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Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 6
décembre 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment
pétition relative à une demande en indemnité de la ville d’Ypres par suite des
pillages de 1831 (de Langhe)
2) Projet de loi portant le budget du
département de la justice pour l’exercice 1838. Discussion des articles. Régime
des prisons, notamment instruction religieuse et morale des détenus (Andries, Ernst, Desmet)
maisons d’arrêt de Verviers (Demonceau), dépôts de
mendicité (de Muelenaere), réplique générale (Ernst), dépôts de mendicité (de
Jaegher), régime des prisons (Desmet), dépôts de
mendicité (Lebeau, Ernst, Lebeau, de Muelenaere, de Jaegher, Ernst), construction
et entretien des prisons (Simons, Ernst,
Pollénus, Ernst, Simons, Ernst), travail des détenus (Pollénus, Ernst), établissements de
bienfaisance (Desmet), palais de justice de Bruxelles (Desmanet de Biesme, de Behr, Ernst, Dumortier, Ernst, Dumortier), établissements
de bienfaisance et hospices d’aliénés (Andries, Ernst, Gendebien, A. Rodenbach, de Jaegher, Ernst, Pollénus), traitements des
membres de l’ordre judiciaire (Verhaegen, Dumortier), palais de justice de Bruxelles (de Behr, Ernst, Dumortier,
Ernst, Gendebien), traitements
des membres de l’ordre judiciaire (Verhaegen)
(Moniteur belge
n°341, du 7 décembre 1837)
(Présidence de M. Raikem.)
M. de Renesse
fait l’appel nominal à une heure.
M. Kervyn
lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse
présente l’analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le conseil communal de la ville d’Ypres adresse
des plaintes sur le prix élevé de la houille.
- Renvoi à la commission des pétitions avec demande
d’un prompt rapport.
_________________
« Le sieur J. A. Pyls, négociant à Meersen
(Maestricht), se plaint des entraves qu’il éprouve dans son commerce de la part
de l’administration des douanes. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
« Le conseil communal de la ville d’Ypres demande
que les indemnités du chef des pillages commis dans la révolution soient à la
charge de l’Etat, et que cette ville soit remboursée des avances qu’elle a faites
de ce chef.
M. de Langhe.
- Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des pétitions
avec invitation de faire un prompt rapport sur cette pétition, en même temps
que sur les pétitions de même nature ; et comme l’affaire qui en fait l’objet
est importante, je demande en outre l’insertion de la pétition au Moniteur.
- La proposition de M. de Langhe est mise aux voix et
adoptée ; en conséquence la chambre ordonne le renvoi de la pétition à la
commission des pétitions avec demande d’un rapport sur cette pétition, en même
temps que sur les autres pétitions qui ont rapport au même objet, et son
insertion au Moniteur.
Voici cette pétition :
«A MM. les membres de la chambre des représentants.
« Messieurs,
« De tristes épisodes ont accompagné notre
régénération politique ; les principales villes du royaume ont été tour à tour
le théâtre de dévastations que déploreront à jamais les amis d’une sage
liberté. La ville d’Ypres eut sa part dans les excès de l’exaspération
populaire. La nuit du 6 avril 1831 amena le pillage de trois de nos plus riches
maisons, et greva notre dette d’une somme 195,456 francs. Nous ne chercherons
pas ici à déterminer sous quelle influence eurent lieu ces désordres ; nous
n’accuserons personne ; nous nous bornerons à relater qu’ils furent exécutés en
présence d’une force armée plus que suffisante pour les réprimer !!
« Mais si ces scènes de dévastation ont eu leur
but politique, les suites n’en ont pas moins été désastreuses pour notre ville.
Bientôt elle se vit appelée en restitution des dommages, conformément à la loi
de vendémiaire an IV ; elle essaya d’abord de se défendre, elle attaqua en
sous-garantie les autorités militaires qui commandaient alors dans son enceinte
; l’affaire s’instruisait, et d’éclatantes lumières allaient jaillir des débats
; mais les dispositions de la loi étaient accablantes ; et la régence, après de
mûres délibérations, de l’avis de jurisconsultes éclairés, et à l’exemple
d’autres villes du royaume, préféra une transaction aux chances inévitables
d’un procès ruineux, se réservant toutefois son recours garantie contre qui de
droit. Une somme de fr. 165,025 90 c. fut payée aux victimes des pillages ;
mais, pour obtenir ce résultat, pour liquider cette dette avec ses accessoires,
la ville dut s’imposer les sacrifices les plus douloureux ; elle fut obligée
d’épuiser son encaisse et ses ressources pécuniaires, de vendre pour 23,00 fr.
de ses plus belles propriétés, d’emprunter aux taux onéreux de 5 et 4 1/2 p. c.
une somme de 90,000 fr., d’imposer à ses habitants une taxe de 5 centimes
extraordinaires sur la contribution personnelle, de soutenir un procès pour le
recouvrement de cette taxe que le gouvernement l’avait autorisée à percevoir,
et qui ne fut prélevée que pendant une année ; de majorer le tarif de ses taxes
municipales sur plusieurs objets de première nécessité ; d’introduite un droit
sur les engrais, et finalement de porter annuellement à son budget une
allocation de 20,000 francs.
« Aujourd’hui que des temps de prospérité ont succédé
à ces jours néfastes, aujourd’hui que la Belgique entière recueille les
bienfaits de sa révolution, le moment est venu de faire entendre les justes
réclamations des villes qui, seules, pâtissent encore des malheurs partiels que
cette révolution a entraînés à sa suite. Représentants de la nation, nous vous
demandons, nous attendons de votre équité, une loi réparatrice, qui, en
déclarant dettes de l’Etat les indemnités résultant des pillages de 1831, en
prescrit la restitution aux villes qui en ont fait l’avance, et nous fondons
notre demande :
« 1° Sur ce que ces pillages doivent être considérés
comme résultant des grands événements qui ont amené notre émancipation
politique, dont il est juste de répartir les charges entre tous ceux qui
participent à ses bienfaits.
« 2° Sur ce que les régences, et en particulier
celle de la ville d’Ypres, qui de leur côté ont épuisé tous les moyens qu’elles
avaient à leur disposition pour arrêter les dévastations, n’ont pas trouvé dans
l’autorité militaire qui représentait le gouvernement le concours qu’elles
avaient droit d’en attendre pour la répression de ces désordres ; que dès lors
la responsabilité n’en peut peser sur elles, mais bien sur le gouvernement
seul, qui tenait à sa disposition le pouvoir de les arrêter.
« Et vous ferez justice.
« (Suivent les
signatures.) »
Discussion des articles
Chapitre VIII. - Prisons
Article premier
M. le président.
- La discussion continue sur le chapitre VIII « Prisons »
M. Andries.
- Messieurs, j’aimerais d’ajouter quelques mots à l’appui de l’opinion émise
par moi dans la séance de samedi dernier. Je n’ai pas hésité à déclarer alors
comme je le déclare encore que le meilleur système pour parvenir à la réforme
morale du prisonnier, c’est le système de l’emprisonnement solitaire. On ne
peut pas se dissimuler, messieurs, que le mouvement qui détermine à travailler
à la réforme des prisons, ne soit un mouvement essentiellement religieux.
Longtemps on s’était borné à y organiser le travail, et on croyait avoir
atteint le comble de la perfection, quand on avait réussi à convertir nos
prisons en ateliers où le travail était parfaitement bien établi, où la
régularité des mouvements était parfaite, où l’hygiène était bonne. Mais le
nombre énorme des récidives apprit bientôt qu’un système où l’influence
moralisante de la religion était nulle ou presque nulle était un système vicieux.
Aujourd’hui les gouvernements, éclairés par une triste
expérience, s’efforcent à rendre les prisons ce qu’elles doivent être avant
tout, des maisons de réforme et de pénitence. J’espère qu’on y réussira ; mais
le succès est subordonné à une condition, c’est que les maisons de pénitence
forcée soient modelées autant que possible sur les maisons de pénitence
chrétienne volontaire. Ainsi donc, les hommes qui s’y trouvent, il faut, pour
les réformer, les prendre un à un et pour ainsi dire corps à corps ; il faut
qu’ils vivent dans la solitude, non pas dans une solitude farouche et absolue,
non ; cette idée outrée ne peut pas entrer dans l’esprit d’un homme sensé ;
mais une solitude tempérée par toutes les modifications que peut inspirer
l’amour du prochain, cette source féconde d’actes généreux et héroïques. Ce
n’est pas d’un confinement solitaire que nous voulons parler, mais nous voulons
substituer aux rapports corrupteurs de nos prisons actuelles les relations
morales, les enseignements fréquents, les soins bienveillants et les
consolations inépuisables de la religion. Le système de séparation seul peut
faire jouir de ces avantages.
Vous parlez de consolations religieuses, c’est vous
faire entendre, messieurs, que, dans mon opinion, pour compléter le véritable
système de réforme, il faut parvenir à faire desservir les prisons par des
frères et des sœurs de la charité, ou par des personnes qui, sous une
dénomination quelconque, se vouent par choix et par vocation au soulagement des
misères humaines. Sans cette influence incessante, douce et bienfaisante de la
religion, je l’avoue, le système dont je parle manquerait son but.
Déjà l’an passé, dans la discussion de son budget, M.
le ministre de la justice a énoncé hautement son opinion en faveur de cette
idée. Voici ce que cet honorable ministre a dit dans la séance du 21 janvier de
cette année ; je me plais à répéter ses paroles : « C’est peu de chose,
a-t-il dit, que les prisonniers soient bien nourris, bien vêtus. Il faut faire
en sorte que les mauvais ne corrompent pas les autres ; il faut faire en sorte
d’améliorer les mauvais. Et je ne connais pas de meilleur moyen, pour obtenir
ce résultat, que de confier la surveillance des prisonniers à des personnes
qu’anime l’esprit de charité, et qui donnent l’exemple d’un dévouement que la
religion peut seule inspirer. »
Aujourd’hui, dans l’ouvrage qui vient de paraître,
l’inspecteur-général de nos prisons dit, dès le début de son livre, que c’est
au catholicisme qu’appartient, dans nos contrées, la mission de régénérer les
prisonniers. « L’œuvre de la réforrne des prisons, dit-il un peu plus
loin, est une œuvre toute chrétienne et tout catholique, qui doit avoir pour
résultat de rendre le coupable à la société dont il a enfreint les lois, à Dieu
dont il a méconnu les commandements. »
Je félicite mon pays de voir à la tête de
l’administration supérieure des hommes animés d’un esprit si réellement
philanthropique. Je forme les vœux les plus ardents pour que cet appel fait au
catholicisme porte de prompts et solides fruits.
Le système cellulaire de nuit, à mon grand étonnement,
a été attaqué dans cette enceinte. Ce système cependant n’est pas d’origine
américaine. C’est en Belgique qu’il a pris naissance et qu’il a reçu ses
premières applications. Dans les maisons centrales de Gand et de Vilvorde,
construites à la fin du siècle dernier par les Etats de Flandre et ceux de
Brabant, chaque détenu avait sa cellule pendant la nuit.
Le système de séparation complète de jour et de nuit
n’est qu’un perfectionnement de l’ancien système de Gand, et quoi qu’en dise un
honorable membre, c’est vers ce système que convergent tous les hommes
compétents dans la matière, tant en Allemagne, en Angleterre, en France qu’en
Belgique. Pour le prouver, je me bornerai à citer un extrait du rapport des
inspecteurs-généraux des prisons de l’Angleterre, présenté, le 7 avril 1837, au
ministre lord Russell. Voici ce que j’y lis : « Dans notre dernier rapport
annuel, nous nous sommes exprimés fortement et sans détour en faveur de
l’emprisonnement séparé pour les prévenus et les condamnés. Nous devons à la
vérité de déclarer qu’un examen plus mûr et plus approfondi de la théorie dont
il s’agit, et l’expérience que nous avons acquise depuis cette époque, ont
encore, si possible, renforcé notre conviction. Il n’y a pas, suivant nous, de
milieu entre la séparation absolue ou la corruption. »
Si je ne devais pas entrer dans trop de détails, il me
serait facile de prouver que le système que je défends est plus économique que
le système actuel, et sous ce rapport il ne peut manquer de trouver grâce
devant la législature. Quant aux frais de premier établissement, ils se feront
insensiblement. Le pénitencier pour les femmes sera ouvert cette année, et
amènera une amélioration sensible à Gand et à Vilvorde, et M. le ministre de la
justice vient de nous promettre de demander cette année un crédit pour un
refuge pour les jeunes délinquants. Pour ces motifs je renonce à demander une
majoration an budget de 1838.
