(Moniteur belge n°134 et 135, des 13 et 14 mai 1836)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à une heure et demie.
M. Verdussen procède à l’appel nominal.
M. Schaetzen lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Verdussen fait connaître l’objet des pièces suivantes adressées à la chambre.
«Le sieur H. Jansen, négociant à Ruremonde, né à Clèves et domicilié en Belgique depuis 30 ans, demande la naturalisation. »
« Des habitants propriétaires de Zwyndrecht-Santhoven demandent l’exemption de l’impôt foncier sur les terres du polder de Burgerweert, récemment encore inondé, qu’ils se proposent de mettre en culture. »
- La première pétition est renvoyée au ministère de la justice ; et la chambre décide, sur la proposition de M. Van Hoobrouck de Fiennes, que la seconde pétition serai renvoyée à la commission des pétitions, avec invitation de faire un prompt rapport.
Il est procédé d’abord par voie du sort au choix des scrutateurs.
Après cette opération, MM. les représentants vont déposer leurs bulletins dans l’urne.
MM. les scrutateurs procèdent au dépouillement des bulletins.
Voici le résultat du scrutin.
Le nombre des votants est de 58 ; la majorité absolue est de 30.
MM. Lejeune a obtenu 43 suffrages.
M. Dubus aîné, 49
M. Doignon, 2
M. Verdussen, 8
M. Berger, 5
M. Desmet, 25
M. Scheyven, 6
M. Devaux, 9
M. Jadot, 15
M. Watlet, 15
M. Fallon, 31
M. Mast de Vries, 23
M. Desmanet de Biesme, 35
M. Heptia, 10
M. Milcamps, 33
M. Cornet de Grez, 26
M. de Renesse, 5
M. Schatzen, 6
M. Coppieters, 7
M. Gendebien, 11
M. Raymaeckers, 5
M. Troye, 6
M. Quirini, 2
M. Liedts, 6
M. Vandenbossche, 1
M. de Behr, 1
M. Demonceau, 1
M. Cols, 2
M. Dequesne, 3
M. B Dubus, 3
M. A. Rodenbach, 1
M. d’Hoffschmidt, 2
M. Desmaisières, 2
M. Seron 4
M. Duvivier, 3
M. Thienpont, 1
M. Vanderbelen, 4
M. Simons, 1
M. de Brouckere, I
M. de Roo, 1
De Roo, I
MM. Dubus, Lejeune, Desmanet de Biesme, Milcamps et Fallon, ayant obtenu la majorité absolue, sont nommés membres de la commission des naturalisations
Il est procède à un nouveau scrutin pour la nomination des deux derniers membres de la commission.
Voici le résultat de ce second scrutin :
M. Desmet a obtenu 39 suffrages.
M. Mast de Vries, 37
M. Cornet de Grez, 25
M. Verdussen, 2
M. Watlet, 3
M. Jadot, 6
M. Fallon, 1
M. Milcamps, 1
M. Doignon, 1
M. Gendebien, 5
M. B. Dubus, 1
M. de Roo, 1
M. Seron, 1
M. Troye, 1
MM. Desmet et Mast de Vries, ayant obtenu la majorité absolue, sont proclamés membres de la commission des naturalisations.
Ainsi la commission se trouve composée de MM. Dubus, Lejeune, Desmanet de Biesme, Milcamps, Fallon, Desmet et Mast de Vries.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux) dépose deux projets de loi dont l’un concerne la création d’une école vétérinaire, et dont l’autre est relatif à une pension à accorder à la veuve Kessels.
- Ces projets seront imprimés et distribués.
La chambre décide que chacun d’eux sera renvoyé à une commission nommée par le bureau.
La chambre décide d’abord qu’on discutera ces projets, en suivant l’ordre alphabétique des communes.
En conséquence, la chambre procède d’abord à la discussion du projet de loi concernant la séparation du village de Boisschoot de la commune de Heyst-op-den-Berg.
Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on procède à l’appel nominal sur le vote de l’article unique du projet.
66 membres prennent part au vote ; un membre s’est abstenu. (M. Gendebien.)
65 membres ont répondu oui.
