(Annales parlementaires de Belgique, session 1845-1846)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 1000) M. de Villegas. fait l'appel nominal à une heure et un quart.
M. Huveners. lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Villegas. présente t'analyse des pièces adressées à la chambre.
« Les administrations communales de Florenne, Hansinne, Hansinelle, Moriaimé, Rosée, Soulmes, Gochenée, Vadelee, Surice, Gimnée, Romerée, Matagne-la-Petite, Matagne-la-Grande, Sautour, Philippeville, Vodecée et Viliers-le-Gambon réehment l'intervention de la chambre pour obtenir l'achèvement de la route empierrée de Charleroy a Florennes, dont la concession a été accordée au sieur Baudour. »
- Renvoi à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport.
« Le sieur Jamotte, échevin de la commune d'Amay, demande que le chemin de fer de Huy à Liège soit établi sur la rive gauche de la Meuse. »
- Même renvoi.
« Les membres du conseil communal et les notables de la commune d'Autryve demandent que le gouvernement pratique une communication entre l'ancien et le nouveau lit de l'Escaut en amont du barrage établi à Autryve. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget des travaux publics.
« Plusieurs industriels et négociants de la ville de Huy demandent la réforme postale.»
- Renvoi aux ministres des travaux publics et des finances.
M. Orban. - La section centrale chargée de l'examen du projet de loi tendant a accorder un crédit provisoire de 1,500,000 fr. au département de l'intérieur m'a chargé de vous en proposer l'adoption.
Ce crédit est calculé sur les besoins du service jusqu'à la fin de mai, époque avant laquelle il n'est pas à présumer que le budget de l'intérieur puisse être voté. Si la somme demandée est supérieure à celle de 800,000 fr. accordée pour faire face aux besoins du service pendant les trois premiers mois de l'année, cela provient de ce qu’il n'a plus été possible de borner cette fois l'emploi du crédit à l’acquit des traitements et des dépenses urgentes.
La section centrale a cru cependant devoir renouveler la réserve qu'elle a faite dans son rapport sur le crédit provisoire de 800,000 fr., à l'égard des augmentations de crédit qui ne devront pas être préjugées avant l'adoption du budget.
- La chambre décide qu'elle s'occupera immédiatement de ce projet.
La discussion générale est ouverte.
M. de Renesse. - Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur, si, au moyen du crédit provisoire dont il s'agit, il pourra accorder, sur la somme de 500,000 francs destinés pour les chemins vicinaux, les subsides déjà demandés par plusieurs communes. C'est ordinairement après les semailles de l’avoine, que les paysans ont le plus de temps pour travailler aux chemins. Dans les circonstances où le pays se trouve cette année, il est indispensable d'accorder les subsides dont il s'agit, le plus tôt possible, afin de procurer du travail aux populations.
(page 1001) M. le ministre de l’intérieur (M. Van de Weyer). - Messieurs, dans les circonstances actuelles le ministère s'est fait un devoir d'aller au-devant de ces besoins ; il a mis plusieurs communes à même de continuer d'anciens travaux et même d'en commencer de nouveaux. Cependant je pense qu'il ne pourra guère, vu les besoins de l'administration, disposer, pour les chemins vicinaux, d'une partie du crédit provisoire qui est demandé à la chambre ; et comme il est probable que le budget de l'intérieur sera prochainement discuté, je pense qu'il serait inutile que je prisse à cet égard un engagement qui lierait le gouvernement.
- La chambre passe à l'examen des articles.
« Art. 1er. Il est ouvert au ministère de l'intérieur un nouveau crédit provisoire de un million cinq cent mille francs (1,500,000 fr.), à valoir sur le budget des dépenses de ce département pour l'exercice de 1846. »
- Adopté.
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »
- Adopté.
Il est procédé an vote par appel nominal sur l'ensemble du projet qui est adopté à l'unanimité des 61 membres présents.
Ce sont : MM. Castiau, Clep, David, de Bonne, de Breyne, de Brouckere, Dechamps, de Chimay, de Corswarem, de Foere, de Haerne, de La Coste, Delehaye, de Meester, de Mérode, de Muelenaere, de Renesse, de Roo, de Saegher, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux, de Tornaco, de Villegas, d'Hoffschmidt, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fallon, Henot, Huveners, Jonet, Lange, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Malou, Mast de Vries, Mercier, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Savart, Scheyven, Sigart, Simons, Thienpont, Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen, Verwilghen, Veydt, Wallaert, Zoude, Biebuyck et Cans.
M. Mast de Vries, rapporteur. - Messieurs, dans les circonstances actuelles, il est en quelque sorte impossible de discuter le budget du département des travaux publics. Par la loi du 30 novembre 1845, vous avez accordé 3,208.212 fr. 65 c. pour assurer le service jusqu'à la fin du premier trimestre de 1846. Ce trimestre étant sur le point d'expirer, il convient de pourvoir aux dépenses du mois d'avril prochain ; à cette fin le gouvernement vous demande un nouveau crédit provisoire de 1,069,404 francs 32 centimes.
La section centrale, à l'unanimité, admet cette proposition ; il reste toutefois entendu que toutes les questions soulevées par le rapport de la section centrale sont réservées.
- La chambre décide qu'elle s'occupera immédiatement de ce projet.
La discussion générale est ouverte.
M. Sigart. - Messieurs, une loi votée dans la dernière session est frappée d'inexécution. La société concessionnaire du canal de Mons à la Sambre prétend que ce canal est inexécutable. Cette assertion me semble, à moi, un peu ridicule en présence du travail remarquable de plusieurs ingénieurs, et notamment de celui de M. Vifquain, sur les voies navigables en Belgique ; cependant, le gouvernement, quoiqu'en procès avec la société, a cru devoir faire examiner l'assertion. Je demanderai à M. le ministre des travaux publics quel a a été le rapport de la commission chargée de cet examen.
M. le ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, les concessionnaires du canal de Mons à la Sambre n'ont pas voulu se soumettre à la loi qui a autorisé la concession de ce canal. Ils ont prétendu que, par suite des modifications introduites par cette loi, dans la convention passée entre eux et le gouvernement ils sont déliés de leurs engagements. Le gouvernement n'a point adopté cette manière de voir et, par arrêté du 13 novembre dernier, les demandeurs ont été déclarés concessionnaires. Depuis lors ils ont intenté une action au gouvernement, en restitution du cautionnement qu'ils ont versé et cette action est maintenant pendante devant le tribunal de première instance de Bruxelles. D'un autre côté, ils prétendent que le canal n'est point exécutable, prétention qu'ils ont appuyée d'un mémoire très développé, rédigé par leur ingénieur. En présence de cette assertion, le gouvernement a cru devoir faire examiner la question par une commission composée de trois ingénieurs de l'Etat. Ceux-ci s'en occupent en ce moment-ci, et je crois que je recevrai incessamment leur rapport. Le gouvernement a cru qu'il ne devait pas laisser planer le moindre doute sur cette question. Il suffisait que l'ingénieur de la société eût développé longuement dans un mémoire l’opinion que le canal n'est pas susceptible d'exécution pour que le gouvernement ait cru devoir obtenir la certitude la plus complète, les preuves les plus claires, sur la question de savoir si les concessionnaires sont dans l'erreur.
Voilà, messieurs, où en est cette affaire. Le gouvernement a l'intention de la poursuivre, et j'espère qu'il pourra obtenir une solution d'ici à un certain temps.
Je ne pourrais pas en dire davantage dans le moment actuel.
M. Osy. - Je demanderai à M. le ministre si l'exécution du chemin de lier concédé à la même compagnie est également interrompue, ou si elle aura lieu nonobstant les difficultés qui existent relativement au canal.
M. le ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt). - Les concessionnaires refusent aussi d'accepter la concession du chemin de fer, par suite des modifications qui ont été introduites par la loi dans la convention.
M. Sigart. - Je prie M. le ministre de vouloir hâter le rapport des ingénieurs dont il a parlé, car les inquiétudes les plus vives règnent parmi les intéressés.
M. Pirmez. - Le gouvernement a fait sans doute étudier avec tous les soins possibles les projets de canal et de chemin de fer dont il s'agit avant de traiter de la concession. Dès que le traité est conclu, il me semble qu'il n'a plus rien à examiner à cet égard. Si le gouvernement, après avoir fait étudier des questions de cette nature, recommence de nouvelles études après que le traité est conclu, à chaque réclamation qui serait élevée par des concessionnaires, il me semble que c'est ouvrir la porte à une foule d'inconvénients.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, je ne pense pas qu'un travail public en Belgique ait été plus soigneusement étudié que le canal de Mons à Erquelinnes. Les membres de la chambre savent que la concession avait été demandée par M. Vander Elst ; l'avis des ingénieurs a été donné, l'enquête administrative prescrite par l'arrêté de 1836 a eu lieu, l'instruction a été complète, et les membres de la chambre qui ont entre les mains le rapport remarquable de M. l'ingénieur divisionnaire Vifquain, sur les voies navigables en Belgique, peuvent se convaincre que cet inspecteur a examiné la question du canal d'Erquelinnes d'une manière approfondie.
