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Chambre des représentants de Belgique
Séance du samedi 12 mai
1838
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment
pétition relative à l’exécution du traité des 24 articles (de Brouckere)
2) Projet de loi prorogeant la loi sur les
péages du chemin de fer et concernant la police judiciaire de ce chemin (Van Hoobrouck)
3) Motion d’ordre relative aux indemnités des
agents de l’administration du cadastre (Lebeau)
4) Motion d’ordre relative au projet de canal de
Zelzaete à la mer du Nord (Desmet)
5) Projet de loi accordant des crédits pour
créances arriérées au budget du département de la guerre (Brabant,
Andries, Fallon, Brabant)
6) Projet de loi autorisant le gouvernement à
garantir un emprunt voté par la province du Limbourg (Heptia)
7) Projet de loi tendant à faire opérer des
transferts de crédits au sein du budget du département de la guerre. Fabrique
(par le gouvernement) d’armes de Liége (Desmaisières,
A. Rodenbach, Willmar, de Behr, Willmar, Pollénus, de Jaegher, Pollénus, Desmet, Dubus
(aîné), Willmar, David, Dumortier, Willmar, Desmaisières, Verhaegen, Dumortier, de Brouckere)
8) Projet de loi accordant des crédits pour
créances arriérées au budget du département de la justice
9) Projet de loi accordant des crédits pour
créances arriérées au budget du département des travaux publics
10) Projet de loi accordant des crédits pour
créances arriérées au budget du département des finances, pour les dépenses du
cadastre (Zoude)
11) Projet de loi accordant un crédit
supplémentaire au budget du département de l’intérieur pour l’encouragement de
la culture de la garance (Lardinois, Van Hoobrouck, Verdussen, Desmaisières, de Theux, de Muelenaere, d’Huart, Lebeau, Verdussen, Desmaisières, de Theux, de Theux, Desmaisières, Van Hoobrouck, de Theux)
(Moniteur belge n°133, du 13 mai 1838)
(Présidence
de M. Raikem.)
M.
B. Dubus fait l’appel nominal à une heure et demie.
M.
Kervyn lit le procès-verbal de la séance d’hier ; la
rédaction en est adoptée.
M.
B. Dubus fait connaître l’analyse des pétitions
suivantes adressées à la chambre.
PIECES
ADRESSEES A LA CHAMBRE
«
Les officiers de la légion de la garde civique du canton de Ruremonde demandent
le maintien de l’intégrité du territoire. »
________________
« Les
administrations communale et les habitants notables des communes de Galoppe,
Locht et Heerlen (Limbourg) demandent que l’intégrité du territoire soit
maintenue. »
________________
« Les habitants de Fauquemont (Limbourg)
demandent le maintien de l’intégrité du territoire. »
________________
« Les conseils communaux de Horst,
Grubbenvorst, Broekhuysen, Venray, Waussum, Ottersum, Sevenum, Mook, Meerlo,
Maesbrie (Limbourg), demandent le maintien de l’intégrité du territoire. »
« Les conseils communaux de Beek,
Meerssen, Vlestraeten, Schimmert, Huisberg, Fauquemont, Bemelen, Borgharen,
Geulle, Itteren, Elsloo et Steyn (arrondissement de Maestricht), demandent le
maintien de l’intégrité du territoire. »
________________
M.
de Brouckere. - Messieurs, la chambre a déjà reçu bon nombre
de pétitions qui lui sont adressées par des habitants de communes qui, d’après
le traité des 24 articles, devraient être cédées à la Hollande. Par ces
pétitions, les signataires protestent de leur sympathie pour la Belgique, et
témoignent le désir de n’en pas être séparés. Vous venez, messieurs, d’entendre
encore l’analyse d’un assez grand nombre de pétitions de ce genre. Je pense
qu’il importe que la chambre prenne dès à présent une décision qui soit pour
les pétitionnaires une preuve de l’intention où elle est de s’occuper de leur
demande avec une attention toute particulière.
Je
demande en conséquence que la chambre décide que toutes les pétitions de cette
nature feront l’objet d’un seul et même rapport, et que lorsque le moment sera
venu de discuter ce rapport, la mise à l’ordre du jour sera annoncée 24 heures
à l’avance, avant que chacun de nous puisse venir assister à la discussion.
De
toutes parts. - Appuyé ! appuyé !
-
La proposition de M. de Brouckere est mise aux voix et adoptée.
PROJET
DE LOI PROROGEANT LA LOI SUR LES PEAGES DU CHEMIN DE FER ET CONCERNANT LA
POLITICE JUDICIAIRE DE CE CHEMIN
M.
Van Hoobrouck de Fiennes, organe d’une
commission, dépose sur le bureau le rapport sur le projet de loi tendant à
proroger la loi qui autorise le gouvernement à percevoir les péages sur le
chemin de fer.
-
Ce rapport sera imprimé et distribué.
MOTION D’ORDRE RELATIVE AUX INDEMNITES DES AGENTS
DE L’ADMINISTRATION DU CADASTRE
M.
Lebeau (pour une motion d’ordre). - Messieurs, à la
fin de la séance d’hier, j’avais proposé de mettre à l’ordre du jour la question
des indemnités relatives aux employés du cadastre. Il paraît toutefois que l’on
n’a pas bien compris l’objet de ma motion. J’ai voulu assimiler le projet
présenté par la commission spéciale des finances, j’ai voulu l’assimiler aux
autres crédits arriérés. J’ai dit qu’il s’agissait là aussi de crédits
arriérés, et dès lors j’ai pensé que le crédit relatif aux employés du cadastre
serait naturellement compris dans le libellé de l’ordre du jour : créances
arriérées. Il n’en a pas été toutefois ainsi ; car on a séparé ce dernier objet
des autres. Comme cette créance est aussi légitime que celles dont la chambre
va s’occuper, et que la discussion du projet qui s’y rapporte ne doit pas être
sérieuse, je demanderai que la chambre revienne sur sa décision d’hier et
qu’elle comprenne la créance due aux employés du cadastre parmi les crédits
arriérés dont nous allons nous occuper.
-
La proposition de M. Lebeau est mise aux voix et adoptée.
MOTION D’ORDRE RELATIVE AU PROJET DE CANALDE
ZELZAETE A LA MER DU NORD
M.
Desmet. - Messieurs, il y a fort longtemps que les
sections ont terminé l’examen du projet de loi relatif au canal de Zelzaete.
Vous connaissez, messieurs, toute l’importance de ce projet. Je demanderai si l’on
peut espérer que bientôt la section centrale présentera son rapport.
M. le
président. - La section centrale s’est déjà occupée
plusieurs fois de cet objet ; les renseignements qu’elle avait demandés lui ont
été communiques il y a quelque temps ; mais, dans l’intervalle d’autres travaux
importants et urgents ont empêché momentanément la section centrale de
poursuivre l’examen du projet de loi dont on vient de parler.
M. Brabant dépose un rapport
sur un projet de loi relatif à des créances arriérées du département de la
guerre.
-
Le rapport sera imprimé et distribué.
M. Andries.
- Je pense qu’il conviendrait d’indiquer un jour pour la discussion de ce
projet de loi. Je proposerai d’en fixer la discussion à lundi. Le rapport
pourra être imprimé aujourd’hui et distribué demain.
M.
Fallon. - Messieurs, il ne s’agit dans ce projet de
loi que d’un crédit de 25,000 fr. ; il n’y a aucune espèce de contestation ; la
commission est parfaitement d’accord avec M. le ministre de la guerre, de
manière qu’on pourrait même discuter le rapport aujourd’hui, sans qu’il soit
nécessaire de l’imprimer.
M.
Brabant, rapporteur. - Messieurs, je n’ai qu’une observation à
faire sur la proposition de l’honorable M. Fallon ; c’est qu’il y a fort
longtemps que le projet est présenté, et que nous ne savons pas en ce moment si
nous pouvons encore faire l’imputation du crédit sur le budget qui était
indiqué dans le projet. M. le ministre de la guerre vient de me dire qu’il
ferait examiner dans ses bureaux sur quel budget il faudra imputer le crédit.
-
La chambre consultée décide qu’elle s’occupera lundi prochain de la discussion
du projet de loi dont il s’agit.
PROJET DE LOI AUTORISANT LE GOUVERNEMENT A
GARANTIE UN EMPRUNT VOTE PAR LA PROVINCE DU LIMBOURG
M. Heptia
dépose le rapport sur le projet de loi présenté par les députés du Limbourg,
tendant à autoriser le gouvernement à garantir un emprunt de 500 mille fr. voté
par le conseil provincial du Limbourg pour construction de routes.
-
La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport.
PROJET DE LOI tendant
a faire operer des transferts de credits au sein du BUDGET DU
DEPARTEMENT DE LA GUERRE
Discussion générale
M.
Desmaisières. - Messieurs, vous avez renvoyé à l’examen de
la commission qui a examiné le projet de loi en discussion, deux pétitions de 9
et 10 de ce mois qui vous ont été adressées par le sieur Malherbe, fabricant
d’armes à Liége. Comme ces pétitions sont peu volumineuses et qu’elles ne
comportent pas beaucoup l’analyse, je crois devoir vous en donner d’abord
lecture.
« A
MM. les membres de la chambre des représentants.
«
Messieurs,
«
Le soussigné propriétaire de la manufacture d’armes de guerre, située quai de
la Sauvenière, à Liége, a l’honneur de vous exposer :
«1°
Que le 29 octobre 1837 il a passé acte par lequel il s’oblige à céder au
gouvernement ses établissements de fabrique d’armes, moyennant le prix convenu
de trois cent dix mille francs, y compris les deux maisons neuves avec outils,
machines et autres objets indiqués dans l’inventaire, et qu’en attendant la
décision à intervenir au sujet de ladite acquisition, il donne à bail à loyer
ledit établissement au gouvernement ;
« 2°
Qu’il n’a consenti ce bail à des conditions aussi préjudiciables et onéreuses,
en abandonnant la somme de cinquante mille francs qu’il exigeait pour la perte
de sa clientèle, que sur l’assurance que l’intention positive du gouvernement
était de faire l’acquisition immédiate dudit établissement au prix stipulé, ce
que le propriétaire a dû croire et a accepté de bonne foi, comme conste
l’esprit de l’acte, qu’il n’aurait positivement pas souscrit s’il avait osé
supposer que le gouvernement n’agissait pas aussi loyalement à son égard. Mais
quelle est sa surprise d’apprendre aujourd’hui qu’au moment même que cet acte
était à l’approbation de M. le ministre de la guerre, on levait le plan d’un
terrain, faubourg St-Léonard, et l’acquisition s’en faisait clandestinement et
sans me prévenir, pour y construire une fabrique d’armes à l’instar de la seule
que je cédais à l’Etat, et qui se trouverait en concurrence et totalement
anéantie à côté de celle projetée ! Il en résulterait alors une perte
insupportable pour moi, sans que l’Etat en puisse retirer le moindre avantage,
attendu que mes établissements cédés peuvent amplement suffire aux besoins les
plus pressants du service, et sous une bonne direction, avec grande économie.
