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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 24 avril 1861

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)

(page 1197) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Snoy procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart et donne lecture du- procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Boe présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Des habitants de l'arrondissement de Charleroi prient la Chambre d'accorder à la compagnie Bouwens la concession d'un chemin de fer de Malines à Terneuzen. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à l'exécution des travaux d'utilité publique.


« Les bourgmestres des communes d'Ixelles, Tervueren, Woluwe-Saint-Pierre, Watermael-Boitsfort, Saint-Gilles, Anderlecht, Molenbeek-Saint-Jean présentent des observations contre le tracé d'un chemin de fer de Bruxelles à Louvain par Cortenberg, et demandent une enquête administrative sur cette question. »

- Même décision.


« Le conseil communal de Bonheyden demande que le concessionnaire d'un chemin de fer de Louvain à Herenthals soit tenu de suivre le tracé par Heyst-op-den-Berg et demande la construction aux frais de l'Etat d'un embranchement partant du chemin de fer à Malines et allant rejoindre la voie principale à la hauteur de Heyst. »

« Même demande des membres du conseil communal d'Itegem. »

- Même décision.


« Les membres du conseil communal de Houdeng-Aimeries demandent que le projet de loi relatif à divers travaux d'utilité publique comprenne le chemin de fer de fer de Houdeng-Goegnies à Jurbise par le Rœulx et Soignies dont la concession est sollicitée par la compagnie Stevens. »

- Même décision.


« Les membres du conseil communal d'Ath demandent que le gouvernement fasse exécuter les travaux de canalisation de la Dendre pour lesquels des fonds ont été mis à sa disposition par la loi du 8 septembre 1859. »

M. M. J. Jouret. - Messieurs, je viens appuyer la requête du conseil communal d'Ath et demander que la commission des pétitions fasse un prompt rapport sur cette pétition.

Il est temps, non seulement dans l'intérêt des populations riveraines, mais pour l'honneur même de l'administration, qu'on en finisse du système d'atermoiement, d'ajournement indéfini qu'on semble vouloir perpétuer relativement à l'amélioration de la navigation de la Dendre.

Depuis un demi-siècle et surtout depuis vingt ans, les divers ministres qui ont dirigé le département des travaux publics, ont publiquement proclamé la nécessité d'une bonne et facile navigation sur cet important cours d'eau, et cette déclaration a été chaque fois accueillie par ls Chambres législatives.

Mais, par une fatalité dont je n'ai pas maintenant à expliquer le principe, nous en sommes encore aux promesses, et malgré que des crédits importants aient depuis longtemps été votés pour ces travaux, les bateaux ne descendent encore la Dendre qu'au risque d'être à chaque moment brisés sur les berges, et ne la remontent qu'avec des frais énormes de toute nature.

Je sais que M. le ministre des travaux publics est personnellement bien disposé en faveur de la Dendre, mais je crains qu'il ne rencontre pas autant de bon vouloir chez quelques-uns des fonctionnaires de son administration. Je le prie donc de donner des ordres pour que les travaux décrétés en 1859 soient sans retard mis en adjudication.

Pour ma part, il ne me sera possible de voter les nouveaux crédits demandés, que pour autant que j'aurai tous mes apaisements quant aux travaux à exécuter à la Dendre.

M. J. Jouret. - Messieurs, cette pétition a une grande importance ; elle émane du collège échevinal et des membres du conseil communal de la ville d'Ath. Ces honorables fonctionnaires expriment l’inquiétude que leur fait éprouver le retard apporté à l'exécution de certains travaux décrétés par la loi de travaux publies de 1859, et notamment des travaux à faire à la Dendre. Ils font observer que si l'on votait la nouvelle loi proposée avant que ces travaux aient été exécutés ou commencés ou qu'on ait tout au moins donné la certitude qu'ils seront exécutés, ce serait, à leur sens, un véritable déni de justice, auquel ils espèrent que ni le gouvernement ni la Chambre ne voudront s'associer.

Des observations en ce sens ont été faites dans les sections lorsqu'elles ont examiné la nouvelle loi de travaux publics, et c'est pourquoi je ne puis m'associer à la demande d'un prompt rapport faite par l'honorable M. M. Jouret. Si l'on veut faire quelque chose d'utile, il faut renvoyer la pétition à la section centrale du nouveau projet de loi de travaux publics, qui en fera l'objet d'un sérieux examen.

J'ai l'honneur de faire cette proposition à la Chambre.

M. M. J. Jouret. - Je me rallie à la proposition de M. J. Jouret.

M. E. Vandenpeereboom. - Messieurs, la section centrale vient de terminer ses travaux et son rapport sera distribué demain. Si l'on veut qu'elle fasse de cette pétition l'objet d'un examen ultérieur, il faudra un rapport supplémentaire.

Pour d'autres pétitions du même genre, la section centrale a proposé le dépôt sur le bureau, pendant la discussion. Je demande que la Chambre prenne cette décision pour la pétition dont il s'agit actuellement.

M. J. Jouret. - Puisque le rapport est sur le point d'être distribué, je me rallie à la proposition de M. Vandenpeereboom.

- Cette proposition est adoptée.


« Le sieur Pierson, journalier à Awonne, ancien tirailleur de l'Escaut, demande une pension ou une indemnité pour services rendus en 1830. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Motion d’ordre

M. le Bailly de Tilleghem. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

C'est tout simplement pour exposer que dans nos provinces on attend vivement la mise en vigueur de la loi sur l'or.

Les inconvénients de la situation continuent par la perte plus ou moins considérable qu'on est obligé de subir, et l'état actuel des choses présente les plus graves inconvénients pour les transactions commerciales.

- M. Ernest Vandenpeereboom remplace M. Vervoort au fauteuil.

M. Rodenbach. - Messieurs, je partage entièrement le sentiment que vient d'exprimer mon honorable collègue et ami.

Il résulte des nouvelles que j'ai reçues de ma localité et d'une partie de la Flandre occidentale qu'on est étonné que depuis le long temps qui s'est écoulé depuis le vote, par les deux Chambres, du projet de loi sur la monnaie d'or, le gouvernement n'ai pas encore promulgué cette loi au Journal officiel.

(page 1205) M. de Montpellier. - Je désire savoir positivement si le gouvernement a intention, oui ou non, de répondre aux honorables membres qui viennent de l'interpeller. La question posée par ces messieurs vient très à propos et elle mérite certainement une réponse.

(page 1197) M. de Smedt. - J'appuie les observations des deux honorables préopinants.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, on parle des vœux qui auraient été exprimés par quelques localités. Jusqu'ici le gouvernement n'a reçu l'expression de ces vœux, ni d'une localité quelconque, ni de personne.

Que demande-t-on au gouvernement ? De promulguer immédiatement la loi sur l'or. La sanction de la loi est dans le ressort de la prérogative royale ; c'est un acte du gouvernement, acte que le gouvernement posera quand il le jugera opportun. Nous n'avons pas d'autre réponse à donner pour le moment.

(page 1198) Messieurs, lorsqu'on parle du long temps qui s'est écoulé depuis la discussion du projet de loi, on se trompe ; on perd de vue que le Sénat a voté la loi, il y a à peine une dizaine de jours. Le vote de la loi ne date donc pas de si longtemps et nous ne voyons pas que le pays montre une impatience bien grande à la voir promulguer.

M. Rodenbach. - Messieurs, le vœu du pays est que la loi soit publiée dans le plus bref délai possible ; jamais loi peut-être n'a été attendue avec une si vive impatience ; elle a été demandée à grands cris par des milliers de pétitionnaires qui se sont adressés aux deux Chambres de tous les points du pays.

Le retard apporté à la publication de la loi froisse les intérêts d'une foule de citoyens.

Si on ne veut pas promulguer la loi, il faut qu'on nous le dise. Je sais bien que le Roi est libre de donner ou de refuser sa sanction ; mais il n'en est pas moins vrai que le retard dont nous nous plaignons occasionne une gêne considérable et des pertes très sensibles pour une grande partie de nos concitoyens.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, nous devons tenir parfaitement la personne du Roi en dehors de nos débats. On ne peut donc pas attribuer au Roi les retards que peut éprouver la promulgation de la loi.