J’ai encore un mot à dire sur
nos dépôts de mendicité. J’ai été voir celui de la Cambre ; je dois dire que
c’est véritablement uns maison modèle, surtout pour ce qui regarde les jeunes
mendiants des deux sexes. Ils sont élevés avec soin. Lorsqu’on est au milieu
d’eux, on croirait être dans un pensionnat. On a le cœur rempli de joie
lorsqu’on voit le bonheur dont jouissent ces enfants, qui tous se disposent à
devenir des membres utiles à la société tandis qu’abandonnés à leur triste sort
la plupart seraient devenus des êtres nuisibles et pervers.
Mais il n’en est pas de même des autres dépôts de la
Belgique. Je connais particulièrement celui de Bruges, destiné aux mendiants
des deux Flandres. Là, depuis quelques années, on a introduit le travail. C’est
là, sans doute, une amélioration de grande importance, On la doit au zèle
constant et infatigable de deux estimables citoyens, de deux hommes
bienfaisants et éclairés qui sont encore aujourd’hui les principaux soutiens le
l’établissement. Mais le zèle de l’administration entière ne peut rien contre
le vice des locaux. Pendant l’hiver surtout, il y a encombrement. Les jeunes
mendiants sont confondus avec les valides ; la séparation des sexes n’est pas
assez complète, et beaucoup doivent coucher à deux et même à trois dans un lit,
de sorte que, sous le rapport de la moralité il reste beaucoup à désirer. On ne
peut pas assez tôt porter remède à ces maux. Il faut donc des constructions
nouvelles, et il est à espérer que le gouvernement accordera des subsides pour
aider à en supporter les frais.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Messieurs, je n’ai pas demandé la parole pour
combattre les idées émises par l’honorable préopinant ; je me félicite de le
voir entrer dans un système de progrès qui lui permettra de seconder
l’administration des prisons dans ses projets d’amélioration. Quant à ce qu’il
a dit de la nécessité d’agrandir et d’améliorer quelques dépôts de mendicité,
c’est aussi mon opinion. Le gouvernement a déjà fait tout ce qui dépendait de
lui pour mettre le dépôt de la Cambre dans l’état prospère dans lequel
l’honorable membre l’a trouvé ; je ferai tous mes efforts pour que les autres
reçoivent les mêmes agrandissements, les mêmes améliorations.
J’ai pris la parole pour répondre à ce qu’un honorable
député d’Alost a dit dans une séance précédente des cantines de nos prisons.
Cet honorable membre a critiqué le système que nous
suivons à cet égard. Je dois dire qu’il est difficile de concilier ses
observations sur les cantines avec celles qu’il a faites sur le régime
cellulaire. Dans le système absolu de l’emprisonnement solitaire, la cantine
n’est pas une nécessité ; le travail est considéré alors comme une récompense,
une consolation pour l’individu livré à une solitude forcée ; mais dans notre
système le travail est imposé aux détenus, parce que la vie commune oisive
serait plus agréable que le travail et peu productive. Si dans ce système on
n’avait pas quelques moyens pour encourager au travail, de récompenser ceux qui
accomplissent leur tâche, on n’aurait que la rigueur, la sévérité pour arriver
au but qu’on se propose.
La cantine est la conséquence nécessaire de
l’introduction du travail.
Si on se reporte à une époque éloignée, on doit
convenir qu’il y avait des abus dans les cantines, mais ces abus ont été
extirpés ; c’est ainsi qu’il est défendu maintenant de vendre des liqueurs
spiritueuses, si ce n’est en vertu d’une ordonnance du médecin ; c’est ainsi
qu’il est défendu de vendre des comestibles qu’on peut considérer comme des
friandises. Ce qu’on vend, c’est de la bière ordinaire, du beurre, du tabac et
autres choses de ce genre.
Un autre abus qu’avait cru devoir signaler le
préopinant, concerne l’intérêt qu’avaient les employés à favoriser le débit
dans les cantines ; cet abus n’existe plus dans les prisons pour peines, dans
les maisons d’arrêt et de sûreté ; car dans ces prisons les cantines sont
tenues depuis longtemps au profit de l’Etat, ou plutôt au profit de personne,
car l’Etat se charge de fournir ce qui se vend à la cantine, mais il le fait au
prix coûtant ; c’est plutôt un embarras, un soin nouveau qu’un avantage pour
les employés ; ils n’ont donc aucune espèce d’intérêt à favoriser ce débit.
Je dois dire que les cantines ne sont pas tenues par
le gouvernement dans les prisons secondaires. Aussi dans ces prisons on n’est
pas parvenu à déraciner les abus ; on est revenu plusieurs fois à la charge
pour défendre la vente des bières fortes et des boissons spiritueuses. Il est
encore quelques-unes des prisons secondaires où ce sont les concierges qui ont
cette espèce de prime d’augmentation de traitement qui résulte du débit de la
cantine. Si on supprimait d’une manière subite cet avantage, il faudrait le
remplacer par une augmentation de traitement qui serait une charge très
considérable pour le trésor. Mais, à mesure qu’on nomme de nouveaux concierges
cet avantage leur est retiré.
L’honorable M. Andries avait eu l’intention de faire
augmenter le crédit pour constructions de prisons ; il a retiré sa proposition
:
Je dois approuver sa résolution, quoiqu’à mon grand
regret le besoin de cette augmentation ait été reconnu par l’administration des
prisons ; mais la nécessité de mettre nos dépenses en harmonie avec nos
recettes a forcé tous les ministres à se restreindre aux dépenses les plus
urgentes.
J’ai annoncé que, dans le courant de l’année, je
serais dans le cas d’approprier un local pour les jeunes délinquants, et de
demander un subside spécial à cet effet. C’est un des motifs qui ont engagé
l’honorable préopinant à retirer sa proposition.
J’ajouterai que depuis
longtemps on a reconnu la nécessité de construire une maison d’arrêt à Liége ;
celle qui existe est dans un état déplorable. Cependant ce sont les maisons
d’arrêt qui doivent surtout être dans une situation convenable, parce que ceux
qui y sont détenus étant présumés innocents, on doit adoucir autant que
possible leur captivité.
Voici la note que j’avais fait insérer dans le budget
: « La somme pour laquelle le gouvernement aura à contribuer dans les frais de
la construction d’une nouvelle prison à Liége n’est pas comprise dans ce
chiffre, les études préliminaires à cette construction n’étant pas encore
terminées. »
Je dois faire la même déclaration aujourd’hui, on
n’est pas encore parvenu à se mettre d’accord sur le lieu qu’on prendrait pour
l’emplacement de la prison neuve. Quand cela sera arrêté et que les études
préliminaires seront faites, je devrai recourir de nouveau à la législature.
(Moniteur belge
n°342, du 8 décembre 1837) M. Desmet. - Messieurs, l’honorable ministre de la justice
vient de me faire un reproche de contradiction assez étrange ; il dit qu’une
contradiction se trouve dans le discours que j’ai prononcé dans la séance de
samedi, quand j’ai répondu à l’honorable M. l’abbé Andries, qui avait préconisé
l’introduction en Belgique du système américain, de l’isolement des
prisonniers, de jour et de nuit ;et elle s’y trouve, dit-il, parce que j’aurais
tout à la fois combattu l’introduction de ce système et l’existence des
cantines dans nos prisons. Il a été difficile au ministre de faire voir les
contradictions qu’il avait imaginées ; et à la vérité, ce ne serait pas très
facile, car je ne puis m’expliquer ce qu’il y a de commun entre la solitude
américaine et les boissons et les comestibles qu’on débite dans les cantines,
si ce n’est que je veuille employer un tel raisonnement en ma faveur, pour dire
qu’aux Etats-Unis les cantines n’existent pas, puisque le détenu, étant
perpétuellement encoffré dans sa cellule, ne peut pas en faire usage.
Mais n’insistons pas sur cette contradiction supposée,
et discutons l’objet. D’abord, M. le ministre a dû reconnaître que dans
quelques prisons, et particulièrement dans les petites, les cantines avaient
donné lieu à des abus.
Vous voyez donc, messieurs, que mes critiques sur les
cantines n’étaient pas entièrement dénuées de quelque fondement ; mais je veux
être franc, comme le veut être M. le ministre, et attaquer directement
l’établissement en général des cantines, et ne pas m’attacher à quelques abus
partiels qu’on rencontre même dans les meilleures institutions. Je soutiens
donc encore, comme je l’ai fait samedi dernier, que les cantines ne sont
d’aucune nécessité dans nos prisons, et qu’elles sont plus dangereuses
qu’utiles, qu’elles ne servent qu’à fournir des occasions aux détenus de se
perpétuer dans leurs vieilles habitudes de cabaret.
Si nous n’avions pas dans nos prisons une nourriture
saine, forte et abondante, je pourrais concevoir quelque utilité dans les
cantines ; mais quand les prisonniers ont force soupes de viande, d’excellentes
pommes de terre et du bon pain, et en quantité suffisante, je ne vois pas
qu’ils ont encore besoin d’autres mets pendant le jour, et je ne vois pas non
plus qu’ils ont besoin de leur cannette de bière. Mais, dit M. le ministre,
quand les détenus font des travaux de fatigue, il serait bien dur qu’avec leur
argent ils ne pourraient pas se rendre à la cantine pour prendre quelque
nourriture super-abondante. Mais M. le ministre doit savoir que quand les
détenus sont obligés de faire des travaux laborieux pour le service de la
prison, qu’alors on leur donne plus de nourriture.
Je sais bien, messieurs, comme vient de le dire M. le
ministre que, depuis quelque temps, les liqueurs spiritueuses sont supprimées
dans les cantines ; c’est une grande amélioration que je dois reconnaître et en
adresser des remerciements à M. le ministre et à l’administration supérieure
des prisons ; mais quoique cette amélioration ait eu lieu, encore je ne puis
reconnaître l’utilité des cantines dans les prisons, et je fais des vœux pour
qu’on les supprime. Qu’on veuille ne pas perdre de vue que ce sont des
malfaiteurs condamnés, et qui ont dans nos prisons une nourriture bien
meilleure et plus nourrissante qu’ils avaient dans leur propre ménage !
Répondant à présent à l’honorable M. Andries, je
commencerai à faire observer que cet honorable membre a aujourd’hui modifié sa
thèse ; samedi il demandait avec empressement l’introduction du système
cellulaire de jour comme de nuit ; aujourd’hui il paraît ne plus vouloir que
l’isolement de nuit. La modification qu’il a faite au système américain est
grande, et je suis aise qu’il a senti tous les inconvénients qu’aurait pu
produire dans notre régime pénitentiaire l’introduction de ce système
dangereux, qui, comme le reconnaissent plusieurs écrivains savants, est
l’innovation la plus funeste et la plus opposée à la régénération morale des
détenus, que la philanthropie sentimentale de cabinet a pu imaginer. Mais
l’honorable membre soutient toujours que l’isolement des détenus doit
nécessairement avoir lieu pour la nuit, ou sans cela point de réforme possible.
