule voie de transport pour les matières pondéreuses.
Il y aurait donc véritable déni de justice de la part du gouvernement, s'il enlevait, par des travaux incomplets, cet instrument de commerce à une région qui le possède depuis des siècles et en retire, tout imparfait qu'il est, de très nombreux services pour la navigation.
M. Notelteirs. - J'ai écouté avec le plus vif intérêt le discours de l'honorable comte de Mérode, député de Turnhout. Ses réclamations au sujet des travaux à exécuter aux Nèthes pour l'entretien et pour l'amélioration de ces rivières méritent au plus haut degré l'attention de la Chambre et la sollicitude active du gouvernement.
L'amélioration de l'écoulement des eaux et celle de la navigabilité de Nèthes est pour la Campine, cette partie considérable et intéressante de la province d'Anvers, une question vitale.
Son sol peu fertile a besoin de beaucoup d'amendement et d'engrais. Le boisement ni la culture ne sauraient donner un produit rémunérateur, sans l'économie la plus stricte dans les frais de transport des engrais et des produits. Voilà pourquoi la navigabilité de la Nèthe est indispensable à ces contrées.
Un autre besoin, tout aussi pressant, plus pressant si c'est possible, c'est l'assainissement des prairies naturelles des bords de la rivière et de ses affluents. Ces prairies sont la base de la culture ; sans elles, pas de ferme prospère dans ce pays, parce que sans elles il ne peut avoir de bonne étable, ni sans bonne étable, un engrais suffisant.
Depuis trop longtemps l'on a négligé de satisfaire à ces besoins impérieux, parce que l'Etat soutenait que les Nèthes, quoique navigables et flottables, appartenaient à la province, et que la province d'Anvers soutenait de son côté qu'elles étaient la propriété de l'Etat. De ce litige est résulté pendant de longues années un état d'abandon qui a causé à ces rivages un dommage inappréciable.
A ce mal est venu se joindre un autre mal peut-être plus grand encore, celui résultant du défrichement des marais, de la canalisation et des irrigations. Ces travaux, si utile en soi, ont achevé de convertir en marais les prairies traversées par les Nèthes, parce que la rivière est plus en état d'évacuer les eaux doublées ou triplées en volume.
De là, messieurs, les inondations continuelles, même en été, la perte des récoltes et en même temps une grande insalubrité.
Cet état désastreux a pendant de longues années fait le tourment du conseil provincial d'Anvers, impuissant à y porter remède. Le gouvernement enfin a prêté l'oreille aux justes réclamations, en inscrivant au budget de 1854 le principe des travaux à exécuter, avec le concours de la province, des communes et des particuliers, comme vient de le rappeler l'honorable comte de Mérode.
En bonne justice, messieurs, la province, les communes, ni les particuliers n'auraient pas dû contribuer à ces frais ; il n'existe, en effet, aucun motif de traiter les Nèthes moins favorablement que les autres rivières.
Elle méritait au contraire toute faveur.- Et M. Cuylits, président du conseil provincial d'Anvers, a pu dire à bon droit : « Que si la reprise d'une rivière navigable devait être plus favorablement accueillie que peut-être aucune autre, c'est celle de la grande Nèthe, parce que les souffrances qu'elle fait subir sont en grande partie le résultat des travaux faits ou encouragés par le gouvernement dans l'intérêt général, les travaux des, irrigations et ceux de la canalisation de la petite Nèthe. »
Cependant, messieurs, tout en protestant contre la charge exceptionnelle imposée à la province d'Anvers, le conseil de cette province s'est empressé d'accepter la loi spéciale et de faire ses offres de concours.
Il fit ses offres contraint par la nécessité, comme le prisonnier offre sa rançon, parce qu'il était impossible de laisser plus longtemps ses administrés en souffrance.
Par une loi subséquente le concours provincial fut agréé et fixé à une somme déterminée, dont aujourd'hui les 4/5, je pense, sont déjà versés dans les caisses de l'Etat.
C'est donc à bon droit que la province d'Anvers et les intéressés réclament du gouvernement l'exécution prompte et complète des travaux d'entretien et d'amélioration des Nèthes, tant sous le rapport de l'écoulement des eaux que sous celui de la navigation.
Il n'est pas étonnant, messieurs, que les intéressés se soient émus de la réponse que l'honorable ministre des travaux publics a donnée à l'interpellation que j'ai faite lors de la discussion du budget de 1861. M. le ministre, en effet, a paru révoquer en doute les obligations de l'Etat relatives aux Nèthes.
Devant les lois votées et promulguées, devant la contribution spéciale offerte, acceptée et payée, le doute n'est pas possible, et le gouvernement ne saurait se soustraire aux obligations qui lui sont imposées par les principes de justice et par la loi écrite.
Je suis donc d'accord avec l'honorable député de Turnhout, lorsqu'il réclame l'exécution prompte des travaux d'entretien et d'amélioration.
Il va de soi, messieurs, que les travaux en aval de la grande Nèthe précèdent ceux d'en amont, mais je ne puis pas admettre qu'on laisse l'amont en souffrance. Si les crédits se trouvaient absorbés, il ne resterait au gouvernement qu'à en demander de nouveaux ; car, comme j'ai eu l'honneur de le dire, il n'est pas admissible de reculer indéfiniment des travaux reconnus indispensables et pour lesquels des contribution, spéciales sont déjà versées par la province, les communes et les particuliers intéressés.
- M. E. Vandenpeereboom remplace M. Vervoort au fauteuil de la présidence).
M. Coomans. - Messieurs, après les observations si fondées et si péremptoires qui vous ont été présentées par les honorables MM. de Mérode et Notelteirs, je n'ai que deux mots à ajouter ; mais je dois insister sur les inconvénients graves, sur les dommages énormes qui résultent des inondations presque annuelles des Nèthes.
Je vois avec surprise que la grande Nèthe ne figure pas au budget.
Cependant la grande Nèthe est une rivière appartenant à l'Etat. Elle a les mêmes droits que les autres à l'intervention financière du pouvoir central.
(page 1049) L'an dernier encore les dommages ont été énormes. Le rendement des prairies de la grande Nèthe n'a pas été de 50 p. c.
Ceci est particulièrement grave pour la Campine, où le foin est surtout indispensable aux progrès agricoles.
C'est en se plaçant à ce point de vue que la législature a fait des sacrifices depuis bien longtemps pour favoriser la production des herbages en Campine.
De là en grande partie le canal de la Campine et les lois et règlements sur les irrigations.
Mais, messieurs, remarquez-le, les débordements des Nèthes enlèvent chaque année plus de foin que n'en donnent les irrigations,
M. Notelteirs. - C'est vrai.
M. Coomans. - De manière, dis-je, que les irrigations qui nous coûtent cher, et qui d'ailleurs sont très intéressantes, rapportent peu de chose eu égard aux produits naturels des prés des Nèthes.
J'ajoute, circonstance heureuse, qu'il ne faudrait pas se livrer à une grosse dépense pour rendre navigable la grande Nèthc et pour prévenir les inondations. (Interruption.)
Je ne fixerai pas le chiffre, mais il m'a été assuré par des hommes très compétents que la somme à dépenser pour atteindre ce résultat ne donnerait pas moins de 20 à 25 p. c, sinon au trésor, du moins à tous les intéressés.
Je fais surtout allusion à haute Nèthe, en amont de Gheel.
J'ai eu l'occasion, avec d'autres représentants des localités intéressées, d'appeler, l'an dernier, l'attention de M. le ministre des travaux publics sur cet objet.
