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d’intention
Chambre des représentants
de Belgique
Séance
royale du mardi 8 novembre 1842
(Moniteur belge
n°313 du 9 novembre 1841)
Hier les tribunes de la chambre des représentants ont
été ouvertes à midi et demi, et les personnes invitées ont pris place dans le
pourtour de l’enceinte et dans la tribune réservée ; la foule a bientôt envahi
la tribune publique. Dans la tribune du corps diplomatique on remarquait Mgr.
Fornari, nonce du Sa Sainteté, M. le marquis de Rumigny, ambassadeur de France,
sir Hamilton Seymour, ministre plénipotentiaire d’Angleterre, M. le comte
Dietrichstein, ministre plénipotentiaire d’Autriche, M. l baron d’Arnhim,
ministre de Prusse, MM. les chargés d’affaires de Suède, du Danemark, d’Espagne,
des Etats-Unis, M. le duc de Bassano, premier secrétaire de l’ambassade de
France, M. et Mme Van de Weyer, etc.
Comme aux précédentes séances royales, un trône
surmonté d’un dais a remplacé dans l’enceinte législative la tribune et le
bureau.
A midi et demi, M. le comte de Quarré, doyen d’âge des
deux chambres, prend place au fauteuil. Il est assisté de M. Dedecker et de M. Vandensteen comme
secrétaires.
Il est procédé au tirage au sort des députations
chargées d’aller recevoir Leurs Majestés.
La députation chargée de recevoir la Reine se compose
de MM. le comte de Baillet et le baron de Schiervel, sénateurs, et MM. le comte
de Theux, le comte de Renesse, de La Coste et Osy, représentants.
La députation chargée d’introduire S. M. le Roi est
composée de MM. le marquis de Rodes, chevalier de Wouters, baron d’Hoggvorst,
comte de Renesse-Breidbach, chevalier Heyndrickx, baron de Peuthy, sénateurs,
et de MM. Fallon, Meeus, Cogels, Vanden Eynde, Lejeune, Lebeau, de Behr,
Rogier, Eloy de Burdinne et Cools, représentants. (Erratum au Moniteur belge n°314, du 10 novembre
1842 : Parmi les noms de messieurs les
membres composant la grande députation chargée de recevoir S. M. le Roi, nous
avons omis le nom de M. Scheyven.)
A une heure, Sa Majesté la Reine, accompagnée de
S.A.R. est arrivée et a pris place dans la tribune de droite aux
applaudissements de toute l’assemblée.
Le canon a annoncé le départ du Roi de son palais, et
à une heure un quart l’huissier en chef de la chambre des représentants a
annoncé : Le Roi.
S. M., revêtue de l’uniforme d’officier-général de la
garde civique, est entrée, précédée de la députation des deux chambres, et
suivies du grand-maréchal du palais, de ses aides-de-camp, de MM. les généraux
d’Hane, Goblet, de Brialmont et le colonel Croquenbourg, de ses officiers
d’ordonnance, de MM. le général comte d’Hooghvorst, commandant en chef les
gardes civiques du royaume ; le général Anoul, inspecteur général de la
gendarmerie ; le général Van Damme, inspecteur-général d’artillerie, et de
plusieurs officiers d’état-major. De vives et bruyantes acclamations partent de
tous les points de la salle.
Le Roi, après avoir à plusieurs reprises salué
l’assemblée, prend place sur son trône, s’assied, se couvre et prononce le
discours suivant :
DISCOURS DU TRÔNE
« Messieurs,
« Je vous félicite, au nom du Pays, de votre
session si longue et si laborieuse, close il y a peu de semaines, et pendant
laquelle vous avez résolu tant de grandes questions.
« Le court intervalle qui nous en sépare, a été
employé par mon Gouvernement à l’exécution de quelques-unes des lois que vous
aviez votées, et à la préparation des travaux que nous allons aborder.
« L’emprunt que vous aviez autorisé et dont la
conclusion devenait urgente, a été contracté à un taux avantageux qui atteste
notre crédit.
« La loi sur l’instruction primaire a reçu de
toutes parts un accueil qui me rassure pleinement sur son exécution, et qui
présage l’heureuse solution d’autres questions du même genre.
« Vous vous êtes empressés de répondre à l’appel
que je faisais aux sympathies nationales, en autorisant mon Gouvernement à
concourir avec les provinces et les communes à perpétuer le souvenir des hommes
qui ont illustré le nom Belge : l’Exposition des beaux-arts a montré de nouveau
que notre patrie conserve le rang qu’elle a conquis depuis trois siècles.
