(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 2009) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.
La séance est ouverte.
M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.
M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.
« Le conseil communal d'Eecloo prie la chambre de comprendre dans le projet de loi de travaux publics l'exécution soit, aux frais de l'Etat, soit par une compagnie, d'un embranchemenl du chemin de fer qui relierait la ville d'Eecloo et les communes de Waerschoot, Sommerghem, Heydinge, Lovendeghem et autres au réseau de l'Etat. »
- Renvoi à la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi.
« Le sieur Borguet présente des observations contre le rapport du conseil des ponts et chaussées sur les projets de travaux publics à exécuter à Liége, que son père a soumis au gouvernement, et déclare que son père est prêt à prendre un engagement pour l'exécution des travaux. »
- Même décision.
« Le conseil communel de Maeseyck demande que le chemin de fer de Hasselt soit prolongé jusqu'à Maeseyck. »
- Même décision.
« Le conseil communal et plusieurs habitants de Ciney demandent le maintien du tracé du chemin de fer du Luxembourg par Ciney. »
« Même demande du conseil communal de Durnal. »
- Sur la demande de M. Lelièvre, dépôt sur le bureau pendant la discussion.
« Le conseil communal de Dampremy demande l'élargissement des écluses n°1 à 9 du canal de Charleroy à Bruxelles, sans redressement. »
- Renvoi à la section centrale, qui a été chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'exécution de travaux publics.
« Plusieurs habitants d'Oostkerke demandent l'exécution des travaux proposés par M. l'ingénieur en chef de Sermoise, pour l'écoulement des eaux de la Lys. »
« Même demande de plusieurs habitants de Wacken, Oostdunkerke, Steeenkerke et Coxyde. »
- Dépôt sur le bureau, pendant la discussion du projet de loi relatif à l'exécution de travaux publics.
« Le sieur Van der Buecken demande que les nouveaux concessionnaires du chemin de fer de Louvain à la Sambre soient tenus de l'indemniser des dégâts que les travaux de ce chemin de fer ont occasionnés à sa propriété dite château-César. »
M. de Man d'Attenrode. - Messieurs, je demande à dire quelques mots, à propos de cette requête, en faveur du droit de propriété lésé en la personne de l'un de mes commettants.
Voici le sujet de la plainte qui vous est adressée.
Les ingénieurs de la compagnie du chemin de Louvain à la Sambre ont jugé à propos, car je crois pouvoir dire sans nécessité, de percer le Mont-César à Louvain pour établir une voie souterraine.
Ce travail en voie d'exécution a été abandonné. Qu'en est-il résulté ? Les propriétés de la superficie se sont effondrées ; les habitations ont été ébranlées.
Le réclamant ayant éprouvé des dommages considérables s'est adressé à l'Etat. L'administration a cherché à se décharger de toute responsabilité ; elle l'a renvoyée à la compagnie déchue, à la compagnie qui n'existe plus. Elle l'a renvoyé à la compagnie à naître. De sorte que cette propriété se trouve en quelque sorte expropriée sans la préalable indemnité que la Constitution exige.
En définitive il faut qu'il y ait quelqu'un qui soit tenu responsable ; et je dis que celui auquel cette responsabilité appartient, c'est celui qui possède ou possédera les propriétés acquises, les travaux exécutés, le matériel de la compagnie déchue.
Ces propriétés constituent le gage des créanciers. Ces propriétés constituent leur hypothèque.
Maintenant qu'une compagnie se présente pour achever les travaux, il est incontestable que cette compagnie, en étant substituée aux droits de la compagnie déchue, a aussi à supporter les charges qui grevaient la concession primitive.
Quant à ma conclusion, je demande que la requête soit envoyée directement à M. le ministre des travaux publics ; que le gouvernement nous donne quelques explications qui soient de nature à dissiper les inquiétudes.
M. le président. - On ne peut pas demander directement un renvoi et des explications sur une pétition présentée.
M. de Man d'Attenrode. - Je conviens que cette marche n'est pas celle que l'on suit ordinairement. Mais je ferai remarquer que des pétitions de même nature ont été envoyées hier au gouvernement d'après les conclusions de la section centrale. La formalité du renvoi à la section centrale est donc sans objet. Si M. le ministre voulait donner quelques explications, le renvoi deviendrait inutile, tout serait terminé.
M. le président. - Ce serait contraire au règlement.
M. de Perceval. - Je crois qu'il est impossible de demander à M. le ministre des explications sur une pétition dont il ne connaît pas le contenu. J'appuie les considérations que vient de présenter l'honorabfc M. de Man. Je demande que M. le ministre veille bien donner des explications étendues sur la position faite au pétitionnaire. Dès hier une pétition semblable a été soumise à la section centrale dont les conclusions ont été le renvoi à M. le ministre des travaux publics. Je demanderai qu'on prenne la même décision à l'égard de la pétition qui vient d'être analysée. J'ajouterai la mention avec demande d'explication.
M. le président. - Il faut d'abord renvoyer la pétition à la section centrale aux termes du règlement.
M. de Perceval. - Avec invitation de faire un prompt rapport.
- Le renvoi à la section centrale est ordonné.
Par messages, en date du 19 août, le sénat informe la chambre qu'il a adopté :
- Le projet de loi établissant un droit sur le débit du tabac ;
- Le projet de loi qui ouvre un crédit supplémentaire de 13,000 fr. au budget du département des affaires étrangères ;
- Le projet de loi qui déclare libres à l'entrée quelques matières premières ;
- Le projet de loi relatif à l'aliénation des biens domaniaux ;
- Le projet de loi contenant le budget des voies et moyens pour l'exercice 1852 ;
- Le projet de loi contenant le budget des affaires étrangères psar l'exercice 1852 ;
- Le projet de loi de délimitation entre la ville de Bruxelles et les communes d'ixelles et de Saint-Josse-ten-Noode.
M. Deliége. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau deux rapports : l'un concernant la demande de crédits supplémentaires au budget de l'intérieur et le deuxième concernant le crédit supplementaire pour l'exposition de Londres.
- Ces rapports seront imprimés, distribués et mis à la suite de l'ordre du jour.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ces crédits sont urgents et particulièrement celui relatif à l'exposition universelle de Londres. Je demande que la chambre le vote le plus tôt possible et, dans tous les cas, avant sa séparation.
- La chambre ordonne l'impression et la distribution des rapports, et met ces projets de loi à la suite de l'ordre du jour.
M. Lange, au nom de la commission de vérification de pouvoirs, fait rapport sur les opérations électorales du collège électoral de l'arrondissement de Tournay ; il conclut à ce que la chambre valide l'élection de M. le comte Ferdinand Visart de Bocarmé, représentant réélu par ce collège électoral.
- Ces conclusions sont adoptées.
En conséquence M. de Bocarmé est proclamé membre de la chambre des représentants.
M. Veydt. - Messieurs, dans sa séance du 13 du courant, la chambre a envoyé à la section centrale du projet de loi en discussion, une pétition qui lui a été adressée par M. Dubois-Nihoul.
Le pétitionnaire rappelle qu'il fut déclaré concessionnaire définitif du canal de Jemmapes à Alost par un arrêté royal du 22 juin 1845 ; qu’il traita pour la réalisation du projet avec la compagnie de la vallée de la Dendre ; que celle-ci ayant fait défaut, il fut obligé d'aller à la recherche de nouveaux capitalistes, que les crises financières et politiques, survenues depuis 1849 l'empêchèrent de trouver ; qu'aussitôt qu'il connût les intentions du gouvernement de venir en aide à certaines entreprises de travaux publics, au moyen de la garantie d’un minimum d’intérpet, il sollicita la même faveur et fit valoir dans une lettre, écrite à M. le ministre (page 2010) des travaux publics sous la date du 12 mai 1851, des raisons et des calculs tendant à démontrer que vraisemblablement cette garantie ne serait jamais invoquée.
M. le ministre exigea une justification préalable des capitaux nécessaires à la construction du canal (14,000,000 do francs) et fixa un délai pour faire cette preuve.
Le délai n'ayant pas suffi, malgré d'activés démarches, le pétitionnaire ne vint retrouver M. le ministre que dix jours plus tard et alors il lui fut répondu que, par suite de la convention qui venait d'être passée avec la compagnie du chemin de fer de Dendre-et-Waes, il n'était plus possible d'accepter ses propositions.
Aujourd'hui M. Dubois-Nilioul s'adresse directement à la chambre. Il l'informe qu'il est détenteur de listes de souscriptions s'élevant au chiffre de 11,402,900 fr. ; qu'elles ont été recueillies par une maison de banque bien connue de Londres (MM. Hutton et comp.) et que, s'il était nécessaire, des informations pourraient être facilement prises pour en constater la réalité.
Ces souscriptions sont subordonnées à la garantie d'un intérêt de 4 p. c. par le gouvernement, Pour compléter le capital, le pétitionnaire demande le million du cautionnement, versé en 1845 pour assurer l'exécution du canal et déclare s'engager avec ses associés pour le complément de 1,600,000 fr.
Il ajoute qu'il est en outre prêt à déposer un cautionnement dans les caisses du trésor, si le gouvernement l'exige.
Eu égard à cet état des choses, le pétitionnaire exprime l'espoir que la chambre n'hésitera pas à adopter les mesures propres à assurer l'exécution d'un projet dont la construction est réclamée depuis si longtemps, et qui sera utile à la fois au Hainaut, aux deux Flandres et à la province d'Anvers.
Telle est, messieurs, l'analyse complète de cette pétition.
Le projet de construclion du canal de Jemmapes à Alost a déjà occupé la section centrale. Il est rendu compte, à la page 130 de son rapport, de ce premier examen et du vote qui l'a suivi.
M. le ministre des travaux publics a été entendu de nouveau. Il résulte de sa déclaration bien explicite qu'au point où les choses en sont aujourd'hui, le gouvernement combattrait la proposition, si elle était faite, d'accorder la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur le capital nécessaire à la construcsion du canal de Jemmapes à Alost. Dans son opinion, il y a plus d'avantages à recueillir, dans des vues d'intérêt général, de la construction du chemin de fer de Dendre-et-Waes et du chemin direct de Bruxelles vers Gand par Alost, et les arrangements qui ont été arrêtés, de commun accord, avec la compagnie concessionnaire de ces chemins, seraient très probablement compromis, si la garantie de 4 p. c. d'intérêt était accordée en même temps en faveur du canal de Jemmapes à Alost.
Cette voie navigable aurait pour résultat, suivant M. le ministre, de diminuer notablement le produit des péages de navigation que l'Etat perçoit et on peut douter que les avantages qu'obtiendraient les exploitations du Couchant de Mons, en se trouvant en communication plus directe et plus facile avec le bas Escaut, offriraient une compensation suffisante de la diminution sur le produit des péages et de la charge éventuelle d'un intérêt sur une somme de quatorze millions de francs.
M. le ministre fait ensuite connaître qu'il a attendu jusqu'au dernier moment pour signer la convention provisoire avec les sieurs Demot et consorts ; cette signature n'a été donnée que le 28 juin, pour ainsi dire la veille de la présentation du projet de loi. Sans vouloir contester l'exactitude ni l'importance des souscriptions recueillies récemment par les représentants de M. Dubois-Nihoul à Londres, on peut être bien certain qu'il y a des garanties sérieuses aussi en ce qui concerne les négociations relatives aux chemins de fer. Il n'y aura de convention définitive, après le vote de la loi, avec M. Demot et consorts que pour autant que le cautionnement ait été préalablement versé et que le payement de 30 p. c. sur la totalité des actions à émettre soit assuré. C'est une justification de laquelle le gouvernement ne se départira pas.
Après la déclaration formelle qui vient d'être faite au nom du gouvernement, des membres pensent qu'il serait superflu d'insister avec chances de succès en faveur de l'obtention d'une garantie d'intérêt par l'Etat. Ils persistent toutefois à croire que l'exécution du canal de Jemmapes à Alost est ce qui répond le plus complètement aux vœux du Couchant de Mons, et ils espèrent, s'il est devenu impossible d'y faire droit, qu'une compensation équitable lui sera donnée en améliorant certaines dispositions du projet de loi.
La section centrale adopte ensuite par trois voix (deux abstentions) la proposition de déposer la pétition sur le bureau de la chambre pendant la discussion.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. le président. - La chambre est parvenue au littera C de l'article premier relatif au contrat avec la compagnie concessionnaire du chemin de fer de la Flandre occidentale. Il n'y a pas d'amendemeuts à ce littera.
M. le Bailly de Tilleghem et M. de Haerne renoncent à la parole.
M. Rodenbach. - Puisque personne ne combat cette partie de l’article, je renonce gaiement à la parole.
Le littera C de l'article premier est mis aux voix par appel nominal.
En voici le résultat :
Nombre des votants, 74
Ont voté l'adoption, 68
Ont voté le rejet, 3
Se sont abstenus, 3
En conséquence, le paragraphe 3 de l'article premier est adopté.
Ont voté l'adoption : MM. Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Cans, Clep, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, Debourdeaud'huy, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, Dedecker, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Man d'Attenrode, de Meester, de Muelenaere, de Perceval, de Royer, T. Desoer, de Steenhault, Destriveaux, de T'Serclaes, de Wouters, d’Hont, Dolez, Dumont (Guillaume), Faignart, Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Malou, Manilius, Mascart, Moreau, Orban, Peers, Pirmez, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Roussel (Adolphe), Rousselle (Charles), Sinave, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Veydt, Allard et Verhaegen.
Ont voté le rejet : MM. de Liedekerke, Lebeau et Vanden Branden de Reeth.
Se sont abstenus : MM. de Renesse, Devaux et Jacques.
Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.
M. de Renesse. - Je n'ai pas voulu voter contre le paragraphe, parce que ce chemin de fer avait déjà été décrété antérieurement et que je ne veux pas m'opposer à son achèvement. Mais comme je ne puis pas approuver l'ensemble du projet, j'ai cru devoir m'abstenir.
M. Devaux. - Je suis contraire à l'introduction dans la loi du principe de la garantie d'intérêt. Mais la chambre ayant déjà admis ce principe pour deux autres chemins de fer, je n'ai pas voulu voter contre son application au chemin de fer de la Flandre occidentale.
M. Jacques. - Je n'ai pas voulu voter contre une convention qui peut procurer aux villes de Thielt, d'Ypres et de Poperinghe la construction d'un chemin de fer. Mais je n'ai pas voulu voter en faveur d'une convention qui prive les villes de Dixmude et de Fumes, du chemin de fer qui leur était également garanti par la convention primitive.
