(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1857-1858)
(page 813) (Présidence de M. Verhaegen.)
M. Crombez fait l'appel nominal à 3 heures et un quart.
M. Vermeire donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.
La rédaction en est approuvée.
M. Crombez communique l'analyse des pièces adressées à la Chambre.
« Le sieur Henri-Louis Lucke, pelletier, à Bruxelles, né dans cette ville, demande la naturalisation ordinaire avec exemption du droit d'enregistrement. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« L'administration communale de Moerbeke-Waes prie la Chambre d'accorder aux sieurs Deperre, la concession du chemin de fer de Lokeren à Terneuzen par Dacknam, Exaerde, Moerbeke et Axel. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Spellemaeckers-Van Roy demande le déplacement d'un conducteur des ponts et chaussées. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. Vander Donckt, rapporteur. - « Par pétition datée de Namur le 14 mars 1858, le sieur Adam, combattant de la révolution, demande à jouir du bénéfice accordé par la loi aux décorés de la croix de Fer. »
Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette requête au ministre de l'intérieur.
- Ce renvoi est ordonné.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Maeseyck le 14 mars 1858, les membres de l'administration communale de Maeseyck demandent que cette ville soit reliée au canal de Maestricht à Bois-le-Duc, par un embranchement jusqu'à Neeroeteren.
Messieurs, l'administration communale de Maeseyck rappelle qu'elle a été la première à arborer le drapeau national au moment de la révolution en 1830, qu'elle a subi de très grandes pertes par suite des constructions et travaux sur la Meuse, et surtout des barrages établis sur cette rivière qui dans cette partie est devenue innavigable en toutes saisons ; qu'elle a subi encore de très grandes pertes par suite de l'exécution du traité des 24 articles, qui ont séparé cette ville de la partie cédée avec laquelle elle avait tous ses rapports industriels et commerciaux, et qui fait aujourd'hui partie du territoire hollandais.
Messieurs, le gouvernement pour récompenser cette ville de ses actes de patriotisme, lui a décerné un drapeau d'honneur. Après cela, la ville de Maeseyck, comme une récompense légère des pertes nombreuses, qu'elle a subies, sollicite de la législature et du gouvernement un embranchement du canal de Maeseyck à Neeroeteren qui la remettrait de nouveau en communication par une voie navigable avec le canal de Bois-le Duc à Maestricht et lui permettrait de rétablir ses rapports industriels et commerciaux avec les parties de la province cédées et d'autres localités du pays.
La commission, appréciant ces motifs, a l'honneur de proposer le renvoi de la pétition au ministre des travaux publics.
M. de Renesse. - Messieurs, déjà, sous la date du 7 octobre 1853, la députation permanente du conseil provincial du Limbourg, en exécution d'une décision prise par ledit conseil, s'était adressée à la législature pour appuyer la juste réclamation de la ville de Maeseyck, demandait la construction d'un embranchement au canal de Maestricht à Bois-le-Duc, qui aurait pour effet de rattacher cette ville à cette grande voie navigable.
Cette communication économique de transport relierait d'un côté la ville de Maeseyck à la plus grande partie de la Campine et à Anvers, et de l'autre, aux provinces de Liège, de Namur et de Luxembourg ; la retirerait, en outre, de l'isolement où elle se trouve sous le rapport de ses relations commerciales qui, actuellement, sont beaucoup moins faciles et plus coûteuses par suite de la mauvaise navigabilité de la Meuse pendant plusieurs mois de l'année, où parfois les bateaux, par le manque d'eau, ne peuvent transporter que le quart de leur charge.
Par suite de l'exécution du traité de paix de 1839 avec la Hollande, la ville de Maeseyck est dans une position tout exceptionnelle qui mérite d'être prise e sérieuse considération ; c'est la ville de la province de Limbourg qui a été la plus froissée dans tous ses intérêts, ayant perdu une forte partie des communes de son district, situées sur la rive droite de m Meuse ; aussi, avant 1839, cette ville était l'entrepôt d'un commerce très considérable et très prospère, tant en denrées coloniales qu'en autres produits des différentes industries de la Belgique.
L'exécution du traité a fait perdre à la ville de Maeseyck toutes ses anciennes relations commerciales avec les communes d'outre-Meuse, entravées actuellement par la ligne douanière, dont elle était affranchie auparavant ; le gouvernement et la Chambre, prenant alors en considération la position si fâcheuse de cette ville, par suite du morcellement du Limbourg, avaient jugé convenable, pour lui accorder une certaine compensation, d'y établir un commissariat d'arrondissement ; mais, quelques années après, on oubliait déjà les sacrifices que Maeseyck avait eu à supporter dans l'intérêt de la généralité du pays, et dans un but d'économie très préjudiciable aux véritables intérêts des habitants de cet arrondissement, ce commissariat fut adjoint à celui de Hasselt ; ce qui force maintenant les administrés de cette contrée de faire un beaucoup plus long voyage, par conséquent, plus de dépenses pour les affaires à traiter personnellement avec leur nouveau commissaire au chef-lieu de la province de Limbourg.
L'exécution de ce petit canal d'embranchement à celui de Maestricht à Bois-le-Duc ne coûtera pas une somme très importante au trésor public ; il pourrait être effectué avec les ressources ordinaires du budget des travaux publics, en reportant la dépense à en résulter, sur une couple d'exercices ; ce canal serait, en outre, d'une grande utilité pour les irrigations dans la Campine, surtout si les eaux de la Meuse pouvaient être prises au moment de la forte crue des eaux de ce fleuve.
Lorsque l'Etat a dépensé des sommes très considérables depuis 1830 pour de grands travaux publics, dans presque toutes les parties du pays, lorsqu'il a accordé des garanties d'intérêt, pour un certain nombre de chemins de fer et pour la navigation transatlantique, lorsque surtout, la ville de Maeseyck n'a jusqu'ici que peu d'espoir d'être reliée directement à l'intérieur du royaume, par l'une ou l'autre voie ferrée, l'on peut, par des considérations de haute équité et de justice distributive, demander que cette ville soit retirée de son isolement et que les Chambres et le gouvernement accueillent avec faveur sa juste réclamation, dont le conseil provincial du Limbourg a déjà été l'interprète auprès du pouvoir législatif en 1853, « en appréciant tout le fondement de la demande de Maeseyck et en s'associant aux vœux ardents de cette malheureuse localité qui a tant souffert des événements politiques qui ont fait le bonheur du reste de la Belgique. »
En appuyant la réclamation de la ville de Maeseyck, dont la position tout exceptionnelle a déjà attiré l'attention du gouvernement, puisqu'il a pris antérieurement l'engagement de construire le petit embranchement de Maeseyck au canal de Maestricht à Bois-le-Duc, j'ose espérer que le ministère actuel voudra bien prendre une décision à cet égard le plus tôt que faire se pourra, pour que cette malheureuse ville, tant froissée dans tous ses intérêts depuis 1839, puisse enfin être retirée de son isolement et obtenir une communication facile et économique vers l'intérieur du royaume.
M. Vilain XIIII. - Les paroles obligeantes que vient de prononcer mon honorable ami et collègue limbourgeois me laissent très peu. de chose à ajouter.
Je me bornerai à dire que la pétition des membres de l'administration communale de Maeseyck, sur laquelle vous venez d'entendre le rapport, est pour ainsi dire une lettre de rappel, adressée à la Chambre nouvellement élue. La ville de Maeseyck désire qu'on se souvienne qu'il y a eu des engagements pris à son égard en 1851 par la Chambre et par le gouvernement.
Vous vous rappelez, messieurs, qu'à cette époque la Chambre adopta une loi de travaux publics, où tous les arrondissements de la Belgique ont obtenu quelque faveur, les uns un chemin de fer, d'autres un canal, une garantie d'intérêt ou des routes, tous enfin ont eu quelque chose» Maeseyck seul n'a rien obtenu, à cause de sa position géographique, qui ne permettait pas de relier son territoire à un chemin de fer.
