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Chambre des représentants de Belgique
Séance du mardi 23 février 1847
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre,
notamment pétition relative au notariat (Desmet, Lys, de Corswarem, Lys,
Vilain XIIII, Desmet)
2) Projet de loi accordant une
pension à un ancien combattant de septembre (Boine) (de Garcia)
3) Projet de loi accordant un
crédit provisoire au département des travaux publics (Brabant,
Lebeau, Brabant)
4) Rapport sur une pétition
relative à l’exécution d’un marché public aux bassins du port d’Anvers (de Lannoy, Rogier, Malou, Osy, de Garcia,
Osy, Malou, Rogier,
Donny)
5) Projet de loi accordant un
crédit supplémentaire au budget du département des finances. Archives de l’Etat
(Malou, Jonet, Lebeau,
Jonet, Veydt, Malou,
Veydt, Rogier, Malou,
de Brouckere)
6) Projet de loi accordant un
crédit supplémentaire au budget du département des travaux publics pour la restauration
de l’hôtel de la cour des comptes (Veydt, Malou)
7) Projet de loi relatif à l’établissement
d’un canton de justice de paix à Sichen (Delfosse, Malou, de Corswarem, de Renesse, de Brouckere)
8) Projet de loi relatif à l’administration
de la caisse d’amortissement et de celle des dépôts et consignations. Dette
publique (Malou, Osy, Malou, Osy), composition (Delfosse, Veydt, Malou,
de Bonne, de Man d’Attenrode), responsabilité
du comptable envers la cour des comptes (Delfosse, de Bonne, Malou, de Brouckere, de Man d’Attenrode,
Malou, de Brouckere, Osy, de Man d’Attenrode), mission légale
et financement de la caisse d’amortissement (de Man d’Attenrode,
Delfosse, Osy, Malou,
Delfosse), et de la caisse des dépôts et
consignations, comptabilité publique, cautionnement des comptables (Malou, de Man d’Attenrode, Osy, de Man d’Attenrode, Malou), des entrepreneurs (Lejeune,
Malou), consignations judiciaires (de
Bonne, Delfosse, Malou)
9) Projet de loi accordant un
crédit supplémentaire au budget du département des affaires étrangères, notamment
relations commerciales avec l’Espagne et industrie linière (Osy,
Delehaye, Dechamps), établissement
commercial de Santo-Thomas (Sigart), caractère temporaire
ou définitif de la mission du prince de Chimay auprès du saint-siège (Verhaegen, Dechamps, Verhaegen, Dechamps, Lebeau), traitements diplomatiques et frais de voyages (Osy, Dechamps), caractère temporaire ou
définitif de la mission du prince de Chimay auprès du saint-siège (Delfosse, Dechamps)
(Annales parlementaires de Belgique, session
1846-1847)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 875) M. Van
Cutsem procède à
l'appel nominal à une heure.
- La séance est ouverte.
M. A.
Dubus donne
lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.
M. Van
Cutsem fait
connaître l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur Eemars, ancien
commis aux écritures de l'hôpital militaire de Bruxelles, prie la chambre, en
attendant qu'elle ait statué sur sa position, de lui faire payer le montant de
la différence qui existe entre le chiffre de sa pension et le minimum fixé par
la loi. »
- Renvoi à la commission
des pétitions.
________________
« Plusieurs fabricants et
négociants en toiles à Bruges, demandent que la société d'exportation ne puisse
opérer sur des marchés d'Europe, ni se livrer à la fabrication. »
- Renvoi à la section
centrale chargée d'examiner le projet de loi sur la formation d'une société
d'exportation.
________________
« Le sieur Routier demande que son fils
Eugène, qui a été désigné pour le service militaire, puisse se faire remplacer
ou substituer.»
- Renvoi à la commission
des pétitions.
________________
Message du sénat, faisant
connaître l'adoption par cette chambre des projets de loi relatifs 1° à
l'inaliénabilité des pensions de veuves d'officiers, etc. ; 2° à l'érection île
la commune de Petit-Hier ; 3° à la nomination des juges de paix. »
- Pris pour information.
« Plusieurs habitants de Bruxelles et de ses
faubourgs demandent la prompte discussion du projet de loi sur le notariat. »
M. Desmet. - Je demande le renvoi à la section
centrale chargée de l'examen du projet de loi.
En même temps, je me
permettrai de demander à l'honorable M. Lys s'il espère déposer sous peu le
rapport sur le projet de loi relatif à l'organisation du notariat.
M. Lys. - Chaque jour, la chambre renvoie à
la section centrale des quantités de pétitions. Ensuite, j'ai souvent des
visites des intéressés. Tout cela me distrait du travail important et difficile
dont je suis chargé. Il m'est impossible de dire quel jour j'aurai terminé mon
rapport.
M. de Corswarem. - Il y a près
d'un mois que le rapporteur est nommé ; car cette nomination est, je crois, du
28 janvier. L'honorable M. Lys, interpellé une première fois sur le même objet,
a déclaré qu'il comptait s'en occuper pendant les vacances du carnaval.
L'honorable membre a joui de ces vacances pendant huit jours. Chacun de nous
s'attendait à ce qu'il aurait déposé son rapport à son retour à la chambre.
On sait combien le retard
qu'éprouve le dépôt de ce rapport excite d'inquiétudes parmi les notaires ; et
ces inquiétudes sont bien fondées, car ils se trouvent dans une situation
véritablement provisoire. Tous les jours, non seulement le rapporteur, mais
tous les membres de la section centrale reçoivent des visites, qui commencent à
devenir importunes.
Je
voudrais donc que l'honorable rapporteur précisât le jour où il déposera son
rapport.
Que
quinze jours encore s'écoulent, et M. le rapporteur aura eu six semaines pour
terminer son travail. Ne pourrait-il pas s'engager à déposer son rapport au bout de ce terme, soit
du 10 au 15 mars ?
Ainsi nous serions à
l'abri des importunités, et les intéressés seraient plus ou moins calmés.
M. Lys. - Je me suis occupé du rapport
pendant le carnaval ; j'y travaille constamment. Je ne puis rien dire de plus à
la chambre.
M. Vilain XIIII. - Dans tous les cas, je demande que
cette pétition ne soit pas renvoyée à la section centrale qui a terminé son
travail, et qui ne pourrait rien y faire. On pourrait ordonner le dépôt de la
pétition sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
M. Desmet. - Je me rallie à cette proposition.
Je retire celle que j'avais faite de renvoyer la pétition à la section
centrale. Ainsi l'honorable rapporteur ne sera pas dérangé de son travail.
- La chambre consultée
ordonne le dépôt de la pétition sur le bureau pendant la discussion du projet
de loi.
________________
M. le président. - Le bureau a composé de MM. Osy, de
Man d'Attenrode, de Brouckere, Brabant et Lejeune la commission chargée de
l'examen du projet de loi présenté hier par M. le ministre des finances et
relatif à la convention conclue entre l'Etat et la Société Générale.
M. Brabant. - Je suis absorbé par la rédaction
du rapport sur le budget des travaux publics. Il me serait donc impossible d'assister
aux séances de la commission. Je prie donc le bureau de me remplacer.
M. le président (après avoir consulté MM. les
secrétaires). - Le bureau nomme M. Dubus (aîné) à la place de M. Brabant.
MM. les présidents des
sections se sont réunis hier pour s'entendre sur la marche à suivre quant à
l'examen de projets de loi en section. Ils ont renvoyé, sauf l'approbation de
la chambre, à l'examen des sections de février le projet de loi relatif à
l'extension du matériel du chemin de fer et le projet de loi relatif à
l'organisation des monts-de piété, deux projets de loi pour lesquels aucune
section précédente n'avait nommé de rapporteur.
Si personne ne fait
d'opposition, je considérerai ce renvoi comme approuvé.
PROJET DE LOI ACCORDANT UNE PENSION A UN ANCIEN COMBATTANT DE SEPTEMBRE
M. de Garcia. - J'ai l'honneur
de présenter à la chambre le rapport sur le projet de loi présenté par le département
de la guerre et tendant à accorder une pension au major honoraire Boine.
Le rapport conclut à
l'adoption de ce projet. La section
centrale propose un seul amendement au projet, il consiste à rendre une partie
de la pension du titulaire réversible sur la veuve ; c'est-à-dire que la
pension du major Boine serait de 1,250 fr., et celle de la veuve, en cas de
décès de son mari avant elle, on de moitié, de 625 fr.
- Ce rapport sera imprimé
et distribué.
M. le président. - Ce projet est urgent, la chambre
veut-elle le mettre à l'ordre du jour de demain ? (Oui, oui.)
- La chambre décide
que ce projet figurera en tête de l'ordre du jour de demain.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN CREDIT PROVISOIRE AU DEPARTEMENT DES TRAVAUX PUBLICS
M. Brabant. - Dans la séance de samedi dernier,
M. le ministre des finances nous a présenté un projet de crédit provisoire pour
le département des travaux publics, s’élevant à la somme de 1,107,981 fr. 03.
La section centrale a
adopté ce projet à l’unanimité sous toutes les réserves qui avaient été faites
antérieurement et par le gouvernement et par la section centrale.
- La chambre décide
qu'elle passe, a immédiatement à la discussion de ce projet de loi.
Personne ne demandant la
parole dans la discussion générale, la chambre passe à la délibération sur les
articles.
Discussion des articles et vote sur l’ensemble
« Art. 1er. Il est ouvert
au département des travaux publics, un crédit provisoire d'un million cent sept
mille neuf cent quatre-vingt-un francs trois centimes [fr. 1,107,981 05), pour
faire face aux dépenses du mois de mars de l'année 1847.
M. Lebeau. - Messieurs, je voudrais demander si nous aurons (page 876) bientôt le rapport de la
section centrale sur le budget des travaux publics. Nous avons à nous occuper
de travaux urgents, les vacances de Pâques approchent, et je crains que nous ne
puissions voter ce budget avant Pâques.
Sans doute nous accordons
des crédits provisoires ; mais il est à ma connaissance que cet état de choses
entraîne pour l'administration des embarras en assez grand nombre et des
inconvénients assez fâcheux pour les personnes.
Je crois que l'honorable
M. Brabant est chargé de présenter le rapport. C'est une raison pour moi, je le
dis volontiers, de l'attendre avec patience, parce que je crois que nous serons
dédommagés du retard qu'éprouve le dépôt du rapport par le travail qui nous
sera présenté.
Mais je désirerais savoir
si nous pourrons voter le budget avant les vacances de Pâques.
M. Brabant. - Messieurs, il m'est impossible de
répondre d'une manière positive à la question qui m'est posée par l'honorable
M. Lebeau. Je ne m'occupe plus que du rapport du budget des travaux publics, et
je crois pouvoir dire que tout au plus tard d'ici à quinze jours ce rapport
sera déposé. Je le ferai le plus court possible, afin que l'impression ne soit
pas bien considérable, et que l'attention des membres de la chambre ne soit pas
distraite par la longueur de la rédaction.
- L'article premier est
mis aux voix et adopté.
________________
« Art. 2. La présente loi
sera obligatoire le 1er mars 1847. »
- Adopté.
________________
II est procédé au vote
par appel nominal sur l'ensemble du projet, qui est adopté à l'unanimité des 62
membres présents. Ce sont : MM. Dumont, Eloy de Burdinne, Fleussu, Goblet,
Henot, Jonet, Kervyn, Lange, Lebeau, Le Hon, Lesoinne, Loos, Lys, Malou,
Manilius, Mast de Vries, Osy, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart,
Thienpont, Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen, Veydt, Vilain XIIII,
Biebuyck, Brabant, Cans, Clep, de Brouckere, Dedecker, de Foere, de Garcia de
la Vega, de Haerne, de Lannoy, Delehaye, Delfosse, d'Elhoungne, de Meester, de
Renesse, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Villegas, Donny, Dubus (aîné) et
Dubus (Albéric).
RAPPORT SUR UNE PETITION RELATIVE A L’EXECUTION D’UN MARCHE PUBLIC AUX BASSINS
DU PORT D’ANVERS
M. de Lannoy,
rapporteur. - La
commission m'a chargé de vous faire le rapport sur la pétition qui vous a été
adressée par le sieur Jean Jacobs, d’Anvers, qui réclame l’intervention de la
chambre pour obtenir le payement de sommes qu'il dit lui revenir du chef de
travaux exécutés pour la construction des bassins de la ville d'Anvers.
Cette pétition, qui se
rapporte à une affaire commencée depuis 40 ans environ, est accompagnée d'un
dossier très volumineux, dont il est nécessaire de vous donner une analyse très
succincte, pour vous faire connaître la nature des prétentions du sieur Jacobs.
Le 7 janvier 1806
l'entreprise des travaux du port et bassins d'Anvers a été adjugée aux sieurs
de Pauw et Van de Weghe. Par acte sous seing privé du 20 février 1806, de Pauw
et Van de Weghe cédèrent au sieur Jacobs, pétitionnaire, un tiers dans leur
entreprise.
Une contestation s'étant
élevée entre les adjudicataires et leur associé, pour règlement de compte des
travaux exécutés en 1806 et 1807, l'affaire fut portée devant les tribunaux. La
cour de Bruxelles, par arrêt du 15 janvier 1810, confirmé par arrêt de la cour
de cassation, à Paris, le 28 février suivant, reconnut la validité des
prétentions du sieur Jacobs à participer pour un tiers aux bénéfices opérés,
non seulement sur les travaux de 1806 et 1807, mais encore sur ceux de la suite
de l'entreprise.
Le sieur Jacobs n'ayant
pu, malgré ces arrêts, obtenir payement de ses coassociés, un nouvel arrêt de
la cour de Bruxelles du 28 août 1813, lui alloua une somme de 20,000 fr. par
provision.
Ces contestations
duraient encore à la chute de l'empire français.
Les travaux des bassins
d'Anvers n'étant pas entièrement soldés, cette affaire dut être réglée par la
commission de liquidation qui fut nommée pour fixer le montant des dettes entre
les gouvernements de France et des Pays-Bas, et il fut reconnu que la somme qui
restait à payer montait à 443,331 fr. 75 c.
Le sieur Jacobs
s'empressa de faire notifier à la commission de liquidation à la Haye,
saisie-arrêt sur cette somme, par acte du 1er juin 1818, comme il conste de
pièces déposées au dossier.
De Pauw, pressé par ses
créanciers, ne pouvant, par suite de cette mesure, obtenir le payement des
sommes déposées à la Haye, présenta, le 15 septembre 1819, une requête au
président du tribunal d'Anvers, pour qu'il voulût, vu l'urgence, assigner
Jacobs à comparaître à l'audience du 18 (cinq jours après), pour y entendre
prononcer la nullité et obtenir la main levée de toute saisie-arrêt mise et à
mettre par ledit Jacobs sur ce qui restait dû par le gouvernement français des
travaux faits au port et bassins d'Anvers.
Le sieur Jacobs ne se
présenta point à cette audience, n'ayant pu réunir en si peu de temps ses
moyens de défense, et, par un arrêt rendu contre lui, par défaut, le tribunal
prononça la nullité et ordonna la main levée de toute saisie-arrêt et
opposition sur les sommes dues par le gouvernement, pour les travaux faits au
port et bassins d'Anvers, et ordonna, attendu qu'il y avait titre, que le
jugement serait exécutoire par provision, nonobstant appel ou opposition, sans
caution.
Le sieur Jacobs interjeta
appel de ce jugement qui fut annulé par arrêt de la cour supérieure de justice
de Bruxelles, du 4 février 1820.
Mais il paraît que
pendant cet intervalle le sieur de Pauw s'était rendu à la Haye et que, produisant
à la commission de liquidation le jugement rendu par défaut contre Jacobs, il
était parvenu à faire liquider son compte moyennant une perte considérable.
Le sieur Jacobs
prétendit, avec raison, paraît-il, que le payement fait à de Pauw, au mépris de
ses prétentions reconnues valables par plusieurs arrêts, était illégal,
arbitraire et injuste ; et ses démarches pour se faire rendre justice duraient
encore au moment de la révolution de 1830.
Le traité du 19 avril
1839 vint relever l'espoir du pétitionnaire ; il fit des démarches pour que ses
prétentions fussent comprises au nombre de celles qui devaient être réglées par
la commission mixte d'Utrecht.
Le ministre des finances,
auquel le sieur Jacobs s'adressa à cette fin, lui répondit, par lettre du 18 août
1841, page 4, que l'examen auquel sa requête avait donné lieu avait fait
connaître que sa demande ne rentrait, sous aucun rapport, ni dans les
attributions de la commission mixte d'Utrecht ni dans celles du département des
finances.
C'est contre cette
décision, que le pétitionnaire regarde comme un déni de justice, qu'il n'a
cessé de réclamer depuis : c'est contre cette décision qu'il réclame encore
aujourd'hui, dans la pétition qu'il vous a adressée, soutenant que M. le
ministre n'était pas compétent pour trancher la question et qu'il lui a été
fait un tort notable.
