(Moniteur belge n°167, du 15 juin 1836)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse fait l’appel nominal à 11 heures.
M. Schaetzen lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse fait connaître à la chambre l’objet des pièces qui lui sont adressées.
« Un grand nombre de pêcheurs d’Ostende se plaignent de la malheureuse position dans laquelle ils se trouvent, et demandent que le gouvernement prenne des mesures pour protéger la pêche nationale. »
« Des cultivateurs et propriétaires de haies à écorces, dans la commune de Heiderscheid (Luxembourg), demandent que la Belgique fasse partie de l’association commerciale allemande. »
« Même demande des propriétaires et cultivateurs de la Commune de Feulen. »
« Le sieur Amand Baetzen, né à Bosemeer (Hollande), habitant la Belgique depuis 1806, demande la naturalisation. »
- Cette dernière pétition est renvoyée à M. le ministre de la justice.
Les deux pétitions relatives à l’accession de la Belgique au système douanier allemand sont renvoyées à la commission des pétitions chargée d’en faire le rapport.
M. Watlet. - Je demande en outre qu’elles soient imprimées au Moniteur, comme la chose a eu lieu jusqu’ici pour les pétitions de ce genre.
- Cette proposition est adoptée.
M. Donny. - Je demande qu’au lieu de renvoyer la pétition des pêcheurs d’Ostende à la commission des pétitions, la chambre en ordonne le renvoi à la commission d’industrie.
- Cette proposition est accueillie.
M. Donny présente à la chambre une nouvelle proposition. Nous la ferons connaître.
- La proposition de M. Donny est prise en considération.
M. Donny. - Attendu que la proposition est d’une nature urgente, je prierai la chambre d’en ordonner le renvoi à une commission.
M. Eloy de Burdinne. - Attendu que c’est une question de budget, je demande que la proposition soit renvoyée aux sections.
M. Rogier. - Je demanderai que la proposition soit renvoyée à la commission qui est saisie du projet du gouvernement relatif à la pêche nationale, et dont l’honorable M. Donny fait partie.
- La demande de M. Rogier est adoptée.
M. Desmanet de Biesme. - Le nommé Aimé Hautecœur, qui avait fait une demande en naturalisation, vient d’informer la chambre qu’il la retire.
Je demande que nous soyons autorisés à lui renvoyer ses pièces.
M. Gendebien. - Messieurs, la demande de l’honorable M. Desmanet de Biesme me paraît insolite ; nous ne pouvons prendre une décision à ce sujet ; je ne crois pas qu’il soit nécessaire de consulter la chambre pour un renvoi de pièces ; ce serait établir un précédent, et il pourrait en résulter quelquefois des inconvénients.
C’est là une affaire de greffe ; c’est au greffe à constater l’identité des personnes qui viennent réclamer des pièces.
- Cet incident n’a pas de suite.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, je pense qui conviendrait de donner d’abord lecture des deux projets de loi présentés, l’un par M. Seron et l’autre par la commission.
Ces deux projets sont à peu près semblables.
(M. le ministre donne lecture de ces deux projets.)
Je crois, messieurs, que les deux projets sont incomplets. En rappelant purement et simplement la loi du 18 germinal an III, on ne se réfère pas aux principales dispositions portant les dénominations des multiples et sous-multiples des poids et mesures ; car, c’est en vertu d’arrêtés du pouvoir exécutif que les dénominations scientifiques ont été postérieurement complétées.
Vous trouverez sans doute utile de rendre obligatoire l’emploi des dénominations métriques dans les actes publics ; j’aurai l’honneur de vous proposer une disposition formelle à cet égard, portant en même temps avec elle la sanction de cette obligation.
Quant aux contraventions antérieures à la présente loi, et qui ne consistent que dans l’emploi des dénominations que nous proposons aujourd’hui de rétablir, je suis d’accord avec la commission et avec l’honorable M. Seron pour les considérer comme non avenues.
Vous n’ignorez pas, messieurs, que la Belgique manque d’étalons prototypes des poids et mesures ; il est essentiel cependant, pour l’exactitude du système métrique, que ces étalons soient à la disposition du gouvernement. Je saisis l’occasion qui se présente en ce moment pour vous proposer d’introduire dans la loi une disposition qui autorise le gouvernement à faire constater par une, commission la conformité d’étalons prototypes avec ceux déposés à l’institut de France.
Je crois qu’il est en outre indispensable d’insérer dans la loi un article relatif aux poids médicaux ; il serait trop dangereux de ne pas conserver provisoirement les poids actuellement en usage dans les pharmacies, et d’improviser l’obligation rigoureuse de se servir des dénominations générales du système métrique pour les médicaments.