Cette ville méritait cependant la bienveillance du gouvernement, car il n'est pas de localité en Belgique qui ait plus souffert qu'elle, par suite de la conclusion du traité de paix avec les Pays-Bas.
La ville de Maeseyck s'est adressée en 1851 à la Chambre ; elle a exposé sa position et exprimé le désir d'obtenir une part dans les crédits demandés pour des travaux dont devaient profiter un nombre considérable d'autres localités. Sa pétition a été renvoyée à M. le ministre des travaux publics et l'honorable M. Loos, rapporteur de la section centrale, s'est exprimé dans les termes suivants, à la séance du 23 août 1851 :
« Il serait équitable de chercher à faire quelque chose dans l'intérêt de Maeseyck. La section centrale appuierait, par exemple, avec empressement les propositions qui pourraient être faites pour relier Maeseyck au canal de Bois-le-Duc, créer ainsi en faveur de cette localité des moyens de transport économiques vers la Campine et Anvers d'une part, vers Liège et les provinces de Namur et de Luxembourg d'autre part.
La Chambre a accueilli cette ouverture avec bienveillance et le gouvernement a partagé son sentiment. Le gouvernement a donné une preuve de ses bonnes dispositions à l'égard de la ville de Maeseyck, et a ordonné les études nécessaires. Ces études sont faites, les plans sont terminés, les devis dressés. Il n'y a donc plus qu'à mettre la main à (page 814) l'œuvre. C'est là, je le sais, la grosse affaire. Aussi ne demandons-nous pas à la Chambre qu'elle vote immédiatement les crédits nécessaires ; nous désirons seulement rappeler à la Chambre nouvelle les engagements qui ont été pris en 1851, afin que, quand de nouveaux crédits seront demandés, nous ne soyons pas oubliés.
- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.
M. Vander Donckt, rapporteur. - Par pétition datée de Neufchâteau, le 25 mars 1858, des instituteurs du canton de Neufchâteau prient la Chambre d'améliorer leur position.
Messieurs, comme M. le ministre de l'intérieur nous a déjà proposé, au budget qui sera incessamment soumis à nos délibérations, une augmentation pour améliorer le sort des instituteurs communaux, la commission a cru pouvoir se borner à proposer le renvoi pur et simple à cet honorable ministre.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Lelièvre. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission qui a été chargée d'examiner le titre II du livre II du Code pénal.
- Ce rapport sera imprimé et distribué, le jour de 1a discussion en sera ultérieurement fixé.
M. Vander Stichelen. - J'ai l'honneur de présenter le rapport de la commission qui a examiné le titre I du livre II du Code pénal.
- Même décision.
M. Vander Stichelen. - J'ai, messieurs, à vous présenter le résultat de l'examen qu'a fait la section centrale des amendements au projet de loi sur les conseils de prud'hommes qui lui ont été renvoyés.
A l'article 2, qui porte « qu'un conseil de prud'hommes peut être établi, par arrêté royal, dans toute localité où cette institution est jugée nécessaire, » l'honorable M. Muller a présenté l'amendement suivant :
« Remplacer le premier paragraphe de l'article 2 par le suivant : Tout conseil de prud'hommes doit être établi pur une loi, qui détermine le nombre des membres, la composition et le ressort des conseils. »
Vous vous rappellerez, messieurs, que cet amendement a été proposé pour trancher la question de constitutionnalité, question qui, d'après l'honorable M. Muller, était engagée dans notre article.
Vous vous rappellerez également que cette question avait été traitée déjà dans le rapport que j'ai eu l'honneur de vous présenter. Les membres qui, au sein de la section centrale, se sont prononcés en faveur de la constitutionnalité de notre projet, ont maintenu cette opinion ; mais par mesure de transaction, transaction parfaitement licite en cette circonstance, ils se sont ralliés en principe à l'amendement de l'honorable M. Muller. La section centrale vous propose donc la rédaction suivante :
« Art. 2. Aucun conseil de prud'hommes ne peut être établi que par une loi, qui en détermine en même temps le ressort. Un arrêté royal régle le nombre des membres et la composition de chaque conseil.
« Seront entendus au préalable, etc. » (Comme à l'article.)
Ainsi, messieurs, pour l'institution d'un conseil de prud'hommes quelconque, il faudra une loi ; cette loi déterminera en même temps le ressort du conseil. A la suite de la loi qui institue un conseil de prud'hommes, vient un arrêté royal qui détermine le nombre de membres et leur division par professions. L'arrêté royal devra être précédé de certaines informations à prendre par le gouvernement, lesquelles sont spécifiées dans le paragraphe 3 actuel de l'article 2.
La section centrale admet donc en principe qu il faut une loi pour l'institution u'un conseil de prud'hommes. Mais il y a les eon-eils* de prud'hommes aujourd'hui existants. Ces conseils, eu ver<u d un article final nui sera présenté, sont maintenus. Il y a d'autres cons-ils qui pouvaient être institués en vertu.de la loi de 1-42. Il sera stipulé par le même art de que tous les conseils de prud'homm^ s qu. étaient mentionnés dans la loi de 1842 et qui ne seraient, pas encore établis, pourraient l'eirc par le gouvernement lorsqu'il le jugerait uti e.
Enfin pour les conseils de prud'hommes qui n'existeraient pas ou qui ne seraient pas compris dans la nomenclature de la loi de 1842 et qui sera répétée dans l'article dont nous avons eu l'honneur de parler, il est entendu qu'il faudrait, pour l'institution de chacun, une loi spéciale.
L'article 3 du projet porte que par chefs d'industrie, on entend les fabricants ou les directeurs-gérants d'industrie, etc.
M. David et Grosfils demandent qu'on entende également par chef d’industrie les artisans travaillant pour leur propre compte.
La section centrale n'accepte pas cet amendement qu'elle croit inutile. Elle pense que la valeur usuelle et légale des mots chefs d'industrie est telle, que les mots contiennent pro facto les artisans travaillant pour leur propre compte, s'ils emploient la matière qui leur appartient.
L'article du projet porte : « Il est nommé, près de chaque conseil, quatre suppléants au moins et huit au plus, choisis comme il est dit ci-dessus, à l’effet de remplacer les prud'hommes en cas d'empêchement. »
MM. David et Grosfils proposent à cet article l'amendement suivant :
« Les suppléants siègent à tour de rôle, en commençant par le plus âgé parmi les chefs d'industrie en remplacement d'un chef d'industrie. et parmi les ouvriers en remplacement d'un ouvrier. »
La section centrale rejette encore cet amendement, elle croit qu'il serait de nature à introduire des complications nombreuses et parfaitement inutiles dans la pratique.
L'article 6 est ainsi conçu :
« Des listes provisoires des électeurs, choisis parmi les catégories énumérées à l'article 3, sont dressées par les administrations communales dans leurs circonscriptions respectives. La liste générale est arrêtée par la députation permanente du conseil provincial du 1er au 15 août. La députation permanente statuera en même temps sur les réclamations qui pourraient lui avoir été adressées. »
MM. David et Grosfils proposent de substituer aux mots : « Les administrations communales » l'expression : « Les conseils communaux. » La section centrale, messieurs, n'a pu accueillir non plus cet amendement. Elle pense que faire dresser par les conseils communaux eux-mêmes la liste des électeurs est une chose encore une fois pratiquement impossible et non désirable.
Au même article MM. David et Grosfils proposent d'ajouter à la suite des mots : « Du 1er au 15 août » le paragraphe suivant :
« Elle porte 90 p. c. au moins des électeurs figurant sur les listes provisoires. »
Cette partie de l'amendement a eu le même sort que la première partie, c'est-à-dire que la section centrale ne s'y est point ralliée.
Elle ne s'y est point ralliée surtout par cette considération-ci : dans le ressort d'un conseil de prud'hommes chaque administration communale dresse la liste des électeurs à son point de vue particulier ; si vous exigiez que la liste définitive porte au moins 90 p. c. des noms de la liste provisoire, il arriverait qu'une commune peu importante eu égard à sa population et à son industrie serait plus fortement représentée qu'une commune beaucoup plus importante dont l'administration aurait été plus réservée dans la rédaction de la liste provisoire.
