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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 28 avril 1835

(Moniteur belge n°120, du 30 avril 1835)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse procède à l’appel nominal à une heure.

M. Brixhe donne lecture du procès-verbal de la séance précédente. Il est adopté.

Pièces adressées à la chambre

M. Verdussen donne lecture de l’analyse des pièces adressées à la chambre.

«Le sieur G. Wemans à Ophuers, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir le renvoi de son troisième fils retenu illégalement sous les drapeaux. »

« Le sieur L. Hortaux à Couvin réclame contre une décision de la députation des états qui l’oblige à servir dans la milice en exemptant un fils de veuve, alors que cette veuve reçoit des secours du bureau de bienfaisance. »

« L’administration communale de Curange (Hasselt) demande que la chambre s’occupe du projet relatif aux indemnités. »

« Le sieur Vandewoors, professeur de langue, demande qu’il soit accordé des encouragements à la littérature nationale. »

« Des huissiers de l’arrondissement d’Audenaerde (Flandre orientale) demandent que la chambre adopte une disposition, lors de la révision de la loi sur les patentes, qui déclare que les huissiers ne seront plus assujettis à prendre une patente distincte pour le moulage des tourteaux. »

« Le sieur F. Minnen à Rhodes-Saint-Pierre, ex-garde champêtre, devenu infirme, demande une pension. »

« Plusieurs fabricants cotonniers de Genappe, Tournay et Saint-Denis, adressent des réclamations en faveur de l’industrie cotonnière.


« Le sieur A. Barbagliotti, Italien réfugié, signale de prétendues vexations qu’il éprouve de la part de l’administration de la sûreté publique. »

- Ces pétitions sont renvoyées à la commission chargée d’en faire le rapport.


Le bureau du sénat transmet à la chambre des représentants notification de l’adoption des projets de loi suivants :

1° Le projet de loi allouant un crédit supplémentaire au département de la guerre pour l’exercice de 1835 ;

2° Le projet de loi ayant le même objet ;

3° Le projet de loi relatif à la régularisation du budget du ministère de la guerre pour l’exercice 1834 ;

4° Le projet de loi relatif à la régularisation du budget du ministère de la guerre pour l’exercice 1835 ;

5° Le projet de loi contenant une rectification au budget de la guerre pour l’exercice 1834 ;

6° Le projet de loi relatif à la succession d’immeubles situes en Hollande ;

7° Le projet de loi ci-inclus contenant le titre 1er et les dispositions transitoires de la loi d’organisation communale.

Projet de loi communale, amendé par le sénat

Motion d’ordre

M. le président. - La chambre veut-elle renvoyer le projet de loi relatif à l’organisation communale devant les sections ou devant une commission ?

M. Eloy de Burdinne. - Je demanderai que le travail du sénat soit soumis à une commission nommée par la chambre.

M. Vergauwen. - Je demande le renvoi devant les sections.

M. Dumortier. - Je ferai remarquer à l’assemblée que le renvoi à une commission serait une mesure insolite ; il faut que le projet sur l’organisation communale soit soumis aux sections : la matière est assez grave pour mériter l’attention de toute la chambre, et si n’y a rien de mieux à faire que de l’examiner dans les sections, on ne saurait procéder avec trop de maturité et appeler trop de lumières.

M. Eloy de Burdinne. - Si la question était neuve, je concevrais les observations présentées par l’honorable M. Dumortier ; mais vous savez que cette loi communale, objet d’un long examen de la part de la section centrale, et de longues discussions dans cette enceinte, a encore été discutée au sénat, et qu’ainsi tout a été dit sur les questions qu’elle soulève. Vous savez de plus que la loi communale est réclamée avec instance par le pays ; on ne saurait donc trop se hâter de la porter. Nous pouvons maintenant voter consciencieusement. Il faudrait que la nouvelle organisation communale pût avoir lieu cette année.