Les concessionnaires nouveaux ayant contesté la possibilité de l'exécution du canal, sous le rapport de l'alimentation et sous d'autres rapports, il était du devoir du gouvernement de se livrer à de nouvelles études, pour connaître si les motifs de refus allégués par les concessionnaires sont fondés.
M. le ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, j'ajouterai aux explications de mon collègue, M. le ministre des affaires étrangères, que les études nouvelles qui viennent d'être ordonnées, ne préjugent nullement la question en ce qui concerne les droits du gouvernement. Dans tous les cas, le commencement des travaux est arrêté par le procès existant entre le gouvernement et les concessionnaires. Ainsi les études auxquelles on se livre, dans ce moment, n'arrêtent nullement l'exécution des travaux. Ces études sont faites, pour qu'il ne puisse planer une ombre de doute sur la question de savoir s'il y a possibilité d'exécution du canal, ainsi que d'une exploitation facile.
- La discussion générale est close. La chambre passe aux articles.
Articles 1 et 2
« Art. 1er. Il est ouvert au ministère des travaux publics un crédit provisoire de un million soixante-neuf mille quatre cent quatre francs trente-deux centimes (fr. 1,069,404 32 c), pour faire face aux dépenses du mois d'avril de l'exercice 1846.
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le 1er avril 1846. »
Ces deux articles sont successivement adoptés sans discussion.
On passe à l'appel nominal pour le vote sur l'ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 63 membres présents.
M. le président. - L'ordre du jour appelle le vote définitif du projet de loi sur les ventes a l'encan.
M. Savart-Martel. - Messieurs, il a été fait rapport sur un crédit supplémentaire demandé par le département de la justice, le 26 février dernier. Ce rapport a été imprimé et distribué. La discussion a été fixée à l'ordre de ce jour. Je viens d'apprendre que M. le ministre de la justice ne peut se trouver à la séance à cause d'indisposition ; mais on me dit que l'un de ses honorables collègues est chargé de le remplacer. S'il en est ainsi, je proposerai à la chambre de discuter immédiatement ce projet de loi.
- La chambre, consultée, décide qu'elle s'occupera immédiatement de ce projet de loi.
L'article unique du projet de loi est ainsi conçu ;
« Article unique. Il est ouvert au département de la justice un crédit supplémentaire de cinquante-six mille quatre cent vingt francs (56,420fr.), dont la destination est indiquée ci-après, savoir :
« 1° Quarante-trois mille francs (43,000 fr.), qui seront ajoutés au chiffre de l'article 2, chapitre VI, du budget de l'exercice 1845, pour faire face aux dépenses du Moniteur pendant ledit exercice.
« 2° Six mille quatre cent vingt francs (6,420 fr.), qui seront ajoutés à la somme allouée à l'article 2, chapitre VI, du budget de l'exercice 1844, pour couvrir la dépense occasionnée par l'impression et la publication des Annales parlementaires, session de 1844-1845, et de la table des matières du Moniteur, pour le 2ème semestre de 1844.
« Sept mille francs (7,000 fr.), qui seront ajoutés à la somme allouée à l'article 4, chapitre X, du budget de l'exercice 1843, pour frais d'impression et de bureau dans les prisons. »
M. Savart-Martel. - Messieurs, en qualité de rapporteur de la commission, je dois faire remarquer que le crédit demandé pour 56,420 francs doit être poussé à 58,274 francs 58 centimes.
La différence de ce chiffre a été expliquée dans le rapport que j'ai eu l'honneur de vous soumettre ; elle provient de ce que la demande de crédit, préparée en 1845, ne comprenait que les dépenses faites jusqu'en novembre, tandis qu'à ce jour, nous y comprenons les dépenses faites jusqu'au 1er janvier 1846, de manière à ce qu'on ne vienne pas nous demander un nouveau crédit.
D'après le projet de la commission, auquel le gouvernement se ralliera (page 1002) probablement, la loi devrait être rédigée de manière à ce que le chiffre du n°1 sera porté à 44,856 fr. 28 c.
Que le chiffre du n° 2 sera réduit à 6,418 fr. 10 c.
Enfin que le chiffre du n°3 restera fixé à 7,000 fr.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Le gouvernement se rallie au projet de loi, tel qu'il a été présenté par la commission.
- Personne ne demandant plus la parole, on passe à l'appel nominal.
Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 63 membres présents. Il sera transmis au sénat.
Les amendements introduits lors du premier vote dans les articles 2, 3 et 4 sont successivement confirmés sans discussion.
« Art. 5. Les ventes publiques et en détail après cessation de commerce, ou dans les autres cas de nécessité prévus par l'article 3 de la présente loi, ne pourront avoir lieu qu'autant qu'elles auront été préalablement autorisées par le collège des bourgmestre et échevins, sur la requête du commerçant propriétaire, à laquelle sera joint un état détaillé et en double des marchandises.
« L'autorisation ne sera délivrée qu'après que le collège des bourgmestre et échevins aura reconnu que le fait qui donne lieu à la vente est réel ou a été constaté par l'autorité judiciaire, et que le commerçant, directement ou indirectement, personnellement ou sous un nom interposé, n'a pas joui de la même faveur depuis cinq ans au moins.
« Le collège des bourgmestre et échevins constatera, par l’acte d'autorisation, le fait qui donne lieu à la vente : il indiquera le jour où elle commencera ; elle sera continuée sans désemparer, sauf les jours fériés. Si la vente a lieu par cessation de commerce, elle se fera dans le local où il s'exerçait. En cas de nécessité dont l'appréciation appartient au tribunal de commerce, le collège des bourgmestre et échevins indiquera le lieu de la vente.
« L'autorisation ne pourra être accordée, pour cause de nécessité, qu'au marchand sédentaire, patenté et ayant son domicile réel, depuis un an au moins, dans la commune où la vente doit être opérée.
« L'autorisation et l'état détaillé des marchandises seront transcrits dans les affiches apposées à la porte du lieu où se fera la vente ; ces affiches seront rendues publiques huit jours au moins avant la vente, et ne pourront être retirées que lorsque la vente sera entièrement terminée.
« Le collège des bourgmestre et échevins sera tenu de statuer dans la huitaine de la demande. Celui auquel l'autorisation aura été refusée pourra se pourvoir auprès de la députation permanente du conseil provincial. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, je proposerai quelques changements de rédaction. Au troisième paragraphe, au lieu des mots : « Il indiquera le jour où elle commencera ; elle sera continuée sans désemparer »; je propose de substituer : « Il indiquera le jour où commencera la vente qui sera continuée sans désemparer. »
Au même paragraphe, je lis : « Si la vente a lieu par cessation de commerce, elle se fera dans le local où il s'exerçait. »
Evidemment cette rédaction est défectueuse. Je propose de substituer au pronom « il » les mots : « ce commerce ». Ce paragraphe serait ainsi conçu :
« Le collège des bourgmestre et échevins constatera, par l'acte d'autorisation, le fait qui donne lieu à la vente ; il indiquera le jour où commencera la vente qui sera continuée sans désemparer, sauf les jours fériés. Si la vente a lieu par cessation de commerce, elle se fera dans le local où ce commerce s'exerçait. En cas de nécessité, dont l'appréciation appartient au tribunal de commerce, le collège des bourgmestre et échevins indiquera le lieu de la vente. »
- Cet amendement est mis aux voix et adopté.
L'article 5, avec cette modification, est définitivement adopté.
Les amendements introduits aux articles 9 et 10 sont confirmés sans discussion.
« Art. 11. Le droit d'enregistrement à percevoir sur les ventes publiques de marchandises neuves mentionnées à l'article 2, est porté à 5 p. c, sauf en ce qui concerne les ventes publiques en détail autorisées par l'article 5, sur lesquelles on continuera à percevoir le droit fixé par l'article 13 de la loi du 31 mai 1824. »
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs la rédaction de cet article n'atteint pas le but que le gouvernement avait en vue, de frapper d'un droit d'enregistrement les ventes publiques qui se font par spéculation commerciale et simplement d'excepter de ce droit les marchandises comprises dans l'article 5, c'est-à-dire les marchandises dont la vente est forcée. Mais on ne peut pas dire que le droit d'enregistrement à percevoir sur les ventes publiques de marchandises neuves mentionnées à l'article 2 est porté à 5 p. c, puisque l'article premier et l'article 2 ne concernent qu'une chose, les marchandises dont la vente est interdite et non celles dont la vente est autorisée. Je propose de supprimer les mots : « mentionnés à l'article 2 ».