1 a répondu non.
En conséquence, le projet de loi est adopté, et sera transmis au sénat.
M. le président. - M. Gendebien est invité, aux termes du règlement, à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Gendebien. - Messieurs, je me suis abstenu, parce que je ne suis pas suffisamment éclairé sur la nécessité ou l’utilité de la séparation demandée. Il me semble que nous entrons dans une voie dangereuse, et que nous donnons ouverture à toute espèce de prétentions, de dissensions même dans les communes.
- La chambre passe à la délibération sur le projet de loi relatif à la délimitation des communes de Bourni (province de Namur) et Clavier (province de Liége). Ce projet est adopté sans discussion, conformément à la proposition faite par le gouvernement.
Il est ensuite soumis à l’appel nominal et est adopté à l’unanimité des 64 membres qui ont pris part à la discussion.
M. de Saegher s’est abstenu de voter par les mêmes motifs, a-t-il dit, qui ont déterminé M. Gendebien à ne pas prendre par au vote sur la loi précédente.
Le projet de loi relatif à la séparation territoriale et administrative de Deurne et Borgerhout est mis en délibération. La proposition faite par le gouvernement est ainsi conçue :
« Art. 1er. Les villages, dont la réunion forme actuellement la commune de Deurne et Borgerhout, province d’Anvers, sont ériges en communes distinctes, dont l’une se composera du village de Deurne (section A et B), et l’autre de celui de Borgerhout (section C). »
« Art. 2. Les limites respectives de la commune sont déterminées conformément à la ligne tracée en jaune au plan ci-annexé, sauf que la maison et le terrain situés au pont du Steenebrug feront partie de la commune de Borgerhout. »
Après quelques observations faites par M. Verdussen sur l’exception mentionnée à l’art. 2, le projet est adopté par assis et levé.
On le soumet au vote par appel nominal, et il est adopté à l’unanimité des 59 membres présents.
La chambre adopte sans discussion, par appel nominal et à l’unanimité des 60 membres présents, un projet de loi qui tend à disjoindre le hameau dit Kleine-Meers de la commune de Stein, pour l’adjoindre à celle d’Elsloo (province de Limbourg).
La chambre passe à la discussion d’un projet de loi ainsi conçu :
« Art. 1er (projet du gouvernement). Les villages de Horst et Sevenum, réunis en une seule municipalité par arrêté du préfet du département de la Roer, en date du 24 brumaire an IX, formeront deux communes séparées ; les limites de leur territoire respectif sont fixées telles qu’elles existaient avant leur réunion, et conformément au plan ci-annexé. »
« Art. 2. Les registres de l’état-civil tenus pendant la réunion de Horst et de Sevenum, les journaux officiels, les mémoriaux administratifs et toutes les archives qui intéressent les deux localités collectivement, resteront déposés à la maison communale de Horst ; l’administration de cette dernière commune en donnera connaissance, soit à l’administration communale de Sevenum, soit à toute autre personne intéressée de cette dernière localité. »
« Art. 3. Les registres, archives et document qui intéressent exclusivement la commune de Sevenum, seront remis à l’administration de cette localité. »
« Art. 4. Il sera procédé, par trois commissaires à nommer par le gouvernement, à la démarcation des limites des deux communes, conformément au plan annexé à la présente loi. »
La commission propose la suppression des articles 2, 3 et 4, et un article nouveau qui formera l’art. 2 :
« En ce qui concerne les archives, la démarcation des limites et les autres suites de la séparation, on se conformera aux dispositions de la loi précitée ; toutefois chaque commune conservera la propriété et la jouissance de ses biens et revenus, comme elles en ont joui respectivement pendant la réunion. »
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je propose la suppression des 2ème, 3ème et 4ème articles du projet présenté par le gouvernement. L’adoption de la loi communale, dont les dispositions prévoient le cas où une commune serait fractionnée, rend ces articles inutiles. Ce motif me semble également devoir faire disparaître l’article nouveau proposé par la commission.
