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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 17 mai 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)

(Présidence de M. Rousselle, deuxième vice-président.)

Appel nominal

(page 1489) M. Ansiau fait l'appel nominal à 1 heure et un quart.

Lecture du procès-verbal

M. Maertens lit le procès-verbal de la séance d'hier.

M. de Theux. - Messieurs, j'ai à faire à la chambre une observation très importante, en ce qui concerne le procès-verbal de la séance d'hier.

Parmi les amendements qui ont été déposés dans le cours de cette séance, il s'en trouve un qui a été présenté par MM. Julliot et de Renesse et qui est ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à concéder, aux conditions ordinaires, un chemin de fer de Bilsen par Tongres à Liège.

« L'article 2 de la loi du 24 juin 1853 est abrogé. »

J'ai été très étonné de voir maintenu le deuxième alinéa de l'amendement.

Vous vous rappellerez qu'on a interpellé M. le ministre des travaux publics sur la question de savoir s'il se ralliait à cet amendement ; M. le ministre a déclaré qu'il ne s'y ralliait pas, en ce qui concernait l'abrogation de la loi de 1853.

J'ai fait voir à la Chambre que si l'on mettait en discussion cet amendement, il y aurait une double violation du règlement ; première violation, puisqu'il s'agit d'une ligne nouvelle qui n'était pas comprise dans le projet du gouvernement, aux termes d'une décision que la Chambre venait de prendre en ce qui concerne le chemin de fer d'Anvers à Hasselt ; seconde violation, en ce qu'on demandait à l'improviste par un amendement l'abrogation d'une loi solennellement votée par les deux Chambres, abrogation qui se présentait pour la première fois dans cet amendement et dont la section centrale ne faisait mention ai dans son texte ni dans son rapport.

Sur ce fait, l'honorable M. Julliot, à la bonne foi de qui j'en appelle volontiers, a fait la déclaration suivante :

« Pour que l'arrondissement de Tongres puisse au moins une fois avoir le gouvernement de son côté, je fais, en ce qui me concerne, Je.sacrifice du deuxième paragraphe de l'amendement de l'honorable M. de Renesse.

« Cet amendement devient ainsi ce qu'il était dans le rapport de la section centrale et j'espère bien que la Chambre l'adoptera.»

Il est vrai que l'honorable M. de Renesse n'a pas répété la même déclaration ; mais il est certain que l'honorable M. Julliot a parlé en nom commun.

Je demande donc que la Chambre exige qu'il soit fait mention au procès-verbal du retrait de l'amendement en ce qui concerne l'abrogation de la loi de 1853 ; il est évident que si la Chambre n'avait pas compris la déclaration de M. Julliot dans le sens que je viens d'indiquer, jamais la Chambre n'eût admis la discussion de l'amendement et la question préalable aurait été prononcée.

Je ne parlerai pas en ce moment de la loi de 1853 ; j'attendrai la discussion générale pour faire voir qu'elle est dans l'intérêt de la province de Limbourg, de la province de Liège et d'autres parties du pays.

Mais, en ce qui concerne l'abrogation de cette loi, c'est une question de bonne foi ; il n'y en a jamais eu de plus claire dans cette Chambre.

M. Maertens, secrétaire. - Je viens donner quelques explications sur la réclamation faite par l'honorable comte de Theux. Le bureau n'a aucun parti pris dans la question soulevée, il n'a qu'à s'en référer à ce que décidera la Chambre sur cet objet. Sa mission ne consiste qu'à consigner fidèlement dans le procès-verbal ce qui se passe dans vos séances.

Je crois que les Annales parlementaires justifient la teneur du procès-verbal. Déjà des réclamations ont été faites à cet égard avant la séance, mais le bureau a cru devoir maintenir la rédaction primitivement arrêtée.

Dans la séance d'hier l'honorable M. Julliot ayant signé un amendement conjointement avec l'honorable comte de Renesse est venu retirer sa signature du deuxième 2 ; la question est de savoir si par la résolution prise par l'honorable membre, ce paragraphe 2 vient à tomber alors que M.de Renesse ne s'est pas rallié à ce retrait. Toute la question est là.

Or, M. de Renesse n'ayant pas manifeste l'intention de modifier son amendement en a évidemment maintenu la rédaction primitive, et la question préalable ayant été demandée, elle s'est éiendue au premier comme au deuxième paragraphe. Mais la question préalable ayant été écartée, l'amendement restait dans son entier. La Chambre décidera s'il doit en être ainsi.

Je disais tout à l'heure que les Annales parlementaires, justifiaient la rédaction du procès-verbal. En effet, M. Julliot a dit :

« L'honorable comte de Theux parle à son aise au nom d'une localité qui est pourvue de 3 ou 4 chemins de fer, et il veut que le cinquième soit encore exécuté à son point de vue exclusif. Messieurs, pour que l'arrondissement de Tongres puisse au moins une fois avoir le gouvernement de son côté, je fais, en ce qui me concerne, le sacrifice du deuxième paragraphe de l'amendement de l'honorable comte de Renesse.

« Cet amendement devient ainsi ce qu'il était dans le rapport de la section centrale et j'espère bien que la Chambre l'adoptera. »

Maintenant M. de Renesse s'est-il rallié à la décision prise par M. Julliot ? Le contraire résulte de ses paroles, voici comment s'est exprimé l'honorable comte de Renesse :

« Je ne veux pas discuter pour le moment avec l'honorable comte de Theux, la question de la ligne directe ou de la ligne par Bilsen. Lorsque nous arriverons à examiner l'amendement, que mon honorable collègue et ami, M. Julliot et moi, nous avons présenté, alors l'on pourra discuter cette question ; mais je dois faire observer, en attendant, que quand le conseil provincial a donné son adhésion à la ligne directe, ce n'a été que sous certaines conditions ; or, ces conditions n'existent plus aujourd'hui puisqu'il paraît que les embranchements proposés ne sont plus compris dans le projet de la ligne directe, ainsi qu'ils avaient été soumis à l'appréciation du conseil provincial. Je crois avoir prouvé dans mes développements que nous sommes fondés à réclamer la ligne par Bilsen. »

Or, comme vous le voyez, messieurs, il résulte des paroles du comte de Renesse qu'il n'avait nullement l'intention de se rallier au retrait du paragraphe 2 de l'amendement qu'il avait proposé ; ce sont là les considérations qui ont déterminé le bureau à maintenir la rédaction du procès-verbal telle qu'elle a été arrêtée de prime abord.

M. le président. - Avant de donner la parole aux membres qui l'ont demandée, je crois devoir lire l'article du règlement concernant les rectifications des procès-verbaux.

Cet article est ainsi conçu :

« Art. 15. S'il s'élève une réclamation contre la rédaction, l'un des secrétaires a la parole pour donner les éclaircissements nécessaires.

« Si, nonobstant cette explication, la réclamation subsiste, le président prend l'avis de la Chambre.

« Si la réclamation est adoptée, le bureau est chargé de présenter séance tenante ou, au plus tard dans la séance suivante, une nouvelle rédaction conforme à la décision de la Chambre. »

Je demande à M. le comte de Theux si, malgré les explications de M. le secrétaire, il persiste dans sa réclamation.

M. de Theux. - Certainement, M. le président.

M. Julliot. - Messieurs, je mettrai autant de loyauté dans mes explications, que l'honorable M. de Theux dans les siennes. J'avouerai que pour ma part j'ai retiré le second paragraphe de cet amendement. J'ai même cru que M. le président l'avait effacé de la rédaction déposée sur le bureau ; d'autant plus que l'honorable comte de Renesse n'a pas fait la même déclaration que moi, et qu'il n'a pas, non plus que je sache, protesté contre ma proposition.

Messieurs, pour être loyal jusqu'au bout, je dois déclarer que selon moi, si la Chambre avait cru que ce second paragraphe était maintenu, il est probable que nous n'eussions pas eu une majorité aussi forte que nous avons eu pour son adoption.

Je dirai d'un autre côté que M. le ministre avait déclaré qu'il n'adhérait pas à cette partie de l'amendement. Je crois que si M. le ministre n'avait pas adhéré à la première partie de mon amendement, notre proposition aurait eu un un succès moindre.

L'honorable comte de Renesse est libre de dire qu'il n'a pas adhéré à ce retrait de la seconde partie de l'amendement. Et je dirai que si le fait matériel a disparu, l'esprit de la loi est toujours là. Car enfin la sympathie dont la Chambre a bien voulu nous gratifier hier, c'est pour moi l'esprit de la loi, c'est-à-dire que M. le ministre, qui est nanti d'une loi, espèce d'épée de Damoclès suspendue sur nos têtes, ne doit pas en user, sans mettre la Chambre en demeure de se prononcer ; il est facile avec un grand nombre d'amis de tuer la lettre de la loi, mais l'esprit ne se tue pas et survit souvent à la lettre matérielle.

M. de Renesse. - Messieurs, immédiatement après que l'honorable M. Julliot avait déclaré qu'il retirait la seconde partie de l'amendement présenté, j'ai déclaré, j'en appelle à mes honorables collègues, que, quant à moi, je ne la retirais pas.

Pourquoi ne l'ai-je pas retirée ? Parce que j'ai répondu à l'honorable comte de Theux, que quant à la question de la préférence à donner à la ligne directe ou à la ligne par Bilsen, elle pourrait être examinée à l'occasion de la discussion de notre amendement. C'est dans cette discussion que nous pourrons examiner si la question de la ligne directe se présente encore dans les conditions où elle s'est présentée au conseil provincial du Limbourg et au gouvernement.

Il est impossible que la Chambre, avant d'avoir une connaissance exacte des faits, puisse prendre une décision. Repousser sans examen la seconde partie de l'amendement, ce serait déclarer que la ligne par Bilsen ne se fera pas.

Le gouvernement avait été autorisé à concéder soit la ligne directe, soit la ligne par Bilsen, soit l'embranchement par le vallon du Jaer. Or, l'embranchement par le vallon du Jaer ne peut plus se faire, et le conseil provincial du Limbourg n'avait donné son adhésion à la ligne directe que pour autant que l'ensemble du projet pût être discuté.

Je dois donc maintenir la seconde partie de mon amendement.

(page 1489) M. de Theux. - Je ne puis qu'insister sur ma réclamation ; elle est trop grave. C'est une véritable question de bonne foi pour la Chambre. J'affirme que je n'ai pas entendu l'honorable comte de Renesse maintenir pour son compte l'abrogation de la loi de 1853 ; et mon affirmation à cet égard a d'autant plus de poids que l'honorable comte Visart, qui se trouvait au bas du banc près de l'honorable comte de Renesse, l'a compris comme moi. Il a dit : « La proposition a été modifiée, on renonce à l'article 2 : la question n'est donc plus la même et je désirerais connaître l'opinion du gouvernement avant de devoir me prononcer sur la question préalable. » Cela a été compris ainsi, j'ose le dire, par presque toute la Chambre.

Que l'honorable M. Julliot parlât au nom de son collègue, c'est encore-un fait avéré. Car l'honorable M. Julliot conclut ainsi : « Cet amendement devient ainsi ce qu'il était dans le rapport de la section centrale et j'espère bien que la Chambre l'adoptera. » Or, dans le rapport de la section centrale, il n'y a pas un mot sur l'abrogation de la loi de 1853.

Je fais donc, messieurs, un appel à votre bonne foi et je demande qu'on insère dans le procès-verbal que l'articles 2 de l'amendement des honorables MM. Julliot et de Renesse a été retiré. Si la Chambre croit qu'elle n'a pas statué et si elle n'admet pas cette rectification, je propose de nouveau et formellement la question préalable sur l'article 2 de cet amendement.

M. de Renesse. - Je crois que la question du chemin de fer direct de Liége à Hasselt par Tongres, doit être réservée jusqu'à la discussion de l'amendemeut que j'ai eu l'honneur de proposer avec mon honorable collègue, M. Julliot, et lorsque mon honorable collègue a cru devoir retirer la deuxième partie de notre amendement, j'ai déclaré immédiatement que, quant à moi, je ne la retirais pas, parce que je voulais, comme je l'ai dit hier, que la Chambre pût, en connaissance de cause, se prononcer sur la ligne directe ou celle par Bilsen, et pour cela il fallait nécessairement attendre la discussion sur l'amendement.

Je m'étonne que l'honorable comte de Theux s'acharne ainsi contre l'arrondissement de Tongres, surtout lui qui, en 1839, étant ministre, a proposé la cession d'une grande partie du Limbourg. Cependant alors M. Nothomb, ministre des travaux publics, déclarait à la séance du 8 mars 1839, au nom du gouvernement :

« La conférence nous a laissé les parties les moins fertiles du Limbourg et surtout du Luxembourg ; c'est à la Belgique à les fertiliser en se les rattachant encore plus intimement par les travaux publics et d'industrie, peut-être avec le temps parviendra-t-elle à donner aux deux provinces restées belges, l'importance qu'elles avaient, dans leur intégralité. Il y va d'ailleurs de son bonheur à ce que le Luxembourg belge et le Limbourg belge n'envient jamais le sort du Luxembourg germanique et du Limbourg hollando-germanique. »

Je demande que la question du tracé de ce chemin de fer soit réservée jusqu'à l'examen de mon amendement.

Je dois, cependant, faire observer à la Chambre, qu'au commencement de 1853, l'honorable comte de Theux nous déclarait formellement, comme le conseil communal de la ville de Hasselt, et sa députation venue ici, avec d'autres, qu'ils appuyaient la direction par Bilsen.