C'est la première fois qu'on presse le gouvernement de faire usage de ses prérogatives. La loi a pris naissance au sein de la Chambre ; elle n’émane pas de l'initiative du gouvernement ; il est juste dès lors de donner au gouvernement le temps de réfléchir avant de promulguer cette loi.

M. Rodenbach. - Le pays pâtit de ce retard.

M. Wasseige. - C’est précisément parce que la loi sur le cours légal de l'or n'émane pas de l'initiative du gouvernement que nous avons le droit et le devoir d'interpeller le gouvernement sur le retard inouï qu'il met dans la promulgation de la loi, car quand une loi est présentée par le gouvernement, cette question n'est jamais douteuse.

S'il dépendait du gouvernement lorsqu’une loi est due à l'initiative parlementaire de se renfermer dans un silence qui a lieu de vous surprendre ou de dire simplement qu'il promulguera la loi lorsque le moment lui paraîtra opportun, ce serait annuler une des prérogatives les plus précieuses que nous donne la Constitution, l'initiative parlementaire.

Jamais loi n'a été réclamée plus vivement, plus généralement par l'opinion publique.

M. Jacquemyns. - C'est pour cela qu'on a attendu six mois avant de présenter le projet de loi.

M. Wasseige. - De grands intérêts peuvent se trouver engagés et compromis par la position que paraît vouloir prendre le gouvernement.

Il vaudrait peut-être mieux encore que l'on sût que le gouvernement est décidé à ne pas présenter la loi à la signature royale que de voir les choses si longtemps tenues en suspens.

Je pense donc que le gouvernement doit aux populations que nous représentons, aux auteurs de la loi et à la grande majorité qui les a soutenus à la Chambre et au Sénat, et même à la dignité du gouvernement lui-même, de prendre une décision et de faire connaître cette décision au pays, dans le plus bref délai possible.

Quant au temps nécessaire pour examiner la loi, le gouvernement a eu ce temps et de reste.

Cette loi n'a pas été présentée par surprise ; peu de lois ont donné lieu à une discussion plus approfondie dans le pays et devant les Chambres, et la nécessité d'examiner me paraît, de la part du gouvernement, soit un faux-fuyant, soit un prétexte peu convenable.

- L’incident est clos.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère de la guerre

Rapport de la section centrale

M. de Smedt dépose sur le bureau le rapport de la section confie chargée d'examiner le projet de loi ouvrant un crédit supplémentaire de 7,410 francs au département de la guerre pour payement d'une créance arriérée.

- Impression et distribution.

Motion d’ordre

M. Hymans. - Messieurs, dans la session extraordinaire de 1859 le gouvernement a présenté à la Chambre un projet de loi de travaux publics dans lequel était comprise la construction d'un chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain,

Le gouvernement proclamait alors la nécessité de la construction de ce chemin de fer et pensait qu'il n'y avait pas même de discussion possible sur son utilité.

La Chambre a ajourné ce projet par de/raisons tout à fait indépendantes de l'utilité même du chemin de fer.

Elle a décidé qu'il serait renvoyé à la session suivante en partie à pause de l'absence des honorables députés de Louvain dont les pouvoirs n'étaient pas encore validés.

Pour mieux dire, le projet a été maintenu à l'ordre du jour. J'ai sous les yeux les Annales parlementaires de cette époque.

Il y est constaté que le projet est maintenu de droit à l'ordre du jour, aut termes du règlement.

Je demande donc que la Chambre veuille bien décider que la discussionde ce projet de loi ajourné dans la session extraordinaire de 1859 soit mis à l'ordre du jour en même temps que la discussion du nouveau projet de loi de travaux publics qui a été présenté par le gouvernement.

M. le président. - M. Hymans propose que le crédit pour le chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain soit compris dans la discussion que nous allons entamer mardi prochain.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'est pas besoin de décision pour cela. Tout membre de la Chambre est libre d'introduire dans la discussion du projet de loi des travaux publics tel projet qu'il peut lui convenir. Il n'est nullement nécessaire de prendre une décision d'avance à cet égard.

M. Hymans. - Je sais parfaitement que nous avons le droit de proposer tous les travaux publics possibles, je sais aussi que nous avons le droit de ne pas les obtenir, mais puisqu'il a été décidé dans la session de 1859 que le projet resterait à l'ordre du jour et que le gouvernement déclare aujourd'hui, en ne le représentant pas, qu'il n'est plus disposé à nous l'accorder, je demande qu'il soit tenu compte de la décision prise par la Chambre à cette époque, et que, puisque la Chambre a déclaré elle-même, en 1859, que, de plein droit, le projet restait à l'ordre du jour, il soit mis à l'ordre du jour de mardi prochain ; cela ne préjuge absolument rien quant au fond.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - S'il est à l'ordre du jour, il est inutile de l'y mettre de nouveau.

M. le président. - M. Hymans persiste donc dans sa proposition. Cependant, je lui demanderai s'il ne trouverait pas préférable d'en ajourner la présentation à mardi prochain.

M. Hymans. - Cela n'avance en rien la solution.

M. le président. - Non, il y a cette différence que mardi prochain la Chambre pourra comprendre immédiatement l'objet dont il est question dans la discussion générale du projet de loi de travaux publics ; tandis que la proposition qui est faite maintenant ne pourrait recevoir actuellement aucune suite utile.

M. Hymans. - Eu égard à l'espoir que vous voulez bien me donner, M. le président, je retire provisoirement ma proposition.

Projet de loi révisant le code pénal (livre II, titre X

Discussion des articles

Chapitre IV. Des infractions de quatrième classe

Article 677

M. le président. - Nous nous sommes arrêtés hier au n°1° de l’article 677, auquel M. Orts a proposé un amendement consistant à ajouter après cette phrase : « Les gens qui font métier de deviner et de pronostiquer ou d'expliquer les songes ... » ces mots « de prévoir l'avenir ou d'évoquer le passé, de découvrir les trésors et les choses perdues, enfouies ou cachées. »

M. Carlier, rapporteur. - L'amendement de l'honorable M. Orts ne me paraît pas pouvoir être admis par la Chambre. Trois ordres de faits, messieurs, sont soumis à votre attention par cet amendement.

Le premier, c'est de prédire l'avenir. Or, messieurs, la première partie de l'article 677 que vous avez adopté hier applique une pénalité aux gens qui font métier de pronostiquer. Je ne crois pas qu'on puisse prédire l'avenir sans pronostiquer. Dès lors, je pense que cette partie de l'amendement de l'honorable M. Orts est complètement inutile, puisque des gens qui feront métier de deviner feront en même temps métier de pronostiquer ; et qu'ils seront donc nécessairement atteints par la pénalité que vous avez votée hier,

Le second membre de l’amendement de l'honorable M. Orts consiste (page 1199) à appliquer la même pénalité aux gens qui font métier d'évoquer le passé.

J'ai cherché vainement à me faire une idée d'une situation quelconque, dans laquelle l'évocation du passé pourrait mériter une pénalité, parce qu'elle servirait, comme les autres faits que vous avez cru devoir punir, à consommer une duperie, à constituer une tentative de friponnerie ; en un mot, d'une situation où cette évocation donnerait lieu à l'application de l'article 677, paragraphe premier.

Le troisième membre de l'amendement tend à punir celui qui fait métier de découvrir les trésors et les choses perdues, enfouies ou cachées. A cet égard encore, je crois que la disposition déjà votée prévoit cette partie de l'amendement.

L'article que vous avez admis hier punit ceux qui font métier de deviner ; or c'est faire métier de deviner à prétexte de prétendues découvertes que de faire métier de découvrir les choses perdues ou cadrées. Je crois dès lors que le fait est prévu par l'article que nous avons adopté et qu'ainsi l'amendement est complètement inutile. Je crois donc devoir le repousser.