Je demanderai par conséquent de ne rien prescrire à l’égard des poids médicaux, jusqu’à ce que la pharmacopée dont on s’occupe en ce moment ait pu être achevée, et que son usage en ait été ordonné par une loi.
D’après ces différentes observations, j’ai l’honneur de vous proposer les articles suivants, en remplacement des deux projets de la commission et de M. Seron :
« Art. 1er. A dater du 1er août prochain les poids et mesures reprendront la dénomination du système métrique, conformément au tableau annexé à la présente loi.
« Tableau annexé à la présente loi, contenant les dénomination des mesures décimales du systèmes métrique.
« 1° Rapport des mesures de chaque espèces à leur unité et première partie des noms, des multiples et sous multiples qui indiquent le rapport aux unités :
« - 10,000 : myria-
« - 1,000 : kilo-
« - 100 : hecto-
« (Remarque : pour le mesures agraires, au lieu de myria-are, kilo-are, hecto-are, on dit : myriare, kiliaire, hectare et décare.)
« - 10 : déca-
« - 0,1 : déci-
« - 0,01 : centi-
« - 0,001 : milli-
« 2° Unités des mesures (deuxième partie des multiples et sous-multiples dont il s’agit dans la colonne précédente) :
« Mesures de longueur : mètre.
« Mesures de capacité : litre.
« Mesures de poids : gramme.
« Mesures agraires : are.
« Mesures de solidité : stère. »
« L’emploi de ces dénominations dans les actes publics sera obligatoire à partir de la même époque. Les contraventions à cette disposition seront punies conformément à la loi du 6 mars 1818, n°12. Toutefois le minimum de l’amende est réduit à dix francs. »
« Art. 2. Jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu par une loi, les dispositions qui précédent ne seront point applicables aux poids médicaux actuellement en usage. »
« Art.3. Le gouvernement est autorisé à faire constater par une commission qu’il désignera à cet effet, la conformité d’étalons prototypes des poids et mesures avec ceux déposés à l’institut de France. »
« Art. 4. Les contraventions à la loi du 21 août 1816, qui ne consistent que dans l’emploi des dénominations rétablies par la présente loi, ne seront punies d’aucune amende. »
M. Legrelle. - Il me semble difficile de saisir assez bien une loi à une simple lecture pour la voter en connaissance de cause.
Si j’ai bien entendu, la loi serait obligatoire au premier août prochain ; je pense que le terme après lequel on ne pourra employer les anciennes dénominations sous peine d’amende est trop rapproché.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je ne m’oppose pas à ce qu’on accorde un délai plus long.
M. Lebeau. - Je ne comprends pas les scrupules de l’honorable préopinant. Il s’agit de rétablir le système français dans son application. Ce système ne se compose pas seulement de la loi de germinal an III ; le système républicain n’est pas plus répudié par moi que par l’honorable préopinant. Il a été posé dans la loi de germinal an III des principes qui ont été développés par des mesures ultérieures.
Il est impossible de ne rendre obligatoire que la nomenclature des unités ; vous laisseriez à chacun le droit de donner telles dénominations qu’il voudrait aux subdivisions et aux multiples. Il faut en revenir au système des poids et mesures tel qu’il existait, non pas en l’an III, mais en 1814.
Tel est le résultat de la loi proposée par le ministre des finances, loi très claire et qui n’est pas susceptible de discussion.
Quant à l’observation faite par l’honorable M. Legrelle sur la nécessité de prolonger le délai dans lequel la loi sera obligatoire, je pense qu’elle a pour but de donner un temps moral pour exécuter la loi. Il veut que les pénalités ne soient prononcées qu’après ce délai, mais il veut que l’exécution facultative de la loi ait lieu immédiatement. Il faut lever l’entrave à ce qu’on revienne aux dénominations scientifiques, auxquelles on avait substitué les dénominations gothiques et barbares par la loi de 1816.
Il faut que la loi soit exécutoire immédiatement, mais que les pénalités qu’elle prononce ne soient appliquées qu’à partir du 1er janvier 1837.
M. Verdussen. - Il m’a paru nécessaire d’établir purement et simplement, comme vient de le dire M. Lebeau, le système des poids et mesures français. Mais la loi que vient de nous proposer M. le ministre des finances remplit-elle bien ce but ? J’en doute. Autant que j’en puis juger à une simple audition, je crois que la proposition de l’honorable M. Seron était plus satisfaisante à cet égard, sauf une légère modification que je proposerai à la rédaction pour la rendre plus générale.
