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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 19 février 1841

(Moniteur belge n°51 du 20 février 1841)

(Présidence de M. Fallon)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Lejeune procède à l’appel nominal à midi et quart.

M. Scheyven donne lecture du procès-verbal de la dernière séance. La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Lejeune présente l’analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.

« Le conseil communal d’Auvelais (Namur) demande que le gouvernement fasse reconstruire la quatrième arche du pont de cette commune sur la Sambre, qui avait été supprimé pour construire un chemin de halage.

M. de Garcia – Messieurs, comme vous venez de l’entendre, cette pétition est relative aux travaux publics. Je pense qu’il serait essentiel de renvoyer cette pétition à la section centrale, afin qu’elle fasse un rapport le plus tôt possible. Si la chambre ne jugeait pas cela nécessaire, je demanderais le dépôt sur le bureau et l’impression au Moniteur, afin que je puise faire telle proposition que je jugerai nécessaire, lorsque nous nous occuperons de l’article du budget des travaux publics relatif à cet objet.

- Le dépôt sur le bureau et l’impression au Moniteur sont ordonnés.


« Deux magistrats du tribunal de quatrième classe de Neufchâteau demandent que la chambre adopte la proposition de M. Heptia, relative à la suppression des tribunaux de quatrième classe. »

M. Zoude – Je demande le renvoi au ministre de la justice.

- Ce renvoi est ordonné.


« Le sieur Guillaume Bernard comte de Limbourg-Stirum, propriétaire à Wemmel (Brabant), né à Arnhem, habitant la Belgique depuis 1822, demande la naturalisation. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le sieur Pierre-Joseph Fremiot, lieutenant au quatrième régiment de ligne, né en France et étant au service de la Belgique depuis 1830, demande la naturalisation. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le sieur Pierre-François Meyer, maréchal-des-logis au 1er régiment de lanciers, né en Allemagne, et habitant la Belgique depuis 1814, demande la naturalisation.

- Renvoi au ministre de la justice.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Dubus (aîné), M. Maertens, M. Lejeune, M. Delehaye et M. Desmet déposent sur le bureau des rapports au nom de la commission des naturalisations.

Ces rapports seront imprimés et distribués.

Proposition de loi relative à un canal d'écoulement des eaux des Flandres, de Zelzaete à la mer du Nord

Rapport de la section centrale

M. de Puydt – Messieurs, la section centrale chargée de l’examen de la proposition présentée, dans l’année 1838, par M. Lejeune, relativement au canal de Zelzaete, m’a chargé de vous présenter son rapport.

Plusieurs voix – L’impression !

M. le président – Ce rapport sera imprimé et distribué.

M. de Villegas – Je demande que la chambre veuille ordonner en même temps l’impression du rapport présenté en 1837 par le ministre des travaux publics sur le même objet et qui n’a pas été distribué aux nouveaux membres.

M. le président – On verra s’il y a un nombre d’exemplaires suffisant pour en faire la distribution aux nouveaux membres. Dans le cas contraire, on le fera réimprimer.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l'exercice 1841

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Administration centrale

Article premier

« Art. 1er. Traitement du ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Traitement des fonctionnaires : fr. 120,000. »

La section centrale propose une réduction de 5,550 francs.

M. le président – M. le ministre se rallie-t-il à la proposition de la section centrale.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Non, M. le président.

Les allocations de l’espèce de celles dont il s’agit se défendent assez difficilement devant les membres d’une chambre qui, par leur position, ne sont pas en mesure d’apprécier les besoins nombreux et journaliers d’un service administratif. Dans ces sortes de dépenses, il faut que la chambre s’en réfère à l’appréciation du ministre qui doit être présumé ne demander que les sommes nécessaires aux besoins de son service. Pour ma part, j’ai pris la résolution de ne pas entraîner la chambre dans de très longs débats pour la défense de cette allocation. Je déclare qu’elle est nécessaire aux besoins de l’administration, que ces besoins surtout pour les travaux publics vont chaque jour croissants et que si la chambre, s’associant à la proposition de la section centrale, refusait la somme de 5,550 francs dont on propose le retranchement, force serait au ministre de retrouver sur une autre parie du budget ce qu’on lui retirerait aujourd’hui. Ainsi le chemin de fer qui est une des branches les plus importantes du département des travaux publics paie le traitement d’un certain nombre d’employés attachés à mon département.

C’est un état de chose que j’ai trouvé mis en pratique. Je me suis borné à le signaler. Outre le personnel payé par les 120,000 francs dont il s’agit en ce moment, il y a des employés payés sur les fonds du chemin de fer. Si l’on retirait du département des travaux publics la somme de 5,550 francs, les besoins de l’administration me forceraient de l’imputer sur les fonds du chemin de fer.

Le département des travaux publics a pris depuis quelques années une très grande extension. Cet accroissement doit de jour en jour s’étendre ; il y a des services qui ne sont pas encore organisés. La chambre a montré beaucoup de sollicitude relativement à tous les travaux hydrauliques, à l’amélioration de nos rivières et canaux.

Au département des travaux publics, il n’y a pas encore de division pour les travaux hydrauliques, on n’a pas encore organisé d’administration spéciale pour cette branche importante des travaux publics ; elle est encore au secrétaire général où un seul employé s’en occupe. Une nouvelle extension devra être donnée à ce service par suite des allocations accordées par la section centrale. Il en est de même pour les postes.

La section centrale a accordé une somme de 70 mille francs pour rendre le service rural quotidien. Cela nécessitera aussi un accroissement d’employés, et sans doute un accroissement de besogne qui devra être rempli par un surcroît de travail ou une augmentation d’employés. Or, on n’obtient pas de nouveaux employés ou un surcroît de travail, sans nouvelle allocation.

Quoi qu’il en soit, j’aurai une régularisation à demander à la chambre. Je ne doute pas que sur ce point la chambre ne soit d’accord avec moi. Il se trouve imputé sur le chapitre de l’instruction publique, chose que j’ai trouvée établie, le traitement de deux employés, l’un chargé du travail relatif à l’inspection des athénées et collèges, l’autre chargé du travail relatif au jury d’examen. Les traitements de ces employés sont pris sur les articles relatifs aux jurys d’examen et aux inspections des athénées et collèges. Il y a quelqu’irrégularité dans ce mode d’imputation. Je proposerai de transférer à l’article « Traitement des fonctionnaires » une somme de 2,400 francs qui serait déduite des article relatifs aux jurys d’examen et aux inspections des athénées et collèges.

L’article 2 du chapitre V serait réduit de 900 francs et l’article 3 de 1,500 francs.

C’est une régularisation qui m’a été d’ailleurs indiquée par la cour des comptes et que j’ai promis d’introduire dans le budget.

M. le président – Le chiffre du gouvernement se trouverait élevé à 122,400 francs.

- Ce chiffre est mis aux voix.

Deux épreuves sont douteuses.

Il est procédé au vote par appel nominal sur le chiffre de 122,400 francs demandé par le gouvernement.

60 membres sont présents.

2 (MM. Troye et Dubois) s’abstiennent)

58 prennent part au vote.

29 votent pour l’adoption.

29 votent contre.

La chambre n’adopte pas.

Ont voté pour l’adoption : MM. Angillis, Cogels, David, Delehaye, Delfosse, de Mérode, de Nef, de Puydt, de Renesse, de Roo, de Villegas, d’Hoffschmidt, Duvivier, Fallon, Fleussu, Lange, Lejeune, Lys, Manilius, Milcamps, Pirmez, Pirson, Raymaeckers, Rogier, Sigart, Smits, Van Cutsem, Vilain XIIII et Zoude.

Ont voté contre : MM. Brabant, de Behr, Dechamps, Dedecker, de Florisone, de Garcia de la Vega, de Langhe, de Meer de Moorsel, Demonceau, de Potter, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Theux, Dubus (aîné), B. Dubus, Hye-Hoys, Kervyn, Maertens, Mast de Vries, Morel-Danheel, Peeters, Raikem, Simons, Thienpont, Ullens, Vandensteen, Wallaert et Trentesaux.

M. Troye et M. Dubois motivent l’abstention sur ce que, entrés au moment du vote, ils ignoraient ce dont il s’agissait.

- L’article 2 est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 116,850 francs.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Je crois devoir faire une observation. J’ai dit que, pour le cas où le chiffre que je demandais ne serait pas accordé, comme il est destiné à faire face à des besoins indispensables, je serais obligé d’imputer sur les fonds du chemin de fer les sommes nécessaires au service. Comme cette déclaration n’a pas trouvé de contradictions, j’y donnerai suite.

M. Desmet – Si le gouvernement agit ainsi, nous n’avons pas besoin de perdre notre temps à voter les budgets. C’est à la suite des allégations du ministre que nous avons voté une réduction. Si le gouvernement agit ainsi, autant vaut renoncer au gouvernement représentatif. Il est vraiment indigne que l’on vienne émettre de telles doctrines.

M. de Puydt – Comme M. le ministre vient de déclarer que le chiffre qu’il avait demandé était nécessaire aux besoins du service, je demanderai si, dans la section centrale, on a prévu d’une manière quelconque qu’il ne fût pas nécessaire aux besoins du service.

M. Dubus (aîné) (pour un rapport au règlement) – Je trouve fort étrange que l’on mette en discussion la résolution de la chambre. Si nous procédons ainsi, nous n’arriverons jamais à la fin de la délibération. Ce n’est pas après le vote qu’on peut faire des observations ; c’est avant le vote qu’il fallait les faire.

M. de Puydt – Ce n’est pas moi qui ai violé le règlement. J’ai parlé sur un incident qui avait été soulevé. Si l’on voulait faire un rappel au règlement, il fallait le faire lorsque l’incident a été soulevé. Mais après qu’il avait donné lieu à deux observations contradictoires, on ne pouvait m’empêcher d’exprimer à cet égard mon opinion.

M. Peeters, rapporteur – Je demande la parole.

M. d’Hoffschmidt – Je la demande également.

M. le président – Les observations que l’on pourrait faire maintenant seront mieux placées au second vote.

M. d’Hoffschmidt – C’était ce que je voulais faire observer.

Articles 3 et 4

La chambre passe à la discussion de l’article 3.

« Art. 3. Loyer du ministre : fr. 9,600. », au lieu du chiffre 12,000 francs primitivement demandé.

Sur la proposition de M. de Langhe, la chambre décide qu’elle discutera en même temps l’article 4.

« Art. 4. Ameublement de l’hôtel du ministre : fr. 60,000. » au lieu du chiffre de 30,000 francs primitivement demandé.

M. de Langhe – Nous avons décrété la formation d’un sixième ministère. On a dit à ceux qui se sont opposés à cette création, qu’ils n’avaient pas d’idées gouvernementales. Pour moi, qui ai été de cet avis, je ne sais si c’est défaut d’intelligence, mais j’en suis encore à comprendre comment nous serions moins bien gouvernés par cinq ministres occupés que par six dont quelques-uns ne le sont pas autant qu’ils pourraient l’être.

Quoi qu’il en soit, c’est une affaire décidée. Je ne propose pas à revenir. Mais il ne suffit pas de créer un ministre, il faut pourvoir à son logement. La chambre avait pensé qu’elle n’aurait qu’à pourvoir à son logement particulier, que les bureaux pourraient rester où ils étaient. C’était dans ce sens qu’elle avait refusé une somme de 12,000 francs demandés ; mais on a dit que le bureaux ne suffisaient pas, que le ministre ne pouvait rester logé comme il était, qu’il devait être près de ses bureaux, qu’il fallait 12,000 francs. On les a accordés.

Maintenant il faut que le ministère soit meublé. La question se présente devant vous, avec une réduction de 3,000 francs sur le loyer et une dépense de 68,000 francs pour mobilier. Si l’on calcule cette dépense à 10 p.c. pour dégradation du mobilier et en y comprenant l’intérêt du capital employé, la somme n’est pas exagérée. Ce serait donc 6,800 francs par an. Ces 6,800 francs, ajoutés aux 9,000 francs, feraient une somme de 15,800 francs au lieu de 12,000 francs que vous avez cru devoir accorder.

Pour louer ce ministère, on a loué plusieurs hôtels, deux hôtels, trois hôtels, je ne sais combien il y en a. Mais de cet ensemble on a formé un ministère.

Ce ministère, ces hôtels, il a fallu les meubler. Je comprends que cette somme a dû être assez forte ; mais ce que je ne comprends pas, c’est que cet ameublement doive se faire de suite, et sur un seul budget. S’il est permis de comparer les petites choses aux grandes, je dirai que le particulier qui se meuble, ne le fait pas entièrement en un an, mais en deux ou trois ans, de manière à rendre peu à peu cet ameublement complet.

C’est dans ce sens que je proposerai une réduction de 18,000 francs, c’est-à-dire de porter à 42,000 francs le chiffre à allouer cette année pour ameublement. Ces 42,000 francs, avec les 8,000 francs que M. le ministre avoue déjà avoir entre les mains, au moyen d’un transfert du ministère des affaires étrangères, porterait à 50,000 francs la somme à la disposition du ministre. Je crois cette somme suffisante pour le moment.

M. Desmet – Messieurs, j’ai demandé la parole pour appuyer l’amendement de l’honorable M. de Langhe. La manière dont on fait des dépenses dans nos ministères dépasse toutes les bornes. Si on voulait calculer tout ce qu’on a dépensé en ameublement, la somme serait vraiment effrayante.

Messieurs, toutes les sections se sont élevées contre le chiffre pétitionné pour l’ameublement. La quatrième, qui était la mienne, a fait connaître qu’on ne devait pas dépenser autant d’argent pour l’ameublement d’un hôtel qui n’appartient pas au gouvernement. Et même, si je suis bien informé il paraît que tout cet ameublement restera au propriétaire de la maison.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Pas du tout.

M. Desmet – Si je suis bien informé, toutes les glaces, par exemple, doivent, d’après le contrat, rester au propriétaire.

Messieurs, je veux bien qu’on meuble les hôtels des ministres, mais la manière dont on les meuble passe toute exagération. On ne se borne pas à un bel ameublement, il faut un ameublement de souverain. Ce serait fort beau si cela ne se faisait pas à la charge des contribuables qui sont dans la misère.

Je le répète donc, il y a vraiment abus dans la manière dont on meuble les ministères ; je crois qu’il faut que la chambre y mette un terme, en adoptant l’amendement de M. de Langhe. Car il y a véritablement abus dans les dépenses exorbitantes et purement de luxe qu’on fait tous les ans dans les hôtels des ministres.

M. de Mérode – Messieurs, en établissant un sixième ministère, je ne sais si on a entendu l’établir d’une manière indéfinie. Car , selon moi, il est fort possible qu’on se contente de nouveau de cinq ministères. Et si l’on fait tant de dépense d’ameublement, comme vient de le dire l’honorable préopinant il est fort à craindre que ces dépenses ne soient perdues. Il me semble qu’il faut donc, à cet égard, mettre la plus grande économie.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Messieurs, les explications qui ont été échangées entre la section centrale et moi, avaient engagé celle-ci à adopter le transfert que j’avais proposé de manière que je ne croyais pas que cette allocation donnât lieu à discussion dans cette chambre.

Le chiffre de 68,000 francs peut paraître considérable, pris isolément. Mais si on le rapproche des sommes dépensées dans les autres ministères, on verra qu’il est modéré. Cela tient à ce que l’hôtel occupé par le ministère des travaux publics a des dimensions assez modestes. S’il eût fallu le meubler sur le même pied que les autres ministères, ce n’est pas 68,000 francs qu’il eût fallu, mais peut-être une somme double.

L’honorable M. de Langhe vient de vous dire qu’un ministre devait procéder comme un particulier et meubler successivement sa maison. Mais je crois qu’un particulier meuble sa maison d’une manière habitable ; sinon il fait un mauvais calcul. C’est ce qui est arrivé pour le ministère de la guerre, pour lequel de fortes sommes ont été dépensées, et qui n’est pourtant pas habitable. On a meublé le premier et pas le second, et tant que le second n’est pas meublé, l’hôtel ne peut être habité par le ministre.

Ainsi, si le ministre des travaux publics avait procédé de cette manière, il aurait pu meubler une partie de l’hôtel, mais il ne l’aurait pas rendu habitable.

On vous a dit que les ministres se donnaient des ameublements de souverain. Je crois qu’il y a là beaucoup d’exagération. La chambre admettra que les ministres étant les premiers fonctionnaires de l’Etat, non pas pour eux personnellement ; beaucoup d’entre eux ont des goûts, des habitudes modestes, mais pour les fonctions qu’ils remplissent, il importe à la dignité du pays que l’ameublement d’un ministère ne ressemble pas à l’ameublement d’un simple particulier. A cet égard, je crois qu’on est d’accord, et d’ailleurs, tous les antécédents, tous les autres pays sont là pour répondre.