La commission a puisé dans l'examen de cette affaire la
conviction que les intérêts du sieur Jacobs ont été lésés d'une manière très
grave et qu'il a été victime d'une suite de circonstances très malheureuses
pour lui ; sous ce point de vue il est digne de l'intérêt de la chambre.
La commission, sans
vouloir rien préjuger sur cette affaire assez compliquée et notamment sur le
refus de M. le ministre des finances de la comprendre parmi celles qui ont fait
matière de l'examen de la commission mixte d'Utrecht, a l'honneur de vous
proposer le renvoi à M. le ministre des finances.
M. Rogier. - Messieurs, d'après
les conclusions de la commission, la pétition serait renvoyée à M. le ministre
des finances. Le rapport exprime une opinion favorable à la situation du
pétitionnaire. Je demanderai que la pétition soit renvoyée à M. le ministre des
finances avec demande d'explication.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, pour prévenir un travail inutile, je donnerai immédiatement
une explication sur la position du gouvernement et du pétitionnaire, en ce qui
concerne la liquidation d'anciennes créances.
La chambre se rappellera
qu'on a alloué, par le traité du 5 novembre 1842 et à forfait, une somme de 7
millions de florins à 2 1/2 p. c. pour achever les liquidations et que, par le
même traité, on a institué une commission chargée de juger souverainement
toutes les questions qui se rattachent au payement des anciennes créances. Je
ne pourrais donner d'autres explications à la chambre que celle-ci : la
commission a statué sur la pétition du sieur Jacobs ; elle a reconnu que celui-ci
ne rentrait pas dans les termes du traité, que, par conséquent, il n'y a aucun
droit à la charge de la Belgique.
II est
impossible que le gouvernement entre dans la discussion de tous les faits
relatifs à la liquidation de toutes les dettes, depuis l'existence des Pays-Bas
autrichiens. Le chiffre connu des créances frappées de déchéances,
prescriptions et autres fins de non-recevoir, non compris les créances qui ont
été admises, s'élève à peu près à 37 millions, et dans ces 37 millions se
trouve la créance du sieur Jacobs. Je crois que l'énoncé seul du fait suffit
pour démontrer qu'on ne peut pas sortir des termes de la loi et des règles
générales de la liquidation.
M. Osy. - Messieurs, après le traité de paix, le gouvernement a fait un appel à
tous les anciens créanciers du royaume des Pays-Bas. Le pétitionnaire s'est
adressé à M le ministre des finances d'alors, qui, si je ne me trompe, était
l'honorable M. Smits. Le pétitionnaire se plaint de ce que M. le ministre des
finances a oublié de saisir de sa réclamation la commission de liquidation à
Utrecht ; ensuite, la commission qui devait répartir les sept millions, a
rejeté la liquidation de cette créance. C’est donc sur l'erreur que le
pétitionnaire dit avoir été commise à son préjudice par son prédécesseur, que
M. le ministre des finances doit porter son attention, et sous ce rapport il ne
doit pas s'opposer à la demande d'explications proposée par l'honorable M.
Rogier.
M. de Garcia. - Messieurs, il
m'est impossible n'admettre la justesse de l'observation qui vient d’être faite
par l'honorable M. Osy. De deux choses l'une, ou le requérant a satisfait aux
obligations qui lui sont imposées par nos lois, ou il n'y a pas satisfait ;
s'il n'y a pas satisfait, les déchéances que prononcent les lois, doivent être
maintenues. Je pourrais citer l'exemple de la ville que j'ai l'honneur de
représenter. Elle avait des sommes énormes à réclamer contre l'Etat, du chef de
la construction de la route de Namur à Louvain. Partout l'Etat a combattu ces
prétentions par des déchéances, et toutes nos réclamations ont échoué dans
cette enceinte.
Quel serait le motif de déroger à cette règle dans l'espèce
actuelle ? Rien de plausible n'a été produit à cet égard.
Un fait pourtant a été
signalé par l'honorable M. Osy ; c'est qu'un haut fonctionnaire aurait négligé
les intérêts du pétitionnaire, et que cette négligence serait la cause des
pertes qu'il a essuyées. Si ce fait est vrai, l'Etat ne serait pas encore soumis
à sa réparation.
Si un ministre ou un
fonctionnaire quelconque écartait une réclamation, et qu'on pût le constater,
je crois que le ministre ou le fonctionnaire devrait être tenu personnellement
aux réparations et aux dommages-intérêts résultant d'actes semblables à ceux
qu'on vient de signaler.
(page 877) M. Osy. - Je n'affirme pas que le ministre des finances ait été cause de la
déchéance que le pétitionnaire a encourue ; je dis seulement ce qui e trouve
dans la pétition ; je dis que le pétitionnaire se plaint de ce qu'un ministre
n'aurait pas adressé sa réclamation en temps voulu au gouvernement des
Pays-Bas, ce qui aurait motivé le rejet de sa créance par la commission de
liquidation. Je ne dis pas que la chose s'est passée ainsi, je dis seulement
que la réclamation faite dans ces termes mérite d'être l'objet d'un examen et
d'explications de la part du gouvernement.
M. le ministre des finances (M. Malou). - En supposant que le ministre
n'aurait pas transmis la réclamation du pétitionnaire à la commission
d'Utrecht, ce serait indifférent pour la question de droit. On a alloué 7
millions, non pour payer toutes les créances dont le payement pouvait être
réclamé près de la commission d'Utrecht, mais pour payer les sommes dues en
1830.
La somme réclamée par le
pétitionnaire a été rejetée par la commission de liquidation, comme n'étant pas
due en vertu des traités. Je ne m'oppose pas au renvoi pur et simple, mais je
désire que le renvoi ait lieu sans demande d'explications.
M. Rogier. - Quand j'ai
proposé le renvoi de la pétition au ministre des finances, avec demande
d'explications, c'était pour attirer son attention spéciale sur le contenu de
cette pétition. Le fait dont se plaint le pétitionnaire, c'est que par suite de
ce qu'il appelle la négligence d'un prédécesseur de M. le ministre, sa
réclamation n'aurait pas été envoyée à la commission de liquidation qui n'a pas
pu statuer sur sa créance ; nous n'avons pas à examiner le fond de la
réclamation, mais nous demandons que M. le ministre veuille bien examiner la
pétition avec tout l'intérêt qu'elle mérite. Quant à l'explication, je voudrais
qu'elle portât sur le fait de n'avoir pas envoyé cette pétition à la commission
de liquidation. Voilà un fait assez grave pour réclamer les explications de M.
le ministre.
M. Donny. - Je viens confirmer l'observation
présentée par M. le ; ministre des finances. Il vous a dit qu'il était inutile
d'examiner si la réclamation du pétitionnaire avait été envoyée ou non à la
commission d'Utrecht. Cela est parfaitement vrai. Cette commission était
chargée par, le traité de 1839, de faire la liquidation des créances y
mentionnées ; si la commission avait rempli ce mandat, toute négligence
apportée par le ministre des finances à faire parvenir à cette commission les
réclamations des parties intéressées aurait pu être fatale à ceux-ci, et, dans
ce cas, le gouvernement devrait naturellement expliquer et justifier sa conduite
; mais les choses ne se sont point passées de cette manière.
La commission a commencé
par faire des tentatives de liquidation, mais elle s'est convaincue bien vite
qu'il était, sinon impossible, du moins extrêmement difficile d'effectuer la
liquidation d'une manière convenable. Alors, laissant de côté toutes les
réclamations qui lui avaient été présentées, elle a tâché de conclure un
arrangement à forfait, au moyen duquel la Belgique se serait chargée de la
liquidation de toutes les dettes non liquidées existantes encore en 1830, sans
distinguer entre celles présentées à la commission et celles qui ne l'étaient
pas. Cet arrangement à forfait a été conclu ; la commission d'Utrecht n'avait
dès lors plus à s'occuper et ne s'est plus occupée de réclamations faites par
des particuliers ; dès lors aussi la présentation à la commission d'Utrecht est
devenue une circonstance complétement indifférente.
- Le renvoi à M. le
ministre des finances est ordonné. La demande d'explication n'est pas admise.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT
DES FINANCES
L'article
unique du projet de loi est ainsi conçu :
« Article unique. Il est
ouvert au budget du ministère des finances un crédit supplémentaire de 175,000
francs applicable :
« 1° A concurrence de
165,000 francs, à l'acquisition des terrains et bâtiments de la Société belge
de librairie, imprimerie et papeterie, rue du Nord, n° 8, à Bruxelles ;
« 2° A concurrence de
10,000 francs, aux dépenses d'appropriation de ces bâtiments.
« Ce crédit formera
l'article unique du chapitre VII du budget du ministère des finances, pour
l'exercice 1847. »
- La section centrale
propose l'adoption du projet de loi tel qu'il a été présenté, mais sous une
condition, à savoir que, lors de la discussion, le gouvernement prendra
l’engagement précis de réaliser, dans le cours de 1848, sur les loyers
mentionnés à l'annexe n°1 de l'exposé des motifs, une économie au moins égale à
la somme représentant l'intérêt du capital à employer à l'achat de l'immeuble
et aux frais d'appropriation, intérêt calculé à 6 p. c. l'an.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Le but de cette acquisition a été
de faire l'économie de quelques loyers de locaux épais dans la ville de
Bruxelles. La réserve faite par la section centrale rentre donc dans les
intentions du gouvernement. C'est pour atteindre ce but, pour faire de cette
propriété une espèce de succursale des ministères, que l'acquisition vous est
proposée. Comme cela est indiqué dans l'exposé des motifs et dans le rapport,
le gouvernement désire aussi pouvoir y placer immédiatement les nouvelles
archives accumulées dans les hôtels des ministères.
La question du placement
des anciennes archives demeure entièrement réservée. Le projet ne change rien à
cet égard. Le gouvernement continue d'étudier cette question. Quand il sera
arrivé à un résultat, il fera, quant aux anciennes archives, une nouvelle
proposition à la chambre.
M. Jonet. - J'étais membre de la 3ème section
qui a émis l'avis suivant énoncé dans le rapport de M. Veydt :
« La 3° section s'est
abstenue de se prononcer. Elle a chargé son rapporteur de s'assurer si le local
choisi répondrait à sa nouvelle destination et si de grandes dépenses
d'appropriation ne seraient pas nécessaires. Elle s'est demandé aussi s'il ne
vaudrait pas mieux bâtir sur un terrain libre appartenant à l'Etat ou acquis
dans ce but. »
Cette opinion de la 3ème
section est également la mienne. Je la propose encore aujourd'hui.
Je pense que l'acquisition
qu'on ferait de la propriété de M. Hauman ne remplirait pas le but qu'on se
propose, que cette propriété serait insuffisante, que l'Etat ferait beaucoup
mieux d'acheter dès aujourd'hui un terrain plus vaste, pour construire un
bâtiment propre à conserver non seulement les nouvelles archives, mais encore
les anciennes.
Cette question a été
soulevée plusieurs fois dans la chambre, notamment à l'occasion du budget de
l'intérieur.
Si l'on trouvait une
propriété plus étendue, où l'on pût construire, non pas en un an, mais en
quatre ans, dix ans s'il le faut, un bâtiment plus convenable, qui serait à
l'abri de l'incendie, parce qu'il serait construit sans bois, en pierres, en
briques et en fer, il y aurait économie à adopter ce système ; car si vous achetez
la propriété de M. Hauman, vous n'aurez fait qu'une opération du moment. A mon
avis, ce ne sera qu'un replâtrage. Vos archives principales resteront toujours
sans bâtiments convenables, exposés à la pluie et aux incendies. Il suffirait
d'avoir une propriété plus grande. Je crois qu'on pourrait la trouver. Il s'en
trouve une qui n'est pas très éloignée et dans une situation beaucoup plus
favorable que celle de la propriété qu'on veut acquérir. J'ai fait quelques
recherches : j'ai à proximité du palais de la Nation et des ministères une
propriété qui pourrait très bien convenir, sauf le prix qu'on demande et qui
ferait l’objet d'une négociation particulière.
Je pense donc que, dans
l'intérêt de l'Etat, il ne faut pas acheter la propriété de M. Hauman, parce
que, en s'entendant avec le propriétaire, on pourrait avoir une propriété plus
étendue dans le prolongement de la rue de la Loi, quartier Léopold, derrière la
maison de M. Meeus, à quelques centaines de pas des ministères et de la chambre
des représentants. Il y a là un terrain carré, isolé, vos archives y seraient
parfaitement placées.
Vous
me direz que l'on ne pourra pas bâtir en une année ; je suis de cet avis. Mais
vous pourriez bâtir une partie en deux ans, le reste dans les deux années
suivantes. Avec les 250,000 fr. qu'il vous faudra dépenser pour l'achat et
l'appropriation des bâtiments dont il s'agit, vous achèteriez ce terrain.
C'est l'opinion que ma
section m'a chargé de soutenir. La section centrale ne l'a pas repoussée ; mais
la majorité pense néanmoins qu'il fallait acheter la propriété de M. Hauman.
Quant à moi, je considère
cette dépense comme inutile.
M. Lebeau. - A certains égards la 4ème section,
dont j'avais l'honneur d'être président, a exprimé une opinion analogue à celle
de l'honorable préopinant, c'est-à-dire que la section a été unanimement d'avis
que si la destination principale des bâtiments acquis par le gouvernement, dans
la rue du Nord, était la conservation de nos archives, il y aurait à cela des
objections sérieuses à présenter. La section s'en est expliquée de la manière
la plus positive. Cependant la section a émis un vote favorable au projet de
loi.
Voici comment elle s'est
expliquée :
« La quatrième section a
été unanimement d'avis que le local désigné ne convient, sous aucun rapport,
pour y réunir et conserver les archives ; mais elle s'est montrée disposée à
accorder le crédit si, pour d'autres destinations, ce local peut remplacer avec
avantage et économie les divers bâtiments loués maintenant et qui se trouvent
disséminés dans toute la ville. Elle a chargé son rapporteur de s'enquérir si
ces conditions seraient remplies et d'examiner les pièces, plans et devis
relatifs à l'acquisition et aux constructions à y faire. »
Du moment qu'il serait
question d'établir dans ces bâtiments le dépôt, non seulement des archives
anciennes, mais des archives de toute nature, de tout ce qui pourrait être
considéré comme sortant du courant des affaires, comme pouvant être mis dans un
lieu spécial de dépôt, le local dont il s'agit ne nous a paru en aucune façon
propre à cette destination ; mais nous avons été frappés des autres raisons
présentées par le gouvernement à l'appui de son projet.
Nous voyons d'abord,
quant à l'acquisition en elle-même, que le prix en est très modéré. En effet,
messieurs, l'estimation a été faite par deux hommes dont la capacité et
l'intégrité sont au-dessus de tout soupçon. Cette estimation est de 170,000 fr.
L'achat est de 165,000 fr. Il paraît que la construction seule des bâtiments a
coûté au-delà de 150,000 francs, et je ne crains pas d'en appeler à l'opinion
de la section centrale et des honorables membres de cette chambre qui se sont
rendus sur les lieux ; ils diront avec moi que cette évaluation n'est pas
exagérée.
Indépendamment d'une
construction récente que l'on dit avoir coûté 150,000 francs il y a trente
mille pieds de développements, trente mille pieds de surface dans une situation
destinée, selon moi, à devenir un jour centrale, dans un quartier où le pied
carré se vend de 3 à 4 francs. (Interruption.)
Permettez ; j'en parle
avec connaissance de cause. Je connais des personnes qui ont acheté des
terrains à bâtir, non pas dans le centre de la ville, (page 878) non pas dans la proximité du Parc, mais dans le quartier
Léopold, et dans une partie excentrique du quartier Léopold. J'ai pu me
convaincre qu'au quartier Léopold, le prix du pied carré varie de 3 à 5 francs,
que le minimum est en général de 3 francs, et qu'il y a des parcelles de
terrains qui s'y vendent jusqu'à 5 francs. Ainsi les parties qui font face au
boulevard se vendent à 5 francs le pied ; et dans la situation où M. Jonet
voudrait placer l'hôtel des archives, le pied carré se vend peut-être 4 fr. -De
sorte que pour l'acquisition à laquelle on convie le ministère, il faudrait,
rien que pour le sol, dépenser environ 400,000 fr.
Eh bien, les trente mille
pieds qui se trouvent dans la rue du Nord, qui touchent à la rue de Louvain, et
qui certes sont bien près des ministères, sont acquis absolument pour rien. On
ne rembourse que le coût des bâtiments.
Je dis donc que, sous le
rapport de l'acquisition, c'est essentiellement un bon marché.
