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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 21 décembre 1846

(Annales parlementaires de Belgique, session 1846-1847)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 355) M. A. Dubus procède à l’appel nominal à 2 heures et quart.

La séance est ouverte.

M. Van Cutsem lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Dubus présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Donner, fabricant à Bruxelles, demande une réduction des droits de sortie sur les peaux de lapin. »

- Renvoi à la commission d’industrie.


« Le conseil communal d’Adegem prie la chambre de prendre des mesures pour subvenir aux besoins de la classe nécessiteuse. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Plusieurs blessés de septembre réclament l’intervention de la chambre pour obtenir la croix de fer et la pension de 100 fr. qui peut être accordée à ceux qui ont obtenu cette décoration. »

- Même renvoi.


« Plusieurs habitants de la section Engsbergs de la commune de Tessenderloo, demandent que ce hameau soit séparé de Tessenderloo, pour être érigé en commune distincte. »

- Renvoi à la même commission.


« Le sieur Christophe Lomberg demande que le gouvernement accorde aux Ardennes une large part dans les crédits votés pour mesures relatives aux subsistances, afin d’améliorer, dans ce pays, la voirie vicinale, et de fournir ainsi du travail à la classe ouvrière. »

M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, si je prends la parole sur cette pétition, c’est qu’il importe qu’elle ne passe pas tout à fait inaperçue. On vous signale dans cette pétition la détresse où se trouve la classe pauvre en Ardennes ; on vous y fait connaître, messieurs, que bientôt elle se trouvera dans ce pays, sans pommes de terre, sans seigle, sans argent, sans travaux publics pour s’en procurer, enfin dans la situation la plus déplorable.

J’attire l’attention de la chambre et du gouvernement sur un fait si désastreux et sur l’observation que renferme la pétition, que le seul moyen de venir en aide à la population de ces contrées, c’est de donner une forte impulsion aux travaux de la voirie vicinale, car il y a fort peu de travaux publics organisés dans cette partie du pays.

Je prie donc la chambre de renvoyer la requête à la commission des pétitions avec demande d’un prompt rapport.

M. de Garcia. - J’appuie les observations présentées par M. d’Hoffschmidt, d’autant plus que je dois aussi attirer l’attention de la chambre et du gouvernement sur une partie de la province de Namur, qui se trouve absolument dans la même position que le Luxembourg.

- La proposition de M. d’Hoffschmidt est adoptée.


« Le sieur Beys, ancien capitaine, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir une solde d’attente ou sa pension de retraite. »

M. Zoude. - Je demanderai que cette requête soit renvoyée à la commission des pétitions, avec prière de faire son rapport en même temps qu’elle le fera sur la requête du major Boine, »

- Cette proposition est adoptée.


« Les membres du conseil communal de la Hulpe réclament l’intervention de la chambre pour que le gouvernement retire la défense qu’it s faite aux habitants des communes limitrophes de la forêt de Soignes, d’y ramasser les feuilles sèches.

M. Verhaegen. - Messieurs, dans les circonstances actuelles la question soulevée par cette pétition est de la plus haute importance pour les pauvres qui habitent ces localités.

Je proposerai le renvoi à la commission des pétitions avec demande d’un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« L’administration communale de Meslin l’Evêque prie la chambre de faire accorder à cette commune soit’ une indemnité pour les charges qu’elle a dû supporter pendant l’épidémie qui a régné dans cette localité, soit un subside pour l’aider à venir au secours de la classe nécessiteuse.

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur de Stoop demande que le déficit que subira le trésor par suite de la réduction de la taxe des lettres et sur les articles d’argent soit comblé au moyen d’une contribution sur les revenus ordinaires des villes et des communes. »

- Même renvoi.


« Les habitants de la rue des Petits-Carmes présentent des observations contre le projet d’adosser la prison des Petits-Carmes à l’hôtel de la cour les comptes, et demandent que cet hôtel soit isolé des habitations. »

M. Verhaegen. - Les habitants de la rue des Petits-Carmes, messieurs, témoignent de justes inquiétudes sur le projet que paraît avoir conçu le gouvernement, non seulement de ne pas isoler l’hôtel de la cour des comptes, mais même de réunir cet hôtel, par une nouvelle aile, à la prison, ce qui augmenterait encore de beaucoup les dangers d’incendie. Je prierai la chambre d’ordonner le renvoi de cette requête à la commission des pétitions avec demande d’un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Plusieurs débitants de boissons dans les cantons d’Assche et de Lennick-Saint-Martin, demandent que la loi du 18 mars 1838 soit rapportée.

- Renvoi à la commission des pétitions.


M. le ministre des finances adresse à la chambre deux exemplaires d’un recueil des documents et des discussions sur la loi relative à la comptabilité de l’Etat.

- Dépôt à la bibliothèque.


Par divers messages, en date du 19 décembre, le sénat informe la chambre qu’il a adopté le projet de loi allouant un crédit supplémentaire au budget de la dette publique et des dotations, pour 1846 ; le budget de la marine ; le projet de loi relatif au droits de barrière dans la province de Luxembourg, pour le plàtre destiné à l’agriculture ; le projet de loi qui fixe lcs limites séparatives des communes de Dourbe et le Matagne-la-Grande ; le projet de loi relatif à l’érection de la commune de Saint-Léonard dans la province d’Anvers ; enfin, le projet de loi accordant des crédits au département de l’intérieur pour mesures relatives aux subsistances, pour le perfectionnement de l’industrie linière et pour le défrichement des terrains incultes.

- Pris pour notification.


M. Scheyven, retenu par une indisposition, demande un congé.

- Accordé.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de 1847

Motion d'ordre

M. de Brouckere. - J’ai demandé la parole, messieurs, pour adresser une interpellation à M. le ministre de l’intérieur sur un objet qui se rattache indirectement à son budget. Je veux parler de la pétition que le conseil communal de Bruxelles a adressée à la chambre et sur laquelle il a été fait rapport samedi dernier.

Vous vous rappellerez, messieurs, que le conseil communal de Bruxelles avait augmenté le droit d’octroi dont les eaux-de-vie étrangères sont frappées. Le gouvernement ayant refusé de donner son approbation à cette mesure, le conseil communal de Bruxelles a réclamé, auprès de la chambre, contre la résolution prise par le gouvernement, et dans une précédente séance il a été fait rapport sur la pétition du conseil communal.

Il résulte de ce rapport que la résolution qui a été prise par le conseil communal de Bruxelles ne blesse ni la lettre, ni l’esprit du traité du 16 juillet 1842 ; il en résulte, en outre, que le tarif arrêté par le même conseil pour 1847, loin de froisser les intérêts du commerce français, est réellement favorable à ce commerce, lorsque ce tarif est pris dans son ensemble.

M. le rapporteur de la commission fait encore remarquer que la ville de Bruxelles, avec une modération dont on doit lui savoir bon gré, n’a frappé les eaux-de-vie étrangères que du même droit dont elle a frappé les eaux-de-vie indigènes : ce qui sera nécessairement favorable au commerce français.

Je demande, messieurs, si, en présence de considérations aussi puissantes, et je puis dire aussi péremptoires, M. le ministre de l’intérieur ne reviendra pas de sa première résolution, et s’il n’accordera pas à la ville de Bruxelles l’approbation qu’elle a demandée pour son tarif.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, jusqu’à présent gouvernement n’a pris à cet égard aucune résolution ; c’est une question que je dois examiner de concert avec mon collègue, M. le ministre des affaires étrangères, et sur laquelle je ne puis prendre aucun engagement en ce moment.

M. de Brouckere. - Je demanderai sera prise avant le 1er janvier.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Oui.

Projet de loi accordant des crédits provisoires au budget du ministère de la guerre

Rapport de la section centrale

M. de Garcia. - Messieurs, le gouvernement demande un crédit provisoire de cinq millions pour les dépenses du département de la guerre. La section centrale, à laquelle vous avez renvoyé l’examen de ce projet de loi, pense que les raisons indiquées par le gouvernement sont suffisantes pour déterminer la législature à voter le crédit ; elle estime qu’il est peu probable que le budget de la guerre pour l’exercice 1847 puisse être discuté avant le mois de janvier prochain. En outre, le gouvernement demande l’urgence, par le motif qu’il est d’usage que la chambre prend des vacances vers la Noël.

M. le président. - Le rapport sera imprimé et distribué. A quel jour la chambre veut-elle en fixer la discussion ?

Un membre. - On pourrait le discuter immédiatement.

M. de Brouckere. - Il s’agit d’un crédit de 5 millions ; je demande que le rapport ne soit discuté au plus tôt que demain.

M. de Garcia., rapporteur. – Je crois aussi qu’on pourrait discuter le projet demain à l’ouverture de la séance. Le projet repose sur des raisons (page 356) tellement palpables qu’il ne donnen, sans doute, pas lieu à un long débat.

- La chambre consultée décide que le projet dont il s’agit sera mis à l’ordre du jour de demain.

Projet de loi qui exempte de l'accise, le sel employé à l'alimentation du bétail ou à l'amendement des terres

Discussion générale

M. le président. - L’article unique du projet est ainsi conçu :

« L’exemption de l’accise pourra être accordée sur le s et employé à l’alimentation du bétail.

« Le gouvernement déterminera les conditions auxquelles cette exemption est subordonnée. »

La commission spéciale propose d’ajouter au premier paragraphe les mots : « ou l’amendement des terres ».

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je me rallie à cette addition.