M. de Corswarem. - Je crois que M. le ministre des affaires étrangères esl dans l'erreur. On a voulu frapper d'un droit de 5 p. c. toutes les ventes de marchandises qui se feraient par spéculation commerciale, dit l'exposé des motifs. Il va sans dire que parmi les ventes désignées à l'article 3, aucune ne peut se faire par spéculation commerciale, si ce n'est en fraude.
Voyons quelles ventes sont autorisées par l'article 3. Ce sont d'abord celles prescrites par la loi ou faites par autorité de justice, qui ne peuvent pas être des spéculations, non plus que celles faites par les monts-de piété ; ce sont ensuite les ventes faites après décès, faillite ou cessation de commerce qui ne se font également pas par spéculation commerciale.
Quand des ventes pour cause de cessation de commerce sont faites par spéculation, elles ne le sont qu'en fraude de la loi. Cet article comprend encore les ventes faites en cas de nécessité dont l'appréciation sera soumise au tribunal de commerce. Il n'est pas à supposer que le tribunal déclarerait la nécessité d'une vente qui serait faite en fraude de la loi et par spéculation commerciale. Je crois que le droit de 5 p. c. a été proposé sur les ventes de marchandises en gros, sur les ventes faites d'après les quantités ou valeurs déterminées à l'article 2. Si cela ne s'appliquait pas à ces ventes-là, les ventes de marchandises en gros qui se font par spéculation commerciale, ne payeraient que le droit d'un demi pour cent, imposé sur la vente de tout ce qui est réputé marchandise dans le commerce, et le droit de 5 p. c. frapperait les ventes des marchandises en détail. Or, les ventes en détail par spéculation de commerce, ne peuvent déterminer la fixation du montant des droits, car d'après les dispositions de la loi, elles ne peuvent être faites qu'en fraude.
La rédaction de l'article ne me paraît pas claire. Je crois qu'il vaudrait mieux dire : « Le droit d'enregistrement à percevoir sur les ventes publiques de marchandises neuves autorisées par l'article 2 est porté à 5 p. c. » L'art.icle2 autorise la vente de marchandises neuves en quantités déterminées par la loi.
On devrait faire ensuite un deuxième paragraphe ainsi conçu : « Sur les ventes publiques et en détail autorisées par l'art. 3, on continuera à percevoir le droit fixé par l'article 13 de la loi du 31 mai 1824. »
En adoptant cette disposition, nous resterions dans les termes de l'exposé des motifs et dans l'esprit qui nous a guidés lors de notre premier vote.
On ne peut pas admettre l'amendement de M. le ministre des affaires étrangères, car alors mieux vaudrait laisser l'article tel qu'il est, bien qu'il ne soit pas des plus clairs. N'oubliez pas qu'il a été présenté par le gouvernement quoique ce soit un amendement.
C'est une chose que je tiens à constater en passant. Le premier projet portait : » II sera perçu un droit de 5 p. c. sur les ventes publiques de marchandises neuves désignées à l'article 2 ».
On voulait dire, celles qui en certaine quantité ou par lots d'une valeur de 100 fr. au moins sont autorisées par cet article.
La section centrale a changé cette rédaction, mais en continuant également « à dire les marchandises neuves désignées à l'article 2 ». Or, l'article 2 ne concerne que les ventes en gros. Je crois qu'il faut ou maintenir l'article voté au premier vote, ou, si on veut améliorer la rédaction, adopter celle que je propose. Mais je ne crois pas que l'amendement de M. le ministre puisse être admis, car il bouleverserait toute l'économie de la loi, telle qu'elle a été entendue par nous jusqu'à présent
M. Delehaye, rapporteur. - Je dois combattre la proposition de l'honorable M. de Corswarem et appuyer celle qui vous est faite par le gouvernement. L'honorable M. de Corswarem demande qu'on remplace les mots « mentionnées à » par ceux-ci : « autorisées par ». Mais l'article 2 n'autorise aucune vente. Cet article 2 est un article explicatif de l'article premier. L'article premier dit que les ventes publiques en détail des marchandises neuves sont interdites., l'article 2 explique ce qu'il faut entendre par les ventes en détail ; il n'autorise pas, il interdit les ventes publiques par quantités inférieures à celles déterminées dans cet article.
Si l'honorable membre entend par ventes autorisées par cet article les ventes par quantités supérieures à celles déterminées dans l'article 2, ce sont des ventes en gros. Or, les ventes en gros ne sont pas prévues par l'article 2, mais bien par un autre article. Mieux vaudrait, dans ce cas, dire que les ventes en gros seules doivent supporter la majoration de droits d'enregistrement. En se bornant à cette indication, on remplit suffisamment le but que l'on se propose.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - J'aurai peu de chose à dire après les observations de l'honorable M. Delehaye. Il me suffira de lire un passage de l'exposé des motifs de l'honorable M. Nothomb, pour démontrer que le sens que j'ai attribué à l'article 11 est bien celui que le gouvernement a voulu lui donner :
(M. le ministre donne lecture de ce passage.)
Ainsi donc le droit d'enregistrement doit frapper les ventes publiques à l'encan, autorisées par la loi. Si c'est là le sens que l'honorable M. de Corswarem attache à son amendement, je ne vois pas d'inconvénient à l'admettre. Nous sommes d'accord sur le sens de l'article.
L'honorable membre demande si l'article s'applique aux ventes en gros.
Il s'applique aux ventes publiques de marchandises neuves d'une quantité ou d'une valeur supérieure à celles fixées par l'article 2.
Ce sont ces ventes que la loi rend encore possibles et qu'il faut frapper d'un droit d'enregistrement. En effaçant les mots mentionnées à l'article 2, le sens devient clair.
Il est évident qu'il s'agit des ventes publiques des marchandises neuves, autorisées par la loi. Il convient donc d'effacer la mention de l'article 2, article qui n'autorise pas, mais qui prohibe, au contraire, des ventes à l'encan.
M. de Saegher. - Je prierai l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir bien expliquer sur quelles ventes sera perçu le droit d'enregistrement de 5 p. c.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - L'article 2 prohibe les veilles publiques et en détail de marchandises neuves par lois d'une quantité ou d'une valeur inférieures à celles désignées dans cet article. Mais les ventes de marchandises d'une valeur ou d'une quantité supérieures restent possibles. C'est à ces ventes à cri public que le (page 1003) droit d'enregistrement va s'appliquer. Mais le deuxième paragraphe excepte toutes les ventes publiques et en détail autorisées par l'article 3, c'est-à-dire les ventes faites par cessation de commerce, par autorité de justice, après décès, faillite, c'est-à-dire toutes les ventes forcées qui ne sont pas faites par spéculation.
M. de Corswarem. - Il n'est pas étonnant qu'il règne quelque désordre dans la discussion. L'article 11 a été introduit, au moment de la discussion même, par M. le ministre de la justice ; aujourd'hui, l'amendement est introduit également inopinément par l'honorable ministre des affaires étrangères.
Je vois que nous ne sommes pas d'accord sur la valeur de l'article, sur son esprit. L'honorable M. Delehaye et l'honorable ministre les affaires étrangères ne sont pas d'accord non plus. L'honorable M. Delehaye dit que le droit de 5 p. c. ne doit frapper que les ventes faites par celui qui cesse son commerce. (Dénégations.)
Messieurs, j'ai tenu note de ces paroles au moment même où elles ont été prononcées. Je comprends donc l'article dans un sens et ceux qui m'interrompent le comprennent dans un autre. Voilà ce qui nous embrouille.
L'honorable rapporteur de la section centrale nous a dit que le droit de 5 p. c. ne doit frapper que les ventes faites après cessation de commerce, parce que, a-t-il ajouté, celui qui cesse son commerce le fait parce que ses affaires sont en bon état ; il va se mettre à l'aise ; il peut bien supporter un droit de 5 p. c. sur ce qui lui reste encore en magasin.
Ce raisonnement ne reposerait peut être pas sur une fausse base si tous ceux qui cessent leur commerce ne le cessent que parce qu'ils sont devenus riches ; mais il en est beaucoup qui ne le cessent que pour ne pas perdre ce qui leur reste encore après avoir déjà perdu une partie de leur fortune. Si vous établissez le droit sur les ventes faites par cessation de commerce, vous frapperiez les débris de la fortune qu'un négociant malheureux voudrait faire échapper à son naufrage. Vous voyez que nous ne sommes pas d'accord. L'honorable M. Delehaye et l'honorable ministre des affaires étrangères professent tous deux une opinion diamétralement opposée.
