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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du lundi 20 janvier 1840
Sommaire
1. Pièces adressées à la chambre
2. Projet de loi portant le budget des travaux publics pour l’exercice
1840. Discussion des articles. Affectation du produit des canaux et des
rivières (de Puydt, Rodenbach,
Eloy de Burdinne, Dumortier, de Puydt, Peeters, Dumortier, de Puydt), lutte
contre les inondations de l’Escaut et barrage d’Autrive (Nothomb,
Van Hoobrouck de Fiennes, Nothomb,
Doignon, Nothomb, Desmet, Dumortier, de Puydt, Liedts, Nothomb, Desmet, Dubus
(aîné)), port de Dinant (Pirson, Nothomb),
travaux aux rives de
(Moniteur belge
n°21 du 21 janvier 1840)
(Présidence de M.
Fallon)
M.
Scheyven fait l’appel nominal à une heure.
M. le président tire au sort le
renouvellement des sections.
M.
Scheyven lit le procès-verbal de la
dernière séance dont la rédaction est adoptée. Ensuite, il présente l’analyse
des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Cuvelier, vinaigrier de troisième
classe à Bruxelles, réclame contre une pétition des brasseurs vinaigriers,
adressée à l’administration des impositions indirectes, tendant à majorer les
droits, les produits des vinaigreries artificielles. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le sieur Jean Moëller, professeur à
l’université catholique de Louvain, né en Wesphalie, demande la
naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
Discussion des articles
Chapitre III – Canaux,
rivières, polders
Article 1er
M. le président – Nous sommes parvenus au chapitre 3, canaux, rivières,
polders, 1,550,941 francs 12 centimes. ; nous mettrons d’abord en discussion
l’article du service ordinaire des canaux, rivières : fr. 357,210.
M.
de Puydt – La section centrale, dans
son rapport, fait l’observation suivante :
« Si le régime de nos routes ordinaires était appliqué
aux rivières et canaux, et que l’excédant des recettes fut destiné à former un
fonds spécial, cette somme serait annuellement employée à la création de ces
voies de communication navigables, dont le besoin se fait si vivement sentir
dans plusieurs provinces du royaume.
Le même rapport dit, un peu plus loin :
« L’une des sections a soulevé la question de
savoir si le moment n’était pas venu d’appliquer aux canaux le régime suivi
pour les routes ordinaires, c’est-à-dire de constituer un fonds spécial de
l’excédant de leurs produits, à l’aide duquel ces utiles voies de communication
pourraient être construites. »
Messieurs, moi aussi je viens demander si ce moment
n’est pas venu ; ou plutôt je crois qu’il est venu. Il est donc possible
de réaliser aujourd’hui ce vœu :
En 1837 j’ai développé devant la chambre deux
propositions de lois :
L’une ayant pour objet d’affecter spécialement à
l’entretien et à l’amélioration du système de navigation intérieure le produit
des canaux de l’Etat ;
L’autre tendant à autoriser le gouvernement à
contracter un emprunt, hypothéqué sur l’excédant du produit, l’entretien
déduit.
La chambre est aujourd’hui en position de pouvoir
apprécier le résultat probable de cette mesure. J’ai fait remarquer dans la
séance de samedi quelles avaient été les conséquences de l'emprunt pour les
routes.
Avant cet emprunt, l’indifférence la plus complète
existait partout : les provinces, les communes et les particuliers
considéraient le gouvernement comme devant seul exécuter les routes.
Depuis l’emprunt, les idées se sont modifiées à
l’instant, et c’est après 1837, c’est-à-dire postérieurement au vote de la loi
dont il s’agit, que les provinces, les communes et les particuliers, stimulés
par l’espoir d’obtenir des subsides du gouvernement, ont spontanément concouru
avec lui à l’exécution de travaux de routes qui ont absorbé un capital de près
de 30 millions, capital dans lequel le gouvernement n’a fournir qu’environ 13
millions, les provinces 11 millions, et les particuliers près de 6 millions.
Si l’on considère que les constructions de routes sont
des entreprises extrêmement chanceuses, puisqu’elles ne produisent moyennent
que 2 ¾ p.c., d’après le relevé des recettes de barrières, tandis que les
canaux, quoique plus coûteux à établir, rapportent néanmoins 10 p.c., on
comprendra que les capitalistes seront entraînés à mettre dans les dernières
entreprises des fonds plus considérables que dans les travaux de routes, et que
l’effet produit par le stimulant de l’emprunt pour les routes se manifestera dans
une proportion bien plus grande, quand il y aura un fonds spécial pour les
canaux.
Un coup d’œil général sur ce qu’il sera possible de
faire doit nous encourager à adopter ce système.
Les canaux projetés pour réunir le Hainaut à la mer du
Nord pourront alors s’exécuter par le concours combiné du gouvernement et des
particuliers. Ces entreprises intéressent les Flandres et le Hainaut tout à la
fois.
Les canaux de
Le canal de Mons à
Enfin, la canalisation du Luxemburg, qui intéresse
cette province et celles de Liége et de Namur, soit qu’elle se fasse suivant le
système proposé par l’ancienne société du Luxembourg, soi qu’elle se fasse
d’après un mode nouveau, pourra également se réaliser si le gouvernement a des
fonds à y consacrer pour aider l’industrie particulière.
Tous les travaux n’exigeraient pas un capital de plus
de 40 millions : un emprunt qui mettrait le gouvernement à même
d’intervenir pour un tiers ou un quart dans ces dépenses suffirait d’après le
crédit dont seraient entourées de pareilles entreprises comparées à celles des
routes.
Je viens donc proposer à la chambre de soumettre les
projets de loi que j’ai rappelés à l’examen des sections actuelles.
M. A. Rodenbach – Je ne m’opposerai pas à ce que demande l’honorable
préopinant, de charger les sections ou une commission de l’examen de son plan,
mais j’inviterai M. le ministre des travaux publics à vouloir bien faire étudier
les rivières du royaume dont la canalisation serait importante. Il y a dans le
district de Roulers une petite rivière qui, avec une somme de 100 mille francs,
deviendrait navigable, et donnerait un revenu d’au moins 10 p.c., peut-être
même de 12 p.c. Une population de plus de cent mille habitants paie aujourd’hui
plus d’un demi-franc le transport par chariots du charbon qu’elle va chercher à
Menin. Remarquez-le bien, ce n’est pas un sacrifice que je réclame ; c’est
l’emploi d’une faible somme pour l’Etat, et qui doit beaucoup rapporter. Il me
semble que, dans ce cas, on doit s’empresser de faire étudier la rivière dont
je parle. Je demande que M. le ministre fasse attention à ma demande.
M. Eloy de Burdinne – Messieurs, si chacun réclamait des canaux, ou la
canalisation des petites rivières, il ne resterait pas de ruisseau dont on ne
demandât la canalisation. Quant à moi, j’engage le ministre à se mettre en
garde contre tous ces faux renseignements qu’on lui donne. Je pourrais parler
aussi des petits ruisseaux de ma localité ; mais faut-il, pour transporter
un peu de chauffage, faire des canaux ? N’entreprenons pas trop, et ne
convertissons pas les petits ruisseaux en canaux.
M.
A. Rodenbach – Je ne demande pas que l’on
construise un canal ; je demande que l’on fasse une étude ; je
demande une amélioration pour que des populations ne paient pas leur
combustible plus cher qu’en France. Enfin, je ne demande ni une faveur ni un
sacrifice, car je propose au gouvernement de se créer un revenu de 12 p.c.
M. Eloy de Burdinne – Quand on a une masse
d’objets à l’étude, les employés manquent ; ils ont assez à faire par les
travaux importants dont ils sont chargés. Faites des canaux dans
M. le président – M. de Puydt demande que ses propositions, qui ont été prises
en considération, soient soumises aux sections ou à une commission.
M.
Dubus (aîné) – Il faudrait savoir d’abord
s’il existe encore des exemplaires suffisants.
M. le président – la proposition a été faite en 1836 ; il faudrait
peut-être la faire réimprimer ; le bureau prendra des informations à cet
égard.
M. Dumortier – S’il est convenu qu’on
attendra, pour prendre une résolution, que le projet dont il s’agit soit
réimprimé, je n’ai pas d’objections à faire pour le moment ; mais si l’on
veut que ce projet soit mis immédiatement à l’ordre du jour des sections, alors
je demanderai l’ajournement. Ce n’est pas, me semble-t-il, dans un moment où il
y a une si grande gêne dans nos finances, qu’on doit chercher à entraîner le
pays dans une dépense de 40 millions. Je crois que nous ne devons pas, pour
satisfaire quelques ingénieurs, créer ainsi une foule de canaux là où le besoin
réel n’en existe pas ; il faut commencer par mettre les recettes en
harmonie avec les dépenses, et jusqu’à ce qu’on en soit venu là, je verrais
avec le plus grand regret qu’on détournât l’excédant de produit des canaux des
fonds généraux de l’Etat, pour en faire un fonds spécial, comme on l’a fait
pour le produit des barrières. Lorsqu’on a discuté la loi relative à cet objet
mon opinion était, et je suis encore du même avis, qu’on eût beaucoup mieux
fait de ne pas y insérer une disposition qui oblige le gouvernement à consacrer
l’excédant du produit des barrières à la construction de routes nouvelles. Ne
croyez pas cependant, messieurs, que je voulusse écarter la possibilité de
créer de nouvelles routes. Loin d’avoir une telle pensée, j’ai toujours été
d’avis qu’il est nécessaire de créer, autant que possible des routes, mais il
m’a toujours paru qu’il ne fallait pas se lier les mains pour l’avenir. Il y a
des moments où le trésor public est prospère, et alors employez l’excédant du
produit des barrières à la construction de routes nouvelles rien de
mieux ; mais lorsque le trésor est obéré, il me semble que toutes les
ressources du pays doivent être laissées à sa disposition pour servir aux
besoins les plus urgents.
En ce qui concerne les canaux, messieurs, la chose est
bien plus important ; un canal, quelque petit qu’il soit, coûtera de suite
plusieurs millions, tandis qu’avec 100, 200 ou 300 mille francs on parvient à
créer des routes d’une grande étendue ; l’excédant du produit des
barrières s’élève annuellement à 5 ou 6 cent mille francs, de sorte qu’il
permet de créer chaque année plusieurs routes, sans que le trésor en soit
affecté d’une manière bien considérable ; mais si vous retirez du budget
l’excédant du produit des canaux, évidemment il ne restera plus de quoi faire
face aux dépenses. Je sais, messieurs, que le produit des rivières est très peu
considérable, mais il n’en est pas de même des canaux ; l’excédant du produit
des canaux s’élève à plusieurs millions par an ; le canal d’Antoing
rapporte à lui seul, je crois, 600,000 francs par an, le canal de Condé
rapporte aussi une somme très considérable ; il en est de même de
M. de Puydt – S’il s’agissait d’augmenter
les charges du pays, j’épargnerais à l’honorable M. Dumortier le soin de me
faire les reproches qu’il se permet en ce moment, parce que je ne ferais pas de
proposition dans ce but.