Cet article porte : « A dater du 1er août prochain, les poids et mesures reprendront les dénominations qui leur ont été données par la loi française. »
Au lieu de « par la loi française, » je proposerai de dire « en vertu des lois françaises, » parce qu’en disant par la loi française, on restreint le système aux dénominations écrites dans la loi, tandis que si vous dites en vertu des lois françaises, vous comprenez tout le système des poids et mesures français, tel qu’il existait avant la loi de 1816 ; vous rétablissez tout ce qui existait alors.
Je n’ai pas bien saisi tout ce qu’a dit M. le ministre des finances ; je ne sais pas si d’après l’amendement on continuerait à exécuter la loi de 1816 dans tout ce qui n’est pas contraire à la présente loi.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je dirai d’abord, répondant à l’observation de M. Verdussen, que dans notre projet, comme dans celui de M. Seron, on ne parle de la loi du 21 mars 1816 que pour dire que les contraventions à cette loi qui ne consistent que dans l’emploi des dénominations que nous rétablissons, ne seront pas poursuivies ; c’est-à-dire que si quelqu’un s’était servi de la dénomination de mètre, alors qu’il aurait dû se servir de la dénomination d’aune, cette contravention ne serait pas punie.
Du reste, nous ne nous occupons en aucune manière de la loi de 1816. Nous ne voulons en changer que les dénominations. C’est la seul chose dont nous nous occupons.
Plusieurs voix. - Renvoyons ! renvoyons !
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Si on veut renvoyer le projet à la prochaine session, je ne m’y opposerais pas formellement. Je ferai seulement observer que nous serons obligés ainsi d’attendre encore un an pour avoir une chose qui me paraît assez simple.
J’ajouterai pour M. Verdussen que, dans mon projet, je ne me borne pas à m’en référer aux dénominations établies par telles lois, mais j’insère les dénominations mêmes dans la loi, afin que tous ceux qui verront cette loi, aient sous les yeux les dénominations dont ils doivent se servir. En un mot, le projet que je propose contient les dénominations, tandis que dans les autres projets on renvoie à d’autres lois et arrêtés pour les trouver.
Il me semble donc, messieurs, qu’il n’y a aucun danger à adopter les dispositions qui nous sont soumises. Quand nous aborderons les articles un à un, nous en apprécierons facilement la portée.
M. Dumortier. - Le projet de loi ne fait que changer la nomenclature bizarre en vigueur. Le gouvernement hollandais voulant bannir les expressions françaises, s’adressa à l’institut d’Amsterdam et à l’académie de Bruxelles ; l’institut proposa des mots barbares, et ils furent admis. L’académie réclamait le maintien de la nomenclature française.
Ce sont des particularités que peu de personnes connaissent.
J’ai recherché dans les procès-verbaux de l’académie des sciences ce qui est relatif à cette affaire ; et voici ce que contient le procès-verbal de la séance du 30 janvier 1817 :
« M. Thiry, au nom d’une commission nommée dans la séance précédente, donne lecture d’un rapport sur la nouvelle nomenclature française des poids et mesures proposée par l’institut royal d’Amsterdam, La commission propose divers changements, après avoir fait voir néanmoins qu’il aurait beaucoup mieux valu adopter l’ancienne nomenclature en usage en France et en Belgique. L’académie adopte le rapport de la commission, etc. »
Le ministre des finances, au lieu de dire simplement qu’il faut s’en référer aux lois françaises, qui ne sont plus en vigueur en Belgique depuis 20 années, présente un tableau de la nomenclature française ; or, cette addition est utile. C’est encore avec sagesse que le ministre des finances ne stipule rien pour les poids de la pharmacopée belge ; un changement de nomenclature serait ici dangereux, car la différence de dose pour certains poisons peut être très funeste.
Les commerçants pourront tenir leurs livres dans la valeur qu’ils voudront choisir ; les uns en francs, les autres en florins de Brabant ou de Hollande. Mais dans leurs réclamations judiciaires ils transformeront ces valeurs en francs ou en mesures nouvelles, et n’emploieront alors que des dénominations légales.
M. Desmet. - La loi de germinal est complète ; elle comprend les noms des mesures principales, les noms de leurs multiples ou sous-multiples décimaux ; mais elle ne présente pas de tableaux, parce que les tableaux ne peuvent être complets.
Il y a plus : dans l’art. 8 de la loi de germinal an III, il est dit que, pour les poids et pour les mesures de capacité, on fera usage de leurs doubles et de leurs unités ; ainsi on a le double litre et la moitié du litre : or c’est ce que vous n’aurez pas par votre loi.