M. Simons. - Je ne crois pas inutile l’article nouveau proposé par la commission, parce qu’il ne s’agit pas ici de partager les biens après la séparation des deux villages et leur formation en communes. Depuis longtemps, les deux communes ont eu un budget séparé. Leurs biens sont séparés. Il est donc nécessaire d’en faire une mention spéciale dans la loi, de peur que les habitants de l’une ou de l’autre des communes ne vinssent réclamer, en vertu de l’article 137 de la loi communale le partage de biens qui n’ont jamais été en communauté.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - C’est précisément parce que les biens n’ont jamais été en communauté qu’il est superflu de faire mention de ce qui aura lieu après la séparation des communes. Evidemment l’art. 151 qui règle le partage des biens ne sera pas applicable dans ce cas.
- L’art. 2 proposé par la commission est mis aux voix et adopté.
M. le président. - Le vote définitif est renvoyé à lundi.
M. le président. - Nous passons à un autre projet qui est ainsi conçu :
« Nous passons à un autre projet qui est ainsi conçu :
« Les villages de Sougné, Sur-la-Heid, Playes et Sécheval, faisant partie actuellement de la commune de Sprimont, province de Liége, sont détachés de ladite commune et réunis à celle d’Aywaille, conformément aux limites indiquées au plan figuratif annexé à la présente loi. »
M. de Brouckere. - Messieurs, lorsque le législateur constituant stipula que les limites des communes ne pourraient être changées qu’en vertu d’une loi, son intention était d’empêcher que de semblables changements ne se fissent trop légèrement et que l’intérêt général ne fût sacrifié à des intérêts particuliers.
Je conçois que quand une demande en changement de limites ne donne lieu à aucune réclamation, on l’accorde sans un examen bien approfondi. Mais, quand il y a opposition, c’est un devoir pour le législateur d’examiner la demande avec une attention scrupuleuse. S’il est vrai qu’un certain nombre d’habitants des hameaux de Sougnée, Sur-la-Heid, Playes et Sécheval ont demandé qu’ils fussent séparés de la commune de Sprimont, il est également vrai qu’un nombre supérieur de ces mêmes hameaux s’élèvent contre la demande de leurs concitoyens. Il est vrai aussi que les habitants de Sprimont, ayant à leur tête le bourgmestre, se réunissent aux habitants des hameaux que j’ai cités pour s’opposer à la séparation demandée.
En présence de cette opposition, n’est-il pas de notre devoir de ne voter la séparation demandée qu’autant qu’il y ait des motifs graves pour prononcer cette séparation ?
Eh bien, j’ai examiné les pièces produites à l’appui de cette demande, et je suis encore à chercher où sont ces motifs graves. S’il en existe si peu que la même demande a été faite antérieurement, en 1827 ou 1828 si je ne me trompe, et qu’après une instruction régulière et sur l’avis des états députés de la province de Liège la demande a été repoussée.
Messieurs, j’ai déjà dit qu’un nombre supérieur d’habitants des hameaux dont on demande la séparation, s’opposaient à cette séparation.
Il est à remarquer que ce sont précisément les plus grands propriétaires de ces hameaux qui demandent que la séparation ne soit pas prononcée. Je pense qu’en pareille matière la qualité de propriétaire mérite bien d’être prise en considération.
Je suis dépositaire d’une lettre écrite par un grand propriétaire de cette commune, homme habitué à s’occuper d’affaires et qui a rempli des places importantes.
Voici un passage de cette lettre ; je ne cite pas le nom de l’auteur, mais il est connu de M. le ministre de l’intérieur : « Je reçois à l’instant votre lettre d’aujourd’hui ; votre départ précipité m’ôte la possibilité de vous remettre la lettre dont je vous avais parlé ; j’en ai beaucoup de regret, car je ne vois dans le projet de distraction d’une partie de la commune de Sprimont pour la réunir à celle d’Aywaille que beaucoup de désavantages pour les habitants, la source d’une infinité de tracasseries, peut-être même de procès longs et frayeux. Il est en vérité à regretter que des personnes qui devraient par leur position sociale ne pas se laisser aller à l’influence de petites passions locales obéissent aux intrigues de deux ou trois personnages qui ne cherchent qu tirer profit de cette oeuvre de destruction. »
Le rapport fait par la commission chargea de l’examen de cette demande lui est favorable, Mais depuis que ce rapport a été fait, j’ai eu des relations avec le bourgmestre de la commune de Sprimont qui, ce matin, m’a remis quelques lignes, en réponse à ce rapport. C’est extrêmement court : si la chambre veut me le permettre, je lui en donnerai lecture. Nous ne pouvons dans de semblables questions avoir recours qu’aux personnes qui habitent les localités, car ici combien de personnes les connaissent ?