M. Lelièvre avait proposé un amendement à l'article 8, mais il l'a retiré.
L'article 12 du projet de la section centrale porte :
« Les membres du conseil ne peuvent être parents jusqu'au troisième degré inclusivement ; si des parents à ce degré sont élus au même tour de scrutin, celui qui a obtenu le plus de voix est seul admis ; en cas de parité des suffrages le plus âgé est préféré. »
L'honorable M. Lelièvre a fait remarquer que dans cet article il n'est pas question de la parenté par alliance, et il propose une nouvelle rédaction qui a été adoptée par la section centrale avec une modification. La rédaction arrêtée de commun accord entre M. Lelièvre et la section centrale est celle-ci :
« Les membres du conseil ne peuvent être parents ou alliés jusqu'au deuxième degré inclusivement. »
L'honorable M. Lelièvre avait proposé un dernier paragraphe ainsi conçu :
« Il en sera de môme pour ceux dont les femmes seraient parentes entre elles jusqu'au deuxième degré inclusivement. »
La section centrale l'a engagé à retirer cette partie de son amendement, ce qu’il a fait.
A l'article 25, l'honorable M. H. de Brouckere a proposé un amendement qui porte également sur l'article 33.
L'article 25 dispose que le président et le vice-président du conseil de prud'hommes sont nommés par arrêté royal parmi les membres du conseil. L'honorable M. H. de Brouckere propose de dire que la présidence sera déférée de droit au juge de paix ou à l'un de ses suppléants.
La section centrale n'a pas admis cette grave modification au projet de loi ; elle a pensé, d'une part, que l'importance des affaires habituellement soumises aux conseils de prud'hommes, non seulement ne commandait pas, mais ne permettait même pas d'y introduire la solennité de sa magistrature. D'autre part, que l'autorité paternelle dont les conseils de prud'hommes doivent être investis pour remplir leur mission n'exigeait pas la présence d'un juge proprement dit au sein de ces conseils.
Les deux autres modifications proposées par l'honorable M. H. de Brouckere portent sur l'article 33.
L'article 33 du projet du gouvernement stipule que le conseil ne peut siéger au nombre de moins de quatre membres.
Le projet du gouvernement ne se préoccupe donc pas du nombre relatif de membres patrons et de membres ouvriers qui devraient faire acte de présence. L'honorable M. H. de Brouckere entend, au contraire, que, dans tous les cas, l'élément patron et l’élément ouvrier soient représentés d'une manière égale, non pas seulement dans la composition primitive, originaire du conseil, mais encore dans le nombre des membres présents, chaque fois que le conseil siège pour rendre des jugements.
De plus, l’honorable membre fixe d’une manière uniforme le nombre des membres présents, qu'il limite à 4 non compris le président, qui, dans son système, serait le juge de paix ou l'un de ses suppléants.
La section centrale a préféré encore sur ce point, par des motifs qui pourront être déduits ultérieurement avec plus de développement, maintenir le projet du gouvernement.
L'article 55 du projet s'occupe de la compétence, quant aux matières, des conseils de prud'hommes. MM. Magherman et Janssens proposent d'ajouter à cet article la disposition suivante :
« Ils (les conseils de prud’hommes) connaissent, dans les mêmes limites, des contestations entre chefs d'industrie relatives aux obligations qui leur sont imposées par les dispositions légales en matière de livrets d’ouvriers. »
MM. A. Vandenpeereboom et de Paul proposent d'ajouter au même article ce qui suit :
(page 815) « Les conseils de prud'hommes connaissent aussi des plaintes en contrefaçon de dessins de fabrique, soit entre fabricants, soit entre fabricants et entrepreneurs, facteurs, ouvriers ou ouvrières. »
Cette double modification est également des plus importantes ; elle tend à investir les conseils de prud'hommes d'un genre tout particulier d'attributions ; elle tend à faire décider par les prud'hommes certaines contestations, soit entre patrons, soit entre fabricants, ouvriers, qui ne leur sont soumises ni par le projet nouveau ni par la loi actuelle ; il s'agit presque de changer le caractère des conseils de prud'hommes.
La section centrale ne s'est pas prononcée sur le fond ; il y a là des questions qu'on ne doit pas vider incidemment : elle n'a pas cru devoir introduire ces dispositions dans le projet de loi en discussion ; il y a lieu, selon elle, d'ajourner la solution des questions que ces amendements font naître.
C’est-à-dire que comme il est plus que probable que très prochainement il sera présenté un projet de loi sur les marques et dessins de fabriques et sur les livrets d'ouvriers, la section centrale pense qu'il sera plus naturel d'examiner alors les points que soulèvent les amendements dont il s'agit.
A l'article 47 l'honorable M. Lelièvre propose un changement de rédaction du paragraphe 2. Il porte : Lorsque le tumulte a été accompagné d'injures ou voies de fait donnant lieu à l'application ultérieure de peines correctionnelles ou de police, ces peines peuvent être séance tenante et immédiatement après que les faits ont été constatés, prononcées, savoir : celles de simple police sans appel et celles de police correctionnelle à la charge de l’appel.
L'honorable M. Lelièvre propose la rédaction suivante :
« Lorsque le tumulte a été accompagné d'injures ou de voies de fait, donnant lieu à l'application ultérieure de peines de simple police, ces peines peuvent être prononcées séance tenante et immédiatement après que les faits ont été constatés. »
Celte nouvelle rédaction tend à supprimer dans ce paragraphe l'application d'une peine correctionnelle par les conseils de prud'hommes. D'après l'auteur, les conseils de prud'hommes ne seraient plus compétents que pour prononcer des peines de sîmple police.
La section centrale a accueilli cet amendement.
L'honorable M. L eièvre a également proposé un changement de rédaction à l'article 58. Cet article porte :
« L'exécution provisoire des sentences peut être ordonnée avec ou sans caution jusqu’à concurrence de 200 fr. Au-dessus de 200 fr. ces sentences sont exécutoires par provision moyennant caution. »
M. Lelièvre propose, de dire : « Au-dessus de 200 fr. ces sentences peuvent-être déclarées exécutoires par provision moyennant caution. »
La rédaction du projet est fautive en ce sens qu’en se montrant un peu rigoureux, on pouvait en conclure qu'au-dessous de 200 fr. l'exécution provisoire était facultative et qu'au-dessus elle était obligatoire. Telle n'a pas été l'intention du gouvernement qui a proposé, ni de la section centrale qui a adopté la disposition du projet.
Reconnaissant donc que la rédaction n'était pas correcte, la section centrale a dû lui en substituer une autre, précisant qu'au-dessus de 200 fr. l'exécution provisoire pouvait être prononcée facultativement, mais moyennant caution. Voici celle à laquelle elle s'est arrêtée :
« L'exécution provisoire des sentences peut être ordonnée avec ou sans caution, jusqu'à concurrence de 200 fr. Au-dessus de 200 fr., ces sentences ne peuvent être déclarées exécutoires que moyennant caution. »
L'honorable M. Lelièvre s'est rallié à cette rédaction.
Enfin l'article 62 de la section centrale énumère les différentes causes de récusation qui pourront être invoquées par les parties.
M. Lelièvre propose d'introduire une cause nouvelle de récusation, empruntée au code de procédure. La section centrale n'a pu que se rendre aux motifs qui ont été présentés à l'appui de cette modification.
Il propose d’insérer un n°4° nouveau ainsi conçu :
« S'il y a procès civil existant entre eux et l'une des parties ou son conjoint. »
La section centrale de son côté pense qu'il y a lieu d'ajouter à l'article un n°6° ainsi conçu :
« Quand ils sont patrons ou ouvriers de l’une des parties en cause. »
Telles sont 1es différentes modifications que la section centrale propose.
(page 823) M. Ch. de Brouckere. - Messieurs, je me bornerai à présenter quelques courtes observations qui motiveront mon vote négatif sur le projet de loi si l'on ne modifie pas les amendements que vient de présenter la section centrale.