M. le président. - M. de Renesse, je dois vous faire observer que dans ce moment il ne s'agit que de la rédaction du procès-verbal.

M. de Renesse. - Je dois présenter mes motifs à l'appui de ma proposition.

M. le président. - Vous ne pouvez pas, à l'occasion du procès-verbal, discuter le fond de la question.

M. de Renesse. - Ils déclarèrent alors, que la direction par Bilsen était le tracé le plus utile à cette partie de la province de Limbourg, l'arrondissement de Tongres resté dans l'isolement depuis 1830, et qu'il était équitable qu'elle pût obtenir l'embranchement le plus utile à tous ses intérêts.

Je déclare, pour le moment, maintenir la deuxième partie de mon amendement.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, l'honorable comte de Renesse s'écarte de la question. Elle est très simple ; la Chambre a-t-elle admis à la discussion les deux parties de l'amendement ou une seule partie seulement- ? Je crois être exact en disant que la partie à laquelle le gouvernement ne s'est pas rallié, aurait été écartée par la question préalable, si le vote avait porte sur l'ensemble. L'amendement n'a été admis à la discussion que parce que le gouvernement s'etait rallié à la première partie, et parce que la Chambre croyait, d'après la déclaration de M. Julliot, que la deuxième partie était retirée. Il est donc évident que le vote de la Chambre a porté seulement sur la première partie de l'amendement.

M. le président. - Je vais consulter la Chambre sur le point de savoir si la réclamation contre le procès-verbal est admise. Si elle n'est pas admise, rien, selon moi, ne sera préjugé quant à l'amendement. Cet amendement sera discuté lorsque son tour sera venu et on pourra alors proposer la question préalable si on le juge convenable. Pour le moment la Chambre ne doit décider qu'une chose, c'est de savoir si le procès-verbal a rendu fidèlement ce qui s'est passé dans la séance d'hier.

- La Chambre, consultée, décide que la réclamation est admise. En conséquence le bureau présentera, aux tenues de l'article 15 du règlement, à la séance prochaine la rectification du procès-verbal.

M. de Theux (pour un fait personnel). - Messieurs, j'ai été très étonné d'entendre l'honorable comte de Renesse faire la sortie qu'il vient de se permettre et qui est dénuée de tout fondement. Pour le prouver, je dirai que c'est d'accord avec l'honorable M. Lesoinne que nous avons, en 1853 proposé l'amendement suivant, qui a été adopté :

« Art. 2. Le gouvernement est autorisé à concéder, après enquête, les embranchements de chemin de fer de Hasselt à Liège par Tongres, de Bilsen à Liège ou de Tongres à Maestricht par la vallée du Jaer. »

Vous voyez donc que la loi de 1853 n'exclut en aucune manière la ville de Tongres ; elle contient en faveur de cette ville deux ou trois embranchements de chemin de fer éventuels.

Je n'en dirai pas davantage. Je m'en rapporte, du reste, à l'appréciation de fa Chambre ; je pense qu'elle connaît trop mon caractère pour qu'elle ajoute la moindre foi aux reproches qui m'ont été adressés.

M. Ansiau, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la Chambre

« Le sieur Vandenzande demande que le chemin de fer de Bruxelles sur Louvain soit rectifié par un raccordement de la ligne de l'Etat entre Vilvorde et Haeght, avec embranchement sur Diest par Werchter, Aerschot, Rillaer, Sichem, Montaigu et Diest, et subsidiairement que le chemin de fer à établir entre Bruxelles et Louvain parte de la station du Nord, pour aboutir par la voie la plus courte à la station actuelle de Louvain. »

-Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la concession de plusieurs lignes de chemin de fer.


« Par quatre pétitions, des habitants de Bruxelles et de la banlieue demandent que le chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain passe par Cortenberg. »

- Même disposition.


« Les conseils communaux de Blaimont, Hontière, Hermeton-sur-Meuse, Agimont, Vodelée, Gochenée, Feschaux, Fineroux et Mesnil Saint-Biaise, demandent l'établissement d'un chemin de fer de Namur-Givet en suivant le cours de la Meuse. »

« Même demande du conseil communal de Purnode. »

- Même décision.


« Le sieur Fafchamps prie la Chambre de suspendre sa décision quant à la démolition des fortifications de la place de Mons, jusqu'à ce qu'il ait été entendu sur un nouveau système de défense des places. »

M. Rodenbach. - Je demande le renvoi de cette pélition à la seciion centrale qui a examiné le projet de loi relatif aux fortifications d'Anvers. »

- Adopté.


« Le sieur Portelange réclame l'intervention de la Chambre pour que justice lui soit rendue dans un procès civil. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Par 22 messages, le Sénat informe la Chambre qu'il a pris en considération autant de demandes en naturalisation ordinaire. »

- Pris pour notification.

Projet de loi relatif à un emprunt de 35 millions de francs

Rapport de la section centrale

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi concernant l'emprunt de 35 millions de francs.

- Le rapport sera imprimé et distribué.

M. Delfosse. - Je demande que le jour de la discussion soit fixé, après la distribution du rapport.

- Cette proposition est adoptée.

Projets de loi relatifs aux constructions militaires d'Anvers et de ses dépendances

Rapport de la section centrale

M. Goblet. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner les projets de loi relatifs aux constructions militaires d'Anvers et de ses dépendances.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

Le jour de la discussion sera fixé après la distribution du rapport.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère des travaux publics

Rapport de la section centrale

M. de Man d'Attenrode. - Messieurs, j’ai l’honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi ouvrant un crédit supplémentaire au département des travaux publics

- Le rapport sera imprimé et distribué.

Le jour de la discussion sera fixé après la distribution du rapport.

Projet de loi relatif au droit d’entrée sur les machines et mécaniques

Discussion générale

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, les changements proposés par la section centrale ne sont que des changements de rédaction convenus avec le département des finances ; je m'y rallie.

M. le président. - La discussion s'ouvre, en conséquence, sur le projet du gouvernement.

La parole est à M. Rodenbach.

M. Rodenbach. - Messieurs, j'ai déjà à maintes reprises demandé dans cette enceinte des modifications à la loi sur l'entrée des machines et mécaniques. Je pense que le projet de loi qui est en discussion atteindra le but qui a été signalé dans une foule de pétitions.

Les constructeurs de machines se plaignent, de leur côté, de ce qu'on laissait entrer, en franchise des droits, les petites machines (page 1491) perfectionnées d'Angleterre ; d'un autre côté, les manufacturiers s'élevaient contre le droit exorbitant qu'on exigeait à l'entrée des machines.

- Des membres. - On est d'accord. Il n'y a pas d'opposition.

M. Rodenbach. - Puisque la Chambre est impatiente d'arriver au vote, je renonce à la parole.

M. Manilius. - Je demande cependant à dire quelques mots.

Le Moniteur enregistre presque journellement des brevets de perfectionnement pour l'importation de machines ; quelle est la conséquence de l'octroi de ces brevets ? C'est d'empêcher nos constructeurs de faire ces machines.

Les importateurs trouvent nécessairement appui dans les tribunaux qui doivent veiller à l'exécution de la loi sur les brevets d'invention.

Je recommande à MM. les ministres de l'intérieur et des finances d'examiner cette question. On ne peut pas laisser dans notre législation des dispositions qui hurlent de s'y trouver ensemble.

En effet, d'un côté, on prend des mesures pour favoriser notre industrie ; d'un autre côté, par la loi sur les brevets d'industrie, c'est seulement l'étranger qu'on favorise.

Déjà, lors de la discussion de la loi sur les brevets, l’honorable M. T'Kint de Naeyer a présenté des observations judicieuses à cet égard. J'espère que le gouvernement avisera au moyen de faire disparaître cette anomalie.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, l'observation que vient de produire l'honorable préopinant se rapporte plutôt à la loi sur les brevets qu'à la loi actuelle. Néanmoins je lui promets que ses observations feront l'objet d'un sérieux examen de la part du gouvernement.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Article unique. Les droits d'entrée sur les machines et mécaniques sont modifiés conformément au tableau ci-après :

« Machines et mécaniques, en fonte, les 100 kil. : fr. 5.

« Machines et mécaniques, en fer ou en acier, les 100 kil. : fr. 7 50

« Machines et mécaniques, en bois, les 100 kil. : fr. 10

« Machines et mécaniques, en cuivre ou toute autre matières, comprenant les baudruches pour batteurs d’or et le caoutcouc combiné avec d’autres matières, préparé pour servir à l’impression des étoffes et à la confection des cardes, les cardes en fil de métal, ainsi que le splaques, rubans et garnitures de cardes de tout espèce, les 100 kil. : fr. 12.

« Machines et mécaniques, pour filature sans distinction, les 100 kil. : fr. 12.

« Dispositions particulières.

(a) Les pièces détachées ou parties de machines sont assimilées aux machines complètes pour l'application des droits. Les machines ou pièces de machines soumises à des droits différents, seront claisés d'après la matière principale par le poids. Les déclarants sont tenus de mettre la douane à même d’apprécier la matière principale, sous peine de payer le droit d'après la matière la plus imposée entrant dans la machine ou dans la pièce de machine en $ii igc.'

« (6) A partir du 1er janvier 1860, les machines classées dans cette catégorie spéciale seront rangées, selon leur composition, dans les autres catégories du tarif. »

- Il est procédé au vote par appel nominal.

Le projet de loi est adopté par les 76 membres qui ont répondu à l'appel.

Ont répondu à l'appel : MM. Frère-Orban, Goblet, Jacques, Jouret, Julliot, Lambin, Landeloos, Lange, Laubry, le Bailly de Tillegbem, Lebeau, Lesoinne, Maertens, Magherman, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Osy, Rodenbach, Rogier, Sinave, Tack, Tesch, Thibaut, Thiéfry, Thienpont, T Kint de Naeyer, Tremonroux, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Visart, Allard, Ansiau, Boulez, Brixhe, Coomans, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Brouwer de Hogendorp, de Haerne, de La Coste, Delfosse, de Liedekerke, de Man d'Attenrode, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Pitteurs, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, de Steeenhault, de Theux, Devaux, du Bus, Dumon, Faignart et Rousselle.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder plusieurs lignes de chemin de fer

Discussion générale

M. le président. - Quatre nouveaux amendements viennent d'être déposés sur le bureau ; en voici la teneur :

« 1° Le gouvernement est autorisé à concéder purement et simplement sans charge aucune pour le trésor public, un chemin de fer direct entre Termonde et St-Nicolas passant par Hamme avec station de raccordement à Elversele pour les lignes :

« 1° D'Elverselé à Lokeren par Waesmunster.

« 2° D'Elversele à l'Escaut en passant par Tamise et Rupelmonde vers la tête de Flandre.

« Signé : Vermeire, Van Overloop, Vander Donckt et Van Cromphaut. »

« 2° Le gouvernement est autorisé à concéder, sous les conditions qu'il déterminera, un chemin de fer partant de Charleroi du point de jonction dès lignes de l'Etat et de l'Entre-Sambre-et-Meuse et simultanément de la nouvelle section du canal de Charleroi à Marchienne se dirigeant par Fontaine-l'Evêque vers le Centre et de là à Masnuy St-Pierre par la ville de Roeulx.

« Signé : Faignart, Ansiau et Matthieu. »

« 3° Le gouvernement pourra construire ou faire construite à condition de s'en réserver l'exploitation :

« 1° Un chemin de fer de Hal à Ath passant par Enghien ;

« 2° Un chemin de fer de Tournai vers Lille.

« Signé : Allard. »

« 4° Le gouvernement pourra concéder, sous les conditions ordinaires, un chemin de fer industriel partant de la station de la ligne de l’Etat à Manage avec raccordement à la ligne de Manage à Wavre et se dirigeant par Bascoup et Piéton vers Forchies-la-Marche.

« Trtemouroux, Mascart. »

- Ces amendements seront imprimés et distribués.

M. de La Coste. - Messieurs, l'impatience de la Chambre m'empêchera d'entrer dans de longs développements qui ne seraient pas écoutés. Je n'avais pas l'intention de vous occuper maintenant spécialement des questions qui intéressent les localités qui m'ont envoyé à la Chambre. Mais comme je crains d'être absent quand on en viendra à ces questions, si la discussion se prolonge, je réclamerai de la courtoisie de la Chambre la permission d'en dire un seul mot, afin que mon opinion soit connue.

Je n'ai pas besoin de dire que j'appuie le chemin de fer de Bruxelles à Louvain ; inutile, je pense, de parer à des objections qui pourraient se produire, car l'adoption de cette voie de communication est à peu près convenue dans la Chambre. L'honorable. M. Orts a proposé un amendement qui modifie ou plutôt précise la proposition du gouvernement.

Je ne partage pas entièrement l'éloignement qu'on a témoigné pour le mode de concession auquel le gouvernement semble donner la préférence, c'est-à-dire moyennant une certaine partie du produit moyen kilométrique du chemin de fer de l'Etat.

Je crois que ce système, qui a, sans doute comme tout autre, des inconvénients, offre aussi des avantages ; mais d'après les observations qui ont été échangées, je crois que ce système a peu de chances d'être admis dans cette Chambic, du moins dans cette session. A mon avis, M. le ministre, ferait donc bien de se rallier au mode proposé, au mode d'exécution directe, quoiqu'il doive en résulter aussi certains inconvénients dont je parlerai tout à l'heure.