Déjà je viens de donner lecture d’une lettre écrite par un des plus grands propriétaires de Sprimont, et voici ce que répond le bourgmestre au rapport. La pièce était adressée à la chambre, mais ce n’est qu’aujourd’hui qu’elle m’a été remise, et je ne l’ai pas déposée sur le bureau parce qu’il était impossible d’en attendre le rapport. Je demande la permission de la lire.
« A la chambre des représentants.
« Le bourgmestre soussigné de la commune de Sprimont (province et district de Liége), se trouvant à Bruxelles.
« Ayant reçu, par deux honorables membres de la chambre lecture du rapport fait par la commission sur le projet de dislocation des villages et hameaux de Sougné, Sur-la-Heid, Playes et Sécheval.
« Doit, en acquit de son devoir, signaler ce qui lui paraît inexact dans ce rapport :
« 1° Sprimont, chef-lieu se voit sur le plan d’assemblage tout au centre de la commune.
« 2° Le principal motif qui a entraîné le rejet par les états provinciaux de Liége, en 1828, était la dette constituée indivisible de sa nature, obstacle invincible qui existe encore aujourd’hui.
« Le rapport de la commission paraît trancher sur cette délicate question ; il tranche encore sur la nature et le partage des biens communaux.
« Source de procès.
« 3° Cette majorité que le rapport de la commission énonce n’existe pas ; la majorité se trouve dans les habitants et propriétaires opposants des villages qu’on veut disloquer. On peut en acquérir la preuve par les signataires des réclamations transmise, à la chambre, datées des 6 et 30 mars et 1er mai 1836 ; qui contiennent 43 signatures (ce qui se voit encore au mémoire) ; d’un autre côté, les familles de Germain, Lardinois et autres habitants opposants des villages que l’on veut disloquer, possèdent autant et même plus de propriétés que tons les signataires de la demande en dislocation.
« 4° L’avis de la députation de Liège, de février 1835, n’admet la dislocation qu’après avoir terminé la liquidation de la dette. Les fonctions administratives dont le soussigné se trouve dans ce moment-ci revêtue forcent de transmettre ces dernières observations à la chambre des représentants. »
(Moniteur belge n°136, du 15 mai 1836) M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Messieurs, contrairement à l’opinion de l’honorable préopinant, je pense que de toutes les demandes de séparation dont la chambre a été saisie, celle-ci est la plus légitime et la plus facile à justifier. Je suis d’accord avec l’honorable préopinant qu’il faut des motifs graves pour prononcer une séparation, surtout quand il s’agit d’ériger une commune nouvelle. D’abord, dans le cas présent, il ne s’agit pas d’ériger une commune nouvelle, mais seulement de distraire d’une commune d’une population de 2,778 habitants, quatre hameaux dont la population n’est que de 500 habitants environ, pour les réunir à une autre commune dont la population, avec cette adjonction, ne sera que de 2,100 habitants, c’est-à-dire de quelques centaines d’habitants de moins que l’autre, même après la séparation effectuée.
Mais cette considération de fait n’est pas celle qui doit dominer. La considération dominante est celle-ci : Importe-t-il que 500 habitants de la commune de Sprimont, qui sont copropriétaires de 1,900 à 2,000 bonniers de terrains dits la Poralée, avec les habitants d’Aywaille, soient réunis à cette commune pour participer à l’administration de ces biens communaux que gère seul le conseil communal d’Aywaille ? Je crois que c’est là un fait qui doit frapper chacun des membres de cette assemblée. Il est reconnu d’ailleurs dans le mémoire qu’ont fait distribuer les adversaires de la séparation.