L'honorable ministre a reconnu, ce qui n'était du reste pas contestable, que les dommages étaient graves, qu'il était convenable de prévenir le retour dans la mesure du possible et que le gouvernement ne reculerait pas devant la dépense à faire.
J'entendrais avec plaisir l'honorable ministre donner l'assurance que ce grave intérêt, à la fois agricole, industriel et commercial, recevra satisfaction et qu'au plus tard dans son prochain budget (si les fonds dont il dispose sont épuisés), les vœux que nous émettons ici et qui ont été plus longuement développés par les honorables préopinants seront exaucés.
Il serait même à désirer que cette année-ci on pût faire quelques travaux qui prévinssent le retour des malheurs de l'an dernier et des années précédentes.
Un dernier mot : Quant aux travaux de canalisation et d'écoulement dont je parle, il y a eu forfait entre le gouvernement d'une part et la province d'Anvers, elles propriétaires d'autre part. En bonne logique et en bonne justice, il faut que le gouvernement achève complètement l'œuvre entreprise. Si, comme je le prévois, les fonds déjà votés sont insuffisants, nous devons créer d'autres ressources, afin que les rivières de la Campine ne soient pas plus mal traitées que toutes les autres.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, il paraît que les paroles que j'ai prononcées l'année dernière ont causé une certaine émotion parmi les intéressés. Je l'attribue à un malentendu entre les honorables membres qui viennent de prendre la parole dans cette séance et moi.
La situation, messieurs, est celle-ci. On a projeté des travaux de canalisation à la Grande-Nèthe. Ces travaux ont un double but : améliorer le régime de la Grande-Nèthe au point de vue des inondations et au point de vue de la navigation.
Les travaux nécessaires à cette double fin étaient évalués, d'après le denier complet, à 890,000 fr.
On a demandé et obtenu le concours de la province, de la commune et des particuliers aux travaux projetés, à concurrence, comme on vient de le rappeler, de 222,500 fr.
Restait donc à charge de l'Etat, la différence, soit 670,000 fr., chiffre rond.
Sur ces 890,000 fr., on a dépensé actuellement, en exécution du projet fait, environ 330,000 fr.
Ces 330,000 fr. ont été exclusivement employés à des travaux de dérivation aux approches de Lierre.
Reste donc à dépenser sur le crédit qui se trouve à la disposition du gouvernement, la différence entre 330,000 fr. et 890,000 fr., soit environ 550,000 fr.
Eh bien ces 550,000 tr., l'Etat est contractuellement obligé de les dépenser aux travaux complémentaires de l'amélioration de la Grande Nèthe, et si je me suis servi, l'année dernière, de paroles qui ont pu faire interpréter autrement ma pensée, c'est que j'ai cru que les honorables membres réclamaient des crédits dépassant celui qui se trouvait encore à la disposition du gouvernement. Mais dans les limites de ce crédit, le gouvernement est obligé.
Je crois que ces explications ne laisseront pas l'ombre d'un doute dans l'esprit des honorables membres et qu'ils s'en trouveront satisfaits
M. Coomans. - Je demanderai seulement à l'honorable ministre si, dans les travaux auxquels il fait allusion, se trouvent compris ceux qui doivent être effectués à la haute Nèthe, en amont de Gheel, sous Moll, etc., et dont les événements de l'an dernier ont démontré l'absolue nécessité.
L'honorable ministre me répond non ; ce non, je le prévoyais et c'est précisément là la raison principale de la part que j'ai prise à ce débat.
Je crois avec l'honorable ministre que la Nèthe en amont de Gheel n'est pas comprise dans ces travaux. Or, il est impossible d'abandonner celle partie de la rivière, rivière aujourd'hui très indisciplinée, très capricieuse et qu'on pourrait mettre à l'ordre avec une dépense modérée.
J'aime certainement les économies, mais je ne les recommanderai jamais quand je me trouverai devant de bons projets de voirie, de canalisations, de constructions utiles, servant à favoriser les intérêts vitaux du pays ou à prévenir des désastres. J'engage au contraire le gouvernement à dépenser beaucoup dans cet ordre d'idées, à ne plaindre aucun sacrifice ; il peut être certain que les Chambres et tous les contribuables sensés applaudiront alors à sa conduite.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - On porte au budget une somme globale pour l’amélioration de toutes les voies navigables : le gouvernement dispose de ce crédit au mieux des divers intérêts en vue desquels il a été voté. Si, par conséquent, il est impossible de comprendre dans les travaux ceux dont l’honorable membre vient de parler, le gouvernement sera heureux de le faire.
M. Notelteirs. - Messieurs, il a existé depuis de longues années un litige entre le gouvernement et la province sur la question de savoir qui est chargé de l'entretien des Nèthes. A mon avis, cette question a été tranchée par la loi budgétaire de 1854, en vertu de laquelle la Grande-Nèthe a été reprise au profit et à la charge de l'Etat. La province d'Anvers, en faisant des offres, a cru se décharger de l'entretien et de l'amélioration de la rivière. Le libellé du budget de 1858 ne laisse aucun doute à cet égard ; il porte :
« La dépense à résulter de l'exécution des travaux à entreprendre dans le but d'améliorer, au double point de vue de la navigation et de l'écoulement des eaux, le régime de la Grande-Nèthe, de l'Yser et du canal de Plasschendaele et de Nieuport par Furnes à la frontière de France, sera supportée par l'Etat, les provinces d'Anvers et de la Flandre occidentale et par les propriétaires intéressés.
« Sont acceptées les offres faites, tant en leur nom qu'au nom des communes et des propriétaires intéressés, par le conseil provincial d'Anvers et par la députation permanente du conseil provincial de la Flandre occidentale, spécialement autorisé par le conseil ; lesquelles offres s'élèvent pour la province d'Anvers à la somme de 222,500 fr., et pour la province de la Flandre occidentale à 216,666 fr. »
C'est un forfait an moyen duquel le gouvernement a repris l'administration et l'amélioration de la rivière. C'est ainsi, messieurs, que la province l'a compris, c'est ainsi que tout le monde l'a compris. Si donc le crédit qui a été voté n'est pas suffisant, c'est au gouvernement à proposer une augmentation.
Voilà, messieurs, la seule interprétation qui me paraisse juste et équitable, et à laquelle, j'en suis convaincu, le gouvernement ne saurait ni ne voudrait se soustraire.
M. de Theux. - Messieurs, l'inconvénient dont se plaint le batelage c'est qu'en passant du canal de la Campine dans les Nèthes, on ne peut passer qu'avec des marchandises pondéreuses et pour ainsi dire pas avec des marchandises encombrantes, ce qui serait cependant particulièrement utile à la Campine.
Il serait donc vivement à désirer que l'on pût remédier à cet état de choses ; ce serait faire chose extrêmement utile à la navigation dans la Campine.
M. Tack. - Mon honorable collègue M. H. Dumortier a dernièrement appelé, ainsi que je l'avais déjà fait, l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur l'infection des eaux de l'Espierre. Cette infection provient de l'écoulement des résidus des fabriques et des immondices des égouts de la ville de Roubaix. L'honorable M. Vandenpeereboom a répondu qu'il s'occupait de cette question et s'était mis en rapport avec le gouvernement français pour obtenir qu'un terme soit mis à ce grave inconvénient ; j'ai confiance dans la sollicitude de M. le ministre de l'intérieur pour les intérêts (page 1050) confiés à son administration, mais je doute beaucoup que l'assainissement complet de l'Espierre soit possible, au moins dans un bref délai. Quoi qu'il en soit, je crois devoir faire appel aussi à M. le ministre des travaux publics, car, quand bien même l'Espierre coulerait des eaux saines et limpides, cela ne préserverait pas ses riverains contre les inondations dont ils sont fréquemment victimes.