Je dois convenir, pour ma part, que j'ai cru que ce droit de 5 p. c. frappe toutes les ventes qui ne seraient pas faites par nécessité, ou qui ne seraient pas autorisées par l'article 5.
Tellement que j'ai cru qu'il frappait les ventes en gros. Voici où j'ai puisé mon opinion.
Si les ventes en gros ne doivent également payer qu'un droit d'un demi pour cent, je crois que ce sera une nouvelle faveur bien grande faite au commerce.
En supprimant dans la loi les mots « marchandises non manufacturées », nous avons déjà fait une grande faveur au commerce. Tout le monde ne saisit peut-être pas la portée de cette suppression. La chambre me permettra de la lui expliquer.
D'après la loi du 22 frimaire an VII, toutes les ventes d'objets mobiliers sont frappées d'un droit de 2 p. c. Depuis cette loi, les bois étrangers, importés dans le pays et vendus publiquement, payaient un droit de 2 p. c, tout comme celles de bois indigènes, qu'il fût sur pied ou abattu. Mais est intervenue la loi du 31 mai 1824 qui a réduit à un demi pour cent le droit sur les marchandises réputées telles dans le commerce. Alors le commerce a dit : Les bois étrangers introduits par le commerce et vendus pour compte des marchands de bois, sont des marchandises réputées telles dans le commerce. Ainsi les ventes de ces bois étrangers ne doivent être soumises qu'à un droit d'un demi pour cent. Ce raisonnement a été admis et le droit sur les ventes de bois faites pour compte d'un marchand de bois a été réduit de 2 p. c. à 1/2 p. c.
Aujourd'hui, en introduisant dans la loi les expressions « marchandises manufacturées ou non », on atteignait également les bois ; car un arbre en grume est une marchandise non manufacturée et une planche est une marchandise manufacturée ; mais après la suppression des marchandises non manufacturées, et d'après les explications qui ont été données, que les planches n'étaient pas de la marchandise manufacturée, aucun bois venant de l'étranger ne sera soumis au droit de 5 p. c.
Qu'arrive-t-il maintenant ? Lorsqu'aujourd'hui un propriétaire vend une partie de ses forêts à un marchand de bois, celui-ci les abat, les revend en détail après les avoir triés de différentes manières, et ne paye qu'un demi pour cent, parce que ce sont des marchandises réputées telles dans le commerce.
Mais que le propriétaire fasse abattre ses arbres lui-même, soit pour l'amélioration des bois, soit pour les progrès de la culture forestière, ou pour mille autres causes quelconques, alors il payera 2 p. c. parce que ses bois ne sont pas réputés marchandises dans le commerce.
Si, au contraire, le propriétaire, passante cours mains du commerce, vend ses bois à un marchand, celui-ci ne paye pas leur demi pour cent, parce qu'alors les bois sont réputés marchandera dans le commerce. C'est donc une faveur notable que l'on a faite au cises dan
Aujourd'hui, si les ventes en gros ne soommerce. pées d'un droit de 5 pour cent, c'est une nouvelle faveur que n nt pas frapnouveau au commerce ; et l'on sait que ce sont les v entes ous ferons de chandises étrangères qui font le plus de tort à l'industrie nationale.
Je voudrais que la question fût posée nettement, que nous fussions édifiés sur le point de savoir si les ventes de marchandises, dans les quantités désignées à l'article 2, seront soumises à un droit de 3 pour cent, ou à un droit d'un demi pour cent.
Voilà la question que je pose, et je prie l'honorable ministre des affaires étrangères de vouloir bien y répondre catégoriquement.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - L'honorable M. de Corswarem et moi sommes d'accord sur le sens à donner à l'article 11. La première observation que j'ai faite était relative à la rédaction. Je crois inutile d'insérer dans l'article les mots « mentionnées à l'article 2 », parce que dans cet article on indique quelles seront les ventes qui seront prohibées, et non quelles seront les ventes autorisées. En supprimant ces mots, le sens de l'article devient beaucoup plus clair ; car il est évident qu'il ne s'agit que des ventes qui sont autorisées par la loi. Nous sommes donc complétement d'accord.
M. de Corswarem. - Je retire mon amendement.
M. Donny. - Si, dans l'article en discussion, l'on supprime la mention de l'article 2, je désire savoir si le droit de 5 p. c. sera appliqué aux ventes qui ne sont pas mentionnées dans cet article 2. Voici les motifs de mon doute.
Dans l'article 2, ne sont pas mentionnées les ventes des bois de construction, puisque ces bois ne sont pas une marchandise manufacturé dans le sens que nous avons attaché à cette qualification. Dès lors, on comprend qu'en disant, à l'article 11, que le droit de 5 p. c. ne serait perçu que sur les ventes publiques autorisées à l'article 2, les ventes de bois de construction se trouvaient soustraites au payement de ce droit élevé. Mais si vous effacez la mention de l'article 2, n'est-il pas à craindre qu'on applique la loi de manière à faire peser le droit de 5 p. c. sur toutes les ventes non exceptées à l'article 3, et par conséquent sur celles des bois de construction ?
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - La suppression que je propose ne donne pas à l'article le sens que supposait l'honorable M. de Corswarem.
Il est clair qu'il ne s'agit que des ventes de marchandises neuves autorisées par l'article 2 ; et les bois sont évidemment exceptés.
- La suppression des mots « mentionnées à l'article 2 » est mise aux voix et prononcée.
L'article 11 est adopté avec cette suppression.
La suppression de l'art. 13 est définitivement adoptée.
Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet.
61 membres répondent à l'appel nominal.
40 votent l'adoption.
21 votent le rejet.
En conséquence le projet est adopté ; il sera transmis au sénat.
Ont voté l'adoption : MM. David, de Bonne, de Breyne, Dechamps, de Corswarem, Dedecker, de Haerne, de La Coste, Delehaye. de Man d'Attenrode, de Mérode, de Muelenaere. de Renesse, de Roo, de Saegher, de Sécus, Desmet, de Terbecq, de Theux, de Villegas, Donny, Eloy de Burdinne, Fallon, Henot, Huveners, Kervyn, Lys, Maertens, Mast de Vries, Mercier, Rodenbach, Savart, Scheyven, Simons, Thienpont, Van Cutsem, Verwilghen, Wallaert, Zoude, Cans.
Ont voté le rejet : MM. Castiau, Clep, Delfosse, de Meester, de Tornaco, Duvivier, Jonet, Lange, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Orban, Osy, Pirmez, Pirson, Sigart, Vanden Eynde, Vandensteen, Verhaegen, Biebuyck.
M. de Mérode. - Messieurs, après vous être réunis depuis le mois de novembre, avec l'espoir de traiter les affaires du pays, nous sommes dans la plus fâcheuse stagnation, sans budgets des travaux publics, de l'intérieur et de la guerre. Jamais pareil avortement ne s'était présenté, et cela tandis que les plus belles promesses nous ont été adressées par le ministère et particulièrement par celui des ministres qui est censé chef du cabinet. Comme, selon les renseignements qui nous sont parvenus et qui ont un caractère beaucoup plus sérieux que des bruits, la cause de la perturbation déplorable, dont nous subissons le fatal effet, provient d'une dissidence extrême, sur un point spécial, entre le ministre de l'intérieur et tous ses collègues ministres à portefeuille ou sans portefeuille, il serait juste que nous connussions enfin en quoi consiste cette dissidence et quelle est la nature de ces prétentions particulières qui entravent toute la marche du gouvernement.
Nous vivons sous un régime de publicité, et le motif du trouble qui affecte si vivement notre situation politique ne peut rester occulte. A chacun l'honneur de ses combinaisons. Si celles de M. Van de Weyer brillent par une entente supérieure des besoins et des vœux du pays, à l'égard de l'éducation secondaire, il est juste qu'il soit récompensé de la hauteur de ses vues par l'approbation générale. Si ses collègues, au contraire, repoussent un projet opposé à l'esprit de nos institutions, il est à propos que tout blâme préventif cesse de peser sur eux. Mais ce qui est surtout convenable, c'est que les chambres sachent pourquoi elles sont condamnées à l'inaction. Je demande donc à apprendre quelle en est la cause positive, afin de ne pas demeurer dans l'ignorance sur un sujet qu'il est temps d'éclaircir.
Si je fais aujourd'hui cette motion, c'est que je vois qu'on va s'occuper de pétitions et qu'on demandera peut-être ensuite à la chambre de s'ajourner.
M. Rodenbach. - Il n'est pas question de cela.
M. de Mérode. - Si la chambre doit continuer ses travaux, c'est différent ; j'ajournerai mes interpellations. Mais si elle était décidée à s'ajourner, je demanderais que l'on répondît à ma question.
M. le ministre de l’intérieur (M. Van de Weyer). - Messieurs, si j'ai bien compris ce que vient de dire l'honorable préopinant, après avoir fait un discours dans lequel il nous pose des questions et nous adresse des interpellations, il conclut cependant par dire qu'il ne demande pas de réponse.
