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Note d’intention
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Congrès
national de Belgique
Séance du
lundi 24 janvier 1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Communication
diplomatique relative au choix du chef de l’Etat. Position de
3) Interpellation sur les
entraves à la navigation de
4) Proposition
tendant à protester contre toute intervention des puissances étrangères et/ou
réponse au protocole du 9 janvier 1831 (Ch. Le Hon, de Robaulx, Devaux, Ch. Vilain XIIII)
5) Projet de décret relatif
aux droit d’entrée sur les fers. Rapport de la section centrale
6) Communication diplomatique
relative au protocole du 9 janvier 1831 (exécution de l’armistice) (Ch. Le Hon, de Robaulx, Lebeau, Duval de Beaulieu, H. de Brouckere)
7) Projet de constitution.
Titre V : De la force publique, Titre VI : Dispositions générales,
Titre VII : De la révision de la constitution. Rapports de la section
centrale
8) Projet de constitution.
Titre III. Chapitre III. Du pouvoir judiciaire. Nomination des présidents et
vice-présidents (H. de Brouckere, Destouvelles, H. de Brouckere, Devaux, Raikem, Van Meenen, H. de Brouckere, de Behr, Devaux, Raikem, Beyts, Barthélemy, Raikem),
nomination du ministère public (Destouvelles, Lebeau, Destouvelles, de Theux, Fleussu), nombre
de cours d’appel (Masbourg, Claus, Masbourg, Claus, Van Snick, Nothomb, Van Meenen, Fleussu, Jean-Baptiste Gendebien, Le Bègue, Raikem)
(E. HUYTTENS, Discussions du
Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe
Wahlen et Cie, 1844, tome 2)
(page
243) (Présidence de M. le baron Surlet de
Chokier)
La séance
est ouverte à midi et demi. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M. de Schiervel informe l'assemblée que la maladie grave
de son père l'empêchera pendant quelques jours d'assister aux séances du
congrès. (P. V.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, présente l'analyse des pétitions suivantes :
Les
habitants d'Epen demandent d'avoir leur administration locale indépendante,
comme avant 1795.
M. Mathieu
regarde le prompt appel d'un prince quelconque comme le seul moyen de
sauver
Les
administrations locales des communes d'Aywaille, Harzé et Lorée réclament
contre le passage forcé des écorces allant à Malmedy par les bureaux du Poteau
et Jalhay.
La veuve
Le Duc demande qu'on lui accorde un local et une rétribution par mois, pour
être institutrice à Bruxelles.
M. de
Locht demande l'abolition de la peine de mort.
(page 244) M. Marcelin Faure, rédacteur
de l'Union belge, présente des réflexions sur la manière dont se font
les rapports des pétitions au congrès : il indique un mode beaucoup plus
convenable, selon lui, soit sous le rapport. du mûr examen dont les pétitions
doivent être l'objet, soit sous le rapport de la publicité que doivent recevoir
les rapports.
Neuf
distillateurs de Liége présentent un mémoire sur les distilleries.
Trente-deux
habitants de Louvain demandent que le duc de Leuchtenberg soit élu roi des
Belges.
M. Derive
dénonce au congrès la non-uniformité des décisions des conseils de la garde
civique.
Vingt
habitants de Dour demandent que les fonctions municipales soient remplies
gratuitement.
Un grand
nombre d'habitants de Saint-Ghislain présentent des observations sur notre
système des poids et mesures.
Un
grand nombre de gardes civiques de Bruxelles demandent l'élection d'Auguste
Beauharnais.
M.
d'Elhoungne soumet au congrès des réflexions sur plusieurs points importants de
la législation.
M.
Motte présente des réflexions sur l'influence commerciale anglaise.
Les
bourgmestres du district d'Alost demandent au congrès de prendre en
considération le commerce du houblon, quand il s'agira d'un traité de commerce
avec
Cinq
anciens élèves vétérinaires présentent des réflexions sur la législation qui
les concerne. (U. B., 26 janv. et P. V.)
-
Toutes ces pièces sont l'envoyées à la commission des pétitions. (P. V.)
M. le président – M. le comte d'Arschot a la parole
pour faire une communication diplomatique. (Profond silence.) (U. B., 26
janv.)
M. le comte d’Arschot,
vice-président du comité diplomatique – Messieurs, j'aurai l'honneur de vous
donner communication d'une lettre que M. de Celles m'a écrite de Paris, ainsi
que d'une note verbale, adressée par lui à M. le ministre des affaires
étrangères de France, et la réponse de ce dernier.
« A M.
le comte d'Arschot, vice-président du comité diplomatique.
« Paris, le 23 janvier 1831.
« Monsieur
le comte,
« J'ai
reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser en date du 19,
avant-hier. Je m'empressai de faire parvenir, le lendemain matin, la note en
date du 22, à M. le ministre des affaires étrangères, dont ci-joint copie. M.
le comte Sébastiani me fit remettre, ce matin, une réponse que je me hâte de
vous expédier par courrier. J'avais prévu que le délai était bien rapproché, et
qu'il serait difficile de satisfaire aux vœux du congrès, pour le 28 de ce
mois. Je pense devoir attendre de nouveaux ordres, pour être à même de remplir
la tâche qui m'est imposée.
« J'ai
l'honneur de vous offrir les expressions de la plus haute considération,
monsieur le comte.
« Comte
DE CELLES. »
_________________
« A M.
le comte Sébastiani, ministre des affaires étrangères.
« Paris, le 22 janvier 1831.
« Le
soussigné, chargé par le gouvernement provisoire de
« Le
congrès national belge a arrêté que les envoyés belges qui se trouvent à Paris
seraient chargés de prendre et de transmettre au congrès, dans le plus bref
délai, des renseignements positifs sur tout ce qui peut être relatif au choix
du chef de l'État, en Belgique, soit sous le rapport du territoire, soit sous
le rapport des intérêts commerciaux, soit sous le rapport des alliances. »
« Le
congrès a fixé au 28 janvier l'élection du chef de l'État.
