(Moniteur belge n°133, du 13 mai 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à midi et demi.
M. de Renesse fait l’appel nominal.
M. H. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la séance précédente.
- Le procès-verbal est adopté.
M. de Renesse fait savoir que les pièces suivantes ont été adressées à la chambre.
« Le sieur C. de Leemans, notaire, signale les inconvénients qui résulteraient de la compatibilité des fonctions de notaire et de bourgmestre ou échevin, si elle était adoptée. »
- Renvoyée à la section centrale chargée de l’examen du projet de loi communale.
« Plusieurs propriétaires de la province de Liège s’élèvent contre les réclamations qui ont été faites au sujet de la légalité des opérations cadastrales. »
- Renvoyée à la commission chargée d’examiner la situation des opérations cadastrales.
« La régence de Bottelaere demande que cette commune soit érigée en chef-lieu du canton d’Oosterzeele. »
- Renvoyée à la commission chargée de l’examen du projet de loi sur la circonscription des justices de paix.
« L’avocat van den Bosche, conseiller de régence à Alost, demande que, dans le projet de circonscription judiciaire, cette ville soit érigée en chef-lieu d’arrondissement judiciaire. »
- Renvoyée à la commission chargée d’examiner les propositions de MM. Dewitte et Desmet.
M. le président donne lecture du numéro 11 de l’article 66 du gouvernement.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - J’ai l’honneur de prévenir la chambre que mon collègue, le ministre de l’intérieur, est légèrement indisposé, et que je suis chargé de le remplacer dans cette discussion. Comme je ne suis pas aussi bien préparé que lui, j’aurai besoin de l’indulgence de la chambre.
M. le président. - Le paragraphe en discussion est ainsi conçu :
« La moitié des frais des tables décennales de l’état civil. »
- Ce numéro, ainsi que les deux suivants (12 et 13) sont adoptés sans donner lieu à aucun débat.
« Les dettes de la province liquidées et exigibles, et celles résultant des condamnations judiciaires à sa charge. »
« Les pensions aux anciens employés de la province, conformément au règlement adopté par le conseil. »
M. le président. - « 14° Le traitement des aliénés indigents et les frais d’entretien des indigents retenus dans les dépôts de mendicité, lorsqu’il sera reconnu par le conseil que les communes n’ont pas le moyen d’y pourvoir. »
M. Verdussen. - Il faudrait faire concorder la loi d’août 1833 sur les dépôts de mendicité, avec le paragraphe en discussion.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je crois que la disposition actuelle peut se concilier avec la loi d’août 1833 ; cette disposition est fondamentale ; si des modifications doivent être faites à la loi de 1833, la disposition dont il s’agit se trouvera naturellement modifiée.
M. de Muelenaere. - Le paragraphe est entièrement conforme à la loi de 1833. (Aux voix ! aux voix !)
- Le paragraphe est adopté.
M. le président. - « 16° Les frais afférents aux séances. »
La section centrale propose de mettre : « Les frais relatifs aux séances du conseil. »
M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, d’après la décision de la chambre qui a pensé qu’une indemnité devait être accordée aux membres du conseil qui n’habitent pas le chef-lieu, je crois qu’il conviendrait d’ajouter au paragraphe : « et l’indemnité allouée aux conseillers. » (Appuyé ! appuyé !)
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je crois qu’il est d’autant plus nécessaire d’introduire dans la loi l’amendement proposé par M. de Theux, que l’article tel qu’il est rédigé l’a été dans la prévision qu’il ne serait pas alloué d’indemnité aux membres du conseil provincial.
L’article du gouvernement n’a reçu qu’une modification de rédaction. Je pense qu’il ne peut exister aucune espèce de difficulté sur l’adoption de l’amendement que je me proposais moi-même de soumettre à la chambre.
M. Eloy de Burdinne. - Il me paraît que la dépense dont il est question devrait être mise à la charge de l’Etat. (Non ! non !)
M. Ernst. - La dépense est évidemment une charge de la province ; car elle varie suivant l’intérêt de la province.
M. Jullien. - C’est une chose déjà décidée.
M. de Muelenaere. - D’après la loi, les séances du conseil provincial seront publiques ; or dans la plupart des provinces il n’existe pas de local pour la publicité de ces séances. Des frais seront indispensables pour en disposer.
Ces frais seront-ils à la charge de la province ou de la commune ? Je crois que la chambre pensera que ce sont des frais provinciaux, mais il faudrait en faire mention dans la loi.
M. de Theux, rapporteur. - La section centrale a prévu cette difficulté. Elle a effectivement mis la dépense à la charge de la province. D’après l’article 67 amendé par la section centrale, l’entretien de l’hôtel du conseil provincial sera mis à la charge de la province ; d’après les numéros 7 et 8 de l’article en discussion présenté par la section centrale, il ne peut rester aucun doute à cet égard.
M. Dumortier. - Le numéro 7 de l’article porte comme une charge provinciale le loyer, les contributions, l’entretien des édifices et bâtiments provinciaux, ou à l’usage de la province ; il est incontestable que la salle des séances du conseil est comprise dans cette disposition. Tout le monde comprend que les frais de construction du local dans lequel siégera le conseil provincial sont des frais à la charge de la province.
M. Desmanet de Biesme. - Dans la loi, l’entretien de l’hôtel du gouverneur de la province est à la charge de l’Etat ; la salle des séances du conseil peut faire partie de cet hôtel ; il semblerait donc que les frais d’entretien devraient être également à la charge de l’Etat.
M. de Theux, rapporteur. - Lorsque le conseil provincial siégera dans une des salles de l’hôtel du gouverneur, il n’y aura plus qu’à faire disposer cette salle pour la tenue du conseil, et tout sera fini.
- L’amendement de M. de Theux est mis aux voix et adopté.
M. le président. - « 13° (de la section centrale) Les secours à accorder aux communes pour l’instruction primaire et moyenne, pour les grosses réparations des édifices communaux. »
M. de Robaulx. - Je demanderai si le gouvernement cessera d’accorder des secours aux communes pour l’instruction primaire.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il n’est rien préjugé à cet égard par la disposition de la section centrale.
- Le paragraphe est adopté.
M. le président. - « 14°. Les frais d’entretien des enfants trouvés, conjointement avec les établissements de bienfaisance et les communes, dans la proportion à déterminer par la loi. »
M. de Theux, rapporteur. - D’après la loi relative aux enfants trouvés, je crois qu’il faudrait rédiger le paragraphe de la manière suivante : « Les frais d’entretien des enfants trouvés, dans la proportion déterminée par la loi. » (Appuyé ! appuyé !)
- La nouvelle rédaction proposée par M. de Theux est mise aux voix et adoptée ; elle remplace le n°14.
Les deux derniers paragraphes suivants sont adoptés sans discussion :
« 17° Les frais des collèges d’administration des prisons, autres que les grandes prisons de l’Etat ; »
« 18° Les fonds destinés à faire face aux dépenses accidentelles ou imprévues de la province. »
M. le président donne lecture de la nouvelle rédaction de la section centrale sur le paragraphe relatif aux églises cathédrales.
Cette disposition est ainsi conçue :
« Les dépenses relatives aux églises cathédrales, aux palais épiscopaux et aux séminaires diocésains, conformément aux décrets des 18 germinal an XI et 30 décembre 1809. »
M. de Theux a la parole pour développer cette rédaction.
M. de Theux, rapporteur. - Messieurs, la section centrale s’est occupée de l’examen de l’amendement qui lui avait été renvoyé dans la dernière séance. Après avoir examiné toutes les dispositions existantes sur la matière, la section centrale a pensé qu’elle ne pouvait mieux faire que d’adopter la rédaction qui vous est soumise ; elle a conservé par cette rédaction ce qui avait été consacré par l’usage, d’après les décrets des 18 germinal an XI et 30 décembre 1809.
Les dépenses dont il s’agit étaient à la charge des provinces : toutefois, à diverses occasions, il a été accordé des subsides pour ces sortes de dépenses. Le principe des subsides n’a point été établi dans les décrets ; en conséquence la section centrale n’a pas jugé à propos d’exprimer ce principe dans l’article. Les choses restent dans le même état, et il n’est apporté aucune difficulté à ce que le gouvernement accorde des subsides lorsqu’il y aura lieu d’en accorder.
Le décret du 18 germinal an XI porte :
« Les conseils-généraux de département proposeront les sommes qu’ils croiront convenable d’appliquer : 1° aux acquisitions, locations, réparations et ameublement des maisons épiscopales ; 2° à l’entretien et réparation des églises cathédrales ; 3°, etc. »
La loi du 30 décembre 1809 contient les dispositions suivantes :
« Art. 106. Les départements compris dans un diocèse sont tenus, envers la fabrique de la cathédrale, aux mêmes obligations que les communes envers leurs fabriques paroissiales.
« Art. 107. Lorsqu’il surviendra de grosses réparations ou des reconstructions à faire aux églises cathédrales, aux palais épiscopaux et aux séminaires diocésains, l’évêque en donnera l’avis officiel au préfet du département dans lequel est le chef-lieu de l’évêché ; il donnera en même temps un état sommaire des revenus et des dépenses de sa fabrique, en faisant sa déclaration des revenus qui restent libres après la dépense ordinaire de la célébration du culte. »
L’article 111 porte que le département dans lequel l’édifice est situé doit payer un dixième en sus dans la dépense.
Dans la dernière séance, on a indiqué l’intention de mettre à la charge des communes dans lesquelles les établissements dont il est question sont situés, une partie des réparations de ces établissements. La section centrale a repoussé ce système ; elle a pensé qu’il s’agissait de consacrer de nouveau le principe que vous avez posé relativement aux dépenses des tribunaux.
Tels sont les motifs qui ont détermine la section centrale dans la proposition dont vous êtes appelés à vous occuper ; cette disposition a été adoptée à la grande majorité de ses membres. (Très bien !)
M. Pirson. - Je demande pourquoi on établit une différence entre les frais de réparation des édifices épiscopaux, et les frais de réparation des cours ; ces derniers ont été mis à la charge de l’Etat, et on s’est déterminé à cette mesure pour éviter les difficultés qui pouvaient surgir entre les provinces ; je demande pourquoi on a suivi un principe si différent ?
