(Moniteur belge n°66, du 7 mars 1843)
(Présidence de M. Raikem)
M. de Renesse fait l’appel nominal à 2 1/2 heures,
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.
M. de Renesse présente l’analyse de la pétition suivante.
« Les membres du conseil communal et plusieurs électeurs de Seraing-sur-Meuse, présentent des observations contre la nomination du bourgmestre de cette commune, faite en dehors du conseil. »
M. Delfosse. - Le fait signalé par les pétitionnaires est un des faits nombreux sur lesquels nous avons annoncé que le gouvernement serait interpellé ; mais pour ne pas retarder, par une nouvelle discussion politique, le vote si impatiemment attendu de la loi sur les sucres, nous choisirons un autre jour pour adresser ces interpellations. Je me bornerai pour le moment à proposer le renvoi de la pétition à la commission des pétitions, avec demande d’un prompt rapport.
Je saisis cette occasion pour prier M. Je ministre de l’intérieur de vouloir bien déposer sur le bureau la liste des bourgmestres nommés en dehors du conseil, et celle des anciens bourgmestres que le gouvernement n’a pas jugé à propos de continuer dans leurs fonctions, bien qu’ils aient été réélus comme membres du conseil ; je suppose que M. le ministre de l’intérieur ne trouvera pas le moindre inconvénient a nous fournir ces renseignements qui sont de nature à faciliter nos investigations et à faire apprécier l’usage que le gouvernement a fait de sa prérogative.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je vois les plus grands inconvénients à accéder à la dernière invitation qui vient de m’être faite. Quand on fera le rapport sur la pétition, je verrai jusqu’à quel point je pourrai répondre ; je ne crois pas qu’un conseil communal puisse s’adresser à la chambre pour obtenir des explications. Voilà pour le jour où le rapport sera fait. Quant aux interpellations qu’on vient de nous annoncer, je verrai jusqu’à quel point je pourrai les accepter.
M. Delfosse. - Le refus de M. le ministre de l’intérieur m’étonne. Il ne peut s’expliquer que d’une manière, c’est que M. le ministre de l’intérieur craint de livrer ses actes à la discussion. Du reste, ce refus n’aura pas d’autre résultat que de nous forcer à faire des recherches qu’on aurait pu nous éviter. On n’y gagnera rien ; ces recherches, nous les ferons, et la discussion n’en aura pas moins lieu.
M. Devaux. - Je crains d’avoir mal compris M. le ministre. Je lui demande s’il refuse de communiquer à la chambre les noms de bourgmestres nouvellement nommés, qui ne remplissaient pas antérieurement les mêmes fonctions, et en second lieu, ceux qui n’étaient pas membres du conseil. Je lui demande s’il refuse de communiquer ces renseignements.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - J’ai répondu que je voyais les plus grands inconvénients à cette communication qui m’est demandée. J’ai déjà fait insérer dans le Moniteur les tableaux de sept provinces, il n’y a plus que les tableaux de deux provinces à publier. Je ferai ensuite insérer un tableau général, où se trouveront les différentes catégories de nomination, de manière à ce que l’ensemble politique puisse être apprécié ; mais on me demande ici des renseignements tels que l’on pourra discuter commune par commune, nom propre par nom propre, et il n’est pas dans mes intentions de faire une communication de ce genre.
Une voix. - Et le nombre ?
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Le nombre, vous l’aurez quand le tableau général sera publié, et il sera publié le jour même ou le lendemain de la publication des tableaux des deux dernières provinces ; mais quant à publier la liste des noms propres, commune par commune, nomination par nomination, pour justifier ce que le gouvernement a fait, je doute que la chambre puisse demander cela.
M. Devaux. - Je ne sais encore si je comprends bien M. le ministre ; je dis qu’un ministre ne peut pas refuser de faire connaître ses actes. Ce serait la chose la plus inouïe. Toute nomination d’employés d’administration que ce soit, porte la qualité dont jouissait celui qui est nommé avant sa nomination. Quand on nomme un procureur du Roi, par exemple, l’acte de nomination dit s’il était substitut auparavant, on indique les autres fonctions qu’il remplissait. Pourquoi ne ferait-ou pas la même chose pour les bourgmestres ? pourquoi ne dirait-on pas que tel exerçait les fonctions de bourgmestre ou celles de conseiller communal. Nous en sommes vraiment arrivés à un point où le gouvernement représentatif devient dérisoire, si le ministère refuse de faire connaître ses actes. Ce n’est qu’après avoir vivement insisté, que nous avons obtenu la publication des noms des bourgmestres sans autre explication ; il semble qu’on voulait les tenir sous le boisseau ; on s’est enfin décidé à les publier, mais on ne veut pas nous faire connaître ce que sont les hommes qu’on a nommés, quelle position ils occupaient dans leur commune. Je me demande si un gouvernement absolu qui se respecte quelque peu ferait pareille chose.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je ne cache pas mes actes.
M. Devaux. - Vous trouvez les plus grands inconvénients à dire quels sont les bourgmestres qui l’étaient l’année dernière, et ceux qui faisaient partie du conseil communal. En vérité, les bras me tombent de voir qu’un ministère en Belgique puisse songer seulement à faire un pareil refus. Il n’y a qu’une seule manière de l’expliquer, c’est que l’on se cache, que n’osant pas faire connaître le véritable caractère de ses actes ; on ne trouve d’autre moyen de les justifier que de les soustraire à la connaissance des chambres et du pays.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - La publication que j’ai faite n’a pas été une publication tardive ; j’ai voulu que les publications ne se fissent pas partiellement ; j’ai voulu qu’elles se fissent lorsque toutes les nominations ou à peu près seraient faites. J’ai voulu, en un mot, qu’on pût juger ces actes dans leur ensemble, que les acceptations fussent connues avant de publier inutilement des nominations qui auraient pu être suivies de refus. Ces publications ont été faites dans la forme suivie en 1836. En 1836, il s’est agi également de remplacer beaucoup de bourgmestres qui se présentaient dans une circonstance toute particulière.
Les bourgmestres nommés en 1830, qui étaient restés en fonction et qui avaient été réélus en 1836, n’ont pas tous été maintenus par le pouvoir exécutif et personne n’a songé alors à demander une publication spéciale de ce chef. Je me suis donc conformé aux précédents de l’administration ; je ne cache pas mes actes, je les publie en suivant les précédents qui ont été consacrés.
Maintenant veut-on faire de l’administration et discuter des noms propres ? Je mettrai dans le Moniteur à la suite des neuf tableaux, un tableau général ; si l’on trouve que cela n’est pas suffisant, j’examinerai si je dois donner d’autres renseignements.
Ce n’est pas mon intérêt personnel que je défends, mais l’intérêt du pouvoir exécutif que je représente ; il faut voir jusqu’à quel point des actes du pouvoir peuvent être livrés, nom propre par nom propre, à l’appréciation de la chambre ; voilà sur quel terrain je prie l’honorable membre de se placer avec moi. Du reste, toute discussion est inutile maintenant : lorsque le rapport sera fait sur cette pétition, j’examinerai dans quels termes je devrai demander l’ordre du jour. Des interpellations me sont annoncées par l’honorable M. Delfosse, il les fera quand les deux derniers tableaux des provinces auront été publiés. Viendra ensuite un tableau général statistique, résumant, catégorie par catégorie, les nominations des neuf provinces. C’est tout ce que l’on doit avoir pour apprécier ces actes politiquement. Si l’on me demande davantage, je verrai alors si je pourrai faire davantage. Je ne le crois pas.
Il ne s’agit pas de soustraire nos actes à la publicité, il s’agit seulement de ne pas attirer complètement dans cette chambre les questions purement administratives, et même des questions de noms propres.
Puisqu’on a cité l’Angleterre, je rappellerai au souvenir de l’honorable membre et de chacun de nous un acte qui vient de se passer dans le parlement anglais. Le chef de l’opposition a interpellé le ministère sur un cumul qui existe en ce moment. Il se trouve que le premier ministre, à la chambre des lords, cumule, avec ses fonctions de ministre, celles de général en chef de l’armée,
Un membre. - C’est différent,
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Non, ce n’est pas différent.
Le ministre, interpellé à la chambre des communes, a donné des explications, mais il a ajouté, quand il a appelé l’attention de la chambre sur ce point que, si elle poussait trop loin ses investigations, elle s’exposerait à attirer dans la chambre des communes des questions qui tiennent au pouvoir exécutif.
Sans vouloir établir une comparaison absolue entre les deux cas, je prie la chambre de vouloir porter son attention sur ceci.
Un tableau général sera publié, nous verrons jusqu’à quel point ce tableau sera suffisant pour une appréciation politique ; nous verrons s’il faut faire davantage sans porter atteinte à l’indépendance que vous devez laisser au pouvoir exécutif pour des actes qui ne concernent pas les chambres. Pour discuter le système politique le tableau général suffira.
M. Delfosse. - M. le ministre de l’intérieur nous a dit qu’il y aurait des inconvénients à faire droit à la demande de renseignements que j’ai formulée, mais il n’en a pas signalé un seul. Si l’on signalait un seul inconvénient sérieux, je serais le premier à renoncer à ma demande. Quel inconvénient, je vous le demande, peut-il y avoir à nous faire connaître, par des pièces déposées sur le bureau, des faits qui résultent de documents officiels et que l’on peut découvrir en se livrant à quelques recherches ? On sait dans chaque commune si le bourgmestre a été choisi dans le sein du conseil ou en dehors ; on y sait aussi si l’ancien bourgmestre a été continué dans ses fonctions, ou si on lui a donné un successeur ; ce sont là des faits de notoriété publique, on ne pourra pas nous empêcher de les découvrir ; il dépendait de M. le ministre de l’inférieur de rendre inutiles les recherches que nous devrons faire ; c’était en quelque sorte un acte de courtoisie que nous lui demandions. L’honorable M. Devaux l’a dit avec raison, le refus de M. le ministre de l’intérieur est un acte sans but, un acte incompréhensible.