M. le président. - Il reste à voter sur l'ensemble de l'article premier.
- Plusieurs membres. - L'appel nominal.
- Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble de l'article premier.
77 membres sont présents.
61 adoptent.
10 rejettent.
6 s'abstiennent.
En conséquenc l'article premier est adopté.
Ont voté l'adoption : MM. Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Cans, Cumont, David, H. de Baillet, de Baillet-Latour, Debourdeaud'huy, de Breyne, Dechamps, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, Delehaye, Delfosse, d'Elhoungne, Deliége, de Meester, Muelenaere, de Perceval, de Royer, Desoer, de Steenhault, Destriveaux, de Wouters, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, G. Dumont, Faignart, Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Manilius, Mascart, Moreau, Orban, Peers, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Sinave, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Veydt, Allard et Verhaegen.
Ont voté le rejet : MM. Clep. de Liedekerke, de Man d'Attenrode, de Mérode-Westerloo, de T'Serclaes, Lebeau, Pirmez, Vanden Branden de Reeth et Vilain XIIII.
Se sont abstenus : MM. de Brouvver de Hogendorp, Devaux, Jacques, Malou, A. Roussel et Ch. Rousselle.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont priés, aux termes du règlement, de faire connaître les motifs de leur abstention.
M. de Brouwer de Hogendorp. - Messieurs, je n'ai pas voté contre l'article, parce que je suis favorable aux concessions des chemins de fer du Luxembourg et de la Flandre occidentale ; mais il m'a été impossible de voter pour, parce que je suis opposé à ce qu'on accorde la garantie d'un minimum d'intérêt à des embranchements qui, à mon avis, seront complètement improductifs.
M. Devaux. - Je me suis abstenu par les motifs que j'ai indiqués tout à l'heure.
M. Jacques. - Messieurs, les conventions peuvent produire de bons résultats ; c'est pour cela que je n'ai pas voulu voter contre ; d'un autre côté, elles ont, à mes yeux, le vice d'accorder de nouvelles faveurs à des compagnies, tout en les dispensant de remplir une partie des engagements qu'elles avaient contractés.
(page 2011) M. Malou. - Messieurs, je me suis abstenu par les motifs qui ont été iridiqués tout à l'heure par l'honorable M. de Brouwer, et, en outre, parce que la chambre, en faisant la première application du principe de la garantie d'un minimum d'intérêt, n'a pas stipulé les conditions qui, dans mon opinion, étaient nécessaires pour protéger les intérêts du trésor.
M. Roussel. - Messieurs, je me suis abstenu, parce que j'approuve une partie des travaux compris dans l'article premier, et que je ne puis pas approuver l'autre.
M. Rousselle. - Messieurs, j'étais favorable à la ligne de Namur à Arlon, sans les embranchements ; je repoussais la ligne de Bruxelles à Namur, qui doit faire concurrence au chemin de fer de l'Etat ; j'étais, d'un autre côté, favorable au chemin de fer de la Flandre occidentale ; je devais donc, dans cette situation, m'abstenir sur un article qui comprenait des choses que j'approuvais et d'autres que je n'approuvais pas.
« Art. 2. Le gouvernement est également autorisé à concéder définitivement, au sieur Verrue-Lafrancq, concessionnaire provisoire, le canal de jonction de l'Escaut à la Lys, entre Bossuyt et Courtray. Cette concession sera octroyée aux clauses et conditions mentionnées dans la convention provisoire, annexée, sous la lettre D, à la présente loi. »
M. le président. - La parole est à M. de Haerne.
M. de Haerne. - Comme je me suis déjà expliqué sur cet objet dans un sens favorable au projet, je préférerais qu'on accordât d'abord la parole aux orateurs qui sont inscrits contre.
M. Rodenbach. - Je fais pour moi la même demande.
M. le président. - La parole est à M. Dumortier, inscrit contre l'article 2.
M. Dumortier. - Messieurs, je vais d'abord, si vous me le permettez, expliquer mon opinion quant au canal projeté, parce que je sais que d'honorables membres vous diront tout à l'heure ce que j'ai fait dans le passé à l'égard de ce canal ; je crois qu'il est beaucoup plus loyal que je le dise moi-même.
J'ai été un des partisans du canal ; j'en ai demandé plusieurs fois l'exécution. Pourquoi demandions-nous l'exécution du canal de Bossuyt ? C'était principalement pour éviter que le gouvernement concédât le canal de l'Espierre. Nous ne voulions pas de ce canal que nous croyions hostile aux intérêts du pays, nous donnions la préférence au canal de Bossuyt ; en secondl ieu, c'est qu'à cette époque il n'existait aucun moyen de communication directe entre le haut Escaut et la haute Lys, tandis qu'aujourd'hui des moyens de communication directe existent, car il existe un chemin de fer.
J'ai donc soutenu à diverses reprises la concession du canal de Bossuyt ; mais je n'ai jamais soutenu qu'un pareil canal dût se faire avec la garantie d'un minimum d'intérêt. C'est toujours le même refrain qui arrive ; on veut nous mettre en opposition avec nos précédents, sans tenir compte de cette différence, que quand nous demandions des concessions de canaux ou de chemins de fer, il ne s'agissait pas d'engager le trésor public, ce qu'on veut faire aujourd'hui.
Si le gouvernement venait demander la concession de ce canal sans réclamer aucune garantie au trésor, je serais encore le premier à dire : Faites le canal. Ce n'est donc pas la construction du canal que je combats, mais la garantie d'intérêt dont on veut faire l'application à cette construction.
En effet, j'ai déjà eu l'honneur de faire remarquer que c'est une voie funeste pour les finances du pays dans laquelle on veut entrer, en ce sens que les localités arriveront de chaque côté pour demander cette garantie et que personne ne sait où cela mènera le trésor public.
J'ai déjà eu l'honneur de faire remarquer que les Belges payent à l'Etat une somme plus forte que sous le gouvernement hollandais et que ce qu'on a voulu à l'époque de la révolution, c'est la réduction des impôts..
Aujourd'hui au moyen des travaux publics exécutés par l'Etat et de la garantie du minimum d'intérêt, neus allons ouvrir la porte à des événements que nous devons chercher à ne jamais entrevoir. Ce canal est-il d'un intérêt si grand, si majeur qu'il faille donner la garantie d'un minimum d'intérêt ? Je ne puis pas lecroire.
D'abord, je répète que s'il ne s'agissait d'accorder que la concession, je donnerais mon vote. Je prie l'honorable M. de Haerne qui, sans doute, me répondra de prendre note, que c'est la garantie d'intérêt que je combats et non la concession.
Je me demande donc s'il y a un tel intérêt qu'il faille imposer un sacrifice de quelques centaines de mille francs aux contribuables. Je dis que cet intérêt n'existe pas. Si je suis bien renseigné, le nombre des bateaux qui remontent la Lys chaque année ne s'élève pas à plus de 150.
Je suppose que ces 150 bateaux traversent le canal de Bossuyt, qu'arrivera-t-il ? C'est qu'à peine si on couvrira les frais d'entretien et d'exploitation. Ces 150 bateaux vous paraîtront un chiffre très élevé quand l'honorable M. de Haerne les transformera en tonneaux. A Tournay, il passe plus de 6 mille batteaux tous les ans, il en passe chaque semaine au-delà de 150. Ainsi toute la navigation du canal de Bossuyt ne dépassera pas la navigation de Tournay pendant une seule semaine.
Il résulte de ce point de fait qu'il n'y a pas là un intérêt majeur et que le canal ne pourra jamais couvrir ses dépenses. Par conséquent, pour vous donner le plaisir de créer ce canal, vous mettrez le trésor en dette de plusieurs centaines de mille francs chaque année pendant le terme de 30 ans que la loi indique.
Je sais qu'on ne manquera pas de dire qu'au moyen du canal nous expédierons des houilles sur la haute Lys. C'est une erreur ; si le canal de Bossuyt était fait maintenant, vous pourriez expédier des houilles sur les affluents de la haute Lys, mais l'honorable membre sait que dans deux ans, il y aura une réduction considérable de droits sur la haute Lys. Comme l'exécution du canal exigera plus de deux ans, il ne sera donc terminé qu'après l'abaissement des droits sur la haute Lys, de sorte qu'on devra se contenter des 150 bateaux, pins peut-être 10 ou 12 bateaux qui déchargent leurs houilles qui sont transportées dans le périmètre de Courtray. Depuis le commencement de la discussion, j'ai défendu le trésor. Je considère la proposition qui nous occupe comme une charge de plus qu'on impose aux contribuables pendant trente années ; comme je trouve qu'ils sont déjà assez chargés, je ne veux pas leur imposer une charge nouvelle qui ne sera pas de moins de deux cent mille francs. Je bornerai là mes observations, me réservant de reprendre la parole selon les réponses qu'on pourra me faire.
M. de Haerne. - Messieurs, je serai très bref. Je n'ai pas d'intérêt à prolonger cette discussion. Permettez-moi seulement de rectifier quelques erreurs dans lesquels est tombé l'honorable préopinant. Je commencerai par le remercier de ses bonnes intentions à l'égard du travail d'intérêt public qui nous occupe. Il dit que s'il ne s'agissait pas de stipuler un minimum d'intérêt, il voterait en faveur du projet. Je prétends que la garantie du gouvernement est purement nominale. La chambre me permettra d'entrer dans les calculs par lesquels j'établirai d'une manière évidente, que les revenus du canal seront tels qu'ils dépasseront les deux cent mille francs qui doivent constituer le minimum d'intérêt sur la somme de cinq millions qui sont affectés à la construction de cet ouvrage. En voici la preuve par chiffres.
(Suit un tableau reprenant le mouvement de navigation sur le canal de Bossuyt à Courtray. Ce tableau n’est pas repris dans la présente version numérisée)
On peut consulter sur ces chiffres les rapports de la députation permanente de la Flandre occidentale, et les rapports de M. Jonckheere, faisant fonctions d'ingénieur de l'arrondissement de Courtray.
Dans ce calcul je ne considère que le mouvement actuel. Tout à l'heure je parlerai de l'augmentation future. Ainsi voilà un mouvement de 170,500 tonneaux ou de 980 bateaux de 180 tonneaux chacun. Le revenu est de 217,300 fr. La garantie du minimum d'intérêt ne porte que sur une somme de 5 millions, qui d'après le devis constitue la dépense totale du canal, dans le cas même où l'on construirait le tunnel, qui d'après le cahier des charges est facultatif, mais qui n'est pas nécessaire. C'est une somme de 200,000 fr. à garantir par l'Etat. Le trésor est évidemment couvert, la garantie est purement nominale. C'est le meilleur des travaux publics garantis par le projet.
Je dois entrer dans quelques explications sur le tableau que je viens d'exposer.
L'honorable préopinant parle de 150 bateaux qui, dit-il, passent par Gand pour entrer dans la Lys, et il suppose que c'est à cela que se borne tout le mouvement qui doit avoir lieu par le canal dont il s'agit.
D'abord, il a prévenu l'objection que j'allais faire quant à la haute Lys. Je lui ferai remarquer que les conditions qui sont faites ne sont aucunement acceptables parce que la réduction de droit qui aura lieu dans deux ans sur la haute Lys sera extrêmement minime, puisque en général les droits sont très peu de chose.
La difficulté de la navigation ne résulte aucunement du droit établi sur la Lys et sur l'Escaut, mais du halage et d'autres obstacles trop longs à enumérer que l'on rencontre ordinairement sur les rivières, et non pas de ce qu'il y a quelques droits insignifiants d'écluses et de ponts à payer.
L'honorable membre vous parle aussi du canal de l'Espierre, et dans (page 2012) le temps, dit-il, il a voté le canal de Bossuyt, parce qu'il s'agissait d'empêcher la construction du canal de l'Espierre.
Ce but, je l'ai très bien compris, mais il est à remarquer que le canal de l’Espierre, ainsi que j'ai eu l'honneur de le dire en répondant à l'honorable membre dans une séance précédente, ne peut, en aucune façon, faire concurrence au canal de Bossuyt, non seulement à cause de ses péages, mais parce qu'il y a une stipulation dans la convention internationale, d'après laquelle, lorsque le canal de Bossuyt sera construit, tous les bateaux naviguant par les eaux françaises devront payer deux francs par tonneau à leur entrée en Belgique, en faveur du canal de Bossuyt.
Or, ce droit de deux francs par tonneau excède le péage total à payer sur le canal de Bossuyt, qui, dans aucun cas, ne peut dépasser 1 fr. 80 c.
Vous voyez donc, messieurs, qu'il est impossible que si le canal de l’Espierre s'achève, ce qui est incertain, on arrive jusque, dans la Lys belge. Ainsi, il est évident que cela ne peut pas faire obstacle.
Pour ce qui regarde le chemin de fer, j'ai déjà eu l'honneur de faire remarquer que le chemin de fer dont il s'agit ne peut pas même lutter contre la navigation actuelle. Le chemin de fer donne tout au plus dix mille tonneaux par an, tandis que la navigation par Gand donne, pour les bateaux de la Lys en amont de l'écluse de Vive-Saint Eloi, plus de 40 tonneaux, retours compris. Ainsi, le chemin de fer ne peut faire concurrence à la navigation dont il s'agit, comme il ne peut pas en faire en général. Il ne peut pas faire concurrence à une navigation coûteuse, longue, dangereuse et toujours incertaine. Comment le chemin de fer pourrait-il entraver la navigation d'un canal destiné à abréger la route actuelle de 34 lieues ?
Vous voyez, messieurs, que la lutte est impossible par le chemin de fer. S'il n'en était pas ainsi, pourquoi à Mons et à Liége demanderait-on des canaux plus ou moins parallèles aux chemins de fer ? Le chemin de fer du Hainaut sur Roubaix n'a pas anéanti la navigation du canal de l’Espierre à Roubaix. Eh bien ! le canal de Bossuyt à Courtray se trouvera dans les mêmes conditions vis-à-vis du chemin de fer belge. Le chemin de fer fait, à partir de Tournay, une courbe tout aussi forte vers Courtray que vers Roubaix.
C'est exactement le même tracé ; et le péage est proportionnel sur les canaux de Bossuyt et de Roubaix, eu égard au parcours.
Outre le mouvement du chef du chemin de fer qui ne peut pas lutter contre le canal dont il s'agit, il y a le roulage qui est très important et qui sera également remplacé presque en totalité par la navigation nouvelle.