Quant à la direction par Cortenberg proposée également par l'honorable M. Orts, je ne me prononcerai point à cet égard. Il y a quelques années l'honorable M. Prévinaire voulut faire adopter d'enthousiasme un tracé par Tervueren ; j'ai pensé alors que la question n'était pas assez mûre ; pour moi, le tracé que je préfère c'est celui qui répondra le mieux à la destination de ce chemin qui est d'abréger les distances ; d'autres considérations ne pourraient prévaloir que si la différence de distance n'était pas très considérable. J'attendrai les explications du gouvernement.

Je ne fais aucun doute qu'il se laissera guider uniquement par l'intérêt général. Il ne s'agit point ici d'une question de clocher et je désire qu'on n'y fasse pas entrer ce que l'honorable M. Verhaegen appelait, dans une autre occasion, des intérêts de cheminée, c'est-à-dire de telle ou telle partie d'une grande ville.

- Plusieurs membres. - Attendez la discussion de l'article.

M. de La Coste. - J'ai demandé à la Chambre la permission de dire maintenant quelques mots ; si je voulais entrer dans la discussion générale comme j'en avais eu l'intention, on ne m'écouterait pas.

Voici la question que j'aurais voulu traiter et que l'honorable M. Rogier, qui m'interrompt, traiterait sans doute beautoup mieux que moi ; c'est la question des lignes parallèles, des lignes prétenduement concurrentes dont, selon moi, on exagère beaucoup le danger. Je ne désapprouve nullement la prudence de la Chambre. J'avoue que le chemin de fer qui était proposé par la section centrale et qui a été écarté, méritait un examen peut-être plus attentif, plus long, que la Chambre n'était disposée à lui accorder pour le moment.

Mais je crois que l'honorable M. Tesch et même quelques-uns de mes honorables amis, devraient examiner davantage ce qu'enseignent à cet égard des chiffres positifs et des faits constatés : ils pourraient se convaincre que ces lignes prétenduement concurrentes nont pas sur les revenus du trésor les effets que l'on suppose.

(page 1492) Je sais bien qu'il y a des lignes concurrentes qui nuisent aux produits du trésor, mais je crois qu'on s'exagère, qu'on généralise trop les résultats et que cette question mériterait de faire l'objet d'un examen attentif, dans un moment où la Chambre serait moins préoccupée qu'aujourd'hui.

Sans attacher un intérêt local exclusif à la ligne à laquelle j'ai fait allusion, je pense qu'elle mérite une'sérieuse attention, et que tôt ou tard elle se réalisera. (Interruption.)

Je parle de la ligne d'Anvers par Diest à Hasselt, j'en parle au point de vue d'une appréciation plus juste de ce qu'on appelle les lignes concurrentes.

Messieurs, il résulterait du changement du mode d'exécution de la ligne de Bruxelles à Louvain, que la ligne de Louvain au camp ne s'exécuterait pas ou tout au moins qu'elle ne s'exécuterait pas prochainement. C'est une considération sur laquelle j'appelle l'attention de la Chambre, parce que cette dernière ligne, étant réellement utile au point de vue industriel, au point de vue agricole et au point de vue stratégique, il y aurait lieu peut-être de présenter à cet égard quelques considérations ultérieures ou bien quelque amendement.

Je me borne, pour le moment, à ces observations que je n'aurais peut-être pas eu l'occasion de vous présenter lorsque cet article viendra en discussion.

- La clôture de la discussion est demandée.

M. Vermeire. - Messieurs, j'avais quelques observations à présenter dans la discussion générale sur le mode actuel de concession. Ce sont des observations très générales et très courtes que je demande la permission de pouvoir produire.

- La clôlure de la discussion est mise aux voix et prononcée.

Discussion des articles

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je me rallie à la proposition de la section centrale qui consiste à faire de chacun des groupes de chemins de fer un article spécial au lieu d'en faire des littera, comme le proposait le projet du gouvernement. Ainsi quant à la forme de la loi on peut ouvrir la discussion sur le projet de la section centrale. Je pense, en me ralliant sous ce rapport à ce projet, faire chose agréable à la Chambre et me conformer à son désir.

Article premier

M. le président. - La discussion est ouverte sur l'article premier.

M. Magherman. - Messieurs, l'article premier a pour objet la concession d'un chemin de fer partant de St-Ghislain et se dirigeant par Renaix et Audenarde sur Gand, avec un embranchement partant de Saint-Ghislain sur Ath et un autre embranchement de St-Ghislain sur Tournai. Cet article n'a été, dans les sections, l'objet d'aucune discussion et n'y a rencontré aucune opposition pas plus que dans la seciion centrale.

Des questions avaient été posées par la seciion centrale, et dans ses réponses le gouvernement avait manifesté des craintes que si d'autres concessions étaient accordées, par exemple celle de Braine-Ie-Comte à Gand, elles auraient pu porter obstacle à la réalisation de la ligne de St-Ghislain à Gand. Les mêmes craintes se sont manifestées dans cette Chambre.

Moi-même je m'en suis fait en quelque sorte l'organe. Mais elles ne sont pas fondées. Ces lignes se présentent dans de telles conditions de vitalité que, quoi qu'il arrive, quelles que soient les concessions que le gouvernement puisse accorder, ces lignes s'exécuteront.

Voici ce que les demandeurs en concession m'ont autorisé à déclarer à la Chambre :

« Que si la concession provisoire qui leur est accordée par le gouvernement est confirmée par une loi, ils sont prêts à exécuter les chemins de fer qui font l'objet de cette concession, quelles que soient les autres concessions qui pourraient être accordées en même temps ; ainsi la ligne de Braine-le-Comte à Gand par Grammont et Sottegem, si elle est concédée, ne l'empêchera pas d'exécuter leur projet dans toutes ses parties. »

Je me borne à cette déclaration. Cet article n'a été l'objet d'aucune contestation. Je pense qu'il ne donnera lieu à aucune discussion dans cette Chambre.

M. Visart. - J'ai entendu avec plaisir et je prends acte des engagements des concessionnaires qui viennent d'être officiellement communiqués par l'honorable M. Magherman ; et je convie l'honorable ministre des travaux publics à en prendre acte comme moi.

M. Allard. - Ils m'ont été communiqués également.

M. Visart. - Messieurs, la triple ligne de chemins de fer qui partira de Saint Ghislain dans la direction des Flandres formera des angles aigus. Les directions vers Ath et, d'autre part, vers Renaix, seraient même, sur une grande étendue de leur parcours, presque parallèles. Des honorables représentants et des industriels craignent, comme moi, que, l'une de ces voies terminée, les concessionnaires, pour éviter de se faire en quelque sorte, concurrence à eux-mêmes, tarderaient à travailler activement à la seconde ; toutes les deux ont cependant de suffisantes conditions de vitalité ; elles traversent des contrées riches par leurs gisements et fécondes en productions. Pour éviter ce danger, il y avait deux moyens : 1° exiger dans le cahier des charges, la confection simultanée ; 2° imposer des conditions plus rigoureuses que ne le sont les prescriptions du tertio de l'article premier des conventions.

Mais, messieurs, en présence de l'engagement qui vient d'être promulgué, les inquiétudes doivent se calmer. J'engage néanmoins l'honorable ministre des travaux publics à faire exercer des surveillances spéciales dans le but de la réalisation complète des engagements afin d'en assurer le résultat avantageux aux nombreuses populations intéressées, dont aucune ne doit être déçue de ses espérances, devenues aujourd'hui des droits.

Messieurs dans le rapport de la seciion centrale qui a dû être rédigé précipitamment, l'honorable M. Coomans en a fait la déclaration, on n'a point détaillé les observations et les propositions des sections : la cinquième cependant a proposé de faire passer la ligne vers Renaix par Péruwelz ; je ne sais donc quel a été le sort de cette demande ; cette rectification ainsi indiquée est pourtant d'une grande importance : d'après le texte rectifiable, du reste, du projet la ligne se courberait au nord vers Leuze, avant d'atteindre la ville populeuse et surtout fort industrieuse de Péruwelz ; le raccourcissement ne serait ainsi que d'environ trois kilomètres.

Je le demande, est-on habitué, dans un long parcours, à délaisser l'alimentation, la vitalité d'un centre important pour une si minime fraction ?

Il y a une autre raison importante qui milite pour le passage par Péruwelz, c'est que c'est le point que rencontre une ligne droite de Gand à Valenciennes, et qu'il existe en France un projet sérieux qui unirait ces deux villes, et qui en outre rencontrerait le railway vers Bruxelles, qui, un jour, y conduira plus directement qu'aujourd'hui.

Par ces motifs importants qui, j'en suis certain, seront appréciés, j'engage M. le ministre des travaux publics à aviser à ce qu'on ne délaisse point, pour gagner si peu de distance, les intérêts majeurs de la ville de Péruwelz qui serait privée de l'usage fructueux d'une communication ferrée avec Leuze et qui n'additionnerait point, par conséquent, ses nombreux transports aux conditions de vitalité de la voie dont il s'agit.

M. de Naeyer, rapporteur. - J'ai été très heureux d'entendre la déclaration de l'honorable M. Magherman. Il est donc bien entendu que les lignes dont la concession est demandée par MM. Martens et comp. ne mettront aucun obstacle à la concession du chemin de fer de Braine-le-Comte à Gand. Cette déclaration faite au nom des demandeurs en concession est entièrement conforme à l'opinion exprimée par votre section centrale, c'est donc bien en ce sens que le projet de loi sera voté. Quant à moi, en présence de ces explications franches et loyales, je le voterai de grand cœur.

Car je suis grand partisan de tous les chemins de fer pourvu qu'ils consentent à vivre à côté des autres, c'est-à-dire qu'ils acceptent la concurrence qui est notre droit commun, et qu'ils ne réclament ni privilège, ni exclusion d'autres lignes.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Dans la discussion générale, et dans cette courte discussion de l'article, différentes observations ont été présentées. Je désire en dire quelques mots à la Chambre.

La Chambre a dû se demander si le gouvernement se ralliait aux propositions de la section centrale, communes à tout le projet, c'est-à-dire à l'obligation imposée à toutes les compagnies concessionnaires de subir le parcours de compagnies voisines ou rivales concessionnaires de lignes parallèles ou affluentes, dans le cas où cette obligation ne serait pas stipulée par les conventions.

Comme je ne fais aucune opposition à l'article 9 du projet de la section centrale, qui admet ce droit de parcours, les conventions où n'est pas stipulé ce droit de parcours seront complétées selon l'intention de la Chambre.

Un autre point est de savoir si ces lignes supporteront la concurrence d'autres lignes.

Ce point a été traité par l'honorable préopinant. D'abord les concessionnaires sont liés par les cnhiers des charges. De plus, j'ai reçu, comme l'honorable préopinant, l'assurance que si l'on construisait une ligne que l'on considérât comme une concurrence à la ligne de Bruxelles à Gand, ce ne serait pas un obstacle à l'exécution de cette concession.

L'honorable comte Visart a appelé l'attention du gouvernement sur ce point qu'il y aurait nécessité d'exécuter toutes les lignes. Je pense que les concessionnaires sont assez sérieux, les renseignements assea satisfaisants, les cautionnements assez importants pour donner toutes garanties à la Chambre.

Enfin un dernier détail : on a appelé l'attention sur la nécessité de faire partir l'embranchement vers Tournai de Péruwelz au lieu de Blaton ; c'est un point sur lequel il m'est impossible de me prononcer. Les concessions de chemins de fer sont accordées d'après des avant-projets qui n'ont pas été soumis à des études contradictoires sur le terrain. Je ne pourrais donc donner à l'honorable député de Tournai l'assurance que l'embranchement partira de Péruwelz au lieu de Blaton.

Déjà mon attention a été appelée sur ce point. Je n'ai pu faire qu'une réponse que je dois répéter, c'est qu'il m'est impossible de me (page 1493) prononcer, dès à présent en connaissance de cause et que cette question sera examinée avec toute l'attention qu'elle comporte.

- La discussion est close.

« Art. 1. Le gouvernement est autorisé à concéder :

« Aux sieurs P. A. Maertens, banquier, à Bruxelies, et V. Dessigny,. banquier, à Mons, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges ci-annexés, la construction et l'exploitation de trois lignes de chemin de fer, ayant leur origine au chemin de fer l'Etat à Saint-Ghislain, et aboutissant, la première, à la station d'Ath, commune aux chemins de fer de Tournai à Jurbise et de Dendre et Waes ; la seconde, à la station d'Audenarde du chemin de fer d'Audenarde vers Gand, en passant par Leuze et Renaix ; la troisième, à la station de Tournai, commune au railway de l'Etat et à celui de Tournai, à Jurbise, en passant par Peruwelz.

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Le gouvernement est autorisé à concéder, à des conditions semblables à celles de la convention et du cahier des charges prémentionnés, la construction et l'exploitation d'une ligne de chemin de fer partant de la station de Braine-le-Comte du railway de l'Etat, et, aboutissant au railway de Dendre-et-Waes, en passant par Enghien, avec prolongement jusqu'à Courtrai. »

M. Tack. - La ligne de Braine-le-Comte à Courtrai, dont il est question à l'article 2, n'a rencontré jusqu'à présent dans cette enceinte aucune opposition, aucune contradiction. L'accueil si favorable et si unanime qui a été fait à la demande de concession de cette voie ferrée tant par la section centrale que par le gouvernement prouve qu'elle se présente avec un caractèie d'utilité évidente, incontestable.

En effet, je puis affirmer comme l'honorable M. Magjherman vient de le faire pour le railway de Saint-Ghislain à Gand, que la construction du chemin de fer de Braine-le-Comte à Courtrai est une entreprise intrinsèquement bonne, et qu'elle ne fait aucune concurrence sérieuse aux voies existantes.