Il m’est toujours impossible de partager cette
opinion, qui, comme nous venons de l’entendre, est aussi partagée par M. le
ministre ; car, outre les considérations que j’ai fait valoir en faveur de mon
opinion, telles que les inévitables ravages de l’onanisme, chez les individus
que leur organisme particulier ou l’esprit de débauche y portait, je demanderai
à mes adversaires de consulter les employés des prisons et ceux qui ont fait
leur étude particulière du système de coucher les détenus hors des dortoirs et
dans des cellules séparées ; je ne doute ou ils disent tous qu’il est prouvé
que les cellules sont bien plus dangereuses que les dortoirs bien surveillés,
pour les vices dont je viens de parler. Je pense que nous avons dans
l’assemblée encore d’autres membres qui font partie des commissions
administratives des prisons ; je voudrais bien qu’ils énoncent leur opinion sur
cette grave question ; je suis fâché que l’honorable M. Constantin Rodenbach ne
soit pas pour le moment en séance, lui qui est aussi membre d’une commission
administrative ; je ne doute où il affirmerait tout ce que j’ai avancé sur les
dangers d’introduire dans nos prisons le système de cellules, et pour la nuit
même. Oui, j’ai la conviction que l’emprisonnement solitaire de nuit est
inutile et même funeste, et que les vastes dortoirs, suffisamment éclairés et
surveillés durant la nuit, sont de beaucoup préférables. Je conjure donc M. le
ministre de bien examiner la chose avant de donner suite à l’exécution d’un
système qui entraînerait l’Etat dans de grandes dépenses ; et il n’est pas
besoin, je pense, de démontrer combien elles doivent être plus fortes, dans la
construction des bâtiments, des prisons, quand on est obligé de construire pour
chaque détenu une cellule particulière.
Si j’ai bien compris l’honorable M. Andries, il aurait
avancé que depuis l’introduction en Angleterre du régime cellulaire, les
récidives seraient diminuées de beaucoup dans ce pays ; mais je pense pouvoir
dire à l’honorable membre qu’il est dans l’erreur. Qu’il veuille se donner la
peine de voir l’ingénieux calcul qu’a fait à cet égard le comte Achille de
Jouffroy, par lequel il prouve que la proportion des accusés, par rapport à la
population de l’Angleterre, était en 1826, comparativement à celle de France,
de 6 à1, et c’est bien de cette époque que date l’introduction en Europe du solitary confinement des Etats-Unis. On
peut voir ce calcul dans le Moniteur des
villes et des campagnes de 1833.
Si nous ne sommes point d’accord sur le point du
régime d’isolement, du moins j’ai vu avec plaisir que mes honorables
contradicteurs pensent comme moi que l’instruction religieuse, morale et
industrielle est l’un des éléments les plus indispensables à la régénération
des détenus, et que sans cette triple instruction il n’y a point d’amendement
possible.
Mais c’est justement ce que les Américains n’ont pas
dans le régime pénitentiaire, qui, comme je l’ai démontré samedi, est
absolument un régime matérialiste, qui a pour principale tendance d’abrutir
tellement l’homme, qu’il ne lui resterait plus aucune notion de religion ou de
morale. C’est pour ces motifs que nous devons chercher à avoir dans nos prisons
des aumôniers instruits et zélés, en un mot de véritables missionnaires, et que
l’administration doit surtout veiller à ce que les employés des prisons et
particulièrement les chefs soient des hommes vertueux et religieux. Il est
aussi utile de charger les aumôniers à examiner les livres qu’on donne aux
détenus pour leur lecture, car la lecture est un grand moyen pour améliorer les
sentiments des détenus, de les faire revenir des erreurs de leur conduite et
avoir des remords des crimes qu’ils ont commis.
L’honorable M. Andries a encore parlé du dépôt de
mendicité de la Cambre ; il a admiré les améliorations qui y ont eu lieu, et
particulièrement pour les enfants, qui sont à présent séparés des autres
mendiants détenus. J’admire comme lui les nombreuses améliorations qu’on a
faites dans cet établissement, et je saisis cette occasion pour en faire mon
compliment à M. le ministre aux chefs de l’administration supérieure ; j’admire
surtout l’instruction qui se donne actuellement aux enfants par les frères de
charité, qui y sont venus du précieux établissement de M. Glorieux de Renaix ;
mais j’aimerais que ces enfants soient entièrement séparés des autres détenus,
et que, continuellement sous la surveillance des frères, ils n’aient plus aucun
contact avec les vieux mendiants.
Je dois aussi faire compliment
à M. le ministre de l’introduction dans cette maison de quelques sœurs de la
charité, qui ont la surveillance des femmes et des enfants du sexe féminin, et
qui leur donne l’instruction ; c’est encore le véritable moyen pour amender la
vie et la conduite de ces femmes dépravées et leur inspirer des sentiments de
religion et de morale : il serait à désirer que M. le ministre trouvât aussi un
moyen pour rendre plus religieux et moraux les vieux mendiants qui se trouvent
en si grand nombre dans ce dépôt, et auxquels, d’après ce qu’on m’a assuré, il
manque beaucoup de ce chef ; en observant scrupuleusement et avec zèle les
dispositions que contient le titre XIII de l’arrêté du 7 octobre 1808, je crois
qu’on pourrait réussir à inspirer à ces hommes corrompus des sentiments plus
religieux et plus moraux.
Avant de terminer, je dois encore prier M. le ministre
de ne pas tarder à mettre exécution son excellent plan de chercher une prison
destinée uniquement à la détention des enfants, afin de les séparer entièrement
des autres prisonniers. C’est une amélioration de première nécessité, car la
régénération des jeunes malfaiteurs est un point distinct dans le grand œuvre
de la réforme des prisons. Je ne puis exprimer combien je demeure convaincu de
l’urgence de séparer les jeunes prisonniers des autres condamnés ; cette
séparation est une des bases de l’édifice pénitentiaire.
(Moniteur belge
n°341, du 7 décembre 1837) M. Demonceau. - Je viens d’entendre M. le ministre
de la justice émettre sur les maisons d’arrêt une opinion que, certes, je suis
loin de contester ; il est indispensable en effet d’apporter sur ce point des
améliorations au système existant ; car les maisons d’arrêt renferment non
seulement des condamnés, mais aussi des hommes en état de prévention, souvent
même des hommes qui bientôt sont reconnus n’être pas suffisamment prévenus,
quelquefois même acquittés ou reconnus innocents. Mais M. le ministre a parlé
des améliorations à apporter à la maison d’arrêt de Liège, et alors j’ai
demandé la parole, non pour combattre les avancés de M. le ministre (car je
reconnais aussi la nécessité d’améliorer les prisons de Liége), mais pour
appeler l’attention de M. le ministre sur l’état déplorable dans lequel se
trouve la maison d’arrêt de l’arrondissement de Verviers. Je vois, il est vrai,
dans le tableau des constructions, réparations, etc., à exécuter dans les
prisons pendant l’exercice 1838, que la prison de Verviers y figure pour une
somme de 5,000 francs. Je déclaré à M. le ministre de la justice que cette
somme est trop ou trop peu, c’est-à-dire que, dans mon opinion, il vaudrait
mieux que M. le ministre attendît qu’il eût une somme assez forte pour apporter
à la prison de Verviers une amélioration réelle.
En parlant ainsi, j’énonce officiellement ma pensée,
que déjà j’ai communiquée officieusement à M. le ministre de la justice ; je
l’ai engagé à faire visiter le local de la prison de Verviers et le local où
siège le tribunal. J’ai fait cette demande pour éviter qu’il y ait des dépenses
inutiles de réparations à ce qui ne peut que très difficilement être réparé. Il
vaudrait mieux profiter du terrain attenant aux bâtiments où siège le tribunal,
attendre encore et patienter, puisque nous patientons depuis sept ans.
Je ferai observer
à la chambre que le mauvais état des locaux de la prison et du tribunal de
Verviers s’explique d’une manière toute simple. Pendant plusieurs années le
local a été en quelque sorte abandonné, la prison déserte. Depuis l’année 1830
où le tribunal a été établi à Verviers, il a fallu spontanément, en quelque
sorte, approprier d’anciens locaux à la prison et au tribunal. Je le réitère
donc, plusieurs réparations sont indispensables ; mais, dans mon opinion, elles
ne peuvent guère être profitables qu’autant qu’elles seront faites avec une
grande attention. J’engage donc M. le ministre de la justice à nous dire si la
somme dont il veut disposer pour réparations, jointe à celle qu’il peut avoir
de disponible sur l’exercice précédent, n’est pas insuffisante pour pourvoir
aux besoins. S’il en est ainsi, je ne demanderai pas qu’elle soit augmentée,
mais je demanderai à M. le ministre de la justice de faire visiter les lieux.
Je dirai que dans ce moment nos prisons sont sur le
point d’être encombrées, mais je me hâte toutefois d’ajouter que ce sont non
des Belges, mais des Prussiens qui les encombrent ; ce sont les dévastateurs de
nos forêts arrêtés en flagrant délit ; ce sont des ouvriers étrangers habitant
le voisinage de nos frontières. Car, à la dernière audience forestière que j’ai
présidée, on m’a assuré que dans une petite ville manufacturière, voisine de
nos frontières, il y avait 3 à 4,000 ouvriers sans ouvrage.
M. de Muelenaere. - Le premier orateur entendu a appelé l’attention de M. le ministre de
la justice sur les dépôts de mendicité. Cet honorable membre a visité
quelques-uns de ces établissements et notamment ceux de la Cambre et de Bruges.
La comparaison ne semble pas avoir été à l’avantage de ce dernier. Toutefois,
l’honorable membre a rendu lui-même justice au zèle éclairé des estimables
citoyens qui ont bien voulu se charger de la direction de cet établissement ;
en effet, depuis vingt ans, les personnes qui administrent le dépôt de mendicité
de Bruges avec le zèle le plus louable et avec un entier désintéressement, ont
introduit dans ce dépôt toutes les améliorations dont il est actuellement
susceptible.
Maintenant, je conviens avec l’honorable orateur que
le zèle des administrateurs a échoué contre l’insuffisance et le vice des
locaux ; en effet le local ne répond nullement à l’usage auquel il est destiné.
Ce local est trop petit, la distribution en est vicieuse.
Je m’empresse de déclarer que le département de la
justice s’occupe de cet objet, que M. le ministre de la justice m’a déjà
réclamé des renseignements sur ce qu’il y aurait à faire, qu’il a chargé
l’autorité provinciale de faire dresser un plan des constructions à exécuter,
avec un devis estimatif de la dépense. Jusqu’à présent ces pièces n’ont pu être
adressées au département de la justice. Dès lors je crois qu’il serait
difficile à M. le ministre de la justice de demander à la chambre un subside
déterminé pour le dépôt de mendicité de Bruges. Mais je suis convaincu qu’il y
a urgente nécessité d’améliorer le local dans l’intérêt des détenus et de la
moralité publique.
Dès lors je demanderai à M. le
ministre de la justice si, le cas échéant, il serait disposé à accorder à la
province un subside pour pourvoir à l’amélioration des locaux.
Je crois qu’avec cette assurance on lèverait bien des
difficultés et qu’on parviendrait facilement à s’entendre avec l’administration
des hospices. Car, pour faire les améliorations que réclame le dépôt de
mendicité de Bruges, il faut aussi l’intervention de l’administration des
hospices. Ce n’est que par la cession des hospices, à la province, d’un local
qui leur appartient, que les améliorations peuvent s’effectuer ; or, il
faudrait, pour que cette cession eût lieu, avoir l’assurance que la province entreprendra
des constructions, et que le gouvernement accordera un subside pour aider à la
dépense que ces constructions peuvent exiger.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je donnerai volontiers à l’honorable préopinant
l’assurance qu’il demande que le gouvernement allouera, pour les constructions
à faire au dépôt de mendicité de Bruges, un subside proportionné à ses besoins
et aux sommes dont nous pouvons disposer. En donnant cette assurance, je ne
fais que dire tout haut ce qui est depuis longtemps l’intention de mon
ministère, je ne fais que suivre, pour le dépôt de mendicité de Bruges, la
règle existant à l’égard de tous les dépôts de mendicité ; car il faut le dire,
les dépôts de mendicité ont reçu d’immenses améliorations, C’est ainsi que le
dépôt de mendicité de Reckem a reçu un changement notable. J’en appelle aux
honorables députés du Limbourg, qui ont été dans le cas de visiter cet
établissement ; c’est ainsi que le dépôt de la Cambre a complétement changé de
face. On y a introduit les catégories, comme l’a dit un honorable préopinant.