C’est pour des motifs aussi puissants et dans l’intérêt de l’industrie manufacturière
d’armes des fabricants de Liége, qui se joindront à moi, que je prends la
liberté de mettre opposition à l’adoption du projet d’acquisition ou de
construction de fabrique d’armes pour le gouvernement, autre que celle que je
me suis engagé de céder de bonne foi, par un acte authentique, dont les
intentions des contractants ne peuvent être suspectées.
« Liége,
le 8 mai 1838.
« M.-J.
Malherbe de Goffontaine. »
________________
« Messieurs,
« J’ajoute
aux représentations que j’ai eu l’honneur de soumettre à la chambre, à l’appui
de l’opposition que j’ai faite contre la construction d’une fabrique d’armes
sur un terrain situé faubourg Saint-Léonard, pour le compte du gouvernement, au
mépris de l’acte de cession et de location provisoire de mes établissements :
«
1° Que le terrain dont il est question a peu de valeur et n’est nullement
convenable à une construction d’habitation quelconque par rapport à la fabrique
de zinc dite Moselman, qui est joignante, pour laquelle, par les fumées et les poussières
insalubres et nuisibles qu’elle répand constamment, le propriétaire a dû
soutenu des procès et a été condamné à payer des indemnités considérables aux
propriétaires voisins, qui, pour se soustraire aux inconvénients et aux dangers
que présentait leur position, ont abandonné ou vendu à bas prix leurs
propriétés bâties ou non bâties.
« Voilà
précisément l’acquisition qu’on propose pour y construire un vaste
établissement de fabrique d’armes, où se trouveront réunies des masses
d’ouvriers exposés à des inconvénients destructifs et nuisibles à la santé, et
qui, par la nature de leurs travaux, exigent impérieusement des locaux bien
situés et convenablement appropriés. Il ne serait donc pas exact de dire que
c’est faire un marché avantageux, lorsqu’il compromettrait la vie ou nuirait
seulement à la santé des malheureux miliciens ou pères de famille obligés de
travailler dans un tel établissement.
«
Je dois supposer que M. le ministre n’a pas été instruit de ces faits patents
qui sont à la connaissance des honorables députés de Liège et de notoriété
publique. J’estime que, sur ce point, les intentions de M. le ministre ont été
surprises ; mais il y a trop de précipitation de demander l’emploi d’un capital
considérable pour l’acquisition d’un terrain à construire des établissements de
fabrique d’armes, avant d’avoir fait disparaître les inconvénients et d’avoir
acquis, par la pratique et l’expérience, les connaissances spéciales dans la
direction et l’administration des nombreux détails de la fabrication des armes,
pour juger ensuite, d’après les résultats, de la nécessité d’une construction
quelconque et des avantages relatifs aux dépenses générales qu’elle doit
assurer à l’Etat.
«
Les accidents désastreux et les erreurs qui se sont succédé dans mes établissements
depuis la prise en possession, que, dans le bien-être du service et dans
l’intérêt de l’Etat, j’ai cru de mon honneur et de mon devoir de signaler à
l’attention de M. le ministre, sont des faits résultant uniquement du manque de
connaissances spéciales et de pratique des employés.
« Sur
ce, et pour rester dans les termes et dans les intentions formels de l’acte
passé le 29 octobre 1837, il est dans l’intérêt de l’Etat de tenir à la
location provisoire, en attendant la décision à intervenir au sujet de
l’acquisition de mes établissements.
« Je
prie la chambre des honorables représentants de vouloir bien prendre cet exposé
en haute considération, et de suspendre l’allocation de cent cinquante mille
francs demandée par M. le ministre de la guerre.
«
M.-J. Malherbe de Goffontaine.
« Liège,
le 10 mai 1838. »
_________________
J’ai
à vous faire connaître la disposition du contrat du 29 octobre 1837 qui est
relative au litige soulevé par M. Malherbe. Cette clause, la voici :
« En
vertu de l’autorisation de M. le ministre de la guerre en date du 26 août
dernier, n°223, et sous son approbation ultérieure, ledit M. Malherbe de
Goffontaine s’oblige à céder au gouvernement, à la première demande de celui-ci
et moyennant le prix de 310,000 fr., sa manufacture d’armes, y compris deux
maisons neuves, situées à Liége, quai de la Sauvenière, avec outils, machines
et autres objets dont l’indication sera portée à l’inventaire qui sera dressé
entre parties.
«
Cette disposition relative à ladite cession engage uniquement le propriétaire,
et en aucune manière le gouvernement, à conclure l’acquisition projetée. »
En
présence de termes aussi formels insérés au contrat passé entre le département
de la guerre et le sieur Malherbe, votre commission, malgré tout l’intérêt
qu’inspire la position du sieur Malherbe, n’a pas cru pouvoir vous faire
d’autre proposition à cet égard.
-
Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe à la
discussion des articles.
Discussion des articles
Article premier
« Art. 1. Les sommes ci-après indiquées,
montant ensemble à cent vingt-huit mille francs (128,000), et qui sont restées
disponibles au budget des dépenses de la guerre pour l’exercice 1837, savoir :
« Sur
le chapitre premier :
« Art.
3. Frais de route et de séjour : fr. 6,900 ;
« Sur
le chapitre II, première section, solde des états-majors :
« Art.
1er. Etat-major-général : fr. 54,000
« Art.
2. Indemnités de représentation : fr. 3,100
« Art.
3. Etat-major des places : fr. 9,000
« Art.
5. Etat-major de l’artillerie : fr. 14,000
« Art.
6. Etat-major du génie : fr. 31,000
« Sur
le même chapitre, section II, solde des troupes :
« Art.
2. Cavalerie : fr. 10,000. »
« Sont
transférées au budget susmentionné ainsi qu’il suit, savoir :
« Au
chapitre II, section III :
« Art.
4. Masse d’entretien du harnachement, traitement et ferrure des chevaux : fr.
22,500
« Art.
6. Masse de casernement des chevaux : fr. 12,500
« Art.
8. Frais de route des officiers : fr. 39,000.
« Art
9. Transports généraux : fr. 16,000.
« Au
chapitre III :
« Art.
2. Pharmacie centrale : fr. 38,000. »
-
Adopté.
Article 2
« Art.
2. Une somme de un million deux cent
neuf mille neuf cent trente-quatre francs quatre-vingt-seize centimes, des
crédits disponibles au budget de la guerre pour l’exercice susmentionné, est
annulée et sera réduite des chapitres, sections et articles ci- après désignés,
savoir :
« Chapitre
II, section II, solde des troupes :
« Art. 1er. Infanterie : fr. 330,000
« Art. 2. Cavalerie : fr. 11,000
« Art. 3. Artillerie : fr. 217,000
« Art.
4. Troupes de génie : fr. 53,000
« Art. 5. Gendarmerie : fr. 72,000
« Art. 6. Ambulances : fr. 58,000
« Même
chapitre, section III :
« Art.
2. Masse des fourrages : fr. 40,000
« Art.
5. Masse de renouvellement de la buffleterie et du harnachement : fr. 58,004 96
c.
« Art.
7. Masse de casernement des hommes : fr. 22,000
« Art.
10. Prime de rengagement : fr. 14,000
« Art.
11. Chauffage et éclairage des corps de garde : fr. 16,000
« Art.
13. Cantonnement, logement et nourriture : fr. 212,930 fr.
« Art.
14. Frais de découchage des gendarmes : fr. 5,000.
« Chapitre
III :
« Art.
3. Hôpitaux sédentaires (personnel) : fr. 60,000
« Chapitre
IV :
« Art.
1er. Traitements temporaires de non-activité : fr. 28,000
« Art.
3. Traitements d’employés temporaires : fr. 10,000
« Total
: fr. 1,209,934 96 c. »
-
Adopté.
Article premier
« Art.
3. Il est pareillement annulé une somme de quatre-vingt-dix mille francs des
crédits disponibles au budget de la guerre pour l’exercice 1836, laquelle sera
déduite des chapitres, sections et articles ci-après :
« Chapitre
II, section II, soldes des soldats :
« Art.
1er. Infanterie : fr. 6,500
« Art.
3. Artillerie : fr. 4,500
« Art.
4. Génie : fr. 1,000
« Art.
6. Ambulances : fr. 3,000
« Section
III :
« Art.
1er. Masse de pain : fr. 2,900
« Art.
2. Masse des fourrages : fr. 5,000
« Art.
3. Masse d’habillement et d’entretien : fr. 6,000
« Art.
4. Masse d’entretien du harnachement, traitement et ferrure des chevaux : fr.
3,600
« Art.
5. Masse de renouvellement de la buffleterie et du harnachement : fr. 13,500
« Art.
6. Masse de casernement des chevaux : fr. 3,000
« Art.
9. Transport généraux et autres : fr. 4,000
« Art.
11. Chauffage et éclairage des corps de garde : fr. 12,000
« Art.
13. Cantonnement, logement et nourriture et frais de découchage des
gendarmes : fr. 4,500
« Art.
15. Masse de casernement des hommes : fr. 6,500
« Chapitre
III :
« Art.
2. Pharmacie centrale : fr. 5,500
« Art.
3. Hôpitaux sédentaires (personnel) : fr. 1,500
« Chapitre
IV :
« Art.
1er. Traitements temporaires de non-activité : fr. 3,000
« Art.
3. Traitement d’employés temporaires : fr. 4,000
« Total
: fr. 90,000.
-
Adopté.
Article 4
« Art.
4. Il est ouvert un nouveau crédit de la somme de un million deux cent
quatre-vingt-dix-neuf mille neuf cent trente-quatre francs quatre-vingt-seize
centimes au budget de la guerre pour l’exercice 1838, à imputer ainsi qu’il
suit :
« Chapitre
premier :
« Art.
4. Matériel du ministère : fr. 638,000
« Chapitre
II, section II, solde des troupes :
« Art.
1er. Infanterie : fr. 294,216
« Même
chapitre, section III :
« Art.
1er. Masse de pain : fr. 70,725
« Art. 3. Masse d’habillement et
d’entretien : fr. 101,844
« Art.
7. Masse de casernement des hommes : fr. 14,145
« Art.
13. Cantonnement, logement et nourriture : fr. 31,004 96
« Chapitre
V :
« Art.
2. Matériel du génie : fr. 150,000
« Total
: fr. 1,299,934 96 c.
M.
Fallon, vice-président, remplace M. Raikem au
fauteuil.
M. A. Rodenbach.
- Je n’ai pas l’intention de m’opposer à l’adoption du chiffre de 15,000 fr.
pour achat de terrain et construction d’une manufacture d’armes. Mais je
désirerais savoir de M. le ministre de la guerre si l’établissement de cette
manufacture ne donnera pas lieu à des dépenses considérables ; car la somme
demandée pour 1838 n’est assurément qu’un commencement de dépense.
Il
n’y a en Belgique qu’une population de 3,800,000 habitants. En Fiance, qui est
une puissance militaire du premier ordre, il n’y a que deux manufactures
d’armes. Il y en avait d’autres, elles ont été supprimées.
Je
pense donc qu’il conviendrait que M. le ministre de la guerre donnât quelques
explications sur la quotité et sur l’utilité de la dépense proposée, et dît
s’il n’y aurait pas plus d’économie à ne pas établir cette manufacture d’armes.
M. le ministre de la guerre (M. Willmar).
- Pour le dernier objet de la demande d’éclaircissements de l’honorable M. A.