« Le
soussigné a reçu hier cette injonction par dépêche officielle, en date de
Bruxelles du 19 de ce mois, et désire pouvoir remplir sa tâche le plus
promptement possible.
« Il
saisit cette occasion d'offrir à M. le comte Sébastiani les expressions de la
plus haute considération.
« Signé
Comte DE CELLES. »
__________________
(page 245) « Réponse
de M. le comte Sébastiani.
« Le
soussigné, ministre secrétaire d'État au département des affaires étrangères, a
reçu la note que M. le comte de Celles lui a fait l'honneur de lui adresser
hier, 22 courant. Cette communication est d'une telle importance, et embrasse
des objets d'un si haut intérêt, puisqu'elle touche à l'élection du souverain
de
« Le
choix du souverain est un acte dont dépendra le sort futur de
« L'époque
que le congrès a fixée me paraît beaucoup trop rapprochée, pour assurer le
bonheur à venir des Belges, et écarter tout ce qui semblerait porter
l'empreinte de la précipitation, en donnant à leur détermination tous les
caractères de la prudence et de la stabilité.
« L'étendue
du territoire du nouvel État ne saurait être fixée sans le concours des
puissances intéressées.
« On
ne peut douter à cet égard de l'appui efficace de
« Les
questions commerciales sont tellement compliquées qu'il me serait impossible de
les traiter dans ce moment. Mais
« Un
État nouveau et indépendant ne doit pas se hâter de contracter des alliances.
Quant à l'alliance de
« Le
soussigné prie M le comte de Celles d'agréer sa haute considération.
« Paris,
le 23 janvier 1831.
« Signé
HORACE. SÉBASTIANI. »
« Pour
copie conforme :
« Le
vice-président du comité
diplomatique.
« Comte
D'ARSCHOT. »
(Grande
agitation.) (U. B.,
26 janv. et A. C.)
M.
Constantin Rodenbach – C'est une déception diplomatique. (U. B., 26 janv.)
Quelques voix – L'impression ! (U. B., 26 janv.)
-
L'impression et la distribution de ces pièces sont ordonnées. (P. V.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII – Voici une proposition qui a été déposée sur le bureau
:
« Les soussignés
ont l'honneur de proposer au congrès de requérir, en vertu de l'art. 12 du
règlement, M. le chef du comité diplomatique de se rendre au sein du congrès,
afin de nous donner des renseignements sur le point de savoir si, maintenant
que nos troupes ont débloqué Maestricht, le comité diplomatique a pris des
mesures pour assurer la libre navigation de
« HENRI
DE BROUCKERE, GELDERS, OLISLAGERS, Vicomte CHARLES VILAIN XIIII. » (U. B.,
26 janv.)
M. le président – Cette proposition est elle appuyée ?
(Oui, oui.) (C., 26 janv.)
M. Henri de Brouckere – Messieurs, les circonstances qui nous
ont forcés à vous soumettre (page 246)
cette proposition sont si impérieuses, que nous n'avons pas cru pouvoir tarder
un instant à la présenter. Depuis trois mois, le gouverneur de Maestricht
empêche la navigation de
M.
le comte d’Arschot, vice-président du comité diplomatique – Messieurs, il était trop intéressant
pour toute la partie du pays au-dessous de Maestricht que la navigation de
M. Henri de Brouckere dit que, s'il a insisté sur la
proposition, c'est par la conviction où il était que les maux occasionnés par
les entraves apportées à la navigation de
L'honorable
membre est satisfait des explications que vient de donner M. le comte
d'Arschot. (U. B., 26 janv.)
M. de Robaulx – D'après ce que je viens d'entendre,
il paraît qu'on refuse de recevoir nos parlementaires à Maestricht, et il
paraît que les ennemis se montrent fort peu disposés à exécuter l'armistice.
Cependant nos troupes lèvent le blocus de Maestricht, et abandonnent la ligne
de circonvallation. Messieurs, une pareille mesure va porter dans notre armée
une démoralisation complète. Si le général Dibbets ne veut pas rendre
M. le président – Je prie le public de s'abstenir de
toutes marques d'approbation ou d'improbation : de telles marques sont interdites
par le règlement. (U. B., 26 janv.)
M.
le comte d’Arschot, vice-président du comité diplomatique – Je ferai observer à l'honorable
préopinant que le général Dibbets reçoit des ordres de
M.
Charles Le Hon, membre du comité diplomatique – Messieurs, le
comité diplomatique s'est occupé de l'objet de la proposition qui vient de vous
être soumise. Je pense que l'armistice sera exécuté par
M. Henri de Brouckere – Nous n'avons pas examiné, quand nous
avons fait notre proposition, si quelques considérations pouvaient empêcher le
général, commandant Maestricht, d'exécuter l'armistice, quand nous l'exécutons
de notre côté ; nous l'avons faite parce que
M.
le président – Les injonctions deviennent donc inutiles ! (U. B., 26 janv.)
M. Lebeau – Je demande qu'au nom de l'assemblée,
le public soit prévenu qu'il doit garder le silence. Je prie M. le président de
donner lecture de l'article du règlement qui interdit toutes marques
d'approbation ou d'improbation ; je
demande encore qu'il soit fait un appel au patriotisme des Belges qui occupent
les tribunes, pour leur faire sentir qu'il est impossible que l'assemblée
délibère avec calme et dignité sur les hauts intérêts de l'État si ces
bruyantes acclamations continuent. (Marques générales d'assentiment.) (U.
B., 26 janv.)
Quelques membres – Faites évacuer. (J. F., 26 janv.)
M. le président après avoir donné lecture de
l'article 40 du règlement – Je préviens le public que je ferai arrêter le
premier qui se permettra de troubler l'ordre. (U. B., 26 janv.)
Une voix – Prévenez aussi l'assemblée. (U.