Quant au rejet de cette demande, rejet qui a eu lieu en 1828, les motifs qui ont déterminé alors à prendre cette mesure n’existent plus actuellement, au moins en partie ; l’honorable rapporteur, M. Keppenne, a suffisamment expliqué ce point.
Sous le rapport de la délimitation, il ne faut que connaître la topographie de ces contrées, pour comprendre qu’il est dans l’intérêt des hameaux de Sougné, de Sur-la-Heid, de Playes et de Sécheval, d’être réunis à la commune d’Aywaille.
La population de Sur-la-Heid est de 93 habitants, celle de Playes est de 24, Sécheval 69 et Sougné 318 ; la distance du centre de Sprimont est pour le premier de 3,500 mètres, pour le second de 3,800, pour le troisième de 5,400, et pour le quatrième de 5,600, tandis que Sougné n’est distant d’Aywaille que d’une demi-lieue environ : or, c’est à Sougné qu’est l’église de ces divers hameaux, c’est là qu’ils se rendent fréquemment, et dès lors ils se trouvent tous à proximité d’Aywaille. Les difficultés de passage de la rivière ne sont qu’imaginaires ; il se fait soit par bateaux, soit sur le pont dit d’Aywaille.
Ces difficultés, si elles existaient, viendraient d’ailleurs à cesser par suite de la construction d’une route partant du Luxembourg.
Il est en outre à remarquer que quatre hameaux déjà dépendants d’Aywaille ne peuvent s’y rendre que par Sougné, et qu’ils doivent passer la rivière de même que les habitants de Sougné pour arriver à Aywaille.
L’on a allégué la montagne que les habitants de Sur-la-Heid auraient à descendre pour se rendre à Aywaille ; mais ils doivent déjà la descendre pour se rendre à l’église succursale de Sougné, et de là à Aywaille ils ont toute facilité.
Au reste pour vous prouver le grand intérêt que les habitants mêmes de Sur-la-Reid attachent à la séparation demandée, il suffit de dire qu’ils ont été jusqu’à consentir à donner hypothèque sur leurs biens personnels pour garantie de leur part dans la dette de la commune de Sprimont. Quand des paysans en viennent là, on peut croire qui ont un grand intérêt à obtenir ce qu’ils réclament. Ce seul fait me paraît décisif.
On a parlé de la dette communale et des inconvénients qu’elle ferait naître dans le cas de la séparation : eh bien, messieurs, les objections que l’on a faites relativement à ce point, sont encore sans exactitude et sans valeur.
A l’époque de la liquidation de la dette communale, cette dette a été fixée à 47,506 francs ; mais sur cette somme il a été remboursé 3,259 francs provenant de la rentrée d’une partie de créance montant à 24,000 francs. Cette commune a encore touché 3,259 francs dont l’emploi n’est pas fait. En outre, elle a vendu des biens-fonds pour 14,986 francs. En appliquant ces diverses sommes à la dette, celle-ci sera réduite à 25,972 francs. Or, les ressources que possède la commune de Sprimont surpassent cette dette : elles sont certaines, et la réalisation, en est peu éloignée ; elles consistent dans le reste de la créance à charge des états du Limbourg, montant à 17,528 francs, et dans le prix de dix bonniers de terrains dont la vente est autorisée et qu’on peut évaluer à 4,000 francs, en tout 21,528 francs lesquels sont à déduire de la dette dont il ne restera que 4,443 fr.
La commune de Sprimont possède en outre 482 francs de rentes annuelles et 197 bonniers de propriétés communales, ressources qui sont de beaucoup supérieures au restant de la dette, et cela résulte de renseignements qui ne sont pas pris au hasard. Je les puise ces renseignements dans un tableau certifié véritable par le commissaire de district le 11 avril 1836.
Si l’on considère le peu d’importance de la dette et l’importance des ressources de la commune ; si l’on considère en outre l’intérêt qu’ont les communes qui demandent à être réunies à Aywaille de prendre part à l’administration de la Poralée, il est impossible de conserver le moindre doute sur l’intérêt qu’ont ces hameaux à être joints à Aywaille.