Je dis presque en totalité, quant au roulage actuel, parce que les arrivages augmentant par la diminution des frais sur le canal d'Antoing, les villages de Warcoing, Bossuyt, etc., favorisés d'ailleurs par les améliorations que nous allons voter pour l'Escaut, conserveront des transports par axe qui rayonneront dans un cercle plus rétréci, il est vrai, mais qui seront évidemment plus nombreux dans ce même cercle. Ces localités, qui peut-être n'ont pu se rendre compte de l'ensemble du système proposé, n'auront pas à s'en plaindre.
Le roulage donne aujourd'hui un mouvement de plus de dix mille tonneaux dans les environs de Courlray et jusque dans les arrondissements dé Thielt et de Roulers. Dix mille tonneaux sont acquis de ce chef au canal.
Il y a plus, c'est que, comme je l'ai déjà dit, la navigation fait de grands progrès en France, en raison des améliorations qui s'exécutent sur les voies navigables de ce pays. Cette navigation, qui déjà est de cent bateaux environ pour la Lys belge, empruntera également le canal de Bossuyt.
Mais la navigation de la Lys française, en amont de l'écluse de Comines, augmentera également le mouvement sur le canal projeté. On trouvera avantage à passer par Bossuyt pour remonter l'écluse de Comines, plutôt que de prendre la voie extrêmement longue, par Douai, qui a ses inconvénients et sur laquelle il y a aussi des péages à payer. C'est pour conserver cette navigation à la France que la compagnie concessionnaire de la Deule a toujours tâché et tâchera encore d'empêcher, par tous les moyens, la construction du canal de Bossuyt à Courtray. Dans le tableau dont je viens de donner lecture à la chambre, je porte cette navigation à 10,000 tonneaux. On ne peut pas l'en blâmer ; mais c'est à nous à veiller à l'intérêt belge qui est engagé dans la question.
C'est ici le cas, messieurs, de faire voir qu'en défendant le projet de canal dont nous nous occupons, je m'élève au-dessus de l'intérêt de clocher.
Je répète à cet égard ce que j'ai eu l'honneur de dire dans une séance précédente : c'est que ce canal est éminemment national. S'il ne se construit pas aujourd'hui par concession, il devra se construire plus tard par l'Etat ; parce que, s'il ne se construit pas, la navigation française absorbera complètement celle qui se fait aujourd'hui par Gand. Qu'en résultera-t-il ? C'est que l'Etat perdra les revenus qu'il perçoit sur une partie du canal de Mons à Condé, sur le canal de Pommerœul à Antoing et sur l'Escaut.
D'un autre côté, si le canal de Bossuyt était condamné par la législature belge, on achèverait le canal de Roubaix jusqu'à la Deule, et ce canal restreindrait même le roulage qui se fait à partir de Bossuyt, de Warcoing et de Pecq.
Ainsi les progrès que la navigation fait en France et qui diminuent les frais d'année en année, ces progrès qui permettent au batelier de faire au moins un voyage de plus par an que lorsqu'il prend la voie par Gand, et qui facilite surtout la navigation en hiver, époque à laquelle on transporte le plus de charbon, ces progrès joints à la suppression de la concession sur la Deule qui doit avoir lieu en 1853, tueront la navigation qui se fait aujourd'hui par Gand.
Ainsi, il y a ici un intérêt national ; il y a l'intérêt du trésor qu'il faut garantir autant que possible. C'est cet intérêt que j'invoque. Si le canal ne paraissait pas avantageux à la compagnie actuelle ou à toute autre (ce que je suis loin d'admettre), ce serait une bonne affaire pour le trésor.
Le mouvement du canal, d'après mes évaluations basées sur les transports actuels, sera de 950 voyages, aller et retour.
Mais ce mouvement s'accroîtra dans une proportion très grande. Je tiens ici des notes qui m'ont été fournies par des personnes très compétentes, qui font le commerce sur la Lys et l'Escaut, et, d'après ces notes, je pourrais vous démontrer que l'accroissement sera de 1 à 4, à cause des facilités qu'offrira le nouveau canal, de la diminution des frais, de la diminution du parcours utile surtout au transport de la chaux qu'on assure à la journée, de là diminution des dangers qui résultent de l'état incertain des eaux ; le mouvement augmentera encore par la diminution du péage sur le canal d'Antoing, et à cause des nouveaux chemins de fer de la Flandre occidentale.
Non, je n'exagère pas en disant que le mouvement actuel sera quadruplé. L'accroissement permettra une réduction de péages sur le canal de Bossuyt, réduction qui donnera lieu à une nouvelle augmentation de mouvement, à un nouveau bienfait.
Ainsi les avantages seront grands pour le commerce et l'agriculture. Quant à l'agriculture, on l'oublie un peu dans cette discussion ; mais outre qu'elle doit profiter de la prospérité générale, elle acquerra, par le creusement du nouveau canal, la chaux à bien meilleur marché.
Savez-vous quelle est la différence des prix de la chaux à Bruges et à Courtray ? Elle est d'un tiers.
Le prix est à Bruges de 1 fr. ; à Courtray de 1 fr. 50 c. De Gand à Bruges on a le canal ; de Gand à Courtray on doit remonter la Lys. La différence des frais sur ces deux voies navigables est de 315 fr. en faveur de Bruges.
Vous voyez quels sont les avantages qui peuvent résulter, pour l'agriculture, de la construction de ce canal.
Il y en a bien d'autres, je ne les énumère pas tous dans la crainte d'être trop long. Mais celui-ci doit frapper la chambre.
Messieurs, je finis en disant que je respecte les intérêts matériels d'abord en eux-mêmes, et ensuite parce qu'on ne les heurte pas impunément lorsqu'ils sont raisonnables. On ne les heurte pas sans faire naître des passions, sans refroidir le sentiment moral de la nation et la confiance qu'elle doit avoir dans la justice de la législature.
- Plusieurs membres. - La clôture.
M. de Denterghem. - Je demande à dire un mot pour motiver mon vote : j'ai voté contre l'artice premier, je voterai également contre l'article 2, non parce que je suis opposé aux travaux que le gouvernement propose, mais parce que je crois qu'il ne convient pas de garantir un minimum d'intérêt.
- La discussion est close.
(erratum, p. 2021) (page 2013) Il est procédé au vote par appel nominal sur l'article 2 ; en voici le résultat :
82 membres répondent à l'appel nominal :
70 votent pour l'article.
10 votent contre.
2 s'abstiennent.
En conséquence, l'article 2 est adopté.
Ont voté l'adoption : MM. Ansiau, Anspach, Boulez, Bruneau, Cans, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, Debourdeaud'huy, de Breyne, Dechamps, Dedecker, de Haerne, de La Coste, Delehaye, Delescluse, Delfosse, d'Elhoungne, Deliége, de Man d'Mtenrode, de Meester, de Muelenaere, de Perceval, de Royer, Destriveaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, Dumon (Auguste), Dumont (Guillaume), Faignart, Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Manilius, Mascart, Mercier, Moreau, Orts, Peers, Pierre, Pirmez, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rollin, Rousselle (Charles), Sinave, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Allard et Verhaegen.
Ont voté le rejet : MM. Clep, Coomans, de Denterghem, de Mérode-Westerloo, de Steenhault, de T'Serclaes, Dumortier, Lebeau, A. Roussel et Vilain XIIIL
Se sont abstenus : MM. de Renessc et Devaux.
M. de Renesse. - Je me suis abstenu, parce que tout en reconnaissant l'utilité de la construction du canal de Bossuyt pour une partie des Flandres et pour le Hainaut, je n'ai pu y donner mon assentiment, parce que ce projet se trouve lié à beaucoup d'autres et que je n'approuve pas l'ensemble du projet
M. Devaux. - Je me suis abstenu pour les mêmes motifs que tout à l'heure.
M. le président. - La section centrale propose un article 3 nouveau ainsi conçu :
( Nous donnerons cet article ).
Pour la régularité, il conviendra de discuter encore cet article par paragraphes. Nous nous occuperons d'abord du paragraphe A.
Plusieurs amendements ont été déposés.
M. Lelièvre propose une disposition additionnelle à l'article 3 ainsi conçue : « Il est également autorisé à traiter avec la compagnie du Luxembourg ou toute autre qui se présenterait pour l'exécution d'un chemin de fer de Gembloux à Jemeppe, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital qui n'excédera pas 2,500,000 fr. »
Amendement à la convention littera B, présenté par M. Moncheur : « Pour la section du chemin de fer de Gembloux à Namur, le gouvernement, d'accord avec la compagnie du Luxembourg, pourra adopter le tracé par la vallée de l'Ornoz, tel qu'il avait été fixé par la loi du 21 mai 1845. »
Sous-amendement présenté par M. Moxhon à l'amendement de M. Moncheur : « Si le gouvernement ne peut amener la compagnie à adopter cette modification,il sera autorisé à traiter avec une compagnie pour l'exécution de la section de Jemeppe à Gembloux, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur une somme qui n'excédera pas 2,500,000 francs. »
Amendement présenté par MM. Dechamps, Pirmez et G. Dumont : « Le gouvernement est autorisé à exécuter, aux frais du trésor public, à l'aide d'un crédit de 6 millions qui lui est alloué à cet effet, la section de chemin de fer de Gembloux vers Charleroy, selon le tracé établi par la convention du 22 janvier et la loi du 22 mars 1846, ou bien à contracter avec une compagnie, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital n'excédant pas 6 millions, aux clauses et conditions stipulées dans les conventions annexées au présent projet de loi, en abandonnant à la compagnie la partie du cautionnement dont le trésor est en possession et les ouvrages exécutés. »
Amendement présenté par MM. Dechamps, Pirmez et G. Dumont : « Le gouvernement est autorisé à prêter, pour le terme de cinq ans, à la compagnie du chemin de fer de Charleroy à la frontière de France, la somme de 1,800,000 fr.
« La compagnie desservira l'intérêt de cette somme au taux de 5 p.c. l'an.
« Tout l'actif de la société sera affecté, comme garantie, au remboursement dudit emprunt en capital et intérêts. »
M. Delfosse. - Je demande la parole pour une motion d'ordre. Il y a autant de projets que de paragraphes et d'amendements. Je pense qu'il faudrait discuter et voter par division.
M. le président. - Jusqu'à présent, je me suis borné à indiquer les amendements présentés au paragraphe A. Je l'ai fait, parce que des amendements viennent de tous les côtés et qu'il serait possible que, malgré tous les soins que je puis y mettre, l'un ou l'autre de ces amendements fût oublié. En les indiquant tous, je donne l'occasion aux membres qui en auraient présenté d'autres, de me les rappeler.
M. Dechamps. - Je crois effectivement que la chambre fera bien de discuter l'article 3 paragraphe par paragraphe, mais les amendements que mes honorables collègues de Charleroy et moi avons présentés, se rattachent au littera A. La branche du chemin de fer de Gembloux vers la Sambre se lie étroitement à l'ancien projet de chemin de fer de Louvain à la Sambre, dont l'embranchement de Louvain à Wavre forme la première section.
Ainsi, je demande qu'on veuille bien entendre les développements de nos amendements relatifs à la section de Gembloux à la Sambre, et au chemin de fer d'Erquelinnes, lorsque la chambre discutera le littera A.
M. Coomans. - Je profiterai de l'invitation que nous a faite M. le président pour faire observer qu'il n'a pas donné lecture de mon amendement.
M. le président. - Vous l'avez présenté à l'article 4.
M. Coomans. - Je n'insiste pas.
M. de La Coste. - Messieurs, j'ai ici le même intérêt que l'honorable M. Dechamps, j'entends le même intérêt au point de vue local. Cependant je pense que la discussion serait beaucoup plus claire si on adoptait la proposition de l'honorable M. Delfosse.
Il y a, par exemple, la proposition de M. Moxhon quant à la direction vers Namur ; eh bien, cette direction n'a rien de commun avec le chemin de fer de Louvain à Wavre. C'est un amendement à l'article qui concerne le chemin de fer du Luxembourg, car la section de Gembloux à Namur appartient maintenant au chemin de fer du Luxembourg.
Il me semble, messieurs, que le plus simple serait de discuter séparément chacune des propositions faites et de considérer ensuite les nouvelles propositions comme autant de paragraphes additionnels d'un même article.
M. le président. - D'après la proposition de M. de La Coste il n'y aurait véritablement d'amendement au paragraphe A de l'article 3 que la proposition de M. Moncheur et la sous-proposition de M. Moxhon.
M. de La Coste. - Il me semble qu'il faudrait statuer d'abord sur les propositions de la section centrale et ensuite sur les différents paragraphes additionnels qui sont proposés.
M. le président. - Voici donc la proposition : c'est de voter d'abord sur les dispositions présentées par la section centrale, puis de considérer les propositions auxquelles on a donné le non d'amendement, comme des dispositions additionnelles qui formeraient autant de paragraphes séparés.
M. Dechamps. - Je ne m'oppose pas à ce que la chambre vote sur chacun des projets séparément, mais je demande que l'on comprenne dans une même discussion les amendements que j'ai eu l'honneur de présenter, et le littera A, car notre amendement et le littera A ne forment qu'un ensemble pour ainsi dire indivisible. En effet, le chemin de fer de Louvain à la Sambre que je voudrais voir exécuter dans son entier, comprend la section de Louvain à Wavre, puis celle de Wavre à Gembloux que la compagnie du Luxembourg est chargée d'exécuter, et comme complément la ligne vers la Sambre.
Or, n'est-il pas rationnel de discuter simultanément toutes ces questions qui sont connexes ? Il me serait impossible de laisser passer ce littera sans parler de notre amendement.
M. Delfosse. - L'amendement de M. Dechamps est tout aussi distinct du paragraphe A que le paragraphe B. Remarquez que le paragraphe B a rapport à la ligne de Wavre à Mannge ; on peut aussi considérer cette ligne comme une continuation du chemin de fer de Louvain à Wavre. Cependant la section centrale en a fait l'objet d'un paragraphe séparé. Je ne vois donc pas pourquoi l'on ne ferait pas aussi un paragraphe séparé de la proposition de M. Dechamps. Si on n'ouvre qu'une seule discussion sur ces différents projets, il y aura confusion. Il me semble qu'il doit y avoir pour chaque projet une discussion et un vote séparés.