Loin qu’il soit question d’augmenter nos dépenses, il
s’agit, au contraire, de mesures propres à augmenter nos recettes. Il est
question de l'application productive d’une partie des recettes des canaux.
M. Dumortier prétend qu’on diminuera les ressources de
l’Etat de plusieurs millions : l’honorable M. Dumortier ne m’a pas écouté
ni ne m’a pas compris.
Quand on discutait l’emprunt pour les routes la même
objection a été faite ; les ressources du trésor doivent être diminuées en
pure perte : au lieu de cela il y a eu augmentation dans le produit des
barrières, dont une très faible somme est appliquée à servir les intérêts de
l'emprunt.
Pour les canaux, il ne s’agit que d’une somme de 10 à
12 millions pour les intérêts de laquelle il faudra 5 à 6 cent mille francs.
M. Peeters – Je concevrais les
observations de M. Dumortier si toutes les parties du pays étaient suffisamment
pourvues de communications ; mais dans un moment où l’on va dépenser tant
de millions pour construire le chemin de fer dans le Hainaut à côté des plus
belles routes et des plus beaux canaux, je ne conçois pas que l’honorable
membre qui se montre toujours si susceptible en faveur des principes de la
constitution dans laquelle il devrait bien voir que, s’il est nommé par le
district de Tournay, il n’en représente pas moins les autres parties du pays
aussi bien que sa localité ; il n’en représente pas moins
L’honorable membre
a avoué lui-même, dans la discussion du canal de l’Espierre, que sa
localité peut se passer de ce canal, maintenant il vient s’opposer à une
proposition qui tend à faire obtenir, sans préjudice pour le trésor, des
communications à des pays qui en ont le plus grand besoin. Puisque l’honorable
membre porte un si vif intérêt à Tournay, je vais dire un mot qui touche cette
ville. Aujourd’hui dans
M. Dumortier – Je ne comprends rien au
reproche que m’adresse l’honorable préopinant, je crois qu’il n’y a rien dans
mes paroles qui puisse justifier ce reproche. Certes, j’ai défendu et je
défendrai toujours dans cette enceinte les intérêts de la localité qui m’a
envoyé ici ; c’est là mon mandat mais l’honorable membre doit savoir aussi
que, dans toutes les circonstances où il a fallu défendre les intérêts d’autrui
je l’ai fait avec empressement, et spécialement lorsqu’il s’est agi de
M.
de Puydt – Vous ne m’avez pas compris.
M.
Dumortier – J’ai très bien
compris ; vous avez dit qu’il ne faudrait que la bagatelle de 40 millions
pour satisfaire aux besoins de toute
Remarquez, messieurs, que quand il s’agit de
construire des routes, les provinces, les communes et les particuliers
contribuent pour une part dans la dépense ; mais qui est-ce qui
contribuera dans les dépenses de l’établissement des canaux ? Les
provinces ne disposent que de faibles sommes ; lorsqu’une province
contribuera pour 100,000 francs, dans la construction d’un canal, ce sera
tout ; car le plus petit canal coûte plusieurs millions.
J’appelle de tous mes vœux la canalisation de
Je viens, messieurs, protester de toutes mes forces
contre le système vicieux qu’on voudrait nous faire consacrer au grand
préjudice du trésor public.
Quant à ce que dit l’honorable M. de Puydt, que depuis
l’emprunt pour les routes, le produit des barrières a augmenté, je vous dirai,
messieurs, que cette augmentation ne provient pas de l’emploi qui a été fait
par le gouvernement des fonds de cet emprunt ; c’est une conséquence
nécessaire de l'augmentation de l’industrie en Belgique ; les routes
nouvelles qui ont été établies se trouvent dans les localités les moins
productives, car là où les routes sont productives, on n’attend pas
l’intervention du gouvernement pour les établir, les compagnies et les
particuliers ont soin d’y pourvoir.
M. de Puydt – Je ferai remarquer à
l’honorable M. Dumortier que le produit des barrières augmente d’un septième
depuis l’emprunt, s’est accru malgré l’existence et le développement toujours
continu des chemins de fer ; évidemment cela est dû aux constructions
nouvelles.
M. Dumortier dit que, pour les routes, il y a eu
concours de particuliers, mais que pour les canaux dont la dépense est plus
élevé, les particuliers n’y interviendront pas. Eh bien, c’est précisément tout
le contraire qui doit avoir lieu, et ce n’est pas sur les dépenses qu’il faut
mesurer la participation des particuliers, mais sur l’intérêt ; or, les
routes qui ne produisent qu’un faible intérêt ont décalé l’emploi de près de 6
millions sur 28 millions. Il y a donc lieu d’espérer que pour des travaux qui
rapportent généralement 10 p.c., cette participation aura lieu dans une
proportion plus élevée.
Au reste, ceci est le fond de la question ; je
n’ai fait que proposer de faire examiner les projets de loi ; on discutera
tous ces points plus tard.
M. le président – La chambre a renvoyé le projet de M. de Puydt aux sections
de 1836 ; et l’honorable membre propose maintenant que ce projet soit
renvoyé au sections de 1840 ; M. Dumortier demande que cette proposition
soit renvoyée jusqu’après la réimpression du projet.
- La proposition de M. Dumortier est acceptée.
L’article 1er du chapitre III (Entretien du
canal au Sas de Gand, etc. 257,910 francs) est mis aux voix et adopté.
Articles 2 et 3
« Art. 2. Canal de Charleroy : fr. 757,375
66. » - Adopté
« Art. 3. Services extraordinaires des canaux de
Pommeroeul à Antoing et de Maestricht à Bois-le-Duc : fr. 60,000. » -
Adopté.
« Art. 4. Service de l’Escaut : fr.
185,525. »
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, d’après les développements du budget, la somme de
185,525 francs devait recevoir l’emploi suivant :
1° Travaux ordinaires dans les provinces de
2° Personnel des deux provinces : fr. 8,333.
3° Travaux d’amélioration dans les premier et second
biefs : fr. 53,500
4° Allocation supplémentaire pour le barrage
d’Autrive : fr. 107,000
Total : fr. 185,525.
A l’époque où ces développements ont été rédigés, le
barrage d’Autrive n’était pas encore adjugé. Par suite des modifications que
j’ai faites au projet, la dépense se trouve réduite de 57,000 francs,
c’est-à-dire qu’au lieu d’un supplément de 107,000 francs, il ne faut qu’un supplément
de 50,000 francs ; reste donc une somme de 57,000 francs, qu’il faut ou
retrancher du chiffre, ou destiner à un autre emploi ; c’est ce dernier
parti que je propose à la chambre.
Dans le budget on ne s’est occupé que de ce que
j’appellerai le haut Escaut, c’est-à-dire de l’Escaut depuis la frontière
française jusqu’à Audenarde, on ne s’est pas occupé de ce que j’appellerai le
bas Escaut, c’est-à-dire de l’Escaut depuis Audenarde jusqu’à Gand et
en-dessous de Gand.
C’est avec raison que la section centrale a signalé
l’espèce de lacune que présente le budget ; ses observations se réduisent
à ceci : Vous faites des travaux dans le haut Escaut, pour facilier
l’arrivée des eaux dans le bas Escaut, mais vous ne faites pas de travaux dans
le bas Escaut, pour accélérer le départ des eaux vers Gand et au-delà. Cette
remarque est juste, et je m’applaudis qu’on puisse y faire droit, au moyen de
la somme disponible que laisse l’allocation pour le barrage d’Autrive.
Vous savez tous, messieurs, que de nouveaux moyens
d’écoulement sont vivement réclamés dans
1° Recreusement du canal de décharge d’Eyne : fr.
24,000
2° Coupure à Seeverghem : fr. 21,000
3° Dévasement dans le bas Escaut en aval des écluses
de
Ces trois ouvrages exigeraient donc une somme de
50,000 francs.
Resterait une somme de 7,000 francs qui serait
reportée au n°3 : travaux d’amélioration dans les deux premiers
biefs ; et l’on dirait : « dans les trois premiers biefs. »
Les 7,000 francs serviraient à améliorer l’écluse de
Maire près de Tournay, écluse qui se trouve dans un état vraiment déplorable.
Je l’ai visitée il y a deux mois, avec plusieurs membres de la chambre, et
nomme avec l’honorable M. Dumortier, et nous avons été étonnés de voir encore
subsister cette écluse malgré son état d’abandon.
Je propose donc à la chambre de maintenir le chiffre
de 185,525 francs, mais le chiffre recevra un autre emploi d’après les
explications que j’ai données ; dès lors l’espèce de grief que
Dès lors les développements du budget seraient
ceux-ci :
1° Travaux ordinaires dans les provinces de
2° Personnel dans ces deux provinces (comme au
projet) : fr. 8,335.
3° Travaux d’amélioration dans les trois premiers
biefs : fr. 60,500.
4° Allocation supplémentaire pour le barrage
d’Autrive : fr. 50,000.
5° Recreusement du canal de décharge d’Eyne : fr.
24,000.
6° Coupure à Seeverghem : fr. 21,000.
7° Dévasements dans le bas Escaut en aval des écluses
de
Total : fr. 185,525.
M. Van Hoobrouck de Fiennes,
rapporteur – Messieurs, je ne m’opposerai
pas à la proposition de M. le ministre ; je l’appuie au contraire de
toutes mes forces. Messieurs, je m’étais vivement préoccupé de l’espèce de
contradiction dans laquelle on tombait en faisant exécuter des travaux à
l’Escaut supérieur pour accélère l’écoulement des eaux dans l’Escaut inférieur,
sans faire de travaux dans l’Escaut inférieur. La nouvelle destination du
crédit a pour but de parer à cet inconvénient.
Messieurs, j’avais d’abord demandé la parole parce que
je croyais que la somme de 53,500 francs pour travaux d’amélioration dans les
deux biefs, était exclusivement destinée à élargir l’écluse d’Antoing, d’après
l’engagement qui a été pris avec
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, vous aurez remarqué
qu’en 1832 l’opinion de la section centrale était que les travaux n’offraient
pas d’urgence. Depuis la question a été l’objet d’une instruction très longue
et minutieuse ; cette instruction est imprimée, elle fait partie du
rapport et des pièces qui vous ont été communiquées le 27 décembre 1837. Il y a
eu des conférences entre les ingénieurs des deux pays ; j’ai rendu compte
de ces conférences et de toute la correspondance. Il a été constaté qu’il était
indispensable, dans un intérêt commun, de faire des travaux aux deux biefs les
plus voisins de
Quand on a employé l’expression : « d’après
les engagements pris avec
J’ai vu avec plaisir que l’honorable rapporteur a
considéré la proposition que j’ai faite, comme faisant droit aux observations
qui avaient été présentées au nom de la section centrale ; de sorte qu’il
se trouve que nous pourrons faire des travaux d’amélioration sur l’Escaut.