M. le ministre de l’intérieur demande si nous voulons transporter l’administration dans la chambre ; si c’est là transporter l’administration dans la chambre, la faute en est à M. le ministre de l’intérieur, et non à nous. Lorsque M. le ministre de l’intérieur est venu demander à la chambre le droit de nommer le bourgmestre en dehors du conseil, il nous a dit, pour obtenir cette prérogative exorbitante, qu’il n’en ferait fait usage que dans des circonstances graves ; il a ajouté que le gouvernement serait tenu, à la première interpellation d’un membre de la chambre, de rendre compte des motifs qui l’auraient engagé à en faire usage. Nous avons pris acte des promesses de M. le ministre, et nous ne faisons qu’en demander l’exécution.
Du reste, je l’ai dit, je ne veux pas retarder le vote de la loi sur les sucres ; j’attendrai la communication que M. le ministre de l’intérieur vient de nous promettre. Plus tard, si je la trouve insuffisante, je reviendrai à la charge et j’invoquerai de nouveau, si cela est nécessaire, les paroles que M. le ministre de l’intérieur a fait entendre dans la discussion de la loi qui a modifié nos institutions communales.
M. Devaux. - Messieurs, je réponds au reproche que m’a fait M. le ministre de l’intérieur, de vouloir attirer l’administration dans la chambre. Tel n’a jamais été, tel ne sera jamais mon but. Mais ce que je veux, ce que j’ai le droit de vouloir, c’est que la chambre connaisse les actes de l’administration ; c’est que ces actes ne soient point occultes pour la chambre et pour le pays. Et c’est à quoi le ministère n’a pas droit se refuser. Il le peut, parce qu’avec la majorité on peut tout. Mais ce que je veux bien constater, c’est que le ministère se refuse à faire connaître ses actes.
Maintenant qu’on passe outre, si ou le veut ; je ne suis pas la majorité. Je ne puis forcer le ministère à dévoiler ses actes.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je ne refuse pas de faire connaître mes actes, je les ai fait connaître par le Moniteur. Je compléterai cette publication par un tableau général, indiquant les différentes catégories de nominations je prétends que dans la mesure de mes devoirs, je ne dois pas faire davantage, et que l’honorable préopinant lui-même, s’il veut bien conserver certains respects pour l’exercice du pouvoir exécutif, n’en demandera pas davantage le jour où il aura vu ce tableau dans le Moniteur. Je suis d’accord avec l’honorable M. Delfosse pour attendre jusque-là.
Quant à la pétition déposée sur le bureau, si elle est présentée par le conseil communal collectivement, je demanderai l’ordre du jour, sans explication quelconque.
M. Devaux. - On respecte le pouvoir exécutif ; mais ne cachez pas vos actes.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Nous ne cachons pas nos actes ; je répète que nous les faisons connaître. Vous me demandez d’autres renseignements, je déclare que nous ne pouvons vous les donner officiellement. Officieusement, nous pourrions...
M. Lebeau. - Nous n’en voulons pas.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Mais officiellement, je vous réponds : voilà tout ce que je vous ferai connaître. Vous verrez le tableau général qui sera inséré dans le Moniteur ; nous discuterons ensuite.
- Le renvoi de la pétition à la commission des pétitions, avec demande d’un prompt rapport, est adopté.
M. de Villegas, rapporteur. - Par pétition du 15 février dernier, datée de Bruxelles, plusieurs banquiers et agents de change de Bruxelles demandent la suppression des lignes télégraphiques établies en Belgique.
L’existence de ces voies de communication, exposent les pétitionnaires, porte le plus grand préjudice aux opérations du commerce en fonds publics, favorisent les manœuvres de la bourse et constitue un véritable privilège au profit des spéculateurs. Ils pensent que ces lignes télégraphiques lèsent les intérêts du trésor, en enlevant à l’administration des postes une multitude de dépêches, et que, dans des moments de crise politique, elles peuvent exercer une dangereuse influence. C’est donc au nom de la morale, de l’ordre public, des intérêts du trésor et du commerce, qu’ils appellent l’attention de la législature sur l’objet de leur réclamation, à défaut de l’appui du gouvernement, qu’ils disent avoir invoqué en décembre 1842.
Messieurs, il n’y a sur ce sujet que peu d’actes législatifs ou réglementaires.
Le premier est la loi du 9 messidor an III de la république, qui ordonne l’établissement, dans l’enceinte du Palais national d’un télégraphe dû à l’invention le Claude Chappe. Cette loi a été abrogée par celle du 26 fructidor an VI.
Jusqu’en 1837, il n’existait aucune loi qui défendît l’établissement de télégraphes particuliers. C’est sur la plainte de l’administration des postes, qui prétendait que l’emploi de ce moyen de communication, fait par des spéculateurs et des sociétés particulières, portait atteinte à son privilège, que le gouvernement a soumis à la législature un projet de lot ainsi conçu :
« Quiconque transmettra, sans autorisation, des signaux d’un lieu à un autre, soit à l’aide de machines télégraphiques, soit par tout autre moyen, sera puni d’un emprisonnement et d’une amende de 4,000 à 10,000 fr. L’art. 463 du code pénal est applicable aux dispositions de la présente loi.
« Le tribunal ordonnera la destruction des postes, des machines et des moyens de transmission. »
Ce projet fut converti en loi, le 2 mai 1837.
En France donc, le gouvernement conserve l’exploitation exclusive des lignes télégraphiques.
Y a-t-il des motifs pour en agir autrement dans ce pays ? Votre commission les conçoit difficilement, en présence des intérêts réunis de la morale, de l’ordre public, du trésor et du commerce. Elle a donc l’honneur de vous proposer, par mon organe, le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l’intérieur.
M. Rogier. - Je demanderai aussi le renvoi à M. le ministre des travaux publics, comme chargé de l’administration des postes,
- Le double renvoi est adopté.
M. le président. - La discussion continue sur les questions du droit et du rendement.
M. Desmet. - Messieurs, en résolvant la première question qui a été posée dans cette discussion, vous avez déclaré ne pas vouloir proscrire une branche de culture et d’industrie ; vous avez en outre déclaré que vous ne vouliez pas comprendre dans votre budget une indemnité pour l’industrie que l’on voulait supprimer. Je crois que la chambre a agi avec sagesse ; et je crois que le cabinet aurait agi avec peu de sagesse, s’il avait obtempéré au conseil qu’on lui a donné de retirer le projet.
Mais si on ne veut pas proscrire l’industrie du sucre indigène, je crois que vous ne voudrez pas non plus proscrire une autre branche importante d’industrie et de commerce ; un moyen de commerce et d’échanges avec les pays lointains, avec les Indes. Mais ce n’est pas seulement pour votre commerce d’échange que je parle, ce n’est pas seulement dans l’intérêt de notre commerce avec les Indes que je parle ; mais c’est surtout dans l’intérêt de l’industrie intérieure, qui a à redouter la concurrence de nos voisins, les infiltrations étrangères ; car nous pouvons dire qu’il existe continuellement une guerre d’infiltrations entre ces trois nations voisines ; entre la France, la Hollande et la Belgique.
Messieurs, la Hollande a les yeux fixés sur nous ; elle voit ce que nous faisons. Si nous agissons imprudemment, elle en profitera.
Vous connaissez, messieurs, le mouvement des sucres qui existe en Hollande, mouvement qui s’élève de 80 à 100 millions de kilog. par an. Vous savez aussi la grande protection que donne la Hollande au commerce des sucres. Car malgré ce mouvement énorme, et bien que les droits soient aussi élevés, elle ne retire que 30,000 francs, terme moyen. Elle n’a que 3 p. c. de réserve.
Messieurs, soyons assez prudents pour ne pas laisser absorber Gand et Anvers par Maestricht. Vous savez combien l’infiltration se fait par ce dernier endroit.
Messieurs, nous sommes en présence de trois systèmes : nous avons d’abord le système proposé par l’honorable M. Dumortier ; nous avons en second lieu le système de la section centrale, et en troisième lieu celui présenté par quelques députés et appuyé par le gouvernement.
Quel est le système de l’honorable M. Dumortier ? C’est d’abord le travail particulier et spécial pour l’exportation des sucres exotiques avec primes ; c’est ensuite la non-jouissance de la prime pour les sucres raffinés destinés à la consommation ; c’est, en troisième lieu, la prime déterminée, et, en quatrième lieu, il n’y a aucune portion des droits réservée ou garantie au trésor.
Je crois que c’est bien là la portée du système de l’honorable M. Dumortier.
Quel est maintenant le système de la section centrale ? C’est la pondération entre les deux sucres, l’exportation avec le haussement du rendement, et seulement la dixième partie des droits réservée au trésor.
