(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1849-1850)
(Présidence de M. Verhaegen.)
(page 1347) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à midi et demi.
- La séance est ouverte.
M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier; la rédaction en est approuvée.
M. A. Vandenpeereboom fait connaître l'analyse des pétitions suivantes.
« Quelques habitants de la commune de Mont, province de Liège, prient la chambre de ne pas accorder la concession d'un accotement de la route de Jemeppe à HolIogne-aux-Pierres. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Plusieurs habitants d'Offagne prient la chambre de rejeter le projet de loi sur l'enseignement moyen ou de le modifier profondément. »
« Même demande des sieurs Lebrocquy et Kindt. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
Hennebert adresse à la chambre 110 exemplaires d'une brochure sur l'enseignement moyen.
- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.
M. de Brouckere, qui vient d'avoir le malheur de perdre son père, demande un congé.
- Accordé.
M. Lelièvre. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'abolition des droits de navigation perçus sur les transports d'engrais.
M. le président. - Ce rapport sera imprimé et distribué. A quel jour la chambre veut-elle en fixer la discussion?
M. Lelièvre. - C'est un objet urgent qui intéresse l'agriculture ; on pourrait le voter immédiatement.
- Plusieurs voix. - Non ! non ! A mardi.
- La discussion de ce projet de loi est fixée à mardi prochain.
M. Van Hoorebeke. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur les amendements introduits par le sénat dans le projet de loi sur le régime des aliénés.
M. le président. - Ce rapport sera imprimé et distribué.
M. Van Hoorebeke. - La section centrale a adopté les amendements introduits par le sénat, je propose de les mettre immédiatement en discussion.
- Un membre. - Je propose de fixer la discussion de ce rapport entre les deux votes sur le projet de loi d'enseignement moyen.
- Cette proposition esl adoptée.
M. Deliége. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi de crédit supplémentaire et de transfert pour le département des travaux publics, exercées 1848 et 1849.
- Ce rapport sera imprimé, distribué et mis à la suite de l'ordre du jour.
M. le président. - La parole est à M. le rapporteur pour présenter le rapport de la section centrale sur les amendements qui lui ont été envoyés.
M. Dequesne, rapporteur. - Messieurs, la section centrale a terminé dans la séance de ce jour la mission que la chambre lui avait confiée en lui renvoyant les divers amendements proposés sur l'ensemble du projet de loi et déposés pendant le cours de la discussion générale. Parmi ces amendements, ceux qui lui restaient à examiner et qui ont fixé particulièrement son attention, sont les amendements relatifs au conseil de perfectionnement, à l'inspection, aux diplômes et à l'enseignement normal. Ils portent sur les articles 33, 34, 35, 10, 37 et 38. Quelques autres amendements concernant les articles non encore votés et s'arrêtant au point où la chambre a terminé hier sa discussion, ont été l'objet de l'examen de la section centrale, mais elle ne doit en faire mention ici que pour ordre, car la plupart de ces amendements ou ont été implicitement rejetés ou sont devenus sans objet par suite des votes précédents.
L’article 21 permet de séparer l’enseignement professionnel de l'enseignement classique. Au lieu d'une séparation facultative, l'honorable M. de Brouckere voudrait une séparation obligatoire et complète pour les villes dont la population dépasse 80,000 âmes.
La question que soulève cet amendement a déjà été traitée et implicitement décidée, lors de la discussion de l'article 2. La section centrale a fait connaître alors les motifs qui lui ont fait repousser la proposition. Elle croit inutile d'y revenir.
A l'article 22 M. de Brouckere propose d'ajouter n°2° aux mots :« l'algèbre jusqu'aux équations du second degré inclusivement » ceux-ci : y compris le binôme de Newton et ses applications au calcul des probabilités. »
Le programme, ainsi qu'on l'a déjà remarqué dans le rapport primitif, est très chargé et ce n'est pas sans inconvénient qu'on peut ajouter de nouvelles manières d'une manière générale. D'après l'article 24 le gouvernement est autorisé à modifier et augmenter les cours, quand le besoin s'en fera sentir, en sorte que l'adjonction demandée par M. de Brouckere pourra avoir lieu par mesure réglementaire, sans qu'il soit besoin d'en faire mention dans la loi.
L'article 24 n'a donné lieu à aucun amendement.
La suppression des articles 25, 26 et 27 avait été demandée par M. De Brouckere comme conséquence de son système sur les écoles moyennes. Cet amendement est venu à tomber par suite du vote de la chambre sur l'article 2.
Les deux amendements, relatif à l'article 28, proposés par M. Osy, sous le titre d'article premier et troisième nouveaux, tombent également comme conséquence de ce vote. Ces deux articles étaient empruntés à la loi de 1834 el concernaient les écoles moyennes.
Il en est de même de la suppression demandée par M. de Brouckere des mots : « soit du premier, sait du second degré, » il doit être permis au gouvernement de subventionner les deux genres d'établissement, collèges et écoles moyennes de la commune.
Les conditions de la subvention déterminées par l'article 29 ne seraient plus admissibles, si le principe contenu dans l'article 2 nouveau proposé par M. Osy était adopté. Cet amendement est ainsi conçu : « Les écoles moyennes communales, même lorsqu'elles reçoivent des subsides, sont librement administrées par les communes. » La section centrale n'a pu accueillir une semblable disposition. Il entre dans le devoir comme dans le droit du gouvernement, de surveiller l'emploi des subsides qu'il alloue.
Les articles 30 et 31 n'ont été l'objet d'aucun amendement. Il est bon de remarquer cependant que les articles 9 et 10 ayant été tenus en suspens jusqu'à l'examen des articles 37 et 38, il convient de réserver la mention qui en est faite dans l'article 30.
L'article 33 relatif au conseil de perfectionnement, a donné lieu à deux amendements, l'un de M. de Brouckere qui en demande la suppression, l'autre de M. Osy qui en règle la composition et y fait entrer, outre la personne déléguée par le ministre, deux membres délégués du clergé, des délégués des universités, deux délégués de l'académie et deux inspecteurs de l'enseignement moyen.
La section centrale, à la majorité de six voix contre une abstention, n'a pu accueillir la demande de suppression du conseil de perfectionnement, faite par le premier amendement. Sans se prononcer sur l'institution telle qu'elle est composée aujourd'hui, et dont l'existence, nouvelle encore, exige une expérience plus longue, elle a reconnu néanmoins, qu'une réunion de personnes, dévouées au progrès de l'enseignement, chargées des attributions que le projet veut leur conférer aux termes des articles 10, 33 et 36, et appelées ainsi à remplir des fonctions purement gratuites, purement honorifiques, pouvait être une création très utile, très propre à arrêter l'administration dans les fausses voies où elle pourrait se laisser entraîner, et destinée enfin à imprimer un caractère d'impartialité et de fermeté aux décisions qui seront à prendre.
Mais votre section centrale ne s'est pas dissimulée que les services qu'on pouvait attendre de cette institution dépendrait en grande partie de sa composition. Pour en former le personnel, ce qu'il faut rechercher, ayant tout, c'est le dévouement à l'instruction, joint aux lumières nécessaires, c'est ensuite ou une position indépendante ou une grande expérience de l’enseignement, et, à cet égard la section centrale pense qu'il serait bien difficile de poser, dans la loi, des règles fixes et des conditions positives, sans courir le risque de manquer le but qu'on se propose d'atteindre. Elle est d'avis que cette partie de la loi doit être laissée à l'exécution, à la responsabilité ministérielle, au contrôle des chambres. Pour elle, elle n'a pu trouver dans ce conseil de perfectionnement aucune analogie avec le conseil supérieur des études qui vient d'être créé dans un pays voisin. Ici le conseil de perfectionnement est un corps purement administratif, avait à s’occuper uniquement et exclusivement de l'instruction moyenne donnée au frais de l'Etat seulement. Les établissements libres restent tout à fait en dehors de ses attributions. Là, au contraire, le conseil supérieur des études est, tout à la fois, le représentant et le surveillant de l'instruction dans son ensemble, privée ou publique. Il a une mission toute politique et doit, avant tout, sauvegarder la liberté de l'enseignement telle que la Constitution de ce pays l'a limitée et définie.
La section centrale a trouvé contre la composition proposée par l'honorable M. Osy et qui a quelques rapports avec celle du conseil supérieur dont il vient d'être parlé, deux objections graves qui l'ont déterminée à repousser l'amendement de l'honorable membre ; la première concerne l'intervention, à titre officiel, des membres du clergé dans le conseil de perfectionnement. La loi sur l'enseignement primaire elle-même ne va pas si loin. Les délégués des évêques sont purement entendus et n'ont pas voix (page 1348) délibérative dans la commission centrale. Dans le cours de la discussion l'on a signalé des inconvénients nombreux que présenterait cette intervention, soit au point de vue de la Constitution, soit au point de vue de l'égalité qui doit être maintenue entre les divers cultes et leurs ministres. La seconde objection porte sur les restrictions trop grandes apportées par l’honorable M. Osy au choix des autres personnes appelées à composer le conseil. Les personnes vraiment aptes à remplir ces fonctions sont rares en tous les pays, l'on doit laisser au gouvernement une grande latitude pour les prendre là où elles se trouvent. La section centrale par ces considérations, maintient donc ses premières propositions.
L'article 34 a été l'objet de deux amendements. M. Osy emprunte ici encore ses règles d'inspection au projet de 1834, en ce qui concerne les établissements communaux, subventionnés ou non. Son système ayant été repoussé par la section centrale, ainsi qu'on l'a vu ci-dessus, l'amendement dont il s'agit ici, et qui n'en est que la conséquence, a été également rejeté.
L'honorable M. de Brouckere voudrait réduire à deux le nombre des inspecteurs pour l'enseignement moyen. Dans le premier rapport, l'on a donné les raisons qui ont déterminé la majorité de la section centrale à conserver les trois inspecteurs proposés primitivement. Le nombre des établissements à visiter tous les ans sera de 105 environ, savoir : 10 athénées, 50 écoles moyennes, 15 à 20 établissements communaux, 20 à 25 établissements patronnés. Cette obligation, prescrite par la loi, si l'on veut qu'elle soit remplie utilement et efficacement, exigera les soins continuels de trois personnes au moins pendant toute l'année.
Il peut même se faire que trois personnes ne suffisent pas. C'est en vue de cette éventualité et dans le but aussi, si la nécessité s'en fait sentir, d'amener de l'unité et de l'harmonie dans l'inspection que la section centrale à cru devoir maintenir l'autorisation demandée de créer au besoin un inspecteur général. La section centrale, à la majorité de quatre voix contre trois, a maintenu sa décision primitive.
Il nous reste, pour terminer la tâche qui nous est imposée, à rendre compte à la chambre des nouvelles propositions que les amendements de MM. Hyacinthe de Baillet et Toussaint, présentés sur l'article 10, ont fait naître.
Sans rentrer dans les raisons qui lui avaient fait admettre, pour l'instruction moyenne, une institution normale analogue à celles qui sont établies pour l’enseignement primaire, raisons qui ont été longuement développées dans le rapport primitif, et tout en persistant dans l'opinion que le système proposé était en parfaite harmonie avec les véritables principes, en matière de liberté d'enseignement el conforme d'ailleurs aux précédents et à diverses mesures identiques, prises dans d'autres branches du service public, la section centrale, par esprit de conciliation et de transaction et tenant compte de certains scrupules qui ont été manifestés, bien qu'elle ne les partage pas, s'est ralliée au système proposé par les auteurs des deux amendements dont a été parlé ci-dessus et propose de soumettre à un jury spécial, la collation du diplôme de professeur agrégé de l'enseignement moyen de l'un ou l'autre degré, quel que soit le temps et lieu ou ses études aient été faites.
Dès lors, toutefois, la section centrale a cru devoir astreindre à ce diplôme, et sauf les exceptions exprimées à l'article 10, tous les professeurs dépendant de l'instruction moyenne donnée aux frais de l'Etat et appartenant aux établissements soit de la commune, soit de la province, soit du gouvernement.
L'utilité et la nécessité même de ce diplôme ne peuvent être méconnues. Les grades, même souvent, sont insuffisants pour constater la véritable aptitude d'un professeur. Personne ne conteste, en effet, que, pour être bon professeur, il ne suffit pas d'avoir les connaissances littéraires ou scientifiques nécessaires, qu'il faut encore posséder l'art de guider et de diriger la jeunesse, le talent d'exposer ce qu'on sait avec méthode et clarté et acquérir enfin la science et l'art de l'enseignement. Ainsi donc, les examens à subir pour obtenir le diplôme de professeur agrégé, porteront donc sur cette dernière branche des connaissances aussi bien que sur les branches littéraires ou scientifiques, les docteurs en lettres ou en science dont les études sont dirigées en vue de l’enseignement, sont seuls dispensés du diplôme.
Voici donc les nouvelles propositions que la section centrale a l'honneur de soumettre à la chambre :
Article 10. Au paragraphe premier, maintenir les mots : « ou non » comme au projet primitif.
Le surplus des propositions de la section centrale est conservé jusqu'inclusivement le paragraphe 4.
Et ajouter ici, paragraphe 5 : « Nul ne peut être nommé professeur, dans les établissements soumis à la présente loi, s'ii n'est Belge ou naturalisé. »
Le surplus comme le propose la section centrale.
« Art. 37 (nouveau). Le diplôme de professeur agrégé de l’enseignement moyen de l'un ou l'autre degré sera délivré par un jury spécial et après des examens qui seront réglés par arrêté royal.
« Toute personne peut se présenter aux examens et obtenir le diplôme ci-dessus sans distinction du temps ou du lieu où elle aura fait ses études. »
Article 38 (nouveau) (article 37 ancien). Conserver l'article 37 en entier.
Y ajouter seulement :
« Des examens auront lieu pour l'admission à l'école normale ci-dessus.»
Supprimer l'article 38 ancien.
M. le président. - Nous en sommes à l'article 21, il est ainsi conçu :
« Art. 21. Les cours sont distribués de telle manière que les élèves qui se destinent aux études académiques puissent suivre toutes les leçons qui préparent à ces études, et, d'autre part, que les élèves qui se destinent au commerce, à l'industrie, aux arts, aux études polytechniques ou à l'état militaire, puissent également profiter de tous les cours utiles à leur profession future.
« Le gouvernement pourra séparer les deux enseignements. »
M. de Brouckere a proposé l'amendement suivant : « L'athénée et l'école d'industrie et de commerce seront confondus en un seul établissement dans les villes dont la population ne dépasse pas 80,000 âmes.
« L'enseignement sera distribué, etc. »
M. Delfosse. - Le but de la disposition est d'avoir dans chaque athénée deux espèces d'enseignement : l'enseignement humanitaire et l'enseignement professionnel. L'article 21 devrait se borner à cette indication. Je propose de le rédiger comme suit :
« Il y a dans chaque athénée deux enseignements : l'enseignement des humanités et l'enseignement professionnel.
« Le gouvernement pourra séparer ces deux enseignements. »
Le reste est réglementaire.
M. Dequesne, rapporteur. - La section centrale se rallie à cet amendement qui n'est qu'un changement de rédaction.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Au fond, l'amendement abrège l'article; il supprime plusieurs dispositions purement réglementaires. La section centrale s'y ralliant, je m'y rallie également.
- L'amendement de M. de Brouckere est mis aux voix; il n'est pas adopté.
L'article 21 est adopté.
La discussion est ouverte sur l'article 22 du projet de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie, et qui est ainsi conçu :
« Art. 22. L'enseignement de la section des humanités comprend :
« 1° Les préceptes de la rhétorique et de la poésie, l'étude approfondie de la langue latine, de la langue grecque et de la langue française, ainsi que de la langue flamande ou allemande, pour les parties du pays où ces langues sont en usage;
« 2° La partie élémentaire des mathématiques, l'arithmétique, l'algèbre jusqu'aux équations du second degré inclusivement, la géométrie des trois dimensions, la trigonométrie rectiligne et des notions de physique ;
« 3° Les principaux faits de l'histoire universelle et l'histoire de la Belgique, la géographie ancienne et moderne, et en particulier la géographie de la Belgique, y compris les notions des institutions constitutionnelles et administratives.
« 4° L'étude des langues modernes, telles que le flamand et l'allemand pour les parties du pays où ces langues ne sont pas la langue maternelle, ainsi que l'étude de l'anglais.
« 5° Les éléments des arts graphiques (dessin et calligraphie), la musique vocale et la gymnastique. »
M. le président. - M. de Brouckere propose au n° 2° un amendement consistant à substituer aux mots : « équations du deuxième degré inclusivement, » les mots suivants : « y compris le binôme de Newton et ses applications au calcul des probabilités.»
M. Dumortier. - J'ai quelques observations à présenter sur l'article en discussion. Cet article, vous le savez, comprend le programma des études .Or, dans l'opinion que j'ai eu l'honneur de professer déjà plusieurs fois dans cette chambre, un des motifs de l'affaiblissement des études en Belgique, ce sont les efforts peu éclairés qui ont été faits pour les fortifier; ces efforts sont de deux sortes : on a multiplié sans mesure les matières d'enseignement ; on a rendu des livres élémentaires non élémentaires. Voilà ce qui a occasionné l'affaiblissement des études en Belgique. Ce n'est pas autre chose. Les livres que vous donnez à la jeunesse sont si peu élémentaires, qu'elle ne les comprend pas; et ne les comprenant pas, elle ne peut profiter de l’enseignement qu'on lui donne. Si je pouvais examiner ici ce qui s'est passé au sujet de telle ou telle grammaire, il me serait facile de démontrer que plus on cherche à fortifier les études, plus, en définitive, on les amoindrit. Ainsi, l'on met aujourd'hui entre les mains des enfants des grammaires tellement philosophiques, qu'elles sont inintelligibles pour eux ; tandis qu'autrefois il y avait des grammaires très simples, très élémentaires que les enfants comprenaient à merveille.
C'est un énorme abus qui a amené les résultats les plus funestes. J'engage vivement, sérieusement, le gouvernement à revenir à l'ancienne méthode, qui afai tdes hommes très remarquables et qui en ferait encore aujourd'hui. Car ne nous y trompons pas. Notre jeunesse n'est pas moins capable, n'a pas moins d'intelligence que ses devancières. Elle est pleine d'ardeur, pleine d'amour pour l'étude, et si les résultats que l'on obtient ne sont pas aussi favorables que par le passé, cela est dû exclusivement aux systèmes vicieux qui ont été employés pour le développement des études.
Un second motif, messieurs, c'est le développement exubérant des matières d'enseignement. J'ai fait une partie de mes études à Paris sous l'empire. Eh bien, à cette époque où l'on faisait de grands efforts pour l'instruction, on était loin d'arriver à une instruction comme celle d'aujourd'hui. Croiriez-vous, par exemple, que dans certains établissements (page 1349) on fait faire aux élèves non seulement des thèmes grecs, mais même des vers grecs. Je vous demande si ce n'est pas là la dernière de toutes les absurdités.
On fait plus, on fait faire des compositions en vers grecs, et dans les concours entre les athénées, on veut que les élèves concourent à faire des vers grecs.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est inexact. On ne fait pas dans les concours des vers grecs.
M. Dumortier. - On fait des thèmes grecs. Je m'entends à l'instruction et à l'étude tout aussi bien que l'honorable M. Rogier.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - On n'a fait dans les concours que des versions. Soyez exact.
M. Dequesne, rapporteur. - On fait de la prosodie, et c'est le fond de la langue grecque.
M. Dumortier. - Ce n'est pas le fond de la langue grecque. Vous ne connaissez pas plus le fond de la langue grecque que vous ne savez le fond de la langue française.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est une impertinence. Je demande la parole.
M. Dequesne, rapporteur. - Je ne réponds pas à des injures.
M. Dumortier. - Le fond de la langue grecque est dans la traduction grecque et non pas dans des thèmes grecs et dans des vers grecs; et si vous voulez introduire dans l'instruclion des matières aussi exubérantes, il est de toute évidence que vous arriverez à ce résultat que vous amènerez un affaiblissement toujours progressif des études.
Je dis donc que le paragraphe qui contient l'étude approfondie de la langue grecque est un paragraphe propre à affaiblir les études. Laissez faire aux élèves des versions grecques, ce sera bien. Mais, je vous le demande, sur cent élèves qui sont sortis des athénées, en dehr:s du corps professoral, en compterez-vous un sur cent qui ait continué l'étude du grec? Je dis que non. Dès lors à quoi bon donner aux élèves des thèmes grecs et de la prosodie grecque?
C'est un temps perdu dans lequel vous hébétez l'intelligence des jeunes gens. Vous leur donnez beaucoup trop de choses à étudier, et ils finissent par n'en retenir, par n'en savoir aucune.
Je eanse donc qu'il est indispensable de simplifier le programme des études, si vous voulez le progrès des études. Il faut apprendre à la jeunesse ce qui doit lui servir dans l'avenir. Or, messieurs, ce qui doit servir avant tout dans l'avenir, c'est l'étude des langues vivantes. Et ici j'arrive à signaler à la chambre un système tout à fait inverse à celui que je voudrais voir introduire dans le programme.
Que vous dit-on? On vous dit qu'on apprendra les langues flamande et allemande dans les parties du royaume où ces langues sont en usage. Eh bien, c'est précisément le contraire qu'il faudrait faire : on devrait enseigner la langue flamande et la langue allemande dans les parties du pays où elles ne sont pas en usage.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) ; - C'est ce que fait la loi.
M. Dumortier. - C'est une erreur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Lisez la loi.
M. Dumortier. - Je vais vous la lire et vous prouver que je la connais mieux que vous. La loi dit : «.....Ainsi que de la langue flamande ou allemande, pour les parties du pays où ces langues sont en usage.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Lisez donc le n°4°.
M. Dumortier. - « L'étude des langues modernes. » Je le sais bien; mais il ne s'agit là que de l'étude des éléments; or je dis que les langues dont il s'agit devraient surtout être enseignées d'une manière approfondie dans les parties du pays où elles ne sont pas en usage.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous aviez commencé par dire qu'on n'enseignait ces langues que dans les parties du pays où elles sont en usage.
M. Dumortier. - J'ai parlé de l'étude approfondie.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous n'avez pas ajouté: approfondie.
M. Dumortier. - Je dis donc, messieurs, que, pour mon compte, je désirerais que le flamand et l'allemand fussent étudiés d'une manière sérieuse dans les provinces wallonnes, surtout dans celles qui touchent aux provinces flamandes ou à l'Allemagne.
En effet, messieurs, tous ceux d'entre nous qui sont nés dans les provinces wallonnes doivent savoir quel vide immense il y a dans notre éducation, lorsque nous ne connaissons pas la langue qui est parlée dans la moitié de la Belgique. Plutôt que de faire des thèmes grecs et des vers grecs, il vaudrait beaucoup mieux d'apprendre l'allemand dans les parties du pays qui touchent à l'Allemagne, el le flamand dans celles qui touchent aux provinces flamandes.
Remarquez, messieurs, que cela serait beaucoup plus important pour les Wallons que pour les Flamands. En effet, lorsqu'un Wallon se présente pour obtenir le plus petit emploi dans les Flandres, on lui dit toujours: Vous ne connaissez pas la langue du pays. Je dis donc que l'étude approfondie de la langue flamande serait beaucoup plus utile que l'exubération des études grecques, études qui, pour les neuf dixièmes des élèves, deviennent complètement inutiles après leur sortie de l’université. Je le demande, voici une assemblée des élus de la nation, eh bien, combien y en a-t-il parmi nous qui sachent maintenant traduire une phrase grecque?
- Un membre. - Moi.
M. Dumortier. - « Moi, » dit un membre; eh bien, j'en félicite notre collègue; je ne pense pas qu'il y ait dans cette chambre quatre autres membres qui puissent dire la même chose.
Voilà donc une étude sur laquelle les jeunes gens pâlissent, dont on fatigue leurs intelligences, et dont on fait bien rarement usage, une fois le cours d'humanités terminé ; l'étude des langues vivantes, au contraire, est un bienfait qui vous est utile dans la vie sociale et dont vous profitez dans tous les passages de votre existence.
C'est pour nous un vide immense, et c'est précisément à cause que je ressens tous les jours le vice de l'absence de l'étude des langues teutoniques que je désire vivement que, dans les provinces wallonnes, ces langues occupent le premier rang dans l'instruction.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, l'honorable préopinant vient de se livrer à des attaques assez violentes contre le programme de l'enseignement; et, à cette occasion, il a émis plusieurs assertions très inexactes.
Ainsi, il a d'abord reproché au concours établi entre les divers collèges subventionnés du royaume, d'admettre comme matière les vers grecs; eh bien, jamais les vers grecs n'ont figuré au programme du concours. L'honorable M. Dumortier s'est rejeté des vers grecs sur les thèmes grecs, en disant que c'était la même chose. L'honorable M. Dumortier, je n'en doute pas, a fait son cours de poésie, et je ne pense pas qu'il puisse confondre les vers avec la prose. Or, je ne crois même pas qu'on ait jamais donné des thèmes grecs dans le concours; on a donné des versions grecques, ce qui est encore autre chose que des thèmes grecs.
L'honorable député de Roulers s'élève ensuite contre l'absence de l'enseignement du flamand dans le programme des études; il trouve que l'étude de la langue flamande est utile dans les parties du royaume où cette langue n'est pas parlée. J'ai été obligé de faire remarquer à l'honorable membre qu'il se trompait encore ici d'une manière complète, qu'il n'avait lu que le premier paragraphe de l'article, qu'il n'avait pas lu le quatrième paragraphe.
Dans le premier paragraphe de l'article, il s'agit de l'étude approfondie de la langue flamande dans les provinces où cette langue est parlée; mais dans les provinces où cette langue n'est pas parlée, on veut qu'elle figure au programme des études, pour être étudiée, non pas littérairement, mais surtout au point de vue pratique.
Ainsi l'honorable député de Roulers s'est livré à des accusations sans fondement, alors qu'il a reproché au programme de ne pas renfermer l'étude du flamand.
M. Dumortier. - J'ai dit l'étude approfondie.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Pardon; ce n'est que quand on vous a fait remarquer votre erreur que vous vous êtes rejeté sur l'étude approfondie. Comme vous vous êtes rejeté sur les thèmes grecs, quand on vous a fait reconnaître votre erreur au sujet des vers grecs.
Messieurs, lorsqu'on est si léger dans ses assertions, il me semble qu'on pourrait se montrer moins exigeant et surtout moins ironique à l'égard de collègues qui, peut-être, sous le rapport scientifique, pourraient en remontrer à certain académicien.
Je sais, messieurs, que l'honorable rapporteur de la section centrale a eu le privilège d'exciter l'esprit satirique de certaine presse; on a accusé notre honorable ami de ne pas savoir l'orthographe, de donner des majuscules, ô crime grammatical! à des substantifs communs et d'écrire des noms propres, le nom de M. Dedecker, avec des petits d!
Voilà, messieurs, d'où l'on est parti pour accuser d'ignorance un des hommes les plus instruits, mais il est vrai aussi un des hommes les plus modestes du pays.
Il est vrai, cet honorable collègue n'a pas le don de parler à tort et à travers de toute espèce de choses; il se renferme, sous ce rapport, dans une réserve peut-être trop grande; j'aurais dû peut-être ici l'imiter ; mais comme c'est la seconde fois qu'on fait allusion à cette misérable et pitoyable querelle faite à un homme qui a rendu, dans cette circonstance, à la loi d'enseignement des services dont le pays et tout le corps professoral sauront se rendre compte, il m'a été impossible de ne pas la relever.
