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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du mardi 2 février 1836 (après-midi)
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre, notamment pétition relative au droit d’entrée sur le
bois (Eloy de Burdinne)
2) Motion
d’ordre relative au canal de Maestricht à Bois-le-Duc (Beerenbroeck)
et à la répression de la fraude des céréales dans le Limbourg (Pollénus, Duvivier)
3)
Rapport sur des pétitions relatives à l’organisation communale
4) Projet
de loi portant le budget de la dette publique et des dotations pour l’exercice
1836. Traitements d’attente (d’Hoffschmidt, Dumortier, d’Huart, Dumortier, d’Huart, Schaetzen, d’Hoffschmidt, d’Huart, (+société générale) Dumortier,
d’Hoffschmidt, Jullien, A. Rodenbach, Dumortier, d’Hoffschmidt, Jullien, Dubus, Fallon, Gendebien,
Dumortier), pensions du personnel de l’Etat
(notamment de l’administration des finances) (d’Huart, Dumortier, (+ophtalmie militaire) d’Huart,
Duvivier, Jullien, Dubus, d’Huart)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur
belge n°34, du 3 février 1836)
M. de Renesse
procède à l’appel nominal à midi et demi.
M. Schaetzen donne lecture du
procès-verbal de la séance précédente. La rédaction en est adoptée.
M. de Renesse
lit le sommaire des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Ed. de Malingreau d’Hembise adresse des
observations sur le projet de loi communale. »
________________
« Des propriétaires de bateaux et négociants
de Bruxelles, Alost et Termonde, demandent que la chambre s’occupe de la loi
relative au transit. »
________________
« Des
propriétaires de bois de sapins de l’arrondissement de Louvain demandent qu’il
soit frappé sur les sapins du Nord un droit tel que le bois indigène puisse
soutenir la concurrence. »
M. Eloy de
Burdinne. - Les propriétaires de bois de l’arrondissement de Louvain
ont adressé une pétition à la chambre. Jusqu’à présent la chambre a renvoyé des
pétitions de cette nature à M. le ministre des finances, à M. le ministre de
l’intérieur et à la commission d’industrie. Je demande qu’il en soit de même
pour la question actuelle.
- La proposition de M. Eloy de Burdinne est
adoptée.
MOTION D’ORDRE RELATIVE AU
CANAL DE MAESTRICHT A BOIS-LE-DUC
M. Beerenbroeck.
- Dans le rapport de la section centrale sur le budget de l’intérieur qui vient
de nous être distribué, je lis, page 26, que le gouvernement a fait une demande
de crédit, postérieurement à la présentation du budget, pour travaux à exécuter
à l’écluse de Hocht près de Maestricht.
Cette écluse serait convertie en écluse de prise
d’eau pour l’alimentation du canal de Maestricht à Bois-le-Duc.
Depuis le mois d’octobre 1830, la navigation du
canal est interrompue, parce que l’autorité militaire de Maestricht en défend
le passage par cette forteresse. Si je suis bien informé, le génie hollandais
avait même fait murer la galerie souterraine par laquelle le canal est
introduit dans le bassin de la ville, afin de ne pas laisser échapper le peu
d’eau qui pourrait filtrer à travers les joints des portes de l’écluse de prise
d’eau.
Le crédit que M. le ministre vous demande a pour
but d’affranchir à jamais de la dépendance de la forteresse de Maestricht et
des caprices de sa garnison, la navigation du canal. Le prompt achèvement est
d’une très haute importance pour le Limbourg et particulièrement pour les
cantons de Mechelen, Peer, Bree, Achel, Weert et
d’une partie de celui de Maaseck.
Déjà la chambre est saisie de plusieurs pétitions
des administrations locales et des habitants de ces cantons, qui demandent
l’ouverture du canal, pour rétablir avec les provinces de Liége et de Namur les
relations qu’ils ont perdues depuis la révolution.
Il est inutile, messieurs, d’appeler votre
attention sur les souffrances de ce pays depuis cette époque, sa situation est
trop bien connue.
La section centrale, considérant que l’appréciation
de ce projet exige des connaissances d’art, a été d’avis de vous proposer de
renvoyer la demande de crédit à l’examen de la commission des travaux publics.
Pour que ce crédit puisse être discuté avec le
budget de l’intérieur, je prie la chambre d’adopter les conclusions de la
section centrale, en invitant la commission des travaux publics de nous
présenter son rapport avant la discussion de ce budget.
- La proposition de M. Beerenbroeck est adoptée.
________________
M. Dubus. - Je
crois qu’il y a une pétition relative à la loi communale. Je demande qu’elle
soit déposée sur le bureau pendant la discussion de cette loi.
- La proposition de M. Dubus est adoptée.
MOTION D’ORDRE RELATIVE AU PROJET DE LOI SUR
M. Pollénus. - La
chambre est saisie d’un projet de loi relatif à la répression de la fraude des
céréales aux environs de Maestricht.
Si je suis bien informé, celle fraude se commet
avec la plus grande activité. Il est urgent d’y porter remède. Je prie en
conséquence la chambre de vouloir bien engager la commission chargée de
l’examen du projet de vouloir bien nous présenter son rapport dans le plus bref
délai.
M. Duvivier. - Si
l’honorable membre avait demandé les noms des membres composant la commission
et s’était adresse à moi qui en suis le président, je lui aurais fourni les
renseignements qu’il demande. Je lui aurais dit que la commission doit se
réunir demain pour terminer son travail.
Il aurait vu qu’elle n’a pas perdu de temps
puisqu’elle compte à peine deux jours d’existence et que le projet lui-même a
été présenté tout récemment à la chambre.
M. Pollénus. - La
véritable manière de demander des explications, c’est de s’adresser à la
chambre. C’est pourquoi j’ai fait ma motion d’ordre.
RAPPORTS SUR DES PETITIONS
RELATIVES A L’ORGANISATION COMMUNALE
M. Verdussen, rapporteur
de la commission des pétitions. - « Par pétition en date du 12 mai 1835,
un grand nombre d’habitants de la commune d’Ardoye adressent des réclamations
en faveur des libertés communales. »
« Par 3 pétitions, un grand nombre d’habitants
des communes de Wonterghem, Gotthem
et Heusden (Flandre orientale) demandent que la chambre maintienne, dans le vote
définitif de la loi communale, l’élection directe des échevins et l’étende même
aux bourgmestres. »
« Par pétition non datée, plusieurs habitants
d’Ath demandent :
« 1° L’élection directe des magistrats
municipaux ;
« 2° La suppression des 10 p. c. additionnels
;
« 3° L’égalité du cens électoral, pour les
villes et pour les campagnes. »
« Par pétition en date du 10 mai 1835,
plusieurs habitants de Genappe demandent l’élection directe, par le peuple, de
tous les membres des administrations communales. »
« Par diverses pétitions, plusieurs habitants
des communes de Sulsique Oost-Eecloo, Knesselaere, Waerschoot, Somergem et Eecloo demandent le maintien des libertés
communales. »
« Par deux pétitions, plusieurs habitants des
communes de Wondelgem et de Everghem
(Flandre orientale), demandent que la chambre maintienne l’élection directe des
échevins et l’étende même aux bourgmestres. »
Toutes les pétitions dont je viens d’avoir
l’honneur de vous donner l’analyse, ont pour but principal de réclamer en faveur
de l’élection directe des échevins et des bourgmestres, et d’étendre, autant
que possible, les, pouvoirs et l’indépendance de ceux-ci. Cependant parmi les
six pétitions qui ont été réunies sous le n°5 du feuilleton, il s’en trouve qui
demandent aussi l’abolition des 10 centimes additionnels ; la péréquation
cadastrale ; la liberté de l’enseignement ; et enfin que la révocation du
bourgmestre, par le Roi, ne puisse avoir lieu qu’avec le consentement de la
chambre ou des états provinciaux.
Il est remarquer, messieurs, que plusieurs des
pétitions qui nous ont été adressées par les habitants de différentes communes
de
La commission vous propose le dépôt de toutes ces
pétitions sur le bureau de la chambre, pendant la discussion de la loi communale.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DE
Discussion des articles
Titre II. - Rémunérations
Article
premier
« Art. 1er (suite.) Pensions militaires : fr.
1,520,000. »
- Adopté.
« Pensions de l’ordre Léopold : fr.
12,000. »
- Adopté.
- Le chiffre de 3,122,000
fr., qui représente le total de l’art. 1er est mis aux voix et adopté.
Article
2
« Art. 2. Arriéré des pensions. (Exercices de
1833 et antérieurs) : fr. 5,000. »
- Adopté.
Article
3
« Art. 3. Traitement d’attente : fr.
150,000. »
M. d'Hoffschmidt,
rapporteur, monte à la tribune. - J’ai à vous entretenir, dit
l’honorable membre, du rapport de la section centrale chargée de l’examen du
budget soumis à vos discussions sur deux pétitions relatives à l’article des
traitements d’attente.
M. le baron de Lamotte Baraffe,
ex-conseiller d’Etat, demande, par sa pétition du 5 novembre dernier, que la
chambre autorise M. le ministre des finances à lui payer l’intégralité du
traitement d’attente de 1,500 fl. qui lui a été accordé par un arrêté royal du
6 juin 1824, pour le récompenser des services qu’il a rendus en sa qualité
d’intendant du département de Jemmapes en 1814 et 1815, plus les arriérés de ce
traitement sur lequel il n’a reçu que des à comptes depuis 1831.
M. de Lamotte Baraffe
allègue, pour appuyer sa réclamation, qu’il est dans une position voisine de la
misère et joint une déclaration de M. le bourgmestre de Tournay, de laquelle il
appert qu’il a été entraîné, durant ses fonctions d’intendant, dans des
dépenses considérables qui ont concouru à compromettre son avoir.
La section centrale, ayant
été partagée sur la question de savoir si les titulaires inscrits sur les
listes comprenant les traitements d’attente, ont des droits acquis à
l’intégralité de ces traitements, et ayant été divisée également sur la
proposition qu’elle a discutée tendant à admettre le chiffre de 50,000 francs
alloué les années précédentes à titre de secours à répartir aux plus nécessiteux
des titulaires, elle vous propose le renvoi de cette pétition au ministre des
finances afin qu’il puisse y avoir égard dans le sens et d’après la décision
que prendra la législature sur le crédit porté au budget pour le paiement des
traitements d’attente.
M. Herla, ancien
directeur des contributions dans la province du Brabant méridional expose, par
pétition du 12 novembre dernier, qu’ayant obtenu la démission honorable de ses
fonctions en 1827, il obtint une pension de 1,617 florins à charge de la caisse
de retraite, pension que le roi Guillaume, prenant en considération ses longs
et loyaux services, augmenta d’un supplément de 2,385 florins qui lui fut
accordé en vertu de l’article 17 de l’arrêté-loi du 14 septembre 1814, de sorte
que sa pension fut ainsi portée à 4,000 florins qu’il a touchés intégralement
jusqu’à la révolution ; depuis lors il n’a plus touché que la pension de 1,617
fr. à charge de la caisse de retraite.
Il fonde sa réclamation sur la légalité de la
collation du supplément qui lui a été accordé par des arrêtés royaux qu’il a
joints à sa pétition et demande que M. le ministre des finances soit mis à même
de lui payer tout ce qui lui revient de ce chef.
La section centrale, déterminée par les mêmes
motifs qui l’ont portée à vous proposer le renvoi au ministre des finances de
la pétition de M. de Lamotte Baraffe, vous présente
les mêmes conclussions pour celle-ci.
M.
Dumortier. - Je viens appuyer les conclusions de la section centrale
quant à la première pétition, et m’opposer à ces mêmes conclusions quant à la
deuxième.