En effet, les débordements qui excitent leurs plaintes ont pour cause la construction sur l'Escaut du barrage d'Espierre. Par suite de ce travail, exécuté dans l'intérêt exclusif de la navigation, l'étiage des eaux du fleuve est plus élevé qu'autrefois. Il en résulte que l'Espierre qui se déverse dans l'Escaut en amont du barrage n'a plus son écoulement naturel et qu'à la moindre crue, ses eaux refluent vers leur source, dépassent leurs rives et se répandent en toute saison et à l'improviste dans les prairies qu'elles endommagent.
Or, il serait très facile de remédier à ce mal ; pour cela il suffirait de construire un contre-fossé ou maîtresse rigole qui permettrait de déverser l'Espierre dans l'Escaut en aval du barrage.
Cet ouvrage qui mettrait le niveau de l’Espierre en rapport avec celui de l'Escaut, n'entraînerait qu'à une dépense insignifiante ; il est facile de s'en convaincre, si l'on observe que l'Espierre se jette dans l'Escaut à proximité du barrage qui occasionne les dégâts que je signalais tantôt.
J'espère que l'honorable ministre voudra bien porter ses investigations sur ce point, et tenir compte de mes observations ; il ne voudra pas que des travaux faits dans l'intérêt de la navigation portent un préjudice notable à l'agriculture.
M. H. Dumortier. - Je disais tout à l'heure, messieurs, qu'il y a une quinzaine d'années qu'un crédit de deux millions, je pense, a été voté pour l'amélioration du régime de l'Escaut et que nous attendons que ce crédit reçoive sa destination.
Le gouvernement a toujours objecté (et je dois dire que cette objection était basée sur des motifs sérieux) qu'il était impossible de commencer des travaux avant que, par l'ouverture du canal de Schipdonck, on pût constater les effets de la dérivation des eaux.
J'espère que ce canal arrivera enfin à son complet achèvement ; que les promesses qu'on nous fait chaque année à cet égard ne resteront pas toujours stériles et que nous verrons enfin le terme des inondations ruineuses qui désolent périodiquement la vallée qui traverse l'Escaut.
Le gouvernement nous avait promis que, pour tout dernier délai le canal de Schipdonck pourrait être terminé avant la fin de l'exercice. Or, si mes renseignements sont exacts, il n'est guère plus avancé aujourd'hui qu'à cette époque.
Maintenant, messieurs, quand le moment sera venu de songer à l'application du crédit voté pour l'Escaut, j'espère que le gouvernement prendra en considération un objet que je vais avoir l'honneur de signaler.
Lorsque le gouvernement a fait construire le barrage d'Autrive sur l'Escaut, on ne s'est pas borné à établir ce barrage : on a, de plus, créé une coupure près de la commune d'Autrive ; et, chose inexplicable même pour les hommes qui se trouvent à la tête de l'administration des travaux publics, on a, en même temps, comblé le vieil Escaut à l'aval du barrage ; de manière que l'on a complètement ruiné le commerce qui se faisait dans la commune d'Autrive l'un des plus importants de tout ceux qui existaient le long de l'Escaut entre Tournai et Audenarde.
Le préjudice que cette commune a éprouvé est d'autant plus irréparable que la distance qui sépare la commune du barrage se trouve sous eau une grande partie de l'hiver.
D'un autre côté, messieurs, les eaux stagnantes dans l'ancien bras de l'Escaut amènent chaque année des cas nombreux de typhus qui déciment la population.
A force de sollicitations, le gouvernement a bien voulu nous gratifier d'une éclusette qui a été adaptée au barrage ; mais il a imposé à la commune l'obligation de prendre à sa charge les frais d'entretien de ce travail ; chose d'autant plus étonnante que, de l'autre côté du barrage se trouve aussi une éclusette pour parer aux dégâts auxquels sont exposées les propriétés particulières, et que, pour celle-là, il n'a jamais été question d'imposer aux propriétaires intéressés des frais d'entretien.
J'espère que le gouvernement voudra bien décharger la commune d'Autrive à cette obligation, non seulement parce que cette obligation me semble ne pas lui incomber, mais encore parce que l'entretien serait probablement mal fait si la commune en restait chargée.
Il y a deux routes qui longent l'Escaut à peu près parallèlement, de Tournai à Audenarde, et qui se rapprochent tellement à l'endroit du barrage qu'elles ne sont séparés sur ce point que de quelques centaines de mètres.
En établissant à cet endroit une route, on aurait une belle et excellente communication qui relierait les deux provinces du Hainaut et de la Flandre occidentale.
Je pense, messieurs, qu'il serait équitable d'exécuter ce travail en compensation des pertes que la commune d'Autrive a essuyées.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je ne prends la parole, messieurs, que pour informer la Chambre que l’on peut compter sur le prochain achèvement du canal de Schipdonck. Ce canal eût dû être achevé, il y a deux ans déjà ; mais, dans le cours de l’été de 1860, on a essayé à différentes reprises de relever ce batardeau, et chaque fois il a été enlevé ; cela donnera lieu à un grave procès entre l’entrepreneur et le gouvernement. Des dispositions sont prises pour que, s’il ne survient pas d’accident, le canal de dérivation soit livré à l’exploitation dans la campagne actuelle.
Quant aux travaux de canalisation à l'Escaut, on a cherché longtemps le meilleur système à adopter.
Une adjudication est ou sera bientôt annoncée de travaux importants à faire pour l'amélioration de l'Escaut supérieur, je veux parler de la construction d'une écluse à sas accolée au barrage d'Antoing.
Dans la pensée du corps des ponts et chaussées, la canalisation de l'Escaut de Tournai à Gand est chose éminemment désirable.
J'ai la satisfaction de pouvoir annoncer qu'avec les crédits que le gouvernement a en réserve, ce travail de canalisation pourra être exécuté ; peut-être y aura-t-il un crédit supplémentaire de 400 à 500 mille francs à demander, mais rien de plus.
- L'article est adopté.
« Art. 21. Escaut, dépense extraordinaire : fr. 29,200 fr. »
- Adopté.
« Art. 22. Canal de Mons à Condé ; charge extraordinaire : fr. 56,000. »
- Adopté.
« Art. 23. Canal de Pommerœul à Antoing ; charge extraordinaire : fr. 16,000. »
- Adopté.
« Art. 24. Lys ; charge extraordinaire : fr. 24,400. »
- Adopté.
« Art. 25. Canal de dérivation de la Lys, de Deynze vers la mer du Nord ; charge extraordinaire : fr. 1,600. »
- Adopté.
« Art. 26. Canal de Gand à Ostende ; charge extraordinaire : fr. 24,500. »
M. Kervyn de Volkaersbeke. - Messieurs, le gouvernement fait exécuter des travaux d'approfondissement au canal de Gand à Bruges. Je ne sais si c'est par suite de ces travaux ou par l'effet de la navigation à vapeur que certains éboulements ont lieu le long de ce canal.
Je prie M. le ministre de faire remédier à cet inconvénient.
Messieurs, j'avais demandé la parole pour faire l'observation que je viens de présenter, quand, jetant les yeux sur l'annexe qui accompagne le rapport de la section centrale, j'ai vu que le 6 novembre 1861 le conseil communal d'Hansbeke vous a adressé une pétition afin d'obtenir la construction d'un pont sur le canal de Gand à Bruges à l'endroit dit Hansbeke-Veir.