M. Gendebien. - Personne, à coup sûr, ne désire plus que moi de voir généraliser l’emploi du calcul décimal ; mais prenons-nous la bonne voie pour généraliser cet emploi ? Je ne le pense pas. Les difficultés que l’on a rencontrées jusqu’ici proviennent, en grande partie, du défaut de connaissance des lois et des nombreux décrets et arrêtes qui ont successivement réglementé et souvent embrouillé une chose assez simple en elle-même.
Depuis la loi de l’an III, de 20 ans en 20 ans, on paraît décidé à porter une loi nouvelle sur les poids et mesures. Nous avons une loi française, une loi néerlandaise ; nous allons avoir une loi de Belgique, de manière que les Belges seront obligés de consulter et la collection des lois françaises et la collection belge et tout cela, messieurs, sous prétexte de faciliter l’usage du système métrique. Pourquoi ne pas faire une loi complète, sans renvoyer à ces collections que peu de personnes possèdent ? Je regrette que l’on ait tant tardé à discuter la proposition de l’honorable M. Seron ; mais puisque l’on a attendu pendant trois ans, je ne vois pas d’inconvénient à la retarder encore pendant quatre ou cinq mois. Remettons cette discussion jusqu’à la session prochaine.
L’académie s’est, dit-on, occupée de cet objet ; eh bien, qu’elle persiste dans ses bonnes intentions et qu’elle fasse une instruction usuelle que l’on joindrait à la loi, et que l’on répandrait dans le pays, en un petit volume et à bas prix. Instruisez le peuple de ses devoirs avant de le punir d’infractions, qu’il ne peut éviter par ignorance.
Veuillez remarquer que pour les juges et les avocats, la plus grande difficulté qu’ils éprouvent dans leurs travaux, c’est la recherche des lois : après avoir consulté plusieurs collections, ils restent souvent dans le doute si quelques dispositions non abrogées ne leur ont pas échappé. Vous sentez que l’embarras est bien plus grand pour ceux qui n’ont aucune habitude des lois. Je voudrais pouvoir discuter une loi complète, abrogeant toutes les lois, décrets, arrêts et ordonnances antérieurs.
Si vous adoptez la loi proposée, vous agirez en sens contraire du but que vous vous proposez ; car, au lieu de simplifier, vous compliquerez la position de vos concitoyens.
Encore une fois, faites une loi complète, joignez-y une instruction dans un petit volume ; si vous faites autrement, vous embrouillerez tout, et vous découragerez plus que jamais ceux qui sont le plus disposés à reconnaître les avantages du système décimal.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - La loi telle que je vous la présente, n’oblige à recourir à aucune autre loi ancienne, puisque le tableau que j’y ai annexé donne la nomenclature. Le projet n’a d’autre objet que d’en revenir aux dénominations françaises. Ce n’est pas notre faute si le gouvernement hollandais, en 1818, y a substitué des dénominations barbares et incohérentes. Notre projet tend encore à empêcher les poursuites qui pourraient être légalement intentées contre les notaires qui auraient employé dans les actes publics les dénominations scientifiques des poids et mesures
On prétend que nous allons marcher en sens inverse du but que nous nous proposons, en adoptant un lambeau de loi : mais la loi est complète relativement aux dénominations : quand nous ferons une loi générale sur les poids et mesures, nous ajouterons simplement à celle dont nous nous occupons, les dispositions qui concernent l’usage matériel du système. Mais en attendant que nous puissions porter une loi générale, ce qui ne pourra avoir lieu d’ici à longtemps, car nous avons des choses plus importantes à faire, il faut au moins, puisque l’occasion se présente, changer les dénominations bizarres que nous avons héritées du régime hollandais.
Du reste, je dirai à l’honorable membre qu’il confond deux objets distincts : l’usage et les dénominations. Notre loi n’aura pas pour effet, par exemple, d’empêcher l’usage du demi-litre. Elle n’aura pour objet que les dénomination à employer. Elle n’a rien de contraire aux usages établis en vertu des lois antérieures.
On a parlé de changer la division du kilogramme, de faire des demis, des quarts, des huitièmes de kilogramme. Cette disposition appartient au pouvoir exécutif. Nous ne voulons dans notre loi autre chose sinon que l’on se serve des dénominations du système métrique.
- L’ajournement de la discussion proposé par M. Gendebien est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M. le président. - La chambre passe à la discussion de l’article premier et du tableau y annexé.
