(Moniteur belge n°144 du 23 mai 1840)
(Présidence de M. Fallon)
M. Mast de Vries procède à l’appel nominal à 2 heures et demie, donne lecture du procès-verbal de la précédente séance dont la rédaction est adoptée, et fait connaître l’analyse des pièces suivantes.
« Le sieur Pierre Carrière, élève de l’hospice des enfants abandonnés de la ville de Paris, habitant la Belgique depuis 1812, demande la naturalisation.
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
« Le sieur Désiré Tack, ingénieur à Gand, adresse des observations sur le projet de loi relatif à l’emprunt de 90 millions. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
Sur la proposition de M. Nothomb, la commission est invitée à faire rapport sur cette pétition avant la discussion du projet de loi concernant l’emprunt relatif au chemin de fer.
« Le sieur Conrard Raikem, praticien en droit, à Jupille (Liége) demande une place de juge de paix ou de greffier. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
Message de M. le ministre de l'intérieur, accompagnant les pièces relatives à la réélection de M. Lebeau, ministre des affaires étrangères, comme représentant du district de Bruxelles.
Il est procédé, par la voie du tirage au sort, à la composition de la commission de vérifications des pouvoirs ; cette commission se compose de MM. Pirson, de Langhe, Dumortier, Morel-Danheel, d’Hoffschmidt, Raymaeckers et de Brouckere.
M. Liedts, ministre de l’intérieur, dont les pouvoirs ont été vérifiés dans une précédente séance, prête serment comme représentant.
M. Zoude – M. Van Cockelberghe expose que par arrêté du gouvernement provisoire en date du 27 octobre 1830, il fut nommé colonel inspecteur adjoint des gardes civiques, que cet arrêté fut communiqué au commissaire général de la guerre avec invitation d’en délivrer le brevet, ce qui ne fut pas fait, sans qu’on en ait donné de motif, mais parce que, paraît-il, cette nomination dans l’esprit du ministre, n’aurait eu de rapport qu’avec le ministre de l'intérieur et nullement avec celui de la guerre.
Mais un mémoire, revêtu de la signature de trois avocats distingués du barreau de Bruxelles, et qui est annexé à la pétition, paraîtrait démontrer que cette nomination de colonel ne peut concerner que le service de l’armée, puisque l’invitation faite au commissaire général de la guerre d’en délivrer le brevet, ne mentionne que cette qualité.
Voici les expressions de cette dépêche :
« M. le commissaire général de la guerre est prié de vouloir bien délivrer le brevet de colonel à M. le chevalier an Cockelberghe, à la garde civique de la Belgique, comme inspecteur adjoint. »
Ce qui le prouverait au surplus, c’est que c’est seulement par un arrêté postérieur, celui de 2 décembre, que le mode de nomination de colonel des gardes civiques a été déterminé. Cet arrêté porte que tous les officiers de la garde civile jusques et y compris les chefs de cohorte, sont à l’élection des gardes, et que les colonels sont nommés par le gouvernement, mais parmi les capitaines et chefs de cohorte de la légion.
Or, la nomination de M. van Cockelberghe, ayant été faite antérieurement, ne devrait, ce me semble, être applicable qu’au service de l’armée.
Toutefois, messieurs, nous devons vous faire remarquer que l’intention du gouvernement provisoire aurait bien pu être de ne conférer au pétitionnaire qu’un grade dans la garde civique, puisque l’arrêté du 27 octobre invoqué, porte dans son article premier ; M. le baron Vanderlinden d’Hooghvorst, général comandant la garde urbaine de Bruxelles, est nommé inspecteur général de toutes les gardes civiques de la Belgique, et l’article 2 que le chevalier van Cockelberghe, lieutenant-colonel de la même garde est nommé colonel inspecteur-adjoint.
Si par cette nomination le pétitionnaire n’a pas été admis dans les cadres de l’armée, il ne s’est pas mis depuis en position de pouvoir lui appartenir ; en effet il déclare qu’au retour de la malheureuse campagne du mois d’août, à laquelle il avait assisté avec une brigade de garde civique, le ministre de la guerre lui offrit de l’employer dans les Flandres, mais qu’il s’y refusa ; qu’il en fit de même du grade d’aide-de-camp honoraire du Roi, et il rompit ainsi tous les liens qui auraient pu l’attacher à l’armée.