« Les négociations directes, ouvertes avec le
cabinet de La Haye, ont amené un dénouement satisfaisant pour tous les intérêts
; toutes les difficultés qui se rattachent à la séparation des deux pays, ont
pu être simultanément résolues ; ce traité, complément de celui de Londres,
fera sans doute le premier objet de vos délibérations.
« C’est sans intermédiaire, guidés par un esprit
mutuel de conciliation, que les deux Etats sont parvenus à se placer
définitivement dans une situation normale ; le premier fruit de ce
rapprochement a été la signature d’une convention de navigation intérieure.
« Ces résultats, en régularisant nos rapports
avec les Pays-Bas, ne peuvent qu’influer favorablement sur nos relations avec
les autres Puissances qui n’ont cessé de nous donner des témoignages de
confiance et d’amitié.
« Les négociations avec l’Espagne ont amené,
comme premier résultat, une convention qui vous sera soumise, et qui rouvre cet
antique marché à une de nos principales industries.
« Tout en poursuivant d’autres négociations, il
est impossible de ne pas considérer certaines mesures de législation intérieure
comme devenues nécessaires.
« Plusieurs produits qui forment la base de nos
exportations, sont soumis, de notre part, à des droits de sortie que rien ne
justifie plus.
« D’autres objets d’importation étrangère sont
susceptibles, sans que notre commerce soit compromis, d’une augmentation de
droits d’entrée, dans l’intérêt de l’industrie nationale et du trésor public.
« Vous aurez aussi à vous prononcer sur les
conclusions de la commission d’enquête que vous avez instituée, il y a deux
ans, et dont j’ai suivi les travaux avec le plus vif intérêt.
« Peut-être, pour favoriser les exportations
lointaines, serons-nous amenés à recourir à une institution qui ne trouve plus
dans le droit public actuel les obstacles qui existaient jadis.
« Le chemin de fer ayant franchi les frontières de
France, et étant sur le point d’atteindre celles d’Allemagne, fait naître des
questions internationales de douane, de police et de postes, pour la solution
desquelles le Gouvernement aura probablement besoin de pouvoirs spéciaux.
« La province restée en dehors de ce grand
système de communication, a accueilli avec reconnaissance le dédommagement que
vous lui avez alloué ; une autre province, victime comme celle-ci des
nécessités diplomatiques, attend la loi destinée à réaliser un des bienfaits de
votre dernière session.
« Indépendamment des projets dont vous êtes
restés saisis, vous aurez à vous occuper de plusieurs propositions dont les
unes ont pour objet le maintien de lois temporaires sur le point d’expirer, et
les autres, le perfectionnement de la législation et la protection de l’enfance
dans les manufactures
« Si la session précédente se distingue par
l’importance des questions qui ont été débattues, et par plusieurs actes
d’équité nationale, ces résolutions, sans compromettre notre état financier,
exigent néanmoins la création de moyens nouveaux propres à mettre les recettes
publiques au niveau des dépenses.
« Diverses lois financières vous ont déjà été
présentées ; d’autres le seront en même temps que le budget des voies et moyens
; en attendant que ces lois destinées à augmenter les revenus, tout en faisant
droit à de justes réclamations contre plusieurs vices de la législation en
vigueur, soient votées et appliquées, des ressources provisoires pour 1843 ont
paru indispensables.
« Les nouvelles dispositions législatives ont
permis d’introduire dans le personnel de l’armée des modifications avantageuses
à son avenir, et ont amené un avancement légitimement acquis.
« Ces mesures ont excité une noble émulation qui,
jointe à la discipline, à l’instruction et au dévouement dont l’armée fait
preuve, continue à la rendre digne de ma confiance et de votre sollicitude.
« Reprenez, Messieurs, le cours de vos
délibérations momentanément interrompues ; au milieu de vous, je n’ai qu’un vœu
à former, c’est qu’à tous égards, la session nouvelle ne soit, pour le pays et
pour moi, que la continuation de la session précédente. »
- Ce discours est accueilli par de nouvelles
acclamations.
S. M. salue l’assemblée et est reconduite avec le même
cérémonial qu’à son entrée.
De nouvelles manifestations éclatent au départ de la
Reine.
MM. les sénateurs quittent la salle.