Cet homme qu'on attaque avec tant de légèreté a présidé le jury d'examen des élèves universitaires, et je renvoie volontiers l'honorable M. Dumortier à l'opinion de tous les membres qui ont siégé avec l'honorable rapporteur de la section centrale, j'en appelle à l'opinion de ces hommes parfaitement compétents.
Je crois en avoir dit assez sous ce rapport. L'honorable M. Dumortier a quelquefois de bons mouvements ; cela peut faire passer plus facilement sur des mouvements contraires auxquels il se livre quelquefois; je suis sûr que, réfléchissant sur ses paroles, il reconnaîtra que c'est à tort qu'il s'est livré à une attaque intempestive contre le rapporteur de la section centrale, qui ne lui avait absolument rien dit.
M. Dequesne. - Je regrette que mon honorable ami, M. le ministre de l'intérieur, ait pris la peine de relever les expressions peu (page 1350) convenables de M. Dumortier. Car, pour moi, je déclare que je les méprise souverainement et n'y ai aucun égard.
M. le président. - Je pense qu'on ne doit pas pousser plus loin cet incident qu'ont provoqué quelques paroles prononcées légèrement et dans la chaleur de l'improvisation par M. Dumortier qui, j'en suis sûr, les regrette.
M. Dumortier. - Certainement, il ne peut être entré dans mes intentions de blesser personne en prononçant les paroles qui me sont échappées dans la chaleur de l'improvisation ; j'ai fait allusion à un fait; on a remarqué beaucoup de fautes de français dans une lettre, cela m'a frappé comme tout le monde.
M. de Haerne. - Je désire entrer dans quelques détails très succincts sur le programme des études soumis à l'appréciation de la chambre. Si je partage l'opinion de l'honorable M. Dumortier sous quelques rapports, je dois dire que je ne puis pas l'admettre à tous égards.
M. Dumortier a désapprouvé avec raison l'emploi de livres classiques qui ne sont pas assez élémentaires, ce qui doit contribuer beaucoup à l'abaissement des études.
Je crois que c'est là une vérité; et j'appuie sur ce point parce que, dans mon opinion, le moyen le plus efficace de relever le niveau des études, c'est la méthodologie. Il ne s'agit pas de retrancher telle ou telle branche de l'enseignement; il s'en agit beaucoup moins que d'améliorer les méthodes. C'est là la question fondamentale, car il ne faut pas seulement faire attention à ce qui se passe dans d'autres pays, pour se mettre au niveau des études de France, d'Allemagne et d'Angleterre où les programmes de l'enseignement moyen sont, à quelques exceptions près, les mêmes que celui qu'on propose pour les établissements du royaume.
Quant à la question de savoir si avec ce programme on doit craindre de voir baisser, ou espérer de relever le niveau des études, je pense, comme je viens de le dire, que cela dépend beaucoup des méthodes.
La méthode est essentielle. Quant aux grammaires et aux autres livres classiques, on devrait faire à cet égard une étude approfondie de toutes les méthodes, surtout de celles qu'on emploie en Allemagne, où l'on fait usage d'excellents livres élémentaires pour les basses classes et d'ouvrages plus relevés pour les classes supérieures. Ces deux sortes d'ouvrages sont conçus d'après un même plan.
On doit composer ou choisir les livres d'après les plans si profondément conçus de l'Allemagne, où l'on ne se plaint pas de l'abaissement des études, quoique celles-ci y soient très multipliées.
Quant à l'étude de la langue grecque, on ferait un grand pas en arrière vis-à-vis des nations éclairées dont je viens de parler, si on la restreignait; elle est très utile, non seulement pour la connaissance des étymologies et des termes techniques des sciences, mais sous le rapport littéraire; la littérature grecque est la première littérature du monde; c'est à cette source que tous les littérateurs anciens et modernes ont été puiser. On ne peut négliger cette belle langue, sans abaisser les études.
Je ne vais pas jusqu'à dire qu'on doit perdre son temps à faire des vers grecs. Si, dans certains établissements, on fait des vers latins, il ne faut pas s'imaginer que c'est pour former des poètes latins ; c'est pour habituer l'oreille à la cadence, à la quantité et pour faire mieux goûter et mieux comprendre les beautés des chefs-d'œuvre poétiques.
Voilà pourquoi on fait faire des vers latins ; et c'est parce que, sous le rapport des quantités, de la structure du vers et sous d'autres rapports, il y a beaucoup d'analogie entre les vers grecs et les vers latins, qu'on peut, selon moi, se dispenser de faire des vers grecs.
Mais quant aux thèmes, je dois dire que les personnes qui s'occupent de la partie pratique de l’enseignement moyen sont d'accord que c'est une excellente méthode de faire des thèmes en langues anciennes, en général, tout en donnant la préférence aux versions ; non pas, encore une fois, pour former des littérateurs dans ces langues, mais pour mettre l'élève à même de pénétrer dans le secret des langues, d'en mieux posséder la grammaire et la syntaxe, et, au moyen de cette connaissance, de mieux comprendre et traduire les auteurs anciens, ce qui est le but des études anciennes.
Voilà pourquoi l'on insiste sur la nécessité des thèmes grecs et latins. Il va sans dire que le latin, qui est le fond d'une foule de langues modernes, qui entre pour une part très considérable dans toute la civilisation tant sacrée que profane, doit avoir le pas sur la langue grecque, dont il importe cependant de comprendre les principaux poètes, historiens et orateurs.
Je disais tout à l'heure que, dans mon opinion, c'est par la méthode qu'on doit surtout empêcher l'abaissement des études. On s'est plaint à plusieurs reprises, à cet égard; on a cité les jurys d'examen, on a cité tant d'autres autorités.
J'avoue que les résultats des travaux des jurys ont fait voir que la plupart des élèves ne sont pas aussi avancés qu'on pourrait le désirer, dans toutes les branches qui font l'objet de l'enseignement.
Ainsi, dans tel jury pour le grade d'élève universitaire, comme dans le jury de Bruges, dont j'ai eu l'honneur de faire partie, on a remarqué que bien des élèves étaient assez faibles pour le latin et surtout pour le grec dont on veut encore restreindre l'étude.
Mais je ne dis pas que ce soit là une preuve de l'abaissement du niveau des études en général ; car quand on parle de l'abaissement du niveau des études, on doit d'abord les prendre dans leur ensemble, et ensuite on doit établir une comparaison entre le niveau actuel et le niveau précédent. Ce qu'il s'agirait de démontrer, ce serait que précédemment les études en général et même les études grecques et latines étaient plus fortes qu'elles ne le sont aujourd'hui dans nos établissements. Voilà ce qu'on ne pourra prouver, car cela n'est pas.
Je suis persuadé que la création des jurys d'examen, non seulement pour le grade d'élève universitaire, mais pour les grades académiques (jurys qui existent depuis longtemps), a donné une impulsion très forte aux études des langues anciennes, et à toutes les études; l'effet produit par la nécessité de comparaître tôt ou tard devant un jury a fortifié les études dans les basses classes mêmes, parce que les élèves se sont dit : Il faudra passer un jour devant un jury, qui exige telle et telle matière qu'on enseigne déjà dans les classes inférieures.
Voilà le résultat produit dans tous nos établissements par la création des jurys pour les grades académiques, résultat qui s'est fait sentir, je dois le dire, dans tout l'enseignement moyen.
Cela ne m'empêche pas de dire qu'il faut relever les études qui sont encore trop faibles, quoiqu'elles aient progressé.
La création du jury pour le grade d'élève universitaire produira un effet plus salutaire encore, lorsque ce jury aura fonctionné pendant quelques années.
Quoique j'aie dit que, dans mon opinion, la méthode fait beaucoup pour relever les études, j'admets cependant que, pour le nombre des branches, on pourrait tomber dans l'excès.
Sous ce rapport, je toucherai un mot de l'amendement proposé par l'honorable M. de Brouckere. Il demande que, pour la partie des humanités, on adjoigne aux mathématiques le binôme de Newton et ses applications au calcul des probabilités. Je partagerais l'opinion de l'honorable M. de Brouckere, s'il s'agissait de la partie professionnelle.
Je crois que cela pourrait être admis pour cette partie d'autant plus qu'elle ne comprend pas l'étude approfondie des langues classiques. Mais, pour la partie des humanités, ce serait aller trop loin.
J'admettrais pour cette dernière partie le binôme de Newton, qui, après tout, peut s'expliquer en peu de temps, et qui ne chargerait pas trop le programme sous le rapport des mathématiques; mais je ne pourrais en admettre les applications au calcul des probabilités.
Je pense que le programme peut être admis dans son ensemble, sauf à fortifier l'étude des diverses parties qui le composent par la simplification des méthodes. La méthode, la manière d'enseigner est un point d'une importance extrême et auquel on n'a pas jusqu'ici attaché assez d'importance.
On vient de parler de la langue flamande. Cette langue n'est pas seulement à mes yeux un élément de nationalité et la clef des langues du Nord; mais elle devrait aussi dans les provinces flamandes, où l'on pense dans cette langue, servir de base et d'instrument aux études classiques et scientifiques. Il est à remarquer que ce n'est qu'en Flandre qu'on se sert d'une langue étrangère pour enseigner toutes choses. Cela est anormal, d'autant plus que la langue flamande offre par sa richesse de composition autant de ressources que la langue allemande pour le développement scientifique.
Je désire donc que l'étude de cette langue s'étende autant que possible. Plusieurs fois, je me suis expliqué dans ce sens. Si l'on croit possible d'obtenir l'étude approfondie de cette langue dans les provinces wallonnes, j'y applaudirai. Mais il faut, sous ce rapport, une certaine latitude; autrement je craindrais que vous ne rencontrassiez une répulsion dans cette partie du pays; ce qui donnerait lieu peut-être à de vives réclamations et ferait plus de mal que de bien à la langue flamande. Cependant, je désire qu'on fasse tout ce qui est possible à cet égard.
J'ai eu l'honneur de présenter l'amendement dont il est fait mention, p. 49 du rapport. Je demandais qu'on enseignât, autant que possible, les langues allemande et anglaise au moyen du flamand. C'est une demande qui a été faite par un grand nombre de pétitionnaires.
Mais plusieurs sont allés trop loin, en demandant que ce fût obligatoire; souvent ces langues vivantes sont enseignées par des Allemands ou des Anglais; elles ne peuvent mieux s'enseigner que de cette manière ; on ne peut exiger de ces professeurs allemands ou anglais qu'ils connaissent le flamand. Il y aurait quelque chose d'absurde à exiger que les professeurs, qui sont considérés comme les meilleurs, enseignassent en une langue qu'en général ils ne comprennent pas. Mais je demande que l'on fasse enseigner, autant que possible, l'anglais et l'allemand au moyen du flamand. Ce serait relever l'étude du flamand que d'entrer dans cette voie.
Il serait à désirer que les professeurs d'anglais ou d'allemand se missent au courant du flamand et fissent comprendre les analogies qui existent entre ces trois langues.
J'ai proposé cet amendement dans la sixième section, mais en grande partie pour donner satisfaction aux opinions émises par plusieurs pétitionnaires. Je déclare que je n'insiste pas sur l'amendement comme amendement. C'est-à-dire que je ne demande pas qu'il soit introduit dans la loi. Je me contente de la déclaration faite par la section centrale, à savoir qu'on en tiendra compte dans l'application. Cela doit être entendu ; et je me déclare satisfait à cet égard.
J'admets donc le programme dans le sens des explications dans lesquelles je viens d'entrer.
M. Dedecker. - J'ai demandé la parole au sujet du programme des études, et pour dire quelques mots relativement à l'étude de la langue flamande.
Vous savez, messieurs, que les défenseurs de la langue flamande avaient adressé à la chambre un grand nombre de pétitions, la section centrale a fait droit à la plupart des demandes des pétitionnaires. Cependant, je crois qu'il importerait que le gouvernement donnât des explications sur (page 1351) d'autres parties de ces demandes qui ne peuvent trouver place dans la loi même (ce que j'admets volontiers) et qui trouveront mieux place dans des règlements particuliers qui devront émaner du ministère.
Ainsi, il a été admis que, pour les provinces où le flamand est la langue maternelle on exigerait ( et c'était justice ) l'étude approfondie de cette langue. Mais il s'agit de savoir ce qu'on entend par étude approfondie. Le sens qu'y attachent les pétitionnaires, c'est que le flamand serait enseigné dans toutes les classes des établissements d'enseignement moyen; c'est qu'on donne à cette langue la même importance qu'on donne dans les provinces wallonnes au français, qui est la langue maternelle de ces provinces.
Ainsi, je voudrais que M. le ministre de l'intérieur donnât une explication dans ce sens. C'est, je vois, sa pensée; je compte la voir formulée dans les règlements à intervenir.
On a stipulé aussi au paragraphe 4 que dans les provinces où le flamand n'est pas la langue maternelle, on étudiera cette langue comme langue étrangère. Mais ici se présente encore une question qui n'a pas pu trouver sa solution dans le dispositif même de la loi. Je veux parler de la demande faite par des pétitionnaires que l'enseignement de la langue anglaise et de la langue allemande ait lieu par le flamand. Nous sommes convenus en section centrale, et j'ai été le premier à le reconnaître, que la loi ne pouvait contenir de disposition impérative sur ce point. Je suis le premier à reconnaître qu'on ne peut forcer un étranger qui vient enseigner l'allemand ou l'anglais à apprendre le flamand. Cependant, en fait, il est à remarquer que très souvent ces étrangers arrivent dans le pays sans connaître ni le flamand, ni le français, et pour eux, à cause de la consanguinité de ces langues, il serait beaucoup plus facile d'apprendre le flamand que le français; surtout lorsqu'ils verraient, au bout de cette étude, une position à acquérir dans les provinces flamandes.
Il est évident, pour tous ceux qui connaissent la nature intime, le génie de ces langues, qu'il est absurde de vouloir forcer les Flamands à apprendre l'allemand et l'anglais au moyen de la langue française. C'est une chose tellement anormale qu'elle ne saurait plus longtemps se justifier.
Je voudrais donc que le gouvernement se ralliât publiquement au vœu manifesté par la section centrale, que partout où cela pourra se faire, on enseigne l'allemand et l'anglais au moyen de la langue flamande.
Moyennant cet engagement que le gouvernement voudrait bien prendre, je crois que les populations flamandes seront satisfaites de ce que, dans la loi sur l'enseignement moyen, le gouvernement et la législature ont fait pour elles.
M. le président. - M. de Bocarmé a déposé un amendement qui n'a pas encore été développé. Le voici : « Ajouter comme deuxième paragraphe :
« Dans la moitié au moins des athénées, un système d'internat spécial sera établi et réglementé dans le but de faciliter l'étude du latin par l'usage obligatoire de cette langue; on fera, autant que possible, participer les externes aux avantages de cette méthode. »
La parole est à M. de Bocarmé pour développer son amendement.
M. de Bocarmé. - Messieurs, il est digne, je pense, d'une époque féconde en inventions, en applications utiles ; digne surtout de notre pays, sagement progressif, de donner au monde savant la courageuse impulsion qu'il faut pour affranchir l'étude du latin de la routine des siècles... raboteuse ornière où l'on n'avance qu'à pas de tortue, en usant, en fatiguant les plus précieuses années et l'intelligence de la jeunesse, dont on a trop longtemps, maladroitement ou machiavéliquement abusé.
En effet, messieurs, combien ne faut-il pas être aujourd'hui doué de dispositions de mémoire, enfin de ce qu'on appelle le génie des langues, pour comprendre, tant bien que mal, les Pandectes et les auteurs classiques; et pour arriver à ce rare point de perfection d'échanger quelques phrases plus ou moins correctes ! Eh bien, messieurs, ces élèves privilégiés, que d'émules ne laissent-ils pas en arrière, plus ou moins empêtrés dans les fondrières d'une route mal indiquée , et qui cependant, avec moins d'aptitude spéciale, eux aussi ne manquent pas d'intelligence.
J'ai la conviction que nous ferions un acte de louable énergie en profitant de la réorganisation des athénées pour revivifier, jusqu'à un certain degré, cette belle langue latine, type et dépôt de la plupart de nos lois, comme de la plus riche et de la plus utile des langues modernes : et cette énergie, s'il veut en user en cette circonstance, elle ne manque pas à notre gouvernement.
Je reconnais, messieurs, que l'adoption de mon amendement jetterait M. le ministre de l'intérieur dans une voie hérissée d'obstacles, principalement à cause du petit nombre de professeurs qui parlent le latin, et des difficultés plus grandes qu'il y aurait à trouver ou à former le personnel pour le service en sous-ordre des locaux destinés à l'enseignement de tous les instants..... Mais que résulte-t-il, messieurs, de ces obstacles mêmes, si ce n'est la preuve qu'il faut arracher le riche idiome dont il s'agit à la pauvreté pratique où il est tombé aujourd'hui ?
Il faut, à tout prix, selon moi, franchir ces espèces de barricades intellectuelles ; et alors, en face de ces premiers succès, la route s'aplanira.
Pourquoi recalerions-nous devant des difficultés qui ne sont pas insurmontables, alors que la palme à obtenir est l'existence de la langue de Cicéron, menacée, sans cela, d'abandon ? Ce serait encore, messieurs, par l'allégement des études, conquérir une plus grande disponibilité des plus heureuses intelligences.
Pourquoi ne profiterions-nous pas d'un exemple récemment donné à Bruxelles, où une maison d'éducation fut créée sous l'influence d'une grande pensée, celle d'un enseignement pour chaque idiome spécial, complet, vivant, si je puis m'exprimer ainsi : il est regrettable que l'institution Gaggia, faute de surveillance et d'assistance, peut-être, ne se soit pas soutenue et perfectionnée?
Pourquoi enfin, messieurs, ne suivrions-nous pas les conseils de l'une des plus grandes illustrations de l'esprit humain, de Montaigne, qui s'applaudissait de ce que son père, par l'usage du latin répandu expressément dans sa maison, lui avait procuré l'inappréciable avantage de savoir cette langue dès l'âge de sept ans ?
M. de T'Serclaes. - Messieurs, la pensée qui a présidé à la rédaction, proposée par la section centrale, des paragraphes 1 et 4 de l'article en discussion est celle-ci : « L'étude approfondie de la langue latine, de la langue grecque et de la langue française, obligatoire pour tous les établissements soumis au régime de la loi. L'étude de la langue flamande obligatoire dans les cinq provinces flamandes et plusieurs localités du Hainaut et de Liège, facultative dans les autres provinces. »
Cette rédaction satisfait en grande partie aux griefs légitimes des populations flamandes et brabançonnes; par conséquent, comme mon honorable ami M. Dedecker, j'approuve l'article en ce qui concerne l'enseignement de la langue maternelle.
Cependant, dans les nombreuses pétitions dont la chambre a été saisie sur la question, on a mis en avant un argument dont il ne sera pas inutile de faire mention dans la discussion de cet article. Cette objection, tirée de l'article 23 de la Constitution, mérite certainement l'attention de la chambre, quelque contraire qu'elle paraisse aux idées qui ont cours, et à la pratique des choses en Belgique, depuis la révolution de 1830.
D'après les paragraphes 1 et 4 de l'article, il est bien facile de voir que la langue flamande est considérée comme langue accessoire ; elle n'est pas placée dans l'enseignement sur la même ligne que la langue française ; celle-ci est seule et exclusivement, parmi les langues modernes, déclarée obligatoire dans tous les établissements du pays.
Ainsi l'on impose aux habitants des provinces flamandes et brabançonnes l'usage presque exclusif d'une langue qui, pour la grande majorité d'entre eux, est une langue étrangère.
Or que porte l'article 23 de la Constitution? L'emploi des langues usitées en Belgique est facultatif. Ici vous déclarez le contraire : dans les établissements soumis au régime de la loi en discussion, l'emploi des langues maternelles ne sera plus facultatif, mais l'emploi de la langue française sera toujours obligatoire.
Que porte encore l'article 23 de la Constitution ? « Il ne peut être réglé que par la loi et seulement pour les actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires ». Ainsi, constitutionnellement parlant, la loi ne pourrait, par exemple, imposer en certains cas l'emploi de la langue flamande aux Wallons, l'emploi de la langue française aux Flamands, que pour les actes de l'autorité publique et pour les affaires judiciaires ; seulement dans ces deux dernières catégories de faits, l'emploi des langues usitées en Belgique pourrait cesser, et ce en vertu d'une loi, pourrait cesser, dis-je, d'être facultatif. En vertu de la loi que nous faisons, l'emploi d'une des langues usitées en Belgique devient obligatoire dans l'enseignement. Tous les Belges indistinctement sont obligés d'apprendre le français, et la majorité de la nation se trouve forcée d'apprendre la langue de la minorité. Il est interdit de ne pas donner l'enseignement du français dans tous les collèges; on interdit, par conséquent, dans la pratique ce que la Constitution a consacré en théorie.
Messieurs, je ne parle ici de cette objection que parce que les pétitionnaires, comme vous venez de le voir, s'appuient exclusivement sur le texte de la Constitution. Or tout ce qui se rattache au sens véritable, à l'application complète de notre pacte fondamental, a droit de notre part à un sérieux examen.
Je m'en réfère volontiers, pour l'examen approfondi de la matière, au projet de loi, qui, conformément au vœu de la Constitution, doit être présentée afin de régler l'emploi des langues usitées en Belgique dans les actes de l'autorité publique.
Je reconnais que le projet de loi amendé par la section centrale, et appliqué comme l'honorable M. Dedecker, membre de la section centrale, vient de l'expliquer, fera beaucoup plus pour la langue flamande que le projet de 1834. il fera même, en quelque sorte, phis que les projets de 1840, parce que le projet actuel prescrit l'étude approfondie de ma langue maternelle dans cinq de nos provinces.
Quant au surplus, messieurs, j'espère que si la littérature flamande continue à se développer avec l'éclat dont elle brille actuellement, si nos prosateurs et nos poètes ne cessent point de nous conquérir de nouveaux titres de gloire parmi toutes les nations germaniques, on en viendra, et bientôt, j'en ai la conviction, à reconnaître la convenance, la nécessité de l'apprendre dans toutes les parties du pays.
Messieurs, j'aurais beaucoup d'observations à présenter sur les paragraphe 2, 3 et 5 de l'article 22; mais, quoiqu'elles me paraissent importantes, elles ne sont pas fondamentales. La chambre paraît disposée à passer au vote; je m'abstiendrai, par conséquent, de formuler mes observations, qui pourraient nous entraîner trop loin.
Je crois, du reste, que le programme nouveau constitue une amélioration à l'état actuel de l'enseignement moyeu.
M. le président. - M. Delfosse propose plusieurs changements de rédaction.
(page 1352) A la fin du paragraphe premier paragraphe, au lieu de : « pour les parties du pays où ces langues sont en usage », il propose de dire : « où ces deux langues sont en usage ».
Au paragraphe 3, au lieu de : « y compris les notions des institutions constitutionnelles et administratives », il propose de dire : « des notions des institutions constitutionnelles et administratives ».
Il propose de rédiger le paragraphe 4 : « L'étude des langues vivantes telles que le flamand et l'allemand, pour les parties du pays où ces langues ne sont pas en usage, et l'anglais. »
M. d'Hont a proposé un autre amendement au paragraphe premier : il propose de supprimer les mots : « l'étude approfondie, en ce qui concerne la langue grecque » et de les remplacer par : « les éléments de la langue grecque ».
M. d'Hondt. - Je vois que la chambre devient impatiente. Je ne dirai donc que deux mots à l'appui de mon amendement. Je suis loin, messieurs, de contester l'utilité de la langue grecque, mais je crois que c'est y attacher une trop grande importance que d'en exiger l'étude approfondie. C'est ainsi, messieurs, qu'aujourd'hui, dans la plupart de nos athénées et collèges, l'on voit la langue grecque mise au niveau du latin, et au-dessus du français et du flamand ; car il est tels établissements où l'on consacre plus d'heures de leçons à la langue grecque qu'aux langues française ou flamande. C'est ce qui me paraît d'une importance vraiment exagérée. D'ailleurs, messieurs, il faut éviter de surcharger les élèves. Je crois donc que la loi pourrait se borner à dire, au lieu de l'étude approfondie du grec, les éléments de la langue grecque, ou bien, si on le préfère, tout simplement l'étude de la langue grecque, en supprimant le mot approfondie.
M. Devaux. - Messieurs, malgré ma vive admiration pour la littérature grecque, malgré son incontestable supériorité sur la littérature latine, je viens appuyer ceux qui demandent qu'on restreigne l'enseignement du grec dans des limites plus étroites.
Je le fais non sans regret, car c'est restreindre une belle étude; mais la nécessité et l'intérêt du reste de l'enseignement l'exigent. J'ai été longtemps d'une opinion contraire, mais je ne puis résister à l'évidence des faits. Le programme des études, tel qu'il est aujourd'hui, si vous conservez au grec les développements qu'il a reçus depuis un certain nombre d'années, et c'est ce que signifie le mot « approfondi », le programme des études est évidemment trop chargé. Parcourez ce programme, voyez ce que vous pouvez retrancher, et vous reconnaîtrez que c'est sur le grec que doivent tomber de préférence les retranchements et que là il peut y en avoir d'efficaces.
On se plaint, messieurs, que les élèves ne sachent plus le latin; mais la raison en est bien naturelle; il y a de cela, à la vérité, plusieurs causes. La loi que nous discutons pourra en détruire plusieurs, mais il en est une qu'on ne surmontera pas, si on n'adopte le moyen qui est dans ce moment proposé. Quelle est, messieurs, la cause principale de la faiblesse des résultats du l'enseignement du latin? La voici : autrefois le latin était la branche principale de l'enseignement classique; tout le reste n'était qu'accessoire. Il y a vingt ou trente ans, l'histoire, le grec, le français étaient des branches très secondaires de l'enseignement des collèges. On n'enseignait le grec que très accessoirement; l'histoire n'était pour ainsi dire rien, et le français lui-même n'était enseigné que comme moyen de traduction du latin, et ce n'était guère qu'en rhétorique qu'on faisait des devoirs français.
Depuis lors on a donné une très grande importance au grec, une très grande importance à l'histoire, aux sciences, aux langues modernes. Tout cela n'a pas été fait sans raison, mais il en est résulté que le programme est trop chargé, car l'intelligence des élèves n'a pu suivre la même progression de développement. Il aurait fallu étendre considérablement le nombre d'années d'études; or le nombre d'années d'études a été diminué. Autrefois on faisait sept années de latin, aujourd'hui on ne fait plus guère, dans le plus grand nombre des collèges, que six années. On a donc à la fois augmenté considérablement les matières enseignées et on a réduit la durée des études du collège. Il n'y a que deux moyens de rétablir l'équilibre : c'est ou de réduire les matières ou de prolonger les études.
Autrefois pendant les années d'études, on fixait 1,500 ou 2,000 devoirs latins; aujourd'hui pendant les 6 années on ne peut en faire que 700 ou 900. Il est évident que l'élève qui ne fait que 700 ou 900 devoirs ne peut pas être aussi fort que celui qui en fait 1,500 ou 2,000. Si donc vous voulez que l'élève sache mieux le latin, donnez-lui les moyens d'y consacrer plus de temps, soit en le retenant plus longtemps au collège, soit en lui permettant de consacrer au latin une partie du temps qu'il consacre aujourd'hui à d'autres connaissances.