M. le président. - (page 2014) Il y aurait d'abord un vote séparé et ensuite un vote sur l'ensemble.
M. Veydt, rapporteur. - Il me semble, messieurs, que la proposition de l'honorable M. Dechamps est extrêmement logique. Dans le paragraphe A de l'article 3, il s'agit d'une partie de l'ancienne concession de Louvain à la Sambre, et M. Dechamps propose de continuer l'autre partie jusqu'à Charleroy. Ce sont donc deux portions d'un même tout, et il me semble que par cela même l'amendement se rattache directement au paragraphe A.
M. Delfosse. - Tout se lie dans les chemins de fer : une section est presque toujours la continuation d'une autre section ; mais il est certain que le paragraphe A est aussi distinct de la proposition de M. Dechamps, que le paragraphe C est distinct de l'article premier, bien qu'il concerne le chemin de fer de la Flandre occidentale.
Je persiste à croire qu'il y aura confusion si la discussion porte à la fois sur différents projets.
M. Dumont. - Messieurs, il y a évidemment connexité entre l'amendement de M. Dechamps et le paragraphe A. En effet, de quoi s'agit-il ? Il est question du chemin de fer de Louvain à la Sambre et il s'agit de savoir si l'on exécutera une partie de cette ligne ou si on l'exécutera tout entière. La section centrale propose d'exécuter la section de Louvain à Wavre et la section de Wavre à Namur. Ainsi, de la ligne de Louvain à la Sambre, la seule section, celle de Gembloux à Charleroy, serait inexécutée : c'est la section qui fait l'objet de l'amendement de M. Dechamps. Eh bien, comme cela faisait partie de la même concession, il me paraît qu'il y a une liaison complète entre le paragraphe A et l'amendement de MM. les députés de Charleroy.
M. Loos. - Je crois, messieurs, que la proposition de l'honorable M. Dechamps se rappporte plutôt à l'article 7 qu'à l'article 3. L'honorable membre demande que le gouvernement soit autorisé à exécuter la ligne dont il s'agit aux frais du trésor public et au moyen d'un crédit de six millions. Il s'agit donc de travaux à exécuter directement par l'Etat, et dès lors la question se rattache à la discussion de l'article 7. Mais si l'honorable M. Deschamps abandonnait la première partie de sa proposition dont je viens de parler, alors il ne s'agirait plus que de la garantie d'un minimum d'intérêt, et ce serait à l'article 3 que la proposition devrait être rattachée.
M. Dechamps. - Je ne comprends pas vraiment l'insistance que l'on met à repousser ma proposition. L'honorable M. Loos vient de faire une objection ; il dit que par l'amendement que nous avons proposé nous laissons au gouvernement la faculté d'exécuter la ligne par lui-même ; mais nous renonçons à cette partie de l'amendement, le ministère nous ayant fait connaître hier qu'il s'opposait à cette faculté que nous voulions lui accorder.
Je vais répondre directement à l'honorable M. Delfosse. Il a prétendu qu'il y avait autant de connexité entre le paragraphe A et le paragraphe B, qu'entre le paragraphe A et ma proposition. C'est une erreur : comme vient de le dire M. Dumont, il y avait en 1846 une concession relative au chemin de fer de Louvain à la Sambre ; il y avait une autre concession relative au chemin de fer de Wavre à Manage.
Ces deux projets formaient deux concessions distinctes ; maintenant il s'agit de rétablir la ligne de Louvain à la Sambre ; nous demandons qu'on y comprenne la section de Gembloux. il est impossible de signaler une connexité plus grande que celle-là.
Ainsi l'objection de l'honorable M. Delfosse n'est pas fondée. Le chemin de fer de Wavre à Manage est un chemin de fer tout à fait distinct qui avait été concédé à une autre compagnie en 1845.
Je demande donc qu'on ne nous empêche pas de développer notre amendement dans la discussion du paragraphe A auquel il se rattache.
M. le président. - On pourrait considérer les amendements de MM. Dechamps, Pirmez et G. Dumont, comme des amendements au littera A, et considérer les autres propositions comme des propositions nouvelles qui seront discutées séparément. (Adhésion.)
Ainsi la discussion est ouverte sur le paragraphe A, et les amendements de MM. Dechamps, Pirmez et G. Dumont.
M. Dechamps. - Messieurs, mes honorables collègues et moi, nous avons proposé deux amendements que la chambre me permettra de développer simultanément, afin de ne pas devoir prendre une seconde fois la parole.
Le premier amendement, comme je l'ai dit, a pour objet de rétablir le chemin de fer de Louvain à la Sambre ; le second amendement consiste à autoriser le gouvernement à prêter à la compagnie du chemin de fer de Charleroy vers la frontière de France, une somme de 1,800,000 francs, à 5 p. c. d'intérêt, et remboursable en 5 ans.
Messieurs, ce que nous demandons au nom du bassin de Charleroy, c'est la réalisation des projets de 1845 et 1846, qui avaient été décrétés pour ce bassin.
La. chambre devra convenir qu'il n'y a aucune exagération dans la prétention que nous élevons, lorsque nous demandons seulement de rétablir pour le bassin de Charleroy la position qui lui était faite par le système de 1845 et de 1846, alors que le bassin concurrent de Liége, comme je l'ai prouvé dans la discussion générale, après avoir vu exécuter tous les projets qui avaient été décrétés pour lui en 1845, obtient encore, par le projet actuel, des travaux nouveaux dont l'importance a été appréciée dans la discussion générale.
Messieurs, je demande pardon à la chambre d'avoir prononcé encore les mots de système de 1845 ; ces mots ont paru blesser certaines susceptibilités.
Puisque le projet actuel, qui avait d'abord été modestement présenté comme l'achèvement, le complément des projets antérieurs que les circonstances n'avaient pas permis d'achever, a été appelé l'œuvre politique, le programme d'affaires de l'opinion qui est au pouvoir ; il m'avait paru que je pouvais, tout en restant modeste, qualifier de système les projets de 1845 et 1846, dus presque entièrement à l'initiative du gouvernement qui ont fait verser dans le pays, en y comprenant les canaux de la Meuse et de la Campine, pour près de cent millions de capitaux en grande partie étrangers, qui ont fait l'objet de dix rapports distincts présentés par des commissions spéciales et qui ont nécessité une discussion de plus de vingt séances, contrairement à ce qu'on a avancé. Mais puisque les projets de 1846 ne sont, aux yeux de quelques-uns, ni un système, ni une œuvre politique, ni un programme, je m'abstiendrai d'employer ces termes, afin de ne pas soulever des objections inutiles.
Je disais donc que nous ne demandions, au nom du bassin de Charleroy, que la réalisation des projets décrétés pour ce bassin en 1845 et en 1846.
En 1846, la concession du chemin de fer de Louvain à la Sambre avec celle de Manage à Wavre forment un ensemble, je n'ose plus dire un système.
Ces deux chemins de fer étaient destinés à ouvrir au bassin du Centre et à celui de Charleroy, le marché de Louvain et de la Campine.
Eh bien, que fait le gouvernement ? Il propose de rétablir ces deux lignes presque entièrement : la section de Louvain à Wavre, celle de Wavre à Gembloux que la compagnie du Luxembourg sera chargée d'exécuter, la section de Wavre par Nivelles vers Manage ; c'est-à-dire l'exécution complète des deux projets, à l'exception de l'embranchement de Gembloux vers Charleroy que l'on a exclu, probablement parce qu'il est de tous le plus important ; je serais curieux de connaître pour quel motif cette exclusion serait prononcée.
La section de Louvain à Wavre, si on ne complète pas le chemin de fer vers la Sambre, sera improductive ; ce qui doit rendre la section de Wavre à Louvain productive, en partie du moins, c'est en y rattachant le bassin de Charleroy.
Lorsque Charleroy sera rattaché au chemin de fer du Luxembourg, et par conséquent à la section de Wavre à Louvain, il est évident que les transports de céréales de Louvain, de la Campine et d'Anvers vers Charleroy, et les transports des produits industriels de Charleroy vers ces marchés profiteront à la section de Wavre à Louvain.
Je le repète, la section de Wavre à Louvain sera improductive, sera presque un non sens, si l'on n'y relie pas le bassin de la Sambre la garantie d'intérêt, vous la payerez dans ce cas ; mais vous ne la payerez pas, si vous complétez le chemin de fer.
Je ne sais s'il est nécessaire de démontrer l'importance de ce chemin de fer. Je pourrais renvoyer la chambre à l'exposé des motifs que l'honorable M. d'Hoffschmidt, alors mon collègue dans le cabinet, a présenté en 1846, et dans lequel il établissait la haute utilité du chemin de fer de Louvain à la Sambre, et les résultats que ce chemin de fer devait produire.
Quel est l'objet de la section de Gembloux dont il s'agit en ce moment ? C'est d'abord, comme je le disais tout à l'heure, de mettre en communication directe le bassin de Charleroy avec le marché de Louvain et la Campine.
En échange des transports en céréales, en bières, en denrées coloniales qu'Anvers, la Campine et Louvain dirigeront vers Charleroy, Charleroy enverra vers ces marchés sa houille, ses fers, ses verres, ses clous et tous les produits originaires de cette riche contrée.
En second lieu, la ligne de Gembloux, c'est la jonction du chemin de fer du Luxembourg avec la Sambre et Charleroy d'une part et avec le chemin de fer d'Entre-Sambre-et-Meuse et celui de Charleroy vers la frontière de France ; ce sera un affluent très important pour le chemin de fer du Luxembourg, destiné à rendre celui-ci beaucoup plus productif qu'il ne le serait sans cela.
Ne pas construire cette section ,ce serait établir une véritable lacune, une solution de continuité dans le réseau des diverses lignes dont je viens de parler.
Quand il s'est agi du chemin de fer du Luxembourg, on a donné, avec raison, pour un des motifs de son utilité, les transports de houille, de pierres et de chaux qui auraient lieu par ce chemin de fer, des provinces de Hainaut et de Namur vers le Luxembourg. Or, les nombreux charbonnages qui se trouvent situés le long de la section de Gembloux, sur ce versant de la Sambre, du côté de Ransart, les riches carrières de Ligny et de Sombreffe, expédieront leurs produits vers les Ardennes par Gembloux et le chemin de fer du Luxembourg, si notre proposition est admise.
Refuser de décréter la section de Gembloux à la Sambre, c'est repousser les produits si nombreux du bassin de Charleroy du chemin de fer du Luxembourg et établir une solution de continuité fâcheuse et dommageable pour ce chemin de fer.
Messieurs, je dis donc qu'au point de vue de l'impartialité, des conditions de concurrence entre les bassins, de la justice distributive, je ne comprends pas pourquoi on exclurait cette section, la plus importante de toutes et si utile à toutes les autres. On amènera les houilles du bassin du centre par Nivelles et Wavre sur (page 2015) le marché de Louvain, et l’on fait bien ; mais pourquoi veut-on priver Charleroy de cet avantage acquis en 1846 ? J'attends qu'on donne une raison, un motif pour justifier un tel refus.
Sous le rapport des produits de ce chemin de fer, ai-je besoin de faire connaître à la chambre à quel point cet embranchement sera productif ? Il suffit, pour s'en rendre compte, de jeter les yeux sur la carte, et d'apprécier la situation des localités qu'il traverse.
Quelles sont les conditions d'un chemin de fer productif ? Qu'il traverse des populations nombreuses et serrées et d'une grande activité industrielle ; qu'il possédées sources de transports pondércux. Toutes ces conditions sont réunies ici ; Charleroy et sa banlieue comptent 80 mille âmes. C'est un des centres de population les plus importants du pays ; le chemin touche aux communes populeuses de Fleurus, Ligny, Sombreffe et Gembloux ; le long de la ligne se trouvent les charbonnages, les haut fourneaux, les verreries, les usines de Charleroy, les minières, les carrières, les fours à chaux de Ligny et de Sombreffe. Que l'on veuille me citer un chemin de fer réunissant plus de conditions de succès !
Mes collègues et moi sommes si convaincus de la prospérité probable de cette ligne, que nous avons cru devoir demander par notre amendement que le gouvernement se réservât la faculté de le construire à ses frais.
Mais pour ne pas soulever d'objections, nous retirons cette partie de notre amendement.
J'arrive à l'autre amendement présenté, celui relatif au chemin de fer de Charleroy vers la frontière de France.
Messieurs, par cet amendement nous demandons que la chambre autorise le gouvernement à faire un prêt de 1,800 mille francs, à cette compagnie pendant 5 ans, à charge de desservir l'intérêt à raison de 5 p. c.
Ce que nous demandons pour la ligne de Charleroy vers la frontière de France, c'est ce que le gouvernement et les chambres ont admis en faveur de la compagnie de Namur à Liége pour la construction de l'embranchement de la rive gauche de la Meuse.
Aucune objection n'a été faite quand le gouvernement a demandé à être autorisé à faire un prêt de 1,800,000 fr. à la compagnie de Namur à Liége ; personne ne s'y est opposé. Je demande s'il y a une comparaison à faire, sous le rapport de l'utilité publique, entre cet embranchement destiné à relier des établissements industriels peu nombreux et le chemin de fer international pour lequel nous réclamons le même concours de l'Etat.
Je demande dès lors pour quelle raison le gouvernement et la chambre refuseraient de faire, non pas même ce qu'on a fait pour la rive gauche, mais moins que cela, car dans le prêt fait à la compagnie de Namur à Liége, le remboursement ne doit avoir lieu qu'au bout de 6 ans, nous ne demandons que 5 ans ; l'intérêt à charge de la compagnie n'était que de 3 p. c, nous proposons 5. C'est-à-dire que nous demandons le même prêt à de meilleures conditions et pour un chemin plus important.
La chambre s'est préoccupée plusieurs fois de l'avenir de nos relations commerciales avec la France et du sort de nos traités. Ne pouvons-nous pas craindre de voir soulever tôt ou tard en France la question des zones. Notre intérêt dès lors n'est-il pas de multiplier nos moyens de communication avec la France, de les faire le plus économiques, le plus nombreuses, le plus faciles que possible.
Le chemin de fer de Charleroy vers la frontière française est l'un de ces chemins destinés à nous conserver ou à nous ouvrir d'une manière plus large le marché de la France. Les travaux sont aux trois quarts achevés. Cette compagnie a fait beaucoup d'efforts pour exécuter par des intermédiaires son entreprise ; il lui manque 1,800 mille francs à 2 millions pour l'achever. Le gouvernement vous propose un projet qui a pour objet d'encourager les compagnies qui ont fait de courageux efforts malgré les crises qu'ont subies en 1848, et pourquoi exclurait-on précisément celle dont les efforts ont peut-être été les plus persévérants ?
