(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)
(page 475) (Présidence de M. Verhaegen.)
M. de Boe, secrétaire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.
M. Vermeire, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.
- La rédaction en est approuvée.
M. de Boe, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes.
« Des cultivateurs de Goyck prient la Chambre d'établir le libre échange pour le houblon ou de soumettre ce produit à un droit d'entrée équivalent à celui dont les houblons belges sont frappés à l'étranger. »
- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.
« Des débitants et consommateurs de sel raffiné, à Mons prient la Chambre de n'apporter aucune modification à la loi du 5 janvier 1844. »
- Même renvoi.
« Le conseil communal et des habitants de Nederockerzeel demandent que l'usage de la langue flamande soit réglé dans les affaires publiques et que l'on donne suite aux propositions de la commission instituée par le gouvernement, pour autant qu'elles soient en harmonie avec la Constitution, »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le comité directeur du journal mensuel l'Homœopathe belge fait hommage à la Chambre d'une collection de ce journal et de 108 exemplaires de son dernier numéro, traitant de la réforme de la loi médicale en Belgique. »
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
« M. Faignart, rappelé chez lui par une affaire urgente, demande un congé de quelques jours. »
- Ce congé est accordé.
M. le président. - Les articles 261 et 262 ont été renvoyés à la commission. M. le rapporteur vient de me donner avis que la commission a délibéré ce matin, mais qu'elle n'a pu terminer son travail. Je propose donc de remettre la discussion du chapitre IV à une autre séance.
- Cette proposition est adoptée.
« Art. 264. Tout fonctionnaire ou officier public, qui aura agréé des offres ou promesses, ou reçu des dons ou présents, pour faire un acte de sa fonction ou de son emploi, même juste, mais non sujet à salaire, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à six mois et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs.
« Il sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d’une amende de cinquante francs à mille francs, s'il a agréé des offres ou promesses, ou s'il a reçu des dons ou présents, soit pour faire, dans l'exercice de sa fonction ou de son emploi, un acte injuste, soit pour s'abstenir de faire un acte qui rentre dans l’ordre de ses devoirs.
« Le coupable pourra de plus être interdit du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
La commission propose au premier paragraphe la rédaction suivante :
« Tout fonctionnaire ou officier public, toute personne chargée d'un service public, qui aura agréé des offres ou des promesses, etc. (le reste comme au projet du gouvernement). »
Et de rédiger ainsi le dernier paragraphe :
« Le coupable pourra être condamné, en outre, à l’interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie à la rédaction de la commission.
- L'article 264, modifié comme le propose la commission, est adopté.
« Art. 265, Tout fonctionnaire ou officier public, qui, par offres ou promesses agréés, dons ou présents reçus, aura fait, dans l'exercice de ses fonctions, un acte injuste, ou se sera abstenu de faire un acte qui entrait dans l'ordre de ses devoirs, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à trois ans, d'une amende de cent francs à trois mille francs et de l'interdiction conformément à l'article 44. »
M. Savart. - Messieurs, l'article 264 prononce une peine contre le fonctionnaire ou officier public, ou toute personne chargée d'un service public qui aura agréé des offres ou des dons pour faire des actes de sa fonction justes, mais non sujets à salaire, ou des actes injustes.
La peine différente dans les deux cas atteint la seule agréation d'offres ou de dons.
L'article 265 punit les actes injustes, par suite des dons reçus, ou des promesses agréées.
L'article 265 ne porte plus, comme l'article 264, « ou toute personne chargée d'un service public ».
Cette omission amène pour conséquence que la personne chargée d'un service public serait punie pour la simple agréation d'une offre ou d'un don, et ne serait pas punie pour une faute beaucoup plus grave, pour avoir, dans l'exercice de ses fonctions, fait un acte injuste ou s'être abstenue de faire un acte qui rentrait dans l'ordre de ses devoirs.
Il est évident qu'il y a dans l'article 265 une lacune, que puisque dans l'article 264 on a mis sur la même ligne le fonctionnaire et officier public, et toute personne chargée d'un service public, il faut encore mettre les officiers, fonctionnaires et les personnes chargées d'un service public sur la même ligne dans l'article 265.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'observation est juste. L'honorable M. Moncheur avait demandé la parole pour la présenter au nom de la commission et du gouvernement et pour demander qu'on ajoutât ces mots : « et toute personne chargée d'un service public. »
M. Moncheur, rapporteur. - C'est une omission qui a été faite lorsque l'article a été rédigé.
- L'article, avec l'addition des mots : « toute personne chargée d'un service public », est adopté.