M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, ma tâche est très facile, puisque le gouvernement se rallie à l’amendement de la commission. La commission a fait remarquer que différentes dispositions, qui ont été prises par le gouvernement, pour accorder l’exemption, sont de nature à empêcher le petit cultivateur de profiter de l’exemption. M. le ministre, dans l’exposé des motifs, vous dit qu’on a fait peu d’usage de sel mélangé pour l’administrer au bétail. Il fait remarquer cependant que, dans la province du Brabant, l’usage en a été assez grand. En effet, 24,627 kilog. de sel y ont été employés avec exemption de droit, moyennant le mélange prescrit par l’arrêté royal, tandis que, dans les Flandres, il n’en a été employé que 717 kilog. Ceci provient des dispositions prises par le gouvernement pour prévenir la fraude. Voici en quoi ces dispositions pèchent : d’abord le gouvernement autorise l’exemption à raison de 64 grammes par jour et par tête de bétail de l’espèce bovine. Un individu ayant quatre vaches n’emploiera que 93 kilog. pendant l’année ; or, une disposition n’autorise le mélange du sel pour jouir de l’exemption du droit que par quantité de 100 kil. Comme je l’ai déjà fait remarquer, dans le Brabant on a employé beaucoup de sel avec exemption de droit, tandis qu’on en a fort peu employé dans les Flandres ; la raison en est que dans les Flandres il y a peu de grands établissements qui soient eu état de remplir cette obligation.

Je bornerai là mes observations. J’appellerai l’attention du gouvernement sur la question de savoir s’il ne pourrait pas faite descendre la quotité pour laquelle on accorde l’exemption du droit.

D’un autre côté je pense qu’il y aurait moyen d’autoriser une personne par canton à débiter le sel rendu impropre à l’usage de l’homme ; ces personnes pourraient en faire approprier par quantité de 5 à 600 kil. et en vendre à tous les individus tenant du bétail des espèces bovine et ovine ; le gouvernement aurait la garantie qu’on n’élude pas le droit dont est frappé le sel servant à la nourriture de l’homme.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). – Il serait à désirer qu’on pût autoriser le mélange du sel par quotité inférieure à 100 kilog. ; l’obstacle consiste dans la difficulté de la surveillance qu’entraîne cette opération. La deuxième observation de l’honorable membre est une de celles que j’ai présentées à M. le ministre des finances, je veux parler de celle relative au débit du sel mélangé dans le canton ; il faudrait pour cela que des personnes consentissent à faire le commerce de sel mélangé et prissent une patente. Si les sauniers voulaient se charger de vendre du sel mélangé, ce serait une facilité pour l’agriculture ; la même facilité existerait si quelqu’un voulait prendre patente pour faire ce commerce spécial ; mais on ne peut pas permettre aux petits cultivateurs de faire le mélange par petite quantité, car il en résulterait une grande surveillance pour empêcher la fraude.

M. Lejeune. – L’honorable M. Eloy de Burdinne a fait remarquer que l’on pourrait proportionner les quantités que l’on permet aux cultivateurs de consommer avec celles qu’on leur permet de prendre en charge. La quantité qu’on prend en charge est trop forte en raison des doses à donner au bétail, par jour et par tête. Il y a donc quelque chose à faire. Si l’on ne peut pas diminuer jusqu’à 10 kilogrammes, ce qui me paraît possible, il y aurait un autre moyen, ce serait d’augmenter les doses qu’on sera autorisé à donner pas jour et par tête au bétail. Ce serait un moyen d’établir une corrélation entre ce qu’on permet de consommer et ce qu’on permet de prendre en magasin.

M. Eloy de Burdinne, rapporteur. - Je voulais faire la même observation ; mais je crois, comme M. le ministre, qu’on ne peut autoriser l’appropriation, par petites quantités, du sel destiné à l’agriculture car il en résulterait une augmentation du nombre des employés ; mais je dis que, si le gouvernement trouve dans les diverses localités des individus qui consentent à débiter du sel approprié, il doit chercher à encourager ce commerce (Adhésion de la part de M. le ministre de l’intérieur.)

Je désire aussi que le gouvernement examine s’il ne- serait pas possible de simplifier les formalités, qui sont telles que beaucoup de personnes renoncent à demander l’exemption des droits.

M. Rodenbach. - Pour que cette loi puisse être de quelque utilité, il me semble que le ministère doit autoriser, dans chaque commune, le débit du sel approprié, par petites quantités et rédiger une instruction dans ce sens ; car les fermiers ne peuvent acheter le sel par quantités de 40 kilog.

M. le ministre de l’intérieur a émis cette idée ; il a dit : Les sauniers pourraient être chargés de ce débit ; mais il n’y en a guère dans la Flandre occidentale, et il n’y en a pas du tout dans les provinces de l’intérieur ; car il n’y en a que dans les ports de mer. Il faudrait donc que d’autres que les sauniers fussent autorisés à vendre en détail le sel qui ne payerait pas de droit.

C’est indispensable, si l’on veut que la loi soit de quelque utilité pour engraisser le bétail, pour le guérir de certaines maladies et pour l’agriculture.

- Il est procédé au vote par appel nominal sur l’ensemble du projet. Il est adopté à l’unanimité des 58 membres présents.

Il sera transmis au sénat.

Ces membres sont : MM. Dubus (Albéric), Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Jonet, Lange, Lebeau, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Mast de Vries, Mercier, Nothomb, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Sigart, Simons, Van Cutsem, Vandensteen, Verhaegen, Wallaert, Zoude, Anspach, Biebuyck, Cans, Clep, d’Anethan, de Bonne, de Breyne, de Brouckere, Dechamps, de Corswarem, Dedecker, de Foere, de Garcia de la Vega, de Haerne, de Lannoy, Delfosse, d’Elhoungne, de Meer de Moorsel, de Meester, de Mérode, de Muelenaere, de Renesse, de Roo, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux, de Tornaco, d’Hoffschmidt, Donny.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de l'exercice 1847

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XI. Agriculture

Article premier

« Art. 1er. Fonds d’agriculture : fr. 258,500. »

La section centrale propose la division en deux articles ainsi conçus :

« Art. 1er. Indemnités pour bestiaux abattus : fr. 220,000.

« Art. 2. Fonds d’agriculture : fr. 78,500. »

M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale ?

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, je ne pense pas pouvoir me rallier à cette division, et en voici les motifs :

Le chiffre de 260,000 fr., messieurs, est destiné à quatre services : les indemnités pour le bétail abattu ; le service vétérinaire dans les provinces, les frais du conseil supérieur d’agriculture et les frais des commissions provinciales d’agriculture.

Messieurs, je veux bien accepter la majoration proposée par la section centrale pour éviter que l’on soit dans le cas de demander des crédits supplémentaires et qu’il y ait ainsi retard dans la liquidation des indemnités pour le bétail abattu.

Il est réellement important que ces indemnités puissent être payées régulièrement au fur et à mesure de l’ouverture du droit.

Cependant, messieurs, j’ai adressé deux circulaires aux députations permanentes des conseils provinciaux pour les inviter à examiner s’il ne serait pas possible d’introduire quelques économies dans ce service, tant pour les dépenses des artistes vétérinaires que pour les dépenses des indemnités, en déterminant mieux les cas dans lesquels l’indemnité est due et aussi en tâchant de prévenir l’exagération des évaluations. Quels seront les résultats qui pourront être obtenus de ce chef ? C’est ce qu’il m’est impossible de prévoir encore.

Je ferai remarquer, messieurs, que l’an dernier, la dépense de ces trois chefs réunis s’est élevée à 282,000 fr., et que, pour 1846, elle atteindra probablement le chiffre de 320 mille francs.

La section centrale propose 300 mille francs. Eh bien, messieurs, j’espère que, moyennant quelques économies, nous pourrons, avec ces 300 mille francs, faire face à tous les besoins du service.

J’accepte donc, messieurs, le chiffre proposé par la section centrale. Mais, quant à la division, il m’est impossible de l’admettre. Je ne suis pas certain d’avance que le service des vétérinaires et les frais des commissions d’agriculture n’exigeront pas une somme supérieure à 78,000 fr. Le service des vétérinaires a coûté 76,000 fr. ; les frais des commissions d’agriculture et du conseil supérieur s’élèvent à 30,000 fr. ; voilà 106,000 francs. Il y aurait donc évidemment un déficit de ce chef. Toutefois, je ne dois pas dissimuler à la chambre que le service des vétérinaires est quelquefois moins onéreux ; cela dépend du nombre des vacations et du plus ou moins d’intensité des épizooties.

Ainsi, messieurs, je demande que l’article demeure en son entier ; mais il est bien entendu qu’on ne pourra imputer sur ce fonds que les indemnités pour bétail abattu, les indemnités pour le service des vétérinaires, les frais des commissions d’agriculture et ceux du conseil supérieur. Or, chacun de ces services étant régi par des règlements d’administration publique, il est évident qu’aucun abus n’est à craindre de ce chef.

M. Orban. - Messieurs, je viens appuyer la division proposée par la section centrale et qui me paraît tout à fait nécessaire. Le crédit relatif à l’agriculture est un exemple des regrettables abus auxquels on peut arriver avec des crédits globaux. C’est au moyen de la réunion en un seul article, des crédits destinés à faire face aux différents besoins de l’agriculture, que l’on est parvenu à faire de cette allocation un usage qui, certainement, n’aurait jamais obtenu l’approbation de la chambre. Sous prétexte de consacrer une somme de 313,000 fr. aux besoins de l’agriculture, la plus grande partie de cette somme est employée à des objets parfaitement étrangers à l’agriculture.

Veuillez, messieurs, jeter les yeux sur l’emploi qui a été fait de ce crédit. D’après une note qui nous a été remise l’année dernière par M. le ministre de l’intérieur, sur les 313,000 fr. dont il s’agit, 6,000 fr. seulement (page 357) ont été réellement et utilement employés en faveur de l’agriculture tandis que l’achat d’étalons de luxe entraîne une dépense de 38,000 fr. environ, tandis que le haras de l’Etat, avec son personnel et une administration, a coûté plus de 130,000 fr. et les courses de chevaux environ 30,000 fr, ce qui fait un total de plus de 240,000 fr. pour les chevaux de luxe, la somme employée pour l’amélioration de la race des chevaux indigènes figure pour 6,416 fr., seulement.