Le chemin de fer dont je parle doit améliorer les relations de Charleroy avec Maubeuge, ouvrir un marché nouveau, celui de Saint-Quentin aujourd'hui fermé aux produits de Charleroy, et rendre l'accès de Paris plus facile à ces produits.
Ceux qui connaissent les questions relatives au commerce de la bouille savent que la vente du charbon à Paris est monopolisée, pour ainsi dire, par les négociants intermédiaires.
Le prix du charbon à Paris est double du prix de revient dans les entrepôts de ces intermédiaires. Par la construction du chemin de fer d'Erquelinnes, qui sera immanquablement prolongé vers celui de Creil à Saint-Quentin, qu'arrivera-t-il pour le bassin de Charleroy ?
On aura mis le consommateur en communication directe avec le producteur. L'accès du marché de Paris aura lieu en toute circonstance, en tout temps, à toute heure ; la consommation s'accroîtra.
Quand il s'agit d'apprécier l'importance industrielle d'une voie de communication, j'ai plus de confiance dans l'opinion des intéressés que dans celle du ministre, qui ne peut connaître tous les faits. Or, l'industrie de Charleroy attache une importance justifiée à l'exécution des deux chemins de fer que nous réclamons.
Je demande qu'on m'explique l'exclusion, l'interdit que l'on veut jeter sur le tracé de Gembloux et sur le chemin de fer de Charleroy à la frontière française. Lorsqu'on aura fait connaître les objections que je ne comprends pas, je répondrai.
M. le ministre a fait, je pense, une seule objection dans la discussion générale. Il a dit que ce chemin de fer était une impasse.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Vous avez dit vous-même que ce chemin de fer n'aurait pas transporté des produits pondéreux et qu'il n'aurait servi qu'à transporter des voyageurs.
M. Dechamps. - Je me méfie un peu de l'exactitude de citations isolées, mais si j'ai dit cela je me suis trompé ; aujourd'hui que les faits me sont parfaitement connus j'affirme que les transports vers Maubeuge, St-Quenlin et Paris peuvent être considérables par cette ligne.
Je reviens à l'objection de M. le ministre quand il a dit que cette ligne était une impasse. C'est là un cercle vicieux dans lequel on se place. Le chemin de fer est construit de Creil à Saint-Quentin ; quand il sera achevé de notre côté jusqu'à Erquelinnes, il existera une lacune entre ces deux lignes. Mais qui peut douter que cette lacune ne soit promptement comblée ? Cela se fera quand nous aurons atteint l
Vous savez, messieurs, qu'une convention avec la compagnie du Nord a été proposée à l'Assemblée nationale de France l'année dernière. On n'a pas repoussé le projet parce qu'il n'était pas utile, mais parce que les clauses ont paru onéreuses. Les négociations ont toujours lieu depuis, elles viennent d'être reprises avec activité, et cette solution de continuité sera comblée. Je dis que c'est un cercle vicieux dans lequel on se place : en effet, en France, on attend que nous arrivions à la frontière, pour nous donner la main, et le gouvernement veut attendre que la ligne de Saint-Quentin à Erquelinnes soit décrétée en France, avant d'aider la compagnie belge à achever sa ligne jusqu'à la frontière de France. C'est un cercle vicieux qu'il faut rompre ; commencez par agir et l'on vous imitera ; accordez votre concours à la compagnie d'Erquelinnes et ce fait amènera la conclusion prochaine des négociations entamées en France.
Je me résume. Je demande à la chambre de réfléchir, dans son impartialité, sur les considérations que je viens de lui soumettre. Je ne viens pas me plaindre des avantages nouveaux que l'on propose d'accorder à d'autres bassins, mais je demande pourquoi on n'accorderait pas même à Charleroy les concessions qui formaient son contingent de 1845 et de 1846.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - La chambre aura pu remarquer que les honorables membres qui reprochent au gouvernement de s'être montré partial, peu équitable, dans la formation du projet de loi, se placent toujours à un point de vue exclusif.
Pour eux l'importance des travaux projetés se réduit à l'importance de l'industrie charbonnière. Ainsi, l'honorable M. Dechamps revient au système de 1845, qui consistait en une série de chemins de fer, dont plusieurs aboutissaient à Louvain, marché secondaire (alors qu'il aurait l'importance du marché d'Anvers, ce serait quelque chose comme 60 mille tonnes).
Lorsque le gouvernement a discuté avec la compagnie du Luxembourg la convention relative à la construction des chemins de fer de Namur à Arlon et de Bruxelles à Namur, il a fait entrer dans ses préoccupations l'importance légitime de la ligne de Louvain à la Sambre. Mais la compagnie du Luxembourg n'a pas voulu, même avec la garantie d'un minimum d'intérêt, se charger dès à présent de l'exécution de cette ligne. On a donc cru devoir se borner à abandonner à cette compagnie un droit de préférence qui a été formellemenl stipulé dans la convention qui est intervenue entre le gouvernement et elle.
Postérieurement à la convention, des demandeurs en concession se sont présentés au gouvernement, qui se chargent, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt sur un capital de 2,800,000 fr. de construire le chemin de fer de Louvain à Wavre. Une compagnie existe pour le chemin de fer de Manage à Wavre. Cette compagnie consent, moyennant la garantie par l'Etat d'un minimum d'intérêt sur un capital de 5 millions, à exécuter la section de Manage à Wavre.
Il reste donc deux sections : Jemeppe à Gembloux et Charleroy à Gembloux. Tout récemment, il y a quelques jours à peine, plusieurs demandeurs en concession se sont présentés au gouvernement. Mais leurs propositions différent essentiellement entre elles.
La direction qu'ils veulent donner à la section n'est pas la même. Ainsi il est tel tracé qui s'embranche sur la ligne de Manage à Wavre, sur un point qu'on appelle Bousval ; c'est une direction. Une autre direction, c'est celle de Charleroy à Gembloux. D'après cette demande, (page 2013) le capital à garantir serait de 7 millions. D'après une autre demande, le capilal serait de 8 millions.
Le gouvernement est donc en présence de plusieurs propositions qui doivent être instruites, examinées avec d'autant plus de soin qu'elles se rattachent à une autre demande de concession extrêmement importante, sur laquelle une enquête est ouverte, c'est la demande en concession d'un chemin de fer industriel, destiné à relier les charbonnages du bassin de Charleroy à la Sambre et le chemin de l'Etat à Charleroy.
Il paraîtrait que si l'on accordait l'autorisation aux demandeurs en concession de construire ce chemin de fer industriel, la ligne de Charleroy à Gembloux concédée isolément pourrait être compromise. L'enquête est ouverte, depuis le 5 de ce mois, sur cette demande de chemin de fer industriel. Quelle nécessité y a-t-il, en présence de cette circonstance, en présence de l'incertitude où se trouve le gouvernement lui-même quant à la somme sur laquelle devrait porter la garantie d'intérêt, de précipiter cette affaire ? Si le gouvernement reconnaît, avant l'ouverture de la session prochaine, qu'il y a nécessité de garantir sur un capital de 6 millions l'exécution de la ligne de Charleroy à Gembloux, il s'empressera de faire à la chambre une proposition.
Le gouvernement a reconnu l'importance de la ligne de Louvain à la Sambre, et c'est même dans cette pensée qu'il avait réservé un droit d'option à la compagnie du Luxembourg.
Mais évidemment l'honorable M. Dechamps est mal venu à dire qu'il n'y a pas de motifs légitimes pour exclure le bassin de Charleroy des avantages qu'on accorde à un autre bassin, au bassin de Liége. Et ici je dois un mot de réponse à l'honorable M. Dechamps.
En 1845, l'honorable M. Dechamps a soumis à la législature une série de projets qui tendaient tous à assurer des avantages soit au bassin du Centre, soit au bassin de Charleroy, soit au bassin du Couchant.
M. Dechamps. - Et au bassin de Liége.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Liége est venu sans doute à votre esprit. Vous avez proposé pour Liége le canal latéral, parce qu'il était impossible de ne pas le proposer.
Comment ! de 1825 à 1815 on avait exécuté au profit du bassin du Couchant et du bassin de Charleroy des voies navigables perfectionnées. On avait doté ces bassins de toute sorte de voies de communication utiles, favorables à leur production. Liége n'avait absolument rien obtenu, pas le moindre avantage.
En 1845, l'honorable M. Dechamps venant présenter une série de projets de loi qui tendaient à assurer au Centre un chemin de fer de Manage à Erquelinnes, à Charleroy, un chemin de fer de Charleroy à Erquelinnes et un chemin de fer de Charleroy à Louvain, au bassin du Couchant, un canal de Jemmapes à Alost, l'honorable M. Dechamps n'aurait pu évidemment se passer de proposer le canal latéral.
Et à cetle époque, on reconnaissait si bien que ce canal ne pourrait être qu'un ouvrage incomplet, que l'honorable M. Malou, combattant l’honorable M. Dechamps, venait déclarer dans cette chambre qu'on ne ferait que la première partie d'un travail destiné à être complété dans la suite. L'honorable M. Malou faisait observer à l'honorable M. Dechamps qu'il faudrait nécessairement canaliser la Meuse dans la traverse de Liége jusqu'à la limite du bassin houiller pour faire produire au canal les effets qu'on pouvait en attendre.
M. Malou. - M. Dechamps démontrait le contraire.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Si donc le gouvernement ne s'associe pas à l'honorable M. Dechamps en ce qui concerne la section de Charleroy à Gembloax, c'est parce que des faits nouveaux se sont produits, que le gouvernement se trouve en présence de plusieurs demandeurs en concession, et qu'à moins de modifier la portée de l'amendement, à moins de laisser à l'écart ce qui se rapporte à la direction du chemin, il lui serait impossible de ne pas conclure à l'ajournement de la proposition qui est soumise à la chambre.
Du reste, on doit le remarquer, le chemin de fer n'a qu'une importance purement industrielle ; et si les demandeurs en concession veulent transporter uniquement des produits pondéreux, pas n'est besoin de l'autorisation de la chambre. Si c'est un chemin de fer purement industriel, qu'on suive les formalités indiquées par l'arrêté de 1836.
Le second amendement de l'honorable M. Dechamps tend à consacrer un nouveau mode d'intervention de la part du gouvernement.
Le gouvernement intervient à l'aide d'une garantie d'intérêt, en faveur de certaines compagnies. L'honorable M. Dechamps se fondant sur ce qui s'est fait en 1850, en faveur de la compagnie de Namur à Liége, voudrait que le gouvernement fît à la compagnie de Marchienne-au-Pont à Erquelinnes, un prêt de 1,800,000 fr. pendant cinq ans à raison de 5 p. c.
Messieurs, l'exemple invoqué par l'honorable membre pour justifier sa proposition, est très mal choisi. Si l'honorable M. Dechamps avait pris connaissance de l'exposé des motifs et du rapport présenté par l'honorable M. T'Kint de Naeyer, dans la séance du 10 mai 1850, il se serait convaincu que si le gouvernement est intervenu en faveur de la compagnie de Namur à Liége, c'est à raison de la situation tout exceptionnelle où se trouvait à cette époque le pont du Val-Benoît.
Ainsi, je lis dans ce rapport : « L'Etat a-t-il un intérêt direct à ce que l'embranchement du chemin de fer concédé, compris entre Flémalle et la station des Guillemins à Liége soit exécuté dans le plus bref délai possible ?
« La réponse à cette question dépend uniquement du plus ou moins d'inquiétude que doit inspirer la situation du pont du Val-Benoît. En effet, si le passage des convois par ce pont était interrompu, soit par un accident, soit par la nécessité d'y exécuter des réparations, on peut aisément se figurer quelle perturbation il en résulterait non seulement pour le commerce en général, mais encore pour les recettes du chemin de fer.
eIl est évident que nos relations avec l'Allemagne par cette voie, seraient complètement interrompues, et le préjudice qui en résulterait pour le commerce d'exportation et de transit, serait incalculable. » C'est ce motif qui a déterminé le gouvernement à intervenir en faveur de la compagnie de Namur à Liége.
J'ai interrompu tantôt l'honorable M. Dechamps pour lui faire remarquer qu'à une autre époque, lorsque incidemment il introduisit le projet du chemin de fer de Marchienne-au-Pont à Erquelinnes, l'honorable membre répondant à l'honorable M. Dolez qui l'accusait de vouloir, à l'aide de ce chemin de fer, déposséder la Sambre, disait que ces craintes étaient purement chimériques. Voici dans quels termes s'exprimait l'honorable M. Dechamps :
« M. Dechamps. - L'honorable M. Dolez nous a dit que ce chemin de fer est demandé dans le but de déposséder la Sambre. C'est là une erreur complète. Le fret de Marchienne-au-Pont à Erquelinnes est maintenant de 1 fr. 80 ; par le chemin de fer, le parcours est de 6 lieues, ce qui par tonneau fait 2 fr. 40 c. Il est donc impossible de croire que les transports pondéreux de Charleroy vont prendre le chemin de fer. On n'ira pas payer, au lieu de 1 fr. 80, 2 fr. 40 et cela sans tenir compte du transbordement qui devrait avoir lieu à Erquelinnes. »
L'honorable M. Dechamps, s'en rapportant du reste au mémoire qui lui avait été fourni par un ingénieur français, M. Cordier, estimait seulement à quelques centaines de tonneaux le chiffre des transports qui seraient effectués par ce chemin de fer. « Le but de ce chemin de fer, ajoutait-il, est de prolonger le chemin de fer de Saint-Quentin à Maubeuge jusqu'à Charleroy ; ce but est de transporter les voyageurs. » Or, je demande quels voyageurs on transportera à Erquelinnes ; et si l’on ne transporte pas de produits pondéreux, à quoi bon faire un prêt de 1,800,000 francs à ce chemin de fer ?
En outre, je ferai observer que, depuis cette époque, on a réduit les pièges de 50 p. c, sur la Sambre, de manière qu'on transporte aujourd'hui sur la Sambre à raison de 17 c. par tonneau et par lieue.
Dans la forme que lui a donnée l'honorable membre, il m'est donc impossible d'adopter l'amendement proposé en faveur de la compagnie de Marchienne à Erquelinnes.
Cependant, le gouvernement se plaît à le reconnaître, la compagnie dont il s'agit a tenté, par des efforts louables, persévérants, de mener à fin son entreprise ; elle a rempli loyalement ses engagements, et aujourd'hui que l'Etat intervient en faveur de tant de compagnies qui sont restées en défaut de remplir leurs obligations, il serait peut-être d'un exemple fàcheux de ne pas également accorder l'assistance des pouvoirs publics à la compagnie de Charleroy à Erquelinnes.