M. Dubus. - S’il est vrai, comme l’assure l’honorable préopinant, que la matière soit familière à chacun de nous, il en résultera que l’examen de la loi devant les sections sera facile et prompt ; ainsi je ne vois pas pourquoi on ne renverrait pas le travail du sénat devant les sections. Considérez que pour soumettre le projet à une commission nommée par la chambre, il faudra procéder à de longs scrutins, tandis que devant les sections la nomination des rapporteurs pour composer la section centrale sera faite presque sur-le-champ. Les sections n’auront en effet qu’à examiner les amendements faits par le sénat. La nouvelle mission de la section centrale sera bientôt remplie si les amendements ne sont pas nombreux.

M. Dumortier. - Dans le cas où le projet serait renvoyé à une commission, je demanderai que cette commission soit nommée par les sections et non par la chambre.

M. le président. - Je vais mettre aux voix la proposition faite par M. Eloy de Burdinne.

M. Dubus. - Le renvoi devant les sections est la règle ; c’est la demande de ce renvoi qu’il faut d’abord mettre aux voix.

M. le président. - Cela est indifférent ; je voulais commencer par mettre aux voix la proposition qui a été faite la première.


- Le renvoi devant les sections est mis aux voix. Deux épreuves par assis et levé sont douteuses. On procède à l’appel nominal.

61 membres sont présents.

31 votent le renvoi devant les sections.

30 votent contre ce renvoi.

Le renvoi devant les sections est ordonné.

Ont voté pour le renvoi devant les sections : MM. Bosquet, Coghen, Corbisier, Dautrebande, de Meer de Moorsel, de Puydt, de Nef, de Renesse, Dechamps, de Sécus, Desmaisières, Desmet, Doignon, Dubus, Dumortier, Fallon, Fleussu, Frison, Gendebien, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Jadot, Liedts, C. Rodenbach, Troye, Vanden Wiele, Vanderbelen, Vergauwen, C. Vuylsteke, L. Vuylsteke, Zoude.

Ont voté contre le renvoi devant les sections : MM. Brixhe, Cols, Cornet de Grez, Davignon, de Behr, A. Dellafaille, H. Dellafaille, de Longrée, de Man d’Attenrode, F. de Mérode, Desmanet de Biesme, de Stembier, de Terbecq, de Theux, Devaux, Dewitte, Duvivier, Eloy de Burdinse, Ernst, Milcamps, Nothomb, Olislagers, Raikem, Simons, Smits, Ullens, Vandenhove, Verdussen, Verrue-Lafrancq.


M. Morel-Danheel écrit pour demander un congé ; cet honorable membre est obligé de rester chez lui quelques jours pour cause de santé.

Décès d'un parlementaire

M. Domis, député de Malines, est mort ; son frère en informe la chambre par une lettre.


Il est fait hommage à la chambre d’une brochure sur l’abolition de la peine de mort, par M. Canaille Wyus, avocat à Mons.

Rapports sur des pétitions

M. Verrue-Lafrancq, rapporteur, entretient la chambre des mémoires suivants. - « Par pétition en date du 25 novembre 1834, les administrations des communes de Lillo, Stabrouck, Beerendrecht et Santvliet, demandent que la chambre adopte le projet de loi relatif aux indemnités, qui lui est soumis, et adressent des observations sur ce projet. »

Cette pétition contenant de nombreuses observations sur la loi relative aux indemnités, la commission conclut au renvoi à la section centrale qui sera chargée du rapport sur le projet de loi sur les indemnités déjà soumis à la chambre.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - « Par pétition en date du 9 décembre 1834, plusieurs habitants de la commune de Blerick, dont les maisons ont été démolies en 1813, par ordre du gouverneur de la forteresse de Venloo, demandent une indemnité. »

Les pétitionnaires au nombre de 25 disent qu’en 1813 leurs maisons ont été démolies par ordre du commandant de la garnison française de Venloo. Jusqu’à ce jour toutes leurs demandes en indemnité sont restées sans effet. Suivant une évaluation jointe à la pétition, la perte essuyée s’élèverait à 30,026 fr.