M. Orts. - J'ai expliqué hier déjà la pensée qui a amené la présentation de mon amendement ; je l'ai formulée dans cette phrase : Pas de privilège ou de monopole en fait de sorciers. La commission avait réprimé quelques faits de sorcellerie, je voulais également réprimer toute prétention à l'exercice d'un pouvoir surnaturel, d'une influence sur le monde en dehors du monde dans lequel nous vivons.

Maintenant si ceux qui par des moyens surnaturels prétendent faire retrouver des choses perdues ou volées, découvrir des sources, etc., sont atteints par l'article de la commission, comme vient de le dire l'honorable rapporteur, des trois catégories comprises dans mon amendement, deux deviennent inutiles. Quant à la troisième, comprenant les gens qui font métier d'évoquer le passé, elle existe.

II y a des personnes qui moyennant argent ont la prétention de vous faire causer avec des personnes décédées plus ou moins récemment, ou qui ont vécu dans les siècles passés.

Il y a des gens qui croient à ce pouvoir et donnent de l'argent pour en profiter, comme il y en a qui donnent de l'argent pour se faire expliquer leurs songes ou dévoiler l'avenir.

Je voulais comprendre ces magiciens-là dans la même disposition, mais s'il n'y a plus de dissentiment que sur ce point entre la commission et moi, je consens à me montrer bon prince, et pour épargner une discussion à la Chambre je ferai grâce à cette troisième catégorie. Moyennant les explications données par M. le rapporteur, je retire donc mon amen dément.

M. le président. - L'amendement de M. Orts est retiré, le n°1° a été adopté.


« 2° Ceux qui auront volontairement dégradé des clôtures urbaines ou rurales de quelques matériaux qu'elles soient faits. »

- Adopté.


« 3° Ceux qu', sans y avoir été autorisés par la police, auront fait le métier de crieur ou afficheur d'écrits, imprimés, dessins ou gravures, même munis des noms d'auteur, imprimeur, graveur ou dessinateur. »

M. Orts. -' Messieurs, le paragraphe actuellement en discussion me semble soulever des questions excessivement graves et importantes, quoique paraissant se rattacher uniquement à quelque chose d'assez simple.

Je vois un premier danger dans l'obligation d'une autorisation préalable que le texte proclame. Nous allons consacrer le monopole de la profession d'afficheur ou de crieur d'écrits imprimés, dessins ou gravures. Il est évident que si vous frappez d'une peine celui qui exerce ce métier sans autorisation d'une administration quelconque, vous donnez le monopole de cette profession à ceux que l'administration aura investis de l'autorisation.

M. Rodenbach. - Ce serait rétablir subrepticement une véritable corporation !

M. Orts. - Comme on le dit encore à mes côtés, vous créez une corporation.

Je pense qu'il y a là quelque chose d'illégal, d'inconstitutionnel même ; une violation de la liberté d'industrie. Et je ne suis pas seul à le penser.

Certaines administrations communales ont cru pouvoir conférer ce monopole, entre autres l'administration communale de Bruxelles en 1854.

Mais ce règlement a été déclaré inconstitutionnel, illégal, non obligatoire en ce qui concerne les crieurs jurés, par un jugement du tribunal correctionnel de Bruxelles en 1854, jugement contre lequel le ministère public ne s'est pas, que je sache, pourvu en cassation.

Maintenant, voici un second danger ; et ce danger touche à une de nos libertés les plus essentielles, à l'un de nos droits politiques les plus importants : l'exercice du droit électoral et la liberté de publications en matière d'élections.

Il est certain que si vous donnez un monopole aux afficheurs ou crieurs d'écrits nommés par l'administration communale, celle-ci a entre les mains les moyens d'empêcher l'affichage et la distribution par voie de criage sur la voie publique, de toute publication électorale contraire à l'opinion des membres de cette administration. Je vais préciser par un exemple et je me prendrai moi-même pour exemple, afin de ne blesser personne.

Je me suppose membre de la Chambre et en même temps chef de l'administration communale de Bruxelles.

On attaque mon élection de membre de la Chambre, et mes adversaires veulent publier, faire afficher des listes sur lesquelles ne se trouve pas mon nom, des écrits qui me combattent. Si j'ai le droit de nommer et de révoquer les crieurs et les afficheurs, je puis dire à ceux-ci : Le premier d'entre vous qui aura le malheur de colporter ou de crier ces listes sur lesquelles mon nom est omis, ces écrits qui me combattent, sera destitué dans les vingt-quatre heures.

Dans une situation pareille, rien n'est plus facile que de porter atteinte à la liberté électorale, d'entraver le droit électoral lui-même dans son exercice.

Je demande la suppression de ce paragraphe, je demande qu'on laisse la fonction de crieur et d'afficheur parfaitement indépendante, en dehors de tout monopole.

Sans doute l’administration communale doit prendre des mesures en ce qui concerne les crieurs sur la voie publique, elle doit indiquer les lieux où l'on peut afficher.

Mais ces indications faites, il faut qu'il soit libre à tout le monde de faire répandre, à ses risques et périls, tous les écrits qu'il croit nécessaire à la défense de ses opinions et de ses doctrines.

Il ne faut pas plus de censure pour les affiches et le criage d'imprimés sur la voie publique que pour les écrits qui se publient sous forme de livres et de journaux.

Du reste je ne sais d'où provient l'introduction dans le projet de ce paragraphe 3. C'est une invention qui n'a pas son précédent dans le Code pénal actuel.

M. Carlier, rapporteur. - C’est une erreur ; voyez l'article 290,

M. Orts. - Si vous avez voulu atténuer l'article 290 du Code pénal, article que je considère comme parfaitement abrogé par la Constitution, vous avez fait une petite inconstitutionnalité au lieu d'une grosse. Ce n'était pas la peine de mettre la main à l'œuvre.

Je désire donc que ce paragraphe 3 disparaisse et que l'on abandonne aux administrations communales le sein de prendre les mesures de police qu'elles jugeront nécessaires en cette matière.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'avais fait connaître à l'honorable rapporteur de la section centrale, avant la séance et par conséquent avant la discussion, que mon intention était de demander la suppression de ce paragraphe, laissant la réglementation de tout ce qui se rapporte au cri et à l'affichage à des règlements de police. Je ne fais donc aucune difficulté à consentir à la suppression de ce paragraphe, laissant à toutes les autorités communales le soin de prendre les mesures qu'elles croiront nécessaires et de les sanctionner par les dispositions de la loi de 1818.

- La suppression du paragraphe est mise aux voix et prononcée.


« 4° Les auteurs de voies de fait ou violences légères, pourvu qu'ils n'aient blessé ni frappé personne, et que les voies de fait n'entrent pas dans la classe des injures ; particulièrement ceux qui auront volontairement, mais sans intention de l'injurier, lancé sur une personne un objet quelconque de nature à l'incommoder ou à la souiller ; »

- Adopté.


« 5° Celui qui aura volontairement et sans nécessité tué ou grièvement blessé, soit un animal domestique autre que ceux mentionnés à l'article 656, soit un animal apprivoisé, dans un lieu autre que celui dont le maître de l'animal ou le coupable est propriétaire, locataire ou fermier. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut ajouter : « Usufruitier ou usager. »

- Le paragraphe est adopté avec cette addition.


« 6° Ceux qui, par défaut de précaution, auront involontairement (page 1200) détruit ou dégradé des fils, poteaux ou appareils télégraphiques. »

- Adopté.

Article 678

« Art. 678. Les peines d'emprisonnement et d'amende portées par l'article précédent pourront être prononcées cumulativement ou séparément contre ceux qui se seront rendus coupables d'actes de cruauté ou de mauvais traitements excessifs envers les animaux, et notamment envers les bêtes de trait, de charge ou de monture. »

- Adopté.


« Art. 679. Les imputations calomnieuses et les injures qui ne rentrent point dans les dispositions du chapitre V, titre VIIl, seront punies d'une amende de quinze francs à vingt-cinq francs et d'un emprisonnement d'un jour à sept jours ou de l'une de ces deux peines seulement. »

- Adopté.