Le gouvernement ne s'opposerait donc point à une intervention à l'aide d'une garantie d'intérêt jusqu'à concurrence d'une somme de 1,500,000 fr. Il est possible que cette intervention du gouvernement détermine non seulement l'achèvement de la ligne sur le territoire belge, mais aussi la formation d'une compagnie sérieuse disposée à donner à ce chemin le prolongeaient à défaut duquel il ne répondra point au but de sa création.
(page 2016) M. Dechamps. - Messieurs, j'ai écouté avec attention le discours que vient de prononcer M. le ministre des travaux publics. J'attendais des objections ; j'avoue naïvement que je n'en ai pas rencontré, au moins de sérieuses.
D’abord, messieurs, je m’occupreai d’une considération générale par laquelle M. le ministre a terminé. Il a parlé des projets de 1845 et 1846 ; il a insinué que j’aurais montré quelque partialité en ce qui concerne la pondération des intérêts entre le Hainaut et Liége.
Eh bien, j'en appelle aux honorables représentants de Liége ; ils se souviendront du témoignage de reconnaissance que Liége a bien voulu nous donner en 1846 et auquel j'attache un grand prix. (Interruption.) L'honorable ministre dit, que j'avais été bien forcé de proposer le canal latéral à la Meuse, pour ne pas faire preuve de partialité contre Liége. Je ne l'ai pas fait, comme forcé, et c'est précisément pour ne pas mériter ce reproche, que j'ai été impartial à l'égard de Liége, comme je crois l'avoir été à l'égard des autres parties du pays.
L'honorable ministre des travaux publics me reproche de ne m'occuper du projet de loi qu'à un point de vue exclusif, qu'au point de vue des quatre bassins houillers.
J'ai examiné le projet sous d'autres points de vue encore, mais il ne faut pas méconnaître que l'intérêt des bassins houillers est extrêmement important : lorsqu'il s'agit de chemins de fer et de canaux, l'objet principal est évidemment le transport des produits pondéreux, et il faut pas conséquent examiner avant tout, l'intérêt des grands centres de production.
M. le ministre croit que l'importance du marché de Louvain pour le district de Charleroy n'est pas bien considérable ; il l'estime tout au plus à 60,000 tonnes. Je ne puis pas vérifier les chiffres en ce moment et je suppose que l'assertion de M. le ministre soit exacte ; eh bien, n'est-ce rien qu'un marché de 60,000 tonnes ? Savez vous quelle est l'importance actuelle du marché de la Hollande pour le bassin de Liége ?
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - 200,000 tonnes.
M. Dechamps. - C'est une grande erreur. Liége exportait avant 1830, 120,000 tonnes...
M. Delfosse. - Avant 1830 le bassin de Liége exportait en Hollande à peu près 240,000 tonnes.
M. Dechamps. - D'après les documents officiels que j'ai fait publier en 1845 l'exportation des houilles du bassin de Liége par la Meuse s'élevait en 1845 à 60 ou 65 mille tonnes ; l'ouverture trop récent entre le canal latéral n'a pas permis d'augmenter ce tonnage de beaucoup... (Interruption de M. le ministre des travaux publics.)
Ne dites donc pas que cette exportation est actuellement de 200,000 tonnes. Vous espérez qu'elle atteindra ce chiffre dans l'avenir ; c'est possible ; je n'en sais rien ; mais je dis qu'en ce moment elle ne dépasse pas 75,000 tonnes ; or, vous regardez cette importance comme assez grande pour justifier l'exécution de travaux considérables pour le bassin de Liége.
D'un autre côté, le littera A a pour objet de donner des débouchés vers Louvain au bassin du Centre ; au point de vue de mes intérêts particuliers qui sont tout entiers dans le bassin du Centre, je devrais m'en applaudir, mais ce serait un acte injuste et, comme député de Charleroy, je demande que ce bassin puisse avoir sa part dans les 60,000 tonnes qui constituent le marché de Louvain.
M. le ministre me fait une singulière objection. Il dit que pour la section de Louvain à Wavre une compagnie s'est présentée, que pour la section de Wavre à Manage une compagnie ancienne existe, mais que pour la section de Gembloux il y a malheureusement plusieurs compagnies qui font des offres. Ainsi, c'est parce que plusieurs compagnie font des offres qu'on repousse notre demande ? (Interruption.)
M. le ministre ajoute que les projets sont différents quant à la direction ; eh bien, le gouvernement veut-il que nous modifiions notre amendement et que nous lui laissions le soin de déterminer le tracé ? Je le veux bien. Nous ne demandons pas qu'on accorde la concession à telle compagnie déterminée ; nous demandons que le gouvernement soit autorisé à concéder et il concédera à la compagnie qui offrira les meilleures conditions et sous le rapport du tracé et sous tous les autres. Ainsi, messieurs, cette objection, selon moi, ne vaut rien.
Autre objection : MM. Alex. Gendebien fils, et Smet ont demandé au gouvernement la concession des chemins de fer industriels destinés à rattacher les usines de Charleroy à la Sambre, au canal de Charleroy et au chemin de fer du Luxembourg par Gembloux. L'honorable ministre croit que cette concession, que le gouvernement fera bien d'accorder, et qui est très utile au bassin de Charleroy, il croit que cette concession ferait obstacle à l'exécution du chemin de fer de Gembloux.
Mais, messieurs, c'est le contraire qui est vrai ; ces chemins de fer se rattacheront à la ligne de Gembloux. Ils formeront les affluents nécessaires de cette ligne qu'ils rattacheront à tous les établissements industriels du bassin de Charleroy ; bien loin d'être un obstacle à l'exécution de la ligne que nous réclamons, ils en faciliteront précisément la construction. (Interruption.)
Comme le dit mon honorable collègue, M. Tremouroux, cela est si vrai, que MM. Gendebien et Smet demandent les deux concessions. Bien loin qu'il y ait opposition, il y a connexité, et ces messieurs demandent à la fois les sections industrielles et la section de Gembloux.
Vous voyez, messieurs, que cette objection tombe de la manière la plus complète.
Messieurs, pour en finir quant à la section de Gembloux, je répète que je n'ai pas entendu une seule objection de nature à démontrer à la chambre que le chemin de fer de Louvain à la Sambre ne devrait pas être rétabli en entier.
Je me permettrai de dire à M. le ministre des travaux publics que (page 2017) le bassin de Charleroy est meilleur juge de ses intérêts qu'il ne peut l'être lui-même.
Pour Charleroy, cette ligne a une importance sous un autre rapport. D'abord des minières considérables se trouvent sur le territoire des communes de Ligny, de Sombreffe et de Fleurus. Aujourd'hui les frais de transport de ce minerai sont très élevés, à cause de l'absence de moyens de communication avec Charleroy. Le chemin de fer traversant tout le terrain minier, le minerai arrivera à meilleur marché aux usines de Charleroy. Ce sera une occasion de réduire le prix de la fonte.
J'arrive au chemin de fer d'Erquelinnes. Quant à ce chemin de fer, M. le ministre des travaux publics a dit tout à l'heure qu'il y avait une différence entre les projets votés par la chambre, relativement au chemin de fer de la rive gauche de la Meuse et le chemin de fer d'Erquelinnes.
J'avais dit aussi qu'il y avait une différence, mais cette différence était relative à l'importance de ces deux lignes ; or, je demande si le chemin de fer jusqu'à la frontière française n'a pas, au point de vue de l'intérêt industriel et de l'intérêt international, une importance dix fois plus grande que la rive gauche...
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous savez qu'il y avait un motif spécial.
M. Dechamps. - On a parlé du pont du Val-Benoît. Je ne dirai pas qu'on a exagéré les craintes relatives au pont du Val-Benoît, et qu'on s'en est servi comme d'un prétexte ; mais ce que je constate, c'est qu'en fait les craintes étaient exagérées, puisqu'on ne parle plus du pont du Val-Benoît. Depuis que le prêt de 1,800,000 fr. est fait, les craintes dont on parlait tant ont cesse ; le pont s'est raffermi. (Interruption.)
Mais en supposant même que ce motif existât réellement, et je l'admets volontiers, est-ce parce qu'il y avait ce motif deplus pour l'embranchement de la rive gauche de la Meuse ; est-ce une raison pour empêcher que le gouvernement accorde le même prêt à la compagnie du chemin de fer d'Erquelinnes ?
J'ai dit tout à l'heure que le trésor public ne courait aucun risque. Ainsi la compagnie du chemin de fer d'Erquelinnes qui a fait, comme l'a dit M. le ministre des travaux publics, beaucoup d'efforts louables pour mener à bonne fin son entreprise ; la compagnie a exécuté pour 9 à 10 millions de travaux sur une somme de 13 millions qui forme le capital d'exécution, c'est-à-dire que les trois quarts du chemin de fer sont exécutes.
Ainsi le gouvernement aurait une garantie trois ou quatre fois plus grande que le prêt que nous propose la chambre d'accorder.
C'est le système préconise par l'honorable M. d'Elhoungnc ; c'est ce système dont nous demandons l'application. L'honorable M. d'Elhoungne a dit : Que les compagnies commencent par trouver une partie de leur capital ; qu'elles fassent exécuter une partie des travaux, et sur ces travaux elles pourront contracter des emprunts. Eh bien, c'est ce que nous demandons ; la compagnie du chemin de fer d'Erquelinnes a exécuté pour 9 à 10 millions de travaux, et nous demandons que le gouvernement lui accorde un prêt pour achever le chemin.
Il reste une dernière objection à laquelle je dois répondre.
M. le minisire des travaux publics a parlé de la concurrence que ce chemin de fer devait faire à la Sambre.
Pas plus aujourd'hui qu'en 1845, je ne crois à une concurrence. Je me suis peut-être trompé en 1845, en ne croyant pas à toute l'importance des transports industriels par cette ligne. Mais M. le ministre des travaux publics doit savoir que l'expérience a prouvé en Angleterre, en France et en Belgique, que quand on établit des chemins de fer parallèles aux canaux, il n'en résulte pas pour les canaux une concurrent préjudiciable. Je puis citer un exemple frappant, c'est l'exemple du chemin de fer de Paris à Rouen.
Savez-vous quel était avant 1844 le tonnage des transports de Paris à Rouen par la Seine ? La Seine transportait 250,000 tonnes avant le chemin de fer. En 1847, le tonnage total des transports sur la Seine et sur le chemin de fer a été de 500,000 tonnes, c'est-à dire que le tonnage a doublé. Le chemin de fer a transporté 25,000 tonnes, et la Seine a conservé son ancien tonnage.
La même expérience a eu lieu en Angleterre et en Belgique. Depuis la création du chemin de fer belge, le produit des canaux a été eu augmentant. Je n'admet donc pas l'objection présentée par M. le ministre des travaux publics.
Je me résume. Je crois que lorsque l'arrondissement de Charleroy demande pour la construction de la section de Gembloux, le concours de l'Etat, quel que soit, du reste, le mode de ce concours, cet arrondissement n'élève pas de prétentions exagérées.
M. le président. - La parole est à M. Landeloos.
M. Landeloos. - Messieurs, je crois inutile de prendre la parole, pour soutenir la proposition du gouvernement et de la section centrale ; jusqu'ici aucun orateur n'a combattu cette proposition ; je renonce donc à la parole ; je me réserve toutefois de répondre aux orateurs qui combattraient ultérieurement la proposition.
M. de La Coste. - Messieurs, la proposition de l'honorable M. Dechamps rentre tout à fait dans le système que j'ai développe et rentre aussi dans le système qui a été développe par l'nonorable M. d'Hoffschmidt.
En effet, l'honorable M. d'Hoffschmidt, en défendant les embranchements du chemin de fer du Luxembourg, est parti du principe que les concessions de 1845 et de 1846 constituaient un droit ; et à coup sûr le droit n'était pas au profit des compagnies, il était au profit des intérêts desservis par les lignes concédées, au profit des localités auxquelles ces intérêts appartenaient.
A ce point de vue, vous comprendrez que toutes les fois qu'il sera question de faire revivre des embranchements qui appartenaient à la concession du chemin de fer de Louvain à la Sambre, je les appuierai de tout mon pouvoir.
M. Delfosse. - L'honorable M. Dechamps a eu le tort, pour défendre Charleroy, d'attaquer Liége. Les représentants de Liége n'avaient pas combaltu et ne se proposaient pas de prendre la parole pour combattre les amendements des honorables représentants de Charleroy ; ils ne cherchaient pas à exercer de l'influence sur le vote de la chambre. La chambre appréciera s'il convient d'adopter ces amendements.
Mais si on ajoute aux projets du gouvernement et de la section centrale des projets de nature à occasionner de fortes dépenses, quels sont les voies et moyens avec lesquels on y fera face ? Je ferai, en passant, la remarque que ceux qui proposent de nouvelles dépenses n'ont pas tous voté les ressources que le gouvernement demandait.
L'honorable M. Dechamps a été injuste. Il a en quelque sorte accusé le gouvernement d'être partial pour Liége, et pourquoi ? Parce que le gouvernement a fait une avance de quelques centaines de mille francs pour achever le chemin de Liége à Namur sur la rive gauche de la Meuse. L'honorable membre a supposé qu'on avait fait cette avance uniquement dans l'intérêt de quelques établissements situés sur la rive gauche de la Meuse. Le gouvernement, s'est-il écrié, étant intervenu dans l'intérêt de quelques établissements de la rive gauche de la Meuse, pourquoi refuse-t-il à intervenir de la même manière en faveur des établissements bien plus considérables du bassin de Charleroy ? L'honorable membre sait bien que ce n'est pas dans l'intérêt des établissements situés sur la rive gauche de la Meuse qu'une avance a été faite à la compagnie de Namur à Liége ; on craignait, non sans raison, la chute du pont du Val-Benoît qui menaçait ruine ; il résultait du rapport des ingénieurs qu'il y avait des dangers sérieux ; si ces dangers ne se sont pas réalisés, c'est qu'on a fait des dépenses considérables pour les prévenir, on a dû cintrer le pont et néanmoins le danger n'a pas encore entièremenl cessé.
L'honorable membre a donc été injuste quand il a prétendu que la mesure avait été prise en vue de quelques établissements industriels. Ces accusations de partialité n'ont pas le moindre fondement, il faut en faire justice ; on n'a été guidé que par un motif d'intérêt général. On voulait empêcher l'interruption des communications entre la Belgique et l'Allemagne. Il n'y a pas eu d'autre motif.