L'institution des prud'hommes est appréciée d'une manière fort différente par les divers membres de cette Chambre comme par les diverses localités du pays.
Cette institution a reçu la consécration du temps, particulièrement dans les Flandres, et elle y fonctionne très bien ; dans d'autres parties du pays, où elle n'a pas fonctionné, on la redoute.
Un de nos collègues vous a présenté ses scrupules relativement à l'article 2 ; je croyais qu'on y aurait fait complétement droit ; la section centrale donne un droit à certaines localités, elle enlève à d'autres tout ce qu'elles pouvaient gagner par l'amendement. Elle admet l'amendement pour les localités où jamais on ne s'est prononcé sur les conseils de prud'hommes, mais elle dit que le gouvernement pourra en établir partout où la loi de 1842 a prévu qu'il pourrait y en avoir.
Je comprendrais qu'on eût dit que là où ces conseils fonctionnent, ils pourront continuer à fonctionner sans nouvelle loi ; mais là où ils n'ont jamais fonctionné, comme à Bruxelles, où il n'y en a jamais eu, je ne comprendrais pas que le gouvernement pût en établir si bon lui semblait.
Je ne demanderais pas une loi si l'on ne pouvait pas instituer de conseils de prud'hommes contrairement à l’avis de la chambre de commerce et du conseil communal, et si le gouvernement n'avait pas la faculté de déterminer l'étendue du ressort. Je n'admets pas que le gouvernement puisse déterminer l'étendue d'un ressert de conseil de prud'hommes.
La loi de 1842 permet l'établissement d'un conseil de prud'hommes à Bruxelles ; je l'admettrais donc pour Bruxelles, mais seulement pour la ville ; je le refuserais s'il devait avoir pour ressort l'arrondissement qui compte 400,000 âmes, qui est beaucoup plus peuplé que plusieurs de nos provinces. Si j'avais la certitude que le conseil n'étendrait pas son ressort hors des limites de Bruxelles, dont la population s’élève à 160,000 âmes, ce qui donnera un travail incessant à un conseil de prud’hommes ; je ne dirais rien ; mais si on lui donne des attributions tellement onéreuses qu'il s'en dégoûte dès l'origine, nous aurons une institution sans force et sans portée.
De deux choses l’une : je demande ou que l'on ne puisse établir un conseil de prud'hommes, dans une localité, qu'en vertu d'une loi, ou que là où l'on voudra en établir on fixe par une loi l'étendue du ressort, que le gouvernement ne puisse pas étendre le ressort à volonté.
Je passe à l'article 34 et j'y relève une erreur qui doit avoir échappé à la plume du rédacteur. D'après cet article, on fait prêter serment entre les mains de la députation permanente. Habituellement on prête serment entre les mains du gouverneur de la province ; mais je ne sache pas qu'on ait fait prêter serment entre les mains de la députation permanente. Il faudra donc modifier la rédaction de l'article, pour corriger cette erreur.
Ce qui est plus sérieux, c'est l'article 33. La section centrale ne veut pas de l'amendement que mon frère a proposé. Eh bien, cet article est, à mes yeux, la chose la plus exorbitante qui se puisse concevoir. Quoi ! dans telle localité vous serez jugé par quatre juges, dans telle autre vous serez, pour le même fait, jugé par 16 juges. Messieurs, quand vous organisez des tribunaux, à quelque ordre, qu'ils appartiennent, quand vous organisez des corps quelconques, vous fixez le nombre de membres de ces corps, à raison du nombre d'affaires dont ces corps peuvent être chargés. Si vous avez à Bruxelles un tribunal de première instance composé de vingt juges, tandis qu'il n'y en a que cinq à Charleroi, par exemple, c'est qu'il y a matière à travailler quatre fois plus à Bruxelles qu'à Charleroi ; mais vous ne faites pas juger chaque affaire par vingt juges à Bruxelles, par cinq à Charleroi ; vous composez plusieurs chambres qui se partagent la besogne.
Il y a quelque chose de réellement exorbitant dans cette disposition d'après laquelle, à Bruxelles, il y aura au moins huit juges, et ce nombre pourra être porté à 16 ; tandis que dans telle autre localité il n'y aura que quatre juges. Pour moi, je ne comprends pas une justice rendue d'une manière aussi inégale que celle-là. Je ne veux pas revenir surtout ce qui a été dit à cet égard ; il est possible que cela soit peu important pour les localités qui sont habituées aux conseils de prud'hommes ; mais dans celles où il n'y en a pas eu jusqu'à présent, figurez-vous un conseil de prud'hommes composé de sept ouvriers et d'un patron, appelé à juger un patron. Il est bien certain que si le patron n'a pas caressé ses ouvriers pendant tout le temps où ceux-ci ont été à son service, il sera infailliblement condamné. Des tribunaux de cette nature ne sont pas éclairés comme les tribunaux ordinaires ; il faut les prendre avec leurs passions et tout le bagage des infirmités morales de l'homme. Eh bien, je ne puis pas comprendre une justice rendue par un nombre inégal de patrons et d'ouvriers ; je ne veux pas plus de l'oppression de l’ouvrier par le patron que de l'oppression du patron par l'ouvrier ; et je déclare que je voterai contre la loi, si l'on ne stipule pas que toutes les fois qu'il y aura un jugement à rendre, il faudra qu'il y ait parité de patrons et d'ouvriers.
Enfin, je n'adopterai jamais la loi, tant qu’elle consacrera la peine de l'emprisonnement. Vous aurez beau cacher la chose en la décorant du nom d'arrêt : ce sera toujours, en réalité, un véritable emprisonnement. Pour rendre l’exécution de cette disposition possible, il faudra affecter une maison spéciale à cette destination ; or, une maison où l'on enferme est une prison. A Bruxelles, nous avons aussi des maisons où l'on enferme certains individus ; et je ne pense pas qu'il soit jamais venu à la pensée d'aucun d'eux de dire qu'ils avaient été aux arrêts, quoique la maison porté légalement le nom de maison d'arrêt.
Ainsi, messieurs, je voterai contre la loi si, pour rendre les jugements, il n'y a pas autant de patrons que d'ouvriers ; je voterai contre la loi s'il peut dépendre d’un hasard qu'il y ait 4, 6, 8,10 et jusqu'à 16 juges ; enfin, je voterai contre la loi si la peine de l'emprisonnement est laissée à la discrétion des conseils de prud'hommes.
Je n'entretiendrai pas la Chambre plus longtemps. Ces observations me paraissent suffisantes pour justifier le vote que j'émettrai.
(page 815) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je tiendrais beaucoup à ce que l'honorable préopinant voulût bien donner son adhésion à la loi. C'est pourquoi je vais tâcher de répondre aux objections qu'il a présentées.
L’honorable membre redoute l’établissement de conseils de prud’hommes dans quelques localités. Mais, messieurs, il est très facile de le rassurer à cet égard ; on n’imposera de conseils à aucune localité.
M. Ch. de Brouckere. - La loi ne dit pas cela.
M. Muller. - Qu'on le mette dans la loi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). Mais, messieurs, il tombe sous le sens commun que le gouvernement n'ira pas établir de conseil de prud'hommes là où l’on n'en voudra pas.
M. Ch. de Brouckere. - Vous ne serez pas toujours ministre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est probable ; mais comme il s'agit d'institutions dues à l'initiative des localités, il n'est pas raisonnable de supposer qu'on les imposera à des localités qui n'en voudraient pas.
Mais, dit-on, il est dangereux de fixer par arrêté royal le ressort des conseils. Comment, messieurs, les choses se passeront-elles ? Le gouvernement s'entendra avec les localités qui demanderont des conseils, pour en fixer le ressort de commun accord avec elles.
Et que ferait l'honorable bourgmestre de Bruxelles, si, le ressort était fixé par une loi, contre laquelle la commune de Bruxelles aurait beau se regimber ?