Aussi se résume-t-il dans sa pétition à demander une pension comme celle qui a été accordée aux officiers qui ont servi dans la garde civique mobilisée, mais telle n’est pas encore la position du pétitionnaire, puisque les officiers auxquels il fait allusion avaient été remis en activité dans la garde civique mobilisée, service qui lui a été offert et qu’il a refusé ; aussi le reconnaît-il en déclarant qu’il a prié le ministre de la guerre de présenter à la chambre un projet de loi qui l’autorisât à lui accorder ce qu’ont obtenu les officiers mobilisés, et n’en ayant pas eu de réponse, il s’adresse à la chambre en la priant de considérer les services qu’il a rendus comme des titres suffisants pour obtenir la pension de son grade, ou du moins qu’il lui soit rendu, à titre d’indemnité, ce qu’il a perdu par la révolution.
Que le pétitionnaire ait rendu des services signalés, on doit le reconnaître ; ils sont attestés d’abord par le général en chef et les officiers principaux de la garde civique ; ce témoignage, messieurs, je vais avoir l’honneur de vous en donner lecture.
Ces services sont encore reconnus dans une adresse de la régence au Roi.
Et enfin, messieurs, tous les membres du congrès qui siègent encore dans cette chambre reconnaîtront avec son honorable président M. de Gerlache, que c’est au dévouement et au courage de la garde civique de Bruxelles que nous avons été redevables de la liberté de nos délibérations et peut-être plus encore.
Messieurs, des services de cette nature sont trop importants pour rester sans récompense ; sans le généreux concours de la garde civique et de ses chefs, la majorité du congrès eût été violée, le pays livré aux déchirements d’une guerre civile et probablement à la restauration ; d’après ces considérations, votre commission à l’honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition au ministre de la guerre pour y avoir tel égard que de justice.
- Les conclusions de la commission sont adoptées.
M. de Brouckere, au nom de la commission des vérifications des pouvoirs, présente le rapport sur la réélection de M. Lebeau, ministre des affaires étrangères, par le district de Bruxelles. (Il a obtenu 847 suffrages sur 898 votants.) la commission propose l’admission.
Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées ; en conséquence, M. Lebeau est proclamé membre de la chambre des représentants.
M. Lebeau, ministre des affaires étrangères, prête serment comme représentant.
M. Nothomb, rapporteur – Le gouvernement a demandé l’ouverture d’un crédit supplémentaire de 5 millions pour les travaux des chemins de fer et des routes. Ce projet n’a soulevé aucune objection de la part de la section centrale, qui n’a pu y voir qu’une mesure d’urgence en même temps que de prudence.
Il est entendu, comme il est dit dans l’exposé des motifs, que des bons du trésor ne seront réellement émis qu’en cas d’insuffisance des sommes disponibles et des ressources existantes.
La section centrale, à l’unanimité propose l’adoption du projet de loi.
- La chambre met ce projet de loi à l’ordre du jour.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Comme nos séances sont assez peu remplies, je demanderai à M. le président s’il n’y aurait pas possibilité de mettre à l’ordre du jour, dans le plus bref délai possible, le projet de loi relatif à la réduction du droit d’entrée sur les houilles françaises. C’est un acte de bon voisinage que le ministère précédent a cru devoir soumettre à la chambre. Il serait à désirer que la discussion n’en fût pas remise indéfiniment.
M. le président – L’instruction de ce projet de loi a été suspendue dans la section centrale, jusqu’à ce qu’on sût si M. le ministre de l'intérieur voulait y donner suite. Ainsi l’instruction de ce projet de loi n’est pas terminée.
Les deux articles du projet de loi sont successivement mis aux voix et adoptés ; ils sont ainsi conçus :
« Art. 1er. Il est ouvert au gouvernement un crédit supplémentaire de cinq millions de francs (fr. 5,000,000), au même fins que celles indiquées à la loi du 28 décembre 1839 (Bulletin officiel, n°885) »
« Art. 2. Ce crédit sera couvert par une émission de bons du trésor à effectuer selon les conditions de la loi du 16 février 1835 (Bulletin officiel, n°157)
Il est procédé au vote par appel nominal sur l’ensemble du projet de loi.
En voici le résultat :
46 membres sont présents.
1 (M. de Mérode) s’abstient.
45 prennent part au vote et se prononcent pour l’adoption.
Ont pris part au vote : MM. Brabant, de Behr, de Brouckere, de Florisone, de Langhe, Dedecker, Delfosse, Demonceau, de Nef, de Renesse, Desmaisières, de Terbecq, Devaux, d’Hoffschmidt, Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Jadot, Lange, Lebeau, Liedts, Lys, Mast de Vries, Mercier, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirson, Polfvliet, Puissant, Raikem, Raymaeckers, Rodenbach, Rogier, Simons, Smits, Trentesaux, Ullens, Van Cutsem, Vandenbossche, Vandenhove, Verhaegen, Zoude, Fallon.
M. le président – La chambre n’est plus en nombre.
- La séance est levée à 3 heures et demie.