A Dieu ne plaise
cependant, si l'acquisition qui a été faite ne répondait pas au but que l'on se
propose, qu'il fallût encourager le gouvernement dans cette voie ; à Dieu ne
plaise qu'en présence de la position de nos finances, il fallût sans nécessité
faire cette acquisition ! Mais nous ne sommes pas libres de ne pas faire des
acquisitions de cette nature. Car déjà aujourd'hui le gouvernement est obligé
de payer, pour placer le trop plein des bureaux des différentes
administrations, des loyers qui répondent, en comptant sur un intérêt de 4 p.
c. seulement, à un capital d'au-delà d'un million. Il faut en loyers 40,155
fr., d'après la note soumise par M. le ministre des finances.
Remarquez que, même sous
le rapport de nos finances, nous faisons
une bonne affaire, si M. le ministre, comme je n'en ai pas le moindre
doute, renouvelle à la tribune la déclaration, faite par lui à la section
centrale, qu'il est prêt à transporter immédiatement différents bureaux dans
les bâtiments dont il a fait l'acquisition, si la vente est ratifiée par les
chambres, et à supprimer différents loyers montant à une somme de 11,350 fr.,
c'est-à-dire pour une somme représentant un capital de près de 300,000 fr. à 4
p. c. Vous voyez donc que de toutes façons l'opération est avantageuse,
indépendamment de la proximité du local de tous les hôtels de ministère pour
l'acquisition desquels la chambre a déjà voté des sommes considérables. Or, si
c'est comme succursale des ministères, si c'est surtout pour y placer un
personnel ressortissant aux différentes administrations, je crois qu'il y avait
convenance de la part du gouvernement, à donner la préférence à l'acquisition
qui a été faite.
Mais, messieurs, à moins
qu'on ne nous donne des renseignements qui nous manquent encore, je proteste
contre toute idée de faire de ce local un dépôt d'archives. Je crois que pour
un dépôt d'archives il faut un bâtiment spécial, un bâtiment isolé, un bâtiment
où le bois n'entre une très exceptionnellement. Je crois que pour ce bâtiment
il faudra des subsides particuliers, une situation toute particulière et un
plan spécial qui ne ressemble à rien de ce que l'on achète aujourd'hui.
A cette occasion, je
voudrais jeter en avant, sans arrêter trop longtemps la chambre sur cette
question, une idée qui m'est souvent venue quant aux archives.
Je suis grand partisan de
la conservation des archives ; mais je connais sous ce rapport des fanatiques
comme il y en a à peu près dans tous les genres. Il y a des hommes qui
croiraient se rendre coupables du crime d'Omar, s'ils lacéraient, s'ils
mettaient au pilon la farde la plus insignifiante.
Je suis convaincu que les
trois quarts peut-être des archives conservées si religieusement, non seulement
à Bruxelles, mais aux hôtels des gouvernements dans les provinces, ne seront
jamais d'aucune utilité et que leur véritable destination, c'est l'épicier.
Je voudrais donc que tout
ce qui n'est pas historique, ou statistique, ou titre de propriété, enfin tout
ce qui n'est pas d'un intérêt évident, fût mis à néant. Mais il faudrait
procéder à une opération de ce genre avec la plus grande prudence, il faudrait,
ce me semble, entre autres mesures, commencer par nommer des commissions
provinciales, dans lesquelles je voudrais voir représenter les partisans les
plus superstitieux de la conservation des archives. Je voudrais que ces
commissions, après leur travail, fissent des propositions au gouvernement qui
statuerait sur le sort des archives à mettre à néant, comme inutiles,
encombrantes et propres seulement à rendre les recherches plus difficiles ;
pour l'anéantissement de tout ce qui peut être considéré comme parfaitement
inutile, je le répète, le gouvernement seul pourra il statuer.
Je
dois dire, messieurs, que j'ai vu dans les archives des provinces des fardes
sous lesquelles ployaient eu quelque sorte les planchers et qui ne contenaient
que des pièces complétement inutiles.
.Je voudrais donc que
l'on en vînt un jour à examiner jusqu'à quel point on peut désobstruer les
dépôts d'archives tant de la capitale que des provinces.
M. Jonet. - J'ai demandé la parole pour
répondre quelques mots à l'honorable M. Lebeau.
Il vous a dit que le terrain
auquel j'avais fait allusion coûterait au moins quatre francs le pied.
Messieurs, il y a au
quartier Léopold des terrains qui se vendent, il est vrai, jusqu'à cinq francs
le pied, et il y en a qui coûtent 4, 3 et 2 fr. le pied.
Quant à celui dont je vous
ai parlé, j'ai été le voir sans mission de personne. J'ai vu le propriétaire et
je lui ai demandé à quel prix il le laisserait. Il m'a demandé si ce serait
pour prendre le tout. Je lui ai répondu que oui, que ce serait pour prendre
tout le carré qui contrent 100,000 pieds à peu près, entièrement entouré de
murs et situé en face de l'église Saint-Joseph. J'en ai demandé le prix, et
comme je ne voulais pas annoncer une chose qui pût paraître incertaine, j'ai
demandé qu'on me donnât le prix par écrit. Eh bien, messieurs, le prix qu'on
m'a demandé est 2 fr. 50 le pied ; mais je suis convaincu que si vous faisiez
une offre vous obtiendriez un rabais, car la société civile a intérêt à voir
établir un nouveau monument au Quartier-Léopold. Quand je dis : un monument, je
n'entends pas qu'on doive faire quelque chose de fastueux : mais il faut une
construction solide, dans le genre du nouvel entrepôt de Bruxelles, quelque
chose qui soit bien à l'abri du feu, où il y ait surtout le moins de bois
possible.
Maintenant, messieurs,
faut-il, dans cette position, acheter le terrain et les bâtiments dont M. le
ministre des finances a fait l'acquisition provisoire ? Vous êtes tous
d'accord, et je crois que M. le ministre des finances conviendra également, que
cette propriété ne suffira pas pour y déposer toutes les archives, alors même
qu'on en enverrait une bonne partie chez l'épicier. Tôt ou tard, messieurs,
quoi que vous fassiez, il vous faudra autre chose. Dès lors pourquoi ne pas
acheter dès aujourd'hui un terrain comme celui dont je viens de parler ? Vous
pourriez ainsi, dans un an, atteindre le but que vous avez en vue en faisant
l'acquisition de la propriété rue du Nord, qui, soit dit en passant, ne vaut
pas le quart de celle dont je viens de parler, sous le rapport de la situation,
car il est certain que la situation de la rue de la Loi vaut bien le double et
peut-être même le quadruple de celle de la rue du Nord, qui n'est
certes pas des plus belles. Je disais donc que dans un an vous pourriez
atteindre le but que vous avez en vue : en effet, dès la première année il vous
serait facile d'avoir des locaux pour le personnel ; la deuxième année vous en
auriez pour les archives nouvelles, et la troisième ou la quatrième vous en
auriez pour les archives anciennes. Vous pourriez en outre placer dans le
bâtiment à construire une foule d'établissements pour lesquels vous êtes
obligés de louer des locaux, ce qui vous ferait économiser non seulement 11,000
francs par année, mais la somme entière de 40,000 fr. Vous auriez alors un bâtiment
solide, isolé des petites maisons et des boulangeries, ce qui n'est pas le cas
pour la propriété dont vous voulez faire l'acquisition.
Je persiste à croire,
messieurs, que l'opération que je viens de vous indiquer serait de beaucoup
préférable à celle qu'on nous propose de sanctionner.
M. Veydt, rapporteur. - L'honorable M. Jonet vient de
faire valoir les considérations qu'il avait présentées dans la section
centrale. Comme il l'a dit, messieurs, il avait bien voulu s'informer du prix
auquel on pourrait acquérir un terrain vaste et convenable pour y bâtir un
local destiné à servir de dépôt à toutes les archives, et ce prix est jusqu'à
présent de 2 fr. 50 cent. le pied. Mais, messieurs, la section centrale
eût-elle pu obtenir le terrain dont il s'agit pour la moitié de ce prix,
eût-elle pu même l'obtenir gratuitement, elle n'aurait pas encore proposé, dans
les circonstances actuelles, la construction d'un bâtiment spécial pour les
archives, et cela pour plusieurs raisons, pour des raisons d'économie et pour
des raisons administratives. En effet, messieurs, il est nécessaire d'avoir
immédiatement un local convenable afin de pouvoir débarrasser les ministères
d'une grande partie des archives modernes qui les encombrent et les exposent,
en cas d'incendie, aux plus grands désastres. Cette seconde considération
s'applique aussi au dépôt actuel du cadastre, même à un plus haut degré.
Dans l'état actuel des
choses, le gouvernement doit louer des maisons situées dans différentes parties
de la ville, et il paye de ce chef annuellement des sommes considérables.
L'acquisition dont il s'agit dans le projet de loi permettra d'abandonner
immédiatement trois ou quatre de ces maisons occupées par les départements de
l'intérieur et des affaires étrangères et qui sont désignées à l'annexe sous
les n°3, 13, 15 et 16. Nous arrivons ainsi à une économie dont le montant
dépasse l'intérêt de la somme que coûte la propriété.
L'honorable M. Jonet a parlé
de 250,000 fr., mais il a été bien entendu, messieurs, que la dépense ne
s'élèvera pas au-delà de 175,000 fr., car au moyen du supplément de 10,000 fr.,
M. le ministre des finances pourra largement pourvoir à toutes les dépenses
d'appropriation et d'emménagement.
Quant aux bâtiments de la
rue du Nord, ils ont été visités par plusieurs membres de la section centrale,
qui ont trouvé qu'ils sont très propres à la double destination qu'ils
recevraient. La partie qui sert d'habitation est construite, en quelque sorte,
comme un petit hôtel de ministère : il y a un grand nombre de places et de
dégagements. Le magasin de la librairie est un vaste bâtiment tout à fait
convenable à un dépôt d'archives. La construction en est solide, et elle n'est
en contact, du côté de la caserne, avec aucun local qui inspire des craintes
d'incendie. On pourrait même l'isoler, s'il le fallait.
Telles
sont les principales considérations, messieurs, qui ont déterminé la section
centrale à appuyer l'acquisition faite provisoirement par le département des
finances. Ce n'est pas une affaire d'éclat, une affaire de grande importance en
elle-même ; mais c'est une chose utile, d'un usage immédiat. Suivant moi, ce ne
sera jamais une affaire onéreuse ; car si le dépôt des archives s'établit ailleurs
et si l'on n'avait plus besoin des bâtiments de la rue du Nord, il sera
possible de les vendre et même d'en retirer la somme qu'on veut y consacrer
aujourd'hui.
Cependant, messieurs, la
section centrale a mis une condition à son approbation au projet de loi ; elle
désire que le gouvernement prenne l'engagement bien positif de résilier des
baux jusqu'à concurrence d'une (page 879)
somme au moins équivalente au montant des intérêts du capital qu'il s'agit de
dépenser. M. le ministre dit bien qu'il y aura résiliation de baux ; mais il
faut nous entendre sur le chiffre des réductions qui en résultera.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, je me suis exprimé sur ce dernier point d'une manière aussi
formelle qu'il était possible de le faire. Nous avons aujourd'hui à notre
disposition l'hôtel de la rue de la Montagne, et nous acquerrons la disposition
des locaux très vastes situés rue du Nord, dont il s'agit en ce moment. A
mesure que les baux pourront être résiliés selon les convenances des diverses
administrations et du public, nous les résilierons. Il sera très facile, dans
mon opinion, de résilier ceux de la maison rue des Sables, n°13 du tableau, de
la maison rue Royale, n°15, et de la maison place des Barricades ; ce qui
donnera lieu à une économie de plus de 11.000 fr. ; et si plus tard nous
pouvions résilier encore les baux de la succursale des archives, rue de la
Paille, et de la maison rue Notre-Dame-aux-Neiges, l'économie s'élèverait à
17,000 fr.
La chambre appréciera
parfaitement les motifs qui m'empêchent de dire dès aujourd'hui : Tel bail sera
résilié plus tôt que tel autre ; mais je puis prendre l'engagement positif que
nous résilierons des baux à concurrence de 10,000 fr. au moins.
Indépendamment de ces économies,
nous obtenons immédiatement de vastes magasins, construits avec beaucoup de
solidité, et qui peuvent être mis à l'abri des plus grandes chances d'incendie.
Dans ces magasins, après
un triage fait avec circonspection, mais aussi sans un amour exagéré des vieux
papiers, nous pourrons placer les archives nouvelles des ministères qui
méritent d'être conservées. Il y a ici deux sortes d'utilité qui m'ont
déterminé et qui ont déterminé la majorité de la section centrale à préférer
dans ce moment cette acquisition à toutes les autres qui nous ont été
proposées.
Il est sans doute fort
facile d'acheter au Quartier-Léopold, là où finissent les constructions
nouvelles, des terrains très vastes ; il est très facile d'y dépenser 250,000
fr. pour 100,000 pieds carrés, et d'y construire pour un ou deux millions un
hôtel pour les archives. Mais il m'a paru que dans ce moment il fallait faire
exclusivement ce qui était utile et économique ; qu'en le faisant, il fallait
ne créer d'obstacle pour aucune amélioration dans l'avenir, et c'est à ce point
de vue que j'ai passé l'acte relatif à l'acquisition de la propriété de la
Société belge de librairie.
Ainsi,
la question des archives anciennes est réservée ; nous nous en occuperons ;
nous tâcherons de trouver la solution à la fois la plus convenable pour la
conservation des archives et la plus économique. Mais dès à présent, nous
pouvons établir une succursale devenue nécessaire pour les ministères, et nous
pouvons y placer en même temps toutes les archives qui encombrent aujourd'hui
les hôtels des départements ministériels. Si plus tard, par exemple, l'on
voulait créer un local général pour les archives, si on avait plus tard des
sommes disponibles pour ériger un monument, la propriété que vous aurez acquise
vaudra au moins alors ce qu'elle vaut aujourd'hui ; ce n'est pas une valeur
morte ou détruite dans les mains de l'Etat.
M. Veydt,
rapporteur. -
Messieurs, quand j'ai demandé la parole, M. le ministre des finances n'était
pas encore arrivé à la fixation d'un chiffre ; il était constamment resté dans
le vague : nous ferons ce qui sera possible ; mais nous ne pouvons pas prendre
d'engagement formel, quant à l'économie qui pourra être réalisée. Or, la
section centrale, en présence de pareilles déclarations, ne vous aurait pas
proposé l'adoption du projet de loi. Maintenant M. le ministre des finances
vient de nous dire que l'économie sera au moins de 10,000 francs ; de cette
manière la section centrale et M. le ministre des finances sont bien prêts de
s'entendre ; en effet par la résiliation des baux indiqués sons les n°13, 15 et
16 il y a déjà en économie une somme de 10,150 francs ; la section centrale
avait également indiqué le n°3 relatif à la maison louée pour l'état-major de
la garde civique et qui entraîne une dépense annuelle de l,200 francs ; cette
économie pourra sans doute être également réalisée. Ainsi sur l'ensemble il y
aura une réduction de 11,350 francs sur l'état de fr. 40,135, annexé à l'exposé
des motifs.
M. Rogier. - Messieurs,
quoi qu'en ait dit M. le ministre des finances, je n'ai pas été frappé de
l'urgence de l'acquisition proposée et qui va entraîner le trésor public dans
une nouvelle dépense de 175,000 fr. à couvrir encore par des bons du trésor.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Non ! non !
M. Rogier. - Comment alors
couvrirez-vous cette dépense ? Les voies et moyens de 1847 ne suffiront pas
même à faire face aux dépenses courantes.
D'après les explications
que vient de donner M. le ministre des finances, le nouveau local, occupé par
la maison de librairie Hauman et compagnie, serait destiné à remplacer divers
locaux éparpillés dans la capitale. Mais d'abord il y aura une dépense de
10,000 fr. en frais d'appropriation, et je doute que cette somme soit
suffisante. En second lieu, je crois qu'on ne fera pas tous les transferts
qu'on nous annonce. En troisième lieu, il s'agirait de transporter dans ce
bâtiment le trop plein des archives qui se trouvent dans les différents
ministères. Eh bien, cette dernière mesure, si elle n'est pas impérieusement
commandée par les circonstances, ne serait pas bonne en elle-même.
Si, quand les temps
seront devenus meilleurs, l'on veut arriver an déplacement du dépôt des
archives générales du royaume, il faut en quelque sorte qu'on y soit forcé par
l'encombrement même des archives ; il faut se réserver de bonnes raisons à
donner aux chambres. Si vous distrayez des différents départements le trop
plein des archives modernes, la nécessité d'un dépôt général d'archives
apparaîtra moins urgente. Aujourd'hui, personne ne conteste la nécessité d'un
nouveau local ; ce qui arrête, c'est la situation financière, car chacun est
frappé de l'état dangereux, précaire, dans lequel se trouvent les archives si
précieuses du royaume. M. le ministre des finances doit être le premier à
reconnaître combien il serait désirable de voir ce dépôt dans une situation
moins périlleuse. Sous ce rapport, le gouvernement aurait dû agir de manière à
se ménager auprès des chambres le plus grand nombre d'arguments possible, afin
d'obtenir le déplacement des archives. Or, je le répète, si vous placez dans un
bâtiment séparé les archives modernes, vous rendez moins nécessaire le
déplacement des archives anciennes qui doivent nécessairement recevoir les
archives modernes.