B., 26 janv.)
M. le président
– L'assemblée donnera
l'exemple, je l'espère. (U. B., 26 janv.)
M.
Charles Le Hon, membre du comité diplomatique – Quelle que
soit l'impopularité qui s'attache à l'opinion que j'ai émise, j'y persiste.
Certes, ce que je fais, je le fais par condescendance et par amour du bien
public, et je ne reculerai pas devant cette impopularité. L'honorable membre a
oublié que je ne répondais pas à sa proposition. Je donnais en effet des
éclaircissements sur les causes qui pouvaient avoir empêché le général Dibbetz
de rendre
Plusieurs voix – L'ordre du jour ! (U. B., 26
janv.)
M. le président – Je vais mettre aux voix la
proposition. (U. B., 26 janv.)
M. Lebeau – Nous demandons ici l'ordre du jour
sur la proposition, puisque, d'après les explications données par les membres
du comité diplomatique, son objet est rempli. (U. B., 26 janv.)
M. Henri de Brouckere déclare qu'il retire sa proposition.
(U. B., 26 janv.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII – Messieurs, voici une proposition qui vient d'être
déposée sur le bureau (Note
de bas de page : Sauf le deuxième paragraphe, du préambule, cette
proposition est textuellement la même que celle présentée par M. de Robaulx
dans le comité général du 16 janvier) :
« AU
NOM DU PEUPLE BELGE,
« Le
congrès national,
« Vu
le protocole signé par les envoyés de
« Vu
les communications faites de la part du gouvernement français ;
« Considérant
que le peuple belge a, depuis plusieurs mois et sans le secours d'aucune
puissance étrangère, secoué le joug de
« Que
la guerre existant entre
« Que
si, sous prétexte d'humanité et pour empêcher autant que possible
l'effusion du sang, les cinq puissances ont offert leur médiation purement
amicale et officieuse , par la seule voie de négociation, afin de
faciliter un armistice, jamais
« Qu'au
contraire les puissances ont elles-mêmes proclamé le principe de non-intervention,
principe alors soutenu par
« Que
les conditions de l'armistice n'ayant pas été exécutées de la part de
« Que
le congrès et
« Que
« Que
le protocole du 9 janvier, auquel
« Que
si les gouvernements se liguent à Londres, pour étouffer les germes de liberté
partout où ils se manifestent, la sainte alliance des peuples saura
rompre les fers que le despotisme leur prépare ;
« Proteste
solennellement contre toute intervention des gouvernements étrangers dans les
affaires de
« Et,
se confiant dans la sympathie des peuples pour les Belges et la cause sacrée
qu'ils défendent, déclare que la nation se lèvera en masse pour conserver ses
droits et son indépendance.
« A.
DE ROBAULX, membre du congrès national.
» (U. B., 26 janv. et A. C.)
M. le président – La proposition est-elle appuyée ? (Oui !
oui ! ) (C., 26 janv.)
M.
de Robaulx monte à la tribune pour la développer. (C., 26 janv.)
M.
Devaux – Je
demande la parole pour un rappel au règlement. La proposition de M. de Robaulx
(page 249) ayant été développée et
discutée en comité général, je demande la question préalable. (U. B., 26 janv.)
M.
de Robaulx – Je demande à parler contre la question préalable. Messieurs, on paraît
vouloir s'opposer à ce que je vienne développer ma proposition, Vous savez que
je l'avais présentée en comité général, qu'elle avait été appuyée, développée
et discutée. Je ne reviendrai pas sur ce qui s'est passé dans le comité général
et dans la séance du lendemain ; mais il est de fait que ma proposition a dû
être retirée, parce qu'il y avait des dispositions plus pressantes à prendre
alors. J'avais promis de la présenter le lendemain, je ne l'ai pas fait ; mais
je le fais aujourd'hui à cause de la communication qui nous fut faite dans la
séance d'hier. Car cette communication est une intervention formelle, quoi
qu'on en dise, puisqu'elle s'oppose à ce que le congrès choisisse pour roi le
duc de Leuchtenberg. J'ai cru que cette opposition seule était une intervention
directe, et que le moment était venu de protester hautement contre toute
intervention. Maintenant si le congrès ne partage pas mon avis, je descendrai
de la tribune ; mais j'en laisse la responsabilité à ceux qui m'y auront forcé.
(U. B., 26 janv.)
M. le président consulte l'assemblée sur la question
préalable. (U. B., 26 janv.)
M.
de Robaulx – On n'a pas demandé la question préalable sur ma proposition, ce n'est que
sur le développement. (U. B., 26 janv.)
M. Devaux – Voici ma proposition : j'ai demandé
qu'attendu que la proposition de M. de Robaulx avait déjà été discutée, il fût
déclaré qu'il n'y avait pas lieu à délibérer. (U. B., 26 janv.)
M. Lebeau – Je demande que l'on consulte
l'assemblée sur la question préalable purement et simplement. (C., 26 janv.)
M. le président – Je vais mettre aux voix la question
préalable : Y a-t-il lieu ou non d'entendre le développement de la proposition
de M. de Robaulx ? (C., 26 janv.)
-
L'assemblée se prononce pour la négative. (C., 26 janv.)
M. le président – La proposition est renvoyée aux
sections. (C" 26 janv. et P. V.)
- Le
congrès en ordonne l'impression et la distribution. (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII – La proposition étant renvoyée aux
sections, je demande que le comité diplomatique nous communique la réponse
qu'il a faite au protocole du 9 janvier. Si cette proposition était digne de
- M. Charles Le Hon quitte la salle. (C.,
26 janv.)
M.
de Robaulx demande la déclaration d'urgence. (U. B., 26 janv.)
M. Lebeau – Avant de déclarer l'urgence (page 250) nous devons entendre la
réponse dans cette séance. (U. B., 26 janv.)