Prolonger le cours des études est ce que je préférerais. En France et en Prusse, on ne craint pas de consacrer 8 ans à l'instruction moyenne. Mais je n'ose pas espérer qu'on adopte sur ce point mon avis. Déjà le gouvernement, dans son projet de loi avait décidé que le cours d'étude ne serait que de 6 ans, bien que plusieurs de nos villes aient reconnu aujourd'hui la nécessité d'une septième année de latin. La section centrale a laissé la question indécise et l'a renvoyée au règlement. Je doute que le gouvernement use de la liberté qu'on lui laisse pour étendre le cours d'étude jusqu'à 8 années; ce seraient à la vérité 8 années des plus remplies de la vie, 8 années consacrées, non pas seulement aux langues anciennes, mais aux langues anciennes et modernes, à l'histoire de toutes les époques, à l'algèbre, à la géométrie, etc., ce serait du temps fort utilement employé, mais aujourd'hui, si on veut beaucoup apprendre, on veut aussi apprendre vite. Reste donc le second moyen : c'est en réduisant une partie du programme qu'il faut trouver le temps qui manque.
Je reconnais, messieurs, que l'étude du grec est utile, bien qu'elle mène rarement dans nos collèges à de brillants résultats. L'étude des langues anciennes est un exercice très utile pour le développement de l'esprit; mais cet exercice, on le trouve dans l'étude du latin.
D'ailleurs, je ne demande pas qu'on supprime complètement l'étude du grec; je désire seulement de la réduire à de moindres proportions, c'est-à-dire de faire ce qu'on faisait autrefois, lorsqu'on ne commençait l'étude du grec qu'en troisième ou en quatrième, et qu'à partir même de cette classe, l'étude du grec prenait très peu de temps.
Les élèves n'arrivaient pas jusqu'à expliquer les auteurs les plus difficiles, ils ne dépassaient pas Lucien, Xénophon et Homère.
Ai-je besoin, messieurs, d'insister sur la différence qu'il y a pour l'utilité pratique des éludes ultérieures entre la langue grecque et la langue latine?
Le latin est indispensable aux jeunes gens qui vont étudier le droit ou la médecine. D'ailleurs, le latin n'est pas seulement la langue de l'antiquité, c'est la langue du moyen âge; c'est, à cette époque, la langue de l'histoire, la langue de l'Eglise, la langue des sciences; c'est, en un mot, la langue de presque toute la civilisation écrite de l'Europe jusqu'à il y a deux ou trois siècles.
Grande est sous ce rapport la différence entre le latin et le grec. Je pense, messieurs, qu'en restreignant l'étude du grec à ce qu'elle était autrefois, on ferait une chose regrettable en théorie, que les philologues regarderont de mauvais œil, mais qui, en réalité, servira au progrès des études et en rendra les résultats plus sérieux. Il faut craindre aussi, messieurs, d'accabler les jeunes intelligences sous un travail exagéré. L'étude de collège est aujourd'hui fatale à beaucoup de jeunes gens. Leur constitution s'y étiole. Tâchons qu'ils en sortent non seulement avec des connaissances acquises, mais avec la vigueur de l'esprit et du corps.
J'appuie donc les observations faites dans ce sens qu'en faisant disparaître de la loi l'étude approfondie du grec, on renforcera l'enseignement du grec dans les limites où il était circonscrit autrefois.
M. Liefmans. - Mon intention n'est pas de combattre l'amendement de l'honorable M. d’Hont, appuyé par l'honorable M. Devaux. Je ne pense pas cependant pouvoir m'y rallier complètement. Une explication me paraît nécessaire.
Il s'agit de savoir ce qu'on entend par l'étude élémentaire de la langue grecque. Si cette étude élémentaire consiste à donner aux élèves des explications tout à fait superficielles, incomplètes, si l'on se borne à apprendre à décliner, à conjuguer, si cette étude est, en un mot, insuffisante pour mettre les élèves à même de comprendre le texte ou quelques textes des auteurs grecs, je devrai repousser cet amendement; car, si d'un côté, l'on est d'accord sur l'importance incontestable de l'étude de la langue grecque, on ne peut pas, d'un autre côté, soutenir que des notions insuffisantes des beautés de la valeur de cette langue puissent suffire aux élèves, à l'enseignement. Qu'arrivera-t-il si votre enseignement est incomplet, insuffisant, sous ce rapport? C'est qu'il aura été stérile, tout à fait inutile; et qu'il aura fait perdre à l'élève un temps précieux sans qu'il puisse en retirer le moindre fruit. Il ne faut pas se dissimuler les difficultés de l'étude de la langue grecque. C'est surtout au commencement qu'elle paraît être des plus arides, eh bien, si vous ne mettez pas l'élève à même de bien comprendre les auteurs, je ne dirai pas à l'aide du dictionnaire, mais à l'aide des commentaires, des explications fournies par les meilleurs hellénistes, il la négligera complètement et tout ce qu'on lui aura enseigné n'aboutira à rien. Si la langue grecque a de l'importance, si on doit dire qu'elle est en quelque sorte indispensable pour celui qui s'adonne à l'étude des langues anciennes, je dis, surtout de la langue latine, il faut que l'enseignement soit assez complet; si on la considère comme tout à fait accessoire, comme étant en quelque sorte une charge inutile, alors qu'on n'enseigne pas cette langue, qu'en en supprime totalement l'étude ; car, en cette matière, des notions incomplètes, insuffisances sont, d'après moi, inutiles.
Je ne puis donc, ni admettre, ni repousser cet amendement, il me faut des explications. Il faut qu'on me définisse le genre d'étude qu'on prétend inscrire au programme. Je ne soutiendrai pas que l'étude la langue doive être approfondie, qu'elle doive aller jusqu'au point de mettre l'élève à même de versifier en grec, même d'écrire en langue grecque ; mais, d'un autre côté, je soutiens que l'élève doit au moins être parvenu à un certain degré de force; qu’il doit être en état de comprendre les auteurs grecs, ou si l'on veut, quelques-uns d'entre eux.
L'honorable comte Le Hon me dit de supprimer le mot « approfondie ». Cette proposition je l'accepte. Qu'on supprime le mot « approfondie » sans le remplacer par le mot « élémentaire », alors l'enseignement comprendra l'étude de la langue grecque, et le professeur ne sera ni dans l'obligation de se borner à un enseignement par trop élémentaire, ni de se livrer à une étude par trop approfondie; on évitera les deux excès, et c'est justement ce que j'ai cru devoir vous proposer.
M. d'Hondt. - Dans les courts développements que j'ai eu l'honneur de donner à mon amendement, j'ai déclaré en termes formels que je proposais, soit la substitution des mots « les éléments de la langue grecque » à « l’étude approfondie de cette langue », soit la suppression pure et simple du mot « approfondie ». Et, en effet, je ne tiens guère aux mots, et je propose formellement qu'on se borne à supprimer le mot « approfondie », de manière qu'il reste purement et simplement « l'étude de la langue grecque. »
M. le président. - Ainsi l'on dirait: « l'étude de la langue grecque, l'étude approfondie de la langue latine, etc.. »
(page 1353) M. de Haerne. - Je demande le maintien de la rédaction de la section centrale, rédaction qui porte : « étude approfondie de la langue latine, de la langue grecque, etc. » Toute la question consiste à savoir si l’on donnera plus d'importance au latin qu'au grec, et à cet égard je suis d'accord avec l’honorable M. Devaux, mais il est extrêmement difficile de limiter l'enseignement élémentaire du grec. Ainsi, par exemple, on exclurait tous les orateurs. Or, ce n'est pas connaître une langue que de ne pas comprendre les orateurs. L'honorable M. Devaux restreint trop selon moi l'étude du grec. Il est à craindre aussi que l'adoption de l'amendement de M. d'Hont ne fasse négliger presque entièrement cette langue ancienne qui ne l'est déjà que trop.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je m'expliquerai en peu de mots sur les divers amendements.
L'amendement de l'honorable M. de Bocarmé, qui consiste à rendre obligatoire l'usage de la langue latine dans les pensionnats, ne peut être adopté ; nous avons abandonné aux directeurs des pensionnats et aux communes le régime intérieur des pensionnats. La question est jugée.
L'on a exprimé le vœu que, dans les parties du pays où l'on parle le flamand, on enseignât l'anglais et l'allemand au moyen du flamand. C'est là une question de règlement. Je pense que, pour la facilité des maîtres et des élèves flamands, ce sera presque toujours à l'aide du flamand qu'on enseignera l'anglais et l'allemand ; ce n'est pas à dire que le français soit inutile ici, car il y a au moins autant de français que de flamand dans l'anglais. (Interruption.) C'est mon opinion.
L'honorable M. d'Hont demande qu'on supprime le mot « approfondie » joint à l'étude de la langue grecque. Si l'on voulait par l'amendement substituer les principes élémentaires à l'étude approfondie, je m'y opposerais; nous voulons avoir une étude sérieuse du grec. L'article 45 de la loi d'enseignement supérieur exige de l'aspirant au grade d'élève universitaire des explications d'auteurs grecs; or, un enseignement purement élémentaire pourrait être compris et donné de telle sorte, qu'il ne mît pas l'élève à même d'expliquer les auteurs grecs.
En supprimant le mot « approfondie », je crois qu'il est fait droit aux observations des honorables MM. d'Hont et Devaux. Quant à moi, c'est aussi avec regret que j'abandonne le mot « approfondie ». La langue grecque mérite, surtout au point de vue littéraire, une étude aussi approfondie que la langue latine ; mais je reconnais qu'au point de vue de l'utilité pratique, la langue latine doit l'emporter.
Au reste, en retranchant le mot « approfondie », nous laissons dans le programme une place assez grande à l'étude du grec, pour pouvoir conduire l'élève au programme de l'examen d'élève universitaire. Je me rallierai donc à l'amendement.
M. Vanden Branden de Reeth. - Messieurs, je ne veux ni présenter un amendement, ni occuper longtemps l'attention de la chambre; c'est une simple demande d'explications que je veux adresser à M. le ministre.
Le n°3 de l'article que nous discutons consacre une innovation en matière d'enseignement moyen. Je désirerais savoir en quoi consistera l'enseignement des notions des institutions constitutionnelles et administratives. Cet enseignement sera-t-il purement textuel et littéral, c'est-à-dire se bornera-t-on à faire apprendre par cœur aux élèves le texte de la Constitution et de nos lois organiques, ou bien le professeur entrera-t-il dans des explications, interprètera-t-il le texte de ces lois, leur portée, etc. ? Dans ce cas, il me semble que cet enseignement pourrait présenter certains inconvénients et devrait appartenir à un degré supérieur.
Je demanderai également ce que l'on entend par « l'enseignement de notions administratives »; et comme ces matières constituent une véritable innovation dans l'enseignement moyen, je voudrais avoir quelques explications à cet égard.
M. Dequesne, rapporteur. - Le but de l'amendement de la section centrale a été de comprendre les notions dont il s'agit dans l'étude de la géographie; afin qu'on enseignât aux élèves l'espèce de gouvernement, les divisions administratives, judiciaires el ecclésiastiques du pays.
M. Vanden Branden de Reeth. - C'était une innovation dans l'enseignement moyen, une explication était nécessaire.
M. Jullien. - Avant de voter l'article 22, je voudrais qu'il fût entendu que cet article a uniquement pour but de réglementer les matières d'enseignement pour la section des humanités, sans que les élèves soient tenus de fréquenter tous les cours mentionnés dans cet article.
Je crois que telle est la pensée du projet, mais je voudrais que M. le ministre de l'intérieur la précisât de plus près par une déclaration formelle sur le point que soulève ma motion.
M. Devaux. - J'ai dit que je me ralliais à l'amendement de M. d'Hont, mais j'entendais par là qu'on renfermât l'étude du grec dans des limites plus étroites, mais pourtant qu'on expliquât certains auteurs grecs, car en grec comme en latin, il y a des auteurs plus ou moins difficiles à comprendre. Je voudrais, comme autrefois, qu'on se bornât à expliquer Esope, quelques odes d'Anacréon, Lucien el quelques livres d'Homère; c'est dans ce sens que j'ai appuyé l'amendement.
M. de Haerne.- Il faut aussi voir Isocrate et Démosthènes.
M. Dequesne, rapporteur. - Je crois qu'on peut supprimer le mot « approfondie » quant à la langue grecque et même quant aux deux autres langues. Le mot approfondie n'ajoute rien au programme en lui-même; il n'indique qu'une méthode, l'étude par principe des langues à enseigner. Le plus ou moins d'extension à donner à chacune des matières inscrites dans le programme est une affaire de règlement. On ne peut guère s'écarter du système adopté dans tous les pays de l'Europe et surtout en Allemagne, en Angleterre et en France.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - La règle générale est que tous les articles inscrits au programme sont obligatoires pour les élèves; on pourra dans le règlement prévoir certaines exceptions, accorder certaines dispenses; mais la règle pour tous les élèves est que les cours, contenus dans le programme, doivent être suivis.
M. Jullien. - Ecoutera-t-on le vœu des pères de famille?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Précisez votre question.
M. Jullien ; - Si un père ne veut pas que son fils apprenne l'anglais, sera-t-il dispensé de l'apprendre?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Laissons à part l'enseignement religieux, pour lequel on ne peut pas forcer le vœu du père de famille; mais pour les matières scientifiques, tous les élèves qui fréquentent l'établissement doivent suivre les cours, sauf les exceptions qu'on pourra faire, les dispenses qu'on pourra accorder en vertu du règlement.
- La discussion est close.
Le retranchement du mot « approfondie », en ce qui concerne l'étude de la langue grecque, est mis aux voix et adopté.
L'amendement de M. de Bocarmé est mis aux voix; il n'est pas adopté.
L'amendement de M. de Brouckere est ensuite mis aux voix; il n'est pas adopté.
M. Delfosse propose à la fin du n°1° au lieu de: « où ces langues sont en usage », de dire : « où ces deux langues sont en usage ».
M. Dedecker. - Je me rallie à cet amendement, mais je demande qu'on ajoute le mot : « respectivement ».
M. Delfosse. - La rédaction que j'ai proposée n'a qu'un but, c'est de ne pas appliquer les dernières lignes du paragraphe à la langue française, mais seulement aux langues allemande et flamande.
- Le changement de rédaction proposé par M. Delfosse est mis aux voix et adopté.
L'amendement de M. Delfosse, consistant à substituer au troisième paragraphe les mots « des notions » aux mots « y compris les notions » est adopté.
L'amendement proposé par M. Delfosse au quatrième paragraphe, consistant à substituer lu le mot « vivantes » au mot « modernes »; 2° les mots « en usage et l'anglais » aux mots « la langue maternelle, ainsi que l'anglais », est adopté.
Les divers paragraphes de l'article 22 (projet de la section centrale) et l'ensemble de l'article sont adoptés avec ces amendements.
La chambre passe à la discussion sur l'article 23 du projet de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie et qui est ainsi conçu :
« Art. 23. L'enseignement de la section professionnelle comprend :
« 1° La rhétorique et l'étude approfondie de la langue française, ainsi que de la langue flamande ou allemande dans les parties du pays où ces langues sont en usage, l'étude pratique des langues modernes et, en particulier, de la langue flamande et de la langue allemande pour les parties du pays où ces langues ne sont pas la langue maternelle, ainsi que l'étude de la langue anglaise.
« 2° L'étude des mathématiques élémentaires ci-dessus détaillées, et, en outre, la géométrie analytique, la géométrie descriptive, la trigonométrie sphérique, avec leurs applications aux arts, à l'industrie et au commerce;
« 3° Les éléments de la physique, de la mécanique, de la chimie et de l'astronomie;
« 4° La tenue des livres, les éléments de droit commercial, d'économie politique et d'histoire naturelle;
« 5° Les éléments de l'histoire et de la géographie moderne et, en particulier, les éléments de l'histoire et de la géographie de la Belgique, y compris les notions des institutions constitutionnelles et administratives.
« 6° Les éléments des arts graphiques (dessin et calligraphie), la musique vocale et la gymnastique. »
M. le président. - Il y a lieu d'introduire dans cet article les modifications apportées sur la proposition de M. Delfosse au n°4° de l'article précédent; c'est-à-dire qu'il faut substituer : 1° le mot « vivantes » au mot « modernes »; et 2°; les mots « en usage » aux mots « la langue maternelle ».
M. Lesoinne. - Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur si, dans les parties du pays où la langue flamande n'esl pas en usage, l'étude des trois langues vivantes précisées dans l'article sera obligatoire.
M. Rodenbach. - L'anglais est bien obligatoire. Le flamand doit l'être à plus forte raison.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'étude d'une des trois langues suffit. Il s'agit ici de l'enseignement professionnel. On sera nécessairement plus exigeant pour les langues modernes que pour l'enseignement classique. Mais une des trois langues suffira. Ce qui n'empêchera pas de donner des cours de flamand, d'allemand et d'anglais.
M. Liefmans. - Je croyais devoir demander les mêmes explications que l'honorable M. Lesoinne. Je pense aussi que l'étude des trois langues vivantes ne saurait être obligatoire. Faire apprendre simultanément l'allemand, l'anglais et le flamand, c'est vouloir la chose impossible. Il faut que les cours se donnent, mais l'élève doit avoir le choix de suivre le cours de la langue anglaise, ou celui de la langue allemande. Si l'on voulait qu'il fréquentât ces deux cours simultanément, on aurait pour résultat de jeter la confusion dans l'esprit, dans la mémoire de l'élève. Il faut bien se pénétrer d'une chose, c'est que celui qui (page 1354) s'applique à l'étude de la langue anglaise et de la langue allemande simultanément, confond très souvent et les mots et les phrases de ces deux idiomes; et s'il est dans le cas de devoir parler l'une ou l'autre de ces langues, il rencontre le grave inconvénient de placer des expressions anglaises à côté d'expressions allemandes. En un mot, cet élève s'apercevra toujours, mais souvent trop tard, que la confusion est inévitable. Il convient donc, comme le désire l'honorable M. Lesoinne, que l'élève ne soit obligé qu'à suivre un seul cours en même temps.
M. Dedecker. - Je ferai remarquer qu'ici, comme à l'article 22, il faut bien distinguer les langues considérées comme langues maternelles ou comme langues étrangères. Nous demandons que dans l'enseignement obligatoire on comprenne, outre la langue française dont l'étude est de rigueur pour toute la Belgique, les langues flamande et allemande, dans les parties du pays où ces langues sont les langues maternelles.
Quant aux langues anglaise, flamande et allemande, là où ces deux dernières langues ne sont pas les langues maternelles, elles sont considérées comme langues étrangères ; l'enseignement en est obligatoire pour le gouvernement, mais l'étude en est facultative pour les élèves.
Voilà comment je comprends les diverses parties de l'article 22.
M. de Haerne. - J'aborde dans le sens de l'honorable préopinant, mais j'ai une observation à faire sur ce qu'a dit l'honorable M. Liefmans. Je crois que les trois langues dont il est question au premier paragraphe ne doivent pas être enseignées obligatoirement pour tous les élèves dans les parties du pays où ces langues ne sont pas les langues maternelles, quoiqu'il doive y avoir obligation pour le gouvernement d'établir partout des chaires pour ces trois langues.
Il n'est pas exact de dire que ces trois langues ne peuvent s'enseigner à la fois, soit à différents élèves dans la même année, soit aux mêmes élèves à des années différentes. Cela dépend de la distribution des études.
Si elle est de trois années, vous pouvez mettre le flamand dans la première année d'études, l'anglais dans la deuxième, l'allemand dans la troisième. Si la durée des études est de six années, vous pouvez encore mieux combiner l'enseignement des trois langues.
Cet enseignement, comme facultatif pour les élèves, doit être d'une très grande utilité. J'insiste donc sur l'enseignement des trois langues; sauf à le diviser d'après la durée des études, et à faire tous les efforts dans l'exécution pour généraliser autant que possible, même dans les provinces wallonnes, l'étude sérieuse de la langue flamande. En un mot, c'est plutôt par les règlements que par la loi que cette matière doit être organisée.
M. Dechamps. - Ne conviendrait-il pas d'ajouter à l'article 32 que le programme de l'examen pour le grade d'élève universitaire sera modifié conformément à cet article?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est la même chose.
M. le président. - Continuons la discussion de l'article 23. L'article 22 est voté; on y reviendra, s'il y a lieu, lors du vote définitif.
M. Lebeau. - Je veux donner suite à l'observation de l'honorable M. Lesoinne; car il me semble qu'on n'y a pas répondu d'une manière pertinente.
S'agit-il de comprendre seulement dans le programme le flamand pour les provinces wallonnes? Si ce n'est que cela, je m'y rallie. Mais s'il s'agissait de l'obligation pour les élèves de suivre les cours des trois langues, je m'y opposerais.
M. Lesoinne. - Si l'élève n'est pas obligé de suivre les cours des trois langues, soit simultanément, soit les uns après les autres, et s'il lui suffit d'apprendre une ou deux langues vivantes, je n'ai plus d'observations à faire. Mais je ne voudrais pas qu'on rendît obligatoire l'étude de la langue flamande par exemple, pour ceux qui croiraient que cette langue ne peut leur être d'aucune utilité,
M. Dequesne, rapporteur. - Lorsque M. le ministre de l'intérieur est venu en section centrale, on lui a demandé des explications sur la portée des articles 22 et 23. M. le ministre nous a déclaré que ces articles obligeaient le gouvernement à faire donner l'enseignement de ces trois langues ; mais que, quant à l'obligation pour les élèves de suivre les cours, c'était une affaire de règlement intérieur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne puis que répéter ce que j'ai dit. L'article 23 indique les matières qui doivent être comprises au programme de l'établissement. Quant à la faculté de suivre ou de ne pas suivre les cours, cela rentre dans le programme intérieur. Il va de soi qu'on ne sera pas tenu d'apprendre à la fois le flamand, l'allemand et l’anglais.
Il est désirable, et j'espère que cela arrivera, que dans les provinces wallonnes on apprenne le flamand. Déjà dans plusieurs collèges wallons on apprend le flamand. Mais il ne sera pas indispensable de suivre le cours de flamand, pas plus que le cours d'anglais ou d'allemand. Toutefois, il est désirable qu'on apprenne au moins deux langues modernes, y compris le flamand.
- La discussion est close.
L'amendement de M. Delfosse, tendant à substituer dans le paragraphe premier le mot « vivantes » au mot « modernes », et les mots : « et de l'étude de la langue anglaise » aux mots « ainsi que l'étude de la langue anglaise », est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe ainsi modifié est adopté.
Les paragraphes 2, 3 et 4 sont adoptés.
Le paragraphe 5 est adopté avec la substitution des mots : « des notions » à ceux-ci : « y compris les notions ».
Le paragraphe 6 est également adopté.
L'ensemble de l'article est adopté.
« Art. 24. Le gouvernement pourra, si l'utilité en est reconnue, créer d'autres cours ou modifier les cours indiqués aux deux articles qui précèdent, suivant le besoin des localités.
« Un règlement d'administration déterminera les conditions à exiger des élèves, soit pour l'entrée dans l'établissement, soit pour le passage d'une classe à une autre. »
M. Coomans. - Messieurs, l'article 24 auquel nous sommes arrivés, est, comme plusieurs autres de cette loi, marqué au coin de l'arbitraire. (Interruption.)
Si ce mot arbitraire soulève quelques observations critiques, je suis prêt à le justifier. Il y a dans la loi vingt articles qui consacrent l'arbitraire. La loi sue l'arbitraire par tous ses articles. (Interruption.) Veut-on que je le démontre ? (Interruption.)
Cet article laisse au gouvernement une immense latitude, latitude telle, qu'on pourrait se demander si l'instruction donnée aux frais de l'Etat est réellement réglée par la loi, ainsi que l'article 17 de la Constitution l'exige.
Je n'ai pas besoin de dire que ce genre tout nouveau de législation n'a pas mon assentiment. Je m'en suis expliqué dans la discussion générale; je n'y reviendrai pas ici, me bornant à faire mes réserves en guise de protestation.
Mais à propos de cet article, qui autorise le ministère à créer d'autres cours que les cours définis par la loi, je dois demander une explication . relativement au projet, déjà ancien, de créer un institut supérieur de commerce et d'industrie.
Messieurs, l'intervention du gouvernement en matière d'institution se justifie surtout par la nécessité. Je conçois que le gouvernement remplisse les lacunes que peut laisser et que laisse effectivement çà et là la libre concurrence. Or, ce qui manque en Belgique, ce ne sont pas ces petites écoles qui ne sont, pour ainsi dire, communales que de nom, et qui absorbent des fonds très considérables, sans profit réel pour le commerce et l'industrie.
Ce qui nous manque, c'est une institution propre à former de bons négociants, des industriels éclairés ; une institution où l'on enseigne d'une manière approfondie tout ce que les négociants et les industriels doivent savoir.
Le siège de cet établissement est naturellement marqué à Anvers, notre métropole commerciale.
Le projet dont je parle, messieurs, n'est pas nouveau. Il a été étudié non seulement dans la presse et dans des brochures, mais il l'a été également au sein du conseil communal d'Anvers, qui très probablement y prêterait son concours financier. Je dis probablement, parce que les rapports officiels et les décisions prises avec une sorte d'enthousiasme, étaient très favorables au projet, réclamé par l'élite de la population anversoise.
Jusqu'à présent le langage du gouvernement, à cet égard, a été assez obscur. Je désirerais savoir quelles sont ses intentions définitives, et s'il est disposé à user de l'article 24 pour doter Anvers et la Belgique entière d'une institution si nécessaire au progrès commercial et industriel.
On a dit (je ne sais trop ce qu'il y a de fondé dans cette assertion) que le gouvernement se propose d'ajouter à l'athénée d'Anvers quelques cours de commerce. La mesure serait bonne en elle-même, mais insuffisante et n'atteindrait pas le but où nous visons.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'article 24 n'est pas combattu, je pense, en lui-même, par l'honorable M. Coomans.
M. Coomans. - Non, mais je voterai contre.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'honorable membre trouve seulement que cet article, ainsi que beaucoup d'autres, respire l'arbitraire. Eh bien, cet article est emprunté à peu près mot pour mot au projet des honorables amis de M. Coomans...
M. Coomans. - Le règlement ne me force pas à être d'accord avec mes amis.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'invoque pas le règlement, je vous donne seulement cet avertissement.
M. Coomans. - Je n'en avais pas besoin.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ainsi, messieurs, ici encore nous faisons de l'arbitraire avec les amis de l'honorable M. Coomans. Mais l'honorable M. Coomans va nous suivre lui-même. Il prend goût, à ce qu'il paraît, à la domination de l'Etat, cette source malfaisante, d'où doivent découler sur toute la surface du pays tant de maléfices.
L'honorable M. Coomans n'est pas satisfait de voir aux mains de l'Etat, de cet être immoral, athée, deux universités, dix athénées, cinquante écoles moyennes; il veut lui donner maintenant une université de plus; il lui faut une université commerciale. Mais que faites-vous donc? Tâchez de rester, au moins pendant cette discussion, conséquent avec vous-mêmes, tâchez que le milieu et la fin répondent au commencement. C'est une règle, je pense, que vous devez avoir à cœur de suivre et dont vous devez vous souvenir. Après avoir accusé le gouvernement de vouloir absorber toute espèce d'enseignement, l'enseignement classique, l'enseignement industriel, l'enseignement agricole, voilà qu'on veut qu'il absorbe l’enseignement commercial.
(page 1355) M. de Mérode. - A la place des autres.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Non pas à la place des autres, mais par-dessus les autres. Les autres établissements sont votés.
L'honorable M. Coomans a le droit d'initiative. Il peut faire une proposition. Quelques-uns de ses amis d'Anvers ont demandé une université commerciale; ils ont même fait un grief au gouvernement de ne pas accorder à Anvers une université commerciale.