Il faut être conséquents avec vous-mêmes : vous avez décidé que les frais de réparation des édifices qui appartiennent aux cours sont mis à la charge de l’Etat. Il devait en être de même à l’égard des édifices épiscopaux.
Les frais du palais national sont payés par l’Etat ; cependant cet établissement procure beaucoup d’avantages à la ville, et on aurait pu les faire payer par Bruxelles et l’Etat ; cependant vous ne l’avez pas voulu, et vous n’avez établi aucune base de proportion dans la dépense ; c’était le même principe qui devait être suivi.
J’ajouterai une dernière considération, c’est que d’après la constitution les frais du culte sont à la charge de l’Etat, et que les frais de réparation des édifices épiscopaux peuvent être considérés comme faisant partie des frais du culte.
M. Dumortier. - Messieurs, il s’agit d’une question purement financière ; il s’agit de savoir quel budget supportera la dépense relative aux réparations des édifices épiscopaux.
Que ce soit l’Etat, la province ou la commune, cela importe peu pour le contribuable ; car lorsque les réparations seront nécessaires, il faudra qu’elles soient faites. Ce dont nous devons nous occuper, c’est de coordonner les charges avec les ressources, c’est de faire que le budget de l’Etat ne soit point trop chargé, qu’il ne soit point impayable, alors que les provinces auraient pour ainsi dire leurs coudées franches.
Dans la section centrale j’ai voté pour le maintien de ce qui existe, c’est-à-dire, pour que la dépense dont il s’agit soit exclusivement une charge provinciale.
Les provinces feront faire les réparations d’une manière plus économique que l’Etat ; elles ne feront rien exécuter avec luxe. Mais pour moi, je n’ai pas besoin de luxe ; je veux seulement qu’on maintienne, qu’on conserve ce qui existe. Si des événements particuliers nécessitaient des dépenses particulières qui seraient au-dessus des ressources de la province, vous seriez les premiers, messieurs, à voter l’allocation réclamée pour ne pas laisser détruire l’édifice qui aurait besoin de réparations. (Assentiment.) Les églises cathédrales font partie des beaux-arts, et elles sont la gloire de notre pays. La cathédrale d’Anvers dans le genre gothique, la cathédrale de Tournay dans le genre lombard, sont les plus beaux monuments qui existent ; ils font l’objet de l’admiration de tous les étrangers.
Quant à la question de savoir si les communes doivent intervenir dans la dépense, je réponds négativement. Il y a peu de jours, vous avez grevé les communes d’une charge très forte en établissant le principe que la dépense relative à l’entretien des enfants trouvés serait supportée moitié par la province, moitié par la commune. Vous avez dégrevé ainsi la province et grevé la commune : faut-il encore une fois améliorer la situation de la province au détriment de la commune ? Evidemment, il ne peut en être ainsi, car la commune serait grevée au-dessus de ses ressources.
Les administrations provinciales sont dans un état prospère. J’ai fait partie de ces administrations ; j’ai siégé dans le conseil de la province du Hainaut ; je puis vous donner l’assurance qu’il n’y a pas de budget qui puisse plus facilement faire face aux dépenses que le budget provincial.
Le budget de l’Etat, au contraire, est fortement chargé, surtout si les 24 articles sont mis à exécution ; pour moi, je désire qu’il n’en soit pas ainsi et, à cet égard, mes opinions sont bien connues. Quoi qu’il en soit enfin, nous devons considérer les 24 articles comme devant être mis à exécution. Le budget de l’Etat s’élèvera de 90 à 95 millions ; dans cette situation nous ne devons pas dégrever les provinces pour augmenter les charges du trésor. (Adhésion.)
- L’amendement de M. de Theux est mis aux voix et adopté.
L’ensemble de l’art. 66 est également adopté.
M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 67 du projet du gouvernement qui correspond à l’article 63 de la section centrale.
- La division par paragraphes est demandée et accueillie.
Les numéros 1, 2, 3 et 4, sont successivement mis aux voix et adoptés. Ils sont ainsi conçus :
« Sont spécialement à la charge de l’Etat :
« 1° Le traitement et les frais de route du gouverneur et de la députation du conseil ; »
« 2° Le traitement du greffier provincial ; »
« 3° Le traitement des employés et les frais de bureau du gouvernement provincial ;
« 4° Le loyer et l’entretien de l’hôtel du gouvernement provincial, l’entretien et le renouvellement de son mobilier. »
M. le président. - La discussion est ouverte sur le n°5, rédigé en ces termes :
« Les traitements et abonnements des commissaires d’arrondissement. »
La discussion est ouverte sur le paragraphe.
M. Pirson. - Je crois qu’il serait plus convenable d’ajourner la discussion de ce paragraphe jusqu’à ce que la chambre ait pris une décision à l’égard des commissaires d’arrondissement. Je remarque en outre que, dans la loi que nous a présentée M. le ministre sur la circonscription des justices de paix, il est question dans ce projet de créer des commissaires de canton à la nomination du gouvernement. Il est possible que cette innovation soit admise. N’y aura-t-il pas empiétement sur les fonctions de commissaire de district ? Par qui ces commissaires seront-ils rétribués ? Je voudrais bien que M. le ministre de la justice s’expliquât à cet égard. Dans tous les cas, je conclus à l’ajournement de la discussion du paragraphe 5.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Quoique je pense que l’opinion de la chambre soit déjà formée à l’égard du maintien des commissaires d’arrondissement, je ne vois aucun inconvénient à ce que l’ajournement demandé par l’honorable M. Pirson soit accueilli.
Quant aux commissaires auxquels l’honorable membre a fait allusion, ce ne sont pas des délégués de l’administration, ce sont des commissaires de police. Il paraîtrait naturel qu’ils fussent à la fois à la charge de l’Etat et de la commune. Le silence de la loi ne préjuge en rien sur ce que vous déciderez dans les questions qui pourraient se présenter ultérieurement. Les désignations portées dans l’article 63 ne sont pas exclusives.
Si plus tard il vous semble convenable de porter à la charge soit de l’Etat, soit de la commune, soit enfin de la province, une dépense quelconque, les dispositions de la loi provinciale ne pourront y former aucun obstacle. Il n’y a donc pas lieu de s’occuper actuellement des commissaires. Pour ce qui regarde les commissaires d’arrondissement, je le répète, bien que je croie l’opinion générale de la chambre favorable à leur conservation, je ne m’oppose pas à ce que l’ajournement du paragraphe 5 soit admis.
M. Pirson. - Répondant à M. le ministre de la justice, je déclare savoir bien que les commissaires de canton ne seront pas en effet les remplaçants des commissaires de district. Mais il y a cette question à examiner. Les commissaires des cantons feront auprès des juges de paix les réquisitions qui, actuellement, sont dans les attributions des bourgmestres des communes. Ainsi un fonctionnaire de l’ordre administratif, qui remplit aujourd’hui en certains cas des fonctions judiciaires, résignera l’une de ses attributions à un agent du gouvernement. Si M. le ministre de la justice n’a eu en vue que de créer des substituts de procureurs du Roi, il est fort possible que son projet échoue devant cette assemblée. Je prétends donc que puisque les commissaires des cantons auront un pouvoir administratif conféré jusqu’à ce jour aux bourgmestres, il y a analogie entre leurs fonctions et celles des commissaires d’arrondissement, De cette manière il se présente une question nouvelle à examiner, et nous ne pouvons voter un paragraphe qui consacre le mode de paiement du traitement d’un ordre de fonctionnaires dont la conservation est problématique.
M. Dumortier. - Il me semble, messieurs, que nous pouvons voter le paragraphe actuellement en discussion, sauf à laisser intacte la question du maintien des commissaires de district, sans préjudice de la manière dont vous croirez devoir la résoudre.
M. de Brouckere. - J’allais faire l’observation que vient de présenter l’honorable M. Dumortier. Si plus tard nous n’admettions pas les fonctions de commissaire d’arrondissement dans l’ordre administratif provincial, le paragraphe 5 tomberait de lui-même.
- Le paragraphe 5 est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe 6, ainsi conçu : « Les frais concernant la milice et ceux des commissions médicales », est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe 7, ainsi conçu : « Les frais de collèges d’administration des prisons, l’entretien des bâtiments affectés aux prisons et maisons de dépôt, autres que les salles de police municipale », devenant sans objet par suite d’une décision antérieure de la chambre, est supprimé.
M. le président. - La discussion est ouverte sur le paragraphe 8, ainsi conçu :
« Les frais de casernement de la gendarmerie. »
M. d’Hoffschmidt. - Je prierai M. le rapporteur de la section centrale de vouloir bien me donner une explication sur ce paragraphe. Je lis dans le rapport de la section centrale :
« La section centrale l’a adopté provisoirement et renvoyé aux dispositions transitoires, en attendant que la loi sur la gendarmerie y statue. »
En effet l’article 127 porte :
« En attendant la loi sur l’organisation de la gendarmerie, il n’est rien innové au mode de supporter les frais de casernement. »
La section centrale n’a donc pas adopté la proposition du gouvernement. Je désirerais dans ce cas connaître les motifs qui ont déterminé cette divergence d’opinions.
M. de Theux, rapporteur. - Il est évident que la section centrale n’a pas adopté l’opinion du gouvernement, puisqu’elle n’a maintenu les choses sur le pied actuel que transitoirement, c’est-à-dire, jusqu’à l’adoption de la loi sur l’organisation de la gendarmerie.
M. d’Hoffschmidt. - Je demande que les frais de casernement de la gendarmerie soient portés à la charge de l’Etat. L’expérience a prouvé que depuis que le budget communal supporte cette dépense, le service du matériel se fait très mal. Les bourgmestres des différentes communes d’un canton devraient s’assembler au chef-lieu pour déterminer la quote-part de chacune d’elles dans les frais de casernement. Cette réunion n’a presque jamais lieu. C’est le bourgmestre du chef-lieu cantonal qui compose seul le budget communal et plus tard les administrations réclament contre la distribution qu’il a faite de son autorité privée. Les literies et autres objets de casernement sont très mal entretenus. Il arrive sans cesse des plaintes à ce sujet aux autorités.
