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Magnette Charles (1863-1937)

Portrait de Magnette Charles

Magnette Charles libéral

né en 1863 à Virton décédé en 1937 à Liège

Représentant 1894-1900 , élu par l'arrondissement de Liège

Biographie

(Extrait de La Chambre des représentants en 1894-1895, Bruxelles, Société belge de Librairie, 1896, pp.366-367)

MAGNETTE, Charles,

Représentant libéral progressiste pour l’arrondissement de Liége, né à Virton, le 3 février 1863

Avocat et collaborateur aux journaux L'Étudiant, La Nation, L'Express, dont il est fondateur et administrateur, M. Magnette était aux côtés de feu Max Waller quand celui-ci fonda La Revue littéraire et La Jeune Belgique.

M. Magnette a été lauréat du concours universitaire de droit Civil de 1885 pour l'obtention de bourses de voyage et, après un séjour à Paris, a fréquenté les Universités de Berlin et de Lausanne.

Son rôle dans les associations politiques a été actif : secrétaire, puis président de la Société des étudiants libéraux de l'Université de Liége de 1881 à 1885 et président du comité de propagande et d'organisation populaires, il fut ensuite membre du comité de l'Association libérale et l’un des premiers scissionnaires au sein de cette société ; il contribua à la fondation de l'Association progressiste, et la Ligue des Capacitaires, créée pour l'obtention de la révision constitutionnelle, le compta parmi ses premiers adhérents. En 1889, il représenta au Congrès des œuvres d'enseignement, tenu à Paris, l'Œuvre du Vestiaire libéral, dont il fut secrétaire général et au nom duquel il fit rapport.

M. Magnette a été élu par l'arrondissement de Liége au ballottage du 21 octobre 1894, en opposition aux libéraux doctrinaires et aux catholiques, par 67,764 voix.


(Extrait de La Wallonie, du 19 octobre 1937) M. Charles Magnette , ministre d'Etat, ancien président du Sénat, est mort lundi après-midi.

Malade depuis de longs mois, endurant des souffrances infinies, M. Magnette s'était complètement retiré de la vie politique et vivait, lorsqu'il résidait à Liége, dans son hôtel de la place de Bronckart.

Charles Magnette naquit à Virton le 3 février 1863. Il fit ses études à l'Athénée et à l'Université de Liége et, en 1885, fut proclamé docteur en droit. Il s'inscrivit immédiatement au Barreau de notre ville et il y fit une splendide carrière. Ses pairs ne lui ménagèrent d'ailleurs pas leur confiance, l'appelant successivement à la présidence du Jeune Barreau, au Secrétariat et au Bâtonnat du Conseil de l'Ordre.

La politique ne le laissa pas indifférent. Membre du parti libéral progressiste, il fonda la Ligue des Capacitaires et fut parmi les premiers administrateurs de notre confrère «L'Express.

Elu député en 1894, il participa à de nombreux débats notamment en matière électorale. Il fut un des rares libéraux qui votèrent la représentation proportionnelle.

Ecarté de la Chambre en 1900. M. Magnette est élu conseiller communal de Liége en 1903. Il le restera jusqu'en 1926.

Les problèmes de l'enseignement municipal y retinrent toute son attention.

La majorité démocratique du Conseil provincial de Liége l'envoie au Sénat en 1906.

C'est là qu'il donnera sa pleine mesure de parlementaire. Son activité est débordante, il n'est de question qui le laisse étranger.

II intervient dans tous les grands débats et le poids de sa haute autorité morale ne laisse pas d'influencer souvent ses collègues En 1911, ils l'appellent au Secrétariat de la Haute Assemblée.

Survient la guerre. Charles Magnette dit leur fait aux Allemands. Grand maître de la Franc-Maçonnerie, il invite les loges d'Outre-Rhin à une enquête contradictoire sur les cruautés commises en Belgique par les occupants. Ceux-ci l'arrêtent et l'emprisonnent dans une forteresse.

La paix revenue, M. Magnette reprend sa place au Sénat.

A la rentrée de novembre 1924, il est nommé vice-président du Sénat. Ses collègues lui confient la présidence en 1928, 1929 et 1930. En 1932, son état de santé étant déjà assez précaire, M. Magnette ne demande pas le renouvellement de son mandat. Le Conseil provincial de Liége désigna M. Forthomme pour lui succéder.