Quel est, en troisième lieu, le système du gouvernement ? C’est la pondération entre les deux fabrications, avec la garantie au trésor non pas de 4/10, mais de 4 millions. Car M. le ministre des finances a déclaré qu’il garantissait au trésor, non seulement 4/10, mais quatre millions, c’est-à-dire que si la réserve des 4/10 n’était pas suffisante, on irait à 5, à 6 dixièmes. Enfin, c’est l’exportation avec primes, mais avec prime proportionnée à ce qui reste disponible du produit des droits après réduction des 4 millions.
Messieurs, quel est à présent le but de la proposition de l’honorable M. Dumortier ? C’est que tous les droits de la fabrication pour la consommation soient acquis au trésor ; que la somme des primes soit déterminée et réservée et que la jouissance des primes d’exportation ne soit accordée qu’au sucre exotique fabriqué dans des raffineries sous la surveillance du fisc et qui ne travailleront que pour l’exportation.
Messieurs, les conséquences du système de l’honorable M. Dumortier, sont, si je ne me trompe, les suivantes : 1° La consommation chargée de la totalité des droits et la décharge seulement en faveur des sucres exotiques fabriqués pour l’exportation, et, par conséquent, la fabrication des sucres indigènes entièrement chargée des droits sans aucune décharge, ou exportation avec primes ou drawback, et la suite nécessaire de la concurrence étrangère sur notre marché pour la consommation intérieure, d’où devra résulter nécessairement la diminution de la fabrication et du produit de l’impôt. Il y aura, par conséquent, incertitude sur le montant de ce produit, on ne pourra compter sur aucune somme ; tandis que pour les primes d’exportation la somme déterminée est réservée.
Ce système tire sur le système anglais, c’est celui que les Anglais appellent refing in bond, raffinage avec obligation, c’est-à-dire avec obligation d’exporter les produits. Ce raffinage se fait dans des locaux du gouvernement et sous la surveillance immédiate et continuelle du fisc, tenus fermés, comme disent les Anglais, sous les trois clés de la couronne. Ils existent dans les principaux ports du royaume-uni, à Londres, Liverpool, Bristol, Hull, Grenich et Glasgow. Non seulement le raffinage se fait sous la surveillance continuelle du fisc, mais même aucune exportation ne peut se faire que, pour ainsi dire, par le fisc même. Ce sont, comme vous le pensez bien, de fortes dépenses pour l’Etat que l’établissement de ces locaux, et les entraves sont telles que cette fabrication cesse presque entièrement : de 160 millions de livres qu’elle produisait en 1818, elle était déjà tombée en 1834 à 19 millions.
D’ailleurs, messieurs, vous savez qu’en Angleterre on ne fait pas de cas du commerce des sucres comme en Hollande et ici. On ne s’attache à la fabrication que pour l’impôt, que pour le produit de l’accise ; et cet impôt est un point important pour le trésor de ce pays. On compte, qu’année commune les revenus de cette accise s’élèvent, après défalcation du drawback, à 4,667,876 liv. ou 116,696,800 fr. La consommation y est calculée à raison de 24 liv. par individu, et par an, 400,000,000 liv. pour toute la population.
En Angleterre on peut exporter tout le produit de la fabrication jusqu’au sirop ; la destination est assurée dans les colonies anglaises, mais ici, que faire des parties qui ne seront pas exportables ni vendables à l’étranger ; on devra ou les perdre ou les livrer à la consommation, ce qui doit nécessairement procurer des moyens de fraude et porter à des abus.
Messieurs, si nous devions suivre le système présenté per M. Dumortier.je pense que l’administration rencontrerait beaucoup de difficultés, et je crois fort que le trésor ne serait pas assuré sur la quote-part qu’il voudrait obtenir de l’accise des sucres.
M. Dumortier. - C’est tout le contraire.
M. Desmet. - Comment ! c’est tout le contraire. N’est-il pas vrai que, par votre système et surtout que la fabrication pour la consommation n’a aucune décharge, elle devra supporter tout le haut droit ; la concurrence étrangère est à craindre, et qu’une fois qu’il y a concurrence, nécessairement il y aura diminution dans la fabrication, et, par conséquent, diminution dans le produit de l’impôt. Votre système ne garantit rien de certain au trésor, il ne donne qu’une garantie pour la somme à prélever pour la prime d’exportation, qui est toujours la même, quoique le produit de l’accise vienne diminuer.
M. Dumortier. - Vous n’avez pas là ce que j’ai dit.
M. Desmet. - Il est possible que je me trompe, mais c’est ainsi que j’ai voulu comprendre votre proposition et ce sont les conséquences que j’en ai tirés.
Messieurs, comme j’ai eu l’honneur de vous le dire, la proposition de la section centrale n’assure au trésor qu’un dixième du montant des prises en charge, c’est-à-dire un revenu d’un million, II en résulte que toute la recette des autres 9/10 peut être absorbée par l’exportation, bien que le rendement soit élevé à 71 et 73, ou, en moyenne, à 72 ; car, ainsi qu’on vous l’a dit, le rendement peut aller jusqu’à 90. Messieurs, le vice principal de ce système, c’est qu’il ne garantit pas 4 millions au trésor, comme le fait celui de la section centrale.
Mais qu’a dit l’honorable rapporteur de la section centrale ? Et vous a dit qu’il se réservait de s’expliquer sur la portion de l’impôt à garantir au trésor.
Messieurs, la section centrale veut aller trop loin, elle n’a aucun égard au commerce existant du sucre, à l’infiltration étrangère, qui est si dangereuse, et elle ne songe pas, tout en voulant favoriser particulièrement la fabrication du sucre indigène, qu’elle frappera, en haussant trop fort le rendement, cette fabrication aussi bien que celle du sucre exotique. Donc, en augmentant le chiffre du rendement, et en augmentant le nombre des portions du droit réservées au trésor, elle augmente doublement le rendement, ou, en d’autres termes, elle diminue la décharge des droits de la prime pour l’exportation. Ceci est évident et je ne puis concevoir qu’on puisse le comprendre autrement ; car qu’est-ce que le rendement ? C’est la recherche ou la fixation des portions utiles qu’auront produites les matières brutes et qui devront jouir du drawback ; or, comme ces portions sont ordinairement plus fortes qu’elles ne le sont comme le rendement les évalue, il reste toujours un remède qui suffit pour absorber toutes les sommes qui ne sont pas réservées au trésor, et, par conséquent, plus sont grandes ces sommes, moins est grand ce vide et moins il est laissé à la décharge pour l’exportation.
Messieurs, je crois donc que la proposition que M. le ministre a présentée en dernier lieu est la plus favorable et celle que nous devons adopter. Elle garantit, sans aucune restriction, les 4 millions au trésor. Elle établit une pondération aussi justement proportionnée que possible entre les deux sucres, elle avantage autant que possible le commerce, et elle garantit le marché intérieur aussi, autant que possible, contre l’infiltration étrangère.
L’honorable M. Demonceau avait avancé dans la séance de samedi, qu’avec la proportion proposée par M. le ministre entre les deux sucres, le sucre indigène avait un désavantage sur le sucre exotique de 14 fr. 44 c., et a, pour le démontrer, présenté un calcul. L’honorable membre me permettra que, de mon côté, je fasse aussi le calcul ; je me servirai des mêmes chiffres, mais le résultat que j’obtiendrai est tout autre que celui qu’il avait obtenu.
Voici mon calcul ; je commencerai par celui du sucre exotique :
18,560,931, kil, de sucre exotique à 40 fr. les 100 kil., produiront fr. 7,424,372
4/10 réservés trésor, ou 7,424,372 kil., qui produiront au trésor fr. 2,969,748
Il restera pour les primes d’exportation la somme de fr. 4,454,624
En prenant le rendement à 58 p c., il y aura d’exportable 6,459,170 kil., et 4,677,389 indemnes.
Les quantités réservées à la consommation seront donc de 12,104,761, qui paieront 2,969,748, ou 24-54 les 100 kil.
A présent faisons le calcul pour le sucre indigène :
5,000,000 kil. à 22 fr. les 100 kil. produiront fr. 1,100,000
4/10 ou 2,000,000 réservés au trésor produiront fr. 440,000
Il restera pour les primes d’exportation, fr. 660,000.
En établissant le rendement du sucre indigène à 50 p. c., j’aurai en sucres exportables 1,500,000 kil. Il me restera donc pour la consommation 3,500,000 kil., qui payeront 440,000 fr. ou 12 francs 85 c. les cent kilogrammes. Une différence donc pour le sucre exotique de plus de 11 fr. 69 c.
Le prix du sucre exotique est coté à fr. 57 00 les 100 kil.
Le droit est de fr. 24 54
En tout, fr. 81 54
Le prix du sucre indigène est de fr. 72 00
Les droits de 12 85
En tout, 85 85
Différence en faveur du sucre exotique, 2 31
Messieurs, vous voyez donc que la différence n’est pas de 14 fr. 44 c. mais seulement celle de 2 fr. 31 c.
Voyons à présent quelle sera la différence mise en regard avec celle qui existe actuellement entre les deux productions. Je vais avoir l’honneur de vous présenter à ce sujet les deux calculs, je prendrai le terme moyen des importations des années qui ont suivi celle de 1838, quand la législation a été majorée et qu’un dixième a été réservé pour le trésor sous le régime actuel.
22,000,000 kil, de sucre exotique à 37 fr, 2 c. les 100 kilog. font fr. 8,144,400.
Un dixième réservé, qui produit au trésor fr. 814,440
Reste fr. 7,229,960
Comme il n’y a que les 814,400 francs qui sont restés au profit du trésor et que la somme restante de 7,229,960 fr. a été absorbée dans la prime d’exportation, on peut établir le montant du droit sur la fabrication du sucre exotique à 3 fr. 70 c. les 100 kil., le sucre indigène n’a aucun droit à supporter.