La construction de ce pont est réclamée par seize communes dont cinq chefs-lieux de canton tels que Deynze, Eecloo, Somergem, Nevele et Waerschoot. Le pont sur le canal de Gand à Bruges à l'endroit indiqué est devenu d'autant plus nécessaire, que ces communes sont gênées, dans le développement de leurs intérêts agricoles et industriels et commerciaux, par la solution de continuité qui existe eu cet endroit. L'année dernière le gouvernement a établi un pont sur le même canal à Vinderhaute à l'endroit dit : Bierstal. Certainement cette construction est des plus utiles, mais il ne s'ensuit pas que celle du pont d’Hansbeke n'ait le même degré d'utilité.
Pour vous en convaincre, messieurs, je me permettrai de vous rappeler l'opinion del lasection centrale du budget des travaux publics de 1861 sur cette construction.
Voici ce que disait l'honorable rapporteur.
« La section centrale estime que s'il y a utilité générale à contruire un pont sur le canal de Bruges à Gand, à l'endroit dit : Bierstal, il y a tout au moins autant d’utilité à en construire un autre à Hansbeke.
« Il lui semble qu'il serait difficile, sans s'exposer à être taxée d'inconséquence, d’admettre le premier, et de rejeter le second.
« Elle pense donc qu'il y a lieu de porter au budget un crédit pour la construction d’un pont à Hansbeke.
« Comme la demande de la commuin d'Hansbeke a une importance réelle, nous avons jugé utile de joindre an présent rapport la pétition précitée. »
(page 1051) Vous le voyez, l'opinion émise par la section centrale était favorable à la demande des pétitionnaires. J'émets le vœu,e t j'aime à croire qu'il sera exaucé, que M. le ministre étendra également sa sollicitude sur cet objet.
Puisque j'ai la parole j'en profiterai, messieurs, pour exprimer un autre vœu. La crise industrielle qui frappe la ville de Gand, laisse un grand nombre d'ouvriers sans ouvrage ; ce nombre est de plusieurs milliers. Je demanderai h M. le ministre, s'il ne jugerait pas convenable de donner suite au projet qu'il a conçu de joindre le canal de Terneuzen à celui de Gand à Bruges par une coupure.
Ce travail permettrait de donner de l'ouvrage à ces malheureux ouvriers et d'alléger ainsi la position affreuse qu'ils supportent avec tant de résignation, en attendant que, la crise industrielle cessant, il leur soit permis de reprendre leurs travaux.
Je soumets avec confiance cette question importante au gouvernement et je la recommande à la sollicitude toute particulière de M. le ministre des travaux publics.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je demande la parole pour répondre à la dernière observation de l'honorable préopinant. La coupure dont parle l'honorable membre est le complément de l'approfondissement du canal de Bruges à Gand ; elle doit réunir le canal de Terneuzen à celui de Bruges à Gand. Le gouvernement a obtenu par la loi de 1859 un crédit qui paraissait devoir suffire et à l'approfondissement du canal de Bruges et au canal de jonction.
Il résulte des études faites que ce travail soulève des difficultés et entraîne à de plus grandes dépenses qu'on ne pensait et par suite qu'il y a insuffisance de crédit.
Je ne dispose donc pas de fonds pour le creusement de ce canal.
J'en ferais toutefois la demande, si le but que se propose l'honorable membre pouvait être atteint ; c'est-à-dire si on parvenait à s'entendre en temps opportun sur le tracé du canal à creuser.
L'humanité a ses droits qui priment tout, et beaucoup de nos concitoyens gantois sont dans une trop triste position pour qu'on ne mette pas tout en œuvre pour les secourir. Ma crainte est qu'il ne s’écoule un temps trop long pour que l'exécution du travail dont il s'agit apporte un remède efficace aux misères qu'il faut soulager. Quoi qu'il en soit, et pour faire tout ce qui dépend de moi, je m'engage à faire faire dans le plus bref délai possible les études qui sont restées suspendues jusqu'ici et qui doivent être faites en tout état de cause, quelle que soit l'époque et les circonstances dans lesquelles on pourra les utiliser, et sans pouvoir accepter la responsabilité des causes de retard qui pourraient venir les entraver.
M. de Baets. - Je me joins à mon honorable collègue M. Kervyn pour appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur cette importante question.
Elle est à l'étude, mais si je ne me trompe, elle est à l'étude depuis cinq ou six ans. La seule difficulté qui puisse surgir à propos de cette question, c'est le point de savoir si le canal de jonction doit venir rejoindre le canal de Terneuzen en amont de l'écluse du Tolhuis ou en aval.
Cette question aurait pu et aurait dû recevoir depuis longtemps une solution, et il serait regrettable que, dans les circonstances actuelles, ce travail, qui offrirait de l'occupation à des milliers d'ouvriers, ne pût s'exécuter ; ce serait regrettable non seulement à raison de la triste position où se trouvent nos ouvriers, mais encore à raison de motifs tout particuliers : c'est qu'à l'heure qu'il est, l'administration communale exécute des travaux qui entraîneront pour elle des dépenses très considérable, et c'est que si l'Etat ne prend pas une prompte décision relativement au canal de jonction, il se pourrait que l'administration communale fût forcée de laisser incomplets les travaux qu'elle exécute, de modifier les plans et de faire plus tard des travaux supplémentaires.
Il serait réellement regrettable que l'on ne pût commencer, dans la campagne actuelle, un travail urgent à plusieurs titres.
Je crois que la question de fonds ne devrait pas être un obstacle. Je suis certain que, dans les circonstances actuelles, la Chambre n'hésiterait pas à voter les fonds pour un travail qui au surplus peut devenir d'une nécessité extrême pour la navigation et le commerce.
Car il s'agit de faire arriver au bassin et à l'entrepôt, les navires d'une certain tonnage qui sont obligés de prendre la voie d'Ostende et de Bruges à la suite des interruptions momentanées que la navigation subit sur le canal de Terneuzen.
Quant à l'autre question qu'a soulevée mon honorable collègue de Gand, et relativement à laquelle M. le ministre n'a pas répondu, je dois aussi insister.
Depuis la création du chemin de fer, Hansbeke est devenue une commune très importante. Elle possède un bureau de poste. C'est une station qui certainement rapporte beaucoup. Eh bien, le chemin de fer longe le canal de Bruges. Il n'y a qu'une très petite distance entre la station et le canal, quelques minutes seulement, et la route qui relie la station au canal doit être le prolongement de la route qui relie Eecloo, Somergem, Ursel, etc., au canal d'un côté, qui relie Thielt, Nevele, Lootenhulle, Poucques et Deynze au même canal d'un autre côté. Hansbeke forme donc le centre d'un réseau auquel vient converger toute une série de chemins, car toutes ces communes se sont imposé des sacrifices considérables pour la construction de bonnes voies de communication. Eh bien, ce réseau est complètement coupé en deux par le canal. On demande depuis longtemps la construction d'un pont et M. le ministre des travaux publics ferait chose utile en accordant à Hansbeke cet ouvrage d'une incontestable utilité.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Le pont dont il est question se trouvera compris parmi les travaux à proposer aux Chambres dans les allocations budgétaires, aussitôt que les ressources le permettront.
Le budget que nous discutons en ce moment comporte près d'un demi-million de plus que le budget de l'année dernière. J'ai dû demander des majorations d'allocation assez grandes pour le service du chemin de fer ; il était impossible de ne pas le faire. En présence du grand accroissement de mouvement qui heureusement se fait remarquer sur le chemin de fer, nous avons certains besoins correspondants qui demandent des augmentations de crédit. J'ai donc dû, avant tout, il y avait force majeure, pourvoir au service du chemin de fer. C'est principalement pour ce service que j'ai demandé des augmentations de crédit qui, je le répète, s'élèvent à près d'un demi-million.