De plus le demandeur en concession se borne à solliciter un octroi pur et simple, sans intervention quelconque directe ni indirecte de l'Etat.

La demande en concession est donc de nature à rallier tous les suffrages et à satisfaire tous les membres de la Chambre, même ceux qui seraient le moins disposés à donner de plus grands développements au réseau de notre railway national.

J'entends dire qu'il n'y a point d'opposition, cela confirme tout juste ce que je viens d'alléguer et puisque l'on semble être d'accord pour adopter le projet de loi, je ne veux pas abuser des moments de la Chambre et je me hâte de renoncer à la parole.

M. de Haerne. - Ne serait-il pas nécessaire d'ajouter à l'article le nom du concessionnaire ?

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - C'est inutile. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau la convention signée pour l'exécution de la ligne. Le cautionnement provisoire est versé.

M. de Haerne. - Je n'insiste pas.

M. le président. - MM. Tremouroux et Mascart viennent de déposer un amendement tendant à ajouter après les mots « Dendre-et-Waes » les mots « en passant par Ribecq et Enghien », et à la fin de l'article les mots : « avec embranchement de Ribecq a Tubize ».

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Il m'est impossible de me rallier à cet amendement alors que la convention est signée.

Quant au tracé de la ligne principale, je ne l'ai pas assez étudié pour me prononcer sur les points de passage.

En ce qui regarde l'embranchement, je n'ai pas le pouvoir de l'imposer au concessionnaire.

M. Trémouroux. - Je ne veux pas entraver la discusssion. Je retire mon amendement.

L'article 2 est adopté.

Articles 3 et 4

« Art. 3. Le gouvernement pourra construire ou faire construire d'après un projet et un cahier des charges à arrêter par lui, un chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain, dont l'exploitation se fera par l'Etat. »

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Vous n'ignorez pas les difficultés qui se sont présentées quant au mode de concession des chemins de fer dont on se propose d'abandonner la construction à l'industrie privée en en réservant l'exploitation à l'Etat.

Vous en avez eu une preuve nouvelle dans la discussion relative au chemin de fer de Luttre à Denderleeuw. C'est selon un système à peu près semblable que le gouvernement avait l'intention de vous demander l'autorisation de concéder le chemin de fer dont il s'agit ici.

La question a été compliquée par un amendement de l'honorable M. Orts qui demande qu'au lieu de recourir à l'industrie privée l'Etat lui-même construise la ligne. Il y a une difficulté relativement au mode de concession ; il y en a une seconde qui n'est pas moindre relativement au tracé.

Il se présente deux tracés principaux en faveur desquels des arguments peuvent être invoqués. L'opinion publique, si prompte d'ailleurs à prendre une résolution, n'est pas encore assise sur cette question.

Il y a ici un point extrêmement important ; c'est celui de savoir à laquelle des stations de Bruxelles se reliera le chemin que nous discutons.

A ces difficultés est venue se joindre celle d’une station centrale.

Relativement au mode de concession, il y a un point que je dois faire connaître à la Chambre, c'est que le gouvernement, en suivant la voie de concession, pouvais espérer joindre à la concession du chemin de fer de Bruxelles à Louvain, celle du chemin de fer de Louvain à Beverloo, qui est d'un grand intérêt au point de vue de la défense du pays.

Ce qui tient ce projet en suspens c'est que le gouvernement n’a pu se prononcer jusqu'aujourd'hui pour un mode de concession qui était soumis à votre appréciation et qui a été l'objet d'une discussion à propos du chemin de fer de Luttre à Denderleeuw.

D'autre part, une commission a été nommée pour déterminer le tracé. Elle m'a envoyé son rapport, il y a très peu de jours. La Chambre voudra bien reconnaître que dans la période si laborieuse que nous venons de traverser, il m'a été impossible d'en prendre une connaissance approfondie et de me former une opinion.

Un troisième point se présente maintenant : quels seront les voies et moyens pour exécuter le chemin de fer d'après le mode proposé par l'honorable M. Orts, c'est-à-dire le moyen de pourvoir à une dépense de plusieurs millions ?

En présence de ces difficultés qui, la Chambre voudra bien le reconnaître, existent pour elle aussi bien que pour moi, il me semble qu'elle ferait chose sage, en ajournant à la session prochaine les projets qui font l'objet des articles 3 et 4, et dont un doit être considéré comme écarté par la question préalable proposée hier.

Pour éviter toute incertitude aux honorables collègues qui attachent avec juste raison une grande importance à ce projet, je veux bieu prendre l'engagement de saisir la Chambre dès le commencement de la prochaine session d'un projet de chemins de fer de Bruxelles à Louvain et de Louvain à Beverloo.

A cette époque, nous pourrons nous prononcer sur le mode de construction par l'industrie ou par l'Etat.

Ma proposition tend donc à ajourner à la session prochaine les articles 3 et 4 du projet de la section centrale.

M. Prévinaire. - Je n'adhère pas, quant à moi, à l'ajournement de cette ligne.

Je comprends que cette question doit encore être étudiée.

Je reconnais avec M. le ministre que la session a été très fatigante pour lui et qu'il lui a été impossible de consacrer tout le temps nécessaire aux études à faire. Mais, messieurs, il est une question qui se rattache au chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain, c'est celle des changements que le gouvernement se proposerait d'apporter aux stations de Bruxelles ; je prie M. le ministre de vouloir bien saisir également la Chambre des mesures qu'il aurait l'intention de prendre à cet égard.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Jusqu'à présent, messieurs, le gouvernement n'a pas d'intention arrêtée sur la question dont vient de parler l'honorable membre. Jusqu'à ce que la Chambre soit saisie des projets en questioa, je considérerais comme un acte mauvais d'agir par surprise en usant de la latitude que la Chambre semble disposée à m'accorder.

M. Orts. - En présence de l'engagement pris par le gouvernement, je retire ma proposition.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je retire les dispositions des articles 3 et 4 qui sont communes au projet de la section centrale.

M. Orts. - Je proposerai l'ajournement à la session prochaine des deux paragraphes. De cette manière la Chambre restera saisie.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je me rallie à cette proposition.

M. Rogier. — Messieurs, d'après le projet de loi, le chemin de fer de Bruxelles à Louvain devait être construit par voie de concession ; je pense que le gouvernement fera bien de renoncer à ce mode de construction pour une route qui doit faire partie intégrante et essentielle du réseau de l'Etat.

Cette ligne doit être construite aux frais du trésor public.

Je demande donc non qu'on ajourne, mais qu'on retire les paragraphes proposés. Avec un simple ajournement le gouvernement pourrait persister dans le système de concession. Or, je demande que M. le ministre y renonce et saisisse la Chambre, à l'ouverture de la session prochaine, d'un projet de loi qui autorise le gouvernement à faire construire la route aux frais de l'Etat.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - La Chambre est également saisie de l'amendement de M. Orts ; ainsi, l'ajournement ne préjugerait rien.

- L'ajournement est mis aux voix et adopté.

Article 5

La Chambre passe à l'article 5 du projet de la section centrale, ainsi conçu :

« Le gouvernement pourra concéder, sous des conditions qu'il déterminera, un chemin de fer de Bilsen par Tongres, aboutissant à la station des Guillemins à Liège. »

M. de Renesse. - Messieurs, la question du tracé du chemin de fer liégeois-limbourgeois n'est pas neuve pour la Chambre, elle y a été traitée à plusieurs reprises, notamment en 1851 et en 1853.

En 1851, la section centrale chargée de l'examen du grand projet de (page 1494) travaux publics, d'après îa proposition faite par une section, avait réconnu tous les titres de l'arrondissement de Tongres à être relié au réseau national, et avait proposé la garantie d'un minimum d'intérêt sur un capital d'un million, pour l'embranchement de Tongres à Fexhe ou à Ans près de Liège, la Chambre adopta cette proposition ; mais la garantie d'intérêt ne portant que sur un capital trop minime, l'exécution ne put en avoir lieu.

En 1853, lorsqu'il s'est agi du prolongement de la voie ferrée de Hasselt à Maestricht, la section centrale, à l'unanimité, d'après les observations de plusieurs sections, proposa un amendement au projet du gouvernement pour l'autoriser à imposer à la société du chemin de fer de Maestricht à Aix-la-Chapelle, l'exécution de l'embranchement de Bilsen par Tongres à Liège.

Cette société ayant formellement déclaré au gouvernement qu'elle ne pouvait, pour le moment, se charger de cet embranchement, parce que les engagements pris avec des capitalistes n'assuraient que le capital pour la ligne de Hasselt à Maestricht.

Par suite du refus de cette société, plusieurs honorables membres de la Chambre proposèrent pendant la discussion de ce projet de loi, pour sauvegarder les droits de la ville de Tongres et de son arrondissement, un amendement qui autorisait le gouvernement à concéder, après enquête, les embranchements de chemins de fer de Hasselt à Liège par Tongres, de Bilsen à Liège ou de Tongres à Maestricht par la vallée du Jaer.

Cette proposition fut adoptée par la Chambre ; c'est elle qui donne lieu actuellement à la discussion qui existe entre les villes de Hasselt et de Tongres sur la bonne et la plus utile direction à donner au chemin de fer liégeois-limbourgeois.

Enfin, la section centrale chargée d'examiner le projet de loi de différentes concessions de chemin de fer, proposé par le gouvernement, pendant la session actuelle, a encore reconnu à l'unanimité qne l'arrondissement de Tongres avait des droits incontestables à être tiré de l'isolement où il ne s'est trouvé que depuis trop longtemps ; ainsi la question du chemin de fer liégeois-limbourgeois a été suffisamment instruite pour que la Chambre puisse prendre une décision en connaissance de cause.

Pour mettre cependant la Chambre au courant de l'état actuel de la question, je crois devoir lui présenler quelques observations sur le tracé du chemin de fer direct par Cortessem que l'honorable comte de Theux semble vouloir maintenir en concurrence avec le tracé par Bilsen, que mon honorable collègue et ami M. Julliot et moi, nous avons eu l'honneur de proposer à la Chambre

Lorsque cette ligne directe par Cortessem fut soumise à l'appréciation du gouvernement, de la commission d'enquête et du conseil provincial du Limbourg, le demandeur en concession proposait formellement d'ajouter à sa ligne directe un embranchement par la vallée du Jaer, destiné à relier les villes de Liège et de Tongres à celle de Maestricht et au duché du Limbourg.

Ce projet obtint, en premier lieu, un accueil favorable de la commission d'enquête ; mais à la condition formelle, que la ligne directe dé Liège vers Hasselt, ne serait pas scindée de l'embranchement par la vallée du Jaer ; que ces deux lignes devaient être exécutées simultanément.

C'est sous cette impression que le conseil provincial du Limbourg y a aussi donné à plusieurs reprises son assentiment, toujours il a été entendu que la ligne directe ne devait recevoir son exécution, que pour autant que l'embranchement par la vallée du Jaer fût exécuté en même temps ; il devait y avoir indivisibilité entre ces deux lignes.

Pour donner encore une plus grande adhésion au projet de la ligne directe, les hauts partisans de ce projet avaient formellement promis que le demandeur en concession se chargerait en outre de la construction d'un autre embranchement, pour satisfaire aux intérêts d'un canton très important de l'arrondissement de Tongres ; cet embranchement devait partir de la ligne directe à Jesseren, pour être dirigé par Looz à Saint-Trond ; si nous avions pu ajouter foi à la promesse de l'exécution de ces deux embranchements, nous eussions volontiers donné notre assentiment à un pareil projet d'ensemble, qui eût été d'un intérêt provincial pour le Limbourg, puisque les cantons du nord-est de celle province auraient, par un léger détour, au moyen de l'embranchement de la vallée du Jaer, pu être relié à leur chef-lieu judiciaire, la ville de Tongres et à leurs marchés actuels ; mais, d'après les diverses objections qui nous avaient été faites, même par le demandeur en concession, de ne pouvoir exécuter sumultanément l'embranchement par la vallée du Jaer qu'il avait proposé lui-même ; nous avons dû croire que cet embranchement n'avait rien de sérieux, qu'il n'avait été mis en avant que pour obtenir une plus grande adhésion en faveur de la ligne directe.

Les procès-verbaux des séances du conseil provincial sont là pour prouver que la majorité du conseil n'acceptait la ligne directe que pour autant que les embranchements fussent compris et exécutés en même temps, et surtout celui par la vallée du Jaer.

Aussi, le rapport de la commission du conseil provincial du Limbourg, de la session de l'année dernière, déclarait formellement que le projet de la ligne directe, avec l'embranchement par la vallée du Jaer, et de Jesseren à Saint-Trond, compléterait le système de communication par voie ferrée dans la province de Limbourg.,

Maintenant, l’on peut affirmer avec un certain fondement, que la ligne directe par Cortessem, ne se trouve plus dans la même position, lorsque ce projet a été soumis à'l'appréciation de la commission d'enquête et du conseil provincial de Limbourg ; en effet, l'embranchement par la vallée du Jaer ne pourrait plus être concédé si (erratum, page 1507) la chambre accorde de préférence la concession à la société qui demande à construire un chemin de fer entre Liège et Maestricht.par la rive droite de la Meuse. Ces deux lignes parallèles à une couple de lieues de distance peuvent raisonnablement exister, et cependant, d'après les procès-verbaux du conseil provincial du Limbourg de l'année dernière, l'on a formellement déclaré, sans contestation aucune, lors de la discussion d'une adresse à voter au gouvernement pour obtenir, le plus tôt possible, la concession directe que sans l'embranchement par la vallée du Jaer ; la décision du conseil provincial eût été tout autre, et que l'enquête et le conseil provincial n'ont appuyé cette voie ferrée directe que sous la condition formelle et expresse de l'exécution simultanée de cet embranchement.