Le gouvernement a dû d'abord se demander ce qu'il fallait entendre par une université commerciale. Veut-on établir à Anvers une université avec trois ou quatre facultés, comme les autres universités? C'est une dépense de quelques centaines de mille francs et quelles que soient mes sympathies bien connues pour la ville d'Anvers, je ne proposerai pas une pareille mesure. S'agit-il de créer à Anvers des cours supérieurs de commerce, ce que j'appellerai une faculté supérieure de commerce? Cela, je l'admets. Je conçois des cours de géographie commerciale, de droit commercial, d'histoire du commerce, d'économie politique. Mais ne nous payons pas de mots et n'appelons pas université ce qui ne peut être que la réunion de quelques cours supérieurs. Si ce n'est pas ainsi que l'entend l'honorable M. Coomans, je lui demanderai le programme de son université. J'ai fait connaître le programme de la mienne; l'honorable M. Coomans veut-il davantage? (Interruption).
L'idée de créer à Anvers ce que j'appelle une faculté de commerce, cette idée est bonne et je serai charmé de trouver dans la loi actuelle le moyen de la réaliser. En l'absence d'une loi, il est probable que le gouvernement eût été amené à créer cette institution à Anvers, en vertu de sa simple initiative.
Aujourd'hui, je puiserai dans la loi le droit de la créer d'une manière plus stable, puisqu'elle ne dépendra plus d'une simple faveur ministérielle.
Déjà, messieurs, je suis entré en rapport avec un homme distingué, ami, je pense, de l'honorable M. Coomans, qui, probablement, voudra bien se charger d'un des cours de cette faculté.
Je pense que ces explications sont de nature à satisfaire l'honorable M. Coomans.
M. Coomans. - Messieurs, je ne sais si j'ai à me défendre du reproche que m'adresse M. le ministre de vouloir donner aujourd'hui au gouvernement plus qu'il ne demande, plus que je ne lui accordais l'autre jour. Mes votes sont là pour répondre à ses accusations imaginaires. J'ai refusé non seulement au gouvernement les 10 athénées, mais aussi les 50 écoles moyennes et toutes les écoles professionnelles et même ses écoles soi-disant agricoles.
L'honorable ministre a réellement tort de dire que je veux renforcer le monopole légal qu'il compte créer. Je serais désolé de mériter ce reproche, de le suivre jusqu'où il prétend aller. Mon intention, je l'ai nettement exprimée. L'intervention directe du gouvernement en matière d'instruction se justifie principalement, j'allais dire uniquement, par une nécessité absolue, c'est-à-dire que le gouvernement doit faire ce que les particuliers ne peuvent pas convenablement faire ; et j'ai dit que je verrais avec plaisir remplacer toutes ses prétendues écoles commerciales par un institut supérieur, central, complet, fortement organisé. Les particuliers peuvent initier les jeunes gens aux notions élémentaires du commerce, mais il n'y a guère qu'une protection officielle qui puisse assurer le succès durable d'une institution comme celle dont je parle en ce moment.
Ai-je demandé, messieurs, comme le dit M. le ministre, quelques centaines de mille francs pour l'exécution de ce projet? Mais non, vous le savez tous : si je ne me suis pas expliqué plus longuement, c'était pour ne pas abuser des moments de la chambre, pressée d'en finir. Il ne s'agissait pas plus dans ma pensée que dans celle de M. le ministre, de fonder une nouvelle université gouvernementale en faveur du commerce et de l'industrie. Le mot d'université n'est pas sorti de ma bouche, ni la demande de centaines de mille francs non plus. M. le ministre ferait bien de réfuter ce que je dis plutôt que ce qu'il me prête. Tout ce que je demande, c'est que l'honorable ministre favorise, par des subsides, un établissement communal anversois. La commune d'Anvers est prête, j'ai lieu de le croire, à faire des sacrifices, afin de créer l'institution qui lui profiterait particulièrement. Eh bien, si elle recevait du trésor public un subside, par exemple de 30,000 francs, c'est-à-dire le dixième de la somme dont l'honorable ministre a parlé, elle pourrait, avec d'autres secours, fonder l'utile établissement que je recommande de nouveau au ministère et à la législature.
Si M. le ministre s'était borné à me répondre comme il l'a fait, d'une manière assez favorable, je n'aurais pas répliqué; mais j'ai dû reprendre la parole, parce qu'il m'a attribué des intentions qui n'étaient pas les miennes, des réclamations que je n'avais pas formulées, des votes que je n'avais pas émis.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Vous savez fort bien que je m'occupe de cette affaire-là.
M. Coomans. - Je vous en félicite, mais décidez-vous enfin.
- Un membre. - Voilà des années que celle affaire traîne.
M. Coomans. - Il ne suffit pas d'ajouter à l'athénée d'Anvers deux ou trois cours de commerce, ni même de les créer en dehors de cet établissement. Cela existe déjà ; dans ma pensée, il s'agit de quelque chose de plus sérieux et de plus efficace.
Voilà, messieurs, toute la portée de mon interpellation. J'y attache une importance telle, que je croirai devoir la renouveler, si l'honorable ministre de l'intérieur ne donne pas au projet en question les développements dont il est susceptible.
- La discussion est close.
L'art. 24 est adopté.
« Art. 25. La somme allouée annuellement sur le budget de l'Etat, en faveur des écoles moyennes, ne peut excéder la proportion, en moyenne, de quatre mille (4,000 fr.) par école.
« La commune où l'école moyenne est établie fournit le local et le mobilier, et pourvoit à leur entretien. En cas de besoin, elle intervient par une subvention qui ne pourra excéder le tiers de la dépense, sans son consentement. »
M. le président. - M. de Brouckere a demandé le rejet de l'article. Je pense que l'amendement vient à cesser par suite du vote précédent. (Oui !) Au reste, c'est le rejet de l'article.
M. Dumortier.—Messieurs, il y a dans le premier paragraphe du projet de la section centrale deux amendements qui me paraissent être sérieux, et devoir être examinés par la chambre. L'un de ces amendements porte à 4,000 francs la proportion de la dépense à supporter par l'Etat dans chaque école moyenne; le second amendement consiste à dire que cette proportion ne pourra excéder les 4,000 fr. en moyenne.
Il résulte de là que le gouvernement pourra allouer une somme très faible à certaines écoles, et accumuler des sommes très fortes sur d'autres écoles. (Interruption.)
Je ne vois pas qu'il y ait similitude ici avec les athénées. Il est évident que, pour les athénées, vous devez pouvoir nommer un grand nombre de professeurs dans les grandes villes ; mais lorsqu'il s'agit des écoles moyennes qui ne sont que des écoles primaires modèles, je ne comprends pas que la section centrale ait pu augmenter le chiffre qui a été demandé par le gouvernement.
Je reprends, pour mon compte, le paragraphe premier de l'article 25 du projet du gouvernement. Puisque les écoles moyennes sont votées, je désire qu'elles coûtent le moins possible au budget de l'Etat; la somme de 3,000 francs, que le gouvernement avait proposée, a suffi aujourd'hui pour organiser les écoles primaires supérieures ; cette somme a été fixée par la loi ; il me semble superflu de faire ici de nouvelles dépenses pour des institutions qui marchent à la satisfaction du pays.
Je demande donc que le premier paragraphe du projet du gouvernement soit mis aux voix.
M. Dequesne, rapporteur. - Messieurs, la section centrale a donné, dans son rapport, le motifs de cette augmentation. Plusieurs écoles primaires supérieures ont maintenant plus de 3,000 francs, parce qu'on y a adjoint des cours qui ont nécessité une augmentation de dépense ; cette augmentation de dépense se prend sur les fonds de l'enseignement moyen, tandis que 3,000 francs s'imputent sur les fonds de l’enseignement primaire. Comme, d'après la nouvelle loi, toutes les sommes allouées à chaque école devront être prélevées sur les fonds de l'enseignement moyen, la section centrale a cru que, pour maintenir ce qui existe, il fallait augmenter la proportion de 3,000 à 4,000 francs; le gouvernement a reconnu l'observation fondée, et il s'est rallié au chiffre de 4,000 francs.
M. Bruneau. - Messieurs, la proposition de l'honorable M. Dumortier est en principe identiquement la même que celle que l'honorable M. de Theux a faite hier relativement aux athénées. Les mêmes motifs qui ont fait rejeter la proposition de l'honorable M. de Theux doivent faire rejeter celle de l'honorable M. Dumortier. D'après les besoins divers des localités, il devra y avoir dans telle école des cours qui ne se trouveront pas dans telle autre école ; il faudra donc augmenter le subside du gouvernement dans certaines écoles et le diminuer dans d'autres.
On a agi ainsi à l'égard des athénées dans un but d'utilité publique, il est juste de faire la même chose pour les écoles moyennes destinées aux petites villes. Loin de proposer de réduire le chiffre d'une manière indirecte, il serait plus rationnel de proposer de l'augmenter. J'appuierai donc le chiffre demandé par la section centrale.
M. Dumortier. - Je veux seulement faire remarquer à la chambre que, si elle adopte le chiffre de 4,000 francs, cela fera une augmentation totale de 50,000 francs.
M. de Theux. - Messieurs, l'article 33 de la loi de l'instruction primaire porte en termes formels que les subsides pour les écoles primaires supérieures ne pourront excéder 3,000 francs par école. (Interruption.)
Je sais que l'on invoque la décision que la chambre a prise hier à la fin de la séance; il n'y avait que 55 membres présents, de sorte que le vote d'hier n'a pas préjugé la question. Je crois qu'il faut conserver ici la moyenne de 3,000 francs, et dire que le subside ne peut pas excéder par école la somme de 3,000 francs.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Messieurs, bien que la loi de l'instruction primaire fixe à 3,000 francs la part contributive de l'Etat, cette disposition n'a pas été rigoureusement observée. Vous avez plusieurs écoles primaires qui reçoivent de l'Etat un subside supérieur à 3,000 francs. Par suite de ces nécessités auxquelles le projet de loi va pourvoir d'une manière régulière, l'on a adjoint des cours à certaines écoles primaires supérieures; l'adjonction de ces cours a rendu nécessaire une augmentation de subside. Je citerai, entre autres, les écoles de Thuin, de Virton et de Marche, qui ont respectivement obtenu des (page 1356) subsides supplémentaires de 3,000, 2,000 et 1,200 francs, pour les classes latines ajoutées à ces écoles.
Si vous alliez réduire ces subsides, évidemment les écoles ne pourraient plus marcher. Il y a même plusieurs écoles qui ne pourraient pas marcher si on ne disposait en leur faveur que de 4,000 francs: mais on pourra augmenter le subside de ces écoles, en n'accordant que 3,000 francs à d'autres qui n'exigeront pas davantage. Il est même certains établissements auxquels un subside de 3,000 francs ne sera pas nécessaire; là le minerval présente des ressources suffisantes pour couvrir la plus grande partie des frais. Ainsi l'école de Bruxelles ne reçoit pas 3,000 fr. Il sera utile de reporter les sommes disponibles sur des localités moins favorisées. Voilà comment j'entends faire la répartition; chaque école ne recevra pas 4,000 fr.; les unes recevront plus, et les autres moins; mais le budget ne sera grevé au plus que de 50 fois 4,000 fr.
M. Christiaens. - Les observations de l'honorable M. Dumortier tendent à réduire de 4,000 à 3,000 fr. le subside du gouvernement pour les écoles moyennes. Je ne suis pas plus dépensier que l'honorable membre quand il s'agit des deniers de l'Etat; j'ai voté contre le budget de la guerre parce que je trouvais le chiffre trop élevé ; j'ai voté également contre les pensions des ministres, parce que je trouvais là une économie juste et raisonnable à opérer; mais quand il s'agit de l'instruction moyenne pour les petites villes surtout, je serais plutôt disposé à voter 6 mille francs que 4 mille proposés par la section centrale. Je demanderais au besoin qu'on réduisît l'allocation de 30 mille fr., qu'on accorde aux athénées, pour augmenter d'autant la somme destinée aux écoles moyennes des petites villes. C'est là surtout, que le gouvernement doit venir au secours par des subsides. Je demande donc le maintien de la somme de 4 mille fr. proposée par la section centrale.
- La discussion est close.
M. de Haerne. - Je demande la division.
- La première partie de l'amendement, consistant dans la suppression du mot « en moyenne », est mise aux voix. Elle n'est pas adoptée.
M. le président. - La seconde partie consiste dans la réduction du chiffre de 4,000 francs à 3,000. Suivant les précédents, je mets aux voix le chiffre le plus élevé proposé par la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Le gouvernement s'y est rallié.
- Plusieurs voix. - L'appel nominal !
Il est procédé au vote par appel nominal, dont voici le résultat :
88 membres répondent à l'appel.
70 membres répondent oui ;
18 membres répondent non.
En conséquence, la chambre adopte le chiffre de 4,000 fr.
Ont répondu oui : MM. Mercier, Moxhon, Orts, Peers, Pierre, Prévinaire, Reyntjens, Rogier, Rollin, Rousselle, Sinave, Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Veydt, Allard, Ansiau, Anspach, Boedt, Bruneau, Cans, Christiaens, Cools, Cumont, Dautrebande, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, Debourdeaud'huy, de Breyne, de Denterghem, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Luesemans, de Perceval, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, de Royer, Destriveaux, Devaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dubus, Dumont (Guillaume), Fontainas, Frère-Orban, Jacques, Jouret, Jullien, Lange, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Manilius et Verhaegen.
Ont répondu non : MM. Osy, Pirmez, Rodenbach, Van Renynghe, Vermeire, Boulez, Clep, Coomans, Dechamps, Dedecker, de Haerne, de Liedekerke, de Meester, de Mérode, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, le Bailly de Tilleghem.
L'ensemble de l'article proposé par la section centrale est ensuite adopté.
« Art. 26. L'enseignement dans les écoles moyennes comprend :
« 1° L'étude approfondie de la langue française et, en outre, de la langue flamande ou allemande, pour les parties du royaume où ces langues sont en usage;
« 2° L'arithmétique démontrée, les éléments d'algèbre et de géométrie, le dessin, principalement le dessin linéaire, l'arpentage et les autres applications de la géométrie pratique;
« 3° L'écriture, la tenue des livres et des notions de droit commercial;
« 4° Des notions des sciences naturelles applicables aux usages de la vie;
« 5° Les éléments de la géographie et de l'histoire, et surtout de l'histoire et de la géographie de la Belgique;
« 6° La musique vocale et la gymnastique. »
- Le seul amendement proposé est celui de M. de Brouckere, qui demande la suppression de l'article.
L'article 26 est mis aux voix, il est adopté.
« Art. 27. Les cours devront être distribués de manière à être terminés en deux années ou trois années au plus.
« Là où le besoin s'en fera sentir, il pourra être annexé à l'école moyenne une section préparatoire dans laquelle seront enseignées les matières attribuées aux écoles primaires.
« Le gouvernement pourra, si l'utilité en est reconnue, créer d'autres cours ou modifier les cours ci-dessus indiqués, suivant les besoins des localités.
M. de Brouckere en demande la suppression.
M. de Luesemans. - D'après le deuxième paragraphe, là où le besoin s'en fera sentir, il pourra être annexé à l'école moyenne une section d'instruction primaire.
Ce paragraphe suppose une création entièrement nouvelle, mais je demanderai à M. le ministre de l'intérieur, si dans les localités où il y a aujourd'hui des écoles primaires supérieures qui deviendront écoles moyennes, les sections d'enseignement primaire qui existent pourront être maintenues. D'après le projet de loi, toutes les écoles primaires supérieures deviennent écoles moyennes. Le niveau des études devra être élevé d'après le programme. Or, il existe beaucoup d'écoles primaires supérieures qui ne sont jusqu'à présent que des écoles primaires. La plupart des enfants qui fréquentent ces écoles ont de 6 à 12 ans.
Je demanderai si ces écoles seront entièrement réorganisées, ou si elles seront simplement transformées en y annexant une section d'enseignement moyen et en conservant l'enseignement primaire complet, tel qu'il existe aujourd'hui.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Les écoles primaires supérieures transformées en écoles moyennes seront réglées d'après le programme de l'article 26. L'article 27 a pour but de maintenir dans ces écoles une section d'instruction primaire. Cela existe aujourd'hui dans plusieurs localités, notamment dans les petites localités où il serait impossible d'avoir à la fois une école primaire supérieure et une école primaire.
- L'article 27 est mis aux voix et adopté.
« Art. 28. Le gouvernement est autorisé à accorder des subsides à des établissements communaux ou provinciaux d'instruction moyenne, soit du premier degré, soit du second degré. »
M. le président. - M. de Brouckere avait proposé de supprimer les mots : « soit du premier, soit du second degré », qui terminent cet article; mais cet amendement vient à tomber. M. Osy avait proposé deux amendements qui viennent également à tomber et qu'il déclare d'ailleurs retirer. Il ne reste plus à cet article que l'amendement de M. Thibaut, ainsi conçu :
«Le gouvernement est autorisé à subventionner ceux des établissements libres patronnés par les communes, qui sont actuellement en possession de subsides sur le trésor. »
M. Thibaut. - Avant d'entrer dans les développements de la proposition que j'ai eu l'honneur de déposer, je demanderai à M. le ministre de l'intérieur et à M. le rapporteur de la section centrale s'ils ne pensent pas qu'en l'absence d'une disposition expresse, le gouvernement serait autorisé à continuer aux établissements patronnés, que ma proposition a en vue, la jouissance des subsides qu'ils ont aujourd'hui : je considère ces établissements comme ayant des droits acquis.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je désire m'expliquer sur ce point comme sur tous les autres avec une entière franchise.
La loi actuelle n'a pas pour but de détruire les établissements existants; je crois qu'elle n'aura pas non plus cet effet et que toutes les communes se soumettront aux prescriptions de la loi, et présenteront au gouvernement des résolutions qu'il pourra accueillir. Ainsi, la loi actuelle ne ferait que régulariser, légaliser les faits anciens.
Les établissements qui ont une position en dehors de la loi, et qui ne pourront se mettre en harmonie avec la loi actuelle, se transformeront ou disparaîtront.
Il existe une catégorie d'établissements qui reçoivent à la fois des subsides de la commune et de l'Etat ; il y en a trois ou quatre dans ce cas, Dinant entre autres. Le gouvernement subsidie un établissement privé, fondé à Dinant sous le patronage de la commune. Je dois dire que l'intention du gouvernement est de maintenir l'état actuel des choses pour ces établissements. Le gouvernement se ferait scrupule de concourir à la ruine d'un établissement d'instruction publique. La loi actuelle a pour but de régler l'enseignement public donné aux frais de l'Etat. Sous ce rapport, nous ne pouvons comprendre dans la loi les subsides accordés aux établissements privés. Mais rien n'empêche que, par le budget, l'on accorde des subsides à certains établissements privés. Pour l'avenir ce système ne me paraîtrait pas en harmonie avec la loi actuelle. Quant au passé, quant aux établissements qui jouissent, depuis un certain nombre d'années, de subsides de l'Etat, et qui se sont fondés, développés à l'aide de ces subsides, je pense qu'il n'y aurait pas de libéralisme à frapper ces établissements par un retrait de subside.
On peut prendre acte de ma déclaration. Si la chambre n'y est pas contraire, les subsides accordés aux établissements existantes seront portés à l'avenir au budget.
M. Thibaut. - Je remercie M. le ministre de l'intérieur de la déclaration qu'il vient de faire, et j'en prends acte. Je n'insisterai pas pour (page 1357) qu'elle passe dans la loi même. Par conséquent, je retirerai mon amendement.
Je ferai seulement remarquer que l'établissement en faveur duquel j'ai surtout pris la parole s'est soumis à toutes les prescriptions que le gouvernement lui a imposées comme conditions de subsides; conditions, du reste, auxquelles le projet actuel soumet le patronage, c'est-à-dire qu'il s'est soumis à l'inspection et qu'il participe au concours. Je puis môme ajouter, avec un légitime orgueil pour l'arrondissement et la ville de Dinant, que son collège a obtenu les plus beaux succès dans les concours. Je citerai la classe de rhétorique. Elle a été appelée trois fois à concourir depuis 1845, et sur ces trois fois, les élèves de Dinant ont remporté deux seconds prix et un premier prix.
Cet établissement continuera, j'en suis convaincu, à mériter toute la bienveillance de M. le ministre de l'intérieur.
M. Dedecker. - Messieurs, l'article 28 est, de fait et en pratique, un des plus importants de la loi. Il s'agit d'accorder au gouvernement la faculté de subsidier les établissements communaux.
Au sein de la section centrale, j'avais proposé de limiter ces subsides, de poser un maximum; et en cela je croyais être conséquent avec d'autres dispositions de la loi. Pour les athénées et pour les écoles moyennes nous avons mis une limite à la libéralité du gouvernement. Nous avons décidé qu'en moyenne le concours du gouvernement ne pourrait aller à plus de 30,000 fr. par athénée et à plus de 4,000 fr. par école moyenne.
Je voudrais donc qu'en ce qui concerne les subsides à accorder aux établissements communaux on pût arriver aussi à poser une juste limite à l'action du gouvernement. Je crois que c'est surtout cette partie de l'enseignement qu'il faut régler par la loi. C'est ici qu'il faut éviter l'abus qu'on pourrait faire des subsides, si la collation de ces subsides reste sans règle.
Lors de la discussion des articles 2 et 3, la chambre a repoussé l’établissement des collèges royaux. Mais si à l'aide des subsides on peut arriver au même résultat, vous aurez la dépense sans avoir les avantages qu'on peut attendre, au point de vue gouvernemental, d'un ensemble de direction dans l'instruction donnée aux frais de l'Etat.
Il y a deux moyens de limiter ces subsides. On pourrait dire qu'il ne sera permis au gouvernement de subsidier qu'un certain nombre d'établissements par province. J'avoue que ce moyen ne me paraît guère praticable. Mais ne pourrait-on pas fixer un maximum par établissement ? Je laisse cette question à l'appréciation du gouvernement, je ne veux fixer aucun chiffre. Mais je demanderai qu'au besoin on renvoie cet article à demain, si tant est que le gouvernement juge convenable de faire droit à ma demande. (Interruption.)
On me dit que chaque année on pourra examiner le chiffre de ces subsides à l'occasion du budget. Mais si nous pouvions décider la question comme règle générale, cela vaudrait mieux que d'y revenir chaque année. Vous savez, d'ailleurs, que cette garantie du budget est en quelque sorte illusoire. On ne peut, à chaque vote de budget, revenir sur cette question qui alors prend un caractère tout local.
Il vaut mieux, dans la loi actuelle, fixer un maximum pour ces subsides, abandonnant à la discussion des budgets la question d'application. Ainsi du moins nous resterons conséquents avec nous-mêmes, en posant ici encore une limite à l'action du gouvernement.
Pour les athénées et pour les écoles moyennes, le gouvernement interviendra pour les deux tiers de la dépense. Ne pourrait-on renverser la proportion et dire que, pour les établissements communaux subventionnés, le gouvernement ne pourra dépasser le tiers de la dépense totale? Ces établissements, entraînant ordinairement une dépense de 18,000 à 20,000 francs, la somme de 6,000 francs formerait donc à peu près le tiers de la dépense. Le maximum des subsides accordés aujourd'hui est de 6,000 à 7,000 fr. ; je maintiendrai donc à peu près ce qui existe aujourd'hui.
Du reste, je le répète, je ne fais pas de proposition formelle, mais je voudrais qu'on examinât la question et qu'on mît cet article en harmonie avec les autres dispositions de la loi où l'intervention pécuniaire du gouvernement est déterminée.
M. Delfosse. - Je ne comprends pas que l'honorable M. Dedecker, membre de la section centrale, et qui a pu faire, au sein de cette section, les observations qu'il croyait utiles, vienne demander le renvoi de sa proposition à la section centrale et l'ajournement du vote.
L'honorable M. Dedecker pense que le vote et l'examen des budgets sont des formalités illusoires. Ce sont, au contraire, des choses très sérieuses qui donnent des garanties suffisantes contre les abus que l'honorable membre semble redouter.
Je dirai un mot des établissements patronnés qui ont reçu jusqu'ici des subsides de l'Etat.
J'apprécie les explications que M. le ministre de l'intérieur vient de donner. Je conçois que, par mesure d'équité, on tienne compte des faits préexistants et qu'on ne retire pas brusquement aux établissements patronnés par les communes les subsides qu'ils ont reçus jusqu'à présent de l'Etat. Mais j'aime à croire, et cela résulte, me paraît-il, des explications de M. le ministre de l'intérieur, que le gouvernement ne s'engagera pas plus avant dans cette voie, c'est-à-dire qu'il n'augmentera pas les subsides qu'on alloue aujourd'hui, et qu'il n'en donnera pas à de nouveaux établissements de cette catégorie.
Nous ferons, messieurs, pour les établissements ce que nous avons fait pour les bourses, lorsque nous avons discuté la loi sur l'enseignement supérieur. Nous avons alors décidé que les bourses de l'Etat seraient à l’avenir réservées aux élèves des universités de l'Etat; mais par une exception que l'équité réclamait, nous avons décidé en même temps que les élèves des autres universités qui avaient précédemment obtenu une bourse, pourraient continuer à en jouir.
La mesure que M. le ministre de l'intérieur se propose de prendre est équitable, je n'ai pas de raison pour m'y opposer. Mais je m'opposerais à l'allocation de subsides à d'autres établissements ou à l'accroissement des subsides déjà accordés.
J'espère que c'est aussi là l'opinion de M. le ministre de l'intérieur.
M. Dedecker. - L'honorable M. Delfosse a commencé par m'adresser un reproche de ce que, membre de la section centrale, je ne lui ai pas fait une proposition dans le sens des observations que je viens de présenter. Je suis obligé de dire à l'honorable M. Delfosse que s'il avait lu le rapport de la section centrale il y verrait que ce reproche ne peut pas m'être adressé. Voici ce que j'y trouve, page 52 : « Dans la section centrale un membre (ce membre c'était moi) propose d'ajouter : « ces subsides ne pourront jamais dépasser 8,000 fr. par établissement, » Cette addition est rejette par six voix contre une. »
Ainsi, messieurs, déjà au sein de la section centrale, j'avais fait une proposition du même genre. Ce que je demande aujourd'hui aurait à peu près le même résultat. Le tiers de la dépense de ces établissements est de 6,000 à 8,000 fr. Je suis donc conséquent avec moi-même.
L'honorable M. Delfosse engage le gouvernement à ne pas étendre dans l'avenir les bienfaits des subsides aux établissements patronnés. Je n'hésite pas à dire qu'ici l'honorable M. Delfosse abandonne le terrain de la véritable liberté. Si le gouvernement voulait réellement user, dans le sens le plus large, le plus constitutionnel, des subsides que nous lui allouons, il ne devrait pas s'enquérir du régime et de la direction de l'établissement, mais il devrait se borner à constater si cet établissement mérite les encouragements de l'Etat, et les lui accorder. Pour moi, je serais heureux, si plus tard on formait des établissements patronnés possédant des titres à l'intérêt du gouvernement, de voir l'Etat étendre à ces établissements le système des subsides.
En France, messieurs, on a, sous ce rapport, mieux compris la liberté qu'ici. Là, le gouvernement n'accorde, en dehors des 56 lycées de l'Etat, aucun subside aux établissements communaux; mais il a la faculté de subsidier des établissements libres. On y suit donc un système contraire à celui que l'on défend ici.
Ainsi je remercie M. le ministre de l'intérieur de la déclaration qu'il vient de faire, que l'on continuera aux établissements patronnés les subsides dont ils ont joui jusqu'à présent; et quant au désir exprimé par l'honorable M. Delfosse, je fais au contraire le vœu que chaque fois qu'un établissement s'élèvera et se montrera digne des faveurs gouvernementales, on ne les lui refuse pas, surtout s'il se soumet à l'inspection.
