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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du samedi 23 avril 1842
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi relatif au canal de Zelzaete à la mer
(canal de Damme à la mer du Nord) (polders, inondations de
(Moniteur
belge n°114, du 24 avril 1842)
(Présidence
de M. Fallon)
M. Kervyn procède à l'appel nominal à midi et demi.
M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la séance précédente ; la
rédaction en est adoptée.
M. Kervyn fait connaître l'objet des pièces adressées à la chambre :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Feburier,
maréchal-ferrant, à Ypres, né en France, demande la naturalisation. » .
« Le sieur Louis-Achille Thorel,
conservateur du canal de Charleroy à Bruxelles, né en France, demande la
naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
_______________________
« Le bourgmestre, les membres de l'administration
communale et des habitants de Marbaix adressent des
observations relativement au projet de loi sur les sucres. »
- Renvoi à la section centrale qui sera chargée de
l'examen du projet.
_______________________
« Des cultivateurs demandent à être dispensés de
payer un droit sur leurs chevaux mixtes. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
_______________________
Par divers messages, en date du 22 avril, le sénat
informe la chambre qu'il a adopté :
1° Le projet de loi réduisant le personnel de divers
tribunaux ;
2° Le projet de loi accordant une pension à la veuve
du général Buzen ;
3° Les projets de loi relatifs aux emprunts de 12, de
10 et de 5 millions.
- Pris pour notification.
_______________________
« M. de Rumigny, ambassadeur de France en
Belgique, fait parvenir à la chambre une caisse contenant des documents
parlementaires que la chambre des député de France adresse à la chambre des
représentants, en échange de ceux que cette assemblée législative lui envoie
chaque année.
- Dépôt à la bibliothèque.
Discussion des articles
Article premier
M. le président. - L’ordre du jour appelle la suite de la discussion
du projet de loi relatif au canal de Zelzaete.
La discussion est continuée sur l’article 1er
et les amendements qui s’y rapportent.
M. Verhaegen. - Messieurs, dans une question qui, sous plus d’un
rapport, est de la plus haute importance, je sens le besoin de vous faire
connaître les motifs de mon vote qui sera favorable au projet du gouvernement.
J’ai écouté, et de plus j’ai lu avec attention tous les discours qui ont été
prononcés dans cette discussion, et l’opinion que je me suis formée est le
résultat d’une profonde conviction.
D’abord je mets de côté tout esprit, tout intérêt de
localité ; il est vraiment fâcheux que dans cette enceinte il faille toujours
s’occuper d’intérêts de clocher, il est fâcheux qu’il y ait pour ainsi dire
autant d’intérêts distincts en Belgique qu’il y a de provinces ; que dis-je ? qu’il y a d’arrondissements, et je n’ai pas été peu surpris
d’entendre hier l’honorable M. Dumortier nous dire que l’arrondissement de
Tournay a lui seul valait une province. Je me suis demandé alors ce que valait
le reste de la province du Hainaut.
M. Dubus (aîné). C’est du
Tournaisis que M. Dumortier a parlé. (erratum, Moniteur belge n°116, du 26 avril
1842 :
Cette phrase doit être effacée, M. Dubus,
n’ayant point dit cela.)
M. Verhaegen. - Ce qui revient à dire qu'il faudrait en revenir à
d'anciennes délimitations.
Quoi qu'il en soit, je mets de côté toutes ces
considérations que j'appellerai mesquines, et je ne consulte que l'intérêt
général. Il est vrai que cet intérêt prend souvent naissance dans une localité
ou à l'occasion d'une localité, mais il ne constitue pas moins l'intérêt
général puisque tout le pays en profite ; ainsi, si l'on venait un jour nous
présenter un projet ayant pour but de canaliser
Dans l'occurrence, messieurs, je n'ai aussi consulté
que l'intérêt du pays. Etranger aux provinces dont il a été question dans cette
discussion, je dois être à même de donner mon vote avec une entière
impartialité.
Ainsi que j'ai eu l'honneur de vous le dire,
messieurs, j'ai écouté et lu avec attention tous les discours qui ont été
prononcés dans cette discussion, et j'ai acquis la conviction d'abord que la
construction du canal de Zelzaete est un acte de justice, que les événements
de la révolution et même le droit ordinaire rendent nécessaire, et ensuite que
c'est un acte de haute politique.
Il faut, messieurs, voir les choses d'un peu plus haut
; il faut apprécier les questions au point de vue de l'intérêt général, et en
agissant ainsi, l'adoption du projet de loi ne peut être douteuse.
Nous considérons l'établissement du canal de Zelzaete
comme un acte de justice, et en effet, il nous a été démontré dans la séance
d'hier, par l'honorable M. Devaux, et il nous avait été démontre précédemment
par un de nos ex-collègues, qui sous le rapport de sa spécialité mérite toute
notre confiance, par l'honorable M. de Puydt, que, par suite des événements
politiques de 1830, les divers moyens d'écoulements que possédaient les
Flandres ont été supprimés ; que sept écluses importantes ont été complètement
détruites et par suite que le Zwyn, outre qu'il se
trouve sur le territoire hollandais, ne présente plus aucune utilité. Cet état
de choses est dû à l'esprit d'agression qui naguère animait
S'il en est ainsi, s'il faut admettre ces principes
(et quant à moi, je les admets, d'après les raisons que d'honorables
préopinants ont fait valoir), il faut nécessairement arriver à la conséquence
qu'il s'agit dans l'espèce d'un acte de haute justice, ayant pour but de
réparer certains désastres causés par les événements de 1830.
Je me demande maintenant, messieurs, quelle est la
différence entre les poldres pour lesquels il a fallu faire déjà des dépenses
considérables d'endiguement (on a dépensé plus de 7 millions), et les terres
des Flandres qu'il s'agit de protéger contre les inondations causées par la
destruction des moyens d'écoulement qu'elles avaient avant 1830. Pour moi,
messieurs, il n'y a aucune différence.
Mais fallût-il mettre de côté les désastres causés par
les événements de 1830, qui cependant sont le fait de la nation, encore la
mesure proposée par le gouvernement serait-elle un acte de justice commandé par
les principes ordinaires du droit, et ici je me permettrai de faire quelques
réflexions qui, je pense, n'on pas été faites jusqu'à présent.
Je pars, messieurs, d'un fait que je considère comme
constant, d'après les preuves invoquées par d'honorables préopinants, c'est que
les eaux de
Maintenant
Ainsi, messieurs, l'Escaut et
Il est donc certain pour moi que l'établissement du
canal de Zelzaete est d'abord un acte de toute justice, et ensuite un acte qui
incombe au gouvernement, d'après les principes ordinaires du droit.
Mais il y a plus. Il a été prouvé hier que
l'établissement du canal de Zelzaete devait, au point de vue politique même,
procurer à
Il y a plus, ce n'est pas le seul avantage qui doit
résulter de cette construction ; on est allé même jusqu'à vous établir (et
c'est encore l'opinion de M, de Puydt) que nous pourrions en certaines circonstances,
au moyen du canal de Zelzaete, user de représailles envers
Ces points de fait étant une fois établis, il en
résulte pour moi et à la dernière évidence, que la construction du canal de
Zelzaete, indépendamment des raisons de justice et de droit qui en réclament
l'exécution, est un acte qui doit donner au pays des avantages considérables au
point de vue politique.
C'est d'après ces considérations que je donnerai mon
assentiment au projet du gouvernement.
Messieurs, je ne pourrai pas adopter l'amendement de
l'honorable M. Cogels, non plus que l'amendement de l'honorable M. Fleussu. Et,
en effet, ces amendements, comme on vous l'a déjà dit, sont le rejet de la loi.
Je ne m'occuperai que de l'amendement de l'honorable M. Cogels, puisqu'il
résume en même temps l'amendement de l'honorable M. Fleussu, qui d'ailleurs s'y
est rallié.
L'honorable monsieur Cogels propose d'accorder à la
province de
C'est précisément là, messieurs, ce qui avait été
adopté par le sénat, car les travaux de la section du canal de Damme à la mer,
doivent coûter 1,720 mille francs ; or, le sénat avait décidé de mettre 860
mille francs, c'est-à-dire, la moitié de la dépense, à charge de la province de
Mais il y aurait cette différence, et à la défaveur de
M. Cogels. - C'est une question que j'ai laissée intacte.
M. Verhaegen. - Votre amendement laissant les choses dans l'Etat
où elles sont, d'après le projet du gouvernement, il en serait ainsi.
L'on arriverait donc à cette conséquence, de faire
quelque chose qui serait beaucoup plus défavorable à la province de
Ces frais d'entretien, on les a évalués (et cette
évaluation n'a pas été contestée) à 14 à 15,000 fr. par an. Ainsi,
Mais où nous conduit l'amendement de l'honorable M.
Cogels ? La proposition du gouvernement tend à décréter en principe qu'il sera
établi un canal de Zelzaete à la mer, mais qu'on commencera par la section la
plus importante, celle de Damme à la mer. C'est un ouvrage que je considère
comme un et indivisible, et je pense que l'honorable M. Cogels n'a fait son
amendement que pour échapper à l'objection qui résultait de cette
indivisibilité, c'est-à-dire que si l'on fait le canal entier, il faut d'autres
dimensions pour la partie du canal de Damme à la mer, que si l'on fait la
section seule de Damme à la mer ; el si je ne me trompe, les proportions pour
le canal entier sont de
Maintenant, l'honorable M. Cogels, pour échapper à
l'objection, prend pour la partie du canal de Damme à la mer les mêmes dimensions
qu'il faudrait donner à cette même partie, alors qu'on ferait le canal entier.
C'est décréter implicitement la construction du canal entier. Pourquoi n'avoir
pas le courage de le déclarer en termes formels ?
On a dit qu'il est possible qu'un jour on fasse le
canal entier. Mais pourquoi ne pas examiner de suite cette question ?
Pourquoi la laisser indécise et dépenser peut-être un million de plus en pure
perte ?
Messieurs, il me semble qu'il est beaucoup plus
convenable, beaucoup plus sage d'examiner dès à présent les questions à fond.
Il y a toujours un grave inconvénient à vouloir reculer les décisions ; il
faut avoir le courage d'aborder les difficultés. Je comprends bien que ceux qui
ont soutenu l'ajournement voudraient y revenir indirectement ; mais, comme la
chambre s'est prononcée à cet égard, il faut subir les conséquences du vote.
L’ajournement a été rejeté : ce qui veut dire que la
chambre est suffisamment instruite, car si la chambre n'eût pas été suffisamment
instruite, elle aurait prononcé l'ajournement et aurait pris d'autres
renseignements. Puisqu'elle a décidé le contraire, puisqu'elle est suffisamment
instruite, elle doit examiner dès à présent s'il faut faire le canal entier ou
si l'on doit se borner à la section de Damme à la mer.
Pour moi, la nécessité de l'exécution du canal entier
est évidente ; je ne suis pas sans doute expert dans ces matières, mais ma conviction,
je l'ai puisée dans la lecture et l'examen attentif de tous les documents que
nous avons sous les yeux, et j'ai cru de mon devoir de faire connaître à la
chambre les motifs de mon vote qui sera contraire à
l'amendement et favorable au projet du gouvernement.
M . Van
Hoobrouck. -
Messieurs, lorsque j'ai demandé la parole, c'était pour répondre à une partie
du discours de l'honorable M. Dumortier. Selon moi, l'honorable M. Dumortier a
basé sur des erreurs matérielles toute l'argumentation de cette partie de son
discours. Si l'honorable M. Dumortier avait connu les modifications que
l'écluse d'Audenaerde avait reçues depuis quelques années, il aurait
probablement supprimé cette partie de ses observations, et la discussion en
aurait été singulièrement abrégée.
L’honorable M. Dumortier a dit que l'ouverture de
l'écluse d'Antoing, au-dessus de Tournay, avait amené dans le bassin de
l'Escaut une quantité d'eau beaucoup plus grande, qui y était enfermée comme dans
un entonnoir, parce qu'on n'avait pas fait élargir l'écluse d'Audenarde.
Si cela était exact, certainement la partie supérieure
de l'Escaut, c'est-à-dire celle qui est comprise entre Tournay et Audenarde,
aurait été inondée ; mais, par une conséquence nécessaire, toutes les terres et
les prairies en-dessous de l'écluse d'Audenarde auraient été affranchies de
ces inondations, ce qui eût été un bienfait pour ces localités. Mais il n'en
est pas ainsi, messieurs, et j'ai pu m'assurer par moi-même, il y a quelques
jours, de l'état réel des choses ; non seulement les terres et les prairies de
la partie supérieure, entre Tournay et Audenarde, sont, dans ce moment,
couvertes d'eau comme dans les crues ordinaires de l'hiver, mais il en est de
même encore des terres et des prairies qui longent l'Escaut depuis Audenarde
jusqu'à Gand ; de sorte que si cet état de choses se prolonge, nous aurons à
ajouter une nouvelle année néfaste à tant d'autres que nous avons eu à déplorer
sous ce rapport. Heureux encore si les premières chaleurs qui nous arriveront
ne développent dans les eaux stagnantes des germes pestilentiels, et ne
causent des maladies épidémiques ou des épizooties comme les années
précédentes.