Pour faciliter les
recherches, il est indispensable que toutes les archives se trouvent dans le
même local et qu'on ne soit pas renvoyé de la rue du Nord à tout autre quartier
de la ville, pour consulter les archives antérieures à 1830.
Voilà pour les archives ;
quant au reste, je ne vois pas la nécessité de nouvelles acquisitions.
Sous le rapport de la
dépense, tout au plus, arrivera-t-on au statu quo, si M. le ministre des finances
parvient à renoncer à la location de certaines maisons qui sont occupées
aujourd'hui par les jurys d'examen, par la garde civique et par quelques
administrations.
Quant à ces locaux même,
on se plaint de leur insuffisance ; mais n'aurait-on pas pu y mettre plus de
réserve ?
Les ministères se sont
successivement agrandis, des locaux ont été achetés, des constructions ont eu
lieu ; cependant on a cru devoir ajouter à ces constructions nouvelles de
nouveaux locaux. La maison rue Royale, je ne sais quelle est sa destination
aujourd'hui.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - La direction du commerce !
M. Rogier. - Autrefois, la
direction du commerce se trouvait dans le ministère ; je ne sache pas que les
attributions se soient tellement agrandies qu'on ait dû placer cette direction
ailleurs.
Autrefois,
les jurys d'examen se réunissaient dans des locaux appartenant à l'Etat ; on a
loué depuis pour leurs séances des maisons particulières. Dans le principe, on
avait l'Observatoire, l'hôtel de l'ancien ministère de l'intérieur, etc., qui
ne nécessitaient pas de loyers. Ces jurys, n'étant pas assemblés toute l'année,
n'avaient pas besoin de résidence fixe. Ce sont là des détails
d'administration, mais ils valent, ce me semble, la peine d'être mentionnés.
L'inconvénient principal
qui me frappe dans l'acquisition actuelle, qu'on nous propose, c'est qu'elle ne
soit un obstacle à l'établissement futur des archives générales dans un emplacement
convenable. Si le local qu'il s'agit d'acquérir était disposé et situé de
manière à pouvoir devenir plus tard le dépôt général des archives, le
gouvernement aurait bien fait de saisir l'occasion de l'acquérir. Mais on est
loin d'être d'accord sur la convenance de ce local pour une pareille
destination, et dès lors, je ne puis admettre ni l'urgence ni l'utilité de
l'acquisition dont il s'agit.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, je crois qu'on ne manque pas de bonnes raisons pour la
construction d'un local destiné à recevoir les anciennes archives. Cette
question continuera à être étudiée ; nous ferons une proposition à la chambre
dès que la question pourra être résolue.
Je
ferai remarquer de nouveau que l'acquisition actuelle ne ferait aucunement
obstacle à l'exécution de ce projet ; indépendamment des améliorations à
apporter à la situation des anciennes archives, l'acquisition actuelle a
toujours pour elle une somme d'utilité plus que suffisante pour justifier
l'achat que le gouvernement a fait. Je ne puis pas expliquer en ce moment pour
quel motif l'on a été amené à prendre en location telle ou telle maison à telle
époque ; mais je sais qu'au département des finances, par exemple, le
développement des affaires et des attributions a été tel que le personnel est
littéralement entassé dans les bureaux quoique l'hôtel soit très vaste.
Il en est de même dans
les autres départements, l'augmentation des affaires et des attributions a été
considérable, ce qui est une preuve du perfectionnement de notre administration
générale ; de là la nécessité de louer des locaux, notamment pour la division
du commerce et de l'industrie.
M. de
Brouckere. – Il résulte des renseignements joints au projet de loi qui nous est
soumis, que le gouvernement à différentes époques a loué un assez grand nombre
de maisons dans différents quartiers de la ville. Ces maisons ont été louées
pour y placer certaines administrations on débris d'administrations.
L'honorable M. Rogier a
demandé des explications sur la nécessité de ces locations ; M. le ministre
répond qu'il lui est impossible de justifier la nécessité de louer tous les
bâtiments que le gouvernement emploie ; je conçois cela, mais je dis au
ministre que s'il voulait chercher les moyens de diminuer le nombre des maisons
qu'on loue, ce ne serait pas difficile ; je lui en indiquerai un, il pourra
chercher les autres, c'est de commencer par faire déguerpir les personnes qui
se sont logées dans les bâtiments appartenant à l'Etal et auxquels le
gouvernement ne doit pas le logement. Qu'il commence par exécuter cette mesure,
il en résultera l'économie d'une ou deux maisons qu'il a louées.
- La discussion est
close.
Il est procédé au vote
par l'appel nominal, sur l'article du projet.
En voici le résultat :
60 membres ont répondu à
l'appel.
54 ont répondu oui.
(page 880) 5 ont
répondu non.
1 s'est abstenu.
En conséquence la chambre
adopte ; le projet sera transmis au sénat.
Ont répondu oui : MM.
Dumont, Goblet, Henot, Huveners, Kervyn, Lange, Lebeau, Le Hon, Lejeune,
Lesoinne, Loos, Lys, Malou, Manilius, Mast de Vries, Orban, Osy, Pirson,
Rodenbach, Scheyven, Sigart, Thienpont, Troye, Van Cutsem, Vanden Eynde,
Vandensteen, Veydt, Vilain XIIIÎ, Biebuyck, Brabant, Clep, de Baillet, de
Brouckere, de Corswarem, Dedecker, de Foere, de Garcia de la Vega, de Haerne,
de Lannoy, Delehaye, Delfosse, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Meester, de
Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, d'Hoffschmidt, Dolez,
Donny, Dubus ainé et Liedts.
Ont répondu non : MM.
Eloy de Burdinne, Jonet, Rogier, de Villegas et Dubus Albéric.
M. le président. - M. de Bonne est invité à motiver
son abstention.
M. de Bonne. - Je me suis abstenu parce que j'ai
été actionnaire dans la Société belge de Librairie. J'ai eu, en cette qualité,
quelques procès avec M. Hauman. J'ai cru ne pas devoir émettre un vote qui
aurait peut-être été mal interprété.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT
DES TRAVAUX PUBLICS
M. le président. - L'article unique du projet de loi
dont la commission propose l'adoption est ainsi conçu :
« Art. unique. Il est
ouvert au budget du ministère des travaux publics un crédit supplémentaire de
cent vingt-six mille francs (fr. 126,000) pour la restauration de l'hôtel de la
cour des comptes.
« Ce crédit formera le
paragraphe 2 de l'article 39, chapitre Il, du budget du ministère des travaux
publics pour l'exercice 1846. »
M. Veydt, rapporteur. - Comme vous avez pu vous en
convaincre, messieurs, par la lecture de l'exposé des motifs et du rapport de
la section centrale, l'ingénieur des bâtiments civils a proposé de reconstruire
l'hôtel incendié de manière qu'il soit à l'abri du feu qui pourrait venir du
dehors.
Afin de mieux assurer
l'exécution de ce plan, la cour des comptes a exprimé le désir que l'hôtel soit
isolé de tout contact avec le bâtiment, qui a été le foyer de l'incendie, du
côté de la maison de sûreté civile et militaire.
L'ingénieur
des bâtiments civils s'est arrêté à un autre moyen de prévenir la communication
du feu ; il veut remplacer la toiture de ce bâtiment qui est, si je ne me
trompe, une écurie, par une plate-forme en maçonnerie, et prendre d'autres
mesures de précaution contre le feu.
La cour des comptes,
quand elle a eu connaissance de ce projet, n'a pas insisté sur l'isolement.
Mais aucune des pièces du dossier communiqué à la section centrale, n'indique
qu'une résolution ait été prise. Je saisis cette occasion d'engager M. le
ministre des travaux publics à s'entendre avec son collègue de la justice pour
que les travaux de reconstruction sur le terrain de la prison soient exécutés
conformément à la proposition qui en a été faite. L'utilité ne saurait en être
contestée.
M. le ministre
des finances (M. Malou). – Il a été entendu entre les deux départements que la reconstruction par
le département de la justice serait faite de telle manière que l'incendie ne
pût plus être communiqué à l'hôtel de la cour des comptes. La prudence la plus
vulgaire l'indiquait. Quand le cheval est volé, il faut au moins fermer
l'écurie.
- Il est procédé au vote
par appel nominal sur le projet de loi qui est adopté à l'unanimité des 58
membres qui ont pris part au vote.
Ce sont : MM.
Dumont, Eloy de Burdinne, Goblet, Henot, Huveners, Jonet, Kervyn, Lange,
Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Malou, Manilius, Mast de
Vries, Orban, Osy, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart, Thienpont,
Troye, Van Cutsem, Vanden Eynde, Veydt, Vilain XIIII, Biebuyck, Brabant, Clep,
de Bonne, de Brouckere, de Corswarem, Dedecker, de Garcia de la Vega, de Haerne,
de Lannoy, Delehaye, Delfosse, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Meester, de
Renesse, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Villegas,
d'Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dubus, ainé.
PROJET DE LOI RELATIF A L’ETABLISSEMENT D’UN CANTON DE JUSTICE DE PAIX A
SICHEN
M. Delfosse. – Il est impossible de discuter ce
projet de loi : ni M. le ministre de la justice ni M. le rapporteur ne sont
présents.
M. le ministre des finances (M. Malou). - M. le ministre de la justice est
au sénat pour la discussion de son budget. Il s'agit au reste d'une simple
régularisation. S'il y a des observations, on pourra renvoyer à la prochaine
séance.
M. de Corswarem. - A propos de la
discussion de ce projet de loi, j'avais l'intention de demandera M. le ministre
de la justice comment il se fait que des renseignements demandés depuis
plusieurs mois, sur d'autres circonscriptions du Limbourg, n'aient pas été
fournis.
Je demanderai à la
chambre la permission d'interpeller à ce sujet M. le ministre de la justice, un
autre jour, quand il sera présent. (Adhésion.)
M. Delfosse. - La justice de paix que l'on veut
créer se compose de quelques communes seulement. Je voudrais savoir quelle est
leur importance, quelle est leur population.
M. de Renesse. - Le maintien de ce canton a été
proposé par le conseil provincial du Limbourg. Toutes les autorités
administratives et judiciaires consultées se sont également prononcées pour le
maintien de ce canton qui aurait une population de 11 à 12 mille habitants. Je
n'ai pas la statistique des communes sous les yeux ; mais je crois pouvoir
assurer que tel serait le chiffre de la population.
Si l'on réunissait les
onze communes qui composeront le canton de Sichen à d'autres cantons, cela
offrirait cet inconvénient que plusieurs communes seraient à plus de 3 lieues
du chef-lieu.
M. Delfosse. - Il s'agit, non pas de maintenir un
canton de justice de paix, mais d'en créer un nouveau.
M. de Renesse. - Je m'oppose à l'ajournement de ce
projet de loi, qui est à l'ordre du jour depuis plus de quinze jours. II est indispensable
qu'il soit voté ; car M. le ministre de la justice doit nommer ce juge de paix
en même temps qu'il confirmera la nomination des autres juges de paix.
- La proposition
d'ajournement est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.
M. le président. - L'article premier du projet est
ainsi conçu :
« Art. 1er. Les
communes de Sichen-Sussen-et-Bolré, Bassenge, Canne, Eben-Emael, Fall-et-Mheer,
Lanaye, Riempst, Roclenge (sur le Jaar), Vlytingen, Vroenhoven, Wonck, sont
réunies en un canton de justice de paix dont la commune de Sichen sera le
chef-lieu. »
M. de
Brouckere. - Si j'ai bonne mémoire, Sichen-Sussen-et Bol ré sont trois hameaux qui
ne forment qu'une commune ; il faut donc dire à la fin de l'article : « dont la
commune de Sichen-Sussen-et-Bolré sera le chef-lieu. » J'en fais la
proposition.
M. de Renesse. - Ce que vient de dire l'honorable
M. de Brouckere est parfaitement exact. Le village est composé de trois
hameaux. Il y a donc lieu d'introduire dans l'article la modification proposée.
- L'article premier,
modifié comme le propose M. de Brouckere, est adopté.
________________
« Art. 2. Les causes
provenant de ces communes pendantes devant les justices de paix de Tongres et
de Bilsen, seront poursuivies devant la nouvelle justice de paix sur une
assignation faite à personne ou à domicile. »
- Adopté.
________________
La chambre décide qu'elle
passera immédiatement au vote sur l'ensemble de la loi.
Voici le résultat du vote
par appel nominal :
57 membres répondent à
l'appel nominal ;
56 votent l'adoption ;
1 (M. Delfosse)
s'abstient.
Ont voté l'adoption : MM.
Dumont, Eloy de Burdinne, Goblet, Henot, Huveners, Jonet, Kervyn, Lange,
Lebeau, Le Hon, Lejeune, Lesoinne, Liedts, Loos, Lys, Malou, Manilius, Orban,
Osy, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart, Thienpont, Troye, Van Cutsem,
Van den Eynde, Veydt, Vilain XIIII. Biebuyck, Brabant, Clep, de Bonne, de
Brouckere, de Corswarem, Dedecker, de Foere, de Garcia de la Vega, de Haerne,
Delehaye, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Renesse,
de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Villegas, d'Hoffschmidt, Dolez,
Donny, Dubus, (aîné), Dubus, (Albéric).
Le membre qui s'est
abstenu est invité à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Delfosse. - Je me suis abstenu, à cause de
l'absence de M. le ministre de la justice et de M. le rapporteur auxquels
j'aurais voulu adresser quelques interpellations sur le projet de loi.
PROJET DE LOI RELATIF A L’ADMINISTRATION DE LA CAISSE D’AMORTISSEMENT ET
DE CELLE DES DEPOTS ET CONSIGNATIONS
Discussion générale
M. le président. - M. le ministre des finances se rallie-t-il
au projet de la section centrale ?
M. le ministre des finances (M. Malou). - Je me rallie aux légers
changements que la section centrale a introduits dans le projet que j'avais
amendé.
Je ferai seulement
remarquer qu'à l'article 5 amendé, au deuxième paragraphe, il faut substituer
le mot semestriellement au mot mensuellement. C'est la conséquence de
l'amendement adopté à l'article 4.
- La discussion générale
est ouverte.
M. Osy. - M. le ministre se ralliant à
l'opinion de la section centrale, sauf quant à l'article 5, je crois que nous
serons facilement d'accord. Mais l'observation que j'ai à faire se rapporte à
l'article 4, et par conséquent à la déclaration que vient de faire M. le
ministre des finances.
Messieurs, pour
l'amortissement de tous les emprunts faits à l'étranger, il est naturel que les
fonds soient mis à la disposition de la commission d'amortissement par
semestre, parce que nous nous sommes engagés à faire l'amortissement par semestre.
Mais pour les emprunts faits dans le pays et notamment pour notre 4 1/2 p. c.
qui se monte à plus de 160 millions (page
881) et dont l'amortissement se fait dans le pays, je voudrais que cet
amortissement se fît par douzièmes et non par semestre. Je crois que cette
mesure serait tout à fait dans l'intérêt de notre crédit publie.
Pour les emprunts de 5 p.
c. contractés à l'étranger et qui se montent au-delà de 100 millions, j'espère
que l'amortissement pourra encore se faire par tirage.
J'espère que nous
pourrons le faire par tirage, c'est-à-dire que notre 5 p. c. restera au-dessus
du pair, et alors il ne peut pas être question de rachat. Je n'entrerai pas
dans la discussion du point de savoir si nous pourrions être obligés de
rembourser par la voie du tirage au sort quelques-uns de nos emprunts, dans le
cas où ces emprunts seraient au-dessous du pair ; les traités sont là, et la
commission d'amortissement prononcera sur le différend qui existe à cet égard entre
M. le ministre des finances et moi.
Je
crois, messieurs, qu'il serait très utile de mettre les fonds destinés à
l'amortissement du 4 1/2 et du 5 p. c., qui s'élèvent à une somme considérable,
de les mettre à la disposition de la commission par douzièmes. Je demanderai
donc à M. le ministre des finances s'il verrait quelque inconvénients à ce
qu'on dît dans l'article 4 : « Par semestre ou par douzièmes, » au lieu de dire
seulement « par semestre. » Alors la commission, d'accord avec M. le ministre
des finances, ferait ce qui serait le plus avantageux au trésor.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - L'amendement de l'honorable M. Osy me paraît inutile : l'article 4 dit
bien que les dotations de l'amortissement seront remises par semestre, mais non
que ce sera le dernier jour du semestre ; dès lors, si le ministre des
finances, d'accord avec la commission de surveillance, instituée en vertu de la
loi, pense qu'il y a lieu de racheter avant la fin du semestre, les fonds
pourront être mis à la disposition de la commission, non seulement par
douzièmes, mais même par semaine ou par jour. L'article ne s'oppose en aucune
manière à cette marche. On ne fait, d'ailleurs, que s'en référer aux contrats.