(page 1004) Je désire savoir quelle est la véritable pensée de l’honorable membre, afin que je sache si j'ai à répondre ou si je dois me taire.
M. de Mérode. - Je laisse à M. le ministre de l'intérieur l'option de répondre immédiatement ou bien à la fin de la séance. S'il préfère attendre la fin de la séance, je ne m'y oppose pas. Mais je demande une réponse aujourd’hui.
M. le ministre de l’intérieur (M. Van de Weyer). - Messieurs, les hommes politiques qui se chargent de la direction des affaires, ont deux grands devoirs à remplir : le premier, envers le pays ; le second, envers eux-mêmes. Ils accomplissent le premier, lorsque, dans la formation d'un cabinet, ils examinent quelles sont les questions sur lesquelles ils auront à délibérer. Alors des principes généraux sont posés ; et si, sur ces principes généraux ils se mettent d'accord, le gouvernement marche.
Que si, ensuite, dans l'examen et l'application de ces principes il se présente des questions sur lesquelles un désaccord a lieu, ces hommes politiques ont un devoir à remplir envers eux-mêmes, c'est de ne pas abandonner des principes qu'ils ont toujours professés, dût-on les accuser d'avorter. Je parle de mes collègues comme de moi-même.
Ni la couronne, ni les chambres, ni le pays ne pourraient exiger de ces hommes qu'ils abandonnassent ces principes, car ce serait exiger qu'ils se déshonorassent.
Il reste alors, pour les ministres qui se sont séparés sur une question de principes, un troisième devoir à remplir, et envers la couronne et envers le pays, c'est de ne pas empêcher, quel que soit le désir qu'ils éprouvent tous de rendre à la chambre un compte complet des dissidences et des causes de ces dissidences, c'est de ne pas empêcher, dis-je, par des explications intempestives et prématurées la formation d'une autre administration qui doit venir prendre leur place.
Ce devoir, messieurs, je prie la chambre de le croire, est peut-être plus difficile et plus pénible à remplir que tous les autres. Mais quel que soit le désir de l'immuable préopinant de nous y faire manquer, je suis convaincu que, si la question lui eût été présentée telle que je viens de l'exposer, il n'aurait pas fait l'interpellation qu'il nous a adressée, ou, du moins, il n'eût pas insisté pour recevoir une réponse immédiate.
M. de Mérode. - La question est de savoir si mes interpellations sont intempestives ou prématurées. Je ne me suis pas, me paraît-il, trop pressé de faire la demande que j'adresse aujourd'hui au ministère, et particulièrement à M. le ministre de l'intérieur. Voilà déjà très longtemps que nous sommes dans une situation extrêmement pénible, qui gêne non seulement les travaux de la chambre, mais aussi les négociations avec l'étranger, et qui nous met ainsi, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, dans une des positions les plus nuisibles.
J'ai attendu jusqu'à présent pour demander des explications. Il me paraît que l'on a eu le temps, depuis le différend survenu dans le cabinet, de se concerter afin de mettre un terme à la situation actuelle. Je ne puis, sans doute, forcer à donner des renseignements si l'on me les refuse ; mais je crois pouvoir soutenir que je n'ai pas trop tôt provoqué l'éclaircissement que je réclame particulièrement de M. le ministre de l'intérieur.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, je ne reviendrai pas sur les explications que vient de vous donner mon honorable collègue M. le ministre de l'intérieur, mais je crois devoir y ajouter un mot en ce qui concerne les travaux de la chambre.
Le 2 de ce mois nous avons remis à Sa Majesté nos démissions. Depuis lors les travaux de la chambre, loin d'être interrompus, ont été féconds en résultats utiles pour le pays.
Je désire que nous puissions continuer à traiter avec autant de calme, avec autant de maturité, les grandes questions dont la solution intéresse le pays.
Il n'y a donc pas inaction dans la chambre, pas d'entrave dans la marche des affaires. Je serais peut-être en droit de dire le contraire et de faire remarquer que ces lois importantes votées récemment, l'ont été (à raison peut-être des circonstances), en dehors des préoccupations qui quelquefois viennent se mêler aux débats d'affaires.
M. Lejeune. - Je demanderai à la chambre de bien vouloir s'occuper maintenant du rapport de l'honorable M. Fallon, sur la pétition des habitants de Lichtervelde.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, mon honorable collègue M. le ministre de la justice étant indisposé, ne peut pas assister à la séance d'aujourd'hui.
Lorsque l'honorable M. Fallon' a fait son rapport, il a été convenu que l'on attendrait la présence de M. le ministre de la justice pour mettre ce rapport en discussion.
J'ai lieu d'espérer que demain mon honorable collègue pourra être présent, et je ne pense pas. qu'un retard d'un jour ou deux puisse porter aucun préjudice.
M. Lejeune. - Messieurs, il m'est impossible d'insister sur ma proposition, après ce que vient de dire M. le ministre des finances. Cependant je ferai remarquer que M. le ministre de la justice était présent lorsque j'ai demandé la mise à l'ordre du jour de ce rapport, et que je crois avoir compris qu'il se ralliait complétement aux conclusions présentées par l'honorable M. Fallon.
Je pensais qu'il ne s'agissait que d'un vote, mais si l'on pense qu'il y aura discussion, je n'insiste plus.
M. Fallon. - Je crois aussi que nous ne pouvons nous refuser à la demande de M. le ministre des finances ; mais je ferai observer que j'ai communiqué le rapport à M. le ministre de la justice, et qu'il m'a dit qu'il y accédait entièrement.
M. le ministre des finances (M. Malou). - En ce cas, messieurs, je n'insiste pas.. J'ignorais quelle était l'intention de mon collègue.
- La proposition de M. Lejeune est mise aux voix et adoptée.
Les deux conclusions de ce rapport sont successivement adoptées sans discussion. Elles sont ainsi conçues :
« La commission, à l’unanimité, propose à la chambre : :
« 1° Par forme de motion d'ordre, de décider que, jusqu'à ce qu'il en soit autrement disposé, la commission des circonscriptions cantonales ne s'occupera plus d'un travail d'ensemble, même par province, et se bornera à délibérer et à lui faire rapport sur les cas spéciaux qui pourront se présenter, soit de la part du gouvernement, soit à la demande des parties intéressées par la voie de pétition ;
« 2° De renvoyer la pétition des habitants de Lichtervelde au ministre de la justice, avec demande d'explications et de complément d'instruction. »
M. Rodenbach. - Je prierai la chambre de bien vouloir régler son ordre du jour, afin que nous puissions continuer nos travaux parlementaires. Je proposerai de mettre à l'ordre du jour de lundi la discussion du budget des travaux publics. (Interruption.) M. le ministre des travaux publics a déclaré à plusieurs membres de la chambre, qu'il est prêt à soutenir la discussion de son budget.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Mon collègue, le ministre des travaux publics assiste en ce moment aux discussions du sénat, mais je suis autorisé à déclarer qu'il est prêt à discuter son budget, lundi, si la chambre juge convenable de le mettre à l'ordre du jour.
M. Verhaegen. - Messieurs, la proposition qu'on vient de nous faire est en contradiction formelle avec le vote que vous avez émis tout à l'heure ; vous venez de voter un crédit provisoire pour le département des travaux publics ; comment voulez-vous après cela voter le budget définitif ? Mais alors il était inutile d'accorder un crédit provisoire. Si vous adoptez la proposition, vous vous déjugez immédiatement.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Si la chambre votait définitivement le budget des travaux publics, je comprendrais jusqu'à un certain point l'objection de l'honorable M. Verhaegen ; mais il est probable, presque certain même, que si la chambre adopte ce budget, le sénat ne pourra pas s'en occuper dans sa réunion actuelle. Ainsi, en toute hypothèse, le crédit provisoire, voté au commencement de cette séance, était indispensable.
M. Dumortier. - Il me semble que la chambre doit absolument s'occuper du budget des travaux publics et des autres budgets. Nous ne pouvons pas laisser le pays sans budgets. Nous voici arrivés presque à la fin de mars et il est possible qu'il s’écoule encore plusieurs semaines avant qu'un cabinet ne soit formé. Ensuite lorsqu'un nouveau ministère sera composé, les nouveaux ministres désireront peut-être examiner leurs budgets avant d'en aborder la discussion et de cette manière nous arriverons au mois de mai ou de juin sans avoir voté les budgets. Evidemment la chose publique souffrirait beaucoup de ce retard, et dès lors il me semble que nous devons voter le budget des travaux publics le plus promptement possible.