Pour pouvoir prononcer sur le mérite de cette réclamation, il faudrait savoir si les maisons se trouvant en dedans ou en dehors du rayon stratégique de la forteresse, étaient ou non assujetties à pouvoir être démolies pour la défense sans indemnité, ensuite on devrait examiner jusqu’à quel point le gouvernement belge peut être obligé envers ce dégât commis par une garnison française en 1813, en ne perdant pas de vue que Venloo fait partie de ce territoire qui, d’après les 18 articles, devrait éventuellement retourner à la Hollande. En l’absence de tous autres renseignements que la pétition seule, votre commission n’a pu examiner cette question sous toutes ses faces et en propose le renvoi au ministre de la guerre.

- Le renvoi est ordonné.


M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - « Par pétition en date du 26 février 1835, l’administration locale de Pael (Hasselt) demande que la chambre admette en principe, dans la loi sur les indemnités, qu’elles sont applicables aux pertes essuyées en meubles, récoltes, etc., comme aux propriétés immobilières. »

« Par pétition non datée, la régence de la commune de Beeringen, province de Limbourg, demande que le principe d’indemnités pour les pertes occasionnées par l’invasion hollandaise du mois d’août 1831 soit rendu applicable aux récoltes et meubles, ainsi qu’aux propriétés immobilières. »

« Par pétition en date du 19 janvier 1835, la dame Marie-Hélène Grauwen, veuve Lauwens, ex-notaire à Esschen, demande une indemnité pour les pertes essuyées par elle en août 1831, à la suite de l’agression hollandaise. »

« Par pétition en date du 7 janvier 1835, plusieurs propriétaires de maisons détruites ou fortement endommagées en septembre 1830 demandent que la chambre s’occupe du projet de loi relatif aux indemnités. »

« Par pétition en date du 22 décembre 1834, le sieur Max.-J. Veydt, demeurant à Bruxelles, boulevard du Jardin Botanique, demande de nouveau le paiement de l’indemnité qui lui revient du chef des pertes qu’il a essuyées par la révolution. »

« Par pétition en date du 11 décembre 1834, les sieurs J.-B. Vanderaa, Guyot et Gilles, à Anvers, victimes du bombardement, demandent à être indemnisés de ce chef. »

« Par pétition en date du 26 novembre 1834, le sieur C.-H. Rooseboom, à Bruxelles, ex-capitaine de navire, demande que la chambre adopte une loi qui autorise le gouvernement à l’indemniser des pertes qu’il a essuyées pendant les journées de septembre. »

« Par pétition en date du 14 novembre 1834, un grand nombre d’habitants de Calloo réclament une indemnité pour les dégâts causés par les Hollandais dans cette commune. »

« Par pétition en date du 12 février 1835, le sieur G. Blonden, fermier au château de Printhagen, demande à être indemnisé des pertes qu’il a essuyées par l’invasion des Hollandais en août 1831. »

« Par pétition en date du 11 décembre 1834, onze jardiniers d’Anvers, victimes des événements qui se sont passés depuis la révolution, demandent le paiement de l’indemnité qui leur revient. »

« Par pétition en date du 20 décembre 1834, le sieur Max Delsarte, peintre en équipages, victime de l’agression hollandaise à Bruxelles, demande le paiement de l’indemnité qui lui revient de ce chef. »

« Par pétitions non datées, les régences des communes de Kermpt, Spalbeek et Berbroek (Hasselt), demandent des indemnités pour les ravages essuyés pendant les journées des 7 et 8 août 1831. »

« Par pétition en date du 21 juillet 1834, les sieurs E. Derkenne, J. Sterk et la dame veuve Arhold, née Pascal, propriétaires des bateaux retenus à Venloo, en 1830, par l’autorité militaire, réclament de nouveau l’intervention de la chambre pour être indemnisés de leurs pertes. »