M. Delfosse. - Messieurs, j'ai très bien lu le rapport de la section centrale et je sais parfaitement que l'honorable M. Dedecker, a soumis à la section centrale une proposition qui n'a pas été admise; mais je ne pouvais pas supposer que M. Dedecker prendrait la parole uniquement pour demander le renvoi à la section centrale d'une proposition que la section centrale a rejetée. (Interruption.) Vous avez demandé cela ; vous avez tout au moins demandé le renvoi à demain et j'ai dû supposer dès lors que vous présenteriez à la chambre des observations nouvelles et c'est de ces observations que je disais que vous auriez dû les soumettre à la section centrale.
L'honorable M. Dedecker pense que le gouvernement ne doit pas se borner à continuer aux établissements privés patronnés par les communes les subsides dont ils jouissant aujourd'hui, mais qu'il doit encore en accorder à d'autres. Je ne veux pas examiner en ce moment s'il est utile que le gouvernement entre dans cette voie, mais je dis que la loi que nous faisons n'accorde pas au gouvernement le droit d'allouer des subsides à de nouveaux établissements. Ce droit ne résulte d'aucune disposition de la loi.
L'article 28 autorise le gouvernement à accorder des subsides à des établissements communaux ou provinciaux ; mais aucun article ne l'autorise à en accorder à des établissements privés.
La question soulevée par M. Dedecker reste entière; si plus tard le gouvernement veut accorder des subsides à des établissements privés patronnés par la commune, il pourra en faire la proposition aux chambres. Le gouvernement peut faire aux chambres toutes les propositions qu'il juge utiles et les chambres sont libres d'adopter ou de rejeter ces propositions.
Mon observation n'a eu que ce sens que le gouvernement ne pourrait pas, sans une autorisation spéciale des chambres, accorder des subsides à des établissements privés qui n'en ont pas aujourd'hui ou augmenter ; les subsides actuellement accordés à des établissements de cette catégorie.
L'honorable M. Dedecker a parlé de la liberté. Je crois être autant que lui, je ne veux pas dire plus que lui, ami de la liberté.
M. de Mérode. - Cela n'est pas vrai.
M. Delfosse. - M. de Mérode ne fait qu'interrompre et injurier. M. de Mérode vient de dire : Cela n'est pas vrai. Je répète que je suis tout aussi ami de la liberté que M. Dedecker, et j'ajoute plus ami de la liberté que M. de Mérode, car je veux la liberté pour tous, et M. de Mérode ne la veut, au fond, que pour le clergé.
(page 1358) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je dois encore donner une explication pour qu'il n'y ait pas de malentendu. Le but de la loi n'est pas de renverser, mais plutôt de régulariser ce qui existe. L'intention du gouvernement est de maintenir les subsides aux établissements privés, patronnés par les communes, qui jouissent actuellement de ces subsides. Seulement il est bien entendu que ces établissements auront à se soumettre au régime de la loi nouvelle.
Le gouvernement ne croit pas trouver dans la loi actuelle le pouvoir d'augmenter ces subsides ni de subsidier des établissements nouveaux. La loi fait-elle bien de ne pas accorder ce pouvoir au gouvernement? Je pense que oui ; au point de vue de la liberté il serait très dangereux que le gouvernement continuât d'avoir en mains le moyen de régenter en quelque sorte un grand nombre d'établissements libres. Et ici l'honorable M. Dedecker n'est pas d'accord avec lui-même quand il vient demander l'intervention du gouvernement en faveur des établissements libres. L'intervention pécuniaire du gouvernement enchaîne les établissements libres ou leur fait concurrence, et vous-mêmes vous venez provoquer le gouvernement à multiplier en quelque sorte ce que vous avez crûment appelé ses entretenues dans le royaume! Il y a, je le répète, des dangers pour la liberté à pousser le gouvernement dans cette voie. Sous ce rapport encore, la loi aura cet effet utile, de limiter l'action de l'Etat.
Aujourd'hui qu'arrive-t-il, messieurs ? Le gouvernement peut, à son gré, répandre des subsides dans tout le royaume, et vous avez vu que, d'année en année, de complicité avec les chambres, le gouvernement a créé et subsidié des établissements nouveaux. Dans le principe, il subsidiait 5 ou 6 établissements; nous sommes arrivés à 30, et si vous ne mettiez pas une barrière à l'action du gouvernement, combinée avec l'impulsion des chambres, je pose en fait qu'avant deux ans peut-être, il y aurait une centaine d'établissements subsidiés.
Il faut donc, messieurs, nous poser à nous-mêmes une barrière contre ces entraînements. Et ce sera là encore un bon résultat de cette loi à laquelle je suis convaincu que tout le monde rendra hommage d'ici à peu de temps.
Je crains, messieurs, que, en dehors de la loi, si l'on s'en rapportait aux inspirations de la discussion des budgets, l'on en vînt encore à subsidier beaucoup d'établissements. Il est difficile de s'arrêter dans cette voie , de résister aux excitations des chambres. Pour ma part, et je voudrais que cette déclaration liât mes successeurs, je ne croirai pas être autorisé par la loi à subsidier un établissement privé qui ne jouit pas actuellement de subsides. Pour le passé, nous respectons ce qui est, mais pour l'avenir, si vous voulez agir avec prudence, vous exigerez une loi spéciale pour subsidier des établissements da cette catégorie.
M. de Theux. - Messieurs, la question de subside est une question de budget: il est évident que les chambres ont le droit d'augmenter ou de diminuer annuellement le chiffre des subsides. L'article que nous votons n'est qu'un principe; ce n'est pas un blanc-seing donné au gouvernement pour accorder des subsides aussi étendus qu'il le voudrait; c'est là une question de budget.
Maintenant ce principe s'applique à tous les établissements libres, communaux ou autres. C'est une question de budget. Relativement aux établissements libres, vous vous rappelez la discussion de la loi sur les universités; là il a été entendu que, quoique le gouvernement affectât un certain nombre de bourses exclusivement aux universités de l'Etat, on pourrait cependant, par le budget, accorder des bourses aux universités libres. Eh bien, messieurs, l'établissement de ces universités n'a point été approuvé par le gouvernement, le gouvernement ne les inspecte point, des bourses leur sont accordées; comment voudriez-vous dès lors que les établissements libres, patronnés par les communes en vertu de conventions soumises à l'approbation du gouvernement, comment voudriez-vous que ces établissements fussent placés dans une position défavorable, alors surtout que le gouvernement s'en est réservé l'inspection? Je crois, messieurs, que c'est une question d'utilité qui reste à examiner par le gouvernement et par les chambres, et qu'il ne doit y avoir ici de posé aucun principe défavorable relativement aux subsides à accorder à des établissements quelconques; ce sera une question de budget, rien de plus.
- L'article 28, tel qu'il a été proposé par la section centrale, est mis aux voix et adopté.
« Art. 29. Les subsides sont subordonnés aux conditions suivantes :
« 1°Que l'établissement accepte le programme d'étude qui sera arrêté par le gouvernement ;
« 2° Que les livres employés dans l'établissement, les règlements intérieurs, le programme des cours, le budget et les comptes soient soumis à l'approbation du gouvernement. »
Il y a à cet article un amendement présenté par M. Osy.
M. Osy. - Je le retire.
M. de Mérode. - Les subsides sont subordonnés aux conditions suivantes :
Que l'établissement accepte le programme d'études qui sera arrêté par le gouvernement, que les livres employés dans l'établissement, les règlements intérieurs, le programme des cours soient soumis à l'approbation du gouvernement.
Il résulte, messieurs, de ces dispositions que dès qu'un établissement d'instruction reçoit un subside, il en ficelé d'une manière complète et ne peut plus améliorer son enseignement avec quelque spontanéité.
Ainsi, d'après d'anciennes coutumes fort abusives, on n'enseigne les langues anciennes que d'après les poètes, les orateurs et les historiens du paganisme. On reporte toute la sympathie des jeunes gens sur les républiques de l'antiquité, sur les passions qui les animaient, sur leur patriotisme exclusif, sur leurs mœurs fort peu recommandables, et les plus beaux livres, les plus instructifs des auteurs chrétiens, restent inconnus aux élèves. Cependant Erasme, qui se connaissait en langue latine, a célébré, sous le rapport du style et de l'éloquence, les œuvres de plusieurs d'entre eux, et quant aux pensées, ces auteurs sont bien préférables aux grands écrivains des nations élevées dans les idées païennes.
Ainsi, messieurs j'ai connu, à l'âge de onze douze ans, les Bucoliques. les Géorgiques; j'ai su que Galatée jetait une pomme à un jeune berger, fort sensible probablement à cette marque d'attention, et que Corydon aimait Alexis, délices de son maître, charme dont je ne comprenais pas l'importance.
N'en concluez pas cependant, messieurs, que j'aie peu de considération pour le célèbre poète de Mantoue. Je l'estime avec plus de raison que n'en a eu le génie du progrès actuel, pour porter aux nues M. Sue, inventeur de ces beaux livres qui ont fait, comme Alexis faisait la joie de Corydon, les délices du libéralisme, victorieux encore en Belgique (la loi actuelle le prouve), mais déjà vaincu à Paris par son héros littéraire.
Cependant, messieurs, grâce au système exclusif des anciennes études en faveur du paganisme, avant l'âge de cinquante ans, je ne possédais pas la connaissance réelle des merveilleux ouvrages du grand évoque d'Hippone, dont mes maîtres ecclésiastiques ou laïques ne m'avaient rien fait expliquer. Il en apprend plus pourtant, pour la véritable et saine appréciation des Romains, que Tite-Live on Tacite.
Dans plusieurs collèges on commence à comprendre le vice du système exclusif que je signale, et l'on adopte, pour les faire traduire aux élèves, des extraits choisis d'auteurs chrétiens, ce qui produit sur eux la meilleure impression.
Il importe donc que cette innovation heureuse ne soit pas contrariée dans les établissements subsidiés, par l'omnipotence que l'article 29 attribue sans nécessité au gouvernement sur le programme des études et le choix des livres.
Les subsides sont pris sur les contributions générales, il ne faut pas les refuser aux établissements dont les chefs auraient des vues différentes et plus larges que celles des directeurs de l'enseignement officiel.
Je voudrais que ces termes : « L'établissement accepte le programme d'études qui est arrêté par le gouvernement, » fussent remplacés par ceux-ci : « L'établissement soumet son programme d'études au gouvernement. »
De la sorte il y aurait invention possible d'un programme à faire prévaloir au lieu d'acceptation nécessaire d'un programme uniforme et stéréotypé.
M. le président. - M. de Mérode propose de dire :
« L'établissement soumet son programme d'études au gouvernement.»
- L'amendement est mis aux voix et n'est pas adopté.
L'article 29 est ensuite mis aux voix et adopté.
« Art. 30, Les communes, soit seules, soit aidées de la province, et en se conformant aux conditions exigées par les articles 6, 7, 8 et 9 de la présente loi, pourront créer ou entretenir des établissements d'instruction moyenne, soit du premier, soit du second degré, dont elles auront la libre administration,
« Les provinces jouiront des mêmes droits. »
M. le président. - Il faut tenir en réserve la mention de l'article 9.
M. Dequesne, rapporteur. - Il en est de même de l'article 10.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, d'après les propositions de la section centrale, auxquelles le gouvernement se ralliera probablement, l'on élargira le cercle des personnes aptes à être nommées professeurs dans les établissements soumis au régime de la loi. Sous ce rapport, il sera donné satisfaction à l'opinion qui voulait plus de liberté ; mais, d'un autre côté, nous avions consenti à ce que les professeurs nommés par les communes non subventionnées pussent être choisies en dehors des candidats diplômés. Si nous étendons maintenant le cercle des éligibles, il est juste aussi que les communes n'aient plus la même latitude ; il convient qu'elles fassent leurs choix parmi les personnes diplômées.
M. Orts. - Messieurs, lorsque j'ai retiré mon amendement à l'article 6, je m'étais réservé le droit de le reproduire dans sa seconde partie, après la concession que je reconnais avoir été faite à mon système par le gouvernement et par la section centrale, à l'article 30, où se trouvait sa véritable place. Je reproduis donc à l'article 30 l'amendement qui tend, au point de vue des dispositions de cet article, à maintenir l'indépendance complète des communes, alors que les communes entretiennent des établissements d'instruction moyenne à leurs frais exclusifs.
Je laisse les établissements subsidiés sous le régime de la loi; mais quant aux établissements communaux , je persiste, comme je l'ai toujours demandé, à les placer en dehors de ce régime, excepté pour l'inspection et le concours. Je reproduis donc ma rédaction primitive, qui est ainsi conçue :
(M. Orts donne lecture de cette proposition.)
Messieurs, je ne pense pas trouver des adversaires à cette proposition; car ces adversaires, de quelque côté de la chambre qu'ils viennent, me paraîtraient ne pas être conséquents avec les principes qu'ils ont émis dans le cours de la discussion.
Si mes adversaires étaient parmi ceux qui ont soutenu avec moi la (page 1359) plus grande partie des dispositions du projet du gouvernement, je leur dirais que mon principe est beaucoup moins large que le principe qui était inscrit dans le projet de loi de 1834, projet que l'on considère généralement comme contenant en germe l'idée du projet de loi de 1850. Je lis en effet dans le projet de 1834 ce qui suit :
« Art. 3. Lorsque les communes établissent des écoles à leurs frais, elles jouissent comme tous les citoyens d'une liberté entière, soit pour nommer, suspendre ou révoquer les instituteurs, soit pour fixer un traitement, soit pour diriger l'instruction. »
Or, qu'est-ce que je veux? Je veux que les communes fassent de l'enseignement privé, quand elles le font à leurs frais exclusifs ; c'est ce qu'on coulait pour l'enseignement primaire par l'article 5 du projet de loi de 1834. Mais, dans le projet de 1834, on allait plus loin pour l'enseignement moyen : on rangeait, parmi les établissements privés, les établissements communaux même subsidiés par l'Etat.
L'article 31 disait : « Les écoles moyennes communales, même lorsqu'elles reçoivent des subsides de l'Etat, sont librement administrées par les communes. » Par conséquent, elles faisaient avec l'argent du gouvernement tout ce que je demande pour elles le droit de faire, avec leur argent exclusivement. Si maintenant les adversaires du projet actuel repoussaient mon amendement, je leur dirais, à eux qui se sont présentés comme les défenseurs des libertés communales, qui ont manifesté une grande confiance dans les autorités communales, parce qu'elles étaient la plus exacte représentation du vœu des pères de famille qui doit être sacré ; je leur dirais : Ne vous défiez pas de la commune, quand je demande pour elle le droit de faire tout ce que chaque père de famille peut faire. Je suis donc en droit de penser que mon amendement ne saurait rencontrer d'opposition d'aucun côté de cette chambre.
M. Delfosse. - Nous ne pouvons pas voter en ce moment l'article 30 qui renvoie aux articles 6, 7, 8,9 et 10. Sur l'article 6 on est tombé d'accord; l'article 7 a été retranché de la loi.
M. Dequesne, rapporteur. - C'est l'article 7 nouveau qui a été adopté.
M. Delfosse. - L'article 8 a également été adopté, mais les articles 9 et 10 n'ont pas encore été votés ; pour savoir si on renverra à ces articles, il faut en connaître le contenu. Je demande que le vote de l'article 30, ainsi que l'amendement de M. Orts, soit tenu en suspens jusqu'après le vote des articles 9 et 10.
M. Orts. - Je me rallie à cette proposition.
- Elle est adoptée.
M. le président. - Nous passons à l'article 31.
La section centrale supprime les paragraphes 2 et 3 du projet primitif.
Le gouvernement s'est rallié à cette proposition.
L'article se réduit au premier paragraphe ainsi conçu :
« Art. 31. La nomination des professeurs de ces établissements, ainsi que celle des professeurs des établissements subventionnés par l'Etat, aura lieu par le conseil communal, conformément à la loi du 30 mars 1836, et, s'il s'agit d'un établissement provincial, conformément à la loi du 30 avril 1836. »
- L'article 31, ainsi amendé, est mis aux voix et adopté.
L'article 32 a été voté dans une précédente séance.
« Art. 33. Un conseil de perfectionnement de l'instruction moyenne, composé de dix membres au plus, est établi auprès du ministre que cet objet concerne.
« Ce conseil est présidé par le ministre ou par son délégué; il est chargé d'aviser sur les programmes des études, d'examiner les livres employés dans l'enseignement ou donnés en prix dans les établissements soumis aux dispositions de la présente loi; il propose les instructions à donner aux inspecteurs, prend connaissance de leurs rapports et délibère sur tous les objets qui intéressent les progrès des études. »
- Plusieurs amendements sont proposés.
M. de Brouckere demande la suppression de l'article.
M. Osy propose l'amendement suivant :
« Un conseil supérieur d'instruction publique est établi près du ministre que cet objet concerne.
« Il est composé :
« De deux ecclésiastiques nommés par les évêques ;
« D'un haut fonctionnaire public, délégué pa rle ministre;
« Des deux inspecteurs de l'enseignement moyen ;
« D'un délégué de chaque université ;
« De deux délégués de l'Académie belge.
« Ce conseil est présidé par le ministre ou son délégué. »
M. Le Hon propose de modifier l'article de la manière suivante :
« Un conseil supérieur de l'instruction moyenne est établi auprès du ministre que cet objet concerne.
« Ce conseil est composé de dix membres, nommés comme il suit :
« 1° Un membre de chaque cour d'appel de Bruxelles, de Gand et de Liège, élu par ses collègues respectivement ;
« 2° Deux membres de l'Académie, l'un de la classe des lettres, l'autre de la classe des sciences, élus respectivement par chaque classe;
« 3° Les autres membres sont nommés par le gouvernement.
« Les membres du conseil des deux premières catégories sont élus pour six ans.
« § 2. Après les mots : ou par son délégué, ajouter ceux-ci :
« Il est chargé de demander son avis sur les règlements relatifs aux examens, aux concours et aux programmes des études, sur les questions de subsides à des établissements communaux ou provinciaux... »
M. Osy. - Messieurs, j'attache beaucoup de prix à l'amendement que j'ai eu l'honneur de proposer. Comment le conseil de perfectionnement sera-t-il composé? Nous n'en savons rien, la loi ne pose aucune règle. L'honorable M. Le Hon, je suis charmé de me trouver d'accord avec lui, veut aussi que la loi détermine les personnes qui feront partie de ce conseil. Il n'y a que le bureau d'administration sur lequel je diffère avec M. Le Hon.
Ma proposition est tirée de la loi de 1834. L'honorable M. Rogier en présentant la loi de 1834 s'est servi des mêmes expressions que moi sauf le 1°. L'honorable M. de Theux dans le projet de 1846 voulait aussi que la loi déterminât comment serait composé le conseil supérieur ; pour avoir la certitude que l'enseignement religieux ne sera pas contraire, il faut que la loi désigne les personnes qui auront la haute direction de renseignement.
Je propose en premier lieu qu'il se trouve deux ecclésiastiques nommés par les évêques. Dans la discussion générale on m'a répondu : Nous ne voulons pas admettre le clergé à titre d'autorité. Voilà le grand mot lancé dans la discussion. Il est tiré du programme du congrès libéral de 1846. C'est là que je l'ai copié.
M. Lesoinne. - Mais c'est très bien !
M. Osy. - Je ne veux pas de ce principe. Comme vous amendez l'article 18, que vous y avez inscrit l'instruction religieuse obligatoire, vous appelez le clergé à surveiller l'enseignement religieux dans les établissements, vous devez l'appeler aussi pour contrôler ce qui se fait dans le conseil supérieur.
On m'a dit : Si vous prenez un membre du clergé catholique, il faudra prendre aussi un membre du consistoire israélite et un pasteur protestant.
Combien avez-vous dans le pays d'israélites et de protestants?
M. Lesoinne. - Cela ne fait rien.
M. Osy. - Il y en a 12,000. Onze mille sont des étrangers habitant momentanément le pays. A Anvers nous avons deux églises protestantes, une allemande, une anglaise. Je ne sache pas qu'il y ait un Belge qui les fréquente. Ce sont tous étrangers. Nous payons les ministres du culte, c'est de toute justice ; je vote toujours ces allocations avec plaisir, parce que je veux que les étrangers puissent célébrer leur culte. Mais pour mille Belges, protestants ou Israélites, faut-il mettre dans le conseil supérieur un rabbin et un membre du consistoire évangélique?
Le gouvernement aura là des agents à lui qui pourront très bien veiller aux intérêts de ces mille dissidents qui auront 20 ou 30 élèves dans les écoles.
Il ne faut donc mettre dans le conseil supérieur que deux ecclésiastiques catholiques. C'est une conséquence de ce que dans l'article 8 nous avons déclaré l'enseignement religieux obligatoire.
Il faut d'abord décider comment seront désignés les membres du conseil supérieur. Si c'est la loi qui les désigne, il sera facile de se mettre d'accord avec M. Le Hon. Cet honorable membre propose de composer le conseil supérieur d'un membre de chaque cour d'appel ; d'un membre de l'Académie (moi également), et de 5 membres nommés par le gouvernement.
Je vous propose un haut fonctionnaire désigné par le gouvernement, deux inspecteurs (agents du gouvernement), un délégué de chaque université et deux délégués de l'Académie belge.
Ainsi la différence, c'est que le gouvernement nommerait cinq fonctionnaires dans le système de M. Le Hon ; j'en propose trois; les autres membres du conseil seront nommés par leurs corps respectifs.
Je crois que nous aurons plus de garanties en fixant par la loi la composition du conseil supérieur qu'en la laissant à l'arbitraire du gouvernement.
M. Tesch (pour une motion d’ordre). - Nous devons tous désirer terminer le plus tôt possible l'examen de cette loi. Nous avons en outre d'assez nombreux travaux. D'un autre côté, le terme de la session approche. Je propose donc à la chambre d'avoir aujourd'hui une séance du soir et de fixer le second vote à samedi.
M. Dumortier. - Il n'y a pas tant de motifs de se presser.
M. Osy. - Evidemment, puisque le sénat n'est convoqué que pour le 13. Ensuite quand on a siégé pendant 5 heures, il ne convient guère d'avoir une séance du soir.
M. Tesch. - Rien n'empêche le sénat, quand il verra la loi votée, de se réunir plus tôt. D'un autre côté, la chambre a d'autres travaux avant la fin de la session. Le mois de mai a commencé; les élections approchent, beaucoup de nos collègues sont dans le cas de devoir se rendre chez eux. Je crois que nous pourrions terminer aujourd'hui une loi dont la discussion dure depuis si longtemps et fixer le vote à samedi.
- La chambre, consultée, décide qu'elle aura une séance du soir qu'elle fixe à 7 1/2 heures.
- Plusieurs membres. - Continuons.
M. Dumortier. - Il est impossible de continuer la séance jusqu'à 5 heures, puisque nous devons avoir séance à 7 1/2 heures.
- Un grand nombre de membres. - Non! non ! Continuons !
M. le président. - La parole est à M. Le Hon.
M. Le Hon. - J'ai soutenu le principe constitutionnel de la loi et le (page 1360) système général de son organisation; mais je crois qu'il est de l'intérêt de la chambre et du gouvernement, pour répondre à toutes les accusations d'arbitraire et d'esprit de parti, dont on ne s'est pas fait faute, de déposer loyalement des garanties morales dans la disposition de l'article 33. Pour cela, il faut placer auprès du ministre autre chose qu'un conseil de savants et de professeurs, nommé tout entier par lui : il faut introduire dans ce conseil l'élément de l'indépendance et de l'impartialité.
C'est le but de mon amendement.
De courtes observations suffiront pour le développer.
D'abord, vous ne vous étonnerez pas que je n'y aie pas fait mention des membres du clergé. Quoique resté étranger aux délibérations du congrès libéral et à son programme, je tiens pour principe vrai et sage que la loi doit se renfermer dans le domaine des choses et des pouvoirs temporels, en laissant à l'action administrative le soin d'établir un concert honorable avec les ministres du culte, sans aliéner aucun des droits, ni manquer à aucun des devoirs de l'autorité civile.
La loi ne doit pas appeler ceux qui sont indépendants de ses prescriptions; le gouvernement peut leur donner accès dans le conseil, s'il les trouve disposés à des relations bienveillantes au sujet de l'enseignement religieux.
Ceci posé, quelle est la mission de ce conseil? L'article 33 en fait un comité consultatif pour les questions en rapport avec les progrès de l'enseignement. Sans changer son caractère, je propose d'étendre son utilité.
Je demande que, par sa composition et ses attributs, il donne, en outre, une sanction morale à l'esprit qui présidera à l'exécution de la loi.
Vous avez placé (article 11) auprès des athénées et des écoles moyennes des conseils d'administration locale. Il est logique, dans l'ordre de la hiérarchie, d'instituer auprès des universités un conseil supérieur. Sans cesser d'être consultatif, il peut prêter aux résolutions ministérielles, dans les matières les plus délicates, l'appui d'une influence acceptée par l'opinion publique.
Le gouvernement formait son conseil de perfectionnement de trois membres au moins et de sept membres au plus, tous nommés par lui.
Je compose le conseil supérieur de dix membres, dont la moitié reste à la nomination exclusive du ministère. Dans ce système, le pouvoir choisit à son gré, comme il l'entend, un nombre de membres presque égal au maximum qu'il avait fixé : mais à côté de cet élément ministériel, que j'appellerai technique, je place un élément électif que j'appelle indépendant.
Je fais entrer dans la partie élective du conseil supérieur les délégués des corps les plus respectables, entourés de la considération du pays, au double point de vue du caractère et de la science ; à ce titre, deux membres de l'Académie, l'un de la classe des lettres, l'autre de la classe des sciences, élus par leurs collègues respectivement, ont leur place marquée dans cette section du conseil ; et comme les objets dont il sera appelé à s'occuper peuvent intéresser successivement toutes les provinces, il m'a paru que les corps placés dans la position la plus convenable pour élire les trois autres membres étaient les cours royales de Bruxelles, de Gand et de Liège, qui se partagent toutes les provinces du royaume.
Dira-t-on qu'un magistrat, très versé d'ailleurs dans la science du droit, peut être étranger aux matières et aux pratiques de l'enseignement? Je réponds que j'ai particulièrement en vue, dans ce choix, la position élevée et indépendante du magistrat; que je l'appelle à faire contrepoids, dans le conseil supérieur, à l'élément ministériel, comme à discuter avec sa haute raison et son expérience générale des affaires les questions soulevées par les représentants du corps enseignant.
Il me paraît difficile de trouver ailleurs une réunion plus complète des conditions de lumières, de considération et d'impartialité.
Les attributions du conseil consistent, aux termes de l'article 33, à « donner un avis sur les programmes des études, à examiner les livres employés dans l'enseignement ou donnés en prix, à proposer les instructions destinées aux inspecteurs, à prendre connaissance de leurs rapports et à délibérer sur tous les objets qui intéressent les progrès des études. »
Je propose de prendre également son avis sur les programmes des examens et des concours, et sur les questions de subsides aux établissements communaux et provinciaux. Il y a dans l'ensemble de la mission du conseil ainsi agrandie des points délicats dont on ne saurait entourer la solution de trop de garanties.
Il faut, par exemple, dans ma pensée et dans le but que j'assigne à mon amendement, que la création de nouveaux cours ou la modification des cours existants (autorisée par l'article 24) offre toujours un caractère d'utilité réelle, de bonne et loyale administration et ne puisse être considérée comme l'abus d'une force rivale envers des établissements prospères de l'enseignement libre.