RAPPORT
SUR LE PROJET DE DECRET RELATIF AUX DROITS D'ENTREE SUR LES FERS
M.
le président – La parole est à M. Zoude pour faire un rapport sur le projet de décret
relatif aux fers. (C., 26 janv.)
Tandis
que M. Zoude se dirige vers la tribune, des murmures d'impatience s'élèvent de
toutes les parties de l'assemblée, qui parait peu disposée à entendre ce
rapport. Il est manifeste pour tous qu'un intérêt plus pressant occupe
l'assemblée. (U. B., 26 janv.)
M. Le Bègue –
Je ferai remarquer que,
d'après une décision du congrès, les séances du jour ne doivent être consacrées
qu'à la constitution, et les décrets d'urgence doivent être discutés dans les
séances du soir. (U. B., 26 janv.)
Plusieurs voix – L'impression et la distribution
sans lecture ! (U. B., 26 janv.)
M.
le président consulte l'assemblée, qui décide que le rapport, sans être entendu, sera
imprimé et distribué. (P. V.)
M. Charles Le Hon, membre du comité
diplomatique, rentre dans la salle portant en main la réponse au protocole du 9
janvier. L'honorable membre monte à la tribune. (Vif mouvement de curiosité
; silence profond.) Il donne lecture de cette réponse :
« Note
verbale du 18 (19) janvier 1831 (Note de bas de page : Trois dates sont assignées à cette
note : le 16, le 18 et le 19).
« Les
président et membres du comité des relations extérieures ont eu l'honneur de
recevoir de lord Ponsonby et de M. Bresson, par une note verbale du 14 janvier,
copie certifiée du protocole d'une conférence tenue à Londres, le 9 janvier,
par LL. EE. les plénipotentiaires des cinq grandes puissances.
« Le
gouvernement provisoire de
« Le
gouvernement belge, fidèle à la parole donnée et sous la foi d'une exécution
réciproque, a fait cesser toutes les hostilités de notre part, contre
« Après
ces preuves non équivoques de bonne foi et de loyauté, le gouvernement
provisoire, quelque légitime que soit sa défiance des intentions et des
promesses de
« 1°
Que, pour le 20 de ce mois, au plus tard, les troupes belges aux environs de
Maestricht soient éloignées de cette place, de manière à éviter l'occasion
d'agressions journalières entre les soldats du dedans et ceux du dehors ;
« 2°
Que les hostilités continuent de rester suspendues, de notre part, sur toute la
ligne, et que les troupes reprennent les positions qu'elles occupaient le 21
novembre 1830 ;
« Quant
aux positions qu'elles avaient au dedans (page
251) dans des limites non contestées de
« Le
gouvernement provisoire, en agissant avec cette entière bonne foi, a droit de
compter, pour le 20 janvier,
sur la complète exécution des engagements de
« Si
ce juste espoir était encore déçu, si l'Escaut restait fermé, après deux mois
de réclamation et d'attentes vaines, il est dans les devoirs du comité de
déclarer qu'il serait extrêmement difficile d'arrêter le cri de guerre de la
nation et l'élan de l'armée.
« A
cet égard le comité ne peut se dispenser de rappeler ici, qu'aux termes de la
note remise à lord Ponsonby et à M. Bresson, le 24 novembre 1830, le
gouvernement de
« Il
lui paraît, au surplus, incontestable que toute convention dont l'effet serait
de résoudre les questions de territoire ou de finances, ou bien d'affecter
l'indépendance ou tout autre droit absolu de la nation belge, est
essentiellement dans les pouvoirs du congrès national ; qu'à lui seul en
appartient la conclusion définitive.
« C'est
aussi parce que les propositions des puissances n'affectaient aucun de ces
droits et de ces hauts intérêts ; parce qu'elles avaient pour objet un état
purement temporaire et transitoire, comme la nature même de ses attributions,
que le gouvernement belge a cru pouvoir et a pu en effet y donner son adhésion.
« Le
comité ajoutera cette considération, bien grave, que toute autre interprétation
de l'esprit des négociations suivies jusqu'à ce jour, et de leurs résultats,
transformerait réellement la démarche amicale des puissances en une
intervention directe et positive dans les affaires de
Plusieurs voix – Très bien ! très bien !
L'impression ! (U. B., 26 janv.)
M. de Robaulx – Je demande l'impression de cette
pièce ; nous aurons besoin de la méditer.
Le langage diplomatique ne m'est pas familier, mais il me semble
que la protestation du comité diplomatique n'est pas assez formelle. Le congrès
national doit protester solennellement et en termes énergiques contre un
système qui ne tend qu'à nous opprimer. (U. B., 26 janv.)
M. Jottrand – Nous ferons cette protestation le 28.
(J. F., 26 janv.)
M.
de Robaulx – Si le congrès national ne protestait d'une manière solennelle, il
manquerait à ce qu'il se doit à lui-même et à la nation. (U. B., 26 janv.)
M. le président – M. Lebeau, vous aviez demandé la
parole. (U. B., 26 janv.).
M. Lebeau – J'y renonce ; seulement je me
contenterai d'observer que, le 28, nous serons appelés à faire une protestation,
plus forte au fond et moins acerbe dans les formes, que toutes celles que nous
pourrions faire aujourd'hui. (U. B., 26 janv.)
M. le comte Duval de Beaulieu
– Je partage l'opinion
du préopinant ; cependant je crois qu'il n'est pas si urgent de protester
contre l'intervention des puissances ; je ne vois pas de menace d'intervention
dans le refus de reconnaître notre roi futur. (C., 26 janv.)
M. Henri de Brouckere – Messieurs, les termes de la réponse
du comité diplomatique m'ont paru remplis de dignité ; mais un passage de cette
réponse m'a singulièrement effrayé, il est relatif à la citadelle de Venloo. Il
y est dit que les troupes reprendront leurs positions du 21 novembre. Or, si je
ne me trompe, les Hollandais occupaient Venloo à cette époque. (Non ! non !)