M. A. Rodenbach. - Il paraît que c’est le tableau joint à l’article premier présenté par le gouvernement qui empêche l’assemblée de voter. Il me semble qu’il faudrait s’en tenir à la proposition de M. Seron et de la section centrale qui se borne à substituer la nomenclature française à la nomenclature néerlandaise. J’engagerais M. le ministre à retirer ce tableau et à en faire l’objet d’un simple arrêté.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je trouve dans le dictionnaire que j’ai sous les yeux « kilo » ou « kilio ». Il serait donc tout à faire indifférent d’adopter le mot de « kilard » ou de « kiliard » que je propose, et qui exprime l’idée que j’y attache ; mais je donne la préférence à celui de ces deux termes qui est admis chez nos voisins dans la nomenclature du système métrique.
- L’article premier de M. le ministre des finances, est mis en discussion, ainsi que le tableau annexé à cet article.
M. Legrelle. - Je crois que M. le ministre des finances a fait droit à mon observation sur le terme du 1er août qui me paraît trop rapproché.
M. le président. - L’on pourrait dire :
« Toutefois ces contraventions ne seraient poursuivies et punies qu’autant qu’elles seraient postérieures au 1er janvier 1837. »
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je me rallie à cette rédaction.
M. Dubus. - je désirerais que l’on me rappelât le minimum de la peine d’emprisonnement, en vertu de la loi de 1818.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - L’amende qui est aujourd’hui de 10 florins a été réduite à 10 francs.
Voici l’article premier de la loi de mars 1818 :
(M. le ministre des finances a donné lecture de cet article.)
Dans mon opinion ii ne peut y avoir lieu à emprisonnement pour s’être servi d’une dénomination qui ne soit pas légale ; aussi je m’étais abstenu de modifier la disposition que je viens de citer, parce que ce sont les tribunaux qui jugeront et qu’ils n’appliqueront jamais la peine d’emprisonnement. Cependant, pour supprimer tout à fait cette peine de la législation sur cette matière, je propose de rédiger l’article comme suit : « Seront punis d’une amende qui ne pourra être moindre de 10 francs, ni excéder 100 francs. »
M. Dubus. - La nouvelle disposition de M. le ministre me paraît devoir donner lieu à un inconvénient très grave ; que toutes les contraventions de cette nature, au lieu d’être jugées par les tribunaux de simple police, pourront être jugées correctionnellement du moment qu’il s’agira d’appliquer une amende jusqu’à cent francs. C’est un inconvénient qu’il faut éviter. Il y a des moments où les tribunaux correctionnels sont encombrés de procès-verbaux de contraventions de cette nature. Les agents du fisc vont, à des époques périodiques, faire des tournées dans les campagnes. Aussi il arrive jusqu’à 200 procès-verbaux à la fois à un seul tribunal correctionnel. Ces contraventions sont ordinairement jugées sur le procès-verbal, et il est rare que les tribunaux aient appliqué plus du minimum de la peine.
M. Demonceau. - Il existe une autre loi que celle du 16 mars 1818. Il y a celle de ventôse. Sera-t-elle supprimée par la présente disposition ?
Plusieurs membres. - Sans doute.
M. Demonceau. - J’ajouterai qu’il y a des arrêtés portés en vertu de la loi du 6 mars 1818, et il en résulte cette anomalie que celui qui contrevient ouvertement aux poids et mesures légaux n’est puni que d’une amende de simple police, taudis que celui qui a chez lui d’anciens poids ou d’anciennes mesures est passible d’une peine correctionnelle.
Cela vient de ce qu’un arrêté du roi Guillaume a étendu à la possession des pénalités que la loi de 1818 n’appliquait qu’à l’usage.
J’appuierai l’amendement de M. le ministre des finances, et je laisserai les tribunaux correctionnels juger des contraventions.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je pense que M. Demonceau n’a pas compris les terme dans lesquels nous nous en référons à la loi de 1818. Les contraventions pour emplois de dénominations non légales, constatées à charge des notaires ou autres officiers publics, seront punies conformément à la disposition que nous indiquons, et que j’ai modifiée en réduisant la pénalité de 10 à 100 fr. d’amende, au lieu de 10 à 100 florins et l’emprisonnement.
Maintenant l’honorable membre parle de l’usage des poids et mesures, du mode de s’en servir ; mais nous ne nous occupons pas de cette partie de la législation ; nous nous occupons des dénominations, et rien d’autre.
J’attendrai la lecture de l’amendement de M. Dubus, pour voir s’il ne s’éloigne pas trop de ma proposition.