En présence de ces majorations, et afin de ne pas soumettre à la Chambre un budget par trop élevé, comparativement à celui de l'année dernière, j'ai momentanément renoncé, pour la branche des ponts et chaussées, aux travaux qui rentrent dans la catégorie de ceux qui s'imputent sur les crédits budgétaires. Il ne s'agit pas de grands travaux qui s'exécutent au moyen de crédits extraordinaires, mais de travaux d'une moindre importance.
Le pont de Hansbeke se trouve parmi ces derniers. J'ai dû provisoirement rayer le crédit destiné à sa construction, ainsi que d'autres crédits, dont l'ensemble montait également à près d'un demi-million. Ce crédit sera demandé dans un prochain budget.
Quant au creusement du canal de jonction dont il s'agit, je dois répéter que les études ne sont pas complètes. L'honorable préopinant constate lui-même qu'il y avait encore un point de divergence sur lequel on n'est pas fixé. Mais malheureusement ces points de divergence entraînent souvent des retards très longs.
Quoi qu'il en soit, l'étude définitive n'étant pas achevée, je m'engage à y faire procéder activement.
- L'article 26 est adopté.
« Art. 27. Canal de Plasschendaele vers la frontière de France ; charge extraordinaire ; fr. 6,000. »
- Adopté.
« Art. 28. Canal de Gand à Terneuzen ; charge extraordinaire : fr. 600. »
- Adopté.
« Art. 29. Moervaert ; charge extraordinaire : fr. 100. »
M. Van de Woestyne. - Les riverains du Moervaert ont appris avec regret la suppression du chiffre de 80,000 fr. qui était demandé pour la construction d'une écluse à sas dans cette rivière.
Le département des travaux publics présume que le creusement du canal suffira pour remédier aux inconvénients qui ont été signalés Cependant des personnes très compétentes ne sont pas de cet avis, et ce qui le prouve, c'est la pétition qui vous a été adressée aujourd'hui par les habitants de Moerkerke ; ils pensent que le système qui va être adopté par le gouvernement sera complètement inefficace.
Dans cette incertitude, je me permettrai de demander à M. l'honorable ministre des travaux publics si la construction de cette écluse est définitivement abandonnée ou bien si, dans le cas où le creusement ne répondrait pas au but que l'on se propose d'atteindre, le département des travaux publics prendrait l'engagement de soumettre aux délibérations de la Chambre une nouvelle demande de crédit destiné à la construction de l'écluse à sas sur le Moervaert.
Puisque j'ai la parole, j'appellerai la bienveillance de M. le ministre des travaux publies sur la demande des habitants de Saffelaere relativement à des travaux à exécuter dans la Zuydlede et le Saffelaere-Naerdeken.
Ces travaux ont une corrélation intime avec le régime du Moervaert. J'espère que M. le ministre des travaux publics trouvera juste de donner satisfaction aux habitants de cette commune.
page 1052) M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - L'année dernière, j'ai demandé un premier crédit de 100,000 fr. pour la construction d'une écluse sur le Moervaert et l'amélioration de cette rivière. Il était annoncé, l'année dernière, que ce crédit de 100,000 fr. n'était qu'un premier crédit, qu'il serait demandé au budget subséquent, c'est-à-dire à celui que nous discutons, un crédit complémentaire.
Ce crédit figurait, en effet, au projet de budget. Il ne figure plus au budget définitif. Il a été rayé et voici pourquoi.
Les travaux d'amélioration au Moervaert, tels qu'on les avait projetés à l'origine, devaient s'effectuer au moyen de l'élévation du niveau des eaux. L'élévation du niveau des eaux demandait la construction assez coûteuse de l'écluse dont il s'agit. Lorsque j'ai soumis le projet à une sorte d'enquête, la crainte a été exprimée que l'élévation des eaux ne fût de nature à porter un grave préjudice à certaines propriétés riveraines.
Dans cette situation et comme le gouvernement n'est pas autorisé à porter préjudice aux uns pour avantager les autres, on a eu recours à un moyen différent, c'est de substituer à la surélévation des eaux le creusement.
La dépense qui, suivant le projet primitif, devait monter à 200,000 fr. environ, se trouve réduite à 10,000 fr. Les travaux de creusement adjugés pour cette somme sont en cours d'exécution. Si le travail, quand il sera achevé, satisfait aux besoins pour lesquels la dépense a été décrétée, le gouvernement aura pris une bonne mesure.
Dans le cas contraire, et s'il est reconnu qu'on peut exécuter le projet de l'année dernière sans porter atteinte aux propriétés riveraines qui jouissent de l'état de choses actuel depuis un temps immémorial, ce projet sera repris dans des conditions d'autant meilleures, que le travail qui se fait actuellement est utile en tout état de cause.
En attendant, le gouvernement a préféré la dépense la plus faible à la dépense la plus forte, l'avenir restant complètement réservé.
M. de Baets. - J'espère que M. le ministre portera en même temps son attention sur le canal de Zuidleede, qui traverse, parallèlement au Moervaert, le bassin qui s'étend entre Exaerde et Mendonck.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - C 'est un petit travail ; il s'agit de quelques milliers de francs. Le gouvernement ne perdra pas cet objet de vue.
M. Van de Woestyne. - Je me déclare parfaitement satisfait de la réponse de M. le ministre. J'espère, comme lui, que le travail de 46,000 francs suffira, mais je n'en ai pas la certitude, et mes doutes sont partagés par beaucoup de personnes compétentes. Au besoin nous rappellerons à M. le ministre la promesse qu'il vient de faire.
- Le crédit est adopté.
« Art. 30. Dendre ; charge extraordinaire : fr. 50,000. »
M. de Naeyer. -
Messieurs, quoique j'aie déjà parlé bien des fois de la Dendre, je suis encore obligé d'en dire quelques mots. Je croirais manquer à mon devoir si je ne présentais pas certaines observations sur les explications données l'autre jour par l'honorable ministre des travaux publics.
Je commencerai par remercier M. le ministre d'avoir soumis cette question très importante à des études sérieuses, approfondies et complètes. Ainsi que j'ai eu l'honneur de le dire à différentes reprises, c'était le seul moyen d'arriver à un résultat raisonné qui fût de nature à donner satisfaction à tous les intérêts légitimes.
Ces études qui ont été longues, difficiles et très compliquées, sont arrivées à leur terme, et je dois dire que j'ai été à même de constater que les hommes de l'art, chargés de cet important travail dans notre province, ont fait preuve d'un zèle aussi intelligent qu'infatigable ; pendant plusieurs mois, ils ont pour ainsi dire travaillé jour et nuit, et je me fais un devoir de déclarer que, sous ce rapport, les riverains de la Dendre leur doivent une grande reconnaissance.
Quant au projet qui est le résultat de ces études, l'administration a bien voulu m'en donner connaissance, et je lui dois des remerciements pour cette bienveillante communication ; il ne m'a pas été possible d'apprécier le projet dans tous ses détails, le temps m'a manqué, mais je crois en savoir assez pour dire qu'en général il me paraît reposer sur des bases justes et équitables ; mais ce qui m'inquiète, ce sont les modifications qu'on voudrait apporter à ce projet et dont l'honorable ministre nous a dit un mot l'autre jour.