(U. B., 26 janv.)
Plusieurs voix – Elles l'avaient quitté le 12. (U.
B., 26 janv.)
M. Henri de Brouckere – Quoi qu'il en soit, je demanderai à
l'honorable M. Le Hon si, en cas que l'armistice fût rompu, les troupes
hollandaises rentreraient à Venloo ? (U. B., 26 janv.)
M. Charles Le Hon, membre du comité
diplomatique – Les troupes conserveront leurs
positions du 21 novembre, et comme nous étions à Venloo à cette époque, nous y
resterons, et les Hollandais n'y rentreront pas. (U. B., 26 janv.)
M. Henri de Brouckere – Je prie le comité diplomatique
d'empêcher que, dans aucun cas, les troupes hollandaises ne rentrent à Venloo.
(U. B., 26 janv.)
-
L'impression et la distribution de la réponse du comité diplomatique sont
ordonnées. (U. B., 26 janv.)
PROJET DE CONSTITUTION. TITRE V : DE
M. le président – La parole est à M. Fleussu pour faire
le rapport de la section centrale sur le titre V du projet de constitution : De
la force publique (L'impression ! l'impression !) (C., 26 janv.)
-
Sans vouloir entendre ce rapport, l'assemblée en ordonne l'impression et la
distribution. (U. B., 26 janv. et P. V.)
PROJET DE CONSTITUTION. TITRE VI DISPOSITIONS GÉNÉRALES, ET SUR LE TITRE VII : DE
M. le président – La parole est à M. Raikem pour un
autre rapport. (C., 26 janv.)
M. Raikem se dispose à présenter le rapport de la section
centrale sur le titre VI du projet de constitution : Dispositions générales,
et sur le titre VII : De la révision de la constitution.
-
L'assemblée ordonne l'impression et la distribution de ce rapport sans vouloir
en entendre la lecture. (U. B., 26. janv. et P. V.)
L'ordre du
jour appelle la suite de la discussion du chap. III, titre III du projet de
constitution, intitulé : Du pouvoir judiciaire.
Article 75
La
discussion sur le dernier paragraphe de l'article 75 est reprise ; ce
paragraphe est ainsi conçu :
« Les
présidents et vice-présidents sont nommés par les cours et tribunaux. » (U. B.,
26 janv. et A. C.)
Un
des secrétaires donne
lecture de l'amendement suivant proposé par M. Henri de Brouckere :
« Les cours d'appel et la cour de cassation choisissent dans
leur sein leurs présidents et vice-présidents. Les présidents et
vice-présidents des tribunaux de première instance sont nommés par le chef de
l'État, sur une liste triple présentée par la cour d'appel du ressort auquel
ces tribunaux appartiennent. » (C., 26 janv. et A.)
M. Henri de Brouckere développe sa proposition. (C., 26
janv.)
M.
Nothomb, secrétaire, lit un amendement de M. Destouvelles, ainsi conçu :
« Les
cours et tribunaux nomment, dans leur sein, leurs présidents et
vice-présidents. Les suppléants participeront à la nomination, sans pouvoir
être élus. » (C., 26 janv. et A.)
M. Henri de Brouckere fait quelques observations sur
l'amendement de M. Destouvelles ; il dit que l'augmentation du nombre des
éligibles ne remédie pas à l'inconvénient de devoir choisir un président parmi
les deux membres restants du tribunal. (c. 26 janv.)
M. Devaux appuie l'amendement de M. de
Brouckere ; mais il croit que relativement à la présentation des candidats à la
présidence et à la vice-présidence des tribunaux de première instance, on
pourrait en restreindre le nombre à élire. (C., 26 janv.)
M.
Destouvelles défend sa proposition. (C., 26 janv.)
M. Raikem, rapporteur – Il me paraît qu'il ne faut pas
attribuer aux cours seules le droit de présentation ; je voudrais que les
conseils de province intervinssent dans la nomination des présidents et
vice-présidents. Je propose donc l'amendement suivant :
« Les présidents et vice-présidents des
tribunaux de première instance sont nommés par le chef de l'État, sur deux
listes doubles, présentées, l'une par la cour dans le ressort de laquelle se trouve le tribunal, et l'autre par le conseil
de la province où siège ce
tribunal. » (C.. 26 janv. et A.)
M. Van Meenen – On
raisonne toujours dans l'hypothèse qu'il y a des tribunaux qui se composent
seulement de trois juges ; mais le moindre tribunal se compose de quatre juges,
y compris le juge d'instruction. (C., 26 janv.)
M.
Henri de Brouckere – M. Van Meenen se trompe ; les tribunaux de Hasselt et
de Ruremonde ne se composent que de trois juges, y compris le juge
d'instruction ; ainsi à la mort du président, le tribunal ne se composera réellement
que de deux membres. Or, il sera souvent impossible de choisir un bon
président si le choix est réduit à deux personnes. (C., 26 janv.)
M.
Destouvelles fait encore quelques observations. (C., 26 janv.)
M. de Behr appuie
l'amendement de M. de Brouckere. (C., 26 janv.)
M.
Devaux demande
un changement dans l'ordre des dispositions du projet de loi, en cas que
l'amendement de M. Raikem fût adopté. (C., 26 janv.)
(page 253) M. Raikem, rapporteur, fait la même demande. (C., 26
janv.)
M.
le baron Beyts combat l'utilité de la présentation faite par les conseils provinciaux.
(C., 26 janv.)
M. Barthélemy propose de laisser à la loi sur
l'organisation judiciaire le mode de nomination des présidents et vice-
présidents. (C., 26 janv.)
M. Raikem, rapporteur – Si on adopte ce système, on pourrait
attribuer au chef de l'État seul le choix des présidents ; or l'influence d'un
président est trop importante pour qu'on laisse le chef de l'Etat maître de
choisir pour président qui bon lui semblerait. (C., 26 janv.)