Ainsi pour le sucre exotique, prix fr. 57
Droit, fr. 3 70
Fr. 60 70
Sucre indigène, 72.
D’où il résulte, pendant le régime actuel, en défaveur du sucre indigène 11 fr. 50.
Voyons à présent la différence après que le projet du ministre sera adopté.
22,000,000 kil, de sucre exotique à 40 fr les 100 kilogrammes font fr. 8,800,000
Les 4/10 réservés font fr. 3,620,000
Reste, fr. 5,180,000
La somme de 3,620,000 k. sera celle dont sera chargée la fabrication, ce qui fera, pour les cent kil., fr. 16 45.
En sucre indigène à 5,000,000 fr., à 22 fr. les 100 kil,, qui font fr. 1,000,000
Les 4/10 à réserver pour le trésor, qui produiraient fr. 440,000
Reste, fr. 660,000
Le droit réel sera donc de 8 fr. 80 les 100 kil.
L’exotique calculé au prix de fr. 57 00, pour droits, fr. 16 45, total, fr. 73 45
L’indigène calculé au prix de fr. 72,00, pour droits fr. 8,80, total, fr. 80 80
Différence de 7 fr. 35.
Ainsi, sous le régime actuel, la différence est de fr. 11 30, et avec la proposition du ministre, la différence ne sera que de fr. 7 35.
Cependant aujourd’hui les deux fabriques travaillent.
Je pense donc, messieurs, que nous devons adopter la proposition de M. le ministre des finances, qui tend à établir un droit de 40 francs sur le sucre exotique, et de 22 francs sur le sucre indigène, sauf à élever successivement ce dernier chiffre jusqu’à ce qu’il soit arrivé à 25 francs. Remarquez que le chiffre de 25 francs est précisément celui de la section centrale, que certes on n’accusera pas d’être hostile à l’industrie du sucre indigène. La proposition du gouvernement me paraît préférable à toutes les autres, parce qu’elle maintient seule la coexistence des deux sucres, et qu’elle assure au trésor 4 millions de francs, et c’est ce que nous devons chercher et avoir particulièrement en vue.
M. Verhaegen. - Messieurs, je me suis opposé à la clôture parce que, n’ayant parlé que dans la discussion générale, je n’avais pas encore eu l’occasion de faire connaître mon opinion sur les questions de principe qui s’agitent en ce moment, et, entre autres, sur celle du rendement que je considère comme fondamentale. Je me propose donc de vous soumettre à cet égard quelques observations générales sans toutefois répéter des calculs qui ont été si bien établis par d’autres orateurs et qui sont restés intacts ; en même temps, je répondrai aux honorables membres qui ont attaqué le système de la section centrale avec le plus de violence, c’est-à-dire à MM. Lebeau, Rogier et Cogels.
Messieurs, je ne me le dissimule pas, le discours de l’honorable M. Lebeau est de nature à exercer une grande influence sur la solution des questions graves que nous discutons, et il m’importe, dans l’intérêt même du système que je défends, de détruire l’effet que ce discours a pu produire.
L’honorable M. Lebeau a fait jouer tous les ressorts de l’art oratoire. Je pourrais dire presque, qu’il a abusé de ce beau talent qui le place si haut dans cette enceinte ; et, en effet, messieurs, il a voulu glaner sur tous les bancs ; il a cherché à ébranler des convictions timides ; il a tenté même de forcer la main au ministère, en lui reprochant sa trop grande condescendance pour la majorité, et en lui disant que, s’il n’avait pas le courage de retirer la loi ou de conseiller à S. M. de refuser sa sanction à celle qu’il aurait combattue, il ne mériterait plus de s’appeler un gouvernement, et tout cela pourquoi ? Dans le seul but de tuer le sucre indigène pour faire vivre le sucre exotique !
Messieurs, il ne s’agissait dans cette discussion que d’une question d’intérêt purement matériel, et l’honorable M. Lebeau s’est placé, à tort suivant moi, sur le terrain de la politique. En invoquant certains principes, il a défendu une opinion que je dois considérer comme lui étant tout à fait personnelle, car il n’a parlé et il n’a pu parler qu’en son nom. Je ne le suivrai pas dans la voie qu’il a prise ; m’étant occupé de toute autre chose que de politique à l’occasion des sucres, je ne me suis pas mis à même d’apprécier toute la portée de l’opinion qu’il a émise sur une question si grave et si délicate, notamment dans un pays tel que le nôtre, où les mœurs du gouvernement représentatif ne sont pas encore fortement enracinées. Il ne serait pas étonnant que, sur ce point comme sur quelques autres, il y eut dissidence entre certains de nos amis et l’honorable membre auquel je réponds ; et en ce qui me concerne, je dois le déclarer tout haut, ici comme toujours, j’entends conserver mon entière indépendance.
Il me suffit, pour le moment, de faire remarquer que les principes développés par l’honorable M. Lebeau sont inapplicables à l’espèce. Je dois le dire, parce que l’intérêt que je défends l’exige, la question des sucres ne pouvait pas comporter une question de cabinet, et j’ai la conviction que l’appel fait au ministère, quant aux conseils à donner à la Couronne, ne sera pas écouté. Le ministère, je l’espère, ne se mettra pas de nouveau en opposition avec la majorité de la chambre ; il subira cette fois le vote, quel qu’il puisse être, et ainsi il se conformera aux principes du gouvernement représentatif.
En France, où l’on cherche avec avidité les questions de cabinet on ne les provoque qu’à l’occasion de la politique proprement dite.
Voyez les immenses intérêts qui s’agitent en ce moment à la chambre des députés ; jamais la tribune française n’a offert des débats plus importants, plus solennels ; on y met à découvert toute la politique extérieure suivie depuis 13 ans ; cette politique est attaquée et défendue tour à tour par les talents les plus éminents : on conçoit qu’à la suite d’une pareille discussion le ministère puisse, je dirai même doive poser une question de cabinet.
On s’occupe aussi en France, et pour ainsi dire en même temps, de la question des sucres. M. Cunin-Gridaine demande franchement et ouvertement l’anéantissement de l’industrie indigène, et M. Martin (du Nord), dans son bureau, combat le système de M. Cunin-Gridaine. Ne croyez pas qu’on confonde jamais cette question d’intérêt purement matériel avec ces grandes questions politiques qui fixent l’attention de l’Europe. La discussion sur la loi des sucres ne traînera pas à sa suite une question de cabinet. Seulement le sucre indigène aura eu son portefeuille, comme le sucre exotique aura eu le sien.
C’est aussi ce que j’aurais voulu rencontrer dans mon pays, et l’interpellation que j’ai faite à M. le ministre de l’intérieur, lors de la discussion générale, n’avait d’autre but que de provoquer en faveur du sucre indigène la sympathie du défenseur né de l’agriculture et de l’industrie ; puisque, d’après l’expression de l’honorable M. de La Coste, le sucre exotique avait pris place au cabinet, j’aurais désiré que le sucre indigène y fût aussi représenté. La réponse de M. le ministre n’a pas amené le résultat que j’attendais de mon interpellation, et j’ai dû me résigner ; car jamais, je dois le dire, il n’est entré dans mon intention d’amener la retraite du ministère par le résultat de la discussion actuelle.
Je comprends les questions de cabinet pour la Belgique comme je les comprends pour la France, c’est-à-dire, à la suite de graves discussions politiques : c’est alors que l’opposition doit marcher unie et compacte ; c’est alors que la discipline et l’ensemble sont indispensables pour combattre le ministère, c’est alors, mais alors seulement qu’il faut rechercher les questions de cabinet. En France, c’est la politique extérieure qui soulève l’opposition, en Belgique, c’est la politique intérieure qui la fait agir ; chez nous, deux pouvoirs rivaux sont constamment en présence et se disputent le terrain ; la mission de l’opposition est de soutenir la prééminence du pouvoir temporel sur le pouvoir spirituel, et de combattre les concessions incessantes que le gouvernement fait au clergé, aux dépens de sa propre dignité, en d’autres termes, de défendre le gouvernement contre le gouvernement lui-même.
Si l’on veut rester sur ce terrain, qui est le véritable terrain de notre politique intérieure, l’opposition ne fera jamais défaut, elle marchera unie et compacte, car elle a appris à se discipliner ; elle ne reculera pas alors devant des questions de cabinet, au contraire elle les fera naître. J’aurais compris une question de cabinet à la suite de la discussion importante de la loi apportant des modifications au régime communal ; j’aurais compris une question de cabinet ; et je dois le dire, j’ai regretté que l’opposition ne se fût pas montrée unie et compacte, lors de la discussion de la loi plus importante encore sur l’instruction primaire ; je comprendrais une question de cabinet, et j’attends l’opposition tout entière, telle que la veut l’honorable M. Lebeau, alors qu’on discutera le fameux projet de M. Nothomb qui porte de si graves atteintes au droit électoral, sous le prétexte de réprimer, et d’une manière imparfaite, les fraudes qui ont été commises, on sait par qui ; mais dans la question des sucres, où il ne s’agit que d’un intérêt matériel, je ne puis pas voir, je ne veux pas voir une question de cabinet.