Evidemment, messieurs, que si, lorsqu’on est venu demander pour la première fois, le crédit de 313,000 fr., on avait annoncé qu’on voulait donner cette destination, la chambre n’y eût jamais donné son assentiment.

Il est d’autant plus étrange qu’on ait consacré une somme aussi faible à l’amélioration de la lace indigène qu’il a été pris en 1840, à la date du 7 décembre, un arrêté royal, d’après lequel une somme de 30,000 fr. devait être consacrée annuellement en primes pour les chevaux de race indigène.

Si vous consultiez les détails statistiques donnés par le ministre de l’intérieur dans les considérations de cet arrêté, vous verriez que les étalons indigènes contribuent pour les 99/100, à la reproduction de la race chevaline en Belgique, et que les étalons de l’Etat, auxquels on consacre tous les ans des sommes si considérables, n’y contribuent que pour 1/100. Je vous laisse à juger s’il y a une proportion quelconque entre les dépenses faites pour le haras de l’Etat et l’utilité que le pays en retire.

C’est pour éviter à l’avenir de pareils abus qu’on demande aujourd’hui de spécialiser davantage les dépenses. Je suis même d’avis que l’on devrait aller beaucoup plus loin dans cette voie que ce que propose la section centrale, et peut-être proposerai-je plus tard un amendement dans ce sens.

En résumé, messieurs, la division proposée par la section centrale aura pour résultat de soustraire une somme de 40,000 fr. au moins aux dépenses que l’on fait pour les chevaux de luxe au préjudice des véritables intérêts de l’agriculture. C’est là une proposition qui doit nécessairement rencontrer des sympathies dans la chambre.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je dois faire observer à l’honorable préopinant qu’il n’a point parlé sur l’article premier, « fonds d’agriculture », mais qu’il a parlé sur l’article 2, « encouragements à l’agriculture ». Cet article 2 comporte la somme de 313,000 fr. dont l’honorable membre a critiqué l’emploi. Quand nous en serons arrivés à cet article, je répondrai aux observations présentées par l’honorable membre.

L’article premier, messieurs, qui est en discussion maintenant, comprend les indemnités accordées aux propriétaires de bestiaux abattus, la rétribution des artistes vétérinaires, Les frais des commissions d’agriculture et ceux du conseil supérieur. Voilà quatre objets spéciaux, et il ne s’agit nullement ici les haras ni de l’amélioration de la race chevaline. (Interruption.)

J’accepte la majoration du crédit proposée par la section centrale, mais je ne puis consentir à la division de l’article.

Messieurs, le fonds d’agriculture se rapporte à ces quatre objets : le conseil supérieur d’agriculture, les commissions provinciales d’agriculture, les indemnités des artistes vétérinaires, et celles qui sont accordées aux cultivateurs pour le bétail abattu. Ces quatre articles se lient. Si une distinction était faite, elle ne pourrait être établie que pour le conseil supérieur et les commissions provinciales d’agriculture ; mais les indemnités des artistes vétérinaires devraient faire partie du fonds des indemnités.

Si la chambre le désire, au budget prochain j’établirai cette division, lorsque je connaîtrai plus exactement le chiffre nécessaire pour les commissions d’agriculture ; je diviserai le chiffre, en ce qui concerne les commissions provinciales et le conseil supérieur d’une part, et les indemnités d’autre part. Je pense que, quant à présent, il vaut mieux laisser les quatre articles en un seul.

M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, je n’ai demandé la parole que pour indiquer une économie possible à M. le ministre de l’intérieur. Les commissions provinciales sont convoquées deux fois par an, à l’arrière-saison et au mois de mars ; à l’arrière-saison, pour confectionner l’état des récoltes ; au mois de mars, pour constater quel sera l’état de la prochaine récolte. Sous le gouvernement des Pays-Bas, la seconde réunion avait été supprimée, et je crois aussi qu’elle est parfaitement inutile. Il est impossible à une commission d’agriculture d’annoncer, au mois de mars, quel sera l’état de la récolte. Il résulte donc de cette deuxième réunion une dépense inutile. C’est une économie que le gouvernement s’empressera sans doute de faire.

M. Vandensteen. - Messieurs, d’après les explications que vient de donner M. le ministre de l’intérieur, l’article premier s’appliquerait à quatre objets : la perte pour le bétail abattu, le service vétérinaire, les commissions provinciales d’agriculture, et le conseil supérieur d’agriculture ; je demanderai à M. le ministre sur quel fonds il prélèvera les indemnités pour pertes de récoltes.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Sur les fonds de non-valeurs.

M. Vandensteen. - Maintenant j’appellerai l’attention de M. le ministre de l’intérieur sur un point qui ne me paraît pas sans importance: je l’engage à mettre un peu plus de régularité et de promptitude dans l’envoi des mandats des indemnités qui sont accordées aux cultivateurs pour perte de bestiaux.

D’abord ces indemnités sont excessivement faibles ; je ne demande pas qu’on les augmente les ressources de l’Etat ne le permettent pas ; mais lorsque les formalités sont remplies, lorsqu’on a pu constater la réalité de la perte, et s’assurer que le cultivateur est dans la position voulue, pour obtenir l’indemnité, il me semble qu’un temps fort court suffirait alors pour envoyer le mandat aux intéressés. Il arrive très souvent que ce payement se fait attendre six mois, voire même deux ans ; il suit de ce retard que la perte est doublée, triplée pour le cultivateur qui obtient si tardivement ce faible allégement.

Je prie donc M. le ministre de vouloir bien tenir la main à ce qu’on mette un peu plus d’activité dans l’envoi aux intéressés des ordonnances de payement.

M. de Brouckere, rapporteur. - M. le ministre de l’intérieur demande, sous la rubrique « Fonds d’agriculture », une somme de 260 mille francs, somme qui doit cependant être réduite de 1,500 fr., par suite d’un transfert à l’article 2 du chapitre premier. Quant à savoir ce que c’est que ce fonds d’agriculture, c’est ce que l’on trouve indiqué à la page 101 du rapport de la section centrale.

Ce fonds se rapporte, comme l’a dit M. le ministre de l’intérieur, à quatre choses : indemnités pour bestiaux abattus, service vétérinaire, commissions provinciales d’agriculture, conseil supérieur d’agriculture. Mais, messieurs, ainsi que les honorables orateurs qui m’ont précédé vous l’ont dit, dans la pratique on paye très exactement le service vétérinaire, les commissions provinciales et le conseil supérieur d’agriculture, et quand le chiffre du budget ne suffit pas, ceux qui en pâtissent, ce sont les propriétaires des bestiaux qui ont dû être abattus. Les indemnités, chaque année, ont été singulièrement arriérées, et je suis persuadé qu’il n’est pas, dans cette chambre, un seul membre qui n’ait reçu de nombreuses plaintes du chef de la lenteur que le gouvernement met à payer cette indemnité qui est souvent un secours indispensable pour le malheureux cultivateur.

Pour porter remède à cet état de choses dont on se plaint dans toutes les parties du royaume, la section centrale a trouvé convenable de diviser l’article en deux, Elle propose un premier article comprenant les indemnités pour le bétail abattu, et pour le chiffre qu’il faut attribuer à cet article, la section centrale s’en est rapportée aux renseignements que lui a donnés le département de l’intérieur. Il résulte du tableau auquel je vous ai déjà renvoyés, que les indemnités pour bestiaux abattus, payées jusqu’au 1er novembre, s’élevaient à 136,477 fr. 43 c., et que les dépenses qu’on présume devoir être faites jusqu’au 1er janvier prochain, s’élèvent à 79,343 fr. 15 c.

Ce qui donne un total de 215,820 58.

La section centrale vous propose, pour l’année prochaine, une somme ronde de 220,000 fr.

L’article 2 comprendrait le service vétérinaire, les commissions provinciales et le conseil supérieur d’agriculture, sous le titre : « Fonds d’agriculture », et recevrait un chiffre de 78,500 fr. ; c’est sur cet article que frappe le montant du transfert, dont j’ai déjà parlé.

Je vous prie de remarquer d’abord que nos deux articles réunis allouent au ministre de l’intérieur une somme de 38 mille fr. de plus qu’il n’avait demandé ; et que si à l’article 2, que nous proposons, nous n’admettons pas entièrement les évaluations faites par le département de l’intérieur, c’est que nous pensons qu’il y a moyen de faire quelques économies sur le service vétérinaire, que le gouvernement évalue à près de 77 mille fr.

Nous avons la conviction qu’avec les deux chiffres que présente la section centrale, le service pourra parfaitement marcher.

Je ne parle pas de l’article suivant, ce serait ouvrir par anticipation la discussion à laquelle cet article donnera lieu. Cependant je dois faire une courte observation. Si M. Orban a confondu les deux articles, c’est parce que l’augmentation que nous proposons à l’article 1er, nous l’empruntons sur l’article 2 ; c’est ce qui a sans doute engagé M. Orban à parler sur les deux articles à la fois. Je m’expliquerai sur l’article 2 quand nous y serons arrivés.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - En consentant à l’augmentation proposée à l’article premier, je n’entends pas consentir à la réduction proposée à l’article 2 ; il faudra examiner ce qui sera nécessaire pour le service des haras. J’ai accepté l’augmentation proposée, parce qu’il est possible qu’elle soit nécessaire, quoique je n’en sois pas certain, et parce qu’on a exprimé le désir que les indemnités fussent payées immédiatement et qu’on ne fût pas obligé d’attendre à l’année suivante pour demander des suppléments de crédit. Je pense que cette marche sera plus utile aux agriculteurs. J’ai dit qu’il valait mieux ne pas diviser l’article que j’ai proposé, parce que de cette manière on avait la certitude morale de faire face à toute la dépense, tandis qu’en divisant on pourrait être obligé à la fin de l’année de proposer un transfert d’un article à l’autre.

