(Moniteur belge n°14 du 14 janvier 1841)
(Présidence de M. Fallon)
M. de Renesse procède à l’appel nominal à midi et quart.
M. de Villegas donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.
M. de Renesse communique les pièces de la correspondance :
« La chambre de commerce et des fabriques d’Ostende, adresse des observations sur le projet de loi relatif au traité de commerce et de navigation entre la Belgique et les Etats-Unis.
- Renvoi à la commission chargée d’examiner le projet ci-dessus.
« La chambre de commerce et des fabriques de Mons, demande la construction du canal de Zelzaete vers la mer. »
- Renvoi à la section centrale pour le canal de Zelzaete.
« Les sieurs Corneille Venceslas Kleczkowski, capitaine de première classe, au 1er régiment d’artillerie, commandant d’artillerie de la place d’Ostende, né en Pologne ; Mardochée-Cajetan Joseph-Charles Bucelani, lieutenant au 1er régiment de ligne, né à Milan ; Jean Loos, sergent au 1er régiment d’infanterie, né à Bergen-op-Zoom ; Jean Alla, ex-sergent au 1er régiment de ligne, né en France ; François Avanzo, négociant à Bruges, né à Piève-Tesino (Tyrol italien), demandent la naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Les fabricants de sucre indigène appellent la sollicitude de la chambre sur la détresse que subit leur industrie et demandent la révision de la législation sur les sucres exotiques, afin que l’Etat ne soit plus frustré des ressources financières que la fabrication des sucres exotiques devrait nécessairement lui rapporter. »
« Le conseil communal de la ville de Louvain adresse des observations contre le projet d’augmentation de l'accise sur la bière. »
« Des négociants de la ville d’Ypres adressent des observations contre les modifications proposées au budget des voies et moyens sur quelques denrées coloniales. »
« Des habitants de la commune de Villers (Luxembourg) demandent l’augmentation du droit sur les eaux-de-vie distillées. »
« Les sieurs A.-S. et Charles Clercx, distillateurs à Overpelt, réclament contre la disposition de la loi du 27 mai 1837, sur les distilleries, qui oblige le distillateur à payer l’impôt par 24 heures de travail et le force à y comprendre les jours de repos. »
- Toutes ces pétitions sont renvoyées à la section centrale des voies et moyens, pour en faire l’analyse, et l’insertion au Moniteur en est ordonnée.
« Les fondateurs de l’université catholique de Louvain demandent que cet établissement soit reconnu par la loi comme personne civile. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Jean Hemmer, propriétaire, demande qu’une créance de 629 francs 45 c. qui lui est due depuis 1834 pour frais d’exploitation des coupes usagères, soit portée au budget des finances, pour l’exercice 1841. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Duyckx, officier pensionné, demande le payement de l’indemnité qu’il prétend lui revenir du chef des pertes qu’il a essuyées par l’agression hollandaise. »
- Renvoi à la commission des indemnités.
« Les habitants de Vieille-Salm demandent la construction d’une route qui traverse leur canton, afin de procurer la fertilisation du sol. »
M. d’Hoffschmidt – La pétition dont on vient de vous présenter l’analyse vous est adressée par les habitants du canton de Vieille-Salm, qui demandent que leur canton soit appelé à participer aux dépenses considérables faites et Belgique pour créer de nouvelles voies de communication. Ce canton se trouve dans une position tout à fait exceptionnelle, car bien qu’il ait 12 lieues de circonférence, il n’a pas un seul mètre de routes : cependant il est loin d’être dénué de ressources ; son sol est productif et susceptible encore de beaucoup d’améliorations : il a un commerce actif, des habitants industrieux, et possède des carrières d’ardoises très importantes et des carrières de pierres à rasoirs, dont on expédie les produits dans toutes les parties du globe.
On avait promis de construire une route qui était destinée à lier Sedan à Malmedy. Cette route doit traverser Saint-Hubert, Laroche, Vieille-Salm et arriver à Stavelot. Elle est faite jusqu’à Laroche ; on ne l’a pas prolongée au-delà. Cependant, ce qui reste à faire est la partie la plus importante de la route, parce qu’elle achèverait la voie de communication principale, et que cette communication est de la plus grande utilité pour les localités qui réclament dans la pétition dont on vient de donner lecture.
Je demande donc que la commission des pétitions soit invitée à faire un prompt rapport, de manière qu’il puisse être présenté et discuté avant la discussion du budget des travaux publics.
- Cette proposition est adoptée.
« Les habitants de la commune de Merckem, Flandre orientale, protestent contre l’établissement d’une nouvelle barrière dans leur commune, ce qu’ils prétendent contraire à l’article 3 de la loi du 10 mars 1838. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Ange Wremé, capitaine de première classe, pensionné depuis le 1er septembre 1840, se plaint de la modicité de sa pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des débitants de boisons distillées de la commune de Cruyshautem, Flandre orientale, demandent l’abrogation de la loi du 18 mars 1838. »
- Renvoi à la section centrale du budget des voies et moyens et insertion au Moniteur.
« Les membres du conseil communal d’Esschin demandent le paiement de prestations militaires forcées faites par cette commune à l’armée hollandaise en 1831. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des brasseurs et cabaretiers de Roulers et autres communes de la Flandre occidentale adressent des observations contre le projet d’augmentation de l’accise sur la bière.
- Renvoi à la section centrale du budget des voies et moyens et insertion au Moniteur.
« Le bourgmestre de la commune de Villers-sur-Semois demande le payement d’une somme de 152 florins 10 cents des Pays-Bas, pour prestations militaires, faites par les habitants de sa commune, en 1831, à un détachement de tirailleurs francs. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Des négociants du canton de Florenville demandent qu’il soit pris des mesures pour empêcher les ventes de marchandises neuves par les colporteurs et les marchands ambulants. »
« Même pétition des négociants de Hasselt »
- Renvoi à M. le ministre de l'intérieur et dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet interprétatif de la loi relative aux ventes à l’encan.
« Le général de brigade Lecharlier réclame de nouveau l’intervention de la chambre pour obtenir sa réintégration dans les cadres de l’armée. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de Stockheim (Limbourg) expose que, par suite des envahissements de la Meuse, une grande partie du territoire de cette commune se trouve exposée aux ravages de ce fleuve, qui menace de se frayer un nouveau lit. Il demande que des fonds soient alloués au budget des travaux publics, pour exécuter les ouvrages indispensables à la défenses des rives de la Meuse. »
« Même pétition du conseil communal de Mechelen (Limbourg). »
M. de Renesse – Par pétition datée du 5 janvier, le conseil communal de Stockheim, province de Limbourg, s’adresse à la chambre pour qu’elle accorde des fonds au budget des travaux publics, pour les réparations urgentes à faire aux rives de la Meuse ; ces réparations et ouvrages de défense sont d’autant plus nécessaires actuellement, où le gouvernement hollandais, depuis la cession de la rive droite de la Meuse, a déjà disposé de sommes considérables pour l’entretien et les réparations des rives de ce fleuve ; il en résulte que le courant de la Meuse se reporte vers la partie belge, et que notamment une grande partie du territoire de cette commune se trouve fortement exposée ; que même ce fleuve menace de se frayer un nouveau lit et de ravager les plus belles campagnes. Déjà, par un fatal événement, cette commune a été, il y a deux ans, presqu’entièrement détruite par un incendie ; si maintenant, le gouvernement ne prend pas les dispositions nécessaires pour empêcher les envahissements de la Meuse, il est à craindre que cette commune, déjà si malheureuse, n’ait aussi à éprouver de grands désastres par les eaux.
Connaissant même la situation des localités citées par ce conseil communal, qui sont menacées par la Meuse, je puis assurer que réellement il y a urgence de faire des ouvrages de défense aux rives de ce fleuve sur le territoire de cette commune, et comme M. le ministre des travaux publics a demandé des fonds pour les réparations à faire à la Meuse dans la province de Limbourg, j’ai l’honneur de proposer à la chambre de vouloir ordonner le renvoi de cette pétition à la section centrale chargée de l’examen de ce budget, et le dépôt sur le bureau de la chambre pendant la discussion du budget des travaux publics.
Une pareille pétition vient aussi d’être adressée à la chambre par le conseil communal de Mechelen, province de Limbourg, je demanderai le même renvoi, et le même dépôt sur le bureau.
- Cette proposition est adoptée.
« Messages du sénat faisant connaître l’adoption des projets de lui suivants :
« Projet de loi allouant un crédit provisoire au département de la guerre pour l’exercice 1841 ;
« Projet de loi fixant le contingent de l’armée pour l’année 1841 ;
« Projet de loi allouant un crédit provisoire au département de l’intérieur, pour l’exercice 1841 ;
« Projet de loi allouant un crédit provisoire au département des finances, pour l’exercice 1841 ;
« Projet de loi allouant un crédit provisoire au département des travaux publics pour l’exercice 1841 ;
« Projet de loi autorisant un transfert au budget du département des travaux publics de l’exercice 1841 ;
« Projet de loi prorogeant la loi sur les concessions de péages ;
« Projet de loi contenant le budget du département de la justice pour l’exercice 1841 ;
« Projet de loi contenant le budget des voies et moyens pour l’année 1841 ;
« Projet de loi relatif au duel. »
- Pris pour notification.
M. David annonce par lettre que la mort d’un membre de sa famille l’empêchera d’assister aux séances de la chambre avant le 16 de ce mois.
- Pris pour notification.
M. Scheyven demande un congé de quelques jours pour cause d’indisposition.
- Accordé.
M. d’Huart, M. Angillis, M. Lejeune et M. Duvivier annoncent par lettres qu’une indispositions les empêchera d’assister aux premières réunions de la chambre.
- Pris pour notification.
M. de Terbecq demande un congé de quelques jours pour assister aux funérailles de l’une de ses tantes qu’il vient de perdre et pour terminer des affaires de famille.
- Accordé.