Après tout, de quoi s’agit-il ? Il s’agit, messieurs, de deux grands intérêts qui sont en présence ; d’abord, d’un intérêt général représenté par le trésor, ensuite, d’un autre intérêt général représenté par deux industries rivales qui se disputent le marché intérieur. Il s’agit de savoir si l’on pourra concilier les deux intérêts en présence, surtout sans nuire au trésor, ou si l’on devra sacrifier l’un de ces intérêts à son rival. Voilà toute la question, question sur laquelle des membres qui siègent sur nos bancs peuvent sans inconvénient ne pas partager notre opinion, alors que nous trouvons des partisans sur des bancs opposés, alors aussi qu’ici, comme en France, il aurait pu y avoir dissidence sur ce point dans le sens du cabinet sans que cette dissidence dût amener sa dissolution, puisque le débat n’a aucun caractère politique.
L’honorable M. Lebeau, au point de vue de l’intérêt matériel, a présenté des considérations qui déjà ont été rencontrées par d’autres honorables membres ; l’honorable M. Demonceau s’est particulièrement chargé de cette tâche, et il l’a remplie d’une manière telle que j’aurai peu d’observations à ajouter celles qu’il vous a soumises.
L’honorable M. Lebeau vous a dit, messieurs, que le sucre indigène n’avait point d’avenir ; d’après lui, plusieurs intéressés, voire même presque tous, ne seraient pas fâchés de toucher l’indemnité ; ils ont trouvé, a ajouté l’honorable membre, qu’un député de Bruxelles avait défendu trop chaleureusement leurs intérêts, et avaient déployé à pure perte une éloquence bucolique : cet honorable membre est M. Meeus. Enfin, l’honorable M. Lebeau a dit que, dans une conversation particulière qu’il avait eue avec un des principaux intéressés très haut placé, d’ailleurs, il avait appris qu’on ne désirait rien tant que la destruction de l’industrie indigène, moyennant indemnité.
Messieurs, j’ai un devoir à remplir, c’est de dire tout haut et sur-le-champ que l’honorable M. Lebeau a mal compris et qu’il se trompe gravement.
M. Lebeau. - Je tiens le fait de M. Bosch.
M. Verhaegen. - Soit ; mais sur 33 raffineurs de sucre indigène, vous vous bornez à en nommer un seul ; je vous concède que vous pourriez en nommer un second, mais vous ne pourriez pas aller au-delà du chiffre deux, et, quant à ce chiffre, il n’est pas extraordinaire que, par des circonstances que nous ne voulons pas apprécier, deux raffineurs de sucre indigène sur 33 n’aient point réussi ; on en trouverait, sans doute, un plus grand nombre parmi les raffineurs de sucre exotique, si ou voulait récriminer.
Messieurs, il existe, comme vous savez, un comité de raffineurs de sucre indigène, lequel, à l’exemple des raffineurs de sucre exotique, suit de près nos discussions. Eh bien, voici une lettre qui m’a été adressé par tous les membres de ce comité. Permettez-moi de vous en donner lecture :
« A M. Verhaegen aîné, membre de la chambre des représentants, à Bruxelles.
« Monsieur,
« Plusieurs des membres de la chambre qui défendent les intérêts du sucre exotique ont allégué, dans diverses séances, que les fabricants de sucre indigène étaient partisans de la mesure qui avait pour objet de prononcer l’interdiction de leur industrie avec indemnité, et un député de Bruxelles l’a affirmé hier, de nouveau, d’une manière si expresse que ce bruit pourrait prendre à la fin, aux yeux de la chambre et du pays, un caractère réellement sérieux.
« Cette allégation est insidieuse en ce qui touche vingt-cinq à trente établissements, et nous vous serons reconnaissants, monsieur, si vous avez la bonté de faire dès aujourd’hui sur ce point une déclaration formelle à la chambre.
« Nous avons l’honneur de vous offrir, monsieur, l’expression de notre haute considération.
« Les membres du comité de l’industrie du sucre indigène.
« (Suivent les signatures.)
« Bruxelles le 4 mars 1843. »
J’ai reçu de plus l’assurance verbale que cette lettre aurait été signée, si le temps l’avait permis, par tous les fabricants de sucre indigène du pays, à l’exception de deux, peut-être. M. Lebeau vous a cité un nom propre, c’est l’auteur de la pétition dont le comte de Mérode vous a présenté l’analyse ; il aurait pu vous dire quel était le deuxième fabricant auquel il a fait allusion, je le connais comme lui, mais je ne citerai pas son nom ; je laisse ce soin à l’honorable M. Lebeau, s’il le juge à propos, puisque c’est avec ce fabricant qu’il a eu sa conversation particulière ; toutefois, j’ai des raisons de douter qu’il l’ait bien compris.
L’honorable M. Lebeau vous a dit, en second lieu, que derrière le sucre indigène se cache un intérêt d’agiotage, et que ceux qui croyaient servir un intérêt agricole, pourraient bien ne défendre qu’un intérêt de bourse.
L’honorable membre, faisant un appel à mes antécédents, a voulu me détourner de la défense d’opérations que j’avais toujours condamnées ; s’il s’agissait, en effet, d’un intérêt d’agiotage, il aurait atteint son but ; mais messieurs, je ne vois pas d’agiotage dans cette question. Si des sociétés anonymes se sont formées pour la raffinerie du sucre indigène, ces sociétés ont eu cette fois pour objet une industrie réelle, une industrie honnête, et il eût été à désirer que toutes les sociétés anonymes se fussent constituées sur de semblables bases, Je ne vois rien à blâmer dans des opérations de cette nature, il n’y a pas de mal à ce que de grands capitaux se meuvent et viennent en aide à l’industrie indigène ; c’est là la véritable mission des sociétés anonymes.
On dit que les actions de ces sociétés, qui étaient en baisse, ont eu un mouvement de hausse. Tant mieux, s’il en est ainsi, mais est-ce là de l’agiotage ? Et d’ailleurs, qu’ont de commun avec cette baisse et cette hausse les raffineurs du sucre indigène ?
L’honorable M. Lebeau s’est occupé ensuite de la question commerciale, mais il n’a fait que répéter les considérations qui avaient été présentées dès le principe dans la discussion générale, et ces considérations ont été combattues à satiété et sous diverses formes. Je ne reviendrai donc pas sur ce point. Je me bornerai à un seul mot. C’est que s’il est vrai que trois maisons belges, malgré tout ce que notre législation actuelle avait de précaire, en vue d’un système qui coûte si cher au trésor, se soient déjà établies à la Havane, je désire qu’elles réussissent mieux que d’autres maisons qui se sont établies naguère à Rio.
L’honorable M. Lebeau a parlé enfin du rendement. C’est là le véritable point de la contestation. Ce sera aussi principalement sur ce terrain que je m’efforcerai de le combattre. Je suis heureux, messieurs, de vous le dire tout d’abord, l’honorable M. Lebeau m’a fourni lui-même des arguments contre le système qu’il a présenté, et qui le détruisent de fond en comble ; il est même allé si loin qu’il s’est mis en opposition formelle avec son ami M. Rogier et avec l’honorable M. Cogels. J’avais craint un moment d’avoir mal compris, car l’argument de l’honorable membre auquel je réponds, me paraissait tellement péremptoire en faveur de mon opinion, que je croyais d’abord m’être fait illusion ; mais le Moniteur a dissipé mes craintes, et je puis maintenant, d’une manière certaine, vous présenter le système qu’il a développé. Le voici : l’honorable membre vous a dit que, dans l’opinion du législateur de 1822, le rendement approchait de la réalité ; que l’industrie de la raffinerie était alors dans son enfance, qu’elle a marché de progrès en progrès. Il l’a dit, pour louer l’industrie du sucre exotique de ce prétendu reproche « qu’elle se serait entendue avec le gouvernement hollandais pour piper (c’est l’expression dont il s’est servi), pour piper les contribuables. »
D’après lui, les raffineurs du sucre exotique ne font que profiter d’une loi qui leur est devenue favorable par suite de circonstances imprévues au moment où elle a été faite. Quel était en effet, vous a-t-il demandé, le but du législateur lors de la loi de 1822 ? et lui-même s’est chargé de la réponse. Le législateur a voulu, a-t-il dit, faire payer par le sucre tout ce qu’il pouvait produire ; et le rendement fixe était en rapport avec la réalité. S’il ne l’est plus, a-t-il ajouté, c’est que l’industrie de la raffinerie n’est plus au point où elle était en 1822, qu’elle a marché de progrès en progrès, ce qui a nécessité des changements successifs en 1829 et en 1838. Eh bien ! prenant acte de ces paroles claires et non équivoques, nous disons en 1843, comme on disait en 1838, que des progrès nouveaux exigent des changements nouveaux pour que le rendement soit encore en rapport avec la réalité. L’honorable M. Lebeau a donc résolu la question, et il ne m’en faut pas davantage pour prouver que tout ce qu’a dit M. Dumortier est marqué du coin de la plus exacte vérité.