Rodenbach, je me réfère à l’exposé des motifs ainsi qu’à tous les
éclaircissements plus étendus donnés à la section centrale et qui étaient de
nature à n’être développés que devant cette section.
La
section centrale n’a pas manqué de demander à combien s’élèverait la dépense de
construction d’une manufacture d’armes ; et j’ai annoncé que d’après le devis
que j’ai fait faire, il faut supposer que la dépense totale ne dépassera pas
300,000 fr. Mais, comme je pense qu’en raison de ce que la saison est avancée,
on ne dépensera cette année que 100,000 fr., j’ai borné ma demande de crédit à
cette dernière somme.
M. de Behr. - Nous ne
reconnaissons pas la nécessité d’établir la manufacture d’armes dont parle M.
le ministre de la guerre. Sous le gouvernement hollandais, jamais on n’a senti
la nécessité d’avoir un pareil établissement. Je crois que c’est là une
mauvaise entreprise ; d’abord elle est contraire aux usages qui se pratiquent à
Liége. On sait que là toutes les pièces sont fabriquées par des ouvriers différents
qui les vendent ensuite. Il résulte de là qu’on a l’avantage de faire un choix.
Les premiers fabricants chez nous, qui avaient les moyens d’établir une
manufacture d’armes sur une grande échelle, ne l’ont jamais voulu, parce qu’ils
ont pensé qu’il y aurait perte ; ils se bornent à rassembler les pièces et à
les monter, ils achètent au marché les pièces vendues par des ouvriers qui
fabriquent exclusivement certaines pièces. Ils choisissent, pour faire ces
achats, le moment le plus favorable.
Au
contraire, s’il y a une manufacture d’armes du gouvernement, quelle que soit la
cherté du fer et du combustible, elle ne pourra jamais chômer. Je ne sais pas
pourquoi on engagerait l’Etat dans une dépense de 300,000 fr., qui pourra
peut-être par la suite s’élever jusqu’à un million de francs. Pour moi, je
pense qu’il convient d’ajourner l’article. J’en fais la proposition.
M. le
ministre de la guerre (M. Willmar). - Je donnerai
quelques explications en réponse à l’honorable préopinant, quoique toutes les
explications désirables aient été données à la section centrale, qui n’aurait
pas manqué d’élever des objections si elle n’avait pas trouvé ces explications
suffisantes.
Je
commencerai par dire que l’appréhension de l’honorable préopinant de voir
s’étendre la dépense de l’établissement d’une manufacture d’armes est sans
aucun fondement.
Sous
le gouvernement hollandais il n’y avait pas, dit-il, de manufacture d’armes.
Cela est exact. Mais le gouvernement hollandais faisait faire à peu près toutes
les armes par un seul fabricant, et il faisait marché avec lui de la main à la
main. Il avait donc sur lui à peu près la même action, la même surveillance que
le gouvernement pourra avoir sur une manufacture à son compte.
Depuis
la révolution, le principe qui a dominé dans l’acquisition des armes de guerre
a été l’adjudication publique ; il y a eu ainsi une coïncidence, par suite de
laquelle on a eu les armes à trop bon marché. Les fabricants fournissant avec
perte n’ont pas rempli leurs engagements. On comprend que les fabricants
fournissant avec perte auront fourni le moins bon possible. C’était en quelque
sorte une loi de leur position. Mais le gouvernement, ayant les ouvriers sous
les yeux, sera plus certain que le travail sera fait d’une manière convenable.
L’honorable préopinant dit qu’il y aurait
économie à ne pas avoir de manufacture d’armes, parce que les fabricants
choisissent le moment le plus convenable pour travailler, tandis que les frais
seront les mêmes pour le gouvernement, quand il sera obligé de laisser choisir
la manufacture d’armes. Mais cette appréhension n’est nullement fondée.
L’échelle de l’établissement que le gouvernement compte construire sera telle
qu’il ne chômera pas. On sait quelles sont les pièces de rechange qu’il faut
pour entretenir l’armement, et le nombre d’armes neuves qu’il faut pour le
compléter. La nouvelle fabrique satisfera à ce double besoin sans le dépasser.
Et
ceci démontrera encore, si l’on veut bien y réfléchir, qu’il est impossible que
la dépense de cette fabrique s’élève aussi haut qu’on le craint ou que
l’honorable préopinant paraît le craindre.
Je
me résume en disant que je regarde comme une chose très utile pour le pays, et
nuisible sous aucun rapport, d’établir la fabrique d’armes dont il s’agit.
M.
Pollénus. - Si j’ai bien compris l’auteur de la
proposition, ce n’est pas le rejet de l’article qu’il demande, mais simplement
l’ajournement : en appuyant cette proposition, je demanderai de l’ajourner
seulement jusqu’à la discussion du prochain budget ; l’ajournement ainsi limité
sera d’accord avec le règlement.
A
en juger d’après le rapport, le gouvernement a loué l’établissement du sieur
Malherbe pour y fabriquer des armes ; le contrat est de la fin d’octobre 1838
et pour 3, 6 ou 9 ans ; ainsi il reste dans tous les cas plusieurs termes à
parcourir encore. Je ne vois pas d’abord que le gouvernement soit dispensé de
payer une indemnité à M. Malherbe s’il renonçait à son bail : dans cet état de
choses je me demande pourquoi on vient nous proposer de constituer un
établissement, tandis que nous sommes chargés d’un loyer pour un établissement
semblable. Il n’y a pas d’économie dans cette manière d’opérer, je ne puis y
voir qu’un double emploi.
Il
me semble qu’on devrait attendre la discussion du budget prochain de la guerre
avant de prendre une décision sur la question.
Je
regrette que ce soit dans une loi de transfert que l’on pose incidemment le
principe d’une dépense qui peut devenir considérable. Car, qu’on ne s’y
méprenne pas, on demande aujourd’hui 150 mille francs, mais ou ne sait pas où
s’arrêteront les demandes subséquentes. Selon M. de Behr, l’établissement
coûtera un million en comprenant les machines, les mécaniques nécessaires. Les
300,000 francs, dont on a parlé, ne paraissent se rapporter qu’aux
constructions simplement.
Je
n’aime pas que l’on s’engage dans des dépenses que l’on ne peut apprécier. Je
vois bien, dans le rapport de la section centrale, qu’elle nous dit avoir reçu
tous les renseignements désirables : mais pour moi, je n’en ai pas ; et c’est
surtout dans le département de la guerre que j’aime voir clair en matière de
dépenses ; car, vous le savez, le budget de ce département absorbe à peu près
la moitié des revenus de l’Etat.
L’expérience,
comme l’a dit M. de Behr, a fait reconnaître qu’il était infiniment plus utile
et plus économique de continuer à se procurer les armes de guerre sur l’ancien
pied. De cette manière les pièces de rebut ne tombent pas à la charge du
gouvernement. Si nous voulons nous engager dans la voie qu’il veut ouvrir, le
gouvernement tentera de faire un établissement sur une grande échelle ; mais la
Belgique ne sera pas dans le cas, je l’espère, de consommer autant d’armes que
l’on veut en faire dans la fabrique projetée, et le gouvernement serait alors
obligé de devenir commerçant.
Quoi qu’il en soit, il y a d’autres objets, me
semble-t-il, sur lesquels il est plus utile d’appliquer notre attention et les
fonds de l’Etat. Depuis trois ans la chambre a alloué des fonds pour mettre nos
frontières du nord en état de défense. La ville de Diest, par exemple, est
considérée comme un point militaire important ; cependant on n’y a pas commencé
de travaux, quoiqu’un crédit soit ouvert dans ce but. On dit, il est vrai,
qu’il s’est élevé entre le gouvernement et la régence de cette ville quelque
difficulté relativement aux remparts ; mais pourquoi cette difficulté
n’est-elle pas levée ? On a eu tout pour cela. La ville de Diest a d’ailleurs
été place forte. Est-ce parce que la régence y a établi une promenade, par
exemple, que le gouvernement aurait perdu ses droits ? Une pareille difficulté
n’a pas paru dans le temps arrêter le gouvernement : à Hasselt, il s’est emparé
des remparts, et l’on s’est occupé de l’indemnité plus tard. Je le répète, messieurs,
le besoin de fortifier notre frontière du nord me paraît bien plus pressant que
celui de construire une fabrique d’armes, dont on a fort bien pu se passer
jusqu’aujourd’hui. Je propose, en conséquence, l’ajournement de l’allocation
demandée jusqu’à la discussion du prochain budget de la guerre.
M.
de Jaegher. - Les explications qu’a demandées M. Pollénus
ont été données par le ministre de la guerre à la section centrale. On a parlé
d’un bail ; et comme il porte que le gouvernement prendra la fabrique de M.
Malherbe pendant trois, six ou neuf années, on en conclut que l’on peut
ajourner l’allocation jusqu’au prochain budget. Mais M. Pollénus n’a pas
réfléchi qu’une fabrique d’armes ne peut s’établir qu’au bout de trois ou
quatre ans, et qu’il faut commencer les travaux à l’avance. Si le gouvernement
a contracté pour trois ans au moins, c’est dans l’intention de commencer les
travaux et de pouvoir espérer les terminer pendant ce temps. Ce motifs nous ont
portés à croire que la demande du ministre ne devait pas être ajournée.
Quant à l’utilité de la fabrique d’armes par le
gouvernement, je ne sais si M. Pollénus peut en apprécier les avantages. Par
exemple, un grand avantage résulte de l’utilité dans la fabrication des armes
de guerre, car lorsqu’une pièce peut encore servir, on l’applique à une autre
arme. Aujourd’hui les fabricants achètent de divers ouvriers toutes les pièces
qui entrent dans un fusil, et les réunissent.
Les
fabricants d’armes de Liége ne sont pas intéressés dans la question qui nous
occupe ; ils n’ont pas réclamé contre la fabrication des armes de guerre par le
gouvernement. Il y a, il est vrai, un intérêt particulier en jeu, c’est celui
du propriétaire de l’établissement où le gouvernement a établi momentanément sa
fabrique ; mais, excepté cet intérêt privé, les fabricants d’armes de Liége ont
déclaré, par l’organe de quelques-unes d’entre eux, que la fabrication d’armes
de guerre par le gouvernement aurait pour résultat de faire disparaître des
rivalités nuisibles à leurs propres intérêts.
Il
est encore d’autres considérations dans le développement desquelles je ne crois
pas devoir entrer, et qui démontrent l’utilité et l’opportunité de la
proposition faite par le gouvernement.
M.
Pollénus. - Puisque, selon le préopinant, l’on est
convaincu de notre peu d’aptitude à juger de l’utilité d’un établissement pour
la fabrication des armes par le gouvernement, je suis étonné que l’on ne se
soit pas donné la peine de nous éclairer davantage, et dans la discussion, et
dans les documents qui nous ont été remis. Si je me suis trompé, c’est appuyé
d’autorités respectables ; c’est appuyé de l’autorité du gouvernement
précédent, de celle du ministre de la guerre lui-même (voir les budgets jusqu’à
ce jour). Je puis donc me consoler avec d’autres, si je partage leur erreur.