M. Verhaegen. - Messieurs, l'observation que j'ai eu l'honneur de faire reste debout. Vous avez voté un crédit provisoire et cela était parfaitement inutile si vous vouliez voter le budget lui-même.
Mais il y a une autre considération, c'est que vous allez vous mettre en opposition directe avec le sénat. Le sénat n'a pas jugé à propos de s'occuper de la loi de comptabilité, précisément à cause des circonstances dans, lesquelles nous nous trouvons, et vous voulez maintenant vous occuper du budget des travaux publics. Mais croyez-vous, messieurs, que le sénat discute le budget lorsque vous le lui aurez envoyé ? Il me semble qu'il est des égards que nous ne pouvons pas perdre de vue, et je crois que nous devons d'autant moins nous mettre en opposition avec le sénat, dans cette circonstance, que les motifs qui l'ont guidé sont adoptés par un grand nombre de membres de cette chambre.
Evidemment, messieurs, le moment n'est pas favorable pour discuter des objets importants, tels qu'un budget, tels que certaines autres lois encore, et j'aurai l’honneur de faire tout à l'heure la même observation pour un des objets qui se trouve à l'ordre du jour de cette séance.
M. Delehaye. - Messieurs, le sénat a déclaré qu'il lui était impossible de discuter en ce moment la loi de comptabilité parce qu'il n'y a pas de ministère définitivement constitué et vous voulez aborder la discussion d'un budget dont le vote est, par sa nature, un vote de confiance ; vous voulez accorder ce budget, ce vote de confiance à un ministre que vous ne connaissez pas ! (Interruption.) On dit que ce n'est pas un budget politique. Mais, messieurs, ce qui est politique c'est le ministre lui-même. Eh bien, ce ministre nous est inconnu. Il s'agit de voter des fonds sans savoir à qui l'emploi de ces fonds sera confié.
Véritablement il se passe quelque chose de fort étrange. Hier on nous demande un crédit provisoire, probablement parce que l'on pensait que nous ne pourrions pas voter le budget dans la situation actuelle des choses. (Interruption.) Mais, a-t-on jamais demandé un crédit provisoire à la veille de la discussion du budget ? C'est une chose dont les annales parlementaires n'offrent pas d'exemple.
(page 1005) Savez-vous, messieurs, ce que je commence à croire ? C'est que, dans certain parti, il doit s'être passe depuis hier quelque chose que nous ne connaissons pas, C'est une véritable comédie ; hier on nous demande un crédit provisoire et aujourd'hui on nous propose de passer à la discussion du budget.
Mais, messieurs, respectons un peu plus nos travaux, ne démolissons pas ce que nous avons fait une demi-heure auparavant. Je le répète, il se passe ici quelque chose d'étrange ; il est probable que d'autres membres sont dans le secret, mais moi, je vous avoue que je n'y comprends absolument rien. Si vous abordez le budget, et qu'un membre demande de quelle manière le ministre se propose d'appliquer telle ou telle allocation, qu'il ajoute que de la réponse du ministre doit dépendre son vote, que fera le gouvernement ? Ne devra-t-il pas répondre qu'il lui est impossible de faire connaître la manière de voir de son successeur ? Cent autres questions peuvent se faire sans qu'elles puissent être suivies de réponses. Malgré tout cela, il faut passer outre, et cela parce qu'il convient à un parti de faire aujourd'hui ce qu'il n'avait pas prévu hier !
M. le ministre des finances (M. Malou). - Il n'y a ici ni comédie ni secret ; dès que nos démissions ont été connues, nous avons déclaré à la chambre que nous nous considérions comme obligés d'expédier les affaires jusqu'à ce que nos démissions fussent acceptées. Cette position que nous avons prise au commencement de ce mois, nous la conservons aujourd'hui.
Le sénat a pensé que la réunion actuelle devant être très courte, il n'aurait pas le temps d'examiner, avec la maturité nécessaire, une loi aussi importante, aussi étendue que celle qui concerne la comptabilité. Je me suis abstenu d'insister pour que le sénat mît à son ordre du jour la discussion de cette loi, parce qu'il y aurait eu de ma part une espèce d'inconvenance à demander qu'il votât, du jour au lendemain, une loi qui avait exigé dans cette chambre une instruction très longue et très approfondie.
Tel est le seul motif qui m'a empêché d'insister auprès du sénat pour la discussion immédiate du projet de loi sur la comptabilité et du projet de loi sur l'organisation de la cour des comptes.
On dit, messieurs, que le vote d'un budget est nécessairement un vote de confiance. J'admets cette signification dans un certain sens, mais pas d'une manière absolue. Ainsi, par exemple, vous avez accordé au ministre des finances et à d'autres ministres, leur budget pour cette année, et s'il fallait attacher une idée aussi absolue de confiance à un semblable vote, il faudrait dans chaque budget insérer la réserve d'un vote nouveau pour le cas où le ministère n’aurait pas la durée d'un budget, ce qui s'est déjà vu.
Le budget des travaux publics a, d'ailleurs, un caractère tout spécial ; il ne soulève que des questions purement administratives, et ici on ne peut élever aucune des objections que l'on présenterait peut-être s'il s'agissait du budget de l'intérieur auquel on a parfois rattaché des questions politiques. Le budget des travaux publics n'a, depuis plusieurs années, donné lieu à aucune discussion de ce genre ; on fait valoir les intérêts divers qui se rattachent à l'administration des travaux publics, et tous les débats se renferment dans ce cercle.
La dignité de la chambre, à quoi est-elle réellement intéressée ? Est-ce à l'interruption des travaux parlementaires motivée sur l'incertitude qui existe relativement à l'issue de la crise ministérielle ? Est-ce à laisser en souffrance les intérêts matériels qui, comme les faits le prouvent, peuvent très bien être satisfaits dans les circonstances où nous nous trouvons. ? Ou bien est-ce à donner suite aux discussions relatives à ces intérêts ? Je demande à la chambre d'être conséquente avec elle-même et d'expédier les affaires qui peuvent l'être indépendamment de la situation actuelle. En procédant ainsi, la chambre ne se déjugera pas elle-même ; car je l'ai déjà fait remarquer, le vote du crédit provisoire pour le département des travaux publics était nécessaire dans toutes les hypothèses. C'est ce que m'a notamment déclaré M. le ministre des travaux publics, avant la séance, prévoyant peut-être qu'on ferait la motion de mettre son budget à l'ordre du jour. (Interruption.) M. le ministre des travaux publics a été appelé au sénat par la discussion du projet de loi relatif au chemin de fer de Louvain à la Sambre. Sans cette circonstance, il nous aurait déclaré lui-même ce que je viens de dire touchant la nécessité du crédit provisoire.
M. de Theux. - Messieurs, l'honorable M. Delehaye pense qu'il s'est passé quelque chose de secret dans un certain parti politique. Je ne sais s'il s'est passé quelque chose de semblable ; mais ce qu’il y a de certain, c'est que j'ignorais complétement qu'une motion dût être présentée à la chambre ; je ne m'y attendais pas plus que l'honorable M. Delehaye. Ainsi, quant à moi, je ne suis pas plus dans le secret que l'honorable préopinant.
Aussi, j'examinerai la question en dehors de toute préoccupation politique. Il me semble qu'il y a un certain degré d'urgence qui se rattache au vote, et tout au moins à la discussion du budget des travaux publics. Il est évident que si cette discussion n'a pas lieu maintenant, elle sera renvoyée après les vacances de Pâques ; dès lors beaucoup de travaux doivent souffrir de ce retard.
Ne pouvons-nous pas maintenant aborder la discussion du budget des travaux publics, qui est véritablement un budget administratif ? Cette discussion traîne ordinairement en longueur, a cause de l'importance de cette administration, et notamment des chemins de fer, des routes, etc. Il est à présumer qu'avant la fin de la discussion du budget, le nouveau ministère sera constitué ; dès lors, nous connaîtrons le titulaire du département, avant de voter sur l'ensemble du budget. Il y aura un grand avantage à ce que les travaux soient aussi avancés, parce que le budget des travaux publics étant adopté par la chambre des représentants, le sénat pourra s'en occuper au moins immédiatement après les Pâques, et dès lors il y aura beaucoup moins de retard.
Il y a infiniment moins d'objections à faire contre la discussion du budget des travaux publics, qui est un budget purement administratif, que contre la discussion du budget de l'intérieur, budget auquel se rattachent des questions plus ou moins politiques. Ainsi, je ne pense pas que les observations par lesquelles on a combattu la motion de l'honorable M. Rodenbach soient bien graves ; je pense, au contraire, que les avantages qui résulteront de l'adoption de cette motion, seront très grands pour le pays.