Le motif pour lequel je viens présenter des
conclusions différentes, c’est que le premier pétitionnaire ne jouit d’aucune
espèce de pension sur l’Etat, tandis que le second touche sur la caisse de
retraite une pension de 1,600 florins, c’est-à-dire au-delà de 3,000 francs, ce
qui me paraît une pension très honnête.
Quant à la première pétition, j’avais toujours
pensé qu’après que la législature avait accordé une partie du subside demandé
pour les traitements d’attente, à l’effet de secourir les plus nécessiteux, que
le gouvernement aurait compris dans la liste de ces personnes l’auteur de la
première pétition. C’est un homme très honorable, qui a été gouverneur du
Hainaut, ensuite conseiller d’Etat, enfin membre de la deuxième chambre des
états-généraux où il s’est fait remarquer par son indépendance, ce qui était
très honorable surtout à cette époque.
Cet ancien fonctionnaire est vraiment dans une
position malheureuse. Je vous assure que de tous ceux qui jouissent d’un
traitement d’attente, il n’est personne sans comparaison qui y ait plus de
droits. Sa position est, je le répète, on ne peut plus malheureuse, et il avait
droit à être porté sur la liste de ceux pour lesquels nous avons voté tous les
ans un traitement d’attente.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - L’honorable préopinant a regretté que je n’aie
pas examiné le fond de la question, la question des droits acquis aux
traitements d’attente par les titulaires de ces traitements. Si je n’ai pas
abordé cette question, c’est que j’ai pensé que c’était inutile et que je
pouvais à cette occasion ménager le temps de l’assemblée.
Vous vous rappellerez que cette question a été
agitée pour ainsi dire chaque année dans la chambre, et a été résolue quatre
fois de la même manière ; de telle sorte que je ne pouvais pas présumer que,
quels que fussent mes efforts, la chambre s’écarterait de ses antécédents à ce
sujet.
Le gouvernement vous demande une allocation de
130,000 fr., ce qui constitue le dixième total des traitements d’attente ;
preuve suffisante (alors même que les déclarations antérieures du gouvernement
ne le constateraient pas) preuve, dis-je, que le gouvernement pense qu’il faut
payer l’intégralité des traitements d’attente, aussi longtemps que la
disposition accordant ces traitements n’a pas été révoquée.
Un honorable député du Limbourg a aussi appelé
l’attention du gouvernement sur ce point. Il a demandé qu’il fît une
proposition de manière à trancher la question une fois pour toutes, et ne pas
la subdiviser en une infinité de petites questions de fait comme celles dont
plusieurs honorables membres viennent de s’occuper. Mais le gouvernement n’a
aucune proposition à vous soumettre en cette circonstance. Un de vous a usé de
son initiative. Il a déposé depuis trois ans une proposition qui tranche la
question, qui reconnaît pour le passé la légalité des traitements d’attente et
en demande l’abolition pour l’avenir.
Dans cette position, le
gouvernement doit attendre que la chambre mette à l’ordre du jour la
proposition faite par M. d’Hoffschmidt en 1833 et examine s’il lui convient de
l’adopter.
Je n’ai pas soutenu la demande d’une allocation de
130,000 fr., parce que je suis convaincu d’avance que la chambre réduira à
50,000 fr. la somme demandée. Je demeure au reste assuré que quand la chambre
pourra aborder cette question, elle la résoudra selon l’équité et le droit.
L’honorable M. d’Hoffschmidt
demande si des pétitions ne me sont pas adressées par les titulaires des
traitements d’attente, pour en réclamer le paiement intégral. On présume, avec
raison, qu’il m’en est arrivé. Mais il y a plus que des pétitions, je dois le
dire, c’est qu’un procès est intenté au gouvernement de ce chef. Dix ou douze
assignations ont été dirigées contre l’administration du trésor pour obtenir le
paiement intégral de ces traitements d’attente. Voilà l’état des choses sous ce
rapport.
Quand la chambre abordera cette question à fond,
elle la tranchera sans doute définitivement. Mais en attendant je suis persuadé
qu’elle allouera au moins, comme les années précédentes, une somme de 50,000
fr. destinée, comme vous savez, aux besoins réels de la majeure partie des
titulaires des traitements d’attente.
(Moniteur
belge n°35, du 4 février 1836) M. Dumortier.
- J’ai été étonné d’apprendre que ce fonctionnaire n’avait pas été compris dans
cette liste et qu’on ne lui avait accordé jusqu’à ce jour aucune indemnité. Je
crois qu’il y a lieu de renvoyer sa requête à M. le ministre des finances, afin
qu’il l’examine.
En ce qui concerne la seconde pétition, je ne pense
pas qu’il faille la renvoyer à M. le ministre des finances. Le pétitionnaire dit
lui-même qu’il reçoit une pension de plus de 3,000 fr. Il n’est donc pas dans
la catégorie des personnes auxquelles le gouvernement vent accorder un secours
sur leurs traitements d’attente. Si le pétitionnaire recevait, outre sa
pension, un traitement d’attente, ce serait un véritable cumul en matière de
pensions, et nous ne devons pas favoriser de semblables cumuls.
Je ferai remarquer en outre que si nous renvoyons
toutes les pétitions de cette nature à M. le ministre des finances, celles qui
ne sont pas fondées dans notre opinion comme celles qui sont fondées, M. le
ministre aura nécessairement moins d’égard pour les pétitions renvoyées
indistinctement à son département.
Je termine en recommandant la première pétition à
l’attention de M. le ministre des finances.
M.
le ministre des finances (M. d'Huart). - L’honorable M. Dumortier est
dans l’erreur quand il pense que le pétitionnaire qui adressé la première
requête sur laquelle il vous a été fait rapport, n’a pas été compris dans la
liste des personnes ayant droit à une partie de leur traitement d’attente. Je
dois déclarer au contraire que M. Lamotte Barnaffe
est compris dans la liste de répartition de ces traitements.
Je dirai même que ce n’est
pas moi qui l’ai porté sur cette liste ; c’est mon honorable prédécesseur qui
avait alloué un subside sur le fonds de 50,000 fr. de traitements d’attente. Le
renvoi de la pétition de M. de Lamotte serait d’autant plus inutile que si par
suite d’extinctions il était possible d’accorder un subside plus élevé à ce
fonctionnaire recommandable et qui se trouve dans une position vraiment
déplorable relativement à sa position ancienne, je me hâterais d’augmenter la
faible part qu’il reçoit maintenant sur l’allocation portée à mon budget.
L. de Lamotte s’est adressé directement à mon
département. Il lui a été répondu que le crédit alloué au budget ne
représentant que le tiers de la somme des traitements d’attente, il avait été
impossible de faire davantage en sa faveur.
Quant à la seconde pétition je ne pense pas qu’il y
ait lieu de la renvoyer au département des finances.
Je suis de l’avis de l’honorable M. Dumortier. C’est un véritable cumul
que le pétitionnaire demande en sollicitant le paiement simultané de deux
pensions dont l’une est définitive.
M. Schaetzen. - Je pense qu’il y a lieu
de renvoyer les deux pétitions à M. le ministre des finances. Je viens donc
appuyer les conclusions de la commission. Il est temps que l’on fixe le sort de
ces malheureux pensionnaires. Il ne faut pas qu’ils viennent tous les ans
solliciter le paiement de leur traitement d’attente.
Cela soulève des questions personnelles toujours
désagréables à traiter dans une assemblée délibérante. Je demande en outre que
M. le ministre des finances nous présente un rapport définitif, à l’effet de
nous proposer des mesures générales. C’est le seul mode à suivre pour éviter à
l’avenir la reproduction de semblables réclamations.
M. d'Hoffschmidt,
rapporteur. - Les honorables préopinants n’ont abordé que la question
de fait. Ils n’ont pas touché la question du fond. Nous avons cependant à
examiner si les titulaires ont des droits, oui ou non, à recevoir l’intégralité
de leur traitement. Selon moi, et j’ai soutenu cette opinion dans la section
centrale, les titulaires ont des droits acquis, incontestables, en vertu
desquels ils peuvent réclamer le paiement, non seulement de leur pension
annuelle, mais encore des arriérés qui leur sont dus, et je regrette que la
chose soit ainsi, car j’ai toujours cherché jusqu’à présent à empêcher que le
trésor soit grevé de ces traitements ou pensions qui ne peuvent être considérés
que comme une vraie dilapidation des fonds de l’Etat.
Mais maintenant que j’ai examiné la question, je
soutiens que les titulaires des traitements d’attente ont des droits acquis en
vertu de l’arrêté-loi du 14 septembre 1814. En effet, vous avez si bien reconnu
la validité de cet arrêté, que dans la loi du 4 août 1832 vous en avez abrogé
l’article 17 en maintenant les autres articles. Pourrait-on nier que le roi
Guillaume ait légalement accordé ces traitements d’attente, quand l’on fait
attention que cet arrêté a été porté du temps où ce souverain avait
l’omnipotence du pouvoir législatif, puisqu’en 1814 la constitution du royaume
des Pays-Bas n’était pas en vigueur. Ainsi l’arrêté de 1814 subsiste, et
jusqu’à ce qu’on en ait rapporté les dispositions, quant aux traitements
d’attente, vous devez les payer ; et remarquez que vous pouvez abroger ces dispositions
quant aux titulaires actuels, puisque le roi Guillaume s’était réservé de le
faire ; mais pour cela il faut des dispositions législatives, c’est ce qui
m’avait engagé en 1833 à vous faire une proposition qui tendait à abolir les
traitements d’attente pour l’avenir.
Cette proposition était basée sur les abus de ces
traitements ; car il est évident qu’ils n’étaient pour la plupart accordés qu’à
des favoris du roi Guillaume. Ces traitements se divisent en trois catégories
qui sont : les traitements d’attente, les suppléments de pensions et les
secours annuels.
Dans ces trois catégories, il y en a une qui est
faite, sans doute, pour réveiller vos sympathies : c’est la dernière, ayant
pour objet des secours à accorder à des veuves et à des orphelins d’ex-employés.
Ces secours sont très faibles, puisque leur somme totale n’est que de 3,630
fl., et je crois que l’on peut laisser continuer ces secours si l’on admet
définitivement le système de la chambre, consistant à accorder, dans certains
cas, des secours ou aumônes publiques, comme elle l’a fait encore hier sur la
proposition de M. Legrelle, en faveur de la veuve d’un officier de marine. Mais
quant aux autres traitements, je crois qu’il est temps de prendre une
disposition.
Car je considérerais comme une
véritable profusion sans motifs, le moindre à compte qui serait continué à
l’avenir aux titulaires de deux premières catégories que je viens de vous
désigner ; il suffit de parcourir les listes où ils sont inscrits pour juger
des titres qu’ils avaient à l’obtention de ces traitements ou pension : par
exemple, un abbé Félix a reçu une pension pour avoir fait un sermon qui a plu
au roi Guillaume ; un ci-devant seigneur a reçu une pension, pour l’indemniser
de la perte de ses droits féodaux, etc.
Je crois donc qu’il est urgent de discuter la
proposition que j’ai eu l’honneur de faire et qui fut renvoyée à la section
centrale chargée de l’examen du budget de la dette publique pour l’exercice
1833 ; mais je crois qu’alors la chambre, s’étant séparée immédiatement après
ce renvoi, cette section ne put s’en occuper.
Je demanderai à M. le ministre des finances s’il ne
reçoit pas de réclamations des titulaires des traitements d’attente, ayant pour
objet d’obtenir le paiement intégral de ces traitements, y compris les
arriérés, et s’il ne nous faudra pas tôt ou tard effectuer ce paiement. Je
crois que ces titulaires ont le droit d’attraire le gouvernement devant les
tribunaux pour obtenir le paiement de ces arriérés. Il ne faut pas nous exposer
non seulement à être condamnés, mais encore à passer pour injustes. Etre juste
pour le passé, être avare pour l’avenir, voilà la règle que l’on doit, à mon
avis, suivre pour les traitements d’attente.