M. Du Bus appuie la proposition de M.
Destouvelles. (Aux voix ! aux voix !) (C., 26 janv.)
- On
met aux voix l'amendement de M. Barthélemy ; il est rejeté. (C., 26 janv.)
M. le président – Je vais mettre aux voix l'amendement
de M. Destouvelles. (C., 26 janv.)
M. Le Bègue réclame la priorité pour l'amendement
de M. de Brouckere. (C., 26 janv.)
- Après quelques discussions, on met aux voix la proposition
de M. Raikem. Une première épreuve est douteuse. On procède à une deuxième
épreuve ; la proposition est adoptée. (P. V.)
Le congrès
décide qu'elle sera insérée au paragraphe deuxième de l'article ; la rédaction
de ce paragraphe se trouve par suite modifiée de la manière suivante :
« Les
conseillers des cours d'appel et les présidents et vice-présidents des
tribunaux de première instance de leur ressort, sont nommés par le chef de
l'État, sur deux listes doubles, présentées, l'une par ces cours, l'autre par
les conseils provinciaux. » (P. V.)
Le
dernier paragraphe de l'article 70 est ensuite rédigé en ces termes :
« Les
cours choisissent dans leur sein leurs présidents et vice-présidents. » (P. V.)
Un
des secrétaires donne
lecture de l'article 75 modifié ; en voici les termes :
« Art. 75. Les juges de paix et les
juges des tribunaux sont directement nommés par le chef de l'État.
« Les
conseillers des cours d'appel et les présidents et vice-présidents des
tribunaux de première instance de leur ressort sont nommés par le chef de
l'État, sur deux listes doubles présentées l'une par ces cours, l'autre par les
conseils provinciaux.
« Les
conseillers de la cour de cassation sont nommés par le chef de l'État sur deux
listes doubles présentées l'une par le sénat, l'autre par la cour de cassation
elle-même.
« Dans
ces deux cas, les candidats portés sur une liste pourront également être portés
sur l'autre.
« Toutes
les présentations sont rendues publiques, au moins quinze jours avant la
nomination.
« Les
cours choisissent dans leur sein leurs présidents et vice-présidents. » (P. V.)
-
L'ensemble de cet article est mis aux voix et adopté. (P. V.)
Article 76
« Art. 76.
Les juges sont nommés à vie. Aucun juge ne peut être privé de sa place, ni
suspendu que par un jugement.
« Le déplacement
d'un juge ne peut avoir lieu que par une nomination nouvelle et de son
consentement. »
- Adopté. (A. C. et P. V.)
« Art.
77. Le chef de l'État nomme et révoque les officiers du ministère public près
des cours et tribunaux. » (A. c.)
M. Destouvelles propose un amendement ainsi conçu :
« Les
officiers du ministère public près des cours et des tribunaux sont inamovibles.
Ils sont nommés par le chef de l'État sur deux listes doubles présentées l'une
par la cour de cassation, l'autre par la cour ou le tribunal près duquel ils
sont appelés à remplir leurs fonctions. » (A.)
- Cet amendement est
appuyé. (C., 26 janv.)
M. Destouvelles –
On a trouvé que,
puisque le ministère était responsable, le ministère public devait être
révocable par le pouvoir exécutif. Mais il est une différence entre le
gouvernement absolu et le gouvernement constitutionnel : dans le premier, les
officiers du parquet sont serviteurs du souverain ; la loi émane du trône, ils
sont ses véritables organes ; mais, dans le second, la loi étant l'ouvrage des
trois branches du pouvoir législatif et par conséquent de la volonté générale,
les officiers du parquet sont avant tout les hommes de la loi et de la nation ;
et ne le deviennent du pouvoir exécutif que quand ils exécutent les jugements,
mais, comme ils sont en outre les dépositaires de la vindicte publique, ils
doivent être indépendants et dégagés de l'influence du pouvoir exécutif. (J.
B., 26 janv.)
M. Lebeau – L'inamovibilité des officiers du
parquet est contraire au principe de la responsabilité ministérielle. La
responsabilité suppose le pouvoir de faire le mal et le bien. Ce n'est qu'en
supposant l'amovibilité de ces officiers que vous pouvez comprendre l'action
d'un ministre de la justice ; car ce fonctionnaire doit pouvoir imprimer (page 254) une direction uniforme à tous
les parquets. Un délit politique a été commis. Le ministre croit que l'intérêt
de l'État demande une poursuite, le parquet ne veut pas agir. Il est
inamovible, il ne peut y être forcé. Lorsqu'il y a un changement de ministère,
le système entier du gouvernement change. Les nouveaux ministres veulent agir
dans un sens nouveau ; ils trouvent les suppôts impopulaires de l'ancien régime
qui leur sont opposés. (J. B., 26 janv.)
M.
Destouvelles répond aux objections de M. Lebeau, et modifie sa proposition de la
manière suivante :
« Le
chef de l'État nomme et révoque les officiers du ministère public et les
greffiers près des cours et tribunaux. La nomination des greffiers se fait sur
une liste triple de candidats présentée par ces cours et tribunaux. » (C.,
26 janv. et A.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt combat l'amendement de M. Destouvelles. (J. F., 26
janv.)
M. Fleussu parle contre l'inamovibilité. (Aux
voix ! Aux voix !) (C., 26 janv.)
- La
proposition de M. Destouvelles est mise aux voix et rejetée. (C., 26 janv.)
L'article 77 est
adopté. (P. V.)
Article
78
«
Art. 78. Les traitements des membres de l'ordre judiciaire sont fixés par la
loi.» (A. C.)
- Cet
article est adopté sans discussion. (P. V.)
Article 79
«
Art. 79. Aucun juge, autre que les suppléants, ne peut accepter du gouvernement
des fonctions salariées, à moins qu'il ne les exerce gratuitement, et sans
préjudice des cas d'incompatibilité déterminés par la loi. » (A. C.)
M. Devaux demande le retranchement des mots : autres
que les suppléants (C., 26 janv.)