L’honorable M. de Mérode a fait remarquer qu’il était important de ne pas faire de grandes dépenses pour l’ameublement d’un ministère des travaux publics, alors qu’on n’avait pas de certitude sur la durée de ce ministère. Il a supposé le cas où, de six ministères, un serait retranché pour retomber dans l’inconvénient des cinq ministères, inconvénient auquel le cabinet précédent a cru devoir mettre un terme.

Eh bien ! je ne ferai pas le même raisonnement que l’honorable comte de Mérode ; je crois que s’il y a des modifications à établir dans l’état de choses actuel, ce serait plutôt en plus qu’en moins. Oui, messieurs, les affaires d’un pays qui prospère sont comme les affaires d’un particulier qui prospère ; elles vont croissant en nombre et en importance, et demandent un plus grand nombre de directeurs.

Pour en revenir au retranchement du ministère des travaux publics (je parle ici d’une manière tout à fait désintéressée), je pense que, loin de le supprimer, plus tard la question pourra être de savoir si un seul ministère suffira pour les travaux publics ; si le chemin de fer, par l’extension immense qu’il est destiné à prendre n’exigera pas à lui seul un ministère pour son exploitation et celle des postes réunies.

Ainsi, pour le moment, je crois qu’il ne peut être question de la suppression d’un des six ministères. Chacun des six ministres est occupé suffisamment dans son ministère et ne pense pas à reprendre une partie des attributions dont il s’est déchargé.

Quoi qu’il en soit, en supposant la réalisation de l’hypothèse à laquelle s’est livré l’honorable comte de Mérode, eh bien ! le ministère supprimé en sera quitte pour procéder à la vente de ses meubles, si tant est qu’il ne puisse se répartir dans les autres départements où les meubles manquent encore.

M. de Langhe – M. le ministre vous a dit que la somme pétitionnée pour l’ameublement de son ministère n’était rien en comparaison de celles demandées pour les autres ministères. Mais je dirai : Parce qu’on a dépensé trop pour les autres ministères, faut-il encore en faire autant cette fois ? Avec un pareil système de nivellement, où nous mènera-t-on ? Où arriverons-nous ?

Je crois que la somme, telle qu’elle est demandée, est amplement suffisante. Je ne propose pas de la réduire, quant au chiffre total ; mais je propose de la réduire pour cette année.

M. le ministre vous a dit qu’il fallait qu’un hôtel fût mieux meublé pour un ministre que pour un particulier. Mais il y a dans un hôtel des appartements qui peuvent rester sans meubles, sans que pour cela l’hôtel soit inhabitable. Plus tard si nous affaires sont plus prospères, on pourra accorder des sommes plus fortes, et cela d’autant plus facilement qu’elles seront portées sur plusieurs exercices.

M. le ministre vous a dit aussi qu’il ne pourrait jamais être question de supprimer un des six ministères. Je ne suis pas, en ce point, de son avis. Je crois qu’il y a des ministres qui réellement ne sont pas occupés autant qu’ils devraient l’être. Je ne dis pas que c’est le ministère des travaux publics qu’on devrait supprimer, mais ce peut être un autre.

Je dirais de plus que la chambre, en s’élevant contre la réunion du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’intérieur, n’a pas entendu pour cela qu’il fallait créer un sixième ministère. Du moins c’est ainsi que je l’ai entendu. On a cru qu’il fallait établir une autre répartition d’attributions, de manière à ce que deux branches importantes de l’administration ne restassent pas dans la même main ; mais, je le répète, on n’a pas entendu qu’il fallait augmenter le nombre des ministères.

M. de Mérode – Messieurs, la réunion des départements des affaires étrangères et de l’intérieur formait pour un ministère une espèce d’omnipotence au moins nominative qui ne plaisait pas à beaucoup de personnes. Je crois qu’on a mal fait de maintenir cette réunion pendant si longtemps ; mais sous le ministère précédent, on avait projeté une combinaison dans les attributions des divers ministres, et avec elle on aurait pu se contenter de cinq de ces hauts fonctionnaires. Je ne sais pourquoi on n’a pas mis ce projet à exécution.

Messieurs, la France à 30 millions d’habitants et n’a, je crois, que sept ministres ; et nous, pour 4 millions d’habitants nous avons six ministres. Il est impossible, malgré tous les chemins de fer, qu’on ne puisse se contenté d’un ministère composé de cinq membres. Si par la suite les chemins de fer exigeaient une direction toute spéciale, on pourrait établir un emploi différent de celui de ministre ; on pourrait, par exemple, nommer un directeur des chemins de fer, qui relèverait du ministère sans être lui-même membre du cabinet.

Un des grands inconvénients de multiplier ainsi les ministres, c’est que, quand il se forme un ministère, il est beaucoup plus difficile de trouver six ou sept personnes d’accord, que quatre ou cinq.

Je crois donc qu’il est essentiel de ne pas augmenter le nombre des ministères ; je désirerais, au contraire, qu’ils fussent réduits à cinq. Cela ne peut se faire dans ce moment ; mais j’espère qu’on pourra revenir plus tard à ce nombre bien suffisant, selon moi.

M. Desmet – Messieurs, quand tout à l’heure j’ai attaqué la manière dont se faisait l’ameublement des ministères, c’est que j’en avais des motifs.

Messieurs, ce n’est pas moi seul qui signale les abus dont il s’agit ; la cour des comptes elle-même a fait à cet égard des observations ; elle s’est demandé s’il convient d’employer l’argent destiné au mobilier à l’achat de services de table, de linge de table et d’autres objets semblables.

La cour demande que la chambre se prononce sur l’étendue que l’on peut donner à l’allocation accordée sous le libellé du mobilier ; il y a grande facilité de satisfaire à la cour de comptes, car il ne parait clair et évidement que, dans l’ameublement, on ne peut jamais comprendre les objets de ménage, comme l’argenterie, les services de table et tout ce qui concerne la lingerie de table !

Il y a une certaine différence entre être meublé comme un ministre et être meublé comme un souverain. On dit que certains ministères sont meubles d’une manière tout à fait extraordinaire ; on cite même des fauteuils qui coûtent jusqu’à 500 francs pièce.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Je sais, messieurs, qu’on a dit beaucoup de choses relativement à l’ameublement des ministères ; ces choses ont été dites non seulement hier et avant-hier, mais aussi il y a un an, il y a deux ans, il y a trois ans ; j’ai toujours entendu parler du luxe effréné avec lequel les ministères sont meublés. Quant au prix de certains fauteuils, je ne suis pas à même en ce moment de donner des renseignements à cet égard. En ce qui me concerne, j’ai recommandé à ceux qui sont chargés de l’ameublement de mon ministère une certaine économie ; mais je leur ai recommandé aussi un certain luxe ; car, je le déclare franchement, je crois que les ministères doivent être meublés avec un certain luxe.

En ce qui concerne des achats de services de table, je dois déclarer aussi que dans la somme de 60,000 francs demandée, il se trouve des dépenses de linge de table.

Je ne chercherai pas à justifier ces dépenses en disant qu’elles ont des antécédents, je dirai seulement que l’on doit accorder aux ministres certains objets mobiliers de cette nature qu’ils ne sont pas censés devoir apporter avec eux.

J’ai cru, messieurs, devoir ces explications très nettes, très franches, à la chambre pour répondre à des on-dit dont l’honorable préopinant s’est rendu l’organe dans cette enceinte ; bien que les débats ordinaires des chambres législatives ne doivent pas porter sur de pareils détails, il n’eût été très agréable que tous les on-dit eussent été reproduits devant l’assemblée, car ainsi que je l’ai déclaré dès le principe de cette discussion, je suis prêt à défendre tous les actes de grande ou petite importance de son administration.

M. de Garcia – Puisque la question est soulevée, je dirai un mot sur le point de savoir ce qu’il faut entendre par le mobilier qui tombe à la charge de l’Etat. Je crois que le gouvernement a fait à cet égard une fausse application de la loi.

Le décret qui met à la charge de la nation l’ameublement des ministères, je ne puis dire sa date, s’exprime, si je me rappelle bien, de la manière suivante : « Les ministres sont logés et meublés aux frais de la république. » Cette loi est unique sur la matière. Or, voici ce que dit le code civil sur la signification de ce qu’on doit entendre par une maison meublée :

« Art. 534. Les mots « meubles meublants » ne comprennent que les meubles destinés à l’usage et à l’ornement des appartements, comme tapisseries, lits, sièges, glaces, pendules, tables, porcelaines et autres objets de cette nature. Les tableaux et les statues qui font partie du meublé d’un appartement y sont aussi compris, mais non les collections de tableaux qui peuvent être dans les galeries ou pièces particulières. Il en est de même des porcelaines : celles seulement qui font partie de la décoration d’un appartement, sont comprises sous la dénomination de « meubles meublants ». »

« Art. 535. L’expression « biens meubles », celle de « mobilier » ou d’ « effets mobiliers », comprennent généralement tout ce qui est censé meuble d’après les règles ci-dessus établies. La vente ou le don d’une maison meublée ne comprend que les meubles meublants. »

Dès la fin de ce dernier article, il est évident que les seuls meubles meublants sont dus à l’hôtel des ministres, et de l’article 534, il résulte que, dans les mots « meubles meublants », l’on ne comprend pas l’argenterie et le linge de table.

Je crois donc, messieurs, que l’on a donné une fausse interprétation à la loi, lorsqu’on a cru que l’argenterie et le linge de table doivent tomber à la charge de la nation, et je crois qu’à cet égard les observations qui nous ont été faites par la cour des comptes sont parfaitement justes et bien fondées.

M. de Behr – Dans le sein de la section centrale, nous avons reconnu, messieurs, que le crédit demandé par M. le ministre des travaux publics est nécessaire pour établir une sorte d’égalité entre les divers ministères, et nous avons cru par conséquent qu’il serait juste d’accorder le chiffre proposé.

M. Dubus (aîné) – L’observation que vient de faire l’honorable président de la section centrale nécessité une réponse. On a pris pour point de comparaison de très vastes hôtels appartenant à l’Etat et qu’il a fallu meubler en proportion de leur étendue, mais il me semble qu’il aurait fallu faire aussi la part des circonstances et reconnaître que l’hôtel dont il s’agit est infiniment plus restreint, qu’il appartient d’ailleurs à un particulier. Or si l’on en vient, dans peu d’années, à acheter un hôtel pour le département des travaux publics, toute la partie du mobilier qui aura été appropriée à l’hôtel actuel deviendra presque sans valeur, de sorte qu’une forte partie de la dépense pour laquelle on nous demande un crédit de 60,000 francs sera à peu près perdue. Je crois donc qu’il faudrait procéder avec la plus sévère économie à l’ameublement de l’hôtel actuel du ministère des travaux publics. L’opinion de M. le ministre est qu’il faut du luxe ; mon opinion, à moi, est qu’il n’en faut pas, surtout là où les dépenses que l’on fait peuvent devenir des dépenses inutiles et surtout dans des circonstances où tout le monde est d’accord pour proclamer que nous devons éviter toute dépense de luxe, à cause de notre situation financière.

M. de Behr –Je crois, messieurs, que l’hôtel du ministère des travaux publics est loué pour 9 ans ; or, il est probable que d’ici à 9 ans le mobilier dont il s’agit sera fort détérioré, et si dans la suite on achète un hôtel, rien n’empêchera d’y transporter les meubles qu’il s’agit d’acheter. Quant au point de comparaison que nous avons pris, nous avons considéré que pour le ministère de l’intérieur, par exemple, on a alloué 120,000 francs et nous avons pensé que nous ne ferions pas une proposition exagérée en proposant d’accorder la moitié de cette somme au ministère des travaux publics.

M. Dubus (aîné) – La section centrale aurait dû aussi prendre en considération la somme qui a été dépensée pour l’ameublement de l’hôtel du ministère de la justice. Je crois que lorsqu’on a meublé cet hôtel, on a dépensé, de ce chef, 15,000 francs.

L’article 3 est adopté avec le chiffre de 9,000 francs.

L’article 4 est adopté avec le chiffre de 60,000 francs.

Article 5

« Art. 5. Fournitures de bureau, impressions, achats et réparations des meubles, chauffage, éclairage, menues dépenses : fr. 24,000. »

M. Doignon – Messieurs, cet article présente une majoration de 7,000 francs sur le chiffre qui a été voté l’année précédente. Une section a désiré connaître la cause de l’insuffisance du crédit accordé précédemment ; M. le ministre a donné à cet égard quelques explications auxquelles la section centrale s’est référée pour motiver la proposition qu’elle a faite d’allouer le crédit demandé ; mais je doute qu’elle eût accordé la majoration proposée si elle avait pris d’autres renseignements ; je demanderai à M. le ministre si les travaux d’impression nécessaires pour le service du chemin de fer sont adjugés publiquement, si mes renseignements sont exacts, ces fournitures se donnent par des marchés de la main à la main, tandis que pour tous les autres ministères, pour toutes les autres administrations, on adjuge publiquement les impressions. Puisque M. le ministre des travaux publics agit en cela contrairement à toutes les règles, je pense que la section centrale aurait bien dû au moins, se faire remettre les prix courants pour examiner si l’on ne paye pas des prix trop élevés. Je suppose que la section centrale a supposé que les impressions dont il s’agit sont fournies d’après une adjudication publique. S’il en était ainsi, la proposition de la section centrale serait le résultat d’une erreur, et alors mieux instruite, elle pourrait revenir elle-même sur sa décision. Dans tous les cas, je pense que le crédit ne doit être accordé que sous la condition qu’il y aura adjudication publique. M. le ministre a présenté l’augmentation des employés comme la seule cause de la majoration du chiffre, mais cette majoration ne serait pas nécessaire, s’il était possible d’obtenir à meilleur compte les impressions dont il s’agit et qui sont fort importantes.

M. Peeters – L’honorable M. Doignon vient d’interpeller le rapporteur de la section centrale sur l’article 5 en discussion.

La section centrale a trouvé que la majoration de 100,000 francs sur cet article, quoi étant la conséquence des changements d’attributions ministérielles, était assez justifiée par les explications de M. le ministre jointes au rapport, mais elle n’a pas examiné la question dont vient de nous entretenir l’honorable orateur.

M. Nothomb – Je ne sais, messieurs, si les impressions sont la cause de l’augmentation du crédit demandé pour le matériel ; c’est M. le ministre actuel des travaux publics qui peut seul donner des explications à cet égard. Je dirai seulement un mot en réponse à l’honorable M. Doignon sur la question des adjudication publiques appliquées aux impressions des ministères. Je ferai d’abord remarqué à l’honorable membre que la questure de la chambre elle-même n’a pas recours à l’adjudication publique pour les impressions.

Elle a reconnu que ce mode offrait de grands inconvénients.

Voici, messieurs, ce que j’ai fait, il y a environ un an, au ministère des travaux publics ; j’ai demandé un bordereau de prix aux principaux imprimeurs de Bruxelles, on a confronté toutes les réponses des imprimeurs, on a réduit chaque article au minimum, et l’on a fait des offres aux imprimeurs, en leur présentant les bordereaux ainsi réduits. Je crois que c’était une marche convenable, et qu’on est arrivé par là au minimum des prix.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Messieurs, l’augmentation de crédit a été suffisamment justifiée aux yeux de la section centrale, qui, il ne faut pas le perdre de vue, n’a admis que les dépenses dont la justification lui paraissait complète.

L’augmentation de 7,000 francs se justifie d’abord par l’extension assez considérable d’attributions qu’a prise le département des travaux publics au mois d’avril dernier, ensuite par l’accroissement successif des affaires qui, journellement , incombent à ce département.

Du reste, messieurs, l’allocation des années antérieures s’est trouvée insuffisante, précisément jusqu’à concurrence de la somme que je demande en plus cette année, de telle manière qu’on peut dire qu’il n’est pas même tenu compte de l’extension des attributions donnée au département des travaux publics et l’accroissement journalier que prennent les affaires.

Pour l’exercice 1839, il y a un déficit de 7,660 francs ; la même insuffisance se reproduira au budget de 1849 ; je serai forcé de venir incessamment demander à la chambre un crédit supplémentaire pour faire face aux déficits des années antérieures. Si cette année la chambre ne m’accorde pas la somme jugée nécessaire, je serai obligé de demander un nouveau crédit supplémentaire l’année prochaine, car la chambre aura beau faire, dans ces sortes de dépenses, il faut bien que les affaires du département marchent ; vous ne pouvez pas, en retranchant telle ou telle somme, empêcher le ministre de faire telle ou telle dépense que les besoins du service exigent impérieusement. Qu’est-il arrivé, chaque fois que la chambre a réduit le crédit demandé pour le matériel de tel ou tel département ? C’est que les années suivantes, le ministre a été obligé de venir réclamer un crédit supplémentaire.