On m’objectera, je le sais, le traité du 15
novembre. L’art. 22 de ce traité nous faisait en effet une obligation de payer
ces traitements d’attente ; mais ce traité n’est pas exécutoire. Quand la
chambre discutera le fond de ma proposition, j’aborderai cette question et je
crois qu’il ne me sera pas difficile de prouver que ce traité ne doit pas nous
empêcher de supprimer les traitements d’attente.
Je n’en dirai pas davantage pour le moment.
J’attendrai les explications de M. le ministre.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - L’honorable préopinant a regretté que je n’aie
pas examiné le fond de la question, la question des droits acquis aux
traitements d’attente par les titulaires de ces traitements. Si je n’ai pas
abordé cette question, c’est que j’ai pensé que c’était inutile et que je
pouvais à cette occasion ménager le temps de l’assemblée.
Vous vous rappellerez que cette question a été
agitée pour ainsi dire chaque année dans la chambre, et a été résolue quatre
fois de la même manière ; de telle sorte que je ne pouvais pas présumer que,
quels que fussent mes efforts, la chambre s’écarterait de ses antécédents à ce
sujet.
Le gouvernement vous demande une allocation de
130,000 fr., ce qui constitue le dixième total des traitements d’attente ;
preuve suffisante (alors même que les déclarations antérieures du gouvernement
ne le constateraient pas), preuve, dis-je, que le gouvernement pense qu’il faut
payer l’intégralité des traitements d’attente, aussi longtemps que la
disposition accordant ces traitements n’a pas été révoquée.
Un honorable député du
Limbourg a aussi appelé l’attention du gouvernement sur ce point. Il a demandé
qu’il fît une proposition de manière à trancher la question une fois pour
toutes, et ne pas la subdiviser en une infinité de petites questions de faits
comme celles dont plusieurs honorables membres viennent de s’occuper. Mais le
gouvernement n’a aucune proposition à vous soumettre en cette circonstance. Un
de vous a usé de son initiative. Il a déposé depuis trois ans une proposition
qui tranche la question, qui reconnaît pour la passé la légalité des
traitements d’attente et en demande l’abolition pour l’avenir.
Dans cette position, le gouvernement doit attendre
que la chambre mette à l’ordre du jour la proposition faite par M.
d’Hoffschmidt en 1833 et examine s’il lui convient de l’adopter.
Je n’ai pas soutenu la demande d’une allocation de
130,000 fr., parce que je suis convaincu d’avance que la chambre réduira à
50,000 fr. la somme demandée. Je demeure au reste assuré que quand la chambre
pourra aborder cette question, elle la résoudra selon l’équité et le droit.
L’honorable M. d’Hoffschmidt demande si des
pétitions ne me sont pas adressées par les titulaires des traitements
d’attente, pour en réclamer le paiement intégral. On présume, avec raison,
qu’il m’en est arrivé. Mais il y a plus que des pétitions, je dois le dire,
c’(est qu’un procès est intenté au gouvernement de ce chef. Dix ou douze
assignations ont été dirigées contre l’administration du trésor pour obtenir le
paiement intégral de ces traitements d’attente. Voilà l’état des choses sous ce
rapport.
Quand la chambre abordera cette question de fois,
elle la tranchera sans doute définitivement. Mais en attendant je suis persuadé
qu’elle allouera au moins, comme les années précédentes, une somme de 50,000
fr, destinée, comme vous savez, aux besoins réels de la majeure partie des
titulaires des traitements d’attente.
M. Dumortier. -
Je pense, malgré ce qu’a dit l’honorable M. d’Hoffschmidt, que les titulaires des
traitements d’attente n’ont aucune espèce de droits aux pensions de ce genre,
pas plus ceux de la troisième catégorie que ceux des autres catégories. En
effet, ces prétendus droits ne reposent sur aucune espèce de disposition
législative. Tout à l’heure je ferai voir que l’art. 17 n’établit pas plus un
droit que toutes les autres dispositions de l’arrêté dont parle M.
d’Hoffschmidt.
D’abord, messieurs, vous savez que les traitements
d’attente se composent de trois catégories. Les watchgeld,
traitement de non-activité qui avait été accordé à d’anciens fonctionnaires
publics qui n’avaient pas droit à la pension, mais auxquels le gouvernement
hollandais jugeait à propos d’accorder un subside pour les aider à vivre. Cette
catégorie s’élevait à 27 mille florins. Viennent ensuite les secours annuels, jaarlyksch onderstand, qui
forment la seconde catégorie. Ce sont les pensions que l’honorable M.
d’Hoffschmidt regarde comme devant être allouées. Elles ont été accordées pour
services de toute espèce et s’élèvent à 3,600 florins pour 17 personnes.
La troisième catégorie, les toelage,
sont des suppléments de traitement qui s’accordaient à des personnes qui
avaient subi une réduction de traitement par suite d’une mesure générale prise
par le gouvernement. Ce supplément de traitement était accordé aux titulaires
pendant la durée de leurs fonctions. La somme de ces suppléments de traitements
s’élevait à plus de 31 mille florins.
Quant aux titulaires de traitement d’attente de
cette dernière catégorie, il est incontestable qu’ils n’ont aucune espèce de
droit acquis. Quand le gouvernement hollandais a créé la banque caissier de
l’Etat, par le contrat passé avec la banque, tous les anciens receveurs
généraux et particuliers sont devenus agents de la banque, qui a dû leur donner
un traitement stipulé par le contrat. Le gouvernement hollandais leur payait un
supplément pour compléter leur ancien traitement.
Nous ne sommes pas tenus de continuer le paiement
de ces suppléments de traitements. Nous ne sommes pas débiteurs envers la
banque, nous n’avons pas à donner des suppléments de traitement à ses employés.
Si les agents de la banque auxquels des suppléments de traitement ont été
accordés ont droit à une pension par suite de la suppression de leurs
fonctions, que leur pension soit liquidée, mais qu’on ne vienne pas demander un
crédit pour compléter l’inégalité de leur ancien traitement. C’est là une
demande qui ne peut pas être justifiée. Sans cela la banque pourrait diminuer
le traitement qu’elle donne aux anciens employés de l’Etat, et l’Etat devrait
augmenter les suppléments au fur et à mesure que la banque diminuerait les
traitements. La banque finirait bientôt par mettre tous les traitements de ses
agents à la charge du budget.
La section centrale qui examine le budget de
l’exercice précèdent n’a reconnu aucune espèce de droit à ceux auxquels des
suppléments de traitement avaient été accordés ; elle a pensé que s’ils avaient
droit à une pension du chef de la suppression de leurs fonctions, ils n’avaient
qu’à réclamer la liquidation de cette pension.
Il est évident que les titulaires de toelagen n’ont
pas plus de droit au supplément qu’on leur a accordé, que si une réduction de
traitement avait été opérée par la législature.
Assurément si vous votiez une réduction sur les
traitements des fonctionnaires d’une administration, ces fonctionnaires ne
seraient pas admis à demander au gouvernement un supplément de traitement
pendant toute l’année. Eh bien, c’est ce qu’on vous demande ici. Si un pareil
système était admis, quand un traitement aurait été affecté à une fonction, la
législature ne pourrait plus le réduire sans devoir payer au titulaire pendant
toute sa vie un supplément qui complète son ancien traitement
Je viens aux traitements de non-activité qui sont
les véritables traitements d’attente. Sur quoi reposent ces traitements de
non-activité ? On dit que c’est sur l’article 17 de l’arrêté-loi du 14
septembre 1815. Voyons ce que porte cet article.
L’arrêté commence par régler les pensions civiles
et la manière dont elles seront accordées, et ensuite à l’article 17, il ajoute
: « Nous nous réservons une exemption à ce qui est statué par le présent
règlement, dans les cas extraordinaires où des services éminents ou d’autres
causes pourront nous engager à donner des marques particulières de notre
bienveillance. »
Il n’y a pas un seul mot qui tende à autoriser le
gouvernement à donner des traitements d’attente ; il en résulte que ceux qui
sont en possession de traitements de cette nature, en vertu de l’art. 17, ne
sont pas fondés à venir en demander le maintien. Cet arrêté du 14 septembre,
comme le dit l’art. 17, était un règlement purement et simplement, et non un
décret, il ne peut pas avoir force de loi.
C’était une mesure provisoire et temporaire, qui ne
confère pas de droits acquis. Le roi Guillaume, en déclarant la mesure
réglementaire, montre que ce n’est pas un droit acquis qu’il veut établir au
profit des possesseurs de wachtgeld.
Quel est le but de cet arrêté ?
« Considérant qu’il
est de la justice du gouvernement de récompenser de longs et fidèles services
et de fournir du soutien à des hommes qui, nés dans les provinces soumises à la
domination du gouvernement actuel de
« Considérant qu’il y a lieu de secourir les
anciens serviteurs de l’Etat dont les services ont été interrompus par les
circonstances, pour qui les années de service antérieur et postérieur, réunies
au temps de l’interruption, complètent le temps prescrit pour pouvoir obtenir
la pension,
« Arrêté, etc. »
Il est donc manifeste que cet arrêté a été fait
dans l’intérêt des citoyens belges qui avaient éprouvé une interruption dans
l’exercice de leurs fonctions pendant le régime impérial ou qui n’avaient pas
pu faire liquider leurs pensions pendant ce régime. Cet arrêté avait donc une
destination spéciale. Il est incontestable que ce n’était qu’un règlement ; les
considérants suffiraient pour le prouver, si l’article 17 ne le disait pas.
Ainsi, ce règlement n’accorde aucune espèce de droit qui puisse être garanti
par le traité du 15 novembre. D’ailleurs, ce traité lui-même n’est pas encore
un traité, et j’espère qu’il ne le sera jamais ; j’espère que
Il est incontestable que le traité ne garantir
aucune espèce de droit à ces traitements d’attente. Je pense donc que nous ne
devons accorder de subside à titre de droit aux porteurs de traitement
d’attente. Qu’on la leur accorde à titre de secours, j’y consens à cause de la
position dans laquelle ils se trouvent ; mais à titre de droit, non, nous ne
devons pas le faire. Nous ne devons reconnaître des droits à des subsides que
quand ils résultent nettement de dispositions législatives.
M.
d'Hoffschmidt, rapporteur. - Quand j’ai dit que je regrettais que le
ministre n’eût pas abordé le fond de la discussion, ce n’est pas un reproche
que j’ai voulu lui adresser. Je savais que plusieurs pétitions lui avaient été
adressées par des porteurs de traitements d’attente pour réclamer les arriérés
de leur traitement et qu’ils allaient assigner le gouvernement. Le ministre
nous a assuré que la chose existait. Maintenant les tribunaux vont être saisis
de la question de légalité ; ils vont décider si les titulaires de ces
traitements ont des droits acquis ou non. Après cette décision, nous verrons
s’il y a lieu ou non de discuter ma proposition. Cependant, j’aurais désiré que
la chambre prît l’initiative pour résoudre cette question qui me paraît assez
claire.
J’ai soutenu, et j’ai cru pouvoir le faire après M.
H. de Brouckere et le ministre de la justice actuel, que les titulaires des
traitements d’attente avaient des droits acquis. Ces honorables membres n’ont
pas pensé que l’arrêté de 1814 ne devait être considéré que comme un règlement.
Et en effet, messieurs, c’est que c’est en vertu de ce même arrêté qu’on
accorde d’autres pensions que vous payez et pour lesquelles vous accordez des
crédits an budget. Si l’argument de l’honorable préopinant était juste vous
devriez rayer toutes les pensions. Car il ne s’appliquerait pas seulement aux
traitements d’attente, mais aussi aux autres pensions.
Je bornerai là mes observations.
M.