M. Dumortier. - Messieurs, j'ai été un de ceux qui ont appuyé la motion ; je ne pense pas que l'honorable M. Delehaye ait voulu faire allusion à moi, quand il a dit que certaines personnes étaient dans le secret ; je ne suis pas dans le secret ; j'ai appuyé la motion, uniquement dans l'intérêt de la chose publique. Nous ignorons encore quelle sera la personne qui sera chargée des fonctions de ministre des travaux publics ; peut-être sera-ce une personne complétement étrangère à cette administration, et dès lors nous ne pourrons aborder la discussion du budget avant la moitié de l'année, et nous marcherons de crédits provisoires en crédits provisoires. Est-ce là une chose utile pour le pays ? Non, sans doute ; je dis que, dans l'intérêt de la chose publique, il faut d'abord avoir les budgets. Les budgets des dépenses n'ont jamais été chez nous considérés comme des questions politiques, à moins que le ministre ne vînt en faire la demande à la chambre. La chambre a ait chaque année du budget des voies et moyens une question plus ou moins politique, parce que ce budget s'applique a tous les membres du cabinet ; elle a considéré les autres budgets comme des actes d'administration. Pourquoi nous abstiendrions-nous dans ce moment de faire un semblable acte d'administration ?
Il me semble que personne n'est plus à même de défendre le budget des travaux publics que le ministre qui l'a présenté, et ce ministre consent à la discussion de son budget.
Mais, dit-on, il n'y a pas de ministère. Je répondrai qu'en France, lorsqu'un cabinet se retire, la chambre se garde bien de jamais s'ajourner ; elle reste à son poste, et en agissant ainsi, elle consulte l'intérêt de sa dignité et les nécessités parlementaires.
Je pense donc que nous avons ici un double devoir à remplir : rester à notre poste, et faire le budget des travaux publics. Voilà les motifs qui m'ont dirigé. Je ne sais s'il y a des secrets auxquels nous ne sommes pas initiés ; cela m'inquiète fort peu ; mais il me semble qu'il est vivement à désirer que le budget des travaux publics vienne à l'ordre du jour, puisque l'auteur de ce budget consent à défendre son œuvre.
M. Verhaegen. - Messieurs, si la chose était possible, je désirerais autant que certains honorables préopinants, que la chambre pût s'occuper utilement de certains projets urgents. Mais quel que soit le désir que nous puissions avoir tous d'en agir ainsi, il me semble cependant impossible de s'occuper quant à présent du budget des travaux publics.
Indépendamment des raisons que nous avons données, il en est d'autres encore. On dit que le budget des travaux publics est un objet purement administratif. Mais c'est un des budgets pour lesquels on demande le plus de fonds, et pour lesquels aussi on dépense le plus de fonds sans contrôle régulier.
Supposez qu'on parvienne à voter le budget. Après le vote devant la chambre, les démissions des ministres sont acceptées. Arrivent d'autres ministres, et peut-être un autre ministre des travaux publics. Le nouveau titulaire ne partagera pas, je suppose, l'avis de son prédécesseur, et force lui sera de proposer des amendements au sénat ; et le budget vous reviendra.
D'ailleurs, en 1841. on a soulevé une question politique à l'occasion du budget des travaux publics. On me dira qu'une autre branche était jointe alors au département des travaux publics ; mais il n'en est pas moins vrai que c'est à l'occasion du budget que la question politique a été soulevée. Maintenant ne pourra-t-on pas soulever une question de ce genre, à raison des détails de ce budget, et notamment à raison de l'importance des dépenses qui ne sont pas contrôlées d'une manière régulière ?
M. de Theux. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour rappeler ce qui s'était passé en 1841, à l'occasion du budget des travaux publics. L'on sait qu'alors l'instruction publique était réunie aux travaux publics, et que le chef de ce département a provoqué une discussion politique sur ce chapitre. C'est un cas spécial qui ne peut pas se représenter dans les circonstances actuelles.
Je disais tout à l'heure que je fais une distinction entre la discussion et le vote du budget. Comme il est probable que cette année encore la discussion du budget des travaux publics prendra beaucoup de temps, l'honorable préopinant pourra, s'il le désire, avant le vote sur l'ensemble, renouveler sa motion, pour suspendre ce vote jusqu'après la constitution du nouveau cabinet.
J’avoue que je trouve étrange que, dans l'état actuel des choses, l'opposition à la discussion du budget des travaux publics se manifeste sur d'autres bancs que sur ceux que nous occupons.
L'honorable membre dit : Mais le nouveau ministre pourra présenter des amendements au budget. Le nouveau ministre ne proposera sans doute pas de diminution ; s'il désirait des crédits plus considérables, rien ne l'empêcherait de faire des demandes de crédits supplémentaires. Il n'y a donc réellement aucune objection sérieuse à faire contre la discussion immédiate du budget des travaux publics.
Je ne veux pas m'engager, pour le moment, à voter l'ensemble du budget ; je consens à ce que la question du vote sur l'ensemble soit tenue en (page 1006) réserve ; libre à chacun de nous de faire, à cet égard, une motion, si, contre toute attente, le ministère n'était pas encore constitué.
M. de Mérode. - Messieurs, je reconnais qu'il y a quelque inconvénient à discuter un budget des travaux publics sous un ministère provisoire ; mais dans le cas actuel, il y a plus d'inconvénient encore à ne pas le discuter ; car le nouveau ministre, qui sera placé à la tête de ce département, ne sera pas au courant des questions traitées dans le budget, et il est heureux que le ministre actuel, qui est prêt à la discussion, veuille bien l'accepter.
On parle de la confiance qu'implique le vote du budget des travaux publics. Pour moi, je voudrais la réduire en général autant que possible ; mais, en définitive, il faudra bien accorder une confiance suffisante pour que l'administration continue ; et dès lors, sous ce point de vue, peu m'importe que tel ou tel successeur remplace l'honorable M. d'Hoffschmidt. Quel que soit le nouveau ministre, il y aura un budget inévitable des travaux publics ; je me soumets à cette nécessité, et puisque nous ne pouvons nous y soustraire, j'aime beaucoup mieux que ce budget soit défendu par un homme au courant de l'administration que par une personne qui peut-être y sera complétement étrangère encore.
- La discussion est close sur la motion d'ordre de M. Rodenbach.
Un grand nombre de membres. - L'appel nominal !
- On procède à cette opération.
En voici le résultat :
61 membres ont réponds à l'appel ;
42 membres ont répondu oui ;
21 membres ont répondu non ;
1 membres s'est abstenu.
En conséquence la proposition est adoptée.
M. le président. - Aux termes du règlement, je dois exposer les motifs de mon abstention. Comme il n'y a pas de vice-président présent, je demanderai la permission de le faire au fauteuil. (Adhésion.)
Mon devoir comme président est d'imprimer aux travaux de la chambre toute la célérité compatible avec un examen approfondi ; dans cette position, je n'ai pas voulu voter contre une proposition ayant pour but d'accélérer nos travaux ; d'un autre côté, je n'ai pas voulu consacrer un précédent qui consiste à voter un budget à un cabinet qui n'est pas constitué.
- Ont répondu non : MM. Castiau, de Bonne, de Breyne, Delehaye, Delfosse, de Tornaco, de Villegas, Jonet, Lange, Lesoinne, Loos, Lys, Maertens, Manilius, Osy, Pirson, Savart, Verhaegen, Biebuyck et Cans.
Ont répondu oui : MM. Clep, David, Dechamps, de Chimay, de Corswarem, Dedecker, de Haerne, de La Coste, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Muelenaere, de Renesse, de Roo, de Saegher, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux, Donny, Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fallon, Henot, Huveners, Kervyn, Lejeune, Malou, Mast de Vries, Mercier, Orban, Pirmez, Rodenbach, Scheyven, Thienpont, Van Cutsem, Vanden Eynde, Verwilghen, Wallaert et Zoude.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Peeters, ancien géomètre, prie la chambre de s'occuper le plus tôt possible de sa réclamation concernant la confection des plans d'alignement et de délimitation des chemins vicinaux, »
Renvoi au ministre de l'intérieur.
-Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Péruwelz demande que la station du chemin de fer, dans la traverse de Leuze, soit établie à la barrière du Vieux-Leuze.»
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Tarte, fondé de pouvoirs de la société anonyme des routes réunies, demande que l'Etat rachète les routes et les ponts construits par la société. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
-Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Plusieurs habitants de Bell, commune de Gheel, présentent des observations contre le tracé de la route projetée de Cheel à Moll. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Je ferai observer que cette route est décrétée depuis plusieurs mois. Je proposerai le dépôt an bureau des renseignements.
