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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 22 août 1835

(Moniteur belge n°236, du 23 août 1835 et Moniteur belge n°237, du 24 août 1835)

(Moniteur belge n°236, du 23 août 1835)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Verdussen procède à l’appel nominal à une heure.

M. Schaetzen lit le procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Verdussen donne communication des pièces suivantes adressées à la chambre.

« Le sieur Van Hoobrouck de Mooreghem, possesseur de créances exigibles à charge de l’Etat, pour une somme de 14,000 florins, demande que la chambre en ordonne la liquidation. »

« Le sieur Jean-François Delhaise, ex-capitaine pensionné de la caisse de retraite, ayant obtenu depuis une nouvelle pension comme capitaine, demande à jouir de ces deux pensions. »

« Le sieur L. Charon, entrepreneur à Mons, réclame de nouveau l’intervention de la chambre pour obtenir une indemnité pour les pertes éprouvées par lui dans une entreprise de fourrages. »

- Ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions.

Projet de loi sur l'instruction publique

Discussion des articles

Titre III. Des grades, des jurys d’examen et des droits qui sont attachés aux grades

Chapitre premier. Des grades et des jurys d’examen
Article 52

M. le président. - A la dernière séance, la chambre a ajourné l’article 52 pour que M. le ministre puisse présenter une nouvelle rédaction.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je ne sais si mon collègue le ministre de l’intérieur s’est occupé de cette rédaction ; pour ma part, je l’ai perdue de vue ; je prie la chambre de passer à d’autres articles, jusqu’à ce que mon collègue arrive.

Articles 54 à 57

M. le président. - Nous passerons à l’article 54.

« Art. 54. L’examen oral durera deux heures pour un seul récipiendaire, et trois heures s’il y en a deux ou trois. »

- Adopté.


« Art. 55. Tout examen oral est public ; il sera annoncé trois jours au moins d’avance dans le Moniteur. »

- Adopté.


« Art. 56. Après chaque examen oral, le jury délibère sur l’admission et le rang des récipiendaires. Il est dressé procès-verbal du résultat de la délibération. Ce procès-verbal mentionne le mérite de l’examen écrit et de l’examen oral ; il en est donné immédiatement lecture aux récipiendaires et au public. »

- Adopté.


« Art. 57. Les certificats d’examen, les diplômes de candidat ou de docteur, sont délivrés au nom du Roi, suivant la formule qui sera prescrite par le gouvernement.

« Ils seront signés, ainsi que les procès-verbaux des séances, par tous les membres du jury. »

- Adopté.

Article 52

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je demande que dans l’article 52 on rétablisse ces expressions qui terminaient l’ancien article 89 :

« Et contiendront la mention que la réception a eu lieu d’une manière satisfaisante, avec distinction, avec grande distinction, ou avec la plus grande distinction. »

M. Dechamps, rapporteur. - La section centrale a suivi à cet égard l’opinion de la première commission. Je prendrai la liberté de lire à la chambre les motifs que cette commission a donnés à l’appui de cette opinion.

« Du reste, les diplômes ne doivent pas mentionner les rangs, parce qu’il serait trop humiliant pour ceux qui se trouveraient classés dans les derniers rangs de ne pouvoir pendant toute leur vie produire leur titre aux grades sans montrer en même temps la preuve de leur peu de succès dans leurs examens. »

Vous savez que les succès obtenus dans les établissements d’instruction ne forment pas toujours la règle d’après laquelle il faut juger le mérite des individus dans tout le cours de leur carrière. Le talent chez quelques-uns se développe quelquefois très tard ; et je pourrais vous citer plusieurs célébrités contemporaines qui n’ont obtenu dans leurs études que des succès fort médiocres.

Je vous ferai remarquer ensuite que le procès-verbal mentionne le mérite de l’examen écrit et de l’examen oral. Celui donc qui voudrait prouver qu’il a passé ses examens d’une manière distinguée, celui-là le pourrait toujours, en recourant au procès-verbal qui a été rédigé.

Ainsi, messieurs, je pense que le procès-verbal mentionnant la manière dont les examens ont été passés, cela suffit pour le but qu’on se propose, et il y aurait de graves inconvénients à mettre cette mention dans le diplôme, car un homme dont le talent se serait développé plus tard devrait enfouir son diplôme et ne pourrait jamais le produire. C’est là un inconvénient assez grave pour faire repousser une disposition qui ne doit amener aucun résultat favorable.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je suis d’accord sur un point avec l’honorable rapporteur de la section centrale, que le procès-verbal mentionnera le rang des récipiendaires ; cela est indispensable, car, d’après l’article 35 que vous avez adopté sur la proposition des jurys d’examen, des bourses pourront être accordées à des Belges qui ont obtenu le grade de docteur avec la plus grande distinction, Je vous prie de faire attention à ces derniers mots.

Mais la question est de savoir si ces expressions « d’une manière avec grande distinction, avec distinction satisfaisante, ou avec la plus grande distinction, » seront reproduites dans le diplôme. L’article dont je viens de donner lecture, ne fait que consacrer ce qui est établi actuellement dans les universités, et l’expérience n’a pas fait trouver le moindre inconvénient à ce qui existe. Au contraire, on a trouvé que c’était un grand motif d’émulation pour les jeunes gens ; car on attache la plus grande importance à avoir un diplôme portant qu’on a passé son examen avec distinction, avec grande distinction ou avec la plus grande distinction.

Quant aux objections qu’a fait valoir l’honorable préopinant, voici ce que j’aurai l’honneur de répondre. Je sais que de très grands hommes ont été de médiocres élèves, mais croyez-vous que ces hommes n’en conviennent pas volontiers ? Ils savent que pendant leurs études ils ne se sont pas donné beaucoup de peine et ils en conviennent. Il en résulte qu’ils doivent à leur propre génie et à leurs efforts la place qu’ils occupent. Ils n’ont aucune raison pour craindre de produire leur diplôme, car s’il ne mentionne pas que l’examen a été passé avec distinction, il ne contient rien d’humiliant.

D’ailleurs ce n’est que pour autant qu’on veuille se prévaloir d’avoir passé son examen avec distinction, avec grande distinction ou avec la plus grande distinction, qu’on montre son diplôme.

Il n’est donc pas vrai de dire que la disposition que je propose de rétablir forcera des élèves à en faire leur diplôme.

Quand on demande à remplir certaines fonctions, on présente son diplôme pour se prévaloir, s’il y a lieu, de sa supériorité d’études ; et en cas de mérite douteux, c’est toujours une direction pour l’administration supérieure. Par exemple, on voit un jeune homme se présenter dans un ministère pour y être attaché comme surnuméraire : pour prouver qu’il a fait de bonnes études, il présente son diplôme. Jusque-là il ne peut pas invoquer des succès dans une carrière quelconque, tout ce qu’il peut invoquer, ce sont les succès qu’il a obtenus dans ses études. Il sera alors rendu justice à qui de droit. Celui qui avec des moyens aura été paresseux ne pourra pas se prévaloir de la supériorité de ses études, mais il ne verra pas avec peine qu’un de ses condisciples qui a mieux travaillé, puisse se prévaloir d’un titre qu’il a acquis par son travail.

Cette disposition doit aussi être considérée sous le rapport de l’intérêt des études ; il faut voir si c’est un motif d’émulation pour la jeunesse. Sous ce rapport, je crois qu’il n’y a pas de doute. Cependant, je dirai que je n’attache pas une grande importance à l’amendement que je propose.

M. Jullien. - M. le ministre de la justice m’a laisse peu de chose à dire sur cette question.

Vous savez que c’est l’usage de la plupart des universités de délivrer des diplômes avec la mention cum laude, cum magna laude, cum maxima laude. C’est ce qu’on vous propose d’insérer en français.

De tout temps on a considéré cela comme un grand motif d’émulation. L’élève ne travaille pas seulement pour obtenir un diplôme, mais pour l’obtenir avec distinction. Il est donc très bon, pour conserver l’émulation, de maintenir cette ancienne formule.

Si, comme a paru le croire l’honorable rapporteur, on insérait quelque chose d’humiliant dans le diplôme de celui qui n’aurait pas passé son examen avec distinction, je serais le premier à penser comme lui. Mais la formule consiste à dire si la réception a eu lieu d’une manière satisfaisante, avec distinction, avec grande distinction ou avec la plus grande distinction. Vous voyez qu’il y a une simple progression de mérite et rien d’humiliant.

Si un élève reçoit un diplôme mentionnant seulement qu’il a passé son examen d’une manière satisfaisante, tant pis pour lui s’il n’a pas travaillé assez pour le passer avec la plus grande distinction. Mais croyez-vous que cela fasse beaucoup dans le cours de sa vie ? Non, certainement ; car, quand pour une affaire vous voulez consulter un avocat, avant de lui donner votre confiance, vous ne lui faites pas tirer son diplôme de sa poche pour savoir s’il a été reçu d’une manière satisfaisante ou avec la plus grande distinction.