Jullien. - Je prends la parole, mais ce n’est pas pour parler sur le
fond ; je ne veux faire qu’une simple observation.
Dans le temps, j’ai considéré les traitements
d’attente comme une dette, c’est toujours mon opinion ; mais ce n’est pas le
moment d’aborder cette question : la chambre est saisie d’un projet de loi sur
cette matière, il faut en attendre la discussion ; ce que nous ferions
aujourd’hui serait décider la question par anticipation, et c’est, je crois, ce
que la chambre n’entend pas faire. Je pense qu’il y a lieu de passer à l’ordre
du jour ; en attendant que la question soit décidée, la chambre fera bien de
suivre ses antécédents en accordant une somme pour les plus nécessiteux.
M. A. Rodenbach.
- Je suis de l’avis de l’honorable député de Tournay, je pense que ce n’est
qu’à titre de secours pour les plus nécessiteux que nous devons accorder un
subside. (Aux voix ! aux voix !)
M. le président. -
M. le ministre a demandé 130,000 fr. A la section centrale on a proposé 50,000
fr. Mais sur cette proposition il y a eu partage, de sorte qu’il n’y a pas
d’amendement.
M. A. Rodenbach.
- Je propose de fixer l’allocation à 50,000 fr., à titre de secours.
Messieurs, de ce qu’on a occupé une fonction, on
n’a pas acquis des droits à une pension. Vous savez d’ailleurs comment la
plupart de ces traitements d’attente ont été donnés, c’étaient des marques de
la bienveillance du roi Guillaume ; il en accordé à ceux qui s’étaient opposés
au pétitionnement. Et nous irions maintenir des pensions à ceux qui ont voulu
empêcher le pétitionnement qui a provoqué notre révolution !
L’argument qui tend à faire regarder ces
traitements d’attente comme des dettes sacrées me paraît absurde. C’est comme
si on prétendait que nous devions accorder des wachtgeld
ou des toelagen aux employés du cadastre. Nous nous montrerons très généreux en
accordait 50,000 fr., en attendant qu’une loi intervienne sur la matière. Il y
a des personnes qui jouissent de 12 et
Je vous demande s’il est juste de donner des
pensions à des personnes jouissant de pareils revenus, pour avoir exercé
pendant 5 ou 6 ans des fonctions publiques.
M. Dumortier. -
Je voulais faire la même proposition que l’honorable M. A. Rodenbach.
L’honorable M. d’Hoffschmidt vient de dire que,
dans son opinion, les titulaires de traitements d’attente avaient des droits
acquis.
Je vous avoue que je crois qu’il serait difficile
de se mettre plus manifestement en contradiction avec soi-même, que vient de le
faire cet honorable membre. Car c’est lui qui a proposé une loi tendant à ce
qu’on ne paie plus de traitement d’attente. Si les droits des titulaires de ces
traitements sont aussi manifestes que vous le dites, il ne fallait pas proposer
de ne plus rien payer du tout.
M.
d'Hoffschmidt, rapporteur. - L’honorable préopinant vient de chercher à
prouver que j’étais en contradiction avec moi-même, parce que d’un côté je
faisais la proposition d’abolir les traitements d’attente et que de l’autre je
demandais que les intérêts fussent payés aux titulaires de ces traitements.
Voici mon système. Je dis qu’en vertu d’une loi les
titulaires avaient des droits acquis, mais j’ai ajouté que la nation ne devait
pas payer davantage ces traitements que je regarde comme une véritable
dilapidation des deniers publics. C’est pour cela que j’ai fait la proposition
de ne plus les payer.
Mon observation a moins pour but de répondre à
l’honorable préopinant que d’empêcher son accusation de se renouveler.
J’ajouterai que si je voulais prendre la parole
chaque fois que l’honorable membre est en contradiction avec lui-même, nous
n’en finirions pas.
Comme je n’ai pas intérêt à retarder la discussion
de la loi communale, je borne là mes observations.
M.
Jullien. - Nous avons gagné quelque chose en ce que la question se
trouve réduite à la quotité du chiffre. Le gouvernement a demandé 130 mille
francs, et MM. A. Rodenbach et Dumortier proposent de réduire l’allocation à 50
mille francs. Il est sensible pour ceux qui soutiennent que les titulaires des
traitements d’attente n’ont aucun droit, que 50 mille francs c’est déjà
beaucoup ; même trop, si ceux à qui vous accordez ce subside n’ont pas de droit
du tout. Pour moi, je ne sais pas ce que c’est que des pensionnaires auxquels
on accorderait des subsides auxquels ils n’auraient pas droit. Il y aurait la
une véritable contradiction.
Si j’accorde un subside par mesure provisoire,
c’est que je soutiens et que j’ai toujours soutenu que les titulaires les
traitements d’attente devaient être considérés cousine ayant des droits acquis.
Maintenant, qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas dilapidation, cela m’est égal.
Eu tait de droits acquis il n’y a rien à
retrancher. C’est une obligation ou ce n’en est pas une. Si c’est une
obligation, il faut la payer intégralement. Si ce n’en est pas une, vous avez
un moyen de vous soustraire à cette charge en faisant la révision des pensions.
Maintenant que la question se trouve réduite à la
fixation de la quotité du chiffre, je désirerais savoir de M. le ministre des
finances dans quelle proportion se trouve la somme qu’il réclame avec les
traitements à payer.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - C’est la totalité que je demande.
M. Jullien. - Je
voterai pour la totalité.
M. Dubus. - Je
demande la parole parce que l’honorable préopinant vient de motiver son vote
sur ce que les titulaires des traitements d’attente avaient des droits acquis,
et d’ajouter que le résultat d’une allocation de 50,00 fr. pour cet objet
serait de reconnaître ces droits acquis.
Je suis disposé à allouer les 50 mille fr., mais je
ne pense pas pour cela que ceux à qui le roi déchu a accordé des traitements
d’attente aient des droits acquis. On a invoqué l’arrêté de 1814, mais on n’a
pas fait attention que cet arrêté renfermait deux espèces de dispositions, les
unes qui fixent les cas dans lesquels des pensions pourront être accordées, et
la manière dont elles seront accordées, et une autre par laquelle le chef du
gouvernement se réserve le droit de disposer des deniers publics, selon son bon
plaisir. Ces dispositions sont d’un ordre différent. Celles par lesquelles on
fixe les cas dans lesquels des pensions pourront être accordées peuvent être
considérées comme ayant force de loi, Mais.l’autre,
celle par laquelle le chef du gouvernement se réservait le droit de disposer
des deniers publics selon son bon plaisir, est tombée devant la constitution
même de 1815.
Cela est si vrai, que si les états généraux avaient
refusé les fonds pour les traitements d’attente, ou ne les aurait pas payés. Eh
bien, qu’avez-vous fait ? Usant de votre droit, vous avez refusé les fonds pour
le paiement de ces traitements ; tout droit s’est évanoui. Seulement, vous avez
accordé 50 mille francs à répartir entre les plus nécessiteux des titulaires de
ces traitements. Ceux entre qui ces 50 mille francs ont été répartis, ont
acquis des droits comme nécessiteux à la somme que vous avez accordée. Mais
comme vous avez refusé le surplus du crédit, il me paraît manifeste qu’il
n’existe aucun droit. On n’a pas pu user, sous l’empire d’une constitution, du
droit de disposer des deniers publics, suivant le bon plaisir du chef
constitutionnel.
Les traitements
d’attente dont il s’agit ont été accordés sous l’empire de la constitution de
1815. Cela ne constitue aucun droit. Cela constitue si peu un droit que le chef
de l’Etat pouvait révoquer ces traitements quand il le voulait. C’est ce qui a
été reconnu de tout le monde.
Or, je demande comment vous pouvez voir un droit
acquis là où il y a une distribution des deniers publics faite suivant son bon
plaisir et qu’on peut faire cesser quand on veut ? Vous avez refusé
l’allocation, pour le paiement de ces traitements ; est-ce que cela n’emporte
pas plus que la révocation que le roi Guillaume aurait pu faire ? Il résulte de
nos votes qu’il n’y pas de droits acquis aux titulaires des traitements
d’attente. C’est dans ce sens que je voterai. S’il pouvait résulter de notre
vote un droit, je rejetterais tout ce crédit.
Ce que nous avons voté pour les exercices
antérieurs doit suffire ; le nombre des titulaires a dû diminuer, il a dû y
avoir des extinctions, et il ne doit pas y avoir un plus grand nombre de
personnes, parmi ces titulaires, dans une situation à avoir besoin de secours
qu’il n’y en avait en 1830. Par tous ces motifs, je voterai pour l’allocation
de 50 mille francs.
M. Fallon. - Comme
on a anticipé sur une question importance que nous ne sommes pas appelés à
résoudre en ce moment, je crois devoir motiver mon vote. Je voterai pour le
subside de 50 mille francs, mais je déclare que je proteste contre la doctrine
de ceux qui prétendent que les titulaires des traitements d’attente ont des
droits acquis.
M. Gendebien. -
C’est pour la quatrième fois que cette discussion se renouvelle. Je persiste dans
l’opinion que j’ai émise dans les discussions précédentes, je reste convaincu
qu’il n’y a aucun droit acquis de la part de ceux qui ont obtenu des wachtgeld du roi Guillaume ; j’accorderai le crédit de 50
mille francs pour ne pas rendre leur position plus fâcheuse. Je me borne à
motiver mon vote. Je ne veux pas recommencer la discussion.
M.
le président. - Je vais mettre aux voix les diverses propositions.
D’abord, sur les pétitions dont le rapport a été
fait.
La section centrale propose le renvoi au ministre
des finances.
M. le ministre des finances demande le dépôt au
bureau des renseignements.
M. Dumortier demande le dépôt de l’une des
pétitions et le renvoi de l’autre au ministre des finances.
M. Dumortier. -
D’après les explications données par M. le ministre des finances, je me rallie
à sa proposition.
- Le renvoi n’est pas adopté et le dépôt au bureau
des renseignements est ordonné.
M. le président. -
Je vais mettre le chiffre aux voix en commençant par le plus élevé.
- Le chiffre de 130,000 francs est mis aux voix. Il
n’est pas adopté.
Le chiffre de 50,000 fr. est adopté.
Articles
4 et 5
M. le président. -
Les art. 4 et 5 étant relatifs au même objet, je vais
les réunir pour ouvrir la discussion sur ces deux articles en même temps.
« Art. 4. Subvention à la caisse des retraites
: fr. 200,000. »
« Art. 5. Crédit supplémentaire remboursable
sur les fonds de la caisse de retraite des employés des finances retenus en
Hollande : fr. 180,000. »
La section centrale alloue la somme de 200,000 fr
et propose d’ajourner l’allocation supplémentaire de 180,000 fr., jusqu’à ce
que M. le ministre ait rendu compte à la chambre du rapport qui doit être fait
par la commission chargée de la révision des pensions.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - La section centrale a émis le vœu que le
gouvernement déposât le rapport de la commission instituée pour l’examen et la
révision de la liste des pensionnaires de la caisse des retraites. Ce travail
était assez avancé il y a trois mois, mais l’un des membres de cette commission
qui s’en occupait particulièrement, qui était en quelque sorte l’un des deux
rapporteurs de la commission, est tombé dangereusement malade, c’est
l’honorable M. H. de Brouckere, et le travail s’est considérablement ralenti.
Un autre membre, M. Donny, qui était également chargé d’une partie importante
de ce travail, est également tombé malade depuis un mois à peu près qu’il
n’assiste plus à nos séances.
Le rapport de cette commission ne peut donc être
présenté à la chambre, et j’ignore même l’époque où il pourra être déposé. Nul
doute qu’il s’écoulera un laps de temps assez long d’ici-là, et avant que je
puisse, en conséquence des conclusions de la commission, proposer au Roi les
modifications aux pensions de la caisse de retraite, qui seraient reconnues
n’avoir pas été liquidées avec exactitude.