Je dirai maintenant un mot sur les adjudications publiques. Jusqu’ici, j’ai continué la marche que j’ai trouvée établie. J’ai eu occasion de dire hier mon opinion sur les adjudications publiques. Je crois qu’en règle générale ce système est bon, mais je pense aussi qu’il a son mauvais côté, que pour certaines fournitures il serait très imprudent de les livrer à l’intérêt privé de tel ou tel spéculateur en adjudication publique. Ainsi, il est arrivé souvent qu’on n’a pas pu faire usage des papiers et des impressions fournis par adjudication publique. C’a été une source de conflits perpétuels entre les fournisseurs et le secrétaire général sur la qualité de telle ou telle fourniture.

Je me suis fait faire un rapport sur la convenance qu’il y aurait de mettre en adjudication les fournitures du département ; si je trouve dans l’application de ce système un avantage pour le service, je n’hésiterai pas à donner la préférence à ce mode ; si, au contraire, j’y trouve des inconvénients, je continuerai le système que j’ai trouvé établi. C’est une question d’administration.

M. Doignon – Messieurs, lorsque dans la séance d’hier, M. le ministre affirmait que la publicité la plus étendue existait pour toutes les opérations de son département, j’ai pensé que les fournitures dont il s’agit entraient dans la catégorie générale.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Je n’ai parlé de cette publicité qu’en ce qui concerne le chemin de fer.

M. Doignon – Mais il paraît qu’il n’en est pas ainsi. L’honorable M. Nothomb argumente de ce qui se passe à la questure : c’est là un cas spécial ; moi, j’argumente de la règle générale qui est suivie dans tous les autres ministères ; or, dans tous ces ministères, on ne trouve pas d’inconvénient à appliquer le mode d’adjudication publique en cette circonstance.

On dit que ce système a ses inconvénients, mais on ne l’a pas prouvé. On a dit seulement qu’il y a des inconvénients. On a dit qu’on fournissait quelquefois du papier dont il était impossible de se servir. C’est un inconvénient qui doit peu nous toucher, puisqu’il peut se corriger aisément : on n’a qu’à faire des conditions telles que le fournisseur soit obligé de livrer du bon papier.

Je pense donc que le système suivi par M. le ministre est tout à fait irrégulier. On a procédé jusqu’ici au moyen d’un concours volontaire ; je pense que ce concours ne peut pas remplacer le mode d’adjudication publique ; c’est ce dernier mode qui offre seul la garantie que l’Etat ne payera pas des prix trop élevé

On dit qu’il existe un déficit pour les années antérieures ; mais c’est une raison de plus pour rechercher la véritable cause de ce déficit. Il n’est pas bien difficile de prévoir les besoins d’un département en pareille matière.

On se prévaut de l’opinion de la section centrale ; mais, d’après ce que vient de dire M. le rapporteur, on n’a pas prévu le cas que j’ai signalé. On a été dans l’opinion que les fournitures de l’espèce étaient livrées par adjudication publique, et dans cette hypothèse, la section centrale a très bien fait d’allouer la majoration de crédit. Mais la section centrale s’était trompée. Si M. le ministre ne veut pas nous promettre de suivre le mode d’adjudication publique, je voterai contre la somme demandée.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Messieurs, il paraîtrait, d’après l’honorable préopinant, que l’adjudication publique pour les impressions de l’administration centrale amènerait une réduction de 7,000 francs.

M. Doignon – Je n’ai pas dit cela.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – L’honorable préopinant base sa proposition, contraire à l’augmentation des 7,000 francs, sur la possibilité de recourir à l’adjudication publique, laquelle sans doute entraînerait des économies jusqu’à concurrence de 7,000 francs.

M. Doignon – Je n’en sais rien.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Si vous n’en savez rien, il ne faut pas en faire la proposition.

Je ne crois pas que toutes les impressions de l’administration centrale montent à 7,000 francs. La somme réclamée est destinée non seulement aux impressions et à l’achat du papier mais encore aux frais de chauffage et éclairage et à l’entretien du mobilier. Ainsi, vous aurez beau recourir à l’adjudication publique pour les impressions, vous n’obtiendrez pas une diminution de 7,000 francs.

M. Dubus (aîné) – Messieurs, M. le ministre vient de faire l’énumération des objets auxquels s’applique le crédit maintenant en discussion, il a cité, entre autres, l’entretien du mobilier. Je sais qu’en effet le crédit de cette catégorie dans les différents ministères, comporte ordinairement plusieurs milliers de francs pour le renouvellement et l’entretien du mobilier ; mais je ferai observer que l’année même où l’on a meublé l’hôtel d’un ministère, il n’y a pas de dépense à faire pour le renouvellement et l’entretien du mobilier de ce ministère. Il me semble donc que de ce chef et pour cette année, le ministre aurait pu demander une augmentation moindre : néanmoins il a augmenté le crédit de l’année 1840 de toute la somme qui a été insuffisante pour le service de cette année ; mais si le crédit a été insuffisant pour cette année, c’est qu’il s’appliquait à un mobilier ancien qui exigeait des dépenses de renouvellement et d’entretien.

M. Desmet – Messieurs, la question qui s’agite a été décidée par une loi. Cette loi, si je ne me trompe, est de 1814. En vertu de cette loi, toutes les entreprises qui dépassent 500 florins doivent faire l’objet d’une adjudication publique. Un arrêté du 15 novembre 1815 a confirmé cette loi.

Voici l’article premier de cet arrêté :

« Art. 1er. A dater de ce jour, toutes les entreprises et travaux, et toutes les fournitures à faire à l’Etat, dont la dépense s’élève à plus de 500 florins, devront être faites par l’adjudication. »

L’article 10 porte en outre :

« Art. 10. La chambre des comptes refusera l’enregistrement de tous les mandats, à l’égard desquels on aura omis les dispositions détaillées dans le présent et les précédents articles, et elle se règlera sur ce point d’après le contenu de l’article 26 de son instruction, arrêtée par la loi du 9 juillet 1814. »

Je sais que souvent les marchés faits de la main à la main sont avantageux ; mais cependant la grande question du mode d’adjudication est résolue depuis longtemps. En France, et généralement dans tous les autres pays, on préfère le système d’adjudication publique, et à cet égard on a tort en Belgique de dévier de cette règle dont l’utilité ne peut être contestée.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Je demande pardon à la chambre de prendre une troisième fois la parole à propos d’une somme de 7,000 francs ; mais je dois répondre à une observation que vient de faire l’honorable M. Dubus, et qui, au premier abord, pourrait paraître sans réplique. Il a dit que le mobilier neuf du ministère n’exigera pas de renouvellement pour cette année, cela est vrai ; il n’y aura pas de ce chef à faire une grande dépense pour 1841 ; mais l’on sait que les bureaux des travaux publics ont été déplacés l’année dernière. Or, en pareil cas, l’on a à pourvoir à certaines dépenses de réparation, d’appropriation des meubles aux nouveaux locaux, et cette dépense compensera les économies qu’on pourra réaliser sur les frais d’entretien et de renouvellement du mobilier, cette observation répond, je pense, à celle de l’honorable M. Dubus.

M. de Puydt – Messieurs, l’honorable M. Desmet a cité une loi de 1814, relative aux adjudications publiques. Je ne sais jusqu’à quel point cette loi peut nous lier ; mais ce que je sais par expérience c’est que si une semblable loi était présentée était discutée, je doute qu’elle fût adoptée. L’on pourrait entrer dans beaucoup de détails qui prouveraient que dans les travaux publics, il n’y a pas, dans certains cas, de mode plus nuisible que celui de l’adjudication publique. L’on pourrait prouver à la chambre que le gouvernement a peut-être beaucoup plus perdu aux adjudications publiques qu’il n’y a gagné en apparence par les rabais.

Du reste, je crois que les motifs de la loi qu’on a citée, tiennent beaucoup plus à la défiance qu’on avait des estimations qui pouvaient être présentées par les ingénieurs ou par les architectes, qu’en l’opinion qu’on pouvait obtenir un meilleur mode d’exécution par l’adjudication publique.

- Le chiffre du gouvernement est mis aux voix et adopté.

Chapitre II. Ponts et chaussées; canaux, rivières, polders; bâtiments civils; personnel des ponts et chaussées

Section I. Ponts et chaussées
Article premier

« Art. 1er. Entretien des routes : fr. 1,550,180

« Salaires des préposés des ponts à bascule : fr. 29,820

« Etudes de projets, frais de levée de plans, etc. fr. 20,000.

« Travaux d’amélioration, réparations extraordinaires : fr. 1,000,000.

« Ensemble : fr. 2,600,000. »

La section centrale propose une réduction de 200,000 francs sur l’allocation relative aux routes.

M. Lange – Messieurs, depuis plusieurs années le conseil provincial du Hainaut appelle l’attention sérieuse de M. le ministre des travaux publics au sujet de la répartition des fonds destinés à l’entretien, amélioration et construction de routes pavées et empierrées. Aujourd’hui encore, il élève la voix et avec raison, je pense. En effet, je ne sais pourquoi la province du Hainaut doit être pour ainsi dire déshéritée ; alors qu’à elle seule, elle fournit peut-être la moitié du produit des barrières de toutes les autres provinces réunies.

Cette question de répartition est déjà vieille, disait-on dans notre dernière session. Elle est neuve pour moi, et je croirais manquer à mon mandat si je ne jetais pas un coup d’œil rapide sur cet objet. C’est assez vous dire que je n’abuserai pas de vos précieux moments.

L’article 225 de la loi fondamentale de 1815 pour le royaume des Pays-Bas porte :

« Les droits payés aux barrières sont affectés à l’entretien et à l’amélioration des fossés, canaux et rivières navigables. Les excédants, s’il y en a, demeurent réservés pour dépenses de même nature dans la même province, à l’exception des droits perçus sur les grandes communications du royaume dont l’excédant peut être employé aux mêmes fins là où le roi l’ordonne. »

Au mépris de cette disposition formelle du pacte fondamental, la loi du 27 décembre 1822, vint enlever ce droit distinct à chaque province et confondre tous les produits des barrières pour les engloutir dans l’abîme appelé alors le syndicat d’amortissement. C’était là un de griefs capitaux contre le gouvernement déchu. Lors de notre régénération politique le redressement en fut justement sollicité. Aussi ne se fit-il pas longtemps attendre. Le congrès national, par son décret du 6 mars 1831, article 3, fit revivre cet article 225 de la loi fondamentale de 1815, en statuant ce qui suit :

« Les droits payés aux barrières seront exclusivement affectés à l’entretien et à l’amélioration des routes ; l’excédant, s’il y en a, demeure réservé pour les dépenses de même nature dans la même province, à la seule exception des droits perçus sur les grandes communications qui seront employées là où le gouvernement l’ordonne et au remboursement des avances faites par le gouvernement précédent pour achèvement et construction de routes en Belgique. »

Comparez le texte de ce décret du congrès national avec le texte de l’article 225 de la loi fondamentale de 1815, et vous vous convaincrez que c’est absolument la même chose.

Le congrès a fait plus ; pour ne plus laisser aucun prétexte pour éluder sa volonté, pour qu’il y ait commencement de réparations de grief, en attendant la classification des routes que ce même décret promet, le congrès décide que les grandes communications du royaume sont les routes portées à la première classe dans les tableaux arrêtés. Ce régime dura deux ans. Vint alors la loi du 18 mars 1833 qui porte : « Art. 3. Les fonds provenant de la taxe des barrières sur les routes de 1er et de 2e classe seront versés dans le trésor de l’Etat, et seront affectés à l’entretien et à l’amélioration des routes, ainsi qu’à l’ouverture de nouvelles communications. Toutefois, les produits des barrières établies sur les routes de deuxième classe concédées aux provinces à des sociétés ou à des particuliers, continueront à leur être attribuées. »

L’article 4 porte : « Une loi déterminera ultérieurement la classification des routes. »

En attendant cette classification déjà décrétée en 1831 par le congrès national, que toujours au mépris de la loi, on proroge, classification néanmoins depuis si longtemps désirée, et qui doit faire la juste part de chacun n’est-il pas naturel de penser qu’il était entré dans l’intention des législateurs, eux qui avaient pris à tâche de faire disparaître à toujours le grief dont nous eûmes tant à nous plaindre sous le gouvernement de Guillaume ; n’est-il pas naturel de penser, dis-je, qu’il est entré dans leur intention que le produit des barrières, confondu dans le trésor de l’Etat, fût au moins réparti d’après les règles de la justice distributive ? Je viens de dire que les produits étaient confondus dans toutes ces voies de communication. En effet, force est à moi de reconnaître aujourd’hui ce caractère de généralité des revenus des barrières qui leur a été imprimé par la loi du 2 mars 1836, qui a ouvert a gouvernement un crédit de 6 millions de francs, pour construction de routes, et qui décide par l’article 2 que la dépense sera couverte au moyen d’un emprunt dont les intérêts et l’amortissement seront prélevés sur l’excédant du produit des barrières ? Mais de ces six millions de cet excédant du produit des barrières, ainsi de nouveau enlevé à certaines provinces, pour en constituer un fonds général, quelle est la répartition ?

Mandataire de la nation, je suis le premier à en convenir, cette répartition ne devait pas être purement mathématique, mais elle devait être juste. Là où il n’y aurait pas de route et où le besoin s’en faisait sentir, tant dans l’intérêt de la localité que dans l’intérêt général, on devait en faire. Mais ce n’était pas une raison pour ne pas en construire de nouvelle dans les provinces qui en possèdent déjà en grand nombre, lorsque déjà non seulement l’intérêt particulier de ces provinces, mais aussi l’intérêt du pays tout entier les réclamaient. Je dis du pays tout entier, parce qu’en facilitant les moyens de transport des productions de certaines provinces, productions qui se consomment dans tout le pays, c’est tout le pays qui profite de l’économie qui en résulte. Cependant le Hainaut, dont on ne peut méconnaître ni contester ni l’industrie, ni l’abondance des produits, fut à peine annoté pour mémoire dans la répartition de ces six millions. Ecoutons, en effet, l’organe du gouvernement dans la séance du sénat du 22 mai 1838, lors de la discussion de l’ensemble du projet relatif au crédit de deux millions, demandé pour construction de routes :

« Il me reste, messieurs, à déclarer que le gouvernement a eu dans le nouveau crédit un moyen de rétablir un certain équilibre entre les provinces, de faire quelque chose de plus pour les provinces, par exemple, qui contribuent dans une forte proportion à la formation de l’excédant du produit des barrières, provinces qui, jusqu’à présent, n’ont pas été les mieux traitées. »

En tenant ce langage, l’organe du gouvernement voulu sans contredit faire allusion à la province du Brabant, et surtout à la province du Hainaut. Et cet aveu, cette promesse de sa part n’était-elle pas la preuve irréfragable du fondement des réclamations de ces deux provinces ? De ce 2 nouveaux millions accordés au gouvernement, qu’obtint le Hainaut, jusqu’alors presque oublié ? La minime somme de 400 mille francs, somme tellement minime en raison des besoins de la province, que l’organe du gouvernement le reconnaissait lui-même, puisqu’à cause de cette allocation, il n’entendait pas restreindre à ce chiffre le concours du gouvernement dans l’établissement des routes dont la province avait besoin et la province attend encore !

J’ai promis de ne pas être prolixe. J’ai hâte de terminer, et ne puis mieux faire que d’appeler la sollicitude de M. le ministre des travaux publics sur une province qui, jusqu’à présent, a été presque totalement oubliée dans la répartition des fonds généraux, et le prier de ne pas lui refuser, dans les subsides, la quote-part à laquelle elle a droit d’après toutes les règles de l’équité et de la justice distributive. Comme il est de principe que qui veut la fin doit nécessairement vouloir les moyens, je voterai le chiffre pétitionné par le gouvernement.

M. Scheyven – Je désire appeler l’attention de M. le ministre des travaux publics sur la route de Beeringen à Maeseyck par Peer et Brée. Elle a été vivement réclamée par le district que j’ai l’honneur de représenter, et le conseil provincial, dans sa séance du 14 juillet, a chargé la députation permanente d’insister près du gouvernement, afin que l’exécution immédiate de cette route ait lieu.

Je ne sais ce qui s’est fait depuis. Je désire savoir si M. le ministre des travaux publics a ordonné les études nécessaires et préparatoires pour le tracé de cette route, et si on peut espérer que bientôt il sera donné suite à cette demande.