Article 680 et article nouveau

M. le président. - La commission propose de supprimer l'article 680 et de mettre à la place un article nouveau ainsi conçu :

« Seront aussi punis d'une amende de quinze à vingt-cinq francs et d'un emprisonnement d'un à sept jours, ou de l'une de ces deux peines seulement :

« 1° Tous cris séditieux publiquement proférés ;

« 2° Le port public de tous signes extérieurs de ralliement non autorisés par les règlements de police ;

« 3° L'exposition dans des réunions ou dans des lieux publics, la distribution ou la mise en vente de tous signes ou symboles destinés à troubler la paix publique. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, je dois demander le maintien de l'article 680. Il prévoit le cas d'une seconde récidive et de récidives ultérieures, et comme la Chambre a admis pour toutes les autres contraventions des pénalités plus fortes lorsqu'il y a une deuxième ou d'ultérieures récidives, il est nécessaire de suivre le même principe pour les contraventions auxquelles s'applique l'article 680.

M. Carlier, rapporteur. - La proposition de M. le ministre de la justice est la conséquence des voies de la Chambre, mais si cette proposition est adoptée il faudra modifier dans le même sens l'article 31 (livre premier) qui a été voté il y a déjà longtemps.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Un vote déjà émis par la Chambre rend cette modification nécessaire, car l'article 676 adopté dans la séance d'hier admet la possibilité d'une peine d'emprisonnement supérieure à celle qui pout être appliquée en vertu de l'article 39 (premier livre). C'est au second vote qu'on pourra proposer la modification à introduire dans cet article.

M. Carlier, rapporteur. - Je crois, messieurs, que l'article nouveau que la commission avait proposé démettre à la place de l'article 680 doit venir avant celui-ci. En effet l'article proposé par la commission applique des pénalités à d'autres faits que ceux dont nous nous sommes occupés jusqu'ici et l'article 680 concerne toutes les contraventions en général.

M. le président. - L'article proposé par la commission est ainsi conçu :

« Seront aussi punis d'une amende de quinze à vingt-cinq francs et d'un emprisonnement d'un à sept jours, ou de l'une de ces deux peines seulement :

« 1° Tous cris séditieux publiquement proférés ;

« 2° Le port public de tous signes extérieurs de ralliement non autorisés par les règlements de police ;

« 3° L'exposition dans des réunions ou dans des lieux publics, la distribution ou la mise en vente de tous signes ou symboles destinés à troubler la paix publique. »

M. Hymans. - Il s'agit ici, messieurs, d'un délit nouveau, et je désirerais que M. le rapporteur voulût bien nous dire ce que la commission entend par des symboles destinés à troubler la paix publique !

M. Orts. - Avant que l'honorable rapporteur réponde à l'interpellation de l'honorable M. Hymans, je me permettrai d'attirer son attention et celle de M. le ministre de la justice sur la disposition tout entière.

Encore une fois, sous des apparences très modestes, il y a ici des principes graves en jeu. La commission, en proposant le nouvel article 680, mue par le désir très légitime et très honorable de diminuer les peines, a jeté une grande perturbation dans l'ordre des juridictions ; elle a touché encore une fois à un principe constitutionnel ; elle a créé trois délits politiques ; mais elle ne les punit que comme de simples contraventions. Ce sont évidemment trois faits politiques que l'on réprime :

« 1° Tous cris séditieux publiquement proférés ; »

Cri séditieux, c'est bien là un fait politique.

« 2° Le port public de tous signes extérieurs de ralliement non autorisés par les règlements de police. »

Il est évident que c'est là encore un fait politique ; il ne peut pas s'agir ici, par exemple, du petit ruban qui décore la boutonnière des membres de certaines sociétés d'archers, d'arbalétriers pour les jours de kermesses ou de fêtes publiques. Ce port ne mérite pas d'être interdit ; il n'y a là ni immoralité ni atteinte à l'ordre public.

« 3° L'exposition dans des réunions ou dans des lieux publics, la distribution ou la mise en vente de tous signes ou symboles destinés à troubler la paix publique. »

Ici encore évidemment un fait politique qu'on veut interdire et réprimer. La chose est tellement vraie que les trois faits sont caractérisés par des termes empruntés à une loi temporaire faite dans les premiers temps de notre révolution de 1830 pour réprimer les démonstrations orangistes.

Cette loi parlait du port public de tous signes destinés à troubler la paix publique ; la cocarde orange portée dans les rues d'une de nos grandes villes avait appelé cette loi temporaire.

La loi parlait aussi de l'exposition, dans des réunions, de tous symboles destinés à troubler la paix publique ; encore un souvenir d'un ordre de choses aujourd'hui si loin de nous.

Maintenant, en introduisant trois faits politiques pour les réprimer dans l'article 680, la commission, mue, disais-je tout à l'heure, par le désir de diminuer les peines, a modifié l'ordre des juridictions.

En effet, en abaissant les peines, on fait de ces trois faits politiques de simples contraventions de police, qui doivent être portées devant les juges de paix en premier ressort, et en appel devant le tribunal correctionnel.

Or, il est de principe constitutionnel que les faits politiques ne peuvent être appréciés que par le jury, par la justice politique du pays ; ce serait s'engager dans une très mauvaise et très dangereuse voie que de chercher à soustraire des faits politique à l'appréciation du jury, en les transformant en simples contraventions de police ; nous arriverions ainsi à tricher les principes constitutionnels : ce qui ne serait ni bon, ni moral, ni utile.

Je demanderai donc à la commission et à M. le ministre de la justice, ou de restituer ces faits à la compétence du jury, ou bien de supprimer cette disposition dans le projet.

Pour ma part, je ne verrais pas de danger à laisser ces actes sans répression lorsqu'ils n'entraînent aucune conséquence constitutive d'un délit plus grave.

M. Carlier. -Messieurs, la disposition en discussion figurait dans le projet du Code pénal sous l'article 380, c'est-à-dire qu'elle faisait partie d'une série d'articles qui tous, ont, ainsi que l'a dit l'honorable M. Orts, un certain caractère politique.

Messieurs, vous avez, la semaine dernière, employé plusieurs de vos séances à la discussion de l'article 379 et vous avez renvoyé un article à la commission du Code pénal, afin d'en faire un examen nouveau.

L'article3580 me paraît participer de la nature des idées qui ont dicté l'article 379, et comme la commission du Code pénal doit se réunir dans la séance de demain pour examiner les amendements présentés à l'article 379, j'ai l'honneur de proposer à la Chambre de renvoyer également à la commission l'ancien article 380, devenu l'article 680.

Si ma proposition était accueillie, nous aurions à examiner les différents points de constitutionnalité que vient de soulever l'honorable M. Orts.

- La Chambre, consultée, renvoie l'article 680 à la commission.


M. le président. - Vient maintenant l'ancien article 680 du projet du gouvernement (article 681 nouveau).

Cet article est ainsi conçu :

« Dans le cas d'une seconde récidive et de toute récidive ultérieure, les tribunaux de police seront autorisés à prononcer, indépendamment de l'amende, un emprisonnement pendant douze jours au plus. »

- Cet article est adopté sans discussion.

Dispositions communes aux quatre chapitres précédents

Article 681

« Art. 681. Il y a récidivé, dans les cas prévus par les quatre (page 1201) chapitres qui précèdent lorsque le contrevenant a déjà été condamné pour la même contravention, dans les douze mois précédents.

Néanmoins, dans les cas prévus à l'article 671, n°5, il y aura récidive quelle que soit l'époque où la seconde contravention a été commise, et le coupable pourra être condamné par le tribunal de simple police à un emprisonnement de huit jours à quinze jours et à une amende de vingt-six francs à deux cents francs. »

- Adopté.

Article 682

« Art. 682. Lorsque, dans les cas prévus par les quatre chapitres qui précèdent, il existe des circonstances atténuantes, l'amende pourra être réduite au-dessous de cinq francs, sans qu'elle puisse en aucun cas être inférieure à un franc. »

M. Nothomb. - Messieurs, comme nous sommes arrivés à la fin du titre X, je demanderai à M. le ministre de la justice, s'il ne croit pas convenable de résoudre la question de l'attribution des amendes en matière de simple police dont j'ai déjà eu l'honneur d'entretenir la Chambre.