« C'est donc à ces conditions que les avis des autorités qui ont été consultées ,et de la commission d'enquête ont été favorables, circonstance dont on peut déduire avec fondement que c'est l'embranchement qui a donné lieu à ce résultat, résultat qui eût été probablement tout autre si l'embranchement par la vallée du Jaer n'avait pas existé ou eût été écarté. »

C'est ainsi que s'exprimait un honorable membre de la députation permanente du Limbourg qui était le plus directement intéressé à la construction de l'embranchement par la vallée du Jaer, et qui rappelait en même temps au conseil provincial que, dans la session de 1853-1854, le conseil avait adhéré formellement à la proposition qu'il avait faite que l'objet de la proposition en délibération (le projet de chemin de fer de la ligne directe) serait voté dans son ensemble et sans aucune espèce de divisibilité de ses différentes parties, en d'autres termes, que l'embranchement de la vallée du Jaer, qui donne véritablement à la ligne son caractère d'intérêt provincial, est essentiellement compris dans la démarche à faire en faveur du projet Benard.

De ces considérations, présentées au conseil provincial du Limbourg depuis 1853, il semble résulter à l'évidence que ledit conseil n'a donné son adhésion à la ligne directe par Cortessem que pour autant que l'on exécuterait en même temps les embranchements et surtout celui par la vallée du Jaer, qui avait été considéré être d'un intérêt provincial.

Vouloir accorder actuellement la concession de la seule ligne directe, sans y comprendre l'un ou l'autre embranchement, ce serait donner la main à une véritable mystification qui aurait été préparée par les hauts partisans du projet Benard, au seul avantage de la ville de Ilasselt, et contrairement aux intérêts d'une grande partie du Limbourg, et surtout de celle qui, déjà sacrifiée en 1839, par un fatal traité, est restée dans un isolement complet depuis 1830, et a perdu ses anciennes et nombreuses relations commerciales avec la partie cédée à la Hollande, (erratum, page 1507) dont un district très considérable ressortissant à l'arrondissement judiciaire de Tongres.

Je ne pense pas que le gouvernement pourrait donner la main à une pareille mystification, dont aurait été dupe un grand corps politique d'une province. Le projet de la ligne directe n'était plus dans la même position où il se trouvait lorsqu'il a été présenté au gouvernement et au conseil provincial du Limbourg, il ne peut plus en être question ; c'est un projet mutilé, qui ne satisfaisait plus aux intérêts de la généralité de la province, puisqu'il forcerait la partie nord-est du Limbourg à faire un grand détour, pour se rendre à ses marchés actuels des villes de Tongres et de Liège, et à son chef-lieu judiciaire ; en outre, la ville de Tongres et les cantons avoisinants seraient forcés de faire un déiour considérable par Hasselt pour se rendre, par voie ferrée, soit à Maestricht ou dans le duché de Limbourg.

Je crois aussi devoir faire remarquer à la Chambre, qu'en 1845, la ville de Hasselt repoussait formellement la ligne directe par Cortcssem, lorsqu'il a été question de prolonger le chemin de fer de Saint-TronJ à Hasselt ; alors un déiour de cinq à six lieues, par Saiut-Trond et Lau-den, pour arriver à Liège, où convergaieul les 7/P0, de ces relations commerciales, ne lui semblait êlrè d'aucune importance encore, au commencement de 18b3, elle s'opposait avec nous a cette ligne directe ; le comte de Theux îui-même nous assurait de son concours, il nous disait que c'était le tour à lavilloct à l'arrondissement de Tongres, d'obtenir le tracé par Bilsen, comme le plus utile à tous leurs intérêts, que le léger détour que la ville de Hasselt aurait à faire n'étàird'aù-cune importance, et si aujourd'hui elle est aussi acharnée que son honorable représentant pour obtenir la direction pour Coriesseui,'cela provient de ce que par la ligne internationale de Hasselt à Maestricht elle va être reliée plus directement avec plusieurs canlons de l'arrondissement judiciaire de Tongres, et que par là elle a l'espoir d'attirer toutes les relations de cette partie du Limbourg vers son marché, au détriment de celui dont la ville de Tongres, chef-lieu de cette pro-, vince, qui ne désire pas être sacrifiée de nouveau, au profit de sa rivale, par trop intéressée, et pouvoir conserver ses anciennes relations commerciales.

Actuellement que plusieurs projets sérieux sont en présence, dont les demandeurs en concession sont prêts à fournir un cautionnement, et qui veulent établir à Liège plusieurs stations, projets qui tous partiraient de Liège, et évitant les inconvénients des plans inclinés, pourraient même être utilisés pour supprimer ces plans, dont l’exploitation occasionne de grands embarras et est très coûteuse ; il ne peut plus (page 1495) être question de relier la ville de Liège à celle de Hasselt par le projet de la ligne directe qui devait avoir son point de départ à Ans au-dessus de Liège et asservissait cette ligne au grand détour des plans inclinés ; déjà la station actuelle des Guillemins présenté l'inconvénient d'être éloignée du centre de Liège de plus de 2,500 mètres ; ensuite la perte de temps sur les plans inclinés augmente la distance de Liège à Hasselt par Tongres d'une manière très notable, que l'on peut évaluer à un parcours d'environ 40 minutes.

En partant de l'intérieur de Liège, ou à plus de proximité de la ville que la station actuelle des Guillemins, l'on évite d'occasionner de plus grandes dépenses, non seulement aux voyageurs, mais aussi pour de transport des marchandises.

La ligne directe par Cortessem n'a donc plus sa raison d'être, puisqu'elle ne satisfait dans son état actuel qu'aux seuls intérêts de la ville de Hasselt, et froisserait ceux d'une forte partie de l'arrondissement judiciaire de Tongres.

Si les embranchements par la vallée du Jaer et de Jesseren par Looz et Saint-Trond avaient été maintenus, l'on aurait pu soutenir que ce projet d'ensemble était d'un intérêt provincial pour le Limbourg. Mais le projet de la ligne directe isolée et mutilée de ses embranchements, n'aurait pas obtenu l'assentiment de la grande majorité du conseil provincial de cette province ; car, d'après le rapport de la commission du conseil provincial de la session de 1853 ; les embranchements devaient compléter le système de communication par voies ferrées dans la province de Limbourg.

Si, par la direction par Bilsen, il y a environ un détour de 5 kilomètres, cela est compensé largement par le plus grand nombre de localités que l'on rattachera à cette voie ferrée, et par conséquent une augmentation notable dans le trafic commercial et par la facilité de communication que l'on accordera, non seulement à la ville de Tongres mais aussi à une partie de son arrondissement avec les villes de Hasselt et de Maestricht, l'on améliore aussi la position matérielle de ce territoire du Limbourg, resté jusqu'ici en dehors de toute communication directe avec le système général de nos chemins de fer.

S'il y avait un grand inconvénient à ce léger détour par Bilsen, déjà largement compensé, par l'évitement et les lenteurs des plans inclinés, l'on pourrait, comme cela a eu lieu pour d'autres lignes ferrées de l'Etat, réduire les péages à environ la distance légale.

Nous demandous à la Chambre de vouloir examiner avec impartialité la juste réclamation de cette partie du Limbourg, qui est restée en dehors de tous les grands travaux décrétés depuis 1830, et qui, par sa position tout exceptionnelle, mérite que la législature intervienne, pour qu'à son tour, elle obtienne une voie ferrée qui puisse satisfaire à ses plus grands intérêts.

Lorsque, chaque année, les Chambres votent des chemins de fer, pour différentes parties de notre pays, déjà reliées au réseau national, il y aurait une véritable injustice à ne pas admettre actuellement la proposition faite par mon honorable collègue M. Julliot et moi, de doter la ville de Tongres et son arrondissement d'un railway destiné it les retirer de l'isolement où on ne les a laissés que trop longtemps.

J'espère que la Chambre ne posera pas un déni de justice envers la partie du Limbourg qui, dans l'intérêt général, a dû subir un morcellement fatal à tous les intérêts, et qui est encore à attendre une compensation aux sacrifices imposés pour consolider la nationalité belge ; car, jusqu'ici, le gouvernement n'a pas tenu la promesse formelle, faite en 1839, de rattacher plus intimement cette partie du Limbourg, par des travaux publics ; aussi, alors l'organe du gouvernement, sous le ministère de l'honorable comte de Theux, déclarait à la Chambre : « Peut-être avec le temps, la Belgique parviendra-t-elle à donner aux provinces restées belges l'importance qu'elles avaient dans leur intégralité ; il y va d'ailleurs de son bonheur à ce que le Luxembourg belge, et le Limbourg belge n'envient jamais le sort du Luxembourg germanique et du Limbourg hollando-germanique. »

Nous venons donc réclamer cette promesse formelle du gouvernement, faite au moment où le Limbourg allait être mutilé, perdre la plus belle partie de son territoiie, et où, particulièrement, l'arrondissement judiciaire de Tongres a dû se résigner au dur sacrifice d'une partie de son ressort judiciaire, et à la perte de ses nombreuses et anciennes relations avec le territoire cédé ; il est donc équitable que la Chambre et le gouvernement tiennent compte de la position tout exceptionnelle de cette partie du Limbourg, et qu'on lui accorde la voie ferrée, de Bilsen, par Tongres à Liège.

M. Julliot. - Messieurs, je n'ai pas l'habitude de défendre des intérêts de clocher, cela me gêne trop, il est beaucoup plus dans ma nature de les combattre, et la question qui est posée me permet ce terrain. J'ai pour point de mire un clocher à bon droit modeste autrefois, qui aujourd hui est enivré ce ses succès et ne vise à rien moins qu'à absorber la province tout entière. Cette prétention qui n'a pas de nom est néanmoins soutenue par le député le plus influent de la Chambre.

J'examinerai donc la situation au point de vue de l'intérêt général en ce qu'il a de connexe avec les intérêts dont la défense m'est confiée.

Ici, je ne représente pas plus l'une que l'autre de ces localités ; toutes elles sont égales devant mon devoir, et quand je consulte les sympathies qui me sont innées, ce ne sont pas les faibles qui ont à craindre mon abandon.

Nous verrons si tout le monde est animé de ces mêmes sentiments.

La question des chemins de fer est mieux comprise de jour en jour, on sait que dans toute localité un peu importante où il n'y a pas de chemin de fer ou bien où il y en a un qui est anti-économiquement tracé, tous les habitants doivent s'y faire rentiers ou émigrer avec leurs capitaux, ils ne sont plus égaux devant la loi du travail, car le travail y devient impossible.

Quand, en Belgique, la question des chemins de fer s'est présentée, il fallait, de prime abord, se fixer sur un système avouable, il fallait ou ne donner que des concessions pures et simples en se disant que partout où un chemin de fer pouvait se payer, il s'en créerait un, et c'était le plus juste ; ou il fallait, comme on l'a fait, mêler le trésor public aux entreprises, mais alors, au lieu de dépenser la fortune publique sur quelques points du pays au choix, et souvent d'après les nécessités électorales du moment, au lieu de faire des doubles, triples et quadruples emplois, il fallait pourvoir toutes les localités un peu importantes de cet élément indispensable et ne pas s'occuper toujours des mêmes intérêts.

L'Etat en se mêlant pécuniairement à la construction des chemins de fer, a déprécié les valeurs des uns et a donné des plus-values fabuleuses aux biens de quelques privilégiés ; la loi d’expopriation est vicieuse sous ce rapport ; il faut la refermer et nous traiterons cette question ç une autre occasion.

J'ai dit, messieurs, que je traiterais cette question au point de vue général.

Eh bien, est-il politique au point de vue national, de laisser croire à certains groupes de population, que tout est pour les uns, rien pour les autres, que des parties déterminées du pays restent condamnées à l'oubli, qu'elles sont mises hors la loi commune ? Telle est néanmoins la position qu'on nous fait. Oh ! s'il ne s'était créé des chemins de fer que dans les conditions ordinaires, nous n'aurions rien à dire. Mais nous voyons les ministres successivement se torturer l'esprit pour inventer des combinaisons propres à faire intervenir le trésor public sous une formé déguisée au profit de quelques privilégiés.

Mais s'agit-il de nous, et je parle au nom d'une partie du pays qui a dans son sein une des neuf villes où siège une cour d'assises, alors le gouvernement n'a plus d'idées du tout, son génie est dépensé et nous sommes inscrits pour mémoire.

Ce que nous avons donc à conquérir, c'est la bonne volonté du gouvernement qui nous fait complètement défaut.

Messieurs, qu'on veuille remarquer que dans un pays de liberté, la désaffection ne se crée pas par la compression, mais qu'elle naît de la partialité et de l'injustice dans les pouvoirs publics.

En ce qui me concerne je n'accepte pas plus longtemps pour mes commettants ce rôle d'abnégation et d'infériorité ; ce rôle est plus factice que réel, il est dicté par de bons sentiments, par ia confiance, et par des sympathies gouvernementales, mais les meilleurs sentiments, quand ils ne sont payés d'aucun retour, ont leur heure de découragement et alors on reconnaît, on dit et on écrit, qu'on est mal gouverné.

Nous, nous sommes en instance depuis six ans ; dans cette période trois fois la Chambre nous a témoigné de ses sympathies par l'organe de ses sections centrales, mais à quoi cela nous mène t-il ? A rien, tant que le gouvernement ne sera pas de son avis.