M. Lebeau. - Il y avait alors table rase, ce qui n’existe pas maintenant.
M. Verhaegen. - Je comprends votre embarras, et je veux bien vous dire que vous m’avez donné l’éveil par votre discours sur le véritable état de la question. C’est par suite de ce que je vous ai entendu dire dans la dernière séance, que je me suis livré des investigations, que j’ai étudié la législation de 1822, et que, je l’ai comparée aux législations antérieures. Je vais vous faire voir maintenant quel a été l’esprit de ces législations ; je ferai parler les sections centrales, j’invoquerai les préambules des lois, et je vous démontrerai que vous avez raison de dire que, « dans l’opinion du législateur, le rendement approchait de la réalité. »
Voici ce que disait l’honorable M. Lebeau :
« Disons d’abord un mot de la loi de 1822. A entendre ce qu’on dit ici des conséquences qu’en ont retirées les raffineurs de sucre exotique, on croirait que leur industrie n’est autre chose que du robert-macairisme ; on croirait qu’ils se sont entendus avec le gouvernement hollandais pour piper les contribuables, pour tromper le pays. Il n’en est rien. Les raffineurs de sucre exotique ont exécuté avec bonne foi une loi qui, je le reconnais, leur est devenue très favorable. Mais quand la loi de 1822 a vu le jour, l’industrie du raffinage était dans l’enfance.
« Quand le rendement a été calculé à un taux contre lequel on a réclamé depuis, il est possible que, dans l’opinion du législateur, et en réalité, ce rendement approchait de très près d’une exactitude mathématique. L’expérience, dit-on, a prouvé le contraire mais la raffinerie a fait des progrès. Je suis heureux de ces progrès ; ils ont été parfaitement légitimes, comme les bénéfices qu’elle a faits. »
Remarquez que, si par les progrès qu’a faits la raffinerie du sucre exotique depuis 1822, ses bénéfices se sont accrus, la législature n’est pas restée inerte. En février 1838, le sucre exotique a eu à subir de nouvelles charges ; on a assuré au trésor le maintien d’un dixième des importations sans restitution de droits ; on a de plus modifié le rendement.
M. Rogier. - Qu’est-ce que cela prouve ?
M. Verhaegen. - Cela prouve beaucoup.
Quand vous, M. Rogier, vous avez parlé de cette belle loi de 1822, vous avez dit qu’elle avait été faite exclusivement en faveur du commerce maritime et voilà que vous êtes combattu par votre honorable ami M. Lebeau, qui vient nous dire que le législateur de 1822 n’a pas eu pour but de donner des primes au commerce, comme vous le prétendez, mais bien d’établir un rendement en rapport avec la réalité, d’une exactitude presque mathématique, pour me servir de ses expressions. J’espère que l’honorable M. Rogier aura compris maintenant la force de mon argument et qu’il sera convaincu que, dans l’opinion de M. Lebeau, le rendement devant être en rapport avec la réalité, il y a lieu de faire ce que nous demandons aujourd’hui.
Messieurs, j’avais l’honneur de vous dire tantôt que les observations de l’honorable M. Lebeau m’avaient mis sur la voie, et que j’avais consulté l’esprit dans lequel avaient été faites les diverses lois sur les sucres, celles antérieures comme celles postérieures à la loi de 1822, et je dois ajouter que j’ai trouvé dans les préambules de ces lois et dans les rapports des sections centrales qui les ont précédées, la confirmation de l’opinion de l’honorable M. Lebeau.
Après la loi de 1816, dont nous n’avons pas à nous occuper, puisque elle n’avait pour but qu’un commencement d’organisation, la première loi qui mérite de fixer l’attention de la chambre, est celle de 1819. Voici le préambule de cette loi :
« Nous Guillaume, etc.,
« Ayant reconnu nécessaire, pour augmenter les revenus de l’Etat, d’imposer le sucre qui est consommé dans l’intérieur du royaume, d’un droit de consommation en sus des droits d’entrée et de sortie ordinaires ;
« Avons, de commun accord avec les états-généraux, statué, etc. »
Suivent les dispositions de la loi.
D’après cela, n’est-il pas évident, messieurs, qu’il était dans l’intention du législateur de 1819, déjà, de venir en aide au trésor, et à cette fin, d’imposer tous les sucres qui seraient consommés dans l’intérieur. S’il a voulu imposer tous les sucres qui seraient mis en consommation, il faut bien que, dans son opinion, le rendement approchât de la réalité, car, sans cela, beaucoup de sucre qui se serait consommé dans l’intérieur aurait échappé au droit.
Voyons maintenant le rapport de la section centrale qui a précédé cette loi ; nous y lisons :
« Les réclamations que l’on a faites contre le projet de loi sur les sucres sont à peu près les mêmes que celles qu’on a présentées sur la loi relative aux cafés. On doit cependant y ajouter que l’on a prétendu que la restitution à l’exportation des sucres raffinés ne suffisait pas pour couvrir les pertes de la raffinerie. »
Le rendement, disait-on, ne suffirait pas pour couvrir les pertes de la raffinerie. Il ne s’agissait donc pas d’accorder une prime au commerce, mais d’éviter une perte réelle aux raffineurs.
La section centrale continue en ces termes :
« La restitution ou décharge de 10 flor, pour les 100 livres des Pays-Bas, alors que le droit est de 8 florins, est suffisante lorsque la raffinerie réussit et lorsqu’on n’exporte que du sucre candi, du sucre en pains ou en morceaux, mais elle est insuffisante pour les sucres qu’on exporte en poudre. Les raffineurs d’Amsterdam comptent qu’il faut 12 flor. pour les indemniser, d’autres portent l’évaluation plus haut. Le calcul des derniers paraît exagéré, celui de 1822 paraît fondé sur l’expérience. En portant l’impôt de 8 à 10 pour le sucre brut, la restitution devrait être de 15 ; on propose de le porter 16 fl. 80 c. Par cette augmentation on satisfait, aux demandes même les plus exagérées. »
Voilà les motifs qu’a donnés la section centrale lors de la présentation de la loi en 1819. Vous voyez, messieurs, qu’il s’agissait de toute autre chose que de donner des primes exorbitantes à l’exportation. Non, il n’était pas dans l’intention du législateur de 1819 de donner des primes à l’exportation ; il n’a voulu qu’une chose, c’était d’augmenter les revenus de l’Etat, et c’est pour cela qu’il a imposé tous les sucres qui se consommaient dans le pays.
En 1821, fut adoptée une loi qui fixait les bases du système des impositions pour tout le royaume, à partir de l’année 1822 ; et voici dans quels termes est conçu le préambule :
« Nous Guillaume,
« Ayant pris en considération le résultat des délibérations de la commission nommée par notre arrêté du 23 janvier 1820, n°17, pour revoir le système actuel des droits d’entrée de sortie et des accises, et ayant reconnu par là la nécessité d’apporter au système des modifications importantes et de le compléter, en tant qu’il est insuffisant pour le trésor, par les moyens qui paraîtront le plus convenables,
« Avons arrêté de commun accord avec les états-généraux :
« Art. 1er. A partir de l’année 1822, le système des impositions sera établi de la manière développée ci-après, etc. »
A la suite de cela a été faite la loi du 27 juillet 1822, et c’est celle-là qui a servi de point de départ aux raisonnements de l’honorable M. Lebeau. Nous avons vu dans quel esprit ont été conçues les lois antérieures, nous allons voir maintenant quel a été le but de la loi de 1822.
Je lis dans le préambule de cette loi :
« Nous, Guillaume,
« Ayant pris en considération que par la loi du 12 juillet 1821, ainsi que par les art. 5 et 6, il a été arrêté que, dans les impositions du royaume, il sera compris une accise sur le sucre, en raison de la consommation, avec les bases sur lesquelles il sera établi etc., avons statué : »
Et si vous voulez consulter le rapport de la section centrale de 1822, vous verrez que la loi précédente, celle de 1819 n’avait pas atteint son but, qu’elle n’avait rien produit au gouvernement ; que les intérêts du trésor avaient été sacrifies, qu’il fallait venir à son aide, et que pour cela il fallait faire autre chose que ce qui existait alors.
Il est évident, messieurs, qu’à cette époque on avait besoin d’argent, de beaucoup d’argent ; et on présentait la loi sur les sucres, cette belle loi, comme l’appelle l’honorable M. Rogier, accompagnée des odieuses lois sur la mouture et sur l’abattage, et tout cela pour venir en aide au trésor, dont la détresse était notoire. Croyez-vous, messieurs, que quand le gouvernement présentait des lois semblables, des lois qui devaient faire crier tout le pays, car, encore une fois, il n’y a pas eu de loi plus odieuse que la loi de mouture ; croyez-vous que, quand le gouvernement en était réduit à cette dure nécessite, il ait pu avoir l’intention de transformer une loi purement fiscale en une loi commerciale et de créer des primes au détriment du trésor ? Non ; il voulait uniquement venir en aide aux caisses de l’Etat, qui étaient vides à cette époque, il a voulu frapper tout ce qui pouvait supporter un impôt, et il aurait laissé échapper cette belle occasion de faire une véritable loi sur les sucres ! Voilà quelle était la position en 1822, et elle parle plus haut que tous les raisonnements.
L’honorable M. Lebeau a donc eu raison, et je me félicite d’avoir pu corroborer son opinion, en vous démontrant que, dans l’esprit du législateur de 1822 et des législateurs précédents, le rendement approchait de la réalité. Eh bien ! messieurs, nous ne demandons pas autre chose, et nous cherchons le moyen d’atteindre ce but.
Messieurs, avant de rencontrer les divers systèmes qui vous ont été présentés et sur lesquels je ne dirai que quelques mots, je dois répondre encore à une observation qui a été faite par l’honorable M. Cogels, et avant lui par l’honorable M. Rogier.
Comment, dit-on, et c’est à l’honorable M. Demonceau qu’on faisait cette objection, vous voulez une protection exorbitante pour le sucre indigène, vous qui vouliez que les protections n’excédassent jamais 15 p. cent.