La Chambre sait que d'après l'article 466 du Code pénal actuel, les amendes en matière de simple police appartiennent aux communes. Le livre I du Code pénal nouveau portait dans son article 51 que toutes les amendes sans distinction aucune appartiendraient à l'Etat. Or, cet article a été supprimé dans la séance du 2 décembre 1854, de sorte que dans l'état actuel des choses, les amendes, en matière de simple police, ne seraient attribuées à personne.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, ainsi que vient de le dire l'honorable préopinant, il y avait, dans le livre I du projet du code pénal, un article concernant l'attribution des amendes en matière de simple police. A cette époque, on se proposait de faire une loi relative à l'exécution des peines et dans laquelle serait inséré l'article dont vient de parler l'honorable M. Nothomb.

Le gouvernement ayant proposé depuis et dans le projet actuel un article pour déterminer la quotité de la réduction de la peine, lorsque celle-ci sera subie en cellule, et l'urgence de cette loi ayant ainsi disparu, nous pourrons reprendre, lorsque nous examinerons le livre premier, la disposition relative à l'attribution de la peine.

La loi dont je parlais tantôt peut ne pas être présentée ; elle n'offre plus l'utilité qu'elle offrait dans le principe. Je pense donc qu'on doit reprendre la disposition relative à l'attribution des amendes lorsque nous arriverons au second vote du livre premier. Je crois que la disposition, si elle doit être insérée dans le Code, trouvera mieux sa place au livre premier du Code.

Ce sera donc lorsque nous arriverons, au second vote, à l'article supprimé que nous aurons à examiner la question.

- Adopté.

Projet de loi révisant le code pénal (livre I, titre X)

Article 97

M. le président. - Nous passons maintenant au livre premier, chapitre X, à la pièce qui fait suite au n°69. Le gouvernement se rallie-t-il aux propositions de la commission ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je demanderai que le débat s'ouvre sur le projet de la commission. Je ferai des observations et je proposerai des amendements au fur et à mesure que les articles se présenteront.

M. le président. - La discussion est ouverte sur les articles de la commission.

« Art. 97. Les peines portées par des arrêts ou jugements devenus irrévocables s'éteignent par la mort du condamné. »

- Adopté.

Article 98

« Art. 98. Le Roi peut en usant du droit de grâce faire cesser les incapacités pénales qui résultent des condamnations. »

M. le président. - M. le ministre de la justice vient de faire parvenir au bureau un amendement ainsi conçu :

« Le Roi peut, usant du droit de grâce, faire cesser les incapacités prononcées par certains juges ou attachées à certaines condamnations par des lois spéciales. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, la rédaction de l'article 98 proposée par la commission ferait supposer que le Roi peut faire remise de toutes les incapacités, même de l'interdiction légale qui est attachée aux condamnations prévues par les articles 28 et 29 du livre premier du Code pénal.

Comme il n'entre pas dans l'esprit du projet de loi qu'il soit possible de faire grâce de l'incapacité qui consiste dans l'interdiction légale attachée à des condamnations, pendant la durée de la peine, je propose une autre rédaction qui fait disparaître cette difficulté.

Je l'ai communiquée ce matin à l'honorable rapporteur de la commission, et nous sommes d'accord.

M. le président donne une seconde lecture de la rédaction proposée par M. le ministre de la justice.

- L'article 98 ainsi rédigé est adopté.

Articles 99 à 111

« Art. 99. Dans le cas où la grâce ne porte que sur la peine principale, le renvoi sous la surveillance de la police prononcé contre le condamné produira ses effets à compter de sa mise en liberté. »

- Adopté.


« Art. 100. Tout condamné à mort, aux travaux forcés ou à la détention à perpétuité, qui obtiendra commutation ou remise de sa peine sera, s'il n'en est autrement disposé par l'arrêté royal de grâce, de plein droit sous la surveillance spéciale de la police pour un terme de vingt ans. »

- Adopté.


« Art. 101. Seront en état d'interdiction légale pendant la durée de leur peine, les condamnés à mort dont la peine aura été commuée en une autre emportant cette interdiction aux termes de l'article 28. »

- Adopté.


« Art. 102. L'interdiction légale cessera, lorsque le condamné à mort aura obtenu remise de sa peine ou la commutation de celle-ci en une autre qui n'emporte point cette interdiction. »

- Adopté.


« Art. 103. Les peines criminelles, portées par les arrêts ou jugements, se prescriront par vingt années révolues, à compter de la date des arrêts ou jugements. »

- Adopté.


« Art. 104. Les peines correctionnelles, portées par les arrêts ou jugements, se prescriront par cinq années révolues, à compter de la date de l'arrêt ou du jugement rendu en dernier ressort, et, à l'égard des peines prononcées par les tribunaux de première instance, à compter du jour où ils ne pourront plus être attaqués par la voie de l'appel. »

- Adopté.


« Art. 105. Les peines de police portées par les arrêts ou jugements se prescriront par deux années révolues, à compter des époques fixées à l'article précédent. »

- Adopté.


« Art. 106. Si le condamné qui subissait sa peine est parvenu à s'évader, la prescription commence à courir du jour de l'évasion. »

- Adopté.


« Art. 107. La prescription de la peine sera interrompue par l'arrestation du condamné. »

- Adopté.


« Art. 108. En cas de prescription de la peine principale, le renvoi sous la surveillance spéciale de la police, prononcé contre le coupable, produira ses effets à compter du jour de la prescription accomplie. »

- Adopté.


« Art. 109. Tout condamné à mort, aux travaux forcés ou à la détention à perpétuité, qui a prescrit sa peine, sera de plein droit sous la surveillance spéciale de la police pendant un terme de vingt ans. »

- Adopté.


« Art. 110. Le condamné à mort, aux travaux forcés ou à la détention à perpétuité, qui a prescrit sa peine, sera, pendant toute sa vie, en état d'interdiction légale. »

M. le président. - La commission propose de supprimer cet article.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie à cette suppression.

- L'article est supprimé.


« Art. 111. En aucun cas, les condamnés par contumace, dont la peine est prescrite, ne pourront être admis à se présenter pour purger la contumace. »

- Adopté.

Article 112

« Art. 112.Les condamnations civiles, portées par les arrêts ou jugements rendus en matière criminelle, correctionnelle ou de police, se prescriront d'après les règles du droit civil, à compter du jour où elles seront devenues irrévocables.

« Toutefois, ces condamnations se prescriront à compter de la date de l'arrêt, si elles ont été prononcées par contumace. »

(page 1202) M. Nothomb. - Je désire présenter une observation qui, je le reconnais, aurait mieux trouvé sa place à l'article 97 que la Chambre vient de voter et dans lequel il est dit : « Les peines portées par des arrêts ou jugements devenus irrévocables s'éteignent par la mort du condamné. »

Je désirerais savoir si nous sommes d'accord que l'article 97 est également applicable aux peines pécuniaires.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - En adhérant à la suppression de la dernière partie de l’article 97, je manifestais très clairement mon intention : l'article 97 créait une exception en ce qui concerne les peines pécuniaires ; dans sa seconde partie, il déclarait que la mort n'éteignait pas l'obligation de payer.

Je n'ai pas fait d'observation quand l'article 97 a été voté ; j'adhérais par conséquent. Il est donc bien entendu que j'adhère au principe qu'on a voulu consacrer par cette suppression.

M. Nothomb. - C'est également ainsi que je l'avais compris ; mais comme la question a une importance réelle, j'ai tenu à constater le parfait accord de la législature sur cette question très sérieuse.

M. Pirmez, rapporteur. - C'est dans le but que vient d'indiquer M. le ministre de la justice, que l'article a été modifié. Cependant puisqu'on agite la question, je reproduirai la réserve qui a été consignée déjà dans le rapport de la commission.