Depuis, nous l'avons dit, M. Magnette vivait très retiré. La maladie ne devait guère lui laisser de répit. La mort est, pour lui, une véritable délivrance.

Rude adversaire, mas toujours courtois, Charles Magnette, libéral, ne nous ménagea pas ses coups à l'occasion. Mais il est un de ces hommes qu'on s’honore à combattre. Sa perte sera douloureusement ressentie par tous ses amis. Nous nous inclinons respectueusement devant la dépouille mortelle d'un tel serviteur du pays.


(Extrait de La Dernière heure, du 19 octobre 1937)

C'est avec une profonde émotion que tous ceux qui ont connu Charles Magnette ont appris, lundi, la mort du ministre d 'Etat.

Dans les milieux politiques de Bruxelles, la belle figure de l'ancien président du Sénat était dans toutes les mémoires. On savait que depuis un an environ, la santé de Charles Magnette était précaire et ses amis n’ignoraient pas que, depuis quelques mois, il s’était alité par suite d'un mal terrible qui le minait de jour en jour. Néanmoins, chacun se plaisait à espérer que la science ferait un miracle de plus pour le conserver à l'affection de tous.

Hélas ! la mort en décida autrement… et Charles Magnette s'en va au moment où l’Humanité à laquelle il consacra toute sa vie est en si grand danger.

C'est un homme d'élite et un grand citoyen qui disparaît.

Charles Magnette était né à Virton le 3 février 1863. Fils d'un juge de paix devenu conseiller à la Cour d'appel de Liége, il avait fait de très brillantes études à l'athénée de Liége et ensuite à l'Université de cette même ville. Il avait été à cette époque président des Etudiants Libéraux de Liége. Diplômé docteur en droit en 1885 et candidat-notaire en 1886, il avait été lauréat du concours universitaire pour sa thèse de droit sur la liberté des testaments. Après des velléités d'entrer dans la carrière professorale, il s’était inscrit au barreau de Liége dès 1885, avait fondé le journal La Justice puis la Ligue des Capacitaires. Il avait séjourné aux Universités de Berlin, de Paris et de Lausanne.

Il avait été au président du Jeune Barreau et secrétaire du Conseil de l'Ordre en 1904-1905 et il devait devenir bâtonnier en 1917.

De 1893 à 1900. il avait présidé le cercle Libéral de l'Est et, en 1899, était devenu directeur politique de L’Express de Liége dont il avait été l'un des fondateurs.

L’homme politique

Libéral progressiste. il était entré à la Chambre des Représentants le 21 octobre 1894 et y était demeuré jusqu'au 27 mai 1900. Conseiller communal de Liége, de 1903 à 1932, il s'y était occupé particulièrement des questions relatives à l'enseignement.

Elu sénateur provincial de Liége en 1906, il avait pris une part prépondérante à la discussion de toutes les grandes questions intéressant la vitalité du pays. Son éloquence était précise et sa dialectique serrée. autant que son intelligence était claire et que la fermeté de ses convictions lui valait le respect de tous.

Successivement, il avait été nommé par ses pairs secrétaire de la Haute Assemblée, puis vice-président et ensuite président. Il avait occupé cette dernière charge de 1928 à 1932 avec une autorité incontestée que lui avaient valu son caractère droit, les hautes qualités de son esprit et son expérience des choses et des hommes. Puis, pour des raisons de santé, il avait renoncé à ce poste et à son mandat politique comme il avait d'ailleurs, à la mort de M. Kleyer, décliné l'offre qui lui était faite de devenir bourgmestre de Liège.

Au Parlement, Charles Magnette avait été, avec Georges Lorand et Georges Heupgen, parmi les seuls libéraux qui avaient voté la R. P.

Il avait pris part aux discussions relatives aux frais de justice, à l'instruction publique, à la législation fiscale, aux budgets des chemins de fer, des Finances, de l'Industrie et du Travail, de la Justice, de la Défense Nationale, au code de procédure militaire, aux traitements de la magistrature, à la chasse, aux lois électorales, à la législation minière, à la reprise du Congo, à la milice, aux prud'hommes, à l'emploi du flamand en matière répressive, à la colonie, la protection de l'enfance, à l'instruction obligatoire, à la répression de la traite des blanches, aux loyers, aux dommages de guerre, aux pensions des mineurs, etc.