« Art. 266. Le coupable sera condamné à un emprisonnement d'un au à cinq ans, à une amende de deux cents francs à cinq mille francs et à l'interdiction conformément à l'article 44, s'il a agréé des offres ou promesses, ou reçu des dons ou présents pour commettre, dans l'exercice de ses fonctions, un crime ou un délit. »
La commission n'a pas proposé d'amendement.
- L'article 266 est adopté.
« Art. 267. Tout juge qui s'est laissé corrompre, soit en matière de répression, soit en matière civile, sera puni de la réclusion.
« L'arbitre qui s'est laissé corrompre sera condamné à un emprisonnement d'un an à cinq ans et à l'interdiction conformément à l'article 44. »
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, je propose d'insérer, dans le second paragraphe après le mot « arbitre » le mot « prud'homme ».
Depuis qu'une loi sur les prud'hommes est intervenue, il y a lieu de placer les prud'hommes dans les dispositions de l'article 267, et je crois qu'il faut les placer dans le second alinéa ; le prud'homme est à peu près dans une condition semblable à celle de l'arbitre.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, je me rallie à cet amendement ; si cette disposition n'était pas introduite dans la loi, on pourrait prétendre, avec beaucoup de raison, que les prud'hommes tombent sous l'application du premier paragraphe de l’article 267 ; car le prud'homme est un juge ; mais il faut admettre qu'il y a une grande différence entre un juge proprement dit et un prud'homme ; je crois qu'on peut placer les prud'hommes sur la même ligne que les arbitres. (Interruption).
Les juges consulaires tombent sous l'application du premier paragraphe de l'article ; il ne peut pas y avoir de doute sous ce rapport.
On demande, à côté de moi, si le second paragraphe ne s'appliquait qu'aux arbitres forcés, ou s'il s'appliquait à tous les arbitres. Je répondrai que la disposition s'applique à tous les arbitres indistinctement.
M. Moncheur, rapporteur. - C'est ainsi que la commission l'a entendu ; cela est même indiqué dans son rapport.
- L'article 267, amendé comme le propose M. Moncheur, est adopté.
« Art. 268. Si, par l'effet de la corruption, l'accusé a été condamné à une détention de plus de dix ans ou aux travaux forcés, et que cette condamnation ait été mise à exécution, le juge corrompu subira la peine des travaux forcés de dix à quinze ans. »
La commission propose de substituer aux mots : « le juge corrompu » ceux-ci : « le juge qui s'est laissé corrompre ».
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie à cet amendement.
- L'article 268, ainsi amendé, est adopté.
« Art. 269 (projet de la commission). Si, par l'effet de la corruption, l'accusé a été condamné à la peine de mort, le juge reconnu coupable subira la peine de la mort.
(page 476) « Néanmoins, si cette condamnation n'a pas été mise à exécution, le juge reconnu coupable subira la peine des travaux forcés à perpétuité. »
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, je pense qu'il vaudrait mieux se servir encore dans cet article de la formule : « qui s'est laissé corrompre », au lieu de celle : « le juge reconnu coupable » ; l'expression me paraît meilleure.
- L'article 269, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.
« Art. 270 (projet de la commission). Le juré qui s'est laissé corrompre, soit en faveur d'un accusé poursuivi pour crime, soit à son préjudice, sera puni de la réclusion.
« Si, par l'effet de la corruption, l'accusé a été condamné soit à une détention de plus de dix ans, soit aux travaux forcés, et que cette condamnation ait été mise à exécution, le juré qui s'est laissé corrompre subira la peine des travaux forcés de dix à quinze ans. »
- Adopté.
« Art. 271 (projet de la commission). Si, par l'effet de la corruption, l'accusé a été condamné à la peine de mort, le juré qui s'est laissé corrompre subira la peine des travaux forcés à perpétuité.
« Il subira la peine de mort s'il a voté contre lui, dans l'intention de le faire condamner à mort.
« Néanmoins, si cette condamnation n'a pas été mise à exécution, le juré reconnu coupable subira :
« Dans le premier cas du présent article, la peine des travaux forcés de quinze à vingt ans.
