Colfs Henri, Louis, François catholique
né en 1864 à Anvers décédé en 1936 à Grimbergen
Représentant 1894-1919 , élu par l'arrondissement de Bruxelles(Extrait de La Chambre des représentants en 1894-1895, Bruxelles, Société belge de Librairie, 1896, pp. 262-263)
COLFS, Henri-Louis-François-Jules
Représentant démocrate chrétien pour l’arrondissement de Bruxelles, né à Anvers, le 1er décembre 1864.
M.Colfs, correcteur d'imprimerie, a été élu représentant pour l'arrondissement de Bruxelles, le 21 octobre 1894. Il figurait sur la liste de l'alliance conservatrice, indépendante et ouvrière comme membre du groupe ouvrier avec MM. Mousset et Lauters, Il obtint 106,880 suffrages, contre 95 ,000 donnés à la liste libérale.
Lors de la discussion de la loi électorale communale, M. Colfs a déposé un amendement -devenu l'article 10 de la loi - tendant à maintenir un vote aux électeurs capacitaires qui figuraient sur les listes précédemment en vigueur. Cette disposition transitoire a eu pour effet d'augmenter sensiblement le nombre des électeurs et valut à son auteur les applaudissements de tous les démocrates.
Il a publié, en collaboration avec M. J.-F. Colfs père, un ouvrage intitulé : La Filiation généalogique des écoles gothiques.
M. Colfs est porteur de la Médaille civique de seconde classe.
(Extrait de La Libre Belgique, du 4 juin 1936)
Mercredi est décédé à l'Institut Saint-Alexis, à Grimbergen, M. Henri Colfs, né à Anvers, le 1er décembre 1864, autrefois député catholique de Bruxelles.
Les débuts d'Henri dans la vie politique remontent à la première révision constitutionnelle de 1893. Il fut, dès lors. un ardent propagandiste de la cause catholique jusque dans les moindres bourgades et hameaux de l'arrondissement de Bruxelles. Vers ce moment se dessinèrent les circonstances qui devaient donner à l'Association conservatrice de l'époque une orientation nouvelle. Elle renforça son action dans toutes les classes sociales en associant à ses efforts des éléments qui faisaient campagne dans la presse pour une réforme démocratique de nos institutions, MM. Renkin et Carton de Wiart, et d'autres qui par leur origine se rattachaient plus directement au peuple : M. Colfs fut de ceux-là, avec M. Mousset qui présidait la maison des ouvriers de Bruxelles et M. Lauters qui devint, par la suite, inspecteur du travail.
Les vétérans de la politique n'ont pas perdu le souvenir des luttes qui, peu d'années plus tard, mirent aux pries les partisans et les adversaires du service personnel. Ceux-ci se comptèrent, deux fois, aux élections législatives de 1900 et de 1909 sur le nom de M. Colts.
On lit à ce sujet, dans les mémoires de Charles Woeste : « En 1900. M. Colfs avait accepté sur la liste de l'Association la dixième place mais à la condition que ses pussent témoigner leur préférence pour sa candidature en votant en sa faveur. Les résultats des élections dépassèrent de beaucoup les espérances des catholiques. M. Colfs fut élu à Bruxelles distançant les candidats placés avant lui.
« Quelques années plus tard, dans une autre élection, un point restait à résoudre : M. Colfs figurerait-il sur la liste de l'Association ou serait-il à la tête d'une liste antimilitariste ? Une entente se produisit qui attribua à M. Colfs la dixième place sur la liste catholique. Elle renfermait des hommes qui étaient aux antipodes et l'on pouvait prévoir qu'une campagne de votes de préférence serait faite en faveur de M. Colfs. »
C’est ce qui arriva. M. Colfs fut élu en tête de liste.
Un soir de mai 1912, peu de jours avant la grande consultation électorale du 2 juin qui devait donner aux catholiques une majorité de seize sièges à la Chambre, M. Colfs sortait de « Patria » où avaient parlé, devant une foule considérable, MM. de Broqueville, chef du gouvernement, et Levie, ministre des Finances. Rue du Marais. il fut assailli par une bande d'énergumènes qui, tout en le frappant à la tête et en le bourrant de coups de pied. le poursuivirent jusqu'au boulevard Botanique. Là, ils le lancèrent contre un réverbère. M. Colfs, le visage en sang, perdant connaissance, s'affaissa dans la rigole. Des passants s'empressèrent autour de lui, tandis que ses lâches agresseurs fuyaient. Ils le transportèrent dans un établissement proche, aujourd’hui disparu, où le blessé reçut les premiers soins et d'où il put être transporté chez lui.