-
L'article 79, ainsi modifié, est adopté. (P. V.)
« Art.
80. Il y aura trois cours d'appel en Belgique.
« La
loi déterminera les lieux où elles seront établies. » (A. C.)
M. Masbourg propose
l'amendement suivant :
« Il y
aura en Belgique trois cours d'appel au moins, et cinq au plus. La loi
déterminera les lieux où elles seront établies. » (A.)
Cet amendement est
appuyé. (C., 26 janv.)
M.
Claus propose
un amendement ainsi conçu :
« Il y
aura au moins trois cours d'appel en Belgique. » (A.)
- Cet amendement est
appuyé. (C., 26 janv.)
M. le président donne la parole à M. Masbourg pour
développer son amendement. (C., 25 janv.)
M. Masbourg – La
crainte de multiplier les corps de judicature a déterminé la section centrale à
ne proposer que trois cours d'appel pour toute
Les
Flandres, le Hainaut et particulièrement le Grand-duché élèveront des
prétentions. La population, les richesses, l'industrie, le commerce qui y
firent établir, il y a plusieurs siècles, les conseils de Flandre et du Hainaut
; ces causes, et toutes les relations qui en sont les suites, ne militeront pas
avec moins de force qu'alors en faveur du rétablissement de cours de justice
dans ces provinces.
L'institution
d'un conseil à Luxembourg, non moins ancienne, avait été jugée indispensable à
raison de l'éloignement de cette province et de la vaste étendue de son
territoire. La position qui le plaçait déjà alors dans un cas d'exception, lui
attribue aujourd'hui les mêmes droits, et de plus fondés encore, à réclamer une
cour d'appel. Eloignée de quarante à cinquante lieues du siège de la cour
supérieure de justice, dont elle dépend, elle ne pourrait sans une injustice
révoltante, rester privée d'une cour. Le coup que lui porta la suppression de
son ancien conseil ne se fit sentir dans toute sa force qu'à l'époque où cette
province fut placée sous la juridiction d'un corps siégeant à une distance
prodigieuse. Elle avait jusque-là fait partie du ressort de la cour d'appel de
Metz, dont le chef-lieu se trouvait assez rapproché, d'autant plus que le
département des Forêts était plus circonscrit. Mais depuis la cessation du
régime français, sa position, sous ce rapport, a été une véritable calamité, et
il y a seize ans que cette province en supporte le poids.
Un état de
choses aussi préjudiciable à ses intérêts et aussi incompatible avec toute idée
de justice, disparaîtra incessamment dans le nouvel ordre judiciaire, fondé sur
des principes constitutionnels. Cependant si l'on admettait la proposition de
la section centrale, cette réforme, que ce simple exposé démontre évidemment
indispensable, pourrait ne pas se réaliser ; elle deviendrait même impossible,
si la législature fixait à Gand, par exemple, le siège de la troisième cour.
Ainsi la constitution qui devrait contenir des germes d'amélioration, formerait
un obstacle insurmontable à la réparation (page
255) d'une profonde injustice et au redressement d'un grief qui frappe
depuis seize ans plus de 300,000 Belges.
Mais en
supposant que le législateur, mû par d'aussi puissants motifs, assignât
l’établissement de la troisième cour à Luxembourg, pensez-vous, messieurs, que
dans ce cas, les Flandres, le Hainaut dussent être privés du même avantage ?
Pouvons-nous, par un article de la constitution, décider irrévocablement et en
dernier ressort les droits de ces provinces ? Admettre la proposition de la
section centrale, ce serait anéantir sans retour des vœux et des espérances qui
peuvent être très légitimes et très fondés.
C'est par
ces considérations, messieurs, que je crois avoir justifié la première partie
de mon amendement tendant à statuer qu'il y aura au moins trois cours d'appel
en Belgique.
Il ne me
sera pas plus difficile, messieurs, de démontrer l'utilité de la seconde partie
du même amendement, ayant pour objet de limiter à cinq le nombre de ces cours
de justice.
L'assemblée
sait avec quelle défaveur le système d'une cour par province, adopté à une
faible majorité en 1827, avait été accueilli par le public. La difficulté de
composer le personnel ; la bigarrure qu'aurait offerte la variation de la
jurisprudence de tant de cours souveraines, et plusieurs autres défauts que
l'on a signalés, avaient déterminé quelques membres des états généraux à
proposer un nouveau plan, même avant que la loi eût été mise en exécution.
Cette tentative, comme on sait, n'a pas eu de succès.
L'étrange
conception qui avait présidé à une loi aussi vicieuse n'était pas en désaccord
avec la loi fondamentale qui avait posé en principe qu'il y aurait une cour de
justice pour une ou plusieurs provinces. Il est essentiel de prévenir le retour
d'un abus aussi dangereux ; il sera rendu impossible si l'on fixe à cet égard
un maximum dans la constitution, et en accordant à la législature la latitude
que je propose on restera bien loin encore de ce système que je viens d'avoir
l'honneur de vous rappeler. Il n'y a en effet aucun rapport d'un plan de cinq
cours pour neuf provinces et quatre millions d'habitants, à cet ordre de choses
qu'aurait introduit la loi de 1827, en établissant dix-huit cours pour dix-huit
provinces et une population de six millions.
En
adoptant l'amendement que j'ai l'honneur de vous soumettre, vous écarterez,
messieurs, le danger de multiplier outre mesure et sans nécessité les corps de
judicature, et vous atteindrez ainsi le but que s'est proposé la section
centrale même ; vous éviterez en même temps le grave inconvénient qui
résulterait de la détermination absolue de l'article tel qu'il est rédigé.