Depuis la frontière jusqu’en dessous de Gand ; c’est-à-dire que nous nous
occuperons à la fois du haut Escaut et du bas Escaut. Je crois que nous devons
tous nous féliciter d’avoir pu arriver à ce double résultat au moyen de la
somme qui reste la même au budget.
M. Doignon – J’ai vu avec satisfaction,
dans les développements du budget, que le gouvernement annonce de
nouveau l’intention d’ajourner la canalisation de l’Escaut, qui faisait l’objet
du projet de loi présenté le 27 décembre 1837. J’aime à croire qu’appréciant de
plus en plus les puissantes considérations qui lui ont été présentées contre ce
projet, il finira pas reconnaître que son exécution, sans atteindre même pour
l’avenir le but proposé, serait tout à la fois nuisible à la navigation
elle-même, à l’agriculture et à la propriété.
Lorsque, l’année dernière, le gouvernement est venu
demander un crédit pour l’établissement d’un seul barrage qui serait placé à
Autrive, entre Tournay et Audenarde, nous en avons proposé l’ajournement en
nous fondant sur ce que cet ouvrage faisait lui-même partie de système de
canalisation dont la chambre était saisie par le projet de loi, qu’on ne
pouvait ainsi anticiper sur l’exécution de ce projet non encore adopté, ou le
scinder, et qu’il convenait s’attendre qu’il eût, avant tout, subi
l’instruction voulue par nos règlements. La chambre n’était pas plus préparée
qu’aujourd’hui à la discussion publique de ce vaste système, elle ne pouvait,
sans dangers, se prononcer sur cette question et faire le premier pas dans
cette grande entreprise.
Elle a néanmoins voté à la hâte et dans une séance du
soir, un crédit de 95 mille francs pour un seul barrage entre Tournay et
Audenarde. Mais le ministère reconnaît lui-même aujourd’hui que ce crédit est
insuffisant et qu’une deuxième allocation est indispensable pour exécuter
l’ouvrage d’une manière convenable, de telle sorte que bien certainement la
chambre est toujours encore libre maintenant d’en suspendre ou modifier l’exécution
si elle juge qu’il est effectivement prudent d’ajourner ce travail, ou que
celui-ci serait même inutile, et, par la suite, préjudiciable aux intérêts
mêmes qu’on prétend favoriser ; si elle juge enfin qu’il est préférable de
commencer cet essai par d’autres travaux dont le résultat doit évidemment
produire une amélioration avec la certitude de ne compromettre aucun intérêt,
si en un mot le même but peut être atteint par d’autres moyens qui n’excitent
point les plaintes dont ce système est l’objet.
Or, nous prions le gouvernement d’y apporter la plus
grande attention ; ce résultat peut être atteint par d’autres ouvrages
qu’il indique lui-même en partie dans le développement de son budget et dont la
dépense est comprise dans le crédit de 185 mille francs qu’il pétitionne. Ces
travaux consisteraient premièrement dans le dévasement et l’approfondissement
de l’Escaut supérieur et l’éloignement du débouché de l'écluse d’Antoing.
On sait que la navigation du bas Escaut entre Tournay
et Audenarde peut laisser à désirer quelque amélioration dans des moments assez
rares de grande sécheresse ; mais c’est en remontant à la cause du mal
qu’on en connaît le véritable remède, et, au total, après avoir consulté, non
pas les hommes de science et à théorie, mais les hommes de pratique, ces
navigateurs qui, passant toute leur vie sur le fleuve, en observent chaque jour
le mouvement et les mœurs, après avoir recueilli aux meilleures sources les
renseignements de fait, il nous paraît hors de doute que c’est aux envasements
qui se sont accrus successivement çà et là dans le lit du fleuve et qu’on a
négligé d’enlever depuis longues années, que c’est aussi aux ouvrages de la
main de l'homme qu’il faut attribuer les entraves dont on se plaint, et qu’il
suffiraient de remettre autant que possible ce beau fleuve dans son état
naturel pour donner à la navigation toutes les facilités désirables.
Un deuxième moyen plus facile encore de régler le cour
de l’Escaut de manière à avoir toujours des eaux à suffisance et en temps
convenable pour une navigation la plus prompt, et la plus régulière possible,
c’est de faire avec
La chambre se rappelle sans doute de quelle manière la
navigation se fait, une partie de l'année, sur l’Escaut. Depuis la frontière de
France jusqu’au Audenarde, le cours du fleuve est partagé en quelques biefs ou
bons d’eau qui chaque semaine font successivement descendre avec vitesse tous
nos bateaux réunis en rame dans le haut Escaut.
Quoique le bief de Tournay à Audenarde soit beaucoup
plus long que celui qui existe vers
Pour y remédier, M. l’ingénieur nous dit : L’eau
de ce bief ne suffisant plus pour le dernier, partagez celui-ci en deux parties
égales au moyen d’un nouveau barrage, et chacune d’elles aura alors plus d’eau
qu’il ne lui en faut, et comme s’il ne s’agissait ici simplement que d’une
opération toute mathématique sans tenir compte des faits, partagez encore de
cette manière, dit M. l’ingénieur, tout le reste du cours de l’Escaut jusqu’à
Gand, et l’eau ne vous manquera jamais pour votre navigation.
Je n’hésite pas à dire que tout ce système de
prétendue canalisation n’est que pure théorie et déjà le gouvernement l’a pour
ainsi dire reconnu lui-même en ajournant chaque année ce grand projet pour
s’arrêter à un ou deux ouvrages seulement et par forme d’essai. Ce qui seul
prouverait combien il est dangereux, dans de pareilles questions, de s’en
rapporter à l’opinion d’hommes de sciences ou de cabinet, c’est qu’ignorant
eux-mêmes, paraît-il (quoique tout le monde le sût) que l’Escaut roulait ses
eaux chargées de limon, on les a vus, comme en France même pour Rodignies et
Thun, proposer primitivement pour barrages des écluses à sas, écluses qui, dans
l’espèce, ne peuvent nécessairement qu’augmenter considérablement et de suite
l’envasement du fleuve, et rendre ainsi elle-même la navigation de plus en plus
difficile ainsi que les inondations de nos terres et prairies beaucoup plus
fréquentes. Quand des hommes savants et de grand mérité commettent dans leur
système d’aussi graves erreurs, que doit-on penser du reste de leur
projet ?
Aujourd’hui, revenus de cette erreur, il prétendraient
substituer les écluses à poutrelles aux écluses à sas, ou plutôt en d’autres
termes, substituer un grand inconvénient à un autre qui eût été plus grand
encore, puisqu’en effet l’écluse à poutrelles, avec ses deux dais construits en
pierre de chaque côté, n’arrêtant pas moins encore le cours des eaux, aurait
aussi pour effet à la longue, et quoique moins rapidement, d’envaser la
rivière, ce qui se voit dans la ville même de Tournay, par suite de la seule
construction de ses ponts qui n’ont cependant aucune espèce d’écluse.
Mais pour fournir en tous temps à la navigation l’eau
que l’on désire dans le bief entre Tournay et Audenarde, il n’est même
aucunement nécessaire de le diviser en deux parties par une écluse à
poutrelles ; que le gouvernement, qui a aujourd’hui l’administration de
l’Escaut, fasse curer avec soin les biefs supérieurs aux endroits où cela est
devenu nécessaire et ils produiront constamment comme autrefois toute l’eau
qu’on peut désirer ; nous en avons pour garant une longue expérience, puisque,
ci-devant, il n’existait aucun barrage dans ce dernier bief et l’on y recevait
la quantité d’eau nécessaire pour y faire parfaitement le service. Pourquoi
n’en serait-il pas de même aujourd’hui si l’on donnait au haut Escaut la
profondeur et la largeur qu’il avait alors. C’est donc évidemment par ce
dernier ouvrage qu’il faut commencer, ouvrage également indispensable pour
arrêter les inondations qui font un tort considérable aux terres et prairies.
Si le gouvernement connaissait exactement les lieux et
les faits, il comprendrait facilement que c’est là une des premiers causes de
tant de sujets de plainte, tant de la part de la navigation que de la propriété
et des populations qui habitent les rives du fleuve. D’après ses explications
jointes au budget, il semblerait qu’il n’est question de procéder au dévasement
qu’entre Tournay et Antoing ; mais on ne peut se dispenser de faire aussi
cette opération au-delà même de l’écluse d’Antoing ; il convient de la
faire notamment vis-à-vis des rivages de chaux, de pierres, etc. Le
gouvernement indique bien certains endroits où il est nécessaire de dégager le
lit des masses de limon et de pierres qui l’encombrent ; mais il en existe
bien d’autres omis sans doute dans les rapports qui lui ont été faits. Tous ces
détails sont beaucoup mieux connus de nos bateliers que des ingénieurs et
négociants.
Lorsque, dans les crues extraordinaires, l’Escaut,
sortant de son lit entre Rodignies et Antoing, répand ses eaux dans les
prairies immenses des villages de Laplaigne, Péronnes, Hollain, etc., il y
avait alors, à partir du premier de ces villages, en parallèle à l’Escaut, un
petit canal de desséchement qui venait jeter ses eaux dans le fleuve au-dessous
de l’écluse d’Antoing. Mais en arrivant à cet endroit, il trouve l’Escaut
tellement envasé que lui-même s’est envasé à son tour et n’est plus de
service ; il résulte de là que ces eaux, au lieu de s’écouler dans
l’Escaut, séjournent une bonne partie de l'année dans cette vaste plaine de
prairies, et présentent réellement l’aspect d’une mer. La conséquence encore de
cet état de choses, c’est que ces prairies riches autrefois, sont devenues, en
grande partie, de très peu ou de nulle valeur, et qu’il en est un bon nombre
dont le produit suffit à peine aujourd’hui ou ne suffit même pas pour payer les
contributions ; c’est que les eaux ayant perdu ce débouché dans l’Escaut,
elles poussent tous les ans les inondations jusqu’aux terres labourables et
ensemencées, et notamment jusqu’aux habitations et les grandes fermes et jusqu’à
la place et l’église même du village de Laplaigne.