M. Raymaeckers – Je saisis également cette occasion pour recommander à M. le ministre des travaux publics la création des routes projetées depuis longtemps dans la province de Limbourg ; d’après les tableaux annexés au rapport présenté à la chambre le 4 février dernier, il paraîtrait que M. le ministre ne se propose de construire, dans la province de Limbourg, pendant les trois années de 1841, 1842 et 143 que la seule route de Hasselt à la Meuse. Si telle était son intention, ce serait bien mal récompenser cette province des sacrifices qui lui ont été imposés dans l’intérêt général du pays ; je le prie, en conséquence, de vouloir me donner quelques éclaircissements à cet égard, et je dois appeler particulièrement son attention sur une route de jonction dont l’enquête a été ordonné par arrêté du 25 mars 1840, et qui est destinée à lier les routes qui aboutissement à Saint-Trond avec celle de Hasselt sur Diest ; indépendamment de la grande utilité que cette jonction produirait à des localités qui ont été jusqu’à présent privées de communications, elle aurait ce double avantage de procurer un nouvel affluent au chemin de fer ; je sais que le génie militaire s’est opposé à la construction de cette route, mais d’après les renseignements que j’ai pris, cette opposition a été formée avant les fortifications de la place de Diest, lorsque toute cette partie du pays était découverte et pouvait, dans un temps donné, inspirer quelques craintes pour la défense du pays. Ces craintes et appréhensions n’existent plus, et si le conseil du génie était appelé à se prononcer un seconde fois sur ce projet, j’ai tout lieu de penser qu’il modifierait un avis qu’il a donné, il y a plusieurs années, sous l’influence d’un état de choses qui n’existe plus. Je ferai, au surplus, observer à M. le ministre des travaux publics que l’opposition du génie militaire à la construction de la route dont il s’agit n’a jamais été absolue ; le conseil a, en effet, signalé quelques inconvénients contre la direction de la route sur la commune de Herck, mais il a eu soin d’indiquer lui-même une autre direction qui ne diffère guère de celle du département des travaux publics et contre laquelle il n’existe pas la moindre opposition, de sorte que je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir donner suite au projet de cette route, dont la dépense ne pourrait être très élevée.

Avant de terminer, je recommanderai également à M. le ministre de continuer les études d’un projet de route de Hasselt à Maestricht par Bilsen, afin de combler un jour la lacune qui existe encore entre les routes qui partent de l’intérieur de la Belgique, et l’étendre jusqu’à la Prusse ; en faisant disparaître cette solution de continuité depuis Hasselt jusqu’à Maestricht, il existera une communication directe depuis la ville de Louvain jusqu’à Aix-la-Chapelle. Cette communication facilitera nos relations avec l’Allemagne et particulièrement avec la Prusse et le pays cédé à la Hollande.

M. Dubois – Messieurs, à l’occasion du chiffre du budget qui nous occupe, et à l’exemple de quelques-uns de mes honorable collègues, je prends la parole à mon tour et je demande un instant votre attention et celle particulière de M. le ministre des travaux publics.

J’ai aussi une demande à faire au gouvernement, et je saisis cette occasion pour appeler l’attention du ministre sur ce qui est nécessaire à l’arrondissement que j’ai l’honneur de représenter ici : à l’arrondissement de Furnes, un des plus riches du royaume par son travail et sa bonne culture, et un des plus pauvres et des plus négligés sous le rapport des chemins publics et des bonnes communications.

Je veux parler de la construction du pavé projeté de la commune de Rosbrugge, frontière de France, au pavé de première classe d’Ypres à Furnes.

C’est un ouvrage d’un mérite incontestable et d’une utilité éminente. Le plan et la description du pavé à construire sont arrêtés. Le génie civil, qui s’en est occupé, a reconnu toute l’importance de l’entreprise. La ville de Furnes et les communes intéressées ont résolu d’y concourir ; ils ont offert, pour y subvenir et pour en payer la dépense, des sacrifices énormes, et la province de la Flandre occidentale, reconnaissant la nécessité et l’opportunité de cette nouvelle route, a consenti à entrer pour une grande part dans les frais de sa confection.

Qu’il me soit permis de le dire en passant, messieurs : je sais qu’il y a des provinces où les subsides votés par les communes se réalisent et rentrent difficilement, où l’Etat a du mal à réaliser les sommes promises, où les communes résistent encore et répondent difficilement aux engagements auxquels elles se sont soumises de concourir dans les frais de construction ; et qu’ainsi l’Etat se trouve quelquefois trompé et fort embarrassé dans ses spéculations, alors que le concours promis par les communes intéressées lui manque et lui fait défaut. Mais il n’en est pas ainsi dans nos Flandres et dans l’arrondissement que j’ai l’honneur de représenter surtout. Les communes, avant de se charger, ont bien examiné leurs ressources, elles se sont cotisées d’avance ; et quand le moment de satisfaire à leurs engagements est venu, quand le trésor réclame, elles sont prêtes, elles s’empressent de répondre à l’appel qui leur est fait, et elles peuvent satisfaire sans observations ni chicane au paiement intégral des sommes voulues qu’elles se sont imposées à elles-mêmes.

Tous les engagements pris jusqu’ici ont été fidèlement remplis par nos communes. Je suis persuadé que l’Etat est fort tranquille à leur égard, qu’il compte sur leur sérieux concours, qu’il acceptera avec confiance les nouveaux engagements, et qu’il peut être tranquille sur l’avenir.

Pour achever une communication aussi importante et dont la nécessité est reconnue par les intéressés, comme par le gouvernement, il ne manque dont plus que sa bonne volonté et son libéral concours ; j’espère qu’il ne nous fera pas faute. Ensuite, de quelques entretiens particuliers que j’ai eus à ce sujet avec l’honorable ministre des travaux publics et quelques employés supérieurs de son département, j’ai lieu de croire que nos raisons seront appréciées, que l’utilité de la route que je réclame pour mon arrondissement et que la nécessité sont reconnues, et que mes commettants que j’ai l’honneur de représenter ici et pour lesquels je pale, ne tarderont pas à voir le gouvernement se mettre à l’œuvre et parfaire un ouvrage qui est reconnu d’utilité publique, qui doit doubler le mouvement et la vie dans un des plus riches cantons agricoles de la province et du royaume ; qui doit répondre à des nécessités incontestables et satisfaire enfin à des vœux exprimés depuis de longues années par toute une population agricole et laborieuse.

Mes commettants et moi, nous nourrissons l’espoir que le gouvernement ne tardera pas à satisfaire à une nécessité et à des vœux aussi légitimes ; que vers la saison prochaine, il fera, pour montrer ses bonnes intentions, commencer la route projetée et depuis si longtemps réclamée.

Au surplus, la somme demandée, le subside nécessaire n’est pas considérable. Il s’agit, messieurs, d’une somme de 100,000 ou 120,000 francs au plus. L’arrondissement de Furnes paye depuis des siècles et paye de grandes contributions à l’Etat ; il s’est toujours fidèlement acquitté de ses charges ; jamais il n’a obtenu qu’une bien faible part dans les bénéfices des travaux d’utilité publique qui se sont fait ailleurs dans le royaume. J’ai le droit, et je le fais avec conscience de faire cette demande à M. le ministre et de lui recommander une attention particulière pour les intérêts de mon arrondissement, et j’ose espérer que la chambre m’écoutera avec quelque faveur.

Messieurs, je voterai pour le chiffre demandé par le ministre. Je ne partage pas entièrement les craintes exprimées par certains de nos collègues. Je ne désespère pas encore de l’état futur de nos finances. Avec du zèle, au moyen de mesures prudentes, avec quelques ressources nouvelles et opportunes, il y aura moyen je le pense, d’assurer et de consolider l’avenir et je suis persuadé que pour le présent, il faut se soumettre à quelques nécessités, qu’il faut consentir à quelques sacrifices pour maintenir le pays dans la voie du progrès commercial et agricole ; dans la voie des améliorations matérielles, pour soutenir les populations travailleuses et pour encourager cette tendance universelle au perfectionnement et au bien-être, qui dans notre beau pays se manifeste de toute part.

M. Mast de Vries – Chacun parle ici pour son saint. Vous ne seriez donc pas étonnés de m’entendre parler pour ma paroisse, moi qui habite une localité située dans le voisinage de la Campine. Mais ce n’est pas mon intention. J’ai demandé la parole pour répondre à ce qui a été avancé par un député du Hainaut, M. Lange. Cet honorable membre s’est plaint de ce que le gouvernement n’employait pas assez de fonds à la construction de routes dans le Hainaut. Il a appuyé son opinion sur ce que le produit des barrières était plus considérable dans cette province que dans les autres. Il en a conclu qu’elle devait prendre dans ce fonds affecté à la construction des routes une part plus grande que les autres provinces. Cet honorable membre a sans doute oublié les décisions prises antérieurement par la chambre : on a décrété deux chemins de fer dans cette province, une route vers Mons, et une autre en construction vers Tournay. On pourrait être moins exigeant lorsque les autres provinces ne jouissent d’aucune de ces facilités. Cet honorable membre devrait se rappeler que cette province est dotée en outre d’une ligne de canaux et récemment encore du canal d’Espierres. Les provinces qui n’ont rien de tout cela sont sans doute mieux fondées à réclamer.

Il n’est pas juste de demander que les fonds perçus dans le Hainaut, pour produit des barrières, soient employés à la construction de routes dans cette province ; car ce n’est pas le Hainaut qui paye cet impôt, mais nous qui avons besoin de ses produits. On a donc très mauvaise grâce à réclamer dans ces fonds une part plus forte que les provinces qui n’ont pas de routes, et qui peuvent dire payer la large part des barrières.

Toujours on parle de la Campine. Mais que fait-on pour cette partie du pays ? Rien du tout. La route de Turnhout à Diest se fait avec une lenteur sans pareille. Quant aux autres routes en construction, elles sont faites par la province, avec de légers subsides du gouvernement. Je sais que le gouvernement est obligé de n’accorder que de légers subsides, pace que les fonds qui sont à sa disposition ne sont pas très considérables. Cependant s’il y a des parties du pays qui n’ont pas de routes, comme la Campine anversoise, la Campine limbourgeoise et le Luxembourg, si nous formons un pays, si nous sommes tous Belges, ne faut-il pas qu’après avoir doté certaines provinces de routes et de canaux on mette les autres sur le même pied ?

M. Sigart – Le Hainaut n’a rien du tout.

M. Mast de Vries – Si le Hainaut dit encore n’avoir rien du tout, il est bien exigeant ; car on a décrété des chemins de fer en sa faveur, tandis que la province d’Anvers n’a et n’aura pour ainsi dire, rien. Elle n’a presque point de routes pavées, pas de canaux et seulement 3 lieues de chemin de fer. Cette province est de tout le pays celle qui est le moins bien dotée comparativement à son importance et à ses produits au trésor.

J’espère que M. le ministre des travaux publics, qui la connaît aussi bien que moi, ne contestera pas ce que j’avance.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – Je demande la parole.

M. Mast de Vries – Je ne demande pas telle ou telle route, dans l’intérêt de quelques localités. Je parle dans l’intérêt général des localités qui en sont dépourvues. En résumé, messieurs, je ne pense pas que ce soit au profit d’une province qui a des routes, des canaux et des chemins de fer qu’on doive appliquer le produit des barrières perçu dans cette province, mais payé par les habitants des provinces qui ont besoin de ses articles. Je me borne à appeler l’attention du gouvernement sur un système général dont on a parlé souvent pour la Campine, à moins qu’on ne veuille s’en souvenir que lorsqu’il s’agit d’y envoyer des troupes pour la démoraliser. Jusqu’aujourd’hui on n’a presque rien fait dans son intérêt.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – L’honorable préopinant m’a fait un appel, et il a pensé que je partageais entièrement sa manière de voir sur l’abandon où la Campine est laissée depuis longtemps. Je crois que l’honorable préopinant a un peu perdu de vue ce qui a été fait pour la Campine. Je sais qu’il reste beaucoup à faire (je l’ai déjà dit, et je le répète encore) pour ces intéressantes contrées, connues sous le nom de Campine limbourgeoise et anversoise. Mais dire que rien n’a été fait, que rien ne se fait, c’est manquer de mémoire et de justice.

Dans la province d’Anvers, à laquelle l’honorable préopinant a fait allusion, je citerai, à ma connaissance, exécutée dans ces derniers temps, d’abord une route de l’Etat de Turnhout à Diest. On dit que cette route s’exécute avec une lenteur sans pareille. Je crois que c’est inexact ; car j’ai donné des ordres pour que les travaux soient activés autant que possible. Peut-être a-t-on plus fait en un an qu’on n’avait fait depuis dix. Je crois que d’ici à peu de temps cette route sera terminée ; elle aura coûté une somme considérable.

Indépendamment de cette route de l’Etat, un grand nombre de routes sont exécutées, à la vérité, par la province ; mais l’Etat contribue aux dépenses par des subsides.

Ainsi, pour parler de la localité où l’honorable représentant est bourgmestre, je citerai les routes de Lierre à Aerschot et de Lierre à Herenthals. La route d’Herenthals a été continuée sur Gheel, et si des oppositions puisées dans l’intérêt de la défense militaire ne m’en empêchent pas, elle le sera sur Moll et Meerhout. Il y a en outre la route de Oostmale à Hoogstraeten, celle de Malines à Heyst, et enfin celle de Heyst à Zammel, pour laquelle les fonds sont faits. Voilà un grand nombre de routes nouvelles dans la province d’Anvers.

Je ne dis pas que cela soit suffisant. Je crois qu’il reste beaucoup à faire dans cette province. Mais dire qu’on n’a rien fait, c’est manquer d’exactitude.

Je ne sais si d’honorables orateurs se proposent de prendre la parole pour rappeler à l’attention du gouvernement des routes qui intéresseraient leurs localités. Je reconnais qu’ici l’esprit de localité peut sans inconvénient exercer son influence sur l’esprit de chacun des membres de la chambre. Mais je dois dire que si le gouvernement devait donner suite au quart seulement des routes qui viennent d’être demandées, le chiffre d’un million serait de beaucoup insuffisants.

Le gouvernement a pris des engagements pour 2,700,000 francs. Il sera donc nécessaire, pour remplir ses engagements, de reproduire le crédit de cette année en 1842 et 1843. Nous répartitions ainsi sur trois exercices le montant des engagements pris.

En dehors de ces engagements, il y a beaucoup de routes dont l’instruction est terminée. Il en est plus encore dont l’exécution est réclamée par des provinces, des commune sou des particuliers.

La section centrale propos de réduire le crédit d’un million à 800,000 francs. Elle l’a fait parce qu’elle ne veut pas faire coïncider cette augmentation de dépense avec une augmentation d’impôt. Je crois que la section centrale a agi dans de bonnes intentions. Je ne me propose pas de combattre à outrance cette réduction. S’il est alloué 200,000 francs de moins, ce sera deux lieues de route de moins que le gouvernement fera exécuter. Ce ne sera pas pour lui un grand dommage. Je craindrais cependant, si j’admettais une telle réduction, de mal répondre aux réclamations d’un grand nombre de localités. C’est donc une réduction que j’abandonne en quelque sorte à l’appréciation de chacun d’entre vous. En même temps qu’on demande une réduction sur le crédit demandé, chaque membre réclame l’exécution de telle ou telle route. Ces deux opinions sont complètement inconciliables. Je le répète, j’abandonne à votre appréciation, messieurs, l’admission ou le rejet de la proposition de la section centrale. Je demanderai seulement que si l’on veut introduire une réduction, on ne la fasse au moins que de 100,000 francs, de telle manière que nous arrivions à 900,000 francs, somme qui forme précisément le tiers des 2,700,000 francs pour lesquels des engagements sont pris par le gouvernement. Nous aurions donc trois ans pour remplir ces engagements.

M. Pirson – Messieurs, au point où la discussion est arrivée, je crois que nous pourrions aller aux voix sur les chiffres seuls en discussion, c’est-à-dire le chiffre de 1,000,000 et cela de 800,000 francs proposé par la section centrale. D’après tout ce qui s’est dit ici, il est facile de voir que le gouvernement ne pourra donner satisfaction à tous ceux qui désirent des travaux dans leur localité, et qu’il lui faudrait pour cela un subside bien plus élevé qu’un million.

Ainsi, tous ceux qui réclament, et je crois qu’il n’est pas un seul membre de cette assemblée qui fasse autrement, doivent voter pour le million pétitionné par le ministère, puisque cette somme sera bien inférieure aux besoins.

Cependant, comme beaucoup de membres ont parlé de leur localité, je parlerai aussi un peu de la mienne ; cela m’est bien permis aussi.