M. Desmet. – J’ai demandé la parole quand j’ai entendu dire qu’il fallait restreindre les cas d’indemnité et le chiffre des indemnités pour l’abatage des bêtes atteintes de maladies épizootiques.

Dans ce moment, une des questions les plus importantes qui puissent vous occuper, c’est celle du bétail et de son engraissement. L’engraissement du bétail est une question vitale. Tous les jours on voit le bétail gras devenir de plus en plus cher et de plus en plus rare. Je vois deux causes principales à cet état de choses : ce sont les ravages de l’épizootie pulmonaire d’un côté, et la grande diminution du nombre des distilleries. Il n y a presque pas d’étables de distilleries qui n’aient pas été atteintes par le ravage des épizooties. Toutes les distilleries du pays ot souffert de cette terrible maladie, mais je ne citerai que celles qui sont dans le pays de l’honorable comte de Theux, de celle de Hasselt où, sur (page 358) 40 distilleries, il n’y en a pas deux qui aient échappé au fléau, et les pertes ont été de 15 à 20,000 fr. par étable. On n’ose plus essayer d’élever du bétail, parce qu’on craint les ravages de la maladie ; c’est au point que, si le gouvernement ne prend pas des mesures efficaces pour garantir les distillateurs contre les ravages des épizooties et les tranquilliser par une certaine garantie ou assurance contre la perte, on n’élèvera plus de bétail. Au lieu de diminuer l’introduction, il faudrait l’augmenter et ne pas se montrer parcimonieux.

On craint les abus ; cependant quand on veut arrêter un fléau aussi désastreux, il faut s’attendre à voir le meilleur remède donner lieu à quelques abus. Toutefois, je dois dire qu’on ne prend pas le bon moyen pour arrêter l’épizootie.

On parle de défrichements, on veut cultiver les bruyères et les landes ; un des principaux moyens d’y parvenir, c’est d’engraisser du bétail ; les engrais provenant du bétail nourri dans les distilleries sont les meilleurs pour les terrains sablonneux ; mais je le répète, le nombre des distilleries est tellement réduit qu’il n’y a plus d’engrais ; l’hiver, on ne peut plus engraisser de bétail quand on n’a pas de distillerie ; il n’est pas étonnant que le bétail gras devienne cher et rare.

Je ne puis trop insister pour appeler l’attention du gouvernement sur ce point ; je l’engage à prendre tous les moyens pour garantir les distillateurs contre les épizooties. Il faut d’abord les indemniser, et en outre leur donner une garantie ; je suis sûr que les distillateurs payeraient volontiers une forte prime d’assurance pour garantir leurs étables des ravages de la maladie.

Il est possible que cette année les 300,000 fr. suffisent ; mais si vous deviez voter un demi-million, il ne faudrait pas reculer, car il faut absolument nous mettre à l’abri des ravages des épizooties. Qu’on veuille bien peser l’importance de l’engraissement du bétail. L’agriculture en a un aussi grand besoin que la consommation. L’engrais que produit le bétail que l’on engraisse par le résidu des distilleries de grains est d’une qualité telle que j’ose avancer que si vous n’avez pas de distilleries pour commencer le défrichement et la culture des landes de la Campine, vous ferez toujours des essais et vous n’aurez pas de bon résultat.

M. de Tornaco. - Messieurs, je pense que la chambre fera bien d’adopter la proposition de division faite par la section centrale. On a fait ressortir les inconvénients nombreux qui sont résultés de la confusion des diverses dépenses comprises dans l’article « Fonds d’agriculture » ; mais une observation n’a pas été faite, je veux parler de l’origine du fonds d’agriculture. Ce fonds a été créé par les cultivateurs qui ont dû payer dès 1820 une contribution particulière pour les dépenses qu’occasionnaient les bestiaux abattus. Ce fonds a été liquidé je ne sais trop comment avec la Hollande ; il est resté une somme assez considérable au trésor belge ; je ne m’en rappelle pas le chiffre, mais ce qui est bien certain, c’est que ce fonds appartenait aux cultivateurs.

D’après tout ce qui nous a été dit, ce fonds a été, en quelque sorte, détourné de sa destination. C’est un grave inconvénient qu’il importe de voir disparaître.

M. le ministre de l’intérieur a paru disposé à admettre cette division pour l’année prochaine. Je ne sais pas pourquoi il s’opposerait à ce qu’elle ait lieu cette année, à ce que cet inconvénient disparaisse de l’exercice prochain.

M. d’Hoffschmidt. - J’ai écouté avec attention le débat qui vient d’avoir lieu entre M. le ministre de l’intérieur et quelques membres de la section centrale, au sujet de la division en deux articles proposée par cette section, et je trouve que rien n’est mieux justifié que cette division, Veuillez remarquer, messieurs, que l’article premier, comme veut le maintenir M. le ministre de l’intérieur, contient des dépenses qui n’ont ensemble aucune connexité.

Ce qui me surprend même, c’est que la section centrale n’ait pas proposé de faire trois articles différents. En effet, quelles sont ces dépenses ? 1° Indemnité pour bétail abattu ; 2° service vétérinaire ; 3° frais du conseil supérieur et des commissions provinciales d’agriculture. Je vous demande quels rapports il existe entre ces trois sortes de dépenses ?

Vous avez l’habitude de faire, pour tout ce qui concerne le personnel, autant d’articles distincts. Pourquoi n’en est-il pas de même en cette circonstance ? Pourquoi les dépenses pour le conseil supérieur et les commissions provinciales d’agriculture ne forment-elles pas un article spécial ? C’est toujours pour la chambre un excellent moyen d’apprécier de quelle manière se font les dépenses. Le contrôle de la chambre doit s’exercer aussi scrupuleusement que possible sur toutes les dépenses qu’elle vote, et cela dans le but d’introduire le plus d’économies possible. Or, vous n’obtiendrez pas la clarté nécessaire pour que ce contrôle s’exerce, si vous adoptez un article global pour trois objets distincts ; en effet, une partie du fonds destiné à être distribué en indemnités pour bétail abattu sera employée en dépenses relatives au service vétérinaire, en indemnités aux membres du conseil supérieur ou aux commissions d’agriculture. C’est ce que vous ne voulez pas. Vous entendez sans doute que la somme allouée pour le conseil supérieur et pour les commissions provinciales d’agriculture ne soit pas dépassée.

La proposition de la section centrale a un autre avantage, c’est qu’elle réaliserait une économie. Je vois à la page 101 du rapport que le service vétérinaire coûte 76,834 fr. 25 c., et les commissions et le conseil supérieur d’agriculture 28,000 fr. ; ce qui fait un total de 104,834 fr. 25 c. La section centrale vous propose un crédit de 80,000 fr., en en déduisant les 1,500 fr., reportés à l’article 2 du budget. Voilà donc une différence de près de 25,000.

L’honorable rapporteur de la section centrale vous a dit que cette économie pouvait parfaitement se réaliser. Si M. le ministre de l’intérieur ne conteste pas cette déclaration, je ne vois pas pourquoi, surtout dans une année comme celle-ci, on ne la réaliserait pas.

J’appuie donc et la division et la réduction proposées par la section centrale.

M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je ne demande pas mieux que de réaliser toutes les économies possibles, mais il m’est impossible de déterminer d’avance le nombre des vacations des vétérinaires. Déjà, sans attendre les observations qui viennent d’être faites, j’ai fait une enquête pour savoir si ce service ne serait pas susceptible d’une réduction. Mais il m’est impossible de déterminer la hauteur du chiffre.

On propose de supprimer une des réunions des commissions d’agriculture, sous prétexte qu’il n’est pas nécessaire de faire, en mars, une appréciation de la bonne ou de la mauvaise récolte ; mais là ne se borne pas la mission des commissions d’agriculture. Cette réunion a aussi pour objet d’appeler l’attention du gouvernement sur tout ce qui peut intéresser l’agriculture.

Du reste, c’est une question à examiner que celle de savoir s’il faut réunir une seule fois, au lieu de deux, les commissions d’agriculture.

M. Eloy de Burdinne, rapporteur. - Je partage l’opinion de M. le ministre sur l’utilité des renseignements que donnent les commissions d’agriculture. Mais je lui ferai remarquer que, sous le gouvernement hollandais, on n’était pas prodigue de ces réunions. Chaque membre envoyait ses renseignements au secrétaire qui rédigeait le rapport. On évitait ainsi aux membres des commissions des déplacements inutiles et, à l’Etat, la dépense qui en est la conséquence.

Puisque j’ai la parole, je reviendrai sur l’observation de M. le ministre qu’il est impossible de savoir d’avance quel sera le montant des indemnités à accorder aux vétérinaires pendant l’année. Je le conçois. Mais un point sur lequel j’appellerai l’attention du gouvernement et de la chambre, c’est la nécessité d’aviser au moyen d’empêcher les ravages que fait dans le bétail la maladie pulmonaire. Il y a un moyen ; je l’ai fait connaître dans le rapport. Il y a un intérêt majeur à prévenir ces pertes de bétail, qui sont considérables, particulièrement dans les Flandres. Si la maladie pulmonaire a fait moins de ravages dans le Brabant, il faut l’attribuer à l’emploi du sel qui se fait, dans cette province, sur une plus grande échelle que dans les Flandres.

Nous avons eu, dans le courant de cet été, cette maladie dans la partie de la province de Liége, qu’on appelle le Condroz ; elle a emporté douze à treize mille têtes de bétail.

Cependant, si l’on avait fait usage de sel on aurait prévenu cette calamité ; si l’on avait donné, non du sel mêlé avec de l’eau, mais du sel brut, au bétail, surtout le soir, on l’aurait préservé d’une maladie qui a causé des pertes immenses. Il en a été de même à la suite de l’été de 1817 dans la Hesbaye, qui n’est cependant pas aussi humide que les Flandres. Mais ce qui prouve l’efficacité du moyen que j’ai indiqué tout à l’heure, c’est que les personnes qui en firent usage ne perdirent pas une tête de bétail.