Quelle que soit la mention, cela n’ôte rien au résultat que l’élève doit attendre de son mandat.

J’admettrai donc la proposition de M. le ministre.

M. Trentesaux. - Si les diplômes devaient être délivrés par les universités où les élèves ont fait leurs études, je ne verrais aucun inconvénient à adopter la proposition de M. le ministre, mais, comme vous le savez, les examens sont passés devant des jurys qui ne voient les sujets qu’une seule fois. Il me paraît qu’il serait dangereux de livrer au hasard d’un seul examen la fixation du degré de force d’un élève. Cela pouvait être bon dans les universités, parce qu’elles connaissaient leurs élèves et leurs différents mérites. Mais un seul examen devant des personnes dont on n’est pas connu, pour prononcer sur le degré de mérite d’un élève, vous conviendrez, comme je l’ai dit en commençant, que c’est livrer beaucoup au hasard.

J’aurais de la peine à me résoudre à adopter l’amendement de M. le ministre par les considérations que je viens de donner.

M. Dubus. - Je me prononcerai dans le même sens que l’honorable préopinant contre la proposition de M. le ministre. Il s’agit d’un brevet de capacité à donner pour l’exercice de certaines professions. Toute la mission du jury est d’examiner si celui qui se présente devant lui réunit les connaissances exigées par la loi pour remplir telle ou telle profession, mais non s’il est plus capable ou le plus capable. Le jury n’a pas mission d’assigner un rang quelconque aux récipiendaires, mais uniquement de prononcer s’il est capable ou non.

Toute la mission du jury se borne là.

C’est à tort que M. le ministre a dit que ce qu’il propose s’était toujours pratiqué ; car, sous le gouvernement français, les diplômes d’avocat ou de médecin ne faisaient aucune distinction ; c’étaient de simples brevets de capacité. Il est vrai que les professeurs, dans la délibération qu’ils prenaient, faisaient mention du plus ou moins de capacité du candidat ; mais dans le diplôme, rien de semblable n’était inséré. Sous le gouvernement de Guillaume même, avant 1825, il n’avait jamais été question de cet usage.

C’est, dit-on, un motif d’émulation. Je crois que sous le gouvernement français il n’y avait pas moins d’émulation, et que les études n’étaient pas moins bien suivies que sous le dernier gouvernement.

Je ne crois pas qu’au moyen de cette mesure, vous arriviez au but que vous vous proposez. Un des préopinants qui l’a appuyée a pris soin de se combattre lui-même, et de prouver qu’en définitive, cette mention était inutile et ne revenait à rien, car il a dit : Quand quelqu’un veut consulter un avocat sur une contestation, avant de lui donner sa confiance, il ne va pas lui demander de tirer de sa poche son diplôme, afin de savoir de quelle manière il a passé ses examens. Ce n’est pas comme cela qu’il le juge, c’est d’après ses succès de tous les jours, d’après la réputation qu’il a acquise.

Ce diplôme, à qui est-il montré en définitive ? Au tribunal, au moment où l’avocat se fait recevoir ; ensuite il ne sort plus du portefeuille de celui qui l’a obtenu. Après cela, je vous demande quelle est l’utilité de faire insérer dans le diplôme si l’élève a été reçu avec plus ou moins de distinction, alors qu’il est dressé procès-verbal de l’examen et que ce procès-verbal fera mention de la manière dont il a été passé et que chacun pourra en obtenir un extrait. Par ces considérations, je voterai contre la proposition.

M. Jullien. - L’orateur qui a parlé après moi a dit que s’il s’agissait encore des anciennes universités, qui délivraient des diplômes à leurs élèves, il ne s’opposerait pas à la proposition du ministre.

Je déclare que ce serait pour moi un motif pour faire le contraire, parce que si les anciennes universités conféraient les grades, elles auraient intérêt à favoriser leurs élèves, et leur donneraient des diplômes attestant qu’ils ont été reçus avec grande ou la plus grande distinction, pour faire voir à d’autres universités que ceux qui suivent ses cours obtiennent de grands succès. Ce serait, à mon avis, un motif déterminant pour supprimer la formule. Mais quand vous avez institué un jury et que vous l’avez composé de manière à ne plus laisser subsister de crainte pareille, il n’y a pas de raison pour ne pas adopter la formule présentée par M. le ministre de la justice.

Je n’ai pas été touché de l’objection faite par l’honorable M. Dubus, qui vous a dit que le jury n’était pas là pour déterminer le degré de capacité du récipiendaire, la manière plus ou moins distinguée dont il a passe son examen, mais pour examiner s’il est capable ou non.

S’il s’agissait de dire à un élève : Vous êtes capable, très capable, infiniment capable, je serais de son avis, mais la formule dont il s’agit ne veut pas dire cela, elle veut dire : Vous avez obtenu votre diplôme avec distinction, avec une grande distinction ou avec la plus grande distinction : cette mention ne porte que sur le mérité déployé par l’élève au moment de l’examen.

L’honorable membre a dit que j’avais démontré que cela ne servirait à rien et que j’avais détruit mes arguments, en disant qu’avant d’accorder sa confiance à un avocat, on ne lui demanderait pas son diplôme pour voir la mention qu’il renferme. Je lui répondrai que je n’avais pas fait de cette mention une question de profit, mais d’émulation. Si cela ne sert pas pour gagner de l’argent, cela sert à l’élève pour montrer à sa famille qu’il a passé ses examens avec distinction ; cela lui sert à montrer qu’il n’a pas perdu son temps et qu’il a eu des succès universitaires, chose qu’on n’oublie jamais et qui laisse un souvenir agréable dans l’âme de celui qui les a obtenus et de sa famille.

C’est sous ce point de vue que j’ai appuyé la proposition de M. le ministre.

Elle peut faire du bien et elle ne peut pas faire du mal.

- L’addition proposée par M. le ministre de la justice est adoptée.

L’ensemble de l’article ainsi modifié est également adopté.

Article 58

« Art. 58. Chaque examinateur recevra vingt-cinq francs par jour de présence aux examens ; les membres du jury qui ne résident pas dans la capitale recevront en outre dix francs par jour de séjour et de voyage. »

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - J’appellerai l’attention de la chambre sur l’observation suivante :

Les fonctions du jury ne seront jamais fort agréables. Elles ne seront jamais lucratives de quelque manière qu’on paie le jury. Une chose qu’il faut prévenir, c est que les membres ne donnent leur démission.

Il faut donc pour le moins les dédommager des pertes qu’ils pourraient faire. Il faudra par exemple que des praticiens siègent dans le jury de médecine. C’est de toute nécessité. Eh bien, si vous donnez à un médecin cinq francs par heure, sera-ce trop ?

Remarquez que les membres des jurys devront siéger quatre heures par jour dans une salle pour se livrer à des fonctions extrêmement fatigantes et fâcheuses. Car, chaque fois qu’un mauvais élève ne sera pas admis, il en attribuera les motifs à la partialité des examinateurs. Les réclamations retentiront jusque dans les journaux, et les jurés se trouveront ainsi en butte à des attaques auxquelles il leur sera impossible de répondre.

Je suppose qu’il y ait dans la matinée une séance de quatre heures et le soir une autre séance de quatre heures. Croyez-vous qu’un médecin ou qu’un avocat distingué veuille siéger huit heures par jour pour recevoir une somme de 20 francs ?

Je ne parle encore que des jurés qui résideront dans la capitale. Mais comme il est à désirer que l’on appelle a faire partie de ces jurys les notabilités qui habitent les provinces, croyez-vous qu’ils consentent à se déplacer pour une indemnité aussi minime de la perte de leur temps. Le médecin qui habite Bruxelles pourra voir ses malades, l’avocat aller au palais. Mais le médecin de la province devra abandonner sa clientèle pour huit jours, il abandonnera sa famille. Ce n’est pas dans l’intérêt des jurés, mais bien dans l’intérêt de l’institution elle-même que je parle. Il serait extrêmement fâcheux que, pour un motif pareil, les jurés fussent disposés à donner leur démission. J’appellerai l’attention de la chambre sur ces deux points.

Faut-il fixer une même somme par séance, n’importe le nombre d’heures dont la séance se composera ? Cela ne me paraît pas naturel. Sera-ce par heure de séance ? Cette dernière disposition me paraît la seule admissible. Je suppose que l’on paie 5 francs par heure de séance. Si la séance dure quatre heures, le juré recevra 20 francs ; s’il y a deux séances de quatre heures en un jour, il aura droit à un jeton de 40 francs. Je ne crois pas que cette somme soit trop élevée.

Il y a une différence entre la proposition de la section centrale et celle du gouvernement.