« Dans le second cas, les travaux forcés à perpétuité. »
- Adopté.
« Art. 272 (projet du gouvernement). Le juré qui s'est laissé corrompre, soit en faveur, soit au préjudice d'un accusé poursuivi pour délit politique ou de presse, sera puni d'un emprisonnement de deux à cinq ans et de l'interdiction conformément à l'article 44. »
- Adopté.
« Art. 273. Si le juge ou le juré qui s'est laissé corrompre a reçu de l'argent, une récompense quelconque ou des promesses, il sera condamné, en outre des peines ci-dessus, à une amende de deux cents francs à trois mille francs. »
- Adopté.
« Art. 274 (projet du gouvernement). Le juge, le juré, l'arbitre ou l'administrateur, qui se sera décidé par inimitié contre une partie, sera puni conformément aux articles 265, 267 à 271 et d'après les distinctions qui y sont établies.
« S'il s'est décidé par faveur pour une partie, il sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans, d'une amende de cent francs à mille francs et de l'interdiction des droits énoncés aux trois premiers numéros de l'article 42. »
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, il faut substituer dans le premier paragraphe au numéro 271, le numéro 272 ; c'est par erreur que l’article 271 se trouve repris dans l'article 274. Si la substitution que je propose ne se faisait pas, il en résulterait que le juge ou le juré qui par inimitié ou par faveur se serait décidé contre ou pour un accusé poursuivi pour délit politique ou de presse ne serait pas puni. Je me suis assuré près du savant rapporteur du projet élaboré par la commission que c'était là une erreur de chiffre.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut ajouter aussi le mot « prud’homme » après le mot « arbitre ».
M. Moncheur, rapporteur. - C'est ce que je propose également par la seconde partie de mou amendement.
- L'article 274 est adopté avec ces modifications.
« Art. 275 (projet du gouvernement). Quiconque aura contraint par violences ou menaces, ou corrompu par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire ou officier public, un juré ou un arbitre, sera puni des mêmes peines que le fonctionnaire, officier, juré ou arbitre contraint ou corrompu.
« Les tentatives de contrainte ou de corruption, qui auront manqué leur effet, seront punies d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. »
« Art. 275 (projet de la commission). Ceux qui auront contraint par violences ou menaces, ou corrompu par promesses, offres, dons ou présents, un fonctionnaire ou officier public, un juré ou un arbitre, pour obtenir un acte de sa fonction ou de son emploi, même juste, mais non sujet à salaire, seront punis des mêmes peines que le fonctionnaire, officier, juré ou arbitre contraint ou coupable de s'être laissé corrompre. »
(Le reste comme au projet du gouvernement.)
M. le président. - M. le rapporteur me fait parvenir un amendement à l'article proposé par la commission ; il consisterait à mettre après les mots : « non sujet à salaire », ceux-ci : « ou l’abstention d'un acte rentrant dans l'ordre de ses devoirs. »
M. Moncheur, rapporteur. - Mon amendement a pour but de mettre l'article 275 en harmonie avec les articles 264 et 265. Il s'explique de lui-même, puisqu'on est aussi coupable pour avoir tenté une corruption ayant pour but d'obtenir l'abstention d'un acte rentrant dans les devoirs du juge.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie à la rédaction de la commission avec le changement que vient d'indiquer M. le rapporteur ; j'ajouterai qu'il y aurait lieu d'ajouter deux fois le mot « prud'homme » après le mot « arbitre ».
- L'article 275, ainsi modifié, est adopté.
« Art. 276 (projet du gouvernement). Il ne sera jamais fait au corrupteur restitution des choses par lui livrées, ni de leur valeur : elles seront confisquées au profit des hospices des lieux où la corruption aura été commise. »
« Art. 276 (projet de la commission). Il ne sera jamais fait au corrupteur restitution des choses par lui livrées, ni de leur valeur : elles seront attribuées aux hospices des lieux où la corruption aura été commise. »
M. le président. - M. le rapporteur vient de me remettre un amendement ainsi conçu :
« Elles seront confisquées et mises à la disposition du bureau de bienfaisance de la commune où le délit aura été commis. »
M. de Luesemans. - Cet amendement répond à une première question que j'avais l'honneur d'adresser à M. le rapporteur et à M. le ministre de la justice, mais il y en a une seconde sur laquelle je dois également appeler leur attention.