« Mais,
dit l’honorable préopinant, les fabricants d’armes de Liége n’apprécient pas
leur intérêt ; l’établissement d’une fabrique d’armes par le gouvernement sera
très favorable ; aujourd’hui, il existe une concurrence fâcheuse,
embarrassante, pour le gouvernement ; si le gouvernement établit une
manufacture d’armes, cette concurrence, cette rivalité viendra à cesser. »
Je vous avoue, messieurs, que ce raisonnement ne
me paraît en aucune manière fondé ; je ne conçois pas comment le gouvernement,
s’établissant le concurrent de tous les fabricants, de tous les ouvriers de
Liége et des faubourgs, pourrait améliorer leur position et ne pas se trouver
lui-même dans une position très difficile.
J’insiste
donc, messieurs, pour que nous conservions à un projet tel que celui-ci son
caractère de spécialité, et que nous ne le votions pas à la légère, à
l’occasion d’un simple projet de crédits supplémentaires.
M. Desmet. - En général,
messieurs, le gouvernement est un mauvais fabricant, un mauvais manufacturier,
un mauvais industriel ; je serai donc toujours disposé, dans de semblables
occasions, à soutenir vivement les intérêts de l’industrie particulière.
Cependant, messieurs, dans la circonstance actuelle, il ne s’agit pas
d’économie, il s’agit de la défense du pays, il s’agit de procurer de bonnes
armes à note armée, et comme M. le ministre de la guerre déclare qu’une
fabrique d’armes lui est indispensable, je considère le vote qui nous est
demandé comme un vote de confiance, et je l’accorderai dans l’intérêt de la
sûreté du pays.
M.
Dubus (aîné). - Messieurs, l’honorable préopinant nous dit qu’il
s’agit ici d’un vote de confiance ; il suffit à ses yeux que le gouvernement
déclare qu’il y a nécessité d’établir une fabrique d’armes, pour qu’il donne
son assentiment au projet. Il me paraît cependant, d’après les pièces que j’ai
sous les yeux, qu’il est question d’autre chose ici que de ce qui frappe
l’honorable membre ; le gouvernement a deux ou trois moyens de fabriquer des
armes ; il s’agit de faire un choix ; or, quel est, dans l’intérêt de l’Etat,
le meilleur de ces moyens ; quel est celui qu’il faut choisir pour satisfaire à
ce que peut exiger la bonne foi, l’équité. C’est ce qui ne m’est pas démontré,
et c’est pour cela que j’appuierai la motion d’ajournement, d’autant plus que
la question nous surprend en quelque sorte à l’improviste, puisque ce n’est que
dans la présente séance qu’on nous a fait le rapport sur la pétition du sieur
Malherbe.
J’ai
entendu, messieurs, un honorable membre de la commission insister sur
l’importance qu’il y a à ce que le gouvernement fabrique lui-même les armes dont
l’armée a besoin ; il a même dit que cela importait dans l’intérêt des
fabricants eux-mêmes. Mais, messieurs, si le contrat dont on a parlé s’exécute,
le gouvernement fabriquera des armes ; si le bail s’exécute, le gouvernement
fabriquera encore des armes ; si le gouvernement renonce à l’achat de
l’établissement de M. Malherbe, et qu’il achète un autre terrain pour y
construire une fabrique, il fabriquera également des armes. Voilà trois moyens
parmi lesquels il s’agit de choisir le meilleur, et nous n’avons aucune donnée
pour nous prononcer aujourd’hui sur un semblable choix.
D’un
autre côté, messieurs, quel est le parti le plus conforme à l’équité, à la
bonne foi ? C’est encore là une question que nous ne sommes pas à même de
décider aujourd’hui ; le contrat que j’ai sous les yeux est assurément un
contrat inusité ; c’est un contrat qu’on pourrait regarder peut-être comme
radicalement nul, car il renferme une clause par laquelle il est stipulé que le
vendeur seul est lié, et qui m’acheteur ne l’est pas ; je ne conçois rien à une
pareille stipulation. Qu’est-ce en effet qu’une vente où le vendeur vend, mais
où l’acheteur n’achète pas ? Ce n’est rien, me semble-t-il. Il y a cependant
lieu de croire qu’on a voulu faire quelque chose, et s’il faut s’en rapporter
au sieur Malherbe, cette clause n’a été rédigée de la sorte que parce que M. le
ministre, qui peut bien lier l’Etat pour un bail, lequel rentre dans son
administration, ne peut pas, sans avoir obtenu l’autorisation de la
législature, contracter un marché qui doit grever le pays. S’il en est ainsi,
l’on aurait mieux fait de stipuler que le contrat ne serait obligatoire pour
l’Etat que sauf l’approbation des chambres, et dans ce cas il aurait convenu de
demander la ratification de la législature au lieu de renoncer au marché pour
en conclure un autre, sans avoir consulté la chambre.
Remarquez,
messieurs, qu’il y a dans le contrat une autre clause qui donne lieu de croire
que c’est réellement à la ratification des chambres qu’on a voulu s’en référer
; cette clause porte :
«
En attendant la décision à intervenir au sujet de ladite acquisition, le
propriétaire donne par les présentes, à bail, etc. »
Quelle
est cette décision à intervenir ? Je comprends, messieurs, que c’est la
décision des chambres qui ont seules le pouvoir de grever l’Etat ; en effet,
dans l’approbation donnée au contrat par M. le ministre de la guerre, je
remarque ce qui suit :
« Le
ministre de la guerre approuve le présent contrat, pour l’acquisition
éventuelle par l’Etat et la location actuelle par le département de la guerre,
etc. »
Ainsi, M. le ministre de la guerre dit que c’est
le département de la guerre qui conclut le bail, et que c’est l’Etat qui fera
l’acquisition, si l’acquisition doit être faite. Or, qui est-ce qui représente
l’Etat pour tout ce qui peut le grever ? C’est la législature.
Il
paraît donc certain qu’on a traité avec le sieur Malherbe, sauf l’approbation
des chambres ; le sieur Malherbe, comme le prouve sa pétition, désire encore
que le contrat soit exécuté : il fallait donc consulter la législature pour
savoir si elle approuve le marché.
Aujourd’hui
on nous demande un crédit pour faire une nouvelle acquisition, cela ne me
paraît pas régulier ; dans tous les cas, nous n’avons pas les renseignements
nécessaires pour décider en connaissance de cause les différentes questions que
cette demande soulève, nous devons donc ajourner notre vote. Nous devons
l’ajourner d’autant plus que rien ne périclite, car s’il y a urgence de
fabriquer des armes, il a été pourvu à cette urgence par le bail qui a été
conclu en attendant la décision à intervenir sur la cession de l’établissement
; ce bail n’est conclu que depuis quelques mois, et il est obligatoire pour 3
ans au moins ; il n’y a donc rien qui puisse nous entraîner à prendre une résolution
précipitée, alors que les faits ne sont pas suffisamment éclaircis. Par ces
considérations, je voterai l’ajournement demandé.
M. le
ministre de la guerre (M. Willmar). - Messieurs,
l’honorable M. de Jaegher vous a très bien exposé pourquoi l’ajournement est
tout à fait intempestif ; il est indispensable que vous accordiez dès à présent
les fonds demandés ; car d’ici à l’expiration du premier terme du bail, il n’y
a que le temps strictement nécessaire pour établir la nouvelle fabrique ; car
remarquez, messieurs, que le premier terme du bail, c’en est la fin, puisque le
propriétaire est libre de le résilier à l’échéance de ce premier terme, s’il le
trouve convenable.
Je
répondrai à l’argumentation de l’honorable M. Dubus que lorsque le bail a été
conclu avec le sieur Malherbe, il n’était pas question de soumettre le contrat
de vente à l’approbation de la législature, par la raison toute simple que je
n’avais pas l’intention bien positive d’acheter l’établissement ; dans le courant
de l’année dernière, des circonstances particulières concernant l’armement de
nos troupes m’ont porté à réunir une commission d’officiers supérieurs de
l’artillerie et de l’infanterie, pour émettre son avis sur les modifications à
introduire dans ces branches importantes du service ; pendant que la commission
s’occupait de son travail, M. Malherbe est venu lui-même me présenter un long
mémoire, dans lequel il développait les avantages qu’il y aurait pour le
gouvernement à fabriquer des armes ; il me faisait en même temps l’offre de sa
manufacture ; cette offre et la question traitée dans le mémoire, furent
soumises à la commission, qui émit l’avis qu’il était très convenable,
nécessaire même, que le gouvernement se chargeât lui-même de la fabrication des
armes. J’ai ensuite autorisé la location immédiate et l’achat éventuel de
l’établissement du sieur Malherbe ; certes, une semblable acquisition ne
pouvait devenir définitive sans avoir obtenu la sanction des chambres, et s’il
s’était agi d’acheter définitivement l’établissement dont il s’agit, je me
serais borné à faire une réserve à cet égard ; mais je n’ai pas voulu me lier,
par le motif que je n’étais pas convaincu que l’établissement fût convenable ;
depuis, je l’ai vu moi-même, et j’ai acquis la certitude qu’il ne satisfaisait
pas à tous les besoins de la fabrication des armes dont l’armée a besoin, et
qu’il serait nécessaire de faire encore des dépenses considérables pour
l’agrandir, et pour l’entretenir dans un état convenable, afin que la fabrication
complète pût y avoir lieu : voilà quels sont les motifs pour lesquels je n’ai
pas voulu user de la faculté que je m’étais réservée d’acquérir ou de ne pas
acquérir. La ratification des chambres ne devait être qu’une conséquence de ma
propre détermination d’acquérir ce local ; il fallait, pour qu’il y eût lieu à
intervention de la part de la chambre, qu’elle fût saisie d’une proposition.
Quant
à moi, j’étais résolu à ne pas faire cette proposition, parce que je ne
l’aurais pas regardée comme conforme aux intérêts du pays.
L’on
a argumenté de la teneur du contrat, et l’on a dit que la clause qui lie en
quelque sorte le propriétaire de la manufacture et qui ne lie pas le
gouvernement pouvait rendre le contrat nul. Je pense que ceci est une
exagération ; le propriétaire n’est pas plus tenu de vendre son terrain que le
gouvernement n’est tenu de l’acheter. Du reste, le contrat est régulier ; je ne
pense pas que la clause dont il s’agit puisse le rendre nul.
On
a employé, à propos de cela, l’expression de bonne foi ; et l’on a argumenté
des inductions qu’on pouvait tirer du contrat, pour juger que les choses ont pu
se passer de la manière qui est indiquée dans la pétition.
Je dois protester de la manière la plus formelle
contre une telle argumentation ; j’opposerai, moi, à ces inductions, la
déclaration positive que tout s’est passé avec la plus entière bonne foi, et je
pense que la section centrale doit avoir acquis la conviction que les choses se
sont passées ainsi.
Je
n’ai jamais dit ni écrit un mot qui pût faire croire au propriétaire de la
manufacture dont il s’agit, que mon intention était d’acquérir son
établissement. Je pense dès lors que je puis laisser cette question entièrement
de côté, et me restreindre à celle-ci : « Est-il convenable que le gouvernement
achète dès à présent un terrain pour établir une manufacture d’armes ? ou bien,
y a-t-il lieu d’ajourner ? » Je ne puis que répéter ce que l’honorable M.
de Jaegher vient de dire à cet égard : c’est qu’on a pris, pour établir une
manufacture d’armes convenable, le moment où, le bail cessant, on n’était plus
tenu par aucun engagement.