J’engage le gouvernement à prendre à ce sujet des renseignements. Mais je suis, quant à moi, persuadé que le moyen que j’ai indiqué est le seul qui puisse préserver le bétail d’une maladie qui, tous les ans, en enlève une si grande quantité.

Si, messieurs, on recourait à des moyens pour prévenir cette maladie, nous n’aurions pas besoin de bétail étranger. Nous en aurions au-delà de ce que réclament les besoins du pays. Comme vous l’a fort bien dit l’honorable M. Desmet, on craint d’élever du bétail dans les localités où l’on est exposé à cette maladie. Eh bien je signale le moyen de la prévenir.

M. Lejeune. - Messieurs, je suis d’accord avec l’honorable préopinant sur l’utilité de l’emploi du sel. Cette question du sel, messieurs, est très importante et mérite une sérieuse discussion ; mais il paraît que son temps n’est pas encore venu.

Je désire dire un mot sur la division du chiffre en discussion.

Je conçois que, pour les motifs déduits par l’honorable M. d’Hoffschmidt, on veuille diviser l’article en littera, afin de pouvoir apprécier quelle est la dépense de chaque service. Mais je ne vois pas que ces raisons aient la même force quand il s’agit de discuter un article d’une manière absolue, de telle sorte qu’il ne puisse pas y avoir un transfert. Je ne suis pas, pour moi, grand partisan de toutes ces subdivisions d’articles. L’expérience nous a prouvé que ces divisions ne font qu’augmenter le chiffre du budget. Une petite augmentation que l’on demanderait quelquefois sur une somme globale se change souvent en trois augmentations lorsqu’on divise la somme globale en trois articles.

On a parlé de confusion, de dépenses qui ne seraient pas justifiées. Je ne conçois pas que cela puisse s’appliquer à l’article en discussion, puisque tous les services payés sur cet article, le sont d’après des règlements. Il y a des règlements pour le payement des indemnités pour bestiaux abattus, pour le payement du service vétérinaire, pour le conseil supérieur d’agriculture et pour les commissions d’agriculture. Il ne peut pas y avoir de payement qui ne soit conforme aux règlements.

Mais, dit-on, il y aura une économie ; la section centrale propose une économie. C’est-à-dire, messieurs, que la section centrale propose une diminution de chiffre. Mais cette diminution de chiffre est-elle une économie ? Peut-on même le prévoir ? Quand tous les payements à faire sont déterminés par des règlements, si le chiffre est réduit, vous aurez de plus grands crédits supplémentaires à voter, et c’est là un grand (page 359) inconvénient. S’il y a lieu de ne pas chercher à faire non pas une économie, mais une réduction de chiffre, c’est lorsqu’il s’agit d’une dépense qui est réglée d’avance, et dont on ne dispose pas à discrétion. Alors on peut être un peu large sur le chiffre pour éviter les crédits supplémentaires.

Ces motifs, messieurs, m’engagent à maintenir le libellé comme il est au budget. Cependant si, pour pouvoir apprécier les besoins de chaque service en particulier, on veut diviser la somme globale en littera, je n’y trouverai pas le moindre inconvénient. Ce que l’honorable M. d’Hoffschmidt a voulu trouver dans l’article, se trouverait dans cette division.

M. le président. - En faites-vous la proposition ?

M. Lejeune. - Non, M. le président.

M. de Brouckere, rapporteur. - En poussant un peu loin les conséquences du système que vient de développer l’honorable M. Lejeune, vous en arriverez à ce résultat, qu’il vaut mieux que la chambre ne vote pas de budgets.

M. Lejeune. — Quand on le pousse l’absurde, on arrive là.

M. de Brouckere. - Voici les deux raisonnements que vous présente l’honorable M. Lejeune : il n’aime pas les divisions en articles et il n’aime pas les réductions.

M. Lejeune. - Je demande la parole.

M. de Brouckere. - Je ne sais ce qui irrite l’honorable M. Lejeune.

M. Lejeune. – Je ne suis pas irrité.

M. de Mérode. - Vous tronquez ses paroles.

M. de Brouckere. - Je n’ai nullement envie de tronquer les paroles de l’honorable M. Lejeune. S’il veut s’expliquer, je lui céderai la parole.

M. Lejeune. - Très volontiers. Je crois que nous ne sommes pas loin de nous entendre.

Vous dites que je n’aime pas les divisions en articles ; cela n’est pas exact. Je dis que je n’aime pas des subdivisions en petits articles de sommes qui ont toujours été votées en un seul article, et que ces subdivisions ont toujours eu pour effet de grossir le budget.

Je n’aime pas les réductions, dites-vous. Mais je vous prie de ne pas prendre ce mot isolément. Je dis qu’il ne faut pas chercher à réduire là où tous les payements sont réglés d’avance, où il y a un règlement pour tous ces payements, c’est-à-dire, où le ministre ne peut pas abuser des sommes qu’on lui confie.

En effet, lorsque le chiffre que vous mettez au budget ne suffit pas, il faut forcément, et par suite des règlements, voter des crédits supplémentaires ; tandis que si la somme est un peu trop grande, il en reste aussi forcément une partie dans la caisse de l’Etat. En résumé, je suis partisan des réductions lorsqu’elles constituent une bonne économie ; je ne suis pas pour les réductions lorsqu’elles conduisent presque infailliblement aux crédits supplémentaires.

M. de Brouckere, rapporteur. -Messieurs, j’avais très bien compris l’honorable membre et je ne puis rien changer au langage que je tenais tout à l’heure.

Il n’aime pas, dit-il, la subdivision d’un article du budget en deux articles. Je réponds à l’honorable membre que quand un article est relatif à deux objets qui n’ont rien de commun, j’aime, moi, la subdivision. Or, je vous le demande, qu’y a-t-il de commun entre l’indemnité que l’on doit donner à des cultivateurs pour des bestiaux abattus et ce qu’il y a à payer pour frais de voyage ou indemnités à des fonctionnaires quelconques ? Il n’y a aucune espèce de rapport entre ces deux dépenses, et voilà pourquoi je crois qu’il faut les distinguer au lieu de les confondre.

Je n’aime pas non plus les demandes de crédits supplémentaires que l’on vient nous faire. Cependant, messieurs, si l’on redoutait ces crédits supplémentaires par trop fort, il en résulterait que l’on devrait allouer au ministre tout ce qu’il demande et alors toute économie devient impossible.

Je persiste, messieurs, à demander la division de l’article, division que vous propose la section centrale à l’unanimité de ses membres.

J’ai la conviction, messieurs, et le langage de M. le ministre me fait croire qu’il la partage jusqu’à un certain point, que sur le service vétérinaire il y a des économies à faire, En réduisant le chiffre du budget, je mets en quelque sorte le gouvernement dans la nécessité de faire des économies, et c’est précisément ce que veut la section centrale.

Messieurs, si vous adoptez la proposition de M. le ministre et si vous ne laissez subsister qu’un seul article, savez-vous ce qui arrivera ? On ne fera aucune économie sur le service vétérinaire, et au bout de l’année, le service vétérinaire, de même que les membres de toutes les commissions possibles seront très exactement payés, et encore une fois les malheureux cultivateurs attendront que l’on vienne vous demander des crédits supplémentaires, qui se font toujours longtemps attendre lorsqu’il s’agit d’eux. Eh bien nous voulons prévenir cet abus qui existe depuis très longtemps. Nous voulons assurer aux cultivateurs le payement immédiat de ce qui leur est dû pour bestiaux abattus, et c’est pour cela que nous présentions un article spécial avec le chiffre de 220,000 fr.

Le second chiffre, comme on vous le dit, bien qu’il ne soit que de 78,000 fr. est réellement de 78,500 fr. par suite du transfert qui a été opéré. Si ce chiffre de 80,000 fr. ne suffit pas, qu’on vienne nous demander un crédit supplémentaire en le justifiant. Nous l’accorderons ; mais nous ne l’accorderons que lorsque nous aurons la preuve que le gouvernement a cherché à introduire dans le service sanitaire toutes les économies que nous persistons à considérer comme très possibles.

M. d’Hoffschmidt. - Je désire, messieurs, répondre aussi quelques mots à l’honorable M. Lejeune. Je conçois très bien que l’honorable membre repousse le système de la division quand ce système va trop loin ; mais ici nous ne tombons pas dans les inconvénients qu’il a signalés, car les articles divisés présenteront encore des sommes considérables ; l’un sera de 220,000 francs, l’autre de 72,500 francs. Je crois que quand nous conservons des chiffres aussi élevés, nous ne poussons pas la subdivision trop loin, car il y a au budget très peu d’articles aussi élevés que ceux-là. Je ne vois pas non plus qu’il soit démontré qu’il sera nécessaire de venir demander des transferts. Mais alors même qu’en définitive on devrait solliciter un transfert, à la fin de l’année, je ne sais pas quel grand inconvénient il en résulterait. Cela s’est déjà fait à plusieurs reprises,

On avait une fois poussé très loin le système que préconise l’honorable M. Lejeune. Je me souviens qu’on votait pour le chemin de fer un chiffre global extrêmement élevé ; mais la chambre est revenue de ce système, et maintenant au lieu d’un seul article pour le chemin de fer nous en avons, je crois, douze. Ici, messieurs, nous devons apporter la même amélioration en ce qui concerne le budget de l’intérieur, et je suis même surpris que M. le ministre de l’intérieur ne se rallie pas à la proposition de la section centrale, puisque cette proposition ne renferme aucune espèce de danger. Dans tous les cas, la division me semble présenter des avantages incontestables, et la section centrale signale en outre une économie que la chambre ne peut pas négliger, surtout dans les circonstances actuelles.