Je
terminerai cet exposé par cette observation générale, que nous devons donner le
plus grand caractère possible d'immutabilité à nos institutions constitutionnelles,
en mettant la législature en situation de satisfaire à des droits légitimes,
des nécessités indispensables. Car si nous lui en ôtons les moyens, la force
des choses provoquera des révisions de la constitution qui n'auront jamais lieu
sans remettre en question toutes nos libertés, sans être suivies de
modifications qui pouvaient ramener sous l'un ou l'autre rapport ces ambiguïtés
de la loi fondamentale, dont nous nous efforçons aujourd'hui d'effacer
jusqu'aux dernières traces. (B., 27 janv.)
M.
Claus – Notre
législation en matière de cassation était trop vicieuse pour que les rédacteurs
du projet de constitution ne cherchassent point à revenir aux principes
élémentaires de la matière, en établissant une cour de cassation séparée et un
nombre de cours d'appel suffisant pour que la cour de cassation ne dût plus
juger le fond.
Pour
parvenir à ce résultat, il fallait au moins trois cours, et c'est à ce nombre
que l'on s'est arrêté. Mais s'il était évident qu'il fallait nécessairement
trois cours, il ne l'était pas également que l'intérêt public ou même des
intérêts locaux n'en exigeraient pas davantage.
Cette
question, aussi difficile qu'importante, demande pour être décidée, des
renseignements et des connaissances locales qui manquent et doivent manquer à
la grande majorité des membres du congrès, et qu'aucun de nous n'est
probablement à même de discuter dans ce moment.
Ce serait cependant trancher cette même
question que d'adopter l'article tel qu'il est proposé ; ce serait repousser,
sans en avoir pris connaissance, des prétentions qui pourraient plus tard être
reconnues légitimes ; en un mot, ce serait consacrer une injustice. Cette
considération suffirait seule pour faire adopter l'amendement proposé, surtout
qu'il ne préjuge pas même la nécessité d'une quatrième cour, et n'a pour but
que de remettre, à un moment où l'on sera préparé, une discussion à laquelle se
rattachent les intérêts les plus graves. (E., 26 janv.)
M. Van Snick appuie fortement
cette opinion ; il fait valoir en sa faveur l'intérêt immense de la province de
Hainaut, et rentre dans des considérations d'intérêt général. (E., 26 janv.)
M.
Nothomb – Je
voterai contre l'article du (page 256)
projet. Il est impossible de fixer aujourd'hui le maximum du nombre des cours
d'appel. Cette question tient à des détails de localité, et il faut
l'abandonner aux législatures qui nous suivront. Si vous limitez
irrévocablement les cours d'appel à trois, vous liez les législateurs à venir,
sans avoir mûrement examiné une question très importante ; les cours seront à
Liége, à Bruxelles, et probablement à Gand ; et vous refusez cette institution
judiciaire au Hainaut, province si étendue, et au Luxembourg, province si éloignée
du siège actuel de la cour. Il vaut mieux ne rien préjuger. La province de
Luxembourg est dans une position moins favorable qu'elle n'était sous l'empire
français : Metz est moins éloigné que Liége. Le gouvernement autrichien avait
fait une exception à l'égard du duché de Luxembourg. La mesure d'ailleurs sera
impolitique ; le roi de Hollande dotera probablement d'une cour d'appel son
prétendu grand-duché, et pourra dire aux Luxembourgeois : Je fais pour vous
plus que le gouvernement belge. (C., 26 janv.)
M. Van Meenen propose de
supprimer l'article 80 et de laisser à la loi d'organisation judiciaire le soin
de déterminer le nombre des cours d'appel. (U. B., 26 janv.)
M.
Gendebien (père) appuie l'amendement de M. Claus. (U. B., 26 janv.)
M.
Fleussu croit
qu'il faut dès ce moment, déterminer quel sera le nombre des cours d'appel.
Qu'il ne faut point laisser dans le vague un objet aussi important. (C., 26
janv.)
M. Jean-Baptiste Gendebien – La loi
fondamentale est de durée perpétuelle, tandis que l'ordre judiciaire varie avec
les besoins des peuples ; il faut donc s'abstenir de toute disposition ; par ce
moyen vous ôtez toute inquiétude pour l'avenir. Il est à espérer que ceux qui
décideront plus tard du nombre des cours consulteront le trésor et se
persuaderont que nous ne sommes plus divisés par des intérêts locaux, mais que
nous voulons tous l'intérêt général. Je voterai pour la suppression de
l'article. (J. B., 26 janv.)
M.
Le Bègue demande
que le principe soit établi dans la constitution, non dans le sens du
préopinant, pour entraver dans la suite les besoins de la nation, mais afin
qu'on ne puisse nous arracher dans le moment actuel les trois cours d'appel qui
sont indispensables. Pour ces motifs, l'orateur votera en faveur de
l'amendement de M. Claus. (J. F., 26 janv.)
M.
Raikem, rapporteur, considère l'institution des trois cours, d'abord sous le
rapport de l'uniformité de jurisprudence ; ensuite sous le rapport de la
difficulté qu'il y aura de trouver des membres capables, si l'on multiplie trop
les cours ; enfin, sous le rapport de la diminution des dépenses : il se
prononce en faveur de l'établissement de trois cours. (C., 26 janv.)
M.
le président invite les sections qui ne se sont pas encore occupées de l'examen du projet
de décret du ministre des finances présenté dans la séance du 20 janvier, à
s'en occuper ce soir. (C., 26 janv.)
M. Destouvelles renonce à la parole. (Aux voix !
aux voix ! La clôture ! la clôture ! Bruit.) (C., 26 janv.)
M. le président – Silence, messieurs ; silence donc !
(C., 26 janv.)
M. Claus répond à quelques objections de M.
Raikem. (C., 26 janv.)
M.
le président met aux voix l'amendement de M. Van Meenen qui tend à la suppression de
l'article 80. (C., 26 janv.)
- Cet
amendement est rejeté ; il en est de même de ceux de MM. Masbourg et Claus.
(C., 26 janv.)
L'article
80 est mis aux voix et adopté, (P. V,)
La séance
est levée à cinq heures. (P. V.)