Nous autres, nous avons peu de choses à demander au gouvernement en fait de routes neuves ; nous n’avons pour l’arrondissement de Dinant qu’une demi-lieue de route à réclamer ; nous l’avions demandée depuis trois ans au gouvernement ; je vous en ai déjà dit quelque chose. Il y avait engagement pris par deux ministres, MM. d’Huart et Nothomb.

Je ne parle que d’une demi-lieue, parce qu’il n’y a qu’une demi-lieue à construire dans la province de Namur. Il y a une lieue et demie à construire sur le Luxembourg ; mais je n’en dirai rien. Je ne sais si M. d’Hoffschmidt a trouvé mauvais ou déplacé ce que j’avais dit ; on le croirait à voir le soin qu’il a pris à excuser le ministère, en disant qu’il ne faisait pas tout ce qu’il voulait.

Si j’avais manqué au ministère, je serais le premier à lui demander humblement pardon. Mais je ne crois pas lui avoir manqué en rien ; ainsi je rengaine mon compliment.

Maintenait, je dirai que nous avons beaucoup de travaux d’améliorations à faire de Namur jusqu’en amont du pont de Dinant. Il y a, messieurs, des endroits si périlleux que, cette année encore, une diligence a versé dans la Meuse au commencement de l’hiver. La diligence a été perdue ; le conducteur, je crois, est mort. Je n’ai d’ailleurs pas de détails positifs, parce que j’étais ici quand cela est arrivé.

Il y a des garde-corps à établir et qui sont extrêmement nécessaires en amont du pont de Dinant. Ces garde-corps doivent être faits en pierres et en partie en murs. Je citerai entre autres une partie de la route que parcourt souvent le Roi. Le Roi lui-même m’a dit que, dans certains moments, il ne passait pas dans cet endroit sans trembler ; ainsi d’autres encore peuvent trembler.

Je vous entretiendrai encore d’une demande qui avait été faite par mon honorable ami M. Seron. Il vous avait parlé d’une route à construire, ou plutôt à terminer, car les terrassements avaient été faits sous le gouvernement français, route qui relierait Philippeville à Givet. Elles se rattacherait aux routes du Hainaut, et dès lors j’espère que les honorables députés de cette province ne s’opposeront pas à la construction que je réclame. Car alors tout le commerce de Givet traverserait une partie du Hainaut, parce que tout le commerce de Givet se porte sur Lille, Valenciennes et Dunkerque. Il s’établirait donc un commerce de transit de Givet sur Philippeville, de Philippeville sur Beaumont, etc.

Le député de Philippeville, l’honorable M. de Baillet, ne prend pas la parole dans cette circonstance parce que, m’a-t-il dit, comme cet embranchement de route traverserait ses propriétés, on pourrait croire qu’il parle non par esprit de localités, mais par intérêt personnel. Quant à moi, on ne peut m’accuser de parler par intérêt personnel. Je dirai, en passant, que M. de Baillet se montre généreux ; car il consentirait à céder tous les terrains nécessaires pour faire cette route.

Voilà ce que j’avais à vous dire relativement au subside d’un million que vous demande le gouvernement. Je ne pense pas qu’il puisse y avoir deux opinions ici, et je dirai, comme les précédents orateurs, que nos affaires ne sont pas en si mauvais état qu’on doive craindre d’employer un million ou deux, lorsqu’il s’agit de dépenses productives. Toutes les fois que l’administration fera des dépenses aussi productives que celles employées aux routes, elle n’aura pas de reproche à encourir.

Ce n’est rien que l’augmentation des contributions en comparaison du travail donné aux ouvriers et des produits que retire le pays de telles constructions. Les économies qu’il faut faire ce sont des économies relativement au luxe et aux dépenses inutiles, et sans doute il y en a beaucoup.

J’espère qu’un jour on parviendra à déblayer cette partie de notre budget, et que nous en viendrons à des budgets normaux. C’est ce que nous examinerons plus tard, si toutefois la bonne union peut se rétablir ici.

M. d’Hoffschmidt – Je demande la parole pour un fait personnel.

L’honorable M. Pirson a demandé si j’avais trouvé mauvais ce qu’il a dit des promesses faites par un ministre, promesses qui n’auraient pas reçu d’exécution.

Loin de moi, messieurs, de me permettre de trouver mauvais ce que dit notre honorable collègue. Au contraire, je me plais à reconnaître que M. Pirson, chaque fois qu’il s’est agi des intérêts de nos provinces du Luxembourg, a toujours été un de nos appuis les plus fermes. Même avant la révolution, lorsque M. Pirson siégeait aux états-généraux, il a élevé plus d’une fois la voix en faveur du Luxembourg.

Je n’ai donc garde de trouver mauvais les allégations de l’honorable M. Pirson, relativement à ce qui se serait passé entre lui et un ministre.

Ce que j’ai dit des intentions d’un ministre, ne s’appliquait qu’à l’honorable ministre des travaux publics, M. Rogier, dont je crois les intentions excellentes. J’ai dit que ses promesses ne pouvaient pas se réaliser, parce que, comme on le voit dans cette enceinte, on réclame de toutes parts des routes, et qu’il est impossible de faire droit à toutes les réclamations.

M. de Theux – Messieurs, c’est avec plaisir que je verrai doter nos provinces de communications nouvelles, qui tendent de plus en plus à augmenter leur prospérité ; mais avec cette double restriction que les ressources de l’Etat le permettent et qu’on observe les principes de justice distributive.

Je crois que personne ne contestera qu’il y a justice distributive à avoir égards aux besoins des provinces qui ont le moins de moyens de communication et le moins de ressources pour en créer. Ces provinces sont le Limbourg et le Luxembourg. Personne ne contestera que ces provinces, ayant perdu une grande partie de leurs relations commerciales, ont de ce chef acquis un titre spécial à invoquer.

Un honorable député a établi la discussion uniquement sur la construction des routes. Mais, messieurs, il faut considérer l’ensemble des moyens de communication dont chaque province est dotée, et sous ce rapport cet honorable membre n’aurait pas dû méconnaître que le gouvernement s’était obéré d’une charge de 13 millions pour le rachat de la Sambre canalisée, plus d’une somme considérable pour le perfectionnement des travaux ; et que jusqu’à présent elle ne donne pour ainsi dire aucun produit à l’Etat.

Il n’aurait pas dû méconnaître qu’il a été décrété trois chemins de fer pour sa province : un embranchement de moindre importance pour relier Tournay avec le chemin de Gand à Lille, et deux chemins très considérables ayant pour objet de relier Charleroy et Mons avec la capitale, Namur et la France, chemins qui coûteront des sommes énormes au trésor, et dont le produit est encore problématique.

Je pense donc que cet honorable membre a eu tort de s’élever avec tant de chaleur contre une prétendue injustice qui aurait été commise à l’égard de sa province.

Il résulte des tableaux fournis par M. le ministre des travaux publics, que la province de Limbourg seule réclame 32 routes. Je signale ce fait à l’attention de la chambre, non que j’aie le moindre espoir de voir allouer la somme nécessaire à la construction de toutes ces routes, mais comme une indication des besoins nombreux de cette province.

Plusieurs orateurs ont signalé en particulier les besoins de la Campine. Ces besoins sont évidents. Ce n’est que par le moyen de routes qu’on peut parvenir au défrichement d’une partie considérable de terrains encore incultes.

Personne n’ira porter les capitaux là où il n’y a pas de moyens de communications. Au contraire, quand il y aura des moyens faciles de communications, vous verrez les capitaux affluer dans ces localités pour des constructions, des défrichements ; et ce pays s’élèvera au degré de prospérité qu’il lui est donné d’atteindre.

Cependant, messieurs, en fait de routes à construire dans la Campine, je crois qu’il faut apporter de l’économie dans les constructions. Ainsi, pour la route de Hasselt à Maeseyck, j’appellerai l’attention de M. le ministre sur le point de savoir si on ne pourrait construire une partie de cette route en gravier, vu la proximité de la Meuse. Il pourrait peut-être résulter de ce chef une économie qui pourrait être employée à la construction d’une autre route utile à cette province.

L’honorable M. Raymaeckers a signalé une route sur laquelle une enquête a été faite, et a été favorable ; c’est celle qui lierait Saint-Trond et Diest par Herck-la-Ville. Cette route serait avantageuse aux provinces de Limbourg et de Brabant ; elle concerne même jusqu’à un certain point la province d’Anvers en ce qu’elle mettrait la route de Turnhout en communication avec le Limbourg.

Il ne me reste plus qu’un mot à dire sur la proposition de la section centrale. Lorsque la section centrale a délibéré, elle n’avait pas sous les yeux le rapport qui nous a été distribué par M. le ministre, où se trouve l’état des engagements déjà contractés et le relevé des sommes nécessaires pour y satisfaire. Chaque membre de la section centrale demeurera donc libre de modifier, s’il le juge à propos, son opinion en conséquence de la communication de ce tableau.

Mais il est une autre considération qui m’a frappé et qui, je crois, a frappé d’autres membres de la section centrale ; c’est que, dans mon opinion, en allouant des sommes considérables pour la construction de routes et pour l’amélioration de voies navigables, l’exécution de ces travaux restait subordonnée aux ressources qu’on pourrait se créer encore. Car, s’il devait résulter de tous ces travaux un augmentation de déficit, si le gouvernement ne parvenait pas à améliorer les recettes d’une manière suffisante, je crois que, lors même que les dépenses seraient votées, il agirait prudemment en suspendant au moins partiellement l’exécution des travaux, en attendant que des ressources fussent créées. C’est dans ce sens que j’ai voté sur les allocations contestées par la section centrale.

M. de Villegas – J’accorderai au gouvernement la somme d’un million qu’il demande pour entretien en constructions de routes.

Les explications données, il y a quelques instants, par M. le ministre des travaux publics, et celles qui se trouvent dans les développements du budget et dans les pièces à l’appui, distribuées à l’assemblée m’ont paru justifier de la manière la plus complète, la demande de majoration de crédit et démontrer à toute évidence, que les dépenses qui concernent l’amélioration des voies de communication sont aussi utiles que productives.

J’applaudis à la résolution prise par M. le ministre des travaux publics, de faire tous ses efforts pour améliorer les voies de communications de ce pays. Je l’engage à persister dans cette résolution ; il peut compter d’avance sur l’assentiment de ceux qui voient dans les dépenses autre chose qu’une question d’argent, et ne se laissent pas dominer par des vues étroites, essentiellement ennemies de la prospérité publique.

Je n’ai pas demandé la parole pour réclamer une part dans le crédit d’un million, pétitionné par le gouvernement, attendu que la route qui concerne l’arrondissement que je représente ici, n’est encore qu’en projet. J’ai l’honneur d’appeler l’attention de M. le ministre sur le projet de router de Nederbrackel à Renaix. Cette route, qu’on peut nommer route de civilisation, est destinée à parachever celle de Bruxelles à Lille par Tournay, elle doit traverser grand nombre de communes flamandes entièrement dépourvues de toutes voies de communications, seules propres à fertiliser notre pays, si riche en produits agricoles, et passer par Renaix, foyer d’une population active, laborieuse et industrielle.

Il suffira d’avoir fait ressortir les bienfaits que la route projetée doit procurer à l’arrondissement d’Audenarde, pour être convaincu que M. le ministre des travaux publics ne les perdra pas de vue.

(Moniteur belge n°52 du 21 février 1841) M. Zoude – Messieurs, j’ai peu à ajouter à ce qui a été dit par mes honorables collègues du Luxembourg, et je n’aurais probablement pas pris la parole, si le rapporteur de la section centrale, dans son discours prononcé à la fin de la séance d’hier, n’avait proféré des erreurs que je ne puis passer sous silence.

Il a établi un parallèle entre les prétendues faveurs dont nous avons été l’objet, et l’abandon dans lequel, dit-il, sa province a été délaissée.

Jusque-là, j’avais cru que lorsqu’on avait un intérêt commun à solliciter des secours, on ne devait pas commencer par des récriminations, et il avait à cet égards des conseils à prendre dans les discours prononcés par les honorables MM. de Nef, de Renesse et Lejeune.

Mais, puisqu’il a plu à M. le rapporteur d’entrer dans une autre voie, il aurait dû au moins se piquer d’exactitude dans les faits qu’ils a avancés.

Le Luxembourg, a-t-il dit, a eu 69 lieues de route, lorsque la province d’Anvers n’en a eu que 23. Mais l’honorable rapporteur a-t-il oublié qu’alors la province du Luxembourg était en étendue trois fois plus grande que celle d’Anvers, que dès lors il y a égalité proportionnelle dans les routes qui leur ont été accordées.

Mais ce à quoi il n’a pas fait attention, c’est qu’une lieue de route dans son pays coûte autant que 4 ou 5 chez nous. Sa province a donc été, pécuniairement parlant, quatre fois au moins plus avantagée que celle du Luxembourg.

Mais nous irons plus loin et nous demanderons à M. le rapporteur quelles étaient les routes les plus utiles à construire, dans l’intérêt général, et examinant ce que chacun des deux pays peut fournir aux besoins du royaume, nous trouvons que dans sa localité, ce ne sera que dans un avenir assez éloigné que les produits du sol pourront livrer quelque chose aux cantons voisins. En effet, sur ce sol il ne croît que des bruyères ; des céréales à la vérité, pourront les remplacer à la longue, mais sous le gazon ne se rencontre pas un atome de terre végétale, aucune autre substance minérale qu’un sable sec et aride, dans lequel se complaît cependant le sapin qu’on y rencontre çà et là.

Dans le Luxembourg, au contraire, on voit presque partout de vastes et riches forêts dont les produits, s’ils étaient facilement transportables, fourniraient abondamment à la Belgique du bois propre à tous les genres de bâtiments civils et navals.

Sous nos bruyères se trouvent des mines inépuisables de fer, l’on y trouve du marbre, du plomb, des ardoises, les meilleures de l’Europe et d’un prix moins élevé que celle de France.

Parlerai-je de son plâtre, dont la quantité est telle qu’elle pourrait fournir aux besoins du monde entier pour des milliers de siècles. Mais arrêtons-nous ! La partie où sont les richesses nous a été enlevée, elle est habitée par des frères que nous avons abandonnés !

Nous laisserons ce champ de récriminations et nous établirons un parallèle plus vrai, celui du Luxembourg au moment de la révolution et ce qu’il est depuis.

Avant la révolution, nous avions en construction un canal qui aurait été une merveille de l’époque, il devait se développer sur une étendue de 60 lieues, et le projet qui en avait été conçu paraissait tellement gigantesque qu’on avait regardé d’abord son exécution comme impossible.

Mais il était réservé à un de nos honorables collègues de résoudre ce problème, honneur à M. de Puydt, c’est lui qui est le véritable inventeur du projet, parce que c’est lui qui a démontré la possibilité de l’exécution.

Eh bien, ce canal qui devait être d’une utilité immense pour le Luxembourg l’était également pour tout le royaume, auquel il devait fournir économiquement nos nombreux produits, et cependant sans la révolution, ce canal eût été achevé en 1832, et par un embranchement qui traversait la province dans sa largeur, il devait relier les deux rivières de l’Ourthe et de la Liesse.

Tout cela est perdu maintenant et peut-être à jamais.

Des routes avaient été également décrétées, et celles que le gouvernement a fait construire récemment, auraient été livrées à la circulation il y a longtemps.

Ce n’est pas dans l’intérêt seul du Luxembourg que le roi Guillaume avait ordonné tous ces travaux, mais bien dans l’intérêt général du royaume.

Nous avions donc, sous le rapport du bien-être matériel, bien peu de griefs à reprocher à ce souverain ; cependant nous n’avons pas été de derniers à venir au secours de la patrie. Nos enfants sont accourus à 50 lieues pour combattre pour l’indépendance ; le sang de ces braves a rougi tous les champs de bataille qui ont assuré le triomphe de la révolution, leurs cendres reposent à la place des Martyrs.

Qu’opposera à ce dévouement le rapporteur de la section centrale ?

Messieurs, je m’arrête par respect pour la chambre, je crois en avoir dit assez pour espérer qu’elle reconnaîtra nos droits légitimes à une indemnité.

Tout ce que nous demandons, nous étions dans la voie d’en jouir avant la révolution.

Mais notre vœu n’est pas égoïste, nous réclamons la même bienveillance pour les provinces et les localités qui sont en souffrance.

M. le ministre a mis en première ligne les provinces du Limbourg et du Luxembourg, nous nous abandonnons à ses promesses avec la plus entière confiance.