M. Ch. de Brouckere. - Je me soumettrais à la loi.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Eh bien, ne vaut-il pas mieux qu'elle s'entende avec le gouvernement pour établir le ressort qui paraîtra le plus convenable, que de devoir se soumettre bon gré mal gré à une loi contre laquelle on aurait protesté ?
Ainsi, au point de vue des garanties, mieux vaut laisser déterminer le ressort de commun accord entre le gouvernement et les localités intéressées, que de le fixer par la loi.
Il y aurait d'ailleurs à cela un inconvénient pratique : il pourrait arriver qu'une commune, à cause du nombre de ses habitants ou par suite de l'établissement d'une industrie nouvelle sur son territoire, dût être ajoutée au ressort du conseil. Faudra-t-il pour ce cas-là que le gouvernement vienne occuper la Chambre d'une loi ayant pour but d'agrandir le ressort de la commune nouvelle ?
Du reste, ce sont là des questions de peu d'importance et dont la solution, quelle qu'elle soit, ne doit pas influer sur le vote de la loi tout entière ; la loi n'est pas dans ces détails-là.
II est d'autres motifs encore qui engageront l’honorable préopinant à repousser la loi. L'un d'eux, c'est l'inégalité possible du nombre des juges d'un conseil à l'autre.
Quand a-t-on vu. dit-il, la justice rendue ici par six juges, là par huit ou même seize ? Mais, messieurs, on pourrait lui citer plus d'un exemple de cette inégalité. En second lieu, dans l'organisation judiciaire, dans certaines localités, il est absolument indispensable d'avoir un plus grand nombre de juges, parce que le nombre d'affaires à examiner y est à la fois plus varié et plus considérable.
L'honorable préopinant, qui est un homme essentiellement pratique, voudra bien ne pas perdre de vue que la grande occupation, le rôle essentiel des conseils de prud'hommes n'et pas dans le conseil lui-même, mais dans le bureau de conciliation.
J’ai dit hier, pour ne rien exagérer, que les neuf dixièmes des affaires viennent se résoudre au sein des bureaux de conciliation. J'aurais pu aller plus loin ; j'aurais pu dire que 5 p. c. des affaires à peine sont produites devant les conseils de prud’hommes.
L'honorable préopinant voit encore une grande défectuosité dans la loi, parce que, dit-il, les deux catégories de juges, les ouvriers et les patrons, pourront, le cas échéant, juger étant en nombre inégal. C'est une observation qu'il a empruntée à l'honorable M. Henri de Brouckere.
Eli bien, s'il ne veut adopter la loi qu'à la condition que toujours il siégera, en nombre égal, au sein des conseils de prud'hommes, des ouvriers et des patrons, bien certainement il ne peut donner un vote affirmatif ; car il est impossible de faire une pareille promesse.
En effet, et en règle générale, je crois qu'il y aura un nombre égal de patrons et d'ouvriers, mais il peut arriver des circonstances où l'une des deux fractions s'abstienne totalement de paraître au sein d'un conseil. Que ferez-vous-dans ce cas ? Allez-vous suspendre la justice, parce qu'il aura plu à l'un des deux éléments qui composent le tribunal de ne pas paraître ?
Vous remettriez donc l'exécution de la loi au caprice, à l'arbitraire d'un certain nombre de juges ? Cela n'est pas possible, et c'est ce qui peut cependant arriver. Si l’on suppose qu'une décision doit être rendue en sens contraire à tel ou tel intérêt, l'intérêt qui croirait pouvoir être lésé, ne paraîtrait pas, et la justice serait interrompue devant ce conseil de prud'hommes.
Ainsi, ce qu'on demande n'est pas praticable ; cette exigence n'est pas raisonnable ; il serait impossible de lui donner satisfaction ; et si l'honorable membre subordonne mn vote à la réalisation de ce que j’appelle une chimère, il votera contre la loi ou il voudra bien nous indiquer le moyen d'atteindre le but qu'il regarde comme essentiel.
Je le prie de nous dire comment il parviendra à avoir toujours les deux éléments en nombre égal dans un conseil de prud’hommes, lors que les ouvriers ou que les patrons refuseraient d'y paraître.
Enfin, messieurs, il y a une disposition qui offusque également l’honorable préopinant ; c'est la disposition qui dans certains cas autorise le conseil de prud'hommes à condamner aux arrêts. Vous avez beau parler d'arrêts, dit-il, il s'agit d'emprisonnement. Or, il est tout à fait exorbitant que les ouvriers aient la prérogative de pouvoir condamner les maîtres à la prison.
Je reconnais qu'il serait fort feu agréable pour des maîtres d’être condamnés à la prison par leurs ouvriers. Mais en réalité de pareils faits se passeront-ils ? Et d’abord les arrêts sont-ils l’emprisonnement ? En aucune manière. Les arrêts ne sont pas non plus une invention du projet (page 816) de loi. Les arrêts sont une mesure ancienne, renouvelée par la loi de 1842. Or, parcourez les comptes rendus des divers jugements rendus par les conseils de prud'hommes ; vous remarquerez qu'on a usé très rarement de cette disposition ; mais dans certains cas elle est utile.
Loin d'être une sévérité nouvelle dans la loi, c'est plutôt un adoucissement dans le régime pénal. Il est tel petit délit, et c'est ce que la loi même appelle des infidélités, commis par l'apprenti, par l'ouvrier, qu'il serait trop rigoureux de porter devant la justice ordinaire. Eh bien, pour ces petits délits, pour ces manquements, le conseil de prud'hommes agit comme le conseil de discipline dans la garde civique. Il condamne à un jour ou deux d'arrêts. Il est même arrivé que le conseil de prud'hommes, qui est un conseil de famille, a condamné des ouvriers ou des ouvrières, pour de légères infractions, à quelques heures d'arrêt.
Voilà comment les choses se passent. Il n'y a pas d'emprisonnement, il n'y a pas de verrous. Il y a une salle spéciale annexée au conseil de prud'hommes, et dans laquelle on enferme le délinquant. Ce n'est pas plus horrible ni plus terrible que cela. Il n'y a donc pas dans cet emprisonnement de quoi faire frémir l'honorable préopinant.
On suppose qu'il pourrait arriver, dans tels cas donnés, que les ouvriers s'amusassent à condamner leurs maîtres à deux ou trois jours d'arrêt. Je ne crois pas cette hypothèse réalisable. Mais en supposant qu'elle dût se réaliser, devez)vous en conclure qu'il faut retrancher du projet la disposition qui donne au conseil de prud'hommes le droit de condamner aux arrêts ? Je ne le crois pas.
Cette disposition est dans l'intérêt du maître comme dans celui de l'ouvrier. Si le conseil de prud'hommes ne peut punir des arrêts certaines fautes, ces fautes pourront être punies de la peine beaucoup plus rigoureuse, de la vraie prison.
Messieurs, nous discutons une loi où la part des ouvriers est assez libéralement faite. Ils sont devant et dans le tribunal sur le même pied que les patrons. Les manquements du patron vis-à-vis de l'ouvrier sont aussi du ressort de ce tribunal de paix, comme les manquements de l'ouvrier vis-à-vis du patron. Cela n'est que juste. Mais il faut aussi que l'esprit de discipline préside de l'exécution de cette loi. Il faut que les fautes soient réprimées avec une certaine douceur ; mais il faut qu'elles soient réprimées et si vous n'avez pas la mise aux arrêts pour certaines fautes, que vous restera-t-il ? Rien. Comment pourrez-vous réprimer ces fautes légères qui se commettent entre ouvriers et maîtres ? Les punirez-vous de l'amende ?
Car ce serait un autre genre de peine qui pourrait devenir excessivement dur pour l'ouvrier. Si vous repoussez la mise aux arrêts, dites que les fautes légères seront impunies ; ou bien dites que vous n'admettez les arrêts que pour les ouvriers, et que vous réservez d'autres peines pour les maîtres, que vous réservez l'amende. Reste à savoir si la Chambre consentira à introduire deux catégories de peines, suivant la catégorie de délinquants.