Il est vrai de dire que de temps en temps le gouvernement nous parle d'une concession partielle sur laquelle il paraît concentrer toutes ses affections, mais ce projet se montre sous des formes désastreuses pour nos relations et on doit savoir que des tracés anti-économiquement établis font en mal ce qu'ils devraient faire en bien.

A l'ouest de notre province un tracé de chemin de fer a ruiné la ville de Saint-Trond, ses habitants ne me démentiront pas, les loyers et les prix de vente des maisons sont réduits de 50 p. c. depuis dix ans à Saint-Trond comme à Tongres, et ce fait constitue le « criterium » de la décadence de ces localités. Je vais donc poser à M. le ministre quelques questions auxquelles il voudra bien répondre franchement et sans réticences. Un demandeur en concession a proposé en 1852 un chemin de fer d'Ans à Hasselt avec embranchement d'Eure à Maestricht par la vallée du Jaer, puis on y a joint une ligne sur St-Trond.

Cette combinaison, si elle avait été sérieuse, convenait du moins à deux de nos cantons.

Cette demande en concession a donc été soumise à une enquête et aux conseils provinciaux de Liège et du Limbourg ; tous les avis ont été favorables en ce sens, qu'on a fait au demandeur la condition sine qua non, de la construction simultanée des lignes vers Hasselt et vers Maestricht, c'est-à-dire que dans le cas où il n'aurait voulu construire qu'une ligne unique, ces mêmes avis devenaient explicitement défavorables et alors que reste-t-il ? Rien.

Maintenant est-il vrai que cet entrepreneur ne veut plus de la concession de la ligne vers St-Trond, ou s'il en veut encore, est-il prêt à prendre un engagement de ce chef ? Première question.

(page 1496) 2° Est-il vrai que cet entrepreneur ne veut s'astreindre à construire la ligne par la vallée du Jaer à Maestricht, que pour autant que le gouvernement s'engage à ne jamais concéder de ligne directe de Liège à Maestricht par le vallon de la Meuse, engagement que nul gouvernement ne peut prendre ? Deuxième question.

3° Est-il vrai que cet entrepreneur ne veut plus exécuter que la ligne unique d'Ans à Hasselt, et que de chef il demande encore des faveurs que l'Etat ne doit et ne peut lui accorder ? Troisième question.

4° Est-il finalement vrai que plusieurs autres demandeurs se présentent avec des projets beaucoup plus complets, qu'un d'eux a écrit à M. le ministre que son cautionnement était prêt et que M. le ministre n'a pas plus répondu à l'un qu'à l'autre ? Quatrième question.

J'attends à ces questions une réponse nette et franche comme M. le ministre est dans l'habitude d'en donner. Persuadé qu'il est qu'en fait de gouvernement, la confiance repose principalement sur la droiture.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je n'ai jamais négocié sur ce point avec le demandeur en concession, il n'a été question que d'une ligne directe de Liège à Hasselt, ; je n'ai pas eu l'occasion d'exiger des explications sur le reste de la concession.

M. Julliot. - Il est donc bien constaté que cet entrepreneur qui s'était procuré des avis favorables en exhibant trois lignes de chemin ne veut plus en faire qu'une seule destinée à nous ruiner.

Eh bien, messieurs, dans ce cas les quatre cinquièmes de nos populations sont indignement dupés et par qui ?

Nous demandons au gouvernement qu'il concède un tracé qui conserve notre statu quo et il nous menace d’une ligne dérivative de nos relations d'affaires.

Ce rôle peut convenir à un entrepreneur de routes, il fait son métier et peut parfois, pour se les rendre favorables, promettre aux populations ce qu'il n'a pas envie de tenir, mais le gouvernement ne peut se faire le complice de cette duperie sans perdre de sa considération et s'attirer le blâme sévère des populations mystifiées.

Voici donc, messieurs, la question dans toute sa simplicité.

Nos relations principales sont établies avec le nord-est de la province, avec Maestricht et la rive droite de la Meuse.

On construit en ce moment un chemin de fer de Maestricht à Hasselt qui se place entre nous et nos relations.

Nous demandons à être rattachés à cette ligne à un point donné, afin que les habitants du nord-est pour continuer avec nous leurs relations trouvent en même temps une ligne ferrée sur Tongres et une sur Hasselt. Par cette combinaison nous serons aussi bien reliés à la ville de Maestricht qu'à celle de Hasselt, et ce moyennant le sacrifice d'un détour de cinq kilomètres au plus, sur quarante entre Liège et Hasselt et tous les intérêts seront saufs, tandis que par la ligne favorite, du corps des ponts et chaussées dont l'honorable M. Dechamps a fait une apothéose que je n'accepte que sous bénéfice d'inventaire, les populations dn nord-est seront forcées de déplacer leurs affaires de Tongres à Hasselt, ville comblée de plus d'avantages que nulle autre du pays.

On lui creuse un canal, elle a trois directions de chemin de fer, mon arrondissement n'a rien. Néanmoins le chemin de fer futur doit encore être dirigé au point de vue exclusif de Hasselt.

Tels sont les principes de justice distributive que préconisent ses défenseurs.

Vous voyez donc, messieurs, qu'ici encore c'est le quadruple emploi pris sur le fait.

Messieurs, si l'honorable député de Hasselt qui se refuse au détour de 5 kilomètres sur quarante, avait médité les conséquences économiques de son projet pour notre arrondissement, il s'arrêterait dans cette croisade, mais il ne voit que les détours, tandis que ceux qui sont derrière lui y découvrent la spoliation d'une ville au profit d'une autre. Ce n'est pas une cession de territoire qu'on nous prêche, mais la cession des affaires pour nous et pourquoi dissimuler le motif de cette opposition, ne vaut-il pas mieux d'appeler les choses par leur nom ? C'est plus sincère.

Il existe un chemin de fer de Maestricht à Hasselt, nous demandons à être reliés à cette ligne.

Dans ce système, Hasselt fera un détour de cinq kilomètres snr quarante, et le charbonnier de Liège poussera un waggon de charbon de moins dans l'un ou l'autre village de la Campine, mais les intérêts engagés du grand nombre seront respectés et Tongres restera le plus grand dépôt alimentaire pour Liège.

Nous pourrons continuer nos relations avec le nord-est de la province, nous irons en chemin de fer à Maestricht comme à Hasselt et on n'expropriera personne.

Dans le système de l'honorable comte de Theux, nous passerons par Hasselt pour aller à Maestricht avec 20 kilomètres de détour, nous serons séparés de nos affaires et le marché de Hasselt prendra la place de celui de Tongres ; le dépôt alimentaire se déplacera au profit de Louvain et du Brabant ; Liège exportera un waggon de charbon de plus et recevra trois waggons d'aliments en moins et, à froid, vous aurez créé une ruine assurée.

Qui de vous se trouve embarrassé dans ce choix ?

Le but de notre proposition, qui est bien un amendement, car cette question est au rôle de la Chambre depuis cinq ans et se trouve dans deux lois qui ne sont pas exécutées, le but de notre amendement est de conserver les relations établies et de nous laisser en communication avec Maestricht et Hasselt à la fois, parmi le sacrifice de 8 kilomètres de détour sur quarante.

Messieurs, hier, dans une question assez difficile, la Chambre a émis pour mon arrondissement un vote sympathique que je n'oublierai jamais, le gouvernement a dû le comprendre, et, selon moi, il n'est pas de ministre assez fort pour signer l'acte qui nous écrase, la main lui ferait défaut au moment de la signature.

Messieurs, nous avons les plus belles institutions du monde, nous avons la tribune et la presse qui veillent, dit-on, à ce que tous soient égaux devant la loi, à ce que l'impartialité et la justice régnent en tout et pour tous.

Et en effet, quand on demande à un garde civique une heure de service qui n'est pas due.

Quand un curé met un instituteur au ban des croyants ;

Quand on conteste les droits électoraux au premier savetier ou paysan venu, la presse s'émeut et dix voix éloquentes se lèvent pour le défendre.

Mais quand dans les intérêts matériels on foule scandaleusement aux pieds les notions élémentaires du juste et de l'injuste, c'est à peine si on vous écoute et on vous abandonne à votre sort.

J'ai dit que nous avons d'excellentes institutions, que les bonnes institutions doivent faire les bons gouvernements, que néanmoins nous ne figurons depuis 25 ans au bilan du pays que comme contribuables.

J'établirai donc une hypothèse où ceux qui me liront prendront ce qui leur convient ; et je dirai que, si nous étions gouvernés par une oligarchie financière, égoïste et cupide, affectant hypocritement des vertus qu'elle n'a pas, ne professant en réalité d'autre culte que celui du veau d'or, et portant son sens moral et sa conscience dans ses poches, nous ne pourrions être autrement gouvernés que nous ne le sommes. Je convie donc la Chambre à voter ces amendements.

J'ai dit.

M. de Theux. - Messieurs, tous les discours que vous avez entendus dans cette séance et dans celle d'hier avaient été produits avec plus d'extension encore dans la discussion qui a précédé le vote de la loi du 24 juin 1853. De plus, messieurs, la ligne qu'on vous propose de décréter est décrétée par cette loi.

En effet, que propose-t-on ? D'autoriser le gouvernement à concéder une ligne de Bilsen par Tongres à Liège.

Eh bien, messieurs, l'article 2 de la loi du 24 juin 1853 porte :

« Le gouvernement est autorisé à concéder après enquête, les embranchements de chemin de fer de Hasselt à Liège par Tongres, de Bilsen à Liège ou de Tongres à Maestricht, par la vallée du Jaer. »

M. le ministre a dit, dans la séance d'hier, qu'il consentait à ce que la discussion s'ouvrît sur l'amendement, afin d'entendre les arguments pour et contre le tracé dont il s'agit. Les honorables membres viennent de traiter longuement cette question ; qu'il me soit permis de la traiter en peu de mots.

L'honorable M. Julliot a demandé à M. le ministre si le concessionnaire est disposé à construire la ligne de Tongres à Maestricht par la vallée de Jaer. Voici ce que je puis dire, d'après mes informations particulières. Le concessionnaire est disposé à construire cette ligne, mais en tant que le gouvernement n'ait pas admis la ligne directe de Liège a Maestricht.

L'honorable membre a demandé si le concessionnaire a l'intention de faire une ligne de Tongres à Saint-Trond. Sur ce point je suis autorisé à dire : oui. Toutefois, si M. le ministre des travaux publics veut concéder la ligne de Hasselt à Liège par Tongres, le concessionnaire prendra l'engagement de construire la ligne de Tongres à Saint-Trond dès que la loi aura autorisé le gouvernement à faire la concession de cet embranchement que le concessionnaire considère comme avantageuse.

Voilà, messieurs, les renseignements que je tiens de l'honorable demandeur en concession.

Cet embranchement de Tongres à Saint-Trond a de l'importance, puisqu'il relie les deux principaux cantons, Tongres et Léan. Mais puisque M. le ministre des travaux publics a désiré des éclaircissements sur le tracé, je suis dans l'obligation de répondre aux observations qni ont été présentées.

De quoi s'agit-il ? De relier Tongres à Liège ; la Chambre avait accordé la garantie d'un minimum d'intérêt d'un million ponr cette ligne ; postérieurement M. Benard est venu demander la construction d'une ligne d'Ans à Tongres sans la garantie d'un minimum d'intérêt ; à cette ligne, il en ajoutait une autre qui était désirée par la ville de Tongres, c'est-à-dire une ligne de Tongres à Hasselt.

Mais la ville de Tongres a demandé que cette nouvelle ligne fût construite avec un détour par Bilsen, ce qui occasionnait à l'entrepreneur un surcroît de dépenses.

Cette réclamation était-elle raisonnable ? la ville de Tongres n'aurait-elle pas dû accepter avec empressement ce nouvel embranchement de Tongres vers Hasselt ? Je pense qu'oui. Une enquête a été ouverte ; à trois reprises différentes, le conseil provincial dn Limbourg s'est prononcé en faveur de ce tracé ; le conseil provincial de Liège, le conseil communal de Hasselt, celui de Liège, la chambre de commerce de Verviers, toutes les autorités enfin qui ont été consultées, se sont prononcées dans le même sens.

Maintenant, on dit qu'il a surgi un tracé nouveau partant de Bilsen (page 1497) par Tongres, aboutissant à la station des Guillemins à Liège. Je ne m'oppose pas à ce que M. le ministre des travaux publics examine cette nouvelle demande ; mais ce à quoi je m'oppose, c'est qu'on abroge la loi de 1853 qui est un droit acquis.

Je dis qu'au point de vue de l'intérêt de la province de Limbourg et de l'intérêt général du pays, c'est le tracé direct qui doit prévaloir, puisque ce tracé relie, par la distance la plus courte, les deux chefs-lieux, de province, Liège et Hasselt.

M. le ministre des travaux publics n'ignore pas qu'il y a deux autres projets, l'un présentant un caractère international, partant d'Ans et se dirigeant sur Tongres, Hasselt et Breda ; l'autre, partant de Diest et se dirigeant sur Hasselt. La Chambre aura à s'occuper ultérieurement de ces questions.

Eh messieurs, pourquoi tant insister sur ce détour par Bilsen ? Parce qu'on craint que le commerce de quelques communes rurales ne se détourne de la ville de Tongres. Mais cette crainte n'est pas fondée ; le commerce peut toujours se faire à pied ou en voiture, la distance étant très courte jusqu'à Tongres.