Messieurs, il n'est pas exact de dire qu'on n'a pas
fait de travaux à l'écluse d'Audenarde. L'année dernière, on a construit une
nouvelle écluse à 4 arches ; cette écluse a une capacité au moins aussi grande
que l'écluse déjà existante ; de sorte que les moyens d'écoulement à Audenarde
sont doublés, et les inondations n'en ont pas moins continué. Vous voyez donc
que l'écluse d'Audenarde est complètement innocente
des méfaits dont l'honorable M. Dumortier l'accuse.
Puisque j'ai la parole, je vous demanderai la
permission de faire brièvement l'historique des causes d'inondations et des
divers moyens employés pour y remédier.
Personne de vous n'ignore que la vallée de
Il en est résulté que toutes les eaux ont été amenées
simultanément sur le même point, de sorte que l'écoulement, qui avait lieu
jadis successivement a lieu aujourd'hui simultanément. Vous comprenez
facilement que l’écluse d’Antoing, comme déchargement naturel, avait une
capacité suffisante, pour écouler en quinze jours une certaine quantité d’eau ;
mais cette capacité était insuffisante pour donner passage à cette même
quantité d’eau en deux fois vingt-quatre heures.
Quoi qu’il en soit, l’écluse d’Antoing, sur la demande
du gouvernement français, a été élargie ; une capacité beaucoup plus grande a
été donnée à cette écluse. Dès lors, les eaux devaient nécessairement arriver
dans le bassin de l'Escaut.
Je ne me suis jamais dissimulé les embarras qui
résulteraient pour le gouvernement de ce travail, s'il n'était pas continué sur
toute la ligne.
Voici comme je m'exprimai en 1839 quand je présentai
le rapport sur le budget des travaux publics :
« La demande d'allocation faite l'année dernière
pour le barrage d'Autrive s'élevait à 95,000 francs,
mais depuis lors des modifications apportées au plan primitif ont porté cette
somme à 202,000 francs. Ce barrage avait été jugé utile dans l'intérêt de la
navigation. Il avait également été réclamé par les commissions nommées pour
aviser aux moyens de prévenir les inondations qui s'étaient si souvent
reproduites. Le cours de l'Escaut, de Tournay à Audenarde, étant de neuf lieues
et sa pente très considérable, l'alimentation du bief de la rivière, les jours
de navigation, exigeait une masse d'eau très grande. Or, cette masse d'eau, par
la retenue à Audenarde, s'amoncelait dans le bassin en amont de cette ville et
y occasionnait souvent des inondations ruineuses pour les propriétés
riveraines. En partageant ce bief en deux parties égales, le niveau de l'eau
dans la rivière pourra être tenu à une hauteur moins grande, et les terres
basses seront affranchies de ces inondations.
« Nous voyons ensuite que les fonds réclamés pour
le service de l'Escaut doivent encore servir à élargir l'écluse d'Antoing,
d'après l'engagement qui a été pris envers
Vous voyez que déjà en 1839 j'avais prévu la
conséquence de l'ouverture de l'écluse d'Antoing dont s'est plaint M.
Dumortier, si simultanément on n'élargissait pas, sur toute la ligne de
l'Escaut jusqu'à la mer, les moyens d'écoulement.
L'effet de l'ouverture de cette écluse d'Antoing a
donc été d'amener simultanément une masse d'eau dans le bassin supérieur de
l'Escaut. Il fallut quand on a eu l'expérience des inondations qui avaient été
prévues, songer à donner une nouvelle capacité à l'écluse d'Audenarde. C'est un
travail qu'on a exécuté l'année dernière. Mais ce travail n'a pas pu avoir
le résultat qu'on en attendait, parce que les moyens d'écoulement inférieurs
n'avaient pas été coordonnés avec l'élargissement de l'écluse d'Audenarde. Si
cette écluse remplissait son but il en résulterait un déplacement d'inondation,
mais non un remède efficace.
Maintenant, dans la partie inférieure de l'Escaut, les
moyens d'écoulement sont également arrêtés par une circonstance sur laquelle
j'appelle toute votre attention. Le parcours de l'Escaut inférieur, d'Audenarde à Gand, est de 12 lieues. Il faut donc que
l'Escaut charrie à son tour en 24 heures la même quantité d'eau qu'il charriait
auparavant en 15 jours. Vous voyez qu'il est impossible que l'écoulement ait
lieu, que l'inondation est inévitable. Ces inondations sont sans conséquence
pendant l'hiver, car les eaux sont saturées d'une partie de limon qui se dépose
sur les prairies et les féconde. Mais elles ne peuvent pas sans de
graves dangers se prolonger au-delà du 1er au 15 du mois de mars. C'est
précisément l'époque où la navigation, interrompue pendant une grande partie de
l'année, recommence avec activité. Il n'est pas de semaine alors ou 2 à
300 bateaux ne circulent sur le lit de l'Escaut. Ces bateaux sont d'une
capacité extrêmement grande, car ils portent environ trois mille hectolitres de
charbon, et doivent mettre obstacle à l'écoulement des eaux. Cependant il est
impossible d'arrêter cette navigation, car elle sert à alimenter la ville de
Gand en combustibles au moment où la plupart des approvisionnements sont
épuisés. Vous concevez combien il serait dangereux de ne pas donner une grande
facilité à la navigation en présence de l'immense consommation de la ville de
Gand.
Quand les eaux arrivent à Gand, elles sont rejointes
par les eaux de
Dans la discussion on a cité trois moyens de
déchargement pour les eaux du bassin de Gand. Le premier est le canal de Gand à
Ostende. L'honorable M. de Muelenaere, avec sa logique ordinaire, a démontré
les inconvénients qu'il y avait à se servir de ce canal, et je craindrais de
diminuer l'impression que son discours a laissée dans vos esprits, en ajoutant
un seul mot sur cette question.
Le second moyen qu'on a cité, c'est l'Escaut
inférieur. M. Dumortier a dit que l'Escaut inférieur était la voie naturelle
d'écoulement de l'Escaut supérieur. Il a raison. Mais cela n'est vrai que pour
autant que l'Escaut charrie ses propres eaux, et ne doit pas décharger à la
fois et les eaux de la vallée de
Reste le canal de Terneuzen. Depuis l'ouverture de ce
canal, le port de Gand a pris un grand développement, et j'appelle de tous mes
vœux le moment où il sera plus considérable. Le canal de Terneuzen est un canal
de navigation, il est impossible d'en faire un moyen d'écoulement, car il est
construit par endiguement ; le niveau d'eau est supérieur au niveau de la
terre. Comme il faut le tenir à une certaine hauteur, au lieu d'être un moyen
d'écoulement, il est une cause d'inondation par la filtration de l'eau. Chaque
fois qu'un navire de haut tonnage arrive dans le port de Gand, l'influence de
l’eau se fait sentir jusqu’à ne distance de trois lieues de ce canal.
Vous voyez que ni le canal de Terneuzen, ni l'Escaut,
ni le canal de Bruges, ne peuvent servir concurremment à la navigation et à
l'écoulement de nos eaux.
On vous a dit : La position des Flandres est
exactement la même qu'elle était en 1830. Les écluses que vous aviez à cette
époque, le traité avec
Quoi qu'il en soit, le traité n'a pas pu agir sur la
nature. Ce n'est pas l'inexécution des traités, la mauvaise volonté des
Hollandais à nous donner des moyens d'écoulement qui nécessite la construction
du canal dont il s'agit, c'est le travail incessant de la nature que les forces
humaines ne peuvent pas arrêter.
Le Brackman, dans lequel
arrivaient nos eaux par l'écluse d'Isabelle, s'est complètement ensablé ; les
mesures prises par les Hollandais dans un but politique ont pu accélérer le
travail de la nature, mais cette partie du Brackman,
où des navires d'un certain tonnage cinglaient à pleines voiles, se trouve
maintenant couverte de quelques pouces d'eau à marée haute et presque tout le
terrain vis-à-vis de l'écluse est affranchi de toute eau, de sorte que là où
jadis on voyait des navires, on verra bientôt, peut-être, des terres fertiles
couvertes à leur tour de magnifiques moissons. Mais l'honorable M. Dumortier ne
s'effraie pas de cette difficulté. C'est un phénomène, a-t-il dit, qui se
présente sur toutes les côtes du Nord.
Les ports s'ensablent ; il en est ainsi à Nieuport.
Là, dit-il, l'ensablement a lieu également, cependant on y a conservé un canal
qui mène les eaux vers la profondeur de la mer. C'est parce que la mer conserve
là sa profondeur, et qu'on peut avec un travail d'hommes arriver à cette
profondeur et avoir un moyen d'écoulement naturel. Mais cela n'est pas vrai
pour le Brackman. Voyez la carte : vis-à-vis de
l'écluse d'Isabelle, il y a un léger filet d'eau qui, à la marée haute, couvre
de quelques pouces les sables du Brackman.
A mesure qu'on approche de la mer, les terres, au lieu
d'aller en baissant, vont en sens inverse, de sorte que le poldre inondé le
dernier est toujours plus élevé en niveau que le poldre qui le précède
immédiatement, cela forme pente vers l'intérieur. J'en tire cette conséquence
que lorsque les inondations sont arrivées à la partie la plus basse, elles ne
peuvent pas descendre par une pente naturelle, qu'elles doivent être conduites
à la mer par un moyen artificiel. Il faut donc creuser un canal.
Notre position de 1830 n'est plus la même, parce que
les ouvrages qu'on a construits à Antoing et dans la vallée de
Pour parer à ces inconvénients, il n'existe d'autres
moyens que la construction du canal de Zelzaete ; quoi que vous fassiez, vous
devrez tôt ou tard arriver à faire ce canal ; je crois qu'il vaut mieux le
faire aujourd'hui avant que les dégâts des inondations aient considérablement
augmenté.
J'ai eu l'honneur de faire partie de toutes les commissions
nommées depuis plusieurs années pour aviser aux moyens de donner un écoulement
définitif aux eaux des Flandres. Nous avons mis le plus grand zèle, la
meilleure volonté à l'accomplissement de notre mission, et tous nous nous
sommes convaincus d'une vérité, que, à part le canal de Zelzaete, tout ce que
l'on ferait ne serait que des palliatifs, et que, sans ce canal, il est
impossible d'arriver ci un résultat certain et définitif.
A cette occasion, j'ai pu apprécier combien les pertes
occasionnées par les inondations ont été considérables. Je puis, sans exagération,
évaluer ces pertes à plus d'un million. C'est là sans doute une diminution
considérable du capital national. Le capital national est l'élément générateur
du travail, et par conséquent de la richesse des nations. C'est à vous à voir s'il est sage, s'il est d'une bonne
politique de maintenir ce dépérissement du capital national : je vous le laisse
à décider.
(Moniteur belge
n°115, du 25 avril 1842) M. de Muelenaere. - Messieurs, je vous prierai de ne pas croire de vue
que toute la loi se trouve dans l'art. 1er, et que l'adoption de l'amendement
proposé par l'honorable M. Cogels équivaudrait à un rejet formel. Mais avant
d'aborder la discussion de cet amendement, je vous prierai de vouloir bien me
permettre de vous présenter quelques courtes observations générales.
Je ne me proposai plus de rentrer dans le fond de la
question ; je le croyais en quelque sorte épuisé. Mais comme à la fin de la séance
d'hier on a répété toutes les objections qu'on avait fait valoir dès le début
même de ces débats, je résumerai brièvement et ces objections et les réponses
qui déjà y ont été faites.
Je ne parlerai plus de la nécessité de l'exécution
immédiate de la section du canal de Damme à la mer. Il paraît que sur ce point
il y a maintenant à peu près unanimité d'opinion. Tout le monde paraît
convaincu qu'il y a nécessité de procéder sans retard à la construction de
cette partie du canal.
Mais un honorable orateur nous a dit hier que les
événements de 1830 ne nous avaient causé aucun préjudice, que notre position
était exactement la même qu'avant cette époque, et que nous avions conservé
tous nos moyens d'écoulement vers la mer. Je répondrai à cette assertion par un
exposé exact des faits.
Avant la révolution de 1830, vous le savez tous,
l'écoulement de nos eaux se faisait dans le canal de Terneuzen, dans le Brackman et dans le Zwyn. Ces
divers écoulements avaient ensemble 8 écluses, dont 7 débouchaient directement
dans la mer du Nord. Une de ces écluses était une écluse secondaire d'une
grande utilité, à la vérité, mais ne débouchant pas directement dans la mer.
De ces 8 écluses, au moyen desquelles nous opérons l'écoulement de nos eaux, 7
se trouvent aujourd'hui au pouvoir des Hollandais ; 7 sont situées sur le
territoire néerlandais ; une seule est demeurée à
Il résulte de ce combat deux conséquences : la
première qu'il y a le plus grand danger pour un pays à avoir ses écluses à
l'extrémité de sa frontière ; la seconde, qu'aux yeux de
Les 7 autres écluses sont maintenant au pouvoir des
Hollandais. Certainement ce n'est pas la même chose pour un pays d'avoir les
moyens d'écoulement de ses eaux sur son propre territoire, ou sur le territoire
d'un pays étranger, avec lequel il peut un jour peut-être se trouver en état de
guerre.