La corruption peut se faire au moyen d'objets ou d'une somme d'argent.
Si l'argent ou l'objet livré appartient au corrupteur, il n'y a pas de difficultés.
Mais si l'objet livré est un corps certain, et s'il n'appartient pas au corrupteur, s'il a été volé ou s'il avait été perdu, il me semble que l'article ne peut être un obstacle à la restitution à qui de droit.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est une question qui s'agitera devant les tribunaux civils.
M. de Luesemans. - Vous décidez que l'attribution se fera au bureau de bienfaisance.
Quand la livraison aura eu lieu, il ne s'agira plus de le revendiquer. Je crois que cela devrait être prévu.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La livraison ne se fera que pour autant que l'objet soit la propriété de celui qui l'a donné. Mais nous ne pouvons dépouiller quelqu'un de son droit de revendication.
M. Moncheur, rapporteur. - Il n'y a pas de doute que si l'Etat n'a pas la libre disposition de l'objet, si l'objet appartient à un tiers, il ne pourra être donné au bureau de bienfaisance de la commune.
M. Pirmez. - Messieurs, cet article reproduit la disposition de l'article 53 du livre premier. D'après cette disposition, la confiscation spéciale s'applique toujours aux choses faisant l'objet de l'infraction et aux choses qui servent à la commettre. Or, les choses données à un juge pour le corrompre sont les moyens de la corruption ; l’article serait donc inutile.
Je ferai une autre observation. D'après la disposition du premier livre, les objets confisqués ne sont pas applicables aux hospices. Je demande pourquoi, dans le cas de l’article 276, cette attribution a lieu. Je ne vois pas de raison pour déroger aux dispositions générales.
Je crois donc qu'on pourrait tenir cet article en surséance. On examinerait les questions qu'a soulevées l'honorable M. de Luesemans et l’on verrait s'il n'y a pas lieu de supprimer l’article.
M. Moncheur, rapporteur. - Je ne verrais pas grand inconvénient à ce qu'on tînt l'article en surséance ; mais je n'en vois pas non plus l'utilité.
Le but de mon amendement est de mettre l'article 276 en harmonie avec l'article 598 du projet qui est relatif à la confiscation des comestibles, denrées, substances alimentaires, etc., qui se trouveraient en possession de celui qui aurait pu exercer le délit de tromperie.
(page 477) Cet article 598 propose d'attribuer cet objet au bureau de bienfaisance de la commune, ce qui me semble tout à fait convenable.
M. Pirmez. - Ils pourraient être attribués à l'Etat.
M. Moncheur, rapporteur. - Sans doute, on peut donc examiner le point de savoir s'il faut attribuer les objets confisqués à l'Etat ou au bureau de bienfaisance, mais nous sommes aussi aptes à traiter cette question dans ce moment que nous le serons plus tard. Je propose donc de continuer la discussion de cet article.
Quant à moi, je pense que c'est plutôt à une œuvre de bienfaisance que les objets confisqués doivent être attribués qu'à l'Etat, l'Etat ne doit pas profiter des valeurs agrées par un juge dans un but criminel.
Cela est, d'ailleurs, conforme à ce qui est déjà prescrit par des lois spéciales.
Je crois donc que l'article doit être adopté tel qu'il a été présenté.
M. Pirmez. - Je n'insiste pas ; l'observation que j'ai faite n'a pas assez d'importance pratique pour que j'y arrête la Chambre.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'article proposé est la disposition du Code actuel. La confiscation au profit de l'Etat a toujours paru une chose odieuse.
-L'article, modifié comme le propose M. Moncheur, est mis aux voix et adopté.
« Art. 277. Sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et de l'interdiction des droits énumérés aux trois premiers numéros de l'article 42, tout fonctionnaire public, agent ou préposé du gouvernement, de quelque état ou grade qu'il soit, qui aura requis ou ordonné, fait requérir ou ordonner l'action ou l'emploi de la force publique contre l'exécution d'une loi ou d'un arrêté royal, ou contre la perception d'un impôt légalement établi, ou contre l'exécution soit d'une ordonnance ou mandat de justice, soit de tout autre ordre émané d'une autorité légitime. »
- Adopté.