Je ne vois pas pourquoi tous les frais occasionnés par la gendarmerie ne seraient pas mis à la charge de l’Etat. La gendarmerie est instituée pour veiller à la sûreté du pays tout entier. Le seul motif que la section centrale nous donne pour conserver la législation actuelle, c’est qu’il convient d’attendre la loi sur l’organisation de la gendarmerie. Je ne sache pas qu’il se soit élevé, jusqu’à ce jour, des plaintes sur cette partie de la force publique. Il me semble que ce service marche très bien. La loi sur la gendarmerie est donc une des moins pressantes. Elle ne doit venir qu’après qu’une multitude d’autres beaucoup plus urgentes auront été discutées.
Tels sont les motifs qui me font désirer que l’on statue immédiatement sur la question de savoir qui, de la commune ou de l’Etat, devra payer les frais de casernement de la gendarmerie.
M. Dumortier. - L’honorable M. d’Hoffschmidt a demandé quels étaient les principes de la section centrale pour faire du numéro en question un article transitoire. Il me sera facile de lui répondre.
Nous avons admis en principe de mettre à la charge des communes toutes les dépenses qui sont du ressort de la famille politique ; à la charge de la province, toutes celles qu’entraîne la réunion de ces familles diverses ; enfin à la charge de l’Etat, les dépenses du gouvernement proprement dit. Il s’est cependant trouvé certaines dépenses qui, réparties sur ces différentes branches du corps politique, se feraient avec plus d’économie si elles étaient particulièrement affectées à l’une d’elles ; et comme en définitive elles produisent le même résultat, nous n’avons pas hésité à faire de ces sortes de dépenses des charges spécialement provinciales ou communales. C’est ainsi que nous avons raisonné quand il s’est agi des menues réparations des locaux occupés par les cours et tribunaux.
La dépense actuelle rentre dans la même catégorie. Qu’est-ce que la gendarmerie ? C’est un corps placé par le gouvernement à la disposition des communes. Les communes peuvent donc intervenir pour une quote-part plus ou moins grande dans les frais de leur entretien. Si vous intervertissez ce système, il faudra que l’Etat achète ou loue pour le casernement des gendarmes dans le royaume la multitude de locaux possédés ou loués par les communes pour leur usage. Les constructions à faire seront beaucoup plus frayeuses que si on en laissait le soin à chaque localité. On pourrait citer des milliers d’exemples qui prouvent que les provinces et les communes apportent dans leurs constructions une économie évaluée à un tiers de la dépense que ferait le gouvernement.
Si la proposition de l’honorable M. d’Hoffschmidt était adoptée, il s’ensuivrait que l’Etat devrait élever partout de petites casernes, tandis que l’on se contente actuellement des bâtiments ne possèdent les différentes communes.
M. d’Hoffschmidt a dit que nous pouvions nous passer d’une loi sur la gendarmerie. Mais il oublie que l’obligation de réorganiser ce corps nous est imposé par l’article 120 de la constitution. Vous voyez donc que la question n’est pas sans difficulté, et la section centrale n’a pas cru pouvoir la trancher par un article de la loi provinciale.
M. Jullien. - Puisqu’il s’agissait de rendre à chacun les dépenses qu’il lui appartient de faire, c’était le cas de mettre à la charge de l’Etat les dépenses de la gendarmerie. On a toujours réclamé contre l’impôt supporté par les communes pour le casernement de ce corps. La gendarmerie fait partie de la force publique. Les individus qui la composent sont officiers de la police judiciaire comme les juges de paix ; ils sont placés sur la même ligne que tous les agents qui contribuent à la sûreté publique, et qui sont rétribués par l’Etat. Or, je vous demande de quel droit mettrait-on à la charge des communes la dépense qu’entraîne leur casernement. On dit qu’en définitive ce sont les contribuables qui paient. Soit, mais il serait à désirer que les dépenses fussent classées d’une manière rationnelle dans les divers budgets, selon que l’intérêt général ou que les localités l’exigent. J’appuierai la proposition de l’honorable M. d’Hoffschmidt.
M. d’Hoffschmidt. - L’honorable M. Dumortier a dit que les dépenses de construction entreprises par les communes se font beaucoup plus économiquement. Je crois qu’il se trompe. Depuis que le gouvernement a admis le système des adjudications, il y de l’économie partout. Il mettrait en adjudication le logement des gendarmes et le mobilier nécessaire pour ce logement. Ces adjudications seraient faites par l’entremise de l’autorité militaire avec la plus grande facilite.
Je le répète, les gendarmes sont très mal dans leur casernement. On ne peut forcer les administrations communales à réformer ce mauvais système. L’honorable M. Dumortier a dit aussi que la gendarmerie faisait la police des communes ; mais, messieurs, cette police ne se rattache-t-elle pas à l’intérêt général, puisqu’elle est faite dans l’intérêt de tous, puisque sans elle l’ordre social serait complètement troublé ?
L’honorable M. Dumortier a dit de plus que l’organisation de la gendarmerie devait faire l’objet d’une loi. Je sais que l’article 120 de la constitution nous en impose l’obligation. Mais comme cette loi n’est nullement urgente et que par conséquent nous ne l’aurons que dans 5 à 6 ans, il est nécessaire de déterminer dès à présent le point sur lequel j’appelle l’attention de la chambre.
M. Dumortier. - Un honorable préopinant a demandé de quel droit on ferait payer par les communes les frais de casernement d’un corps employé par le gouvernement. La raison en est simple. La gendarmerie n’est pas un corps exclusivement à la disposition de l’administration centrale, c’est un corps mixte. Eh bien, il est de toute justice que, servant à la fois au gouvernement et à la commune, il soit payé par l’un et par l’autre. Que l’Etat paie le traitement des gendarmes, et que la commune leur fournisse le logement.
Qu’arrivera-t-il, si vous supprimez cette dépense évidemment communale ? Il en résultera que vous grèverez inutilement le budget. Il existe actuellement des bâtiments affectés au casernement de la gendarmerie. Vous devez consacrer au budget de l’Etat, pour l’achat et la location de ces bâtiments, des sommes considérables. Il est possible que les gendarmes se plaignent. Leurs casernes ne sont pas meublées brillamment. J’en sais quelque chose, car j’ai logé dans l’une d’elles sous le roi Guillaume. (On rit.) Mais enfin les locaux actuels suffisent.
Il est inutile d’ajouter au budget de l’Etat une dépense nouvelle dont il est difficile de calculer la portée. Car enfin elle peut arriver à des millions.
- Une voix. - Ah ! ah !
M. Dumortier. - Ne dites pas : Ah ! Songez qu’il faudra une caserne pour chacune des brigades disséminées dans les cantons du royaume. Et je ne sais pas si les adversaires du système pourraient nous présenter l’évaluation des frais qu’entraînerait l’adoption du leur.
Je me résume : la section centrale a pensé que dans une dépense mixte, comme l’est celle de la gendarmerie, il convenait que le gouvernement payât les traitements de ce corps, et que les communes pourvussent au casernement des brigades disséminées dans tous les cantons du royaume.
M. de Robaulx. - Je ne puis partager l’opinion émise par M. Dumortier en ce qui concerne la gendarmerie. Il la considère comme une troupe mixte parce qu’elle est sujette aux réquisitions des autorités locales ; mais je ne sache pas qu’il y ait une seule troupe qui ne soit sujette à de tels réquisitoires. Ainsi la garnison de Bruxelles peut être requise par l’autorité municipale, même avant la réquisition de la gendarmerie ; cependant la garnison de Bruxelles n’est pas formée par une troupe mixte. La gendarmerie est un corps d’élite qui a pour mission spéciale de s’occuper plus particulièrement de la tranquillité intérieure. Elle est l’auxiliaire du ministère public ; elle est répartie dans les diverses localités pour être à la disposition de l’autorité judiciaire. Elle est une troupe tout comme une autre, dont le gouvernement dispose : il appartient à l’Etat de distribuer sa police ou ses moyens de police comme il lui convient ; mais les gendarmes sont sous les ordres du ministre de la guerre qui peut les employer à l’armée.
Quant à ce qui regarde leur casernement, on a fait remarquer qu’une loi…
- Une voix. - Une loi du 28 germinal de l’an VI.
M. de Robaulx. - Je n’aime pas à me rappeler les lois de l’an VI ; elles sont trop funestes.
Je disais qu’on avait fait remarquer qu’une loi mettait les frais du casernement de la gendarmerie à la charge des communes ; je crois, d’après les considérations que j’ai exposées, qu’on peut mettre ces frais à la charge de l’Etat. J’appuie la proposition de M. d’Hoffschmidt.
Mais il y a danger, dit M. Dumortier, à mettre le casernement de la gendarmerie à la charge de l’Etat ; la dépense sera considérable. Cependant si M. Dumortier a éprouvé par lui-même combien étaient mauvais les logements des gendarmes, il devrait chercher à les améliorer. Dans la position des choses, nous sommes tous exposés à faire des visites forcées à la gendarmerie. Les améliorations sont urgentes, soit dans l’intérêt des étrangers innocents ou coupables qui osent venir chez nous, soit des régnicoles.
Vous devez ne pas oublier que c’est avec peine que les communes paient les frais de casernement, et c’est un des motifs principaux du mauvais état des casernes ; il est plus naturel que le gouvernement se charge de cette dépense puisque la gendarmerie est toujours aux ordres de l’Etat. La mauvaise organisation signalée par M. Dumortier, et dont il a été victime, doit être réformée dans l’intérêt même de cet honorable membre, s’il doit encore faire séjour dans les casernes des gendarmes.
M. Fallon. - Je crois qu’il serait imprudent d’improviser un service nouveau sur la gendarmerie. Je craindrais qu’en voulant faire cesser des inconvénients, on n’augmentât considérablement les dépenses.
Il existe au moins une caserne par canton, et le nombre des cantons est assez élevé.
Je ne sais pas ce qui s’est passé dans d’autres provinces, mais dans la province de Namur la gendarmerie n’a pas à se plaindre de la manière dont elle est logée. Depuis longtemps cette province s’est appliquée à acheter les locaux nécessaires au logement des gendarmes et il faudrait que le gouvernement les rachetât à la province ou aux communes.