J'ai dit que le projet en général, et sauf certaines réserves de détail, m'a paru admissible. Ainsi on a adopté localement le principe des maîtresses-rigoles et j'aime à croire qu'on en a fait une application raisonnable, or, ce point est très important, car le nivellement de la vallée de la Dendre est venu constater officiellement que beaucoup de nos prairies se trouvent à plus d'un mètre et quelquefois à plus de deux mètres au-dessous des bords de la rivière et vous comprenez, messieurs, qu'il y aurait eu injustice criante si, sans compensation, on avait enlevé à ces riches propriétés les moyens de sudation dont elles jouissent aujourd'hui. Si on applique sagement le principe des maîtresses-rigoles, il y aura compensation ; la situation ne sera pas empirée, elle sera même, je l'espère, améliorée conformément aux promesses formelles qui nous ont été faites et qui forment une condition essentielle de l'allocation des fonds pour l'amélioration des eaux de la Dendre.
J'ai encore pu me convaincre que les auteurs du projet ont tenu compte, au moins dans certaines limites, de la question tout à fait vitale des irrigations.
Ces irrigations, messieurs, forment un des éléments les plus essentiels de la valeur de nos prairies. Cependant, je dois soumettre, à cet égard, une observation à l'honorable ministre. Si j'ai bien compris les explications qui m'ont été données par un fonctionnaire supérieur des ponts et chaussées, il s'agirait de modifier le projet de façon qu'on rendrait l'irrigation possible par le débordement des eaux au-dessus du chemin de halage.
Eh bien, je le dis franchement, cette idée-là n'est pas heureuse. Il en résulterait des inconvénients très graves. II y aurait des conflits pour ainsi dire continuels entre le batelage et le commerce d'une part et les propriétaires riverains de l’autre.
Pour concilier tous les intérêts dans une juste mesure, il est indispensable de faire ici ce qu'on a fait pour la Dendre inférieure, c'est à-dire pour la Dendre canalisée entre Alost et Termonde.
Le halage a été rendu insubmersible... et on a ménagé des prises d'eau qui permettent d'irriguer les prairies sans déranger en rien la navigation.
L'irrigation alors- st possible non seulement par les fortes crues, mais chaque fois que le volume d'eau qui se trouve dans la rivière excède les besoins de la navigation.
Je crois qu'il faut procéder de la même manière pour la haute Dendre, pour la Dendre qu'il s'agit de canaliser.
Ici également on doit s'attacher à mettre le chemin de halage à l'abri des inondations et de toute submersion, et faire en sorte que les irrigations puissent avoir lieu sans apporter aucun trouble à la navigation. Pourvu que les propriétaires consentent alors à s'associer et à s'imposer quelques sacrifices communs, on peut arriver sans grandes difficultés à un système d'irrigation artificielle qui fonctionnerait avec une parfaite régularité.
J'ajouterai à cet égard, que déjà en 1858, le gouvernement a promis que, pour la canalisation de la Dendre supérieure, on suivrait absolument le système adopté pour la Dendre inférieure. Je crois qu'il suffira de rappeler cette promesse à l'honorable ministre pour le déterminer à adopter les observations que je viens de présenter et à renoncer absolument à l'idée de faire passer les eaux d'irrigation au-dessus du chemin de halage.
Messieurs, l'honorable ministre nous a dit que suivant une première étude le coût de la canalisation a été évalué à 8 millions, mais qu'on a déjà pu faire une première réduction d'un million. Cette réduction, si je suis bien informé, résulte principalement de ce qu'on a élagué du projet des ouvrages qui ne s'y rattachaient que d'une manière indirecte. Je crois que c'est là une très bonne économie, une économie que tout le monde doit approuver.
L'ouvrage est assez important pour qu'on n'aille pas le grossir outre mesure en y ajoutant des dépenses qui ne s'y rattachent que d'une manière indirecte.
Il reste donc une dépense de 7 millions.
M. le ministre des travaux publics a fait observer que cette dépense de 7 millions dépasse de beaucoup le crédit de 2 millions et demi alloué par la loi de septembre 1859. Cela est vrai, mais cela ne doit étonner ni la Chambre ni le gouvernement ; je vous demande pardon de l'expression, mais je dis franchement qu'un homme de bon sens n'a pu croire qu'avec 2 millions et demi on parviendrait à canaliser la Dendre dans de bonnes conditions. Aussi, dès le mois de mars 1858, c'est-à-dire plus d'un an et demi avant le vote du crédit, ai-je dit et répété à satiété dans cette Chambre, que 2 millions et demi ne formeraient pas même la moitié et formeraient tout au plus le tiers de la dépense totale. Tout le monde a donc pu voter en pleine connaissance de cause, personne n'a été induit en erreur.
Maintenant, la dépense de 7 millions est-elle exagérée eu égard à l'importance du projet ? Est-elle exagérée, eu égard aux résultats très considérables qu'il s'agit de réaliser ? Personne ne le soutiendra ; et je suis convaincu que M. le ministre des travaux publics ne considère en aucune façon cette dépense comme exagérée, quand on la met en regard des grands intérêts qui sont en cause.
(page 1053) Il s'agit d'un projet qui intéresse directement et au plus haut degré l'arrondissement de Mons, l'arrondissement d'Ath, l'arrondissement de Soignies, une partie importante de l'arrondissement de Bruxelles, tout l'arrondissement d'Alost, celui de Termonde, le pays de Waes ; il est évident que tout cela est une partie considérable du pays, cette partie du pays est le siège de grandes et nombreuses industries, et renferme une population de plus d'un demi-million d'habitants.
Ainsi, vous voyez que quand vous mettez le projet eu regard des résultats, il n'y a rien d'exagéré à dépenser 7 millions.
Je ne veux pas faire ici la comparaison avec d'autres dépenses ; j'examine la chose en elle-même, et je dis que personne n'est autorisé à dire que la dépense de 7 millions est exagérée.
Pour l'arrondissement de Mons surtout l'utilité du projet est immense ; une ligne de navigation reliant directement le bassin de la Haine au bas Escaut, présente pour les charbonnages du couchant de Mons la même importance que le canal de Charleroi présente pour le bassin de Charleroi et le bassin du centre ; en effet dans l'un et l'autre cas, il s'agit d'une voie de communication directe avec le marché de l'intérieur du pays ; il y a là, je le répète, un intérêt de la plus grande importance.
Quel est aujourd'hui l'état des choses ? La production houillère du bassin de Mons est de 3 millions de tonnes par an.
Eh bien, au moins les 3/5 de cette production doivent être exportés aujourd'hui en France. C'est là une position exceptionnelle, car pour le pays en général, l'exportation de l'industrie charbonnière ne forme que le tiers de la production ; eh bien, je dis qu'il serait d'une très bonne politique de faire en sorte que le bassin du couchant de Mons soit moins dépendant du marché français.
Or, tel est le but et tel sera incontestablement le résultat de la canalisation de la Dendre qui sera nécessairement complétée, et cela sans aucun nouveau sacrifice, par le canal de jonction d'Ath vers le bassin de la Haine.
Je me permettrai de citer à cet égard un seul chiffre.
Aujourd'hui les charbons du couchant de Mons, pour arriver à Termonde par le bas Escaut, ont à supporter un fret qui s'élève ordinairement à 4 fr. 50 c ; par le chemin de fer, quoiqu'il y ait un tarif tout à fait privilégié, le fret est encore de près de 6 fr.
Eh bien, savez-vous quel résultat on obtiendra par la canalisation de la Dendre, y compris le canal de jonction ? Le fret ne sera plus que de 2-75 ; donc une économie de près de 2 fr.
Or, dans cette lutte si ardente qui règne aujourd'hui dans l'industrie charbonnière, c'est là un résultat très considérable.
Dès lors, on n'est pas fondé à parler d'une dépense exagérée, quand on tient compte des intérêts qu'il s'agit de desservir ;
Cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas faire toutes les économies possibles.