« Art. 278. Si cette réquisition ou cet ordre ont été suivis de leur effet, le coupable sera condamné à la détention de cinq à dix ans. »
M. Muller$. - Je propose de dire : « si cette réquisition ou cet ordre a été suivi d'effet, le coupable, etc. »
- L'article ainsi modifié est adopté.
« Art. 279. Si les ordres ou réquisitions ont été la cause directe d'autres crimes punissables de peines plus fortes que celles exprimées aux articles 277 et 278, ces peines plus fortes seront appliquées aux fonctionnaires, agents ou préposés, coupables d'avoir donné lesdits ordres ou fait lesdites réquisitions.
« Néanmoins, la peine de mort sera remplacée, dans ce cas, par celle des travaux forcés à perpétuité. »
- Adopté.
« Art. 280. Lorsqu'un fonctionnaire ou un officier public, un administrateur, un agent ou un préposé du gouvernement ou de la police, un exécuteur des mandate de justice ou jugements, un commandant en chef ou en sous-ordre de la force publique, aura, sans motif légitime, usé ou fait user de violences envers des personnes, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, il sera puni selon la nature et la gravité de ces violences, et en élevant la peine au maximum. »
- Adopté.
« Art. 281. Tout juge, tout administrateur ou autorité administrative, qui, sous quelque prétexte que ce soit, même du silence ou de l'obscurité de la loi, aura dénié de rendre la justice qu'il doit aux parties, après en avoir été requis, et qui aura persévéré dans son déni après avertissement ou injonction de ses supérieurs, sera puni d'une amende de deux cents francs à cinq cents francs et de l'interdiction du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. »
La commission ne propose pas d'amendement.
- L'article 281 est adopté.
« Art. 282. Tout commandant, tout officier ou sous-officier de la force publique, qui, après en avoir été légalement requis par l'autorité civile, aura refusé de faire agir la force à ses ordres, sera puni d'un emprisonnement de quinze jours à trois mois. »
La commission ne propose pas d'amendement.
M. J. Jouret. - Je lis dans cet article : « faire agir la force à ses ordres ». Ne serait-il pas plus correct de dire : « faire agir la force qui est placée sous ses ordres » ? Il me semble que l'expression employée dans le projet n'est pas très française.
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, si mes souvenirs ne me trompent point, l'expression critiquée par l'honorable préopinant se trouve dans le Code actuel. C'est aussi l'expression dont on se sert le plus souvent, je pense, dans le style militaire. On ne dit pas ordinairement d'un commandant qu'il avait telle ou telle force placée sous ses ordres mais on dit qu'il avait telle ou telle force à ses ordres. L'expression est en tout cas consacrée par un long usage et par son insertion dans le Code actuel.
M. J. Jouret. - Messieurs, il me semble que l'observation, faite par l'honorable rapporteur, n'est pas fondée : Faire agir la force à ses ordres n'est pas une expression correcte. Je comprends que dans l'exemple cité par l'honorable rapporteur, on puisse se borner à dire : à ses ordres ; mais cette expression ne peut être conservée dans l'article en discussion tel qu'il est conçu :
Au lieu des mots : « de faire agir la force à ses ordres », je propose de dire : « de faire agir la force qui est placée sous ses ordres ».
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, je ne m'oppose pas à ce changement de rédaction, bien que je ne voie pas de différence entre les deux expressions.
- L'article 282, amendé, comme le propose M. J. Jouret, est adopté.
« Art. 283 (projet du gouvernement). Lorsqu'un fonctionnaire ou officier public, un dépositaire ou agent de la force publique, aura ordonné ou fait quelque acte contraire à la loi, s'il justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs, pour des objets du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle sera, dans ce cas, appliquée seulement aux supérieurs qui auront donné l'ordre. »
« Art. 283 (projet de la commission). Lorsqu'un fonctionnaire ou officier public, un dépositaire ou agent de la force publique, aura ordonné ou fait quelque acte contraire à la loi, s'il justifie qu'il a agi par ordre de ses supérieurs, pour des objets du ressort de ceux-ci et sur lesquels il leur était dû obéissance hiérarchique, il sera exempt de la peine, laquelle ne sera, dans ce cas, appliquée qu'aux supérieurs qui auront donné l'ordre. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie au projet de la commission.
- L'article 283 du projet de la commission est mis aux voix et adopté.