Il faut aussi que les résolutions qui seront prises en matière de subventions aux établissements provinciaux et communaux d'instruction se présentent en tout temps à l'appréciation de l'opinion publique, avec la sanction morale d'avis indépendants.
Qu'on ne l'oublie pas :la loi que nous faisons doit être exécutée par tous les ministères, assez différents de principes et de couleur, que le mouvement des majorités politiques peut élever successivement au pouvoir.
Quels qu'ils soient, leur action administrative ne subira pas d'entraves puisque la majorité appartiendra toujours dans le conseil aux délégués du gouvernement ; mais l'adoption de mon amendement serait un acte de prudence à l'égard de l'avenir en même temps qu'une réponse loyale aux défiances du présent.
M. Delfosse. - Je me suis déjà expliqué dans la discussion générale sur la partie de l'amendement de l'honorable M. Osy, qui ferait entrer de par la loi deux ministres du culte dans le conseil de perfectionnement.
Les ministres des cultes pourront faire partie du conseil de perfectionnement, comme les autres citoyens; rien n'empêche le gouvernement de les choisir. On m'a fait dire dans une certaine presse, fort charitable, que j'entendais exclure les ministres des cultes. Il n'y a rien dans mes paroles qui puisse justifier une telle supposition.
Le ministre de l'intérieur aura le droit d'appeler au conseil de perfectionnement les ministres des cultes comme tous les autres citoyens.. Tous auront le même droit, mais je ne veux pas que les ministres des cultes y entrent par privilège. Je ne veux de privilège pour personne.
Il est une autre partie de l'amendement de M. Osy sur laquelle je ne me suis pas encore expliqué et qui n'est pas plus admissible que celle dont je viens de parler. M. Osy voudrait faire entrer dans le conseil de perfectionnement un délégué de chaque université.
Savez-vous, messieurs, ce que l'honorable M. Osy propose? II propose de faire pour l'enseignement moyen ce que vous avez refusé de faire pour l'enseignement supérieur. Vous avez refusé de donner, par la loi d'enseignement supérieur, des droits aux universités libres, vous n'avez pas voulu les reconnaître par la loi, lorsqu'il s'agissait de la composition du jury d'examen, c'est-à-dire lorsqu'il s'agissait d'un objet de leur compétence.
Vous sentez que lorsqu'il s'agit de l'enseignement moyen, vous ne pouvez raisonnablement donner aux universités libres un droit que, par des raisons très plausibles, vous avez refusé de leur attribuer lorsqu'il s'agissait de l'enseignement supérieur.
Qu'il ne soit donc plus question de l'amendement de M. Osy.
L'honorable M. Le Hon a déposé une proposition à laquelle il m'est également impossible d'adhérer. L'honorable membre voudrait faire entrer dans le conseil de perfectionnement des membres des cours d'appel. Messieurs, s'il s'agissait d'un corps ayant des attributions graves, ayant des droits sérieux, je concevrais les précautions que l'honorable M. Le Hon veut prendre, les garanties qu'il réclame.
Mais remarquez bien qu'il s'agit d'un corps qui n'est appelé qu'à donner des avis. Le conseil de perfectionnement est là pour éclairer le ministre, mais c'est le ministre qui prend les résolutions. Eh bien, pour éclairer le ministre, que faut-il? Il s'agit d'enseignement : faut-il des jurisconsultes? Non, messieurs, il faut des hommes de la partie, des hommes ayant fait une étude spéciale des matières de l'enseignement. D'un autre côté, on enlèverait à l'administration de la justice des conseillers de cour d'appel qui n'ont pas trop de leur temps pour l'accomplissement de leur mission.
En France on a fait entrer dans le conseil supérieur des membres de l'ordre judiciaire; mais là il fallait des garanties, parce que le conseil supérieur pèse, non seulement sur l'enseignement de l'Etat, mais même sur l'enseignement libre. Il fallait là des garanties contre le gouvernement. Mais ici, je le demande, à quoi bon des garanties du genre de celles qu'on demande? A quoi bon faire entrer des magistrats inamovibles dans un corps appelé simplement à donner des avis que le gouvernement peut suivre on ne pas suivre?
Je crois, messieurs, que ce qu'il y a de mieux à faire, c'est d'adopter purement et simplement l'article 33 tel qu'il est proposé par la section centrale.
Je concevrais que l'on demandât comme garantie qu'il y eût une présentation de candidats par certains bureaux d'administration, mais je ne conçois pas qu'on fasse intervenir des magistrats inamovibles. Cette garantie, que l'on prend quand il s'agit de statuer sur la fortune, la vie, l'honneur des citoyens, on ne peut pas l'exiger pour un corps qui se borne à donner des avis au ministre sur des questions d'enseignement; ce serait pousser les précautions beaucoup trop loin.
M. de Theux. - Messieurs, un grand nombre de nos collègues sont déjà sortis de la salle. Cet article est réellement un des articles essentiels de la loi. Quoique j'aie échoué dans plusieurs propositions que j'ai faites, je veux cependant essayer d'améliorer la loi autant qu'il est en mon pouvoir. C'est en ce sens que je désire prendre la parole sur cet article, mais je désire communiquer mes observations à la chambre entière.
Je demande donc que la séance soit remise à ce soir.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est suspendue à quatre heures trois quarts.
A 7 heures 3/4, la séance est reprise.
(page 1360) M. Le Hon. - Messieurs, les objections de l'honorable M. Delfosse contre mon amendement me donnent lieu de penser que je n'ai pas assez clairement expliqué son caractère et sa portée.
Qu'ai-je voulu? Pas autre chose qu'entourer de garanties morales l'exécution de loi. Après avoir fortement soutenu le principe sur lequel elle repose, j'ai pensé qu'il fallait que ses applications fussent mises à l'abri, même dans les esprits les plus prévenus du soupçon d'arbitraire, d'esprit de parti et de tendance au monopole.
Or, il m'a paru que la création d'un simple conseil de perfectionnement (page 1361) composé de 3 à 7 membres à nommer par le ministre ne présentait pas les caractères d'impartialité et d'indépendance nécessaires pour constituer la sanction morale que je cherchais.
C'est pourquoi j'ai proposé un conseil supérieur de dix membres nommes, pour la moitié seulement, par le ministère et j'ai agrandi ses attributions.
L'honorable M. Delfosse s'est attaché à la deuxième partie de mon amendement, celle relative à la composition du conseil.
Je ne discuterai donc pas la première, celle des attributions nouvelles, que j'ajoutais au paragraphe 2 de l'article 33.
J'ai dit que l'impartialité présumée d'un comité consultatif donnait du poids et de l'autorité aux résolutions que le gouvernement prendrait d'après ses avis; que le pouvoir subit les vicissitudes et les changements auxquels sont exposées les majorités politiques, que pour asseoir sur les bases de l'intérêt général l'exécution de la loi organique d'un grand principe, il fallait y mettre des entraves à l'arbitraire de l'esprit de parti, sans gêner les mouvements réguliers de l'action administrative.
J'en ai conclu qu'un conseil supérieur qui réunirait dans son organisation l'élément ministériel ou technique et l'élément électif ou indépendant, de manière à laisser la majorité aux délégués du pouvoir central, réaliserait une combinaison heureuse pour le pouvoir lui-même.
Je crois avoir atteint ce but en faisant représenter cinq voix sur dix dans le conseil, par les élus de certains corps très haut placés dans la considération publique et jouissant d'une juste réputation d'indépendance et de lumières.
Comme je l'avais prévu, on m'oppose que des magistrats de l’ordre judiciaire peuvent être fort honorables, fort éclairés, et cependant être restés étrangers aux matières de l'enseignement public : aussi n'est-ce pas au point de vue de cette expérience spéciale, que je propose de les appeler au conseil. La partie technique de l'enseignement a dans le conseil cinq et même six représentants à la nomination du ministre : mais les élus de la magistrature et des corps savants, en apportant aux délibérations les lumières de la saine théorie et du savoir, forment un contrepoids à l'action naturelle du pouvoir sur les autres membres.
On m'a objecté aussi que le conseil supérieur dont je parle n'était pas de même nature que le conseil créé en France, et au sein duquel on avait, en effet, appelé des magistrats de la cour de cassation. Si l'honorable membre qui m'a fait cette objection voulait parcourir les attributions du conseil supérieur français, il verrait que dans presque toutes les matières, il s'agit d'un concours consultatif; qu'il est chargé de donner son avis sur les règlements relatifs aux examens, aux concours et aux programmes d'études dans les écoles publiques, et en général sur tous les arrêtés portant règlement pour les établissements d'instruction publique;
Sur la création des facultés, lycées et collèges :
Sur les livres qui peuvent être introduits dans les écoles publiques, etc., etc., etc. ;
Qu'il n'exerce qu'une seule attribution de juridiction contentieuse, celle de statuer, en degré d'appel, sur les décisions des conseils académiques, et que les cas où elle s'exerce sont infiniment plus rares que ceux des catégories précédentes.
Veuillez observer que la combinaison que je propose n'est préférable, à mes yeux, que parce que trois cours d'appel se partagent entre elles toutes les provinces, et qu'une question de subside, de programme, de choix de livres, de concours ou d'examen, quelque établissement qu'elle intéresse, trouve dans le conseil un magistrat en position de recueillir et d'apporter des formations locales.
Au reste, je ne tiens pas absolument aux trois cours d'appel. Si l'on pense que les déplacements de deux magistrats peuvent nuire à l'administration de la justice, eh bien ! il y a une cour de cassation et une cour d'appel à Bruxelles; s'il vous convient mieux d'en appeler deux de la première et une de la seconde, je vous le concède. Cette voie conduira âu même but : quel que soit le moyen, je suis convaincu que la combinaison que je propose sera utile au gouvernement, utile à l'effet moral de la loi, utile à son exécution impartiale.
Je suis pénétré de cette conviction par cela même que, malgré la plus vive opposition, nous avons consacré d'une manière large, franche et nette, le droit constitutionnel de l'Etat sur l'enseignement public. Le sentiment d'intérêt général qui nous a guidés doit laisser son empreinte dans les dispositions organiques de la loi.
Réfléchissez aux opinions si diverses qui, dans l'avenir, seront appelées à diriger son exécution, et vous reconnaîtrez qu'on ne saurait l'entourer de trop de garanties, ne fût-ce même que pour rassurer dans le présent les consciences les plus timorées et les esprits les plus contraires à son principe.
Le ministère n'a aucune espèce d'intérêt à repousser la combinaison de mon amendement, puisqu'elle lui vient puissamment en aide, quant à l'autorité morale de la loi sur l'opinion publique, et qu'elle sauvegarde toute son action administrative pour en assurer les bons effets et les faire comprendre au pays.
Tontes ces considérations me déterminent h persister.
M. Delfosse. - L'honorable M. Le Hon se trompe quand il croit qu'il n'y a que de très légères différences entre les attributions du conseil supérieur en France et celles du conseil de perfectionnement qu'il s'agit de créer.
L'honorable membre vient de dire que le conseil supérieur en France n'est, eu général, appelé qu'à donner des avis, que ce n'est que dans des cas très rares qu'il est appelé à statuer en dernier ressort sur les décisions du conseil académique.
Je ferai remarquer à l'honorable membre que le conseil supérieur prononce en appel sur les affaires contentieuses relatives à l'obtention des grades, aux concours devant les facultés, à l'ouverture des écoles libres, aux droits des maîtres particuliers et à l'exercice du droit d'enseignement; sur les poursuites dirigées contre les membres de l'instruction secondaire publique et tendant à la révocation avec ou sans l'interdiction d'exercer la profession d'instituteur libre, et dans les cas déterminés par la présente loi, sur les affaires disciplinaires relatives aux instituteurs primaires publics ou libres.
Voilà, messieurs, des attributions très importantes, d'une haute gravité, pour lesquelles on comprend qu'il ait fallu exiger des garanties. Il n'y a pas de comparaison à faire, quant aux attributions, entre le conseil supérieur qui existe en France et le conseil de perfectionnement qui va être établi par notre loi; ce conseil de perfectionnement ne sera que consultatif, c'est le ministre qui prendra les résolutions.
J'ai donné dans l’autre séance quelques raisons pour que la chambre n'adopte pas la proposition de l'honorable M. Le Hon, mais je ne les ai pas données toutes, parce que l'heure était avancée.
Il y a pour moi une raison déterminante ; je ne veux de privilège pour personne; je n'en ai pas voulu pour les membres du clergé, je ne puis pas en vouloir pour les membres des cours d'appel ; tous ceux qui seront dignes d'entrer dans le conseil supérieur pourront y être appelés.
Nous avons fait une loi sur les incompatibilités, entre autres motifs pour que les mêmes personnes ne soient pas surchargées d'attributions. Quand on a trop de choses à faire, on n'en fait bien aucune.
De ce qu'on fait partie d'un corps, ce n'est pas une raison pour qu'on soit apte à remplir toute espèce de fonctions; ce que je dis des membres de l'ordre judiciaire s'applique également aux membres de l'Académie; on peut, sans être de l'Académie, avoir autant et plus de mérite que bien des académiciens ; il y a des savants très distingués qui ne font pas partie de l'Académie.
Il convient que le ministre qui sera chargé de composer le conseil de perfectionnement puisse choisir partout, dans l'enseignement de l'Etat comme dans l'enseignement libre, dans les cours d'appel comme dans les tribunaux de première instance, dans les académies comme dans les autres classes de citoyens. J'ai déjà dit et je répète que des ministres des cultes pourront y être appelés. Je ne veux exclure personne, comme je ne veux admettre personne à titre de droit.
M. De Pouhon. - La loi en discussion sera probablement votée dans cette séance. Nous devons nous préoccuper de son exécution et faire en sorte qu'elle soit accueillie avec confiance par le pays. Il serait bien regrettable qu'elle se présentât à grand nombre de chefs de famille avec le préjugé qu'en dehors de cette enceinte, on a cherché à lui imprimer.
Le gouvernement exécutera la loi avec loyauté et impartialité; il l'exécutera avec la déférence que commandent les sentiments religieux du pays. J'en ai pour garants la modération qu'a toujours montrée à cet égard l'honorable ministre de l'intérieur, depuis le commencement do sa carrière administrative, et l'esprit de conciliation qui a guidé le gouvernement dans la discussion du projet de loi, disposition à laquelle j'ai regretté de ne pas voir l'opposition répondre convenablement.
Ce qui s'est passé dans nos débats, et plus encore les manifestations qui ont eu lieu en dehors, nous font un devoir de donner un gage des bonnes intentions qui animent les auteurs de la loi.
Le conseil de perfectionnement aura à donner son avis sur tout ce qui concerne la direction de l'enseignement; vous avez rendu l'enseignement religieux obligatoire dans les collèges. Qui pourrait, si ce n'est le prêtre, éclairer le conseil sur les intérêts de cette branche des études, juger de l'orthodoxie des livres présentés? Il pourrait échapper à l'attention de laïques des choses qui auraient une importance réelle au point de vue du sentiment religieux.
Je propose donc que le clergé soit appelé à déléguer un de ses membres pour faire partie du conseil de perfectionnement.
Dans un conseil qui peut se composer de dix membres, il n'est pas à supposer que l'un d'entre eux fasse prévaloir des exigences qui ne seraient pas légitimes.
Voulût-on admettre que le clergé ne répondît pas à l'appel du gouvernement, je dirai que, résistant aujourd'hui, il pourrait céder demain, et qu'en cas d'abstention de sa part, le conseil serait de neuf membres au lieu de dix. La loi et le gouvernement auraient fait preuve de respect envers la religion et ses représentants, les torts seraient évidemment du côté de ceux-ci.
Si le conseil ne comprend pas un membre du clergé pour veiller aux intérêts religieux, il laissera le champ libre aux accusations, aux méfiances; des bruits se répandront de projets et de décisions hostiles à l’Eglise, qui n'auront pas le moins du monde occupé le conseil. La présence d'un membre du clergé éloignerait tout soupçon et tout sujet d'inquiétude. Vous auriez fait beaucoup pour la bonne harmonie désirable entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel.
M. le président. - Voici l'amendement proposé par M. De Pouhon :
« L'épiscopat sera invité à déléguer un de ses membres pour faire partie du conseil supérieur. »
M. Delehaye. - Je désire, messieurs, autant que l'honorable membre qui vient de se rasseoir que le clergé fasse partie non pas seulement du conseil de perfectionnement, mais encore du bureau d'administration. Et pour ma part, comme conseiller communal, je déclare que (page 1362) je ne négligerai rien auprès de mes collègues pour que, parmi les candidats, ils comprennent quelques membres du clergé; cela sera utile, c'est une garantie d'impartialité que nous donnerons à toutes les croyances.
Je désire que le gouvernement en agisse de même, quant à la formation du conseil de perfectionnement, et certes son esprit de conciliation lui fera consentir à en agir ainsi; mais messieurs, il ne faut pas que vous prescriviez dans la loi une disposition dont vous ne pouvez pas assurer l'exécution.
Je me résume, messieurs, je fais de vœux pour que le clergé soit compris dans le bureau d'administration comme dans le conseil de perfectionnement; sa présence y sera utile. Elle donnera une garantie à tous les pères de famille. Mais n'imposez pas plus au clergé qu'à tout autre corps l'obligation de nommer l'un ou l'autre membre. Laissons la composition à un pouvoir qui en portera toute la responsabilité.
M. de Theux. - Lorsqu'on propose d'instituer par la loi un conseil de perfectionnement, un conseil consultatif pour l'enseignement moyen, il me paraît conforme aux principes de déterminer dans la loi quelle est la règle pour la composition de ce conseil.
Sous ce rapport, je donnerai mon assentiment aux observations présentées par l'honorable M. Le Hon, sauf à discuter les détails de la composition. A cet égard, je ferai une seule objection. Je crois que la loi ayant institué des jurys pour conférer le grade d'élève universitaire, jury en quelque sorte appelé à contrôler les résultats des études des collèges, il serait bon de faire entrer dans la composition du conseil supérieur quelques membres de ces jurys.
Je crois qu'ils seraient plus aptes que tout autre à donner au gouvernement des avis, des renseignements très utiles.
J'aborderai premièrement la question principale soulevée par l'amendement de l'honorable M. Osy, auquel je donnerai mon appui.
J'ai dit, dans la discussion générale, qu'il me paraissait d'une haute importance d'appeler les ministres des cultes à se faire entendre dans le conseil supérieur sur les intérêts de l'enseignement religieux dans les athénées et dans les collèges.
Et, ici, je ne suis pas exclusif. Ainsi, par exemple, j'admets la proposition de l'honorable M. Osy : deux délégués du culte catholique, parce que c'est le culte de la presque totalité du pays. Il y a très peu de dissidents qui fréquentent les collèges. Mais, je le répète, je ne suis pas exclusif : ainsi M. le ministre de l'intérieur, à mon avis, fera très bien d'entendre séparément les ministres des cultes dissidents pour se concerter avec eux au sujet des garanties religieuses qu'ils peuvent désirer pour les enfants appartenant à leurs cultes respectifs.
Bien entendu qu'il n'y aura pas dans un même établissement l'enseignement religieux de cultes différents. Ce serait donner lieu au grief qui a agité l'Irlande. Je veux parler des établissements mixtes que le gouvernement anglais, malgré tous ses efforts, n'a pu parvenir à organiser. Mais relativement aux cultes dissidents, il y aura concert avec leurs ministres pour l'enseignement religieux des élèves de leur communion en dehors des établissements.
Sous ce rapport, je désire que le gouvernement soit impartial.
Si nous avons insisté pour l'enseignement de notre religion dans les athénées, nous ne voulons pas exclure de ce bienfaits les cultes dissidents.
L'honorable M. Delfosse a présenté une objection qu'il considère comme décisive. Il ne veut de privilège pour personne, ni pour la magistrature, ni pour le clergé, dans le conseil de perfectionnement. La réponse est très facile. Ce n'est pas d'un privilège qu'il s'agit. Il s'agit, dans le conseil de perfectionnement, de deux intérêts bien distincts. L'un a pour objet le perfectionnement littéraire et scientifique; l'autre a pour objet l'enseignement religieux.
Je pense qu'à très peu d'exceptions près, nous sommes d'accord en ce qui concerne l'enseignement religieux. Il appartient exclusivement aux ministres des différents cultes, ce n'est pas un privilège que nous leur accordons. Nous reconnaissons une chose qui existe de fait. Il n'existe pas de culte sans la direction donnée par les ministres de ce culte. Chaque culte a sa hiérarchie, ses ministres.
Remarquez bien que le conseil, d'après la loi organique, n'est que consultatif. Les ministres des cultes n'auront pas à délibérer sur des intérêts civils, ils ne le désirent pas. Ils ont assez de responsabilité dans leur mission toute spéciale, pour ne pas désirer s'immiscer dans les intérêts civils.
Tout ce qu'on demande c'est que, comme dans la loi sur l'instruction primaire le clergé est appelé, à titre consultatif, dans la commission centrale, il le soit également dans le conseil de l'enseignement moyen.
Il y a deux manières de donner satisfaction à l'enseignement religieux, c'est que l'on adopte la proposition de l'honorable M. Osy, d'après laquelle les ministres des cultes délibérant avec les membres laïques, faisant connaître leurs observations, entendant contradictoirement les observations des membres laïques et le ministre, ayant entendu les observations respectives, juge s'il y a lieu de faire droit à ces observations, puisque à lui seul appartient l'exécution de la loi.
En France on a été beaucoup plus loin ; on a admis les ministres des différents cultes dans un conseil délibérant, dans un conseil statuant sus différentes questions d'ordre civil.
Ce n'est pas ce que nous demandons. Nous demandons uniquement qu'ils soient entendus sur les intérêts religieux.
L'honorable ministre de l'intérieur, dans la discussion générale, a en quelque sorte indiqué comme obtenant sa préférence, le système qui est suivi pour l'instruction primaire. Il s'est loué des bons effets que produit la commission centrale de l'instruction primaire, et je ne pense pas qu'il ait jamais eu à regretter dans cette commission centrale la présence des ministres du culte. Bien au contraire, je crois que M. le ministre n'a en qu'à s'en féliciter.
Eh bien, si l'honorable ministre de l'intérieur voulait organiser pour l'enseignement moyen une commission centrale d'après les principes de la loi d'instruction primaire, peu m'importent les moyens ; tout ce que nous demandons, c'est que la loi ayant à donner des garanties à l'intérêt moral, à l'intérêt religieux, tout aussi bien qu'à l'intérêt littéraire et scientifique, il y ait une disposition quelconque, peu importe dans quels termes elle soit formulée, qui consacre le principe de l'admission du clergé dans le conseil consultatif. Je crois que cela est entièrement conforme aux principes, qu'il n'y a aucune espèce de privilège, puisque l'intérêt religieux est un intérêt tout spécial en dehors du domaine laïque.
Je ne pousserai pas plus loin ces observations. J'avais déjà présenté quelques considérations dans la discussion générale, et je pense que raisonnablement on ne peut faire aucune espèce d'objection, que c'est une garantie que la législature donne au pays, donne aux pères de famille.
- La clôture est demandée.
M. de Brouwer de Hogendorp. - J'ai demandé la parole contre la clôture. Je n'ai pas encore parlé; je suis inscrit pour parler en faveur de l'amendement de M. de Brouckere, qui demande la suppression de l'article 33; je trouve l'établissement d'un conseil de perfectionnement une mesure inutile et même dangereuse. (Interruption.) Si vous êtes si impatients de clore, messieurs, je ne m'imposerai pas à la chambre, d'autant plus que je vois bien que l'amendement que je voudrais soutenir, parce que c'est, à mon avis, le meilleur, le seul bon, a peu de chances d'être admis. Il m'a suffi de faire connaître mon opinion.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je demande à donner quelques explications.
Messieurs, les divers amendements renvoyés à la section centrale ont été examinés par elle avec soin, et elle a conclu au maintien des propositions du projet de loi. Je pense aussi que ces propositions doivent être maintenues au projet, et je suis persuadé qu'après les explications que je vais donner, la grande majorité sera d'avis de les maintenir.
Le conseil de perfectionnement est, à la vérité, à la nomination du ministre. Il peut choisir les membres de ce conseil parmi toutes les classes de citoyens. Il choisira les hommes les plus aptes par leurs connaissances, leur expérience, leurs lumières à siéger utilement dans le conseil de perfectionnement.
Du moment où vous imposez certains choix au gouvernement, du moment où le gouvernement n'est pas libre dans son action, qu'un autre pouvoir vient se mêler au sien, une partie de la responsabilité du gouvernement disparaît ; il se retranche derrière ce conseil mixte ; el lorsqu'il a à rendre compte dans cette chambre de l'état de l'instruction publique et de la direction qui lui a été imprimée par l'autorité publique, il peut rejeter une partie de la responsabilité sur le conseil supérieur qu'il n'aura pas eu la liberté de composer.
Messieurs, cette responsabilité du gouvernement n'est pas chose insignifiante. Elle va très loin. N'avons-nous pas vu dans le cours même de cette discussion le ministre interpellé, non pas sur l'ensemble de l'enseignement public, non pas sur la direction d'un établissement d'enseignement moyen, non pas sur le cours donné par un professeur, non pas même sur tel ou tel incident arrivé dans un collège, mais sur une phrase échappée à un professeur dans un discours en dehors de l'enseignement. Voilà jusqu'où va, messieurs, la responsabilité du gouvernement en matière d'enseignement public, et dans une telle circonstance comme dans toute autre, si le gouvernement venait vous dire : En effet, tel établissement décline, tel cours ne convient pas, tel professeur va trop loin dans l'expression de ses opinions, mais le conseil supérieur a trouvé que cela convenait, le conseil de perfectionnement a excusé, a approuvé; messieurs, qu'auriez-vous à objecter à une pareille défense de la part du ministre qui ne serait pas maître de la composition du conseil de perfectionnement?
M. de Mérode. - Nous ne devons rien dire.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Oui, vous devez tout dire, et je pense que vous usez bien largement de la faculté. C'est, au contraire, pour laisser la responsabilité du ministre toute entière, pour laisser le ministère entièrement livré à vos discours et à vos attaques que je demande pour lui la faculté de nommer librement le conseil de perfectionnement. Je vous demande de ne pas l'abriter derrière un pouvoir irresponsable, de lui laisser toute liberté, et en même temps sa responsabilité tout entière.
Messieurs, l'amendement de l'honorable comte Le Hon, qu'il a d'ailleurs justifié par de solides raisons, renfermerait les inconvénients que je viens de signaler. Il partagerait en quelque sorte la responsabilité du gouvernement. En deuxième lieu, il a un caractère exclusif que nous ne pouvons pas accepter, car si nous admettions d'office des membres des cours d'appel, des membres de l'Académie, on pourrait se demander pourquoi nous n'admettons pas également des membres du clergé qui eux aussi ont une aptitude à faire partie du conseil de perfectionnement. Or, nous ne voulons admettre personne d'autorité, mais nous ne voulons non plus exclure personne.
(page 1363) L'honorable M. Osy m'a reproché de ne pas reproduire ici les dispositions du projet de 1834. Ce projet offrait une lacune : il admettait des membres de l'Académie et des membres des corps judiciaires, mais il n'admettait pas de ministres du culte. Je vais m'expliquer sur ce dernier point.
Nous ne devons pas, messieurs, tomber dans la faute qui a été commise en France et contre laquelle les évêques protestent et avec raison.