Un autre envasement non moins remarquable qui empêche
les eaux en amont de Tournay de s’écouler assez vite et en assez grande
quantité dans les biefs inférieurs, c’est celui qui existe près de l'écluse de
Tournay aux fossés, ou « petite rivière », qui ont été primitivement
creusés tout exprès pour faire éviter aux eaux les obstacles qu’elles
rencontrent dans la ville de Tournay à cause de ses ponts, et les conduire en
dehors le long de ses murs directement dans le bas Escaut avec plus de
promptitude et en abondance.
Un autre obstacle à la marche régulière des eaux vient
non seulement du mauvais état de l’écluse en aval de Tournay, mais de ce que la
manœuvre s’opère en laissant constamment au fond du lit une partie des
poutrelles.
Il est donc constant, d’après tout ce qui précède, que
c’est inutilement, ou au moins prématurément, qu’on établirait aujourd’hui un
barrage à Autrive et que les premiers ouvrages à faire doivent être le
dévasement et l’approfondissement du fleuve. On doit d’autant plus adopter ce
parti qu’il est certain qu’il ne compromet aucun intérêt et que déjà il fait
droit aux nombreuses et pressantes réclamations des propriétaires et villages
riverains. Les calculs de l’ingénieur doivent céder ici en présence des faits.
C’est fort mal raisonner que de dire que le volume d’eau d’un bief est
insuffisant pour un autre parce que celui-ci serait beaucoup plus long, puisque
la chose peut dépendre de mille et une circonstances qui rendent ce calcul inexact,
et c’est ce qui se voit dans l’espèce.
Mais admettons même, ce qui n’est pas supposable, que
l’exécution de ces ouvrages et la levée des obstacles au libre cours du fleuve
n’aient point l’effet qu’on en attend, celui d’obtenir plus d’eaux et de rendre
plus facile et plus prompte la navigation dans le bief inférieur, il vous
resterait encore un autre moyen sans devoir recourir au barrage d’Autrive.
Les eaux du bief sont insuffisantes, dites-vous, pour
le bief inférieur. Mais les eaux ne manquent pas dans le haut Escaut sur le
territoire français ;
Mais si
Le gouvernement, dans les développements du budget,
nous parle d’engagements qu’il aurait déjà pris vis-à-vis de
Ces engagements de la part de notre ministère sont
encore de la catégorie de ceux que la diplomatie étrangère a surpris à sa
faiblesse. Contractés à l’insu même des chambres et de tout le pays, ils sont évidemment
inopérants et ne forment et ne peuvent former aucun obstacle à ce qu’on adresse
à
Puisqu’on a l’opinion que les eaux peuvent quelquefois
manquer, la première stipulation commandée par l’intérêt de notre navigation,
comme de notre agriculture, devait être de nous assurer dans ce bief supérieur
un volume d’eau suffisant pour alimenter ces barrages dont on craint tant, et
avec raison, les effets désastreux. Or c’est précisément l’objet qu’on a
négligé. Tout en reconnaissant que les concessions et ouvrages demandés par
Avant d’entreprendre aucun barrage, qu’on dise au
moins à
Puisque le gouvernement français travaille dans
l’intérêt évident de la vallée de
Supposons même qu’après l’exécution de tous ces
ouvrages préalables, la navigation n’ait point encore atteint la plus grande
perfection, ce ne serait certes point un motif pour lui sacrifier tous les
autres intérêts, ceux de la propriété, de l’agriculture, etc.
M. le ministre a dit encore que l’établissement de ces
nouveaux barrages n’est pas une innovation, mais l’extension d’un système déjà
connu et justifié par l’expérience. D’abord, c’est faire de la théorie que de
parler de système dans une matière où chaque fois tout doit dépendre des
circonstances du temps et des lieux. Si deux barrages ont dû être établis à
Antoing et Tournay, c’est qu’il a fallu céder à une nécessité impérieuse que
tout le monde regrette, puisque tout le monde en reconnaît les inconvénients. Or,
cette urgence et indispensable nécessité ne milite point au cas actuel, puisque
d’autres moyens, d’autres ouvrages sont indiqués par la nature même des choses
et qu’on n’a point épuisé ceux même que l’expérience et notre position
vis-à-vis de
Au résumé notre conclusion, c’est qu’il y a lieu,
sinon de rejeter, au moins de suspendre la construction nouvelle du barrage
entre Tournay et Audenarde, jusqu’à ce qu’on ait premièrement exécuté les
travaux dont nous avons parlé, et pu juger de leurs effets ou jusqu’à ce qu’on
ait obtenu de
J’invite, dans tous les cas, le gouvernement à faire
dès aujourd’hui des démarches pressantes vis-à-vis de
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, il ne s’agit pas
aujourd’hui du système de canalisation de l'Escaut. Il est vrai qu’il vous a
été présenté, le 28 décembre 1837, un projet de loi relatif à cet objet ;
mais ce projet de loi, il n’en est plus question. De qui s’agissait-il dans le
projet de loi ? De réaliser un système complet de canalisation de
l’Escaut, par voie de concession. Depuis l’Etat a repris l’Escaut. Il a été
entendu qu’on ferait successivement les travaux à l’Escaut. L’année dernière
vous avez, par une loi, par le budget, autorisé en principe l’établissement
d’un seul barrage entre Audenarde et Tournay qui coupera cet immense bief de 56
mille mètres.
Que devient maintenant le système de canalisation qui
paraît si redoutable à l’honorable préopinant ? Ce projet n’existe plus
que comme document à consulter, c’est-à-dire que si l’expérience prouvait qu’un
autre barrage peut encore être construit sans inconvénients pour les divers
intérêts de la navigation et des propriétaires et qu’une proposition fût faite,
on aurait recours à ce document.
Je suis vraiment étonné que l’honorable préopinant
n’ait pas davantage rendu justice à l’esprit de conciliation que je crois avoir
apporté dans cette question. Tournay est effrayé d’un système complet de
canalisation. Qu’a-t-on fait ? On a tenu compte des appréhensions de
certains intérêts, appréhensions que nous croyons exagérées, et on a consenti à
ne faire qu’un barrage, sans rien préjuger sur le reste du projet. Est-ce là,
messieurs, méconnaître les intérêts au nom desquels on réclame ? Est-ce là
se montrer absolu ? Est-ce là céder docilement, comme on m’en fait le
reproche, aux idées conçues a priori par les hommes de l'art ?
Les engagements pris pour continuer à me servir des
expressions peut-être trop absolues des notes du budget ; les engagements
pris envers
La preuve est qu’il était entendu que les stipulations
du procès-verbal seraient exécutées dans les deux années ; il est de
1833 : voilà sept ans écoulés et elles ne le sont pas encore ; il
faut avouer qu’il n’y a pas là un grande condescendance envers le gouvernement
français qui, de son côté, a commencé l’exécution de ses engagements. S’il n’a
pas fait plus, c’est que nous n’étions pas en mesure de lui dire d’exécuter
complètement les engagements pris en 1833.
Je regarde donc comme sans objet les observations de
l’honorable préopinant, quant au système complet de canalisation de l’Escaut,
car il ne s’agit ici que d’un seul barrage et nullement des autres parties du
système ; nous verrons plus tard ce qui sera nécessaire. J’ai même lieu
d’écrire que l’expérience prouvera qu’un seul barrage est suffisant entre
Audenarde et Tournay.
M. Desmet – Je partage la sollicitude de l’honorable M. Doignon pour les
intérêts des propriétaires, mais je ne suis pas d’accord avec lui sur les
moyens. Je pense que le système présenté n’est pas de canaliser mais de
redresser les nombreuses sinuosités du haut Escaut ; en second lieu, de
faire des canaux de dérivation, et en troisième lieu de faire des barrages. Je
dois vous faire remarquer qu’il faut examiner le projet dans son ensemble et
non pas en isoler les parties, car tout est combiné pour opérer ensemble. Ce
n’est pas seulement pour la navigation qu’on réclame l’exécution de ce projet,
mais pour les propriétaires. L’an passé, la commission d’enquête qu’on a réunie
à Audenarde était composée seulement de propriétaires de ce district ; ils
ont reconnu, non seulement l’utilité, mais la grande nécessité d’exécuter pour
ce qui concerne les propriétés, tout le projet présenté par l’ingénieur
Vifquain.
L’honorable M. Doignon a parlé de dévaser l’Escaut,
mais vous devriez employer des milliards pour cela.
M.
Doignon – J’ai dit dans certains
endroits.
M.
Desmet – J’ai compris que vous aviez
parlé d’approfondir la rivière, c’est pourquoi j’ai cru devoir faire remarquer
que c’est chose sinon impossible au moins très coûteuse. Ce sont les bateaux
qui tiennent la rivière à profondeur, mais ce sont surtout les sinuosités qui
forment les ensablements et les allusions. Et je crois qu’avec le système
projeté, on parviendrait à arrêter considérablement les ensablements ;
car, par les redressements, on donnera un plus grand courant à la rivière, et
par les canaux de dérivation, on fera écouler des eaux limoneuses par ces
canaux ; car, qu’est-ce qu’on cherche par le système présenté ? A
arriver à ce que le passage des eaux sauvages, qui a lieu annuellement, se
fasse par les canaux de dérivation. Comme l’Escaut a deux lits, que le lit de
la rivière est plus élevé que les canaux de dérivation ou les maîtresses
rigoles, il arrive que les eaux se déchargent plus facilement par ces
canaux ; mais pour que ces canaux puissent activement agir, il faut
absolument avoir des barrages dans la rivière. Car ce sera par les barrages
qu’on formera en aval un bassin, par lequel sera donné aux canaux beaucoup de
pente et qui augmentera de beaucoup le courant, c'est ce dont il est besoin
pour faire accélérer les eaux des inondations. Or, pour la conservation des
propriétés, il y deux choses à
considérer : l’irrigation et l’écoulement des eaux en temps utile ;
parce que si vous n’avez pas d’irrigation, comme c’est l’engrais des prairies,
vous n’aurez bientôt plus de récoltes. Par les canaux de dérivation, vous
obtenez l’irrigation et l’écoulement, parce que, comme les canaux servent pour
faire écouler les eaux des propriétés, ils servent aussi à les y faire entrer
et à les irriguer ; on pourra obtenir tous ces avantages par le projet de
M. Vifquain.
Le système de redressement de dérivation et de barrage
n’est pas nouveau. L’année dernière, je crois avoir dit que cela avait été
demandé par la ville de Tournay et le Tournaisis.
Je pourrais citer les mémoires très intéressants du
colonel de génie de Beneffe et d’un certain Cuviller, directeurs des eaux, qui
ont tous deux demandé ce que le gouvernement vous propose, et si vous voulez
consulter les archives de l’Etat, vous y verrez encore d’autres mémoires
intéressants sur les écoulements des eaux. Toujours on a dit qu’il n’y avait
qu’un seul moyen de les opérer convenablement et que c’était par le
redressement, le barrage et les modes de dérivation à établir sur l’Escaut.