Je
pense que ce ne sera qu’en 1840 que le nouvel établissement pourra être
complétement en activité, si toutefois on le commence dès cette année ; c’est
pourquoi j’insiste pour que le crédit soit accordé.
M. David.
- Messieurs, l’utilité d’une fabrique d’armes à Liége au compte du gouvernement
me paraît une chose bien douteuse.
En
effet, si la Belgique était forcée de subir les 24 articles, si elle était
condamnée à la neutralité, à quoi bon une fabrique d’armes propriété du
gouvernement, quand nous avons plusieurs fabriques de particuliers qui ont
toujours eu la réputation de livrer un travail parfait ?
Ce
que je viens de dire, messieurs, m’amène à ajouter qu’il serait plus convenable
au gouvernement de continuer le bail avec M. Malherbe, pour faire des essais,
jusqu’à notre stabilité complète, que de commencer des établissements dont on
ne peut dès aujourd’hui indiquer la valeur, et qu’on sera peut-être forcé de
laisser chômer plus tard.
Il
y a aussi, messieurs, des considérations d’équité qui doivent réveiller la
sympathie de la chambre en faveur du contrat de M. Malherbe, car si on rompt ce
contrat brusquement, il est évident qu’on fait un tort considérable à M.
Malherbe qui a abandonné depuis quelque temps les affaires de la fabrication et
sa clientèle.
M.
Dumortier. - Messieurs, je ne puis qu’appuyer les
observations de l’honorable M. David. Il est certain que dans l’état où la
Belgique se trouvera lors de la conclusion d’un traité de paix avec la
Hollande, une manufacture d’armes, aux frais de l’Etat, ne serait pas seulement
inutile, mais encore onéreuse au pays.
En
effet, lorsque la Belgique aura acquis la neutralité, je vous le demande,
messieurs, à quoi servira une manufacture d’armes dans laquelle on pourra faire
mille fusils par mois ?
Je
ne pense pas, messieurs, que ce soit là une conception heureuse pour un pays
qui n’est pas destiné à devenir une puissance belligérante. Je conçois qu’en
France et dans d’autres pays ou l’état militaire est un état permanent, une
fabrique d’armes aux frais de l’Etat puisse avoir un certain degré d’utilité ;
mais chez nous une telle fabrique serait réellement une superfétation, un
non-sens.
Le
roi Guillaume qui, certes, s’entendait en matière d’économie politique, n’a
jamais songé à créer une manufacture d’armes, quoique le royaume des Pays-Bas
fût le double de la Belgique actuelle. Le roi Guillaume s’était borné à faire
des acquisitions dans les fabriques d’armes de Liége. Depuis la révolution nous
avons réorganisé notre armée, au moyen d’acquisitions faites chez les
fabricants de la même ville et des environs. Il me semble qu’alors que ce
système a été suivi pour l’armement de l’armée, il ne doit pas être modifié
après que l’organisation de l’armée a eu lieu.
Je
ne conçois d’exception à ce système que lorsqu’il s’agit d’une fonderie de
canons, car il faut que la fabrication des pièces d’artillerie soit entourée de
garanties, pour qu’elles puissent servir d’une manière convenable. C’est
pourquoi aussi le gouvernement a établi une fonderie de canons. Mais vouloir
établir une fabrique d’armes aux frais de l’Etat, lorsque dans quelque temps
peut-être la Belgique sera déclarée neutre, lorsque nos principales forteresses
seront rasées, je vous le demande, à quoi servira une pareille manufacture ? Si
le système du ministre était adopté, je demanderais pourquoi le gouvernement
n’établirait pas aussi une manufacture de draps, une manufacture de toiles,
afin de se procurer le drap et la toile à meilleur compte. En réalité, il n’y a
pas de différence entre ce dernier cas et celui dont nous nous occupons.
Quant
à la question qui a été soulevée, je dirai que j’ai eu l’occasion de voir le
contrat de M. Malherbe, et qu’il est résulté pour moi cette conviction intime que, dans la passation de ce contrat, la première
chose qui avait été mise en avant était celle relative à l’acquisition de
l’établissement. Est-ce agir avec une loyauté parfaite, après avoir fait
l’acquisition de la fabrique de M. Malherbe que de venir le lendemain chercher
à acheter un terrain à côté ? Et si je suis bien informé, la fabrique que l’on
se propose d’établir sera au faubourg de Liége qui regarde Maestricht ; de
manière qu’on établirait la manufacture dans un endroit où, à la suite d’une
sortie inopinée de Maestricht, l’ennemi pourrait venir détruire la fabrique. Si
le gouvernement établit une semblable manufacture, il doit l’établir de manière
à la rendre à l’abri d’un coup de main de l’ennemi. En France, on a établi une
fabrique d’armes dans le midi, précisément pour la mettre à l’abri d’un coup de
main, pour la tenir éloignée des frontières. D’ailleurs, je le répète, c’est
une idée malencontreuse que de vouloir établir une manufacture d’armes chez
nous. En général, le gouvernement est mauvais fabricant en toutes choses, et
puisque l’armement de notre armée a été effectué au moyen d’acquisitions faites
chez des particuliers, il n’existe pas de motif pour que nous changions de
système.
Je
voterai, en conséquence, contre tout crédit qui tendrait à acquérir un terrain
pour l’établissement d’une fabrique d’armes.
M. le
ministre de la guerre (M. Willmar). - Messieurs, l’on
établir en général des fabriques d’armes là où l’on trouve les meilleurs
ouvriers. Or, comme Liége est la seule localité où l’on fabrique les armes sur
une grande échelle, c’est naturellement la place où il faut établir une
manufacture d’armes.
Quant
à la position de cette manufacture dans le faubourg de St-Léonard (elle ne
serait donc pas à côté de la fabrique de M. Malherbe, comme l’avait dit M.
Dumortier), je ferai observer que cette fabrique se trouvera à côté de la
fonderie de canons, et sous le canon de la citadelle.
M.
Dumortier est revenu sur la teneur du contrat, et il a dit qu’il avait la
conviction que la première condition de ce contrat avait été que le
gouvernement ferait l’acquisition de l’établissement de M. Malherbe ; que dès
lors M. Malherbe devait naturellement croire que c’était là mon intention.
Je
suis surpris que M. Dumortier soit revenu sur cette insinuation, alors que
j’avais déclaré positivement qu’il n’en était rien. Je défie qu’on cite un seul
mot de moi, d’où l’on puisse induire que mon intention était de proposer
l’acquisition de l’établissement de M. Malherbe. Je dirai que cette clause
insolite (pour me servir de l’expression de M. Dubus) n’a été véritablement
conservée dans le contrat que parce qu’elle devait servir d’avertissement au
propriétaire que j’entendant n’être nullement tenu envers lui. Ainsi la
conséquence qu’il est raisonnable de tirer de cette clause est inverse de celle
que M. Dubus, et après lui M. Dumortier, ont voulu en faire ressortir.
M.
Dumortier demande pourquoi, si l’Etat se fait fabricant d’armes, il ne se
ferait pas fabricant de drap ; il trouve qu’il n’y a entre ces deux choses
aucune différence. Tout autre que M. Dumortier trouvera qu’il n’y a aucun
rapport.
M.
Dumortier trouve que le gouvernement peut avoir une fonderie de canons ; car,
dit-il il faut des garanties pour que les canons soient bons. Comme, d’un autre
côté, il trouve inutile d’avoir une fabrique d’armes, on doit croire qu’il
suppose qu’il est inutile d’avoir des garanties de la bonté des armes. II est
inutile, messieurs, de vous faire remarquer toute l’importance de ces
garanties, afin que le soldat ne soit pas trahi par son arme.
On
a insisté surtout sur l’inutilité de la fabrique pour le temps de paix. Ceci
dépend évidemment de la proportion que l’on donnera à la fabrique elle-même.
Mais
il est bien certain que la Belgique, toute neutre qu’elle est sur le papier,
voudra avoir une certaine garantie de sa neutralité. Elle a des établissements
importants à garder, des villes de guerre où elle aura toujours une armée en
garnison, une armée qui devra avoir des armes. Nous devrons alors avoir un
approvisionnement d’armes représentant le double des armes qui se trouvent
entre les mains des troupes.
Tout
le monde sait que même en temps de paix les armes n’ont qu’une certaine durée.
On n’a qu’à calculer le nombre d’hommes qu’on devra conserver sous les armes
pour apprécier le nombre d’armes qu’on devra fabriquer annuellement et réparer,
les deux choses devant avoir lieu en même temps.
Je
dirai seulement quelques mots sur le tort que cette fabrique pourrait faire au
commerce. Je prierai la chambre de faire attention que la fabrication des armes
a deux objets : les armes de guerre et les armes de commerce. Les fabricants de
Liège sont habitués à fabriquer des armes pour le commerce ; la fabrication des
armes de guerre n’est pour eux qu’un accessoire ; quand la fabrication des
armes de guerre est donnée comme accessoire à un fabricant d’armes de commerce,
c’est un objet de jalousie pour les autres fabricants et un moyen de lui faire
une concurrence nuisible en accaparant un certain nombre d’ouvriers ; une lutte
s’ensuit, la main-d’œuvre augmente, et l’arme, revenant plus cher que ne
l’avait calculé le fabricant, est moins soignée, et on a de moins bonnes armes.
De la distinction que j’ai signalée entre la
fabrication d’armes de guerre et la fabrication d’armes de commerce, il résulte
qu’en retirant au commerce la fabrication des armes de guerre, on ne lui
portera pas un préjudice réel. C’est ce qu’a affirmé un honorable préopinant,
qui vous a dit que les fabricants d’armes de Liège ne se plaignent pas du
projet du gouvernement. Quant à moi, aucune réclamation ne m’a été adressée à
cet égard, quoique les fabricants de Liége n’ignorassent pas l’intention du
gouvernement d’établir une fabrique d’armes de guerre.
Je
répète que l’ajournement qu’on propose serait très nuisible, d’abord parce
qu’il s’agit de s’assurer d’un terrain, et que dans toutes les villes du pays,
et à Liége surtout, la valeur des terrains va toujours en augmentant, dans une
proportion très forte ; d’où il résulte que si le gouvernement veut acquérir,
il faut qu’il le fasse en temps opportun. Quant aux travaux de construction, il
faut que le gouvernement ait le temps de les exécuter, de manière à avoir une
manufacture d’armes bien organisée au moment où expirera le bail avec le sieur
Malherbe.
M.