Dans le projet du gouvernement, il est écrit que le juré recevrait 25 fr. par séance. Il y avait quelque chose à critiquer à cette proposition. Je conviens que cette somme serait trop élevée si la séance ne durait que deux heures. Mais pourquoi, dans le projet de la section centrale, fixer la rétribution par jour ? Il peut y avoir deux séances de quatre heures chacune par jour, et la somme arrêtée par la section centrale est trop faible dans ce cas. Il me semble qu’il faut en revenir au principe de payer chacun suivant la durée de son travail, et de fixer par heure de séance une somme quelconque.

Avant de présenter un amendement, j’attendrai pour voir s’il y aura quelque espoir de le faire accueillir par la chambre.

M. Lejeune. - Je pense comme M. le ministre de la justice que si l’on admettait la proposition de la section centrale, les jurés seraient trop peu rétribués. Si jamais le choix doit être libre et doit pouvoir se faire dans le plus grand cercle possible, ce doit être dans le cas de l’article 58.

L’on propose de déclarer que chaque examinateur recevra 25 fr. par jour de présence aux examens. Cette somme pourrait être considérée comme assez élevée, sans cependant l’être trop, pour ceux qui résideront dans la capitale, parce qu’il leur restera toujours quelques moments dans la journée pour vaquer à leurs affaires. Mais l’on propose en mène temps d’accorder dix francs d’indemnité de séjour et de voyage par jour aux examinateurs des provinces. Cette indemnité me paraît trop faible.

Un docteur en médecine, un avocat ou un savant d’un talent un peu distingué, qui a des occupations dans la ville qu’il habite, ne voudra pas accepter les fonctions de juré pour une indemnité de déplacement aussi insuffisante. Il n’abandonnera pas sa clientèle et sa famille pendant plusieurs jours pour venir dans la capitale. Il préférera rester dans la ville où sa clientèle lui rapportera bien davantage. Il vaudrait mieux, à mon avis, accorder aux membres choisis dans les provinces 25 fr. d’indemnité par jour de séjour et de voyage.

Il est à remarquer que ces frais seront compensés par les droits d’examen exigés des élèves. Il y a ceci à considérer qu’il y aura 42 jurés à nommer. Pour éviter des non-acceptations, il faut accorder des indemnités suffisantes. Il faut que l’on puisse choisir dans le cercle le plus large possible. Aux 42 jurés effectifs, il faut ajouter 42 suppléants, ce qui fera en tout 84 membres à choisir.

J’avais rédigé un amendement, par lequel j’élevais à 25 fr. l’indemnité par jour de séjour et de voyage. Je me rallierai à l’amendement de M. le ministre de la justice en ce qui concerne l’indemnité par heure de présence. Je me contenterai de déposer un amendement à l’article 58, ainsi conçu :

« … recevront en outre 25 fr. par jour pour indemnité de séjour et de voyage. »

M. le président. - L’amendement de M. le ministre de la justice est ainsi conçu :

« Il sera payé à chaque juré cinq francs par heure de séance. »

M. A. Rodenbach. - Je me prononcerai pour l’amendement de M. le ministre, parce qu’il engagera les jurés à prolonger leurs séances, et par conséquent à siéger moins de jours. Mais je ne puis admettre l’amendement de l’honorable M. Lejeune d’où il résulterait qu’un juré étranger pourrait recevoir 55 fr. par jour, à savoir : 30 fr. pour six heures de séance, et 25 comme indemnité de séjour.

M. Lejeune. - Je ferai remarquer que les jurés étrangers seront dans une position plus désavantageuse que ceux qui habiteront la capitale, attendu qu’ils seront obligés d’abandonner momentanément leur clientèle et leur famille. Il est à craindre que si on ne donne que 10 francs par jour de séjour et comme indemnité de voyage, l’on ne trouve guère de jurés qui acceptent. L’on serait fort embarrassé si, sur 24 membres nommés, la moitié refusait.

M. Dubus. - Il est nécessaire que l’article 58 soit modifié. Je trouve un avantage sous certains rapports au paiement des jurés par heure de séance. Mais il me semble que l’on ne peut aller jusqu’à exiger des examinateurs qu’ils fassent connaître le nombre d’heures qu’ils auront siégé.

Je ferai en outre observer qu’il y aura des séances du jury qui ne seront pas consacrées aux examens des élèves. Il serait difficile de déterminer dans ce cas le nombre d’heures employées par le jury. L’indemnité payée par jour me paraît donc préférable.

L’honorable M. Rodenbach admet l’amendement de M. le ministre, en supposant que les jurés recevront terme moyen 30 fr. par jour. Qui nous empêche d’admettre ce chiffre ? Je crois aussi que l’on doit faire droit jusqu’à un certain point à l’observation de l’honorable M. Lejeune. La somme de 10 francs comme indemnité de séjour et de voyage n’est pas assez élevée. Mais elle pourrait n’être élevée qu’à 15 ou à 20 fr. Il me semble que de cette manière l’on ferait suffisamment la part de chacun.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - J’ai entendu que les jurés seraient payés par heure d’examen. Les travaux préparatoires des jurys ne leur seront pas payés.

L’honorable préopinant trouve une difficulté dans l’impossibilité qu’il y a d’exiger des jurés de constater le nombre d’heures qu’ils auront siégé. Le procès-verbal de l’examen en fera foi. Ainsi la difficulté n’est pas réelle. Je trouve ma proposition plus juste que celle de l’honorable préopinant qui voudrait donner 30 fr. par jour de séance à chaque jury. Ce serait trop si les séances n’étaient que de 2 heures, et pas assez s’il y en avait deux de 4 heures.

M. Dechamps, rapporteur. - Je me rallierai volontiers à la proposition faite par plusieurs honorables préopinants d’augmenter la rétribution des examinateurs, surtout de ceux qui ne résident pas dans la capitale. La somme de 10 francs fixée par eux comme indemnité de séjour ne me paraît pas en effet assez élevée.

Je me prononcerai pour l’amendement de l’honorable M. Dubus plutôt que pour celui de M. le ministre de la justice.

Il pourrait en effet arriver dans le système de ce dernier que le jury n’examinât qu’un seul récipiendaire à la fois. Je sais bien que de pareils soupçons ne doivent pas atteindre les membres du jury qui, par leur position, ne feront probablement pas de pareils calculs. Cependant, il faut prévoir cette possibilité, et la fixation d’une somme par séance les met à l’abri d’un tel reproche. Puis il y a quelque chose de moins noble à rétribuer des jurés par heure que par séance. Je voterai donc en faveur de l’amendement de M. Dubus.

M. F. de Mérode. - Je ferai observer qu’il ne faut pas considérer dans les lois ce qui est noble et ce qui n’est pas noble. Il s’agit avant tout dans la loi d’arriver au résultat le plus convenable.

Le paiement des jurés par heure de séance est ce qui se pratique en beaucoup de circonstances. Si ce mode a des inconvénients réels, nous ferons bien de l’abandonner. Mais il faut que cet inconvénient existe autre part que dans les mots. Ceux de noble et de pas noble n’ont aucun effet sur moi.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - L’objection que l’honorable M. Dechamps a faite se fonde sur le passage de l’article 54 par lequel il est dit que l’examen durera deux heures s’il y a un récipiendaire à interroger, et trois s’il y en a deux ou plusieurs.

Le jury qui serait payé par heure de séance, pourrait, dit l’honorable rapporteur, n’interroger qu’un récipiendaire à la fois. Je répondrai qu’il ne peut pas dépendre du jury de n’interroger qu’un seul élève à la fois. Le nombre des élèves à interroger se déterminera d’après celui des élèves inscrits, en vertu de règlements qui seront portés sur la matière. Il faudra que le jury se conforme à ce règlement.

M. Jullien. - Fixez les rétributions et les indemnités comme bon vous semblera. Il ne faut pas croire qu’elles engageront les notabilités étrangères à la capitale à se déplacer. Ce qu’un médecin ou un avocat en réputation abandonnera pour se rendre où vous l’aurez appelé, sera toujours beaucoup plus considérable que ce que vous lui donneriez.

J’appuierai la proposition qui comporte le plus de dignité. Le paiement par heure me semble très mesquin. On peut rétribuer ainsi les experts, les personnes qui vivent de leur travail. Mais cela est peu convenable quand il s’agit d’indemniser un juré à qui ce titre suppose une position assez élevée. Je désirerais donc que l’indemnité fût fixée par jour.

Sous ce rapport, je donnerai la préférence à l’amendement de l’honorable M. Dubus. Il me semble qu’une indemnité de 30 fr. par jour de séance et une autre de 20 par jour de séjour seraient suffisantes. Le juré étranger à la capitale recevrait ainsi 50 francs par jour.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je ne sais pas en quoi il y aurait plus de dignité à être payé par jour que par heure. Mais il me semble, messieurs, que si les examinateurs pouvaient avoir intérêt à prolonger les examens, cela pourrait être préjudiciable aux élèves. Ainsi, au lieu de consacrer 10 heures par jour aux examens, on n’y affectait que 5 heures, il faudrait le double de temps. C’est ce qui pourrait arriver si l’indemnité était payée par jour au lieu de l’être par heure d’examen. Un règlement fixera l’ordre dans lequel les élèves seront examinés.