« Par pétition en date du 6 juin 1834, le sieur P.-H. Tollendries à Bruxelles, réclame le paiement de l’indemnité qui lui revient du chef des pertes qu’il a essuyées dans les journées de septembre, par le pillage de sa maison par les Hollandais. »

« Par pétition en date du 3 avril 1834, la dame veuve Cloosen, locataire de la barrière de Houthalen, demande une indemnité du chef de l’incendie de sa propriété par l’armée hollandaise, en août 1831. »

Huit pétitions du n°44 au n°51 et sept autres du n°54 à 60 réclament que la chambre adopte la loi sur les indemnités ; quelques-unes se plaignent de l’insuffisance des secours reçus, quelques autres en réclament de nouveaux.

Votre commission a cru utile de les classer en deux catégories :

1° celles de personnes qui demandent seulement l’adoption de la loi dont la chambre est saisie, et 2° celles de personnes qui ont déjà reçu un secours à compte et en réclament encore, ou en demandent sans en avoir reçu. A la première catégorie appartiennent les huit du n°44 au n°51 dont la commission propose le renvoi à la section centrale chargée du rapport sur le projet de loi relatif aux indemnités ; à la seconde appartiennent les sept autres du n°54 au n°60 dont la commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur, qui pourra faire participer, s’il y a lieu, les pétitionnaires au secours provisoire voté dans son budget.

Si quelques honorables membres désiraient des explications spéciales sur l’une ou l’autre de ces pétitions, je suis prêt à les donner.

M. Verdussen. - Je ne sais si parmi ces pétitions il ne s’en trouve pas une relative à une emprise de terrain.

M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - Non ! non !

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - « Par pétition en date du … novembre 1833, neuf propriétaires de terres hautes, situées sur le territoire des communes de Burght et de Zwyndrecht, demandent une juste indemnité pour emprise de terrain. »

Les pétitionnaires ont adressé leur demande en indemnité à M. l’ingénieur dès le commencement de 1833 ; ils furent prévenus en date du 20 février que les pièces étaient adressées au ministre de l’intérieur auquel ils s’adressèrent le 7 mars ; le 29 du même mois le gouverneur de la province d’Anvers leur donna avis que, d’après les lois sur la matière, les indemnités étaient à charge de l’administration des polders ; celle du polder de Borgerwert décline cette obligation ; de là nouveaux recours des pétitionnaires vers le ministre de l’intérieur en date du 27 août 1833 et du même jour en 1834, restés l’un et l’autre sans réponse ; cependant, sur l’invitation du commissaire de district de St-Nicolas, le 25 novembre 1833, les intéressés se sont rendus en ladite ville de St-Nicolas pour nommer un expert qui réglerait, conjointement avec celui du gouvernement, le montant des indemnités auxquelles ils pourraient avoir droit.

Après plus d’un an d’attente, les pétitionnaires se fondant sur l’article 11 de la constitution et 545 du code civil, réclament l’indemnité qui leur est due.

La commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur avec demande d’explications.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Les indemnités ont déjà été évaluées ; il ne s’agit plus que de reconnaître les véritables propriétaires, ou s’il n’y a pas d’obstacle au paiement à raison d’hypothèques. Des instructions ont été adressées sur ces objets au gouverneur d’Anvers, et j’espère que sous peu de temps cette affaire sera terminée.

M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - Si la chambre est satisfaite de ces explications, je n’insisterai pas. Je ferai cependant observer que j’ai reçu une lettre d’un des pétitionnaires et qu’il ne m’annonce rien de semblable à ce que dit M. le ministre.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Le pétitionnaire ne doit rien connaître encore, parce que l’instruction a été récemment envoyée au gouverneur.