Je pense,
messieurs, qu’il est utile de dire quelques mots sur les pensions de la caisse
de retraite, considérées d’une manière générale, et si vous voulez me prêter
quelque attention sur ce sujet, vous n’hésiterez pas, je crois, à allouer la
somme de 380,000 francs que je demande.
Dans la rapport de la section centrale, on a mis en
doute les droits qu’auraient les employés de l’administration des finances à
obtenir des pensions, ainsi que cela a lieu pour les employés des autres
administrations.
A cet égard, je crois cependant qu’il ne peut y
avoir aucune espèce de doute, car dans la loi originaire des rémunérations de
l’Etat, la loi institutive des pensions, celle du 22
août 1790 qui pose le principe, vous trouvez que le législateur veut que la
nation récompense les services que lui sont rendus, ou qui sont rendus au corps
social par les fonctionnaires publics. Cette loi ne comporte aucune exclusion,
et elle comprend par conséquent les employés des finances, puisqu’ils rendent
évidemment, dans la sphère de leurs attributions, des services très utiles au
pays : ils consacrent, comme les autres fonctionnaires, leur vie à servir la
patrie ; et ils ont des droits acquis à la pension tout comme les autres
fonctionnaires.
Si dans la loi institutive
des pensions on n’indique pas explicitement que les employés du département des
finances auront des pensions, on ne les en exclut pas non plus. Mais cette loi
de 1790, qui était la règle pendant la réunion de
Et à propos de cette disposition de la loi
d’organisation judiciaire, je dirai que si j’avais besoin de trouver une preuve
de l’existence de l’arrêté-loi de 1814, je la puiserais dans l’abrogation de
l’article spécial que je viens de rappeler ; abrogation qui confirme tacitement
la force obligatoire des autres articles.
Je dis donc que la législation existante jusqu’en
1814 admettait aux pensions les employés des finances, comme les employés des
autres départements ; et ceci paraît à l’abri de toute espèce d’objection. Mais
l’arrêté-loi ne laisse plus aucun doute à cet égard, car il y est fait mention
des remises des receveurs et autres comptables, et chacun sait que ceci ne peut
concerner que les agents des finances.
L’institution de la caisse de retraite a imposé des
privations à ces employés ; elle les soumet à des retenues sur leurs
traitements ; pourrait-on prétendre que cette position onéreuse ne leur donne
pas droit à une pension de la part du gouvernement ? Ce serait vainement que l’on
viendrait soutenir une pareille thèse. La caisse de retraite a été instituée
pour améliorer le sort des employés des finances et grossir la pension à
laquelle ils ont droit comme les autres fonctionnaires publics en vertu de
l’arrêté-loi de 1814 ; cette caisse de plus a été formée pour assurer aux
veuves et aux orphelins de ceux qui y ont contribué, des moyens d’existence
après le décès de leur mari ou de leur père.
Ceci posé, je vais examiner ce qui serait arrivé si
nous n’avions pas eu la caisse de retraite, établie le 29 mai 1822. J’ai fait
faire un travail à cet égard, et il satisfera, je pense, l’assemblée. Il
présente la liquidation générale de toutes les pensions accordées depuis la
révolution aux fonctionnaires du département des finances d’après les règles
fixées et suivant les bases établies par l’arrêté-loi de 1814.
J’ai trouvé dans ce travail, que je donne pour très
exact, que depuis la révolution il a été compté pour la pension 5,835 années de
service rendu dans le département des finances, et, en outre de cela, 603
années de service étranger aux finances, et qui avaient presque toutes été
consacrées à des services militaires ou à des services dans diverses
administrations.
Si les années de service des finances et autres
avaient été rémunérées conformément à l’arrêté-loi de 1814, elles auraient
coûté au trésor 256,655 fr., tandis que suivant le règlement de la caisse de
retraite, fait pour améliorer les pensions des fonctionnaires de
l’administration des finances, la liquidation de leurs pensions s’est élevée à
314,273 fr., c’est-à-dire à 57,618 francs de plus que si la caisse de retraite
n’avait pas existé.
Je n’ai pu faire opérer le même travail sur les
pensions obtenues avant la révolution, parce que je n’avais pas les pièces
nécessaires ; mais, procédant du connu à l’inconnu et admettant que les choses
s’étaient à peu près passées sous ce rapport de la même manière avant ou après
la révolution, j’ai trouvé, par une simple règle de proportion, que les
pensions antérieures à la révolution que le trésor aurait à payer s’il
n’existait pas de caisse de retraite, s’élèveraient à la somme de 231,042 fr. ;
de telle sorte que si toutes les pensions du département des finances,
anciennes et nouvelles, eussent été liquidées sans qu’il eût été opéré des retenues
sur les appointements pour la caisse de retraite, c’est-à-dire selon
l’arrêté-loi de 1814, le trésor aurait incontestablement à sa charge une somme
de 487,695 fr. : d’où résulte qu’il y a une augmentation, par le fait de la
caisse des retraites pour les deux catégories de pensions, de 107,241 fr., à
laquelle augmentation il faut ajouter celle résultant des pensions attribuées
aux veuves et orphelins, et qui s’élève à 250 mille 419 fr. ; la somme à
supporter par la caisse de retraite serait donc en bonne équité de 357,660 fr.
sur le chiffre total des pensions montant à 845,355 fr.
Or la caisse des retraites a des revenus et des
remises qui s’élèvent ensemble à 434,603 fr. Elle ne devrait à la rigueur
intervenir que pour 357,660 fr. puisque c’est là la somme qui excède le taux
des pensions qui eussent été accordées par la loi de 1814 ; elle paie donc
réellement à la décharge du trésor 76,943 fr. Je donnerai au Moniteur ces résultats des tableaux que
j’ai fait dresser, et vous verrez que la caisse de retraite, loin d’être
onéreuse au trésor, le décharge en effet de la somme de 76,943 fr. Ainsi toutes
les fois que l’on s’est récrié contre la caisse des retraites, on a eu tort ;
et si l’on avait connu les chiffres que je cite, on aurait vu que les attaques
n’étaient pas fondées.
Dans les discussions analogues des sessions
précédentes, on s’est élevé contre l’énormité des pensions ; on a dit qu’il y
en avait de portées à un taux scandaleux : pour m’éclairer et pour vous
produire ensuite les renseignements recueillis, j’en ai fait dresser un tableau
dont je viens déjà de présenter quelques résultats. Ces tableaux vous feront
voir que l’exagération dans les pensions n’est pas telle qu’on a voulu le
prétendre.
Les indications que je vais donner s’appliqueront à
trois catégories différentes. La première concernera les pensions accordées
antérieurement à la révolution ; la deuxième, les pensions accordées depuis la
révolution jusqu’à mon entrée au ministère, et la troisième les pensions
accordées depuis le 4 août 1834.
M. Desmet. - Ainsi,
il y a augmentation.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Ne tirez encore aucune conclusion de ce fait ;
attendez, et vous verrez qu’il n’y a pas d’abus.
M. A. Rodenbach. - Les augmentations sont
des abus.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je n’argumenterai pas sur les pensions des
veuves et des orphelins, parce que le montant de celles-là restera, sans doute,
à l’abri de toute critique ; il y en a 157.
Je dois une explication sur les pensions accordées
depuis le 4 août 1834, avant d’aborder les chiffres. Beaucoup des pensionnaires
de cette catégorie avaient été admis à la retraite par des arrêtés antérieurs à
mon entrée à l’administration ; quoiqu’ayant été liquidées postérieurement à
cette époque, elles doivent être comprises dans le nombre de celles qui ont été
accordées depuis 1830 jusqu’au 4 août 1834 ; car c’est l’admission à la
retraite qui donne ouverture à la pension ; c’est à l’époque de cette date
qu’il faut rapporter les arguments que l’on fait contre le nombre des pensions
accordées.
Ceci posé, voici ce que je trouve dans le tableau :
(Note du
webmaster : le Moniteur reprend un tableau très détaillé du nombre des pensions
accordées en raison, notamment, du taux. Parmi les éléments intéressants à
constater, on peut mentionner que le nombre de pensions accordées par la caisse
(hors les pensions nouvelles accordées depuis 1834) est de 1332, dont 6
au-dessus de 6,000 fr. ; 6 entre 5,000 et 6,000 fr. ; 9 de 4,000 à 5,000 fr. A
l’inverse, 323 en-dessous de 200 fr. ; 294 de 200 à 300 fr. ; 205 entre 300 et
400 fr., etc. Quant aux pensions
accordées depuis le 4 août 1834, leur nombre est de 111 : seules deux pensions
supérieures à 3,000 francs font partie de ce nombre.)
Vous trouverez peut-être qu’il y a eu beaucoup de
pensions accordées depuis mon entrée à l’administration. Mais il n’est pas
loisible au département des finances d’échapper à la collation d’une pension
qui incombe aux veuves et aux orphelins. Lorsque le père n’existe plus, les
enfants ont droit à une pension sur la caisse de retraite, lorsqu’un employé
laisse une veuve, il faut liquider la pension de cette veuve. Si le nombre
total de 111 peut paraître élevé, il ne l’est pas partiellement du côté
attaquable, car il n’y a que 47 pensions d’employés.
Depuis 1830, il a été accordé 5 pensions qui
dépassent 6,000 fr. mais n’allez pas croire que l’excédant des 6,000 francs
soit énorme ; vous seriez dans l’erreur.
Les cinq pensions les plus élevées accordées depuis
la révolution ne dépassent ensemble que de 11,460 francs le taux auquel elles
auraient dû rester si elles avaient été liquidées à leur maximum ; sont-ce là
les pensions exorbitantes contre lesquelles on s’est récrié dans cette enceinte
?
Messieurs, j’ai dit tout à l’heure qu’il ne fallait
pas se prononcer trop tôt sur l’élévation du chiffre des pensions accordées
depuis 1830 jusqu’à mon entrée au ministère, et qu’il ne fallait pas trouver
trop haut le taux de ces pensions.
Maintes fois, à d’autres époques, on a reproché au
département des finances de conserver dans les fonctions administratives des
hommes qui déplaisaient à l’opinion publique, des hommes que l’on prétendait
avoir des idées de retour pour une dynastie déchue : eh, messieurs, le
département des finances, placé en présence des avis qu’on lui donnait, et
n’ayant aucun fait positif, n’ayant que des soupçons qui ne se fondaient sur
aucun acte patent, et cependant devant satisfaire l’opinion publique sans être
toutefois injuste ; le département des finances a été forcé par les
circonstances politiques du moment de mettre à la pension plusieurs
fonctionnaires, et surtout plusieurs hauts fonctionnaires, lesquels n’y eussent
été admis que plusieurs années après. Sous ce rapport donc il y a eu nécessité
de la part de ce département d’agir comme il l’a fait.
Vous n’oublierez pas que vous avez fait
successivement des réductions immenses dans l’administration des finances ; et
je rappellerai à la chambre, que tout d’un coup, sur une proposition faite, il
y a 3 ans, vous avez sapé 30,000 francs ; que vouliez-vous que fît le ministre
d’hommes qui n’avaient plus de traitement ?
Il eût été souverainement injuste de frapper des
fonctionnaires qui avaient rendu de longs services au pays, de les exclure de
l’administration ; vous vous seriez récriés vous-mêmes, messieurs, contre cette
mesure, et le ministre des finances a été forcé d’admettre à la pension
plusieurs des fonctionnaires supérieurs de l’administration centrale. Ces
pensions figurent dans le tableau que je viens d’indiquer.
Depuis la révolution il a été alloué 525 pensions ;
avant il en a été alloué 918. Ici j’irai au-devant d’une objection qui ne
manquera pas d’être faite.