Je crois, messieurs, avoir répondu aux diverses observations de l'honorable préopinant. Je lui donne d'avance l'assurance que si le conseil communal de Bruxelles...
M. Ch. de Brouckere. - Je ne parle pas ici comme bourgmestre de Bruxelles.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je lui donne l'assurance que si le conseil communal de Bruxelles ne demande pas un conseil de prud'hommes, si la chambre de commerce n'en demande pas, si les organes naturels des ouvriers et des patrons n'en demandent pas, il ne sera pas établi de conseil de prud'hommes à Bruxelles, je lui en donne l'assurance positive et je crois qu'il peut être parfaitement tranquille à cet égard sous toutes les administrations possibles.
Quant à moi, si j'avais l'honneur d'être bourgmestre de Bruxelles, loin d'attaquer la loi ou de la repousser par de frivoles motifs, je l'appuierais de toutes mes forces.
C'est surtout dans les grandes villes que les conseils de prud’hommes peuvent être très utiles dans certains moments. A Paris, les conseils de prud'hommes jouent, un rôle très utile et ils sont en assez grand nombre. Si j'avais l'honneur de présider à l'administration de la ville de Bruxelles, je voudrais non pas un, mais plusieurs conseils de prud’hommes dans la capitale.
S'il y a des villes qui ne veulent pas de conseils de prud'hommes, j'ai ici, sous les yeux, les noms d'autres villes qui en demandent ; il y en a 5 ou 6 qui sont en instance pour en obtenir et le gouvernement attend le vote de cette loi, la consécration des principes nouveaux qu'elle renferme pour instituer des conseils de prud'hommes là où l'on en demande. Quant aux localités qui n'en demanderont pas, elles n'en auront pas.
M. Ch. de Brouckere. - Je n'ai pas dit que je repoussais les prud'hommes, je n'ai pas dit que je les redoutais, j'ai dit uniquement que je ne me prononçais pas relativement à Bruxelles.
M. Van Overloop. - Messieurs, je suis partisan des conseils de prud’hommes, qui ont pour but d'établir l'harmonie entre les maîtres et les ouvriers. J'en suis d'autant plus partisan, que c'est une institution véritablement nationale, et la Chambre me permettra à cet égard de lire quelques lignes d'un ouvrage intitulé : Manuel des prud'hommes.
« L'institution des Prud'hommes, ou Prudes-gens, née et confondue avec le pouvoir municipal, remonte comme celle-ci aux premiers temps de l'affranchissement des communes, sous les règnes de Philippe d'Alsace, premier législateur des Flandres et de l'empereur Baudouin, fils de Baudouin VIII, qui réunit sous sa domination les pays de Flandre, du Hainaut et de Namur.
« Ces princes, ainsi que leurs contemporains, les évêques de Liège, les ducs de Brabant et de la Lotharingie, dans les diplômes qu'ils octroyèrent aux villes de la Belgique, posèrent successivement en principe, ou reconnurent la liberté individuelle, celle des transactions commerciales et le pouvoir électif de certains chefs et magistrats par le peuple. »
Ainsi, messieurs, l'institution des prud'hommes n'est pas pour nous une institution d'importation étrangère, c'est une institution véritablement nationale.
Comme l'avouait tantôt l’honorable bourgmestre de Bruxelles, cette institution fonctionne parfaitement dans les Flandres. Aussi suis-je d'avis, avec mon honorable collègue M. Janssens, qu'il importe de la développer autant que faire se peut.
Je suis donc partisan du projet de loi qui nous est soumis, puisqu'il a pour objet d'abord d'améliorer l'institution actuelle des prud'hommes, et en second lieu, d'étendre le bienfait de cette institution à de plus nombreuses catégories douvriers.
Mais, messieurs, si je suis partisan du projet de loi en principe, je suis loin de pouvoir approuver complétement toutes les dispositions qu'il renferme.
Je crois qu'on peut articuler contre le projet de loi des critiques générales, des critiques portant sur la loi considérée dans son ensemble et je crois aussi qu'on peut articuler contre le projet des critiques portant sur des dispositions particulières.
Quant au projet de loi considéré dans son ensemble, je crois qu'on aurait mieux fait de se borner à nous soumettre les dispositions qui ont pour objet d'améliorer la législation qui concerne l'organisation actuelle des prud'hommes et les dispositions qui sont relatives à l'extension de la juridiction des prud’hommes, à de plus nombreuses catégories d'ouvriers ; il me semble que pour le surplus il eût été préférable de maintenir la législation existante.
D'abord, messieurs, cela nous aurait fait gagner un temps considérable, car nous aurions évité ainsi l'examen de la moitié peut-être des dispositions du projet actuel. Nous n'aurions pas eu à nous occuper, par exemple, de la question de l'emprisonnement ou des arrêts ; car les arrêts existent depuis 1810, et ils ont été maintenus par la loi de 1842. Pourquoi donc avions-nous besoin de discuter de nouveau cette question ? Si on ne nous avait pas proposé d'adopter un article de loi déjà en vigueur, nous n'aurions pas à nous occuper aujourd'hui de l'une des questions que vient de discuter l'honorable bourgmestre de Bruxelles, question au surplus sur laquelle je n'ai pas encore mon opinion arrêtée.
On me dira : Nous avons voulu réunir en une seule loi toutes les dispositions sur la matière. Mais, messieurs, si on voulait véritablement codifier, il suffirait d'un seul article pour toutes les dispositions des lois existantes qu'il n'était pas nécessaire de modifier ; on aurait pu dire : « Telles et telles dispositions sont maintenues, toutes les autres sont abrogées. »
Messieurs, quand on veut codifier, il me semble qu'il faut réunir, condenser toute la législation sur la matière ; or, il n'en est pas du tout ainsi, car le projet laisse de côté tout ce qui concerne les livrets d'ouvriers, tout ce qui est relatif aux marques de fabrique. La loi ne constituera donc pas ce qu'on pourrait appeler un Code de prud'hommes.
D'un autre côté, messieurs, il est dangereux de faire voter de nouveau des articles de lois qui sont déjà en vigueur, car on emploie souvent des mots nouveaux pour exprimer la même pensée et ces mots nouveaux pourraient s'interpréter dans un sens différent de celui que le législateur a voulu y attacher ; par cela seul qu'il s'est servi d'expressions nouvelles, on est porté à croire qu'il a voulu autre chose que ce qui existait auparavant.
Mais, enfin, messieurs, puisque le gouvernement a en l'intention de codifier, il faut au moins que la loi soit, autant que possible, complète et en harmonie avec la législation générale. Dans ce but, messieurs, et pour répondre à l'invitation qui a été faite par l'honorable ministre de l'intérieur dans la première séance, je me permettrai de soumettre à la Chambre une quantité assez considérable d'amendements, mais qui ne soulèveront pas de grandes difficultés.
J’en ai déjà fait part à l'honorable rapporteur. En général, ce sont tout simplement des amendements qui consistent à reproduire la rédaction du Code de procédure pour toutes les dispositions du projet qui sont extraites de ce Code. Je ne vois pas pourquoi, quand on maintient une disposition d'une loi existante, on doit se servir de termes nouveaux. Ces amendements portent donc bien plutôt sur la forme que sur le fond ; mais, je le répète, ils sont importants au point de vue de l’uniformité dans la rédaction des lois.
Je n'en dirai pas davantage pour le moment sur ces amendements ; la Chambre a décidé hier que tous les amendements proposés seraient renvoyés à la section centrale. Cette section examinera ceux que j’ai l'honneur de vous soumettre. Je ne fais aucune question d'amour-propre de leur adoption. Je les crois utiles, voilà tout.
Je ferai encore, messieurs, quelques observations sur trois dispositions particulières du projet de loi qui vous est soumis.
Je crains, avec mon honorable ami M. Janssens, que si l'on fait voter l'élément ouvrier et l'élément maître dans deux assemblées séparées, on (page 817) ne provoque des sentiments de défiance on ne laisse une porte ouverte à l'antagonisme, ce qui serait aller directement à l’encontre du but de l'institution des prud'hommes.