M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - Je me bornerai à demander le dépôt de la pétition au bureau des renseignements.

- Le dépôt au bureau des renseignements est ordonné.


M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - « Par pétition en date du 17 octobre 1834, la dame veuve Guillaume Claessens, propriétaire d’un terrain dans le polder d’Ordam (Anvers), qui a été occupé par les victimes des inondations, par ordre de l’autorité, demande à être rétablie dans la possession de sa propriété. »

La dame veuve Claessen se plaint de ce que, par ordre des agents du gouvernement, une partie de sa propriété a été occupée par des personnes de Lillo et du village de Paille que les circonstances avaient forcées de quitter leur demeure ; elle s’est adressée à diverses reprises au gouverneur de sa province qui, en reconnaissant la justice de ses plaintes, l’a renvoyée à l’administration du polder.

La pétitionnaire ajoute que cette administration a acheté un terrain sur lequel on a transporté les huttes placées jusqu’alors près de la digue, tandis que, quoiqu’il y eût encore de la place suffisante sur ce terrain, les baraques construites sur sa propriété y restent ; elle demande à être promptement rétablie dans la possession de sa propriété. Si les faits allégués par la pétitionnaire sont vrais, il y a déni de justice, et la commission propose le renvoi au ministre de l’intérieur avec demande d’explications.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. Verrue-Lafrancq, rapporteur. - « Par pétition en date du 15 septembre 1834, le sieur C.-J. Verzyl, à Venloo, renouvelle sa demande d’indemnité pour les pertes qui a essuyées par le chômage de son moulin, par suite des inondations autour de cette forteresse. »

« Par pétition en date du 1er avril 1834, le sieur Ch. Vierzyl, propriétaire d’un moulin à eau, à Venloo, demande une indemnité pour la perte qu’il a essuyée en 1830, par l’inactivité de son moulin, par suite des inondations ordonnées par le génie militaire. »

Sans s’expliquer ni sur le temps que son usine a chômé, ni sur le montant des indemnités auxquelles il prétend, le pétitionnaire demande à recevoir celles qui lui sont dues par suite d’une longue stagnation.

D’autres propriétaires de moulins qui ont également chômé par suite d’inondations prescrites par l’autorité militaire, ont reçu une indemnité par ordre du ministre de la guerre. La commission propose le renvoi au ministre de la guerre.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.

Projet de loi communale, amendé par le sénat

Motion d’ordre

M. le président. - L’ordre du jour est épuisé.

M. Dumortier. - Si le projet de loi sur l’organisation communale pouvait être imprimé et distribué ce soir, on pourrait l’examiner demain dans les sections. Tous les articles adoptés de commun accord par la chambre et par le sénat ne donneront lien à aucun travail ; ainsi on pourrait avoir promptement un rapport.

M. le président. - On m’assure que le projet pourra être distribué demain à 9 heures du matin.

Projet de loi ouvrant des crédits pour la construction d'un canal de navigation dans la province d'Anvers

Dépôt

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux) dépose sur le bureau un projet de loi relatif à la construction d’un canal de navigation dans la province d’Anvers.

- L’impression du rapport et du projet de loi est ordonnée.

Il est renvoyé à une commission.

M. Dumortier. - Vous venez d’entendre M. le ministre de l’intérieur vous demander un nouveau crédit de 800,000 fr. pour la construction d’un canal de navigation.

Cette dépense n’est pas la seule qu’ait sollicitée le gouvernement. La chambre est saisie de plusieurs projets de dépenses dont le total monte à plusieurs millions. Je désirerais savoir avec quoi l’on entend combler ces différentes dépenses. Je voudrais également que M. le ministre des finances nous remît un état de situation du trésor : il ne s’agit pas seulement de voter de nouvelles dépenses ; il s’agit de savoir comment nous pourrons les combler.