Les pensions antérieures à la révolution, au nombre
de 918, ne montent qu’à 418,671 fr., tandis que les pensions postérieures à la
révolution, au nombre de 525 seulement, montent à 424,356 fr. Il semblerait
qu’on a été plus généreux depuis la révolution qu’auparavant. Mais je vais
démontrer que la force des choses a dû amener un tel résultat, sans qu’il y ait
eu pour cela largesse.
Les pensions antérieures à la révolution
comprennent une durée de 15 années. Pendant ce temps, beaucoup de pensionnaires
sont décédés. Mais ils sont décédés, en laissant des orphelins ou des veuves,
et dès lors le chiffre de la pension s’est trouvé réduit, parce que les veuves
et les orphelins ne reçoivent que les deux tiers de la pension. Et il en est
résulté, en outre, que le nombre des pensionnés s’est accru : il n’y avait
qu’un individu pensionné ; en mourant, il y a 4 ou 5 orphelins qui le sont
devenus à sa place. Ainsi, un plus grand nombre de parts a été substitué pour
prendre un chiffre moins fort. Voilà ce que l’intervalle de quinze années a
amené très fréquemment.
Les pensions postérieures à
la révolution ont été données pendant une durée de cinq années ; les
extinctions ont été moindres ; proportionnellement elles ont dû être du tiers :
de sorte qu’il y a eu beaucoup moins de réversions de pensions ; et dès lors le
chiffre de ces pensions a dû être plus fort, quoique comparativement le nombre
des pensions fût plus petit.
Voilà comment s’expliquent des chiffres qui au
premier abord peuvent plaider contre l’administration qui les donne. Cependant,
en examinant de près et en ne dégageant pas les actes de l’administration des
considérations dont il faut équitablement et raisonnablement les entourer, on
voit, je le répète, que la force des choses a dû amener ce résultat.
Je pense qu’il résulte des différentes observations
que je viens de soumettre à la chambre, premièrement que si le rapport de la
commission n’a pas été terminé, c’est par des causes que nous n’avons pu
prévoir et qui ne doivent pas retarder le paiement des pensions ; deuxièmement,
que la subvention que nous demandons est loin d’être onéreuse au trésor,
puisque la caisse des retraites paie 76,000 fr. que le trésor aurait dû payer
de plus, si elle n’avait pas existé.
M. Dumortier. -
Je ne m’attendais pas à prendre la parole, parce que je pensais que M. le
ministre des finances se serait rallié à la proposition d’ajournement faite par
la section centrale. Mais puisque M. le ministre des finances insiste, je crois
de mon devoir de contester quelques-unes des assertions qu’il a émises.
D’abord il présente les employés du ministère des
finances comme ayant des droits â la pension résultant de l’arrêté du roi
Guillaume dont nous avons parlé tout à l’heure, le règlement de septembre 1814.
Cette prétention (car ce n’en est qu’une) a déjà été soutenue dans cette
assemblée ; mais la chambre en a fait justice, et en cela elle a fort bien
fait.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Jamais !
M. Dumortier. - Tous
les orateurs se sont élevés contre cette prétention ; et la chambre n’a jamais
reconnu de pareils droits ; car, si elle les avait reconnus, elle n’aurait pas
accordé de subventions, elle aurait payé l’intégralité. La chambre a donc fait
justice de cette prétention ; et, en effet, sur quoi repose-t-elle ? Sur le
vote que vous avez émis dans la loi d’organisation judiciaire. M. le ministre
des finances a dit que s’il fallait une preuve relativement à l’arrêté de
septembre 1814, on la trouverait dans la loi d’organisation judiciaire. Eh
bien, loin d’établir une preuve en faveur de l’argumentation de M. le ministre
des finances, cette loi prouve, au contraire, qu’il n’a pu être accordé de
pensions en vertu du règlement de septembre 1814. Ce règlement a été considéré
depuis la révolution comme n’ayant plus aucune force légale ; il a fallu une
disposition spéciale de la loi pour lui rendre force légale, et cette
disposition a été insérée dans la loi d’organisation judiciaire. Relisez cette
loi, vous verrez qu’elle rend force légale à cet arrêté, moins l’art. 17 dont
on avait abusé sous le gouvernement précédent. Tout en rendant force légale à
l’arrêté de septembre, elle a décidé que l’art. 17 ne serait pas remis en
vigueur.
Ainsi cette disposition prouve que, depuis la
révolution, on n’avait pu accorder aucune pension en vertu de cet arrêté. Cela
est si vrai qu’en fait, avant la disposition insérée dans la loi d’organisation
judiciaire, il n’a été accordé aucune pension en vertu du règlement de 1814. Il
a fallu que la législature intervînt, qu’une disposition législative fût prise
pour qu’une seule pension fût accordée en vertu de cette disposition.
Ainsi les fonctionnaires de l’administration des
finances, depuis la révolution jusqu’à ce jour, n’ont aucun droit à la pension
de retraite en vertu du règlement de 1814. Les fonctionnaires des autres
services publics ont-ils plus de droit ? Non, sans doute ; car même sous le roi
Guillaume, un arrêté fut pris pour régler les pensions militaires, et un autre
arrêté pour les pensions des fonctionnaires des finances dans le service des
douanes. Et c’est ce même arrête relatif aux employés du service des douanes
qui a été ensuite étendu aux employés de toutes les branches du département des
finances.
Ainsi il est évident que même sous le roi Guillaume
les fonctionnaires publics de l’ordre financier n’avaient aucun droit du chef
de l’arrêté qui nous occupe, et que des dispositions spéciales consacraient
leurs droits à la pension de retraite.
Vous savez d’ailleurs qu’en 1824 une disposition
générale du roi Guillaume a été prise relativement aux pensions de retraite du
ministère des finances.
Je trouve d’autant plus singulier que M. le
ministre des finances veuille faire résulter du règlement de 1814 un droit pour
les employés de son ministère, que cet arrêté n’admet pas de pensions dépassant
le chiffre de 6,000 francs. Or, vous avez accordé des pensions de plus de 6,000
francs. Vous avez donc violé l’arrêté de 1814. Il vous est impossible de mettre
d’accord, de faire marcher de pair ces deux argumentations.
De deux choses l’une : ou votre argument donne une
force légale aux pensions accordées en vertu de la loi de 1814, et alors les
pensions accordées à des veuves et à des orphelins qui dépassent le taux de
6,000 fr., ont été illégalement conférées. Ou vous avez eu raison d’augmenter
le chiffre de ces pensions, et alors vous ayez tort de vous prévaloir de cet
arrêté-loi. Il vous est impossible de sortir de ce dilemme. Il n’y a pas de
droit contre le droit ; si le droit résulte de l’arrêté de 1814, vous ne pouvez
dépasser les limites fixées par cet arrêté. Si c’est en vertu de la loi qui a
institué la caisse des retraites que vous avez conféré les pensions, vous ne
pouvez invoquer les dispositions d’une loi antérieure qui sera en contradiction
avec celle-là. Les lois ne peuvent se prêter â une pareille élasticité.
J’ai saisi, fort à la hâte, les chiffres donnés par
M. le ministre des finances Je loue fort sa sollicitude pour les employés de
son département. C’en une sollicitude toute naturelle, et véritablement
paternelle. Mai, quelque estime que je professe pour M. le ministre des
finances, je ne trouve pas moins des abus dans la collation des pensions du
département des finances depuis la révolution.
M. le ministre des finances nous a présenté un
tableau qu’il a divisé en trois catégories. Il aurait pu s’en tenir à deux
catégories seulement, comme je vais le prouver.
Les pensions accordées aux employés du ministère
des finances avant la révolution, s’élèvent à 918 et présentent un chiffre de
418,000 fr. Veuillez remarquer ces deux chiffres, messieurs.
Depuis la révolution le nombre des pensions
conférées dans le même département s’élève à 525 et présente un chiffre total
de 424,000 fr.
Que résulte-t-il de la simple énonciation des deux
premiers chiffres comparés aux deux seconds ? Le chiffre des pensions accordées
après la révolution est à peu près le même, est même un peu plus élevé que
celui des pensions accordées avant la révolution. Ainsi nous avons eu en cinq
ans une somme de pensions beaucoup plus forte que pendant les 15 années qu’a
duré le règne du roi Guillaume. Que résulte-t-il encore de ce tableau ? C’est
que 918 pensions représentent sous le roi Guillaume le chiffre des 525 pensions
accordées depuis la révolution. Sous le roi Guillaume l’on avait accordé à peu
près le double de pensions pour la même somme.
Le terme moyen des pensions accordées depuis la
révolution est le double du terme moyen de celles accordées avant cette époque.
Voilà une première réflexion que je vous abandonne.
Je vous demande si cette première comparaison ne commence pas par établir qu’il
a dû exister des abus. Le terme moyen, résultant d’une disposition législative
qui n’a pas changé doit être le même, et quand il diffère dans l’application de
cette disposition, c’est qu’il y a eu abus.
Si nous suivons les chiffres fournis par M. le
ministre, nous voyons qu’avant la révolution il a été accordé 609 pensions au
taux de 500 francs et au-dessous, tandis que depuis l’époque de la révolution
jusqu’à l’arrivée de M. le ministre des finances actuel, il n’a été accordé que
121 pensions du chiffre de 500 fr. et au-dessous. Ce nombre est augmenté, si je
bien compris, de 22 pensions de cette catégorie depuis son arrivée.
Ainsi, avant la révolution, les petites pensions se
sont élevées au nombre de 609 ; depuis la révolution, à 143 seulement. Vous
voyez, d’après ce relevé, que sous le roi Guillaume on accordait dans le
département des finances beaucoup de petites pensions, tandis que depuis la révolution
on accorde beaucoup de grosses pensions.
Nous voyons qu’il y a :
30 pensions de 700 à 1,000 fr.
21 pensions de 1,500 à 2,000
14 pensions de 2,000 à 3,000
7 pensions de 3,000 à 4,000
6 pensions de 4,000 à 5,000
7 pensions de 5,000 à 6,000
5 pensions de 6,000 et au-dessus.
Il y a une pension qui s’élève à plus de 10,000
francs. C’est à un conservateur des hypothèques que l’on a accordé un chiffre
aussi élevé. Comment M. le ministre des finances peut-il accorder de pareilles
pensions ? M. le ministre répond à cela que la pension a été réglée d après les
émoluments. Je le prierai de remarquer que la pension se calcule sur le
traitement, et que les émoluments ne peuvent en aucun cas servir de base pour
fixer le taux de la pension.
C’est une chose souverainement ridicule que de voir
dans l’administration des finances un simple receveur toucher une pension
triple, quadruple de celle de son supérieur. Un inspecteur ne touchera que 2 à
3,000 francs de pension, tandis qu’un simple receveur en touchera 10,000. C’est
réellement absurde, c’est réellement scandaleux.
En France il y a dans l’ordre financier un maximum
fixé par la loi pour chaque classe de pension.
La pension d’un receveur ne peut être plus élevée
que celle d’un ordre plus élevé.
L’on a voulu que même dans les pensions la
hiérarchie administrative fût conservée. Chez nous au contraire, cette mesure
salutaire n’a pas été appliquée. L’on calcule la pension d’un receveur non
seulement sur ce qui lui revient annuellement, mais sur les sommes éventuelles
qu’il perçoit, et même sur ses frais de bureau. Car les frais de bureau entrent
en compte dans le denier de la recette.
L’on en est arrivé à ce point qu’au moyen de la
base admise, la pension d’un receveur est plus élevée que celle de son
supérieur.
C’est là un véritable abus.