Il n'est
pas inutile, dans l'intérêt du crédit public, de répondre à l'observation que
vient de présenter l'honorable M. Osy, sur nos emprunts 8 p. c. lorsque les
nouveaux emprunts ont été faits, on a soigneusement écarté la clause qui
existait pour l'emprunt de 100 millions, et d'après laquelle l'amortissement se
faisait par tirage au sort et forcément ; cette mesure avait pour effet de
maintenir le 5 p. c. à un taux peu élevé ; on l'a écartée et on y a substitué
une clause de non-remboursement pendant un terme déterminé. Depuis que l'honorable
membre m'a fait les observations dont il s'agit, j'ai de nouveau revu les
contrats relatifs aux emprunts de 1840 et de 1842, et je puis donner
l'assurance la plus positive à tous les porteurs de titres de ces emprunts,
qu'ils ne sont nullement menacés de recevoir le remboursement de leurs capitaux
par la voie du tirage au sort, et au pair.
M. Osy. - Je ne veux pas plus que M. le
ministre des finances, menacer les porteurs d'obligations, mais il me semble
que lorsque les périodes pendant lesquelles le remboursement est interdit,
seront expirées, nous devrons amortir par la voie du tirage au sort ; de sorte
que l'amortissement doit être fait ainsi à partir du mois de septembre de
l'année dernière, pour l'emprunt de 1840, et à partir de 1848 pour l'emprunt de
1842. Je le répète, du reste, je ne veux pas insister sur ce point, la question
devra être décidée par la commission d'accord avec le gouvernement, et s'il y a
dissidence entre le gouvernement et la commission, nous pourrons nous en
occuper dans la discussion du budget de l'année prochaine.
Quant à la modification
que je voudrais voir introduire dans l'article 4, je sais bien que le
gouvernement pourra mettre les fonds de l'amortissement à la disposition de la
commission, dès le commencement du semestre, mais je voudrais qu'il fût dit
positivement dans la loi que l'amortissement pourra se faire par douzième. En
France l'amortissement se fait par jour, et on fait connaître par avis affichés
à la bourse combien on rachètera tous les jours. Je conçois que le montant de
nos emprunts n'est pas assez considérable ; pour que nous puissions faire
l'amortissement par jour ou même par semaine ; mais je crois qu'il faut le
faire par mois. Or il me semble que si nous ne changeons pas l'article 4, le
gouvernement éprouvera des difficultés à cet égard, tandis que si nous
adoptions la modification que j'ai indiquée il serait entièrement libre de
faire, d'accord avec la commission, ce qui serait le plus avantageux à notre
crédit.
- Personne ne demandant
plus la parole sur l'ensemble du projet, la chambre passe à la discussion des
articles.
Discussion des articles
Article premier
« Art. 1er. Il est
institué une administration de la caisse d'amortissement et de celle des dépôts
et consignations.
« Les comptes et
registres de chaque caisse sont tenus séparément. Leurs fonds ne peuvent jamais
être confondus.
« La vérification des
deux caisses est toujours faite simultanément. »
- Adopté.
« Art. 2. Une commission
de cinq membres surveille les opérations de la caisse d'amortissement et de
celle des dépôts et consignations.
« Cette commission
est composée :
« D'un sénateur élu par
le sénat ;
« D'un représentant élu
par la chambre, et de trois membres nommés par le Roi.
« La commission est
renouvelée par séries de trois en trois ans.
« Les membres sortants
peuvent être maintenus.
« Les fonctions de membres de la
commission sont gratuites.
« Le règlement d'ordre
intérieur de la commission sera soumis à l'approbation du Roi.
« Tous les documents et
renseignements que la commission juge utiles pour l'exercice de sa
surveillance, lui sont communiqués par le gouvernement. »
M. Delfosse. - Je ferai remarquer qu'on ne dit pas combien il y aura de
séries.
M. Veydt. - L'intention a été qu'il y aurait
deux séries.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Le nombre des membres étant impair, on ne pouvait pas dire que la
commission serait renouvelée par moitié ; mais on a dit qu'elle serait
renouvelée en deux fois et par séries, l'une étant composée de deux membres et
l'autre trois. C'est ce qu'on doit entendre, je pense, par les mots : « sera
renouvelée par séries. »
M. de Bonne. - Je demanderai si les membres, faisant partie de la
commission, seront nommés pour six ans, et comment se fera la première sortie :
s'ils sont nommés pour six ans, alors ils se renouvellent de trois en trois
ans.
Des membres. - Un règlement d'ordre intérieur
pourvoira à cela.
M.
de Man d’Attenrode. - Ce point est expliqué j dans le rapport de la section centrale. Voici
ce que je trouve dans ce rapport, page 6 :
« Le § 2 de l'article 2 a
été adopté par la section centrale. Il lui a paru suffire d'indiquer dans le
rapport que la première série sortante serait de trois membres à désigner par
le sort, de manière à ce que la première série comprît l'un des membres élus
par la législature. »
Il me paraît que cette
explication donnée dans le rapport suffit pour indiquer de quelle manière la
commission se renouvellera.
Le règlement d'ordre que
prévoit un des articles de la loi sera rédigé en conséquence de cette
explication. La première série sortante sera de trois membres, que le sort
désignera. La première série comprendra l'un des membres élus par les
chambres ?
- L'article 2 est mis aux
voix et adopté.
« Art. 3. La caisse
d'amortissement et celle des dépôts et consignations sont dirigées et administrées
par un directeur chargé du maniement des deniers et valeurs.
« Cet agent
comptable est placé sous les ordres du ministre des finances, responsable
envers lui de sa gestion et justiciable de la cour des comptes.
« Il fournit un
cautionnement dont le montant est fixé par arrêté royal, sur la proposition de
la commission. »
M. Delfosse. - M. le ministre des finances
propose à l'article primitif des changements de rédaction qui ne me paraissent
pas heureux. On lit dans le premier paragraphe, la caisse « dirigée »
par un directeur. Le deuxième paragraphe est rédigé d'une manière incorrecte et
obscure.
D'après la rédaction de
M. le ministre, c'est lui et non le directeur qui serait responsable. Il faut
changer cela.
M. de Bonne. - Messieurs, il me semble qu'en retranchant les mots :
« envers lui », cela suffirait. Il est tout naturel que le comptable,
qui est sous les ordres du ministre des finances, soit responsable envers lui
de sa gestion et justiciable de la cour des comptes. Il semblerait que par ces
mots : « envers lui », le comptable est uniquement responsable envers
le mini-Ire et que, si le comptable commettait une faute quelconque, personne
ne pourrait s'en plaindre ; M. le ministre des finances pourrait dire : « Le
comptable n'est responsable qu'envers moi seul ; j'ai donné des ordres. »
Il y a dans la loi de
comptabilité une disposition où il est dit que les vérificateurs seront tenus,
sous leur responsabilité personnelle, de déclarer quand ils auront trouvé la
caisse du comptable en défaut. Ainsi, s'ils trouvaient un comptable en défaut,
et qu'ils en prévinssent le ministre, on ne pourrait pas destituer le comptable
ou le suspendre, si le ministre ne voulait pas, parce que le comptable ne serait
responsable qu'envers lui.
Les mots « envers
lui » pourraient donc être retranchés.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, il y a lieu, ce me semble, de maintenir dans une loi
spéciale le principe admis par la loi de comptabilité. Toute administration
suppose une hiérarchie, c'est-à-dire une subordination ; il faut donc que les
comptables soient responsables envers le ministre des finances, sauf à être
justiciables de la cour des comptes. Il ne faut pas que, dans le cas qui nous
occupe, le comptable puisse être considéré comme l'agent de la commission ;
ainsi, il faut qu'il soit responsable envers le ministre des finances et non
envers la commission qui est chargée d'une simple mission de contrôle et de
surveillance.
L'article du projet, dont
nous nous occupons, a été calqué sur l'article 7 de la loi de comptabilité ; je
pense qu’il n'existe aucun motif pour dévier ici du principe général.
- La discussion est
close.
M. le président. - M. Delfosse propose la suppression des mots
« dirigés » et dans le premier paragraphe.
- Cette suppression est
adoptée.
M. le président. - Dans le second paragraphe, on propose de faire précéder le
mot « responsable » par la particule « est », et de
remplacer les mots et « justiciable » par ceux-ci, « il est
justiciable ».
(Un débat s'engage sur la
position de la question.)
M. de
Brouckere. - Il semblerait, d'après le paragraphe 2, qu'on place l'agent dont il
est question, dans une position spéciale, et comme responsable vis-à-vis du
ministre des finances, et comme justiciable de la cour des comptes ; il n'en
est rien, le but qu'on a eu en vue, en rédigeant le paragraphe a été de dire
que l'agent comptable dont il s'agit, est, placé j dans la même position
vis-à-vis du ministre des finances et vis-à-vis de la (page 882) cour des comptes que tous les comptables. Eh bien,
j'aimerais mieux mettre : « l'article 7de la loi de la comptabilité de l'Etat est
applicable à cet agent comptable. » De cette manière toutes les objections
qui ont été présentées, viendraient à tomber.
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. -Messieurs, je ne comprends pas du
tout les motifs de la proposition de ce changement de rédaction ; je ne vois
réellement pas qu'on ait fait une observation sérieuse contre la rédaction du
paragraphe 2 qui me paraît parfaitement claire. L'honorable M. Delfosse,
d'abord, a paru croire que parce que le mot responsable n'était pas précédé de
la particule et, on pourrait croire que le mot responsable concerne le ministre
des finances. En lisant le paragraphe, il est impossible de se méprendre, de se
figurer que le mot responsable s'applique au ministre des finances ; on
comprend immédiatement que cette expression se rapporte à l'agent comptable ;
une virgule se trouve placée entre les mots finances et responsable ; de sorte
que ce dernier mot s'applique uniquement à l'agent comptable. La particule
« et » a été supprimée entre les deux mots finances et responsable,
parce qu'elle se trouve employée un peu plus loin.
Je ne vois aucun motif,
je le répète, pour modifier la rédaction ; elle me semble parfaitement claire.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Messieurs, il suffirait d'ajouter,
dans le premier paragraphe, après le mot directeur, ceux d'agent comptage
(entre virgules) ; en disant qu'il est agent comptable, on renvoie à toutes les
dispositions de la loi de comptabilité, et toutes les difficultés de rédaction
viendraient à disparaître.
Je dirai : « La caisse
d'amortissement et celle des dépôts et consignations sont administrées par un
directeur, agent comptable chargé du maniement des deniers et valeurs. »
De cette manière le
deuxième paragraphe de l'article disparaît et le troisième reste.
M. de
Brouckere. - Je me rallie à la proposition de M. le ministre des finances qui
rentre entièrement dans ma pensée. Ce n'est pas seulement ici qu’il faut un
changement ; à l'article 4, j'en proposerai un autre pour le même motif. Je
vois en tête de l'article 4 « dispositions particulières à la caisse
d'amortissement », et je lis dans cet article : « A cet effet il est émis
des ordonnances de payement qui sont soumises au visa préalable de la cour des
comptes, etc. »
Mais cela n'est pas
spécial a la caisse d'amortissement, ce visa préalable est exigé pour toutes
les ordonnances de payement. Il ne faut pas avoir l'air de porter des
dispositions spéciales pour la caisse d'amortissement, quand on ne fait que
répéter les prescriptions de la loi de comptabilité.
Je me rallie à
l'amendement de M. le ministre des finances, qui vaut mieux que celui que j'ai
proposé.
- L'amendement proposé
par M. le ministre des finances est mis aux voix et adopté.
L'ensemble de l'article
5, tel qu’il a été amendé, est également adopté.
Discussions particulières
à la caisse d’amortissement
« Art. 4. Les
dotations et les intérêts des capitaux amortis, qui sont affectés au remboursement
des emprunts, sont mis, par semestre, à la disposition de la caisse
d'amortissement, pour servir au rachat des rentes dans les limites déterminées
par les lois spéciales ou par les contrats passés avec les bailleurs.
« A cet effet, il est
émis des ordonnances de payement qui sont soumises au visa préalable de la cour
des comptes et imputables sur les allocations ouvertes, chaque année, au budget
de la dette publique.
« Les rachats se font
avec la coopération de la commission de surveillance : ils ont lieu avec
concurrence et publicité, lorsqu'il peut en résulter un avantage quelconque
pour le trésor. »
M. Osy. - Par suite du principe adopté à l'article 3, et des paroles prononcées par
l'honorable M. de Brouckere, il est évident que nous devons effacer au deuxième
paragraphe les mots : « qui sont soumises au visa préalable de la cour des
comptes. »
Il va sans dire que la
loi de comptabilité ordonne le visa préalable de toutes les ordonnances de
payement ; il est inutile de le mettre dans la loi actuelle.
Le premier projet a été
présenté par M. Mercier, il y a trois ans, par conséquent longtemps avant la
loi de comptabilité ; maintenant il est inutile de prescrite, dans le projet
que nous faisons, des choses prévues par la loi de comptabilité.
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - Je me rallie à l'amendement de
l'honorable M. Osy. Il a dit que le projet de loi qui nous occupe avait été
déposé avant la loi de comptabilité, que cette loi ayant suffisamment établi
qu'aucun payement ne pouvait se faire sans le visa préalable de la cour des
comptes, il était inutile de le répéter ici. Du reste, les explications qui ont
été données sont suffisantes pour établir qu'il est impossible qu'il en soit
autrement.
J'ai demandé la parole
pour répondre à ce qu'a dit l'honorable M. Osy sur l'art. 4.
M. Osy. - Je n'ai pas présenté d'amendement.
M.
de Man d’Attenrode. - M. Osy n'insiste pas ; cependant je dois lui faire observer qu'il
s'est trompé en supposant que l'amendement de la section centrale avait la
portée de mettre obstacle à ce que les achats se fissent mensuellement. Il n'en
est rien ; nous avons voulu que les sommes nécessaires aux rachats fussent
mises à la disposition de la commission par semestre, mais la commission de
surveillance n'en pourra pas moins racheter par douzième, si elle le juge
avantageux ; rien ne s'y oppose. Il me semble qu'il est inutile de faire aucun
changement à l'article proposé.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Je me rallie à la suppression proposée par M. Osy.
M. Delfosse. - Nous sommes, je pense, tous d'accord
que l'on ne doit opérer les rachats par semestre que quand on y est obligé par
le contrat d'emprunt. Quand on a une entière liberté, il est bon que l'action
de l'amortissement soit plus fréquente ; c'est le moyen d'empêcher des
variations trop brusques dans le cours des fonds publics ; le rachat par
semestre doit être l'exception, le rachat par mois la règle.
M. Osy. - Je n'ai pas proposé d'amendement ;
par suite des déclarations de M. le ministre et de M. le rapporteur, nous
sommes d'accord que si on met les fonds à la disposition de la commission par
semestre, elle n'en peut pas moins faire ses rachats par mois, ce qui vaut
mieux pour éviter des mouvements brusques toujours fâcheux pour le crédit
public. Si les rachats se faisaient par semestre, il pourrait en résulter des
mouvements considérables dont souvent beaucoup de personnes seraient victimes.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - La loi a pour but de donner au ministre la commission de surveillance
pour l'aider dans l'action de l'amortissement et l'administration des fonds de
dépôt. Des règles positives expresses ne peuvent être posées pour toutes les
circonstances. Je suppose qu'une baisse très forte se manifeste au-dedans et
au-dehors, m'obligerez-vous à faire agir l'amortissement semaine par semaine,
jour par jour, quand je puis réaliser un bénéfice de 15 p. cent en faisant agir
l'amortissement d'une manière brusque et précipitée. Je n'admets pas qu'on
doive agir toujours d'une manière continue ? Je reconnais que quand c'est
possible, il peut en résulter des avantages ; mais il est des circonstances où
il est de l'intérêt du public et du trésor, qu'on puisse agir brusquement.
M. Delfosse. - Il est évident qu'il faut se
régler d'après les circonstances, et qu'il y a des moments où le gouvernement
doit suspendre l'action de l'amortissement, quand il le peut, quand il n'est
pas lié par le contrat. Je n'ai parlé qu'en règle générale ; cela n'exclut pas,
cela suppose même des exceptions, c'est à la commission de surveillance à
décider, d'accord avec le ministre, dans quels cas on fera bien de s'écarter de
cette règle ; l'action de l'amortissement doit autant que possible être
fréquente pour qu'il n'y ait pas des mouvements trop brusques dans les fonds.
- La suppression proposée
par M. Osy est adoptée.