J'attendrai que l'article relatif à la Meuse soit mis en discussion, pour relever, si cela est nécessaire, d'autres passages du discours de l'honorable M. Dechamps. Pour le moment, je me bornerai à dire que l'honorable membre est dans l'erreur, quand il prétend que nos exportations vers la Hollande avant 1830, ne s'élevaient qu'à 120,000 tonnes ; j'ai en mains un document qui prouve qu'elles étaient approximativement de 210,000 tonnes. Aujourd'hui, malgré le canal latéral à la Meuse, que nous devons en grande partie à M. Dechamps, et Liége lui en témoigne sa reconnaissance, malgré ce canal qui, malheureusement est incomplet, nous n'exportons que 90,000 tonnes, c'est-à-dire à peu près le tiers de ce que nous exportions avant 1830.
M. Veydt, rapporteur. - Rien, dans les paroles prononcées par l'honorable préopinant, n'indique qu'il entend repousser l'amendement principal des honorables députés de Charleroy. Je crois, au contraire, qu'après une discussion plus approfondie, il émettra un vote favorable. Et en effet, messieurs, l'honorable M. Delfosse, comme son collègue, M. Lesoinne, membres tous les deux de la section centrale, ont constamment prêté leur appui aux travaux, lorsqu'ils étaient reconnus éminemment utiles à des localités importantes du pays.
Tel est aussi le sentimet qui n'a cessé d'animer M. le ministre des travaux publics, et c'est avec regret que je l'ai vu s'écarter, en cette occasion, de sa ligne de conduite.
Il m'est démonlré, par toutes les explications qui ont été fournies en section centrale, qu'il n'a pas dépendu de M. le ministre que les anciennes concessions ne fussent de nouveau comprises, pour toutes leurs sections primitives, dans le projet de loi que nous discutons. Que d'efforts n'a-t il pas faits pour l'achèvement, par la société concessionnaire de la Flandre occidentale, de l'embranchement de Dixmude et de Furnes !
La stipulation d'un minimum d'intérêt plus élevé ne l'eût pas empêché d'apporter à la chambre une proposition en faveur de ce complément. La même conduite a été tenue pour relier Dinant au chemin de fer du Luxembourg. L'obstacle est venu d'ailleurs, et depuis, afin de pouvoir profiter d'autres chances qui viendraient à s'offrir, c'est l'honorable ministre qui nous a présenté la disposition concernant l'embranchement de Ciney à Dinant.
Dans une séance précédente, nous avons entendu M. le minisire des finances, répondant au discours de l'honorable M. Rolin, nous rendre compte des négociations qu'il a suivies avec la compagnie du Luxembourg et de ses offres pressantes pour la déterminer à se charger, immédiatement de la construction du chemin de fer abandonné de Louvain à la Sambre.
Si je me rappelle bien le chiffre qu'il a cité, le gouvernement aurait, au besoin, consenti, pour assurer cette exécution, à une garantie d'intérêt sur huit millions de francs ; et je comprends ces instances de l'honorable M. Frère. C'est une justice qu à mon tour j'aime à lui rendre, il aura insisté d'autant plus qu'il ne voulait laisser aucun prétexte de (page 2018) croire que la rivalité des bassins de Charleroy et du Centre avec le bassin houiller de Liége pour arriver à une ville de consommation aussi importante que Louvain, fût le moins du monde en cause.
Depuis qu’est-il arrivé ? Par la disposition accueillie en section centrale il y aura un chemin de fer de Manage à Wavre et de Wavre à Louvain. Le Centre, déjà si pourvu de moyens de communication, sera lié à cette dernière ville ; ses vœux seront accomplis. Je le vois avec plaisir, mais au moins que l'acte de justice soit complet. La jonction de Gembloux à la Sambre offre un intérêt au moins égal pour Charleroy et pour les nombreuses usines qui se trouvant dans ses environs. Il y a là tant d'éléments pour rendre ce chemin de fer productif que la garantie, qui est demandée, d'un minimum de 4 p. c. sur 6 millions a, suivant moi, les plus belles chances de n'être que nominale ou du moins de n'entraîner qu'un sacrifice léger et temporaire. Tous ceux d'entre vous, messieurs, qui connaissent particulièrement cette partie du pajs, s'en forment la même idée que moi, et le tableau que l'honorable M. Dechamps nous en a fait est très exact.
Le caractère du projet de loi est d'être juste et impartial et de réaliser, autant que faire se peut dans un même contexte, ce qui en travaux publics était antérieurement admis comme devant être exécuté ou ce qui est aujourd'hui reconnu éminemment utile dans les parties les plus importantes du pays. Je voudrais qu'après le vote définitif d'une grande loi comme celle-ci, chacun de nous pût se dire avec conviction qu'aucune partie essentielle n'a été perdue de vue, ni sacrifiée. Si nous ne pouvons atteindre ce but, tâchons au moins d'en approcher le plus près possible. Pour mon compte, messieurs, je ne crains pas les conséquences financières de la loi. Il y aura de larges compensations, car de nouvelles sources de prospérité seront infailliblement ouvertes Des ressources spéciales ont d'ailleurs été préalablement créées par le gouvernement. Ce qui pourrait y manquer, si tous les travaux s'achèvent, si le minimum de revenu doit être payé pour certaines lignes, n'a, suivant moi, rien qui puisse un instant nous inquiéter. Je ne partage en aucune manière les craintes qui ont été manifestées à ce sujet par quelques membres de cette assemblée et les chiffres qu'ils ont groupés m'ont paru très exagérés.
Il me reste, messieurs, à rencontrer deux considérations de l'honorable ministre ; car ce ne sont pas des motifs sérieux d'ajournement. Le tracé, a-t-on dit, n'est point arrêté ; des concessionnaires se sont présentés tout récemment, et leurs demandes diffèrent sous ce rapport. Il n'y a pas là d'obstacle, pas plus qu'il n'y en a eu pour les embranchements de Tongres à Fexhe et d'Audenarde à Deynze. Le principe de ces lignes nouvelles est proposé par la section centrale, et il a été entendu que le gouvernement déterminera les tracés lorsque des études complètes lui auront fait connaîlre quels sont ceux qui méritent la préférence.
Pour la jonction à la Sambre, il y a un tracé dans la concession de 1845 ; c'est la ligne de Gembloux à Charleroy. Rien n'empêche cependant qu'il y soit apporté un changement, si cela est utile, et je pense qu'une grande latitude peut être laissée à cet égard au gouvernement.
Enfin, M. le ministre nous a dit qu'il s'agit aussi de la construction d'un chemin de fer industriel, pour relier un grand nombre de charbonnages à la Sambre et au chemin de fer de l'Etat.
Mais comment peut-il y avoir là une difficulté ? C'est, au contraire, un avantage, une garantie de plus, de la bonté de la ligne principale, et les concessionnaires, qui se présenteront pour celle-ci, seront disposés à faire aussi les embranchements. Leur intérêt doit les y convier. On arrivera ainsi, au moyen d'une garantie sur un capital de six millions de francs, à assurer l'exécution d'un ensemble de lignes de 9 à 10 millions.
J'appuie,par toutes les raisons qui précèdent, le premier amendement des honorables représentants de Charleroy.
M. Malou. - Je répondrai à l'honorable M. Delfosse dans la discussion relative à la Meuse.
M. Dumont. — Ce que vient de dire l'honorable rapporteur réfute les objections de M. le ministre des travaux publics.
Je me rallie à la proposition faite par M. le rapporteur de ne pas indiquer le tracé dans l'amendement. Pourvu que le chemin de fer traverse les minières et les houillères de Charleroy, l'intérêt de ce bassin sera satisfait.
M. Le Hon. - Je viens compléter, par quelques mois, la réponse de la section centrale à l'interpellation de M. Dechamps, en ce qui concerne le rejet de la garantie du minimum d'intérêt pour l'embranchement de Charleroy à Gembloux. Le ton sur lequel l'honorable membre nous a interpellés, me donne lieu de croire que, dans sa pensée, on a été injuste envers ses commettants.
M. Dechamps. - Oui ; je le pense.
M. Le Hon. - Je vous ai donc bien compris. À votre tour, vous eussiez pu comprendre aussi les motifs de la section centrale, sans attaquer, par des insinuations assez transparentes, l'impartialité de ses intentions. Nous étions saisis de trois demandes d'embranchement : le premier, de Louvain à Wavre ; le second, de Wavre à Manage par Nivelles ; le troisième, de Gembloux à Charleroy. Le gouvernement nous renfermait dans la limite de ses voies et moyens, qu'il désirait ne pouvoir être dépassée que dans la mesure restreinte des ressources réservées par la loi projetée sur la contribution mobilière.
Obligés de faire un choix, nous avons résolu d'accueillir les demandes qui avaient pour objet de rattacher au réseau national deux chefs-lieux d'arrondissement, Wavre et Nivelles, centres de contrées populeuses, qij n'avaient point profité jusqu'ici des communications par le chemin de fer de l'Etat.
Charleroy, placé au milieu des voies fluviales et ferrées qui assuraient à ses habitants comme à ses produits des conditions économiques de transport, n'attendait de l'embranchement de Gembloux que l'amélioration de ses avantages ; il s'agissait du nécessaire pour Nivelles et Wavre et seulement de l'utile pour Charleroy.
Le choix ne pouvait pas être douteux, et notre résolution, quoi qu'en pense M. Dechamps, a été équitable et logique.
Je dois cette justice à mes honorables collègues de Liége, membres de la section centrale, qu'ils n'ont pas dit un mot qui fût contraire aux intérêts de Charleroy.
Au surplus, je suis trop partisan du perfectionnement des communications utiles pour ne pas être favorable à l'embranchement de Gembloux comme à celui d'Erquelinncs, s'il n'y a pas, de la part du gouvernement, opposition au point de vue financier ; et je regarde, en effet, ces deux lignes comme devant être très productives.
M. Malou. - Je réclame mon tour de parole, si la discussion continue.
M. Delfosse. - Après la discussion qui vient d'avoir lieu, je suis tout disposé à voter la garantie d'un minimum d'intérêt pour le chemin de fer de Gembloux à Charleroy. Mais, malgré le désir que j'ai d'être agréable aux représentants de l'arrondissement de Charleroy, il me sera impossible de voter pour le deuxième amendement qu'ils ont proposé.
Les représentants de l'arrondissement de Charleroy demandent que l'Etat fasse un prêt de 1,800,000 fr. à la compagnie d'Erquelinnes. Je ne pense pas que le gouvernement puisse entrer dans cette voie, quane il est réduit à faire un emprunt de vingt-six millions, peut-être même d'une somme plus considérable, pour les travaux à exécuter par l'Etat.e
Il me sera donc impossible d'adopter la proposition telle qu'elle est formulée. Mais je donnerai une preuve de l'esprit de conciliation qui m'anime en adoptant le premier amendement. C'est d'ailleurs celui qui a le plus d'importance.
M. Malou. - Les objections que vient de faire l'honorable M. Delfosse ne me paraissent pas fondées, il y a une différence énorme entre le prêt qui a été fait à la compagnie du chemin de fer de Namur à Liége et celui qu'on propose de faire à la compagnie d'Erquelinnes, et la différence est en faveur de la compagnie d'Erquelinnes.
En effet, lorsqu'on a fait le prêt de 1,800,000 fr. à la compagnie de Namur à Liége, on n'était pas stimulé exclusivement par la considération dont on a parlé. Mais on voulait aussi que le chemin de fer se fît sur les deux rives, et que les établissements industriels de la rive gauche fussent dans les mêmes conditions que les établissements de la rive droite.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Du tout ! C'était la seule raison.
M. Malou. - Maintenant, je dis qu'il y a une différence en faveur de la compagnie d'Erquelinnes : lorsqu'on a prêté à la compagnie du chemin de fer de Namur à Liége, on l'a fait en deuxième rang d'hypothèque ; elle avait fait un emprunt de 12 millions, tandis que le prêt à la compagnie d'Erquelinnes sera fait sur première hypothèque.
On dit : Mais il faudra augmenter le capital de l'emprunt. Il s'agit de faire un prêt à 5 p. c. pour quelques années. On peut espérer que le gouvernement empruntera au même taux ; il a toute garantie. Je ne vois pas ce qui empêcherait ce prêt.
L'honorable M. Delfosse a reproché à quelques préopinants de ne pas avoir voté les impôts. J'accepte ce reproche, mais à la condition que l'honorable M. Delfosse voudra bien reconnaître qu'il y a une partie des dépenses que nous ne votons pas ; d'où il résulte que nous sommes logiques. Ainsi par exemple, si l'honorable M. Delfosse nous avait aidé hier, à repousser des dépenses qu'on peut évidemment considérer comme inutiles, qui ne passeraient pas si elles n'avaient un vernis politique, nous aurions pu réduire l'emprunt et la nécessité de voter des impôts aurait été moins grande, moins impérieuse.
D'ailleurs pour ce qui concerne le vote des impots, il peut y avoir d'autres motifs légitimes de nos votes : c'est que les impôts proposés n'étaient pas ceux que nous croyions pouvoir être admis. Cette opinion a déjà été exprimée plusieurs fois dans cette enceinte. Ainsi toutes les fois qu'on demande à MM. les ministres quand ils exécuteront l'engagement qu'ils ont pris de mettre la chambre en mesure de se prononcer sur le tarif des marchandises, sur l'organisation législative du chemin de fer, MM. les ministres ne répondent pas. Mais eux et leurs amis politiques nous reprochent de n'avoir pas voté des impôts qui sont et seront dans l'avenir plus impopulaires encore.
M. Pirmez. - Si le gouvernement s'oppose au prêt, je crois qu'on pourrait y substituer la garantie d'un minimum d'intérêt. Mais je regarde le prêt comme plus favorable au gouvernement.
Je propose donc de garantir à la société un minimum d'intérêt de 4 p. c, sur un capital qui n'excédera pas 1,800,000 fr. Le terme de la garantie serait, comme pour les autres chemins de fer, de 50 ans.
M. Dumont. - Je n'avais demandé la parole que pour (page 2019) exprimer la même opinion que l'honorable M. Pirmez et pour proposer de convertir le prêt en une garantie de minimum d'intérêt.