Examinons à présent l'état actuel des écluses qui sont
tombées au pouvoir de nos voisins. Celle de Philippine se trouve bouchée depuis
1832 ; par conséquent, elle n'est plus d'aucune utilité. Le rétablissement de
cette écluse est généralement considéré par tous les hommes de l'art comme
impossible. Une autre écluse, celle du Watergank d'Eecloo, située à l'est de 1a ville de l'Ecluse, est aujourd'hui
pour ainsi dire, complètement envasée, à tel point, comme on vous l'a dit, que
la marée montante ne peut plus même faire fermer les portes de flot. Une autre,
l'écluse du Pass-Water, est
également à peu près hors d'usage.
L'honorable M. Lejeune vous a déclaré qu'il avait pu
constater par lui-même ; que, loin de s'écouler par cette écluse, les eaux
rentraient vers l'intérieur du pays.
Tous les faits que je viens de vous citer sont
évidemment le résultat des événements de 1830 ; et, sous le rapport de
l'écoulement des eaux, nous pouvons dire que la révolution de
Dès lors, messieurs, je vous le demande, peut-on dire
en bonne justice, avec vérité, que la révolution de 1830, sous le rapport de
l'écoulement des eaux, ne nous a causé aucun préjudice, que nous sommes restés
dans la position où nous étions auparavant, lorsqu'il est évident qu'au lieu
d'avoir huit écluses sur notre territoire, nous n'en avons plus qu'une seule et
que des sept écluses placées sous la dépendance de
M. Dumortier. - Je prierai l'honorable M. de
Muelenaere de me permettre une observation.
Certainement l'honorable membre peut me répondre comme
il le fait, s'il prétend que j'aurais dit que la révolution a fait que les
écluses qui se trouvaient sur le territoire des Pays-Bas sont aujourd'hui
séparées de
Quand j'ai allégué que les Flandres n'avaient rien
perdu par le fait de la révolution, j'ai comparé leur état actuel à ce
qu'il était sous l'ancien gouvernement autrichien. Or, sous le gouvernement
autrichien, elles n'avaient pas plus de moyens d'écoulement qu'aujourd'hui,
elle n'en avait pas même autant, c'est en ce sens que
j'ai dit que la révolution n'a rien empiré.
M. de Muelenaere. - Je ferai remarquer à
l'honorable M. Dumortier que je ne réponds pas au discours qu'il a prononcé
hier. J'expose les faits, et j'expose les faits tels qu'ils existent
véritablement, parce que je veux par ces faits répondre aux objections qui ont
été produites, notamment sous ce rapport que la révolution de 1830 n'aurait
changé en rien notre position quant à l'écoulement des eaux. Or, je crois avoir
démontré à toute évidence que notre position a été considérablement changée,
qu'elle a été sensiblement empirée et que nous sommes loin d'avoir les moyens
d'écoulements que nous avions avant 1830.
Messieurs, une autre objection, et la plus grave de
toutes, qui ait été faite contre la loi, c'est qu'on prétend que la
construction du canal de Zelzaete n'est pas d'un intérêt général ; que cette
construction ne présente qu'un caractère d'utilité locale ou d'utilité provinciale.
Sans aucun doute, messieurs, le canal dont nous
réclamons la construction, sera d'une grande utilité aux Flandres. Nous croyons
même qu'il est démontré à toute évidence, par les documents qui nous ont été
distribués, que ce canal est nécessaire aux Flandres. Mais parce que ce canal
et nécessaire et sera utile aux Flandres, parce qu'il sera construit dans cette
province, suit-il de là qu'il perd son caractère d'utilité générale ?
Messieurs, tous les grands travaux publics, quels
qu'ils soient, n'ont-ils pas, indépendamment du caractère d'intérêt général, un
caractère d'utilité provinciale, et surtout un caractère d'utilité locale ?
L'Escaut, par exemple, messieurs, qui sans aucun doute est un fleuve qu'il faut
conserver dans l'intérêt général ; l'Escaut n'a-t-il pas un caractère bien
prononcé d'utilité locale, n’est-il pas excessivement utile, excessivement
avantageux à la ville d'Anvers ? Ou perd-il pour cela son caractère d'utilité
générale ?
N'en est-il pas de même ici, si nous vous prouvons que
dans l'intérêt général, le canal de Zelzaete, doit être construit, c'est-à-dire
que ce canal procurera au pays des avantages généraux ? Or, il me semble que
ceci vous a été prouvé à toute évidence. Je me bornerai simplement à résumer
quelques-uns des arguments principaux.
D'abord si, comme je le pense, il est évident que
c'est, en partie du moins, à la révolution de 1830 que nous devons l'état
calamiteux des Flandres dans ce moment, il me paraît que le gouvernement, par
esprit de justice, doit venir au secours des Flandres.
On vous a parlé, messieurs, des polders, et on vous a
dit :
« Qu'avez-vous fait pour les poldres ? » Eh bien,
messieurs vous avez rendigué les poldres ; vous avez
rétabli les poldres dans leur condition première. Nous vous demandons à notre
tour que vous replaciez les Flandres dans leur condition première. Vous avez
replacé les poldres dans leur condition première sans aucune participation des
propriétaires. Ici, au contraire, les propriétés intéressées interviendront
dans la dépense jusqu'à concurrence d'un quart, et en outre pour un travail qui
sera d'intérêt général, tandis que le rendiguement
des poldres ne pouvait être considéré que comme étant d'intérêt privé, les
propriétés resteront à perpétuité chargées des frais d'entretien et de
conservation.
En outre messieurs, la révolution de 1830, fait peser
de nouveau sur les Flandres la plus dure et la plus vexatoire des servitudes.
Elle nous place, pour l'écoulement de nos eaux, dans la dépendance absolue de
Je vous prie, messieurs, de ne pas perdre de vue (et
l'histoire est là pour attester ce fait) que de tout temps les Hollandais ont
attaché la plus haute importance â se trouver en possession des écluses, que de
tout temps, dans leurs querelles avec les souverains de ce pays, ils se sont
fait de ces écluses une arme puissante en faveur de leurs intérêts. Ce qui est
arrivé autrefois arrivera encore dans la suite.
Je dis, donc qu'il me paraît d'un intérêt général pour
le pays, qu'il est de la plus haute importance pour
Permettez-moi, messieurs, de vous citer à ce propos un
passage du rapport qui vous a été présenté en 1837 par l'honorable M. Nothomb,
alors ministre des travaux publics, et dans lequel cette question se trouve
traitée.
Voici ce que
dit M. Nothomb dans son rapport :
« L'expérience n'atteste que trop combien une
servitude de ce genre est dure, non seulement pour les localités qu'elle
atteint immédiatement, mais pour le pays en général. Car, qu'on y fasse bien
attention, le pays ne peut consentir à ce que certaines portions du territoire
soient victimes de désastres tels que les inondations, surtout lorsqu'ils
tiennent à une cause politique. Sous ce rapport, il y a solidarité entre toutes
les provinces. Les désastres advenant, les chambres seront amenées par une
force irrésistible à y mettre un terme, fût-ce au prix des plus grands
sacrifices. Ce n'est là ni une théorie, ni une supposition. Un fait récent, et
dont le souvenir restera longtemps dans nos esprits, prouve que telle est la
marche inévitable des choses. Les Hollandais, au moyen des forts qu'ils occupent
sur les rives de l'Escaut, avaient le pouvoir de s'opposer au réendiguement du poldre de Lillo, d'y maintenir
indéfiniment les eaux, de perpétuer la possibilité ou le danger d'inondation
pour les poldres environnants. Pour sortir de cette situation, nous avons
négocié avec
« La frontière des Flandres, l'un des points sur
lesquels le pays est le plus vulnérable, doit, dans l'intérêt de la généralité
autant que, dans le sien propre, être à l'abri de sinistres éventualités, Il
est de notre devoir, en un mot, puisque nous en avons les moyens d'améliorer la
position que la politique nous a faite. De ce point de vue, la question
s'agrandit. »
Vous voyez que même considérée uniquement sous ce
point de vue, sous le point de vue de l'indépendance et de la dignité nationale,
M. le ministre des travaux publics en 1837 était d'avis qu'une dépense de 4
millions n'était pas une dépense trop forte pour soustraire le pays à la
sujétion dans laquelle il se trouve vis-à-vis de
Messieurs, je ne sais pas s'il faut dire encore
quelque chose du canal de Zelzaete, relativement à l'intérêt qu'il présente
pour la navigation.
Tout le monde sait que nous avons une magnifique ligne
de navigation qui s'étend depuis l'Escaut à Gand jusqu'à la frontière française
(Dunkerque). Nous avons des canaux de navigation, de Gand à Bruges, de Bruges à
Ostende, à Nieuport, à Furnes et enfin à Dunkerque. Cette ligne de navigation,
messieurs, intéresse incontestablement tout le pays ; c'est en quelque sorte la
continuation de l'Escaut dans l'intérieur du pays. Le commerce du Brabant, le
commerce du Hainaut, le commerce des Flandres sont éminemment intéressés à la
conservation de cette ligne en bon état de navigabilité.
Je vous le demande, messieurs, croyez-vous que ce soit
dans l'intérêt privé de quelques propriétaires du nord de Bruges ou bien dans
l'intérêt de la navigation, dans l’intérêt du commerce et de l'industrie, que
la chambre de commerce de Mons vous a présenté une pétition dans laquelle elle
insiste vivement pour la construction du canal de Zelzaete ? N'est-ce pas
évidemment parce que la chambre de commerce de Mons a compris que l'écoulement
des eaux qui doit se faire aujourd'hui par le canal de Bruges porte le plus
grand préjudice à la navigation charbonnière qui se fait par le canal d'Ostende
vers Dunkerque et plusieurs parties de
Un honorable député de Bruges vous a dit hier,
messieurs, qu'à une certaine époque il y avait eu jusqu'à 80 bateaux qui
attendaient dans le canal de Gand et dans le canal de Bruges que l'on pût
mettre les eaux à la hauteur nécessaire pour rendre ces canaux navigables. Eh
bien, messieurs, c'est là un fait qui se présente malheureusement assez souvent
; à chaque instant, 50, 80, 100 navires sont obligés d'attendre dans les canaux
dont il s'agit jusqu'à ce que les eaux puissent être mises à la cote navigable.
C'est pour cela que la chambre de commerce de Mons a compris que l'intérêt
bien entendu, bien apprécié du commerce et de l'industrie du Hainaut, exige la
construction du canal de Zelzaete, puisque par cette construction l'on pourra
rendre à cette ligne de canaux sa valeur première, sa valeur normale, et
affranchir ainsi la navigation de toutes les entraves auxquelles elle est
aujourd'hui assujettie.
Messieurs, la conservation du port d'Ostende
n'est-elle pas encore d'un intérêt général ? Or, n'est-il pas prouvé pour tout
le monde que le chenal de ce port ne peut se conserver qu'au moyen des chasses
? l'absence prolongée de chasses lui ferait
infailliblement perdre sa profondeur.
Vous savez que les chasses ne se font régulièrement
que pendant les vives eaux, et pour effectuer les chasses, il faut
préalablement faire une retenue des eaux ; et ce n'est encore que pendant les
vives eaux qu'on peut écouler efficacement les eaux du nord de Bruges. Il en
résulte que pour l'écoulement des eaux le canal doit être baissé précisément à
l'époque où il faudrait faire les chasses ; et que dès lors les chasses ne
peuvent pas avoir lieu. A défaut de chasses le chenal du port s'envase, et
bientôt vous seriez obligés de faire des dépenses extraordinaires pour remettre
le chenal du port d'Ostende dans l'état où vous pourriez le conserver sans
frais au moyen de chasses régulières et souvent répétées.
Vous voyez qu'une foule de motifs se réunissent pour
faire décider que le canal de Zelzaete est non pas d'intérêt local, non pas
d'intérêt provincial, mais d'un intérêt véritablement général. Il est dans
l'intérêt de la dignité et de l'indépendance du pays, il est dans l'intérêt de
la conservation du port d'Ostende, il tend à rendre à la ligne de navigation de
l'Escaut à Gand jusqu'à Dunkerque sa valeur normale, sa valeur première. Voilà
sans doute tous des motifs d'intérêt général de premier ordre. Dès lors je ne
comprends pas qu'on puisse soutenir que la construction d'un canal, qui doit
produire tous ces résultats, n'a pas un caractère d'intérêt public et général.
Maintenant examinons brièvement l'amendement qui vous
a été soumis par l'honorable M. Cogels :
« J'ai l'honneur de proposer à la chambre de porter à
860,000 fr. la somme de 550,000 fr. fixée comme subside à accorder à la province
de
Vous voyez, messieurs, que M. Cogels propose
d'accorder à
Dans la supposition que l'on construise un canal qui
ne serve pas seulement à l'écoulement des eaux des terres qui forment le bassin
du Zwyn et qui sont situées dans
Ainsi, messieurs, dans la première hypothèse, le canal
coûterait 550,000 fr. ; dans la seconde, 825,000 fr.