L'article 4 ainsi amendé
est également adopté.
Article 5
M. le président. - Le gouvernement a proposé la
suppression de l'article 5 ; la section centrale l'a admise.
« Art. 5. Sont exceptées
des dispositions de l'article précèdent, les dotations dont l'emploi, pour
l'amortissement, a été ajourné temporairement par la loi.
« Néanmoins il est
ouvert dans le grand-livre de la trésorerie un compte spécial à la caisse
d'amortissement, où celle-ci est créditée semestriellement de la portion des
donations qui ne sont pas applicables au rachat des rentes.
« Cette opération se fait
au moyen d'une ordonnance de payement visée par la cour des comptes et
imputable sur l'allocation compétente du budget.
«L'ordonnance de payement
dûment quittancée par l'agent comptable, ne donne lieu à aucune sortie
matérielle de fonds du trésor public ; elle est transférée au crédit de la
dotation de l'emprunt et au débit du compte de la trésorerie.
« Le ministre des
finances délivre, en échange des ordonnances ainsi quittancées, un récépissé
qui est produit au soutien des comptes de l'agent comptable. »
- Adopté.
Article 6
« Art. 6. Le tirage au
sort des obligations d'emprunt qui doivent être amorties et l'annulation de
celles rachetées se font publiquement par un fonctionnaire du département des
finances que le ministre désigne à cette fin, et en présence du délégué de la
commission de surveillance, d'un membre de la cour des comptes et des prêteurs,
lorsque, l'intervention de ces derniers est requise par les contrats passés
avec eux.
« Il est dressé
procès-verbal de ces opérations.
« Les numéros des obligations
sorties ou annulées sont immédiatement insérées au Moniteur. »
- Adopté.
Discussions particulières
à la caisse des dépôts et consignations
« Art. 7. Indépendamment
des consignations de toute nature, autorisées par les dispositions actuellement
en vigueur, la caisse des dépôts et consignations reçoit :
« 1° Les
cautionnements en numéraire ou en valeur exigés des personnes qui prennent part
aux adjudications publiques, ou qui obtiennent des concessions de chemins de
fer, de routes ou canaux ;
« 2° Les
cautionnements des comptables et d'autres agents des diverses administrations
publiques soumis à cette obligation ;
« 3° Les cautionnements
en numéraire fournis par les contribuables dans le cas prévu par l'article 271
de la loi du 20 août 1822 (Journal officiel, n°58) ;
« Les cautionnements en
numéraire fournis par les personnes qui prennent pari aux adjudications
publiques, ou qui obtiennent des concessions de chemins de fer, de routes ou
canaux, sont assimiler à tous points, aux dépôts et consignations. »
M. le ministre
des finances (M. Malou). - La section centrale émet le vœu que les cautionnements soient
constitués en inscriptions au grand-livre, (page 883) au lieu d'être versés en numéraire. J'ai examiné cette
question. La mesure indiquée par la section centrale se concilierait
difficilement avec les intérêts des comptables et avec l'intérêt du trésor.
Les dispositions que la
chambre a adoptées pour le payement des indemnités dues par suite de la guerre
de la révolution, permettront d'inscrire, au nom de la caisse, la plus grande
partie de l'actif qui lui appartient en fonds de la dette publique : tout le
reste devra également être inscrit nominativement en vertu d'un article de la
loi que nous discutons. Dès lors tout danger pour les titres au porteur va
disparaître.
La
fixation des cautionnements n'est pas en rapport avec les sommes formant îles
inscriptions de rentes sur l'Etat. Il en résulterait que les comptables
devraient verser une partie du cautionnement en numéraire. L'on créerait donc
un double embarras, bien loin de simplifier les formalités.
Du reste, le placement
des cautionnements se fait en rentes sur l'Etat, par l'intermédiaire du
gouvernement. Le but qu'on se propose est donc atteint, et les formalités sont
plus simples que si l'on forçait les comptables à fournir eux-mêmes leur
cautionnement en inscriptions.
J'ajouterai que cette
mesure serait parfois rigoureuse et injuste, en ce sens que les fonds
pourraient être très élevés, quand on verserait le cautionnement, et très bas
quand on le retirerait.
Cet inconvénient ne se
fait pas sentir aujourd'hui, parce qu'on restitue au comptable ce qu'il a
versé, et qu'on réalise l'inscription de rente quand les circonstances sont
favorables.
M.
de Man d’Attenrode, rapporteur. - Messieurs, l'honorable ministre des finances vient de
dire que la section centrale avait émis le vœu que les cautionnements ne
fussent plus versés en numéraire, mais qu'ils fussent constitués en
inscriptions au grand-livre. La section centrale n'a pas émis ce vœu ; mais
elle s'est bornée à recommander l'étude de cette question à l'attention du
gouvernement.
J'avoue cependant que je
ne conçois pas que M. le ministre considère comme une source de difficultés une
modification que j'envisage quant à moi comme une amélioration qui offrirait
beaucoup d’avantages.
Avant 1830, sous le
gouvernement des Pays-Bas, les cautionnements n'étaient pas versés en numéraire
; ils étaient constitués eu inscriptions au grand-livre. Ce système n'a jamais
soulevé de réclamation ; je suis donc fondé à croire que les difficultés dont
on nous a parlé ne sont pas bien sérieuses.
Est arrivée la révolution
de 1830 : un arrêté du gouvernement provisoire du 23 novembre a décidé que les
versements seraient faits en numéraire. Le gouvernement provisoire a pris là
une mesure, comme en prennent les gouvernements dans des moments difficiles, où
l'on a besoin d'argent ; c'est un moyen de disposer des fonds des
cautionnements.
C'est ce qui se pratique
en France depuis longtemps ; à présent encore les cautionnements sont versés en
numéraire dans les caisses publiques, le gouvernement s'en sert pour faire face
aux dépenses ordinaires, et ces fonds font ainsi un service de dette flottante.
Mais le gouvernement français vient de présenter un projet de loi pour changer
ce système, pour obliger les comptables à constituer leurs cautionnements en
inscriptions au grand-livre.
Le fait est qu'il est
incontestable que le système proposé par le gouvernement français tend à faire
disparaître de nombreuses formalités, et à décharger le trésor d'une grande
responsabilité. Avec ce système la trésorerie n'a d'autre formalité à remplir,
que celle de constater que le comptable a pris une inscription au grand-livre
suffisante pour servir de gage à sa gestion. Dans le système actuel, le
comptable verse son cautionnement : l'administration est obligée de faire
valoir les fonds, parce que le gouvernaient est obligé d'en payer les intérêts.
Il y a là une foule de formalités à remplir, et toute la responsabilité que la
gestion de ces capitaux entraîne avec elle.
J'ai à
vous signaler encore un avantage à obliger le comptable à constituer son
cautionnement en rentes sur l'Etat, c'est qu'on l'intéresse à la stabilité du
gouvernement et des institutions nationales.
C'est là encore un
argument d'une grande valeur en faveur de cette mesure.
D'ailleurs, comme je l'ai
dit en commençant, la section centrale n'a pas formulé de vœu ; elle s'est
bornée à engager le gouvernement à étudier la question, et je l'engage, pour ma
part, à le faire de la manière la plus sérieuse, et à ne pas se prononcer avant
de l'avoir examinée.
M. Osy. - Le mode indiqué par l'honorable préopinant serait préférable, en ce
que les risques seraient, non pour l'Etat, mais pour les comptables. Au reste,
je crois que la loi doit être muette sur ce point qui sera réglé de commun
accord entre le gouvernement et l'administration de la caisse. Si la chambre a
des observations à faire à ce sujet, elle pourra les faire à l'occasion du
rapport que le gouvernement devra faire chaque année.
M.
de Man d’Attenrode. - Je conviens, messieurs,- que cette question pourra se discuter d'une
manière plus convenable dans une autre circonstance ; et cette circonstance se
présentera tout naturellement, lorsque le gouvernement présentera le projet de
loi, destiné à fixer la base de l'affectation des cautionnements.
La section centrale, qui
a été chargée de l'examen de la loi de comptabilité, en proposant l'article 8
de cette loi, qui a été admis, a exprimé à l'unanimité, dans son rapport, qu'il
y avait lieu d'arrêter par la loi le taux des cautionnements.
La section centrale, dont
j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur, avait été frappée de ce qu'aucune règle
ne guidait le gouvernement pour la fixation des cautionnements ; de ce que le
taux était entièrement abandonné à son arbitraire.
En effet, messieurs,
cette matière n'est réglée, pour le moment, que par un arrêté de 1814, qui est
très incomplet, et qui n'a pas même été publié d'une manière convenable.
Lors de la mise en
discussion de l'article 8 de la loi de comptabilité, proposée par la section
centrale, accompagnée du vœu émis dans son rapport, que le taux des
cautionnements fût fixé par une loi, le ministre a laissé adopter l'article
sans aucune réclamation et sans aucune discussion. J'ai donc lieu de croire que
M. le ministre des finances s'est rallié à ce vœu, et qu'il déposera
incessamment un projet pour satisfaire à ce vœu.
Le
gouvernement français a déposé il y a un an un projet, qui tend par une de ses
dispositions à fixer le taux des cautionnements, abandonné jusqu'à présent aux
caprices de l'administration, qui tend à les rendre proportionnels et
susceptibles de varier d'après les produits, de manière à ce que le gage reste
en rapport avec les intérêts auxquels il sert de garantie.
J'espère que notre
gouvernement imitera ce bon exemple, et que M. le ministre des finances tiendra
à assujettir à des règles précises les garanties que doivent offrir les
comptables.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, je me félicite d'avoir demandé quelques explications sur
l'idée émise par la section centrale. Car il paraîtrait, d'après ce que vient
de dire l'honorable rapporteur, que lorsqu'un article est adopté sans
discussion et que la section centrale a émis un vœu à l'occasion de cet
article, le gouvernement est censé s'y rallier.
Messieurs, j'ai cherché
vainement dans mes souvenirs et dans la discussion de la loi de comptabilité,
si l'on avait pris un engagement pour la fixation, par la loi, des
cautionnements ; je n'ai rien trouvé de semblable.
Les cautionnements sont
fixés d'après des règles certaines, et sous le contrôle de la cour des comptes.
C'est là un véritable acte d'administration. Il y a une certaine mobilité dans
les recettes, dans les produits des places de comptables, et la même mobilité
se remarque dans les cautionnements. On ne conçoit pas l'utilité d'une loi pour
régler des faits aussi variables.
Je
pense donc qu'il n'y a pas lieu de présenter une loi pour régler la matière des
cautionnements. Il n'y a pas lieu non plus de changer le mode actuellement
établi pour le versement des cautionnements.
Ainsi, un comptable aura,
je suppose, un cautionnement de 1,300 fr. à fournir. Il ferait acheter à l'une
des bourses du pays une inscription de 1,000 fr., je suppose, et il verserait
300 fr. en numéraire. Il aurait donc, d’une part, des formalités à remplir pour
immobiliser comme cautionnement cette inscription qu'il aurait acquise, et
d'une autre part, il aurait pour le solde de 300 fr., les mêmes formalités à
remplir que s'il avait versé toute la somme en numéraire. De plus, il y aurait
contre lui des chances de perte qu'il ne subit pas aujourd'hui, et que, par la
combinaison adoptée, l'Etat ne subit pas non plus.
M. Lejeune. - Messieurs, dans son projet, le gouvernement terminait
ainsi le 1° de l'article en discussion : « ou qui obtiennent des concessions de
routes ou canaux. » La section centrale propose de dire : « ou qui obtiennent
des concessions de chemins de fer, de routes ou canaux ».
Ne vaudrait-il pas mieux
d'employer, au lieu de cette énumération, un terme général et de dire : « ou
qui obtiennent des concessions de péages.» Je proposerai ce changement de
rédaction.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Pour généraliser l'expression, on pourrait dire : « qui
obtiennent des concessions de travaux d'utilité publique. » Il pourrait y avoir
certaines concessions où il n'y aurait pas de péages.
- Le changement de
rédaction proposé par M. le ministre des finances est adopté, ainsi que
l'ensemble de l'article.
Article 8
« Art. 8. Il est interdit
aux cours, tribunaux et administrations quelconques, d'autoriser ou d'ordonner
des consignations ailleurs que dans la caisse des dépôts et consignations,
auquel cas elles sont nulles et non libératoires. »
M. de Bonne. – Il me semble que cet article
laisse à désirer dans sa rédaction.
« Il est interdit
aux cours, tribunaux et administrations quelconques, d'autoriser ou d'ordonner
des consignations ailleurs que dans la caisse des dépôts et consignations,
auquel cas elles sont nulles et non libératoires. »
Quel
est ce cas ? Est-ce quand les cours et tribunaux ont autorisé ou ordonné des
consignations ? Il me paraît que l'article serait plus clair s'il était rédigé
comme suit :
« Les
cours, tribunaux et administrations quelconques ne pourront autoriser ou
ordonner des consignations ailleurs que dans la caisse des dépôts et
consignations. Tout dépôt ou consignation fait ailleurs, est non-libératoire. »
Je retranche le mot
« nulles », parce que si la consignation n’est pas libératoire, elle
est nulle.
M. Delfosse. - Je crois que l'on ferait bien de
supprimer la dernière phrase. L'interdiction adressée aux cours et aux
tribunaux doit suffire.
(page 884) Nous ne devons pas supposer que les cours et les
tribunaux violeront la loi.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, je crois me rappeler que l'article 9 du projet est copié textuellement
dans l'ordonnance générale portée en 1838 par le gouvernement français. Je
reconnais du reste bien volontiers que la rédaction n'est pas très correcte.
Mais, je crois qu'on ne peut se méprendre sur le sens de l'article. Lorsqu'on
dit qu'il est interdit de consigner ailleurs, auquel cas la consignation sera
nulle et non libératoire, il me semble résulter clairement de cette rédaction
que l'on veut parler de toute consignation faite ailleurs que dans la caisse
désignée par la loi.
Messieurs, l'article ne
suppose pas du tout que les cours, tribunaux ou administrations quelconques
auraient l'intention de violer la loi ; seulement la loi déclare que toute
consignation qui ne serait pas faite conformément à ses dispositions, sera
nulle comme consignation, et non libératoire ; c'est la peine, la sanction de
ces dispositions.
Je crois donc, messieurs,
qu'il y a lieu de maintenir la rédaction telle qu'elle a été présentée et telle
que la section centrale l'a adoptée.
M. le président. donne une nouvelle lecture de la
rédaction proposée par M. de Bonne.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Je demande qu'on ajoute toujours le mot « nulle » qu'on dise :
« sera nulle et non libératoire. »
- La rédaction proposée
par M. de Bonne, ainsi modifiée, est mise aux voix et adoptée.
Article 9
« Art. 9. La caisse des
dépôts et consignations demeure exclusivement chargée de rembourser les
consignations et les cautionnements et d'en payer les intérêts échus.
« Toutes les sommes et
valeurs provenant des consignations et des cautionnements non remboursés à
l'époque où la présente loi deviendra obligatoire, seront remises à la caisse
des dépôts et consignations, »
- Adopté.
Articles 10 à 14
« Art. 10. il est ouvert
à la caisse des dépôts et consignations un compte courant :
« 1° Pour les dépôts et
consignations ;
« 2° Pour les
cautionnements de toute nature autres que ceux exigés des personnes qui
prennent part aux adjudications publiques, ou qui obtiennent des concessions de
routes ou canaux ;
« 3° Pour les autres
fonds attribués à la caisse des dépôts et consignations. »
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Il faudrait faire ici le changement qui a été fait à l'article 7, et
remplacer les mots « routes et canaux », par ceux de « travaux
d'utilité publique ». Pour éviter une répétition désagréable, il
conviendrait alors de supprimer le mot « publiques » après
adjudications.
- L'article ainsi modifié
est mis aux voix et adopté.
_______________
« Art. 11. Les sommes
portées au crédit de chaque compte, qui ne sont pas nécessaires pour le service
courant, sont placées, par les soins du ministre des finances, en rentes sur
l'Etat ou en obligations de trésor, la commission préalablement entendue. »
- Adopté.
_______________
« Art. 12. Les rentes sur le grand-livre de la
dette publique sont inscrites au nom de la caisse des dépôts et consignations.
« Un compte spécial est
ouvert pour chaque fonds dont l'administration lui est confiée.
« L'indication du fonds
auquel les rentes appartiennent est également reproduite sur les extraits des
inscriptions. »
- Adopté.
_______________
« Art. 13. Les inscriptions au grand-livre et
les extraits qui en sont délivrés portent l'annotation suivante :
« La présente inscription
ne peut être transférée qu'en vertu de l'autorisation du ministre des finances,
donnée sur le vu de l'avis de la commission de surveillance. »
- Adopté.