J’avais l’espoir que si les craintes de guerre qui avaient signalé l’ouverture de la session actuelle disparaissaient, le gouvernement aurait arrêté la perception des centimes additionnels, qui fait, il faut l’avouer, un très mauvais effet dans le pays, surtout quand on se rappelle que dans le discours du trône le gouvernement avait promis une réduction dans les impôts. Les craintes de guerre sont complètement dissipées et la perception des centimes additionnels se continue. Elle fait, je le répète, crier dans le pays. Notez bien que le gouvernement a établi par la nouvelle péréquation du cadastre une perception de l’impôt foncier telle que les contributions de beaucoup de propriétaires en sont considérablement augmentées.

Si le gouvernement entend conserver le produit des centimes additionnels pour entraîner le pays dans une foule de dépenses qui n’avaient pas été prévues lors de la formation du budget, il importe que la nation le sache et que les représentants du pays ne soient pas trompés.

Si au contraire le gouvernement se désiste de ses prétentions de lever les centimes additionnels après un temps déterminé, je demande avec quoi l’on entend couvrir toutes les dépenses que l’on nous propose. Si l’on en faisait l’addition, je suis sûr que l’on trouverait un total des 8 à 10 millions. Je ne sache pas que le trésor soit en état de faire face à une pareille augmentation avec les ressources ordinaires.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Le gouvernement ne se refuse jamais de procurer aux commissions ou aux sections tous les renseignements dont elles ont besoin pour examiner les projets de loi. Si la commission que le bureau nommera me demande des renseignements dans le sens indiqué par l’honorable préopinant, je m’empresserai de les lui fournir.

Je ne crois pas que ce soit le cas maintenant de traiter les questions effleurées par l’honorable M. Dumortier, et qu’il a rattachées à la perception des 10 centimes additionnels. Elles trouveront seulement leur place lorsqu’il s’agira d’examiner si les dépenses sollicitées par le gouvernement sont utiles au pays et aux moyens de les faire ; on se fixera alors sur la question de savoir si ces moyens existent dans la continuation de la perception des centimes additionnels, et ce sera à la législature à le décider. Telle est la réponse que je crois devoir à l’honorable M. Dumortier.

M. Desmet. - Comme M. le ministre de l’intérieur vient de demander à la chambre, si je ne me trompe, une somme de 800,000 fr. pour le creusement d'un nouveau canal, je lui demanderai si le gouvernement a abandonné le projet de confectionner le canal d’écoulement de Zelzaete à la mer, et pour lequel il a déjà demandé une somme d’un demi-million de francs dans le budget de l’exercice courant ; je tiens surtout à connaître à cet égard l’opinion de M. le ministre de l’intérieur, afin que les provinces des Flandres sachent si le gouvernement à l’envie de s’intéresser à elles pour faire écouler les eaux qui les inondent pendant les saisons de pluie, et qu’elles reçoivent de France et de la province du Hainaut.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux). - En aucune manière. Je désire au contraire que la chambre fixe à un jour prochain la discussion du projet relatif à cet important travail.

M. Dumortier. - M. le ministre des finances n’a pas compris mon intention. J’ai demandé que le gouvernement nous fournisse l’état de situation du trésor. Certainement chacun de nous peut individuellement se procurer cet état à la cour des comptes. Mais il est plus convenable que le gouvernement devance nos recherches. Nous ne pouvons émettre un vote en connaissance de cause sur toutes les lois de dépense que l’on propose, si nous ne savons pas quelle est la situation du trésor public, sur quels fonds ces dépenses pourront être imputées.

D’après le dernier état de situation qui nous a été communiqué, le trésor présentait un déficit qu’il fallait combler par une émission de bons du trésor ; ce déficit a dû s’accroître par suite de la continuation de la route en fer. Je ne sais trop comment nous y ferons face. Il est de notre devoir de ne pas l’augmenter outre mesure en votant inconsidérément de nouvelles dépenses. Je demande donc que M. le ministre des finances nous fournisse un état de situation du trésor avant le 1er mai prochain.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Lors de la discussion du budget des voies et moyens, il a été fourni à la chambre un état de situation du trésor public. Si l’assemblée désire qu’il lui en soit présenté un nouveau, je m’empresserai de souscrire à ses vœux.