Maintenant, messieurs, l'honorable M. Cogels propose
d'accorder à
Je vais plus loin ; d'après les pièces que vous avez
sous les yeux, le canal, tel qu'il suffirait de le construire dans l'intérêt de
la province, ne devrait coûter que 4,500 fr. d'entretien annuel. Or, quand le
canal sera construit d'après le projet du gouvernement, la part de
Voilà donc le cadeau que l'honorable M. Cogels ferait
à
Evidemment, messieurs, si le gouvernement ne voulait
intervenir pour rien ou seulement pour une part minime dans la construction
du canal, la meilleure chose que peut faire
Si ce principe est admis pour
Je prie encore la chambre de remarquer qu'il y aurait
une injustice flagrante à mettre cette somme de 550,000 francs à la charge de
la province de
Messieurs, je crois avoir suffisamment prouvé que la
nécessité de la construction du canal de Zelzaete est due en grande partie aux
événements de la révolution de 1830 ; que cette construction est d'intérêt
général, et que dès lors le gouvernement traite déjà assez durement les
propriétaires du bassin du Zwyn, en les obligeant
d'intervenir dans les frais de première construction jusqu'à concurrence du
quart de la dépense totale, et en leur imposant, en outre, à perpétuité, à
dater de l'achèvement du canal, l'entretien ordinaire et les frais
d'administration de ce canal. .
Je crois avoir prouvé
également que l'amendement de l'honorable M. Cogels n'est pas admissible ; que
cet amendement, dans l'état des choses, n'est pas même discutable.
(Moniteur belge
n°114, du 24 avril 1842) M. Angillis.- Messieurs, en entrant pour un moment dans la discussion,
je trouve cet avantage que mon esprit est pleinement dégagé de toute
préoccupation. Je n'ai aucun intérêt personnel dans la construction de ce
canal. Et si en ce moment je viens soutenir, appuyer un projet de loi qui a
pour but la conservation d'une masse de propriétés dans les deux Flandres,
c'est que ce projet me paraît juste et équitable, et j'en ferai de même à
chaque occasion pour toutes les provinces et toutes les localités du pays,
lorsque les demandes me paraîtront également justes et équitables. Je dis que
je n'ai aucun intérêt personnel ; mais j'y vois quelque chose de plus élevé que
l'intérêt personnel, savoir ; l'intérêt d'une contrée assez considérable et en
second lieu public. Je dis l'intérêt public, parce que l'intérêt public se
compose essentiellement de tous les grands intérêts particuliers ; il est
difficile, pour ne pas dire impossible, de poser une ligne de démarcation
entre l'intérêt de deux provinces qui, sous tous les rapports, ne sont pas les
moins importantes du royaume et l'intérêt que l'on appelle l'intérêt public. En
effet, lorsqu'il s'agit de l'intérêt de deux provinces qui forment le tiers du
royaume, un intérêt aussi éminent me paraît inséparable de l'intérêt général,
qui n'est autre chose que la représentation de tous les intérêts particuliers.
On nie cet intérêt, on le conteste vivement, et même
il a été facile d'apercevoir que l'intérêt de localité n'était pas tout à fait
étranger dans cette opposition.
Eh bien,
messieurs, l'extrait du rapport qui nous a été communiqué de M. Vifquain et qui
serait la meilleure justification du projet prouve cet intérêt général en ces
termes : (L'orateur donne lecture de
cette partie du rapport.)
Voilà donc, selon moi, l'intérêt général bien établi.
Cet intérêt public n'existât-il point, on ne serait
pas moins en droit de réclamer le concours de l'Etat pour préserver nos
propriétés de toutes grandes catastrophes. Ce concours est un devoir de
l'association politique, c'est en partie pour cette,fin
que les impôts publics sont établis.
Les devoirs du gouvernement, qui représente
l'association politique, ne sont pas seulement de maintenir le bon ordre et la
tranquillité à l'intérieur et l'indépendance nationale à l'extérieur, mais
encore par des mesures de prévoyance administrative pour préserver toutes les
propriétés situées dans le territoire d'un Etat, de l'envahissement des eaux.
De là les dunes artificielles, les digues et les nombreux ouvrages hydrauliques
que chaque Etat élève, pour la conservation des propriétés, et puisque tous les
biens d'un Etat sont soumis à des impôts qui, lorsqu'ils sont bien établis,
sont proportionnés aux besoins publics, toutes les propriétés ont un droit égal
à la protection de la puissance suprême, qui est la réunion de tous les
pouvoirs de l'Etat.
La question réduite à sa véritable valeur, me paraît
si simple, que je ne conçois pas bien comment elle a pu donner lieu à une si
longue discussion ; mais en la plaçant dans toutes les positions, en
l’examinant sous toutes ses formes, l’abus des mots a amené la confusion dans
les idées et la question a été singulièrement embrouillée.
Je dois donc répéter ce qui a été dit tant de fois,
savoir : que l'on ne demande aucune faveur, qu'il ne s'agit pas d'améliorer nos
propriétés, mais seulement de les préserver de l'envahissement des eaux, ou
plutôt de nous restituer les moyens que nous possédions avant la révolution
d'évacuer, de faire écouler nos eaux. C'est-à-dire, et rien de plus, de nous
replacer dans notre ancienne position. A cette demande on répond et on soutient
que non seulement notre position n'est pas aggravée, mais que depuis la
révolution elle est beaucoup améliorée.
Messieurs, lorsqu'on parle d'une grande localité que
l'on ne connaît que par l'examen de quelques cartes, on doit se défier de ce
qu'on croit entendre trop aisément, aussi bien que de choses que l'on ne
connaît pas.
Pour ne pas prolonger la discussion, je citerai, pour
toute réponse, encore une partie du rapport de M. Vifquain. (L'orateur donne lecture de cette partie du
rapport et continue.) Voilà donc, messieurs, le véritable état des choses,
et pour soutenir le contraire, il faudrait d'autres preuves que de simples
suppositions, car, et vous le savez, on ne détruit pas les preuves qui
résultent d'un rapport d'un homme spécial, d'un homme de l’art, qui a étudié
la question sur les lieux mêmes, il faut d'autres preuves que des raisonnements
qui ne reposent que sur des suppositions.
Au commencement de la discussion on a parlé de notre
position financière, position qui ne nous permet pas de faire de nouvelles
dépenses. Sans doute, messieurs, notre position financière n'est pas brillante,
mais je dois vous faire remarquer que nous ne sommes pas encore arrivés à la
fin de nos dépenses extraordinaires. Nous avons cela de commun avec tous les Etats
constitutionnels de l'Europe. Voici comment un célèbre statisticien allemand,
M. le baron Malchus, s'exprime : « Et dans tous
ces Etats, les frais sont plus considérables que dans les pays des monarchies
absolues, et cependant les peuples des monarchies constitutionnelles européens
sont généralement dans une situation bien plus prospère que ceux des
monarchies absolues, et la cause en est que de meilleures lois, et par suite
une activité industrieuse assurent une évidente supériorité, sous tous les rapports,
aux monarchies constitutionnelles. Les chiffres prouvent ce que la raison avait
déjà fait pressentir. Les monarchies constitutionnelles subviennent à de
grandes dépenses ; elles ont à pourvoir au service d'une dette énorme, mais
ces dépenses et cette dette elle-même, devenant un moyen d'accélération pour la
circulation et l'accroissement des capitaux qu'elles fécondent toutes les fois
qu'ils sont remués, ces Etats n'ont fait que s'élever en grandeur, en richesse
et en puissance. »
Je dis aussi, messieurs, que notre état financier
n'est pas brillant, mais il est moins mauvais que celui de
Quant aux amendements qui ont été proposés, je ne puis
les admettre, et je considérerai l'adoption de ces amendements comme le rejet
de la loi, et si ces amendements sont adoptés, je voterai contre le projet.
Messieurs, avant de finir,
je dois vous faire observer qu'il s'agit ici d'un acte de justice, or vous
savez que la justice est la première dette de la société, j'espère donc que la
chambre ne reculera pas devant un acte de justice.
(Moniteur belge
n°115, du 25 avril 1842) M. Cogels - Messieurs, l'honorable M. Verhaegen et M. de Muelenaere
m'ont reproché d'avoir voulu, par une voie déguisée, amener le rejet de la
loi. Telle n'a pas été mon intention. Je ne suis pas habitué à procéder par
voie détournée, par voie indirecte. Si j'avais été complètement contraire à la
construction du canal de Zelzaete ou de Damme, je m'en serais expliqué
formellement.
L'honorable M. Verhaegen m'a dit que, par mon
amendement, je voulais faire aux provinces des Flandres une condition plus
défavorable que le projet qui avait été amendé par le sénat, en ce que par le
projet actuel les Flandres resteraient chargées de la totalité de l'entretien,
tandis que, dans le projet amendé par le sénat, les frais de cet entretien
étaient partagés entre la province et l'Etat. Cette question avait été laissée
intacte. L'adoption de mon amendement devait nécessairement amener dans la loi
d'autres amendements, puisqu'il changeait complètement les dispositions de la
loi. Le but principal que je me suis proposé est de ne pas décréter dès à
présent la construction totale du canal de Zelzaete.
M. Verhaegen a dit qu'il y avait indivisibilité, que
cette construction totale était décrétée explicitement par le projet du gouvernement,
et implicitement par mon amendement, puisque je voulais mettre le gouvernement
à même de construire la section de Damme à la mer dans des dimensions
nécessaires pour qu'il pût servir de tête au grand canal. Cette indivisibilité,
je ne la reconnais pas, M. de Muelenaere ne la reconnaît pas, M. l'ingénieur ne
la reconnaît pas non plus. Pour la construction du canal de Damme à la mer, il
peut y avoir une espèce d'urgence ; mais pour la section de Zelzaete à Damme,
il n'y a pas la même urgence.
Ceci est reconnu et par les ingénieurs et par la
plupart des orateurs qui ont pris part à la discussion. Pourquoi, dès lors,
nous occuper de discuter la section de Zelzaete à Damme ? Attendons que nous
ayons pu l'approfondir. La section de Damme à la mer est approfondie ; celle de
Zelzaete ne l'est pas ; nous ne savons à quels sacrifices cela nous conduirait.
En décrétant maintenant la section de Zelzaete, nous ne pourrons plus refuser
les fonds quand on viendra nous les demander.
Une antre considération résultant des documents mis
sous nos yeux, c'est que la position des propriétaires de
L'honorable M. Verhaegen nous a dit qu'en faisant
notre proposition, nous voulions revenir à une question d'ajournement, que
cette question avait été décidée par la chambre et que nous devions la
respecter. Personne plus que nous ne respecte la décision de la chambre. Obligé
que j'ai été de m'absenter un moment de la chambre, je n'ai pas voté sur la
proposition d'ajournement. Mais, messieurs Osy et Fleussu, auteurs de
l'amendement que j'ai sous-amendé ont voté contre cette proposition. Ainsi ils
n'ont pas voulu reproduire un ajournement coutre lequel ils ont voté.
M. de Muelenaere dit qu'il s'agit seulement de
replacer les propriétaires des Flandres dans leur condition première. Ceci
n'est pas exact. Quelle était leur position sous le gouvernement autrichien.
Précisément celle qui leur est rendue par le traité des 24 articles. On veut
les placer dans une position meilleure. Dès lors il est juste qu'ils
contribuent pour une forte part aux frais de cette amélioration. Mais c'est
uniquement aux frais des poldres ; le gouvernement n'y intervient pour rien.
Cette construction n'a pas été faite dans l'intérêt des poldres, mais dans l'intérêt
général.
Ce qui m'a frappé le plus dans les observations de M.
de Muelenaere, et je vous avoue que ceci me ferait peut-être consentir à
modifier mon amendement, c'est que
Avec le projet qui nous est proposé, il n'y a rien
d'évalué. On nous demande dé décréter tout le canal et de donner 550,000 fr. ;
mais on ne sait pas ou cela nous conduira.
Je n'ai jamais dit que le canal dot être une dépense
purement provinciale. J'ai reconnu que c'était un intérêt mixte ; M. de
Muelenaere a dit que si l’amendement était adopté, la province pourrait
construire un canal de petite dimension ; Je ferai observer que j'entendais
qu'en accordant le subside, le gouvernement ferait un cahier des charges auquel
on serait oblige de se conformer, faute de quoi le subside serait retiré.
Je crois avoir répondu aux observations faites ; je laisse
à la chambre à juger s’il lui convient ou non d adopter mon amendement.
(Moniteur belge n°114, du 24 avril 1842) M. le président. - M. d’Hoffschmidt propose de substituer le mot
Damme au mot Zelzaete dans l'art 1er du projet du gouvernement.