L'honorable rapporteur, rencontrant l'objection de mon honorable ami, a dit, si je ne me trompe, que le vote dans des assemblées séparées est une conséquence du but de l'institution, but qui est l'égalité. Je crois que l'honorable rapporteur a été complétement dans l’erreur en s'exprimant de cette manière ; le but essentiel de l'institution des prud'hommes est, non pas de consacrer l'égalité entre les ouvriers et les maîtres, mais d'établir l'harmonie entre les maîtres et les ouvriers ; et un moyen de réaliser ce but consiste à faire représenter, d'une manière égale, l'élément ouvrier et l'élément maître dans le conseil de prud'hommes. L'égalité, c'est le moyen, mais non pas le but.
Or, cette égalité de représentation sera maintenue, si vous adoptes le système de mon honorable ami, M. Janssens, aussi bien que si vous adoptez le système proposé par le projet de loi.
Je me demande : Pourquoi changer ce qui est ? Se plaint-on de l'état actuel des choses ?
Aujourd'hui le vote a lieu dans une assemblée unique ; pourquoi ne pas maintenir ce mode de votation, alors qu'on ne signale pas d'inconvénients ?
Les conseils de prud'hommes, constitués comme ils le sont aujourd'hui, ne marchent-ils pas bien à Bruges, à Gand, à Lokeren, à Saint-Nicolas ?
- Un membre. - On ne se rend pas aux élections.
M. Van Overloop. - Si l’on ne se rend pas en grand nombre aux élections, cela prouve-t-il que l'institution ne fonctionne pas bien ? Ne pourrait-on pas au contraire conclure de cette apathie qu'elle fonctionne si bien qu'on ne croit pas nécessaire d'y apporter le moindre changement ? Quant à Saint-Nicolas spécialement, mon honorable ami M. Janssens vous a donné des détails qui prouvent que le conseil de prud'hommes y remplit parfaitement sa mission.
Je le répète, messieurs, je pense avec mon honorable ami que si vous faites voter les ouvriers et les maîtres dans des assemblées séparées, vous irez directement contre le but de l'institution, qui est de maintenir l'harmonie entre l'élément maître et l'élément ouvrier.
Quel est l'argument qu'on met en avant pour nous déterminer à adopter le principe du projet de loi ? C'est que ce mode de votation existe en France.
Je comprends qu'on emprunte à la France ce qui est bon ; mais il ne suffit pas qu'une chose existe en France, pour qu'il faille nécessairement l'adopter en Belgique ; nous devons tâcher, au contraire, d'avoir une législation aussi nationale que possible (Interruption.)
Je ne critique tps la disposition, parce qu'elle nous vient de France, mais je dis qu'il faut d'autres motifs que le régime de France pour nous la faire adopter. Voilà ma manière de voir.
Rien n'importe plus à un pays pour maintenir et consolider l'esprit national, que d'avoir une législation proprement dite nationale, une législation qui s'éloigne, autant que possible, des législations étrangères, non pas certes pour les grands principes de justice qui sont universels, mais pour tous les points de forme et de droit positif.
Permettez-moi, messieurs, de dire encore un mot sur les articles 30 et 31.
Aux termes de l'article 30, il y aura un bureau de conciliation définitif. Aujourd'hui, quand des difficultés naissent, que se passe-t-il ? Le président du conseil des prud'hommes prend un membre de l'élément patron et un membre de l'élément ouvrier et renvoie les parties devant un bureau de conciliation spécial. Je crois que cela vaut beaucoup mieux que la disposition du projet.
S'il y a un bureau définitif, il pourra arriver que ce bureau soit composé, par exemple, de deux membres, imprimeurs de coton, ou bien de deux membres, typographes ; on pourra donc envoyer les contendants, imprimeurs de coton, devant des juges typographes, et vice-versa. Sous ce rapport donc une modification est indispensable.
Du reste, mon honorable ami, M. Janssens et moi, nous présentons un amendement à cet article.
Il nous paraît également utile de modifier l'article 31.
Aux termes du second paragraphe de cet article, le président du conseil peut, en cas d'urgence, convoquer extraordinairement le bureau de conciliation.
Nous croyons qu'il serait utile, conforme au but de l’institution, qui est de rendre une justice prompte et expéditive, de supprimer les mots en cas d'urgence.
Il faudrait que le président du conseil pût en tout temps convoquer les prud'hommes, afin de leur faire remplir leurs fonctions. Cela vaudrait infiniment mieux. Je suis convaincu, du reste, que cela rentre dans les idées de l'honorable ministre de l'intérieur.
Voilà les observations que j'ai cru devoir présenter à la Chambre. Je le répète, les amendements que nous avons déposés sur le bureau sont en général des amendements de forme plutôt que de fond. Ils ont surtout pour but d’établir l'unité de rédaction dans notre législation générale. Je pense que, sous ce rapport, ils ne peuvent rencontrer aucune objection véritable.
M. le président. - Voici les amendements présentés par M. Van Overloop :
« Art. 2 § 1. Un conseil de prud'hommes peut être établi par arrêté royal, dans les localités suivantes : (énumération des localités dans lesquelles le gouvernement croit utile d'établir des conseils).
« § 2. L'arrêté détermine le nombre des membres, la juridiction et les ressort du conseil.
« § 3 (Supprimé.) »
« Art. 41. Insérer à la suite du paragraphe 3 la disposition suivante de l'article 6 du Code de procédure :
« Dans les cas urgents, le président donnera une cédule pour abréger les délais, et pourra permettre d'appeler les parties, même dans le jour et à l'heure indiqués. »
« Art. 42. Remplacé par l'article premier du Code de procédure modifié comme suit :
« Toute citation contient la date des jour, mois et, an, les noms, profession et domicile du demandeur ; les noms, demeure et immatricule de l'huissier ; les noms et demeure du défendeur ; elle énonce sommairement l'objet et les moyens de la demande, et indique, « le lieu, » le jour et l'heure de la comparution. »
« Art. 45. Remplacé par les articles 4 et 5 du Code de procédure, ainsi modifiés.
« La citation est notifiée par huissier ; copie en est laissée à la partie ; s'il ne se trouve personne en sa demeure, la copie est laissée au bourgmestre ou à l'un des échevins de la commune, qui vise l'original sans frais.
« Il y aura un jour au moins entre celui de la citation et le jour indiqué pour la comparution, si la partie citée réside dans le rayon de trois myriamètres.
« Si elle réside au-delà de cette distance il sera ajouté un jour par trois myriamètres.
« Dans les cas urgents, les délais pourront être abrégés comme il est dit à l'article. 41. »
« Art. 44. Remplacé par le § 3, article 5 du Code de procédure, ainsi modifié :
« Dans le cas où les détails n'auront point été observés, si le défendeur ne comparaît pas, le conseil ordonnera qu'il sera réassigné, et les frais de la première citation seront à la charge du demandeur. »
Art. 45. Remplacé par les articles 10 et 11 du Code de procédure, avec les modifications suivantes :
« Le président a la police de l'audience.
« Les parties seront tenues de s'exprimer avec modération et de garder en tout le respect qui est dû à la justice ; si elles y manquent, le président les y rappellera d'abord par un avertissement ; en cas de récidive, elles pourront être condamnées à une amende qui n'excédera pas la somme de dix francs, avec affiches du jugement, dont le nombre n'excédera pas celui des communes du ressort du conseil.