A la suite des discussions qui ont eu lieu, on a
obtenu qu’on ferait seulement le barrage d’Autrive. Si le ministre des travaux
publics se borne à faire cela sans redresser le fleuve et creuser les canaux
qui sont nécessaires, tant en amont qu’en aval, je crains qu’on ne se plaigne
du barrage.
Le barrage d’Autrive sera toujours important pour
améliorer les basses prairies de Pottes et d’Hérinnes ; mais pour cela, il
faut construire une rigole maîtresse en amont d’Autrive et la continuer dans
les prairies d’Escanaffles et environs.
Ce sera un grand avantage pour ce canton de prairies
basses, dont on verrait en peu d’années augmenter les récoltes d’herbages, et
améliorer dans leur qualité et les rendre de bon foin, tandis qu’actuellement
ils sont d’une très mauvaise qualité et qu’à cause des inondations très souvent
ils ne peuvent être récoltés.
Je conviens que depuis Autrive jusqu’à Audenarde, on
pourrait laisser le bief sans autre barrage, mais les autres barrages projetés
entre Audenarde et Gand sont d’une urgente nécessité, et j’espère bien que le
gouvernement y donnera suite ; car de tous côtés et particulièrement des
propriétaires, ils sont demandés ainsi que les autres ouvrages projetés.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Cela viendra dans son temps.
M.
Desmet – C’est pour cela que je dis
que le système de barrage doit être exécuté dans son ensemble, avec les
redressements et les rigoles de dérivation, et je suis très aise d’apprendre
par la bouche du ministre que ces ouvrages seront exécutés.
Comme le gouvernement a repris la rivière, il doit avoir
tous les charges, et ces charges ne sont pas seulement pour ce qui concerne la
rivière en elle-même, mais tout qui y est attaché comme accessoires ou qui est
causé par elle.
C’est pourquoi j’insiste près de M. le ministre pour
qu’il fasse prendre soin que toutes les maîtresses rigoles soient annuellement
curées et dévasées, que les ponts qu’elles contiennent soient d’une largeur
proportionnelle à la rigole et soient tenus dans un bon état d’entretien.
J’insiste aussi pour que les chemins de halage ou les bords de la rivière
soient bien tenus, qu’on n’y fasse point des ouvertures ou qu’on n’en baisse
point les hauteurs, et particulièrement j’insiste pour que le règlement de 1740
soit scrupuleusement observé et surtout pour la manœuvre des écluses de décharge
à Gand.
Un autre objet que je soumets à M. le ministre des
travaux publics, c’est que, par suite du débordement de la rivière l’inondation
a lieu, non seulement des prairies, mais d’une quantité de terres labourables.
J’en appelle ici au témoignage de M. Thienpont, qui doit en savoir quelque
chose. Cela provient d’une lacune qui existe à une digue du haut Escaut, qui
commence au village d’Huerne et se termine à Eeke.
Cette submersion nuisible a lieu dans les communes de Singhem,
Asptre, Auwghem, Huysse et Mulhem, et s’étend bien d’une lieue et demie dans
l’intérieur des terres cultivés. Les dégâts sont immenses, et c'est très facile
à le concevoir, car il y a par centaines d’hectares qui se trouvent submergés
et qu’on devra cultiver et semer de nouveau. Je désire que M. le ministre fasse
prendre des informations. Je ne doute pas qu’il verra la nécessité d’exécuter
le travail que nécessite la digue dont je viens de parler pour mettre à l’abri
de ces désastres les communes que je viens d’énumérer.
Le système de l'ingénieur Vifquain est approuvé par
tous les propriétaires des Flandres ; si on ne le met pas à exécution,
jamais l’état des prairies ne sera amélioré ; je ne puis trop le dire, il
est excellent et il apaisera tout à la fois les plaintes des bateliers comme
celles de propriétaires, et si on ne le met à exécution, je mets en fait que
dans dix ans plus de mille hectares de prairies seront décuplées en valeur et
les terrains marécageux seront devenus productifs. J’ai dit.
M. Dumortier – Messieurs, la question des
travaux relatifs à l’Escaut est un des questions d’art les plus graves et les
plus délicates que vous ayez à examiner ; car vous avez là en présence
divers intérêts opposés et qui sont tous majeurs, c’est-à-dire, non pas de
quelques centaines de mille francs, mais de plusieurs millions. Vous comprenez
donc combien cette question est délicate, et d’après cela, vous devez sentir
que l’on ne doit pas apporter légèrement des modifications au système qui
existe actuellement et dont personne n’a à se plaindre.
M. le ministre des travaux publics demande les fonds
nécessaires :
1° Pour travaux ordinaires d’entretien ;
2° Pour travaux d’amélioration dans les premier et
second biefs ;
3° Une allocation supplémentaire pour le barrage
d’Autrive.
Là se borne le projet de M. le ministre des travaux
publics. M. Desmet va plus loin : il veut revenir au système de M.
l’inspecteur Vifquain : de nombreuses coupures, la construction d’un grand
nombre d’écluses sur l’Escaut et la canalisation de l’Escaut dans son entier.
Pour apprécier ces diverses demandes, il importe de connaître d’abord les
faits.
L’écluse supérieure de l’Escaut, en Belgique, est
celle d’Antoing. C’est là qu’arrive l’Escaut à son débouché de
Au moment où je parle, l’Escaut marque à Tournay, au
radier du pont Notre Dame, de dix-sept pieds et demi à
Quand, l’année dernière, la chambre a voté l’écluse
d’Autrive, on ne l’a fait que pour la facilité de la navigation ; alors
elle ne devait jouer que dans les basses eaux, et par là elle était peu
nuisible aux prairies des bords de l’Escaut. Aujourd’hui, cette écluse aura un
autre but : avec le canal de l’Espierre, pour pouvoir opérer la manœuvre
de l'entrée et de la sortie du canal, il faudra tenir les eaux en tout temps,
et alors le remous se fera sentir jusqu’à Tournay.
On a beaucoup parlé, ces jours derniers, du canal de
l’Espierre ; je suis maintenant à même de démontrer à l’évidence que ce
canal malencontreux, qu’on nous présentait comme devant avoir de si heureux
résultats en faveur des houilles belges aura au contraire pour résultat de
faire arriver les houilles françaises à Roubaix à 10 p.c ; meilleur marché
que les houilles belges. Cela est fort simple : les houilles belges,
arrivant à l’écluse d’Auterive, devront payer le droit du canal d’Antoing,
tandis que les houilles françaises, venant en descente du fleuve, n’auront pas
de droit à payer. Pour le commerce intérieur, cela ne nous portera aucun
préjudice, elles devront payer le droit de douane, et il y aura large
compensation. Mais quand elles seront destinées pour
Ce canal, qui sera dans l’intérêt de
Je sais que le gouvernement français a fait la
demande, afin de se débarrasser des eaux des bords de
Avant la canalisation,
Je remercie M. le ministre des travaux publics du
dévasement qu’il a fait exécuter et des travaux qu’il a fait faire à l’écluse
de Maire, laquelle nécessite les plus urgentes réparations. Quant à
l’envasement, il est si considérable à Tournay, que dans le quartier où était
situé le parlement, au temps de Louis XIV, et où sont les maisons qu’occupaient
les conseillers, qui étaient les personnages les plus importants de la ville,
les appartements du rez-de-chaussée de ces maisons en sont devenus les caves.
Les anneaux auxquels on attachait alors les navires sont maintenant à huit
pieds sous les eaux. Ce qui prouve combien il faut prendre garde de se laisser
aller aux belles conceptions des ingénieurs, qui n’ont pas les connaissances
géologiques nécessaires pour de pareilles opérations, et qui affectent le plus
souverain mépris pour la propriété.
L’honorable M. Desmet ne veut pas qu’on fasse le
dévasement de l’Escaut, parce que cela coûterait, dit-il, des milliards ; et
cependant son système tend à exhausser les eaux du fleuve, à causer son
envasement, et, par suite, à donner lieu à son dévasement.
Mais pourquoi donc vouloir canaliser ce fleuve ?
On ne vous demande rien pour ce fleuve. Faites-y les améliorations nécessaires ;
voilà tout ce qu’on désire. Sous le prétexte de faire nos affaires, on veut
causer notre ruine. C’est pour cela que nous élevons la voix. On regardera
toujours une telle défense comme sacrée dans cette enceinte.
Je serais tenté de croire que l’honorable M. Desmet
qui parle du lit de l’Escaut, ne le connaît pas ; car il parle d’un second
lit de l’Escaut ; or, il n’y a pas un second lit dans la vallée de
l’Escaut ; il n’y en a jamais eu qu’un seul. L’honorable membre se trompe
également, lorsqu’il parle de marais au bord de l’Escaut. Il y a cent ans, il y
avait des marais ; mais aujourd’hui, au moyen des améliorations faites par
les communes et les particuliers, ces marais ont disparu. Je pourrais citer des
communes où il y avait cent hectares de
marais, et il n’y en a plus maintenant un hectare. C’est vraiment induire la
chambre en erreur que de parler toujours de ces marais.
Je crois donc qu’il est important de ne pas toucher à
l’Escaut, ou d’y toucher le moins possible. Vous avez pour vous l’expérience
qui a été faire des barrages, qui avaient été construits pour améliorer la
navigation, ont causé de désastreuses inondations.
Je vous citerai pour preuve la pétition qui vous a été
adressée par tous les bateliers du haut Escaut, dans le cours de l’an dernier.
Voici ce qu’ils disent, relativement à l’écluse de Rodignies.
Autrefois nous passions à l’écluse de Rodignies avec
un tirant d’eau de mètres
Voilà, messieurs, ce que disent les bateliers, les
personnes qui naviguent. Ils disent qu’il y a vingt ans on passait avec des
bateaux ayant un enfoncement de plus de deux mètres, et que maintenant on ne
peut passer qu’avec des bateaux ayant un enfoncement d’un peu plus d’un mètre.
L’Escaut est le premier fleuve du pays ; c’est la grande artère de
M. de Puydt – Quoiqu’il ne soit question,
pour le moment, d’après la déclaration du ministre, d’aucun projet arrêté pour
la canalisation de l’Escaut, je ne puis cependant passer condamnation sur les
étranges principes que vous venez d’entendre.
Il n’y a dans tout ce que vient de dire l’honorable M.
Dumortier pas un fait qui ne soit inexact, pas un principe dont l’application
ne soit faussée.
M.
Dumortier – Prouvez-le.
M.
de Puydt – C’est ce que je vais faire.