M. d’Hoffschmidt. - Le canal projeté pour
l'écoulement des eaux des Flandres se divise en deux grandes sections principales,
savoir : la section de Damme à la mer, et la section de Damme à Zelzaete. Ainsi
qu'un honorable préopinant vient de le dire, il n'y a urgence que pour la
section de Damme à la mer, et l'on ne conteste pas qu'il n'existe pas la
moindre urgence, quant à la section de Zelzaete à Damme. Or, je conçois
parfaitement que nous nous occupions de la section pour laquelle il y a
urgence.
Mais je ne conçois pas pourquoi dès maintenant nous
irions décider en principe la construction d'une partie de ce canal pour
laquelle il n'y a pas la moindre urgence. Mon but en présentant mon amendement
est de concilier les termes du projet de loi voté en 1836 par la chambre avec
le système proposé par le gouvernement dans le dernier projet qu'il vous a
soumis. Ainsi dans le projet présenté par le gouvernement en 1836, il n'a été
question que de la section nécessaire pour l'écoulement des eaux des Flandres
entre Damme et la mer. Mais dans ce projet, toute la dépense à faire était à la
charge du gouvernement. Le sénat modifia le projet et par suite de cette
modification il fut retiré par le gouvernement.
Maintenant un terme moyen a été présenté par M.
Lejeune, terme moyen auquel s'est rallié le ministre des travaux publics, et
qui consiste à faire payer les trois quarts de la dépense par le gouvernement
et un quart par les propriétaires intéressés et à mettre l'entretien à la
charge de la province.
Je voudrais donc par mon amendement adopter ce
principe pour la dépense, sans nous occuper maintenant de la question en ce qui
concerne la partie de Zelzaete à Damme.
La principale objection qu'on fait à cette
proposition, c'est qu'il faut nécessairement décider maintenant que toute la
ligne du canal sera construite, parce qu'on doit donner une plus grande dimension
à la partie entre Damme et la mer, si on décide la construction de toute la
ligne, que si on ne décide que la construction du canal entre Damme et la mer.
Mais, messieurs, je ne vois pas que cela entraîne
cette nécessité. Je pense que maintenant en ne nous occupant que de la section
de Damme à la mer, nous pouvons facilement décider que dans l'éventualité, très
probable, du reste, que ce canal sera prolongé jusqu'à Zelzaete, les
dimensions,de la partie dont nous nous occupons seront construites en
conséquence, c'est-à-dire que ce canal sera construit sur une dimension telle
qu'il coûtera, d'après l'évaluation faite, 1,720,000 fr. D'après cela, la
quote-part qui incomberait à l'Etat et qui serait des trois-quarts, s'élèverait
à peu près à 1,300,000 francs ; le reste serait à la
charge des propriétés intéressées.
L’honorable M. Verhaegen nous a demandé tout à l'heure
pourquoi l'on ne voulait pas décider la question de suite, quant à toute la
longueur du canal. Je réponds qu'il y a plusieurs motifs sérieux pour ne pas le
faire : d'abord il n'est pas
nécessaire d'engager l'Etat d'avance, sans nécessité absolue, parce qu'il est
possible que dans l'avenir le gouvernement change d'avis, et que les circonstances
peuvent être telles que nous soyons amenés à modifier notre opinion. Or, il est
toujours fâcheux de placer le pouvoir législatif dans la position de devoir
revenir sur une première décision. Jusqu'à présent on ne dit pas à quelle
époque le canal de Zelzaete à Damme sera construit.
Le système du projet de loi est que l'Etat payera les
trois quarts, que les propriétés intéressées paieront un quart, et que
l'entretien sera à la charge de la province. Il est possible que quand nous
aurons examiné soigneusement le travail de M. l'inspecteur Vifquain, ainsi que
les questions qui se rattachent aux travaux publics en Belgique et la manière
de faire face aux dépenses qu'ils nécessitent, on trouve un système beaucoup
meilleur que celui du projet de loi. Et cependant si le projet du gouvernement
est adopté, nous serons liés relativement au canal de Zelzaete.
Le travail de M. Vifquain, si je ne me trompe d'après
le coup d'œil que j'y ai jeté, tend à mettre la construction de nos voies
navigables à la charge de l'excédant du produit des revenus des canaux. Il est
possible que, dans quelques années, ce système soit adopté, et alors on
pourrait mettre l'exécution du canal de Zelzaete à la charge de l'excédant du
produit des canaux. Il est possible aussi qu'on trouve que l'intervention d'une
compagnie serait utile pour la construction de ce canal. Voilà toutes
questions qu'il est difficile de traiter maintenant et que nous préjugeons, en
adoptant le projet du gouvernement. Nous ne devons pas ainsi, messieurs,
bénévolement renoncer aux renseignements qui nous seront
donnés, à l'examen des rapports qui nous seront soumis. Bornons-nous dans le
projet actuel à la section de Damme à la mer, et déjà le sacrifice à faire par
l'État sera assez considérable. Je crois même qu'en réduisant le projet à ces
termes, cela devrait satisfaire entièrement messieurs les députés des Flandres.
Je serais, en effet, fort surpris qu'ils n'en fussent pas satisfaits, puisqu'en
1836 le projet présenté par le gouvernement ne s'occupait que de cette
section. Cependant dans le ministère de cette époque se trouvait l'honorable M.
de Muelenaere, député des Flandres.
La commission qui a examiné le projet a dit aussi
qu'on devait se borner à cette section, et à la tête de la commission se
trouvait M. Devaux, député des Flandres. Enfin le projet de loi de
Ainsi, messieurs, je demande qu'on se borne à cette
dernière section, et qu'on laisse
l'autre en suspens. Qu'on veuille bien remarquer que nous ne demandons pas que
la section de Zelzaete à Damme ne soit jamais construite. Il s'en faut de
beaucoup. Nous ne décidons rien à cet égard. L'examen de cette question
trouvera naturellement sa place quand on s'occupera du projet concernant
toutes les voies navigables du pays.
Je bornerai là, messieurs,
mes développements ; si l'on admet l'amendement que j'ai l'honneur de proposer,
j'indiquerai ensuite les changements qui devront être faits aux articles
suivants, comme conséquence de son adoption.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières) -
Quoi qu'en dise l'honorable M. Cogels, son amendement et le chiffre lui-même de
son amendement impliquent la décision dès à présent de la construction du canal
entier de Zelzaete à la mer. Car qu'a fait l'honorable M. Cogels pour établir
son chiffre ? Il vous a dit : La section de Damme à la mer doit coûter d'après
le devis estimatif 1,720,000 fr. Je prends la moitié
de ce chiffre et j'en fais l'objet du subside que je propose d'accorder,
c'est-à-dire, 860,000 fr. Or, messieurs, la somme de 1,720,000
fr. est celle nécessaire pour construire la section du canal de Damme à la mer
dans les dimensions nécessaires pour qu'elle puisse faire suite à l'autre
section de Zelzaete à Damme. Ainsi vous voyez qu'implicitement l'amendement de
l'honorable M. Cogels décide la construction du canal entier de Zelzaete à la
mer. Qu'ont demandé M, Lejeune, la section centrale et le ministère ? Le
principe que M. Cogels pose implicitement, ils ont demandé qu'on le pose
explicitement. Et si vous ne le dites pas explicitement, comment pourrez-vous
régler le concours des divers terrains des bassins intéressés ? Cependant il
est avantageux pour le trésor que cela soit établi dès à présent ; car plus
tard, quand vous aurez construit la section de Damme à la mer, dans les
dimensions voulues pour un canal de Zelzaete à la mer, on vous forcera la main
parce que vous ne pourrez plus faire autrement que de l'exécuter, quand le
moment sera venu, si vous voulez ne pas avoir fait des dépenses considérables
en pure perte, et alors vous n'obtiendrez certainement pas les conditions que
vous obtiendriez maintenant.
De même l'honorable M. d'Hoffschmidt (et il a en
quelque sorte soin de s'expliquer lui-même), pose implicitement le principe de
la construction entière du canal de Zelzaete à la mer. Il vous a dit que
c'était une éventualité très probable, que, par conséquent, il faudrait
accorder la somme nécessaire pour construire le canal de Damme à la mer, de la
dimension nécessaire pour qu'il fasse
partie du canal de Zelzaete à la mer. Eh bien, messieurs, je crois que
vous penserez avec M. Lejeune, la section centrale et moi que lorsque la
législature doit poser un principe, elle doit plutôt le poser explicitement qu'implicitement ; car il importe avant tout d'attacher aux
lois un véritable caractère de franchise.
M. Delehaye. - L'honorable auteur du dernier amendement propose
d'accorder une somme pour l'écoulement des eaux des Flandres. Mais l'inspection
seule de la carte prouve qu'un canal de Damme à la mer ne peut servir qu'à
l'écoulement des eaux de
En 1836, on ne s'est effectivement occupé que du canal
de Damme. Mais quelle était à cette époque la position de
Avant la révolution, Gand avait un débouché
considérable par le canal du Sas. A cette époque on voulait que Gand qui était
déjà le Manchester des Pays-Bas et où la fabrication avait pris un grand
développement, fût en contact direct avec la mer.
On a voulu qu'à Gand on pût se procurer, sans frais et
promptement, la matière première, les objets de première nécessité pour nos
fabriques. On s'est donc imaginé qu'il fallait construire un canal qui fît de
Gand un véritable port de mer, et, pour me servir des expressions de cette
époque, on voulait que Gand, le Manchester des Pays-Bas, devînt aussi son
Liverpool. On voulait enfin établir une rivalité entre Gand et Anvers.
Le canal de Terneuzen fut construit par des
concessionnaires. Mais à peine fut-il achevé, à peine un navire de haut bord
entra-t-il à Gand par ce canal, que bientôt on s'aperçut que la première
destination du canal d'écoulement était entièrement perdue. Si mes souvenirs ne
me trompent, lorsque le roi Guillaume vint faire son entrée à Gand par le canal
de Terneuzen, il a fallu inonder une partie des propriétés riveraines pour que
le navire qui portait le monarque pût rentrer. Alors on a senti la faute qui
avait été commise. Le syndicat s'est empressé de reprendre le canal et à cette
époque (j'invoque à ce sujet le souvenir de mes collègues des deux Flandres) il
était déjà question de construire aux frais du trésor un canal latéral au canal
de Terneuzen, pour l'écoulement des eaux des Flandres, canal qui devait nous
rendre les services que nous rendaient anciennement le canal du Sas-de-Gand,
qui, par le chenal du Sas, se dirigeait dans le Brackman.
Ce fait est constant, et je suis étonné que jusqu’ici on n’ait pas fait valoir,
cet argument.
Messieurs, si vous adoptiez, la proposition de
l'honorable M. d'Hoffschmidt, voyez la singulière position que vous feriez à
la Flandre orientale. Nous continuerions à payer des frais pour l'écoulement
des eaux de
Ainsi vous voyez, que si le canal se terminait à
Damme, vous donneriez à
Messieurs, si on a déclaré que la partie du canal de
Damme à la mer était la plus urgente, quel en a été le motif ? C'est qu'on a
cru qu'en commençant par le canal par Zelzaete, on ferait des travaux
absolument inutiles ; qu'il fallait d'abord construire la section de Damme,
pour que les eaux pussent arriver à la mer. C'est ce qu'ont cherché les
ingénieurs. Ils ont dit : Nous allons commencer par la section la plus
rapprochée de la mer, pour que les eaux puissent trouver un débouché ; en
attendant que toute la section de la mer à Zelzaete soit achevée.
Il est vrai que depuis quelque temps on a fait
l'inverse à l'égard de l'Escaut et de
Messieurs, si vous vous contentez de faire le canal de
Damme à la mer d'après les dimensions indiquées par MM. Cogels et
d'Hoffschmidt, dans la prévision que la section de Zelzaete à Damme ne doive
pas se faire, vous feriez des dépenses inutiles.
Car nécessairement, si vous construisez un canal qui
ne doit servir qu'à l'écoulement des eaux de
D'un autre côté, si vous faites maintenant un canal à
petites dimensions, et si plus tard vous reconnaissez la nécessité de faire la
section de Damme à Zelzaete, la dépense que vous aurez faite sera perdue. Je
prie l'honorable M. d'Hoffschmidt de ne pas perdre de vue cette considération.
Si vous faites votre canal de Damme à la mer dans la prévision de le faire
servir uniquement à l'écoulement des eaux de
M. d’Hoffschmidt. - Il faudrait pour cela
rejeter la section de Damme à la mer, et ce n'est pas là ce que je veux.
M. Delehaye. - Eh bien ! si vous faites
un canal à grandes dimension et si vos prévisions, qu'il ne faut pas construire
la section de Damme à Zelzaete, viennent a se réaliser, il en résultera que
vous aurez fait une dépense inutile de plusieurs centaines de mille francs.
J'entends l'honorable M. Delfosse me dire : une dépense d'un million.