M. Zoude – Je viens présenter à la chambre les prompts rapports qu’elle a demandés à la commission des pétitions.
Le pétitionnaire expose à la chambre que sans aucun arrangement préalable, le gouvernement s’est emparé d’une partie de sa propriété pour y construire la digue du polder de Lillo ; qu’à la vérité une indemnité lui avait été promise mais qu’il désespère de l’obtenir sans l’intervention de la chambre, à moins de recourir à la voie des tribunaux.
La constitution dit-il, et les lois sur les expropriations garantissent son droit à l’indemnité.
Mais le pétitionnaire paraît ignorer que la loi du 6 octobre 1831, qui a ouvert un crédit au gouvernement pour les polders, avait stipulé que les avances qu’elle autorisait seraient remboursées par les propriétaires intéressés, chacun dans la proportion des avantages qu’il retirerait des terrains soustraits à l’inondation.
Ce principe a été reconnu par un arrêt de la cour de Bruxelles en date du 20 juillet 1838.
Dans cet état de choses, votre commission estime qu’il y aurait lieu à passer à l’ordre du jour sur la demande du pétitionnaire, attend qu’elle est de la compétence des tribunaux, puisqu’il s’agit (manque une dizaine de mots) remboursement ; mais appréciant la bonne foi du pétitionnaire, qui a cru que le refus qu’il éprouvait de la part du gouvernement était une violation de la constitution dont la garde est particulièrement confiée aux chambres, elle a l’honneur de vous en proposer le dépôt au bureau des renseignements.
- Cette proposition est adoptée.
Le pétitionnaire exprime le regret que, lors du traité des 24 articles, on n’ait pas stipulé pour condition préliminaire une convention commerciale avec les pays que ce traité nous enlevait et notamment avec le duché de Luxembourg qui, entièrement séparé de sa nouvelle mère patrie, ne peut guère entretenir des relations commerciales avec elle, surtout en ce qui concernes les denrées coloniales.
Que l’intérêt de nos anciens frères ainsi que le nôtre réclament impérieusement la conclusion d’un traité de ce genre, dont la négociation doit être devenue beaucoup plus facile depuis l’avènement d’un nouveau souverain au trône de Hollande, circonstance qui le décide à recommander cet objet à toute la sollicitude de la chambre.
Votre commission, partageant le vœu émis par le pétitionnaire, à l’honorable de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.
- Cette proposition est adoptée.
M. de Garcia (pour une motion d'ordre – Si je suis bien informé, on célèbre demain à 11 heures, le service funèbre de l’honorable M. Seron. J’aurai l’honneur de proposer à la chambre d’inviter la députation qui a assisté à ses obsèques à se rendre demain au service funèbre, qui sera célébré à Ste-Gudule. Les souvenirs que cet honorable collègue a laissés parmi nous font un devoir de rendre tous les honneurs à un citoyen aussi distingué que l’était l’honorable M. Seron.
- Cette proposition est adoptée.
M. le président – Les objets portés à l’ordre du jour pouvant être épuisés dans cette séance, je proposerai à la chambre de fixer son ordre du jour de demain.
Nous avons le budget de l’intérieur, la loi sur les pensions, la loi sur les successions et la loi sur l’aliénation des établissements d’Uccle et de Meslin.
Je proposerai de mettre ces projets à l’ordre du jour de demain.
M. de Brouckere – On pourrait se contenter de mettre à l’ordre du jour le budget de l’intérieur ; on déciderait ensuite sur les autres projets.
M. de Garcia – Nous avons un projet de loi relatif à l’aliénation de l'établissement de Meslin-Lévêque. Cette loi a trait directement au budget de l’intérieur. Il me semble donc que pour bien agir rationnellement, pour nous former une idée bien exacte de ce que nous avons à voter au budget de l'intérieur, il faudrait d’abord examiner cette loi. L’établissement qu’elle concerne est l’objet d’un chapitre de dépense du budget de l’intérieur. Si nous admettions l’aliénation, la dépense disparaîtrait. Il est donc rationnel, je le répète, de nous occuper de ce projet avant de discuter le budget de l’intérieur. Je propose, en conséquence, de le mettre en première ligne à l’ordre du jour de demain.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Je ne fais pas d’objection à cette proposition.
- La proposition de M. de Garcia est adoptée.
M. Donny – Messieurs, il s’agit ici de parvenir à l’abolition d’un péage élevé qui pèse principalement, je pourrais dire presque exclusivement sur la classe agricole et sur la classe ouvrière. Le but qu’on se propose rencontrera donc bien certainement des sympathies dans cette assemblée.
La suppression de ce péage doit, d’après le projet de loi, se faire aux dépens de la province de la Flandre occidentale. Seulement le trésor est appelé à contribuer à cette suppression pour une part comparativement minime et tellement minime qu’elle mérite à peine d’être portée en ligne de compte.
Pour vous prouver que tel est en effet le véritable effet des choses, il me suffira de mettre en présence d’un côté le sacrifice que le projet de loi impose à la Flandre occidentale et de l'autre celui qu’il demande au trésor.
D’après le projet, la province, tout en s’abstenant de percevoir aucun péage, reste chargée à perpétuité de l’entretien et de la réparation du pont. Un pont tournant en bois à grande dimension, comme celui de Stalhille doit, d’après le dire des ingénieurs, se renouveler dans l’espace de 25 ans. C’est-à-dire que les frais d’entretien et de réparation que nécessité un pont semblable, dans une période de 25 ans, forment un total équivalent au coût primitif de construction du pont. Maintenant, si l’on veut calculer ce que l’entretien et la réparation doivent coûter par année, il ne faut pas, comme on l’a fait dans l’exposé des motifs prendre la moyenne de 15, 16 et même 18 années qui suivent la construction, ce serait une moyenne trop faible, mais il faut prendre la 25e partie du coût primitif, et comme le pont de Stalhille a coûté 50,000 francs, la moyenne des frais annuels doit être évaluée à 2,000 francs, le 25e de 50,000 francs. La province restant chargée de l’entretien, c’est un sacrifice de 2,000 francs par an qu’elle s’impose en faisant l’acquisition du pont. Mais là ne se borne pas le sacrifice ; car d’après le projet qui sera, j’espère, converti en loi, la province doit encore payer à l’Etat une somme de 15,000 francs, ce qui représente une rente perpétuelle de 800 francs. Voilà donc 2,800 francs que la province prend à sa charge à perpétuité et sans compensation aucune.
Voyons maintenant le sacrifice que le trésor est appelé à faire. Dans l’état actuel des choses, le trésor reçoit par an trois mille francs. Mais ce n’est pas là une recette nette ; il faut prendre là-dessus la somme nécessaire pour les réparations et l’entretien.
Nous venons de voir que cette charge s’élève à deux mille francs par an. Le trésor ne reçoit donc net que mille francs par an dans l’état actuel des choses.
D’après le projet, cet avantage ne sera plus perçu ; mais par contre la province versera au trésor 16 mille francs qui représentent 800 francs par an. Le gouvernement ne fera donc qu’un sacrifice de 200 francs par an au plus, car pour qu’il pût s’élever à cette somme, il faudrait qu’on pût supposer que jamais le gouvernement n’aurait rien à payer pour voyages d’ingénieurs et d’agents des ponts et chaussées chargés de la direction des travaux de réparation, et que jamais le pont ne sera atteint par un de ces accidents imprévus, qui viennent de temps à autre déranger tous les calculs.
D’après ces considérations, je voterai pour le projet qui vous est soumis.
M. Simons – Je regrette de ne pouvoir donner un vote approbatif au projet en discussion. Autant qu’aucun membre de la chambre, je désirerai qu’on pût supprimer toutes les impositions exceptionnelles, de la nature de celle dont il s’agit, qui sont excessivement gênantes pour le commerce et l’industrie, et vexatoires sous tous les rapports. Mais ce n’est pas là le point qu’il s’agit d’examiner. Il s’agit de savoir si, dans la position où nous nous trouvons, nous pouvons diminuer les ressources du trésor ; car il s’agit de renoncer à un péage qui se perçoit au profit du trésor, et qui année commune est évalué à plus de 3 mille francs ; c’est là la question que la minorité de la commission s’est posée ; et elle n’a pas hésité à prendre sur cette question, une résolution négative.
Et en effet, sommes-nous dans une position à renoncer à des ressources, tandis que nous nous trouvons en présence d’un déficit assez considérable que nous a légué le passé, et que la législature ainsi que le gouvernement ne savent de quelle manière aviser à établir l’équilibre entre nos ressources et nos dépenses ? Certes, il ne peut entrer dans les intentions de la chambre d’approuver un projet de loi qui doit avoir pour conséquence la diminution de nos ressources.
Encore, s’il ne s’agissait que de l’objet en question, quoique je n’admette pas avec l’honorable préopinant qu’il ne s’agisse que d’une légère somme de 2,000 francs (il s’agit d’une somme beaucoup plus considérable) ! Mais nous ne pouvons poser un précédent qui peut avoir des conséquences extrêmement nuisibles au trésor. Car la chambre se rappellera que ce n’est pas le seul péage qui soit perçu au profit du trésor. Nous voyons figurer au budget des voies et moyens une somme de 60,000 francs ; et nous voyons dans le tableau joint au budget que cet article a produit en douze mois une somme de 80,000 francs. Si vous adoptez le projet de loi, d’autres réclamations vont surgir et à moins de vous montrer injustes, à moins d’avoir deux poids et deux mesures, vous ne pourrez vous refuser à les accueillir.
On dit que c’est l’intérêt général qui est en cause ici ; mais pas du tout, c’est intérêt de la localité. C’est à tel point qu’à l’endroit où se trouve le pont, il n’y avait ci-devant qu’un passage d’eau par barquettes. C’est sur les réclamations de la localité qui seule y était intéressée qu’un pont a été construit.
Ces deux considérations, 1° que nous ne sommes réellement pas dans une position à pouvoir faire des sacrifices quelque minimes qu’ils soient ; 2° que nous ne pouvons poser un précédent qui aurait des résultats très nuisibles pour le trésor, détermineront sans doute la chambre à ne pas adopter le projet de loi.