(Moniteur belge n°51 du 20 février 1841) M. Dolez – Je ne comptais point, messieurs, prendre la parole dans ce débat, sachant par expérience que le pétitionnement général auquel on est livré chaque année à l’occasion de la discussion du budget des travaux publics, n’amène aucun résultat, le ministre restant toujours libre, comme il doit l’être, de juger quelles sont les voies de communication qui conviennent le plus aux intérêts généraux du pays. Ce n’est point pour demander, à mon tour, quelque chose que je romps le silence, mais pour répondre aux injustes attaques qui ont été dirigées contre la province à laquelle j’appartiens, par l’honorable M. Mast de Vries.

Avec un peu plus de connaissance des faits, avec la moindre connaissance des localités, cet honorable membre eût bientôt reconnu que tout était faux, essentiellement faux, dans le langage qu’il a tenu tout à l’heure.

Il a commencé par dire que le Hainaut aurait mauvaise grâce de se plaindre, puisque là les routes abondent, que là mille sacrifices divers ont été faits par l’Etat.

L’honorable membre ne sait-il pas que toutes les routes de cette province, à très peu d’exceptions près, ont été construites aux frais de nos villes ? Sait-il que nos villes paient encore, à l’heure qu’il est, les intérêts des capitaux qu’elles ont consacrés à la création de ces routes ? Sait-il que pendant qu’elles supportent encore toutes ces charges, l’Etat emporte les produits des routes qu’elles ont construites, produits qui devraient cependant être employés au remboursement des capitaux qui ont été empruntés pour ces routes ?

L’honorable membre prétend que c’est à tort que nous invoquons les produits immenses des routes du Hainaut comme devant amener pour cette province une attribution favorable dans l’emploi de ses produits ; et cela pourquoi ? parce qu’il soutient que ce sont les autres provinces qui viennent payer le droits de barrière chez nous. L’honorable M. Mast de Vries n’aperçoit pas qu’il fait ici la guerre à un des griefs les plus graves que la Belgique élevait contre la Hollande avant 1830. A cette époque, quelle était une des plaintes les plus sérieuses que la Belgique articulait contre la Hollande ? C’était que le produit de nos barrières servait presqu’exclusivement à l’entretien et à la construction des digues hollandaises. Il eût été facile et commode de dire alors, comme l’honorable M. Mast de Vries l’a dit tout à l’heure, que c’étaient les Hollandais qui consommaient en partie nos houilles, nos fers, nos marbres, nos pierres, et qu’ils payent nos droits de barrière, que par conséquent il était tout naturel que le produit de ces barrières fût employé en Hollande. Cependant la Belgique n’en a pas jugé ainsi ; il est si vrai, messieurs, que c’était là un des griefs les plus sérieux de la Belgique contre la Hollande que dès l’une des premières séances le congrès national proclama ce principe qui a été invoqué tout à l’heure par mon honorable collègue, M. Lange. Le congrès national, dans sa séance du 6 mars 1831, porta relativement aux droit des barrières, un décret dont voici un passage des plus significatifs :

« Les droits payés aux barrières sont exclusivement affectés à l’entretien et à l’amélioration des routes ; l’excédant, s’il y a lieu, demeurera réservé pour des dépenses de même nature dans la même province. » (l’entendez-vous, M. Mast de Vries ? « dans la même province ») à la seule exception des droits perçus sur les grandes communications du royaume, dont l’excédant peut être employé aux mêmes fins là où le gouvernement l’ordonne et au remboursement d’avances faites sous les gouvernements précédents pour l’achèvement et la construction des routes de la Belgique. »

Ce n’était donc que pour une seule exception, pour les grandes communications, que l’on pouvait distraire de la province les fonds produits par les barrières qui y sont situées. Le congrès national reconnaissait dans le principe qui a été invoqué tout à l’heure pour le Hainaut et l’honorable M. Mast de Vries a par conséquent tort de dire que c’était invoquer un principe que rien ne justifie, que de demander qu’on consacre à notre province le produit des barrières qui y sont situées.

Déjà à différentes reprises nous avons eu l’occasion de faire entendre nos plaintes sur la manière dont l’excédant du produit des barrières était employé. Il y a un peu plus d’un an, lorsque M. le ministre des travaux publics réclamait un nouveau crédit de deux millions pour la création de routes nouvelles, nos réclamations s’étaient encore fait entendre ; eh bien, alors on nous avait fait la promesse d’appliquer le principe que nous réclamons aujourd’hui. Voici ce que disait l’honorable M. Nothomb dans une séance du mois de janvier 1840 :

« Le gouvernement fera quelque chose de plus pour les provinces qui contribuent dans une forte proportion à la formation de l’excédant du produit des barrières, provinces qui jusqu’à présent n’ont pas été des mieux traitées. »

Eh bien, messieurs, cette promesse, on ne l’a point tenue, ou si on a eu l’air de le faire, c’est d’une manière tellement insignifiante, que le pourrais peut-être la qualifier de dérisoire.

L’honorable M. Mast de Vries pense encore non seulement qu’il y a dans le Hainaut toutes les routes désirables, mais même qu’il y en a plus qu’il n’en faut. Je disais tout à l’heure que si l’honorable membre connaissait le Hainaut, qu’il n’a peut-être jamais vu (je suis tenté de le croire, d’après la manière dont il a parlé) il saurait par exemple, qu’il existe dans le Hainaut une contrée des plus importantes, tout le bassin de la Dendre, qui réclame depuis longtemps des routes et des canaux, et qui n’obtient absolument rien. M. Mast de Vries a dû entendre quelquefois notre honorable collègue M. Desmet se joindre à ces réclamations, à cause de l’affinité des intérêts de cette partie du Hainaut avec ceux de la localité à laquelle il appartient. Eh bien, messieurs, pourquoi ne fait-on point les communications que réclame la contrée dont je parle ? C’est parce qu’on emploie dans d’autres localités le produit de nos barrières.

Maintenant, messieurs, pour dire un dernier mot de cet argument de l’honorable député de Lierre, que les droits de nos barrières se paient par les habitants des autres provinces et non pas par les populations du Hainaut, je lui demanderai s’il croit que le trésor belge recevrait encore un denier de ces barrières si le Hainaut n’appartenait plus à la Belgique. Evidemment, non. C’est donc grâce au Hainaut et par le Hainaut que vous recevez chaque année des sommes importantes que produisent nos barrières ; et nous sommes dès lors en droit de réclamer l’application du principe de justice proclamé par le congrès national ou tout au moins qu’on nous traite avec équité dans la répartition de l’excédant du produit des barrières.

L’honorable M. Mast de Vries a dit encore que pour le Hainaut tout se fait avec profusion ; que, par antithèse avec ce qui s’est passé pour la province d’Anvers, nous avons, nous, deux chemins de fer. Jusqu’ici, messieurs, je sais que la province d’Anvers, depuis l’origine de cette grande construction nationale, jouit d’un chemin de fer, tandis que nous sommes encore à en attendre un. J’espère toutefois que, grâce à l’activité de l’honorable ministre des travaux publics, nous aurons bientôt plus que l’espérance ; mais jusqu’à présent nous n’avons que cela et dans tous les cas nous aurons été les derniers servis. Or, messieurs, nous n’étions pas les moins importants et je vous attends aux résultats ; ils vous démontreront, j’espère, qu’il eût été dans l’intérêt bien entendu du trésor de commencer par nous.

On a cité enfin le canal de l’Espierre, mais l’honorable M. Mast de Vries a-t-il vu au budget qu’un seul centime soit mis à la charge de l’Etat pour ce canal ? C’est l’industrie privée qui le crée et il ne coûtera pas un centime à l’Etat. Où est donc la faveur si grande ? où est dont la répartition si bienveillance du produit de nos barrières, qui fait le texte au discours de l’honorable membre ? Non seulement le canal de l’Espierre ne coûtera rien à l’Etat, mais il sera pour lui une source d’avantages et cela grâce au Hainaut, grâce à l’industrie, grâce à l’activité de cette province. Car pour le canal de la Sambre, le canal de Pommeroeul à Antoing, le canal de Charleroy, dont a parlé l’honorable M. de Theux, croyez-vous que le gouvernement ait fait une opération si mauvaise, en les reprenant ? D’abord, je ferai remarquer que la construction de ces canaux a été le fait de l’industrie privée ; qu’on n’a rien demandé de ce chef à l’Etat ; que si, par conséquent, l’Etat a jugé convenable de les reprendre, c’est qu’il a cru que son intérêt le lui commandait.

Il n’a d’ailleurs point fait une mauvaise opération en reprenant ces canaux ; car nous avons cela de particulier dans le Hainaut, que l’argent qu’on y consacre à des travaux publics rapporte de très gros intérêts ; ce qui, pour le dire en passant, est la meilleure preuve de leur utilité, tandis qu’il n’en est pas de même dans beaucoup d’autres localités. Il a été démontré, lors de la dernière session du conseil provincial, dans un rapport très remarquable qui a reçu l’approbation de cette assemblée, et que le gouverneur, organe du gouvernement, n’a pas cru pouvoir contredire, il a été démontré dis-je, que ces canaux rapportaient annuellement un intérêt de plus de 6 p.c.

Il semble, d’après cela, que le gouvernement et l’honorable député de Lierre, ainsi que l’honorable M. de Theux, auraient mauvaise grâce de venir prétendre que c’est là un sacrifice que l’Etat s’est imposé en faveur du Hainaut.

Restent enfin deux autres observations.

La première consiste à dire qu’il faut construire des routes là où il n’en existe qu’un petit nombre, et s’en abstenir dans les localités où il en existe davantage.

Déjà, à différentes reprises, j’ai témoigné ma sympathie pour certaines parties du pays qui me semblent destinées à un degré de prospérité qu’elles sont loin d’atteindre aujourd’hui ; c’est ainsi, par exemple, que j’ai déjà eu l’occasion de déclarer que je voterais bien volontiers, dans des limites modérées, des subsides pour l’établissement de voies navigables dans la Campine. Je suis donc en droit de prier la chambre de se garder de croire que, quand je défends les intérêts de la province à laquelle j’appartiens, il entre le moins du monde dans ma pensée de vouloir m’opposer à l’établissement de voies de communications dans d’autres contrées ; ce que je veux, ce que j’attends de la justice du gouvernement, c’est qu’on n’oublie point le Hainaut et qu’on lui consacre une attention digne de sa haute importance ; et ici je rencontre une erreur dans laquelle versent plusieurs membres de cette chambre et spécialement celui auquel je réponds en ce moment. S’il fallait l’en croire, c’est dans les localités où il existe et peu d’agriculture et peu d’industrie qu’il faudrait surtout porter l’action du gouvernement pour la création de voies de communication… Sans doute il est bon et utile de faire quelque chose pour ces localités ; mais celles où l’agriculture et l’industrie sont plus répandues réclament bien plus impérieusement encore de nouvelles routes, de nouveaux canaux. Que sont en effet les routes et canaux ? Des moyens de transporter les produits de l’agriculture et de l’industrie, de manière à les rendre accessibles à un plus grand nombre de consommateurs. Il est évident dès lors que là où il existe une agriculture et une industrie avancées, là où d’immenses capitaux sont déjà consacrés au développement de ces deux branches de la richesse publique, là se révèle un besoin plus grand de consommations nouvelles.

C’est donc dans de telles contrées qu’il importe de multiplier les routes et les canaux, à péril d’en compromettre la prospérité.

Permettez-moi de consacrer encore quelques mots à ce qu’a dit M. Mast de Vries de l’oubli dans lequel le gouvernement laisserait la province d’Anvers, à laquelle il appartient. Déjà j’ai montré la part favorable qui lui avait été faite par la création du chemin de fer, dont elle a été la première en possession. Je rappellerai maintenant ce qui a été fait pour l’Escaut. Le gouvernement et la chambre n’ont certes point montré en cette occasion qu’ils manquassent de sympathie pour cette province, d’ailleurs tant digne d’intérêt ; et la mienne ne lui a point non plus fait défaut, puisque j’ai été un de ceux qui ont appuyé le rachat du péage sur l’Escaut. C’est donc avec peu de justice que l’honorable membre auquel je réponds a voulu faire croire que l’on n’a point marqué à cette province tout l’intérêt quelle est en droit d’inspirer.

Messieurs, je le répète en terminant, je n’avais point compte prendre part à ce débat, parce que j’ai la conviction que l’honorable ministre, qui dirige le département des travaux publics, comprend trop bien toute l’importance du Hainaut, de son agriculture et de ses industries divers, pour ne point reconnaître qu’il y manque une foule de voies de communications dont il importe à sa prospérité et à celle du pays tout entier de la doter et qu’elle est au premier rang digne de toute son attention. Mais ce silence que je comptais garder, j’ai dû le rompre pour répondre comme je le devais, en ma qualité de député du Hainaut, à de paroles qui tendaient à égarer la chambre sur la véritable position de cette province et à faire croire que tout avait été faveur par elle là où nous n’avons souvent rencontré que de l’oubli ou de la négligence.

M. Peeters, rapporteur – Si je prends la parole ce n’est pas comme rapporteur de la section centrale, mais comme membre de la chambre ; ainsi que j’ai eu soin de le dire à la section centrale, je ne puis pas admettre la réduction votée par la majorité, réduction que je crois contraire à ce qui a été décidé antérieurement par la chambre.

Par la loi du 18 mars 1833, vous avez créé un fonds spécial pour les routes, vous avez décidé que les excédants des produit des barrières seront employés pour construction de nouvelles routes. Par les états fournis par M. le ministre, joints au rapport du budget des travaux publics, vous avez pu voir, messieurs, que l’Etat doit au fonds spécial des routes environ 600,000 francs, vous ne voudriez donc pas restreindre un crédit si nécessaire pour les routes pavées dans un moment où vous avez dépensé plus de cent millions pour les chemins de fer, d’autant moins que M. le ministre vous prouve que, par ce crédit, il ne pourra nullement satisfaire aux engagements contractés.

J’engage beaucoup M. le ministre a ne pas employer ce crédit de la manière que vient de l’indiquer un honorable député du Hainaut ; ainsi que l’ont très bien fait observer, selon moi, les honorables MM. Mast de Vries et de Theux, les droits de barrières sont payés par les consommateurs ; les localités où existent les routes ont l’avantage de pouvoir par là plus facilement transporter les productions de charbons, fer et pierres, qui, sans ces routes ou canaux resteraient ensevelis dans la terre. L’honorable M. Dolez est allé plus loin, il a voulu compter, pour compte de la province d’Anvers, le rachat des péages établis sur l’Escaut par le traité, il doit cependant savoir que ce rachat a eu lieu dans l’intérêt du commerce de tout le pays. Si je voulais suivre l’honorable orateur dans ses faux raisonnement, je pourrais réclamer pour compte de la province les droits de douanes considérables, reçus dans la ville d’Anvers seule ; d’ailleurs la province d’Anvers est plus que suffisamment récompensée par le chemin de fer.

M. le ministre des travaux publics, en répondant à l’honorable M. Mast de Vries, vient de nous citer nominativement toutes les routes faites ou décrétées dans la province d’Anvers, depuis la révolution ; mais il a oublié de citer, par comparaison, les routes faites dans d’autres provinces depuis cette époque. M. le ministre doit savoir cependant, que suivant l’indication de son rapport, présenté à la chambre le 4 de ce mois, cent trente-quatre lieues de routes ont été faites par l’Etat depuis 1830, et que, dans ce grand nombre de routes, la province d’Anvers ne figure que pour huit lieues, et ainsi que j’ai eu soin de vous le dire hier, cette province a été encore plus mal partagée dans les routes provinciales, par la raison que cette province avait absorbé toutes les ressources pour la canalisation de la petite Nethe, pour laquelle elle n’a reçu aucun subside et n’a pu employer qu’une faible somme, en proportion des autres provinces, pour des routes provinciales. J’appelle donc l’attention sérieuse de M. le ministre sur les deux routes que j’ai eu l’honneur de lui indiquer avec mon honorable ami M. de Nef, dans la séance d’hier.

L’honorable M. Zoude vient de critiquer assez amèrement le peu de paroles que j’ai prononcées hier comme rapporteur de la section centrale, et par lesquelles je n’ai nullement voulu faire du tort au Luxembourg, comme le paraît croire l’honorable orateur. J’ai expliqué les choses comme elles s’étaient passées à la section centrale, et c’était mon devoir comme rapporteur ; j’ai dit et je le dirai encore que les chambres, en décrétant un embranchement du chemin de fer pour le Luxembourg, n’ont nullement eu l’intention d’y employer trente millions comme on paraît le prétendre, la somme à employer pour cet embranchement n’a pas été fixée, la chambre s’est réservé le droit de la voter plus tard.