Quand ils auront répondu à l’examen par écrit, il faudra que le tour de leur examen oral vienne, et c’est selon le plus ou moins d’élèves à interroger que le jury examinera un seul élève ou plusieurs à la fois. Il n’y a donc pas d’abus à craindre dans le cas de paiement de l’indemnité par heure.

M. Lejeune déclare se rallier à l’amendement de M. Dubus.


- Les amendements de M. Dubus et de M. le ministre de la justice sont mis aux voix et adoptés.

En conséquence, l’article 58 se trouve ainsi conçu :

« Chaque examinateur recevra cinq francs par heure de présence aux examens ; les membres du jury qui ne résident pas dans la capitale recevront en outre vingt francs par jour de séjour et de voyage.

Article 52

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - J’ai rédige l’article 52 qui avait donné lieu à quelques difficultés dans la séance d’hier. Voici comme serait cette rédaction :

« L’examen par écrit précédera l’examen oral ; il aura lieu à la fois entre tous les récipiendaires qui doivent être examinés sur les mêmes matières. Il leur est accordé 3 heures au moins pour faire leurs réponses ; il y aura au moins une séance par semaine pour l’examen par écrit, exigé pour l’obtention de chaque grade. Les élèves seront examinés oralement suivant l’ordre de priorité déterminé par un tirage au sort, en commençant par les élèves qui ont concouru au premier examen par écrit, et ainsi de suite. »

M. Devaux. - Je crois que dans la rédaction de l’amendement de M. le ministre il y a quelque chose qui est contraire à ses intentions et qui pourrait être retranché ; cela rendrait la rédaction plus claire. Cet amendement porte : « Il (l’examen) aura lieu à la fois entre tous les récipiendaires qui doivent être examinés sur les mêmes matières. » Il résulte de cette disposition que tous les élèves qui solliciteront un grade quelconque devront être examines en même temps par écrit, et qu’il subiront aussi ensemble l’examen oral. Je vais faire voir l’inconvénient de ce système.

Que l’examen par écrit soit passé simultanément par 50, 80 élèves, il n’y a pas à cela de difficulté. Mais l’examen oral, s’il doit avoir lieu entre tous les élèves, peut se prolonger pendant 10 ou 15 jours. Or cela a de grands inconvénients, car il faudra que les élèves séjournent pendant ce temps-là à Bruxelles et là ils perdront leur temps.

Je sais que ce n’est pas là l’intention de M. le ministre. C’est si peu son intention que plus loin il dit dans son amendement : « Il y aura au moins une séance par semaine pour l’examen par écrit, exigé pour l’obtention de chaque grade. » J’approuve cette rédaction. Un examen par semaine est même peut-être trop peu. Je voudrais qu’il y eût par semaine deux examens par écrit, afin que les élèves ne fussent pas forcés de rester huit jours dans la capitale.

Je crois que dans la seconde phrase de l’article, au lieu de « entre tous les récipiendaires, » il faudrait dire « entre un certain nombre d’élèves déterminé par le jury. » Sans cela vous forcez les récipiendaires à rester 10 jours environ à Bruxelles, et vous sentez que, pour les parents et pour les élèves, c’est un inconvénient sous le rapport de la dépense et d’autant plus que les candidats en sciences et en lettres sont très jeunes, et que leurs parents n’aimeront pas à les laisser dix jours dans une ville où ils n’ont pas leurs habitudes, où ils sont étrangers et où ils n’ont rien à faire.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Voici la rédaction de l’amendement : « L’examen pas écrit précédera l’examen oral ; il aura lieu à la fois entre tous les récipiendaires qui doivent être examinés sur les mêmes matières. »

Il est bien entendu qu’il s’agit d'examens fait sur les mêmes matières et dans une même séance, puisque le paragraphe suivant prévoit qu’il y a au moins un examen par écrit par semaine.

Maintenant, je pense qu’il faut laisser le reste à la détermination des règlements.

Une séance du jury suffira pour l’examen par écrit de tous les élèves qui veulent obtenir un grade. Ensuite on déterminera quel nombre d’élèves il convient d’assigner à chaque séance pour l’examen oral. Et le tirage au sort déterminera quels élèves seront examinés dans la première, dans la seconde, dans la troisième séance, etc. Ainsi il n’y aura ni confusion, ni abus possibles.

Article 59 (nouveau)

M. Jullien. - Avant de passer à la discussion du chapitre II, j’aurai l’honneur de proposer à la chambre une disposition additionnelle au chapitre premier.

On s’est beaucoup occupé, pendant tout le cours de la discussion de garanties contre la partialité possible des examinateurs. Mais il en est une seule que l’on a oubliée, et c’est, à mon avis, la plus essentielle.

Vous avez vu qu’il y aura beaucoup d’examinateurs, autant en raison du nombre des universités que du nombre des sciences qui feront la matière des examens. Mais il y aura aussi beaucoup de jeunes gens à examiner et il ne sera pas rare qu’il se trouve des examinateurs qui soient parents des jeunes gens à examiner. Maintenant si vous n’introduisez pas dans la loi quelque disposition qui déclare l’incapacité de l’examinateur en raison de tel degré de parenté avec l’examiné, la parenté pourra être cause de quelque partialité dans les examens.

On me dira peut-être : Mais dans ce cas l’examinateur se récusera lui-même. Oui, sans doute, si le membre du jury doit examiner son fils ou son frère. Mais s’il s’agit de parents du troisième et du quatrième degré, ne croyez-vous pas que celui qui devra être examiné, ayant de bonnes raisons pour taire cette parenté, ne parlera pas ? D’un autre côté, l’examinateur, en raison de l’affection qu’on a toujours pour les membres de sa famille, n’en parlera pas non plus.

Et la partialité possible de l’examinateur ouvrira la porte à toutes les réclamations des élèves qui auront été écartés. Ils diront qu’ils ne l’eussent pas été si, comme d’autres, ils eussent eu leur oncle, leur cousin, pour examinateur.

Je crois qu’une telle disposition est d’autant plus nécessaire, que si vous ne déterminez pas à quel degré l’incapacité des examinateurs devra s’arrêter, vous permettrez que l’on récuse des parents du 8ème, du 9ème degré.

Je pense donc qu’il est utile et même nécessaire de déterminer dans la loi les cas où les examinateurs devront s’abstenir. Voici en conséquence la disposition additionnelle que je proposerai et qui formerait l’article 59 de la loi :

« Nul ne pourra, en qualité de membre d’un jury, prendre part à l’examen d’un parent ou allié, jusques et y compris le quatrième degré, à peine de nullité. »

Je dois déclarer que la rédaction de cet amendement ne m’a pas coûté beaucoup de façon. Je l’ai trouve presque tout entier dans une brochure distribuée à tous les membres de la chambre, où j’ai reconnu des observations toujours justes, quoique pas toujours exemptes de malice. Quand j’y ai trouvé quelque chose de bon, je n’ai pas manqué de le prendre. Ici l’observation de l’auteur de la brochure m’a paru très fondée. Sa rédaction n’était pas tout à fait la même, je l’ai modifiée ainsi que je viens de la lire.

M. Dubus. - Je ne sais pas pourquoi l’honorable M. Jullien dit dans son amendement : « en qualité de membre du jury. »

M. Jullien. - C’est pour que l’examen ne soit pas nul dans le cas où un parent du degré déterminé aurait pris une part indirecte à l’examen, dans le cas par exemple où il aurait interrogé le récipiendaire, sans faire partie du jury, je me suis laissé dire que cela arrivait quelquefois dans les examens.

M. Dubus. - Je crois que l’honorable M. Jullien entend que l’on puisse être présent à l’examen mais non y prendre part. Je ne pense pas qu’une disposition semblable soit en vigueur. Dans l’usage, les professeurs s’abstiennent quand ils ont un parent à examiner ; car ce cas s’est présenté plus d’une fois. Mais je ne vois pas de difficulté à en faire une disposition de loi. (Adhésion.)

- L’amendement de M. Jullien est mis aux voix et adopté, il formera l’article 59 de la loi.