Il y a des locaux distincts pour les vieillards des deux sexes, pour les
adultes et pour les enfants des deux sexes. Pour les jeunes filles surtout,
c’est chose admirable de voir de quelle manière les écoles sont tenues par les
religieuses. L’honorable M. Andries, qui d’après mon désir vient de visiter cet
établissement, vous a parlé du bon état de cette institution.
Quant à ce qu’a dit M. Desmet, que les jeunes garçons
y sont confondus avec les adultes, il me permettra de lui faire observer que
cela n’a lieu que par une nécessitée momentanée ; car on est occupé à y bâtir,
pour les enfants masculins, des locaux particuliers, où ils seront surveillés
par les frères de la Charité. Quand ces bâtiments seront achevés, les enfants
ne courront plus avec les adultes. Tout ce que l’administration a pu faire pour
améliorer ce dépôt, elle l’a fait ; et elle fera de même pour le dépôt de
Bruges.
On s’est plaint longtemps du dépôt de mendicité de
Namur. On disait qu’il était dans un état tel qu’il n’était pas susceptible
d’amélioration ; on l’a supprimé, et il sera remplacé par un pénitencier pour
les femmes.
L’administration fera aussi tous ses efforts pour
améliorer le dépôt de mendicité de Mons. Il sera agrandi pour recevoir les
mendiants du Hainaut, de Namur et du Luxembourg.
Le dépôt de mendicité de Hoogstraeten est aussi un
très bon établissement en ce genre ; mais l’administration a eu peu de chose à
y faire.
L’honorable député d’Alost nous dit qu’il ne faut pas
se borner à donner du travail aux prisonniers ; il faut aussi songer à
l’amélioration morale et religieuse ; mais l’honorable membre nous rendra cette
justice que l’un n’est pas plus négligé que l’autre. Les exercices et les
instructions religieuses se font à de certaines heures ; le travail est la
chose de tous les moments et de tous les jours, et on ne peut pas assez faire
pour encourager au travail.
Dans les grandes prisons de l’Etat, la cantine est
nécessaire, comme encouragement au travail, comme récompense, quoi qu’en ait
dit l’honorable député d’Alost. Comment pourrait-on refuser, à des condamnés à
la mort, aux travaux forcés à perpétuité ou à temps, un peu de bière, de
beurre, de lait !
On devrait, dit-on, réserver
l’argent que les détenus dépensent ainsi, pour le leur donner quand ils sortent
; mais on ne leur accorde pas tout l’argent qui leur revient, mais seulement
une très petite partie de ce qu’ils ont gagné. Si on n’avait pas ces moyens
pour les encourager au travail, il faudrait employer les moyens de rigueur que
l’on a cru devoir supprimer. L’honorable membre consentirait-il à recourir à
ces moyens ?
Quant à ce que l’honorable député d’Alost a dit contre
le système cellulaire de nuit, j’en suis fâché, je ne puis accueillir ses raisons.
Qu’on me dise que l’emprisonnement cellulaire de jour peut présenter des
inconvénients, cela est susceptible de discussion ; mais je ne puis admettre
qu’il y ait des inconvénients à la séparation pendant la nuit.
Il me reste un mot à dire sur la maison d’arrêt de
Verviers. Nous ferons les réparations avec prudence, avec circonspection.
Récemment j’ai envoyé sur les lieux un architecte qui mérite toute confiance ;
j’attendrai son rapport pour prendre une résolution.
M. de Jaegher.
- J’ai quelques observations à soumettre au ministre de la justice sur la
comptabilité des dépôts de mendicité.
Toutes les communes sont loin de pourvoir aux besoins
de leurs pauvres. La répartition des ressources des communes, faite par tête,
donnerait à chaque pauvre un secours annuel de 4 ou 5 fr. ; il leur serait donc
impossible d’entretenir leurs pauvres dans des dépôts de mendicité qui leur
appartiendraient.
En conséquence de nos dispositions pénales, après
avoir fait subir la peine du délit de mendicité à un individu, on l’envoie dans
un dépôt où il est traité aux dépens de la commune à laquelle il appartient.
Mais il est une autre classe de pauvres qui sont encore à la charge des
communes ; ce sont ceux qui se rendent volontairement dans les dépôts de
mendicité. Parmi eux, il s’en trouve de très exigeants et qui ne veulent
absolument pas travailler : il dépend donc d’eux d’occasionner des dépenses à
la commune en se rendant dans un dépôt de mendicité, et là ils y consomment les
secours qu’on pourrait distribuer à une vingtaine de malheureux.
Le dépôt de mendicité de Bruges est celui auquel je
reprocherai d’ouvrir trop facilement ses portes aux pauvres qui s’y présentent
volontairement. Et, comme administrateur, j’ai été, dans la même année, dans le
cas de réclamer quatre ou cinq fois le même individu, qui, par paresse, aimait
mieux être là que de travailler. Je sais bien que les dépôts de mendicité sont
forcés de recevoir les mendiants, mais je voudrais qu’on prît des mesures
contre la paresse d’individus animés de mauvais vouloirs.
Les communes doivent payer les dépenses que font leurs
mendiants dans les dépôts ; si l’on compare cette rétribution à ce que coûtent
les prisonniers à l’Etat, on la trouvera assez élevée.
Les pauvres entretenus dans
ces dépôts sont astreints à un travail journalier : ce travail procure
nécessairement un certain bénéfice, et je ne m’aperçois pas qu’on en tienne
compte aux pauvres qui sortent de ces établissements, ni qu’on en tienne compte
à la commune à laquelle les pauvres appartiennent.
Je prierai le ministre de la justice, ou les membres
de la chambre qui sont éclairés dans cette matière, de me donner des
renseignements à cet égard.
On devrait remédier aux inconvénients que j’ai
signalés, et dans l’intérêt des communes et dans l’intérêt des pauvres, parce
qu’il ne dépendrait plus de l’un d’eux de dévorer à lui seul des secours qui
sont destinés à plusieurs.
M. Desmet.
- A entendre le ministre de la justice, on croirait que les prisonniers, en
Belgique, n’ont que du pain et de l’eau pour toute nourriture. Nos paysans ne
sont pas si bien nourri que les condamnés ; ceux-ci ont, trois ou quatre fois
par semaine, de la soupe de viande ; ils ont de bon pain. Qu’on leur donne de
la bière, du beurre, et même du pain, on n’en voit pas trop la nécessité. Je le
répète, nos paysans sont plus mal nourris ; ils n’ont que du pain de seigle, du
lait battu et des pommes de terre sans beurre. Il n’y a pas nécessité, et même
il y a danger, de distribuer des comestibles et des boissons dans les prisons.
Ce qu’il faut, c’est qu’en sortant de prison le
condamné libéré ait une bonne bourse qui l’empêche de recourir au métier de
malfaiteur. Je suis donc d’opinion qu’on peut, sans inconvénient, supprimer les
cantines dans les prisons.
Relativement à la question de
l’isolement des prisonniers pendant la nuit, je trouve bien inutile d’occuper
la chambre de cette polémique entre le ministre et moi. J’ai mon opinion bien
établie !
Mais je désire qu’avant de faire les grandes dépenses
que demandera l’introduction du système cellulaire, M. le ministre daigne
consulter la commission administrative des prisons de l’Etat, ainsi que les
directeur et commandant ; il y verra que mon opinion est souvent partagée, et
quand on a cité la prison de Gand, je désire de même qu’on consulte la
commission administrative de cette prison.
J’ai dit.
M. Lebeau. - J’ai cru entendre, tout à l’heure, que le ministre de la justice, en
parlant du dépôt de mendicité de Namur, en avait attribué la suppression à
l’état de désorganisation où était tombée son administration. C’est du moins le
sens qui m’a paru résulté du discours de ce ministre ; mais comme je ne veux
pas m’engager dans une réfutation de faits, je prierai le ministre de
s’expliquer, car je me propose de prouver que la translation du dépôt de
mendicité de Namur doit être attribuée à d’autres causes.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je me bornerai dans ce moment à donner l’explication
demandée par l’honorable préopinant.
J’ai dit que le dépôt de mendicité de Namur était en
si mauvais état qu’on avait été charmé d’avoir l’occasion de le supprimer, et
de le remplacer par une prison. J’ai entendu parler de l’état dans lequel étaient
les bâtiments, et même de la manière dont les pauvres étaient entretenus ; je
maintiens ce fait : il était le plus mauvais des dépôts de mendicité. Nous le
regardions comme tellement mauvais que nous avons été heureux de saisir
l’occasion de le supprimer, et de disposer du local pour construire un
pénitencier pour les femmes.
M. Lebeau.
- Je dois dire, messieurs, que ce que M. le ministre de la justice a dit
relativement aux bâtiments du dépôt de mendicité de Namur, est parfaitement
exact. Depuis longtemps ce local était dans un état de délabrement complet,
nécessitait des réparations considérables, et il est certain que si ces
réparations n’ont pas été faites, il est impossible de l’attribuer à
l’administration du dépôt, qui n’avait pas de ressources pour cet objet. Mais
je dois dire aussi que quant au régime intérieur, quant à l’administration du
dépôt, depuis quelques années elle a reçu, avec le secours de la législation
nouvelle, des améliorations notables. L’état de presque désorganisation dans
lequel se trouvaient les dépôts, tenait à l’incertitude de la législation sur
cette partie des établissements de charité ; cette incertitude de la
législation était telle que, dans les premiers mois qui ont suivi la
révolution, la plupart des communes se sont à peu près refusées à payer les
frais d’entretien de leurs mendiants aux dépôts de mendicité, se fondant d’une
part sur l’obscurité de différentes dispositions législatives, et d’autre part
sur une disposition de la constitution. C’est sous l’influence de ce conflit
entre le gouvernement et les communes que l’administration du dépôt de
mendicité de Namur, comme l’administration de plusieurs autres dépôts de
mendicité, a été sans cesse périclitante, parce que les moyens manquaient et
que le gouvernement n’avait pas la force nécessaire pour obliger les communes
retardataires à remplir leurs obligations ; mais depuis que la chambre a voté
la loi que j’ai eu l’honneur de lui soumettre à cet égard, la résistance des
communes a cessé ; le gouvernement de son côté est venu au secours des dépôts
de mendicité, et l’administration de ces dépôts s’est sensiblement améliorée :
dans plusieurs dépôts le travail a été introduit, notamment à Namur où il a été
introduit sur une échelle vaste : on y fait des clous, du drap, des toiles, des
souliers, enfin à peu près tout ce qui est nécessaire aux détenus ; l’arriéré a
été liquidé, et on a pu mettre en adjudication les fournitures, sur lesquelles
on a obtenu un rabais considérable ; au moment de la suppression la
comptabilité était à jour, et l’on était en train d’amener des réformes
extrêmement utiles.
Le principal
motif, messieurs, pour lequel on a supprimé le dépôt de mendicité, c’est de
satisfaire au désir manifesté par le gouvernement d’avoir le local à sa
disposition pour y établir un pénitencier ; on a vu là le moyen de faire deux
choses utiles, d’abord d’établir un pénitencier pour les femmes, et ensuite de
donner dans la province de Namur une sanction à la loi suppressive de la
mendicité : car il est certain que la considération des bons effets que devait
produire sur les personnes qui se livrent à la mendicité la crainte de subir
une espèce d’expatriation, de se voir transporter non à Namur, où elles
pouvaient rester en relation avec leurs proches, mais à Mons, qui est en
quelque sorte pour elles un pays étranger, il est certain que cette
considération a dirigé spécialement le conseil provincial lorsqu’il a accédé au
vœu du gouvernement.