Evidemment il faut faire toutes les économies compatibles avec l'économie du projet. Mais en fait de travaux hydrauliques, il y a des économies qui sont détestables ; il y a des économies qui coûtent horriblement cher et qui consacrent, en outre, une criante injustice : ce sont celles qui se traduisent en désastres pour les propriétés et les populations riveraines.
Eh bien, je n'hésite pas à ranger dans cette catégorie l'économie dont nous a parlé l'autre jour M. le ministre des travaux publics, et qui consisterait à réduire la section de la rivière ; oui, ce serait là une économie féconde en désastres pour le territoire d'aval.
Messieurs, je me suis beaucoup occupé de ce côté de la question, je puis le dire avec vérité ; or, je suis profondément convaincu que la section de la rivière, proposée dans le projet, est loin d'être exagérée. Je pense au contraire qu'elle est au-dessous des besoins, et surtout des besoins qui seront créés par suite du remaniement qu'on fera subir à la Dendre.
D'après moi, cette section sera insuffisante pour préserver le territoire d'aval du fléau périodique des inondations, même dans les crues ordinaires.
Je pourrais entrer dans de très nombreux détails et prouver mon opinion à la dernière évidence. Je me bornerai à présenter des considérations.
Ainsi, par exemple, je remarque que pour déterminer cette section, on n'a pour ainsi dire tenu aucun compte de l'accélération qui sera nécessairement imprimée à la marche des eaux vers l'aval, par suite des nombreuses coupures et rectifications qui doivent être opérées et qui sont indiquées dans le projet.
Ces rectifications et ces coupures qui sont indispensables exclusivement dans l'intérêt de la navigation, ont une importance extrêmement grande.
Aujourd'hui, le cours de la rivière, depuis le Hainaut jusqu'à Alost, a un développement de plus de 8 lieues ; eh bien, par les rectifications qui doivent être opérées, le parcours ne sera plus que de 7 lieues. Voilà donc un raccourcissement d'une lieue sur 8 : ce qui fait plus de 13 p. c. Il est évident qu'en remaniant aussi considérablement cette rivière, on va accélérer considérablement la marche des eaux vers l'aval.
Cela est clair comme le jour, parce que d'abord le trajet sera plus court, et en outre la pente sera devenue plus forte, puisqu'elle sera augmentée dans la proportion du raccourcissement qui sera opéré, c'est-à-dire, dans la proportion de 13 p. c.
Cependant, voilà une considération qui a été en quelque sorte négligée pour calculer la section qui est proposée.
Voici une autre considération dont on ne paraît avoir tenu aucun compte :
Non seulement le volume des eaux qui doivent s'écouler en aval est nécessairement plus considérable ; mais là l'écoulement est encore moins actif, parce que la pente naturelle est moindre. Cela se remarque sur toutes les rivières en général, et cela est aussi très sensible pour la Dendre.
A ces considérations j'en pourrais ajouter d'autres.
Eh bien la section proposée dans le projet a été déterminée en faisant abstraction de ces considérations ; on l'a calculée d'après la situation actuelle, d'après un volume d'eaux dont le débit a déjà été constaté dans une crue en quelque sorte ordinaire. On a supposé que les eaux tombées dans un moment donné continueraient comme aujourd'hui à mettre trois jours pour s'écouler, et alors qu'on est resté ainsi incontestablement au-dessous des nouveaux besoins, on voudrait encore réduire la section proposée. Cela me paraît peu sérieux. Aussi, M. le ministre des travaux publics n'a fait qu'émettre cette idée comme étant à l'étude ; il ne l'a pas adoptée.
Eh bien, je le conjure de la repousser absolument, je le conjure de ne pas attacher son nom à une œuvre qui serait un bienfait, si vous voulez, pour le Hainaut, mais qui serait un désastre, une calamité pour les Flandres et que nous devrions maudire alors même que d'autres la béniraient.
Messieurs, cette question de la section de la rivière est ici pour le territoire d'aval d'une importance extrême. C'est toute la question des inondations, et pour vous prouver combien on s'en préoccupe vivement dans la vallée de la Dendre, je citerai un seul fait qui s'est présenté dans le courant de l'été dernier.
Si je ne me trompe, au mois de juillet ou d'août, on avait répandu le bruit que le comité des ponts et chaussées venait de décider qu'on adopterait pour la canalisation de la Dendre une largeur uniforme de 10 mètres au plafond.
Eh bien, cette nouvelle excita instantanément les plus vives alarmes.
Immédiatement on convoqua une réunion afin d'aviser aux moyens de parer aux dangers dont on se croyait menacé.
Je me suis fait un devoir de me rendre à cette réunion et je n'ai pas hésité un seul instant à déclarer que ce bruit était complètement faux.
Je le disais en quelque sorte à priori et sans informations officielles, parce que, pour moi, il était impossible que jamais le comité des ponts et chaussées eût pris une pareille décision.
En effet, le simple bon sens nous dit qu'il y a une différence énorme entre un canal et une rivière canalisée.
Les conditions sont complètement différentes. Evidemment, la rivière canalisée doit remplir deux fonctions : celle de canal et celle de rivière. Il faut qu'elle serve à la navigation sans rien perdre de sa destination principale, de sa destination naturelle qui est de faire écouler les eaux de la vallée.
Cela est évident, cela est clair comme le jour.
Ce qui n'est pas moins évident, ce qui n'est pas moins clair, c'est qu'au fur et à mesure que l'on descend une rivière, le bassin hydrographique prend nécessairement plus d'étendue.
Par conséquent, il faut que la rivière canalisée soit mise à même de faire écouler un volume d'eau plus considérable.
Il y a donc nécessité d'agrandir progressivement les sections de la rivière au fur et à mesure que l'on descend vers l'aval.
Voilà pour quelle raison je disais à priori qu'il était impossible que le comité des ponts et chaussées eût adopté une largeur uniforme.
Aussi je me hâte d'ajouter que j'ai pu constater dans le projet qu'on avait tenu compte de ces notions si simples et si élémentaires.
Les explications que j'ai données alors furent suffisantes pour faire cesser les alarmes, et j'ai pu m'assurer par des informations officielles, par examen du projet que j'avais dit vrai.
(page 1054) Ainsi, l'auteur du projet a eu soin à partir de Ninove, d'augmenter progressivement la largeur de la rivière jusqu'à Alost. Messieurs, il y a sous ce rapport une énorme différence entre les deux provinces traversées par la Dendre, entre le Hainaut et la Dendre.
Dans le Hainaut on ne doit s'occuper que des intérêts de la navigation, pourquoi ? Mais parce que dans cette province la largeur et la profondeur indispensables pour la navigation sont plus que suffisantes pour l'écoulement des eaux ; mais il n'en est pas de même dans notre province qui forme le territoire d'aval. Ici il faut des travaux spéciaux pour l'écoulement des eaux, et voilà comment les auteurs du projet ont reconnu la nécessité d'augmenter la largeur de la rivière à partir de Ninove en la divisant en plusieurs sections, dont chacune présente une largeur d'un demi-mètre de plus que celle qui précède immédiatement.
Il paraît qu'on obtient ainsi un résultat à peu près équivalent à celui qui consisterait à élargir progressivement et de manière à avoir à l'écluse de Denderleeuw une largeur de 41 mètres, et à celle d'Alost une largeur de 12 1/2 mètres.
Je ne pense pas que, sous ce rapport, on veuille déranger l'économie du projet. Cependant je ne sais pas au juste quelles modifications M. le ministre a eues en vue en disant qu'on examine si la section proposée pourrait être réduite.