Le préopinant pose un fait, que les ingénieurs veulent élargir l’écluse
d’Antoing à l’amont de Tournay afin de donner passage à une plus grande masse
d’eau, et qu’on a le projet de barrer ensuite la rivière vers Autrive à l’aval
de Tournay, de manière à faire refluer les eaux dans la partie intermédiaire du
vallon pour noyer le terrain : Eh bien, cela n’est pas exact. Il est très
facile de critiquer un système supposé en prêtant de telles intentions à des
ingénieurs.
Les travaux de canalisation d’une rivière ont pour but
d’en régulariser le régime ; surtout quand il existe sur cette rivière des
barrages qui n’ont été calculés d’après aucune étude de ses crues et de son
produit d’eau, d’après la nature du terrain. C’est dans cette condition
fâcheuse que se trouve aujourd’hui l’Escaut, et ses inondations sont dues à
l’inobservance des règles que l’on veut établir.
Eh bien, cette rivière, avant 1835, était canalisée
très imparfaitement ; sur un point, il y avait des écluses trop
étroites ; sur d’autres, des barrages fixes ; ailleurs, des barrages
mobiles ; les uns paralysaient l’effet des autres ; les inondations
étaient fréquentes, indomptables.
Le barrage d’Antoing n’a pas aujourd’hui une ouverture
égale à la section transversale du lit du fleuve ; on veut lui donner
cette section : le barrage qu’on construira à Autrive aura également une
ou plusieurs ouvertures d’une surface au moins égale à la section transversale
du lit. Ces barrage, ayant des poutrelles mobiles, pourront être manœuvrées suivant
les variations du produit d’eau, de manière qu’étant entièrement ouverte, la
rivière se trouve rendue à la liberté primitive, comme s’il n’y avait pas de
barrages. La garantie des propriétés repose, d’après cela, sur un règlement
facile à observer.
Ces barrages n’étant entièrement fermés qu’à l’époque
des plus basses eaux, on peut alors, dans l’intérêt de la navigation, soutenir
la flottaison à une hauteur qui n’expose les prairies à aucune danger.
Des travaux ainsi conçus, ainsi faits, sont l’œuvre
d’ingénieurs qui, quoi qu’on en dise, connaissent les lois de l’hydrostatique,
et ne sont pas sourds aux enseignements de la géologie.
On a dit que les projets proposés n’étaient que pure
théorie ; et qu’il ne s’agissait que de systèmes contre lesquels s’élève l’opinion
des hommes d’expérience.
Messieurs, je ne crois pas que toute l’expérience sur
ces matières soit renfermée dans les murs de Tournay et ce que l’on propose
n’est pas une chose neuve ; je vais en citer un exemple très remarquable.
Il y a en Belgique une rivière très importante et
soumise à un régime très variable et bien plus capricieux que l’Escaut, c’est
Depuis 1825, on a changé cet état de choses : on
a établi dans le lit de
Voilà un résultat qui est le fruit d’une étude bien
entendue des localités et l’application sage des principes dont on veut dénier
la connaissance aux ingénieurs. Ce sont ces résultats que nous désirons voir
obtenir sur l’Escaut.
M. Liedts – Messieurs, j’applaudis de
tout cœur à la sollicitude des députés de Tournay ; leur but est le même
que le nôtre, que celui du gouvernement. Toutefois, ils me permettront de
m’étonner qu’ils n’aient pas produit leurs observations l’année dernière, alors
qu’il s’agissait de poser en principe l’établissement d’une écluse à Autrive.
M.
Dumortier – L’écluse n’a été adoptée
que par quelques voix.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Quelques voix ! Elle a été adoptée à la majorité de 34
voix contre 18, et après deux jours de discussion !
M.
Liedts – La chambre a posé le
principe du barrage que l’on établit à Autrive ; 90 mille francs y ont
déjà été consacrés ; ne serait-il pas extraordinaire de voir la chambre
revenir sur sa décision après l’emploi d’une telle somme ?
La question qui nous occupe est celle-ci : Quel
est le meilleur moyen de perfectionner la navigation de l'Escaut sans nuire aux
propriétés riveraines, et même en leur faisant du bien ? Cette question a
été l’objet d’une enquête ; tous les hommes de l’art ont été
entendus ; et ce serait sur l’allégation des députés de Tournay que l’on
reviendrait sur un système consacré et sur les décisions des ingénieurs !
Messieurs, tout ce que nous pouvons faire de plus raisonnable, c’est de recommander
la question à la sollicitude du gouvernement.
En quoi consiste, d’ailleurs, le système des députés
de Tournay ? ce serait d’abandonner le système de barrage, et de dévaser
l’Escaut. J’ai entendu dire que ce dévasement coûterait des millions, si
toutefois il est praticable ; et je crois que cette évaluation n’est pas
exagérée, si j’en juge pas les dépenses qu’exige le dévasement d’un bassin
d’Anvers, lequel n’est pas très large : il en coûtera 150 mille francs. Et
vous conviendrez qu’il faudrait être un bien grand nombre de bassins semblables
au bout les uns des autres pour équivaloir à quelques lieues de l’Escaut.
Mais, dit-on, il faudra bien arriver à ce dévasement
un jour ; car vous allez relever le lit du fleuve en maintenant un barrage
à Autrive. Il a été répondu à cette observation par M. de Puydt à l’occasion de
la discussion du canal de l’Espierre. Cet honorable membre vous a fait
remarquer que l’observation ne serait juste que s’il s’agissait d’un barrage
permanent ; mais qu’il est sans fondement lorsqu’il s’agit d’un barrage
mobile, facile à manœuvrer, et qui enlèvera plus de vase que les eaux n’en
déposeront. J’ai la plus grande confiance dans les connaissances géologiques
des hommes de l’art qui ont pris part à l’enquête, et beaucoup plus que dans
celles des honorables membres de Tournay ; et je voterai pour le chiffre
en délibération, en priant M. le ministre des travaux publics de porter son
attention sur cette importante affaire.
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Entre M. Desmet et M.
Dumortier, il n’y a pas si grande divergence qu’on pourrait le croire. Quand M.
Desmet parle de la canalisation de l'Escaut, ce qu’il demande, c’est le
rétablissement d’un barrage, au moins entre Gand et Audenarde. Ce que M. Dumortier
redoute, c’est qu’on établisse plus d’un barrage entre Tournay et Audenarde.
M. Dumortier, dans une session précédente, a déclaré
que, s’il ne s’agissait que d’u seul barrage à Autrive, il n’y verrait pas un
grand inconvénient. Il a même demandé que le barrage fût à Autrive ; ce
qui a été décidé par arrêté royal, du 13 février 1839.
Ce que redoute M. Desmet, c’est qu’on n’établisse pas
de barrage entre Gand et Audenarde ; à cet égard, rien n’est décidé. S’il
est reconnu qu’un barrage entre Gand et Audenarde est utile à la navigation
sans nuire à l’agriculture, et même en contribuant à l’assèchement des
propriétés riveraines, on demandera au budget, soit de l’exercice 1841, soit de
l’exercice 1842, des crédits pour exécuter ce barrage. D’après tous les renseignements
que j’ai recueillis, un seul barrage entre Tournay et Audenarde suffira
probablement. Ainsi on n’a pas renoncé au barrage que réclame M. Desmet, et on
ne paraît pas d’intention de faire entre Tournay et Audenarde plus d’un
barrage : ce que craint M. Dumortier.
Messieurs, j’ai déjà, tout à l’heure, interrompu un
orateur, fait remarquer que précisément cette question de l’établissement du
barrage d’Autrive avait fait, l’année dernière, l’objet d’une discussion de
deux jours. Je croyais même que cette discussion avait fini par une espèce de
transaction : l’établissement d’un seul barrage entre Tournay et
Audenarde. Il ne faut donc pas qu’on vienne dire aujourd’hui que la décision a
été en quelque sorte enlevée : la discussion a été très approfondie, et il
y a eu 34 voix contre 18 pour rejeter l’ajournement et décider l’établissement
du barrage. L’honorable M. Dumortier, je le répète, s’est borné à demander que
le barrage fût établi à Autrive ; eh bien, il est établi à Autrive.
M. Desmet – Quand il a commencé son discours, l’honorable M. Dumortier a
dit que je voulais travailler en faveur des propriétés des Flandres et faire
tort aux propriétés du district de Tournay ; sous ce rapport, l’honorable
membre est gravement dans l’erreur.
Mais, messieurs, je commencerai à vous faire remarquer
que l’honorable membre ne nous contredit plus pour ce qui regarde le système,
tel qu’il est présenté par l’inspecteur Vifquain, pour faire les améliorations
que requièrent l’Escaut et les propriétés riveraines. Et ensuite je dois
déclarer à l’honorable contradicteur que ce que nous demandons pour l’Escaut
n’est pas seulement avantageux pour les Flandres, mis aussi pour le Tournaisis,
car le projet que nos appuyons, et cela de toutes nos forces, sera aussi très
avantageux pour les propriétés riveraines de l’Escaut dans son pays, il est le
seul qu’on puisse employer efficacement pour faire écouler en temps et prémunir
ces propriétés contre les inondations hors de saison, et dont l’honorable député
de Tournay se plaint constamment.
M. Dumortier dit encore qu’il n’y a point de marais le
long de l’Escaut. Mais, messieurs, je ne conçois pas comment on peut avancer de
telles inexactitudes. Je demanderai à l’honorable membre comment il considère
les bas fonds qui se trouvent dans les communes de Potts et d’Herinnes,
communes du district de Tournay ; ce serait très heureux pour ces
communes, si l’honorable député de ce district disait vrai.
L’honorable gouverneur de
L’honorable M. Dumortier est encore dans l’erreur
lorsqu’il dit que dans la vallée du haut Escaut, il n’existe pas deux lits de
rivières ; messieurs, dans cette vallée, il y a deux rivières, l’Escaut et
les maîtresses rigoles ou canaux de dérivation qui sont plus bas que le lit de
l’Escaut.
Et ce sont ces petites rivières ou rigoles maîtresses
qui, quand elles ne sont bien tenues et bien dirigées, sont les meilleures oies
d’écoulement pour chasser les eaux de l’inondation et garantir les prairies des
dommages qu’elles en ressentent presque tous les ans.
M.
Dumortier – Ce n’est pas exact.
M.
Desmet – C’est très exact. M. le
ministre des travaux publics peut l’affirmer ainsi que la plupart des honorables
députés de ma province ; mais, messieurs, il est très facile de tout nier,
mais il ne sera pas si facile à l’honorable membre de prouver ce qu’il avance.
M. Dubus (aîné) – Une chose bien certaine, messieurs, c’est que
l’élargissement de l’écluse d’Antoing et le barrage d’Autrive ne font aucun
tort aux propriétés qui environnent Audenarde ; mais la question est de
savoir s’ils ne portent point dommage aux propriétés des environs de
Tournay ; et je crois que nous avons des raisons pressantes pour appeler
l’attention de la chambre sur ce point. Si donc, l’honorable M. Liedts ne porte
pas un grand intérêt à la question, nous y portons, nous un très grand intérêt.