« Art. 284. Tout fonctionnaire public qui sera entré en exercice de ses fonctions sans avoir prêté le serment prescrit par la loi, sera condamné à une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. »
La commission ne propose pas d'amendement.
L'article 284 est adopté.
« Art. 285 (projet du gouvernement). Tout fonctionnaire public révoqué, destitué, suspendu ou interdit légalement, qui, après en avoir eu la connaissance officielle, aura continué l'exercice de ses fonctions, ou qui, étant électif ou temporaire, les aura exercées après avoir été remplacé, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. Il pourra, de plus, être interdit du droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. Le tout sans préjudice des plus fortes peines portées contre les officiers ou les commandants militaires par l'article 121. »
« Art. 285 (projet de la commission). Tout fonctionnaire public révoqué, destitué, suspendu ou interdit légalement, qui, après en avoir eu la connaissance officielle, aura continué l'exercice de ses fonctions, ou qui, étant électif ou temporaire, les aura exercées après avoir été remplacé, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. Il pourra être condamné, en outre, à l'interdiction au droit de remplir des fonctions, emplois ou offices publics. Le tout sans préjudice des plus fortes peines portées coutre les officiers ou les commandants militaires par l'article 121. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie au projet de la commission.
(page 478) M. Moncheur, rapporteur. - Je propose de supprimer la finale de l'article, consistant dans ces mots : « Le tout sans préjudice des plus fortes peines portées contre les officiers ou les commandants militaires par l’article 121. »
Nous avons pris pour règle de supprimer cette semblable finale dans tous les articles où elle se trouvait, parce que cela va de soi, et est conforme aux principes généraux.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je me rallie à la suppression proposée par l'honorable rapporteur.
- L'article 285 du projet de la commission, amendé comme le propose M. Moucheur, est adopté.
« Art. 286. Les officiers de l'état civil qui auront inscrit leurs actes sur de simples feuilles volantes seront punis d'un emprisonnement de huit jours à trois mois et d'une amende de cinquante francs à trois cents francs. »
La commission ne propose pas d'amendement.
L'article. 286 est adopté.
« Art. 287 (projet du gouvernement). Seront punis d'une amende de cent francs à cinq cents francs, les officiers de l'état civil qui auront procédé à la célébration d'un mariage, sans s'être assurés du consentement des pères, mères ou autres personnes, lorsque ce consentement est requis pour la validité du mariage ; ou sans qu'il y ait eu d'actes respectueux, dans les cas où ils sont prescrits par la loi. »
« Art. 287 (projet de la commission). Lorsque, pour la validité d'un mariage, la loi prescrit le consentement des pères, mères ou autres personnes :
« Si l'officier de l'état civil a négligé d'énoncer ce consentement dans l'acte de mariage, il sera puni d'une amende de vingt-six francs à cent francs ;
« S'il a procédé à la célébration du mariage sans s'être assuré de l'existence de ce consentement, il sera puni d'une amende de cent francs a cinq cents francs ;
« S'il a célébré le mariage contre le gré des personnes dont le consentement était requis, il sera condamné, outre l'amende de cent francs à cinq cents francs, à un emprisonnement de six mois à un an.
« Enfin, lorsqu'il n'y aura pas eu d'actes respectueux, dans les cas où ils sont prescrits par la loi, l'officier de l'état civil qui aura célébré le mariage sera passible d'une amende de vingt-six francs à trois cents francs. »
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, je me rallie à la nouvelle rédaction proposée par la commission ; mais je demande qu'au paragraphe 4, on réduise le minimum de la peine de 6 mois à 3 mois. Je pense que le minimum de la peine proposé par la commission est trop élevé.
M. Moncheur, rapporteur. - Je ne m'oppose pas à cet amendement.
M. Muller. - Je dois simplement soumettre une observation à M. le ministre de la justice, à la commission et à la Chambre. D'après une loi récemment introduite, les officiers de l'état civil sont obligés de mentionner la déclaration faite par les époux sur le point de savoir s'il y a, oui ou non, contrat de mariage ; ne conviendrait-il pas qu'il y eût une légère pénalité prévoyant aussi ce cas ? Je ne suis pas bien au courant de cette matière pour le moment, mais, s'il n'y a pas de pénalité, ne conviendrait-il pas que cette clause qui est tout à fait dans l'intérêt public pût être aussi sanctionnée par une légère pénalité.