- La division en deux articles, proposée par la section centrale, est d’abord mise aux voix et adoptée.

Les articles 1er et 2 proposés par la section centrale sont ensuite successivement adoptés.

Article 2

« Art. 2 (qui devient l’art. 3). Encouragements à l’agriculture : fr. 325,000. »

La section centrale propose le chiffre de 274,000 francs, la réduction comprenant une somme de 40,000 fr. qui a été ajoutée à l’article précédent.

M. de Brouckere, rapporteur. – Je désire, messieurs, donner quelques explications sur la proposition de la section centrale. M. le ministre de l’intérieur a demandé à l’article 2 du chap. XI, qui devient l’article 3, une somme de 313,000 fr. L’emploi de ces 313,000 fr. est expliqué à la page 102 du rapport. Sur cette somme, messieurs, 145,759 fr. sont affectés au haras de l’Etat, et 38,614 fr. à l’achat d’étalons. Ces deux sommes ont paru à la section centrale extrêmement élevées, et elle a cru qu’elle pouvait vous proposer une réduction de 40,000 fr., somme égale à celle dont vous avez augmenté les deux articles que vous venez de voter. La plus grande partie de cette réduction doit, d’après la section centrale, porter sur le chiffre qui était destiné à l’achat d’étalons, car il ne s’est élevé, dans la section centrale, aucune plainte contre le personnel qui est chargé de diriger et de soigner le haras de l’Etat ; et je dois dire que, quant à moi, j’ai toujours entendu faire le plus grand éloge du directeur de ce haras. Il ne faut donc pas qu’on prenne le change sur les intentions de la section centrale ; ce n’est point, je le répète, sur le personnel que la réduction doit tomber, c’est particulièrement sur les achats d’étalons.

Ainsi, messieurs, de ce chef il y a à déduire du chiffre de 313,000 fr. une somme de 40,000 fr.

Il y a ensuite à déduire une somme de 3,000 fr. sur les 13,328 fr. qui ont été employés pendant le courant de cet exercice en primes pour la garance. Il résulte des explications données par le ministère de l’intérieur que cette réduction de 3,000 fr. peut facilement être admise.

Ainsi donc le chiffre de 313,000 fr. réduit d’une part de 40,000 fr. et, d’autre part de 3,000 fr., se trouverait n’être plus que 270,000 fr. mais M. le ministre de l’intérieur a adressé à la section centrale une lettre par laquelle il la prie de majorer ce chiffre de 12,120 fr. pour différents subsides à accorder, soit aux provinces, soit aux villes, soit à des sociétés. Ces 12,120 fr. comprennent, en outre, 2,500 fr. pour subsides à allouer, dans le cas où le gouvernement n’établirait pas des dépôts de remonte, pour augmenter les prix donnés par le département lie la guerre pour l’achat de chevaux de remonte.

Examen fait de cette lettre, la section centrale n’a admis des 12,120 fr. demandés, qu’une somme de 4,000 fr. qui serait employée à accorder des subsides aux provinces seulement. Quant à ce qui concerne les villes et les sociétés, la section centrale a pensé que si le gouvernement persévérait dans la voie où il paraît vouloir entrer, de donner des subsides à toutes les villes, à toutes les sociétés qui en demandent, la chambre se trouverait dans la position de ne pouvoir en refuser à aucune grande localité.

Quant aux 2,500 fr. pour subsides destinés à augmenter les prix donnés par ie département de la guerre pour l’achat des chevaux de remonte, la section centrale a pensé que si la chambre jugeait convenable d’accorder ces 2,500 fr., elle devrait les faire figurer au budget de la guerre, mais non pas au budget de l’intérieur.

Ainsi, messieurs, la section centrale a réduit le chiffre de 313,000 fr. d’une part de 40,000 fr. et d’autre part de 3,000 fr., et elle y a ajouté 4,000 fr. ce qui donne le chiffre de 274,000 fr.

M. le président. - Voici un amendement qui a été déposé par M. Orban :

« Je propose d’ajouter au chapitre relatif à l’agriculture un nouvel, article ainsi conçu :

« Primes pour les étalons de gros trait, frais d’examen, etc., en exécution de l’arrêté royal du 7 décembre 1840 : fr. 30,000.

(page 360) « La somme de 30,000 fr. sera déduite du chiffre consacré aux haras et étalons de l’Etat. »

M. Orban. - Messieurs, j’ai signalé tout à l’heure l’emploi peu intelligent qui a été fait des fonds spécialement destinés à l’encouragement de l’agriculture ; j’ai fait connaître qu’au moyen des crédits globaux qui figurent au budget de l’intérieur, une somme de 240,000 fr. était destinée à l’achat d’étalons de l’Etat, aux courses du gouvernement et à l’entretien des haras de l’Etat ; je vous ai fait connaître ensuite qu’une somme de 6,000 fr. seulement était dépensée en véritables encouragements à l’agriculture, c’est-à-dire en primes à accorder aux étalons de long trait.

Il suffit de signaler cet état de choses pour démontrer la nécessité d’y porter immédiatement remède. Mais il est d’autant plus extraordinaire qu’un pareil abus ait pu se produire en violation d’un arrêté royal du …, lequel dispose que chaque année 50,000 francs seront consacrés en primes aux étalons indigènes.

Pour justifier mon amendement, je ne puis mieux faire, messieurs, que de vous donner lecture de quelques-uns des considérants de cet arrêté royal.

« La Belgique a besoin de 19,000 chevaux annuellement pour sa propre consommation et de 10,000 pour l’exportation, total 29,000 poulains et pouliches par an.

De ces 29,000 poulains, les étalons de l’Etat en créeront à l’avenir 700 au moins, ce qui ne fait pas la quarantième partie. Mais il est à remarquer en outre qu’une très grande partie des produits de ses étalons s’exporte du pays, parce que l’intérêt de l’acheteur est de nous enlever ce que l’espèce chevaline présente de plus beau et de plus recherché. On peut donc affirmer que les étalons de l’Etat fournissent à peine la centième partie des poulains qui restent en Belgique et entretiennent la population chevaline. Les autres 99/100 des naissances sont dues par conséquent aux étalons indigènes.

« Il résulte de ce qui précède, que si le dépôt des étalons de l’Etat contribue incontestablement à l’amélioration (le la race indigène, cette amélioration sera longtemps encore insensible et que le gouvernement ne doit pas perdre de vue la reproduction par les étalons indigènes.

« Il est temps, sire, de parler remède à cet état de choses, si le pays ne veut pas perdre les fruits des sacrifices qu’il fait par l’établissement d’un haras. A quoi sert-il, en effet, que les étalons de l’Etat procurent au pays quelques centaines de poulains et pouliches par an, s’ils sont presque tous exportés à l’étranger, et que les juments qui nous restent, par des croisements avec des étalons indigènes non approuvés, donnent naissance à des poulains informes, mal construits et qui reproduisent tous les défauts de leur père ; si l’on détruit, en un mot, dès la deuxième génération, le bien commencé à la première ?

« Un des moyens les plus propres à exciter à la fois le zèle des autorités provinciales pour cette partie de l’administration et l’émulation des éleveurs de chevaux, consiste à accorder une prime aux propriétaires des étalons les plus distingués du pays C’est le but de l’arrêté joint au présent rapport.

« LEOPOLD, Roi des Belges,

« A tous présents et à venir, salut,

« Sur le rapport de notre ministre de l’intérieur,

« Nous avons arrêté et arrêtons :

« Art. 1er. Une somme de trente mille francs sera prélevée annuellement sur les fonds alloués au budget, pour l’encouragement de l’agriculture, et distribué en primes aux propriétaires d’étalons approuvés par les commissions provinciales, et aux propriétaires de juments issues des étalons de l’Etat, et qui seront présentées à ces commissions avec un poulain de l’année, issu de ces mêmes étalons.

« Art. 2. Cette somme sera répartie entre les provinces dans la proportion des allocations qui seront portées pour le même objet aux budgets provinciaux.

« Art. 3. Notre ministre de l’intérieur est chargé de l’exécution du présent arrêté.

« Donné à Bruxelles, le 7 décembre 1840.

« LEOPOLD.

« Par le Roi

Le ministre de l’intérieur, LIEDTS. »

Messieurs, si l’arrêté royal avait reçu loyalement son exécution, je n’aurais aucune proposition à soumettre à la chambre ; lorsqu’il existe des crédits globaux, ces crédits doivent être employés en premier lieu à acquitter les dépenses résultant de lois ou d’arrêtés royaux, pris en exécution de lois. C’est pour servir de sanction à l’arrêté royal du 7 décembre 1840 que je propose de créer un article spécial portant 30,000 fr., pour primes à accorder aux étalons de long gros trait.

- Cet amendement est appuyé.

M. Osy. - Messieurs, la section centrale engage le gouvernement à réduire pour 1848 à 50 fr. la prime de 100 fr, pour la culture de la garance, et à supprimer entièrement cette prime pour 1849. J’engage, au contraire, M. le ministre à examiner s’il n’y a pas lieu de continuer la prime.

Avant 1845, c’étaient les commissaires d’arrondissement et les autorités communales qui étaient chargés par le gouvernement d’acheter des plantes de garance et de les distribuer entre les cultivateurs, au moment où les terres étaient préparées pour cette culture.

Mais, depuis 1845, le gouvernement doit avoir fait un arrangement avec un propriétaire cultivateur dans les Flandres, pour fournir toutes les plantes que l’on distribue gratuitement aux cultivateurs de la garance. Je dirai avec ma franchise ordinaire que cet arrangement doit avoir eu lieu en vue d’une manœuvre électorale, et que cette mesure a été nuisible à l’intérêt de cette culture.