On a répondu aux chiffres, et je ne reviendrai pas sur ce point. Je me bornerai à demander à ceux qui ont fait l’objection, de quelle protection jouit le sucre exotique ?
Un membre. - C’est cela.
M. Verhaegen. - Puisque ces messieurs ne veulent pas répondre, je répondrai pour eux ; je dirai que le sucre exotique jouit d’une double protection, et obtient des primes énormes à l’exportation, et qu’il est protégé par des droits considérables sur l’entrée des sucres raffinés ; chose curieuse, l’honorable M. Cogels prétend maintenant que la protection est trop forte et qu’elle favorise la fraude ; mais qui donc a demandé cette protection pour le sucre exotique ? Ce sont nos adversaires.
M. Cogels. - Je demande la parole pour une explication.
M. Verhaegen. - Ils se plaignent d’une trop grande protection, et voilà comment on se combat soi-même, quand on est à côté de la vérité.
M. Cogels. - Je demande la parole.
M. Verhaegen. - Vous aurez beau équivoquer, vous avez une protection énorme dans la prime et dans le droit sur les sucres raffinés à l’entrée.
Il me reste à dire quelques mots sur les différents systèmes qui ont été présentés. Messieurs, il y a d’abord le système nouveau du gouvernement, qui se résume dans son système précédent, avec cette seule différence que, dans la première proposition, c’était la mort du sucre indigène avec indemnité, tandis que dans la proposition actuelle, c’est la mort du sucre indigène sans indemnité, c’est-à-dire, avec spoliation ; c’est ce système nouveau qui a été combattu avec force à la tribune française par le rapporteur, le général Bugeaud ; et si ce n’était pas abuser de vos moments, je vous demanderais la permission de vous lire quelques mots de son rapport.
Voici comment il s’exprimait :
« Ce serait, a dit M. Dupin, indigne, barbare, illibéral ; cette proposition n’est pas française, messieurs : ce qui serait illibéral, barbare, cruel, ce serait, par voie indirecte, la suppression de l’industrie indigène, la suppression avec spoliation, etc. »
Nous vous dirons, messieurs, ce que disait en termes si énergiques le général Bugeaud : Il serait barbare, cruel, après avoir proposé l’anéantissement du sucre indigène avec indemnité, de le demander ensuite sans indemnité, Ce serait une véritable injustice, une véritable spoliation.
L’amendement de l’honorable M. Rodenbach doit atteindre le même but que la proposition nouvelle de M. le ministre des finances, et on l’a démontré à satiété ; je ne reviendrai donc pas non plus sur ce point.
La proposition de l’honorable M. Dumortier me souriait, messieurs, car elle est dans l’esprit de la législature, je l’ai démontré à l’évidence ; elle est d’ailleurs justifiée par l’opinion de M. Lebeau, qui veut que le rendement approche de la réalité. M. ; Dumortier le veut aussi ; il ne refuse pas une protection au sucre exotique, il consent même à y sacrifier deux millions ; il ne s’agit que de savoir de quelle manière on atteindra ce but. Il eût été facile, me semble-t-il, de dresser le tableau dans lequel auraient été classées les différentes qualités de sucre, et si le gouvernement avait voulu faire preuve de bonne volonté, il aurait pu obtenir ce résultat. Vous comprendrez, messieurs, que, quant à moi, je ne remplirai pas cette tâche, elle est au-dessus de mes forces ; d’ailleurs, je ne suis pas l’auteur de la proposition, et je craindrais de m’égarer dans les calculs. J’attendrai donc des explications ultérieures de la part de l’honorable M. Dumortier.
Reste la proposition de la section centrale. Messieurs, je dois le dire, parce que telle est ma conviction profonde, si l’on y retranche quoi que ce soit, et surtout si on touche au rendement, c’est la ruine du sucre indigène ; je crains même qu’avec cette proposition on n’atteigne pas le but qu’on se propose ; mais, à coup sûr, c’est la limite extrême.
Une seule objection sérieuse a été présentée contre ce système, et j’espère bien qu’au moyen d’une observation, par laquelle je vais terminer, j’aurai l’avantage de rallier quelques adversaires à la proposition de la section centrale ; d’autres ont cherché à rallier des opinions à leur cause ; il me sera bien permis de faire de même.
On veut assurer les droits du trésor, c’est l’opinion qui domine. Eh bien, il y a un moyen de donner, à cet égard, les garanties. Dans l’opinion de la section centrale, et veuillez, messieurs, fixer votre attention sur ce point, la réserve pour le trésor doit être en réalité de deux et demi dixièmes, c’est-à-dire, d’un quart.
M. Cogels. - Elle n’est que d’un dixième.
M. Verhaegen. - Dans l’opinion de la section centrale, la réserve serait en effet de deux et demi dixièmes, si on adopte le rendement tel qu’elle l’a établi, et je fais à cet égard un appel à l’honorable rapporteur, M. Mercier, qui voudra bien contrôler mon assertion.
M. Mercier, rapporteur. - Je demande la parole.
M. Verhaegen. - Messieurs, je prendrais inutilement les moments de la chambre si je devais entrer dans des détails, je crois devoir abandonner les calculs à d’autres orateurs qui sont, à cet égard, plus compétents que moi. Mais il est bien certain que l’intention de la section centrale est d’assurer 2 1/2 dixièmes au trésor.
Vous agissez, messieurs, vous partisans du sucre exotique, d’une manière très adroite : vous venez dire que le rendement n’a rien de commun avec la retenue. Mais le rendement et la retenue sont corrélatifs, et je vous défie de nier cette corrélation.
Il y a ici quelque chose de bien extraordinaire, c’est la retenue des 4/10 demandée, ou au moins consentie par le sucre exotique. Qu’est-ce que cela prouve ? Cela prouve que le rendement doit lui être très favorable, car autrement que ferait-il avec la retenue des 4/10 ?
Oui, messieurs, le rendement est en rapport avec la retenue, et, comme dans l’opinion de la section centrale, la réserve qui, dans les termes, n’est que de 1/10, est cependant dans la réalité de 2/10 et demi ou de 1/4, pour donner une garantie à ceux qui la réclament ; et pour exprimer clairement dans la loi ce qui a été dans l’intention de la section centrale, je propose, par amendement, de fixer la retenue à 2 1/2 dixièmes ; de manière que, si vous avez une consommation de 15 millions, vous aurez une recette assurée de 4 millions 200 mille et des francs.
Veuillez remarquer, messieurs, que je conserve le rendement fixé par la section centrale ; car je ne change rien à son travail, je mets seulement dans la loi, d’une manière formelle, ce qui y est d’une manière implicite ; mon amendement ralliera, j’espère, quelques opinions chancelantes, surtout celles qui veulent venir en aide au trésor.
Messieurs, j’ai parlé avec l’accent d’une conviction profonde, et les observations que je vous ai soumises, je les aurais faites aussi sous le ministère précédent ; mon opposition aurait été la même. Vous le savez, messieurs, j’ai soutenu le cabinet Lebeau, mais je dois le déclarer tout haut, pour qu’on ne se trompe pas sur mes intentions, le ministère Lebeau eût-il fait de la question des sucres une question de cabinet, j’aurais voté contre son projet de loi, mon vote eût-il dû amener sa retraite. J’ai dit.
- La clôture est demandée.
M. Delehaye (contre la clôture). - Messieurs, je conçois difficilement la demande de clôture en ce moment. L’honorable M. Verhaegen vient de vous faire une proposition qui n’est pas même encore écrite. Je vous demande comment vous voulez voter sur un amendement qui n’est pas encore écrit.
M. Delfosse. - Je suis surpris de l’opposition que l’honorable M. Delehaye fait à la demande de clôture. L’honorable membre est un de ceux qui ont le plus parlé dans cette discussion, L’honorable membre a parlé cinq ou six fois, et chaque fois assez longuement ; jusqu’à présent je l’ai écouté avec plaisir, mais j’avoue que je ne l’écouterai plus avec le même plaisir s’il parlait encore. Nous sommes saturés de discours et d’arguments ; je pose en fait qu’il n’y a pas un argument qui n’ait été produit au moins vingt fois dans cette enceinte et qui, avant d’être produit dans cette enceinte, n’ait été invoqué dans les nombreux mémoires qui nous ont été distribués. La chambre a montré beaucoup de patience dans cette discussion ; je ne lui en fais pas un reproche, la gravité des intérêts engagés dans la question nécessitait une discussion approfondie, mais il est temps d’en finir ; tout ce qu’il y avait à dire a été dit, chacun de nous doit avoir une opinion fixée, et les discours les plus éloquents seraient en pure perte.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, nous sommes en présence de propositions qui vous sont soumises depuis peu de jours. Je sais que la chambre est fatiguée et je crois qu’il faudrait déterminer le moment de la clôture. Mais je ne pense pas qu’il faille clôturer aujourd’hui même. Il suffit que quelques orateurs aient exprimé le désir de parler pour que la chambre doive adhérer à ce vœu. Mais on pourrait décider que la discussion ne se prolongera pas au-delà de la séance de demain. C’est une proposition que je fais maintenant. Je pense qu’il y a encore quelques points à éclaircir et qu’il y a lieu de continuer demain encore la discussion, mais de voter, à la fin de la séance, sur les différentes questions.
M. de Brouckere. - Messieurs, dans cette question, je suis d’une opinion diamétralement opposée à celle que défend l’honorable M. Verhaegen. Il vient de prononcer un discours très remarquable, et cependant je me déclare pour la clôture sans demander qu’un partisan de mon opinion parle après lui.