M. Max, bourgmestre de Bruxelles, qui avait été mis au courant de l'agression dont venait d'être victime le député catholique, se rendit au domicile de M. Colfs, le soir même, pour lui exprimer ses regrets de l'odieux attentat.
M. Colfs ne se remit jamais de ce terri choc. Son mal empira peu à peu. Les malheurs de la guerre l'accentuèrent. Le 16 novembre 1916, il se retira à l'Institut Saint-Alexis de Grimberghen. Il mangeait peu, pain, lait, légumes. Il veillait tard, ayant le sommeil difficile. Il occupait ses loisirs à parcourir les journaux, à en découper les articles qui lui plaisaient, à les réunir en liasses qu'il tenait régulièrement à jour.
Il se montrait patient, résigné. ayant gardé de fortes convictions religieuses. Il aimait à rendre service aux Frères de l'Institut et aux compagnons de sa retraite. Il s'est éteint doucement avec le sourire du devoir accompli.
Il laissera à ceux qui l'ont connu le souvenir d'un fervent croyant, d'un homme animé du désir de bien faire et qui a consacré le meilleur de son cœur et de son temps à la défense des idées catholiques.
Nous prions Madame Colfs d’agréer l’expression de nos chrétiennes condoléances.
(Extrait du Courrier de l’Escaut, du 7 juin 1936)
La mort de l'ancien député catholique de Bruxelles aura éveillé bien des souvenirs. Henri Colfs fut élu la première fois le 24 octobre 1894 et demeura membre de la Chambre des Représentants jusqu'à la guerre. Sauf la première fois où II figura sur la liste aux côtés de MM. Mousset, Le Sergeant d'Heudecourt et Lauters, représentant la maison des ouvriers alors sise à la rue Locquenghien, chacune de ses réélections fut le triomphe des votes de préférence. Sans doute, il incarnait la résistance antimilitariste de ce temps-là, mais il était surtout la protestation vivante contre la case de tête. Ancien ouvrier typographe et correcteur d'imprimerie, Colfs fut surtout un modeste qui remplissait son mandat avec une régularité, une assiduité, une ponctualité que personne n'a jamais égalée même M. Fieuillien qui est le député qui on peut le moins reprocher. II siégeait au haut de la travée de droite, non loin du siège de M. Woeste que ses interventions irritaient fréquemment, car si le député de Bruxelles ne cherchait nullement des effets d'éloquence, il parlait posément. Il parvenait à se faire entendre, si tumultueuses que fussent le plus souvent les interruptions cherchant à le désarçonner. Henri Colfs était un homme d'œuvres ayant fondé la Maison des Ouvriers d'Ixelles dont il fut longtemps le Président. Malheureusement il se laissa lui aussi solliciter par le mirage des coopératives et celle qu'il dirigea à laquelle II avait donné l'enseigne « la Paix » fut l'occasion de ses premiers déboires.
En 1912, à la sortie d'une séance électorale tenue à Patria rue du Marais, il fut maltraité, frappé, piétiné par les prédécesseurs, des fracasseurs que conduisait encore il y a un an M. Spaak. La blessure qu'il reçut à la tête lui causa une commotion dont il ne guérit jamais. Survint alors la guerre et conséquence de cette infirmité cérébrale, suite aussi de certaines affinités - collaboration avec son père, Henri Colfs avait publié un ouvrage d'archéologie architecturale : la filiation généalogique des Ecoles gothiques - M. Colfs se livra aux recherches les plus laborieuses sur les prophéties qui pouvaient avoir des analogies avec les hostilités - son patriotisme le poussant à convaincre ceux qui voulaient l’écouter, et il arrêtait chaque passant à cette fin, que l'Allemagne serait inévitablement vaincue. Ce fut une telle obsession que l'on dut songer à la sécurité de l'ancien parlementaire catholique. II se retira alors à l'abbaye de Grimbergem où il continua à fouiller les archives et collectionner les articles de journaux à allure prophétique. II s'est éteint doucement - presque oublié des générations d'aujourd'hui. Ceux qu'il servit, pour lesquels il se dépensa sans mesure, sont presque tous disparus. C’est avec émotion, qu’en ancien, j'ai évoqué cette figure de bon citoyen et de brave chrétien.