Il y a quelque chose de faux, quelque chose d'absurde, même à vouloir réunir dans un seul conseil les ministres de tous les cultes pour s'y entendre sur la meilleure direction à donner à l'enseignement de la religion; il y a là quelque chose qui révolte le bon sens. Aussi vous avez vu la plupart des évêques, même ceux qui se résignaient à la loi, déclarer qu'ils se réservaient bien formellement de ne pas entrer dans le conseil, de ne pas se mêler à cette espèce d'amalgame monstrueux. Lisez les discussions de l'Assemblée nationale et de la presse et vous verrez que cette disposition a révolté les hommes les plus orthodoxes de France.
M. de Mérode. - L'évêque de Langres est orthodoxe.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Eh bien, je tiens ici un de ses discours, je vais vous le passer et vous verrez qu'il fait des réserves expresses. Voici d'abord comment s'explique Mgr. Parisis. évêque de Langres, sur l'intervention imprudente du clergé dans la direction de l'enseignement public :
« J'ai assez réfléchi pour savoir ce que valent à la religion les faveurs de la politique; à Dieu ne plaise que j'attaque ici aucun des pouvoirs déchus, bien moins encore ceux pour lesquels je conserve le plus profond et le plus affectueux respect; mais je n'ai pas oublié que depuis 1822, par exemple, jusqu'en 1825, on voulut communiquer au clergé une partie du pouvoir universitaire; je n'ai pas oublié que cette participation au pouvoir fut regardée comme une faveur; que depuis cette époque les passions irréligieuses allèrent toujours en croissant, et qu'enfin on fut réduit à faire payer à la religion ces prétendues faveurs par de nouvelles entraves. »
Voici maintenant les réserves :
« Comme la question est grave et comme ma position personnelle est grave aussi, je ne veux pas descendre de la tribune sans avoir franchement fait quelques réserves.
« La première, c'est que la loi conservera certaines dispositions importantes adoptées par la commission et indispensables, essentielles à la liberté religieuse.
« La seconde (je désire être bien compris de tout le monde ici), la seconde réserve, c'est que les décisions doctrinales qui seraient prises, par exemple, à l'occasion de l'examen des livres, par ces conseils laïques parmi lesquels siégeront quelques membres de l'épiscopat, ne pourront jamais ni obliger la conscience, ni gêner l'enseignement des évêques comme des pasteurs des âmes.
« La troisième enfin, c'est que , comme c'est une voie nouvelle dans laquelle vous nous engagez, comme vous-mêmes vous ne pouvez pas en calculer toutes les chances, s'il arrivait que dans ces conseils on fît aux évêques des conditions inacceptables pour leur foi, ils s'en retireraient. »
L'honorable M. de Theux vient de nous dire que peu lui importait le moyen, pourvu que le clergé fût appelé à se faire entendre auprès du conseil de perfectionnement. Eh bien, je crois qu'il convient que le clergé fasse connaître au gouvernement et, au besoin, au conseil de perfectionnement la manière dont l'enseignement religieux est donné dans les établissements publies auxquels il donnera son concours. Le clergé, en vertu de l'article 8, est invité à donner et à surveiller...
- Un membre. - Ou à surveiller.
- Un autre membre. - A inspecter.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - A donner ou à surveiller , à donner et à surveiller, à surveiller ou à inspecter, si votre opposition se réduit à ces distinctions, je pense qu'il serait très facile de lever cette dernière pierre d'achoppement.
Messieurs, le gouvernement par l'article 8 reçoit le commandement de la loi, d'inviter le clergé à donner, à surveiller, à inspecter l'enseignement religieux, dans les établissements soumis au régime de la présente loi. En exécution de l'article 8 qu'est-ce que le gouvernement aura à faire? Il aura, chaque année, à s'adresser au clergé pour connaître d'une manière générale comment l'enseignement religieux est donné. Il demandera des rapports et, au besoin il invitera le clergé à faire connaître au conseil de perfectionnement ses vues d'amélioration en ce qui concerne l'enseignement religieux.
Voilà comment je conçois l'exécution de l'article 8. Le gouvernement invitera le clergé à faire connaître la manière dont l'enseignement religieux est donné, à présenter toutes ses observations, et certainement, si le clergé trouvait que certains collèges laissent à désirer, il ne manquera pas de les signaler. Son droit d'observation est illimité. Je parle du clergé, je devrais parler des ministres des cultes.
Sous ce rapport, il y aurait quelque chose d'irrégulier à inviter les ministres des cultes à siéger tous ensemble dans le conseil de perfectionnement. On les invitera à venir, successivement, à des heures différentes, s'expliquer sur la manière dont l'enseignement religieux est donné. Voilà comment les choses se passeront.
Le gouvernement s'entendra avec le clergé sur les conditions auxquelles il pourra donner honorablement et efficacement son concours. Eh bien, si les ministres des cultes expriment le désir d'être entendus dans le conseil de perfectionnement, le gouvernement ne demandera pas mieux que de les y appeler. De cette manière nous éviterons certaines difficultés que nous devons chercher à écarter de la loi.
M. Osy (pour une motion d'ordre). - Messieurs, d'après ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur, je crois que nous nous rapprochons. La différence qu'il y a entre le ministre et moi, c'est que le ministre a des intentions, et que moi je veux les intentions dans la loi. J'ai donc l'honneur de proposer de dire, dans mon amendement, au lieu des mots :. « les deux ecclésiastiques nommés par les évêques, » les mots : « les évêques seront appelés à se faire représenter auprès du conseil de perfectionnement par des délégués qui y assisteront, avec voix consultative, pour faire connaître ce qui concerne l'instruction religieuse dans les établissements d'instruction moyenne, soumis au régime de la présente loi. »
- L'amendement est appuyé.
M. Dechamps. — L'honorable M. Osy n'a fait que traduire en un amendement la déclaration que vient de faire M. le ministre de l'intérieur et qu'il avait déjà faite dans la discussion générale. La question est donc de savoir si nous devons nous borner à faire des vœux pour que telle ou telle idée se réalise, ou si la législature a une volonté à exprimer; dans une question aussi importante, il ne suffit pas de savoir quelle est l'intention du ministre de l'intérieur, assis en ce moment sur le banc ministériel, mais il faut que la législature dise quelle décision elle veut prendre.
Je ne vois aucune objection raisonnable contre l'amendement de l'honorable M. Osy; je comprends que des objections pourraient être faites relativement au premier amendement de l'honorable membre ; là, on fait entrer d'autorité le clergé dans le conseil supérieur. Je ne recule pas devant le principe; mais je comprends que là on était en présence de difficultés d'exécution ; sans doute, il n'est pas en Belgique de collège où les élèves catholiques ne soient en immense majorité; mais je le répète, par respect pour l'égalité constitutionnelle des cultes, nous étions en présence d'une assez grave difficulté d'exécution. Mais par suite du nouvel amendement de l'honorable M. Osy, la chose est très simple : les chefs des cultes seront, comme l'a déclaré M. le ministre de l'intérieur, appelés à se faire représenter, à titre de voix consultative, dans le conseil supérieur, pour faire au conseil et au ministère ses observations sur tout ce qui concerne l'enseignement religieux dans les établissements soumis au régime de la loi.
Eh bien, quelles objections avez-vous donc contre cette proposition? L'honorable M. Delehaye a dit tout à l'heure qu'on ne pourrait pas nommer le clergé dans la loi, par le conseil supérieur Je lui répondrai que nous l'avons nommé à l'article 8; à l'article 8, nous avons déclaré que le clergé sera appelé à donner ou à surveiller l'enseignement religieux ; quelle difficulté y a-t-il à dire que le clergé sera appelé à faire connaître au conseil supérieur les résultats de sa surveillance? C'est la sanction de l'article 8.
Je trouve d'abord cet avantage dans l'adoption de l'amendement dz l'honorable M. Osy : c'est que la législature aura posé un acte de confiance à l'égard du clergé. Je le répète, il ne suffit pas ici de l'intention d'un ministre qui passe; l'honorable M. Rogier peut avoir l'intention d'appeler le clergé dans le conseil supérieur, comme il est appelé dans la commission centrale d'instruction primaire; cela est fort bien, mais cela ne lie pas le successeur de l'honorable M. Rogier. C'est un singulier système dans lequel on entre : c'est de déléguer tout au gouvernement, dans une matière aussi délicate ; au lieu qu'il n'y a aucun inconvénient à ce que la législature exprime son vœu et le transforme en volonté.
L'honorable M. Lebeau, dans la discussion générale, a dit une chose très vraie; il a dit : Il ne faut pas qu'on donne au clergé une mission d'espionnage dans tout ce qui se passe dans le collège en dehors de l'enseignement religieux. Effectivement si vous ne donnez pas à l'article 8 une certaine sanction législative, eh bien, lorsque le surveillant religieux du collège, le ministre du culte, aura à se plaindre d'un enseignement religieux qui serait donné à côté de lui, si vous ne l'introduisez pas par la loi dans le conseil supérieur, il aura à exercer un rôle d'espionnage; mais il n'en sera pas ainsi, si les ministres du cultes sont appelés, au nom de la loi, à faire connaître leurs observations au ministre en conseil supérieur.
Voilà un nouvel avantage que je trouve à l'adoption de l'amendement de l'honorable M. Osy. Je ne conçois pas les difficultés que l'on craint ; si nous avions demandé, comme en France, l'introduction du clergé dans le conseil supérieur avec voix délibérative, je comprends jusqu'à un certain point les objections qu'on a soulevées: mais je ne les comprends pas, en présence de la déclaration de M. le ministre de l'intérieur.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je demande la parole.
M. Dechamps. - M. le ministre veut-il me permettre d'ajouter un mot?
J'avais cru que M. Osy avait repris l'article de la loi d'instruction primaire, mais je vois que sa proposition comprend seulement les évêques. Voici comment je proposerais de rédiger l'amendement, c'est l'article de la loi d'enseignement primaire.
(M. Dechamps donne lecture de cette proposition.)
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La première objection que je voulais présenter contre l'amendement de M. Osy était tirée de son inconstitutionnalité. Il est évident qu'on ne peut pas, dans une loi, désigner d'une manière exceptionnelle les chefs d'un culte. D'après (page 1364) l’article 14 de la Constitution qui consacre la liberté des cultes et l'article 117 qui met sur la même ligne les ministres de tous les cultes, il est hors de doute que, dans le langage légal, on ne doit jamais se servir que de cette expression : « les ministres des cultes ». C'est ainsi que dans l'article que la chambre a adopté on a parlé des ministres des cultes; c'est le langage constitutionnel.
Je ferai une autre objection déjà indiquée par mon honorable collègue M. le ministre de l'intérieur; c'est que cet amendement est inutile. Vous avez décidé par l'article 8 que les ministres des cultes seraient invités à donner ou à surveiller l'enseignement religieux dans les établissements soumis au régime de la loi. (Interruption.)
Comment! Les ministres des cultes seront invités à donner ou à surveiller l’enseignement religieux dans les établissements soumis à la loi, et il ne résulte pas de là comme conséquence rigoureuse, logique, qu'un conseil de perfectionnement étant établi près du ministre, ce conseil entendra, recevra les observations des ministres des cultes sur la manière dont l’enseignement religieux est donné dans les écoles ou athénées! C'est parce que c'est là la conséquence rigoureuse de l'article 8, qu'il est inutile d'énoncer de nouveau cet objet dans un autre article de la loi.
En outre, veuillez remarquer que cet amendement a peu d'importance, puisqu'il se borne à appeler les ministres des cuites à présenter leurs observations à un conseil consultatif.
- Un membre. - Au ministre qui le préside.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Mais n'est-il pas indubitable, évident, que les ministres des cultes, invités à donner ou à surveiller l’enseignement religieux, peuvent toujours présenter sur ce point leurs observations au gouvernement! Est-ce que l'article 8 n'implique pas la pensée qui a dicté l'amendement?
Ces considérations suffisent pour démontrer qu'il est inutile de s'arrêter à la proposition de M. Osy. Contentons-nous de l'article 8. il a résolu la grave question de l'enseignement religieux d'une manière satisfaisante pour la chambre et pour le pays. (Interruption). Il n'y a eu guère que des abstentions après toutes les clameurs que l'on a fait entendre et ce résultat fort significatif, aura fait impression sur les personnes qui auront suivi les débats sans prévention, avec bonne foi, sans parti pris.
- Plusieurs voix. - La clôture! la clôture.
M. Dumortier. - Je demande la parole contre la clôture.
Je ne pense pas qu'il soit dans l'intention de la chambre de clore la discussion sur une question aussi grave que celle qui nous occupe. Voulons-nous, oui ou non, l'intervention du clergé dans nos écoles? Si nous la voulons, tâchons de formuler des dispositions qui permettent d'obtenir le résultat que nous désirons; nous ne le pourrons qu'après une discussion calme et complète. Je l'ai déjà dit, c'est une des questions qui préoccupent le plus le pays. On ne peut pas fermer la discussion avant d'avoir entendu tous les orateurs inscrits.
- La chambre consultée ferme la discussion sur l'article 33 et tous les amendements.
M. le président. - Je vais d'abord mettre aux voix l'amendement de M. Le Hon.
M. Osy. - J'ai fait une proposition. Je pense qu'on devrait d'abord voter sur une question de principe, celle de savoir si la loi déterminera la composition du conseil ou si on laissera au gouvernement la faculté de le composer comme il l'entendra.
M. le président. - Cela revient à mettre d'abord aux voix la proposition du gouvernement. Si elle était adoptée, tous les amendements tomberaient.
M. Dechamps. - Il faut s'entendre. Je veux bien qu'on vote d'abord sur la proposition du gouvernement, mais elle n’est pas exclusive de celle de M. Osy.
Posons d'abord la question de la manière suivante : Faut-il composer le conseil comme le propose M. Le Hon , ou comme le propose le gouvernement, laissant en dehors la proposition de M. Osy, qui peut s'appliquer à celle des deux propositions précédentes à laquelle la chambre aura donné la préférence.
M. le président. - Si la chambre décide que le conseil sera composé comme le propose le gouvernement, tout est décidé, les amendements sont écartés.
M. Dechamps. - La question me paraît fort simple. Sans doute, on pourrait commencer par statuer sur les amendements, on arriverait au même but. Mais nous pouvons voter sur la proposition du gouvernement, sauf réserve de la proposition de M. Osy qui est complètement indépendante de la proposition du gouvernement.
M. le président. - La proposition du gouvernement est de laisser au gouvernement la composition du conseil de perfectionnement. Si elle est adoptée, tous les amendements tombent.
M. de Theux. - Il est impossible d'accepter le vote avec les conséquences indiquées par notre honorable président. Aux termes du règlement, le vote sur les amendements doit précéder le vote sur la proposition principale. Je demande donc que la proposition qui s'éloigne le plus de celle du gouvernement (qui est celle de l'honorable M. Osy) soit mise la première aux voix.
- Un grand nombre de membres. - C'est cela.
- Le premier amendement de M. Osy est mis aux. voix; il n'est pas adopté.
Le deuxième amendement de M. Osy, sous-amendé par M. Dechamps, est mis aux voix par appel nominal. Voici le résultat du vote :
Nombre des votants, 89.
32 membres votent pour l'adoption.
57 votent contre.
La chambre n'adopte pas.
Ont voté pour l'adoption : MM. Mercier, Moncheur, Osy, Rodenbach, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Boulez, Clep, Cools, Coomans, de Baillet (Hyacinthe), de Bocarmé, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, de Man d'Attenrode, de Mérode, De Pouhon, de Theux, de T'Serclaes, Dubus, Dumont (Guillaume), Dumortier, Faignart, le Bailly de Tilleghem.
Ont voté contre : MM. Orts, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Reyntjens, Rogier, Rolin, Rousselle, Sinave, Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Van Grootven, Van Hoorebeke, Allard, Ansiau, Anspach, Boedt, Bruneau, Cans, Christiaens, Cumont, David. Debourdeaud'huy, de Breyne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Luesemans, de Perceval, de Pitteurs, Dequesne, de Renesse, de Royer, Desoer, Destriveaux, Devaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Fontainas, Frère-Orban, Jouret, Jullien, Lange, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Manilius et Verhaegen.
M. le président. - Vient maintenant l'amendement de M. De Pouhon.
M. De Pouhon insiste-t-il?
M. De Pouhon. - Non, M. le président.
M. le président. - Nous passons à l'amendement de M. Le Hon.
- L'appel nominal est demandé. En voici le résultat :
89 membres répondent à l'appel nominal.
12 votent pour l'amendement.
76 votent contre.
1 (M .Coomans) s'abstient.
En conséquence l'amendement n'est pas adopté.
Ont voté l'adoption : MM. Orts, Osy, Rousselle, Ansiau, Cumont, de Bocarmé, de Brouwer de Hogendorp, de Man d'Attenrode, de Mérode, Dumont (Guillaume), Dumortier, Faignart, Le Hon.
Ont voté le rejet : MM. Mercier, Moncheur, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rolin, Sinave, Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Allard, Anspach, Boedt, Boulez, Bruneau, Cans, Christiaens, Clep, Cools, David, de Baillet (Hyacinthe), Debourdeaud'huy, de Breyne, Dechamps, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, Delehaye, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Luesemans, de Perceval, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, de Renesse, de Royer, Desoer, Destriveaux, de Theux, de T'Serclaes, Devaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dubus, Fontainas, Frère-Orban, Jouret, Jullien, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos, Manilius et Verhaegen.
Le membre qui s'est abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Coomans. - Je n'ai pas voté pour l'amendement de l'honorable M. Le Hon, parce que je n'approuve pas le mode de composition du conseil de perfectionnement proposé par lui.
D'un autre côté, je n'ai pas voulu voter contre, parce que, étant ennemi de l'arbitraire, j'aurais semblé le consacrer par le rejet d'une disposition qui venait modifier l'article du projet.
- L'article, tel qu'il est proposé par la section centrale, est mis aux voix el adopté.
« Art. 34. Il y a trois inspecteurs pour l'enseignement moyen.
« Ils visitent, au moins une fois l'an, les établissements soumis au régime de la présente loi. »
M. de Brouckere a proposé un amendement ainsi conçu :
« Il y a pour l’enseignement moyen deux inspecteurs généraux. »
M. Osy a aussi proposé un amendement sous la dénomination de quatrième article nouveau :
« Les inspecteurs de l'enseignement moyen pourront visiter les écoles secourues par le gouvernement et donner des avis aux administrations communales pour améliorer l'instruction et la mettre en rapport avec les besoins de la localité. »
Enfin, M. Orts propose le paragraphe additionnel suivant :
« Nul ne peut être nommé inspecteur, s'il ne réunit les conditions nécessaires pour exercer les fonctions de professeur dans un athénée royal aux termes de la présente loi. »
M. Orts. - Messieurs, mon amendement me paraît si simple, que la lecture m'en semble la meilleure de toutes les explications.
Je demande que, pour être inspecteur, on réunisse au moins les qualités nécessaires pour être professeur. Je ne comprends pas que l'inspection, si on la veut sérieuse et honorée, puisse être confiée à des personnes qui ne réunissent même pas les qualités nécessaires pour se trouver dans les rangs des inspectés. Les fonctions d'inspecteur imposent au moins des connaissances égales à celles des individus sur lesquels l'inspecteur doit exercer sa surveillance, si l'on veut que les premiers respectent ce dernier. Tout ce que je demande, c'est qu'on ne puisse nommer à ces fonctions celui qui ne sera pas réputé légalement connaître les choses soumises à son inspection.
(page 1365) M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne vois pas la nécessité d'inscrire cette recommandation dans la loi. Si l'on veut entrer dans l'énumération des qualités qui doivent constituer un bon inspecteur, il ne faut pas s'arrêter à celle de professeur agrégé. Il faut pour l'inspecteur une réunion de qualités plus nombreuses et je dirai même plus élevées que celles-là. Vous pouvez prendre les inspecteurs parmi les hauts fonctionnaires, parmi les hommes considérables et justement considérés du pays, qui n'auront pas eu dans leur jeunesse l'occasion de se faire délivrer un diplôme de professeur agrégé et qui cependant formeront d'excellents inspecteurs.
Messieurs, le gouvernement ne fera pas choix d'un ignorant pour remplir les fonctions d'inspecteur. Il faut laisser, sous ce rapport, et ici il n'y a pas le moindre danger, toute latitude au gouvernement. Il va de soi qu'il n'ira pas choisir des hommes étrangers aux études humanitaires ou aux études scientifiques. Il choisira certainement parmi les sommités de la science , peut-être parmi les sommités administratives et parmi les sommités politiques ; mais enfin il choisira des hommes qui répondront dignement à l'importance des fonctions qui leur seront confiées.
M. Orts. - Messieurs, c'est précisément pour ne pas permettre que l'enseignement soit soumis à l'inspection des sommités administratives ou politiques que je propose mon amendement. Je ne veux pas que les inspecteurs de l'enseignement moyen soient des fonctionnaires de l'ordre administratif ou des fonctionnaires politiques; je veux que ce soient avant tout des fonctionnaires inspirant toute confiance au corps professoral, des fonctionnaires sortis autant que possible des rangs des hommes pratiques, des fonctionnaires qui devront précisément joindre des connaissances théoriques à leurs connaissances pratiques, aux termes de la loi que nous volons.
Je crois d'ailleurs que le choix du gouvernement n'est pas circonscrit par mon amendement dans des limites trop étroites ou dangereuses, puisque le gouvernement peut prendre ses professeurs non seulement parmi ceux qui possèdent le grade de professeur agrégé, mais les docteurs en philosophie, les docteurs en lettres et en sciences et les personnes qui occupent actuellement un grade dans les établissements d'instruction moyenne subsidiés par le gouvernement, la province ou la commune.
Voilà la disposition de l'article 10. Elle me semble assez large pour concilier les intérêts du gouvernement et les intérêts de la science.
En un mot, ce que je veux, messieurs, c'est un minimum de garanties, et par cette observation je réponds à celle qui m'a été faite dès le début par M. le ministre de l'intérieur. Il m'a dit que je n'exigeais pas assez. Eh bien, que le gouvernement, si cela lui plaît et lui convient, exige davantage. Mais je n'entends pas permettre au gouvernement d'exiger moins.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je concevrais que l'on exigeât par la loi des conditions d'aptitude, de science, des garanties de capacité hors ligne pour pouvoir devenir inspecteur de l'enseignement moyen, s'il était possible de déterminer ces garanties. Mais je ne comprends pas que l'on exige que l'on soit au moins professeur agrégé de l'enseignement moyen. Quelle sera la valeur d'une pareille prescription?
Quelles exclusions allez-vous prononcer par là? Un officier du génie, un général du génie ne sera plus capable d'aller inspecter les études mathématiques dans vos collèges parce qu'il n'aura pas le grade d'agrégé dans l'enseignement moyen! Les professeurs des universités qui n'ont pas le grade d'agrégé dans l'enseignement moyen seront exclus.
M. Orts. - Ils sont docteurs.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ils ne sont pas tous docteurs.
Les membres de l'Académie seront exclus!
M. Dumortier. - Ils ne peuvent pas être professeurs.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - M. Dumortier peut appuyer la proposition de M. Orts; mais cela ne prouve pas qu'il y ait de bonnes raisons pour déclarer un membre de l’Académie incapable d'inspecter l'enseignement moyen.
Si un Newton existait ici il ne pourrait pas être inspecteur de l'enseignement moyen!
Je pense, messieurs, qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter à la proposition de l'honorable M. Orts.
M. Deliége. - Je n'ai plus, messieurs, qu’une seule observation à faire. M. le ministre des finances vient de dire à peu près tout ce que je voulais dire. J'ai été, dans le temps ,élevé à l'université de Liège où, il y avait des professeurs de droit distingués qui étaient certes bien capables d'inspecter l'enseignement moyen. Eh bien, l'amendement de l'honorable M. Orts aurait eu pour effet d'exclure tous les professeurs de droit, de l'université de Liège. Ainsi, M. Ernst, ancien ministre, était professeur de droit et il n'était ni candidat en lettres, ni candidat en sciences, ni professeur agrégé de l'enseignement moyen. D'autres professeurs, également d'un très grand mérite, n'avaient pas non plus ces grades. Vous voyez, messieurs, où vous conduirait l'amendement de l'honorable M. Orts.
M. Dumortier. - Je crois, messieurs, que les objections qu'on présente ne sont pas fondées. Nous n'avons pas encore voté l'article 10; quand nous en serons à cet article, je pense que la chambre fera bien d'étendre un peu le cercle dans lequel les choix pourront être faits. Je voudrais, pour mon compte, qu'on ajoutât les docteurs en droit, les membres de l'Académie; pourquoi les docteurs en droit ne pourraient-ils pas être nommés professeurs dans l'enseignement moyen? Pourquoi ne pourrait-on pas choisir comme professeur de l'enseignement moyen, un membre de l'Académie, qui a fait ses preuves, qui a été nommé par ses pairs?
Maintenant vous trouvez mauvais que ces hommes ne puissent pas être inspecteurs; mais vous n'en voulez pas comme professeurs. Si vous estimez tant ces hommes de mérite, si vous estimez tant ces docteurs en droit, ces membres de l'Académie, si vous estimez tant Newton, que vous avez cité, permettez-leur donc d'être professeur.
D'après votre projet, un membre de l'Académie ne pourrait pas être professeur de septième. Newton ne pourrait pas être professeur de mathématiques dans un athénée. (Interruption.)
Je ne conçois vraiment pas le système d'explications qu'on nous oppose constamment. Chaque fois que nous voulons mettre des garanties dans la loi, c'est par des explications qu'on veut les remplacer. Savez-vous, messieurs, ce que c'est que cette loi? Ce n'est plus une loi, c'est un ensemble d'explications, c'est un Code formé de toutes les explications des ministres !
Eh bien, ce système, je le déplore ; je n'y ai jamais donné mon assentiment, depuis que je siège dans cette enceinte ; quels que fussent les ministres qui siégeassent au banc ministériel, j'ai toujours demandé que la loi dît ce qu'elle voulait dire. Je ne veux pas qu'on substitue au système représentatif le système explicatif.
Je demande que l'amendement de mon honorable collègue et ami, M. Orts, soit adopté. C'est un minimum pour les inspecteurs; ce n'est pas un maximum; si ce minimum ne suffit pas, étendez-le; mais il est indispensable, alors qu'on exige des garanties si sévères pour les professeurs, qu'on exige au moins quelques garanties pour l'inspection ; sans cela, vous pourriez voir peut-être arriver à l'inspection un homme qui n'aura jamais fait d'études, (Interruption.) J'aime à croire que l'honorable M. Rogier ne le fera pas; mais l'honorable M. Rogier conviendra qu'il pourrait le faire, avec la loi, telle qu'elle est.
L'amendement de mon honorable ami, M. Orts, ne fait que remplir dans la loi une lacune que vous ne pouvez y laisser, si vous voulez que les inspecteurs jouissent auprès du corps professoral de cette considération sans laquelle leur mission ne peut guère être remplie avec quelque efficacité.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, l'auteur de l'amendement et surtout ceux qui l'appuient, sont précisément ceux qui substituent au système législatif le système qu'on vient d'appeler le système explicatif, (je ne sais si cette expression est admise par l'Académie). Que veut-on en définitive? On vous propose de faire de l'administration dans la loi ; on recommande au gouvernement de ne pas choisir, pour les fonctions d'inspecteurs, des ignorants, des incapables. Croyez-vous que vous aurez sauvé tout lorsque vous aurez forcé le gouvernement à faire tomber son choix sur un professeur agrégé de l'enseignement moyen? Il peut y avoir parmi les professeurs agrégés beaucoup d'hommes incapables de remplir les fonctions d'inspecteur. Ainsi vous n'aurez remédié à rien du tout; seulement vous aurez déposé dans la loi une recommandation illusoire.