J’ai dit que parmi les neuf cents pensions
accordées sous le roi Guillaume, il s’en trouvait six cents d’un ordre
inférieur, de 500 francs et au-dessous, tandis que parmi les pensions conférées
depuis la révolution ne s’en trouve que cent quarante-trois d’un chiffre
inférieur, Sous le roi Guillaume, on accordait des pensions trop faibles tandis
qu’à présent on accorde des pensions trop fortes. C’et là un abus que nous ne
devons pas tolérer. Je ne puis donner mon assentiment à de pareilles
majorations de crédits.
La chambre a accordé l’année passée, outre le
subside ordinaire à la caisse de retraite, une subvention extraordinaire ; mais
la chambre n’a pas voulu que cela continuât à perpétuité.
Si telle avait été son intention, elle n’aurait pas
fait deux chiffres séparés de ces deux subventions, elle les aurait réunir en
une seule allocation. Le chiffre de 180,000 fr. accordé au budget de l’année
dernière porte le titre de subvention extraordinaire.
Les recommandations données tant de fois dans cette
enceinte au gouvernement pour qu’il fît cesser les abus qu’on signale ont-elles
été écoutées par M. le ministre des finances ?
Non, messieurs ; car naguère encore on a accordé
des pensions de 7, 8, 9 et 10,000 fr. Qui est-ce qui paie ces pensions ? En
définitive c’est le trésor public, puisque l’on demande au budget des dotations
une subvention de 380,000 fr. Comme c’est le trésor public qui est forcé de
payer ces pensions, du moins qu’elles subissent les conditions imposées à
toutes les pensions à charge du trésor, qu’elles ne puissent en aucun cas
dépasser le chiffre de 6,000 fr.
Comment, le président de la cour de cassation, le
premier fonctionnaire de l’ordre judiciaire, le procureur-général de cette
cour, son égal en rang, auront exercé pendant 50 ans ces hautes et honorables
fonctions, et lorsque le grand âge aura déterminé leur retraite, ils n’auront
droit qu’à une pension de 6,000 fr., tandis que nous verrions un simple
receveur des hypothèques toucher une pension de 10,000 fr.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Vous ne tenez pas compte des retenues.
M. Dumortier. -
Les retenues opérées sur les traitements des fonctionnaires de l’ordre financier
ne doivent influer en rien sur le chiffre de leurs pensions. Elles ne servent
qu’à assurer à leurs veuves et à leurs orphelins la réversion de la pension à
laquelle ils ont eu droit.
Je le répète, il est scandaleux de voir qu’un des
premiers fonctionnaires de l’Etat n’ait droit qu’à 6,000 francs de pension,
tandis qu’un simple receveur communal, qui peut être tout aussi recommandable,
j’en conviens, mais qui est un employé d’un ordre inférieur, recevra près du
double de ce chiffre. Cela est un abus réel. Puisque c’est le trésor qui paie
la pension de ces fonctionnaires, qu’ils se soumettent à la loi des pensions à
charge de l’Etat, à la disposition qui veut que dans aucun cas ces pensions ne
puissent dépasser le chiffre de 6,000 fr.
Maintenant, messieurs, je me demande si en droit
nous devons la somme considérable que l’on sollicite au budget en discussion.
Non, messieurs, le trésor n’est pas redevable d’une
pareille somme ; vous savez comme moi que sous le roi Guillaume, en vertu de la
loi qui a institué la caisse de retraite, le syndicat pouvait donner au plus à
cette caisse une somme de 60,000 fl. par an. Cette subvention ne pouvait dans
aucun cas aller au-delà, mais pouvait être inférieure.
Remarquez que cette somme de 60,000 florins était
donnée à la caisse de retraite des Pays-Bas. Ces 60,000 florins étaient donc
alloués pour tout un royaume, dont le nôtre ne compose plus que la moitié.
Supposons un moment que nous soyons liés par cet arrêté du roi Guillaume. Que
devrait
Aujourd’hui on vous demande pour la caisse de
retraite 380,000 fr., c’est-à-dire 320 de plus que ce que vous devriez payer.
D’où vient ce déficit dans la caisse de retraite
dont a parle M. le ministre des finances ? il provient
des abus sans nombre qui se sont passés dans la collation des pensions.
J’ai signalé tout à l’heure ceux qui sont relatifs
à l’augmentation du chiffre des pensions. Il en est d’un autre genre qui sont plus scandaleux encore. Il y a dans l’arrêté-loi de
1824 une disposition très salutaire à mon avis que l’on n’aurait jamais dû
perdre de vue, qui porte que nul n’a droit à la retraite, s’il n’est dans une
incapacité absolue de continuer son service.
Si cette disposition avait été fidèlement observée,
vous ne verriez pas le total des pensions du département des finances monter à
un chiffre aussi élevé, et l’on ne viendrait pas vous demander 380,000 fr. pour
subvention à la caisse de retraite. Qu’a-t-on fait depuis la révolution ? L’on
a accordé des pensions à des fonctionnaires valides ou invalides sans
distinction. La chose en est venue à ce point au département des finances que
quand un employé a accompli le nombre d’années de service qui constitue un
droit à la pension, il se fait délivrer un certificat de maladie, et presque
toujours il obtient une pension qu’il cumule avec un autre traitement.
Vous donc deux budgets des finances ; un budget
pour les personnes qui travaillent et un budget pour celles qui ne travaillent
pas. C’est un véritable abus. Si M. le ministre des finances, dont je connais
les bonnes intentions et la bonne volonté, se faisait présenter toutes les
personnes qui ont obtenu des pensions et disait à chacune d’elles :
« Monsieur, vous êtes valide et capable de travailler, vous rentrerez en
fonction ou vous ne toucherez plus votre pension, » ce moyen amènerait une
économie notable dans le chiffre de 380,000 francs. Beaucoup d’entre les
personnes qui reçoivent aujourd’hui une pension, ne seraient pas fâchées de
reprendre leurs fonctions. Quant à celles qui s’y refuseraient, l’Etat ne leur
doit rien.
Il ne faut pas que les pensions deviennent un droit
acquis après tant d’années de service. Il faut n’accorder de pensions qu’aux
fonctionnaires qui sont dans l’impossibilité de continuer leur service, qui ont
blanchi sous le travail. Si la rigueur que j’aurais voulu voir apporter dans la
collation des pensions avait guidé les ministres, nous n’aurions pas vu les
pensions militaires s’accroître depuis la révolution de 500,000 francs et les
pensions de l’ordre financier exiger une subvention annuelle de 380,000 francs.
Si le gouvernement continue comme il l’a fait jusqu’à ce jour à accorder des
pensions aux personnes valides, il est incontestable que le chiffre des
pensions ira toujours croissant. Alors vous aurez un chancre dans le trésor
public comme cela a existé sous le roi Guillaume.
Je sais que l’on peut répondre qu’à la suite de la
révolution l’on a dû opérer des réformes dans lé département des finances et
que l’on a dû pensionner les fonctionnaires que leurs opinions politiques ou
leur conduire sous l’ancien gouvernement avaient rendus odieux. Le gouvernement
provisoire a bien fait en agissant ainsi. Mais le nombre des pensions qu’il a
fallu accorder de ce chef s’est élevé à un chiffre peu considérable. Puis
beaucoup de ces fonctionnaires se sont singulièrement amendés. Il en est de
très peu que l’on ne puisse remplacer surtout en fixant leur résidence dans des
localités où ils n’ont jamais exercé leurs fonctions. Vous ferez ainsi un acte
à la fois utile à eux-mêmes et au trésor public.
Je maintiens que nous devons nous borner à adopter
la subvention ordinaire telle qu’elle a été votée l’an dernier. Nous mettrons
ainsi le gouvernement dans la nécessité de faire de cet objet le but de ses
méditations.
Sous le ministère actuel, la plupart des pensions
ont atteint un chiffre fort élevé. Une cinquantaine de pensions ont été
conférées depuis que le ministre actuel des finances est aux affaires. Au-delà
de la moitié de ce nombre dépasse 500 fr.
Il y en a 23 qui sont de 500 fr.
6 de 700 à 1,000 fr.
1 de 1,500 à 2,000 fr.
5 de 2,000 à 3,000 fr.
1 de 5,000 à 6,000 fr.
Voilà, messieurs, les
pensions que l’on accorde aujourd’hui. Mais, à voir le taux de ces pensions, on
se demande quels sont les traitements des fonctionnaires du département des
finances dans un pays où un conseiller de cour d’appel n’a que 3,000 francs, un
gouverneur de province que 15,000. Et nous voyons des personnes qui, pour ne
rien faire, touchent 6, 8 et 10 mille francs par an.
Proportionnez donc les pensions aux services rendus
à chacun suivant ses œuvres. Mais n’allez pas accorder des pensions énormes à
ceux qui ne font rien.
L’Etat ne doit que le nécessaire à celui qui a
cessé ses services. Il en est de même des femmes qui se séparent de leurs
maris. Ceux-ci ne leur doivent que du pain, dit le code civil. L’Etat ne doit
que du pain au fonctionnaire qui se sépare de lui. (Hilarité que partage l’orateur lui-même.)
Vous trouverez, comme moi, qu’il y a abus réel dans
la collation des pensions du ministère des finances. C’est un scandale de voir
des personnes qui ne font rien mieux rétribuées que celles qui travaillent. Il
est nécessaire d’apporter une réforme à tout ceci. Je ne voterai que le chiffre
proposé par la section centrale et j’ajournerai tout autre proposition jusqu’à
la révision de la loi des pensions.
Cette révision pourra avoir lieu dans le courant de
l’année, lorsque nous aurons terminé la loi communale et le rapport sur la
banque ; nous pourrons nous occuper de cette loi et la terminer en quelques
séances. C’est alors que nous verrons s’il y a lieu d’augmenter le crédit
actuel. Si cette augmentation est justifiée, nous l’accueillerons. Mais nous
prendrons des mesures pour réprimer les abus du présent comme du passé ; car je
ne suis pas de l’avis de M. le ministre des finances qui veut sanctionner les
abus commis dans la collation des pensions. Il faut porter la hache dans cette
partie des charges du trésor. Donnons à chacun ce qui lui revient légitimement
et pas plus. Soyons justes ; mais n’accordons de faveur à personne.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Quoique d’honorables orateurs aient demandé la
parole, je crois nécessaire de parler avant eux pour répondre à quelques
allégations de l’honorable M. Dumortier, et replacer la discussion sur son
véritable terrain.
Il faut examiner avant tout et résoudre la question
de savoir si les employés des finances sont dans une catégorie de
fonctionnaires toute spéciale, bien qu’ils exercent des fonctions extrêmement
pénibles, souvent fort désagréables, puisque c’est sur eux que repose le soin
de faire rentrer les impôts ; il s’agit de savoir si vous voulez placer ces
employés dans une condition plus défavorable que celle des autres employés. Je
crois que la justice la plus ordinaire ne permettrait pas de le faire. La loi
heureusement vient encore appuyer cette manière de voir.
Je pourrais me borner à citer un article de
l’arrêté-loi de 1814 dont je n’ai pas besoin de défendre davantage la force
obligatoire. En effet, si le gouvernement n’avait pas suivi dans la collation
des pensions les dispositions de cette loi, assurément la législation n’aurait
pas accordé les crédits demandés pour assurer le service de ces pensions, et
certes vous ne l’auriez jamais fait pour des pensions accordées en vertu d’un
arrêté de bon plaisir.
Il me suffirait, dis-je, de citer une disposition
de cet arrêté pour prouver que les employés des finances ont été expressément
compris dans la mesure générale comme les autres employés.
En effet, je vois dans le deuxième paragraphe de
l’article 10 :
« Les remises des receveurs et autres agents
comptables seront considérées comme traitement, mais seulement pour les 2/3 de
ce qu’un pareil employé aura retiré de ce chef pendant le terme moyen des 3
dernières années de son service. »
Assurément cet article auquel j’ai déjà fait
allusion, désigne les employés du département des finances ; car il n’y a
d’agents comptables et de receveurs (dans l’administration générale, s’entend)
ailleurs que dans le ministère.