Il peut exister, dans d’autres provinces, des inconvénients très graves ; mais je ne puis en parler.
M. A. Rodenbach. - Si vous ne voulez pas augmenter considérablement le budget de l’Etat, vous devez faire contribuer les provinces et les communes pour subvenir aux frais de casernement des gendarmes. Depuis la révolution ces frais ont été diminués d’une manière notable ; pourquoi ne persisterait-on pas dans un système économique ?
Comme on vous l’a fait observer, lorsque nous aurons à payer la dette hollandaise et qu’il faudra l’inscrire au budget, si vous enflez annuellement nos lois de finances, vous finirez par avoir un budget énorme, et vous ferez dire que par suite de la révolution on paie plus d’impôts que sous le gouvernement néerlandais.
M. de Muelenaere. - Sur qui doivent tomber les frais de casernement de la gendarmerie ? sera-de sur l’Etat, sur la province ou sur la commune ? On peut alléguer de fort bonnes raisons en faveur de l’un et de l’autre système.
Ceux qui pensent que les frais doivent être supportés par l’Etat disent que les gendarmes constituent une partie de la force publique ; que, par conséquent, cette dépense doit être assimilée aux dépenses des autres troupes de l’armée.
Il est également vrai de dire, avec ces honorables membres, que la gendarmerie est chargée d’un service spécial ; qu’elle est chargée d’un service de police : et, à cet égard, on a fait observer que les officiers de gendarmerie étaient même des officiers de police judiciaire ; qu’ils sont assimilés sous certains rapports aux procureurs du Roi, aux juges de paix, lesquels sont payés par l’Etat : mais à cela on peut répondre que les officiers de gendarmerie sont aussi payés par l’Etat, et qu’ici il ne s’agit que des frais de casernement.
Les commissaires de police sont payés par les villes et les communes où ils exercent leurs fonctions ; ce sont cependant des officiers judiciaires.
Je crois que les casernements seraient meilleurs si les frais en étaient à la charge de l’Etat. Mais je suis retenu par la crainte manifestée par M. Dumortier : si les frais sont à la charge de l’Etat, la dépense sera non seulement quadruplée, elle sera centuplée. Si on écoute les plaintes des officiers de gendarmerie, je suis sûr qu’une somme cent fois plus forte que celle qu’on emploie aujourd’hui sera nécessaire.
La section centrale n’a pas posé un principe utile en ajournant la décision de la question. Dans plusieurs provinces, les casernes sont dans un mauvais état ; elles réclament des réparations urgentes ; leur mobilier doit aussi être renouvelé en grande partie ; quelle est la cause de cet état de choses ? C’est qu’il y a incertitude sur la question de savoir par qui, dans la suite, les frais de casernement seront supportés.
Les communes trouvent toujours les moyens de différer les dépenses dans l’espoir que plus tard elles seront déchargées de ces dépenses, et que l’Etat ou la province seront appelés à les faire. Si la législation maintenait l’état de choses existant, les inconvénients viendraient à cesser, et il ne faudrait pas des sommes très élevées pour mettre les casernes dans un état convenable ; je ne dis pas dans un état qui pût satisfaire les exigences des officiers de gendarmerie.
Il ne faut pas adopter la proposition de la section centrale parce que toutes les difficultés que l’on élève dans les communes continueront à être élevées. Il importe de décider la question dans la loi même, et de maintenir le système actuellement existant.
M. d’Hoffschmidt. - Le principal argument que l’on a fait valoir contre ma proposition est celui-ci : Si la dépense du casernement de la gendarmerie est à la charge de l’Etat, on enflera le budget : mais croit-on qu’en mettant la dépense à la charge des communes, on fera des économies ? Est-ce qu’en définitive, comme on l’a très bien dit, les contribuables ne paieront pas ? Dans l’un et l’autre système la dépense sera faite par les contribuables, et il s’agit ici de savoir de quelle manière elle sera mieux faite. Les casernes sont en mauvais état ; le mobilier ne vaut pas mieux que les casernes ; il faut tout réparer : par qui l’amélioration sera-t-elle exécutée ?
Je vois de graves inconvénients à mettre la dépense à la charge des communes ; les communes opèrent avec assez peu d’ordre. Dans chaque canton on dresse tous les ans un inventaire des dépenses à faire ; puis on répartit cette dépense entre les communes ; mais cette répartition se fait sans règle. L’Etat opérerait plus régulièrement : il enverrait un inspecteur pour constater les améliorations nécessaires aux bâtiments et au mobilier ; on mettrait les travaux ou les fournitures en adjudication ; et ce mode, le plus rationnel, serait en même temps le plus économique.
Les adversaires de ce mode exagèrent les dépenses qu’il faudrait faire. Les communes, en grande partie, possèdent les bâtiments qui servent de casernes ; ces bâtiments ne sont propres qu’à l’emploi auquel ils sont consacrés ; les communes seraient très aises de se débarrasser de ces bâtiments, et les céderaient à bas prix.
Les différentes parties du mobilier des casernes seraient aussi cédées par elles à fort bon compte. Je ne vois donc aucun inconvénient sérieux à mettre les dépenses à la charge de l’Etat ; je n’y vois que des avantages, et je persiste dans ma proposition.
M. de Theux, rapporteur. - Il eût été à désirer, vient-on de dire, que la section centrale eût fait une proposition formelle sur le casernement de la gendarmerie : la section centrale a été arrêtée par deux considérations. Il lui a paru que le casernement de la gendarmerie devait, en principe, être à la charge de l’Etat ; mais il lui a paru impossible de prévoir à quelles dépenses on engagerait le gouvernement en posant en principe que le trésor devait fournir à ces dépenses.
La section centrale s’est rappelé qu’en exécution de la loi du 28 germinal an VI, beaucoup de bâtiments servant aux casernes ont été abandonnés gratuitement par l’Etat aux communes ; que d’autre part, en 1814 et 1815, le gouvernement a accordé des subsides assez considérables pour remettre les bâtiments et leur mobilier en bon état. C’est dans ces circonstances que la section centrale a cru prudent de maintenir ce qui existe en attendant que la question soit éclaircie. Elle a pensé que lorsque le gouvernement présenterait une nouvelle législation sur la gendarmerie, il produirait les documents nécessaires pour statuer sur cet objet.
M. Dumortier. - Je présume que la question est suffisamment éclaircie. On veut mettre la dépense à la charge de l’Etat ; on devrait bien nous faire connaître le montant de cette dépense.
Je viens de faire un calcul approximatif pour me donner une idée des frais qu’il y aurait à faire. Il y a environ 200 cantons..
- Des voix. - Il y en a 216 !
M. Dumortier. - Supposons que les bâtiments à construire dans chaque canton coûtent 10 mille francs ; pour 200 cantons, le chiffre s’élève à deux millions. Ce chiffre doit suffire pour éloigner la pensée de mettre la charge sur l’Etat. Mais indépendamment d’une première dépense, vous aurez annuellement les frais d’entretien du mobilier et de réparation des bâtiments, ou 200 mille francs au moins à porter au budget. D’après cet aperçu, ne vaut-il pas mieux continuer le système établi ?
M. de Brouckere. - Le paragraphe en discussion soulève une question difficile à résoudre.
On dit que les frais de casernement de la gendarmerie doivent être à la charge de l’Etat : en effet, cette arme fait partie de la force publique ; elle doit être mise sur la même ligne que les autres troupes ; il y a de plus de graves inconvénients à laisser les frais de casernement à la charge des cantons ; plusieurs faits le prouvent. J’en citerai un :
Il existe un canton dont le chef-lieu est une ville de six mille habitants, et dans laquelle il n’y a pas de gendarmerie, parce que cette ville n’a pas voulu fournir un local ; elle prétend que c’est à l’Etat à le fournir. L’absence de gendarmerie dans ce canton y entrave le service public ; ce que la ville dont je parle vient de faire, d’autres peuvent le faire, et l’inconvénient deviendra plus grave.
Cependant, changer tout d’un coup le système qui existe aujourd’hui présente aussi des inconvénients, La dépense ne s’élèverait sans doute pas à deux millions ; mais elle serait assez forte pour qu’on fût obligé d’y regarder à deux fois avant de la mettre à la charge de l’Etat. Il ne s’agirait pas de bâtir simultanément 216 casernes ; il s’agirait seulement de mettre à la charge de l’Etat les loyers des casernes qui sont actuellement à la charge des communes, ou de payer ces loyers aux communes quand elles possèdent les bâtiments.
La section centrale propose de remettre la solution de la question à un autre temps. M. de Muelenaere a trouvé que ce serait par là donner naissance à de profonds abus. Si vous annoncez au pays que la question ne sera décidée que dans deux ou trois ans, je demande quelles seront les communes qui consentiront à faire des dépenses pour l’amélioration des bâtiments et du mobilier des casernes ?
Aucune commune, aucune province ne consentira à en faire, car elles craindront de n’être pas remboursées. Le plus mauvais des expédients à prendre est celui qu’indique la section centrale ; c’est celui de ne décider rien. Je demande le renvoi de l’article à la section centrale, pour qu’elle nous fasse une proposition formelle après mûr examen. Il est de l’intérêt de l’Etat, de l’intérêt des communes, de l’intérêt de la gendarmerie que l’incertitude cesse.
Si la majorité de la section centrale croit que les frais de casernement sont une dette de l’Etat, alors on nous présentera un calcul des dépenses plus approximatif que celui que nous a présenté M. Dumortier.
Il faut le dire aussi, cet honorable membre n’a guère eu que quelques secondes pour établir le sien.
Je demande donc formellement le renvoi du paragraphe à la section centrale.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Messieurs, vous ne vous étonnerez pas de voir le gouvernement déserter de temps en temps la défense de quelques parties du projet sur lequel vous délibérez. La chambre se rappelle la manière dont elle a été saisie de ce projet. Il était l’œuvre d’une commission spéciale, et le gouvernement, pour accélérer la discussion, l’a présenté comme il était sorti des mains de cette commission, mais sans abdiquer le droit de réclamer quelques modifications. Il n’y a donc rien d’extraordinaire à ce que le gouvernement se rapproche des dispositions qui appartiennent à la section centrale. Cependant ici je me réunis à l’avis émis par l’honorable préopinant.