Mais indépendamment de cette dépense d'un million
faite en pure perte, vous imposeriez encore à
Vous voyez donc que la proposition de l'honorable M.
d'Hoffschmidt est d'abord injuste, en ce qu'elle laisse le territoire de
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, l'honorable
préopinant a constamment raisonné comme si ma proposition avait pour but de
rejeter définitivement la construction du canal de Zelzaete à Damme. Mais,
messieurs, je n'ai pas dit qu'on dût se borner de toute éternité à la
construction de la section entre Damme et la mer. Ce que j'ai voulu, c'est que
nous nous occupions seulement de ce qu'il y a urgence d'exécuter, et que nous
laissions pour l'avenir à décider la question pour ce qui ne présente aucune
urgence.
La différence entre l'honorable préopinant et moi,
c'est qu'il veut que nous décidions immédiatement la construction d'une partie
qui n'est pas pressée, et que moi je veux ajourner cette décision. En un mot ce
que je propose, c'est l'ajournement en ce qui concerne la partie du canal de
Zelzaete à Damme, ajournement qui ne porte pas préjudice aux Flandres,
puisqu'on a reconnu qu'il n'y avait pas nécessité maintenant, d'exécuter cette
section. En effet les rapports qui nous ont été soumis sont conçus dans ce sens
; et la discussion qui dure depuis trois jours est venue le confirmer.
Si cependant nous nous étions trompés, si on nous
démontrait qu'il y a également urgence de construire la partie de Zelzaete à
Damme, je consentirais volontiers à retirer mon amendement. Car je ne suis pas
hostile, je le répète, à la construction dont il s'agit, et je serai toujours
prêt à voter les fonds nécessaires pour procurer cet avantage aux Flandres.
Mais je ne veux pas le faire, quand il n'y a pas nécessité démontrée.
M. le ministre des travaux publics nous dit : « Vous
décidez implicitement la construction de la partie du canal de Damme à Zelzaete. »
Mais alors, si nous la décidons, pourquoi devrions-nous la formuler dans la loi
? Je ne vois pas l'obligation de le faire, puisque le sens est le même,
d'après M. le ministre.
D'ailleurs le projet du gouvernement, tel qu'il est
conçu, est loin d'être lui-même complet. On décide bien la construction de tout
le canal, mais on ne dit pas quand il s'exécutera ; on ne dit pas comment
seront prélevées les sommes avec lesquelles on l'effectuera. Ainsi le projet
lui-même est incomplet, et ne doit pas satisfaire l'honorable M. Delehaye, qui
est si pressé (et je conçois cet empressement) d'obtenir la section de Zelzaete
à Damme. Je le répète, d'après ce que vous venez de dire, le projet doit vous
paraître insuffisant ; en effet l'art. 5 déclare seulement que la première section,
entre Damme et la mer, sera exécuté immédiatement, et il ne se prononce
nullement quant à l'exécution de l'autre partie, de sorte que cela ne doit pas
non plus vous suffire ; car on peut encore en ajourner indéfiniment la
construction. Quand on nous demandera des fonds pour faire cette section, nous
pourrons dire : le moment n'est pas encore venu. Nous aurons donc décrété un
principe et rien de plus. On pourra vous dire chaque année, que l'état
financier du pays ne permet pas cette dépense, qu'il n'y a pas nécessité, et vous n'en serez pas plus avancé.
Ainsi je crois qu'il est plus sage d'adopter la
rédaction qui avait déjà reçu l'approbation de la chambre en 1836. Alors on n'y
avait pas trouvé les inconvénients qu'on paraît vouloir y reconnaître
maintenant. Bornons-nous donc à cette partie du projet, et plus tard nous
jugerons s'il est utile de voter l'autre partie. Et quant à moi, si l'état de
nos finances le permet, je ne me montrerai pas alors plus difficile pour voter
les fonds nécessaires à la construction de cette partie,
que pour voter ceux que demande l'exécution de la section de Damme à la mer. (La clôture ! la clôture !)
(Moniteur belge
n°115, du 25 avril 1842) M. Dubus (aîné). - Messieurs, je n'ai que deux mots à dire. Mon
intention n'est pas de répéter les observations que j'ai faites dans la séance
précédente. Mon dessein est seulement d'appeler l'attention de la chambre sur
une explication qui me paraît désirable relativement à la portée de l'article
premier sur lequel nous discutons, en tant qu'on y rattache les autres articles
du projet. Cette explication ne sera pas longue à demander, et je crois qu'il
faudra aussi peu de temps pour la donner.
Il est question, d'après l'article premier, de
décréter la construction du canal de Zelzaete aux frais du trésor public et
avec le concours des propriétés intéressées. Dans les articles suivants, on
détermine dans quelle proportion les propriétés intéressées devront concourir à
la dépense, et sur ce point, il semble, d'après l'art. 2, qu'elles doivent
concourir pour un quart. Mais quand on lit plus bas l'art. 6, on voit que les
propriétés qui composent le bassin du Zwyn, au lieu
de concourir pour un quart, ne concourront que pour un huitième environ, et on
ne dit pas qui payera la différence entre le quart et le huitième.
Comparaison faite de ces articles, le projet ne me
paraît pas complet et une explication me paraît nécessaire sur la question de
savoir s'il est vrai que les propriétés intéressées concourront en effet pour
un quart de la dépense réelle.
A cette occasion, je dirai un mot de ce concours des
propriétés intéressées ; ce concours, on en a singulièrement exagéré l'importance,
afin d'en venir à dire que l'on aurait tort d'exiger en outre le concours de la
province. D'après les développements qui ont été données sur ce point, vous
croirez sans doute, messieurs, que les propriétaires intéressés vont faire de
grands sacrifices ; eh bien, savez-vous quels seraient ces sacrifices,
savez-vous quelle serait la somme énorme à laquelle s'élèverait la part
contributive des propriétaires intéressés, qui, aux termes de l'art. 6,
payeraient une somme de 206,000 fr., au moyen d'annuités réparties sur 25
années ?
Eh bien, cela reviendrait annuellement pour chaque
hectare, à 60 centimes ! (Marques
d'étonnement.) Je vois, messieurs, qu'on s'étonne de ce que je viens de
dire ; eh bien, c'est là un chiffre que j'ai puisé dans le rapport de M.
Vifquain ; le calcul de ce que paiera chaque hectare de terre, est établi dans
ce rapport en trois lignes, que l'on a jugé à propos de supprimer dans
l'extrait du rapport qui a été imprimé pour nous être distribué. Voici,
messieurs, ce que je lis dans cet extrait imprimé, à la page 12 :
« Le coût particulier d'un canal d'écoulement,
exclusivement consacré à l'évacuation du bassin du Zwyn,
aurait coûté 820,000 fr., celui de son entretien serait resté au-dessous d'une
dépense annuelle de 4,500 fr. »
Immédiatement après cette phrase, et en trois lignes,
M. Vifquain établit le calcul dont je viens de parler, et c'est apparemment
pour économiser sur les frais d'impression de l'extrait que l’on a cru ne pas
devoir y comprendre ces trois lignes. (Hilarité.) Quoi qu'il en soit, voici ces trois lignes :
« La participation des propriétaires dudit bassin,
dont la superficie est d'environ
Ce n'est pas tout : MM. les propriétaires ont la
faculté de racheter cette rente, et savez-vous quel capital ils devront
consacrer à ce rachat ? Huit à neuf francs ! Au moyen d'un capital de 8 fr. par
hectare, ils peuvent racheter cette charge énorme que l'on a fait sonner si
haut.
Je ferai, à cet égard, une courte observation. De
quelles propriétés s'agit-il, messieurs ? Il s'agit, d'après ce que l'on nous
a dit, de poldres, de propriétés qui n'ont été données à la culture que par des
moyens artificiels, qui ne peuvent obtenir et conserver leur assèchement que
par des moyens artificiels. Or, il a toujours été reçu que la dépense
nécessaire à la création, à l'entretien et au remplacement de ces moyens
artificiels, devait peser sur les propriétaires. Seulement, quand la situation
se trouve désastreuse, quand les sacrifices à faire sont trop énormes, qu'ils
sont de nature à entraîner la ruine même des propriétaires, alors l'Etat peut
accorder un subside.
Si les propriétaires faisaient toute la dépense
nécessaire pour rétablir leurs moyens d'écoulement, ils dépenseraient, nous dit-on,
825,000 ; eh bien, si cette somme était convertie en annuités et répartie sur
25 années, les annuités seraient d'environ 2 fr.40 c. par hectare, et si l'on
voulait les racheter, il suffirait pour cela de 34 francs environ par hectare.
C'est pour éviter un semblable sacrifice aux
propriétaires auxquels il s'agit de conserver la jouissance de leurs terres,
que l'on dit menacées dans un avenir plus ou moins prochain, c'est pour cela
que l'on veut mettre à la charge de l'Etat les trois quarts d'une dépense qui
s'élèvera peut-être à cinq millions de francs, si pas au-delà.
Je ne sais pas, messieurs, si cette observation fera
impression sur vous, mais quant à moi, elle me confirme de plus en plus dans la
résolution que j'avais prise de voter pour l'amendement,
et dans le cas où l'amendement serait écarté, de voter contre le projet.
(Moniteur belge
n°114, du 24 avril 1842) M. le ministre des travaux publics (M. Desmaisières) - L'honorable membre nous a
entretenus, messieurs, du mode de paiement établi dans le projet de loi à
l'égard des propriétés intéressées, il lui a paru que ce mode de paiement était
trop peu onéreux pour celles-ci. Mais que les propriétés intéressées paient 60
centimes annuellement par hectare, qu'elles paient un franc, qu'elles paient
deux francs pour rembourser le capital qui leur est assigné pour leur part dans
les frais de construction du canal, cela doit être parfaitement indifférent, il
suffit que ces propriétés paient un quart du capital nécessaire à la
construction du canal.
Seulement on peut dire que l'honorable préopinant, en
faisant son observation, a fait l'éloge du mode de paiement. En effet, messieurs,
il a dit que l'art. 1er posait le principe de la construction du canal de
Zelzaete à la mer au nord, aux frais du trésor public avec le concours des
propriétés intéressées, que l'art. 2 établissait l'annuité à payer pendant 25
ans par les propriétés intéressées à la construction du canal depuis Zelzaete
jusqu'à la mer, et que l’art. 6 venait ensuite parler d'une autre contribution
annuelle représentant le concours à la construction de la section de Damme à
la mer, des propriétés du bassin du Zwyn, en
attendant que le canal de Zelzaete à la mer du nord soit entièrement construit.
Mais, messieurs, il n’en pouvait être autrement, et le projet de loi n'eût pas
été complet s'il n'avait pas d'abord réglé tout ce qui est relatif au concours
général de toutes les propriétés intéressée à la construction du canal, c’értait là ce qu’il fallait faire et c’est ce qui a été fait
par l’art. 2, qui a établi que toutes les propriétés intéressées à la
construction du canal entier depuis Zelzaete jusqu’à la mer du Nord, paieront
en remboursement du quart du coût de la construction, c’est-à-dire en
remboursement du million qui leur est assigné, une indemnité de 71,000 fr.,
annuellement pendant 25 années. Et pourquoi, parce que ces 71,000 fr.
représentent, avec les intérêts composés à 5 p. c. un capital de un million qui
serait payé aujourd'hui.
Ainsi, messieurs, si l'annuité à payer par hectare
paraît plus ou moins minime, cela ne prouve autre chose, si ce n'est que le
mode de remboursement a été bien combiné et cela ne diminue en rien le chiffre
en capital du concours des propriétés intéressées.
Maintenant la première section du canal, comprise
entre Damme et la mer, sera seule construite immédiatement. Eh bien, on a voulu
pour que le trésor public ne restât pas trop longtemps en avance, en attendant
que l'autre section puisse être aussi construite, déterminer quelle serait
jusqu'à cette époque le concours des propriétés intéressées à la première
section. C'est là un concours provisoire qui sera réglé définitivement avec le
concours des propriétés intéressées à la deuxième section, lorsque tout le
canal sera exécuté.
- La clôture est mise aux voix ; il y a doute, la
discussion continue.
M. Peeters. - Lorsque j'ai combattu la loi qui est en discussion,
j'ai ajouté que je n'étais pas contraire à la construction du canal de
Zelzaete, que je ne m'y opposais que parce qu'on ne voulait pas attendre la
publication du grand travail qui venait d'être déposé sur le bureau et auquel
on nous avait toujours renvoyé lorsque nous demandions la discussion de la
question du canal de
Quoi qu'il en soit, messieurs, lorsque nous avons
demandé l'ajournement, les députés des Flandres nous ont dit que la construction
d'une partie du canal de Damme à la mer était urgente, que cette partie devait
être exécutée immédiatement, si l'on voulait éviter de grands désordres. Il me
paraît que la proposition de M. d'Hoffschmidt doit les contenter entièrement,
et pour prouver que je ne suis pas hostile à la construction du canal, je
voterai en faveur de cette proposition. Je voterai probablement plus tard pour
tout le canal, mais je désire que pour la section de Damme à Zelzaete, qui
n'est pas urgente, on attende qu'il soit fait une proposition générale pour
tous les canaux à construire dans le pays. On a beaucoup parlé des avantages
qui résulteront de la construction de ce canal pour la défense du pays, pour
l'empêchement de la fraude. Ces motifs peuvent être invoqués à plus forte
raison pour
On a fait valoir également les motifs politiques du
canal de Zelzaete, en soutenant que la séparation avec
J'ajouterai que ce canal, d'après les calculs que j'ai
présentés dans la discussion du budget des travaux publics, rapportera annuellement
15 p. c. à l'Etat de toutes les sommes qui y auront été employées. La
construction de quelques petites routes provinciales a plus que doublé dans nos
cantons les droits d'enregistrement et de succession, ils décupleront lorsqu'on
fera des canaux dans ce pays, où il n'y a rien, où tout est à créer. Je voterai
pour l'amendement de M. d'Hoffschmidt, amendement,
je le répète, qui doit entièrement satisfaire les députés des Flandres.