Je n’entrerai pas dans d’autres détails ; j’attendrai qu’on fasse de nouvelles objections pour développer de nouvelles considérations à l’appui du projet.
(Moniteur belge n°134 et 135, de 13 mai 1834) M. de Brouckere. - M. le ministre de l’intérieur convient lui-même que l’on ne doit rien changer aux limites des communes sans motifs graves, alors que les changements ont pour objet, non de créer une commune nouvelle, mais de faire passer certains hameaux faisant partie d’une commune dans la circonscription d’une autre commune. Mais il ne me semble pas que le motif allégué par M. le ministre de l’intérieur à l’appui du projet de loi ait ce caractère de gravité.
Le premier motif allégué par M. le ministre de l’intérieur est celui-ci : « La commune de Sprimont comprend 2,700 habitats ; la commune d’Aywaille n’en comprend que 1,600 ; le hameau que l’on veut détacher n’en a que 500... »
Ainsi, dit M. le ministre de l’intérieur, alors même qu’on adopterait le projet de loi présenté par le gouvernement, il resterait à la commune de Sprimont un plus grand nombre d’habitants qu’à l’autre commune. Mais il est impossible d’alléguer un motif plus futile ; car la conséquence de ce système est qu’il faudrait faire un nivellement de toutes les communes, qu’il faudrait ôter aux grandes communes un certain nombre d’habitants pour le donner aux petites communes.
Tous les autres arguments allégués par M. le ministre de l’intérieur concernent les localités. Eh bien, toutes les allégations du ministre sont contredites par les signataires du mémoire qui s’appose au projet. Ainsi, par exemple, M. le ministre de l’intérieur a parlé de quelques bois communaux qui appartiennent à des habitants d’Aywaille et d’une partie de la commune de Sprimont. Cette objection est rencontrée par les opposants, et pour ne pas abuser de vos moments, je vous prierai de lire les pages 15, 16 et 17 de ce mémoire. Vous trouverez la réfutation de ce qu’a dit M. le ministre de l’intérieur.
J’avais parlé d’un des principaux habitants de Sprimont, et je pourrais même dire du principal habitant de Sprimont, et de l’opposition qu’il a formée à la dislocation dont il s’agit. J’ai lu une phrase de sa lettre, qui est, je crois, assez énergique. Que dit à cela M. le ministre de l’intérieur ? Que ce propriétaire s’est opposé à la dislocation en 1828 et que c’est pour cela qu’il s’y oppose en 1836. Cela est vrai, les motifs qui existent en 1836 sont les mêmes motifs qui existaient en 1828. Ces motifs ont été trouvés bons en 1828. Pourquoi ne les trouverait-on pas également bons en 1836 ?
Enfin, M. le ministre de l’intérieur s’est établi l’organe des habitants de la commune de Sprimont. Mais j’ai les mêmes droits à m’établir l’organe de ceux qui s’opposent à la dislocation, puisqu’il y a, pour s’opposer à cette dislocation, plus de signatures que pour la demander.
Par ces motifs, je persiste à m’opposer au projet,
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je ne m’oppose nullement à ce que l’honorable préopinant défende les intérêts qu’on est venu l’engager à défendre. Cela n’empêche pas que la réponse que j’y ai faite ne demeure entière.
D’abord, l’honorable préopinant a écarté de sa réfutation les raisons principales que j’avais fait valoir ; il a assez légèrement effleuré la question de l’intérêt qu’ont les habitants des quatre villages à être réunis à la commune de Sprimont pour l’administration de leurs biens communaux. Les raisons que j’ai fait valoir à cet égard restent entières.
Je le demande, est-il vrai que les 500 habitants co-propriétaires de 2,000 bonniers de terrains communaux administrés par le conseil communal d’Aywaille ont intérêt à faire partie de cette commune ? Certes, on ne le niera pas.
Chacun doit reconnaître qu’il y a un intérêt puisant et présent à ce que ces 500 habitants ne fassent partie de la commune d’Aywaille pour contribuer à la nomination de ceux qui auront à administrer leurs biens. Je crois que c’est là une vérité tout élémentaire.