Mais je ne pense pas que ce soit en diminuant la largeur. Ce serait en diminuant la profondeur, si mes informations sont exactes. Comme chacun sait, la section d'un canal ou rivière n'est autre chose que la largeur multipliée par la profondeur ; il s'agirait donc de diminuer l'un de ces deux facteurs, savoir : la profondeur ; mais en définitive le résultat serait toujours de diminuer le débit de la rivière à tel et tel point donné, sous ce rapport la position du territoire d'aval serait déplorable, et je devrais regretter d'avoir tranquillisé les esprits. Cette diminution de l'approfondissement projeté de la Dendre aurait, d'ailleurs, des inconvénients tout particuliers, et à cet égard je citerai l'opinion d'un homme qui était bien compétent en cette matière et qui s'est occupé beaucoup de la Dendre. C'est l'opinion de l'honorable M. Wolters, ancien ingénieur en chef de notre province.
Cet homme de l'art considérait comme déplorable et désastreux tout travail de canalisation à la Dendre, qui n'adopterait pas pour le plafond une pente parallèle à celle de la vallée. Dans un mémoire remarquable, il a signalé cette faute dans les travaux qui ont été exécutés anciennement dans le lit de la Dendre, et il a prouvé que c'est à cette faute qu'on doit attribuer les principaux défauts du régime actuel de la rivière. Or, si on s'obstinait à vouloir réaliser des économies en diminuant la profondeur de la rivière en amont des écluses, on renouvellerait l'anomalie signalée par M. Wolters et qui a contribué surtout à gâter la Dendre, car encore une fois la pente du fond de la rivière ne serait pas parallèle à celle de la vallée. Je crois donc qu'il est impossible de donner suite à cette idée. L'économie qui en résulterait ne saurait d'ailleurs être considérable. Supposons un demi-million. Voudriez-vous, pour un demi-million, gâter un ouvrage de cette importance, et le rendre désastreux pour une partie considérable des propriétés riveraines ?
Voudriez-vous même pour économiser une pareille somme vous exposer à gâter l'ouvrage ?
Cette seule crainte devrait vous faire reculer, car il y a ici pour le gouvernement une immense responsabilité.
Cet objet, messieurs, est si important que je regretterais les démarches que j'ai faites depuis 10 ans pour obtenir la canalisation de la Dendre, si ce projet devait être exécuté de cette manière ; aussi, j'espère qu'il n'en sera rien.
Messieurs, je ne combats pas le projet tel qu'il a été élaboré.
J'avoue qu'il ne me rassure pas complètement et que je ne voudrais pas en assumer la responsabilité, mais enfin je comprends qu'en cette matière surtout on est obligé de mettre de l'eau dans son vin ; ce que je combats, ce sont les modifications qu'on voudrait y apporter en adoptant une section inférieure à celle qui a été proposée.
Je me permettrai maintenant, messieurs, d'ajouter quelques remarques sur le canal de jonction qui doit compléter la Dendre canalisée.
Si j'ai bien compris les explications de M. le ministre, son intention serait, lorsque la somme nécessaire à la canalisation de la Dendre sera définitivement déterminée, d'offrir cette somme comme subside aux demandeurs en concession du canal de jonction d'Ath vers la Haine, qui seraient alors chargés d'exécuter en même temps les travaux de canalisation.
Il me semble qu'il vaudrait mieux que le gouvernement fît la canalisation lui-même et donnât la Dendre canalisée comme subside.
Veuillez remarquer que le résultat financier est toujours le même. Il s'agit toujours d'un sacrifice de 7 millions ; mais voici les avantages.
J'y vois plus de garanties pour la bonne exécution des travaux et, dans tous les cas, plus de facilité pour les changements qui seront probablement reconnus nécessaires dans le cours d'une entreprise de cette importance. Cela est évident.
Ensuite, il y a ceci. C'est que, si vous dégagez la concession des travaux de canalisation, vous rendez pour ainsi dire l'entreprise plus accessible, parce qu'elle est moins forte, moins considérable, moins lourde ; il y a espoir d'obtenir plus de concurrence et vous avez certainement plus de chances d'une prompte réalisation.
En outre, je crois que si le gouvernement faisait les travaux de canalisation et que la concession fût chargée du canal, les deux entreprises pourraient en quelque sorte s'exécuter simultanément, ce qui devient presque impossible lorsque les deux choses seraient concentrées entre les mêmes mains.
Maintenant, en parlant l'autre jour du canal de jonction, on n'a fait mention que d'un seul projet.
C'est celui d'Ath à Blaton. En bien, je ferai remarquer qu'il en existe un autre qui me paraît évidemment supérieur : c'est le canal d'Ath à Jemmapes. Et voici pourquoi il est supérieur.
M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - C'est entendu.
M. de Haerne. - C'est que ce canal aboutit directement aux lieux de production et d'embarquement, et cela avec un parcours de 20 kilomètres seulement ; or, il n'en est pas de même du canal de Blaton.
Avant d'arriver des lieux de production à Blaton, les bateaux auront à parcourir une grande partie du canal de Mons à Condé et de Pommeroeul à Antoing.
Ainsi, jusqu'à Ath il y aura un parcours de 40 kilomètres ; soit une différence d'environ 13 kilomètres en faveur du canal de Jemmapes, ce qui, si je ne me trompe, se traduit en une économie de fret d'environ 60 c. par tonneau.
Voilà une première cause de supériorité incontestable.
Ensuite, il est à remarquer qu'aujourd'hui déjà le canal de Pommerœul est souvent encombré ; si donc vous ajoutiez encore à sa navigation actuelle une navigation nouvelle qui nécessairement prendra un grand développement, vous aggraveriez considérablement cet état d'encombrement.
Le canal de Jemmapes, au contraire, est complètement isolé de toutes les autres voies navigables actuelles.
Je me permets de soumettre ces observations à M. le ministre des travaux publics, afin qu'il veuille bien en tenir compte lorsqu'il aura à examiner des demandes de concession qui pourront lui être soumises.
Je termine, messieurs, en demandant de nouveau avec les plus vives instances, et en conjurant M. le ministre de ne pas s'exposer, pour une économie qui ne saurait guère être importante (et le fût-elle, cela ne serait jamais qu'une considération secondaire), de ne pas s'exposer, dis-je, à gâter un ouvrage qui doit être une grande chose, et qui certes n'a pas besoin de faire des victimes.
M. de Muelenaere. - Comme M. le ministre de la justice est à son banc, je me permettrai de lui faire une observation que je crois avoir un certain caractère d'urgence. Je viens de lire dans un journal qu'un incendie qui a éclaté le 25 de ce mois à Oultre, commune de la Flandre orientale, arrondissement d'Alost, a détruit toutes les archives et (ce qui est plus grave encore peut-être) tous les registres de l'état civil. Quant aux registres de l'état civil des années 1861 et antérieures, les doubles devant en être déposés au greffe du tribunal, on pourra facilement les remplacer, en procédant comme l'a fait le gouvernement des Pays-Bas, dans une circonstance analogue ; mais la question est peut-être plus délicate pour les actes de l'année courante.
C'est là une question très grave et sur laquelle je me permets d'appeler l'attention de M. le ministre de la justice. Je crois qu'il serait important que l'attention de l'autorité judiciaire fût immédiatement appelée sur ce point pour éviter plus tard aux habitants de la commune des frais frustratoires et de grands embarras peut-être pour reconstituer leur état civil.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Jusqu'à présent le fait dont l'honorable comte de Muelenaere vient d'entretenir la Chambre ne m'a pas été signalé officiellement, et je dois dire que je n'en avais point lu la relation dans les journaux. Dans tous les cas, l'honorable membre peut être bien persuadé que dès demain je verrai les mesures qu'il y a à prendre pour qu'aucune perturbation n'existe dans l'état civil des personnes intéressées.
- La séance est levée à 5 heures.