Mais il y a d’autres considérations à faire valoir. Ainsi que j’ai eu l’honneur de le dire, il n’y avait autrefois sur l’emplacement du pont de Stalhille qu’un simple passage d’eau, comme il y en a beaucoup dans les provinces d’Anvers, de la Flandre orientale et de Liége, qui produisent en total une somme de 80,000 francs. Dans l’intérêt et sur les réclamations de la localité, un pont a été décrété en 1822. Ce n’est qu’en 1824 que la construction étant terminée, le passage sur le pont a remplacé le passage par barquettes.
Les dépenses de construction s’élèvent à 51,000 francs. De quelle manière a-t-on pu parvenir à ce résultat que le gouvernement, au moyen de 16,000 francs, rentrerait dans tous les fonds qu’il a dépensés pour ces travaux ? Aux dépenses de construction, 50,000 francs, on ajoute les frais de réparation, 15,000 francs : total : 65,000 francs. D’où on déduit pour produit des péages perçus 49,000 francs. Différence : 16,000 francs.
Vous sentez qu’un tel calcul n’est pas admissible. Le gouvernement a donné 51,000 francs. En ne comptant l’intérêt de ce capital qu’à 4 p.c., on trouve qu’il avait à recouvrer annuellement de ce chef une somme de 2,000 francs. Le produit annuel n’a été que de 2,900 francs. De manière qu’il ne restait réellement que 900 francs à dépenser en réparations. Il résulte de ce calcul que le gouvernement n’a rien recouvré des 51,000 francs qu’il a dépensés pour la construction d’un pont, dans l’intérêt d’une localité.
Si les calculs que l’on a faits étaient admissibles, il en résulterait que nous devrions supprimer toutes les barrières ; car, à calculer comme on l’a fait, il est évident que tous les capitaux engagés pour la construction de routes sont depuis longtemps remboursés, en comptant les droits de barrière qui ont été perçu.
Je crois que ces considérations suffiront pour démontrer qu’il serait extrêmement dangereux de poser le principe résultant du projet de loi. Car, il n’y a pas de doute que d’ici à quelque temps, nous serions accablés de réclamations faites par les provinces qui ont des intérêts analogues ; et il est incontestable que nous serions forcés, pour ne pas être injustes, de faire droit à ces réclamations.
Ces considérations suffiront aussi, je pense, pour que la chambre comprenne qu’elle a le plus grand intérêt à ce que le trésor ne renonce à aucune de ses ressources, et par conséquent pour qu’elle n’adopte pas le projet de loi.
Personne plus que moi, je le répète, ne désire que nous puissions supprimer tous ces péages extrêmement vexatoires. Je conviens que les voies de navigation artificielles sont établies, non dans l’intérêt des localités qu’elles traversent, mais pour augmenter les communications. Ainsi le canal de Bruges à Ostende a été construit non dans l’intérêt de Stalhille, mais dans l’intérêt de Bruges et d’Ostende. Sous ce rapport, je conviens qu’il est dur pour les habitants de cette localité de payer un droit de péage sur ce pont. Aussi, s’il ne s’agissait que de cette localité, je ne ferais pas de difficulté. Mais remarquez que vous avez au budget des voies et moyens un article de 80,000 francs, pour produits des péages, que vous verrez disparaître si vous posez un antécédent que ne manqueront pas d’invoquer toutes les localités qui sont dans le même cas.
M. Rodenbach – Je trouve que les calculs des développements du projet de loi sont très exacts. Je ne partage pas l’opinion de l’honorable préopinant. Les calculs sont très simples. Le pont produit annuellement 3,000 francs ; les réparations qu’on y fait coûtent annuellement 1,200 francs. Donc le pont ne produit que 1,800 francs. Tout cela me paraît très clair, très net. Lorsqu’on donne 16,000 francs pour la cession du pont de Stalhille, il me semble que le sacrifice que fait le gouvernement est très minime ; cependant d’après l’honorable orateur, il semblerait qu’il s’agit de sacrifices immenses, de sommes exorbitantes. Il a parlé d’intérêts de localité ; mais, pour les routes pavées, les trois quarts, outre un intérêt général, ont un intérêt de localité. Ainsi, je ne crois pas que cela doive arrêter la chambre. Il s’agit d’un intérêt général ; il s’agit des intérêts du commerce et de l’agriculture. Les cultivateurs, pour porter des engrais sur leurs terres, doivent payer des droits de péages. Est-ce là protéger l’agriculture ? Le commerce souffre également de ces droits de péages.
Remarquez que voilà 16 ans que le pont est construit. D’après l’avis des ingénieurs, un pont ne dure que 25 ans. Ainsi bientôt il faudrait dépenser en réparations non plus 1,200 francs mais de 1,500 à 2,000 francs. Je dis donc que l’affaire n’est pas onéreuse pour le gouvernement. Je dirai de plus qu’elle est dans l’intérêt général ; car l’intérêt de l’agriculture est qu’on n’empêche pas par des droits énormes les cultivateurs de porter des engrais sur les terres.
M. de Muelenaere – Je ne reviendrai pas sur les calculs présentés par l’honorable membre, qui a parlé le premier dans cette discussion. Mais il importe de ne pas se tromper sur la portée du projet de loi. Il ne s’agit pas de substituer la province au trésor, dans les avantages que lui offrait la perception des péages sur le pont de Stalhille. Le but du gouvernement et de la province même, c’est de pouvoir, avec l’assistance de la province et sans léser les intérêts du trésor, supprimer un péage si onéreux que percevait autrefois le syndicat d’amortissement et que perçoit aujourd’hui le gouvernement sur le pont de Stalhille.
Ce pont, décrété en 1822, a été livré à la circulation en 1824. Le syndicat d’amortissement, qui avait fait les frais de la construction de ce pont, a été autorisé, par l’ancien gouvernement, à percevoir des droits fort onéreux. La province, dans le seul but de supprimer ce péage, de concert avec le gouvernement, propose de verser 16,000 francs dans les caisses du gouvernement. C’est le résultat d’une convention conclue entre la province et l’Etat. Il résulte en outre de cette convention que, moyennant ces 16,000 francs, que la province verserait dans le trésor, le gouvernement serait remboursé de toutes les dépenses de construction du pont et de toutes les dépenses d’entretien, non compris les intérêts du capital employé. Voilà la seule différence : « Non compris les intérêts du capital employé. » Or, je vous le demande, serait-il juste, serait-il équitable d’exiger l’intérêt d’un capital employé à l’exécution de travaux d’utilité publique, lorsque la province qui fait l’acquisition du pont ne la fait que pour supprimer les péages, par conséquent dans l’intérêt général, dans un intérêt qui profite aux habitants des autres localités ?
Au surplus, il est une remarque qui a échappé à l’honorable préopinant. S’il fallait rembourser les intérêts du capital employé, il faudrait rembourser au gouvernement la somme qu’a coûtée la construction du pont : c’est à quoi s’élèverait à peu près le montant des intérêts ; mais je vous le ferai remarquer, et tout le monde paraît d’accord à ce sujet, un pont tournant en bois, à grandes dimensions, ne peut durer que vingt-cinq à trente ans. Or, le pont de Stalhille est livré à la circulation depuis 1824. En sorte donc qu’il ne vaut plus que le tiers ou la moitié de ce qu’il valait en 1824, par suite des dégâts qu’il a subis. Ainsi, si on remboursait la somme intégrale, ou avec les intérêts, ce qui revient au même, il faudrait que le gouvernement livrât non pas un pont détérioré mais un pont neuf, tel qu’il était en 1821, époque où a commencé la circulation.
Je suis parfaitement d’accord avec l’honorable orateur, le trésor paraît lésé parce qu’on ne tient pas compte des intérêts. Mais permettez-moi de vous présenter à cet égard quelques autres observations.
Je le déclare, dans les circonstances actuelles, la province a tort peut-être de céder à la juste impatience de cette partie de sa population qui habite la rive droite du canal d’Ostende. En ce moment une proposition est soumise au gouvernement ; elle a pour but la construction d’une route. La construction de cette route présente des avantages tellement évidents dans l’intérêt du gouvernement lui-même, qu’il n’y a pas de doute qu’il n’accepte la proposition de la province, des wateringues et des communes intéressées à cette construction.
Eh bien ! faites bien attention à ceci. La première section de cette route, soumise en ce moment à l’approbation du gouvernement, relie entre elles la route de première classe n°10 de Bruges à Ostende, et la route de seconde classe de Ghistelles à Bruges. Un droit de péage doit être établi sur cette nouvelle route. Or, le pont de Stalhille, dont on propose la cession, tombe dans le tracé de cette première section.
Evidemment, messieurs, si, ce dont je ne doute pas, le gouvernement adopte la proposition qui lui est faite, si la route nouvelle est décrétée, évidemment, dans l’intérêt de ses routes, de Bruges à Ostende, et de Ghistelles à Bruges, qui doivent être reliées par la route projetée, le gouvernement lui-même devra supprimer le péage exorbitant qui se perçoit sur le pont de Stalhille, et cela dans l’intérêt des barrières à établir sur la nouvelle route projetée, et de celle déjà établie sur une route de première classe et sur une route de seconde classe, appartenant toutes deux à l’Etat.
Vous voyez donc que, si la province avait montré moins d’empressement, elle serait arrivée à la suppression du péage par la seule force des choses.
On vous a dit qu’autrefois il n’y avait qu’un bac, un ponton, un passage d’eau, que c’était à la sollicitation des habitants que ce bac avait été remplacé par un moyen plus facile de communication, par un pont, et que, par conséquent il était juste que les habitants payassent une indemnité.