Maintenant on dit que 125 habitants de Florzé, quoique poralistes, ne demandent pas leur réunion à Aywaille ; mais ils peuvent avoir, en raison de leur proximité de Sprimont, intérêt à rester réunis à cette commune.
Quant à la prétendue difficulté pour les habitants dont il s’agit de se rendre à la commune d’Aywaille, on n’a rien réfuté de ce que j’ai dit.
On s’est arrêté de nouveau à la difficulté de la séparation des dettes. Mais cette difficulté ne doit pas plus vous arrêter dans cette affaire qu’elle ne vous a arrêtés au sujet de la commune de Celles-Molembaix et des autres communes dont vous avez prononcé la séparation.
Le texte de la loi communale est précis à cet égard. L’article 151 suppose que la séparation soit prononcée en premier lieu ; ce n’est qu’après la séparation prononcée que l’on s’occupe du partage des biens et des dettes.
Je vais avoir l’honneur de donner à la chambre, comme je l’ai fait pour le projet relatif à Celles et Molembaix, de l’avis de la députation des états. L’assemblée verra que c’est par erreur que l’honorable orateur a dit que la députation voulait la liquidation des dettes avant la séparation. Il est vrai que d’abord elle s’était prononcée dans ce sens ; mais elle a reconnu depuis qu’il n’était pas conforme aux règles d’exiger la liquidation préalable.
(Note du webmaster : le ministre de l’intérieur donne ensuite lecture d’une première délibération des états provinciaux. Compte tenu de son intérêt limité, le texte de cette délibération n’est pas repris dans la présente version numérisée. Le ministre poursuit comme suit :)
J’ai déjà fait connaître à l’assemblée que la liquidation des dettes n’aurait lieu qu’après la séparation des communes. Dans le cas dont il s’agit, cette liquidation se fera sans difficultés attendu que, comme j’ai déjà eu l’honneur de le faire savoir à la chambre, plusieurs habitants de Sougné ont offert de faire prendre une hypothèque sur leurs propriétés personnelles pour garantir cette liquidation. Ce seul fait prouve l’intérêt qu’ils portent à la séparation demandée. Un pareil exemple se rencontre rarement.
Voici la deuxième délibération de la députation des états :
(Note du webmaster : le texte de cette deuxième délibération n’est pas non plus repris dans la présente version numérisée. Le ministre poursuit comme suit :)
M. Dumortier. - Je ne conçois pas que l’on s’oppose à la dislocation de la commune de Sprimont. Cette commune se compose de 26 villages ; quand elle en perdrait 3, il lui en resterait 23 encore.
La commune de Sougné se trouve propriétaire de biens dont l’administration de la commune d’Aywaille a la gestion. De plus, la commune de Sprimont dont elle dépend est située dans les montagnes, tandis que la commune d’Aywaille est dans une plaine sur les bords d’une rivière. Tout milite en faveur de la demande des habitants de Sougné.
Le bon sens n’indique-t-il pas qu’il est nécessaire pour les habitants de Sougné d’avoir des mandataires dans le conseil communal d’Aywaille appelés à gérer leurs biens ? Ce qui n’arrivera jamais s’ils continuent à faire partie de la commune de Sprimont, tandis que, d’après la loi communale, ils auront droit comme fraction de commune à être représentés dans le conseil d’Aywaille et prendront part de plus aux élections de tous les conseillers,
On nous dit que le principal propriétaire de Sougné s’est opposé en 1828 à la séparation et que ses réclamations ont été écoutées. Ce n’est pas une raison pour moi. J’aimerais mieux l’opinion des habitants pauvres, du plus grand nombre enfin.
Les arguments d’un grand propriétaire ne doivent pas peser beaucoup dans la balance quand il s’agit de la distraction de hameaux qu’il n’habite pas. S’il habitait un des hameaux dont on demande la réunion à une autre commune, je comprendrais que son opposition à ce changement fût d’un grand poids ; mais dès qu’il ne les habite pas, son dire n’a pas plus d’intérêt à mes yeux que celui d’un grand propriétaire de Bruxelles. Les habitants de ces hameaux qui demandent la séparation, y ont, au contraire, un intérêt direct ; ils sont intéressés à prendre part à la nomination des magistrats qui ont la gestion des propriétés de la Poralée.