M. Rolin. - J'ai demandé la parole pour dire que le seul motif qui ait déterminé le gouvernement à demander à la chambre l'autorisation de prêter une somme de 1,800,000 à la compagnie de Namur à Liége, c'était l'impossibilité de répondre de l'exidence du pont du Val-Benoît. C'est le seul motif qui ait été allégué dans l'exposé des motifs présenté à la chambre ; c'est le seul qui ait agi sur le gouvernement ; et dans cette circonstance, je dois le dire, M. le ministre dis finances a défendu jusqu'au bout les intérêts du trésor. J'ai été obligé d'insister à diverses reprises pour obtenir que ce prêt fût fait à la compagnie.
M. Dechamps. - Nous proposons le terme de 25 ans au lieu de celui de 50 ans. Comme il s'agit d'un chemin de fer qui est sur le point d'être achevé, le terme de 50 ans serait peut-être trop long.
- La discussion est close sur le paragraphe A et sur les deux amendements qui s'y rattachent.
M. le président. - Je vais mettre aux voix le premier amendement de M. Dechamps, relatif au chemin de fer de Gembloux. M. Dechamps a renoncé à la première partie de son amendement, qui serait dès lors ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à contracter avec une compagnie, pour l'exécution de la section du chemin de fer de Gembloux vers Charleroy, selon le tracé établi par la convention du 22 janvier et la loi du 22 mars 1846, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital n'excédant pas 6 millions, aux clauses et conditions stipulées dans les conventions annexées au présent projet de loi et en abandonnant à la compagnie la partie du cautionnement dont le trésor est en possession et les ouvrages exécutés. »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - J'ai quelques observations à présenter sur les termes mêmes de la proposition.
On demande que l'Etat soit autorisé à garantir à une compagnie qui se formerait un minimum d'intérêt sur une somme de 6,000,000, et à faire l'abandon de ce qui reste du cautionnement, et, en outre, les travaux déjà exécutés.
Ici il y a une difficulté que je dois signaler. La compagnie ancienne a exproprié des terrains et a fait exécuter des travaux qui ne sont pas payés.
Certains propriétaires ou d'autres personnes intéressées ont assigné l'Etat pour le faire condamner au payement des sommes dues par la compagnie déchue. Les expropriations ayant eu lieu à la requête de l'Etat belge, parce qu'il doit devenir ultérieurement propriétaire de la ligne après l'expiration du terme de la concession, le tribunal de Charleroy a pensé que cette circonstance était suffisante pour que l'Etat fût condamné à payer.
Il y aura bien évidemment appel de cette décision qui, je pense, ne sera pas confirmée.
Je ne sais s'il convient d'insérer dans l'amendement de l'honorable M. Dechamps cette clause qui suppose, au moins cela me paraît ainsi, que l'Etat serait obligé de payer. (Non ! non !)
Messieurs, il faut bien s'entendre ; il est indubitable que si le gouvernement avait été appelé à traiter, et il a eu à examiner des propositions à cet égard, il aurait probablement imposé à ceux à qui il accordait un minimum d'intérêt et l'abandon des travaux exécutés, l'obligation d'acquitter le prix des terrains et même le prix des travaux en tant qu'ils leur profitaient.
Il me semble donc qu'il serait impossible de maintenir les termes de l'amendement de l'honorable M. Dechamps. Il suffirait, je pense, de rédiger l'amendement en ce sens que le gouvernement serait autorisé à accorder la garantie d'un minimum d'intérêt sur un capital n'excédatl pas 6 millions, aux clauses et conditions à déterminer par le ministre des travaux publics.
Il est bien certain que le ministre des travaux publics fera l'abandon des travaux. Mais il stipulera les conditions qui seraient dictées par l'intérêt de l'Etat.
M. de La Coste. - Je demande la division quant au cautionnement Le cautionnement n'appartient pas plus à cet embranchement qu'à l'autre.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je pense qu'on pourrait laisser également à l'écart cette question du cautionnement ; elle serait aussi décidée par le ministre des travaux publics. La partie du cautionnement restante est d'ailleurs relativement minime ; il s'agit, si ma mémoire est fidèle, d'une somme de 100,000 fr.
M. le président. - Ainsi l'amendement serait rédige comme suit.
« Le gouvernement est autorisé à traiter avec une compagnie, pour la section du chemin de fer de Gembloux vers Charleroy, selon le tracé établi par la convention du 22 janvier et la loi du 22 mars 1846, moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital n'excédant pas 6,000,000, aux clauses et conditions à déterminer par le ministre des travaux publics. »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je demanle encore à faire une observation.
Mon collègue, M. le ministre des travaux publics, a fait connaître à la chambre que depuis la présentation du projet de loi et même de l'amendement, des demandes diverses ont été adressées au gouvernement. Elles ont toutes un but analogue, mais elles ne veulent pas y arriver par le même moyen. Il y a des tracés différents. Je pense qu'il serait très prudent de ne pas déterminer le tracé dans l'amendement.
M. Dechamps. - On ne le détermine pas.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Pardon. On dit : « de Gembloux à Charleroy. »
Diverses demandes en concession ont été adressées au gouvernement. Elles tendeut à relier plus ou moins directement, le bassin de Charleroy au marché de Louvain.
Il y a en outre, une concession de chemin de fer industriels qui concourt encore au même but, mais pas exactement de la même manière ; eh bien, il se peut que la concession des chemins de fer industriels rende, dans une certaine mesure, inutile le tracé qui est proposé ici ; il se pourrait aussi que la concession des chemins de fer industriels ne permît plus de trouver une compagnie pour la ligne de Gembloux à Charleroy. Ne conviendrait-il pas de réserver l'examen de toutes les questions d'adopter une rédaction qui n'exclut aucune combinaison ?
M. Dechamps. - Nous nous rallions volontiers aux modifications proposées par M. le ministre des finances relativement aux clauses et conditions pour les ouvrages exécutés et le cautionnement ; mais je crois qu'il faudrait dire : le chemin de fer de Gembloux à Charleroy, « selon le tracé à déterminer par le gouvernement ». En effet, d'après tous les tracés, au moins ceux que je connais, le point de départ est toujours Gembloux et le point d'arrivée Charleroy.
M. Pirmez. - M. le minisire des finances a parlé de chemins de fer industriels, demandés en concession. Je me permettrai de lui faire observer que ces chemins de fer industriels ne touchent pas à la ligne du Luxembourg. Ils relient certains charbonnages entre eux et les rattachent à la Sambre vers Charleroy, mais ils ne touchent nullement au chemin de fer de Bruxelles à Namur. Ils ne peuvent donc pas suppléer ni être un obstacle à la concession de la ligne dont il s'agit dans l'amendement.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Il est très important, messieurs, de ne pas se prononcer dès à présent sur la direction. Le département des travaux publics se trouve saisi en ce moment de plusieurs demandes en concession ; il y en a deux qui ont pour point de départ Charleroy et qui aboutissent à Gembloux, se reliant ainsi au chemin de fer de Louvain à Wavre, mais il en est une autre qui a aussi pour point de départ Charleroy, mais qui s'embranche au chemin de fer de Manage à Wavre, à un endroit qu'on appelle Bousval. Il est impossible que le gouvernement se prononce dès à présent sur la direction de Charleroy à Gembloux ; il pourra être amené à donner la préférence à la direction de Charleroy vers Bousval.
C'est là une nouvelle difficulté, indépendamment des chemins de fer industriels.
Autre observation : c'est que si la chambre adoptait l'amendement, il conviendrait, dans tous les cas, de réserver les droits de la compagnie du Luxembourg : aux termes de l'article 16 de la convention avec la compagnie du Luxembourg, cette compagnie conserve pendant deux ans le droit de préférence pour l'exécution de cette ligne.
Il faudrait donc, dans tous les cas, une réserve à cet égard dans l'amendement.
M. Delfosse. - Puisqu'on ne s'entend pas sur la rédaction, on pourrait provisoirement adopter l'amendement, et lors du second vote, modifier la rédaction en ce qui concerne le tracé.
M. Dumont. - J'ai déjà dit que Charleroy sera satisfait, si on le relie à la ligne du Luxembourg, soit à Gembloux, soit sur un autre point ; mais c'est à une condition : il faut que le tracé, qui serait déterminé par le gouvernement, traverse les terrains houillers et les terrains de minerai de fer.
Cette condition, ou plutôt ces deux conditions remplies, il devient indifférent à quel point se fait la jonction avec le chemin de fer du Luxembourg. On pourrait rédiger l'amendement dans ce sens.
M. d'Elhoungne. - Je pense qu'on pourrait adopter provisoirement une rédaction où la ligne à construire serait désignée de cette manière : « Une section de chemin de fer destinée à relier Charleroy à Louvain. »
Le point de départ serait ainsi arrêté ; mais on laisserait au gouvernement le soin de déterminer le point où la ligne devrait aboutir. (Interruption). On pourrait dire : « Le bassin de Charleroy. »
M. Dechamps. - Messieurs, nous nous rallions à l'amendement de l'honorable M. d'Elhoungnc ; d'ici au second vote nous pourrons examiner s'il est possible de déterminer d'une manière plus précise les points de départ et d'arrivée. Nous avions proposé Gembloux et Charleroy parce que c'était conforme à la concession déjà accordée et que nous ne connaissons pas les nouveaux projets dont on vient de nous parler. Maintenant nous nous rallions à l'amendement de M. d'Elhoungne, sauf à proposer des modifications au second vote, s'il y a lieu.
M. le président. - La disposition serait donc ainsi conçue :
« Le gouvernement est autorise à contracter avec une compagnie pour une section de chemin de fer destinée à relier le bassin de Charleroy à Louvain, moyennant la garantie d'un mininum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital n'excédant pas 6 millions et aux clauses et conditions qu'il déterminera. »
- Plus de cinq membres demandent l'appel nominal.
Il est procédé à cette opération.
En voici le résultat :
78 membres répondnet à l'appel.
64 répondent oui.
(page 2020) 10 répondent non.
4 s'abstiennent.
En conséquence, le premier amendement est adopté.
Ont répondu oui : MM. Ansiau, Boulez, Bruneau, Cans, Cumont, David, de Baillet (H.), Debourdeaud'huy, de Breyne, Dechamps, Dedecker, de La Coste, Delehaye, Delfosse, d'Elhoungne, Deliége, de Man d'Attenrode, de Perceval, De Pouhon, de Royer, de Steenhault, Destriveaux, de Wouters, d'Hont, Dumont, Faignart, Frère-Orban, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Malou, Manilius, Mascart, Mercier, Moreau, Orts, Pierre, Pirmez, Prévicaire, Reyntjens, Rogier, Rolin, Roussel (A), Rousselle (C), Sinave, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Vandenpeereboom (A.), Vandenpeereboom (E.), Van Groolven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Veydt, Allard et Verhaegn.
Ont répondu non : MM. Clep, Delescluse, de Liedekerke, de Muelenaere, de T'Serclaes, Dumon (A.), Orban, Rodenbach, Vanden Branden de Reeth et Vilain XIIII.
Se sont abstenus : MM. Coomans, de Brouwer, de Haerne et Jacques.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités, aux termes du règlement, à faire connaître les motifs de leur abstention.
M. Coomans. - Messieurs, je n'ai pas voté pour l'amendement, parce que j'ai rejeté d'autres projets de ce genre ; et je n'ai pas voté contre parce qu'il a été démontré par les honorables députés de Charleroy que ce projet est un des plus utiles et des plus raisonnables qu'aient été produits dans cet enceinte.
M. de Brouwer de Hogendorp. - Messieurs, je crois que ce chemin de fer est très utile, c'est le motif pour lequel je n'ai pas voté contre ; mais je n'ai pas voté pour, parce qu'à ce chemin de fer doit être appliqué le principe de la garantie d'un minimum d'intérêt, principe qui peut produire les meilleurs effets, mais qui peut aussi produire des effets désastreux pour le trésor public. Je me borne à voter ce principe pour quelques lignes principales ; je le repousse pour les autres lignes.
M. de Haerne. - Messieurs, malgré mon désir d'adopter l'amendement, je n'ai pas cru pouvoir le faire, parce que j'ai crains d'excéder les ressources créées pour l'exécution des travaux publics.
M. Jacques. - Je suis partisan du chemin de fer de Gembloux à Charleroy, mais je trouve que le chiffre de 6 millions est trop élevé.
M. le président. - Je mets aux voix le second amendement quî est ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à contracter avec la compagnie du chemin de fer de Charleroy à la frontière de France, moyennant un minimum de 4 p. c, pour le terme de 25 ans, sur un capital qui n'excédera pas 1,800,000 fr. »
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, le terme de 25 ans me paraît trop long. La compagnie reconnaissait que si on lui prêtait 1,800,000 fr. elle pourrait les rembourser en 5 ans ; si maintenant on favorise son emprunt par la garantie d'un minimum d'intérêt, et qu'on donne à cette garantie le terme de 5 ans, on fera peut-être assez pour la compagnie. Je propose provisoirement le terme de 5 ans ; on pourra y revenir au second vote.
M. Dechamps. - On peut adopter provisoirement le terme de 5 ans, sauf à y réfléchir d'ici au second vote.
- L'amendement est adopté avec la substitution du terme de 5 ans à celui de 25 ans, et sous la réserve indiquée ci-dessus.
M. le président. - Il reste à voter sur le littera A de l'article 3.
- Ce littera est adopté avec l'addition finale des mots : « aux clauses et conditions à déterminer par le gouvernement. »
M. le président. - Nous passons au littera b qui est ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à garantir, pendant 50 ans :
« b. A la compagnie chargée de l'exécution du chemin de fer de Manage à Wavre par Nivelles, un minimum d'intérêt de 4 p. c. sur un capital qui ne pourra excéder cinq millions de francs, et à lui faire abandon de la partie du cautionnement dont le trésor est encore en possession. »
Ne serait-ce pas aux conditions à déterminer par le gouvernement ?
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il y a, je pense, un cautionnement de 750 mille francs ; il est disponible ; si c'est la même compagnie qui exécute, elle aura son cautionnement. Si c'est une autre compagnie, il conviendrait de ne point statuer sur le cautionnement.
M. le président. - Je mets le paragraphe aux voix.
M. Bruneau. - Je propose la suppression des derniers mots.
M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Pour le chemin de Manage, c'est la compagnie primitive qui continue, de manière que la cautionnement est à sa disposition ; il n'y a pas nécessité d'adopter l'amendement de M. Bruneau.
- Le paragraphe b est mis aux voix et adopté tel qu'il a été proposé.
La séance est levée à 4 heures trois quarts.