M. le président. - Le voici : « Une amende de 1 à 15 fr., et un emprisonnement de 1 à 5 jours cumulativement et séparément. »
M. Dubus. - Je demanderai la parole pour ajouter quelques mots à l’appui de mon amendement.
En proposant une amende de 1 à 15 francs et un emprisonnement de 1 à 5 jours, je reste dans les termes de la juridiction de simple police. Je donne le moyen d’infliger une pénalité plus sévère dans les cas qu’on trouverait plus graves, cas pour lesquels le ministre voulait porter l’amende à 100 fr. En portant l’amende à 100 fr., il en résultait que toutes les contraventions en matière de poids et mesures tombaient dans la compétence des tribunaux correctionnels, tandis que par ma proposition, elles demeurent des affaires de simple police. Cela diminuera le chiffre des affaires correctionnelles dont les tribunaux sont surchargés et qu’on fait sonner bien haut.
M. Dumortier. - Je suis forcé de m’opposer à l’amendement de mon honorable ami. Je ne puis pas admettre qu’on prononce une peine d’emprisonnement pour une simple contravention en matière de poids et mesures ; j’aime mieux voir les tribunaux correctionnels surchargés d’affaires que les citoyens exposés à aller en prison pour si peu de chose.
Je voterai donc contre l’amendement.
M. Lebeau. - Je crois qu’on ne peut descendre plus bas que ne l’a fait l’honorable M. Dubus. La peine qui était autrefois de dix florins se trouve réduite à 15 fr., et quant à la peine de l’emprisonnement qui pourra en outre être prononcée, il y a une garantie, c’est que l’exécution de la loi n’est pas confiée au ministère public près le tribunal de première instance, mais à un membre de l’administration communale, qui, protecteur naturel de ses administrés, n’ira pas se faire des ennemis.
Un membre. - C’est le commissaire de police.
M. Lebeau. - Dans les campagnes, il n’y a pas de commissaires de police. Vous avez la garantie que là la poursuite sera dirigée par un élu de la commune, et s’il n’y a qu’une simple négligence, s’il n’y a pas de mauvaise volonté, la poursuite n’aura pas lieu. C’est ce qui arrive aussi de la part du ministère public près des tribunaux correctionnels. Mais s’il y a récidive, s’il y a résistance à la loi, il faut établir des moyens de répression efficaces. Si la peine était appliquée mal à propos, il y aurait encore le recours en grâce ; on ne peut pas faire au gouvernement le reproche d’être trop sobre de l’exercice du droit de grâce. C’est plutôt le reproche contraire qu’on lui adresse.
M. le président. - Je ferai observer qu’aux termes de la loi, les notaires sont toujours justiciables des tribunaux de première instance.
M. Legrelle. - L’observation de M. le président tranche la question. S’il est avéré que les notaires sont toujours sous la juridiction des tribunaux de première instance, je ne vois pas pourquoi on n’adopterait pas la proposition de M. le ministre des finances. Si je suis toujours disposé à réduire les peines et les affaires soumises aux tribunaux de première instance, je recule devant le danger de voir un notaire dans le cas d’être emprisonné pour s’être par récidive servi d’une ancienne dénomination de poids ou mesure. Je ne trouve pas de gradation dans la peine ; j’aimerais mieux payer six fois l’amende que d’être mis en prison un jour.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il est plus prudent d’adopter ma rédaction, qui commine une peine de 10 à 100 fr., que la proposition de M. Dubus. Ce n’est pas que je la trouve trop rigoureuse, mais uniquement parce que nous pourrions déranger l’économie de nos lois de procédure. Une disposition spéciale met aujourd’hui les notaires sous la juridiction des tribunaux de première instance. Serait-il utile de changer cette juridiction ? c’est ce qu’il faudrait prouver. Il vaut mieux stipuler l’amende de 10 à 100 fr., qui est sans doute très faible, et qui peut être remise par la Roi, si, sur l’avis du procureur du Roi, la peine appliquée est encore réellement trop forte eu égard aux circonstances atténuantes.
Du reste, les agents publics, qui contreviendront à la loi auront aussi plus de garantie, en comparaissant devant un tribunal de première instance.
En adoptant mon amendement, vous parez à tous les inconvénients présentés ; vous empêchez d’appliquer des peines trop sévères, et vous ne vous exposez pas à déranger l’économie des lois de procédure.
La chambre est du reste saisie dans ce moment d’une loi sur la compétence civile ; on pourra faire entrer dans la catégorie qu’on jugera à propos les contraventions dont il s’agit. Laissons donc subsister les choses telles qu’elles sont maintenant, sauf à les modifier par la loi dont je viens de parler.