Desmaisières. - Je dois justifier la commission du reproche
de laconisme qu’on a adressé à un de ses membres, mais qui, en réalité, était
adressé à tous. Nous avions pensé que toute la chambre, dans une matière aussi
délicate, nous approuverait de garder une sage réserve sur les motifs qui
avaient porté le ministre à faire la proposition d’établir une manufacture
d’armes, et sur les motifs qui nous avaient portés à l’adopter. Nous avions cru
qu’il suffisait de déclarer qu’en notre âme et conscience nous croyions la
mesure utile au maintien de la bonne organisation de notre armée, pour que
personne dans cette chambre n’élevât aucune objection. S’il m’était permis de
vous lire les notes qui nous ont été remises par le ministre de la guerre, mais
dont je crois pouvoir offrir la communication particulière à mes honorables
collègues, je suis persuadé que vous seriez convaincus de l’utilité, de la
nécessité, de l’urgence de l’exécution de cette proposition. Je dirai même, en
réponse à des assertions émises par d’honorables membres, que si le roi
Guillaume avait établi une manufacture d’armes pour le compte du gouvernement,
nous n’aurions pas manqué d’armes, et de bonnes armes, pour les défenseurs de
la patrie au mois d’août 1831.
Maintenant,
je conviens que sous le rapport de l’exécution, depuis l’opinion émise par la
section centrale, cette question s’est un peu modifiée, par suite de
l’opposition faite par le fabricant qui avait loué sa fabrique au gouvernement.
Nous avions eu le soin de demander au ministre de la guerre, préoccupés
toujours comme nous devons l’être de l’intérêt matériel du pays, de l’intérêt
des diverses industries du pays, s’il n’y avait pas d’opposition de la part des
fabricants d’armes de Liége. M. le ministre de la guerre nous a répondu qu’il
n’y en avait pas. En effet, aucune ne s’est manifestée, si ce n’est celle que
vient de faire M. Malherbe, propriétaire de la fabrique louée au gouvernement ;
qui, dans sa pétition dont je viens de vous faire le rapport, dit que les
fabricants d’armes de Liège, qui ne faisaient pas d’opposition à la fabrication
des armes de guerre par l’Etat, aussi longtemps qu’il s’agissait de l’achat de sa
fabrique par le gouvernement, sont prêts à faire opposition à la mesure
proposée aujourd’hui.
On
le conçoit. Le sieur Malherbe, fabricant d’armes pour le commerce, a destiné
son établissement à la fabrication des armes de guerre. Dès lors, il était
indifférent à l’industrie de Liége que ce fût le sieur Malherbe ou le
gouvernement qui fabriquât des armes de guerre, parce que lorsque l’article des
armes de commerce est prospère, les fabricants d’armes en général préfèrent
travailler pour le commerce que pour le gouvernement. Mais maintenant qu’il
s’agit d’établir pour les armes de guerre une autre fabrique que celle du sieur
Malherbe, et que celle-ci devra être livrée à la fabrication des armes de
commerce, il en résultera une concurrence pour les autres fabricants. Ou peut
prévoir, par la pétition du sieur Malherbe, qu’il y aura de leur part une
certaine opposition.
Je ne sais si en présence de l’utilité, de la
nécessité, de l’urgence de la mise à exécution du projet du ministre, cette
opposition probable de l’industrie de la fabrication des armes nous paraîtra de
nature à le faire ajourner. Il est de fait que nous arrivons à la fin de la
session, à une époque assez avancée et qui n’est pas loin d’une autre époque où
nous discuterons le budget. Dans mon opinion personnelle, je pense qu’il n’y a
aucun temps à perdre, surtout en présence des mouvements politiques qui ont
l’air de se préparer.
M.
Verhaegen. - Messieurs, je ne me proposais pas de prendre
la parole dans cette discussion ; mais la lecture d’une partie du contrat passé
avec le sieur Malherbe a éveillé mon attention. Je me permets de vous
communiquer mes idées sur ce point.
On
vient de vous dire que la fabrication des armes de guerre par le gouvernement
était une chose indispensable. L’honorable rapporteur n’a pu communiquer
entièrement sa pensée. Vous apprécierez les motifs de son silence. Quant à moi
je comprends les motifs qui ont déterminé la commission, et chacun des membres
de l’assemblée pourrait en faire autant. Et l’honorable M. Dumortier, s’il
connaissait ces motifs, se rangerait aussi de notre avis.
Quoi
qu’il en soit, il me semble que la nécessité de cette fabrication par le
gouvernement a été reconnue ; comme l’a dit l’honorable M. Dubus, il ne s’agit
que du mode de fabrication par le gouvernement, car la fabrication par le
gouvernement existe en principe. Le gouvernement fabrique ; mais il fabrique
dans un local qu’il tient en location. Cette location doit-elle continuer, ou
bien convient-il que le gouvernement achète un terrain et bâtisse une fabrique
? Voilà toute la question.
Eh
bien, si j’examine le contrat passé avec le sieur Malherbe, j’ai la conviction
intime que l’intérêt du gouvernement exige qu’il en finisse avec lui et bâtisse
une fabrique convenable.
En
effet, le gouvernement paie annuellement 20 mille francs au sieur Malherbe ; il
doit entretenir tous les ustensiles, les machines, sauf la machine à vapeur ;
il est responsable de toutes les détériorations, et s’il fait faire des
bâtisses nouvelles, elles appartiennent au propriétaire sans la moindre
indemnité. C’est probablement par cette raison qu’on a ajouté la clause qu’il
serait libre au gouvernement d’acquérir la fabrique de M. Malherbe moyennant la
somme de 310,000 fr., et que le propriétaire serait lié, mais non le
gouvernement. Ce qui a fait dire à l’honorable M. Dubus que le contrat, à
raison de cette condition qu’il considère comme potestative, fut frappé de
nullité.
Je
n’examinerai pas la question de savoir si cette condition est potestative et si
cette condition potestative doit entraîner la nullité du contrat. Mais ce
contrat serait-il nul, ce que le gouvernement demande et ce qu’il pense devoir
être dans l’intérêt du gouvernement, au lieu que le gouvernement achète pour
310,000 fr. plusieurs petites maisons, qui en définitive ne constituent pas un
ensemble, si les renseignements qui m’ont été donnés sont exacts ; ne vaut-il
pas mieux avoir un bel et bon bâtiment qui coûtera 300,000 fr. ?
Ici
l’intérêt particulier se trouve tant soit peu en jeu. Je viens d’entendre de la
bouche de l’honorable rapporteur que les fabricants de Liége, d’après ce qu’a
dit M. Malherbe, n’ont pas fait d’opposition aussi longtemps que le
gouvernement se proposait d’acquérir sa fabrique ; aujourd’hui que le
gouvernement ne veut plus faire cette acquisition, ils feront avec lui de
l’opposition. Voilà un intérêt particulier en jeu.
Maintenant
vaut-il mieux que le gouvernement construise pour 300,000 francs un bel et bon bâtiment,
alors qu’il est démontré que le gouvernement doit fabriquer lui-même les armes,
au lieu d’acheter pour 310.000 francs de toutes petites maisons qui ne valent
pas une fabrique ? On paie annuellement 20,000 francs. Le bail a été passé pour
9 ans en 1837, avec faculté pour le gouvernement de résilier au bout de la
troisième et de la sixième année en avertissant 3 mois d’avance. La première
période triennale va finir en 1840. Il faut, pour se débarrasser du bail, que
le gouvernement prévienne 3 mois d’avance.
Il
faut donc prendre ses mesures quelque temps avant qu’une période soit terminée.
Si on attend jusqu’en 1840, le gouvernement n’aura pas le temps d’organiser une
manufacture d’armes, il faudra donc commencer une seconde période et payer
pendant 3 années 20,000 fr. Ceci répond à l’objection sur laquelle on veut
appuyer la proposition d’ajournement. Moi je trouve qu’il y a urgence d’adopter
la proposition du gouvernement, car si vous attendiez jusqu’au budget, il
faudra commencer une seconde période de 3 ans et ainsi une somme de 60,000 fr.
montant du loyer pendant ces trois années, sera perdue. II est donc nécessaire
de prendre de suite un parti.
Mais,
dit-on, qu’a-t-on besoin d’une manufacture d’armes en Belgique ? La neutralité
de la Belgique s’y oppose. Qu’il me soit permis de dire en réponse à
l’honorable M. Dumortier que la neutralité de la Belgique me semble un
non-sens. La position naturelle de la Belgique fera toujours, quoi qu’en en
dise, le champ clos où toutes les puissances duellistes de l’Europe viendront
vider leurs querelles. Nous aurons beau faire et beau dire, cette position ne
nous donnera jamais une neutralité proprement dite.
Un
membre. - La Suisse est bien un pays neutre, pourquoi
la Belgique ne le serait-elle pas également ?
M.
Verhaegen. - Parce qu’il y a une grande différence entre
la position de la Suisse et celle de la Belgique. D’ailleurs la neutralité de
la Suisse n’a pas toujours été respectée, elle a été violé par Suwarowe et
Masséna, et lors de l’invasion de 1814, l’année autrichienne a traversé la
Suisse. De même, malgré notre neutralité, si les puissances du nord déclarent
la guerre à celles du midi, ou si nos alliés ne s’entendent plus, c’est en
Belgique que se videront leurs querelles.
Aux
raisons déjà données pour établir les avantages de la fabrication des armes par
le gouvernement, il faut en ajouter une autre ; il peut arriver que, d’un
instant à un autre, nous ayons besoin d’une grande quantité d’armes ; si le
gouvernement a une fabrique d’armes, dans un moment d’urgence, il peut faire
fabriquer immédiatement les armes nécessaires ; s’il faut qu’il ait recours à
une industrie particulière, ce même avantage n’existerait pas. Je demanderai à
l’honorable M. Dumortier, lui qui n’est pas partisan des 24 articles, où la
neutralité de la Belgique est proclamée, lui qui, dans une autre circonstance,
a senti la nécessité d’être en mesure non seulement de repousser une agression,
mais encore de diriger nous-mêmes une agression, nécessaire dans son opinion,
je lui demanderai s’il n’est pas nécessaire d’avoir une fabrique d’armes.
Au reste, cette difficulté n’est pas contestée ;
la question n’est pas là, elle est uniquement dans le mode de fabrication.
Si
les 300 mille francs restent pendant quelque temps improductifs, si nous
jouissons des avantages d’une neutralité d’après moi imaginaire, cette fabrique
d’armes n’aura pas toute l’extension que l’on veut lui supposer. Que
perdons-nous à cela ? L’intérêt de 300,000 fr., c’est-à-dire 15,000 fr. annuellement,
si nous supposons l’intérêt à 5 p. c. ; mais si vous considérez que cette
fabrique pourvoira à l’entretien et à la préparation des armes, vous jugerez
qu’on en tirera un avantage suffisant pour que l’intérêt du capital ne soit pas
perdu.
En
résumé, je pense que vous devez adopter la proposition du gouvernement pour
faire cesser les effets d’une convention que je considère comme désastreuse.
Si, dans d’autres circonstances, et il n’y a pas longtemps encore, j’ai blâmé
le monopole du gouvernement en matière d’industrie, d’autre part, je suis et
j’ai toujours été d’avis que le gouvernement peut et doit s’occuper de la
fabrication qui peut intéresser la défense du pays.
M.
Dumortier. - L’honorable préopinant a eu grand tort d’invoquer
mon opinion à l’égard des 24 articles ; cela ne fait rien à la question, car
les 24 articles n’ont rien de commun avec le statu quo. Si le préopinant avait
suivi les négociations diplomatiques, il saurait que longtemps avant qu’il fût
question des 24 articles et dès l’origine même de la révolution, l’Europe
entière a désiré voir la Belgique devenir un pays neutre. Cette neutralité
est-elle un bien ou un mal ? Ce n’est pas le lieu de l’examiner.