Il est vrai qu’en 1822 il n’existait qu’un bac, un ponton, mais il n’est pas exact de dire qu’il n’y a jamais eu de pont. Au contraire, il y a eu un pont antérieurement. Ce pont a été supprimé par suite d’événements désastreux, pendant la guerre, pendant la révolution, il a été détruit, et depuis, il n’y a eu qu’un bac, qu’un passage d’eau.
Mais veuillez me prêter un instant d’attention et vous verrez combien la proposition de la province est vraiment généreuse, combien elle s’est montrée impatiente de venir au secours d’une partie de ses habitants ; vous verrez, par les calculs que je vais vous présenter, que le pont a été payé et qu’elle veut le payer une seconde fois.
Vous savez qu’aux termes de l’article 68 de la loi du 24 avril 1806, les provinces, dans un but d’utilité publique, peuvent s’imposer des centimes facultatifs, avec l’autorisation du gouvernement.
Eh bien, en 1807, la province s’est imposée dans ces centimes facultatifs, pour la reconstruction du pont de Stalhille, avec destination expresse et spéciale, une somme de 6,400 francs ; dans le budget de 1809, une somme de 18,000 francs ; dans le budget de 1810 une somme de 8,000 francs, et dans le budget de 1811, une somme de 2,600 francs, faisant ensemble 35,000 francs.
Voilà, messieurs, les sacrifices que la province, autorisée par le gouvernement, s’était imposés jusqu’en 1811, par des centimes facultatifs, pour la reconstruction du pont de Stalhille. Eh bien, après cela, je trouve dans les pièces authentiques de la comptabilité provinciale que la balance de compte des centimes facultatifs pour l’exercice 1812 offrait un excédant de 71,584 francs et sur cet excédant il est imposé 1°, 2°… et enfin 9° une somme de 8,000 francs pour compléter la dépense résultant de la reconstruction du pont, suivant la demande faite dans l’état de situation financière, adressée à son excellence M. le ministre de l'intérieur.
Il y avait donc avant 1812 une somme de 35,000 francs qui, avec celle de 8,000 francs votée dans cet exercice, présente un montant de 43,000 francs, qui se trouvaient dans la caisse générale du trésor à la fin de 1813, au moment de la restauration.
Cette somme a dont été emportée et par conséquent, elle doit avoir figuré dans la convention conclue le 25 avril 1818 avec le royaume des Pays-Bas. Le royaume des Pays-Bas doit avoir reçu de ce chef une indemnité, puisque ces 43,000 francs ont dû figurer dans les sommes appartenant aux provinces et emportées par les autorités françaises.
Vous voyez que la province avait déjà payé en 1814 la somme nécessaire pour la reconstruction du pont de Stalhille, et que si cette reconstruction n’a pas eu lieu aux frais de la province, c’est par l’effet des changements survenus dans les relations politique du pays.
Il me semble, messieurs, que d’après toutes ces considérations il est juste et équitable d’adopter le projet actuellement en discussion.
La province, comme province, n’a certainement aucun intérêt dans ce projet, puisque d’un côté elle sera grevée d’une somme de 16,000 francs qu’elle offre de verser immédiatement dans le trésor, et que d’un autre coté (le projet est formel à cet égard), le péage sera aussitôt supprimé, et qu’enfin la province se chargera à perpétuité et sans compensation de l’entretien de ce pont.
Ce pont figure, dans la note remise par M. le ministre des finances, pour une somme moyenne de 8,900 francs. Mais il y a une erreur que M. le ministre a rectifiée lui-même en partie ; c’est qu’en 1824 et 1825, premières années où la circulation a été établie sur ce pont, il n’y a point eu de frais d’entretien. Ils n’ont commencé qu’en 1826 ; si je ne me trompe, ils ont été de 1,034 francs. Mais la moyenne des frais d’entretien est bien plus considérable. En effet, depuis 1829 jusqu’au 1er janvier 1832 le pont a été loué avec charge d’entretien par le locataire, j’ai les pièces authentiques à la main. Voilà encore trois années à déduire ; ce qui augmente considérablement la moyenne annuelle. Aussi, à partir de 1833, les frais d’entretien se sont montés à environ 1,236 francs par an.
Eh bien, plus le pont devient vieux, comme vous l’a fort bien fait observer M. le ministre des finances, plus la dépense est considérable, et je suis convaincu que d’ici à deux ou trois ans elle sera de 2,000 francs. Dans dix ou douze ans, le pont devra d’ailleurs être reconstruit, puisque ces sortes de construction ne peuvent durer que 25 à 30 ans.
Vous voyez que la province assume réellement des dépenses considérables ; d’une part une somme de 16,000 francs qu’elle paie au trésor, et d’autre part les frais d’entretien qu’elle prend à sa charge. Et cela pourquoi ? dans un but d’intérêt général, je le répète ; pour supprimer le péage exorbitant qui se perçoit sur ce pont.
Voilà le seul avantage qu’elle retirera de l’adoption du projet. On dira qu’il s’agit de l’intérêt d’une fraction de population ; mais il en est toujours ainsi quand il s’agit d’un pont ou d’une route. Il me semble que quand une province fait de tels sacrifices, il y a lieu d’accueillir sa proposition.
M. Lys – Je faisais aussi partie de la minorité de la commission qui a déclaré ne pouvoir accueillir le projet de loi.
Quoiqu’on en dise, messieurs, ce pont n’a été construit que dans un intérêt particulier.
C’est dès lors une avance que le gouvernement a faite en faisant construire ce pont, et un péage a été établi.
N’est-ce pas la localité qui a offert le péage qu’on trouve aujourd’hui exorbitant, afin d’engager le gouvernement à faire construire ce pont ?
Je partage, messieurs, le raisonnement qu’a fait valoir l’honorable M. Simons ; nous posons un précédent, que d’autres localités feront valoir, et ce précédent est posé, dans un moment où vous ne savez comment faire face à vos dépenses.
Je ne suivrai pas l’honorable préopinant dans les calculs qu’il a fait pour les avances faites anciennement par la province de la Flandre occidentale ; chaque province pourrait faire valoir pareil antécédent. Ne voyons-nous pas des provinces privées du produit des routes qu’elles ont fait construire, dont le gouvernement perçoit les revenus, tandis que ces provinces restent grevées des capitaux qui ont servi à leur construction ?
M. Desmet – Messieurs, je voterai le projet de loi en faveur du commerce et de l’agriculture. Je sais bien que l’Etat fera quelques sacrifices ; mais le sacrifice qui est demandé à l’Etat est excessivement minime ; toute la province de la Flandre occidentale demande que l’on fasse cesser la perception du péage qui est établi sur le pont de Stalhille, et elle offre de faire une dépense de 16,000 francs pour obtenir la suppression de ce péage. Cela prouve clairement que cette province envisage cette suppression comme étant d’un intérêt général, sinon pour tout le pays, au moins pour la province, et quand une province entière a un intérêt, je crois bien pouvoir dire que l’intérêt général y est pour quelque chose, et surtout quand c’est dans un intérêt commercial, et vous savez, messieurs, que sous le rapport du commerce, la Flandre occidentale est une province extrêmement importante, une des provinces les plus importantes du pays. On peut donc dire, messieurs, qu’il s’agit réellement ici d’un objet d’intérêt général, et dans un moment où l’industrie et le commerce sont dans une situation si fâcheuse, je crois que l’on eut bien faite en leur faveur le léger sacrifice dont il s’agit. Je ne vois donc pas dans cette circonstance la perte de 200 à 300 francs que l’Etat pourrait faire ; mais je vous ici les intérêts spéciaux du commerce, de l’industrie et de l’agriculture ; et, messieurs, je dois encore vous le répéter, il est temps de ne plus négliger ces intérêts, il faut saisir toutes les occasions, aussi peu importantes qu’elles puissent être, pour venir à leur secours et tâcher pour tous les moyens possibles de les relever et de nous ôter autant que possible de l’état terrible de misère où la pauvre Belgique se trouve.
Remarquez d’ailleurs, messieurs, que le pont dont on demande que le gouvernement fasse la cession, est un pont en bois qui exige tous les ans des réparations, et tous les 5 ou 6 ans des restaurations tellement importantes, qu’elles enlèvent souvent la totalité des revenus.
J’ajouterai, messieurs, que le pont de Stalhille se trouve dans une position tout à fait spéciale et que par conséquent nous ne devons pas craindre de poser un précédent ; si un cas analogue se présentait plus tard, on pourrait prendre une mesure semblable à celle qu’on demande aujourd’hui : que d’autres provinces trouvent nécessaires comme celle de la Flandre occidentale, qu’un péage soit supprimé, et qu’elle le fasse dans l’intérêt du commerce et de l’agriculture, je le voterai encore ! Je sais bien qu’il faut être aussi sobre que possible dans la diminution de nos revenus, surtout à une époque où nous sommes en présence d’un si lourd déficit et où nous avons une si forte dette publique ; mais aussi, messieurs, quand vous songez à la situation effrayante du commerce et de l’industrie en Belgique, nous devons certainement faire quelque chose d’avantageux pour ces intérêts et le sacrifice bien minime que l’Etat va fait peut très bien se faire.
M. Pirmez – Je dois, messieurs, combattre le projet de loi, non pas tant à cause de la perte que pourra faire le trésor par suite de la cession de ce pont, qu’à cause du principe que vous poseriez en adoptant le projet dont il s’agit. Il existe dans le pays une infinité de ponts de la catégorie de celui qui nous occupe ; si vous autorisez la cession de celui-ci, toutes les raisons qui viennent d’être alléguées en faveur d’une semblable mesure pourront être également invoquées lorsqu’on viendrait vous demander la même autorisation pour d’autres ponts ; si ces raisons doivent être admises, il faudrait supprimer tous les péages.