Et d'ailleurs est-ce à l'intérêt de quelques communes rurales qu'on doit sacrifier l'intérêt de deux chefs-lieux de province et un intérét international ? Voilà la question.

Maintenant que M. le ministre des travaux publics examine consciencieusement la valeur des enquêtes, d'après les faits qui se produisent, d'après les déclarations faites par les demandeurs en concession, d'après les nouvelles demandes de concession qui pourront se présenter, rien de mieux ; nous ne faisons aucune loi au gouvernement, nous demandons uniquement que l'affaire soit examinée au point de vue de l'intérêt général.

Encore une observation : c'est que le tracé de M. Benard utilise, au profit de l'Etat, le parcours de.... jusqu'à Ans. (Interruption.)

Le gouvernement n'a pas l'intention d'abandonner les plans inclinés d'Ans, puisqu'il demande à la Chambre de nouvelles sommes pour y apporter des améliorations.

Je n'en dirai pas davantage ; je pense que MM. les députés de Tongres ne doivent pas insister sur le vote de leur amendement, puisque cette disposition est littéralement écrite dans la loi de 1853 ; mais je ne m'oppose en aucune façon à ce que le gouvernement examine de nouveau l'affaire et s'entoure de tous les renseignements.

M. Lesoinne. - Messieurs, je considère l'amendement de l'honorable M. de Renesse, comme ayant pour objet la construction d'un chemin de fer qui n'est que la tête d'une voie ferrée, qui se prolongera en Hollande ; le chemin de fer borné à la province de Limbourg ne présente pas, à mes yeux, des chances de succès capables d'attirer des capitalistes ; mais, je suis persuadé qu'il se continuera en Hollande.

J'ai à faire une recommandation à M. le ministre des travaux publics.

Dans le crédit de 21 millions pour le chemin de fer, il y a des fonds pour l'établissement de la station de Liège ; si la station doit s'établir à l'intérieur, et en cela, il serait peut être possible de concilier les besoins bien entendus de la ville avec ceux de l'administration, je prierai M. le ministre des travaux publics de vouloir bien communiquer aux autorités locales les plans auxquels il serait disposé à donner son approbation ; son prédécesseur, l'honorable M. Van Hoorebeke, avait consenti à faire cette communication.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, je pense avec l'honorable M. de Theux que l'amendement ne peut pas avoir une très grande portée, puisque le gouvernement a déjà, en vertu de la loi de 1853, le droit de concéder un chemin de fer de Hasselt à Liège.

L'honorable M. Lesoinne appelle l'attention du gouvernement sur la nécessité de ne pas précipiter la solution des questions qui se rattachent à l'établissement d'une station à l'intérieur de la ville de Liège ; je m'engage, comme mon honorable prédécesseur, à communiquer à l'autorité communale de Liège, avant de prendre une résolution, les projets auxquels le gouvernement serait disposé à donner son assentiment, pour autant que ces projets impliquent l'établissement de la station à l'intérieur de la ville de Liège. (Aux voix ! aux voix !)

M. Delfosse. - L'article 5 du projet de la section centrale a été écarté par la question préalable. Il ne reste à voter que sur l'amendement de MM. de Renesse et Julliot. Le gouvernement s'est rallié à la première partie de cet amendement. La seconde partie a fait l'objet d'un incident au commencement de la séance.

M. de Theux. - La seconde partie a été écartée.

M. de Renesse. - J'ai proposé la seconde partie de mon amendement, parce que je pense que la ligne directe n'est plus dans la même position où elle s'est trouvée lorsque le projet de cette ligne a été soumis à l'appréciation du gouvernement et du conseil provincial du Limbourg, l'embranchement par la vallée du Jaer ne paraissant plus pouvoir recevoir son exécution, ni celui de Jesseren par Looz à Saint-Trond, que le demandeur en concession n'avait jamais promis.

Si le gouvernement veut voter la première partie de mon amendement, je ne m'y oppose pas, et je retirerai la seconde partie, pourvu que, par ce vote, la Chambre entende donner une « manifestation » en faveur de la ville et de l'arrondissement de Tongres, restés jusqu'ici dans un isolement complet.

M. de Theux. - Maintenant que l'amendement est retiré, nous demandons que le gouvernement instruise la chose à fond ; si les enquêtes déjà faites sont insuffisantes, qu'on en fasse de nouvelles et qu'on exécute la loi de 1853 dans son véritable esprit.

M. de Renesse. - J'ai demandé que la Chambre émît un vote sur le premier paragraphe de notre amendement comme témoignage de sympathie.

- Un grand nombre de voix. - Oui ! oui ! votons ! aux voix ! La clôture !

- La clôture est mise aux voix et prononcée.

L'amendement de M. de Renesse et Julliot, réduit au premier paragraphe, est mis aux voix et adopté.

Article 6

« Art. 6 du projet de la section centrale. Le gouvernement pourra concéder, à des conditions semblables à celles dont il est question à l'article premier, la construction et l'exploitation d'un chemin de fer de Mariembourg à Chimay, avec prolongement éventuel jusqu'à la frontière de France. »

M. de Baillet-Latour. - Messieurs, j'aurais désiré présenter quelques considérations relativement au projet de chemin de fer en discussion ; mais, comme la Chambre paraît avoir hâte d'en finir, je me bornerai à une seule observation en ce qui concerne le tracé de Mariembourg à Chimay. Je vois que ce tracé suit le cours de la petite rivière appelée Eau Blanche. Or, cette direction laisse en dehors de la ligne nouvelle la ville très industrielle de Couvin, qui, en cas de raccordement ultérieur avec la France, ne se rattachera à cette ligne que par son embranchement actuel du chemin dè fer d'Entre-Sambre-et-Meuse, restant ainsi bout de ligne, et isolée, au lieu de se trouver sur le parcours même de la communication principale. Assurément, je ne prétends pas dire qu'il n'y ait pas eu de bonnes raisons pour donner la préférence à la vallée de l'Eau Blanche sur celle où est situé Couvin.

Les hommes de l'art qui ont fait les études préliminaires sur place ont sans doute des calculs plausibles à faire valoir à l'appui de leur choix. Mais encore serait-il convenable que ces raisons, que ces calculs eussent été connus.

- Plusieurs voix. - Nous sommes tous d'accord.

M. de Baillet-Latour. - Si tout le monde est d'accord, je renonce à la parole.

- L'article 6 est mis aux voix et adopté.

Article 7

« Art. 7. Le gouvernement pourra concéder, aux sieurs Sedille et Cie à Bruxelles, la construction et l'exploitation, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges ci-annexés, d'un chemin de fer de Blankenberghe vers la station du chemin de fer de l'Etat à Bruges. »

M. Coppieters 't Wallant. - Je demande la parole.

- Un grand nombre de voix. - C'est inutile, on est d'accord.

M. Coppieters 't Wallant. - J'ai une simple observation à soumettre à l'examen du gouvernement. Je n'ai n'en à dire quant au chemin en lui-même ; je désire qu'il s'exécute le plus promptement possible, mais je désire aussi qu'il prospère et qu'il soit utile aux populations dans l'intérêt desquelles il a été conçu ; mais j'ai éprouvé des craintes à cet égard en voyant qu'on avait arrêté à l'avance un tarif tellement élevé qu'il n'est en rapport ni avec le tarif de l'Etat ni avec aucun des tarifs des lignes concédées, pour les marchandises, pour le poisson les prix sont le double de ceux d'Ostende à Bruges. Je demanderai seulement que M. le ministre veuille bien conférer avec les concessionnaires et tâcher de faire en sorte qu'ils consentent à la modification de cette partie de leur contrat. Leur propre intérêt du reste doit les y engager.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, le chemin de fer dont il s'agit a une plus grande importance qu'on ne semble le croire ; il s'agit d'utiliser, ce qui a été tant recommandé, les accotements des grandes routes aujourd'hui peu fréquentées. Sous ce rapport, comme système nouveau, ce chemin a réellement une certaine importance ; il fallait donner la garantie d'un tarif rémunérateur pour encourager des capitalistes à consacrer des fonds à cette entreprise qu'on croit utile. L'honorable M. Coppieters voudra bien reconnaître que l'intérêt des concessionnaires est le même que celui des populations, que pour que l'entreprise soit fructueuse il faut que le chemin de fer soit fréquenté et pour cela qu'il offre ses services à des prix convenables.

Le tarif dont il est parlé est un maximum qu'il était nécessaire d'insérer dans les cahier des charges pour donner au concessionnaire une grande latitude. J'ai lieu d'espérer que ce maximum qui est plus élevé que le tarif des chemins de fer de l'Etat ne sera pas appliqué ; si l'honorable membre le désire, je prends l'engagement de faire une nouvelle démarche auprès des concessionnaires pour que ce maximum qui effraye l'honorable membre soit réduit.

M. Sinave. - Après la déclaration que vient de faire M. le ministre, je crois pouvoir renoncer à la parole. Il est en effet, de l'intérêt des concessionnaires de diminuer leur tarif.

- L'article 7 est mis aux voix et adopté.

Articles 8 et 9

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je me rallie aux articles 8 et 9 proposés par la section centrale.

« Art. 8 (proposé par la section centrale). Toute concession de chemin de fer sera précédée du dépôt d'un cautionnement, lequel sera de 100,000 francs, pour les conventions provisoires et de 5 p. c. du coût des travaux à exécuter, pour les conventions définitives.

« Le délai stipulé dans une convention provisoire, pour compléter le (page 1498) cautionnement de 5 p. c., sera de six mois au plus, et ne pourra être prorogé que de trois mois, dans des circonstances extraordinaires. »

- Adopté.


« Art. 9 (proposé par la seciion centrale). Dans toute concession de chemin de fer, le gouvernement se réservera la faculté de régler le droit de parcours, moyennant une indemnité équitable. »

- Adopté.

Articles additionnels

M. le président. - Il reste à statuer sur les divers amendements qui ont été déposés hier et aujourd'hui.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Il me semble impossible pour la Chambre de se prononcer en connaissance de cause sur tous les amendements qui ont surgi dans une discussion aussi rapide que celle-ci. La plupart de ces amendements ont été déposés dans la séance d'hier à la suite d'une discussion assez confuse, et ceux qui ont été déposés dans la séance d'aujourd'hui sont à peine connus.

Je propose donc que la Chambre maintienne la décision qu'elle a prise, de ne rattacher au projet déjà voté aucun des amendements proposés.

M. Orts. - Je propose à la Chambre d'appliquer à tous les amendements nouveaux la question préalable qu'elle a appliquée aux amendements qui avaient été admis par la section centrale. Je crois que cela est juste ; car sans cela nous aurions traité d'une manière peu équitable les amendements qui ont déjà été écartés.

D'ailleurs, comme l'a dit M. le ministre des travaux publics, il est réellement impossible à la Chambre de se prononcer d'une manière un peu sage sur le déluge d'amendements qui a fondu sur elle dans la séance d'hier. Plusieurs de ces amendements n'ont pas même été imprimés ; ils ne sont pas plus connus par les membres de la Chambre que par le gouvernement.

Il est donc impossible au gouvernement ni de s'y rallier ni de les combattre, parce qu'il lui est impossible d'apprécier les conséquences de chacune de ces propositions. Le seul moyen de se tirer d'affaire et de faire de la bonne et sage besogne, c'est d'appliquer la même mesure à toutes les propositions.

Je propose donc la question préalable sur tous les amendements.

M. de Haerne. - Je ne parlerai que de la question préalable. Cependant je dois dire qu'elle rentre dans les observations qui ont été faites tout à l'heure par M. le ministre des travaux publics.

Je conçois très bien les motifs allégués par M. le ministre des travaux publics et par l'honorable M. Orts. En général ces raisons me paraissent fondées. Mais d'après la connaissance que j'ai des amendements, je crois qu'il y a au moins une exception à faire. Il est du reste possible que l'observation que je vais avoir l'honneur de présenter s'applique à d'autres amendements.

Il y a, messieurs, une exception à faire pour un amendement auquel j'ai apposé ma signature ; c'est celui qui concerne le chemin de fer de Mariemont à Marchiennc. Il y a des motifs spéciaux pour ne pas prononcer la question préalable sur cet amendement. Car sur quoi la question préalable est-elle motivée ? Sur l'absence d'examen.

Or, j'aurai l'honneur de vous dire que cette question a été si bien examinée, que la concession a été demandée depuis 1847, que le cautionnement est prêt, et qu'un rapport favorable à cette concession a été fait par les ingénieurs du gouvernement.

J'ai établi dans la séance du 8 courant les droits de M. Dubois-Niboul à la priorité.

La raison qu'on a alléguée ne peut donc être appliquée à cet amendement, et je demande qu'il soit examiné par la Chambre. On verra alors qu'il est un affluent au railwvay de Braine à Courtrai, et qu'il doit desservir le pays situé dans la direction de l'Entre-Sambre-et-Meuse pour la spécialité des charbons du Centre.

M. Orts. - Messieurs, je propose à la Chambre la question préalable comme une mesure d'équité, pour assurer à toutes les propositions nouvelles le même traitement et le même examen sérieux. Or l'exception que réclame l'honorable M. de Haerne, si elle était admise par la Chambre, nous constituerait en état flagrant d'injustice ; nous venons d'écarter tout à l'heure une proposition émanant des honorables MM. Tremouroux et Mascart, qui se rattachait à un chemin de fer destiné à desservir les mêmes localités, les mêmes intérêts que celui pour lequel l'honorable M. de Haerne demande une exception. Nous aurions été injuste pour la proposition des honorables MM. Tremouroux et Mascart si, après l'avoir écartée, nous en examinions une autre parallèle et identique.