Dans les Flandres, on ne cultive que 8 hectares de garance, tandis que dans la province d’Anvers on en cultive 66. Or, dans cette dernière province, on envoie les plantes de garance ou trop tôt ou trop tard, alors qu’elles ne peuvent être d’aucun usage, et c’est ainsi qu’on fait un grand tort à cette culture que nous devons conserver dans le pays, pour n’être pas forcés de chercher, pour nos fabriques, de la garance, soit en Hollande, soit à Avignon.

J’engage M. le ministre de l’intérieur à vouloir bien examiner si l’ancien mode de distribution qui avait été employé n’était pas plus convenable, et s’il n’y a pas lieu de charger de nouveau de cette distribution les commissaires d’arrondissement et les autorités communales.

M. Vandensteen. - Messieurs, ainsi que l’a dit l’honorable rapporteur, c’est effectivement à la page 102 du rapport de la section centrale que nous trouvons les détails explicatifs sur l’emploi de la somme de 313 mille fr. que le gouvernement demande au budget. D’après les propositions de la section centrale, il y aurait une première réduction à l’article Haras ; si j’ai bien compris les observations de l’honorable rapporteur, cette réduction porterait sur la somme affectée à l’achat des étalons.

M. de Brouckere, rapporteur. - En grande partie !

M. Vandensteen. - Mais permettez, si je ne m’abuse, ce serait la somme tout entière, car elle est portée au budget pour un chiffre de 38 mille fr. et vous augmentez l’article premier de 40 mille fr. Avant de se prononcer sur la réduction, il faudrait savoir quels sont les besoins du haras pour 1841. Quant à cette partie du budget, j’avoue que, pour moi, je suis assez disposé à réduire le chiffre ; le haras peut être utile et rendre des services ; mais il y a d’autres encouragements qui sont bien plus profitables à l’agriculture.

Une autre réduction de trois mille fr. porterait sur le littera F garance.

Nous venons d’avoir une explication de l’honorable M. Osy sur ce qui se passe relativement à la culture de la garance et des résultats obtenus.

Depuis assez longtemps nous portons chaque année au budget une somme pour cet objet, et je crois que si on réunissait tout ce qui a été voté pour propager cette culture, nous arriverions à un chiffre de plus de 150,000 fr.

Je crois, messieurs, que nous sommes en droit d’exiger des renseignements officiels sur l’état de cette culture. Je crois que la section centrale a sagement fait en engageant le gouvernement à apporter insensiblement de la modération dans les sommes à affecter à cette culture. Il faut finir par prendre une décision à cet égard ; car après des essais de plusieurs années, il est facile de voir si on peut espérer obtenir des résultats avantageux pour le pays.

Il me semble que la question de la culture de la garance doit pouvoir être jugée maintenant.

Pendant la discussion du budget en section centrale, M. le ministre de l’intérieur a fait une nouvelle demande de 12,000 francs. Cette demande repose sur le projet qu’aurait le gouvernement d’accorder surtout des subsides à des sociétés d’agriculture et aux villes qui font des efforts pour introduire les règlements propres à améliorer les races bovines et autres. Je ne puis, à cet égard, partager l’opinion de la section centrale qui ne voudrait accorder que quatre mille francs. Voici les motifs allégués dans le rapport à ce sujet :

« La section centrale pense qu’il y a lieu à faire une distinction entre les subsides réclamés par les provinces, et qui doivent avoir pour résultat de faciliter, d’assurer l’exécution des règlements pour l’amélioration de la race bovine, et ceux qu’on voudrait accorder à des villes ou des communes rurales, soit pour des concours de bestiaux, soit pour d’autres objets, ou des sociétés particulières. Autoriser légèrement ces derniers, serait s’exposer à voir un grand nombre de villes, de communes, de sociétés, solliciter la même faveur, qu’il serait d’autant plus difficile de leur refuser, qu’elles pourraient presque toutes faire valoir les mêmes titres. »

Ainsi, d’après l’opinion de la section centrale, il ne faudrait accorder de subsides que pour assurer l’exécution des règlements pour l’amélioration de la race bovine. Cependant il y a un genre d’amélioration qui tourne directement à l’avantage de l’agriculture, et ce résultat est obtenu, je puis dire, par les sociétés agricoles qui se forment dans le pays. On peut en parler, parce que je crois qu’elles ont produit des résultats marqués, quoiqu’elles soient encore dans l’enfance. Les efforts qui ont déjà été faits prouvent combien on s’est imposé de sacrifices pour arriver au point où on en est.

On m’accusera peut-être encore cette fois de défendre ici une question de clocher ; cependant je dois citer un fait, et signaler au pays les bienfaits rendus à l’agriculture par une société agricole qui s’est formée la première en Belgique et se compose d’hommes dévoués à l’agriculture qui payent non seulement de leurs connaissances, mais de leur fortune ; je veux parler de la société agricole de la province de Liége ; cette société a obtenu des résultats très marqués qui ont fait faire un pas notable (page 361) à l’agriculture ; on peut en être convaincu. Je sais que le gouvernement n’a point voulu rester inactif ; je l’en félicite ; il a voulu, ayant de prendre une détermination, s’éclairer.

Il doit avoir envoyé un agent supérieur pour voir ce qui s’est passé dans les différents concours de Tinlot et Hannut. A ces concours, les réunions ont été nombreuses, on a amené une quantité considérable de bétail élevé dans les environs, on a accordé des primes, on a fait des expositions d’instruments aratoires. Dans le principe, je doutais, je l’avoue, que ces réunions eussent des résultats prochains. J’ai hâte de le dire, je me suis heureusement trompé, j’ai vu dans les localités que les cultivateurs appréciaient eux-mêmes ces genres de concours et y prenaient part. Je verrais donc avec plaisir que le gouvernement voulût encourager ces sociétés et ces concours. Cependant, je ne voudrais pas l’engager à entrer trop promptement et trop largement dans cette voie ; mais il pourrait prendre des renseignements, préparer les règlements, se faire soumettre les statuts de ces sociétés, envoyer, comme il l’a déjà fait, des agents dans les localités où ont lieu les concours, se faire faire des rapports.

Je crois qu’à l’aide de ces données, nous pourrions atteindre directement le but que nous nous proposons pour l’amélioration de l’agriculture.

Nous sommes saisis d’un projet de loi qui exercera une influence très grande sur les destinées de l’agriculture ; mais ces concours ne doivent pas être négligés ; c’est un des moyens les plus actifs, les plus sûrs que nous puissions avoir pour améliorer notre richesse nationale.

Une somme de 2,000 fr. est demandée pour achat de chevaux par le département le la guerre. Je crois, comme l’a dit l’honorable rapporteur, qu’il est plus convenable que cette somme soit portée au budget de la guerre Nous pourrons examiner cette question, si la chambre le décide ainsi, quand nous nous occuperons du budget de la guerre.

M. d’Hoffschmidt. - L’honorable M. Osy vient d’exprimer une opinion contraire à celle de la section centrale, relativement aux primes accordées pour encourager la culture de la garance.

Dans un premier vote la section centrale avait proposé la suppression totale du crédit demandé pour cet objet ; elle n’est revenue sur sa décision, que parce qu’elle a cru qu’il y avait une espèce de droit acquis pour les propriétaires qui se sont livrés à cette culture en vue de la prime ; mais en même temps la section centrale a averti M. le ministre qu’elle ne serait plus disposée à voter le crédit l’année prochaine.

Cc n’est pas cette section centrale seule qui s’est prononcée en ce sens, si ma mémoire est fidèle ; plusieurs sections centrales ont déclaré que la culture de la garance n’avait pas d’avenir dans nos contrées, qu’il fallait se hâter de supprimer le crédit qu’on votait chaque année pour l’encourager. Il y a quelques années, j’avais proposé de réduire, le crédit dans l’espoir qu’on le ferait ensuite totalement disparaître. On m’a répondu qu’il y avait des engagements pris vis-à-vis de certains propriétaires, et qu’il fallait allouer la somme ; après cela le crédit a été voté. Il s’ensuit qu’avec de raisonnements semblables, on perpétue le crédit alloué pour cette culture, Il est à remarquer que voilà au moins dix années qu’on accorde des crédits assez importants pour encourager cette culture.

On doit être fixé sur la question de savoir si elle peut s’acclimater chez nous ; c’est ce que l’on ne dit pas. Je pense que si l’année prochaine on veut encore nous faire voter ce crédit, il faut qu’on nous démontre qu’il y a quelque espoir de réussir. On ne doit chercher à introduire dans un pays la culture de plantes étrangères que quand elles ont des chances de prospérer. Je pense que si la culture de la garance est encore si faible, malgré toutes les primes qu’on lui a accordées, c’est qu’il n’y a aucune chance d’avenir pour la culture de cette plante en Belgique.

Or, avoir des plantes étrangères qui ne font que végéter sur le sol, à l’abri d’un subside, c’est réellement une dépense inutile ; et nous reconnaîtrions que cette dépense ne laisse pas que d’être assez considérable, si l’on nous faisait connaître toutes les sommes dépensées à ce titre.

C’est une dépense que nous ne devons pas tolérer, à moins qu’on ne nous donne de meilleures raisons.

On annonce toujours des économies ; en voici une qu’on pourrait très facilement réaliser.

Je crois donc que le gouvernement doit faire attention à l’avertissement que lui donne la section centrale, qu’il ne doit plus renouveler cette demande le crédit, ou que, s’il la renouvelle, il doit l’appuyer de raisons qui portent la conviction dans nos esprits. Sans quoi je suis bien décidé à ne plus admettre aucun crédit pour la culture de la garance,

M. Eloy de Burdinne, rapporteur. - Je m’aperçois avec plaisir que mes observations ont porté leurs fruits et qu’on commence à reconnaître avec moi que l’intitulé du chapitre XI, n°2, est un non-sens. Il y a dix ans que j’ai eu l’honneur de vous signaler que ces prétendus secours et encouragements à l’agriculture ne sont rien moins que cela, L’honorable M. Orban vient de vous dire ce que j’ai eu l’honneur de vous répéter à satiété.