_______________
« Art. 14. Les arrérages résultant du
placement en rentes sur l'Etat ou en obligations du trésor, des dépôts et
consignations, et des cautionnements versés en numéraire, sont attribués au
trésor à la charge par celui-ci d'acquitter les intérêts courus au profit des
tiers pour le compte et à la décharge de la caisse des dépôts et consignations
d'après le taux fixé par les lois et règlements, et d'en régler les comptes
avec ladite caisse.
« Sont portés
annuellement :
« a. Au budget des voies
et moyens et dans les comptes, les arrérages à percevoir au profit du trésor ;
« b. Au budget des
dépenses et besoins et dans les comptes, les intérêts à payer aux tiers. »
- Adopté.
Dispositions communes aux
deux caisses
Articles 15 et 16
« Art. 15. Toutes
les fois qu'elle le juge utile, et une fois au moins par trimestre, la
commission instituée par l'article 2 constate les deniers et valeurs existant
dans la caisse d'amortissement et dans celle des dépôts et consignations,
contrôle l'emploi qui a été fait des sommes portées en recette, vérifie les
écritures et approuve provisoirement les comptes annuels.
« A l'expiration de
chaque semestre, il est inséré dans le Moniteur un résumé présentant à cette
époque la situation de chacune des deux caisses. »
- Adopté.
_______________
« Art. 16. Avant la fin du premier
trimestre de chaque année, le ministre des finances fait aux chambres, après
avoir entendu la commission de surveillance, un rapport sur l'administration et
la situation matérielle des deux caisses au 31 décembre de l'année précédente.
« Ce rapport est inséré
au Moniteur. »
- Adopté.
Comptes annuels
Articles 17 à 19
« Art. 17. L'agent
comptable rend annuellement à la cour des comptes, avant le 1er mars, les
comptes de sa gestion, séparément pour la caisse d'amortissement cl pour celle
des dépôts et consignations. »
- Adopté.
_______________
« Art. 18. Les deux comptes, appuyés des
pièces justificatives, présentent, avec les distinctions nécessaires :
« 1° Le tableau des
valeurs de toute nature, existant en caisse et en portefeuille au commencement
de la gestion ;
« 2° Les recettes et les
dépenses faites pendant le cours de cette gestion ;
« 3° Le montant des
valeurs qui se trouvent dans la caisse et en portefeuille à la fin de la
gestion.
« A ces comptes sont
annexés des tableaux de développement indiquant les capitaux placés en rentes
sur l'Etat ou en obligations du trésor, appartenant à chacun des services au 31
décembre de chaque année. »
- Adopté.
_______________
« Art. 19. La présente loi sera obligatoire le
1er janvier 1848.
« Un arrêté royal réglera
les mesures relatives à son exécution. »
- Adopté.
Le vote définitif est
renvoyé à après-demain.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU
DEPARTEMENT DES AFFAIRES ETRANGERES
M. Osy. - Messieurs, l'heure est trop
avancée pour que nous puissions aborder maintenant le projet de loi relatif aux
monnaies d'or, pour la discussion duquel je prie M. le président de bien
vouloir m'inscrire. Je proposerai à la chambre de discuter aujourd'hui le
projet de loi ayant pour objet d'accorder un crédit de 82,000 fr. au
département des affaires étrangères.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Messieurs, je reconnais que l'heure est trop avancée pour nous occuper
aujourd'hui du projet de loi sur la monnaie d'or ; mais je demande que ce
projet conserve à l'ordre du jour le rang qu'il y occupe sauf, toutefois, à
voter à l'ouverture de la séance de demain le projet de loi relatif au major
Boine. Pour aujourd'hui, je demanderai que la chambre vole aussi le crédit
supplémentaire demandé pour le département de la guerre.
M. Delfosse. - Je demande que M. le ministre de
la guerre soit présent à cette discussion : j'ai une interpellation à lui
adresser.
M. le président. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :
« II est ouvert au
département des affaires étrangères un crédit supplémentaire de cinquante-deux
mille cinq cents francs (52,500 francs], crédit destiné à couvrir des dépenses
arriérées de 1845 et 1846.
« Cette somme sera
ajoutée à l'allocation votée pour le chapitre IV, article unique, du budget de
1846, intitulé : Frais de voyage des agents du service extérieur et de
l'administration centrale, frais de courriers, estafettes, courses diverses. »
- La discussion générale,
qui se confond dans celle de l'article, est ouverte.
La parole est à M.
Delehaye.
M. Delehaye. - Messieurs, à l'occasion de ce
crédit, je me permettrai d'adresser une interpellation à M. le ministre des
affaires étrangères ; M. le ministre sera d'autant plus à même de répondre que
je l'ai prévenu de mon interpellation.
Messieurs, vous savez que
nos relations avec l'Espagne ont beaucoup souffert des modifications
ministérielles survenues dans ce pays. Personne n'ignore non plus que l'Espagne
était jadis un des débouchés les plus importants pour les produits de notre
industrie linière. A la dissolution des dernières cortès, il était question
d'une révision du tarif espagnol. C'est surtout dans cette question de révision
du tarif que l'industrie linière était intéressée. La chambre comprend que
quand un pays se propose de réviser son tarif, c'est surtout alors que les
envoyés des nations étrangères doivent veiller avec le plus de soin aux
intérêts qu'ils ont mission de défendre. Or, je m'étonne, avec le commerce, que
le moment de la réunion des cortès soit précisément celui que le gouvernement
belge a choisi pour rappeler son agent d'affaires à Madrid ; la révision du
tarif va occuper les cortès, et la Belgique n'a pas actuellement de
représentant près du gouvernement espagnol.
Le gouvernement me
répondra sans doute qu'en l'absence d'un chargé d'affaires titulaire, nous
avons à Madrid des attachés qui pourront défendre nos intérêts.
Mais remarquez,
messieurs, qu'en général ces attachés sont des personnes qui n'ont pas encore
assez d'expérience, qui ne sont pas au courant des questions ; ce sont, la
plupart du temps, des apprentis-diplomates, des jeunes gens qui ne sont
attachés à la légation que pour la forme.
J'aurais
donc voulu que le gouvernement ne rappelât pas notre chargé d'affaires en
Espagne ; ou, s'il jugeait nécessaire de le remplacer, il aurait (page 885) dû le remplacer immédiatement
par une personne parfaitement au courant des importants intérêts qui sont en
jeu.
Je demanderai donc à M.
le ministre des affaires étrangères s'il a pris toutes ses précautions pour que
les intérêts belges ne soient pas lésés par le rappel de notre chargé
d'affaires à Madrid.
Je désire que M. le
ministre donne à la chambre quelques éclaircissements qui soient de nature à
dissiper les craintes que le commerce a conçues à cet égard.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, le gouvernement a pris
toutes ses précautions, pour que les intérêts belges, engagés dans la question
de la révision du tarif espagnol, ne puissent pas souffrir de l'absence de
notre chargé d'affaires à Madrid. Le projet de révision, qui avait été élaboré
par M. Mon, ancien ministre des finances, était terminé ou près de l'être,
lorsque M. le comte de Marnix est revenu en Belgique ; de manière que
l'influence que le gouvernement a pu exercer sur le projet de révision du tarif
était épuisée.
En
l'absence de M. le comte de Marnix, M. le comte de Hamal qui est parfaitement
au courant de tout ce qui concerne nos intérêts commerciaux, a été chargé de
surveiller ces intérêts et de faire part au gouvernement de tous les incidents
qui pourraient surgir. Je puis affirmer que les intérêts belges, engagés dans
la question, n'ont nullement à souffrir de l'absence momentanée d'un chargé
d'affaires. Du reste le poste de Madrid ne restera pas longtemps inoccupé.
M. Sigart. - J'adresserai, à mon tour, une interpellation à M. le ministre des
affaires étrangères ; je lui demanderai s'il est exact que le gouvernement a
affrété un navire pour le retour des orphelins et des colons de Santo-Thomas.
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, je demanderai à
l'honorable membre de ne pas répondre directement à la question qu'il vient de
poser, le gouvernement examine la question relative aux orphelins et aux colons
de Santo-Thomas. J'ai déclaré à la chambre, dans une discussion précédente,
quelle était la position que le gouvernement voulait prendre, quels étaient les
devoirs qu'il croyait avoir à remplir dans certaines circonstances données. Le
gouvernement examinera si ces circonstances se sont produites, et il ne
reculera certes pas devant l'accomplissement d'un devoir d'humanité, s'il lui
est commandé. Mais je désire qu'une discussion ne s'entame pas sur ce sujet. Si
le gouvernement prend une mesure, il en assumera la responsabilité ; la chambre
aura le droit de la discuter, lorsqu'elle aura été prise.'
M. Sigart. - Je dois donc
tenir en réserve le compliment que je voulais vous adresser.
M. Verhaegen. - Messieurs, sera-ce le seul crédit
supplémentaire qu'on nous demandera pour 1846 ?
M. le prince de Chimay
offrirait-il peut-être à l'Etat, vu les temps difficiles où nous vivons, la
remise de son indemnité ?
Et à ce sujet, je me
permettrai de faire quelques interpellations à M. le ministre des affaires
étrangères.
1°Est-il vrai que le
prince de Chimay ait été envoyé à Rome avec le titre d' « ambassadeur
extraordinaire » près le saint-siége, et que par suite de difficultés que
le choix de ce titre aurait fait naître à Rome, il ait été obligé de prendre,
le lendemain même du jour de la remise de ses lettres de créance, le titre et
le rang d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire, c'est-à-dire de
descendre d'un degré dans la hiérarchie diplomatique ?
Si le fait est exact, et
je crois qu'il l'est, de deux choses l'une, ou bien le gouvernement aura fait
preuve d'une extrême légèreté en donnant à M. le prince de Chimay,
contrairement aux usages en vigueur à la cour de Rome, le rang diplomatique le
plus élevé (celui qui lui faisait représenter notre souverain lui-même), ou
bien il aurait montré une condescendance très blâmable à l'égard des exigences
non fondées que la cour de Rome aurait mises en avant pour amoindrir la
position et le caractère de l'envoyé belge. Sans vouloir me prononcer sur l'une
ou l'autre de ces deux hypothèses en l'absence de données positives, je ferai
remarquer que le saint siége a chez nous un nonce, c'est-à-dire un envoyé ayant
rang d'ambassadeur, et représentant par conséquent près de notre gouvernement,
non seulement le gouvernement pontifical, mais le saint-père lui-même.
2" Les journaux
allemands étaient-ils bien informés en publiant que M. le prince de Chimay
était parti de Rome pour Naples, porteur de lettres de créance l'accréditant
près du roi des Deux-Siciles en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre
plénipotentiaire ?
N'est-il pas vrai, d'un
autre côté, que le gouvernement belge a déjà, à deux reprises différentes,
envoyé à Naples un diplomate de ce rang et que S. M. Napolitaine n'a daigné
répondre ni à l'une ni à l'autre de ces deux avances ?
Si la réponse du ministre
à cette double question était affirmative, et je crois qu'elle le sera, la
chambre trouverait sans doute qu'en agissant ainsi le gouvernement aurait
complétement manqué de dignité. Jamais un gouvernement qui se respecte ne
renouvelle une demande de cette nature lorsque le gouvernement étranger auquel
il a fait une gracieuseté y répond par quelque chose qui a un caractère tout
opposé.
Quoi qu'il en soit je
demanderai à M. le ministre des affaires étrangères, si la mission de Naples
terminée, M. le prince de Chimay rentrera en Belgique ou bien, s'il ira reprendre
à Rome ses fonctions d'envoyé extraordinaire et de ministre plénipotentiaire.
3°
Est-il vrai qu'il y a 7 ou 8 mois, un arrêté royal ait attaché à notre
ambassade en France, un agent spécial pour les questions commerciales et
industrielles que nous avons un si grand intérêt à faire suivre à Paris, et que
M. le prince de Ligne n'ayant pas été préalablement consulté comme il aurait dû
l'être sur le choix de la personne nommée, se soit opposé à l'exécution de
l'arrêté royal ?
La chambre reconnaîtrait
sans doute que ce fait, s'il n'était nié, aurait quelque chose d'excessivement
grave. Or, il ne peut pas être nié : si le prince de Ligne n'avait pas été
consulté au préalable il y aurait eu certainement manque de procédé à son égard
; mais cette circonstance, quelque blâmable qu'on puisse la trouver, ne serait
cependant pas de nature à laisser permettre qu'une atteinte aussi grave fût
portée à la signature royale.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. Dechamps). - L'honorable M. Verhaegen a demandé s'il était vrai que le
prince de Chimay avait revêtu le titre et le caractère d'ambassadeur pour
l'abandonner le lendemain du jour où il en avait été investi, laissant supposer
que le prince de Chimay aurait par là accepté un rôle peu digne de la nation
qu'il représente.
L'honorable membre ignore
sans doute que pour toutes les missions de courtoisie, quand un diplomate est
nommé pour complimenter un prince étranger soit à l'occasion d'un mariage, soit
à l'occasion d'un avènement au trône, il est généralement d'usage que celui qui
en est chargé revête momentanément, pour le temps que dure cette mission
spéciale, le rang supérieur à celui assigné à la légation.
Je pourrais citer de
nombreux exemples de précédents semblables pris à l'étranger et en Belgique
même. Quand le prince de Ligne a été nommé pour complimenter la reine Victoria,
il a pris le titre d'ambassadeur, tandis que le rang assigné à la mission de
Londres n'est que celui de ministre plénipotentiaire ; M. de Saegher a été chargé
d'une mission analogue pour laquelle il a pris le titre de ministre
plénipotentiaire. M. F. Rogier a également rempli, comme ministre
plénipotentiaire, une mission dont il avait été chargé auprès de S. M.
Louis-Philippe, dans une circonstance récente et extraordinaire. Je pourrais
multiplier ces citations. Il est d'usage, je le répète, que pour les missions
de courtoisie, qui sont toujours temporaires, celui qui en est chargé occupe un
rang diplomatique supérieur à celui assigné à la légation ordinaire.
Ainsi, le prince de
Chimay a remis à Rome et à Naples des lettres de créance de ministre
plénipotentiaire ; mais seulement, conformément aux règles établies, il a pris
le rang d'ambassadeur, quand il fut reçu par le souverain pontife pour le
complimenter sur son avènement.
C'est ainsi que le
ministre plénipotentiaire de Portugal à Rome, à peu près à la même époque, a
été chargé d'une mission de courtoisie toute semblable, et il a revêtu
momentanément le caractère d'ambassadeur et l'a abandonné le lendemain du jour
où cette mission a été remplie.
Ainsi ce qui s'est passé
quant au prince de Chimay n'est pas extraordinaire, n'est pas une chose
particulière à la Belgique. Le prince de Chimay n'a pas manqué de dignité en
acceptant cette position, qui a été faite à son collègue, le ministre du
Portugal.
L'honorable M. Verhaegen
m'a adressé une seconde interpellation ; il m'a demandé s'il était vrai que la
Belgique, après avoir accrédité à deux reprises des ministres près de la cour
de Naples, n'avait jamais obtenu la réciprocité de la part de la cour des
Deux-Siciles.
L'honorable membre aurait
pu se dispenser de m'interpeller à cet égard, car c'est moi qui ai fait
connaître ce fait dans la discussion du budget des affaires étrangères. Il est
vrai que deux fois des ministres belges à Rome ont été accrédités près de la
cour de Naples, sans que la cour de Naples ait jugé convenable d'accréditer un
ministre napolitain près de la cour de Bruxelles. Je dirai que ce fait n'avait
pas été posé en vue de considérations politiques dont la Belgique aurait pu
s'offenser ; c'était une question d'économie qui avait dominé la cour de
Naples, question d'économie qu'elle avait appliquée à tous les autres pays
secondaires.
Le prince de Chimay avait
dans ses instructions de ne pas remettre ses lettres de créance, sans avoir la
certitude que la cour de Naples userait cette fois de réciprocité. C'est ce qui
est arrivé ; la cour napolitaine a accrédité près de la cour de Bruxelles le
duc de Serra Capriola, son ministre à Paris, comme notre ministre à Rome a été
accrédité près de la cour de Naples. Il y a maintenant parfaite réciprocité
entre ces deux cours. Le prince de Chimay est donc parvenu à régulariser entre
les deux gouvernements une position qui ne l'était pas. C'est un premier
résultat obtenu.
L'honorable M. Verhaegen
m'a demandé si, après que le prince de Chimay aurait rempli sa mission, négocié
le traité de commerce avec Naples, il reviendrait en Belgique. J'ai déjà eu
occasion de déclarer que le prince de Chimay n'avait voulu accepter qu'une
mission temporaire que les circonstances justifiaient. Il en résulte donc que
lorsque le but spécial pour lequel il a été nommé sera atteint, il reviendra en
Belgique.