Mais, a-t-on dit, 125 habitants de Florzé, ayant aussi des droits sur les propriétés de la Poralée, s’opposent à la séparation. Je n’examine pas les motifs que peuvent avoir les habitants de ce hameau à ne pas vouloir se séparer de Sprimont car déjà le gouvernement a fait droit à leur réclamation, puisqu’il n’est pas question dans le projet de réunir Florzé à Aywaille. Si on faisait cette proposition, je concevrais qu’on vînt y opposer leurs objections, mais on les laisse à Sprimont. Leur dire ne peut pas être pris en considération.
Je ne vois donc aucune objection à la séparation proposée, et à moins qu’on ne me montre des choses que je n’ai pas aperçues, je voterai pour le projet.
M. de Brouckere. - Je prie la chambre de ne pas perdre de vue que si les hameaux de Sougné, Sur-la-Heid, Playes et Sécheval sont aussi rapprochés d’Aywaille que de Sprimont, l’Amblève les sépare de la commune d’Aywaille. On dit qu’il y avait un pont ; mais ce pont a été plusieurs fois emporté, et alors il n’y a plus aucun moyen de communication avec Aywaille. On m’assure même que ce ruisseau de l’Amblève est sujet à des crues si subites que c’est un proverbe dans le pays qu’il n’y a pas de rivière si forte que l’Amblève.
L’habitant dont j’ai cité la lettre, n’a aucun intérêt, dit M. Dumortier, parce qu’il habite Sprimont.
Je me servirai de l’argument de M. Dumortier pour lui répondre. Je lui dirai : C’est parce que l’auteur de cette lettre est désintéressé que j’insiste sur ses observations, et que j’y ai plus de foi. Vous avez entendu, messieurs, combien son langage est formel. Son opinion mérite d’être prise en considération ; car, outre qu’il est désintéressé, il connaît les localités mieux que qui que ce soit.
M. Dumortier. - Je n’ai pas dit que l’auteur de la lettre citée par l’honorable préopinant fût désintéressé dans la question. Je trouve au contraire qu’il y a un intérêt très direct, il est intéressé à s’opposer à la dislocation de la commune de Sprimont.
Quant au pont sur l’Amblève qu’on dit avoir été emporté plusieurs fois, je dirai que ce pont est sur la grande route de Liége à Bastogne, et s’il était détruit, non seulement la communication n’existerait plus entre les hameaux dont il s’agit et Aywaille, mais entre Liége et Bastogne.
Je pense que quand le gouvernement fait un pont sur une rivière que traverse une grande route, il le fait assez solide pour n’être pas emporté par un torrent. (Aux voix ! aux voix !)
- La clôture est mise aux voix et prononcée.
L’article unique est mis aux voix par appel nominal.
55 membres prennent part au vote ;
2 s’abstiennent ;
44 répondent oui ;
9 répondent non.
En conséquence, le projet de loi est adopté. Il sera transmis au sénat.
M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités, aux termes du règlement, à énoncer les motifs de leur abstention.
M. Desmanet de Biesme. - Je me suis abstenu parce que j’ai vu, d’après le mémoire qui nous a été remis, que précédemment cette même demande avait été repoussée par les états de la province de Liège. Ensuite j’avais reçu différentes communications de grands propriétaires habitant cette commune. Ils m’ont donné contre la séparation des raisons qui m’ont paru bonnes ; et je crois ces personnes incapables d’en imposer. Cependant l’affaire ne m’a pas paru assez bien éclaircie ; car les habitants qui demandent la séparation produisent aussi des raisons qui paraissent bonnes. Dans cet état de choses, j’ai craint, si je me prononçais, de commettre une injustice.
M. Verdussen. - Les arguments produits de part et d’autre n’ayant pas porté dans mon esprit une conviction suffisante pour me prononcer en connaissance de cause sur cette question extrêmement obscure, je me suis abstenu. (A demain ! à demain !)
- La séance est levée à quatre heures et demie.