L'amende s'éteint par la mort du condamné lorsqu'elle constitue uniquement une peine, mais la jurisprudence a considéré certaines amendes, par exemple les amendes pour infractions aux lois fiscales, comme ayant le caractère, non d'une pénalité, mais d'une réparation. Nous ne nous occupons ici que des amendes qui constituent des pénalités ; nous laissons à la jurisprudence le soin de modifier le principe quand les amendes à payer ont en même temps le caractère d'une réparation.

M. Nothomb. - Nous sommes d'accord que lorsque l'amende prononcée emportera le caractère d'une réparation, le principe consacré par l'article 97 ne sera pas applicable ; quand, au contraire, elle constitue purement une peine, elle tombe sous l'application de cette disposition.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'ai adhéré à la suppression du second paragraphe, dans l'ordre d'idées développé par la commission elle-même. Je n'ai pas entendu toucher le moins du monde aux lois spéciales, aux lois de douane, par exemple. Il ne s'agit ici que des amendes en matière ordinaire, et c'est ainsi aussi que la commission l'a entendu...

M. Pirmez, rapporteur. - C'est expliqué ainsi dans le rapport.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je tiens à répéter de nouveau que je ne me suis rallié à la suppression proposée que dans le même sens et avec les mêmes réserves que la commission.

M. Van Overloop. - Je crois devoir faire mes réserves quant aux droits de douanes notamment. S'il s'agit d'amendes qui ne constituent que la réparation du tort fait au gouvernement, je comprends l'interprétation qui vient d'être donnée. Mais quand les amendes constituent de véritables peines, il me semble qu'elles doivent s'éteindre conformément au principe consacré par l'article 97. En d'autres termes, quand les amendes sont purement une réparation civile, j'admets qu'elles ne s'éteignent pas par la mort de celui qui les a méritées ; mais quand elles constituent véritablement une pénalité, je crois que cette pénalité doit, comme toutes les autres peines, s'éteindre par la mort du condamné.

M. Pirmez, rapporteur. - L’honorable préopinant va évidemment trop loin : nous sommes d'accord sur ce point que lorsque l'amende est uniquement une peine, elle ne passe pas aux héritiers ; mais il est évident que lorsqu'il s'agit uniquement d'une réparation civile, cette réparation civile, comme toutes les autres dettes en général, passe aux héritiers.

Maintenant, il peut y avoir, dans des lois fiscales, des amendes ayant un caractère mixte, des amendes qui sont tout à la fois une peine et une réparation, qui ont quelque chose d'analogue à ce qui se trouve dans les contrats sous le nom de clauses pénales. Nous n'avons pas à décider ici quelles sont les amendes qui ont ce caractère mixte ; nous laissons ce soin à la jurisprudence.

Mais il faut qu'il soit reconnu que nous ne préjugeons ni dans un sens ni dans l'autre la transmissibilité des amendes. C'est à la jurisprudence à décider dans quels cas il y a transmissibilité de l'amende aux héritiers.

M. Van Overloop. - Je dois persister dans ma manière de voir.

Ainsi, je suppose que je me vois rendu coupable d'une fraude qui cause au trésor une perte de 100 fr. du chef de non-paiement de droit et que je sois condamné à une amende de 3,000 fr.

Je comprends que mes héritiers, si je meurs, soient tenus à la réparation du préjudice que le trésor a éprouvé ; mais les 2,900 fr. restant constitueront une véritable pénalité. (Interruption.) Enfin, messieurs, je fais mes réserves parce qu'il ne me semble pas juste de faire pâtir les héritiers d'une véritable pénalité et non d'une simple réparation. Cela me paraît contraire au principe, que les peines sont personnelles.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Quant à moi, je ne puis que répéter que je n'adhère nullement aux réserves de l'honorable M. Van Overloop. Il est certainement libre de faire toutes les réserves qu'il juge convenables, il peut même ne pas adhérer du tout au principe ; mais je dois dire que c'est dans le sens que j'ai indiqué de commun accord avec M. le rapporteur de la commission, que la disposition a été rédigée.

- L'article 112 est mis aux voix et adopté.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Nous n'avons plus de rapport sur le Code pénal.

M. Pirmez. - Messieurs, le Code pénal est aujourd'hui voté entièrement sauf cinq ou six articles qui ont été renvoyés à la commission.

Je demanderai à la Chambre de maintenir le Code pénal à l'ordre du jour de demain. La commission doit se réunir avant la séance ; elle aura certainement le temps de revoir ces quelques articles et il pourra vous être fait rapport au commencement de la séance, de sorte que la Chambre pourrait terminer le premier vote du Code pénal.

Ce travail achevé, je crois que la commission pourrait, dans le cours de la semaine prochaine, soumettre à la Chambre le travail complet de révision ; de sorte qu'en une ou deux séances le projet pourrait être définitivement voté et ensuite transmis au Sénat.

M. de Theux. - Il est bien entendu cependant que la Chambre ne prend aucune décision maintenant sur la proposition faite par l'honorable rapporteur de soumettre, la semaine prochaine, le Code pénal au second vote de la Chambre.

M. Pirmez. - Je n'ai pas fait de proposition, je n'en ai parlé que comme d'une chose possible.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je modifierai la proposition de l'honorable rapporteur de la commission en ce qui concerne l'ordre du jour de demain en demandant que cet ordre du jour se compose de feuilletons de pétitions et de quelques naturalisations et que l'on renvoie à après-demain la discussion des différents articles du Code pénal sur lesquels il reste à statuer.

L'honorable rapporteur aura ainsi un jour de plus pour examiner ces articles qui, sont, d'ailleurs, assez importants.

M. Moreau. - II y a aussi quelques crédits que nous pourrions mettre à l'ordre du jour de demain.

M. le président. - Il doit être bien entendu que la décision que la Chambre prendra maintenant, quant à l'ordre de ses travaux, ne pourra pas avoir pour effet de retarder la discussion du projet de loi des travaux publics, fixée à mardi.

- Quelques voix. - A demain.

M. de Gottal. - Je prierai la Chambre de vouloir bien comprendre parmi les crédits dont elle compte s'occuper aujourd'hui ou demain un crédit qui ne donnera lieu qu'à un simple vote ; je veux parler d'un crédit de 8,000 fr. au département des finances pour une restitution de droits qui est en souffrance depuis plus de deux années.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - On pourrait mettre aussi à l'ordre du jour la convention avec le Hanovre concernant le péage de Stade.

M. de Boe. - On pourrait faire aussi quelques naturalisation ; il y a des demandes concernant des personnes qui attendent depuis plus d'un an. Les membres de la commission sont relancés par ces individus. Nous avons demandé à plusieurs reprises à la Chambre de prendre une décision sur ces naturalisations ; le moment me paraît favorable. Je prie la Chambre de vouloir bien s'occuper de cet objet.

Interpellation

M. Pirmez. - J'ai une interpellation à adresser à M. le ministre de l'intérieur ; comme la Chambre n'a pas décidé encore comment elle emploierait la fin de la séance, je lui demanderai la permission de faire mon interpellation.

- Plusieurs voix. - Oui, oui, parlez !

M. le président. - M. Pirmez, vous avez la parole.

(page 1205) M. Pirmez. - Il est arrivé à la Chambre une pétition du conseil provincial de Liège qui a pour but de demander le vote d'une loi modifiant certaines expressions de la loi sur les incompatibilités parlementaires.

Un membre de la Chambre, après avoir été réélu membre du conseil provincial, avait réuni un assez grand nombre de voix pour une place de membre de la députation permanente ; il n'a pas été nommé, mais le conseil provincial, à l'unanimité, a exprimé le regret de ce qu'il n'avait pas été élu parce qu'il n'avait pas cessé depuis un an de faire partie de la Chambre.

Le conseil provincial croit en effet qu'aux termes de la loi sur les incompatibilités, un membre de la Chambre ne peut entrer à la députation permanente qu'après qu'un an s'est écoulé depuis qu'il a quitté la législature.

C’est en cela qu'une modification à la loi en vigueur est réclamée. Je prie M. le ministre de l'intérieur de nous dire ce qu'il compte faire à cet égard.

S'il m'est permis d'émettre une opinion quant à la question soulevée, je dirai que le conseil provincial de Liège ne paraît avoir interprété d'une manière trop rigoureuse, trop littérale, le texte qu'il indique, sans tenir suffisamment compte de l'esprit de la loi.