Voilà, messieurs, les principaux motifs de la
suppression du dépôt de mendicité de Namur et de sa translation à Mons.
M. de Muelenaere. - Messieurs, l’honorable député d’Audenaerde a fait un reproche à
l’administration du dépôt de mendicité de Bruges sur la facilité avec laquelle
elle admet les mendiants qui se présentent volontairement ; mais l’honorable
orateur a répondu lui-même à ce reproche en faisant observer que
l’administration est forcée de les recevoir. En effet, messieurs, c’est en
vertu d’une disposition de la loi que les administrations des dépôts de
mendicité sont obligées de recevoir ceux qui se présentent volontairement. Je
conviens avec l’honorable membre que l’admission d’un plus ou moins grand
nombre d’individus d’une même commune au dépôt de mendicité devient une charge
quelquefois accablante pour cette commune ; mais s’il y a des reproches à faire
à cet égard, ce n’est pas aux administrations qu’ils peuvent être adressés mais
à la loi elle-même, qui fait un devoir aux administrations de recevoir tous les
individus qui se présentent.
L’honorable membre a parlé
aussi du produit du travail qui se fait dans les dépôts de mendicité ; d’abord
je lui ferai observer qu’au dépôt de mendicité de Bruges chaque détenu reçoit,
soit pendant son séjour à l’établissement, soit à sa sortie, tout ce qui lui
revient dans le produit du travail ; je ferai remarquer en même temps que, sous
ce rapport, il n’y a pas de comparaison à faire entre les dépôts de mendicité
et les prisons : d’abord dans les prisons tous les frais d’administration sont
à la charge du gouvernement, les locaux mêmes sont à la charge du gouvernement
; dans les dépôts de mendicité au contraire tous les frais d’administration
tombent à la charge des dépôts, l’entretien des locaux est encore à la charge
des dépôts, les frais de chauffage et tous les frais généralement quelconques
doivent être supportés par les dépôts ; il résulte de là que la part du produit
du travail revenant aux mendiants est beaucoup moindre que celle qui revient
aux condamnés des prisons de l’Etat, et il ne faut pas s’étonner dès lors que
ce que les mendiants reçoivent à leur sortie du dépôt soit assez minime.
M. de Jaegher. - Messieurs, quand je faisais les observations que j’ai
cru devoir présenter à la chambre, je n’ignorais pas que les dépôts de
mendicité sont forcés d’admettre les pauvres qui s’y présentent ; mais c’est
précisément pour obvier à l’inconvénient qui en résulte que j’ai appelé sur ce
point l’attention de M. le ministre de la justice, afin qu’il examinât s’il n’y
aurait pas lieu à présenter une disposition législative à cet égard.
Quant à la rétribution du travail des mendiants, les
explications de l’honorable préopinant ne m’ont point satisfait ; je vois à la
page 7 du rapport de la section centrale que, dans les prisons, le prix moyen
de la journée d’entretien est de 24 centimes par individu ; au dépôt de
mendicité de Bruges il est de 30 centimes ; je crois que cette différence
couvre bien celle qui peut résulter des dépenses d’administration et des frais
d’entretien des locaux ; j’appelle sur ce point l’attention de l’administration
supérieure, et je pense que la loi sur l’organisation des dépôts de mendicité
pourrait être modifiée d’une manière avantageuse pour les communes.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Messieurs je ne puis que répondre à l’honorable
député d’Alost que la nourriture des prisonniers est simple, modeste, telle
qu’elle doit être. Qu’on ne s’imagine pas que les prisonniers ont 4 ou 5 fois
par semaine de la viande à discrétion ; on met seulement un peu de viande dans
leur soupe.
Quant aux observations qui ont été faites par
l’honorable préopinant relativement à l’acceptation des personnes qui se
présentent volontairement aux dépôts de mendicité, je ne conteste pas que cette
acceptation peut présenter quelques inconvénients, mais le refus donnerait lieu
à des inconvénients bien plus grands. Comment veut-on, lorsqu’un homme,
dépourvu de tous moyens d’existence, se présente à un dépôt de mendicité, que
les portes lui soient fermées ? Faudra-t-il qu’il commette un délit, qu’il
aillé mendier pour se faire admettre dans un dépôt ? Ce serait cependant là la
conséquence du refus qu’on ferait de recevoir les personnes qui se présentent
volontairement aux dépôts de mendicité. Je ne crois pas, messieurs,
qu’actuellement les dépôts de mendicité exagèrent le montant de la journée
d’entretien ; je dois dire qu’à cet égard l’administration centrale exerce une
surveillance convenable sur les dépôts de mendicité.
- L’article premier du chapitre VIII, Frais
d’entretien et nourriture des détenus, 700,00 fr., est mis aux voix et adopté.
Articles 2 à 4
« Art. 2. Traitement des employés attachés au service
des prisons : fr. 240,000. »
- Adopté.
__________________
« Art. 3. Récompenses à accorder aux employés
pour conduite exemplaire et actes de dévouement : fr. 2,500. »
- Adopté.
__________________
« Art. 4. Frais d’impression et de bureau : fr.
9,000. »
- Adopté.
« Art. 5. Constructions nouvelles, réparations et
entretien des bâtiments et du mobilier : fr. 200,000. »
- Adopté.
M. Simons.
- Il y a deux ou trois ans que, faisant partie de la section centrale chargée
de l’examen du budget du ministère de la justice, je crus devoir fixer l’attention toute particulière du chef de ce
département sur l’état vraiment déplorable dans lequel se trouve la maison
d’arrêt du chef-lieu judiciaire de la province du Limbourg.
Ma réclamation fut reconnue fondée ; aussi, je me
plais à lui rendre cette justice, M. le ministre s’empressa d’y faire droit :
une somme de 30,000francs fut portée au tableau des travaux à exécuter au
prisons de l’Etat pendant l’exercice suivant, pour l’agrandissement et les
améliorations indispensables de la maison d’arrêt à Tongres.
Depuis cette époque l’on voit figurer, régulièrement
tous les ans, pareil chiffre de 30,000 fr. pour le même objet au tableau fourni
à l’appui de l’article maintenant en discussion ; mais, chose singulière et
vraiment digne de remarque, veuillez jeter les yeux sur tous les tableaux qui
vous ont été successivement communiqués depuis à ce sujet, et qui indiquent les
travaux réellement exécutés ; consultez particulièrement celui qui fait suite
au rapport de votre section centrale de cette année, sub littera A vous y
remarquerez que les améliorations projetées ont toutes été exécutées, quant aux
autres prisons ; celle de Tongres est la seule que l’on perde constamment de
vue : les fonds qui lui avaient été destinés ont été successivement employés à
d’autres travaux de la même nature.
S’il s’agissait d’une faveur qui dût spécialement
profiter à la localité, je l’avoue franchement, en ce cas, pour mon compte, je
ne m’en étonnerais pas. L’arrondissement dans lequel j’habite, ainsi que celui
de Ruremonde, sont habitués à être perdus de vue, alors qu’il s’agit de faire
emploi de fonds destinés à l’amélioration matérielle du pays.
Cette observation ne concerne nullement le département
de la justice, je le sais ; aussi je ne la fais que très transitoirement.
Bientôt l’occasion se présentera de faire ressortir avec plus de développement
le sujet des plaintes fondées de ces localités.
Mais il ne s’agit pas ici de faveur. Il est question
de tout autre chose ; il s’agit d’un objet qui intéresse tout particulièrement
la sûreté publique, et sous ce rapport je ne conçois pas quelle considération
ait pu justifier un pareil oubli.
En effet, la maison d’arrêt dont je m’occupe se trouve
dans un délabrement déplorable. Déjà nous avons eu à déplorer plusieurs
évasions de détenus pour crimes, et sans la surveillance active et incessante
des employés subalternes qui en sont spécialement chargés, elles auraient
certainement été bien plus fréquentes. Oui, les choses y sont à un tel point
que, pour prévenir que des criminels, des condamnés à la peine capitale ne
s’évadent, on est obligé de les faire surveiller, nuit et jour, dans leurs
cellules par des prévenus ou des condamnés pour de simples délits correctionnels.
Ce n’est pas tout. Il est de notoriété publique, M. le
ministre ne peut pas l’ignorer, que le local qui y sert de prison ne répond en
aucune manière à sa destination. De maison de passage qu’il était avant la
révolution il est devenu tout à coup prison criminelle et civile d’un chef-lieu
judiciaire. Aussi les détenus y sont tellement à l’étroit, qu’ils sont pour
ainsi dire entassés les uns sur les autres.
Aucune classification, aucune division par catégories
n’y est possible. On est obligé d’y amalgamer pêle-mêle les prévenus avec les
condamnés, les correctionnels avec les criminels, souvent peut-être les
innocents avec les coupables des crimes les plus atroces.
Devant des considérations de
cette nature, toutes autres, quelles qu’elles puissent être, doivent
nécessairement fléchir. Enfin l’état des choses est tel qu’il est de toute
urgence que M. le ministre y fasse exécuter, dans le plus bref délai possible,
les travaux qui depuis longtemps sont reconnus indispensables, et pour lesquels
depuis plusieurs années des fonds ont été successivement alloués par la
législature.
J’ose espérer que ces courtes observations suffiront
pour engager M. le ministre à faire enfin droit aux réclamations fondées qui
lui ont été adressées à différentes reprises à ce sujet. La sûreté publique
autant que des considérations de moralité et d’humanité lui en font un devoir
impérieux.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Messieurs, le gouvernement
n’a pas perdu de vue la prison de Tongres, et si cette prison n’est pas
réparée, ce n’est certes par la faute du gouvernement. Depuis longtemps le
gouvernement a fait les instances les plus vives pour que l’autorité
provinciale concourût à l’établissement d’une prison neuve dont la nécessité
est reconnue par l’honorable préopinant, puisqu’il vient de dire que le local
actuel ne convient aucunement.
Les démarches du gouvernement ont été infructueuses
jusqu’ici ; il est vrai que la ville de Tongres a offert un emplacement, mais
la province s’est positivement refusée à contribuer dans la dépense.
Dans cet état de choses, nous devons nous borner à
faire réparer la prison actuelle de Tongres. A cet égard, je déclare que
j’emploierai le subside de 30,000 fr. de la manière la plus utile ; mais je
dois dire que s’il s’agissait cette année de la construction d’une prison
neuve, la somme de 30,000 fr. ne suffirait pas.
M. Pollénus.
- J’apprends avec plaisir que le ministre de la justice ne conteste pas la
nécessité de la construction d’une prison à Tongres. Aussi cette nécessité est
tellement reconnue de tout le monde qu’il n’est pas possible de la révoquer en
doute.
Je confirme donc de tout point les observations qui
vous ont été présentées par l’honorable M. Simons. J’ajouterai qu’aussitôt que
des condamnations graves sont prononcées par la cour d’assises de Tongres, on
doit transporter les condamnés dans une prison voisine. Il est inutile de vous
démontrer, messieurs, tous les inconvénients qui résultent de ces translations
fréquentes et forcées.
M. le ministre de la justice vous a fait observer
qu’il a éprouvé, de la part de l’autorité provinciale, un refus de concourir à
la dépense de la construction d’une prison neuve ; mais je demanderai à M. le
ministre ce qu’il adviendra, si l’administration provinciale persiste dans son
refus. La prison de Tongres restera-t-elle dans l’état de défectuosité où elle
se trouve actuellement ? Il me semble, messieurs, que si le gouvernement
continue à rencontrer des obstacles que la loi ou les voies administratives ne
lui permettent pas de faire disparaître, force lui sera cependant d’aviser aux
moyens de procurer à la ville de Tongres une prison neuve dont la construction
est reconnue par le gouvernement lui-même.