M. Pirmez. - Je crois que la sanction de la disposition dont parle l'honorable M. Muller est tout entière dans le Code civil, d'après lequel le contrat de mariage n'a pas d'effet vis-à-vis des tiers s'il n'a pas été mentionné dans l'acte de mariage.
M. Muller. - Je dois m'être mal exprimé, car l'honorable M. Pirmez n'a pas tout à fait compris ce que je voulais dire.
L'officier de l'état civil est obligé de relater conformément à la déclaration des parties si, oui ou non, il y a contrat de mariage.
Je suppose que l'officier de l’état civil dresse un acte où il ne constate rien à cet égard ; je dis qu'en pareil cas l'officier de l'état civil devrait être, selon moi, frappé d'une certaine pénalité, ou plutôt je dis qu'il devrait y avoir une pénalité comminatoire qui attirât l'attention des officiers de l'état civil sur cette nouvelle disposition.
M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, le but de l'article 287 n'est pas de punir toutes les omissions qui peuvent être commises par les officiers de l'état civil ; il ne concerne exclusivement que les omissions relatives au consentement des personnes dont le consentement est nécessaire pour la validité du mariage.
Plusieurs énonciations sont en outre prescrites par la loi et doivent être faites dans les actes de mariage, mais ces énonciations sont énumérées dans les articles du Code civil relatifs aux actes de l'état civil.
Si l'observation de l'honorable préopinant est juste en ce qui touche l'obligation de mentionner l'existence d'un contrat de mariage, et je pense qu'elle l'est, c'est à l'occasion de la révision du Code civil qu'il devrait y être fait droit. Mais, je le répète, l'article dont nous nous occupons se borne à prévoir les cas d'omission qui auraient rapport aux consentements exigés à peine de nullité du mariage.
La question de savoir s'il y a ou s'il n'y a pas contrat de mariage est donc complétement étrangère à l'objet de cet article.
M. Savart. - Je ne sais pas, messieurs, si l'honorable M. Muller a été bien compris. Il a supposé le cas où, un contrat de mariage existant, les époux viennent déclarer à l'officier de l'Etat civil qu'il existe un contrat de mariage et où l'officier de l'Etat civil ne veuille pas relater cette déclaration, comme il est tenu de le faire. D'après la loi qu'en résulterait-il ?
Il en résulterait que ceux qui ont fait le contrat de mariage en perdraient l'avantage vis-à-vis les tiers, et ce par le fait de l'officier de l'état civil.
Je dis, messieurs, que ce point mérite toute l'attention de la Chambre.
M. le ministre de la justice (M. Tesch). - L'obligation d'énoncer dans l'acte de mariage la date des conventions matrimoniales des époux et l'indication du notaire qui les aura reçues, a été votée en même temps que la nouvelle loi sur le régime hypothécaire, et forme une de ses dispositions additionnelles. Cette obligation se trouve consacrée par un nouveau paragraphe qui a été ajouté à l'article 76 du Code civil, dont il forme le n°10.
Il est ainsi conçu :
« Art. 76. On énoncera dans l'acte de mariage...
« n°10. La date des conventions matrimoniales des époux et l'indication du notaire qui les aura reçues, faute de quoi les clauses dérogatoires au droit commun ne pourront être opposées aux tiers qui ont contracté avec ces époux dans l'ignorance des conventions matrimoniales. »
C'est là une obligation qui intéresse principalement les parties elles-mêmes et qui à leur égard trouve sa sanction dans la disposition même. S'il faut une sanction en ce qui concerne l'officier de l'état civil, elle devrait plus tard se trouver dans le Code civil qui punit le défaut de certaines énonciations qu'il prescrit, et prévoit les contraventions qui portent plutôt atteinte aux intérêts particuliers qu'à l'ordre public. Il n'y a donc pas lieu, selon moi, à nous occuper, à propos du Code pénal, de la mention exigée par l'article 76, n°10, du Gode civil.
- L'article 287 est mis aux voix et adopté.
« Art. 288. L'officier de l'état civil sera puni d'une amende de vingt-six francs à trois cents francs, lorsqu'il aura reçu, avant le terme prescrit par l'article 223 du Code civil, l'acte de mariage d'une femme ayant déjà été mariée. »
- Adopté.