Il y a eu deux causes, messieurs, qui semblent devoir
amener les mêmes résultats : des inondations à Tournay et aux
environs ; si l’on élargit l’écluse d’Antoing, il est évident que les eaux
se porteront en plus grandes masses sur Tournay ; si l’on établit un
barrage entre Tournay et Audenarde, à coup sûr cela ne facilitera pas
l’écoulement des eaux, mais cela aura un effet tout contraire ; ce sont
donc là deux causes qui doivent concourir à faire s’accumuler les eaux aux
environs de Tournay ; il me semble que cela doit être évident pour tout le
monde.
« Mais, dit-on, il y a nécessité », il
semble même que la discussion est inutile. Eh bien, messieurs, les hommes
pratiques dont nous sommes en quelque sorte les organes (car nous n’aurions
point parlé avec cette assurance, si nous n’avions pas consulté les personnes
plus à même d’apprécier les intérêts des propriétaires que les ingénieurs qui
méprisent souvent ces intérêts lorsqu’ils font leurs projets), ces hommes
pratiques ont vu le danger, et si nous entrons dans le système où l’on veut
nous entraîner, les demandes d’indemnités qui nous arriveront ne devrons pas
rencontrer de difficulté ; car si, pour favoriser les propriétaires
français ou pour satisfaire aux demandes de ceux qui s’occupent principalement
de la navigation, vous changez le régime de l’Escaut de manière à apporter des
dommages notables aux propriétés riveraines ; certes vous ne pourrez pas
refuser de réparer le mal que vous aurez causé.
On allègue la nécessité ; mais, messieurs, cette
nécessité n’a pas été démontrée, notamment quant à l’élargissement de l’écluse
d’Antoing, on l’accorde aux réclamations de
Il me semble que c’est là élever ces prétentions très
haut. Je crois aussi que la situation des bords de
On prétend qu’il n’y aura aucun dommage parce qu’on
donnera à l’écluse d’Autrive des ouvertures nouvelles transversales. Il
résultera de là que l’obstacle sera moindre que ce qu’il serait s’il y avait
moins d’ouverture, mais on ne contestera pas qu’il y aura toujours un obstacle.
Remarquez, messieurs, que l’écluse d’Audenarde fait
déjà sentir ses effets, jusqu’à Autrive. Ainsi l’écluse d’Autrive fera sentir
ses effets à Tournay ; les eaux s’écouleront bien moins vite qu’à présent,
et dès lors il y aura des inondations qu’il n’y a point à présent.
Si cela ne doit pas arriver, je m’en réjouis, mais
j’insiste sur les craintes que j’ai à cet égard, parce que ces craintes sont
partagées par un grand nombre de personnes de Tournay, et parce que si l’on
réalise ce système, on ne pourra pas se refuser à faire droit aux demandes en
dommages-intérêts que l’on ne manquera pas de faire à charge de l’Etat.
- Le chiffre de 185,525 francs est mis aux voix et
adopté.
Article 5
« Art. 5. Service de
- Adopté
« Art. 6. Service de
M.
Pirson – Dans la discussion générale
du budget des travaux publics, j’avais prié M. le ministre de dire s’il avait
reçu la réclamation des bateliers et navigateurs de
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Cette réclamation ne m’est pas parvenue, mais je m’en
informerai.
M.
Pirson – Cependant le conseil
provincial avait chargé la députation de s’adresser à M. le ministre.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Je promets à l’honorable membre de prendre des informations
à cet égard.
M.
Pirson – La chose est assez
pressante. On a fait deux ports de déchargement dont il est impossible de se
servir. M. le gouverneur de la province a été sur les lieux, ainsi que tous les
députés de la province, ils ont vu ce dont il s’agit. Nous sommes maintenant
occupés à percer un ancien bastion pour faire une nouvelle rue afin de faciliter
l’abord des ports qui ont été faits mais aussi longtemps qu’il sera impossible
de s’en servir, nous devrons suspendre nos travaux, et cependant la navigation
a besoin de bords de déchargements. L’affaire est très pressante. Je dirai
qu’il y a aussi un peu de retard dans les propositions des ingénieurs actuels,
parce qu’il répugne toujours à des collègues de détruire l’ouvrage qui a été
fait par leurs devanciers ; et l’ouvrage n’est pas ancien.
M. de Garcia – Messieurs, lors de la discussion générale, j’ai fait
observer au ministre que la somme pétitionnée par lui pour réparations aux
rives de
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, l’étude sur
M. de Garcia – Messieurs, les observations que j’ai eu l’honneur de faire
ne tombent pas sur le point de savoir si la somme de 24,000 francs devait
servir à l’amélioration du fleuve. J’ai demandé si cette somme était suffisante
pour les réparations ordinaires. M. le ministre m’a répondu qu’il s’était borné
à demander le chiffre qui figurait dans les budgets provinciaux de Liége et de
Namur ; eh bien, je puis affirmer qu’avec ce chiffre les réparations
nécessaires n’auront pas lieu. Je pense qu’un des motifs qui ont engagé le
gouvernement à proposer de remettre quelques fleuves sous la direction de
l’Etat, était que les provinces ne s’imposaient pas les sacrifices nécessaires
à cet égard. En conséquence, je demanderai que M. le ministre veuille faire
majorer le chiffre, sinon je ferai une proposition formelle à ce sujet.
Je prierai M. le ministre de faire immédiatement
dresser par les ingénieurs le devis estimatif de la dépense qui est nécessaire
pour rendre la navigation seulement praticable. J’entends dire que mon
observation tend à un projet de canalisation de
Je demande seulement que l’on fasse les réparations
nécessaires, pour que la navigation de
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, je dois le
répéter, il ne s’agit, cette année, que du service ordinaire de
Si l’honorable préopinant fait une proposition, je
serai forcé de déclarer que, pour le moment, je ne sais pas à quoi le
supplément serait employé ; il faudrait alors faire une étude, et chercher
à quels travaux urgents d’amélioration il serait convenable de destiner le
supplément. Je crois, messieurs, qu’il est prudent de s’en tenir au chiffre que
j’ai proposé. Ne faisons pas toutes les choses en une fois ; procédons
graduellement. L’année prochaine, nous n’aurons plus un chiffre aussi
considérable pour l’Escaut, et alors
M. de Garcia – Messieurs, je suis fort
étonné que M. le ministre ne sache pas à quoi il pourrait employer un
supplément de crédit. M. le ministre demande un rapport des ingénieurs, et il
ne sera plus embarrassé à employer la somme.
M. Lebeau – Je ne comprends pas l’insistance de l’honorable préopinant.
Il semble, d’après lui, que le ministre devrait demander un supplément
d’instruction au corps des ponts et chassées dans la province de Namur ; mais
il est à remarquer que le projet de budget des travaux publics pour 1840 n’a
été rédigé, en ce qui concerne les rives de
L’honorable M. de Garcia a parlé d’améliorations à
faire à la navigation de
Quant à ce qu’a dit l’honorable M. de Garcia, que les
chemins de halage sont en mauvais état, cela arrive tous les hivers, c’est la
conséquence des grandes crues ; si les chemins de halage sont toujours plus
ou moins endommagés, la faute en est donc aux événements et non à
l’administration provinciale.
Je sais personnellement que l’administration
provinciale de Namur n’a pas seulement employé, selon le vœu du corps des ponts
et chaussées, les sommes provenant des droits de navigation, pour entretenir et
améliorer les chemins de halage, mais qu’elle a encore affecté des sommes
considérables à la construction de quais, chaque fois que la nécessité en a été
établie par le corps des ponts et chaussées. Ainsi, depuis la révolution, l’on
en a construit deux ou trois à Dinant, et deux à Namur dont l’un, très
considérable et très coûteux, vient d’être achevé et paraît réunir toutes les
conditions que le commerce en attendait. J’étais bien aise de saisir cette occasion
de dire un mot, pour mettre la chambre en garde contre ce qu’il pouvait y avoir
d’exagéré, contre son intention peut-être, dans les paroles de l’honorable M.
de Garcia.
M. de Garcia – Messieurs, M. le ministre des travaux publics prétendait
tout à l’heure que dans mes observations, je touchais à ce qu’il appelle
l’amélioration de la navigation de
- Personne ne demande plus la parole, l’article 6 est
mis aux voix et adopté.
« Art. 7. Service de
M.
Simons – Messieurs, si je n’ai pas
pris la parole ni dans la discussion générale de ce budget ni sur le chapitre 2
relatif aux routes, ce n’est pas que les vives réclamations, que nous avons
faites, les années précédentes, au sujet de l'application peu équitable des
fonds consacrés à l’établissement de nouvelles voies de communication, aient
obtenu leur apaisement en ce qui concerne la localité dont je tiens mon mandat.
Non, certes tel n’est pas le motif du silence que j’ai cru devoir
m’imposer ; aux griefs que nous n’avons cessé de signaler dans cette enceinte
à l’attention de M. le ministre des travaux publics sont venus se joindre
d’autres griefs bien plus accablants, suites désastreuses du traité de paix
avec
Ceux-ci exigent sans doute un redressement d’autant
plus prompt que l’honneur national y est engagé et l’impose au pays entier
comme une dette sacrée.
Je ne me suis imposé dans cette circonstance le
silence, que parce que j’ai foi dans l’engagement de la législature, que parce
que j’ai foi dans la parle du cabinet.
Avec confiance nous avons pris acte des paroles qui
ont été prononcées dans une discussion tristement mémorable ; nous ne
cesserons d’en provoquer l’accomplissement avec insistance, si, contre toute
attente, le cabinet ne tenait à honneur d’y rester fidèle.
Après cette petite digression, que je me suis permise
pour que l’on ne prenne pas le change sur la véritable situation de la localité
à laquelle je fais allusion, j’aborde l’objet pour lequel j’ai demandé
particulièrement la parole.
Messieurs, j’ai vu avec peine dans le rapport de la
section centrale que quelques sections se sont élevées contre le crédit de
40,000 francs demandé pour travaux aux rives de
Autant que qui que ce soit dans cette enceinte, je
suis grand partisan des économies. Chaque fois que je verrai la possibilité
d’en introduire dans les dépenses de l'Etat, je me ferai un devoir de les
appuyer de toutes mes forces. Rien ne mine tant le pouvoir, rien ne fait tant
détester les gouvernements que l’augmentation progressive des dépenses parce qu’elles
ont nécessairement pour conséquence immédiate l’augmentation dans la même
proportion des impositions publiques. Mais cette considération, quelque forte
qu’elle soit, ne me portera jamais à reculer devant une dépense utile.