J’avoue que je n’ai nullement eu l’intention de nuire à cette province ; si je l’avais voulu, j’aurai pu faire des comparaisons entre les contributions payées par elle, et celles payées par d’autres provinces, mais j’ai dû citer au moins les avantages dont cette province a joui, lorsqu’elle vient nous demander une somme si considérable comme un droit acquis.

Mais, a dit l’honorable membre, le sol du Luxembourg est fertile ; il y a de beaux bois, tandis que dans la Campine on ne trouve que des bruyères, et une terre qui ne rapporte qu’un peu de seigle. J’observerai à l’honorable membre qu’il doit peu connaître la Campine, où il y a des endroits fort fertiles, et des forêts beaucoup plus belles que dans le Luxembourg. « Ce n’est pas dans l’intérêt du Luxembourg, continue l’orateur, que nous demandons des routes, mais dans l’intérêt général du pays. » Je puis lui faire la même réponse pour la Campine.

L’honorable membre s’est beaucoup appuyé pour soutenir ses droits sur le patriotisme des Luxembourgeois. Je pourrais, messieurs, encore inviter l’orateur à venir voir nos belles communes de la Campine ; il n’y trouvera pas, il est vrai, des chemins de fer ou des canaux, et fort peu de routes, mais des drapeaux d’honneur à une époque trop rapprochée de la révolution pour avoir oublié nos services.

M. d’Hoffschmidt – Messieurs, je viens combattre la diminution que propose la section centrale sur le chiffre d’un million demandé par le gouvernement pour la construction de routes nouvelles. Je suis même surpris qu’elle ait proposé cette réduction, alors que, pour ainsi dire, chaque membre de cette chambre vient réclamer une route pour sa localité. Il est certain cependant que, si l’on veut que le gouvernement fasse droit aux réclamations qui sont formées pour ainsi dire par chacun de nous, il faut bien lui donner les moyens d’y faire droit, c’est-à-dire lui accorder la somme qu’il réclame.

Le budget en discussion présente des augmentations sur plusieurs chiffres adoptés l’année dernière : 660,000 francs pour le chemin de fer ; 312,000 pour les canaux et 253,443 francs pour les routes. La section centrale adopte les deux premières augmentations ; mais elle rejette l’augmentation pour les routes. Les motifs de ce rejet sont puisés dans l’état financier du pays qui permet de voter seulement les sommes indispensables. Mais d’abord ces motifs peuvent tout aussi bien s’appliquer aux canaux et peut-être même au chemin de fer qu’aux routes. Je ne pense donc pas que ce motif seul puisse engager la chambre à rejeter une des augmentations les plus utiles qui se trouvent au budget.

Toutes les voies de communication exercent certainement une heureuse influence sur la prospérité d’un pays ; mais je crois que les voies de communication les plus indispensables, celles qui sont réclamées de toutes parts avec le plus d’instance dans le pays, ce sont les routes ordinaires. Ainsi il serait fâcheux que, par suite d’une préoccupation trop grande pour le chemin de fer et la canalisation d’une partie du pays, et par suite des dépenses considérables qui doivent résulter de ces travaux, on négligeât, comme l’a dit fort bien l’honorable M. de Mérode, les routes qui sont cependant plus utiles à la prospérité du pays.

Il est d’ailleurs à remarquer que la somme d’un million ne pourra pas être appliquée toute entière cette année aux routes nouvelles. Nous voyons en effet dans les développements du budget que, par suite d’engagements pris, il ne restera plus que 400,000 francs pour subvenir aux travaux considérables que le gouvernement fait exécuter, et à ceux qu’on réclame dans différentes localités.

Ainsi, messieurs, si nous diminuons encore de 200,000 francs le chiffre demandé, il ne restera plus que 200,000 francs pour construction de routes ; il ne restera plus que la dixième partie de ce que coûte une lieue de chemin de fer entre Ans et la frontière prussienne.

Veuillez encore remarquer qu’il s’agit ici d’un fonds spécial dont l’excédant a été destiné à la construction et à l’amélioration de routes.

Or, pendant les années précédentes, l’excédant du produit des barrières a dépassé de 600,000 francs les allocations portées au budget. Il serait donc de toute justice que cette somme fût rendue à sa destination. L’augmentation demandée par M. le ministre des travaux publics n’est donc, en définitive, qu’une espèce de restitution de ce que le trésor a pris sur le fonds spécial destiné aux routes.

J’espère en conséquence que la chambre adoptera le chiffre demandé par M. le ministre et mon espoir à cet égard me paraît bien fondé, puisqu’il s’appuie sur les nombreuses réclamations qui ont été faites pour de nouvelles constructions de routes pavées.

Quant au mode de répartition des fonds qui sont mis pour cet objet à la disposition du gouvernement, je crois que nous devons nous en rapporter à cet égard au ministre qui est à la tête du département ; je crois que la position qu’il occupe peut mieux lui faire voir où existent les besoins les plus réels sous ce rapport, où enfin il pourra le mieux placer les forces dont il peut disposer pour le bien-être et pour la prospérité du pays. Il est impossible, en effet, à un membre de cette chambre de dire que dans telle ou telle localité une route est plus nécessaire que dans telle autre : le gouvernement seul peut être juge de la question de préférence.

Du reste, on ne doit pas seulement envisager une route d’après les produits immédiats qu’elle rapporte ; une route doit encore être considérée au point de vue de l’industrie qu’elle est destinée à faire éclore dans la contrée ; de l’augmentation de la valeur des terres, et dd la civilisation sont elle favorise le développement. Voilà certainement de très puissantes considération. Ce n’est pas seulement en calculant le produit que la route rapportera dans tel ou tel espace de temps, qu’on doit apprécier la valeur d’une communication mais cette appréciation doit se faire encore d’après la prospérité que la route est destinée à faire naître, d’après l’augmentation de population qui en sera la suite, et enfin d’après la richesse territoriale dont elle doit être la première cause.

Je vous citerai à cet égard ce que vous a dit avant-hier l’honorable M. de Puydt. Il vous a parlé d’une province qui, en 1815 n’avait que 213,000 habitants, et dont le tiers du territoire seulement était cultivé ; province qui, en 1839, avait 340,000 habitants, et dont les 2/3 du sol étaient livrés à la culture, grâce aux routes qui y ont été construites.

Eh bien, messieurs, ne voilà-t-il pas un des résultats les plus importants qu’un gouvernement puisse obtenir ? C’est ainsi qu’il augmente dans une plus forte progression la richesse d’un pays, en faisant cultiver les terres incultes et en favorisant l’accroissement de la population. Ainsi l’on ne doit pas toujours examiner, je le répète, si dans telle ou telle localité une route produira des revenus immédiats considérables ; mais il faut voir avant tout si cette communication sera une source de fertilisation, une cause d’augmentation de richesses pour le pays entier.

C’est pour avoir obtenu des résultats semblables que beaucoup de souverains sont cités dans l’histoire ; c’est parce qu’ils ont fait défricher des terrains incultes, dessécher des marais, qu’ils ont acquis des titres à la postérité ; ce sont ces titres-là que le gouvernement doit ambitionner.

Je crois donc que la chambre fera chose utile au pays, en n’hésitant pas à adopter la proposition du gouvernement.

M. Mast de Vries – Lorsque l’honorable M. Dolez, député de Mons, a pris la parole, j’ai cru qu’il allait me convaincre que j’avais eu grand tort dans les faits que j’avais avancés ; mais je suis obligé de dire que ce qu’a dit l’honorable membre ne m’a nullement convaincu. Il a prétendu que les bases dont j’argumentais étaient fausses. Il m’a paru, au contraire, qu’elles étaient extrêmement exactes. L’honorable membre, pour faire connaître la position du Hainaut et la nature de ses routes, a dit que les villes les avaient faites elles-mêmes, et qu’elles payaient encore les intérêts des capitaux empruntés pour les construire. Ce qui a lieu dans le Hainaut a lieu également dans toutes les provinces ; les routes ont été faites par les villes, et les villes payent les sommes empruntées pour leur construction.

Je puis dire la chose avec certitude, car je paye moi-même comme bourgmestre une somme extrêmement importante pour des routes qui ont été faites il y a un siècle par la ville que j’ai l’honneur d’administrer. Nous sommes donc sur le même pied que le Hainaut.

On vous a parlé des chemins de fer, on vous a dit que ces routes ne sont qu’en projet. Je regarde les chemins de fer décrétés pour le Hainaut et pour lesquels j’ai voté les fonds, sinon comme achevés, du moins comme existants. Or, dans la construction du chemin de fer, la province la plus favorisée, celle qui l’a été même au-delà de ce que la loi voulait, c’est le Hainaut.

On avait décrété un chemin de fer pour joindre Bruxelles à la France, et ce chemin de fer devait passer par Mons. C’est la première idée de la loi. Mais depuis on est allé plus loin, on a décrété une seconde voie de Gand sur Lille, et on a profité de cette occasion, pour demander et on a obtenu un chemin de fer de Courtray sur Tournay, qui est en voie d’exécution, ; plus tard, il s’agira de relier Tournay à Mons ; l’année dernière une troisième communication ferrée a encore été accordée au Hainaut, pour relier Charleroy à Namur.

Je crois qu’une province qui est aussi bien dotée a grand tort de se plaindre. La province d’Anvers, dit-on, a un chemin de fer ; mais à quoi serviraient les vôtres, s’ils n’étaient point directement en relation avec Anvers ; au surplus, je ne pense pas que jamais aucun chemin en Belgique produise la moitié du taux des intérêts du chemin d’Anvers.

Les canaux, dit-on, ont été faits par des sociétés particulières et repris par le gouvernement. Mais les capitaux ne sont pas moins portés au budget de l’Etat. Si les intérêts sont compensés, si les capitaux rapportent 6 p.c. d’intérêt, c’est très heureux pour le Hainaut, qui en profite. Mais c’est nous, consommateurs, qui payons ces intérêts. Je fais ici l’application du principe que j’ai posé à propos du produit des barrières. Ce n’est pas le Hainaut qui paie ces droits, c’est nous qui les payons en allant chercher les produits du Hainaut. Si la prétention de l’honorable M. Dolez en faveur du Hainaut était fondée, la province d’Anvers n’aurait-elle pas le droit de dire que c’est elle qui paie les millions que reçoit la douane ? Ce serait une prétention absurde ; elle est aussi absurde de la part du Hainaut, qui nous dit qu’il paie les droits des barrières.

Nous demandons pour la Campine, non pas la jouissance d’avantages qui lui ont été refusés par la nature, mais la création de communications. Ces communications lui ont été refusées par les gouvernements successifs qui ont exploité la Belgique, parce qu’on trouvait dans l’état de ce pays une barrière entre la Belgique et la Hollande. Il est impossible de donner d’autres raisons pour ainsi 270 mille hectares de bruyères dans l’état où ils se trouvent.

Qu’a-t-on demandé ? qu’une partie des fonds sollicités pour l’amélioration générale du pays fût appliquée à l’amélioration de cette contrée. Si on a cité une loi qui affectait à chaque province l’excédant du produit de ces barrières, on sait que cette loi a été rapportée. Nous demandons qu’on emploie une partie des produits généraux du pays à cette partie du pays. Si le Hainaut produit beaucoup au moyen de ses barrières et des péages, la province d’Anvers le fait au moyen de la douane, tout rentre dans le trésor, et le pays entier y a droit.

Les voies de fer décrétées et à construire dans le Hainaut, que je pense évaluer au moins à 25 millions, le seront aux frais du trésor ; on peut dire que la Campine, la province d’Anvers y contribuent pour une somme considérable ; si ces voies en fer sont faites dans l’intérêt général, elles sont plus particulièrement dans l’intérêt du Hainaut. Des communications dans la Campine seront aussi dans l’intérêt général ; elles présenteront donc le même caractère, c’est ce que j’ai voulu établir, et aucun argument ne pourra me convaincre du contraire.

Je persiste donc à demander que le gouvernement s’occupe des communications que les bruyères qui existent dans le Limbourg, le Luxembourg et la province d’Anvers réclament ; c’est le moyen de recouvrer indirectement les deux demi-provinces que nous avons eu le malheur de perdre.

M. de Theux – Je prends la parole pour relever une erreur dans laquelle est tombé un honorable préopinant. Je n’ai en aucune manière combattu les avantages concédés au Hainaut sous le rapport des voies de navigation et du chemin de fer. Je n’avais pas parlé du canal de Charleroi. L’honorable membre a dit que ce canal et la Sambre canalisée avaient été construits sans l’intervention du gouvernement. Il est dans une erreur grave. Jamais le canal de Charleroi n’eût été construit si le gouvernement n’eût fait des avances jusqu’à concurrence de 4 millions de florins. Il est vrai que, par suite du rachat que j’ai conclu avec les concessionnaires, l’Etat est entré en jouissance, et se trouve couvert des avances qu’il a faites et au-delà.

Cela n’empêche pas que le gouvernement est intervenu pour 4 millions de florins dans la construction, et que sans cela jamais le canal n’eût été construit. Il en est de même en ce qui concerne la Sambre. Des sommes considérables avaient été avancées aux concessionnaires. Le résultat n’a pas été aussi avantageux que pour le canal de Charleroy ; car il est loin de produire les intérêts du capital de 13 millions que ce rachat a coûté. Du reste, je n’avais pas critiqué les avances faites par le gouvernement pour construction de canaux et les dépenses qu’il fait actuellement pour le chemin de fer dans le Hainaut.

L’honorable membre ne doit pas perdre de vue que quand des routes sont construites dans des provinces qui en manquent, les provinces à carrière et à mines en tirent un grand avantage, car elles fournissent les pavés et obtiennent en même temps un débouché pour leurs mines. Si le reste de la Belgique manquait de communications, ces provinces à carrière et à mines ne pourraient exploiter utilement ni leurs mines ni leurs carrières. Il y a donc communauté d’intérêts pour toutes les provinces dans la construction des voies de communication. L’un profite des communications qu’on construit dans l’autre. L’avantage est donc réciproque ; c’est au gouvernement, dans son équité, à juger ce qu’il convient de faire.

J’ajouterai une observation sur les concessions. Je félicite les localités qui peuvent trouver des concessionnaires de routes et de canaux, et je plains celle qui n’en trouvent pas. Il est certain que, là où on ne trouve pas de concessionnaires, il faut que le gouvernement intervienne pour développer la prospérité du pays, jusqu’à ce qu’elle soit assez grande pour qu’il y ait moyen d’avoir des routes par voie de concession. Mais il faut auparavant créer une prospérité première dans ces localités. De cette manière, les provinces qui n’ont pas de ressources en obtiendront et pourront intervenir davantage dans ces sortes de dépenses. Que peut-on demander à la province du Limbourg et à celle du Luxembourg ? Qui commencerait à faire des routes dans ces provinces par concession de péages ? Il faut que le gouvernement intervienne, si on ne veut pas que ces provinces soient à tout jamais privées de voies de communication.

M. Desmet – Tous les ans nous votons des sommes considérables pour les routes.

Les routes et les canaux, comme vient de le faire observer l’honorable préopinant, sont d’utilité publique. Ce n’est pas seulement la localité où la construction a lieu qui en profite, mais les localités voisines. On a parlé du Hainaut, qui a besoin de communications nouvelles. Cette province n’est pas la seule dans ce cas, les deux Flandres aussi demandent des communications nouvelles.

Je trouverais ridicule qu’on refusât la construction de telle ou telle route, si nous pouvions les faire ; mais les moyens nous manquent. Comme l’argent manque, il faut trouver moyen de faire les routes sans obérer le trésor.

La proposition qui a été faite par les honorables membre, M. Puissant et consort, donne ce moyen. Si le gouvernement voulait garantir l’intérêt si minime de 3 p.c., tout le monde serait satisfait, vous auriez les routes dont vous avez besoin. Les routes se feraient, excepté dans deux provinces, où je crois, comme l’honorable M. de Theux, qu’on n’aurait pas de concessionnaires. A cet égard, j’appuie cette opinion que le gouvernement doit venir en aide aux provinces pour construire des routes dans la Campine et dans le Luxembourg. Si vous aviez de bonnes routes dans le Luxembourg, vous ne seriez plus tributaires des ardoisières de France. Les ardoises du Luxembourg sont meilleures que celles de France, ce sont les frais de transport qui empêchent qu’on ne les emploie de préférence ; de sorte que si l’on devait transporter les ardoises de Namur aux mêmes frais, on préférerait celles du Luxembourg à celles de Fumay.

Il en est de même pour le plâtre. Malheureusement, comme l’a fait observer l’honorable M. Zoude, nous avons perdu la partie du pays où se trouvaient ces carrières de plâtre, et c’est un grand malheur.