Puisque nous en sommes au chapitre concernant les
constructions des prisons, je profiterai de l’occasion pour attirer l’attention
de M. le ministre sur un objet qui ne me paraît pas faire l’objet d’une
surveillance suffisante. Pour ma part, je voterai toujours les fonds que l’on
croira nécessaires à l’amélioration du système pénitentiaire ; mais ce que je
désire, et ce que le ministre doit désirer autant que moi, c’est que l’emploi
de ces fonds soit toujours régulièrement surveillé.
Or, je crois me rappeler que, dans la session
précédente, j’ai appelé l’attention de M. le ministre de la justice sur un fait
qui était à ma connaissance particulière. Des travaux considérables avaeint été
adjugés, et les parties principales des constructions avaient été exécutées
d’une manière tellement différente du devis et des plans, que la plupart des
locaux cessaient de répondre à leur destination, et de fournir le moyen de
s’assurer des prisonniers.
Je crois avoir cité à cette
occasion ce fait-ci : Le plafond des dortoirs d’une prison, qui devait avoir
une hauteur convenable, était tellement bas que le prisonnier, assis sur son
bois de lit, pouvait atteindre au plafond avec la main ou avec la tête, de
manière qu’il lui était laissé toute facilité pour s’évader.
Je suis certain que le gouvernement désire qu’il soit
fait le meilleur emploi possible des fonds destinés à la construction des
prisons, et comme il s’agit en ce moment de voter un crédit pour cet objet,
j’ai cru pouvoir me permettre de présenter ces courtes observations, afin
d’attirer l’attention de M. le ministre sur la nécessité de faire exercer une
surveillance plus active en cette matière.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Ainsi que j’ai déjà eu l’honneur de le dire, le
gouvernement aurait désiré que l’administration locale et l’autorité
provinciale voulussent entrer dans le système de reconstruction de la prison
actuelle de Tongres ; mais, jusqu’à présent, il n’a pas été secondé autant
qu’il l’aurait souhaité, et autant qu’il est parvenu à l’obtenir dans d’autres
localités.
Je dois dire que quand il a été question de construire
une prison neuve à Liége, le gouvernement en a agi de même à l’égard des
administrations locale et provinciale.
Je me suis trouvé récemment en relation avec une
députation de Tongres, composée de plusieurs membres de la commission des
prisons, et nous avons arrêté alors des mesures provisoires qui satisferont, je
pense, aux nécessités des circonstances.
Quant à la recommandation de l’honorable préopinant,
qu’il importe de surveiller les constructions qui se font dans les prisons, je
la crois tout à fait inutile. Je ne dis pas que, parmi les nombreuses
constructions qui sont exécutées dans les prisons, il ne puisse y avoir une
exception de temps à autre ; mais en général ces constructions sont très bien
surveillées, et l’on ne peut que désirer que le système qui est actuellement
suivi à cet égard continue à l’être.
M. Simons. - Messieurs, M. le ministre de la justice m’a répondu que le
gouvernement n’a pas perdu de vue l’objet dont il s’agit. Mais, messieurs, s’il
ne l’avait pas perdu de vue, il aurait employé les 50,000 francs, sinon à
reconstruire, du moins à réparer le local actuel de la prison de Tongres.
M. le ministre dit qu’on a fait des démarches auprès
de la commune et de la province, pour qu’elles concourent à la reconstruction
de ce local ; mais je demanderai au ministre si une dépense de ce genre est une
charge ou communale ou provinciale.
Si c’est une charge communale, le ministre doit avoir
le moyen de forcer la commune de satisfaire ses obligations ; il en est de même
pour ce qui concerne la province, si la dépense est une charge provinciale.
Mais je pense, pour ma part, que les dépenses de ce genre incombent
exclusivement à l’Etat...
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Je ne prétends pas le contraire.
M. Simons.
- Si nous sommes d’accord, je ne vois pas pourquoi on ajourne une dépense qui
n’incombe qu’à l’Etat, et cela parce que la commune et la province, qui n’y
sont pas obligées, ne veulent pas contribuer dans cette dépense. Je ne conçois
pas qu’on puisse dire qu’on n’a pas perdu de vue cet objet, alors que, pendant
deux ans, on n’a pas fait usage du crédit de 50,000 fr. qui a été alloué par la
législature pour la prison de Tongres, et qu’on emploie cette somme à d’autres
opérations de la même nature ; ce sont là des choses que je ne puis pas
m’expliquer.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Messieurs, l’honorable préopinant ne comprend pas
qu’on puisse expliquer qu’ayant 50,000 francs à sa disposition pour
l’amélioration de la prison de Tongres, le gouvernement a pu appliquer cette
sommé à d’autres besoins de la même nature. Cette explication est très facile :
aussi longtemps que j’ai pu espérer d’entrer en arrangement avec la régence de
Tongres et l’administration provinciale pour la construction d’une nouvelle
prison dans cette ville, évidemment je n’ai pu employer les 50,000 fr. à
réparer la prison actuelle. Ce n’est que récemment que j’ai acquis la
conviction que je ne parviendrais pas à m’entendre avec les deux autorités qui,
il est vrai, ne sont pas obligées à la dépense, mais qui sont intéressées à ce
qu’il existe à Tongres une prison neuve. Dès lors, je me suis entendu avec une
de la commission de la prison de cette ville, non pour faire ériger un nouveau
bâtiment, mais pour faire exécuter des constructions partielles. Mais, je le
répète, jusque-là il n’y a pas eu lieu de faire opérer ces réparations, et les
50.000 fr. ont été employés les années précédentes à améliorer les locaux
d’autres prisons.
Quand le gouvernement vous demande une somme globale
de 200,000 fr. pour les dépenses de l’espèce, il n’est pas tenu de faire usage
du crédit, en se renfermant dans les limites de la répartition qui se trouve
dans les développements du budget. C’est ainsi que les deux chambres l’ont
toujours entendu. Interpellé plusieurs fois au sénat par l’honorable M. Van Muysen
sur la question de savoir ce que le gouvernement ferait du crédit des 50,000
fr., j’ai répondu que cette somme recevrait son emploi, dès que le gouvernement
tomberait d’accord avec l’administration provinciale pour la construction d’une
prison neuve. Mais maintenant qu’un semblable arrangement n’est plus possible,
j’emploierai les 50,000 fr. de la manière la plus utile à la prison actuelle de
Tongres.
- L’article est mis aux voix et adopté.
Article 6
« Art. 6. Achat des matières premières et
salaires : fr. 1,350,000. »
M. Pollénus.
- Messieurs, je désire savoir si M. le ministre de la justice pourra, au moyen
de cette allocation, fournir quelque travail dans les prisons de second ordre, dans
les maisons d’arrêt et dans les maisons de sûreté civile et militaire.
Je n’ai pas pris part à la discussion tout à l’heure
lorsque d’honorables orateurs ont parlé d’améliorer le moral des prisonniers.
Pour ma part, je crois qu’aux yeux de tous ceux qui ont quelque expérience des
faits, le moyen le plus efficace d’améliorer le moral des reclus, c’est le
travail.
Je n’ai pas vu que, jusqu’ici, dans un assez grand
nombre de maisons de sûreté civile et militaire, et surtout dans une qui m’est
particulièrement connue, on ait fait quelque chose pour donner aux prisonniers
le moyen de se livrer au travail.
C’est dans les prisons du second ordre que le besoin
du travail se fait spécialement sentir. Là, des prévenus, des condamnés de tous
les âges et de tous les degrés se trouvent confondus ; là il n’existe pas ce
nombreux personnel qui puisse exercer une surveillance continuelle, comme dans
les grandes prisons de l’Etat ; là, par conséquent, ne règne pas ce silence que
les surveillants des prisons devraient surtout s’appliquer à y faire observer.
C’est donc dans ces prisons que le besoin se fait le plus sentir de fournir aux
moyens d’occuper-les prisonniers.
Je prévois que le ministre me répondra que peu de ces
prisons présentent des locaux convenables pour organiser des ateliers de
travail. Cependant il me semble qu’il est quelques prisons où on trouve des
locaux convenables ; je fais allusion à la prison de Hasselt. Il me semble que
là il n’y a pas impossibilité absolue de fournir du travail aux détenus.
Puisque je parle du travail
comme amélioration du régime des prisons, je profite de cette occasion pour
appeler l’attention de M. le ministre sur la nécessité, en l’absence de moyens
de travail, de recommander aux surveillants de faire observer le silence et d’aviser
au moyen de ne pas laisser pendant toute une journée ensemble les condamnés de
différentes catégories, des personnes non condamnées qui ont en leur faveur la
présomption de non-culpabilité, des enfants confondus dans la même precaux le
même dortoir la nuit et le jour.
Il me semble qu’il est de toute nécessité que
l’attention du gouvernement se reporte sur les prisons secondaires. J’ai cru
faire ces observations ; par ma position je suis à même d’apprécier les suites fâcheuses
des cantines et de la confusion des prisonniers et de l’absence du travail, qui
les maintient dans un état d’oisiveté déplorable.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Mon attention n’a jamais été détournée de l’importance
des maisons d’arrêt, je l’ai déjà déclaré ; sans doute il est plus utile là
qu’ailleurs de séparer les détenus par catégories, de leur donner du travail,
de faire observer le silence. Ce sont des choses que le gouvernement exécute
lorsque les locaux le permettent et qu’il est secondé par les commissions
administratives et par les concierges
- L’article 6 est mis aux voix et adopté.
Chapitre IX. - Etablissements de bienfaisance
Article premier
« Art. 1er. Frais d’entretien et de transport des
mendiants dont le domicile de secours est inconnu : fr. 12,000. »
- Adopté.
Article 2
« Art. 2. Subsides à accorder extraordinairement
à des établissements de bienfaisance : fr. 50,000. »
M. Desmet.
- Je prierai M. le ministre de jeter un coup d’œil sur l’établissement consacré
aux vieillards malades, aux aliénés, à l’instruction des enfants, et où doit se
former une réunion de frères, et sur lequel M. Liedts a fait, il y a deux ans,
un discours fort remarquable ; il pourra s’assurer qu’il est digne de la
sollicitude du gouvernement et mérite de recevoir un subside.
- L’article 2 est mis aux voix et adopté.
Articles 3 à 5
« Art. 3. Subside pour l’amélioration des hospices
d’aliénés : fr. 75,000. »
- Adopté.
_______________
« Art. 4. Pour avances à faire au nom des
communes, à charge de remboursement de leur part, au dépôt de mendicité établi
aux colonies agricoles : fr. 74,074. »
- Adopté.
_______________
« Art. 5. Subsides pour les enfants trouvés et
abandonnés, sans préjudice du concours des communes et provinces : fr.
180,000. »
Adopté.
Chapitre X. - Dépenses imprévues
Article unique
« Article unique. Dépenses imprévues : fr.
8,000. »
Adopté.
Chapitre XI. - Dépenses arriérées
Article unique
« Article unique. Pour solde des dépenses
arriérées concernant l’exercice de 1833 : fr. 2,000. »
M. le président.
- Il n’y a pas eu d’amendement, nous allons passer au vote sur l’ensemble.
M. Desmanet de Biesme. - M. le ministre ayant obtenu de faire construire le
palais de justice de Bruxelles, il me semble qu’il doit y avoir lieu de porter
un crédit pour location d’un emplacement où logeront les cours et tribunaux. On
va démolir le palais actuel ; les locaux où logeront le tribunal de première
instance, la cour d’appel et la cour de cassation, exigeront une somme assez
considérable, pendant les cinq ans qu’on doit mettre à construire le nouveau
palais. Je fais cette observation pour qu’on ne demande pas dans quelque temps
de nouveaux crédits. Comme on peut être fixé maintenant à cet égard, il serait
bon de s’en expliquer avant de voter le budget.