- Cette proposition est adoptée.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Touvenel, ingénieur civil à Mons, présente des observations sur la cause de l'accident survenu au tunnel de Tirlemont. »
La commission avait proposé le renvoi à la commission chargée de faire une enquête sur cet accident. La commission d'enquête ayant terminé son travail, et le pétitionnaire attribuant l'accident à un défaut de plan et non d'exécution, nous vous proposons le renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Torton présente des observations sur l'utilité de l'emploi des troupes pour l'exécution des travaux publics. »
Renvoi aux ministres de la guerre et des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Les sieurs Bulens, Incolle et Deschamps présentent un mémoire qui a pour objet la réunion des trois stations du chemin de fer et la formation d'une grande foire annuelle, et prient la chambre de faire examiner ces projets »
Renvoi aux ministres des travaux publics et de l'intérieur.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal d'Alost soumet à la chambre un mémoire qui a pour objet la construction d'un chemin de fer de Bruxelles, par Alost et Wetteren, sur Gand.
Renvoi au ministre des travaux publics.
M. Desmet. - Messieurs, je ne puis mieux faire que d'appuyer les conclusions de la commission des pétitions qui consiste à renvoyer au ministre des travaux publics, les pétition et mémoire du conseil communal de la ville d'Alost, qui a pour objet la construction d'un chemin de fer de Bruxelles directement à Gand, par Alost et Wetteren ; à l'occasion de cette pétition j'aurais voulu demander quelques renseignements à M. le ministre des travaux publics sur les études de ce chemin, mais comme il n'est pas présent à la séance, je dois ajourner ma motion ; tout ce que je puis faire en ce moment, c'est de le prier de vouloir attacher une attention toute particulière au mémoire de la régence d'Alost, qui contient des observations de la plus grande importance et du plus haut intérêt pour une grande partie du pays.
- Le renvoi est adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Jodoigne présente des considérations sur l'utilité d'un chemin de fer de Namur à Tirlemont, par Perwez et Jodoigne. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Joncret présente des observations contre la demande de concession de deux embranchements de chemin de fer, dont l'un de Couillet à Orel, l'autre de Moulin à Florennes. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Plusieurs habitants de Gembloux demandent la construction d'un chemin de fer de Louvain à Jemeppe-sur-Sambre. »
« Même demande des habitants de Nil-Saint-Vincent-Saint-Martin. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Plusieurs habitants de diverses communes du canton de Perwez demandent qu'il soit stipulé, dans l'acte de concession du chemin de fer entre Jemeppe et Louvain, qu'il sera établi une grande station au point dit la Lessière sous Walhain-Saint-Paul-Sart-lez-Walhain. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Van Herck, négociant à Waremme, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir l'indemnité qui lui revient du chef des pertes que lui a fait subir l'administration du chemin de fer, en retardant l'expédition de ses marchandises. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Renaix prie la chambre d'ordonner l'étude d'un chemin de fer de Mons à Gand et d'en autoriser la concession. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Plusieurs habitants de la vallée de la Meuse demandent que le gouvernement soit autorisé à concéder le chemin de fer de Liège à Maestricht projeté par MM. Lamarche et Borguet. »
« Même demande de la part des habitants de Fouron-le-Comte. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Gelrode demande que le chemin de fer de Louvain à Diest passe par Aerschot. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Balâtre propose de faire prolonger la route de Wainage vers celle d'Eghezée, en projet, afin de procurer de l'ouvrage à la classe ouvrière pendant la saison de l'hiver. »
« Même demande des conseils communaux de Velaine et Onoz. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Les bourgmestres des communes de Ermeton-sur-Biert, Flavion, Corenne, Omezée, Soulme, Gochenée, Agimont, Hermelon-sur-Meuse, Xastière, Gerin, Anthée, Falaën et Sosoye prient la chambre de faire exécuter le prolongement de la route de Ligny à Dénée jusque Anthée et ceux des chemins vicinaux déclarés de grande communication, afin de donner à la classe ouvrière de l'ouvrage pendant la saison de l'hiver. »
Renvoi au ministre des travaux publics.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Bricoux, vérificateur des contributions directes à Beaumont. soumet à la chambre un projet de loi relatif à l'aliénation et au défrichement des bruyères et terrains incultes de la Belgique. »
Dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le sieur Wasson demande que le gouvernement mette en adjudication l'exploitation des salles de restaurant dans les stations du chemin de fer, et offre 5,000 francs annuellement pour occuper la salle de restaurant dans la station de Verviers. »
Renvoi à M. le ministre des travaux publics, avec demande d'un rapport.
M. Osy.- En l'absence de M. le ministre des travaux publics, je crois pouvoir adresser une interpellation à M. le ministre des affaires étrangères chargé l'an dernier du département des travaux publics.
A la fin de la dernière session, nous avons appris que le département des travaux publics avait accordé, sans adjudication publique, le droit d'affichage dans les stations du chemin de fer. Je dois demander à cet égard quelques renseignements ; car il me semble que cela s'est fait d'une manière irrégulière. On doit maintenant payer des sommes considérables pour affichage dans les stations, et cependant je ne vois figurer aucune somme à ce titre au budget des voies et moyens.
Je demande des renseignements sur ce point, comme aussi sur les conditions auxquelles est accordé le droit d'établir des restaurants dans les stations.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Je demanderai à l'honorable membre de vouloir bien ajourner cette interpellation jusqu'à lundi, puisque la discussion du budget est renvoyées à une époque (page 1007) prochaine. Je pourrais donner des explications ; mais elles seraient incomplètes, parce que j'ignore ce que mon honorable collègue, qui m'a succédé au département dus travaux publics, a décidé sur ces deux questions qui sont controversées.
M. Osy. - Je renouvellerai avec plaisir mon interpellation, lorsque nous en serons à la discussion du budget des travaux publics. Je prierai l'honorable ministre des affaires étrangères de se concerter avec son collègue des travaux publics, pour que les renseignements que j'ai demandés sur les deux objets que j'ai indiqués soient donnés à la chambre.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Le conseil communal de Gerpinnes présente des observations contre la demande de concession du chemin de fer de Couillet à Oret. »
« Mêmes observations du conseil communal et des habitants d'Oret. »
La commission propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. de Corswarem, rapporteur. - « Les sieurs Crame, concessionnaire de la route de Châtelet à Châtelineau, et Berlier, principal actionnaire de la route de Charleroy à Florennes présentent des observations contre la demande de concession des chemins de fer de Couillet à Oret et de Florennes à Moulin. »
La commission propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.
- Ces conclusions sont adoptées.
M. Verhaegen. - J'ai vu figurer avec un certain étonnement à l'ordre du jour de cette séance la discussion de la proposition que j'ai eu l'honneur de faire en 1844, et qui a pour objet de modifier les droits d'enregistrement sur les donations entre-vifs à titre gratuit. La chambre comprendra, j'en suis convaincu, que les motifs d'ajournement que j'ai invoqués tout à l'heure sont applicables à ce projet plutôt qu'à tout autre. En effet, il ne s'agit ni plus ni moins, comme l'a fait observer la section centrale, que de modifier à certains égards notre système d'impôts.
Cette question est de la plus haute importance. Je ne conçois pas comment, dans la situation où nous nous trouvons, on pourrait discuter cette question qui tient à l'assiette de l'impôt. Je demande donc que ma proposition disparaisse de l'ordre du jour.
Elle touche à un point assez délicat sur lequel les deux opinions qui divisent cette assemblée pourraient ne pas être d'accord ; je veux parler du droit d'enregistrement sur donations à des établissements publics, corporations, etc. Il ne convient assurément pas, dans les circonstances actuelles, d'ouvrir une discussion de cette nature.
Indépendamment de cela, la question en elle-même constitue tout un système. Enfin elle peut soulever une véritable question politique.
J'insiste donc pour que la chambre fasse disparaître de son ordre du jour cette question qui n’a d'ailleurs rien d'urgent.
M. de Theux. - Puisque l'honorable M. Verhaegen, auteur de la proposition, insiste pour l'ajournement, je n'en demanderai pas la discussion immédiate. Mais je proposerai la mise à l'ordre du jour après la discussion du budget des travaux publics.
M. Verhaegen. - Je demanderai que ma proposition soit mise à l'ordre du jour après la discussion de tous les budgets. Je ne vois pas, en effet, puisque la chambre discute le budget des travaux publics, pourquoi elle ne discuterait pas les autres budgets ; car il n'y a pas de différence entre les uns et les autres.
M. de Theux. - Je me rallie à la mise à l'ordre du jour après tous les budgets.
- La chambre, consultée, met la proposition de M. Verhaegen à l'ordre du jour après tous les budgets.
M. Verhaegen. - Je demande que la chambre mette à l'ordre du jour, après la discussion du budget des travaux publics, la discussion du budget de l'intérieur.
M. le président. - Plusieurs membres viennent de se retirer : la chambre n'est plus en nombre.
M. Verhaegen. - Je renouvellerai demain ma proposition.
- La séance est levée à trois heures trois quarts.