La loi porte qu'un membre de la Chambre ne pourrait être nommé à des fonctions salariées par l'Etat qu'un an après avoir cessé de faire partie du parlement ; mais a-t-elle pensé interdire autre chose que les nominations qui dépendent du gouvernement ?

Qu'a-t-on voulu empêcher ? L'influence du gouvernement sur les membres des Chambres.

Qu'a-t-on cherché ? A mettre les membres de la législature à l'abri de la tentation des faveurs du pouvoir ?

Evidemment rien de cela ne s'applique à l'élection des membres de la députation.

C'est un principe de droit que dans les dispositions restrictives il faut toujours tempérer la lettre de la loi par son esprit. Il ne faut donner au texte que la portée que comporte l'intention du législateur.

Si le législateur n'a voulu qu'empêcher le membre du parlement de sacrifier son indépendance à l'espoir d'une fonction à la collation du gouvernement, il ne faut pas appliquer la loi aux fonctions qui sont le produit de l'élection et surtout d'une double élection.

Or, les fonctions de membre de la députation permanente ne peuvent être obtenues que quand on a été élu membre du conseil provincial, d'abord, et choisi ensuite par un corps électif ; il est donc évident qu'aucun des motifs qui ont fait porter la loi ne s'applique aux fonctions qui nous occupent.

Si ma manière de voir en avait besoin, elle trouverait un point d'appui dans le texte même de la loi.

Ce texte dit qu'on ne peut être nommé à une fonction salariée par l'Etat qu'un an après avoir cessé de faire partie du parlement. Le mot « nomination » s'applique plus spécialement à la collation de fonctions qui viennent d'un pouvoir central, le terme « élection » est plus spécial pour la collation des fonctions qui viennent des corps ou des assemblées.

Je désire savoir quelle est l'intention du gouvernement. Se propose-t-il de présenter une loi, ou pense-t-il qu'il n'y a pas lieu de changer la loi existante ?

Et dans ce dernier cas, serait-ce parce qu'il voudrait maintenir à la loi la portée qui lui a été donnée à Liège, ou parce que, partageant ma manière de voir, il croit une loi nouvelle inutile ?

(page 1203) M. Van Overloop. - II me semble que la loi sur les incompatibilités a été déjà interprétée dans un sens contraire à celui que vient d'énoncer l'honorable M. Pirmez, quand il s'est agi de la candidature d'un membre de cette Chambre à la cour des comptes.

Je fais cette observation uniquement pour rappeler un précédent. Je n'entends pas traiter incidemment la question que l'honorable M. Pirmez a soulevée.

M. Devaux. - Je crois que le conseil provincial de Liège a cédé à un scrupule de légalité fort honorable, mais qui va un peu loin. Je n'irai cependant pas aussi loin en sens contraire que l'honorable M. Pirmez. Puisque la loi ne limite pas sa prohibition aux fonctions conférées par le gouvernement, il n'y a pas lieu d'établir de distinction à cet égard quant à ce qui concerne l'origine de la nomination.

Mais les fonctions qu'il s'agissait de conférer au conseil provincial de Liège sont, à d'autres égards, d'une nature toute spéciale. Les fonctions de membre de la députation permanente sont une conséquence de celle de conseiller provincial. Le conseil choisit, dans son sein, des délégués à qui il confie certaines attributions particulières, mais toujours à raison de leur qualité de conseiller provincial ; c'est comme conseiller provincial qu'on remplit les fonctions de membre de la députation et on reste conseiller provincial tout en les exerçant.

Celui qui a reçu des électeurs le mandat de conseiller provincial ne me paraît pas plus pouvoir être exclu des fonctions de membre de la députation qui sont une conséquence de son mandat, pas plus qu'il pourrait être exclu des fonctions de président du conseil si ces fonctions étaient rétribuées.

Sans doute si le conseiller élu à la députation occupait en dehors du conseil une position inconciliable avec ses fonctions nouvelles, il devrait l'abandonner .pour les exercer, mais il n'en serait pas moins éligible à ces fonctions comme tous les autres conseillers et par cela seul qu'il est conseiller.

Le cas d'une nomination à la cour des comptes pour lequel la Chambre s'est prononcée était tout différent.

Ce n'est pas une délégation, il ne faut pas être membre de la Chambre pour entrer à la cour des comptes. Ce n'est pas comme représentant qu'on y entre.

Si un représentant entrait à la cour des comptes, il ne continuerait pas à être membre de la Chambre ; les deux mandats sont même incompatibles.

D'un côté il y a délégation d'un membre du conseil à des fonctions qu'il exerce au nom du conseil.

De l'autre il y a nomination à des fonctions nouvelles qui n'ont rien de commun avec celles de représentant.

Je crois que M, Kœler sortant de la Chambre et étant élu conseiller provincial, pouvait remplir toutes les fonctions qui incombent à un conseiller provincial et entre autres celles de membre de la députation permanente.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je pense que la loi relative aux incompatibilités parlementaires a été tellement loin que, dans l'intérêt même de nos institutions représentatives, nous devons nous montrer aussi larges que possible dans son interprétation.

Je suis d'avis aussi que le conseil provincial de Liège a cédé à des scrupules exagérés en considérant l'honorable M. Koeler comme ne pouvant pas être admis, dans l'année qui a suivi la cessation de son mandat parlementaire aux fonctions de membre de la députation permanente.

L'article 36 de la Constitution est très formel. Il exige deux conditions pour créer l'incompatibilité ; il veut que le membre de la Chambre des représentants ail été nommé à un emploi salarié par l'Etat et ait été nommé par le gouvernement : or un membre de la Chambre qui reçoit un mandat de député provincial n'est pas nommé par le gouvernement, et dès lors il ne doit pas tomber dans l'incompatibilité constitutionnelle.

En 1848, on a fait une loi qui, à mon avis, a plus ou moins porté atteinte à l'article 36 de la Constitution.

La loi de 1848 parle simplement d'emplois salaries, elle n'ajoute pas : « conférés par le gouvernement ». De là le doute qui a été soulevé et de là aussi la question qui a été décidée à propos d'un membre de la cour des comptes nommé non par le gouvernement, mais à un emploi salarié par l'Etat et qui dès lors tombait, disait-on, sous l'application de la loi de 1848.

Mais, messieurs, que veut l'article de la Constitution ? Il veut que le représentant qui a été nommé par le gouvernement à un emploi salarié par l'Etat, non pas soit exclu du parlement, mais soit soumis à l'élection, soit soumis au jugement des électeurs, et c'est ce qui arrive pour le membre de la Chambre qui, en quittant la Chambre, aurait en vue d'entrer à la députation provinciale.

En quittant ses fonctions de représentant, pour entrer au conseil provincial, il doit comparaître devant les électeurs. Si ceux-ci l'investissent d'un nouveau mandat, c'est qu'ils reconnaissent qu'il n'a pas démérité de leur confiance. Indépendamment de ce premier mandat qu'il doit recevoir des électeurs, il y a un second mandat qu'il doit recevoir du conseil provincial, pour devenir membre de la députation. Il y a donc une double garantie puisée dans ces deux élections auxquelles le membre de la Chambre se soumet pour arriver aux fonctions de membre de la députation permanente.

Je le répète donc, je crois que le conseil provincial de Liège a poussé trop loin le scrupule, en considérant M. Kœler comme ne pouvant dans l'année qui a suivi la cessation de son mandat faire partie de la députation permanente.

Du reste nous n'avons pas ici de prescriptions à faire aux conseillers provinciaux.

Le conseil provincial de Liège n'a pas cru devoir adopter cette interprétation. Je désirerais quant à moi qu'elle devînt la loi commune, et fût acceptée par tous les conseils provinciaux, pour le cas très rare où un membre sorti de la Chambre serait présenté dans une province pour devenir membre d'une députation permanente. Un ancien représentant ne pourrait qu'apporter d'utiles lumières, une expérience utile à la bonne gestion des affaires provinciales, et je crois que la province ne pourrait être que très honorée en même temps que mieux administrée, à posséder, parmi les membres de sa députation, d'anciens sénateurs ou d'anciens représentants.