Je pourrais aussi demander au gouvernement quelque chose en compensation pour ma localité, qui a tant perdu par le chemin de fer. Je ne lui demande rien. Je ne demande que la garantie d’un intérêt minime, parce qu’alors la vallée de la Dendre fera ses propres communications. Les projets sont préparés. Mais je voudrais savoir quelles sont, à cet égard, les intentions du gouvernement. Si le gouvernement se montre favorable à cette combinaison, je suis prêt à voter les fonds demandés. Mais s’il nous laisse dans le doute je voterai contre le crédit.

M. Dolez – Je n’ai que quelques mots à répondre à MM. de Theux et Mast de Vries.

M. Mast de Vries vous a dit qu’il en était du Hainaut comme des autres provinces, en ce qui concerne les charges résultant de la création de routes. A cela il y a deux réponses ; la première, c’est que, par cela seul qu’il y a eu plus d’effort dans le Hainaut, qu’il y a eu plus de routes construites, la charge qui grève nos provinces et nos villes est plus lourde, tandis que dans les autres provinces, où il y a eu peu d’efforts tentés, les charges sont réduites à peu près à zéro. La seconde, c’est qu’il n’est pas exact de dire qu’il en est de même dans les autres provinces. Pour ne parler que de la province du Limbourg, à laquelle appartient M. de Theux, et d’une partie de la province de Liége, je dirai que les villes de cette partie du pays, plus heureuses que celles du Brabant, ont pu remettre à la charge de l’Etat le payement des capitaux qu’elles avaient empruntés.

M. Demonceau – Je demande la parole.

M. Dolez – J’aime à croire que ce n’est pas pour me contredire que l’honorable député de Verviers demande la parole ; car il me sera facile de prouver ce que j’avance.

Dans le Limbourg, beaucoup de communes ont emprunté des capitaux pour faire de nouvelles routes. Les routes ont été construites. Il est intervenu entre les communes et la province des traités par lesquels la province a repris les routes, en prenant la charge de payer les rentes. Depuis 1830, les créanciers des communes les ont attaquées pour obtenir le payement ; les communes ont appelé le gouvernement en garantie ; ce n’était qu’une action en garantie. Les créanciers ont échoué, et ont été déclarés déchus. Je puis l’attester ; car c’est moi qui ai eu l’honneur de défendre devant la cour de cassation les intérêts de ces communes ; toutes ont eu le bonheur de réussir. C’est ainsi que la ville de Herve, à laquelle l’honorable M. Demonceau appartient par d’anciennes relations, a obtenu une condamnation contre le gouvernement, à fin de garantie contre la condamnation prononcée contre elle pour construction de routes. Il y a eu bien d’autres communes dans le même cas. Il n’est donc pas exact de dire, comme l’a fait M. Mast de Vries, que le Hainaut est sous ce rapport dans la même position que les autres provinces.

D’autre part, cet honorable membre est dans une erreur évidente, lorsqu’il croit que ce sont des individus étrangers au Hainaut qui payent la taxe des barrières, dont le produit doit être employé à la construction de routes.

L’honorable membre croit sans doute que l’exportation de nos produits se fait par les routes ; mais elle se fait presqu’exclusivement par les canaux. Ce qui fait que nos routes rapportent, c’est la consommation de nos houillères, de nos hauts fourneaux, de nos carrières ; c’est pour leur approvisionnement que les droits de barrière se payent. C’est donc par les habitants du Hainaut que ces droits sont payés. Ainsi l’équité, conforme à l’injonction du décret du congrès national, fait une loi d’employer le produit des barrières du Hainaut à la construction de routes nouvelles et à l’amélioration des routes existantes dans cette province.

J’ai dit que le gouvernement n’avait rien fait pour les canaux. M. de Theux a répondu que c’était une erreur, qu’il avait prêté aux concessionnaires. Il a fait en cela l’office d’un banquier. Les concessionnaires ont été obligés de rembourser les fonds empruntés ; c’étaient des créances qui étaient à leur charge.

Quant aux produits de la Sambre, il peut se faire que cette voie de navigation, qui n’est encore qu’en enfance, ne produise pas complètement l’intérêt des capitaux payés pour son rachat. Mais il n’en est pas moins vrai que le gouvernement perçoit 6 p.c. des capitaux qu’il a employé au rachat des canaux de Pommeroeul à Antoing, de Charleroy et de la Sambre ; c’est donc une excellente opération qu’a faite le gouvernement.

Je terminerai en disant un mot du crédit, objet du débat. J’ai parlé en faveur du Hainaut, non pour réclamer quelque chose pour cette province, mais pour la défendre contre d’injustes attaques.

Je voterai pour le crédit demandé par le gouvernement. Je crois que MM. de Theux et Peeters, qui demandent la construction de routes nouvelles dans le Limbourg et dans la Campine, voteront avec tous leurs amis pour le crédit demandé. S’ils faisaient autrement, ce serait un contre-sens et un défaut de logique.

M. de Mérode – Messieurs, tout ce que je viens d’entendre me prouve que si le gouvernement comprenait bien les intérêts les plus pressants du pays, il procéderait plus lentement à la construction de certaines parties des chemins de fer secondaires, et réserverait les fonds du trésor pour activer davantage les travaux des routes. Remarquez qu’une seule lieue de chemin de fer coûte un million, terme moyen ; et pendant que nous sommes forcés de discuter sur une réduction de 200,000 francs, à propos de routes pavées les plus nécessaires, nous nous hâtons de terminer au plus vite les lignes ferrées les moins urgentes. Permettez-moi de vous citer ici quelques extraits très courts d’une brochure, publiée en 1838, par un homme de haute intelligence, sincère ami du progrès (Victor Considérant).

« Avant de vouloir procéder à des dépenses colossales, par des travaux gigantesques, à la fusion des nations et des peuples, il serait sage de chercher d’abord à établir la prospérité, l’ordre et la fusion des classes dans le pays que l’on habite. Vous voulez associer les peuples de l’univers ; commencez par vous mettre en mesure de savoir et de pouvoir associer entre eux les habitants de vos bourgades ; le mouvement passionné, délirant qui emporte les imaginations fascinées à la réalisation universelle des chemins de fer, demande à être attaqué avec vigueur, avec exagération si vous voulez. La passion n’écoute pas les arguments froids et calmes… Comment, votre agriculture, la base et la source de votre richesse et de votre prospérité possible, produit à peine, malgré la supériorité de votre sol et de vos climats, le quart proportionnellement de ce que produit l’agriculture de vos voisins d’Angleterre. Manquant de capitaux, elle manque d’instruments et consomme à perte une énorme quantité de travail. Ses chariots s’enfoncent jusqu’au moyeu sur ses chemins d’exploitation ou de communication, et pendant que sur les grandes lignes entre vos villes, les voyageurs parcourent déjà à bas prix deux et trois lieues à l’heure, vous excitez le public à dépenser des capitaux fabuleux, pour que ces voyageurs puissent faire six ou huit lieues à l’heure, au lieu de deux ou trois, et pour attirer dans vos villes et vos centres de fabrication, déjà encombrés, de nouveaux capitaux et de nouveaux prolétaires. »

Ma conclusion, messieurs, serait que sans retirer les décisions prises à l’égard des chemins de fer de second ordre, sans renoncer le moins du monde à l’achèvement de toutes les parties, on mît à l’égard des moins utiles, un peu du bois d’allonge que l’on ne craint pas d’appliquer aux routes que l’on réclame ici avec tant d’instances, à ces routes de civilisations, semblables à celle de Nederbrackel à Renaix, signalée par M. de Villegas. On m’a dit que la généralité des travaux de chemins de fer quelconques est adjugée, je ne puis alors que déplorer un tel manque de prévoyance et de bon jugement, mais je crois que si M. le ministre des travaux publics le veut sincèrement, il pourra économiser encore 200 mille francs sur les frais d’entretien et d’exploitation de chemins de fer, frais primitivement portés au budget à 4,370,000 francs, et rendre ainsi aux routes moins fastueuses ce qu’il retrancherait au luxe des autres.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – L’honorable préopinant perd de vue que nous ne sommes pas arrivés à l’article relatif au chemin de fer. Dans son ardeur à critiquer constamment cette œuvre nationale, il s’est un peu trop hâté. Il aurait dû attendre que nous fussions arrivés à l’article du chemin de fer pour reprendre la série de ses attaques. C’est sur cet article que je me réserve de lui répondre, si ses attaques ne sont pas renouvelées. Cependant, dès à présent, je dois dire que je ne suis pas moins désireux que lui de voir le chemin de fer produire de gros revenus ; mais le moyen qu’il indique me paraît détestable pour procurer les revenus qu’il demande. Selon l’honorable préopinant, il ne faudrait pas se hâter de terminer l’exécution des sections commencées, ni presser l’exécution de nouvelles sections. Qu’en résulterait-il ? Que les capitaux employés jusqu’ici ne produiraient rien. Nous avons tous deux le même but. Mais nous procédons pas deux moyens contraires. Pour moi je crois que le moyen de rendre le chemin de fer productif, c’est de l’achever le plus tôt possible.

Je dois dire un mot d’un publiciste que l’on a représenté a plusieurs reprises comme un adversaire des chemins de fer. Je connais particulièrement l’auteur de la brochure dont l’honorable préopinant a donné lecture pour la seconde fois. Je puis assurer qu’il ne lui a jamais donné la portée que lui attribue l’honorable préopinant. M. Victor Considérant a fait sa brochure, principalement en vue d’arrêter l’engouement parisien qui se jetait avec trop d’ardeur sur l’entreprise du double chemin de fer de Paris à Versailles qui devait entraîner à des dépenses énormes, que les sociétés ne pouvaient couvrir.

J’ai eu l’occasion d’entretenir l’auteur de la brochure. C’est ainsi qu’il s’en est expliqué. Il a voulu mettre un point d’arrêt dans la spéculation qui s’emparait alors des chemins de fer. Du reste, l’auteur dont les écrits ont surtout pour but l’association des hommes et des peuples, est loin de nier l’immense influence du chemin de fer pour arriver à la réalisation de ses doctrines. Il s’en est expliqué de la manière la plus formelle.

Malgré tout mon désir d’augmenter la dotation des routes pavées, il me serait impossible d’employer dès à présent à cette destination une partie du crédit destiné au chemin de fer. Il faudrait du reste pour cela, l’autorisation des chambres. Si, lorsque le chemin de fer sera achevé, le crédit mis à la disposition du gouvernement laissait un excédant, je serais le premier à proposer de l’appliquer aux routes pavées ; car j’en reconnais toute l’importance. Sans avoir tout l’éclat, toute l’utilité du chemin de fer, elles ont une utilité sur laquelle je ne fermerai jamais les yeux.

M. de Mérode – je n’ai pas parlé des frais de construction, j’ai parlé du chapitre III « Frais d’entretien. » J’ai dit que sur ce chapitre on trouverait facilement une économie de 200,000 francs, chiffre qui est l’objet du débat. Et quant aux sections que l’on n’aurait pas achevées immédiatement, il en est certainement dont les travaux commencés étaient su peu importants qu’il était possible de les ajourner.

M. Demonceau – Lorsque j’ai entendu l’honorable M. Dolez parler de certaines décisions qui auraient été prises en faveur de quelques communes de l’arrondissement que l’habite, ce n’était pas pour contredire ce qu’il a dit, que j’ai demandé la parole, c’était pour le compléter.

L’honorable membre a eu raison de vous dire que quelques communes ont gagné leur procès. Mais il y aurait eu double injustice si elles n’avaient pas gagné, car si elles avaient dû payer, elles auraient payé deux fois.

Ces circonstances, je dois d’autant mieux les connaître que les jugements auxquels on a fait allusion ont presque tous été rendus sous ma présidence.

Mais savez-vous ce qui est résulté de ces procès ? Les communes les ont gagnés et néanmoins ont dû payer leurs propres créances. La députation permanente de la province de Liége les impose d’office pour payer leurs créances, et savez-vous ce que fait le gouvernement ? Il ne paie pas.

Voilà dans quelle position se trouvent les communes auxquelles l’honorable M. Dolez a fait allusion.

Maintenant, si d’une part quelques communes ont gagné leurs procès près le tribunal de Verviers, d’autres les ont perdus. Et je citerai la ville de Verviers même qui a été condamnée relativement à une avance pour laquelle elle réclamait 100,000 florins.

Vous voyez que, dans le même arrondissement, les un sont gagné leurs procès, les autres le sont perdus.

Je dirai maintenant un mot sur le chiffre pétitionné pour construction de routes, il me semble résulter de tout ce que vous avez entendu dans cette discussion que malgré la meilleure intention du monde d’être économe, cela n’est guère possible. Aussi, pour mon compte, je déclare que je voterai le chiffre demandé par le gouvernement.

Quant à ce qu’a dit l’honorable M. de Mérode, sur la possibilité d’économiser sur les chemins de fer, je partage assez cette opinion. Je pense que sur les fonds que nous avons alloué par la loi d’emprunt, s’ils sont administrés avec cette économie qui, je l’espère, régnera dans l’administration des chemins de fer, à l’avenir, il pourra y avoir économie. Mais il n’est guère possible de faire usage de ces économies dans ce moment ; et M. le ministre vous a dit qu’il y avait dans ce moment des engagements pris pour trois millions à peu près. S’il y a économie, nous pourrons la retrouver sur un budget prochain.

M. le président – Je vais mettre aux voix le chiffre de 2,600,000 francs, pétitionné par le gouvernement.

M. Cogels – Je crois que M. le ministre a consenti à une réduction de 100,000 francs.

M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – J’ai ai consenti éventuellement ; j’ai dit que c’était un expédient pour économiser ; mais je tiens toujours à ma première proposition.

- Il est procédé au vote par appel nominal sur le chiffre du gouvernement. En voici le résultat :

70 membres répondent à l’appel.

2 s’abstiennent ;

49 répondent oui ;

19 répondent non ;

Ont voté pour l’adoption : MM. Coghen, David, Dechamps, de Garcia de la Vega, Delehaye, Delfosse, de Man d’Attenrode, Demonceau, de Nef, de Puydt, de Renesse, de Sécus, de Theux, Devaux, de Villegas, d’Hoffschmidt, Dolez, Donny, Dubois, Dumont, Duvivier, Fallon, Jadot, Lebeau, Leclercq, Lejeune, Liedts, Lys, Mast de Vries, Meeus, Mercier, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Pirson, Puissant, Raikem, Raymaeckers, Rogier, Scheyven, de Baillet, Sigart, Simons, Troye, Ullens, Van Cutsem, Vandenbossche, Vandenhove, Vandensteen, Verhaegen, et Zoude.

Ont voté contre l’adoption : MM. Brabant, Cogels, Cools, de Behr, Dedecker, de Florisone, de Langhe, de Meer de Moorsel, de Roo, Desmaisières, Doignon, Donny, Dubus (aîné), Fleussu, Hye-Hoys, Thienpont, Trentesaux, Vilain XIIII et Wallaert.

MM. de Mérode et Eloy de Burdinne, qui se sont abstenus, sont invités à en faire connaître les motifs.

M. de Mérode – Messieurs, pour dépenser il faut percevoir d’une part ou économiser de l’autre. Je voudrais voter les fonds demandés, mais comme M. le ministre ne veut renoncer à aucune autre dépense sur laquelle je lui au signalé des économies, je suis forcé de m’abstenir.

M. Eloy de Burdinne – Je me suis abstenu pour les mêmes motifs.

Article 2

« Art. 2. Frais de nouvelles plantations sur les routes de l’Etat : fr. 50,000. »

M. Peeters, rapporteur – J’ai vu avec plaisir que M. le ministre, par sa circulaire du 5 décembre dernier, a voulu s’entourer de tous les éclaircissements nécessaires, pour un objet si important que les plantations sur les routes pavées ; je l’engage beaucoup à faire surveiller de plus près ces plantations nouvelles ; j’ai remarqué que la condition qui oblige l’entrepreneur à former des grands trous, et de les remplir avec des gazons ou de terre végétale, condition indispensable pour avoir de bonnes plantations, est toujours négligée ; j’ai vu faire tant de plantations, mais nulle part je n’ai vu amener de la terre végétale.

Les élagages se font aussi avec peu de soin ; on emploie presque partout la même méthode ; l’on élague beaucoup trop dans certaines localités, dans les mauvais pays, les chênes surtout ne souffrent pas d’être élagués.

Je pense qu’à l’avenir il pourrait être fort utile pour les plantations surtout, de communiquer les conditions du cahier des charges aux administrateurs des communes situées à proximité des routes à entretenir, de cette manière, on appellerait l’attention publique sur cet objet, et l’on n’oserait plus commettre tant de négligences.

- Le chiffre de 50,000 francs est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à 4 heures et quart.