Il faut remarquer que la disposition finale de l’article transitoire proposé par la section centrale laissera planer l’incertitude qui résulte de la législation actuelle sur les obligations respectives de la commune, de la province et de l’Etat, sous le rapport de la dépense du casernement de la gendarmerie.
La législation, sur cette partie des dépenses publiques, n’est pas, en effet, très claire. La loi du 28 messidor an IV contient une disposition ainsi conçue : « Les dépenses du corps législatif et de la gendarmerie nationale seront acquittées par le trésor public. »
D’autre part, la loi du 28 germinal de l’an VI contient, article 83 : « Le casernement (de la gendarmerie) sera fourni par les soins des administrations centrales. » Et pour ce qui concerne les simple brigades, il y a, si je ne me trompe, une disposition analogue à l’égard des cantons ; elle porte : « Le casernement sera fourni par les soins des administrations centrales et communales. » De là un premier motif d’incertitude. Car il y a une expression tout à fait semblable pour le transport des prisonniers ; il est dit aussi que ce transport est fait par les soins de l’administration communale ; et cependant l’administration communale n’en fait que l’avance ; c’est l’Etat qui, en réalité, en fait la dépense. Il y a donc nécessité de faire cesser l’incertitude, qui peut, jusqu’à un certain point, légitimer les résistances des autorités provinciales et communales.
Bien que la constitution dise que les attributions de la gendarmerie doivent être déterminées par la loi, ce n’est pas là une invitation adressée à la législature de porter immédiatement une loi ; c’est simplement la déclaration d’un principe, à savoir : que les attributions de la gendarmerie ne peuvent être établies par le pouvoir exécutif.
Je crois que c’est là le véritable sens de la disposition citée par l’honorable député de Tournay ; car je ne puis admettre la nécessité d’une loi relative à la gendarmerie, en présence de la loi du 26 germinal an VI où le service et l’organisation de ce corps sont clairement définis.
Je ne suis pas très frappé des considérations que l’on a fait dériver de la nature de la dépense et par lesquelles on a voulu établir qu’elle devait être une charge de l’Etat. La chambre a déjà dévié de ces principes dans plusieurs dispositions de la loi actuelle. Ainsi pour les menues dépenses des tribunaux de première instance, de commerce, de justice de paix et de police, pour les réparations des maisons d’arrêt et des prisons autres que les grandes prisons de l’Etat, bien qu’évidemment ces dépenses fussent des dépenses d’intérêt général, cependant vous avez décidé que c’était la province qui devait y faire face. On en a déjà donné la raison : on a dit qu’une disposition de la loi du 12 juillet 1821, disposition qui se trouvait déjà dans les lois antérieures sur les contributions directes, a accordé aux provinces des centimes additionnels à charge de supporter certaines dépenses qui, par leur nature, devaient être une charge de l’Etat, et cela parce que ces dépenses pouvaient être surveillées par l’administration provinciale avec plus de facilité et de soins que par l’Etat, d’une manière plus économique, moins onéreuse pour les contribuables.
On a dit avec raison que la dépense de la gendarmerie était une dépense mixte. Le gouvernement en supporte peut-être les 9/10 ; car il paie les traitements ; ce qui peut compter pour la plus grande partie de ces dépenses.
Veuillez remarquer, messieurs, et déjà cette observation a été faite, que les commissaires de police, les gardes-champêtres et les bourgmestres, lorsqu’ils concourent à l’exécution des lois générales, sont des agents du gouvernement ; eh bien, la dépense de leur traitement est une charge des localités ; cependant les commissaires de police et les gardes-champêtres sont chargés d’une partie de la police judiciaire ; les bourgmestres sont dans le même cas ; ils sont aussi fonctionnaires de l’Etat, agents du gouvernement dans une foule d’occasions.
Je crois que la section centrale, si on lui renvoie la disposition sur laquelle nous délibérons, devra tenir compte aussi des faits accomplis. Par exemple, ne croyez pas que toutes les brigades de gendarmerie siègent dans tous les chefs-lieux de canton. Il est plusieurs cantons où le chef-lieu n’est pas le siège de la brigade de gendarmerie.
M. Fleussu. - Cela est vrai.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Telle commune plus populeuse que le chef-lieu a offert un local destiné à la gendarmerie, parce qu’elle croyait y trouver un avantage quelconque, soit pour sa sûreté, soit en raison de la dépense que fait toujours un corps tel qu’une brigade de gendarmerie. Il est des espèces de contrats ainsi formés entre l’administration générale et la commune. Les communes ne se bornent pas à offrir des locaux pour la gendarmerie ; elles en offrent même pour le casernement de l’armée. Plusieurs villes ont offert de construire à leurs frais des casernes, uniquement pour avoir l’avantage de posséder une garnison. Des offres de ce genre sont faites assez souvent à l’administration. La présence d’une forte garnison est regardée par une ville comme un grand avantage, en raison de ce qu’elle augmente considérablement la consommation. C’est ce qui fait qu’en plusieurs occasions, la commune offre de faire tous les frais de casernement ; j’entends parler des frais de logement.
C’est ce que la section centrale devra considérer dans la proposition qu’elle aura à nous faire, afin que nous suivions autant qu’il sera en notre pouvoir le système tel qu’il est aujourd’hui, tout en faisant disparaître cependant les incertitudes résultant de l’insuffisance de la législature.
Dans tous les cas, je crois que si l’article transitoire proposé par la section centrale avait été mis en discussion, il aurait dû être modifié en ce sens qu’au lieu de : « En attendant une loi sur la gendarmerie, » on aurait dû dire : « En attendant la loi d’organisation communale. » Mais je pense que le meilleur parti à prendre est d’adopter la proposition de l’honorable M. de Brouckere, c’est-à-dire le renvoi à la section centrale qui, en présence de textes divers et presque contradictoires sur cette partie des dépenses publiques, comprendra la nécessité d’une disposition formelle propre à lever tous les doutes.
M. d’Hoffschmidt. - Je me rallie à la proposition de M. de Brouckere.
M. Smits. - J’appuie le renvoi à la section centrale. Je désire qu’elle examine si ne pourrait pas mettre la gendarmerie dans la même catégorie que la cavalerie, dont les frais de casernement, d’après le règlement de 1814, sont à la charge des communes, sauf l’indemnité à laquelle ce règlement assujettit l’état envers elle.
M. Dumortier. - Ce serait créer un impôt au bénéfice des communes.
M. de Brouckere. - Laissez faire la section centrale.
M. Smits. - Cette indemnité serait accordée aux communes, sauf à elles à fournir le local nécessaire au casernement. Je désire que la section centrale examine s’il n’y aurait pas lieu à ce qu’il en fût ainsi pour la gendarmerie.
M. Lardinois. - Il faut le demander au ministre de la guerre.
- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et prononcé.
Les articles de 64 à 70 du projet de la section centrale, auxquels se rallie le gouvernement, sont adoptés en ces termes :
« Art. 64. Le conseil fixe le taux des traitements et des pensions des employés salariés par la province. »
« Art. 65. Il décide de la création et de l’amélioration des établissements publics aux frais de la province. »
« Art. 66. Il autorise les emprunts, les acquisitions, aliénations et échanges de biens de la province, et les transactions relatives aux mêmes biens. »
« Art. 67. Il autorise les actions en justice relatives aux biens de la province, soit en demandant, soit en défendant, sans préjudice de ce qui est statué à l’article 96 de la présente loi. Les actions sont exercées conformément à l’article 111. »
« Art. 68. Le conseil statue sur la construction des routes, canaux et autres ouvrages publics à exécuter en tout ou en partie aux frais de la province. »
« Art. 69. Lorsqu’il s’agit d’exécuter des ouvrages d’entretien ou de réparation, concernant plusieurs provinces, chaque province est appelée à en délibérer ; en cas de contestation le gouvernement décide. »
« Art. 70. Le conseil adopte les projets, plans et devis des travaux pour lesquels il vote des fonds, à moins qu’il ne les renvoie à l’approbation de la députation permanente. »
M. le président. - La chambre passe à la discussion de l’article 75 du projet du gouvernement. Il est ainsi conçu :
« Il (le conseil provincial) donne son avis, et le gouvernement décide sur toute autre construction de routes, canaux, écluses et travaux d’utilité publique qui intéressent la province. »
La section centrale propose la suppression de cet article. Le gouvernement y adhère.
M. Jullien. - Je ne vois pas le motif de cette suppression. Je conçois que le conseil statue sur des travaux à faire aux frais de la province, ce sont des affaires de ménage provincial. Le conseil a seul le droit de prendre une décision à cet égard, sauf les modifications qui peuvent y être apportées plus tard. Mais lorsqu’il s’agit de travaux à exécuter aux frais de l’Etat, je ne vois pas pourquoi le conseil provincial ne donnerait pas son avis : sans doute le gouvernement ne serait pas lié par cet avis, mais cet avis pourrait être très utile, éclairer le gouvernement sur la manière la plus économique de faire faire les travaux sur l’emplacement où il serait le plus convenable de les exécuter. Car tout travail fait dans une province dans l’intérêt général de l’Etat intéresse toujours plus ou moins cette province. Il serait donc convenable, ce me semble, que la province donnât son avis. Je m’opposerai donc à la suppression de l’article ; ou au moins attendrai-je pour y adhérer que l’honorable rapporteur de la section centrale en ait fait connaître les motifs.
M. de Theux. - Comme l’a dit l’honorable préopinant, l’avis du conseil provincial sera bon à prendre pour les travaux qui devront être exécutes dans la province aux frais de l’Etat. Mais il faut convenir que si la disposition de la loi était aussi absolue que les termes de l’article 75, elle ne ferait qu’entraver l’exécution des travaux publics. Sans doute, il faudra consulter le conseil provincial ; mais il faudra à cet égard faire quelques distinctions selon la nature, l’importance et l’urgence des travaux. Au reste, la section centrale a pensé que cette disposition trouverait mieux sa place dans la loi des travaux publics ; elle ne propose donc que l’ajournement de l’article.