On dit qu’il va être construit une route et qu’il importe de supprimer le péage dont il s’agit, dans l’intérêt des barrières qui seront établies sur cette route ; eh bien, attendons la construction de la route, et nous verrons alors si réellement l’intérêt du produit des barrières exige la suppression du péage qui se perçoit sur le pont de Stalhille ; mais, je le répète, de tous les péages dont le gouvernement perçoit sur des ponts quelconques, il n’en est pas un dont on ne puisse demander la suppression, par les motifs que l’on a fait valoir pour obtenir la suppression de celui dont il s’agit en ce moment. Si vous adoptez le projet de loi, vous allez mettre à la charge du trésor de l’Etat (ce qui est extrêmement facile dans notre gouvernement) une foule de frais qui sont maintenant à la charge des particuliers.
(Moniteur belge n°15 du 15 janvier 1841) M. Jadot – Messieurs, malgré les observations faites en faveur du projet, je ne puis partager la manière de voir du gouvernement sur la cession proposée.
Dans l’exposé des motifs, M. le ministre des finances nous dit : « qu’il s’agit moins de substituer la province de la Flandre occidentale au gouvernement dans la propriété de ce pont, que de parvenir à l’abolition du péage qui s’y perçoit, et que cette mesure étant utile à l’intérêt général, il est juste que l’Etat concoure au sacrifice qui doit en amener la réalisation. »
Je dis, moi, qu’il ne s’agit de rien d’autre que de priver l’Etat d’un revenu pour en doter la Flandre occidentale.
Que la mesure n’a pour objet qu’un intérêt local et provincial, puisque le droit supprimé ne profitera qu’aux populations voisines du canal qui seules réclament.
On pourrait avec une sorte de raison prétendre qu’elle est d’un intérêt général. Si, au lieu du droit à payer pour passer sur le pont, on avait supprimé celui que payent les navires qui passent dessous, mais pas du tout, c’est celui-ci qui est reçu, afin que le commerce fournisse un pont aux communes de Stalhille et autres voisins de ce point du canal. Et je ne conçois pas comment l’honorable M. Desmet a pu trouver que le projet est favorable au commerce auquel il n’accorde rien.
Voilà pour les motifs, voyons maintenant les calculs, qui du reste ne sont pas justifiés, mais que j’admets.
Il en résulte que le pont de Stalhille donne à l’Etat, année commune, un revenu de 3,096 francs 97 centimes.
La moyenne des frais d’entretien admise pour établir celle du revenu serait de 913 francs 54, calculés sur 16 ans, et de 1,044 francs 07, calculée sur 14 ans, attendu qu’aucune réparation n’a dû être faite pendant les deux premières années.
On est arrivé à une moyenne de 1,200 francs, comme conséquence de ce que les réparations faites en 1825, 1836 et 1837 ont coûté 1,225 francs, ce qui ne laisse pas d’être assez extraordinaire ; car en partant de ce chiffre, le taux moyen des réparations ne serait que de 408 francs, ce qui laisserait à l’Etat un revenu beaucoup plus important que celui indiqué dans l’exposé des motifs, et auquel on vous propose de renoncer pour recevoir 16,000 francs seulement.
Et cependant on vous dit très sérieusement qu’en renonçant au capital que donne le revenu calculé au denier 20, pour ne recevoir que 16,000 francs, le sacrifice que fait l’Etat est encore inférieur de 21,939 francs 40 centimes à celui que fait la province.
Pour savoir si la province fait un sacrifice, il aurait fallu nous dire ce que rapporte le droit sur la navigation qui continuera à être perçu à son profit ; or, en supposant que ce droit ne soit que de la moitié du revenu total, elle aurait plus de 8 p.c. d’intérêts de son capital.
Je conseille à l’administration de la Flandre occidentale de faire souvent de pareils sacrifices.
Il est encore une remarque très importante à faire :
Le canal de Bruges à Ostende est la propriété de l’Etat qui seul a droit d’en recevoir le produit ; or, le pont dont il s’agit en est une dépendance, inséparable selon moi.
Maintenant, messieurs, voyez s’il convient aux intérêts du trésor de voter cette proposition. Quant à moi, j’ai la conviction la plus intime que je manquerais à mon devoir en m’associant à un pareil vote.
(Moniteur belge n°14 du 14 janvier 1841) M. le ministre des finances (M. Mercier) – Messieurs, lorsqu’il s’agit d’abandonner une ressource au trésor, c’est toujours avec une extrême réserve que l’on doit procéder ; aussi le gouvernement n’aurait pas proposé le projet de loi en discussion s’il n’avait été en présence d’un état de choses tout à fait exceptionnel. En effet, messieurs, le péage qui se perçoit sur le pont de Stalhille est réellement exorbitant ; il n’en existe point de semblable et l’on ne doit pas craindre qu’en votant le projet de loi, on poserait un précédent qui pût être invoqué à l’avenir au préjudice du trésor.
Le sacrifice que la cession du pont de Stalhille imposerait au trésor serait extrêmement faible ; l’honorable M. Donny a déjà donné à cet égard des explications ; je n’ai pas présents à la mémoire les chiffres qu’il a indiqués, mais j’ai fait le calcul de la charge qui résulterait pour le trésor de la cession de ce pont, elle ne s’élèvera pas à plus de 2 à 300 francs par an. En effet, le péage est, année commune, de 3,096 francs ; déjà, dès à présent, les réparations coûtent 1,225 francs par an, et elles augmenteront d’année en année ; d’après l’avis des ingénieurs, cette dépense s’élèvera bientôt à 1,800 francs ou 2,000 francs ; eh bien, si du montant du péage qui est de 3,096 francs, vous déduisez 2,000 francs, il ne restera plus que 1,096 francs. Mais l’Etat reçoit de la province de la Flandre occidentale une somme de 16,000 francs, donnant un intérêt annuel de 800 francs, cette somme encore déduite de celle de 1,096 francs, il ne reste en définitive qu’une perte de 296 francs. Voilà, messieurs, le sacrifice que fait l’Etat en vue d’un intérêt général ou du moins d’un intérêt provincial extrêmement considérable. Ce n’est là qu’un très faible subside, et je ne pense pas que la chambre hésite à donner sa sanction au projet de loi, alors qu’au moyen d’un sacrifice aussi léger on peut obtenir le résultat important que nous avons en vue en vous présentant ce projet.
M. de Theux – En principe, messieurs, je suis opposé à la suppression des péages établis pour la construction de travaux publics, parce que surtout dans l’état actuel de nos finances ce n’est qu’au moyen de péages que l’on pourra achever une foule de travaux dont le pays a encore besoin ; cependant, dans le cas actuel, je suis très disposé à voter le projet de loi parce qu’il s’agit de l’aliénation d’un pont en bois qui devra nécessairement, dans un temps plus ou moins rapproché, être reconstruit à neuf ; alors il faudra payer le capital du nouveau, tandis qu’en aliénant le pont actuel, vous vous assurez une rente de 800 francs. D’après cela, je crois qu’il est plus avantageux à l’Etat d’aliéner le pont que de le conserver ; mais en principe, je ne prétends nullement qu’il faille supprimer ou abaisser les péages existants, d’autant plus que je suis persuadé que la plupart des travaux publics ne pourront, à l’avenir, être construits qu’au moyen de péages.
Vote sur l’article unique et sur l’ensemble de la loi
Personne ne demandant plus la parole dans la discussion générale, on passe à celle de l’article unique du projet. Il est ainsi conçu :
« Le gouvernement est autorisé à céder à la province de la Flandre occidentale, la propriété incommutable du pont domanial de Stalhille, moyennant le prix de seize mille francs, sous la condition qu’elle s’obligera à l’entretenir et n’y percevoir d’autre droit que la rétribution ordinaire qui se prélève sur la navigation aux autres ponts de la province. »
Il est procédé à l’appel nominal pour le vote de cet article. En voici le résultant :
60 membres sont présents.
53 adoptent.
7 rejettent.
En conséquence, le projet de loi est adopté.
Ont voté l’adoption : MM. Brabant, Cogels, Coghen, Coppieters, de Behr, de Brouckere, Dedecker, de Florisone, de Foere, de Garcia de la Vega, Delehaye, Delfosse, de Man d’Attenrode, de Meer de Moorsel, de Mérode, de Muelenaere, de Perceval, de Potter, de Puydt, de Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Theux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Donny, Dubois, B. Dubus, Dumont, Eloy de Burdinne, Fleussu, Hye-Hoys, Kervyn, Lange, Lebeau, Leclercq, Liedts, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Milcamps, Raikem, Raymaeckers, Rodenbach, Rogier, Troye, Ullens, Van Cutsem, Vandensteen, Wallaert, Zoude et Fallon.
Ont voté le rejet : MM. Jadot, Lys, Peeters, Pirmez, Puissant, Sigart et Simons.
Les deux articles du projet sont successivement mis aux voix et adoptés.
Ils sont ainsi conçus :
« Art. 1er. La commune de Tourinnes –Beauvechain, province de Brabant, est divisée, et formera deux communes distinctes, sous les noms de Beauvechain et de Tourinnes-la-Grosse.
« Les limites de ces communes sont fixées telles qu’elles se trouvent indiquées au plan figuratif des lieux et au procès-verbal de reconnaissance desdites limites, annexés à la présente loi. »
« Art. 2. Le cens électoral et le nombre des conseillers à élire dans ces nouvelles communes seront déterminés par l’arrêté royal fixant le chiffre de leur population. »
Il est procédé au vote par appel nominal sur l’ensemble du projet de loi. En voici le résultat :
Le projet de loi est adopté à l’unanimité des 59 membres qui ont répondu à l’appel. Ce sont : MM. Brabant, Cogels, Coghen, Coppieters, de Behr, de Brouckere, Dedecker, de Florisone, de Foere, de Garcia de la Vega, Delehaye, Delfosse, de Man d’Attenrode, de Meer de Moorsel, de Mérode, de Muelenaere, de Perceval, de Potter, de Puydt, de Renesse, Desmaisières, Desmet, de Theux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dubois, B. Dubus, Dumont, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Hye-Hoys, Jadot, Kervyn, Lange, Lebeau, Leclercq, Liedts, Lys, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Milcamps, Peeters, Pirmez, Puissant, Raikem, Raymaeckers, Rodenbach, Rogier, Sigart, Simons, Troye, Ullens, Van Cutsem, Vandensteen et Wallaert.
Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe à la discussion des articles.
« Art. 1er. Des limites séparatives des communes de Wanfercée-Haulet (hainaut) et de Ligny (Namur) sont fixées telles qu’elles se trouvent indiquées au plan figuratif des lieux et dans la délimitation des conseils de ces communes, réunis en séance le 21 avril 1836 ; lesdites pièces annexées à la présente loi.
« Néanmoins, en ce qui concerne la partie des limites projetées suivant l’axe de la route de Charleroy à Sombreffe, ces limites sont modifiées et fixées le long et en dehors de ladite route, de manière que la partie de cette route comprise entre les points indiqués au plan par les lettres A et B, étant divisée sur sa longueur en deux moitiés, l’une vers A, appartienne au territoire de la province de Hainaut, et l’autre vers B, au territoire de la province de Namur. »
- Adopté.
« Art. 2. Les privilèges soumis à la formalité de l’inscription et les hypothèques existant sur les biens compris dans les parties des territoires des deux communes qui passent dans un nouvel arrondissement judiciaire, seront inscrits sans frais, à la requête des parties intéressées, au nouveau bureau de conservation des hypothèques.
« Ces inscriptions seront faites sur la production de deux bordereaux visés pour timbre. »
« Art. 3. Un délai d’un an, à partir de la promulgation de la présente loi, est accordée aux parties intéressées pour faire opérer cette inscription.
« A l’expiration de ce délai, les hypothèques qui n’auront pas été inscrites ne prendront rang qu’à dater du jour de l’inscription qui sera requise postérieurement.
« Dans le même cas, les privilèges dégénéreront en simples hypothèques et n’auront rang que du jour de leur inscription. »
M. de Behr – Messieurs, j’ai demande la parole pour vous soumettre quelques observations sur les articles 2 et 3 du projet en discussion. Ces articles, comme vous le savez, obligent les créanciers inscrits sur des biens qui passent dans un autre arrondissement à renouveler leurs inscriptions au nouveau bureau dans le délai d’une année, à peine de déchéance. En général, la loi ne dispose que pour l’avenir, elle ne doit rétroagir que dans les cas d’absolue nécessité. Or, les dispositions finales du projet de loi sont-elles commandées par cette nécessité ?
En France, on procède souvent à des changements dans les limites des communes, et jamais on n’a décrété des dispositions aussi exorbitantes que celles qui vous sont proposées par le gouvernement. Après le dernier traité de paix entre les puissances alliées et la France, quelques communes ont été détachées de ce dernier pays, et réunies à la Belgique. Le gouvernement des Pays-Bas a eu dès lors à s’occuper du sort des hypothèques sur les biens situés dans ces communes, et par un arrêté du 30 juin 1817, il a autorisé les créanciers à renouveler leurs inscriptions sans frais aux nouveaux bureaux de conservation ; mais cette mesure n’imposait aucune obligation, ne prononçait aucune déchéance ; elle n’avait été prise que comme un moyen de sécurité pour ceux qui voudraient en faire usage dans l’exercice de leurs droits. Je sais bien qu’il y avait alors un régime différent qui soumettait les inscriptions hypothécaires au renouvellement décennal et mettait par là un terme à l’inconvénient pour les tiers intéressés de s’adresser à deux bureaux différents de conservation. Mais la chambre est saisie en ce moment d’un projet de loi qui rétablit les dispositions du code civil sur le renouvellement des inscriptions, et quel que soit le résultat des délibérations de la chambre à ce sujet, il sera nécessaire d’en venir à une mesure qui fasse cesser les inscriptions sans causes, et dont l’existence met pour ainsi dire hors du commerce un nombre considérable de propriétés foncières.
Les dispositions dont j’entretiens l’assemblée en ce moment, ne préjugent pas seulement d’une manière incidente la question que soulève le projet de loi que je viens d’indiquer, mais l’obligation à laquelle elles assujettissent les créanciers pourrait leur être de nouveau imposée peu de temps après par la loi générale sur la nécessité du renouvellement des inscriptions hypothécaires. En conséquence, j’ai l’honneur de proposer à la chambre l’amendement suivant, en remplacement des articles 2 et 3 du projet de loi :
« Les parties intéressées pourront, dans le délai d’un an, à partir de la promulgation de la présente loi, requérir du nouveau bureau de la conservation des hypothèques, l’inscription sans frais des privilèges et inscriptions existant sur les biens situés dans les parties des deux communes qui passent dans un autre arrondissement judicaire.
« Les inscriptions seront faites sur la production de deux bordereaux visés pour timbre. »
- L’amendement est appuyé.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Messieurs, l’instruction de cette affaire date de fort loin ; elle a été examinée par trois ministères successifs. Déjà du temps de l’honorable M. Ernst, on s’est occupé de la question de savoir s’il valait mieux faire un article spécial de la disposition qui nous occupe, que d’en faire une loi générale.
Ce n’est donc qu’après mûr examen que le gouvernement est venu vous proposer la disposition dont il s’agit. Vous voudrez bien remarquer que c’est à tort qu’on veut ici faire croire qu’il s’agit de donner à la loi un effet rétroactif ; il ne s’agit ici nullement d’enlever un droit acquis, il est uniquement question d’imposer une formalité à ceux qui possèdent une inscription hypothécaire, formalité à laquelle on les soumet sans qu’il en résulte pour eux aucun frais, et pour l’accomplissement de laquelle une année tout entière lui est donnée.
Vous le savez, messieurs, aujourd’hui les inscriptions hypothécaires ne doivent pas être renouvelées ; soutiendra-t-on que si demain le législateur pense que les inscriptions doivent être renouvelées tous les 10 ans ; soutiendra-t-on, dis-je, que la loi dans ce cas, aurait un effet rétroactif, parce qu’elle obligerait à ce renouvellement, même ceux qui ont des inscriptions prises antérieurement ?
La loi peut donc, sans être entachée du vice de rétroactivité, imposer à ceux qui ont une inscription prise l’obligation de la renouveler dans un délai donné. Et ici, messieurs, on est d’autant plus fondé à adopter une semblable disposition que, s’il n’y a pas nécessité absolue, il y a au moins utilité publique à prendre cette mesure.
En effet, vous savez, messieurs, que, d’après les règles du code civil, une inscription hypothécaire ne doit être prise que là où le bien est situé. Or, comme, par le projet de loi, une partie d’une commune passe dans un autre arrondissement, le créancier, en levant un certificat constatant qu’il n’existe pas d’inscription prise sur le bien dans l’arrondissement dans lequel ce bien passe, croirait être à l’abri d’une inscription hypothécaire et pouvoir donner en toute sûreté des capitaux sur ce bien tandis que plus tard il apprendrait, à son grand étonnement, que le bien avait appartenu autrefois à un arrondissement différent dans lequel des inscriptions hypothécaires avaient été prises.
Vous devez reconnaître, messieurs, qu’il est utile à l’intérêt général de faire cesser cet embarras. Or, cet inconvénient disparaît si vous obligez les propriétaires d’inscriptions hypothécaires à renouveler, dans le délai d’une année et sans frais, l’inscription au bureau du ressort duquel le bien passe.
Cette disposition, d’ailleurs, n’est pas nouvelle, et c’est à tort que l’honorable préopinant veut lui donner un caractère de nouveauté, car elle a été prise textuellement par l’honorable M. Ernst dans la loi de 1822 qui était destinée à devenir le code civil du royaume des Pays-Bas, et qui sans la révolution serait aujourd’hui en vigueur.
Cette disposition se trouve encore reproduite textuellement dans la loi sur la circonscription cantonale.
Vous voyez donc que les ministres de la justice de toutes les époques, qui ont eu à examiner cette question, n’ont pas jugé que la disposition qui nous occupe eût un effet rétroactif. Je crois en avoir dit assez pour la justifier, et j’espère que l’assemblée l’adopter, puisqu’elle satisfait à tous les intérêts.
M. Lys – Je ne m’opposerai point, messieurs, à la loi proposée, parce que pour mon district, je connais par expérience les inconvénients qui résultent d’une loi qui ne serait pas obligation pour la rénovation de l’inscription.
C’est ici un précédent établi pour une parcelle de commune.
J’espère que le gouvernement prendra l’initiative pour une pareille mesure, en faveur de tout un district ; je parle du district de Verviers.
M. de Behr – Messieurs, il me semble que M. le ministre n’a pas répondu aux objections que j’ai présentée.
D’abord j’ai parlé de ce qui se pratique en France. Là, si on consulte le recueil général des lois, on trouve que dans une infinité de circonstances où il a été apporté des changements dans les limites des communes, il n’a jamais été pris de dispositions pour le transfert des inscriptions. Et pourquoi n’a-t-on pas pris une semblable disposition ? parce que l’inconvénient de s’adresser à deux bureaux pour connaître l’état des inscriptions doit nécessairement cesser après le terme de dix ans. Maintenant nous avons un projet de loi qui nous est également proposé pour renouveler les inscriptions ; ce projet fixe à une année le terme endéans lequel le renouvellement devra avoir lieu.
Eh bien, messieurs, si vous exigez dans le délai de deux ans le renouvellement général des inscriptions hypothécaires, qu’arrivera-t-il ? Que des créanciers soumis par la loi actuelle à l’obligation de renouveler leurs inscriptions dans le délai d’une année, quelques jours après, devront les renouveler encore en vertu de la loi générale qui leur en imposera l’obligation.
Voilà donc des créanciers qui seront forcés de faire deux fois la même chose. Vous voyez que le projet qui nous occupe se rattache au projet concernant le renouvellement décennal des inscriptions hypothécaires. Je crois qu’il vaut mieux pour le moment laisser une simple faculté aux créanciers hypothécaires de renouveler leurs inscriptions ; je ne vois pas de nécessité de leur en imposer l’obligation. Quand nous examinerons le projet de loi qui vous est soumis, nous verrons ce qu’il y aura à faire.