M. le président. - M. Dumortier propose d’ajouter à l’amendement de M. le ministre des finances la disposition suivante :
« Néanmoins ces contraventions seront jugées dans la forme de celles de simple police. »
M. Dumortier. - Je propose cet amendement pour supprimer la peine de l’emprisonnement. Un notaire préférerait perdre deux mille fr. que d’être privé de sa liberté.
Comme mon honorable ami a motivé son amendement sur ce que les tribunaux étaient encombrés d’affaires, je propose de faire juger les contraventions dont il s’agit par les tribunaux de simple police.
- L’amendement de M. Dumortier n’est pas appuyé.
Celui proposé par M. Dubus est mis aux voix. Il n’est pas adopté.
L’article premier proposé par M. le ministre des finances est mis aux voix et adopté.
« Art. 2 (proposé par le ministre des finances). - Jusqu’à ce qu’il y ait été autrement pourvu par une loi, les dispositions qui précèdent ne seront point applicables aux poids médicaux actuellement en usage. »
- Adopté.
« Art. 3. (proposé par le ministre des finances). - Le gouvernement est autorisé à faire constater par une commission qu’il désignera à cet effet la conformité d’étalons prototypes des poids et mesures avec ceux déposés à l’institut de France. »
- Adopté.
« Art 4. (conforme à l’article 2 du projet primitif). - Les contraventions à la loi du 21 août 1816, qui ne consistent que dans l’emploi des dénominations rétablies par l’article précédent, ne seront punies d’aucune amende. »
- Adopté.
M. le président. - Le ministre des finances propose le retranchement de la disposition suivante :
« Sont maintenues et continueront d’être exécutées les dispositions de ladite loi du 21 août 1816, dans tout ce qui n’est pas contraire à la présente. »
M. Verdussen. - J’ai demandé l’ajournement de la discussion parce que je ne voulais pas me prononcer au galop sur une loi de cette importance. Toutefois, puisque l’ajournement est écarté, je voudrais que la loi fût le moins mauvaise que possible. Il faudrait savoir dans quelle situation se trouverait un négociant qui aurait tenu ses écritures en d’autres mesures que les mesures décimales, et qui aurait des poursuites à exercer devant les tribunaux. Il y a des dispositions dans la loi actuelle qui présentent la plus grande anomalie avec la loi générale.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Un négociant qui aura tenu ses écritures en mesures autres que les mesures décimales, quand il voudra porter une réclamation en justice, n’aura rien autre chose à faire qu’à traduire ces anciennes mesures en nouvelles, et employer les noms décimaux dans les actes judiciaires en regard des autres noms cotés dans les livres ou écritures qu’il aura tenus. Il faut que le langage de tous les officiers publics soit le même que celui de la loi. Nous n’avons du reste touché à la loi de 1816 que pour l’adoucir, quant aux amendes et à l’emprisonnement que nous avons supprimé ; mais ce serait aller trop loin que de la supprimer complètement, attendu qu’elle renferme une sanction qu’il est indispensable de maintenir si l’on veut du système décimal.
M. Desmet. - Le ministre ne répond pas d’une manière satisfaisante à l’honorable M. Verdussen. La loi est fautive en plus d’un point. Le tableau que l’on y annexe n’est pas suffisant pour indiquer les subdivisions des mesures dont on peut avoir besoin. Ce tableau n’est bon que dans un ouvrage élémentaire, dans une instruction. On ne peut pas changer une loi importante par des improvisations à la tribune. Je ne puis voter une loi dont je ne puis apprécier la portée. Je m’abstiendrai.
M. Demonceau. - Il faut reprendre le système décimal des mesures et leur nomenclature scientifique ; il faut donc porter des peines contre ceux qui contreviennent à la loi. Mais les peines ne doivent pas être hors de proportion avec la faute commise. On a très bien fait d’adoucir les amendes et de supprimer l’emprisonnement ; sous tous les rapports il y a avantage à adopter la loi.
- La disposition dont M. le ministre des finances a demandé la suppression est mise aux voix et rejetée.
Quoique la loi soit amendée, la chambre demande à passer immédiatement au second vote.
L’urgence est mise aux voix et adoptée.
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.
57 membres sont présents.
54 membres votent l’adoption.
1 membre vote le rejet.
3 membres s’abstiennent.
La loi est adoptée
M. Desmet. - Je me suis abstenu parce que je ne puis voter sur une loi qui n’a pas été communiquée à la commission, qu’on n’a même pas pu lire ; sur une loi improvisée, enfin. Je ne veux pas me hasarder à doter mon pays de lois semblables.