M. Vandenbossche. - Je suis disposé,
messieurs, à voter en faveur du canal de Zelzaete, mais je dois avouer que ce
que vient de dire l'honorable M. Dubus, relativement à la contribution des
propriétaires, a fait impression sur moi. Je voudrais que l'on pût trouver un
moyen de faire contribuer les propriétaires en proportion de la plus-value que
le canal procurera à leurs terres.
De
toutes parts. - La clôture ! la clôture !
- La clôture de la discussion est mise aux voix et
prononcée.
M. le président. - Je mets d'abord aux voix l'amendement de M.
Cogels. Cet amendement est ainsi conçu :
« Il sera accordé à la province de
M. Cogels. - Pour abréger la
discussion, je déclare me rallier à l'amendement de l'honorable M.
d'Hoffschmidt.
M. Dubus (aîné). - Je reprends l'amendement de M. Cogels.
- Cet amendement est mis aux voix.
Des
membres.
- L'appel nominal !
Il est procédé à l'appel nominal. En voici le résultat
:
68 membres prennent part au vote ;
15 répondent oui ;
53 répondent non.
En conséquence, l'amendement n'est pas adopté.
Ont répondu oui : MM. Cogels, de Renesse, Dubus (aîné),
Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fleussu, Huveners, Jadot, Pirmez, Raikem,
Scheyven, Simons, Troye el Vandensteen.
Ont répondu non : MM. Angillis, de
- La chambre, passe au vote de l'amendement de M.
d'Hoffschmidt, lequel consiste à substituer dans le projet du gouvernement le
mot de Damme au mot de Zelzaete.
On réclame également l'appel nominal.
Il y est procédé.
69 membres prennent part au vote.
24 répondent oui.
45 répondent non.
En conséquence, l'amendement n'est pas adopte.
Ont répondu oui : MM. Cogels, Cools, David, Delfosse,
de Renesse, de Theux, d'Hoffschmidt, Dubus (aîné), Dumont, Dumortier, Eloy de
Burdinne, Fallon, Fleussu, Huveners, Jadot, Lys, Mercier, Peeters, Pirmez,
Raikem, Scheyven, Simons, Troye, Vandensteen.
Ont répondu non : MM. Angillis, De
L'art. 1er du projet du gouvernement est ensuite mis
aux voix et adopté en ces termes :
« Art. 1er. Il sera exécuté aux frais
du trésor public, et avec le concours des propriétés intéressées un canal de
Zelzaete à la mer du Nord, pour l'écoulement des eaux des Flandres. »
« Art. 2. Les propriétés intéressées
contribueront aux frais de construction, à concurrence d'un million de francs,
c'est-à-dire du quart de la dépense présumée, en payant à l'Etat, pendant 25
ans, une annuité de fr. 71,000.
« Cette annuité, qui sera recouvrable par les
moyens autorisés pour les impositions directes, prendra cours à partir du jour
où les propriétés seront mises en jouissance du canal.
« Les intéressés qui le désireront pourront, en
tout temps, pendant les 25 ans, se libérer des annuités dont il s'agit en
payant le capital représenté par les annuités dont ils se trouveront encore
débiteurs. »
M. Dumortier. - Messieurs, je propose de supprimer cet article, et
de le remplacer par celui-ci :
« Les propriétés intéressés contribueront pour le
quart de la dépense. »
Outre que par amendement, la part à payer par les
propriétaires sera déterminée d'une manière positive, il en résultera cet autre
avantage, c'est que l'Etat sera dégrevé du quart de l'emprunt que l'Etat aura à
faire. C'est quelque chose. Au reste, j'aurais désiré qu'on ne fît plus
d'emprunt et qu'on pourvût aux dépenses de construction du canal de Zelzaete,
au moyen des ressources ordinaires des budgets.
M. de La Coste. - La proposition de M. Dumortier a un côté sous le
rapport duquel je l'appuierai entièrement. Il ne m'a pas paru qu’il ait été
répondu à la question faite par M. Dubus, celle de savoir qui payerait la
différence entre la somme assignée aux propriétaires de
Cette différence sera-t-elle couverte par la province
ou sera-t-elle reportée sur les propriétaires de
Cette question serait tranchée par la proposition de
M. Dumortier. Mais il y a un rapport sous lequel je ne puis adopter cet amendement.
C'est un point assez important que j'aurais traité avec les développements dont
il est susceptible, avant qu'on passât au vote sur l'article 1err,
si je n’avais craint d'abuser de l'attention déjà fatiguée de la chambre, et
sur lequel maintenant elle ne jugera peut-être pas à propos de revenir.
J'exposerai cependant en peu de mots mon opinion : A mon avis il ne faudrait
pas taxer directement les propriétaires.
Il me semble qu'il faudrait charger les provinces du
quart de la dépense à faire, sauf à elles à en proposer la répartition.
A la vérité, M. Dubus a fait connaître que la charge
des propriétaires serait assez faible. Cette observation, cependant, n'est pas
aussi fondée qu'elle le paraît au premier coup d'œil. La contribution annuelle
de 60 centimes dont a parlé l'honorable membre n'est que le taux moyen, et
quelques terres seraient taxées dans une proportion beaucoup plus forte ;
maintenant, d'après la proposition de M. Dumortier, on payerait immédiatement
le capital même, ce qui pourrait devenir une charge considérable. Remarquez
d'ailleurs, messieurs, qu'en taxant directement les propriétés nous entrerions
dans une voie toute nouvelle ; nous ferions ce que la chambre n'a jamais, fait,
c'est-à-dire, imposer directement les individus. La chambre représente la
nation, mais ses membres ne peuvent pas être considérés comme les mandataires
des individus. Si on imposait la province et que la province fît la
répartition entre les propriétaires, les propriétaires du moins auraient été entendus.
Les honorables membres qui appartiennent aux provinces
des Flandres diront que la charge n'est pas trop forte, et quant à moi
personnellement, leur témoignage me suffit complètement. Mais je ne vois pas
qu'ils soient les intermédiaires naturels entre la chambre et des individus. Si
l'on faisait l'application de la loi de 1807 la difficulté serait moindre, car
là il y a aurait une base certaine : la contribution ne devant pas excéder la
moitié de la plus-value des propriétés. Cependant celle-là est tombée en
désuétude. Elle a été appliquée à la ville de Tournay à propos des améliorations
faites au quai des Tanneurs. La plupart des propriétaires intéressés avaient
souscrit ; mais il y avait quelques récalcitrants ; on s'est adressé au
gouvernement qui a homologué les rôles. Mais alors le chef du gouvernement
exerçait un pouvoir qu'il ne partageait avec aucun corps délibérant. Depuis
lors et jusqu'en 1830 on a, je pense, admis en principe que quand l'Etat
faisait une dépense, il était naturel que l'Etat payât, que quand c’était une
commune, la commune, et qu’enfin les propriétaires devaient être libres dans
leur concours.
En 1834, vous avez accordé des sommes à la province de
Liége, pour des travaux auxquels vous avez appelez le concours de la province,
mais non des propriétaires. Seulement vous avez autorisé la province à exercer
son recours contre qui de droit. Ce mode me paraît plus rationnel et présente
encore cet avantage que la province pourrait faire un emprunt pour couvrir le
quart de la dépense et que l'Etat serait déchargé d'en faire l'avance.
Je pense même que les provinces ne pourraient
supporter une partie de la dépense, sans la mettre à la charge des
propriétaires. Il serait en effet extraordinaire que l'Etat et les
propriétaires fussent intéressés dans une dépense et que la province ne le fût
pas, je ne puis comprendre cette solution de continuité dans la chaîne
administrative dont l'Etat et les particuliers sont les deux extrémités. Il
serait juste que la province, les communes prissent intérêt dans une dépense
semblable, et prendre intérêt c'est payer en style administratif. Les communes
pourront intervenir dans la dépense, car elles ont intérêt à être assainies.
Voici encore un autre rapport sous lequel la province
pourrait être appelée à contribuer, cette loi est considérée comme une loi de
réparation, c'est un des motifs qui m'engagent à en admettre le principe ; or,
la province pourrait bien avoir quelque chose à réparer. En effet, je trouve
dans le travail de M. l'abbé Andries, que le mal a commencé par la suppression inutile de l'écluse de Blankenberg. Cette suppression a dû être ordonnée par les
Etats des Flandres ; car
En résumé, je pense qu'il y aurait avantage pour
l'Etat et plus de régularité si les provinces étaient chargées de fournir le
quart de la dépense, sauf à elles à en proposer une
équitable répartition, entre elles-mêmes, les communes et les propriétaires.
M. Dumortier. - J'aurai l'honneur de faire observer que les
arguments de M. de
Je ferai d'ailleurs une remarque à l'assemblée, c'est
que la rédaction, telle qu'elle est présentée, mettrait à la charge des propriétaires
une somme équivalant au quart de la dépense pour la partie entre Damme et la
mer ; mais je ne vois nulle part une pareille somme mise à la charge des
propriétaires intéressés pour la partie entre Damme et Zelzaete. Car
l'évaluation dont il est question ne s'applique qu’à la partie entre Damme et
la mer.
M. Lejeune. - C'est pour toute
l'étendue.
M. Dumortier. - Alors, je retire mon observation ; mais il reste
celle-ci : Rien ne démontre que le canal ne coûtera que quatre millions. Toutes
les fois qu'on est venu parler de dépenses semblables, les prévisions ont été
dépassées. C'est ainsi qu'en France, les quatre grands canaux qui ne devaient
coûter que cent quatre-vingt millions, en ont coûté deux à trois cents.
Pour notre chemin de fer, qui ne devait coûter que 50
millions, nous en avons déjà dépensé cent et nous avons encore un déficit. Chaque
fois qu'il s'est agi de travaux semblables, il y a eu augmentation sur les
devis présentés. Rien ne nous garantit qu'il n'en sera pas de même ici. Il faut
qu'un quart de la dépense totale soit laissée à la charge des propriétaires ou
des provinces.
Je pense donc qu'on doit admettre ma rédaction, sauf à
substituer la province aux propriétaires.
M. Delehaye. - Je ne comprends pas bien l'amendement de M.
Dumortier.
M. Dumortier. - Mon amendement a pour but 1° la garantie que
l'Etat ne paiera pas au-delà des trois quarts de la dépense, en deuxième lieu
de supprimer le paiement en 25 annuités, parce que je veux que les
propriétaires ou la province paient au fur et à mesure des travaux, et que
l'Etat ne soit pas obligé de supporter les charges d'un emprunt pour faire
l'avance du quart qui incombe aux propriétaires.
Il va sans dire que la somme
doit être payée par les propriétaires intéressés au fur et à mesure de la
dépense.
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- Si je comprends bien la pensée qu'a eue l'honorable M. Dumortier en proposant
son amendement, il veut assurer le trésor contre les excédants de dépenses qui
peuvent résulter de la construction du canal. Nous avions cru, dans
l'amendement que j'ai proposé, devoir poser un chiffre ; en effet, il n'en est
pas d'un canal comme des chemins de fer. Les chemins de fer étaient chose
inconnue ; là les ingénieurs ont pu se tromper, mais les travaux des canaux sont
trop connus pour qu'ils se trompent dans l'évaluation de ces travaux.
Quoiqu'il en soit, pour faire droit à l'observation de l'honorable M.
Dumortier, et pour conserver le concours des propriétés intéressées, je
proposerai l'amendement suivant :
« Art. 2. Les propriétés intéressées contribueront aux
frais de construction à concurrence de un million de francs, en payant à
l'Etat, pendant 20 ans, une annuité de 71,000 fr.
« Si la dépense excède 4 millions, les propriétés
intéressées contribueront à l'excédant à concurrence d'un quart, et l'annuité
qu'elles seront tenues de payer sera augmentée dans la
même proportion. »
M. Dumortier. - L'amendement de M. le ministre des travaux
publics fait droit à la première partie de mes observations, mais non à la
seconde sur l'inutilité d'un emprunt pour faire face à une dépense que les
propriétaires intéressés doivent supporter.
Des propriétés doivent être améliorées ; des hectares
doivent augmenter en valeur de 1,000 à 1,500 fr., et l'on ne voudrait pas payer
10 ou 20 fr. ! Je pense que rien ne s'oppose à mon
amendement.