M. le président. - La chambre passe à la discussion du chapitre II.

Chapitre II. Des inscriptions et des frais d’examen
Articles 59 et 60

« Art. 59. Les époques et la forme des inscriptions pour l’examen, l’ordre dans lequel on y sera admis seront déterminés par les règlements, sans distinction des lieux où les aspirants ont fait leurs études. »


« Art. 60. Les frais des examens sont réglés comme suit :

« Pour le grade de candidat en philosophie et lettres, fr. 50 ;

« Pour le grade de candidat en sciences, y compris l’épreuve préparatoire, fr. 80 ;

« Pour celui de candidat en médecine, fr. 80 ;

« Pour celui de candidat en droit, fr. 100 ;

« Pour celui de docteur en philosophie et lettres, fr. 100 ;

« Pour celui de docteur en sciences, fr. 100 ;

« Pour le premier examen de docteur en médecine, fr. 80 ;

« Pour le deuxième, fr. 100 ;

« Pour l’examen de docteur en chirurgie et en accouchements, fr. 50 ;

« Pour le premier examen de docteur en droit, fr. 100

« Pour le deuxième, fr. 200. »

M. Dechamps, rapporteur. - Par la décision que la chambre a prise en ôtant le second examen de docteur en droit, l’économie du système adopté précédemment est totalement changée.

Voila quel était le système adopté par le gouvernement et sanctionné par la section centrale : On avait considéré les avantages que procure dans chaque faculté le grade de docteur. Or, le grade de docteur dans la faculté des sciences et dans celle des lettres ne mène à aucune profession lucrative, tandis que les grades de docteur en droit et en médecine ouvrent la porte aux professions d’avocat et de médecin et aux hautes fonctions publiques.

Cependant la section centrale avait cru devoir faire une différence entre les frais du doctorat en médecine et les frais du doctorat en droit, parce qu’il paraît généralement reconnu que l’on désire ne pas trop multiplier le nombre des avocats, afin de ne pas trop encombrer les fonctions. Ensuite on a cru devoir favoriser spécialement l’étude de la médecine, parce que dans le projet de loi on supprime le grade d’officier de santé. Par ce motif on a établi une certaine différence entre les frais du droit et de la médecine.

Voici une statistique que j’ai faite à cet égard, et qui pourra éclairer l’assemblée :

Pour arriver au grade de docteur en philosophie et lettres, d’après les calculs que j’ai faits, l’élève doit payer 650 fr. Avant la révolution, ces frais s’élevaient à peu près à 990 fr. D’après le projet de la première commission ils montaient à 950 fr. Vous voyez que dans le projet actuel ils ont été considérablement diminués, par les motifs que j’ai exprimés.

Dans la faculté des sciences, les frais pour arriver au grade de docteur s’élèvent à 690 fr. Avant la révolution ils étaient de 1,430 fr. La première commission proposait de les fixer à la somme de 950 fr. Ainsi encore, pour cette faculté, les frais sont diminués de façon notable.

Dans la faculté de droit, les frais du grade de docteur montaient à 1,680 fr., d’après le projet de la première commission. Avant la révolution, ils s’élevaient à 1,455. Vous les avez fixés maintenant à 1,550 fr.

M. de Brouckere. - Non, vous êtes dans l’erreur.

M. Dechamps. - Puisque M. de Brouckere me croit dans l’erreur, je vais lui donner lecture de mes calculs, que je ne crois pas d ailleurs infaillibles.

Frais pour arriver au doctorat en droit :

- Frais du grade de candidat en philosophie et lettres, fr. 305 ;

- Inscription au rôle de la première année, fr. 15 ;

- Première année : six cours semestriels à 50 fr. chacun, fr. 300 ;

- Examen pour le grade de candidat en droit, fr. 100 ;

- Inscription de la seconde année, fr. 15 ;

- Seconde année : six cours semestriels, fr. 300 ;

- Inscription de la troisième année, fr. 15 ;

- Troisième année : six cours semestriels, fr. 300 ;

- Examen pour le grade de docteur, fr. 200.

Total : fr. 1,550

Pour la faculté de médecine les frais étaient, avant la révolution, de 1,590 francs. D’après le projet de la première commission, ils s’élevaient à 1,490 francs. Ils s’élèveront maintenant à 1,270.

Je pense que les frais de la faculté de droit sont déjà assez élevés. Je pense donc que pour établir l’équilibre, il faudrait diminuer les frais d’examen du doctorat. Si personne ne propose un amendement, j’en proposerai un moi-même.

M. de Brouckere. - Je demanderai si, en supprimant un des examens du doctorat en droit, le gouvernement a entendu supprimer la rétribution qui y était attachée.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - J’attendrai le cours de la discussion.

M. Jullien. - Dès qu’on supprime un examen, il faut supprimer l’une des rétributions exigées. Je crois qu’il faut mettre le chiffre 200 fr. ; on ne demande aux médecins que 100 fr.

M. A. Rodenbach. - Il est reconnu que ceux qui s’adonnent à la médecine ont en général moins de fortune que ceux qui étudient le droit. C’est ce que l’on remarque en Belgique et partout ; c’est pour cette raison qu’on a demandé que 100 fr. pour le doctorat en médecine.

On supprime les officiers de santé, il sera dorénavant difficile aux personnes peu fortunées de se livrer à l’étude de l’art de guérir. Je consens à ce que le gouvernement perçoive 200 francs pour l’examen de docteur en droit : nous avons vote des sommes assez fortes pour les membres des jurys, il faut les couvrir. Les membres des jurys recevront à peu près 80 fr. par jour. Les ministre qui n’ont que 70 fr. par jour ne reçoivent pas autant. Il ne faut pas que les nouvelles dépenses soient à la charge du trésor.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - La question n’est pas de savoir si l’on paiera 200 francs, mais bien de savoir si l’on paiera 300 francs. Ce sont des droits de grade bien établis, puisqu’ils serviront à couvrir les frais du jury. L’élève gagne déjà à n’être soumis qu’à un seul examen.

Dans le système de la section centrale, comme dans celui du gouvernement, on n’a pas voulu rendre trop facile l’obtention du brevet d’avocat. Si cette raison a quelque empire sur l’assemblée, il faut conserver le chiffre de 300 francs.

M. de Brouckere. - Je conviens que la question n’est pas de savoir si l’on paiera 200 fr., mais si l’on paiera 300 fr. Cependant je trouve la somme de 300 fr. trop élevée. En philosophie l’élève paie déjà un droit. Il en paie un autre pour être candidat ; il me paraît que 200 fr. seraient assez.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je proposerai une espèce de transaction ; je demanderai que le chiffre soit de 250 fr. Si vous diminuer les frais pour le doctorat en droit, il faudra diminuer les frais pour le doctorat en médecine ; il faut prendre garde qu’en diminuant les rétributions exigées des élèves, on ne mette beaucoup de frais à la charge du trésor.

M. de Brouckere. - Je me réunis à l’amendement présenté par M. le ministre de la justice. J’adopte le chiffre de 250 fr.

M. Demonceau. - Nous avons, dans l’une des précédentes séances, adopté un amendement d’après lequel un médecin pourra devenir docteur en accouchements ; il faut poser un chiffre pour l’examen relatif à l’obtention de ce diplôme.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - On pourra mettre 50 fr. pour l’examen du médecin qui voudra devenir docteur en accouchements.

M. Dechamps, rapporteur. - Si l’on ne demande que 250 fr. pour le diplôme d’avocat, il faudra diminuer le droit pour obtenir le diplôme de docteur en médecine, et je le proposerai formellement.

M. Devaux. - Déterminons d’abord le chiffre relatif aux avocats ; nous déterminerons ensuite le chiffre relatif aux médecins. Il est certain que les médecins manquent dans les campagnes.

M. A. Rodenbach. - C’est une erreur !

M. Pirson. - Il y en a trop !

M. Devaux. - Il y a des empiriques dans les campagnes ; les bons médecins y manquent. En supprimant les officiers de santé, vous rendez les études plus coûteuses. Il y en encore une autre raison. C’est que les médecins paient patente, tandis que les avocats n’en paient pas.

M. A. Rodenbach. - Je demande qu’on mette 300 fr. pour le grade de docteur en droit.

- Le chiffre de 300 fr. mis aux voix est adopté.

M. Dechamps., rapporteur. - Puisque le chiffre de 300 fr. est admis, je n’ai plus rien à proposer pour le grade de docteur-médecin.

- L’article 60 est adopté dans son ensemble.

Article 61

« Art. 61. Le jury prononcera le rejet ou le simple ajournement du récipiendaire qui n’a point répondu d’une manière satisfaisante ; en cas d’ajournement, le récipiendaire peut se représenter soit dans la même session du jury, soit dans une session, suivante, et ne paiera plus aucuns frais d’examen.

« Le récipiendaire refusé ne peut plus se présenter dans la même session, et il est tenu de payer la moitié des frais d’examen. »

- Adopté sans discussion.

Chapitre III. Des droits attachés aux grades académiques
Article 62

« Art. 62. Nul ne sera admis aux fonctions qui exigent un grade académique s’il n’a obtenu ce grade de la manière déterminée par la présente loi. »

- Adopté sans discussion.

Article 63

« Art. 63. Nul ne pourra pratiquer en qualité d’avocat, de médecin ou de chirurgien, s’il n’a été reçu docteur, conformément aux dispositions du chapitre premier de ce titre.