- La clôture est demandée.

M. Thibaut. - Je ferai une observation bien simple qui mettrait peut-être fin à tout débat. On propose la question préalable sur tous les amendements. Mais leurs auteurs consentiraient probablement à les retirer si la Chambre voulait les recommander à l’examen sérieux de M. le ministre des travaux publics.

- Plusieurs membres. - On les recommande tous. (Interruption.)

M. Thibaut. - Je prends acte de l'unanimité avec laquelle la Chambre recommande toutes les propositions déposées sur le bureau à l'attention de M. le ministre. J'espère que plusieurs seront converties en projet de loi au début de la session prochaine.

- La question préalable proposée par M. Oris est mise aux voix et prononcée.

M. Lesoinne (pour une motion d’ordre). - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

Messieurs, nous avons vu les inconvénients qu'il y avait à présenter des projets de concessions aussi tardivement que ceux qui viennent d'être examinés.

Il existe beaucoup de demandes sérieuses et pour lesquelles les demandeurs en concession sont prêts à déposer le cautionnement et à faire les capitaux nécessaires pour l'exécution. Je prierai M. le ministre de bien vouloir examiner ces demandes avec le plus grand soin dans l'intervalle des sessions et de vouloir les soumettre à la Chambre à sa rentrée.

Lorsque nous arrivons ici au commencement de la session, nous n'avons pour ainsi dire rien à faire. Nous utiliserions notre temps en examinant ces concessions, qui sont, selon moi, d'une grande importance pour le bien-être du pays.

J'engagerai donc M. le ministre à vouloir présenter les demandes en concession dans les premiers jours de la session prochaine.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je n'hésite pas à me rallier à la proposition de l'honorable membre et je crois avoir fait preuve de déférence envers la Chambre, en lui soumettant au mois de novembre dernier le projet de Luttre à Denderleeuw et au mois de février, c'est-à-dire il y a plus de 4 mois, le projet de loi que nous discutons en ce moment. Je mettrai le même empressement l'année prochaine, si l'occasion s'en présente, à saisir la Chambre des projets de loi relatifs à d'autres chemins de fer.

M. Faignart. - Messieurs, je partage entièrement l'opinion émise par l'honorable M. Lesoinne et je recommanderai plus particulièrement à l'attention de M. le ministre des travaux publics les projets qui ont subi toutes les formalités de l'enquête et de la publicité, qui sont reconnus d'utilité publique et pour lesquels il y a des concessionnaires. Je citerai tout d'abord un chemin de fer, non pas comme l'ont demandé MM. Dechamps, Brixhe et de Haerne, non pas le tronçon dont MM. de Haussy et Rasquin demandent la concession, mais tout le chemin de fer partant de Marchiennes, traversant les charbonnages du Centre et aboutissant à Masnuy-Saint-Pierre vers Jurbise, en passant par la ville du Rœulx et Thieusies.

L'exécution de cette voie ferrée est tellement sérieuse, messieurs, que si, comme je le crois, mes renseignements sont exacts, les fonds sont faits, et les demandeurs en concession offrent de déposer le cautionnement. (Interruption.)

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, comme tous les articles du projet ont été adoptés sans opposition, je pense que la Chambre peut sans inconvénient déclarer l'urgence et passer au vote définitif.

- Cette proposition est adoptée.

Vote sur l’ensemble du projet

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet, qui est adopté par 70 voix contre 1.

Un membre (M. Devaux) s'est abstenu.

Ont voté l'adoption : MM. Frère-Orban, Goblet, Jacques, Jouret, Julliot, Lambin, Landeloos, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lesoinne, Maertens, Magherman, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Sinave, Tack, Tesch, Thibaut, Thiéfry, Thienpont, Tremouroux, Van Cromphaut, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Visart, Allard, Ausiau, Anspach, Boulez, Brixhe, Coomans, Coppieters 't Wallant, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Decker, de Haerne, de La Coste, de Liedekerke, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Pitteurs, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, de Steenhault, de Theux, du Bus, Dumon, Faignart et Rousselle.

M. Vanden Branden de Reeth a voté le rejet.

M. Devaux. - Messieurs, j'aurais pu voter le projet attendu qu'on en avait écarté, par la question préalable ou par le retrait, les dispositions sujettes à contestation ; ou plutôt j'aurais pu approuver séparément toutes les dispositions du projet ; mais j'ai pris la résolution de ne plus voter de projets de lois qui réunissent en un seul tout des travaux publics étrangers les uns aux autres. C'est pourquoi j'ai dû m'abstenir.

Motion d’ordre

M. Allard (pour une motion d’ordre). - Messieurs, j'avais déposé un amendement relatif à deux chemins de fer, je n'ai pas pu le développer parce que la question préalable a été adoptée. Je crois devoir, maintenant, en dire deux mois et appeler l'attention de M. le ministre sur une conséquence qui pourrait naître si on ne les exécutait pas.

Nous avons perdu le transit de l'Allemagne vers la France par suite de l'ouverture du chemin de fer d'Erquelinnes à Charleroi et nous sommes à la veille de perdre le transit de l'Allemagne vers l'Angleterre si on ne rectifie pas, d'ici à peu de temps, les lignes de Tournai à-Lille par Templeuve, d'Ath à Hal par Enghien et de Bruxelles à Louvain.

Messieurs, la compagnie du Nord est en instance pour obtenir l'autorisation (et je crois même qu'elle l'a déjà obtenue) de relier la ligne de Douai à Erquelinnes. Aussitôt que cette ligne sera faite nous perdrons entièrement le transit de l'Allemagne vers l'Angleterre.

Pour vous faire apprécier, messieurs, en peu de mots l'importance des rectifications dont je viens de parler, permettez-moi de vous soumettre quelques chiffres.

(page 1499) La ligne actuelle de Louvain par Bruxelles à Lille, a maintenant :

De Louvain à Bruxelles, 44 kilomètres.

De Bruxelles à Lille, par Jurbise et Tournai, 133 kilomètres.

En tout 177 kilomètres.

La ligne rectifiée aurait :

De Louvain à Bruxelles, 19 kilomètres.

De Bruxelles à Hal, 14 kilomètres.

De Hal à Ath, par Enghien, 36 kilomètres.

D'Ath à Tournai, 32 kilomètres.

De Tournai à Lille par Templeuve, 21 kilomètres.

Ensemble 122 kilomètres.

Il y aurait donc par suite de la rectification 55 kilomètres de raccourcissement pour cette ligne, 55 kilomètres sur 177, c'est énorme.

J'appelle spécialement l'attention du gouvernement sur ces faits parce que, je le répète, si l'on n'exécute pas ces rectifications dans un temps peu éloigné, nous perdrons un million du chef du transit de l'Allemagne vers l'Angleterre comme nous avons déjà perdu nn million du chef du transit de l'Allemagne vers la France.

M. Jouret. - J'appuie les observations que vient de présenter M. Allard.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je ne suis pas informé du fait que l'honorable M. Allard vient de signaler, je doute que l'administration du chemin de fer du Nord ait décidé la construction d'une nouvelle voie destinée à relier entre elles ses lignes Vers Quiévrain et vers Erquelinnes. Si cette circonstance venait à se produire, elle occasionnerait au transit par la Belgique une perte réelle. Le gouvernement aurait alors à examiner sérieusement les moyens d'atténuer les effets d'une semblable concurrence.

Les lignes recommandées par mon honorable collègue seraient certainement de nature à atteindre ce but et à ramener sur notre territoire le transit de l'Angleterre vers l'Allemagne, transit dont je ne méconnais pas l'importance.

Projet de loi relatif au canal de jonction de l’Escaut à la Lys, entre Bossuyt et Courtrai

Discussion générale

M. le président. - Le projet de loi se compose d'un article unique ; la section centrale en propose l'adoption. La parole est à M. Rodenbach.

M. Rodenbach. - Je renonce à la parole, si le projet de loi ne doit pas rencontrer de contradicteurs. (Aux voix ! aux voix !)

M. le président. - M. Rodenbach renonce à la parole.

M. Visart. - L'heure est avancée, on a hâte d'en finir, je demande cependant, messieurs, la permission d'attirer l'attention de M. le ministre des travaux publics sur une objection sérieuse qui a été faite à l'occasion du projet de creusement du canal de Bossuyl ; on s'est préoccupé dans mon arrondissement du mal que pouvait faire cette entreprise, en ne se conformant qu'imparfaitement au cahier des charges, et en exhaussant le niveau actuel de l'Escaut, ou bien en mettant dans l'impuissance de l'abaisser : on a affirmé que les craintes, à cet égard, n'étaient point fondées ; j'aime à le croire, et je voterai même avec empressement cette addition à une concession qui doit amener un résultat du premier ordre, l'union de l'Escaut et de la Lys. Je prie néanmoins l'honorable ministre de ne point perdre de vue cet intérêt si important du littoral du fleuve qui fait à présent subir chaque année aux riverains sur une très grande étendue des pertes considérables ; en cas que le canal de Bossuyt réalisât les craintes que j'ai mentionnées, le dommage de ce chef deviendrait immense.

M. Rodenbach. - Puisqu'il y a discussion, je reprends mon tour de parole.

- Des membres. - Vous avez renoncé à la parole.

M. de Mérode. - J'ignore pour mon compte à quel point cette obligation qu'on impose à l’Etat peut être onéreuse ; je désire savoir si réellement il est indifférent pour le trésor qu'on augmente ainsi de 20 ans la durée de la garantie de l'Etat.

M. le président. - La parole est à M. de Haerne.

M. Rodenbach. - Messieurs, je reprends mon tour de parole.

Je répondrai à l'honorabIe préopinant.

M. le président. - Vous n'avez pas la parole ; j'ai donné la parole à M. de Haerne.

M. de Haerne, rapporteur. - L'honorable M. Visart a interpellé M. le ministre des travaux publics sur le danger qu'il pourrait y avoir, selon lui, dans l'exhaussement du lit de l'Escaut qui résulterait de la construction du canal de Bossuyt à Courtrai. Il craint une aggravation dans les inondations qui ont lieu sur les rives du fleuve. M. le ministre voulant bien me confier le soin de répondre, je dirai que cette question'a été examinée par la section centrale ; on fait remarquer en effet, dans le rapport que j’ai eu l’honneur de présenter à la Chambre, que le gouvernement ayant le droit d'exercer, dans l'intérêt public, une surveillance sur les travaux de premier établissement, on ne pourra pas s'écarter des règlements établis pour remédier aux inondations. Aucun danger n'est donc à craindre de ce chef. Ce canal, pas plus que celui de l'Espierre ne peut aggraver la situation de l'Escaut. Je serais le premier à demander des garanties à cet égard, si elles n'existaient pas.

Quant à la question soulevée par l'honorable M. F. de Mérode, la réponse se trouve également dans le rapport. On y lit :

« Le canal de Bossuyt à Courtrai, qui est destiné à réunir l'Escaut à la Lys et aux affluents de cette rivière, se présente dans les conditions les plus favorables. La navigation existe et, malgré ses énormes détours, elle se développe à côté du railway qui est aussi en progrès. C'est ce jui a été établi, en 1851, dans un mémoire officiel adressé à M. le ministre des travaux publics par l'ingénieur en chef de la Flandre occidentale, M. Gerardot de Sermoise. C'est ce que ce même ingénieur a confirmé dans un rapport, également officiel, du 13 mars dernier. Il y fait voir que la navigation actuelle vers les rives de la haute Lys, qui n'a fait que s'accroître, quoiqu'elle ait pris de plus en plus la direction par la France, suffit pour couvrir les frais de construction et d'entretien du canal. »

Messieurs, encore un mot. Si l'on demande une prolongation de garantie c'est uniquement, au point de vue financier, pour pouvoir négocier l'affaire, vu l'engouement exclusif et non justifié, qui existe pour les chemins de fer, et qui déprécie les canaux aux yeux du public.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Par extension donnée aux dispositions de l'article 2 de la loi du 20 décembre 1851, le gouvernement est autorisé à octroyer à la société représentée par les sieurs A.-J. Adan, banquier à Bruxelles, Parent et Schaken, la concession du canal de jonction de l'Escaut à la Lys, entre Bossuyt et Courtrai, en garantissant, pendant les cinquante premières années de la mise en exploitation de ladite voie navigable, un minimum de produit net annuel de 200,000 fr.

« Cette concession sera octroyée aux clauses et conditions de la convention provisoire du 1er juillet 185l et en conformité de l'engagement souscrit par les demandeurs en concession sous la date du 25 avril 1856. »

- Un membre. - La section centrale a demandé que le ministre, en souscrivant la nouvelle convention avec les concessionnaires les soumette aux mêmes conditions de cautionnement que les nouveaux concessionnaires de chemins de fer.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je pense que le cautionnement a été versé dans la journée d'aujourd'hui ; s'il ne l'a pas été, il le sera demain. (Aux voix ! aux voix !)

Vote de l'article unique

- Il est procédé au vote par appel nominal.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 55 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel : MM. Frère, Goblet, Jouret, Lambin, Landeloos, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lesoinne, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Rodenbach, Rogier, Sinave, Tack, Tesch. Thiéfry, Thienpont, Van Cromphaut, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Visart, Allard, Ansiau, Anspach, Boulez, Coomans, David, de Bronckart, de Decker, de Haerne, de La Coste, de Liedekerke. F. de Mérode, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, de Theux, Devaux, du Bus, Dumon, Faignart et Rousselle.

- La séance est levée à 4 1/2 heures.