M. Dolez – Je ne puis donner mon assentiment à l’amendement de M. de Behr, parce qu’étant dépourvu de sanction, il n’atteindrait aucun résultat. Mais, d’autre part, j’entrevois dans le projet du gouvernement des dangers et même des injustices qui s’opposent à ce que je me range de cet avis. D’après le projet les parties doivent requérir une nouvelle inscription dans l’année qui suivra la promulgation de la présente loi, à péril de perdre la priorité et devoir convertir en simple hypothèque le privilège qu’elles pourraient avoir auparavant. M. le ministre a exposé les dangers qui pourraient exister pour les propriétaires de créances hypothécaires si on ne les avertissait pas de la nécessité de renouveler leurs inscriptions. Mais ces dangers, je les retrouve dans le projet que le gouvernement nous présente. Je suppose un créancier hypothécaire absent, à l’étranger, sera-t-il instruit qu’une petite commune de la Belgique vient d’être fractionnée et de changer d’arrondissement judiciaire ? Cependant le projet de loi le frappe de déchéance pour n’avoir pas pris d’inscription dans le délai d’une année.
Appartient-il au législateur d’enlever un droit acquis ? car c'est enlever un droit acquis que de changer en simple hypothèque un droit de privilège ! Non ; le législateur ne peut pas le faire sans encourir le reproche le plus grave qu’on puisse lui adresser, celui de consacrer une injustice.
Au milieu de ces inconvénients que je signale à charge du système de M. de Behr et du projet du gouvernement, je pense que peut-être on pourrait placer un terme moyen qui concilierait tout ; ce serait d’astreindre les conservateurs à faire le renouvellement des inscriptions d’office. Il me paraît tout naturel et équitable d’astreindre les conservateurs à faire ces renouvellements d’inscriptions.
C’est dans l’intérêt de la généralité qu’on fractionne les communes ; n’est-il pas naturel que les conservateurs qui sont établis dans l’intérêt des propriétaires et des créanciers hypothécaires soient astreints à faire d’office les renouvellements d’inscriptions que nécessitent les fractionnements de commune ?
J’entends dire auprès de moi qu’il y a quelque danger dans une pareille mesure remplie d’office. Je ne le pense pas ; ces inscriptions étant un droit de conservation, quel inconvénient peut-il résulter de ce que cette mesure de conservation soit prise d’office ? Si elle est prise indûment, quel sera l’inconvénient ? de devoir faire lever l’inscription, de la faire disparaître en démontrant que c’est à tort que le conservateur a affecté une inscription à tel arrondissement. De cette manière tous les droits seront conservés, si quelques inconvénients se présentent, ils n’iront pas au-delà de quelques frais judiciaires. Entre ces inconvénients et celui de compromettre les intérêts des créanciers hypothécaires inscrits, il n’y a pas à hésiter. Je n’oserais pas garantir cependant qu’il ne peut pas en résulter quelques autres inconvénients, parce que je reconnais que c’est une chose essentiellement grave, que de toucher au système hypothécaire. Peut-être ferions-nous bien d’ajourner l’adoption de l'article, afin que chacun puisse y réfléchir de son côté. Cependant, jusqu’à présent, je ne vois que l’inconvénient que j’ai signalé moi-même. Si on n’en indique pas d’autre, je penserai que le meilleur système est d’ordonner l’inscription d’office.
Je sais que déjà des dispositions ont passé inaperçues, mais ce n’est pas un motif pour en agir encore ainsi. Je me féliciterai de vous avoir présenté ces courtes observations, si elles peuvent contribuer à vous faire adopter une disposition plus prudente, plus juste et dans l’intérêt de toutes les parties.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Le premier orateur qui a pris la parole dans cette discussion ne revient plus sur la première idée qu’il a émise, que le projet du gouvernement enlevait des droits acquis, mais il nous renvoie en quelque sorte à la loi française. De ce que cela ne se trouve pas dans la loi française, ce n’est pas un motif pour ne pas le faire en Belgique. Je ne vois pas pourquoi toutes nos lois devraient être formulées sur la loi française. J’ai voté la loi faite en 1822 par les Etats-généraux où siégeaient des jurisconsultes aussi distingués que dans cette chambre.
En France, l’inconvénient que nous avons en vue n’existe pas ; parce que le renouvellement des inscriptions est décennal et qui si un inconvénient se présente, il cesse après dix ans, tandis que chez nous les inscriptions n’étant pas soumises au renouvellement, l’inconvénient subsiste toujours. Mais, dit-on, vous êtes saisis d’un projet de loi préservant le renouvellement décennal. Eh bien, en supposant que ce projet de loi soit adopté plus tard, le plus grave inconvénient qui pourra en résulter, c’est qu’après avoir renouvelé une inscription en vertu de la loi actuelle, on devra encore la renouveler en vertu de la loi générale. Quel mal trouve-t-on à cela, puisque ce renouvellement s’opère sans frais, c’est une simple formalité ?
La seule objection sérieuse qu’on ait faite était le cas où un propriétaire de créance inscrite serait absent hors d’Europe et qu’il revînt une année après, sans avoir eu connaissance de la disposition. On pourrait dire également que ceux qui sont absents n’ont pas eu le temps de renouveler leurs inscriptions aux époques où elles doivent l’être. Je reconnais cependant que la prudence pourrait exiger qu’on accordât deux ans pour renouveler leurs inscriptions, aux créanciers inscrits qui seraient absents à l’époque de la promulgation de la loi. Je ne verrais donc pas d’inconvénient à ce qu’on adoptât un amendement dans ce sens.
Quant à l’objection faite en dernier lieu par l’honorable député de Mons, je ne pourrais pas l’admettre. Il dit que c’est donner un effet rétroactif à la loi et enlever un droit acquis que de réduite un droit de privilège à une simple hypothèque pour défaut de formalité. Qu’il veuille bien se pénétrer de ceci : Faire déchoir un privilège au rang d’une simple hypothèque pour inobservation d’une formalité prescrite par la loi, n’est pas plus enlever un droit que faire déchoir une hypothèque à une simple créance chirographaire, à défaut d’avoir rempli une formalité voulue par la loi. C’est une espèce de peine que le législateur établit dans l’intérêt général, et surtout dans l’intérêt des tiers, auxquels il importe de savoir si les biens qu’on leur présente en garantie sont quittes et libres et de toutes charges.
Il y a véritablement danger à présenter un système nouveau pour remplacer celui qui a été élaboré par trois ministères qui se borne à une simple formalité sans frais, et pour l’accomplissement de laquelle on a une année entière ; d’ailleurs la prescription de cette formalité sera rendue publique par le Moniteur et portée à la connaissance du petit nombre de propriétaires que la chose peut concerner. Car, il ne s’agit pas ici de toute la commune, mais seulement de quelques bonniers.
L’amendement du député de Liége n’a aucune portée. Les mots « pourront » ne signifient rien. Tout le monde sait que l’on peut renouveler une inscription prise dans un autre bureau. Vous connaissez les inconvénients qui sont résultés de l’absence de dispositions impératives, dans le district que représente M. Lys. Les mêmes inconvénients résulteront de l’amendement de M. Dolez. Dans le décret du gouvernement provisoire, on s’était borné à faire faire une transcription en marge ; ce décret a présenté tant de difficultés qu’on a reculé devant son exécution. Le député de Verviers demande maintenant une loi générale qui régularise les hypothèques dans ce district.
Je le répète, il ne s’agit ici que d’une simple formalité facile à remplir, pour l’accomplissement de laquelle on a une année entière, qui est utile, sinon indispensable dans l’intérêt des tiers. D’après ces observations, nous pensons que la chambre se ralliera à la proposition du gouvernement.
M. Dolez – J’avais senti tout ce qu’a de grave toute innovation au système des hypothèques. C’est pour cela que je me suis abstenu de formuler en amendement les considérations que j’ai présentées. Cependant les observations que vient de présenter M. le ministre de l'intérieur, sous certains rapports, n’ont pas entièrement dissipé mes appréhensions dans l’intérêt des créanciers inscrits.
Il a dit que l’hypothèse de l’absence ne pouvait s’appliquer qu’à l’absence hors d’Europe. Je ne le pense pas ; je crois même avoir été trop loin en supposant qu’il faudrait être absent pour ignorer la disposition qui va être prise.
Je vais plus loin : je mets en fait qu’en sortant de la séance les trois quarts des membres de cette assemblée ne se rappelleront pas le nom de la commune à laquelle s’applique la loi. Je ne pense pas qu’il s’élève beaucoup de voix pour démentir cette assertion. Si cela est vrai pour nous qui faisons la loi, comment peut-on supposer que tous les habitants du pays auront connaissance de cette loi ! On pourra me répondre que les habitants de la commune à laquelle s’applique la loi auront plus d’intérêt à savoir ce qui concerne leur commune. Mais tous les créanciers hypothécaires n’habitent pas la commune où sont situés les biens qui sont la garantie de leur créance. Il y en a qui en sont fort éloignés. Comment donc assujettir ces créanciers au renouvellement de leur inscription ? On dit que cela est simple, facile et sans frais. Sans doute ; mais qu’importe, alors qu’on ignore les prescriptions de la loi ? Je répète qu’il y a le plus grand danger de consacrer une injustice dans le projet de loi.
Je ne substitue pas au projet un autre projet, parce que je n’y ai pas assez réfléchi, et que je ne trouve pas que l’on puisse improviser des dispositions dans une matière aussi difficile. Mais je regretterais que le projet de loi fût adopté tel qu’il est. Si la chambre le veut ainsi, je n’y puis rien. Mais, dans ce cas, je ne donnerais pas mon assentiment au projet de loi, parce que je suis d’avance convaincu qu’il consacrerait une injustice.
M. de Behr – La modification que j’ai proposée n’est pour aussi dire qu’une dispositions transitoire, en attendant la loi générale sur le renouvellement des inscriptions. C’est alors qu’on recherchera quel délai il convient de donner aux créanciers pour renouveler leurs inscriptions, et que l’on résoudra toutes les difficultés de la matière.