Eh bien, messieurs, je mets en fait que, de toutes les
dépenses auxquelles le budget est appelé à faire face, il n’en est aucune qui
soit aussi indispensable, aussi urgente que celle dont il s’agit.
Mon intention était de vous mettre sous les yeux, dans
tout son jour, le tableau vraiment effrayant de l’état dans lequel se trouvent
les rives de
Il en résulte, à la dernière évidence, que les
nombreuses dégradations que les rives de ce fleuve ont essuyées dans plusieurs
endroits par les différentes causes qu’il signale, nécessitent les réparations
les plus promptes. Pour peu que l’on tarde à s’opposer, d’une manière efficace,
aux empiètements que fait
Le gouvernement hollandais, qui certainement est
appréciateur compétente en matière d’ouvrages hydrauliques, a tellement senti
la nécessité d’aviser promptement aux moyens de prévenir les catastrophes dont
les communes riveraines sont menacées, qu’à peine il avait pris possession de
la partie du Limbourg abandonnée qu’il a ordonné des travaux de défense
importants sur la rive droite ; des ouvrages y ont été faits pour à peu
près 80,000 florins des Pays-Bas depuis le mois d’août dernier. Veuillez ne pas
perdre de vue que les ouvrages sur la rive opposée sont une nouvelle cause de
destruction des rives qui nous appartiennent, et exigent d’autant plus
impérieusement que nous n’épargnions rien pour les combattre efficacement.
D’après ces considérations, je ne soutiens pas
seulement de toutes mes forces cette allocation ; mais, convaincu de
l’insuffisance de ce crédit en présence de nouvelles causes de destruction qui
se présentent, je crois de mon devoir d’interpeller M. le ministre s’il ne
conviendrait pas de doubler le chiffre qu’il a pétitionné pour cet objet.
En fait de travaux de cette nature, une lésinerie mal
placée est souvent au rebours de toute idée d’économie. Peut-être même l’état
désastreux dans lequel se trouvent ces rives doit-il, en grande partie, être
attribué à ce que jamais le mal n’a été attaqué avec assez d’énergie pour
en arrêter le cours. Aussi n’a-t-il pas été rare de voir des ouvrages
importants et très dispendieux faits aux rives de
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, il me paraît
impossible de répondre à l’interpellation que m’adresse l’honorable préopinant.
Je n’ai reçu aucune proposition nouvelle de l’ingénieur en chef. Il y a donc
lieu de croire que le chiffre de 40,000 francs doit continuer à être considéré
comme suffisant.
M.
Simons – Messieurs, il n’est pas
étonnant que cet ingénieur n’ait pas demandé une somme plus forte, lors de la
confection du budget ; alors n’étaient pas connus les ouvrages qui ont été
faits par le gouvernement hollandais. Je le répète, on a dépensé, en fait
d’ouvrages de ce genre, une somme d’environ 80,000 florins. On sait qu’en
travaillant sur la rive d’un fleuve, l’autre rive est nécessairement exposée à
des dégradations continuelles.
Je suis d’autant plus étonné que l’on n’ait pas
demandé une somme plus forte, que dans une des séances du conseil provincial du
Limbourg, l’ingénieur en chef ayant été interpellé, a déclaré que les travaux
indispensables à faire aux rives de
Je n’ajouterai rien à ce que je viens de dire ;
je crois qu’il est réellement dans l’intérêt du gouvernement qu’on mette la
main à ces ouvrages.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Les faits cités par l’honorable membre n’étaient pas
inconnus à l’administration. Le chiffre de 40,000 francs figure depuis
plusieurs années au budget. Il a été demandé alors que le Limbourg nous
appartenait encore en entier. La première idée qui a dû se présenter depuis la
cession est celle de savoir s’il ne fallait pas réduire ce chiffre. Je crois
qu’en effet la proposition a été faite dans plusieurs sections. L’ingénieur que
j’ai consulté a répondu qu’il ne fallait faire aucune réduction, bien que le
cours de
- Le chiffre de 40,000 francs est adopté.
« Art. 8. Polders : fr. 42,000. »
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Messieurs, je suis obligé de demander une augmentation. Les
42,000 francs demandés sont destinés :
1° 30,000 francs à la compagnie Van der Griendt la
seconde année d’entretien, aux termes de la soumission du 23 septembre
1837 :
2° 5,000 francs pour le subside à payer à la direction
du polder de Lillo le 1er mars 1840.
De ces deux objets, il est rendu compte, d’une manière
très détaillée dans l’exposé du budget et le rapport de la section centrale. Il
reste 7,000 francs pour les dépenses éventuelles. Il est reconnu maintenant que
cette somme est insuffisante. Divers travaux sont devenus nécessaires.
Ces travaux consistent :
1° A construire une diguette en prolongement du
bajoyer de droite de l’écluse neuve du polder de Lillo ;
2° A effectuer
3° A employer un cube de fascinages coulé sous lest de
Vous savez que la digue, dont la législature a
autorisé la construction il y a deux ans, est à
Je propose de porter le troisième objet de l’article à
20,000 francs. Il me resterait une somme d’un peu plus de 1,000 francs pour les
dépenses éventuelles, ce qui, je l’espère, sera suffisant. Le chiffre total
serait alors de 55,000 francs.
- Le chiffre proposé par M. le ministre est adopté.
« Art. 9. Service des bacs et bateaux de
transport : fr. 75,972 13 c. »
M. Cools – Messieurs, le service des
bacs et bateaux de passage comprend trois services distincts : d’abord le
service du bateau à vapeur d’Anvers à
Aujourd’hui, il n’y a qu’un seul bateau à vapeur entre
Anvers et
Il résulte des explications données au sénat par le
ministre des finances qu’on a fait construire un bateau à vapeur à haute
pression pour le faire servir à la remorque. Ainsi, ce deuxième bateau serait
employé 1° à relayer celui qui fait le service de
Je demanderai à M. le ministre, non ce qu’il compte
faire du second bateau qu’il a fait construire, mais si le service qu’il se
propose d’établir entre Anvers et tamise, sera à jours et heure fixes et non
par un bateau ayant trois usages, et ne faisant ce service qu’à ses moments
perdus, mais par un bateau spécial. La commune ne consentira à faire les
dépenses auxquelles on l’engage que pour avoir un service régulier.
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Ce service et nouveau pour
moi. C’est à partir du 1er janvier de cette année que ce service, en
ce qui concerne le matériel, appartient au ministère des travaux publics. Je
n’en serai pleinement en possession qu’après le vote du budget ; je ferai
mon possible pour faire droit aux observations de l’honorable préopinant.
M. Cools – J’ai prié M. le ministre de nous
dire si le service qu’on se propose d’établir entre Anvers et Tamise, doit être
à jour et heure fixes.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb) – Je ne suis pas encore au courant de cet objet, j’examinerai
et je verra ce qu’il y aura lieu de faire.
M. Delehaye – Est-il certain qu’un service soit établi entre Tamise en
Anvers. J’avoue que je conçois difficilement un service de ce genre fait par le
gouvernement. Je ne dis pas qu’il ne soit pas utile, mais je désire avoir des
renseignements.
M. de Foere – Je ne pense pas que le gouvernement puisse établir, sans
l’intervention de la chambre, un service entre Tamise et Anvers, au moyen d’un
bateau à vapeur. Il appartient à la chambre d’examiner si l’utilité de ce
service répond aux dépenses qu’il doit entraîner. La motion que l’honorable
député de Saint-Nicolas vient d’adresser au ministre est donc sans objet.
L’honorable ministre des travaux publics ne peut lui donner une réponse
positive sans l’intervention de la chambre. C’est à elle, je le répète, à voir
si le besoin existe et si les dépenses seront compensées par l’utilité que la
population de Tamise et des environs y trouveront.
M. Cools – Comme M. le ministre vient de dire qu’il ne connaissait pas
cet objet, je vais donner quelques explications qui éclairciront la question Ce
service d’Anvers à Tamise est projeté depuis un an ; on a engagé toutes
les communes situées sur les bords de l’Escaut à organiser des embarcadères. La
même demande a été faite à la commune de Tamise : comme elle se trouve
dans une situation financière gênée, le gouvernement veut bien en faire
l’avance à la condition d’être remboursée en quatre ou cinq ans. La commune a
reçu les plans et les devis ; elle a consenti à cet arrangement, mais
c’est pour avoir un service régulier avec Anvers. Au reste, je me contente des
explications de M. le ministre.
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – On dit que le gouvernement
ne peut pas organiser de service de passages d’eaux sans l’intervention de la
chambre. Mais la chambre a voté la construction de deux bateaux à vapeur, l’un
pour le service de
M. Van Hoobrouck de Fiennes – J’avais demandé la parole pour faire les mêmes observations
que M. le ministre ; il ne peut plus être question de l’utilité de ce
service ; elle est décidée ; le matériel est prêt ; ce service
n’a pas encore été mis en activité, parce qu’il vient de passer du département
des finances dans celui des travaux publics. S’il était nécessaire de justifier
l’utilité, je dirais que par ce moyen une riche contrée, qui est comme séparée
du royaume, s’y trouve rattachée.
J’insisterai donc pour que ce projet soit mis à exécution
le plus tôt possible. Je prierai M. le ministre de faire tous ses efforts pour
qu’il tarde le moins longtemps possible.
M. Delehaye – Si la chambre a décidé, je n’ai rien à dire. Mais on me
permettra de douter que cette décision ait été prise. Je conçois qu’un bateau à
vapeur, appartenant à l’Etat, fasse le service du passage de
M. de Foere – Si j’ai bonne mémoire, ce sont les députés d’Anvers qui ont
demandé un second bateau à vapeur, non pour établir une communication entre
Tamise et Anvers, mais pour remorquer les bâtiments marchands sur l’Escaut, et
pour relayer le bateau à vapeur qui fait le service entre
M. le ministre des
travaux publics (M. Nothomb) – Le gouvernement exploitera
ce bateau à vapeur, comme il exploite le chemin de fer. Je sais fort bien que
c’est là une exception. Mais cette exception a été clairement indiquée
lorsqu’on a demandé les fonds nécessaires. Dans les développements du budget des
finances, il est clairement indiqué que le gouvernement veut exploiter lui-même
ce passage d’eau, pour lequel il devait fournir un matériel d’exception ;
car un bateau à vapeur peut être considéré comme tel.
- L’article 9 est mis aux voix et adopté.
Article 10
« Art.
10. Frais d’études : fr. 15,000. » - Adopté.
Chapitre IV
Article
unique
« Article
unique. Ports et côtes : fr. 282,584. » - Adopté.
- La séance est levée à 4 heures et demie.