Voilà la réponse que j'ai à faire à l'honorable M. Pirmez. Je suis entièrement d'accord avec lui sur la portée qu'il faut donner à la loi de 1848 relative aux incompatibilités.

Je crois qu'il faut interpréter cette loi le plus largement possible et j'incline à croire aussi qu'on a été trop loin dans l'extension donnée aux incompatibilités parlementaires.

Puisque nous en sommes à une question d'interprétation, je dois rappeler à la Chambre que j'ai déposé sur le bureau, avant les dernières vacances, les explications demandées relativement aux élections de Thollembeek qui avaient donné lieu à une discussion assez longue sur l'interprétation de l'article 46 de la loi communale. Je ne sais si l'intention de la Chambre est de recommencer la discussion sur les conclusions de mon rapport. Mais je suis prêt à en soutenir les conclusions. .

M. Nothomb. - J'ai lu le rapport auquel le ministre de l'intérieur vient de faire allusion, rapport assez compendieux, et j'avais précisément l'intention de demander à la Chambre de vouloir fixer un jour à son gré pour discuter ces conclusions, car je déclare faire mes réserves les plus formelles sur les opinions qui y sont exprimées et je désire les présenter à la Chambre.

Je n'admets pas les conclusions du rapport.

Je suis donc à la disposition de l'honorable ministre pour cette discussion, à tel jour qu'il voudra faire fixer.

M. de Theux. - Quant à l'affaire de Thollembeek, je fais mes réserves sur les conclusions du rapport de M. le ministre de l'intérieur, mais je pense que la question est très importante et que si elle doit être discutée dans cette session, elle devrait être mise à l'ordre du jour quelques jours d'avance pour qu'on eût le temps de se préparer. C'est, je le répète, une question extrêmement importance pour la pratique.

Quant à la question posée par l'honorable M. Pirmez, je ferai également remarquer que ce n'est pas à la suite de quelques observations sur une question à laquelle la Chambre n'était pas préparée, que des idées pour ou contre peuvent faire autorité.

Il y a une décision de h Chambre, contraire à mon opinion, il y a une décision en quelque sorte conforme à celle de la Chambre, de la part du conseil provincial de Liège.

Je ne pense pas qu'on puisse ainsi improviser une interprétation de la loi. D'ailleurs, notre opinion seule ne ferait pas loi ; il faudrait le concours des trois branches du pouvoir législatif. Je pense donc, messieurs, que cette question reste entièrement réservée.

(page 1205) M. Pirmez. - Messieurs, je n'ai jamais pensé que mon interpellation pût avoir pour résultat d'amener une interprétation obligatoire, mais il m'a paru utile de faire constater pourquoi le gouvernement ne présente pas la loi qui a été demandée.

Il nous est maintenant connu que c'est, non pas parce qu'il considère comme fondée l'opinion du conseil provincial de Liège, et qu'il veut maintenir la portée que ce corps a donnée à la loi, mais au contraire parce qu'il croit qu'une loi interprétative est inutile.

Je remercie M. le ministre de l'intérieur des explications qu'il a données, et qui trouvent un nouvel appui dans les raisons très décisives présumées par l'honorable M. Devaux.

Je constate maintenant qu'aucune voix divergente ne s'est élevée sur cette question, puisque l'honorable comte de Theux nous a rappelé qu'il a défendu jadis l'opinion que nous soutenons, et il n'est pas douteux, je pense, qu'il la partage encore.

(page 1204) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - La Chambre a décidé qu'un de ses membres ne pouvait pas être nommé conseiller à la cour des comptes ; c'est un cas tout différent de celui qui s'est présenté au conseil provincial de Liège, et les raisons qu'on donne pour soutenir qu'un membre de la Chambre qui vient de donner sa démission peut être nommé membre de la députation permanente, ne s'appliquent pas du tout à un membre de la Chambre qui serait nommé conseiller à la Cour des comptes.

Dans ce dernier cas on peut supposer qu'un ministère veuille acquérir de l'influence sur un membre de la Chambre, en lui donnant l'espoir de lui faire obtenir une place à la cour des comptes, à l'aide de la majorité qui appuie ce ministère.

Cette action du gouvernement ne peut jamais se faire sentir en ce qui concerne les nominations des membres des députations permanentes, car elle devrait s'exercer d'abord au sein du collège électoral, qui nomme les conseillers provinciaux et ensuite dans le conseil provincial lui-même, qui nomme les membres de la députation permanente.

De plus le gouvernement n'a pas intérêt à faire entrer dans la députation d'un conseil provincial telle ou telle personne, tandis qu'il a un grand intérêt à être représenté au sein de la Cour des comptes.

Et il peut exercer une grande influence réelle sur les nominations qui se font par la Chambre ; outre les voix des ministres, il y a les voix de leurs amis.

Je crois donc, messieurs, que les cas ne sont pas du tout identiques. Je ne sais pas si la Chambre n'a pas été un peu loin, je n'examine pas ce point ; mais je dis que les raisons données à l'appui de la décision de la Chambre ne s'appliquent nullement à la décision du conseil provincial de Liège.


M. Vander Donckt (pour une motion d’orde. - Je ne viens pas m'opposer, messieurs, à ce que la Chambre s'occupe vendredi prochain du Code pénal, mais le vendredi est réservé par le règlement aux prompts rapports de pétitions.

Je demanderai que la Chambre veuille bien mettre ces prompts rapports en tête de son ordre du jour de demain.

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi accordant un crédit au budget du ministère des finances

Vote des articles et vote sur l’ensemble

« Art. 1er. Un crédit de 8,500 fr. 49 c. est mis à la disposition du ministre des finances pour rembourser les droits d'entrée payés sur les marchandises déclarées en transit et qui ont été perdues par suite de l'incendie qui s'est déclaré, le 17 juin 1859, à bord du steamer français Languedoc, en charge dans le port d'Anvers. »

- Adopté.


« Art. 2. Ce crédit sera couvert au moyen des ressources ordinaires et formera l'article 41 du budget du département des finances pour l'exercice 1861. »

- Adopté.


Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet, qui est adopté à l'unanimité des 66 membres présents.

Ce sont : MM. Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Overloop, Verwilghen, Wasseige, Allard, Beeckman, Carlier, Dautrebande, David, de Boe, de Bronckart, de Brouckere, Dechentinnes, De Fré, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Maere, de Mérode-Westerloo, de Montpellier, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ridder, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, H. Dumortier, Faignart, Frison, Grosfils, Hymans, Jacquemyns, Janssens, J. Jouret, Julliot, le Bailly de Tilleghem, Loos, Moreau, Muller, Nélis, Neyt, Nothomb, Orban, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Royer de Behr, Saeyman, Savart, Snoy, Tesch, Thibaut, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Dormael et E. Vandenpeereboom.

Projet de loi approuvant la convention conclue entre la Belgique et le Hanovre, concernant le péage de Stade

Vote de l’article unique

M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« La convention particulière conclue entre la Belgique et le Hanovre, le 18 février 1861, concernant le péage de Stade, sortira son plein et entier effet. »

- Personne ne demandant la parole, on passe à l'appel nominal.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 67 membres présents. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui : MM. Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Overloop, Verwilghen, Wasseige, Allard, Beeckman, Carlier, Dautrebande, de Boe, de Bronckart, de Brouckere, Dechentinnes, De Fré, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Maere, de Mérode-Westerloo, de Montpellier, de Naeyer, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, de Ridder, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, II. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Frison, Grosfils, Hymans, Jacquemyns, Janssens, J, Jouret, M. Jouret, Julliot, le Bailly de Tilleghem, Loos, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Neyt, Nothomb, Orban, Orts, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Royer de Behr, Saeyman, Savart, Snoy, Tesch, Thibaut, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Dormael et E. Vandenpeereboom.


M. le président. - M. Allard, obligé de s'absenter, demande un congé.

- Accordé.

La séance est levée à 4 heures et demie.