M. Lardinois. - je me suis abstenu par les mêmes motifs.
Ont voté l’adoption : MM. de Jaegher, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Theux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Doignon, Dubois, Dubus (aîné), Dubus (Bernard), Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Hye-Hoys, Jadot, Keppenne, Kervyn, Lebeau, Legrelle, Lejeune, Mast de Vries, Meeus, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Pirson, Polfvliet, Raikem, Raymaeckers, A. Rodenbach, Rogier, Rouppe, Schaetzen, Simons, Smits, Stas de Volder, Thienpont, Trentesaux, Ullens, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Verrue-Lafrancq, H. Vilain XIIII, Vuylsteke, Watlet.
A voté le rejet : M. Gendebien.
M. le président. - Nous avons à l’ordre du jour le projet de loi concernant le traitement des vicaires.
M. Legrelle. - Je crois qu’il faudrait s’occuper des naturalisations qui sont aussi à l’ordre du jour.
M. de Nef. - Il est urgent de discuter immédiatement le projet de loi relatif au traitement des vicaires Car si cette loi n’était pas votée, les communes pourraient refuser à leurs budgets le traitement des vicaires, ce qui aurait des résultats fâcheux.
M. Fallon. - Il n’y a aucun inconvénient à différer l’examen de ce projet. La loi n’aurait d’exécution que pour le premier janvier 1837. Or, les budgets des communes sont faits jusqu’à cette époque.
J’insiste d’autant plus sur l’ajournement de cette loi, que le projet a été mis si brusquement à l’ordre du jour que peu d’entre nous sont préparés à soutenir la discussion. Il est évident que si M. le ministre de l’intérieur se rallie à la proposition de la section centrale, il n’y aura pas de discussion. Mais s’il s’en tient à son projet, la discussion pourra être fort longue.
M. Dubus. - Toute la question est de savoir si M. le ministre de l’intérieur se rallie au projet de la section centrale. Dans le cas contraire, la chambre aura à examiner si nous pourrons arriver à une solution dans cette séance.
M. Doignon, rapporteur. - En demandant que la loi sur le traitement des vicaires fût mise à l’ordre du jour, je supposais que M. le ministre de l’intérieur se rallierait à l’opinion de la section centrale, avec d’autant plus de raison que c’est celle de toutes les sections. Si M. le ministre de l’intérieur ne se rallie pas au projet, je suis le premier à demander l’ajournement de la discussion jusqu’à notre prochaine réunion. Il nous serait impossible en effet, en ce moment, d’être en nombre jusqu’à la fin de cette discussion, qui pourra être longue.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je ne crois pas devoir me rallier au projet de la section centrale, parce que je suis convaincu que ce projet n’offrira aucun avantage ni pour le clergé, ni pour les communes. Je suis persuadé qu’il n’aura d’autre résultat que de grever le budget. Comme la chambre ne me paraît pas disposée à aborder actuellement la discussion de ce projet, je propose de la mettre à l’ordre du jour de la première séance de notre prochaine réunion. (Appuyé !)
- La proposition de M. le ministre de l’intérieur est mise aux voix et adoptée.
M. Legrelle. - A la fin de notre dernière session, j’avais demandé que M. le ministre des finances nous distribuât les budgets de l’exercice suivant pendant l’intervalle des deux sessions. Chacun a pu apprécier les avantages de cet examen à tête reposée. Je renouvelle aujourd’hui ma demande, particulièrement en ce qui concerne le budget des voies et moyens.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je crois pouvoir déclarer, au nom du gouvernement, que les budgets seront distribués à MM. les membres de la chambre, aussitôt qu’ils auront été définitivement arrêtés en conseil des ministres. Il est bien entendu que la présentation officielle des budgets aura lieu au renouvellement de la session.
M. le président. - Les naturalisations restent à l’ordre du jour.
M. A. Rodenbach. - Il serait inutile d’aborder cet objet en ce moment. Nous ne pouvons que prendre en considération actuellement les propositions de la commission. Ce n’est qu’après la prise en considération par le sénat que nous pourrions prendre une décision définitive. La chambre étant à peine en nombre, il est à peu près inutile d’entamer cet objet.
M. Fallon. - Je propose que la chambre s’ajourne indéfiniment.
M. Gendebien. - Je fais un amendement à cette proposition. (Hilarité.) Je prie MM. les ministres de ne pas nous convoquer au milieu de l’été. Il me semble que si nous nous assemblions le 15 octobre, nous ferions beaucoup plus de besogne que dans une session extraordinaire. C’est un simple vœu que j’exprime.
M. le président. - La chambre s’ajourne indéfiniment.
- La séance est levée à 2 heures et demie.