M. Jullien. - Dès lors que ce n’est qu’un ajournement, je ne forme plus d’opposition.
- La suppression de l’article est prononcée.
Article 76 (du projet du gouvernement)
M. le président. - Nous passons à l’article 76 du projet du gouvernement ; il est ainsi conçu :
« Art. 76. Le classement des routes provinciales et de l’Etat est réglé par la loi, sur l’avis préalable des conseils provinciaux. »
La section centrale propose le retranchement des mots : « sur l’avis préalable des conseils provinciaux. » Le gouvernement adhère à cette modification.
M. Dumortier. - Du moment que ces mots sont retranchés, l’article ne peut plus trouver sa place dans le chapitre des attributions du conseil provincial ; car il est sans rapport aucun avec le conseil provincial. Il faut, ou retrancher l’article, ou le maintenir tel qu’il est dans le projet du gouvernement ; ce qui me paraît préférable.
- L’article 76 du projet du gouvernement est mis aux voix et adopté.
M. le président. - « Art. 77. (du gouvernement.) Aucun péage, droit de barrière, de passage ou de navigation ne peut être établi que du consentement du conseil provincial ou en vertu d’une loi, sans toutefois déroger aux contrats et aux concessions antérieures à la présente loi. »
- Cet article est supprimé par suite de l’adoption de la loi sur les péages.
M. le président. - La section centrale propose également de supprimer les deux articles suivants :
« Art. 78. Le conseil prononce sur la part que doivent respectivement supporter les diverses localités, en proportion de leur intérêt, dans la construction et l’entretien des routes provinciales, en prenant l’avis préalable des administrations communales et sauf leur recours au Roi, dans le délai de 40 jours, à partir du jour où la résolution leur a été notifiée.
« Il prononce également sur les offres faites par les communes, par des associations ou des individus, pour concourir aux dépenses susmentionnées. »
« Art. 79. Le conseil prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la fois plusieurs communes de la province et sur la part de la dépense afférente à chacune, en prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le délai de 40 jours, à partir de celui où la résolution leur a été notifiée. »
La discussion s’ouvre sur l’art. 78.
M. Dumortier. - Je demande le maintien de l’article.
M. d’Huart. - L’article 72 de la section centrale y supplée.
M. le président. donne lecture de l’article 72, ainsi conçu :
« Art. 72. Le conseil prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la fois plusieurs communes de la province et sur la part de la dépense afférente à chacune, en prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le délai de 40 jours, à partir de celui où la résolution leur a été notifiée. »
M. Dumortier. - Messieurs, j’ai combattu dans la section centrale la suppression de l’article 78, je viens encore en demander le maintien. Je ne vois pas pourquoi on retranche aux conseils provinciaux la faculté de prononcer sur la part que doit supporter chaque commune dans la construction ou l’entretien des routes provinciales. Si vous annulez cette faculté, vous diminuerez les attributions du conseil provincial ; et en second lieu, vous accorderez par le fait de nouvelles attributions à la députation du conseil.
Je propose de maintenir la disposition en discussion, parce que dans une foule de cas je la crois nécessaire. Je demande d’ailleurs qu’on justifie la suppression de la section centrale.
M. de Theux, rapporteur. - Il est une différence essentielle dans l’article 78 du gouvernement et l’article 72 de la section centrale. L’article 72 ne s’occupe que des routes construites aux frais de la province ; l’article 78 accorde au conseil provincial la faculté d’imposer les frais de construction, ou d’entretien à telles communes qu’il juge devoir plus particulièrement profiter de la construction des routes. La section centrale n’a pas cru devoir poser ce principe, elle a pensé qu’il convenait mieux de renvoyer la matière de l’article 78 à la loi sur les travaux publics.
La section centrale a vu des inconvénients dans les dispositions de l’article ; en effet, dans plusieurs provinces, des routes ont été construites aux frais de la province ; si des routes nouvelles devaient encore être établies, le conseil pourrait imposer plus particulièrement les communes qui ont été jusqu’ici privées des routes. Il y aurait alors injustice à l’égard de ces communes. Il est juste que les communes qui les premières ont obtenu des routes contribuent à confectionner les routes qui restent encore à établir.
Tels sont les motifs qui ont déterminé la section centrale : du reste, les choses restent dans l’état où elles ont toujours été ; les conseils provinciaux continueront à suivre la marche tracée pour les routes provinciales.
Si, dans la loi sur les travaux publics, on croit utile d’autoriser le conseil provincial d’imposer telle ou telle commune, on pourra le faire en connaissance de cause.
M. Jullien. - Je suis d’avis de maintenir l’article ; il me paraît que la suppression emporterait avec elle une véritable amélioration qu’il introduit dans le système des routes. Si je comprends bien l’article, il suppose le cas où une province, sollicitée par l’intérêt de telle ou telle localité, voudrait faire construire ou réparer une route provinciale. Dans ce cas on établit que le conseil provincial aura le droit de déterminer la part des frais des communes qui ont un intérêt particulier à cette construction ou à cette amélioration de routes. Sous ce rapport, il n’y a rien que de juste dans l’article.
Mais, dit M. le rapporteur, il y aurait injustice à l’égard des communes qui toutes ont contribué et qui devront contribuer encore. Si les communes profitent de la route qu’on se propose d’établir, il n’y aura plus d’injustice, le fait ancien ne préjuge rien, c’est un fait conforme dans l’intérêt des provinces. Il s’agit ici d’un système d’améliorations, chaque commune doit contribuer aux frais qui en résulteront.
Voici ce qui complète l’idée que je me suis faite de la disposition dont nous nous occupons.
L’article porte dans sa dernière partie : « que le conseil prononce également sur les offres faites par les communes par des associations ou des individus, pour concourir aux dépenses de construction et d’entretien de routes. » Ainsi, telle localité s’adresse au conseil provincial et propose d’établir à ses frais une route dont elle retirerait de grands avantages : rien n’empêche que la province ne satisfasse à ce désir ; c’est ce que la disposition de l’article consacre.
Je vote avec l’honorable M. Dumortier pour le maintien de l’article.
M. de Theux, rapporteur. - La dernière partie de l’article 78 est tellement claire qu’elle ne peut souffrir de difficulté, et qu’elle n’avait pas besoin d’être écrite dans la loi ; il est certain que si une commune offre de contribuer à la construction d’une route, le conseil provincial peut accepter ses offres.
La première partie de l’article est très importante et elle mérite toute votre attention. La section centrale ne l’a pas adoptée, parce qu’elle donne naissance à un nouveau système relativement aux dépenses de construction des routes. La section a supposé un arrondissement de chef-lieu bien partagé en routes construites sur les fonds généraux de la province, et à côté un autre arrondissement qui en serait à peu prés dépourvu. Elle a craint que dans ce cas, lorsqu’il s’agirait de construire des routes dans cet arrondissement, le conseil ne fît contribuer spécialement les communes de cet arrondissement. Evidemment, je le répète, il y aurait là injustice.
M. Fallon. - Je ne puis admettre le système ni de l’article 78, ni de l’article 72 ; il me semble que dans l’un et dans l’autre, on donne ouverture à un arbitraire qui me répugne. Dans l’article 73, vous n’avez parlé que de l’entretien des ouvrages concernant plusieurs provinces ; dans ce cas, les provinces sont entendues : il me semble que dans le cas dont il s’agit, les communes doivent également être entendues.
M. Dumortier. - L’article 78 est entièrement dans l’intérêt de la construction des routes : il est incontestable que lorsque vous ferez entrer chaque commune dans les frais de construction, il sera plus facile de multiplier les moyens d’établir des communications d’un point à l’autre.
Qui sera appelé à décider la part de dépense que devra supporter la localité à laquelle on aura procuré des avantages de communication ? sera-ce le gouvernement ? évidemment non. Sera-ce la députation provinciale ? Quant à moi, je repousse ce système, c’est le conseil en entier qui doit prononcer, parce que lui seul représente bien tous les intérêts des localités, et que la députation peut être placée sous l’influence de quelques-uns de ces intérêts particuliers.
Je ferai remarquer que l’article stipule que les communes devront donner leur avis sur la construction des routes ; voilà déjà un motif de lumière pour le conseil qui prononcera ainsi, en consultant tous les intérêts locaux et communaux. Après cette garantie, vous avez celle de la sanction du Roi ; pouvez-vous désirer d’autres garanties dans l’intérêt des communes et dans l’intérêt général des localités ?
On peut retrancher l’entretien des routes du projet provincial. Je ferai remarquer, qu’une fois les routes construites, les frais de barrières suffisent et même au-delà pour couvrir les frais d’entretien. C’est ainsi qu’on a constaté 800,000 fr. d’excédant sur ces dépenses. Comme lorsqu’il y a excédant, la province jouit des bénéfices, il est impossible de faire intervenir les communes dans le paiement des frais d’entretien.
Je persiste à demander le maintien de l’article.
M. Desmanet de Biesme. - Je ne puis admettre l’article en discussion. Je conçois que les communes doivent contribuer aux frais de construction des routes dont elles retireront quelques avantages. Mais ainsi que l’a dit M. de Theux, il y a des localités qui sont bien pourvues de routes, soit provinciales, soit de l’Etat, et dont les frais avaient été supportés par la province ; si vous adoptez l’article, les conseils provinciaux par égoïsme pourront se refuser de venir au secours des localités qui seront privées de routes. Dans la province de Namur et dans les communes qui avoisinent le grand-duché, il existe peu de routes ; eh bien ! les cantons riches ne voudront pas aider les cantons pauvres pour la construction de nouvelles routes. Je crois que ce serait consacrer une injustice que d’adopter l’article.
M. de Theux. - Je ne reviendrai pas sur les considérations que j’ai déjà présentées ; je répondrai seulement aux observations de M. Fallon. Ces observations ne me semblent pas fondées.
L’article 79 qui reproduit pour les communes le principe adopté dans l’article 72 pour des travaux qui intéressent plusieurs provinces, répond aux objections faites par l’honorable membre : il porte que les communes doivent être consultées sur les travaux à exécuter.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je pense que vous pouvez, sans inconvénient, adopter l’article 78. Je m’empare de la réflexion faite par l’honorable préopinant ; si l’article 72 renferme une garantie pour les communes contre les décisions du conseil central, il me semble que cette disposition, reproduite dans l’article précédent, doit dissiper toutes les craintes.