Nous
avons toujours vu la Suisse sauvée par sa neutralité, car si on a violé son
territoire, il en est toujours résulté à la paix qu’on lui rendait ses
anciennes limites.
Quoi
qu’il en soit, d’après le traité fait avec la Hollande, nous devons être pays
neutre. Que ferez-vous alors d’une manufacture d’armes qui fournira 1,000
fusils par mois ? Où mettrez-vous ces fusils ? A quoi serviront-ils ? Vous les
mettrez dans les arsenaux, mais ce seront des fonds inutilement employés.
Ferez-vous commerce de ces armes ? Vous aurez donc alors un gouvernement
marchand, un gouvernement d’agioteurs ; mais c’est le pire de tous les
gouvernements ; il n’y a qu’un pas de là à voir le gouvernement devenir un
gouvernement de Robert Macaire. (On rit.)
Dans
un tel état de choses, une manufacture d’armes du gouvernement est un véritable
non-sens. C’est sous ce point de vue que je repousse la proposition du
gouvernement.
L’honorable
rapporteur de la section centrale a dit que si nous avions eu une bonne
fabrique d’armes en 1831, nous n’aurions pas eu les événements de cette époque,
parce que la Belgique se serait présentée en armes devant l’ennemi. Mais vous
devez vous rappeler que le motif pour lequel nous n’avions pas d’armes alors,
c’est qu’on avait commis la faute de permettre la sortie des armes dans un
moment où nous en avions un si grand besoin. Par suite de ce système qu’on
avait adopté par une fausse délicatesse de liberté commerciale, nos fabricants
fournissaient des armes à nos ennemis et n’en fournissaient pas à nos armées.
Plus tard on est revenu sur cette disposition et on a prohibé la sortie des
armes ; mais c’est à cette sortie des armes que sont dus les événements de
1831.
Maintenant nous avons des armes dans les
arsenaux ; chacun de vous peut les visiter, il verra que les armes y sont en
bon ordre et en grand nombre. Je vois M. le ministre de la guerre faire un
signe de dénégation ; je sais qu’il n’y en a pas assez, mais le gouvernement
n’a pas besoin pour cela d’en fabriquer, il faut en acheter.
Si
la proposition qui est faite était admise, le gouvernement serait obligé
d’acheter du bois pour faire des crosses ; du fer, du cuivre, pour faire des
armes et leurs garnitures. C’est là une complication administrative, un dédale
dont il ne sortira pas à son avantage. Si le gouvernement a besoin d’armes, il
en trouvera toujours assez chez les fabricants de Liége.
M.
de Brouckere. - Si le gouvernement demandait des fonds pour
établir une fabrication qu’il transformerait en spéculation, je voterais contre
cette demande, parce qu’en matière de fabrication, il faut laisser faire
l’industrie privée ; mais la question soulevée aujourd’hui se rattache à la
défense du pays, et sous ce rapport je voterai pour la proposition du
gouvernement.
On
nous dit que si le fabricant est autorisé à fabriquer des armes, on pourra de
même l’autoriser à fabriquer les toiles et les draps dont les soldais ont
besoin. Messieurs, les toiles et les draps peuvent être de qualités plus ou
moins bonnes sans compromettre la sûreté de l’Etat ; mais il en serait
autrement, si les fabricants d’armes abusaient de la position du gouvernement
pour lui donner de mauvaises armes ; la défense du pays pourrait en souffrir.
Il faut que le gouvernement puisse armer les soldats, et qu’il ait par là toute
garantie relativement à la bonté des armes.
Mais,
dit-on, le gouvernement devra donc acheter du bois et du feu ? Oui, il en
achètera comme il achète des métaux pour la fabrication des canons. L’honorable
membre qui a fait l’objection, a ajouté lui-même que la fabrication des canons
ne pourrait pas être abandonnée à l’industrie particulière, parce qu’elle ne
présentait pas assez de garanties ; eh bien, il en est de même des fusils.
Je
dis ces mots pour appuyer la proposition du gouvernement. Toutefois je dois
ajouter que je ne me prononce ainsi que dans l’espoir que les prévisions du
ministre de la guerre ne seront pas dépassées, et que la somme de 500 mille
francs sera à peu près suffisante. Je témoignerais du mécontentement si elle
était de beaucoup dépassée.
Le
gouvernement fabrique aujourd’hui dans des bâtiments qu’il a pris à bail ;
quand on lui ôterait la faculté de construire une fabrique, il n’en
fabriquerait pas moins des armes ; cette considération fait tomber toutes les
objections que l’on a faites.
-
L’ajournement propos par M. de Behr, mis aux voix, n’est pas admis.
L’article
4 est adopté.
Article 5
« Art.
5. La somme de vingt-neuf mille trois cent soixante-treize francs douze
centimes des crédits alloués au budget de la guerre pour l’exercice 1838, sur
les chapitre, sections et articles ci-après désignés, est transférée au
chapitre II, section III, art. 13, cantonnement et nourriture, savoir :
« Du
chapitre II, section II, solde des troupes :
« Art. 1er. Infanterie : fr. 14,474 25 c
« Art. 2. Cavalerie : fr. 1,354 29 c.
« Art. 3. Artillerie : fr.
1,068 90 c.
« Art.
4. Génie : fr. 236 88 c.
« Du
même chapitre, section III :
« Art.
1er. Masse de pain : fr. 10,199
« Art.
7. Masse de casernement des hommes : fr. 2,039 80 c.
« Total
: fr. 29,373 12 c. »
-
Cet article est adopté sans discussion.
Vote
sur l’ensemble du projet
-
La loi n’ayant pas été amendée est soumise à l’appel nominal.
73
membres sont présents.
69
votent l’adoption.
2
votent le rejet.
2
s’abstiennent.
En
conséquence, la loi sera transmise au sénat.
Ont
voté l’adoption : MM. Andries, Angillis, Beerenbroeck, Bekaert-Baeckelandt,
Brabant, Corneli, David, de Behr, de Brouckere, de Florisone, de Jaegher, de
Langhe, de Longrée, de Man d’Attenrode, F. de Mérode, Demonceau, de Nef,
Dequesne, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, de
Terbecq, de Theux, Devaux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dolez, Dubois, Dubus (aîné),
B. Dubus, Dumortier, Duvivier, Eloy de Burdinne, Ernst, Fallon, Frison, Heptia,
Hye-Hoys, Jadot, Kervyn, Lardinois, Lebeau, Lecreps, Lejeune, Maertens,
Mercier, Metz, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Pirson, Pollénus,
Raymaeckers, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Scheyven, Seron, Smits, Stas de
Volder, Trentesaux, Troye, Ullens, Vanderbelen, Van Hoobrouck, Verdussen,
Verhaegen, H. Vilain XIIII, Willmar, Zoude.
Ont
voté le rejet : MM. Seron, Jadot.
M.
Dubus (aîné). - La discussion a fourni les motifs de mon
abstention. Je n’ai rien trouvé de satisfaisant dans les réponses aux questions
adressées au ministre.
M.
Dumortier. - Je me suis abstenu de voter contre la loi
parce qu’il s’agit de notre armée ; mais je n’ai pu voter son adoption à cause
de l’article que j’ai combattu.
PROJET DE LOI ACCORDANT DES CREDITS POUR CREANCES
ARRIEREES AU BUDGET DU DEPARTEMENT DE LA JUSTICE
« Article
unique. Il est ouvert, au département de la justice, un crédit de quarante-cinq
mille trois cent trente francs (45,330 fr.), applicable au paiement des dépenses
de l’exercice 1832 et des exercices antérieurs, qui restent à liquider.
« Cette
allocation formera le chapitre XI, article unique du budget du département de
la justice pour l’exercice 1837. »
-
Cet article est adopté sans discussion.
Il
est soumis à l’appel nominal et adopté à l’unanimité par les 72 membres
présents.
PROJET DE LOI ACCORDANT DES CREDITS POUR
CREANCES ARRIEREES AU BUDGET DU DEPARTEMENT DES TRAVAUX PUBLICS
Personne
ne demandant la parole, l’article unique de ce projet est mis aux voix et
adopté à l’unanimité par les membres présents.
Il
est ainsi conçu :
« Il
est alloué au département des travaux publics un crédit supplémentaire de cent
cinq mille sept cent quatre-vingt-quatre francs quatre-vingt-trois centimes
(fr. 105,784 83 c.) pour l’acquit de diverses dépenses de 1835 et années
antérieures, restant à liquider, et qui sont détaillées dans le tableau annexé
la présente loi.
« Cette
allocation formera le chapitre IX, article unique, du budget du même
département pour l’exercice de 1838. »
PROJET DE LOI ACCORDANT DES CREDITS POUR COUVRIR
LES DEPENSES ARRIEREES DU CADASTRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT DES FINANCES
M.
Zoude propose, au nom de la commission du cadastre,
le projet de loi suivant :
« Article
unique. Il est ouvert au ministre des finances un crédit de 223,758 fr. pour
solder l’arriéré des dépenses faites pour l’exécution du cadastre.
« La
réserve mise à la libre disposition du crédit alloué pour le même objet, au
chapitre III, article 12 du budget du département des finances pour 1838 (loi
du 31 décembre 1837, Bulletin officiel,
n°645), est levée. »
M. le
ministre des finances (M. d’Huart) déclare se rallier au
projet qui n’a d’autre objet que d’accorder au gouvernement le complément d’un
crédit demandé au budget et voté en partie.
-
Le projet de loi est adopté à l’unanimité par les 68 membres qui ont pris part
au vote.
M. Eloy de Burdinne
s’est abstenu ; il motive en ces termes son abstention. - Je me suis abstenu,
messieurs, parce qu’il ne m’est pas prouvé que les soldes réclamés soient
réellement dus au moins en entier.
PROJET DE LOI
ACCORDANT UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT DE L’INTERIEUR POUR
L’ENCOURAGEMENT DE LA CULTURE DE LA GARANCE
M. le
président. - L’ordre du jour appelle la discussion du
rapport de la commission d’agriculture sur les pétitions relatives à la
garance.
M.
Lardinois. - Messieurs, ce rapport n’a été distribué
qu’hier ; il me semble qu’il conviendrait de remettre la discussion à lundi,
afin que nous ayons le temps d’examiner la question.
M.
Van Hoobrouck de Fiennes. - Messieurs je dois
faire remarquer que le projet a été distribué dès la semaine dernière et que la
loi a été mise à l’ordre du jour pour aujourd’hui.
D’ailleurs
il ne s’agit pas ici de voter un crédit nouveau mais d’autoriser simplement le
ministre à disposer des sommes qui ont été annuellement allouées par la
législature pour cet objet et qui n’ont pu être employées les années
précédentes.
Si
la loi est encore aujourd’hui ajournée, elle sera sans résultat, car l’époque
de l’année où l’on doit cultiver la garance est arrivée.
Je
demande donc que, s’en tenant à son ordre du jour, la chambre discute
immédiatement le projet de loi.
-
La chambre décide que la discussion du projet de loi aura lieu immédiatement.
Discussion des articles
Article premier
Ce
projet est ainsi conçu :
« Art.