M. de Behr. - D’après la convention faite avec les états-députés
de la province, le palais ne doit être démoli que successivement ; on laissera
debout les deux ailes qui continueront à être occupées par la cour de
cassation, la cour d’appel et le tribunal de première instance. Cela est
spécifié dans la convention et dans le plan de M. Suys, où on a déterminé les
parties qu’on commencerait à démolir.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - J’ajouterai à ce que vient de dire l’honorable
préopinant, pour que les renseignements soient complets, que s’il est
nécessaire de préparer ou de louer des locaux pour que les magistrats puissent
siéger convenablement, j’en trouverai les moyens dans mon budget : il y a au
chapitre V 35,000 fr. pour réparations et loyer de locaux ; ainsi je n’aurai
pas de subside à demander. (Aux voix !
aux voix !)
M. Dumortier. - Je ne pense pas qu’on puisse voter ; il y a un
amendement très important, c’est celui qui se rapporte à l’article 15 et qui a
été le plus contesté. On ne peut pas s’opposer à ce qu’il y ait deux votes. Le
ministre avait d’abord demandé 300,000 fr., et ensuite il a demandé qu’on porte
l’allocation à 400,000 fr. Comme je fais dépendre mon vote sur le budget de
l’adoption ou du rejet de cet article, je désire d’autant plus que la
discussion recommence, que les dernières paroles prononcées par l’orateur qui a
clos la discussion, sont de nature exercer une grande influence sur la chambre,
et qu’elles renfermaient une grande inexactitude. Il a dit que cette chambre
avait été construite par la ville de Bruxelles qui pourrait bien venir en
réclamer le prix.
M. Gendebien.
- Ce n’est pas cela ; quand nous en serons au second vote, nous nous en
expliquerons.
M. Dumortier.
- Je demande qu’on ajourne le second vote à raison de l’amendement par lequel
on a porté à 400 mille fr. l’allocation primitivement demandée de 300 mille fr.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Notre honorable président
qui connaît les précédents de la chambre, aurait su qu’il existait un amendement si réellement il y en avait eu.
Mais il a supposé qu’il n’y en avait pas ; en effet, il n’y en a pas. J’ai
demandé 400 mille francs avant que la chambre fût saisie de mon budget, je me
suis adressé à la section centrale pour prévenir la nécessité d’une instruction
ultérieure. La section centrale a examiné la proposition de 400 mille francs,
comme elle aurait fait de celle de 300 mille fr. C’est la première proposition
qui a été modifiée, mais il n’y a pas eu d’amendement ; j’ai agi ainsi pour
économiser les moments de la chambre. Quoi qu’il en soit, je suis persuadé que
si cette question était de nouveau soumise à la chambre, elle ne manquerait pas
de confirmer le vote qu’elle a émis après une discussion aussi longue.
M. Dumortier.
- Je n’ignorais pas ce que vient de dire M. le ministre de la justice. Il n’est
pas moins incontestable qu’il y a amendement : s’il était possible que les
majorations de crédit ne fussent pas considérées comme amendement. On
soustrairait au second vote les amendements du gouvernement ; le second vote
serait une mesure hostile contre les premiers votes de la chambre.
Une voix. - Qu’est-ce que
cela veut dire ?
M. Dumortier.
- Cela veut dire que les propositions ministérielles n’ont pas le privilège
d’être dispensées de subir un deuxième vote dans les cas où les propositions
des membres de la chambre doivent y être soumises. Autrement, le deuxième vote
serait une mesure tendant à l’arbitraire, une mesure tendant à faire de la
chambre une espèce de succursale du ministère ; ce que je ne puis admettre. (Hilarité. Dénégations.)
S’il devait en être ainsi, tout homme sensé devrait
demander la suppression du deuxième vote sur les amendements des membres de la
chambre, comme elle aurait lieu de fait relativement aux amendements proposés
par les ministres.
Je dis donc qu’il y a un amendement, et qu’il doit
être soumis à un deuxième vote. Je ne pense pas que la chambre puisse s’y
refuser. La chambre ne peut pas consentir à imposer sans un mûr examen, au
pays, la charge de deux millions ou deux millions et demi et probablement même
de trois millions.
M. le ministre des finances (M. d’Huart). - La dépense ne peut pas dépasser 2 millions.
M. Dumortier.
- Oui, 2 millions ; mais comme on vous l’a fort bien dit, la ville de Bruxelles
ne saurait payer le demi-million pour lequel vous voulez la faire contribuer
aux dépenses de construction, si vous ne lui accordez pas un subside de
pareille somme. Cela fera sans doute 2 millions et demi.
M. le président.
- Je rappellerai à l’orateur qu’il s’agit de la question du deuxième vote.
M. Dumortier.
- Je rentre dans la question dont on m’avait écarté un instant.
Il est clair que la proposition de M. le ministre de
la justice a été faite après la présentation du projet de loi. Dès lors il y a
eu amendement. Le règlement ne distingue pas entre les amendements des
ministres et ceux des membres de la chambre. Il n’a qu’une seule voix, qu’une
seule mesure pour tout le monde, et on voudrait qu’il eût 2 voix, 2 poids et 2
mesures ; une moindre pour les députés, une plus favorable pour les ministres !
J’ai la confiance que la chambre n’admettra pas un pareil système.
Je demande un deuxième vote, parce que je désire
parler sur l’article. J’ai la confiance que la chambre mieux éclairée ne
persistera pas dans son premier vote.
S’il y a 2 millions de trop dans les caisses de
l’Etat, qu’on les donne à la ville de Bruxelles qui en a besoin. Cela vaudra
mieux que d’ériger des palais.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - J’ai communiqué une proposition à la section
centrale avant que la chambre fût saisie de la question.
La chambre n’a pas considéré ma proposition comme un
amendement .Il n’y a eu dans la pensée de personne 2 amendements. La chambre
n’a pas voté sur un amendement de 100,000 fr., mais sur un chiffre de 400,000
fr.
M. Gendebien
et M. Lebeau
renoncent à la parole.
- La chambre consultée décide qu’il n’y a pas lieu à
un second vote sur le projet de loi du budget de la justice.
Demande de
rectification quant à la répartition de certains crédits
M. Andries. - Avant que la chambre ne passe au vote définitif,
je demande la parole pour indiquer une rectification à faire au budget. Je lis
au chapitre IX : « Art. 2. Subsides à accorder extraordinairement à des
établissements de bienfaisance : fr. 50,000. » « Art. 3. Subside pour
l’amélioration des hospices des aliénés : fr. 75,000. »
Je crois que la dénomination générale d’établissements
de bienfaisance s’applique particulièrement aux hospices d’aliénés. Je pense
donc qu’il faudrait réunir ces deux articles en un.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Je considère comme très
utile la proposition de l’honorable préopinant en faveur des hospices d’aliénés
qui sont réellement des établissements de bienfaisance. J’y vois cet avantage,
que si les 75,000 francs alloués par le budget aux hospices d’aliénés ne
pouvaient pas être employés intégralement dans l’intérêt de ces établissements,
l’excédant pourrait être alloué aux autres établissements de bienfaisance, par
exemple au dépôt de mendicité de Bruges, etc.
M. Gendebien.
- Cette proposition qui n’a en apparence pas d’inconvénient, peut en avoir un
réel. Vous allez réunir deux crédits en un, qu’en résultera-t-il ? Que chacun
obsédera le ministre pour avoir le plus possible. Vous allez donner à ces deux
administrations la tentation de sortir du cercle dans lequel vous les aviez
restreintes. Je pense donc qu’il vaut mieux maintenir la division des crédits.
M. A. Rodenbach. - Il me semble que l’adoption de la proposition de l’honorable M.
Andries ne peut pas souffrir de difficulté ; car, ainsi qu’il l’a fait
observer, les hospices d’aliénés sont des établissements de bienfaisance. La
division que M. Andries veut faire disparaître constitue donc un véritable
pléonasme. Je voterai pour la proposition de l’honorable membre.
M. le ministre de la justice (M.
Ernst). - Si les inconvénients qu’a signalés
l’honorable. M. Gendebien existaient réellement, j’en serais frappé le premier,
je serais le premier à les redouter- ; car c’est sur moi qu’ils retomberaient
indirectement. Je le prie de croire que dans la pratique ces inconvénients
n’existent pas.
Les établissements de bienfaisance auxquels des
subsides sont accordés sont : les hospices de sourds-muets, les hospices
d’aveugles, les hospices d’incurables, les ateliers de charité.
Jusqu’à présent on n’avait pas compris en termes
exprès les hospices d’aliénés dans les établissements de bienfaisance auxquels
des subsides étaient accordés.
Ayant acquis la certitude qu’il faudrait à l’avenir
accorder des subsides importants aux hospices d’aliénés, j’en ai fait
formellement la demande. Cependant, s’il n’était pas besoin de toute la somme
allouée, je crois qu’il serait utile de pouvoir employer la somme disponible à
améliorer les dépôts de mendicité de Mons, de Bruges et quelques autres.
C’est dans ce sens que j’appuie la proposition de
l’honorable M. Andries.
M. de Jaegher. - D’après les explications de M. le ministre de la
justice, il n’y aurait pas d’inconvénient à réunir les deux crédits ; il y en
aurait, au contraire, d’après l’honorable M. Gendebien. Par exemple, il se peut
que des hospices d’aliénés, ayant droit à un subside, ne puissent, dans l’année
1838, terminer les plans, devis, etc., nécessaires pour justifier leurs droits
à l’obtention du subside.
Si la proposition de l’honorable M. Andries était
adoptée, il s’en suivrait que M. le ministre de la justice, dans le cas que je
viens de prévoir, disposerait des 75,000 fr. pour subvenir aux besoins des
autres établissements de bienfaisance ; et lorsqu’ensuite des hospices
d’aliénés justifieraient de leurs droits à un subside, ce seraient de nouvelles
dépenses auxquelles il faudrait pourvoir. C’est sous ce rapport que la
proposition de l’honorable M. Andries me paraît ne pas devoir être adoptée.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - L’observation de l’honorable préopinant, dans la
pratique, n’est pas exacte. Si cette année il m’est possible de disposer en
faveur des hospices d’aliénés de la somme qui leur est allouée, j’en disposerai
ainsi ; mais autrement je voudrais pouvoir employer la somme allouée dans
l’intérêt des dépôts de mendicité.
M. Pollénus.
- Il me semble qu’il ne faut pas perdre de vue que le crédit des hospices
d’aliénés est un crédit tout à fait nouveau. C’est la première fois que la
chambre est appelée sur un semblable crédit ; et si vous voulez vous rendre
compte des motifs sur lesquels M. le ministre de la justice fonde sa demande,
vous verrez que le gouvernement a particulièrement eu en vue de favoriser les
hospices d’aliénés. Il me semble qu’à ce titre, comme il s’agit de dépenses qui
peuvent se représenter, il importe de conserver le libellé du budget. Mais, dit
M. le ministre de la justice, il peut être utile de pouvoir opérer un transfert
d’un article à un autre.
Messieurs, je suppose que le ministre a étudié son
budget, qu’il a parfaitement apprécié les besoins des établissements de
bienfaisance, et qu’on peut connaître la part du subside qu’on veut leur
accorder. Je ferai observer d’ailleurs que les établissements de bienfaisance
sont à la charge de la province. Je maintiens donc le libellé tel qu’il est. (Aux voix ! aux voix !)
La chambre ferme la discussion.
La réunion des articles, proposée par M. Andries, est
mise aux voix ; deux épreuves par assis et levé sont douteuses.
On procède à l’appel nominal.
85 membres sont présents.
43 votent la réunion,
42 votent contre.
En conséquence la proposition de M. Andries est
adoptée.