« Dans le cas d'insulte ou d'irrévérence grave, le président en dressera procès-verbal, et le conseil pourra condamner à un emprisonnement de trois jours au plus. »
« Art. 46. Remplacé par l'article 12 du Code de procédure :
« Les jugements, dans les cas prévus par le précédent article, seront exécutoires par provision. »
« Art. 47. Remplacé par les articles 89, 91 et 92 du Code de procédure :
« Si un ou plusieurs individus, quels qu'ils soient, interrompent le silence, donnent des signes d'approbation ou d'improbation, soit à la défense des parties, soit aux discours des prud'hommes, soit aux interpellations, avertissements ou ordres du président, soit aux jugements ou ordonnances, causent ou excitent du tumulte de quelque manière que ce soit, et si, après l'avertissement de l'huissier, ils ne rentrent pas dans l'ordre sur-le-champ, il leur sera enjoint de se retirer, et les résistants seront saisis et déposés à l'instant dans la maison d'arrêt pour vingt-quatre heures ; ils y seront reçus sur l'exhibition de l'ordre du président, qui sera mentionné au procès-verbal de l'audience.
« Ceux qui outrageraient ou menaceraient les prud'hommes dans l'exercice de leurs fonctions seront, de l'ordonnance du président, saisis et déposés à l'instant dans la maison d'arrêt.
« Ils seront, dans tous les cas, renvoyés devant h tribunal compétent, qui, sur le vu du procès-verbal constatant le délit, les condamne à un emprisonnement qui ne pourra excéder le mois, et à une amende qui ne pourra être moindre de 25 francs, ni excéder 500 francs.
« Si les délits commis méritaient peine afflictive ou infamante, le prévenu sera poursuivi et puni suivant les règles établies par le Code criminel. »
« Art. 48. Remplacé par l'article 427 du Code de commerce, ainsi modifié :
« Si une pièce produite est méconnue, déniée ou arguée de faux, et que la partie persiste à s'en servir, le conseil parafera la pièce et renverra devant les juges qui doivent en connaître, et il sera sursis au jugement de la demande principale.
« Néanmoins, si la pièce n'est relative qu'à un des chefs de la demande, il pourra être passé outre au jugement des autres chefs. »
« Art. 53. Ajouter après le n°3 du projet de la section centrale :
« 4° S il y a procès écrit existant entre eux et l'une des parties ou leurs conjoints. »
« Art. 51. Remplacé par l'article 19 du Code de procédure.
(page 818) « Si au jour indiqué par la citation, l’une des parties ne comparaît pas, la cause sera jugée par défaut, sauf la réassignation dans le cas prévu dans... »
« Art. 55 Remplacé par l'article 20 du Code de procédure :
« La partie condamnée par défaut pourra former opposition dans les trois jours de la signification faite par l'huissier commis par le conseil.
« L'opposition contiendra sommairement les moyens de la partie et assignation au prochain jour d'audience, en observant toutefois les délais prescrits pour les citations : elle indiquera les lieu, jour et heure de la comparution, et sera notifiée, ainsi qu'il est dit ci-dessus. »
« Art. 55. Remplacé par l'article 21 du Code de procédure :
« Si le conseil sait par l'un de ses membres, ou par les représentations qui lui seraient faites à l'audience par les proches, voisins ou amis du défendeur, que celui-ci n'a pas pu être instruit de la procédure, il pourra, en adjugeant le défaut, fixer, pour le délai de l'opposition, le temps qui lui paraîtra convenable, et dans le cas où la prorogation n'aurait été ni accordée d'office ni demandée, le défaillant pourra être relevé de la rigueur du délai, et admis à opposition, en justifiant qu'à raison d'absence ou de maladie grave il n'a pu être instruit de la procédure. »
« Art. 57. Remplacé par l'article 22 du Code de procédure.
« La partie opposante qui se laisserait juger une seconde fois par défaut ne sera plus reçue à former une nouvelle opposition. »
« Art. 58, 59, 60 et 61. Remplacer le mot : « sentence » par le mot « jugement. »
« Art. 60. § 2. Les jugements contradictoires peuvent (la suite comme à l'article du projet). »
« § 3. Remplacé par les articles 10 et 11 de la loi du 25 mars 1841, modifiés comme suit :
« Ne sera pas recevable l'appel des jugements mal à propos qualifiés en premier ressort, ou qui, étant en dernier ressort, n'auraient pas été qualifiés. Seront sujets à l'appel les jugements qualifiés en dernier ressort, s'ils ont statué, soit sur des questions de compétence, soit sur des matières dont le conseil des prud'hommes ne pouvait connaître qu'en premier ressort. Néanmoins, si le conseil s'est déclaré compétent, l'appel ne pourra être interjeté qu'après la décision définitive ou qu'après un jugement interlocutoire et conjointement avec l'appel de ce jugement.
« L'appel des jugements des conseils de prud'hommes ne sera pas recevable après les quarante jours qui suivront la signification. »
« Art. 61. Remplacé par l'article 28 du Code procédure :
« Les jugements qui ne seront pas définitifs ne seront point expédiés quand ils auront été rendus contradictoirement et prononcés en présence des parties : dans le cas où le jugement ordonnerait une opération à laquelle les parties devraient assister, il indiquera le lieu, le jour et l'heure, et la prononciation vaudra citation. »
« Ajouter les articles 29 et 30 du Code de procédure.
« Si le jugement ordonne une opération par des gens de l'art, le président du conseil de prud'hommes délivrera à la partie requérante cédule de citation pour appeler les experts, elle fera mention du lieu, du jour et de l'heure, et contiendra le fait, les motifs et la disposition du jugement relatif à l'opération ordonnée.
« Si le jugement ordonne une enquête, la cédule de citation fera mention de la date du jugement, du lieu, du jour et de l'heure. »
« Art. 64. Ajouter, conformément à la loi du 4 mars 1848, après le mot : « prud'hommes, » le mot : « exclusivement. »
« Art. 68, § 2. Supprimer les mots : « entre conjoints. »
« Ajouter : « Le conseil de prud'hommes peut, en cas de nécessité, autoriser la femme mariée et le mineur à ester en justice. »
M. le président. - Un amendement a été présenté par MM. Janssens et Van Overloop. Il est ainsi conçu :
« Art. 31, § 2. Supprimer les mots : « En cas d'urgence. »
« Ajouter : « Il peut aussi, en se conformant au paragraphe 2 de l'article 33, renvoyer les parties en conciliation devant deux membres du conseil autres que ceux qui composent le bureau de conciliation. »
Un amendement a également été déposé par M. David. Il est ainsi conçu :
‘Art. 8 (de la section centrale). Rédiger comme suit le paragraphe 3 :
« Ceux qui sont inscrits comme électeurs à la commune et à la province. »
- Tous ces amendements sont renvoyés à la section centrale.
M. Lelièvre. - Je crois devoir appeler l'attention du gouvernement sur certaines questions qui concernent la juridiction attribuée aux conseils de prud'hommes.
La section centrale propose d'admettre des demandes reconventionnelles ou en compensation ; mais il doit être bien entendu que semblables prétentions ne peuvent être formées que dans le cas où elles sont relatives à des objets qui sont de la compétence de la juridiction qui sera établie. Il n'est pas possible, en effet, que par des demandes reconventionnelles ou en compensation on change la nature de la juridiction et qu'on défère aux conseils de prud'hommes la connaissance des matières qui ne leur sont pas attribuées par la loi.
Je pense que le projet devrait s'expliquer positivement sur cette question.
Il doit également être entendu que l'article 43 proposé par la section centrale ne concerne que les demandes reconventionnelles fondées sur des causes antérieures à l'action et non point sur des faits nés de l'action même.
L'article 22, paragraphe premier, de la loi du 25 mars 1841 a donné lieu à des difficultés qu'il est essentiel de prévoir, pour les résoudre par les dispositions du projet.
D'après le projet, qui ne déroge en rien aux principes du droit commun, je pense que le conseil de prud'hommes devra prononcer la contrainte par corps, comme moyen d'exécution, dans les cas où cette mesure est décrétée par loi. Une explication de M. le ministre de l'intérieur me semble utile pour prévenir tout doute à cet égard.
Je pense, du reste, que si nous voulons atteindre le but que nous nous proposons, il est important de n'adopter que des amendements dont l'utilité ne puisse être douteuse. C'est le seul moyen d'aboutir à des résultats réalisant un progrès dont le pays eût le droit de se féliciter.
- La discussion est continuée à demain.
La séance est levée à 5 heures.