On dit que la disposition que j’ai proposée n’a pas de sanction. Mais elle aura toujours une sanction sous le rapport des frais. Le créancier diligent s’empressera de profiter de la disposition pour ne pas être soumis aux frais. Sous ce rapport, mon amendement aura toujours un résultat utile.
Tout ce qui résulterait de l’observation de M. le ministre, qu’il ne faut pas préjuger la loi générale, c’est que si ma proposition n’était pas admise, il faudrait retrancher de la loi les deux dispositions relatives au renouvellement des inscriptions.
M. Raikem – Après les observations qui viennent d’être présentées, il me restera peu de chose à dire. Mais la première question qui me semble devoir être examinée est celle de savoir s’il convient de faire une loi spéciale pour le petit espace de terrain qui, dans les limites du projet, passe d’un arrondissement dans un autre.
D’après les principes généralement enseignés, une loi est toujours envisagée comme devant soutenir une disposition générale, qui concerne tous les citoyens, qui est obligatoire pour tous.
Je conçois qu’il y aurait eu lieu de porter une loi pour une portion de territoire, qui, étant distraite d’une commune pour faire partie d’une autre, entre par là dans la circonscription d’un autre arrondissement, s’il n’y avait pas d’autres cas exactement identiques. Mais plusieurs honorables membres ont fait l’observation qu’une disposition semblable était également nécessaire pour d’autres arrondissements. On conviendra que, si d’autres arrondissements se trouvent dans la même catégorie que la portion du territoire dont il s’agit, il convient de porter une loi qui leur soit commune. On ne peut porter une loi spéciale pour un territoire particulier lorsqu’il s’agit d’une même question générale. Je crois donc qu’il n’y a pas lieu de s’occuper des articles 2 et 3 du projet de loi, et que l’on doit renvoyer ces articles à l’examen de la commission chargée de vous présenter son rapport sur le projet de loi relatif au renouvellement des inscriptions hypothécaires.
Tout ce qu’on a dit ne m’a fait voir qu’une chose, c’est qu’il est urgent de s’occuper de ce projet de loi, de voir si l’on veut ou non adopter le principe du renouvellement. Si on l’admet, peut-être ne sera-t-il pas nécessaire de donner suite aux dispositions du projet de loi dont il s’agit. Si l’on ne l’admet pas (ce que je ne veux pas préjuger, car la question demande une étude approfondie) il y aura lieu de vous présenter des dispositions propres à remédier aux inconvénients qui ont été signalés dans cette assemblée.
Ces observations me démontrent de plus en plus qu’il est préférable de statuer sur la question par une disposition générale et par suite de renvoyer les deux articles à la commission dont je viens de parler.
La question, on doit en convenir, est fort grave. On ne peut à cet égard improviser des dispositions. D’honorables préopinants vous ont même dit qu’ils ne faisaient des propositions qu’avec une certaine défiance. On conçoit toute la maturité qu’exigent des dispositions sur cette matière.
M. le ministre a traité une question en principe. Il n’y a pas, a-t-il dit, d’effet rétroactif à soumettre les hypothèques à une inscription nouvelle, pas plus qu’il n’y en a eu dans le principe à établir l’obligation de l’inscription. Il n’y a pas non plus d’effet rétroactif à faire dégénérer le privilège en simple hypothèque, puisque cela n’a pas lieu de plein droit. Les créanciers étant libres de renouveler l’inscription, s’ils ne le font pas, ce n’est pas la loi qui leur enlève un droit acquis ; c’est leur négligence qui le leur fait perdre. Je conçois cet argument.
Cependant des réponses peuvent y être faites ; déjà il en a été présenté. Une règle de législation se trouve inscrite dans l’article 2 du code civil. Cet article contient deux dispositions : l’une porte que la loi ne dispose que pour l’avenir ; l’autre que la loi ne peut avoir d’effet rétroactif. Cette seconde disposition, je conçois qu’on ne doive pas la franchir. Mais quant à la première, une loi peut aussi exercer son influence sur le passé. Cependant la règle générale doit être que la loi ne dispose que pour l’avenir.
Ici nous ferions une loi qui disposerait pour le passé, puisqu’elle obligerait le créancier hypothécaire à renouveler une inscription à un bureau où il n’est pas tenu maintenant de la prendre, et cela à peine de perdre un droit hypothécaire, qui actuellement lui est assuré.
Je n’entrerai pas davantage dans les détails de la question, parce que, dans mon opinion, il faudrait une disposition générale et qu’on ne doit pas la préjuger par une disposition spéciale comme celle dont il s’agit.
Je persiste donc dans ma proposition, de renvoyer les articles 2 et 3 du projet, à la commission chargée de l’examen du projet de loi relatif au renouvellement des inscriptions hypothécaires.
M. Lys – J’ai déjà eu l’honneur de dire que je ne partage pas l’opinion de M. de Behr. Je crois bien que quelques créanciers se prêteront à renouveler leur inscription, parce que, comme l’a dit cet honorable membre, ils n’auront pas de frais à payer. Mais comme il n’y aura aucune peine à défaut de transcription, cela n’évitera aucuns frais à ceux qui devront prendre des certificats, et qui devront pour cela s’adresser à l’ancien et au nouveau bureau. La proposition de M. de Behr n’épargnera aucuns frais aux parties. Vous dites qu’elle offre un avantage aux créanciers ; mais cet avantage n’a rien de réel, puisque ceux qui n’auront pas profité de la disposition jouiront des mêmes droits que ceux qui auront fait la transcription.
Je ne puis partager l’opinion de l'honorable M. Dolez, qui veut astreindre les conservateurs à faire ces inscriptions d’office. En effet, s’il en était ainsi, ce serait au détriment de certains créanciers, qui seraient forcés de poursuivre des radiations, lesquelles sont souvent difficiles et occasionnent de grands frais.
Encore un autre inconvénient : ces inscriptions d’office ne seront pas faites par l’ancien conservateur, mais par le nouveau. Or, comme les fera-t-il ? Il faudra qu’il les transporte dans l’ancien bureau.
Voilà une difficulté qui doit être prise en considération. Dans cet état de choses, et pour un objet aussi minime, je partage l’opinion de l’honorable M. Raikem, que, comme il y a plusieurs partages plus considérables du pays, intéressées dans cette question, il y a lieu de renvoyer la partie du projet relative aux inscriptions hypothécaires à la commission chargée de l’examen du projet sur cette matière.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Pour mettre un terme à cette discussion, et comme elle a peu de portée pour la commune à laquelle le projet est relatif ; comme elle se lie d’ailleurs à une question de principes qui est envisagée sous différents points de vue par les divers orateurs qui ont pris successivement la parole, je consens au renvoi à la commission, afin que la question de principes soit décidée, avant d’en faire l’application.
M. le président – Personne ne s’opposant au renvoi à la commission, je le déclare adopté. Voici comment cette commission est composée : MM. de Behr, Milcamps, Demonceau, Angillis, Dubus aîné, Pollénus et Berger. Un membre serait à remplacer.
M. de Behr – Je crois que M. Pollénus a déjà été remplacé par M. Verhaegen.
M. le président – C’est ce que je pourrai vérifier.
Le projet en discussion se bornera donc à l’article 1er. Il va être procédé à l’appel nominal.
Le projet est adopté à l’unanimité des 52 membres présents.
M. le président – Nous avons maintenant à l’ordre du jour un projet de loi ainsi conçu :
« Art. 1er. La commune de Bolinne, province de Namur, est divisée et formera deux communes distinctes, sous les noms de Bolinne et Harlue.
« Les limites séparatives de ces communes sont fixées telles qu’elles se trouvent indiquées au plan figuratif des lieux, par la ligne A, B, C. »
« Art. 2. Le cens électoral et le nombre des conseillers à élire dans ces nouvelles communes seront déterminés par l’arrête royal fixant le chiffre de leur population. »
Ces deux articles sont successivement adoptés sans discussion.
L’ensemble du projet est adopté à l’unanimité des 52 membres présents.
M. le président – Le dernier objet à l’ordre du jour est ainsi conçu :
« Art. 1er. Les sections d’Ucimont et de Botassart, province de Luxembourg, sont séparées de la commune de Sansanruth et érigées en commune distincte, sous le nom de commune d’Ucimont. »
« Art. 2. Le cens électoral et le nombre des conseillers à élire dans ces nouvelles communes seront déterminés par l’arrête royal fixant le chiffre de leur population. »
Ces deux articles sont aussi adoptés sans discussion.
L’ensemble est adopté à l’unanimité des 54 membres présents.
M. le président – L’ordre du jour est épuisé. La séance est remise à demain à midi pour la discussion du projet de loi relatif à la cession des établissements d’Uccle et de Meslin-l’Evêque, et du budget de l’intérieur.
Je prie les sections de se réunir. Plusieurs objets sont en souffrance. Voici les projets dont elles auront à s’occuper en premier lieu :
1° Prorogation de la loi du 7 mars 1837, relative à la libre entrée des mécaniques ;
2° Proposition de M. Vandenbossche ;
3° Interprétation du décret du 17 nivôse an XIII sur les cantonnements ;
4° Projet de loi sur les céréales ;
5° Propositions de MM. Zoude et Peeters relatives à des constructions de routes ;
6° Proposition d’une estampille comme moyen de répression de la fraude.
Les sections pourraient d’abord s’occuper du projet sur les céréales.
M. Doignon – Il n’est guère possible que les sections s’assemblent demain, puisque la séance est fixée à midi.
M. le président – Elles peuvent s’assembler de 10 heures à midi.
M. Doignon – Il faut qu’on ait le temps d’examiner le budget de l’intérieur.
M. le président – Comme il n’est pas certain que les sections pourront être convoquées pour demain, la séance reste fixée à midi.
- La séance est levée à 3 heures et quart.