Je répéterai ce qu’on vient de vous dire tout à l’heure : il est plus que temps que la discussion finisse ; c’est aujourd’hui le dix-septième jour de discussion, et il est sans exemple qu’on ait discuté dix-sept jours, non pas sur un projet de loi, mais sur une question ; car quand la question de principe aura été décidée, nous aurons encore à examiner les conséquences du principe que nous aurons voté.
Il y a, messieurs, une raison péremptoire pour terminer promptement la loi sur les sucres ; c’est que d’ici à peu de jours, peut-être dans le courant de cette semaine, on vous présentera le rapport sur le projet de loi relatif aux fraudes électorales. Aussitôt que ce rapport sera imprimé, il faudra que nous entamions la discussion, alors même que celle sur le projet des sucres ne serait pas terminée car ce projet sur les fraudes électorales est de la plus grande urgence. De cette manière nous devrions interrompre la discussion de la loi des sucres, et nous arriverons à la fin de la session sans aucun résultat.
Je crois d’après cela, et par le motif que l’on a fait valoir, qu’on ne peut présenter de considérations nouvelles, qu’il est temps d’en finir, et je me prononce pour la clôture immédiate.
M. le président. - Voici l’amendement de l’honorable M. Verhaegen :
« J’ai l’honneur de proposer de fixer la réserve à 2 1/2 dixièmes ou au quart des prises en charge, et par conséquent, de substituer au § 6 de l’article 44 du projet de la section centrale, les mots : jusqu’à concurrence des 3/4 du montant des prises en charge, ceux : jusqu’à concurrence du 1/10 du montant des prises en charge. »
- L’amendement de M. Verhaegen est appuyé.
M. le président. - Quelqu’un demande-t-il encore la parole sur la clôture ?
M. Rogier. - S’agit-il de clôturer aussi sur la proposition de la section centrale ? Jusqu’ici cette proposition n’a pas été débattue, elle n’a pas même été discutée par l’honorable rapporteur de la section centrale. On a combattu la multitude de systèmes qui, grâce à l’attitude du gouvernement, ont surgi dans cette enceinte. Mais la proposition de la section centrale n’a pas encore été discutée. J’aurais, quant à moi, des interpellations à adresser à l’honorable rapporteur, sur la portée de ses propositions ; j’attendais que la proposition de la section centrale fût en discussion pour les lui adresser.
M. Demonceau. - J’engage beaucoup la chambre à ne pas prononcer aujourd’hui la clôture, et voici pourquoi c’est que la proposition que vient de faire l’honorable M. Verhaegen se rapporte à une proposition qui, ainsi que vient de le dire l’honorable M. Rogier, n’a pas encore été discutée.
La proposition de la section centrale est complexe ; elle propose bien une retenue de 1/10 mais elle demande un changement de rendement. C’est précisément sur ce point qu’il faudrait tâcher de s’entendre. Si vous prononcez aujourd’hui la clôture de la discussion, quand vous serez au vote, vous ne saurez comment voter. Mettrez-vous, par exemple, aux voix la proposition de l’honorable M. Verhaegen ? mais vous serez peut-être embarrassés lorsque vous l’aurez adoptée.
Messieurs, je vous assure que malgré la longueur de cette discussion, comme on s’est beaucoup écarté des chiffres pour se lancer dans des généralités, la question n’est pas assez mûrie pour se prononcer en connaissance de cause, et j’engage la chambre à ne pas prononcer aujourd’hui la clôture, sauf à la prononcer demain, lorsqu’on se sera entendu sur les conséquences du système de la section centrale.
M. Mercier, rapporteur. - Messieurs, je continue à me prononcer contre la clôture, sauf à passer demain au vote. Je dois cependant faire une observation. On a dit que l’on n’avait pas discuté encore le projet de la section centrale. Je ferai remarquer qu’il en a été question dans beaucoup de discours ; car c’est en opposition à ce projet que la plupart des discours de nos adversaires ont été prononcés. De mon côté, j’ai indiqué plus d’une fois les résultats de la proposition de la section centrale. J’ai dit, entre autres, que la section centrale, avait pensé que d’après le rendement qu’elle proposait, on n’apurerait pas les 9/10 susceptibles d’exportation, mais qu’il nous resterait 2/10 ou 2 1/2 dixièmes qui ne seraient pas apurés par le moyen de l’exportation.
Maintenant, ce que vient de faire l’honorable M. Verhaegen, c’est précisément la réalisation du système de la section centrale, si ce n’est que, comme plusieurs de nos adversaires ont prétendu que nous ne réaliserions par les recettes que nous promettons, c’est un moyen sûr d’obtenir le produit que la section centrale a annoncé.
M. Delfosse. - Je suis surpris d’entendre dire que les propositions de la section centrale n’ont pas encore été discutées. Il y a dans les propositions de la section centrale deux questions : la question de savoir s’il y aura un droit protecteur pour le sucre indigène et quel sera ce droit, et celle de savoir s’il y aura un rendement et quel sera ce rendement. C’est là le fond des propositions de la section centrale. Tout n’a-t-il pas été dit sur ces deux questions, et la discussion a-t-elle roulé sur autre chose ? Il y en a qui pensent qu’il ne faut pas de droit protecteur pour le sucre indigène ; ce sont, entre autres, les députes d’Anvers et de Gand ; n’ont-ils pas, je vous le demande, dit tout ce qu’il y avait à dire en faveur de leur opinion, n’a-t-on pas entendu une foule d’orateurs en faveur de l’opinion contraire ? La quotité du droit à établir a aussi été longuement et chaleureusement débattue. Il y en a qui pensent qu’il ne faut pas de rendement ; l’honorable M. Dumortier est de cet avis. Peut-on ajouter quelque chose aux considérations qu’il a fait valoir à l’appui de sen amendements ? Il y en a d’autres, notamment les députes de Gand et d’Anvers, qui soutiennent qu’il ne faut pas toucher au rendement actuel ; jamais cause ne fut soutenue avec plus d’habilité ; d’autres enfin, c’est l’opinion de la section centrale, disent qu’il faut élever le rendement ; cette cause n’a pas manqué non plus d’éloquents défenseurs. La chambre fera ce qu’elle voudra ; mais je prédis d’avance que, si elle ne prononce pas la clôture, elle n’entendra rien de nouveau ; ce sera du temps entièrement perdu.
M. Cools. - Contrairement à l’opinion du dernier orateur, je partage, messieurs, l’avis de beaucoup de membres, qu’il est deux points dont la discussion n’est pas assez avancée ; je veux parler de la question de la retenue et de celle du rendement ; mais je prétends aussi qu’il est deux propositions sur lesquelles il est impossible de dire encore quelque chose de nouveau ; c’est la proposition de l’honorable M. Dumortier et la proposition de l’honorable M. Rodenbach, qui a été légèrement modifiée part le ministre des finances. Je sais bien que l’honorable rapporteur de la section centrale pourra encore présenter des considérations en faveur des droits proposés par cette section, mais les membres de la chambre ayant lu les documents fournis par M. le rapporteur, ont tous une opinion arrêtée sur la question de savoir s’il faut adopter les chiffres de 50 et de 25 fr., ou ceux de 40 et de 22 fr. Ainsi, messieurs, je pense que l’on pourrait prononcer la clôture, en réservant la discussion sur la question de la retenue et sur celle du rendement.
M. Demonceau. - Messieurs, l’honorable M. Delfosse porte à ses collègues un défi qu’il lui est facile de leur porter ; l’honorable membre faisait partie de la section centrale, et il a pu dès lors étudier à fond la question ; mais tous les membres de la chambre ne sont pas dans le même cas. J’ai également mon opinion arrêtée sur la question, parce que je faisais aussi partie de la section centrale ; mais je désire qu’avant d’en venir au vote, tous les membres de la chambre sachent bien positivement sur quoi ils sont appelés à se prononcer, et je demande, par conséquent, que la discussion ne soit pas close aujourd’hui.
M. Rodenbach. - Je demande aussi que l’on ne prononce la clôture que demain, car il faut convenir que l’amendement qui vient d’être présenté par l’honorable M. Verhaegen n’a pas encore été discuté. Le système de la section centrale n’a pas non plus été discuté d’une manière spéciale. Je crois, par exemple, qu’il sera très facile à M. le ministre des finances de démontrer que ce système ne rapporterait pas au trésor les 4 millions dont il a besoin.
M. le ministre des finances (M. Smits) - Messieurs, la chambre se trouve en présence de 4 propositions différentes ; la première est celle de l’honorable M. Eloy de Burdinne tendant à frapper le sucre exotique de 60 francs et le sucre indigène de 30 fr. ; la seconde est celle de l’honorable M. Dumortier, qui tend à supprimer tout rendement et à obliger les raffineurs de sucre exotique à travailler en entrepôt ; la troisième est celle du gouvernement, qui demande un droit de 40 fr. sur le sucre exotique et de 22 fr sur le sucre indigène ; enfin la quatrième, c’est la proposition de la section centrale. Je pense, messieurs, que les deux premières de ces questions ont été suffisamment examinées, mais il me reste encore quelques réflexions à présenter sur les deux autres ; je voudrais surtout rencontrer l’objection faite par les honorables MM. Mercier et Verhaegen. Je demande donc que la discussion continue encore, sauf à clore définitivement demain.
- La clôture n’est pas prononcée.
La séance est levée à 4 heures et demie.