Il avait déposé ou contresigné différentes propositions de loi ayant trait : à la responsabilité des conducteurs d'autos, au règlement de la profession d'avocat, à la glorification d'un soldat belge inconnu mort au cours de la grande guerre, à la composition du jury, à la révision de la Constitution, au travail de la femme mariée, à la création d'une université flamande, aux traitements des magistrats, à l'accord de Washington pour le remboursement des dettes de guerre, etc.

Pendant la guerre

Grand-maitre national de la Franc-Maçonnerie belge, il avait, dès le 27 septembre 1914, dans une lettre adressée aux loges allemandes, proposé de procéder à une enquête contradictoire sur les atrocités commises en Belgique par les troupes envahissantes. Ayant essuyé un refus, il avait répondu vertement, ce qui lui valut d'être menacé de la déportation s'il continuait à répandre le texte de ces correspondances que cependant des journaux hollandais avaient publié.

En 1916, lors des déportations d'ouvriers, il avait protesté avec énergie contre de pareilles méthodes contraires au droit des gens et, de ce chef, il avait été arrêté, condamné à trois semaines de prison et à mille marks d'amende.

Dans le jugement rendu le 21 décembre 1916, le tribunal d'occupation disait :

« Son but était de soulever une partie du peuple allemand contre l'administration allemande en Belgique. La violence de ses expressions le démontre péremptoirement ; un pareil abus d'un Belge contre l'administration allemande ne saurait être admis en temps de guerre. »

Et plus loin :

« En vue de remédier à cette situation (la misère) qui devient de plus en plus intolérable et qui est aussi néfaste au peuple belge en général qu'aux individus, le gouverneur général a adopté des décisions qui permettent aux Belges oisifs d'aller librement en Allemagne et d'emmener de force ceux qui refusent le travail qu'on leur présente moyennant un gros salaire, par peur du travail.

« M. Magnette aurait dû accepter cette explication donnée par M. le gouverneur général représentant le seul pouvoir en qui on doit, en ce moment, avoir pleine confiance.

« En admettant même qu'en sa qualité de jurisconsulte et de politicien il voyait les faits sous un autre jour, il ne pouvait, malgré tout, exprimer ses opinions d'une façon offensante pour l'autorité allemande et encore moins répandre des opinions en Belgique et en Allemagne pour y lever des partisans. »

C'est dire combien Charles Magnette fut l'une des âmes ardents de la résistance à l'oppression allemande et combien son nom restera dans les annales du patriotisme belge.

Après la guerre

Aussi, en janvier 1920. les loges célébrèrent-elles sa belle conduite et un télégramme de loyalisme ayant été adressé au roi Albert à cette occasion, celui-ci fit répondre par son chef de cabinet :

« J'ai été chargé par le Roi de vous transmettre ses cordiaux remerciements pour le très chaleureux télégramme que vous lui avez adressé vous faisant l'interprète de neuf cents réunis à Bruxelles pour fêter Magnette.

« Sa Majesté à été très touchée ainsi que la Reine que vous avez associée à l'expression de vos sentiments d'attachement. »

Le 2 avril 1925, Charles Magnette, qui déjà était porteur de nombreuses distinctions honorifiques, était nommé ministre d'Etat. La même année, il lançait un manifeste protestant avec indignation contre les sévices inqualifiables dont de nombreux francs-maçons avaient été victimes à raison uniquement de leur qualité maçonnique.

En 1928. comme nous le disions d'autre part, il était élu président du Sénat.

L’homme

Homme privé, Charles Magnette était un gai Wallon, un aimable et spirituel convive. Son péché mignon était la chasse. Et ce Gaumais, naturalisé Liégeois, en qui chantait l’âme celto-latine de la Lorraine belge, était, à ses heures, poète, musicien et excellent violoncelliste.

Il laissera le souvenir d'un homme droit, d'un esprit élevé et d'un grand citoyen.

La Dernière Heure présente à sa famille, ainsi qu'au journal L'Express dont il était toujours président du conseil d'administration, l'expression de ses condoléances émues.