« Néanmoins le gouvernement pourra accorder des dispenses spéciales pour certaines branches de l’art de guérir, après avoir pris l’avis du jury d’examen.

« La dispense spécifiera la branche, et ne pourra s’appliquer qu’à ce qui y sera nominativement désigné. »

M. le président. - Voici un amendement présenté par M. C. Rodenbach ; il ferait le troisième paragraphe de l’article 63 :

« Les commissions médicales provinciales pourront accorder, jusqu’au premier juillet 1836, conformément à la loi du 12 mars 1818, le grade de chirurgien de ville et de campagne, et de pharmacien, aux élèves qui auront trois années d’études. »

M. C. Rodenbach. - Mon amendement se rattache directement à l’article 63. Si la chambre l’adoptait, soit avec modifications, soit sans modifications, elle pourrait le placer, comme article, dans les dispositions transitoires. Je pense cependant qu’il est plus régulier de le discuter immédiatement, sauf à le classer à la fin du projet de loi.

D’après le premier paragraphe de l’article 63, on supprime les institutions des officiers de santé et des chirurgiens de ville et de campagne.

Tous les amis des sciences, tous les hommes éclairés qui ont été à même d’apprécier les graves inconvénients qui résultent de ces espèces d’institutions, donneront leur approbation à cette suppression. En effet, élever au grade de docteur ceux qui en sont dignes, et interdire l’exercice de l’art de guérir à ceux qui l’avilissent, ou qui, par une instruction insuffisante, sont souvent un fléau pour la société, est une mesure réclamée depuis longtemps, pas seulement en Belgique, mais même en France. Ce principe n’est plus susceptible de controverse ; mais tout en approuvant, messieurs, le principe de la disposition légale qu’on nous propose, nous devrions, il me semble, être justes envers tout le monde et éviter de donner à la loi un effet rétroactif.

Une loi nouvelle trop rigoureuse, et qui affecte des droits acquis, provoque une véritable perturbation dans les familles. C’est un effet que nous devons chercher à éviter.

Un grand nombre de jeunes gens suivent depuis 3 à 4 ans les cours des écoles de médecine de Bruxelles, de Bruges, de Tournay, etc. Parmi eux il s’en trouve de capables qui ont dépensé leur patrimoine pour parvenir à se faire une carrière et entrer dans l’exercice d’une profession indépendante. Par le premier paragraphe de l’article 63, vous détruisez d’emblée tout leur avenir. La médiocrité de la fortune de quelques-uns ne leur permet pas de supporter les frais universitaires.

D’autres, ayant des connaissances suffisantes pour exercer l’une ou l’autre branche de l’art de guérir, ne pourront, n’ayant pas fait leurs humanités, être admis au grade de docteur, vu le grand nombre de connaissances accessoires qu’on exige, surtout dans l’examen du candidat.

D’après ces motifs, il me paraît juste d’accorder à cette classe d’élèves un délai.

J’ai demandé que les commissions médicales provinciales soient autorisées à continuer à recevoir ces élèves jusqu’au 1er juillet 1836. Ce délai n’est pas trop long. Il me paraît suffisant, d’autant plus que les commissions provinciales ne pourront pas en abuser et faire des réceptions avec célérité et en masse.

Je regrette que M. le ministre de l’intérieur n’ait point parlé dans la loi des pharmaciens ; il eût été convenable d’exiger par la suite, de tous ceux qui s’adonnent à la pratique de la pharmacie, le grade de docteur. J’avais préparé un amendement sur cet objet ; je l’ai abandonné parce que je sais qu’on s’occupe au ministère de l’intérieur d’un projet général sur le service de santé qui modifiera la loi du 12 mars 1818. L’intention du ministre est, si je ne me trompe, d’établir une école spéciale de pharmacie.

Pour ce qui concerne mon amendement, je le crois juste, et j’ai lieu d’augurer que la chambre en portera le même jugement.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je me rallierai volontiers à l’amendement de l’honorable membre ; cependant je demanderai la suppression du mot pharmacien. La loi actuelle ne s’occupe pas de l’institution des pharmaciens. Une commission est formée pour la révision de la loi du 12 mars 1818 ; je désirerais approfondir les questions que cette législation soulève avant de me prononcer sur ce qui concerne les pharmaciens.

S’il y a des cours institués dans la faculté des sciences et la faculté de médecine, que les jeunes gens qui se destinent à la pharmacie puissent suivre avec fruit et utilité pour se présenter devant la commission provinciale, je crois que cela suffit pour le moment en attendant la révision de la loi du 12 mars 1818 et qu’on statue définitivement sur le maintien ou la suppression de la faculté qu’ont encore les commissions provinciales de donner des diplômes de pharmacien.

M. C. Rodenbach. - Je consens à retrancher le mot pharmacien puisque M. le ministre nous promet de nous présenter une loi pour organiser le service de santé et réviser la loi du 12 mars 1818.

M. Dechamps, rapporteur. - Je demande l’ajournement de l’amendement entier à l’article 67.

M. C. Rodenbach. - J’ai demandé moi-même ce renvoi. Je n’ai présenté mon amendement à l’article 63 que parce que cet article propose des suppressions, et qu’avant de voter ces suppressions, je voulais faire mes réserves. Mais je sais que la place de mon amendement est à l’article 67.

M. Dumortier. - J’ai une explication à demander sur le premier paragraphe de l’article 63. Il porte : « Nul ne pourra pratiquer en qualité d’avocat, de médecin ou de chirurgien, s’il n’a été reçu docteur conformément aux dispositions du chapitre premier du présent titre premier. » Je ferai remarquer qu’il existe des officiers de santé qui n’ont pas le titre de docteur en chirurgie. Ces officiers de santé sont de plus accoucheurs.

Vous avez créé un grade de docteur en accouchements. N’y a-t-il pas une lacune dans votre article ? De ce qu’il n’y est pas parlé d’accoucheur, ne pourra-t-on pas en conclure que le grade de docteur en accouchements ne sera pas nécessaire et que la commission provinciale pourra continuer de conférer des grades d’officier de santé pour les accouchements ? Je demanderai ensuite, s’il n’y a pas des décrets qui autorisent les officiers de santé à exercer, et dans ce cas, si l’article 63 est assez explicite pour les abroger. (Oui ! oui !)

M. Lebeau. - Je prierai l’honorable auteur de l’amendement de réfléchir sur la portée de son amendement, de voir s’il ne supprime pas une classe d’artistes femelles extrêmement utile dans les campagnes. Ce sont les sages-femmes.

M. Dumortier. - Je ne pense pas qu’il faille supprimer les sages-femmes. Je voudrais que le gouvernement présentât une disposition à cet égard.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - La loi de 1818 autorise la profession d’accoucheur et de sage-femme. Si vous supprimez l’accoucheur qui n’a pas de diplôme de docteur, et que vous ne parliez pas de la sage-femme, la loi de 1818 reste en vigueur pour ce qui la concerne.

M. Dumortier. - Je persiste à demander l’addition du mot accoucheur. Il ressortira de la discussion qui vient d’avoir lieu que cela ne concerne pas les sages-femmes.


- L’amendement de M. Dumortier est adopté ainsi que le paragraphe amendé.

Les deux autres paragraphes sont également adoptés.

La chambre adopte ensuite l’amendement de M. C. Rodenbach sous-amendé par M. le ministre de l’intérieur, sauf à le reporter a l’article 67.

Et enfin l’ensemble de l’article 63 est adopté.

Articles 64 et 65

« Art. 64. Le gouvernement pourra accorder des dispenses aux étrangers munis d’un diplôme de licence ou de docteur, sur un avis conforme du jury d’examen. »

- Adopté.


« Art 65. Toute disposition légale ou réglementaire contraire aux articles 62, 63 et 64 est abrogée. »

- Adopté.

Titre premier. De l’enseignement supérieur donné aux frais de l’Etat

Chapitre premier. Des universités
Article 6

M. le président. - Nous allons reprendre l’article 6 qui a été ajourné.

L’article primitif du gouvernement était ainsi conçu :

« Les universités pourront conférer des diplômes de docteur à des étrangers, en observant les conditions qui seront prescrites par les règlements. Ces diplômes ne conféreront aucun droit en Belgique. »

Voici la nouvelle rédaction qu’il présente :

« Les grades sont conférés conformément aux dispositions du titre III de la présente loi. Néanmoins les universités pourront conférer des diplômes de docteur à des étrangers, en observant les conditions qui seront prescrites par les règlements. Ces diplômes ne conféreront aucun droit en Belgique. »

M. Dubus. - D’après les observations qui ont été faites dans cette enceinte, il me semble que l’article 6 doit être modifié.