Remarquez qu’un pouvoir supérieur, nécessairement impartial, devra plutôt prononcer avec justice qu’une administration locale qui peut méconnaître les droits des autres communes et ses propres intérêts. L’article 78 présente toutes les garanties que l’on peut demander : une première garantie résulte de ce que le conseil provincial devra consulter les administrations communales ; s’il y a opposition de la part de ces administrations, elles en exposeront les motifs et un pouvoir supérieur statuera en dernier ressort ; remarquez en effet que le conseil provincial ne prononce pas d’une manière définitive. Une seconde garantie existe en ce que le conseil provincial, intervenant dans des questions de localité, sans aucun intérêt de position, pourra agir selon les règles les plus sévères de l’impartialité ; cette intervention est d’ailleurs consacrée dans d’autres dispositions de la loi.
On a parlé de l’égoïsme provincial ; il faut aussi se mettre en garde contre l’ignorance locale qui peut se refuser à reconnaître l’utilité des routes qu’on proposerait de construire. Je pense que lorsqu’un pouvoir supérieur comme le conseil provincial aura jugé nécessaire d’établir des routes dans des localités isolées, et privées de communications, on devra plutôt en croire le conseil provincial, représentant ce qu’il y a de plus éclairé dans la province, que l’intérêt local, qui en matière de communications, manque parfois, je le crains, de connaissances suffisantes et peut céder à des préventions étroites.
Si le conseil commettait une injustice, si telle ou telle localité était sacrifiée à d’autres localités, alors évidemment, le gouvernement interviendrait, et il opposerait son veto ; il exercerait le droit d’intervention consacré par les articles 78 et 79.
Je pense que les craintes que l’on a élevées sur l’arbitraire des conseils provinciaux sont exagérées ; les provinces sentiront qu’en présence de la sanction nécessaire du gouvernement, ils ne peuvent impunément porter atteinte aux droits des communes.
M. Jullien. - Deux opinions différentes sont en présence. D’un côté on soutient que l’article 78 consacrerait une injustice, tandis que de l’autre je soutiens que l’article consacre un rappel à la justice distributive.
Il faut bien se pénétrer de l’intention de l’article : on y suppose le cas où le conseil provincial juge la nécessité de constructions nouvelles ou bien de simples réparations ; dans quelles circonstances ce cas se présentera-t-il ? C’est lorsque des localités dépourvues de routes en demanderont l’établissement ; quelles sont les communes qui s’opposeront aux vœux de ces localités ? ce sont celles qui jouiront des avantages des communications ; alors le conseil provincial aura recours à l’approbation du gouvernement. Ainsi personne ne sera lésé ; on fait un rappel à la justice distributive ; on distribue en effet des avantages à toutes les communes.
L’article dit que chaque commune sera consultée et qu’elle pourra donner son avis sur les constructions à entreprendre : si les communes se croient lésées, elles auront le recours au Roi ; alors le gouvernement pourra juger d’une part si les communes se montrent trop récalcitrantes, et de l’autre, si les conseils ont prononcé dans un esprit d’égoïsme.
Evidemment il y a quelqu’un qui se trompe.
Les adversaires de notre système prétendent qu’il y a injustice ; nous, au contraire, nous soutenons qu’il y a justice à conserver l’article 78. Je persiste à en demander le maintien. Que la chambre juge entre nous.
M. Fallon. - Ce n’est pas parce qu’il pourrait résulter une injustice du maintien de l’article 78 que j’en demande la suppression, c’est parce qu’il consacre l’arbitraire. Quand vous avez admis le principe d’un système de chemins de fer, qu’avez-vous fait ? Vous n’avez pas imposé aux villes de Louvain, de Liége et d’Anvers, l’obligation d’en payer les frais. Non, c’est sur la masse des contribuables que ces dépenses retomberont.
Pourquoi en serait-il autrement pour les routes ordinaires ? Si vous exigez de chaque commune par laquelle passera une route qu’elle se cotise pour sa construction, évidemment vous consacrerez l’arbitraire.
M. de Theux, rapporteur. - J’ajouterai une réflexion à ce que viennent de dire d’honorables préopinants, que si vous poussez jusque dans ses conséquences le système consacré par l’article 78, vous devrez imposer également les propriétaires. Il existe une loi du 16 septembre 1807 par laquelle, après avoir fixé la plus-value des propriétés particulières, (erratum au Moniteur belge n°136, du 16 mai 1834) qu’on pouvait les imposer jusqu’à concurrence de la moitié de la plus-value. Je sais que cette loi n’a jamais été mise à exécution par suite de la presqu’impossibilité que cette exécution présentait.
Je pense que le moment n’est pas venu de consacrer le principe, qu’il vaut mieux attendre la discussion de la loi sur les travaux publics pour introduire un système nouveau. Si vous adoptez l’article 78, vous arrêteriez immédiatement la construction des routes, comme l’a fait observer judicieusement M. Desmanet de Biesme. Les conseils provinciaux voudront imposer aux arrondissements l’exécution des routes projetées, et ceux-ci s’y refuseront, parce qu’ils ne trouveront pas juste de payer intégralement les voies de communication dont ils auront besoin, tandis qu’ils auront contribué pour les autres routes provinciales.
Je terminerai en répondant à l’accusation d’inconséquence que l’on pourrait m’adresser en m’entendant repousser l’article 78 et admettre l’article 79. C’est que l’article 79 établit la solidarité des dépenses entre plusieurs communes. En suivant ce principe, qui a dicté l’article 73 du projet de la section centrale, il y a une différence essentielle entre les deux systèmes.
M. Desmanet de Biesme. - Dans le système de nos adversaires, l’article 78 doit avoir pour but d’activer la construction des routes. Je prétends qu’il l’arrêtera totalement. Il en résultera que toute amélioration des voies de communication se réduira à une espèce de marché.
On dira aux communes : Vous voulez une route. Combien donnerez-vous ? Je sais bien que le conseil provincial ne les forcera pas à apporter leur quote-part, mais le refus que feront les localités d’y contribuer paralysera tout progrès, et le résultat sera tout autre que celui que les partisans du système que je combats s’en promettent.
M. Milcamps. - L’article 78 peut cependant présenter quelques avantages. Je citerai la route de Nivelles à Ath dont la députation du Brabant a reconnu la nécessité. L’on n’attend, pour la mettre à exécution, que le moment où les communes voudront contribuer aux dépenses qu’elle entraînera. Si l’article était adopté, ce retard serait bientôt levé.
- L’article 78 est mis aux voix, il n’est pas adopté.
La chambre adopte l’article 79 (72 de la section centrale) ainsi conçu :
« Le conseil prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la fois plusieurs communes de la province et sur la part de dépense afférente à chacune, en prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le délai de 40 jours, à partir de celui où la résolution aura été notifiée. »
M. le président. - La discussion est ouverte sur l’article 81 du projet du gouvernement :
« Art. 81. Il répartit entre les communes, conformément aux lois, le contingent de contributions directes assigné à la province.
« Il prononce sur les réclamations et demandes en réduction qui lui sont adressées par les communes.
« Néanmoins, lorsque le conseil n’est pas assemblé, la députation permanente fait cette répartition et prononce sur les réclamations, sauf recours au conseil. »
La section centrale propose la rédaction suivante
« Art. 74. Il répartit entre les communes, conformément aux lois, le contingent des contributions directes assigné la province ; en cas que la répartition même ne puisse avoir lieu, il en détermine les bases.
« Il prononce sur les réclamations et demandes en réduction qui lui sont adressées par les communes.
« Lorsque le conseil n’est pas assemblé, la députation permanente fait la répartition d’après les bases fixées par le conseil et prononce sur les réclamations, sauf recours au conseil. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - La rédaction de l’article présenté par la section centrale me paraît peu claire. Je désirerais qu’elle fût modifiée.
M. Milcamps. - Je préférerais la rédaction du projet du gouvernement quant au dernier paragraphe. La députation permanente devra fixer la répartition d’après les bases établies par le conseil. Il se pourrait que ces bases n’eussent pas été établies. Si donc le conseil n’est pas assemblé, la répartition ne pourra avoir lieu. Il vaut donc mieux laisser à la députation permanente de fixer elle-même les bases de la répartition ; et en supposant que cette fixation donnât lieu à des réclamations, le recours au conseil existe et permet de réparer les abus qui pourraient s’être commis.
M. Dumortier. - Vous comprenez tous que cet article est très obscur. Rapporteur de la 5ème section, j’avas proposé une rédaction, selon moi, infiniment plus simple. J’aurai l’honneur de faire remarquer à la chambre que la répartition des contributions et les bases sur lesquelles elles seront assises, ne doivent, dans aucun cas, être laissées à la députation permanente. C’est un objet d’une trop haute importance pour que le conseil puisse abdiquer ses droits à cet égard. Si la députation permanente en était saisie, les députés d’une ville pourraient régler selon leur bon plaisir, la répartition des contributions de toute une province. C’est ce qui est arrivé depuis vingt ans dans le Hainaut.
L’arrondissement de Tournay a toujours été sacrifié par celui de Mons. Un tel état de choses pourrait durer cent ans encore. Ce qu’il y aurait à faire, serait que le conseil provincial arrêtât les bases de la répartition, et déclarât que telle commune serait imposée pour autant. Ce qui resterait à faire ne serait que la conséquence des travaux du conseil, et les injustices que j’ai signalées ne pourraient se renouveler.
Au surplus, je vous prie de remarquer que cet article est absolument inutile. Le conseil provincial s’assemble au mois de juillet. A cette époque la répartition de l’impôt est fixée. Que vient donc faire cet article ? Il ne signifie rien. Il n’y a plus de bases d’impôts à asseoir ; elles sont faites pour tout le royaume.
Dans tous les cas, il faut en principe que l’on fasse en sorte qu’il y ait lieu de déterminer les bases de répartition, que le travail soit laissé au conseil et que la députation permanente se borne à en faire l’application. De cette manière vous ne consacrerez pas une injustice.