M. de Muelenaere. - L'honorable M. Dumortier
veut obtenir l'assurance que les propriétés intéressées concourront à la
dépense jusqu'à concurrence du quart. Ensuite, il veut que ce quart soit payé
au fur et à mesure de l'exécution des travaux, et non par annuités. Quant au
premier point, il y est satisfait par l'amendement de M. le ministre des
travaux publics. Quant au deuxième, je ferai remarquer que le bassin du Zwyn ne se compose pas seulement de poldres ; il y a
beaucoup de petits cultivateurs qui seraient très gênés, si on les obligeait à
payer le quart de la dépense ; quelques-uns seraient obligés de vendre leurs
propriétés. Sans doute, les grands propriétaires payeraient le quart de la dépense
; pour eux, il y aurait avantage ; car dans les annuités se trouvent les sommes
nécessaires pour l'intérêt à 5 p. c. et
pour l'amortissement.
M. Eloy de Burdinne. - Qui fera la répartition
?
M. de Muelenaere. - Le gouvernement, par un
règlement d'administration générale. Le gouvernement aura intérêt à faire
rentrer ces sommes, qui seront portées au budget.
M. Dumortier.- Vous aurez remarqué comme la question se
modifie d'heure eu heure. Tout à l'heure tout le bassin de Zwyn
était sous les eaux ; maintenant il n'y a pas de poldres dans ce bassin.
Plusieurs
membres.
- Cela n'empêche pas qu'il ne soit sous les eaux.
M. Dumortier. - Maintenant je ferai remarquer que la somme ne
s'élèvera qu'à 8 francs par hectare. Ce n'est pas pour une telle dépense que
l'on sera obligé de vendre sa propriété. D'ailleurs la constitution a établi un
régime spécial pour les poldres et les wateringues, on n'a qu'à s'y conformer
pour ce quart de la dépense qui est à la charge des propriétés intéressées.
D'un autre côté, je voudrais bien qu'on m'expliquât
comment il sera possible d'opérer ce rachat. Vous aurez pour cela 25 ans.
Il faudra un compte ouvert pour chaque parcelle de propriété. Mais il y aura
confusion. Ce n'est pas un système d'exécution ; il n'y a rien de pratique dans
un pareil système. Il serait bien plus simple de substituer la province aux
propriétaires.
Je ne conçois pas que l'on fasse un emprunt pour des
sommes qui seront remboursées peut-être dans un bref délai. Si dans un espace
de deux ans, la dépense est remboursée, cet argent sera absorbé par les
dépenses de l'Etat et vous n'en aurez pas moins ensuite votre emprunt à
rembourser. Si l'on admet le remboursement par les propriétaires, que ce
remboursement ait lieu dans un petit nombre d'années, et nous ne serons pas
obligés de faire un emprunt.
M. le président. - L'amendement qu'a
présenté M. le ministre des travaux publics, remplace le premier paragraphe de
l'article 2.
M. Desmet. - Messieurs, nous sommes tout à fait d'accord avec l'honorable
M. Dumortier. Il ne s'agit pas de l'intérêt de quelques propriétaires, mais
bien de l'intérêt d'un grand territoire.
On ne vous a pas donné le calcul de toutes les
propriétés intéressées, parce qu'on fera ce calcul quand la loi sera votée. Mais,
messieurs, le gouvernement a cru devoir fixer le chiffre pour lequel elles
devraient intervenir, parce qu'il sait qu'il ne faut pas trop inquiéter les
propriétaires. Lorsque les propriétaires ne savent pas ce qu'ils doivent
payer, ils sont dans l'inquiétude ; il n'en est plus de même lorsqu'ils savent
quelle est la somme des sacrifices auxquels ils doivent consentir.
En second lieu, il faut évidemment accorder quelque
facilité aux propriétaires pour le payement de leur part dans la dépense, on a
donc eu raison d'échelonner ce payement par annuités.
Par ces considérations, je crois, messieurs, que nous
devons adopter l'amendement de M. le ministre des travaux publics.
- L'amendement proposé par M. Dumortier est mis aux
voix ; il n'est pas adopté.
La rédaction du 1er paragraphe de l'art. 2, proposée
par M. le ministre des travaux publics, est ensuite mise aux voix ; elle est
adoptée.
Le § 2 est adopté, ainsi que l'ensemble de l'article.
Articles 3 et 4
« Art. 3. Les mêmes propriétés supporteront en
totalité les frais d'établissement des ouvrages nécessaires pour conduire leurs
eaux au canal.
« Ceux de ces ouvrages à placer aux points où les
rigoles ou conduits d'eau déboucheront dans le canal, seront construits conformément
aux projets arrêtés par le département des travaux publics. »
« Art.
« Les provinces pourront exiger des propriétés
intéressées une rétribution annuelle destinée à couvrir, en tout on en partie,
les dépenses faites de ce chef. »
- Ces deux articles sont adoptés.
« Art. 5. La première section du canal, comprise
entre Damme et la mer, sera exécutée immédiatement. »
M. Dubus (aîné). - Cet article est inutile ; le gouvernement
exécutera comme il le voudra.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - C'est une réserve dans
votre sens.
- L'article est adopté.
Article 6
« Art. 6. Les propriétés qui feront usage de
cette partie du canal pour l'écoulement de leurs eaux, contribueront aux frais
de construction, à concurrence de 206,250 fr., c'est-à-dire du quart de la
dépense qu'il faudrait affecter à l'établissement d'un canal limité aux besoins
de la localité, et ce en payant a l'Etat, pendant 25 ans, une annuité de 14,643
fr. 75 c., laquelle viendra en déduction de l'annuité mentionnée à l'art. 2,
sera recouvrable par les mêmes moyens, prendra également cours à partir du jour
où les propriétés dont il s'agit seront mises en jouissance du canal, et sera
rachetable aux mêmes conditions. »
M. le ministre
des travaux publics (M. Desmaisières) - Il y aurait peut-être lieu à ajouter à cet article
les mots : sous la réserve spécifiée à l’art. 2.
M. Dubus (aîné). Messieurs, j'insiste sur l'observation que j'ai
faite, lorsque nous étions à la discussion de l'art. 1er. Il ne suffit pas de
maintenir à l'art. 6 une réserve faite à l'art. 2 ; mais il faut fixer son
attention sur ce point, que l'art. 6 est en opposition avec l'art. 2.
L’art. 2 décide que les propriétés intéressées
supporteront un quart de la dépense ; et l'art. 6 décide que les propriétés qui
feront usage de la partie du canal entre Damme et la mer supporteront un
huitième de la dépense. La dépense totale de cette section est de 1,720,000 fr., et on limite les charges des intéressés à une
somme de 206,000 fr., ce qui fait un peu plus d'un huitième.
Ainsi si cet article s'exécute, il ne sera pas vrai,
aux termes de l'art. 2, que les propriétés intéressées supporteront un quart de
la dépense ou bien il faudra que les propriétaires de
l'autre section paient davantage ; mais c'est ce qu'on ne dit pas. Est-ce ainsi
qu'on l'entend ?
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- J'ai déjà dit tout à l'heure que l'art.2 était général, qu'il établissait le
concours de la province et des intéressés pour tout le canal. Mais comme l'art.
5 n'ordonne la construction immédiate que de la première section du canal, comprise
entre Damme et la mer, il a fallu que l'art. 6 vînt régler quelle serait la
situation des propriétés intéressées, relativement au concours obligé qui leur
est assigné, en attendant l’exécution entière du canal.
M. Lejeune. - Messieurs, je n'ai jamais compris l'art. 6 de
cette manière. L'art. 2 pose en principe qu'il sera
payé une annuité de 71,000 fr. à répartir entre toutes les propriétés intéressées,
lorsque le canal sera entièrement achevé, et cette répartition se fera d'après
les règles à établir dans un arrêté royal. L'honorable M. de Muelenaere fait un
signe d'assentiment ; c'est ainsi qu'il a aussi compris le projet. Ainsi l’art.
2 suppose la construction du canal en son entier.
Mais on a dû régler l'état exceptionnel des propriétés
intéressées de la première section. On a dit que tant que le canal ne serait
pas tout à fait achevé, les terrains qui profitent de la première section se
trouveraient dans une position exceptionnelle aussi longtemps que le travail ne
serait pas complet. Il s'agit donc d'un règlement provisoire, duquel on devra
tenir compte lors de l'achèvement du canal. Dans tous les cas, il me semble que
l'Etat ne peut rien perdre.
Je ne sais si 1'honorable M.
Dubus comprend comme moi la question. .
M. Dubus (aîné). - Si l'article était entendu dans le sens que vient
de lui donner l'honorable M. Lejeune, il faudrait changer la rédaction. Car
telle n'est pas la portée de l'art. 6 ; Cet article n'est pas subordonné à la
condition qu'on n'exécutera que la première partie du canal, de manière que si
on construisait l'autre partie, il viendrait à cesser. Il n'y a rien dans
l'art. 6 qui décide cela. La rédaction actuelle me paraît avoir cette portée
que les propriétés dont il est question dans l’article, ne devront dans aucun
cas supporter une plus forte charge que celle qu'indique cet article, tandis
que les autres propriétés, qui seraient asséchées par la continuation du canal,
devraient concourir à la dépense pour une plus forte part.
Voilà, selon moi, quelle
sera la conséquence de l'art. 6, s'il est voté tel qu'on vous le propose. Si ce
n'est pas cela qu'on a voulu, il faut en changer la rédaction.
M. Devaux. - Messieurs, vous comprenez bien qu'il faut fixer un
chiffre pour le concours des propriétés intéressées dans la section de Damme à
la mer, parce que vous ne pouvez faire concourir à la dépense les propriétés
intéressées à la construction de cette section dans la même proportion que
devront concourir les propriétés de
Le canal de Zelzaete aura, je crois, au point de
départ sept mètres de largeur. Mais près de la mer, il sera élargi au point
d'en avoir 20 à 25. Vous comprenez donc que la section de Damme à la mer est la
plus coûteuse. Aussi, bien qu'elle ne soit en longueur que la cinquième ou
sixième partie de tout le canal, elle demandera des frais à peu près aussi
considérables que l'autre section. Il faut la grande écluse à la mer, des
écluses à Damme, à l'endroit où le canal à construire traversera celui de Damme
à Bruges. Ces dépenses doivent se faire sur la section de Damme à la mer et
cependant elles ne sont pas seulement utiles aux parties que le canal traverse,
elles sont utiles au canal tout entier. Vous concevez donc que les
propriétaires du bassin du Zwyn doivent payer dans
une proportion moindre que les propriétaires entre Damme et Zelzaete, par la
raison que la dépense que l'on fait sur la section la plus rapprochée de la mer
n'est pas seulement utile au bassin du Zwyn, mais
qu'elle l'est également au bassin du Brackman.
C'est pour cela qu'on a dû fixer la proportion dans
laquelle interviendrait dans la dépense le bassin du Zwyn,
en attendant que les travaux soient totalement exécutés. Quand tout le canal
sera construit, vous pourrez faire une nouvelle répartition du quart de la
dépense, si la première n'a pas été faite exactement ;
mais tant que la seconde partie du canal n'est pas exécutée, il faut bien fixer
un chiffre.
M. Lejeune. - Je ne conteste nullement ce que vient de dire
l'honorable député de Bruges. Il s'agit en ce moment d'une question de
règlement. Faudra-t-il que ce que vous appelez le bassin du Zwyn contribue dans une proportion moindre que les autres
terrains ? C'est très possible ; c'est une question qui doit être décidée par
le règlement d'administration générale. Je suis aussi tout à fait d'accord sur
ce point qu'il faut fixer et maintenir dès à présent le chiffre de l'article en
discussion pour la jouissance du canal de Damme à la mer, jusqu'à ce que le
canal soit achevé en son entier.
M. Dubus (aîné). - Je crois qu'il faudra ajouter une phrase à
l'article pour en déterminer le sens. Je comprends qu'on ne veut voter
l'article que comme établissant provisoirement la rétribution à payer par les
propriétés dont il s'agit, en attendant que le canal soit entièrement construit
et qu'on puisse faire une répartition définitive. Or, cela ne résulte pas du
texte de l'article.
M. Lejeune. - Il n'y aurait peut-être qu'un léger changement à
faire : L'art. 7 forme encore une disposition exceptionnelle ; il me paraît
que ces deux articles peuvent très bien être fondus en un seul ; et alors on
commencerait l'article par les mots qui se trouvent au commencement de l'art. 7
: « Aussi longtemps, etc. »
M. le ministre des travaux publics (M.
Desmaisières)
- Je crois, messieurs, que pour lever toute difficulté on pourrait rédiger
l'art. 6 ainsi :
« Provisoirement et en attendant l'exécution de
l'autre section du canal, celle de Zelzaete à Damme, les propriétés qui font
usage de cette partie du canal, etc. »
M. Delehaye. - Il faudrait remettre la discussion à lundi pour
que l'article puisse être rédigé convenablement.
M. d’Hoffschmidt. - D'après toutes les
explications qui viennent d'être données, il me semble que la rédaction de
l'article n'est pas claire ; l'heure est très avancée, et je crois qu'il serait
préférable de remettre la continuation de la discussion à lundi. (Assentiment.)
- La séance est levée à 4 heures 3/4.