Il a été reconnu que les diplômes conférés par les jurés étaient des brevets de capacité nécessaires pour l’exercice de certaines professions dans le pays, mais que les universités pourraient conférer tels diplômes qu’elles jugeraient convenable d’accorder. Je ne vois donc pas la nécessité de la restriction qui fait l’objet de l’article 6. Pourquoi les universités de l’Etat ne conféreraient-elles pas des diplômes aux Belges comme aux étrangers ? Il faut mettre, ce me semble, cet article en harmonie avec les principes admis dans cette chambre.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je ne m’opposerai pas à ce que les universités de l’Etat puissent accorder des diplômes aux Belges comme aux étrangers, mais il y avait nécessité de parler des diplômes conférés par les universités de l’Etat, dans la loi qui en détermine l’organisation.

M. Devaux. - L’observation de l’honorable M. Dubus est parfaitement juste. De deux choses l’une, ou les universités de l’Etat n’ont pas le droit de conférer des grades honoraires, ou elles l’ont ; dans le dernier cas, il faut que les Belges soient admis à en obtenir comme les étrangers.

Je ne vois pas pourquoi on refuserait aux universités de l’Etat un droit dont les établissements libres seront en possession. Il peut arriver que des élèves qui auront suivi les cours d’une faculté dans une université de l’Etat, et qui ne se voueront pas à une profession pour laquelle un diplôme du jury d’examen soit nécessaire, désirent néanmoins obtenir un certificat comme quoi ils ont suivi des cours avec distinction. Je demande qu’on dise : « Les universités pourront délivrer le grade de docteur aux élèves ainsi qu’aux étrangers, etc. »

M. Dumortier. - Dès le début de cette discussion, j’ai désiré que les universités fussent seules appelées à conférer les diplômes et que les jurys d’examen n’accordassent que des licences. Je pense donc comme les préopinants qu’il est juste que les universités de l’Etat jouissent comme les universités libres du droit de conférer des diplômes. Mais il ne faut pas spécifier qu’elles n’accorderont que des grades de docteur ; il vaut mieux, selon moi, dire qu’elles conféreront des grades scientifiques. L’on distinguerait ainsi le diplôme scientifique du diplôme légal.

M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je me rallie à la proposition de l’honorable préopinant et crois qu’il y a lieu de modifier l’article dans le sens qu’il a indiqué.

M. Jullien. - De sorte que vous aurez des savants comme il y a des barons allemands. (Hilarité.)


- L’article 6 est mis aux voix et définitivement adopté comme suit :

« Les grades légaux sont conférés conformément aux dispositions du titre III de la présente loi. Néanmoins les universités pourront conférer des diplômes scientifiques, en observant les conditions qui seront prescrites par les règlements. Ces diplômes ne conféreront aucun droit en Belgique. »

Titre III. Des grades, des jurys d’examen et des droits qui sont attachés aux grades

Chapitre premier. Des grades et des jurys d’examen
Article additionnel

L’article additionnel de M. Trentesaux est mis aux voix et adopté comme suit :

« La chambre des représentants nommera la première, et fera connaître dans les 24 heures son choix au sénat, qui procédera ensuite à la nomination qui lui est attribuée. Ces nominations effectuées, le gouvernement fera la sienne. »

Dispositions transitoires

Articles 66 et 67

L’article 66 est mis aux voix et adopté comme suit :

« Art. 66. Les examens pour le grade de candidat, la première année, et ceux pour le grade de docteur, les deux premières années à dater de l’exécution de la présente loi, n’auront lieu que sur les matières actuellement enseignées dans les universités existantes, et formant l’objet des cours dont la fréquentation était prescrite.

« Les certificats constatant la fréquentation des cours délivrés par les professeurs des universités, et légalisés par les recteurs avant la mise en vigueur de la présente loi, auront la même valeur devant le jury qu’ils auraient eue devant les facultés. »


- L’article 67 est également adopté.

« Art. 67. Les articles 62 et 63 du titre III ne sont pas applicables à ceux qui exercent, ou qui ont acquis le droit d’exercer une fonction ou un état en vertu des lois et règlements en vigueur.

« Les grades de candidat, conférés par les autorités existantes, conserveront également leurs effets. »

Il sera suivi de l’amendement de M. Dumortier sur les commissions médicales, également adopté.

Article 68

(Moniteur belge n°237, du 24 août 1835) « Art. 68. Les professeurs et autres personnes actuellement attachés à des établissements d’enseignement public, ainsi que leurs veuves et orphelins, continueront d’être régis par les dispositions réglementaires existantes, en ce qui concerné la pension ou l’éméritat, jusqu’à la confection d’une loi nouvelle sur cette matière. »

M. de Brouckere. - Je ferai observer que l’article est rédigé dans la supposition de l’adoption des trois titres. Il convient de remplacer les mots établissements d’enseignement public par celui d’universités.

M. Jullien. - Je ferai une simple observation de rédaction sur une locution assez singulière. Je ne comprends pas trop que des professeurs, leurs veuves et orphelins soient régis par une loi.

C’est dans l’intérêt de la langue que je fais cette observation.

M. Dubus. - Je crois qu’en effet il faudrait modifier la rédaction ; car ces expressions : « continueront d’être régis, » feraient supposer que des dispositions réglementaires auraient force de loi, tandis que, d’après la constitution, elles ne peuvent plus avoir force de loi.

M. de Brouckere. - Supprimez l’article.

M. Jullien. - Si vous supprimez l’article, vous n’avez plus besoin de rédaction. Si vous ne le supprimez pas, je propose de dire « continueront d’être soumis, » au lieu de : « continueront d’être régis. »

M. Dumortier. - Je crois qu’il serait préférable de dire continueront de jouir du bénéfice des dispositions existantes.

M. Jullien. - Soit !

M. Devaux. - Je pense qu’il faudrait dire : « la publication d’une loi nouvelle, » au lieu de « la confection d’une loi nouvelle. »

M. le président. - Par suite des diverses propositions qui sont faites, l’article 68 serait ainsi rédigé :

« Art. 68. Les professeurs et autres personnes actuellement attachés aux universités, ainsi que leurs veuves et orphelins, continueront de jouir du bénéfice des dispositions réglementaires existantes, en ce qui concerne la pension ou l’éméritat, jusqu’à la publication d’une loi nouvelle sur cette matière. »

- L’article 68. ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.


M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je crois qu’il faudrait ajouter un paragraphe additionnel qui ferait participer au bénéfice de la disposition que vous venez de voter les professeurs mis à la retraite par le gouvernement provisoire, et dont la retraite n’est pas liquidée.

- Un grand nombre de membres. - Cela va sans dire.

M. le président. - M. le ministre de l’intérieur persiste-t il dans sa proposition ?

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Non, M. le président.

Puisque la chambre l’entend ainsi, cela me suffit.

Articles 69 et 70

« Art. 69. Les professeurs et lecteurs actuels qui seront mis à la retraite feront valoir leurs droits conformément à ces mêmes dispositions. »

- Adopté.


« Art. 70. Les lecteurs actuels pourront être continués dans leurs fonctions et conserver le traitement dont ils jouissent. Il n’en sera plus nommé à l’avenir. »

- Adopté.

Article additionnel

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Je proposerai une disposition additionnelle ainsi conçue :

« Les professeurs et les lecteurs, actuellement attachés aux universités de l’Etat, pourront être dispensés des conditions exigées par l’article 13 de la présente loi. »

- Cette disposition additionnelle est mise aux voix et adoptée.

Article additionnel

M. Dumortier. - J’aurai l’honneur de proposer à la chambre une autre disposition additionnelle ainsi conçue :

« La faculté d’appeler des étrangers au professorat sera soumise à un nouvel examen, lors de la révision de la loi spéciale sur le jury. »

Vous comprendrez facilement les motifs de cette disposition. La constitution a posé en principe que, pour exercer des fonctions en Belgique, il fallait être Belge ou naturalisé. Que l’on admette des étrangers pour l’organisation de l’enseignement supérieur, rien de mieux ; mais on ne peut tolérer que le gouvernement puisse conserver indéfiniment ces étrangers dans leurs fonctions, quand il y aura des nationaux capables de les remplir. Vous ne pouvez admettre une telle dérogation à la constitution pour les fonctions du professorat, fonctions qui sont au nombre de celles les plus rétribuées de l’Etat.

D’un autre côté, il faut donner aux Belges qui se destinent à la carrière de l’enseignement la perspective d’arriver dans les universités. Il faut leur garantir la possibilité d’arriver tôt ou tard à y exercer des fonctions. Si cette garantie n’est pas dans la loi, vous supprimez pour eux toute émulation, vous les jetez dans le découragement.

Je pense donc qu’il est nécessaire d’introduire dans la loi une disposition tendante à ce que, lors de la révision de la loi spéciale sur les jurys d’examen, on revienne sur la faculté accordée au gouvernement d’appeler des étrangers au professorat.