Ont voté l’adoption : MM. Andries, Bekaert, Coghen, de
Behr, de Florisone, de Longrée, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de
Nef, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux,
d’Huart, Donny, Dubois, B. Dubus, Duvivier. Ernst, Hye-Hoys, Kervyn, Lejeune, Maertens, Mercier,
Nothomb, Peeters, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Smits, Stas de Volder, Ullens,
Vandenhove, Vergauwen, Wallaert, Willmar.
Ont voté le rejet : MM. Angillis, Beerenbroeck,
Berger, Brabant, Coppieters, Corneli, David, de Jaegher, de Man d’Attenrode,
Demonceau, de Puydt, Dequesne, Desmanet de Biesme, Doignon, Dumortier, Eloy de
Burdinne, Gendebien, Heptia, Keppenne, Lardinois, Lebeau, Lecreps, Liedts,
Manilius, Mast de Vries, Metz, Milcamps, Pirmez, Pirson Polfvliet, Pollénus,
Raikem, Raymaeckers, Scheyven, Simons, Trentesaux, Troye, Van Hoobrouck, Van
Volxem, Verhaegen, Vilain XIIII, Zoude.
Motion d’ordre
relative aux traitements des membres de l’ordre judiciaire
M. Verhaegen.
- Avant de procéder au vote définitif du budget de la justice, je pense que le
moment est venu de formuler une demande relativement à la proposition que j’ai
déposée sur le bureau. Cela est d’autant plus nécessaire que le traitement des
membres de l’ordre judiciaire est porté au budget de ce ministère.
Vous le savez, il y a une proposition générale
concernant la magistrature ; elle est renvoyée aux sections. Il y a plusieurs
propositions particulières ou des demandes d’augmentation du personnel de
certains tribunaux et des demandes de classification différentes de celles qui
existent.
Les sections et les commissions qui sont chargées de
l’examen de ces objets, ont le temps de s’en occuper. Les sections n’ont plus
de besogne ; depuis trois semaines je n’ai pas été convoqué dans ma section.
Je ne puis pas croire que le renvoi aux sections soit un
ajournement indéfini. Il doit y avoir un moyen pour les appeler à s’occuper de
ma proposition. J’en ai conféré avec mes honorables collègues ; et l’on m’a dit
qu’il fallait inviter notre honorable président à s’entendre avec les
présidents des sections et des commissions, afin de faire mettre à l’ordre du
jour tous les projets relatifs au traitement des membres de l’ordre judiciaire,
à la classification des tribunaux et à l’augmentation de leur personnel. J’ose
croire que l’on appuiera la proposition que je vais déposer sur le bureau dans
ce but.
M. le président. - C’est à la chambre à mettre elle-même les objets à
l’ordre du jour dans les sections et dans les commissions. C’est ce qu’elle a
fait déjà plusieurs fois.
M. A. Rodenbach. - C’est l’affaire du bureau.
M. Verhaegen.
- J’ai cru qu’il fallait laisser cela à l’arbitrage de notre honorable
président ; mais s’il y trouve quelque inconvénient, je demanderai que la chambre
mette à l’ordre du jour, dans les sections, l’examen du projet de loi que j’ai
présenté.
M. Dumortier.
- La proposition de M. Verhaegen est une proposition de centimes additionnels. Avant
de l’envoyer dans les sections, il me paraît que nous devons décider, oui ou
non, si l’on mettra de nouveaux centimes additionnels sur les contribuables.
La proposition de notre honorable collègue a pour
objet d’augmenter d’un demi-million la somme que nous dépensons actuellement
pour les tribunaux et les cours de justice ; or, comme nous serons peut-être
déjà obligés de voter des centimes additionnels, il me semble que nous ne
pouvons pas examiner cette question avant le budget des voies et moyens, avant
d’avoir vu s’il fallait augmenter les impositions actuelles.
D’ailleurs, messieurs, plusieurs des propositions que
l’honorable membre veut mettre à l’ordre du jour dans les sections ont été
renvoyées à une commission ou sont déjà soumises à une section centrale ; il
faudrait donc recommencer une besogne qui est déjà en partie achevée ; nous ne
pouvons donc pas adopter la position de M. Verhaegen.
M. le président.
- Je puis dire que la section centrale à tous les jours une séance.
Plusieurs voix. - Votons
d’abord le budget de la justice.
M. le président.
- On demande que la chambre ne continue à s’occuper de la proposition de M.
Verhaegen qu’après avoir terminé le budget de la justice. (Assentiment.)
Proposition relative
à l’article relative à la construction d’un palais de justice à Bruxelles
M. de Behr. - Je désire, messieurs, faire une observation relativement à la
construction du palais de justice. Vous savez, messieurs, que la province et la
ville sont obligées d’intervenir chacune pour 500,000 fr. dans les frais de
cette construction ; il a été en outre convenu entre M. le ministre et la
section centrale qu’elles contribueraient dans les frais d’entretien et de réparation
des locaux ; je crois, messieurs, qu’il serait convenable d’insérer cela dans
le budget. Je demande donc qu’on ajoute ce qui suit au libellé de l’article qui
accorde un crédit pour la construction du palais de justice :
« A la charge pour la ville et la province de
contribuer chacune pour 500,000 fr. dans les frais de construction, et, en
outre, de remplir leurs obligations légales en ce qui concerne l’entretien et
la réparation des locaux. »
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Messieurs, les obligations de la province et de la
commune, en ce qui concerne leur part contributive pour l’érection du palais de
justice, ne peuvent être contestées ; il y a un engagement pris envers le
gouvernement, qui est le résultat des résolutions constatées aux procès-verbaux
du conseil provincial et du conseil communal ; cependant, il ne peut y avoir
aucun inconvénient à admettre l’espèce de développement que l’honorable
préopinant propose de donner à l’article du budget qui concerne l’objet dont il
s’agit, afin d’éviter toute difficulté dans l’avenir ; voici même un avantage
qui pourrait résulter de l’adoption de la proposition de M. de Behr. La ville
de Bruxelles ne conteste pas qu’elle doit intervenir dans les grosses
réparations du palais de justice en proportion de la part qu’elle prend à
l’érection de ce palais ; la ville de Bruxelles ne conteste pas non plus
l’obligation de pourvoir à l’entretien des locaux occupés par les corps
judiciaires qu’elle doit loger, et de contribuer aux frais du mobilier ; mais,
en ce qui concerne la province, il pourrait y avoir quelques doutes à cet
égard. Le conseil provincial, messieurs, s’est borné à accorder 500,000 fr., au
lieu d’un million qu’on lui demandait, et il a voulu se libérer de l’obligation
de contribuer aux dépenses du mobilier et aux frais de réparation et
d’entretien du palais de justice ; je n’admets pas cette restriction du conseil
provincial, et je suis persuadé que lorsqu’il verra que la législature a suppléé
à ce qu’il a refusé, en votant 2 millions au lieu de 1,500,000 fr., le conseil
provincial acceptera de son côté loyalement cette espèce de transaction, et
qu’il consentira à payer aussi sa part dans le mobilier, les réparations et
l’entretien du palais de justice. C’est dans ce sens que je ferai des
propositions au conseil provincial, soit que la chambre adopte ou n’adopte pas
la proposition de M. de Behr, et en agissant de la sorte, je croirai répondre à
vos intentions. Messieurs, il est évident que nous voulons tous ce que veut
l’honorable M. de Behr, et dès lors il n’y a pas d’inconvénient à le dire
ouvertement.
-
La proposition de M. de Behr est successivement appuyée et adoptée.
M. le président.
- Si l’on ne considère pas comme un amendement la disposition qui vient d’être
adoptée, nous allons passer au vote définitif.
M. Dumortier. - Je ne pense pas qu’on puisse considérer comme
blanc ce qui est noir ; la disposition qui vient d’être adoptée apporte une
condition au vote primitif ; ce vote n’est donc plus un vote pur et simple
comme il l’était d’abord ; c’est maintenant un vote conditionnel, dès lors il
est évident que la proposition de M. de Behr est un amendement.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). - Messieurs, la condition que vous venez de
formuler, était dans la pensée de tous ceux qui ont voté l’allocation ; vous
n’avez donc fait qu’expliquer plus clairement votre intention, et dès lors vous
n’avez pas amendé la loi.
M. Dumortier.
- Je demande à M. le ministre de la justice ce que c’est qu’un amendement, si
une disposition qui change le texte d’un article de loi n’en est pas un ?
M. Gendebien.
- A quoi aboutirait en définitive l’adoption de la proposition de M. Dumortier
? A soumettre à un second vote l’amendement de M. de Behr et à rien autre chose
: le but de M. Dumortier, de faire voter une seconde fois sur l’article qui
alloue un crédit pour la construction d’un palais de justice, ne serait pas
rempli, puisque la chambre a décidé tout à l’heure que le budget ne doit pas
être soumis à un second vote. La proposition de M. Dumortier ne peut donc avoir
d’autre résultat que de faire discuter deux fois la proposition de M. de Behr,
qui est tellement simple qu’elle n’a pas même besoin d’être discutée une seule
fois.
- La chambre, consultée, décide que l’adoption de la
proposition de M. de Behr ne donne pas lieu à soumettre le budget à un second
vote.
Vote sur les
dispositions légales et sur l’ensemble du projet
L’article premier de la loi qui fixe le budget de la
justice pour 1838 à la somme de 6,345,875 fr. est mis aux voix et adopté.
L’article 2 qui rend la loi obligatoire au 1er janvier
1838 est également mis aux voix et adopté.
On passe à l’appel nominal sur l’ensemble ; en voici
le résultat.
82 membres prennent part au vote.
1 (M. Desmanet de Bicorne) s’abstient.
77 adoptent.
5 rejettent.
En conséquence le budget de la justice est adopté.
Ont voté l’adoption : MM. Andries, Angillis
Beerenbroeck, Bekaert-Baeckelandt, Berger, Brabant, Coghen, Coppieters,
Corneli, David, de Behr, de Jaegher, de Longrée, de Man d’Attenrode, de Mérode
(Félix), de Mérode (Werner), Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de Puydt,
Dequesne, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de
Theux, d’Huart, Donny, Dubois, B. Dubus, Duvivier, Eloy de Burdinne, Ernst,
Gendebien, Heptia, Hye-Hoys, Keppenne, Kervyn, Lardinois, Lebeau, Lecreps,
Liedts, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Metz, Milcamps,
Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Pirson, Polfvliet, Pollénus, Raikem,
Raymaeckers, A. Rodenbach, C. Rodenbach, Scheyven, Simons. Smits, Thienpont Trentesaux, Troye, Vandenbossche,
Vandenhove, Van Hoobrouck, Van Volxem, Vergauwen, Verhaegen, H. Vilain XIIII,
Wallaert, Willmar, Zoude.
Ont voté le rejet : MM. de Florisone, de Langhe,
Doignon, Dumortier et Stas de Volder.
M. le président.
- M. Desmanet de Biesme qui s’est abstenu est invité, aux termes du règlement,
à faire connaître les motifs de son abstention.
M. Desmanet de Biesme. - Messieurs, je me suis abstenu parce que, dans mon
opinion, il faudrait des motifs bien graves pour voter contre le budget du
département de la justice, dont presque toutes les allocations sont réglées par
la loi. Je n’ai d’ailleurs aucune espèce de grief contre ce département ;
cependant je n’ai pas cru pouvoir voter pour le budget, parce que je n’ai pas voulu
sanctionner par mon vote l’allocation concernant la construction d’un palais de
justice à Bruxelles ; cette dépense ayant pu, selon moi, être ajournée pendant
quelques années.
- Sur la proposition de M. Verhaegen., la chambre décide que
tous les projets de loi concernant les traitements des membres de l’ordre
judiciaire, ainsi que l’augmentation du personnel et le changement de
classification de certains tribunaux, lesquels n’auraient pas été renvoyés à
une commission, ou ne seraient pas déjà en section centrale, seront mis à
l’ordre du jour dans les sections.
La séance est levée à 4 heures.