Comme je vois aujourd’hui cette opinion partagée par un grand nombre de mes collègues, je viens appuyer la division proposée pour l’article de 313,000 fr. On comprend les courses de chevaux dans les encouragements accordés à l’agriculture, comme si l’agriculture était intéressée à voir courir des chevaux ! Ce ne sont pas des chevaux de course qu’il faut à l’agriculture, mais des chevaux propres au travail.

Si vous voulez avoir une bonne race de chevaux, faites ce qu’on fait en Angleterre ; encouragez l’amélioration de la race par la race. Mais ce n’est pas avec le montant des primes que vous accordez pour les étalons étrangers que vous y parviendrez.

Notre position financière n’est pas brillante. J’engage donc le gouvernement à tâcher de réduire les dépenses, à faire des économies, à renoncer à des dépenses qui excèdent nos moyens.

Comment ! on fait figurer comme encouragements à l’agriculture les dépenses que nécessitent les haras ! Mais l’agriculture n’a aucun intérêt dans les haras. On obtient par-ci par là un bon poulain ou une bonne pouliche par le croisement d’une jument du pays avec un entier étranger ; mais c’est l’effet du hasard ; cela tient à ce que la jument est de même nature que l’entier. Mais lorsque l’animal qui est le produit de croisement se reproduira, vous ne retrouverez plus dans ses rejetons aucune trace de la race étrangère.

On vous a dit que les concours d’agriculture, dans les provinces, étaient appelés à donner de bons résultats. Je partage, à cet égard, l’opinion de la section centrale.

Il y a eu, non pas à Waremme, comme l’a dit un honorable préopinant, mais à Hannut, une exposition d’animaux. On y a vu des animaux de l’espèce bovine, améliorés par leur race, qui valaient mieux que les produits du croisement de vaches du pays avec des taureaux de Durham. Je crois que c’est préférable. Ajoutez à cela que la dépense est beaucoup moindre.

Je reviens aux haras dont toutes les dépenses sont comprises dans les encouragements à l’agriculture. Mais c’est pour les chevaux de luxe, pour l’amusement de ceux qui aiment à voir courir les chevaux, et nullement dans l’intérêt de l’agriculture.

On accorde quelque chose à l’agriculture. Mais, sur les 313,000 fr., devinez combien : 5,965 fr. 30 c. Et l’on intitule l’article 2 : « Encouragement à l’agriculture » ! En vérité, elle a les miettes du festin ; mais les amateurs de courses de chevaux sont conviés au banquet.

Si l’on dépensait, pour l’amélioration de la race par la race, la moitié de ce qu’on dépense pour l’amélioration de la race bovine par le croisement avec des taureaux de Durham, on aurait dix fois plus de résultat.

En résumé, j’appuie la réduction proposée par l’honorable M. Orban et celle proposée par la section centrale.

Au moins nous saurons ce que nous dépensons en prétendus encouragements à l’agriculture, et lorsque je combattrai des demandes de subside pour telle ou telle industrie, on ne sera plus en droit de me dire : « Ah ! vous avez bonne grâce ; on vous accorde 313,000 francs pour l’agriculture ! »

Je réclame le changement de l’intitulé. C’est une demande que j’ai déjà faite dans la discussion du budget de l’intérieur des années précédentes.

M. Desmet. - Lorsque la section centrale a demandé qu’on supprimât les primes accordées à la culture de la garance, j’ai été de la minorité. Je trouve, au contraire, qu’il y a nécessité de protéger la culture de la garance au moyen de primes.

La garance qu’on recueille dans ce payé, messieurs, a une qualité particulière sur celle de la Zélande et d’Avignon ; de sorte que si vous en supprimiez la culture, vous nuiriez à l’industrie des teinturiers qui en ont absolument besoin.

Il y a un autre motif pour que la culture de la garance soit protégée par une prime, c’est, comme vous le savez, que la culture de la garance ne donne une récolte qu’au bout de deux ou trois ans, et qu’aujourd’hui, à cause de la rareté des terres à cultiver, on n’est pas très empressé d’en planter en garance.

C’est à tort, messieurs que l’on dit que cette culture n’a pas fait de progrès ; elle en a fait de tellement grands depuis quelques années, que notre garance est presque aussi bonne que celle de la Zélande. Je ne vois donc pas de motifs pour arrêter l’encouragement de la culture de la garance. C’est une matière première dont le pays a indispensablement besoin pour la teinture des étoffes ; on devrait, pour ce motif, augmenter la protection.

M. de Corswarem. - Messieurs, je m’étonne vraiment que l’on vienne aujourd’hui proposer de réduire ou plutôt de supprimer les primes en faveur de la culture de la garance.

On prétend que cette plante n’a pas d’espoir d’avenir, qu’elle ne s’acclimatera pas dans le pays, qu’elle ne peut qu’y végéter. Messieurs, toutes ces raisons sont autant d’erreurs. La garance n’est pas une plante étrangère, dont il s’agit d’introduire la culture dans notre pays. Depuis des siècles, on a cultivé la garance en Belgique ; on l’y a cultivée avec le plus grand succès. Ce n’est que sous le gouvernement précédent que cette culture a décliné. Sous l’empire français, elle prospérait d’une manière toute particulière.

Maintenant, messieurs, qu’on a de nouveau provoqué cette culture au moyen de primes, maintenant qu’on voit qu’elle prend du développement, on vous propose de la supprimer. Elle s’est élevée en peu d’années jusqu’à 100 hectares, car cette année on a planté 100 hectares de garance. Or, pour ces 100 hectares, on n’accorde qu’une prime de 10,000 francs par an.

Non seulement, messieurs, la garance est utile au commerce ; mais aucun autre produit de la terre ne procure autant de main-d’œuvre aux journaliers ; aucun autre produit de la terre n’améliore autant le terrain. Ce sont là deux buts utiles qu’elle atteint, outre le but commercial. Pourquoi, messieurs, voudrait-on supprimer la prime que l’on accorde annuellement pour la culture de la garance ? Serait-ce pour faire tomber (page 362) cette culture et avoir le plaisir de tirer ce produit de l’étranger ? Mais il y a une foule d’autres produits que nous encourageons et que nous pourrions produire ; tel est le sucre. Nous accordons des primes aux raffineurs de sucre indigène, tandis que le pays produit beaucoup de sucre et pourrait même suffire à tous les besoins de la consommation.

Mais on dit que l’industrie sucrière est une industrie intéressante, qu’il faut l’encourager, lui accorder des primes.

Aujourd’hui, messieurs, on trouve que l’industrie de la garance n’est pas une industrie intéressante, qu’il ne faut pas lui accorder des primes, qu’il faut la laisser mourir.

Messieurs, laisser mourir une industrie, après en avoir provoqué le développement, serait un précédent très fâcheux. Qui donc oserait désormais se fier encore aux promesses du gouvernement ? Une foule de particuliers en Belgique ont élevé des fabriques, ont élevé des moulins à garance ; ils ont dépensé des capitaux considérables pour faire ces établissements. Aujourd’hui que ces établissements sont érigés, vous voulez les ruiner !

Messieurs, ce serait là avoir deux poids et deux mesures.

La section centrale reconnaît qu’il ne faut pas retirer le subside destiné à favoriser la culture du mûrier qui, lui, est une plante étrangère qu’il s’agit d’acclimater en Belgique. Et pour quelles raisons veut-elle qu’on continue à protéger cette culture ? Les voici : « Supprimer les primes aujourd’hui, serait en quelque sorte un acte d’injustice. Ceux qui ont élevé des établissements ont fait entrer dans le calcul de leurs bénéfices le produit de cette prime. » Messieurs, ceux qui ont élevé des établissements pour fabriquer, pour moudre la garance, ont également fait entrer dans leurs calculs le produit de la prime.

Ce que vous trouvez injuste envers les cultivateurs de mûriers, vous le trouveriez juste envers les cultivateurs de garance ? Il est impossible d’admettre un pareil système, de traiter une industrie d’une manière et une autre d’une autre. Il faut supprimer toutes les primes, tous les encouragements que vous avez accordés jusqu’à présent, ou, si vous maintenez les uns, il faut les maintenir tous. Veut-on supprimer les primes en faveur de la fabrication du sucre, en faveur de la culture du mûrier, et toutes les autres primes que l’on accorde ? Alors nécessairement, je ne pourrai pas demander une exception pour la garance ; mais je demande qu’on ne lui fasse pas une position exceptionnelle, qu’on lui maintienne les faveurs que l’on accorde à d’autres industries.

M. Osy. - L’honorable M. d’Hoffschmidt a demandé la suppression de la prime pour la culture de la garance. Messieurs, je dois faire mes réserves à l’égard de cette proposition, ainsi qu’à l’égard de celle de la section centrale qui demande qu’on réduise la prime de moitié en 1848, pour la supprimer entièrement en 1849.

Messieurs, j’engage beaucoup le gouvernement à nous faire l’année prochaine, avant la discussion du budget, un rapport sur la culture de la garance et sur la production les terres qui ont été consacrées à cette culture.

La garance vient parfaitement bien dans la Zélande. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas la cultiver avec autant de succès dans les polders de la province d’Anvers et des Flandres. Si nous pouvions réussir dans cette culture, ce serait un grand avantage pour le pays de ne pas devoir aller acheter ce produit à l’étranger.

Messieurs, l’arrêté relatif à la culture de la garance n’a été pris qu’en 1841 ; il y a cinq ans qu’on a décrété les primes. Or, la culture de la garance est une culture de trois ans ; c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu deux cultures depuis que l’arrêté est pris, et déjà on veut réduire la prime. Il serait très utile que le gouvernement voulût nous éclairer à cet égard par un rapport.

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.