L’honorable préopinant a parlé d’un déficit existant dans le trésor. Ce n’est pas à proprement parler un déficit ; c’est une dette flottante qui n’est que la représentation des créances que le gouvernement a à charge des négociants qui ont des droits d’accises à payer, et auxquels l’administration fait crédit.

Ce déficit, dit l’honorable préopinant, a dû être accru depuis le dernier état de situation du trésor par la construction du chemin de fer, et il se demande quel est le moyen d’y faire face. Mais ce moyen est écrit en toutes lettres dans la loi qui ordonne l’érection de ce chemin ; ce sera par un emprunt, dont les intérêts et l’amortissement seront perçus sur le produit de cette route. L’emprunt ne se bornera pas, toutefois, à ce qui sera nécessaire pour couvrir la dépense que nécessite la route en fer, mais il pourvoira encore à celles qui sont réclamées à l’effet de compléter promptement nos communications ordinaires jugées indispensables, et qui ont été sollicitées, avec de vives instances et à diverses reprises, par d’honorables membres de cette assemblée.

Le gouvernement se propose donc de soumettre dans peu à la législature un projet d’emprunt qui embrassera des dépenses de la route en fer, celles qui seront affectées à l’ouverture et à l’achèvement de route ordinaires vivement sollicitées par le pays et en troisième lieu, à l’acquisition de la canalisation de la Sambre pour laquelle le gouvernement a conclu des arrangements avec les concessionnaires. Cet emprunt au surplus n’aura rien d’onéreux, parce qu’il sera suffisamment couvert par les produits directs de ces voies nouvelles de communication, sans compter les avantages immenses qui en résulteront pour l’agriculture, l’industrie et le commerce.

M. Dumortier. - Si M. le ministre des finances veut bien s’engager à accompagner la présentation du projet d’emprunt dont il nous a parlé d’un état de situation du trésor public, je n’insisterai pas.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je le ferai.

Ordre des travaux de la chambre

M. Dubus. - Dans une des dernières séances de la chambre, il a été déposé sur le bureau un rapport sur une partie du projet de loi relatif à l’organisation de l’instruction publique. L’impression de ce rapport est avancée au point qu’il pourra être distribué demain. Je demanderai s’il ne conviendrait pas que dans cette éventualité la chambre en fixât la discussion à vendredi prochain.

- La proposition de M. Dubus est adoptée.

M. Devaux. - Il est bien entendu, par le vote que vient d’émettre la chambre, que nous aurons à vider préalablement la question préjudicielle qui a été soulevée à l’occasion de ce rapport. Car il n’a pas encore été décidé si l’on ferait du rapport sur l’enseignement supérieur une loi séparée. Je désire qu’il soit entendu que la fixation de l’ordre du jour pour vendredi ne préjuge rien à cet égard.

M. Liedts. - Puisqu’il y a deux jours d’intervalle et que le rapport du projet sur la taxe des lettres et sur les postes rurales pourra être imprimé et distribué, je demande qu’on en fixe également la discussion à vendredi.

M. de Puydt. - Je fais la même demande pour le rapport relatif à la construction de forteresses sollicitée par M. le ministre de la guerre.

M. Desmet. - Je demande la parole, mais c’est pour un autre objet que celui qui est en discussion ; c’est pour inviter M. le président à bien vouloir engager les sections qui ne se sont pas encore occupées de la proposition sur l’industrie cotonnière, de vouloir s’en occuper sans retard. Trois sections ont déjà terminé leur travail et ont nommé leurs rapporteurs ; mais vous sentez que si les autres ne font de même, la section centrale ne pourra se réunir pour s’occuper de cet objet qui est de la plus grande importance, et qui, je puis vous l’assurer, réclame avec urgence une décision de la chambre.