Il faut supposer que le gouvernement fera ses choix avec intelligence, et qu'il n'ira pas déléguer comme inspecteurs des hommes incapables d'inspecter les matières pour lesquelles il les déléguera ; il nommera des mathématiciens pour les mathématiques; des hommes versés dans les littératures classiques, pour les parties classiques de l'enseignement ; il n'a pas besoin de recommandation pour cela.
M. de Perceval. - Messieurs, je n'abuserai pas longtemps de la bienveillante attention de la chambre. Je me propose de vous présenter uniquement quelques considérations sur le nombre des inspecteurs qui se trouve inscrit dans le projet de loi soumis à nos délibérations, et que la section centrale a admis, contrairement à mon opinion.
Les articles 34 et 35 du projet de loi créent quatre inspecteurs pour l’enseignement moyen. Je suis peu convaincu, en ce qui me concerne, de l'utilité et de l'opportunité de ces quatre inspecteurs.
Si vous voulez introduire dans l'instruction moyenne l'harmonie, l'unité et la force en même temps, je crois qu'il est indispensable de réduire le nombre d'inspecteurs. Si vous désirez que les études soient fortes, que les élèves s'adonnent avec une égale sollicitude à toutes les matières que vous venez d'inscrire dans le programme des cours, diminuez, simplifiez votre système d'inspection. Car, tel qu'il est proposé par les articles 34 et 35, il sera nuisible pour l'instruction publique, peut-être même fatal pour une bonne et saine organisation de l'enseignement moyen; et, messieurs, je n'hésite pas à vous le dire, en inscrivant dans la loi qu'il y aura quatre inspecteurs, vous atteindrez un but diamétralement opposé à celui auquel nous voulons tous parvenir. Il est incontestable que le grand nombre d'inspecteurs, loin de fortifier les études, les affaiblissent au contraire. C'est ma conviction,
Je soumets donc de nouveau à l'examen de l'assemblée l'amendement que j'avais déjà présenté dans ma section et qui avait été adopté par elle, amendement que j'ai, du reste, reproduit en section centrale, et qui consiste à réduire le nombre des inspecteurs à deux...
- Un membre. - C'est ce que demande M. de Brouckere.
M. de Perceval. - Pardonnez- moi. L'honorable M. de Brouckere (page 1366) demande deux inspecteurs généraux ; je ne désire, moi, que deux inspecteurs, car je supprime les inspecteurs généraux. Au fond, je suis peut-être d'accord avec l'honorable député de Bruxelles, mais il se peut aussi qu'il comprenne d'une autre manière que moi l'inspection et le système «-qu'il convient d'adopter à cet égard.
Je ne puis assez m'appesantir sur cette considération, que c'est dans d'intérêt de la force et de l'unité à imprimer à l'enseignement moyen, que je prie la chambre de créer seulement deux inspecteurs.
M. Jullien. - Messieurs, je regrette beaucoup que l'honorable M. de Brouckere n'ait pas pu assister à cette discussion pour soutenir son amendement. Pour ma part, je m'associe entièrement à cet amendement.
Jusqu'à présent et avec raison, on s'est occupé des résultats scientifiques de la loi : c'était, avant tout, à ce point de vue que la loi devait être examinée dans la chambre. Il ne faut pas cependant non plus perdre de vue le côté financier de la loi.
Messieurs, le gouvernement vous propose de créer trois inspecteurs pour l'enseignement moyen, et il se réserve d'adjoindre un contrôleur général à ces trois inspecteurs. L'honorable M. de Perceval veut, lui, deux inspecteurs, plus un inspecteur général.
M. de Perceval. - Je modifie ma proposition.
M. Jullien. - L'honorable M. de Brouckere s'est borné, au contraire, à demander que la loi instituât deux inspecteurs généraux seulement, auxquels serait confiée toute l'inspection qui fait l'objet des articles 34 et 35. Eh bien, ces deux inspecteurs généraux pourront-ils répondre aux exigences de cette inspection? Je n'hésite pas à dire : oui, deux inspecteurs suffisent, car la facilité des communications dans presque toutes les provinces leur permettra d'inspecter très fréquemment les établissements placés dans le ressort de leur inspection. A mon avis deux inspecteurs suffiront aussi pour surveiller toutes les branches de l'enseignement moyen, l'inspection des branches historiques et géographiques pouvant sans inconvénient être réunie à l'inspection des branches littéraires.
Messieurs, évitons de créer, sans une nécessité bien démontrée, une nouvelle légion de fonctionnaires. Si vous créez quatre inspecteurs, vous ne créez pas seulement quatre traitements qui seront très élevés, mais vous ouvrez encore accès à de nouvelles pensions.
Je crois donc que deux inspecteurs généraux, comme l'a proposé l'honorable M. de Brouckere, suffisent largement aux besoins de l'enseignement; j'appuie en conséquence l'amendement que cet honorable membre a soumis à la chambre.
M. le président. - Voici le nouvel amendement de M. de Perceval :
« Il y a pour l'enseignement moyen deux inspecteurs. (articles 34 et 35 réunis.) »
M. de Perceval. - Messieurs, ma proposition diffère de celle de l'honorable M. de Brouckere, parce que je ne donne pas aux deux inspecteurs la qualification de généraux. Il me semble que la dénomination d'inspecteurs généraux n'est pas admissible dans cette circonstance, et la démonstration en est très facile.
Si les inspecteurs généraux avaient sous leurs ordres d'autres inspecteurs, je concevrais jusqu'à un certain point la qualification de généraux, que la loi donnerait à ces fonctionnaires. Mais quand il n'y a que deux simples inspecteurs, je trouve peu convenable, peu logique même, de leur donner cette qualification d'inspecteurs généraux, qui ne leur est guère applicable, car, dans l'opinion de l'honorable M. de Brouckere, (erratum, page 1391) les inspecteurs ordinaires ou subalternes sont bien certainement supprimés, je pense.
Par mon amendement, je propose qu'il n'y ait que deux inspecteurs. Pourquoi les qualifier d'inspecteurs généraux, puisqu'ils n'ont pas à inspecter, à contrôler des sous-inspecteurs dont je ne veux point? Il me semble plus rationnel de dire : « Il y a pour l'enseignement moyen deux inspecteurs. »
M. Le Hon. - J'ai une seule observation à faire. Je viens appuyer l'amendement de M. Orts. On a supposé qu'une condition apportée à la fonction d'inspecteur était superflue et enchaînait le choix du gouvernement. Il me semble que c'est une erreur ; car, dans toute œuvre législative, il faut prévoir l'exécution de la loi par d'autres ministères que celui qui siège au moment du vote.
Le législateur doit avoir les yeux fixés sur l'avenir, et c'est ce qu'ont fait de concert le gouvernement et l'assemblée législative de France, dans la dernière loi relative à l'instruction publique. Ils ont résolu la question, non dans les termes proposés par M. Orts, mais dans l'esprit de son amendement; ils ont déterminé des catégories dans lesquelles seraient divisés les inspecteurs.
Voici ce que porte l'article 19 de la loi française du 15 mars dernier :
« Les inspecteurs sont choisis par le ministre parmi les anciens inspecteurs, les professeurs des facultés, les proviseurs et censeurs des lycées, les principaux des collèges, les chefs d'établissements secondaires libres, les professeurs des classes supérieures dans ces diverses catégories d'établissements, les agrèges des facultés et lycées et les inspecteurs des écoles primaires, sous la condition commune à tous, du grade de licencié ou de dix ans de service. »
Cette disposition prouve toute l'importance qu'on attache en France aux titres scientifiques ou à la position professorale de ceux qui sont chargés d'inspecter l'enseignement.
Le même intérêt doit prévaloir chez nous dans le choix des inspecteurs. Il faut en écarter les considérations d'ordre politique pour donner à ces fonctionnaires, auprès du personnel enseignant, l'autorité morale qui leur est nécessaire. C'est par ces motifs que j'appuie l'amendement de M. Orts.
M. Liefmans. - La proposition de la section centrale mérite la préférence sur l'amendement de l'honorable M. de Perceval. L'honorable M. de Brouckere, il est vrai, a cru qu'il suffisait de nommer deux inspecteurs généraux; mais il esl à remarquer que, dans son intention, s'il faut s'en rapporter aux explications qu'il a fournies au sujet de la division des deux branches de l'enseignement moyen, donné dans les athénées, que, dans son intention, il fallait un inspecteur pour l'enseignement littéraire, classique, et un autre inspecteur pour l'enseignement industriel.
Je crois aussi, messieurs, que cette distinction doit être accueillie, et c'est pour ce motif que je considère l'amendement de l'honorable M. de Perceval comme inadmissible.
En effet, qu'arriverait-il si cet amendement était adopté? C'est que, de fait, les inspecteurs ne sauraient presque jamais être pris dans les provinces où la langue flamande n'est pas usitée. Notez-le très bien, que la moitié du pays ne parle point le flamand, et comme la langue flamande est obligatoire dans les provinces où cette langue est parlée, il faut nécessairement que l'inspecteur de l'enseignement classique parle le flamand. Or, dans les provinces de Liège, de Namur où l'on ne parle que le français, on trouverait difficilement des inspecteurs capables d'inspecter l'enseignement moyen dans les provinces flamandes. Je pense que, pour être juste, il faut qu'il y ait, outre l'inspecteur de l'enseignement professionnel, un inspecteur pour les provinces flamandes et un autre inspecteur pour les provinces wallonnes.
Quant au quatrième inspecteur, l'inspecteur général, dont parle l'article 33, il est à remarquer que cette nomination n'est pas prescrite obligatoirement par la loi ; l'article porte simplement, qu'il pourra être nommé si le besoin s'en fait sentir.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, l'inspection est l'âme de l'enseignement, il ne faut pas le perdre de vue ; autant vaudrait supprimer l'enseignement de l'Etat, que de supprimer l'inspection; car l'inspection est le seul mode efficace pour le gouvernement de s'assurer de la manière dont l'enseignement est donné dans les établissements de l'Etat.
Toutefois comme nous ne voulons rien exagérer, que nous voulons concilier les conditions d'un bon enseignement avec les ressources du budget ; que nous ne voulons pas entraîner le pays dans des dépenses qui pourraient paraître trop fortes; comme un des trois inspecteurs pourra être chargé de l'inspection générale, je consentirai au retranchement de l'inspecteur général dont le gouvernement a demandé la nomination facultative dans le cas où le besoin s'en ferait sentir.
- Plusieurs voix. - Aux voix !
M. Osy. - Je retire mon amendement.
M. le président. - Je mets aux voix l'amendement de M. de Perceval.
- Plusieurs membres. - L'appel nominal!
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si l'amendement de M. de Perceval est adopté, je maintiens l'inspection générale.
- L'amendement de M. de Perceval est mis aux voix par appel nominal.
Voici le résultat du vote :
Nombre des votants, 86.
45 votent pour l'adoption.
41 votent contre.
La chambre adopte.
Ont voté pour l'adoption : MM. Moncheur, Orts, Osy, Pirmez, Prévinaire, Rodenbach, Rousselle, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Tremouroux. Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom , Van Grootven , Van Renynghe, Vermeire , Ansiau, Boulez, Cans, Clep, Cools, Coomans, H. de Baillet, de Bocarmé, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, Dedecker, de Denterghem, de Haerne, Delehaye, de Man d'Attenrode, de Perceval, de Renesse, de Royer, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Faignart, Fontainas, Jacques, Jullien, le Bailly de Tilleghem et Verhaegen.
Ont voté contre : MM. Mercier, Peers, Pierre, Reyntjens, Rogier, Rolin, Sinave, Tesch, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Allard, Anspach, Boedt, Bruneau, Christiaens, Cumont, David, Debourdeaud'huy, de Breyne, Delfosse, Deliége, de Luesemans, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, Desoer, Destriveaux, Devaux d'Hoffschmidt, d'Hont, Dubus, G. Dumont, Frère-Orban, Jouret, Lange, Lebeau, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, et Loos.
- L’amendement de M. Orts est mis aux voix par appel nominal.
Voici le résultat du vote.
Nombre des votants, 85.
29 membres votent pour l'adoption.
56 votent contre.
La chambre n'adopte pas.
(page 1367) Ont voté pour l'adoption : MM. Orts, Osy, Prévinaire, Rodenbach, Thiéfry, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vermeire, Ansiau, Boulez, Cans, Clep, Coomans, Debourdeaud'huy, de Brouwer de Hogendorp, Dechamps, Dedecker, de Denterghem, de Man d'Attenrode, de Renesse, de Theux, de T'Serclaes, Dumortier, Faignart, Fontainas, le Bailly de Tilleghem, Le Hon.
Ont voté contre : MM. Moncheur, Peers, Pierre, Pirmez, Reyntjens, Rogier, Rolin, Rousselle, Sinave, Tesch, T'Kint de Naeyer, Tremouroux, Van Cleemputte, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Allard, Anspach, Boedt, Bruneau, Christiaens, Cools, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Bocarmé, de Breyne, de Haerne, Delehaye, Delfosse, Deliége, de Luesemans, de Perceval, de Pitteurs, De Pouhon, Dequesne, de Royer, Desoer, Destriveaux, Devaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dubus, Dumont (Guillaume), Frère-Orban, Jouret, Jullien, Lange, Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Liefmans, Loos et Verhaegen.
- L'article 34 du projet de la section centrale est adopté dans son ensemble, avec l'amendement de M. de Perceval.
« Art. 35. Si le besoin s'en fait sentir, il pourra être nommé un inspecteur général. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me serais contenté de l'article 34 tel qu'il était avec trois inspecteurs. Maintenant je demande formellement le maintien de l'article 35, qui accorde au gouvernement la faculté de créer un inspecteur général.
J'appelle l'attention des partisans de la loi sur l'importance d'une bonne inspection. Il ne faut pas énerver nous-mêmes les principes de la loi que nous allons voter. Remarquez que le succès de la loi gît en grande partie dans l'inspection. Je ne sais si l'on reviendra, au second vote, sur le vote qui vient d'avoir lieu. Mais j'espère bien qu'on maintiendra l'article35 tel qu'il est proposé.
- L'article 35 est mis aux voix et adopté.
« Art. 36. Il sera institué chaque année, aux frais de l'Etat, un concours général entre les établissements d'instruction moyenne.
« La participation an concours est obligatoire pour tous les établissements soumis au régime d'inspection établi par la présente loi.
« Elle est facultative pour les établissements privés.
« Un règlement d'administration publique organisera ce concours, sur l'avis du conseil de perfectionnement. »
- Adopté.
« Art. 37. Le gouvernement est autorisé à entretenir, en y employant, s'il y a lieu, les ressources que présentent les universités de l'Etat, une institution d'enseignement normal pédagogique, destinée à former les professeurs des athénées, des collèges et des écoles moyennes.
« Il pourra instituer un internat pour les élèves des cours normaux.
« Vingt bourses, de cinq cents francs chacune, sont créées en faveur des élèves de l'école normale.
« Ces bourses sont conférées par arrêté royal. »
M. le président. - C'est à la discussion de cet article qu'on a renvoyé celle de l'article 10.
L'article 10 est ainsi conçu :
« Art. 10. A dater de la quatrième année de la publication de la présente loi, ne pourront être nommés aux fonctions de professeur ou de préfet des études dans les athénées royaux et dans les collèges communaux subventionnes par le trésor public, que les candidats munis du diplôme de professeur agrégé de renseignement moyeu du degré supérieur.
« Les directeurs et régents des écoles moyennes, soit du gouvernement, soit des communes, devront être porteurs d'un diplôme de professeur agrégé de l'enseignement moyen du degré inférieur.
« Pour être nommé aux fonctions de maître d'études ou de surveillant, il faudra être porteur ou du certificat d'élève universitaire ou du diplôme d'instituteur primaire.
« Sont exceptés, les docteurs en philosophie et lettres, les docteurs en sciences et les personnes qui occupent actuellement, dans un établissement d'instruction moyenne dirigé ou subsidié par le gouvernement, la province ou la commune, les emplois auxquels s'applique le présent article.
« Le gouvernement pourra, sur l'avis conforme du conseil de perfectionnement, dispenser des conditions prescrites par le présent article.
« Le présent article n'est point applicable aux professeurs de langues vivantes, des arts graphiques, de musique et de gymnastique. »
A cet article ou a présente plusieurs amendements.
(Amendement de M. H. de Baillet)
« Ajoutez, après le paragraphe 2, le paragraphe suivant :
« Les diplômes seront délivrés par un jury, sans qu'on ait égard au lieu où les candidats ont fait leurs études. »
(Amendement de M. Toussaint) :
« Art. 10 nouveau. A dater de la deuxième année de la publication de la présente loi, ne pourront être nommés aux fonctions de professeur ou de préfet des études dans les athénées royaux et dans les collèges communaux subventionnés ou non par le trésor public, que les candidats munis du diplôme de professeur agrégé de l'enseignement moyen délivré par un jury spécial établi par la loi.
« Les directeurs, etc. (comme au projet). »
(Amendement de M. Dumortier.)
« Remplacer l'article 10 par la disposition suivante :
« Nul ne peut être nommé professeur dans les établissements soumis à la présente loi, s'il n'est Belge ou naturalisé.
« Néanmoins, les étrangers actuellement en fonctions dans les établissements publics d'instruction moyenne pourront continuer à remplir ces fonctions. »
(Amendements de la section centrale.)
« Au paragraphe premier, maintenir les mots : « ou non » comme au projet primitif.
« Le surplus des propositions de la section centrale est conservé jusqu'inclusivement le paragraphe 4.
« Y ajouter ici, paragraphe 5 : « Nul ne peut être nommé professeur, dans les établissements soumis à la présente loi, s'il n'est Belge ou naturalisé.
« Le surplus comme le propose la section centrale.
« Art. 37 (nouveau). Le diplôme de professeur agrégé de l'enseignement moyen de l'un ou l'autre degré sera délivré par un jury spécial et après des examens qui seront réglés par arrêté royal.
« Toute personne peut se présenter aux examens et obtenir le diplôme ci-dessus, sans distinction du temps ou du lieu où elle aura fait ses études.
« Art. 38 nouveau (37 ancien). Conserver l'article 37 en entier.
« Y ajouter seulement :
« Des examens auront lieu pour l'admission à l'école normale ci-dessus. »
« Supprimer l'article 38 ancien. »
M. Dumortier. - Il n'est pas possible de confondre tout cela en une seule et même discussion. Je demande que les divers articles soient examinés séparément.
M. Dequesne, rapporteur. - Je crois, messieurs, que nous devons commencer par l'article 37 nouveau.
M. le président. - La discussion est ouverte sur l'article 37 nouveau.
M. Dumortier. - Messieurs, j'admets le principe de cet article, mais je n'admets pas l'application telle qu'elle y est déterminée. Nous avons fait un grand pas, puisqu'on admet que toute personne pourra se présenter devant un jury spécial pour obtenir le grade qu'il faudra posséder pour pouvoir être nommé professeur; mais cela suffit-il? Le jury sera nommé par arrêté royal; les matières d'examen seront déterminées par arrêté royal; le jury aura à examiner une personne qui se présente pour enseigner les lettres latines, les lettres grecques, les mathématiques, les lettres françaises, l'histoire, la géographie, etc.; sur quoi portera l'examen? La loi n'en dit pas un mot. Faisons un retour sur nous-mêmes Quel est celui d'entre nous qui serait à même de répondre à toutes les questions que ce jury pourra lui faire? Mais cela est matériellement impossible. Je pense, pour mon compte, que chaque candidat devrait être examiné sur les matières qu'il désire enseigner, c'est-à-dire que si le candidat se destine à l'enseignement des lettres, il devra être interrogé sur les lettres et non pas sur les mathématiques, que s'il se présente pour enseigner les sciences mathématiques, il devra être examiné sur ces sciences et non pas sur les lettres grecques et latines.
- Plusieurs membres. - Cela s'entend.
M. Dumortier. - Mais nous ne trouvons rien de cela dans la loi. Je vaudrais le voir dans la loi. Si vous ne le mettez pas dans la loi, il arrivera un jour ou l'autre que l'on pourra forcer celui qui se présente pour enseigner le latin ou le grec, à faire ses preuves sur les mathématiques, et qu’on pourra forcer le mathématicien le plus distingué à faire ses preuves sur la littérature.
Prenons quelques points de comparaison.
Certes, l'école militaire est bien l'institution où les études mathématiques sont poussées au plus haut point. Eh bien, je suppose qu'un premier de l'école militaire soit frappé d'un accident; on doit lui faire l'amputation; il ne peut pas rester au service; évidemment il a fait toutes les preuves possibles pour constater qu'il est capable de donner un cours de mathématiques dans un athénée; eh bien, cet homme si distingué, si éminent devra subir un examen. Sur quoi portera cet examen? Peut-être sur les humanités qu'il n'a pas étudiées ou tout au moins qu'il a perdues de vue! Supposez un homme de lettres de la plus grande distinction, qui, par suite de circonstances quelconques, désire devenir professeur de langues anciennes, eh bien, on pourra lui faire subir un examen sur les mathématiques.
Vous voyez, messieurs, que ce système est inadmissible. On a parlé tout à l'heure des membres de l'Académie. L'honorable M. Frère se récriait de ce que, d'après l'amendement de M. Orts, un membre de l'Académie ne pourrait pas être inspecteur : eh bien, d’après (page 1368) votre système, il ne pourrait pas être professeur! Certes, un membre de l'Académie a fait ses preuves, car pour faire partie de l'Académie, il faut être auteur d'un ouvrage et avoir été reçu par ses pairs. Eh bien, d'après votre système, les membres de l'Académie devraient subir un examen.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - De même que pour devenir instituteur primaire.
M. Dumortier. - C'est une autre affaire. Ils ne le deviendront pas.
Je pense, messieurs, que cet article doit subir des modifications. Je pense qu'il est des catégories d'hommes qui ont fait leurs preuves suffisamment pour ne pas être soumis à un examen.
Ainsi, voilà un homme qui a obtenu le doctorat en droit avec distinction; évidemment, vous ne pouvez pas le faire asseoir sur les bancs pour subir un examen sur les lettres, puisqu'il a dû faire ses preuves sur les lettres avant de devenir docteur en droit. (Interruption.)
Je ne pense pas, messieurs, dire des choses si déraisonnables pour être à chaque instant interrompu. Si la chambre est impatiente de voter, qu'elle prononce la clôture et qu'on vote. Mais je pense que mes observations sont réellement pratiques et qu'elles méritent quelque considération.
Il existe dans la société des classes d'hommes qui ont fait leurs preuves.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Lisez l'article.
M. Dumortier. - J'ai tout lu, mais nous sommes occupés à discuter un si grand nombre de dispositions que M. le président a dû mettre 4 minutes pour les lire.
Je demande, messieurs, que l’article 37 soit amendé dans ce sens que le récipiendaire ne doive être interrogé que sur les matières à l'enseignement desquelles il se destine et qu'on ne l'interroge pas sur des choses qui lui sont devenues complètement étrangères.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je croyais que la proposition nouvelle de la section centrale, à laquelle le gouvernement s'est rallié, obtiendrait au moins l'adhésion de ceux qui ont le plus attaqué les cours normaux dirigés par l'Etat. En principe, le gouvernement serait parfaitement en droit de demander aux chambres d'être chargé à lui seul de former les professeurs des établissements qu'il dirige ; je crois que ce serait de stricte justice et peut-être aussi de bonne administration ; mais nous vivons sous un régime de liberté, et nous voulons que la liberté pénètre, autant que possible, partout. Eh bien, tout Belge, quel que soit le lieu où il a fait ses études, quel que soit le temps qu'il y a consacré, pourra aspirer au rang de professeur agrégé, c'est-à-dire conquérir la candidature pour les établissements de l'Etat.
La liberté n'use point de réciprocité envers l'Etat ; elle forme elle-même ses professeurs et elle n'admettrait pas ceux qui ont été formés dans les établissements de l'Etat; l'Etat admet tout le monde. C'est encore là une modification importante introduite dans la loi.
On demande des exceptions. Mais la loi prévoit les exceptions : les hommes d'un mérite reconnu pourront être dispensés de la production d'un diplôme sur l'avis conforme du conseil de perfectionnement. Les docteurs en lettres et en sciences obtiennent la même dispense.
Voici le système entier : Admission de tous les citoyens belges à l'examen pour le grade de professeur agrégé devant un jury spécial ; exemption de l'examen pour les hommes jugés aptes par le conseil de perfectionnement; enfin, exemption de plein droit pour tous les docteurs en lettres ou en sciences.
M. Dechamps. - Messieurs, je ne viens pas faire un discours. Je veux seulement démontrer à la chambre que nous allons voter sur 2, 3, 4 questions les plus importantes qu'on puisse soulever, que nous allons voter sur ces questions sans aucune espèce de discussion. Je vais indiquer ces questions ; je ne discute point.
Y aura-t-il une ou deux écoles normales? Je vous avoue que je ne comprends pas trop bien la loi à cet égard.
Y aura-t-il dans les écoles normales un internat? Cette deuxième question est fort importante; elle a été discutée pendant deux jours à l'assemblée de France ; elle a donné lieu à de longs débats dans le parlement anglais.
Voilà déjà deux questions qui demanderaient à être mûrement examinées...
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ce n'est pas l'article en discussion.
M. Dechamps. - Tout est en discussion.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il n'y a que l'article 37 en discussion.
M. Dechamps. - Mais on veut finir aujourd'hui ! Ainsi tous ces articles vont se suivre très rapidement.
Il y a encore l'amendement de M. Orts. Les collèges librement fondés par les communes seront-ils soumis aux prescriptions de l'article 37?
Toutes ces questions, messieurs, sont pour moi de la plus haute importance, mais je ne veux pas les discuter : je ne veux pas me heurter à l'impatience de la chambre.
M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ferai remarquer à l'honorable M. Dechamps qu'il n'y a, en ce moment, en discussion que l’article 37 nouveau, relatif au jury chargé de délivrer les diplômes de professeur agrégé.
M. Osy (pour une motion d’ordre). - Je demande positivement que la séance soit remise à demain. Plusieurs d'entre nous ont été en section centrale à 10 heures du matin. Il n'est plus possible d'examiner les questions avec l'attention qu'elles méritent.
Je demande que ma motion soit mise aux voix.
M. de Theux. — Messieurs, si quelques membres doivent partir samedi, et si c'est un motif pour déclarer l'urgence du second vote, je préférais qu'on adoptât la motion de l'honorable M. Osy, sauf à décider maintenant que le second vote aura lieu samedi par urgence. (C'est cela !)
M. Tesch. - Messieurs, si dans la séance du jour, j'ai demandé qu'il y eût une séance du soir, ce n'est pas parce que j'ai envie de partir samedi, mais c'est dans l'intérêt des travaux que nous avons à terminer avant notre séparation.
M. Delfosse. - S'il est entendu que demain on ne s'opposera pas au second vote pour samedi, il n'y a pas le moindre inconvénient à faire droit à la motion de l'honorable M. Osy.
M. de Theux. - Il faudra cependant que les amendements aient été imprimés et qu'on ait eu un temps moral pour les examiner. (Oui ! oui !)
M. Delfosse. - On peut commencer dès à présent l'impression des amendements qui sont déjà votés. (C'est cela !)
M. le président. - On est donc d'accord qu'à cette condition le second vote aura lieu samedi ; on peut voter aujourd'hui l'article 37 nouveau; si personne ne demande plus la parole, je déclare la discussion close sur cet article.
- L'article 37 nouveau proposé par la section centrale est mis aux voix et adopté.
La séance est levée à 11 heures.