« Art. 289 (projet du gouvernement). Seront punis d'une amende de trois cents francs à mille francs, les officiers de l'état civil qui auront inscrit, à l'effet de contracter mariage, des personnes âgées de moins de trente-six ans accomplis, sans qu'elles aient produit la preuve légale qu'elles ont satisfait à leurs obligations relativement à la milice nationale. »
« Art. 289 (projet de la commission). Seront punis d'une amende de vingt-six francs à trois cents francs, les officiers de l'état civil qui auront célébré le mariage de personnes qui n'auraient point produit la preuve légale qu'elles ont satisfait à leurs obligations relativement à la milice nationale, ou qui n'auraient point atteint l'âge auquel la loi dispense de cette preuve. »
- Adopté.
« Art. 290 (projet du gouvernement). En cas de récidive, les délits prévus par les articles précédents seront punis, indépendamment de l'amende, d'un emprisonnement de huit jours à six mois, pour la première récidive, et pour toute récidive ultérieure, d'un emprisonnement de six mois à deux ans. »
« Art. 290 (projet de la commission). En cas de récidive, le délit prévu par le second paragraphe de l'article 287 sera puni d'une amende de cent francs à trois cents francs.
« Le délit prévu par le troisième paragraphe sera puni, indépendamment de l'amende, d'un emprisonnement d'un mois à six mois.
(page 479) « Le délit prévu par le quatrième paragraphe sera puni, indépendamment de l'amende, d'un emprisonnement d'un an à trois ans.
« Enfin, le délit prévu par le cinquième paragraphe de l'article 287 et par les articles 288 et 289, sera puni, outre l'amende, d'un emprisonnement de huit jours à six mois. »
- Adopté.
« Art. 291. Les peines portées aux articles précédents contre les officiers de l'état civil leur seront appliquées, même dans les cas où les infractions par eux commises ne seraient pas jugées suffisantes pour faire prononcer la nullité de leurs actes et lors même que la nullité n'en aurait pas été demandée, ou aurait été couverte ; le tout sans préjudice des peines plus fortes, s'il y a lieu, d'après les autres dispositions du présent Code. »
M. Moncheur, rapporteur. - Je propose de supprimer encore ici le dernier paragraphe de cet article : « le tout sans préjudice, etc. »
- L'article 291, amendé par M. Moncheur, est mis aux voix et adopté.
« Art. 292. Hors le cas où la loi règle spécialement les peines encourues pour crimes ou pour délits commis par les fonctionnaires ou officiers publics, ceux d'entre eux qui se seront rendus coupables d'autres crimes ou d'autres délits qu'ils étaient chargés de surveiller ou de réprimer, subiront le maximum des peines attachées à ces crimes ou à ces délits. »
- Adopté.
« Art. 293. Tout ministre d'un culte qui, hors les cas formellement exceptés par la loi, procédera aux cérémonies religieuses d'an mariage, sans qu'il lui ait été justifié d'un acte de mariage préalablement reçu par les officiers de l'état civil, sera, pour la première fois, puni d'une amende de vingt-six francs à cent francs. »
M. Moncheur, rapporteur. - Ce chapitre donnera probablement lieu à une discussion générale plus ou moins longue. Il vaudrait mieux ne pas l'engager aujourd'hui samedi, puisqu'elle serait interrompue, et que d'ailleurs la Chambre n'est pas très nombreuse en ce moment. Je propose donc de renvoyer cette discussion à lundi.
- Plusieurs voix. - Alors à mardi, à mardi !
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ne pourrait-on pas commencer la discussion générale ?
M. de Theux. - On n'est pas préparé.
Plusieurs voix. - A mardi, à mardi !
M. J. Jouret. - Je suis inscrit et prêt à parler il n'y a pas, ce me semble d'inconvénient à commencer la discussion.
M. de Theux. - S'il y a des orateurs prêts à parler, je ne m'oppose pas à ce qu'on commence la discussion, pourvu qu'il soit bien entendu qu’elle ne sera pas close, qu'il n'y aura pas de vote.
M. le président. - La Chambre veut-elle aborder la discussion du chapitre IX ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si on veut suspendre la discussion pendant deux ou trois jours, autant vaut ne pas la commencer aujourd'hui.
- La Chambre décide qu'elle renvoie la discussion à mardi.
La séance est levée à trois heures trois quarts.