M. Dumortier. - Il s’est passé quelque chose d’étrange dans trois sections chargées d’examiner le projet de loi. La chambre a décidé que les sections ne s’occuperaient de la proposition de M. Desmaisières qu’après que l’impression de tous les renseignements serait terminée. Si je suis bien informé, trois sections ont clos leur examen et nommé leurs rapporteurs avant notre séparation, alors que tous les renseignements que la commission s’est procurés sur cette importante question n’avaient pas été distribués. Il est impossible d’examiner une question en connaissance de cause sans posséder tous ses éléments.

Je désire donc que la chambre invite les trois sections que je signale à réviser leur travail et à présenter un nouveau rapport basé sur des renseignements qu’elles n’auront pas été à même d’examiner.

M. Desmet. - Il est vrai, comme vient de vous le dire l’honorable député de Tournay, qu’il n’y a pas très longtemps que toutes les pièces de l’interrogatoire sur l’industrie cotonnière se trouvent imprimées, car ce n’est seulement qu’hier que nous avons reçu les dernières. Cependant, il vous a dû paraître très étrange qu’on ait mis plus d’un mois pour faire l’impression de cet interrogatoire qui n’était certes pas si volumineux pour traîner un si long temps.

La section à laquelle j’appartiens a été convoquée par son président pour s’occuper de la proposition sur le coton ; dans sa première séance, elle a délibéré sur le point de savoir si, quoique toutes les pièces de l’interrogatoire ne fussent pas encore imprimées et distribuées, elle pourrait continuer à s’occuper de l’objet pour lequel on était convoqué ; après une discussion assez longue et avoir entendu un membre de la commission de l’industrie et du commerce, qui était d’avis qu’on pouvait continuer la délibération, vu qu’il pouvait assurer à la section que les principaux interrogatoires se trouvaient distribués et que les autres qui restaient n’étaient que pour ainsi dire une répétition de ceux-là, la section a été d’avis de continuer à délibérer sur la question cotonnière, et après sept à huit jours de discussion, elle a entièrement achevé son travail et nommé son rapporteur.

Messieurs, il serait assez étrange qu’à présent on voulût revenir sur un travail pour lequel on a été légalement convoqué dans les sections et qui est entièrement achevé dans trois. Je ne conçois pas cette manière extraordinaire d’agir ; il paraît qu’on pourrait dire qu’on veut chercher de toutes les manières pour trouver un prétexte pour ajourner la discussion d’un objet dont on ne peut contester la grande importance, et qui intéresse un si grand nombre de malheureux ouvriers.

D’ailleurs, messieurs, que vous demandent les fabricants de coton ? que la solution d’une question qui est pendante dans votre chambre depuis trois ans. Vous ne pouvez pas refuser de leur donner cette solution, ils ne vous la demandent que pour leur gouverne ; quand vous vous serez prononcés, ils sauront du moins à quoi s’en tenir, ils sauront s’ils doivent renvoyer ou non leurs nombreux ouvriers, s’ils doivent transporter leurs établissements en pays étrangers ou les conserver à la Belgique. Vous ne pouvez ignorer que, tout récemment encore, une fabrique d’Anvers vient de quitter la Belgique pour s’établir en Hollande.

M. Eloy de Burdinne. - C’est moi qui ai proposé dans ma section l’examen immédiat de la question cotonnière : mais je ne pensais pas que l’on aurait terminé le travail avant l’impression de tous les renseignements. Aussi ai-je été fort surpris d’apprendre, un jour que je ne m’étais pas rendu à ma section, qu’on y avait nommé un rapporteur.

- La chambre décide que les rapports non imprimés ne seront pas mis à l’ordre du jour de vendredi.

La séance est levée à 2 heures et demie.