1er. Les sommes suivantes, allouées pour encouragement à la culture de la garance,
et qui sont restées disponibles sur les crédits portés aux budgets du ministère
de l’intérieur, pour les exercices 1834, 1835, 1836 et 1837, sont transférées
au chapitre VI du budget du même ministère (exercice 1838), pour y former avec
la somme de 7,000 francs qui s’y trouve déjà comprise, un article spécial
intitulé : Encouragement à la culture et à la fabrication de la garance, et
dont le montant total sera ainsi porté à 29,335 fr. 90 c., savoir :
« Du
budget de 1834 : fr. 3,000
« Du
budget de 1835 : fr. 6,294 83 c.
« Du budget de 1836 : fr. 4,221 23 c.
« Du
budget de 1837 : fr. 8,849 84 c.
« Somme
déjà comprise au budget de 1838 : fr. 7,000
« Total
: fr. 29,335 90 c. »
« Art. 2. Les conditions à remplir, pour avoir
part à la distribution du fonds d’encouragement alloué par l’article précédent,
en faveur de la culture et de la fabrication de la garance, seront déterminées
par un arrêté royal, inséré au Bulletin
officiel, publié et affiché dans toutes les communes du royaume. »
M. Verdussen.
- Je désire savoir si le libellé qui est porté dans les budgets de 1834 à 1837,
est semblable à celui qui est proposé dans l’article premier.
M. Desmaisières, rapporteur.
- Messieurs, l’honorable préopinant ne se rappelle probablement pas que dans
ces budgets il n’y a pas de libellé proprement dit pour l’encouragement de la
culture de la garance. La somme qu’on a votée pour cet objet est comprise dans
le crédit total affecté à l’encouragement de l’agriculture. C’est dans les
développements des budgets que ce libellé, tel qu’il se trouve à l’article
premier, est indiqué. Or comme il ne s’agit plus dans le cas présent que de
l’encouragement de la culture de la garance, nous avons proposé à l’article
premier le même libellé qui se trouve dans les développements du budget pour
ces encouragements.
M. le ministre de l’intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Messieurs, on
pourrait adopter cette rédaction : « Les sommes suivantes, allouées au
fonds général de l’agriculture pour l’encouragement de la culture de la
garance… »
De
cette manière, il n’y aurait plus de doute.
M.
de Muelenaere. - Messieurs, parmi les transferts qu’on se
propose d’opérer, il y en a qui concernent les exercices 1834 et 1835. Je
demanderai à M. le ministre des finances s’il ne voit pas d’inconvénients à ce
qu’en 1838 on opère, par une mesure législative, un transfert du budget déjà
clos ; car les budgets de 1834 et 1835 sont clos. Dès lors ces transferts ne me
paraissent pas très réguliers, conformément aux dispositions existantes. Il y
aurait, au reste, un autre moyen d’arriver au même résultat : ce serait
d’ouvrir un crédit à M. le ministre de l’intérieur.
M. le ministre des finances (M.
d’Huart). - L’observation de l’honorable préopinant est
juste. On ne peut pas transférer des sommes du budget de 1834 et de 1835,
puisque les exercices 1834 et 1835 sont clos. Mais on peut arriver au but que
se propose la commission en ouvrant un crédit équivalant aux deux sommes qu’on
proposait de transférer.
M.
Lebeau. - Ne vaudrait-il pas mieux, pour l’ordre de la
comptabilité, ne rien transférer du tout, et ouvrir au ministre un nouveau
crédit au budget de 1838 ? Dans le fait, c’est la même chose. Je proposerai en
conséquence d’ouvrir un crédit de 22,000 fr. au budget de l’exercice de 1838.
M.
Verdussen. - Messieurs, il y a en vérité des
inconvénients dans les transferts, et j’en signalerai un qui pourrait se
présenter. Je ne sais pas, par exemple, s’il n’y a point eu déjà des transferts
sur les budgets des années antérieures mentionnées à l’article premier ; s’il y
a eu des transferts, je ne sais pas si les sommes disponibles n’ont pas été
toutes absorbées.
Maintenant on demande un crédit spécial sur
l’exercice de 1838. Si l’on adopte cette proposition, je ferai observer qu’il
ne faudra alors allouer que 22,000 fr., puisque 7,000 fr. sont déjà passés au
budget de 1838.
D’un
autre côté je n’ai pas très bien compris tantôt si le ministre a dit qu’il
n’avait été rien alloué pour l’encouragement de la culture de la garance ; je
ne sais pas non plus si les sommes qui ont été globalement allouées dans les
budgets des années indiquées à l’article premier n’ont pas été absorbées par
d’autres encouragements.
Ce
sont des doutes que j’ai eus, sur lesquels je voudrais avoir des
éclaircissements. Je le répète, je n’ai pas pu prévoir que cette discussion
aurait lieu ; je ne me suis pas préparé, et je voudrais qu’en tout état de
cause, la chose fût remise à lundi.
M.
Desmaisières, rapporteur. - Messieurs, il
s’agit seulement de voter l’application de sommes qui ont déjà été alloués. Si
nous n’avons pas proposé un crédit nouveau, et si nous avons proposé des
transferts, c’est parce que nous ignorions si, par suite d’un crédit nouveau,
la balance continuerait à exister entre les recettes et les dépenses de
l’exercice 1838 ; et que, comme il y avait des fonds disponibles sur les
budgets antérieurs, nous n’augmentions pas la somme des dépenses de 1838. S’il
y a possibilité, sans déranger la balance des recettes et dépenses, d’ouvrir un
nouveau crédit sans transfert, je ne m’y opposerai pas. Je ne parle ici qu’en
mon nom, car je n’ai pas eu le temps de consulter la commission.
Maintenant,
de quoi s’agit-il ? Purement et simplement de rendre disponibles de nouveau des
sommes qui été votées déjà par la législature et qui n’ont pas été employées.
L’honorable M. Verdussen voudrait que cela fût
voté sous le titre général d’encouragement à l’agriculture, sans spécifier que
c’est pour encourager la culture et la fabrication de la garance. Il pourrait
en être ainsi, si nous votions le budget ; mais nous votons un encouragement
spécial pour la culture et la fabrication de la garance ; il est nécessaire
alors de libeller l’article, comme la commission a proposé de le faire.
Il
y a un autre motif, c’est que l’amendement que vient de proposer le ministre de
l’intérieur, est motivé sur ce qu’en 1837 la somme de 8,919 fr. destinée à
encourager la culture de la garance, qui n’a pas été employée à cet objet, sur
les 10,000 fr. accordés cette année pour encouragement à l’agriculture, a été
employé à un autre encouragement de l’agriculture en général ; je crois, à la
construction d’écuries pour des haras.
Ainsi
donc, si vous voulez que le crédit que vous votez soit employé à encourager la
culture de la garance, il faut libeller le projet de loi comme nous le
proposons. Si vous dites seulement d’une manière générale que c’est pour
encouragement à l’agriculture, vous risqueriez d’en voir frustrer la culture et
la fabrication de la garance.
M. le ministre de l’intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Si en 1837 la
somme portée au budget pour encourager la culture de la garance n’a pas reçu
cette destination, c’est qu’il n’a pas été possible d’en faire un emploi utile.
Mais pour aller au-devant de toutes les objections je pense qu’on pourrait
rédiger l’article premier de la manière suivante :
« La
somme de 7 mille fr. comprise dans les fonds pour encouragement, au budget de
1838 du département de l’intérieur, à l’effet de favoriser la culture et la
fabrication de la garance, est majorée de 22,000 fr. »
-
Cet article est adopté.
Article 2
« Art.
2. Les conditions à remplir pour avoir part à la distribution du fonds
d’encouragement à l’agriculture, au budget de 1838 du département de
l’intérieur, à l’effet de favoriser la culture et la fabrication de la
garance. »
M. le ministre de
l’intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux).
- Je demanderai la suppression de cet article 2. Il est évident que s’il s’agit
d’accorder des primes, ces primes seront déterminées par arrêté royal et
portées à la connaissance de tous les habitants du pays avec la plus grande
publicité. Mais jusqu’à présent je vous dirai que je suis peu fixé sur la
nécessité d’accorder des primes à l’agriculture et sur les conditions à
déterminer. Pour le faire avec utilité, il faut offrir aux intéressés une
garantie que ces primes seront continuées pendant quelques années et qu’il y
aura un fonds suffisant pour tous les réclamants.
Vous
savez que quand il s’est agi d’encourager la construction des navires, on a
fixé la prime, mais on n’a pas limité le crédit. C’est de principe, et, aussi
longtemps que la loi sera en vigueur, ceux qui construiront des navires auront
droit à la prime. Je crois qu’avant de se déterminer à accorder des primes pour
l’objet dont il s’agit, il faudrait faire une loi. Mais une partie de la somme
pourrait être employée utilement pour faciliter, améliorer les procédés de
fabrication de la garance. Il serait inutile de prendre un arrêté royal qui
détermine les conditions ; cette disposition pourrait être un obstacle à
l’emploi utile de la somme.
L’article
2 doit être retranché dans l’intérêt des vues des auteurs du projet. S’il
s’agit d’une concurrence à établir, les conditions seront déterminées par
arrêté royal de la manière la plus large.
M. Desmaisières.
- Pressée par le temps et n’étant pas bien fixée, la commission a proposé son
article 2 par lequel elle a voulu assurer qu’il serait donné toute la publicité
possible aux encouragements que le gouvernement se proposait de donner, et
ensuite que les conditions à remplir pour avoir part à l’encouragement seraient
bien déterminées et soumises à la critique des intéressés. Mais l’honorable
ministre de l’intérieur vient de faire connaître qu’il trouve des difficultés à
ce que cet article soit admis, et qu’il pourrait être un obstacle à l’emploi
convenable du crédit. Dans ces circonstances, pour ce qui me regarde
personnellement, je me rallie à la suppression qu’il demande.
M.
Van Hoobrouck de Fiennes. - Notre proposition
n’avait pas pour objet le perfectionnement et l’encouragement de la fabrication
de la garance, mais l’encouragement de la culture. Nous avons besoin avant tout
de la matière première, qui nous manque depuis que la Zélande est séparée de
nous, parce qu’il y a une prohibition absolue. Par conséquent, c’est la culture
qu’il faut encourager. Je demanderai donc à M. le ministre de l'intérieur si
son intention, comme j’ai cru le comprendre, est de se borner à encourager la
fabrication plutôt que la culture de la garance, car c’est pour la culture que
nous avons demandé des encouragements.
M. le ministre de l’intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je n’ai pas dit
d’une manière absolue qu’il ne serait pas donner d’encouragements à la culture
de la garance, mais que je ne pouvais pas prendre l’engagement d’accorder des
primes pour cette culture, parce qu’il fallait avant tout que cette question
fût l’objet d’un examen approfondi. C’est pour cela qu’il faut laisser au
gouvernement le soin d’employer la somme votée, soit à la culture, soit à la
fabrication de la garance, et retrancher l’article 2.
-
L’article 2 est mis aux voix et n’est pas adopté.
Vote sur l’ensemble du projet
La
chambre décide qu’elle passera immédiatement au vote par appel nominal.
51
membres seulement étant présents, le vote est renvoyé à lundi.
La
séance est levée à quatre heures et demie.