Quant à moi j’ai déjà exprimé l’opinion que nous avions en Belgique des hommes capables de remplir les chaires, des hommes aussi capables au moins que les étrangers que l’on va chercher.

Je sais bien qu’on a dit que peut-être on trouverait des hommes d’un mérite transcendant. Mais, messieurs, ces hommes ont déjà une position, et ils ne la quitteront pas pour venir en Belgique.

Songez-y, messieurs, il faut inspirer aux Belges l’amour de nos institutions, l’amour du pays. Il faut leur donner de l’émulation, afin qu’ils fassent un jour la gloire de la Belgique. D’un autre côté, si vous mettez dans la loi la révision au bout de trois années, vous aurez la garantie que le gouvernement usera de la faculté que vous lui avez accordée. Ses choix seront rares et excellents. Au contraire si vous n’admettez pas cette disposition, le gouvernement appellera un grand nombre d’étrangers au préjudice de Belges capables de remplir leurs fonctions.

Je crois que l’on peut sans scrupule adopter l’amendement que j’ai eu l’honneur de déposer sur le bureau. Il consiste à prescrire la révision de la faculté d’appeler des étrangers pour l’enseignement lors de la révision de la formation du jury. S’il est démontré à cette époque que la Belgique renferme assez d’hommes capables pour remplir les chaires, comme j’en ai la conviction, on n’emploiera plus d’étrangers.

Je ferai remarquer à la chambre qu’en Angleterre on exige impérieusement qu’un professeur soit avant tout Anglais, et jamais, dans ce pays, un savant, quelque soit son mérite, n’aurait de fonctions dans une université s’il n’appartenait à la nation anglaise. Faisons comme cette nation et suivons notre constitution, qui veut que toutes les fonctions soient remplies par des Belges.

M. F. de Mérode. - Messieurs, il me semble que la science est cosmopolite, et que ce serait une disposition assez singulière que celle qui empêcherait le gouvernement de choisir des professeurs d’une haute capacité hors de la Belgique. Le gouvernement serait alors dans une condition pire que les universités libres qui ne sont pas assujetties à cette restriction. On cite l’Angleterre ; mais il y là 22 millions d’habitants, et par conséquent plus de chances de faire de bons choix que dans quatre millions que l’on compte en Belgique. Je ne crois pas au reste que l’on choisira de préférence des étrangers ; si le gouvernement en appelle, c’est que ce seront des hommes de premier mérite. On aimera toujours mieux les hommes du pays.

M. Dubus. - L’honorable ministre d’Etat que vous venez d’entendre n’a réellement pas combattu l’amendement. On ne demande pas que le gouvernement soit privé de la faculté d’appeler des étrangers au professorat ; il s’agit d’autre chose ; il s’agit de savoir si l’on doit désespérer de l’avenir du pays, et si on ne peut pas présumer dès à présent que dans trois ans on sera dans le cas de se passer de secours étrangers.

La proposition de mon honorable ami a pour but de nous faire rentrer dans les dispositions constitutionnelles. On n’ôte rien au gouvernement de la faculté qu’il a maintenant ; mais on voudrait que cette faculté soit temporaire ainsi que la formation du jury. D’après cette thèse rien n’est compromis.

Cependant il est bon de dire à ceux qui se livrent aux études universitaires : A une époque qui n’est pas éloignée vous serez préférés aux étrangers ; redoublez d’ardeur ; on veut que vos travaux ne soient stériles, ni pour vous, ni pour votre patrie.

M. Devaux. - La question de constitutionnalité que l’on agite a été déjà traitée bien des fois et résolue : on n’a donc rien à désirer sous ce rapport ; mais ce que l’on veut c’est de mettre du précaire dans la loi, c’est d’éloigner les étrangers en ne leur donnant aucune sécurité pour leur avenir dans le cas où on les appellerait. Je ne dis pas que vous soyez dépourvus d’hommes capables ; mais il pourrait s’en trouver de plus capables encore à l’étranger, et il faut laisser au gouvernement la faculté de s’en servir ; les universités libres ne se priveront pas de secours étrangers, quand elles les jugeront utiles à leur prospérité.

Au reste, ne croyez pas que les étrangers soient empressés de venir au milieu de vous ; ils y sont regardés avec trop de défaveur pour consentir à se déplacer ; et le ministère mettra de la réserve dans les choix qu’il fera hors de la Belgique, si tant est qu’il en fasse.

M. Dumortier. - Je dois protester contre le sens qu’on donne à mes paroles ; je ne demande pas qu’on renvoie les étrangers dans trois ans...

M. Lardinois. - Vous n’aurez pas la peine de les renvoyer, ils ne viendront pas !

M. Dumortier. - il y a loin de la révision de la loi dans trois ans et à y introduire une disposition par laquelle on n’appellerait plus d’étrangers, renvoyer ceux dont on se serait servi.

On cite les universités libres ; elles n’ont fait venir que deux étrangers. Moi, je suis persuadé qu’en Belgique…

M. Lebeau et d’autres membres. - Assez ! assez ! Aux voix ! aux voix !

M. Dumortier. - Ne m’interrompez pas ! Je ne vous interrompu pas quand vous parlez, M. Lebeau !

Ma proposition est dans l’intérêt du pays.

Vous n’aurez pas une éducation nationale si elle n’est pas faite par des indigènes. On dit que les étrangers éprouvent trop de déboires ici pour être tentés d’y venir. Cependant on voit des étrangers partout, dans nos administrations, dans l’armée ; on s’en plaint dans le pays entier ; on en fait des reproches au gouvernement, à tort ou à raison ; il n’y a qu’un cri sur ce point.

Allez dans nos villes et vous en connaîtrez l’opinion : on se demande pourquoi les chambres ne font pas exécuter l’article de la constitution qui veut que les Belges seuls soient admis aux emplois. Nous faisons une loi, mettons-y toutes les clauses utiles à notre pays, c’est-à dire écrivons-y qu’en conservant les étrangers en fonctions, dans trois ans on n’en appellera plus d’autres.

M. F. de Mérode. - Je demande la parole : ce n’est pas sur la question ; mais je ne puis pas laisser passer sans réponse les paroles de M. Dumortier.

Il a accusé le gouvernement…

M. Dumortier. - Je n’ai pas accusé le gouvernement, j’ai dit qu’on se plaint dans le pays.

M. F. de Mérode. - Soit ; vous avez dit qu’on se plaignait dans le pays que tel gouvernement se montrait partial à l’égard des officiers étrangers qui sont dans l’armée belge. Ces officiers, messieurs, ont été invités à y venir. On a senti la nécessité de les demander ; ce n’est pas quand on en a eu besoin pendant longtemps, qu’on a le droit de les présenter comme recevant des faveurs auxquelles ils n’ont pas droit et au préjudice des nationaux.

Les militaires français, polonais, ou autres qui sont dans notre armée, n’ont eu que les grades auxquels ils avaient droit.

Je ne conçois pas qu’on cherche à établir la zizanie dans une armée qui est le fondement de l’indépendance du pays

M. Dumortier. - Je m’étonne qu’on dénature ainsi ce que j’ai dit.

M. F. de Mérode. - Je n’ai pas dénaturé ce que vous avez dit.

M. Dumortier. - Je n’ai pas dit que le gouvernement accordait des faveurs aux officiers étrangers au préjudice des nationaux, je n’ai pas non plus cherché à jeter la zizanie dans les rangs de l’armée. J’ai dit que c’était une opinion communément répandue dans le pays, que le gouvernement accordait tous les grades aux étrangers. Je n’examine pas si c’est vrai ou faux ; mais le fait est, j’en appelle à tous mes collègues, que quand nous retournons dans nos provinces, on nous répète cela à chaque instant aux oreilles.

Je proteste de toutes mes forces contre les inculpations odieuses que m’a prêtées l’honorable préopinant.

Je persiste dans mon amendement.

- L’amendement de M. Dumortier est mis aux voix. Il n’est pas adopté.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Il nous reste à fixer le jour du vote définitif.

M. Dubus. - La chambre avait décidé qu’entre les deux votes de la loi sur l’enseignement, on discuterait les discussions du rapport de M. de Behr. Comme il importe que les amendements de la loi sur l’enseignement puissent être imprimés et distribués avant le second vote, je demanderai que cet ordre du jour antérieurement fixé soit maintenu, et qu’on mette à mardi le vote définitif sur l’enseignement supérieur.

M. Jullien. - Mais le rapport de M. de Behr ne donnera lieu à aucune discussion.

M. Dubus. - Nous avons des pétitions dont nous pourrons nous occuper lundi.

M. Frison. - Si vous fixez à lundi la discussion de la loi sur l’enseignement supérieur, il est bien entendu que l’on discutera après la loi sur les tribunaux (Oui ! oui !)

- La chambre consultée fixe à mardi le second vote de la loi sur l’enseignement supérieur.

- La séance est levée à 4 heures.