L'honorable membre a cru
devoir parler d'un fait tellement insignifiant que je m'étonne qu'il l'ait
produite la tribune. Il m'a demandé s'il était vrai qu'un arrêté royal avait
attaché un employé de mon département près de la légation de Paris, et que cet
arrêté avait été retiré parce que le prince de Ligne n'avait pas accepté cette
nomination.
Messieurs, comme je ne
m'attendais pas à cette interpellation, il est possible que mes souvenirs me
servent inexactement, et que M. Verhaegen soit plus au courant que moi des
petits secrets des bureaux. Mais je ne pense pas qu'il y ait eu nomination par
arrêté royal ; voici les faits, tels qu'ils se sont passés, si je ne me trompe.
Mon intention avait été
d'attacher à la légation de Paris un secrétaire, (page 886) n'importe de quel rang, chargé spécialement des questions
commerciales. Je pense que ce but d'utilité devra être atteint tôt ou tard.
Le prince de Ligne, à qui
j'en avais parlé, avait considéré en principe une telle nomination comme utile
dans une légation aussi importante que Paris. J'allais mettre ce projet à exécution,
lorsque la crise ministérielle qui précéda la formation du ministère actuel
commença.
Un fonctionnaire fut
désigné, sa nomination fut sur le point d'avoir lieu, mais elle resta suspendue
; on n'y donna pas suite, précisément parce que je n'avais pas eu le temps de
demander au prince de Ligue si cette nomination ne rencontrerait pas de sa part
des objections. |
La
nomination de ce fonctionnaire n'a donc pas été régularisée, il n'y a donc pas
eu d'arrêté royal retiré.
Relativement à la
question de personnes, je ne la discuterai pas à cette tribune. Je ne dirai pas
quels obstacles ont empêché de donner suite à la nomination que j'avais eu
l'intention de proposer ; seulement j'ajouterai que ces obstacles n'ont rien
qui doive blesser le mérite et le caractère du fonctionnaire auquel ou a fait
allusion.
M. Verhaegen. - Je vois que M. le ministre est
d'accord avec moi sur les faits que j'ai signalés. Seulement il cherche à
donner à ces faits une couleur autre que celle qu'ils comportent.
Je réponds de suite à ce
qui a été dit sur la mission à Paris.
M. le ministre se trompe,
en disant qu'il n'y a pas eu d'arrêté royal. J'ai tout lieu de croire {(e me
tiens dans cette réserve) qu'il y a eu un arrêté royal. L'honorable M. Dechamps
convient qu'il n'avait pas consulté le prince de Ligne sur le choix d'un chargé
d'affaires commerciales et industrielles à Paris ; voilà bien un manque de
procédés, car on n'adjoint pas à un ambassadeur ou à un ministre
plénipotentiaire, sans le consulter, un employé quelconque à qui l'on donne la
mission de diriger des affaires qui rentrent directement dans les attributions
de la légation.
Comme toujours, le
ministère ayant rencontré de l'opposition, n'a pas donné suite à la mesure, et
la signature royale a été compromise !
Eu ce qui concerne la
mission de M. le prince de Chimay, M. le ministre des affaires étrangères est
d'accord avec moi sur les faits qui ont été de ma part l'objet d'une double
interpellation. Mais il y donne encore une fois une couleur autre que celle que
ces faits ont réellement.
Je m'attendais, j'en
conviens volontiers, à sa réponse, et elle me donne la preuve que la mission du
prince de Chimay est une mission non pas temporaire, mais une mission
définitive.
En effet, que dit M. le
ministre des affaires étrangères pour expliquer comment le prince de Chimay a
d'abord paru à la cour de Rome, en qualité d'ambassadeur, représentant le
souverain lui-même, comment il a déposé ce titre le lendemain, pour prendre le
titre de ministre plénipotentiaire, enfin comment il se fait qu'après un double
refus essuyé par notre gouvernement de la part de la cour de Naples, le prince
de Chimay ail été chargé de négocier avec celle cour une convention d'après
laquelle l'ambassadeur napolitain à Paris serait accrédité près de la cour de
Bruxelles, tandis que le prince de Chimay serait accrédité près de la cour de
Naples ? Il n'a présenté qu'un véritable jeu de mots.
Tout cela ne prouve-t-il
pas à l'évidence que le prince de Chimay représente effectivement la Belgique
près des cours de Rome et de Naples ? S'il y a là du temporaire, il y en a
partout ; car, à coup sûr, il n'y a pas de mission perpétuelle !...
II résulte des
explications de M. le ministre, que M. le prince de Chimay aurait eu une
mission temporaire extraordinaire pour complimenter le pape, comme ambassadeur,
et qu'après il aurait déposé le costume d'ambassadeur pour prendre celui de
ministre plénipotentiaire et d'envoyé extraordinaire à Rome et à Naples.
Ce
qui est évident dans tout cela, c'est que le prince de Chimay représente
réellement aujourd'hui la Belgique près des cours de Rome et de Naples, comme
elle est représentée près de toutes les autres cours par des ambassadeurs ou
des ministres plénipotentiaires.
On a ajouté le mot
« temporaire » pour échapper aux conséquences d'une mission
ordinaire.
Voilà l'explication de M.
le ministre des affaires étrangères.
Voilà ce que tout le
monde appréciera.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. Dechamps). - L'honorable membre a voulu tirer du mot mission
extraordinaire une conclusion parfaitement inexacte. Il a voulu en déduire que
la mission du prince de Chimay n'était pas temporaire, que c'était une mission
permanente, déguisée sous le nom de mission temporaire. C'est une erreur. Ce
qui fait le caractère d'une mission temporaire, c'est sa durée limitée ; or, le
fait prouvera que le prince de Chimay a été charge d'une mission temporaire,
comme M. Lebeau à Francfort et M. de Stassart à Turin, c'est-à-dire dans un but
spécial.
Le but de la mission
temporaire, quel était-il ? Il était d'abord de complimenter le souverain
pontife sur son avènement, et en second lieu de nouer une négociation
commerciale à Naples. Eh bien, messieurs, c'est ce qui a eu lieu. L'honorable
prince de Chimay a accompli sa mission spéciale auprès du souverain pontife, et
il n'a pas tardé à partir pour Naples, pour y suivre une négociation
commerciale. Lorsque cette négociation commerciale sera terminée, et j'espère
qu'elle le sera bientôt, le prince de Chimay aura rempli sa mission temporaire
et il reviendra en Belgique.
Est-ce
parce que le prince de Chimay avait le rang d'ambassadeur lorsqu'il a
complimenté le souverain pontife, que sa mission a perdu son caractère
temporaire ? Mais non, le prince de Chimay n'a fait que suivre les usages
généralement établis. C'est une question d'étiquette qui n'est nullement
relative au fond de la mission.
.le dis, messieurs, que
cette mission est réellement temporaire, temporaire à Rome, temporaire à
Naples, et le fait, comme je l'ai dit tantôt, le prouvera.
M. Lebeau. - Messieurs, je ne me serais pas
mêlé à cette discussion, si M. le ministre des affaires étrangères n'avait pas
de nouveau, car ce n'est pas la première fois, invoqué un exemple qui me
concerne personnellement.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. Dechamps). - Je n'ai rien dit de malveillant pour vous.
M. Lebeau. - Je suis persuadé qu'il n'y a rien
de malveillant pour moi dans vos observations ; vous parlez dans l'intérêt de
votre défense. Mais je crois que vous ne tenez pas assez compte des grandes
différences qu'il y a entre la mission réellement temporaire que j'ai remplie
et la mission dont les honorables membres se sont occupés.
Je suis obligé,
messieurs, par l'insistance que l'on met à jeter mon nom dans le débat,
d'entrer dans quelques explications. J'en demande pardon à la chambre, mais je
ne réclame que quelques moments d'attention.
Remarquez, messieurs,
quelle différence dans les circonstances ! Lorsque j'ai été chargé d'une
mission à Francfort, nous venions de conclure le traité de 1839, en vertu
duquel la Belgique entrait en relations officielles avec l'Allemagne, notamment
avec la confédération germanique, qui jusque-là n'avait pas reconnu la
Belgique. Beaucoup de princes de la confédération n'avaient pas non plus, avant
le traité, reconnu la Belgique.
Immédiatement après la
conclusion de ce traité, le gouvernement crut utile de nouer de premières
relations, d'établir en quelque sorte des liaisons avec l'Allemagne. C'est
ainsi que M. le général Goblet fut chargé, et c'était bien là une mission
temporaire, de visiter, si je ne me trompe, cinq ou six princes souverains de
l'Allemagne. Je fus chargé en même temps de visiter non seulement la
confédération, mais trois ou quatre princes appartenant à la confédération.
A la différence de ce qui
existe à Rome, où la légation est établie, je pense, depuis dix ans, il n'y
avait pas de légation établie en Allemagne ; j'étais réellement envoyé, ainsi
que le général Goblet et d'autres personnages, pour former les premières
relations.
Il n'y
eut rien là, messieurs, qui ressemblait à une place à traitement. Nous fûmes
tout simplement remboursés de nos frais, moyennant un abonnement par jour,
convenu avec M. le ministre des affaires étrangères. Cela est tellement vrai,
que ce n'est qu'à partir du jour (et je prie M. le ministre d'être attentif à
cette circonstance qui, je crois, n'existe pas dans le cas dont la chambre
s'occupe), ce n'est qu'à partir du jour où l'on s'est mis en route que les
indemnités ont compté ; et au bout de trois ou quatre mois toutes ces missions
étaient remplies. Elles étaient donc bien temporaires. Voilà, messieurs, les
faits tels qu'ils se sont passés. Je laisse à l'impartialité de la chambre, et
à l'impartialité de M. le ministre lui-même, le soin de reconnaître s'il y a
identité entre ces cas et celui dont on vient de s'occuper.
M. Osy. - Messieurs, lors de la discussion
du budget des affaires étrangères, nous vous avons parlé de la mission du
prince de Chimay en Italie. A cette occasion il y a un antécédent dont nous
n'avons pas parlé. En 1836, un honorable sénateur, M. le comte de Baillet, a
été envoyé en mission temporaire à Berlin ; lui-même avait fait la condition
que la mission ne serait que temporaire, et cependant il s'est soumis à la
réélection, il s'est représenté devant les électeurs de Bruxelles qui l'ont
réélu. C'est là un antécédent sur lequel j'appelle l'attention de M. le
ministre des affaires étrangères.
Maintenant, messieurs, je
viens, comme rapporteur, vous parler du crédit qui nous est demande.
Nous avons voté en 1846,
pour le seul chapitre du budget des affaires étrangères dont il s'agit, une somme
de 70,000 fr. On vous demande pour cette année-là seule, un crédit de 44,000
fr. pour missions extraordinaires. Je conviens qu'il y a eu des mutations en
1845 et en 1846 ; mais je vous avoue que, selon moi, plusieurs de nos envoyés
font des voyages et des frais véritablement inutiles.
La majorité de la section
centrale propose à la chambre l'adoption de ce crédit. Mais, messieurs, un de
mes honorables collègues et moi nous n'avons pu donner notre assentiment au
projet, d'autant plus que nous avons vu qu'on accordait des indemnités a
certains envoyés parce qu'ils allaient pendant l'été à la campagne. Dans la
lettre de M. le ministre des affaires étrangères qui est jointe au rapport, on
vous dit que ces voyages sont nécessaires, que notre envoyé eu Portugal doit se
rendre à Cintra, que notre envoyé en Turquie doit se rendre à Buynkière parce
que les cours se rendent dans ces résidences. Mais je crois que la vérité est
tout bonnement que le séjour de Lisbonne et de Constantinople n'est guère
agréable l'été et que l'on préfère la campagne.
Selon moi, messieurs, on
cherche là un moyen détourné d'augmenter les traitements. Si les traitements ne
sont pas suffisants, qu'on le dise. Mais je ne puis donner mon approbation a
des demandes continuelles de crédits supplémentaires dans le but d'augmenter
indirectement ces traitements.
Messieurs, je vous avoue
que je suis étonné que le gouvernement ne nous demande un crédit supplémentaire
que pour un seul chapitre du budget des affaires étrangères. Je demanderai à M.
le ministre si nous pouvons espérer d'une manière positive que pour 1845 et
1846 on ne (page 887) viendra pas
nous demander des crédits supplémentaires sur d'autres chapitres de son budget.
Je crains qu'il ne nous arrive de nouvelles demandes à la fin de la session,
alors que nous n'aurons plus le temps de les examiner convenablement.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. Dechamps). - Messieurs, j'avais oublié de répondre à une interpellation
de l'honorable M. Verhaegen, qu'a reproduite l'honorable M. Osy.
II avait demandé si un
autre crédit supplémentaire ne serait pas présenté à la chambre.
Messieurs, oui, un
nouveau crédit supplémentaire sera présenté à la chambre, et j'avais eu soin
déjà de l'annoncer à la chambre lorsque nous avons discuté le budget de mon
département.
J'ai remis ce projet de
créait supplémentaire à mon honorable collègue des finances qui, je pense sous
peu de jours le présentera à la chambre.
L'honorable M. Osy croit
que le gouvernement a autorisé des voyages et des frais inutiles. Messieurs,
cette critique est générale ; je voudrais qu'on pût la spécialiser, qu'on pût
indiquer quels sont les voyages inutiles que le gouvernement a autorisés. (Interruption.) L'honorable membre a cité
deux cas ; ils concernent notre agent à Constantinople et notre ministre à
Lisbonne ; ce sont les voyages que font ces agents aux résidences d'été à
Buyukiléré et à Cintra.
J'ai fait connaître,
messieurs, comme vous pouvez le voir par la note que reproduit le rapport de la
section centrale, j'ai fait connaître les motifs qui ont toujours fait
autoriser ces voyages.
En
effet, messieurs, à Constantinople comme à Lisbonne, la résidence d'été est
assez éloignée de la capitale et il est d'usage que tous les agents
diplomatiques suivent le gouvernement à cette résidence d'été. Vouloir que
l'agent belge fasse exception, ce serait en réalité demander la suppression,
pendant les mois d'été, de la légation de Constantinople et de la légation de
Lisbonne ; ce serait interdire à nos agents diplomatiques accrédités dans ces
deux capitales d'exercer pendant une partie de l'année l'influence en vue de
laquelle ils sont nommés. Il faut que les agents diplomatiques suivent les
usages établis et acceptés par tous les gouvernements étrangers, sous peine de
se rendre inutiles.
M. Delfosse. - M. le ministre des affaires étrangères nous a dit tantôt
que ce qui constitue une mission temporaire c'est le temps, et il a ajouté que
le temps prouverait que la mission conférée au prince de Chimay est réellement
temporaire, ce personnage devant revenir sous peu en Belgique.
Je ferai remarquer que
les prédécesseurs du prince de Chimay revenaient aussi de temps en temps en
Belgique, et cependant leur mission n'était pas temporaire. Nos agents
diplomatiques à Rome nous reviennent presque toujours à l'approche de l'été,
époque où il fait trop chaud en Italie ; le prince de Chimay aura, en outre, un
autre motif pour être ici au mois de juin prochain ; mais qui nous dit que son
retour sera définitif ? On pourrait bien publier, au mois de juin prochain, un
arrêté royal qui ferait cesser la mission prétendument temporaire et qui
conférerait une mission permanente. Je ne sais ce que M. le ministre des
affaires étrangères nous prépare, mais je ne puis m'empêcher de croire que l'on
élude ici la Constitution.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. Dechamps). - L'honorable membre semble croire qu'il y aurait dans ce
que j'ai dit une espèce de jeu de mots, qu'on accorderait au prince de Chimay
un congé, comme on en a accordé à quelques-uns de ses prédécesseurs, qu'il
viendrait passer quelques mois en Belgique sauf à reprendre sa position après
l'expiration de ce congé. Interpréter mes paroles de cette manière, c'est-leur
donner un sens qui n’est nullement dans ma pensée, et qui serait réellement peu
sérieux et peu digne du gouvernement.
Evidemment lorsque j'ai
parlé de la cessation de ces fonctions, j'ai voulu dire, non pas qu'on
accorderait un congé au prince de Chimay, mais que ses fondions viendraient en
réalité à cesser. C'est l'intention du prince, comme c'est l'intention du
gouvernement.
- Il est procédé au vote
par appel nominal sur l'article unique du projet, qui est adopté par 39 voix
contre 10.
Ont voté l'adoption : MM.
Anspach, Brabant, Clep, de Brouckere, Dechamps, de Corswarem, de Haerne, de
Lannoy, d'Elhoungne, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Renesse, de
Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Donny, Dubus (aîné), Dubus (Albéric),
Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Kervyn, Lebeau,
Lejeune, Lesoinne, Malou, Orban, Pirson, Rodenbach, Scheyven, Thienpont, Troye,
Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen.
Ont voté le rejet : MM.
Biebuyck, de Bonne, Delfosse, de Villegas, Lys, Manilius, Osy, Sigart,
Verhaegen, Veydt.
- La séance est levée à 4
heures 1/2.