M. Fallon. - Je partage l’opinion de l’honorable M. Dumortier. Il est certain que si vous n’obligez pas le conseil à déterminer les bases de répartition de l’impôt, vous pouvez supprimer l’article, jamais l’assemblée des états de la province de Namur ne s’est réunie à une époque où la répartition était possible. Il faut donc adopter le système de M. Dumortier. Mais je ne partage pas son opinion quand il attaque la rédaction de la section centrale. Il me semble que le premier paragraphe doit répondre au vœu qu’il a exprimé au nom de la 6ème section, ce paragraphe porte que : « en cas que la répartition même ne puisse avoir lieu, le conseil provincial en détermine les bases. »
M. de Theux, rapporteur. - Vous voyez que la section centrale a fait droit aux réclamations de la 5ème section. Tout en admettant que la députation permanente pourrait fixer la répartition des contributions d’après les bases arrêtées par le conseil, elle a voulu laisser intactes les prérogatives du conseil provincial en lui réservant le droit de faire lui-même cette répartition, ce qui pourrait avoir lieu si une loi financière qui exigeât une répartition était votée avant la réunion des conseils provinciaux, ou si ces conseils étaient convoqués extraordinairement à l’époque du voie des impôts ; la section centrale devait donc agir dans les deux hypothèses. C’est ce qu’elle a fait. Je pense donc que sa rédaction doit être conservée.
M. Dumortier. - Je ne puis partager l’opinion de l’honorable rapporteur de la section centrale. On établit l’époque de la répartition quand elle ne pourra plus avoir lieu. Jamais dans aucun cas le conseil provincial ne pourra fixer la répartition, cela lui sera physiquement impossible. Il ne lui sera possible que d’en asseoir les bases. C’est donc dans ce sens qu’il faut modifier l’article, si vous voulez qu’il soit intelligible.
M. Jullien. - Le premier devoir du conseil provincial est de fixer le contingent des contributions directes imposées à la province. Si vous lui ôtez la plus notable de ses attributions, mieux vaut supprimer l’institution elle-même. Car c’est dans ce but seul qu’ont été créés les conseils. C’est ce que la section centrale a très bien senti.
Les conseils s’assemblant au mois de juillet, il est très possible que la répartition des contributions directes ne puisse avoir lieu. Mais, comme l’a très bien fait observer l’honorable M. de Theux, il serait très possible qu’une nouvelle loi financière harmonisât l’époque de la répartition avec celle de la convocation des conseils. Il faut donc formuler dans la loi un droit qui leur appartient et prévoir l’éventualité où ils en pourront faire usage.
Ainsi l’article de la section centrale est infiniment clair. Il prévoit également le cas, qui dans la législation actuelle se présentera presque toujours le seul, où les conseils n’auront qu’à déterminer les bases de l’année suivante. Ces bases une fois arrêtées, les députations permanentes suivront la ligne qui leur aura été tracée, et il restera dans tous les cas la ressource du recours au conseil. Je ne vois donc pas qu’il y ait lieu de changer l’article de la section centrale.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je persiste à trouver la rédaction de la section centrale obscure, et mon opinion en cela est partagée par un grand nombre de membres. Je proposerais de mettre, à la place des mots : « en cas que la répartition même ne puisse avoir lieu, » ceux-ci : « s’il n’a pu opérer cette répartition. » Cette rédaction nouvelle, outre qu’elle prévient toute autre interprétation de la loi, présenterait, sous le rapport de l’euphonie, l’avantage de la suppression d’une locution aussi disgracieuse qu’est ce mot : « en cas que. » Elle conserverait également les prérogatives du conseil, qui, à cet égard, ont paru si importantes en France, que la répartition des impôts directs figure en tête des attributions des conseils généraux dans la loi départementale.
- L’article 81 est mis aux voix et adopté, sauf rédaction ultérieure.
M. le président. « Art. 82 (du projet du gouvernement) et 75 (de la section centrale). Le conseil prononce sur la demandes des conseils communaux, ayant pour objet l’établissement, la suppression, les changements des foires et marchés dans la province.
« Il veille à ce qu’il ne soit mis à l’importation, à l’exportation et au transit des denrées et marchandises, d’autres restrictions que celles établies en vertu des lois. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Nous adhérons à la rédaction de la section centrale.
- L’article 75 est adopte sans discussion.
M. le président. - L’article 83 du projet du gouvernement est ainsi conçu :
« Art. 83. Le conseil donne son avis sur les changements proposés pour la circonscription de la province, des arrondissements, cantons et communes, et pour la désignation des chefs-lieux. «
La section centrale propose la suppression de cet article.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il me semble que la prérogative du gouvernement n’est pas ici contestée de présenter des projets de loi sur ces circonscriptions ; on l’oblige à prendre un avis : qu’on formule ou qu’on ne formule pas l’obligation, il prendra toujours cet avis ; cependant je ne comprends pas les motifs de la suppression demandée. La disposition est une garantie de plus qu’on donne aux localités.
M. Fallon. - Je voterai pour le maintien de l’article 83 par les motifs qui m’ont déterminé à adopter l’article 76. L’article 83 est une garantie de plus pour les intérêts provinciaux.
M. de Theux, rapporteur. - Je n’attache pas d’importance à ce que l’article soit supprimé. Mais voici ce qui a porté la section centrale à demander ce retranchement.
L’année dernière une proposition semblable avait été faite par le gouvernement. Il demandait l’avis des conseils provinciaux sur la confection des routes ; la chambre a cru l’article inutile parce que la législature ne pouvait être liée par aucun avis. Conséquente avec les antécédents de la chambre, la section centrale a cru devoir proposer la suppression de l’article en délibération.
- L’article mis aux voix est adopté.
M. le président. - « Art. 84 (du projet du gouvernement) et 76 (du projet de la section centrale). Le conseil peut charger un ou plusieurs de ses membres de la mission de recueillir sur les lieux les renseignements dont il a besoin dans le cercle de ses attributions. Il peut correspondre avec les autorités constituées et les fonctionnaires publics, à l’effet d’obtenir les mêmes renseignements.
« Si, malgré deux avertissements consécutifs constatés par la correspondance, des autorités administratives subordonnées sont en retard de donner les renseignements demandés, le conseil peut déléguer un de ses membres, aux frais personnels desdites autorités, à l’effet de prendre les renseignements sur les lieux. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il y a dans la rédaction de la section centrale un changement qui rend mieux la pensée du gouvernement ; j’adhère au changement.
- L’article est adopté sans discussion.
M. le président. - « Art. 85 (du projet du gouvernement) et 77 (de la section centrale). Le conseil peut appuyer les intérêts de la province et des administrés près du Roi et des chambres. »
M. Fallon. - Je demanderai la suppression de cet article parce que je le crois tout à fait inutile. Si je ne me trompe il est la répétition d’un article de l’ancienne loi fondamentale des Pays-Bas ; mais, d’après notre constitution les conseils provinciaux jouissent du droit de pétition, et peuvent appuyer par conséquent les intérêts de l’administration et de la province près du Roi et des chambres,
M. Dumortier. - L’article 161 de l’ancienne loi fondamentale du royaume des Pays-Bas consacrait le droit de pétition aux particuliers individuellement, et collectivement aux corps constitués légalement et reconnus comme tels ; cependant quand les conseils provinciaux s’adressaient à l’Etat, on leur contestait ce droit, attendu, disait-on, qu’ils ne pouvaient faire de doléances que relativement aux intérêts provinciaux. Messieurs, le droit de pétition, c’est le droit de plainte, c’est le plus sacré des droits, et nous devons par tous les moyens en assurer l’exercice ; mais nous devons nous garder d’en restreindre l’usage, même involontairement.
L’article en délibération est inutile parce que l’article 21 de notre constitution a pourvu à tout ce qui concerne le droit de pétition.
Si on admettait la disposition de l’article en délibération, ne pourrait-on pas dire aux conseils : « Vous pouvez faire des pétitions, mais dans la sphère de vos attributions ; vous nous direz, par exemple, si telle route doit passer ici ou là ; mais n’allez pas plus loin. » Je demande le rejet de l’article qui est contraire à l’un des principe sacrés pour lesquels nous avons fait notre révolution.
M. d’Huart. - L’article 21 de la constitution est bien plus formel que celui sur lequel nous discutons ; cet article en délibération pourrait être interprété dans un sens restrictif ; écartons-le donc et conservons les dispositions de notre pacte fondamental, dispositions bien plus simples et qui nous conservent dans toute son étendue le droit sacré de pétition.
M. de Theux, rapporteur. - L’article 161 de l’ancienne loi fondamentale était conçu à peu près dans les mêmes termes que l’article 21 de notre constitution, mais l’article 151 relatif aux attributions des états provinciaux contenait cette disposition : « Ils peuvent appuyer les intérêts de leurs provinces et de leurs administrés près du roi et des états-généraux » C’est cette disposition qui est reproduite dans le projet du gouvernement et que la section centrale a adopté.
M. Fallon. - Le droit de pétition résulte de notre constitution ; il est indéfini. Je crains qu’avec l’article en discussion on ne puisse dire aux conseils : « Vous ne pouvez vous occuper que des intérêts de vos provinces et de vos administrés. » C’est ce qu’on leur a dit sous la loi fondamentale, et je ne veux pas qu’on leur répète la même chose sous la constitution.
- L’article 85 mis aux voix est rejeté.
M. le président. - « Art 86 (du projet du gouvernement) et 78 (de la section centrale). Il peut faire des règlements provinciaux d’administration intérieure et des ordonnances de police.
« Ces règlements et ordonnances ne peuvent porter sur des objets régis par des lois ou par des règlements d’administration générale.
« Ils sont abrogés de plein droit si, dans la suite, il est statué sur les mêmes objets par des lois ou règlements d’administration générale.
« Le conseil peut établir pour leur exécution des peines qui n’excèdent pas 8 jours d’emprisonnement et 200 francs d’amende.
« Ils sont publiés dans la forme déterminée aux articles 105 et 106 de la présente loi. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - J’adhère à cette rédaction présentée par la section centrale.
- L’article mis aux voix est adopté sans discussion.
Il est quatre heures et demie. La séance est levée.