Je dis donc que l’arrêté-loi de 1814 reste en
vigueur, et qu’il confère un droit à des pensions aux employés du ministère des
finances. Cela est trop évident pour que l’on puisse encore soutenir que ces
employés n’ont aucun titre à être récompensés de leurs services.
Laissons de côté la caisse de retraite qui ne
procure des avantages plus grands aux employés des finances que parce qu’ils
s’imposent annuellement une retenue considérable sur leurs appointements. Si
vous signalez le chiffre élevé de la pension que touche un receveur, faites
attention que cette pension élevée est le résultat d’une retenue très forte
faite sur son traitement ; n’oubliez pas qu’il a remis à la caisse de retraite
chaque année 5 p. c. de ses appointements et que ce sacrifice doit lui valoir
quelque chose. L’institution de la caisse de retraite est une charge que les
employés se sont imposée pour jouir de quelques avantages, mais elle ne peut
détruire les droits primitifs qu’ils ont à la pension. Laissons, dis-je, de
côté la caisse de retraite, et examinons à quoi les employés peuvent prétendre
d’après les lois préexistantes. Que voyons-nous ? C’est que, d’après le chiffre
que j’ai présenté tantôt, l’Etat devrait 487,695 fr., et que demandons-nous ?
Seulement 380,000 fr.
Ainsi, la caisse de retraite, loin d’être une
charge pour le trésor, comme on se plaît à la représenter, vient au contraire
chaque année à sa décharge pour une somme notable, pour une somme de près de
100,000 fr. Du moment que l’on met de côté l’institution de la caisse de
retraite, et que l’on place les employés du département des finances dans la
même situation que les autres employés, l’on voit que le trésor aurait 100,000
fr. de plus à payer.
L’honorable M. Dumortier a tiré quelques
conséquences très inexactes du raisonnement que j’avais présenté. Il s’est
élevé contre les pensions qui dépassent le chiffre de 6,000 fr., prétendant que
dans aucun cas l’on ne pourrait accorder des pensions excédant ce taux. Il y a
là une grande erreur. Je le prierai de vouloir bien remarquer que quand je l’ai
interrompu je voulais lui démontrer son erreur en lui lisant l’article 9 de la
loi de 1814 :
« La pension d’un employé qui a servi 40 ans
et au-delà, peut aller aux deux tiers du traitement dont il a joui pendant le
terme moyen des 3 dernière années de son service. »
Ainsi le
fonctionnaire qui aura joui d’un traitement de 18,000 fr. peut avoir droit à
une pension de 12,000 fr. Il en serait de même pour un fonctionnaire de l’ordre
judiciaire.
Je rappellerai à cette occasion que l’honorable M.
H. de Brouckere qui avait avancé la même allégation que l’honorable M.
Dumortier, a reconnu lui-même son erreur, lorsque je lui citai cet article 9,
et déclara que j’avais interprété cet article comme il devait l’être.
L’honorable M. Dumortier, pour exciter davantage au
rejet de l’allocation demandée, est venu rappeler les pensions militaires. Il a
entamé de nouveau une question qui avait été résolue par le vote de
l’allocation demandée. Je suis charmé qu’il soit revenu sur ce point. Son
insistance me fournira l’occasion de produire à l’assemblée un renseignement
très favorable à l’administration de mon honorable collègue.
Je me suis assuré que, depuis 1833, 1106 pensions
militaires ont été conférées par le département de la guerre ; mais, sur ces
1106 pensions, il y en a 961 qui ont été accordées à des soldats. Lorsque l’on
rappelle le nombre exorbitant des pensions, très souvent on ne se rend pas
compte des éléments de ce nombre. Si on avait su ce que je viens de dire,
certainement on se serait bien gardé de faire un crime au ministre de la guerre
de l’élévation du nombre des pensions. Il y a d’ailleurs un autre fait à
considérer. Si l’accroissement du nombre des pensions militaires paraît
considérable, c’est que, jusqu’en 1833, on n’avait conféré aucune retraite
définitive. Le département de la guerre payait aux soldats atteints de cécité
par suite de l’ophtalmie des traitements provisoires sur les allocations de son
budget. Ces ophtalmistes, au nombre de 961, pour
lesquels tout espoir de recouvrer la vue est entièrement perdu, ont été admis
définitivement à la pension.
Vous voyez ainsi, messieurs, que le nombre total
des pensions militaires accordées aux officiers, n’est que de 145, ce qui
réduit singulièrement l’énormité du chiffre signalée par quelques membres de
cette assemblée.
Il faut avoir des considérations analogues pour les
pensions du département des finances. Beaucoup de fonctionnaires remis en
fonctions ou qui se trouvaient réemployés ont dû être mis à la retraite par
différents motifs inhérents aux circonstances mêmes, motifs qui ne se
renouvelleront plus, attendu que les exigences politiques ne doivent plus se
reproduire.
Messieurs, je reviendrai très brièvement sur la
légalité de la loi de 1814 et sur cette considération que l’institution de la
caisse de retraite ne doit pas préjudicier à la position des employés des
finances, attendu que cette institution leur impose un sacrifice annuel très
considérable.
La preuve que l’institution
de la caisse de retraite n’a pas pu empirer la condition des employés des finances,
c’est qu’avant que cette institution existât, de 1814 à 1822, il a été conféré
des pensions à des fonctionnaires de ce département. Ces pensions ont été mises
à la charge du trésor. Je dirai en passant qu’il n’est pas juste de comparer le
chiffre des pensions accordées depuis la révolution avec celui des pensions
conférées sous le roi Guillaume, comme l’a fait l’honorable M. Dumortier. Le chiffre qu’il a cité
n’embrasse qu’une période de 8 années, depuis 1822 jusqu’en 1830. Dans ce
chiffre ne sont pas comprises les pensions accordées depuis 1814 jusqu’en 1822.
Il résulte de tout ceci que les employés des
finances ont des droits à des pensions à charge du trésor, comme les autres
fonctionnaires de l’Etat, et que la caisse de retraite n’a été instituée que
pour améliorer leur position.
Pour mon compte, je désirerais qu’il fût décidé,
une fois pour toutes, si les fonctionnaires du département des finances doivent
être rangés dans une condition plus défavorable que celle des autres employés
et fonctionnaires à qui l’on accorde gratuitement des pensions et qui pourtant
n’exercent pas des fonctions très désagréables, qui exigent des forces
physiques, bien vite épuisées par la nature même de leurs pénibles travaux.
Les impôts sont un mal, mais un mal nécessaire ;
ceux qui sont chargés de l’exécution des lois qui en établissent la perception
sont toujours, quoique remplissant les volontés du législateur, mal vus des
contribuables, c’est-à-dire de la généralité des habitants ; ils sont par là
assujettis, tout en remplissant leurs devoirs, à bien des désagréments que
n’éprouvent pas d’autres fonctionnaires. Le juge, par exemple, qui remplit ses
devoirs, qui applique la loi, n’est pas exposé aux récriminations qui s’élèvent
contre les agents du département des finances qui appliquent aussi les lois qui
concernent leurs attributions. En considération de tout cela, il n’y aurait
rien que de très équitable, si proportionnellement les traitements et les
pensions de ces derniers étaient plus élevés que ceux des fonctionnaires qui
sont appelée à rendre des services physiquement et moralement moins pénibles.
M. Duvivier. -
Une partie des observations que je me proposais de faire ayant été présentées par
M. le ministre des finances, il ne me reste que peu de choses à ajouter.
Comme vient de le dire M. le ministre, c’est une
erreur de penser que les fonctionnaires civils ne peuvent pas avoir de pension
supérieure au maximum de 6 mille francs.
Je ferai observer qu’il y a deux catégories
distinctes de pensions. Les uns s’accordent à des fonctionnaires qui ont 60 ans
d’âge et 30 ans de service. Les pensions de cette catégorie excédant 6,000 fr.
sont ramenées à ce chiffre de 6,000 fr., d’après une disposition de l’arrêté de
1814. Mais si le fonctionnaire a 60 ans d’âge et 40 ans de fonctions, il peut
avoir jusqu’aux deux tiers de son traitement quelque peu élevé qu’il soit. Nous
en avons eu un exemple récent ; un honorable gouverneur qui a été retraité par suite
des changements faits il y a dix-huit mois dans les gouvernements de province,
a reçu une pension qui excède 10 mille francs, parce que ce gouverneur qui est
des doyens des fonctionnaires, et qui a été retraité à cause de son grand âge,
avait plus de 40 ans de fonctions et plus de 70 ans d’âge.
Aussi, quand on s’est
récrié qu’un premier président, un magistrat de premier ordre, si on lui
donnait sa retraite après 50 ans de service dans la magistrature, n’aurait
qu’une pension de 6,000 fr., on s’est trompé. Le magistrat auquel on a fait
allusion, et qui a, je crois, un traitement de 14 ou 15,000 francs, après 50
ans de service, aurait au moins une pension de 12 à 13 mille francs. Ainsi,
l’arrêté de 1814 n’empêche pas d’accorder une pension de plus de 6,000 fr. à un
fonctionnaire ayant 60 ans d’âge et 40 ans de fonctions publiques.
Il est à regretter que cette question soit
maintenant agitée ; j’avais envie de faire la motion de l’ajourner. Vous avez
sagement agi à l’égard des traitements d’attente. Vous avez alloué le chiffre
en disant qu’on discuterait la question du fond quand on serait saisi du
rapport qui doit être fait.
Je pense que la discussion de la question qui nous
occupe est également intempestive ; car vous n’êtes pas nanti des rapports de
la commission de révision en qui vous avez toute confiance, et qui par suite de
circonstances extraordinaires n’a pas pu encore terminer son travail. Ce n’est
que quand vous aurez ce travail que vous pourrez aborder sainement cette
question.
J’ajouterai que la première fois que le ministre
des finances a pris la parole dans cette discussion, il a communiqué à la
chambre des pièces de la plus haute importance présentant des comparaisons et
des rapprochements très lumineux. Ces pièces seront imprimées au Moniteur.
Je pense que chacun de vous devrait avoir le temps
de les méditer avant de résoudre la question dont on s’occupe d’une manière
intempestive.
Si on voulait continuer la discussion, je me
réserverais de reprendre la parole, attendu que j’ai une foule d’observations à
faire. Mais je crois que la chambre ne s’occupera que du chiffre du budget, et
remettra la discussion au fond jusqu’au moment où le rapport nous aura été
remis. Nous pourrons ainsi examiner, avec attention, les différents
renseignements qui nous ont été communiqués par le ministre des finances.
Je le répète, je me réserver de présenter mes
observations sur le fond si la discussion continue.
M. Jullien. -
Messieurs, la question des pensions de la caisse de retraite est encore une de
ces questions graves qui reviennent tous les ans à la discussion du budget, et
qui reviendront tous les ans aussi longtemps qu’on n’aura pas fait justice, et
justice complète. En matière d’obligations, il n’y a que deux manières de
résoudre une question, il faut ou reconnaître ou rejeter. Les pensions de
retraite sont précisément dans ce cas. Vous vous rappellerez qu’il y a un an et
il y a deux ans, quand cette question s’est présentée, on est entré dans de
longs développements sur l’origine de la caisse des retraites.
Prenant égard à ce que vient de dire l’honorable
préopinant, je ne dirai que peu de mots sur le fond.
La caisse de retraite doit son origine aux lois
françaises. Pendant tout le temps que
Sous le gouvernement des Pays-Bas, lorsqu’il s’est
agi d’après le traité d’avril 1815, de régler les doits des créanciers belges à
la charge de
La caisse de retraite était donc riche. Le
gouvernement des Pays-Bas l’a administrée à sa manière ; il s’est emparé des
fonds, les a versés dans la caisse du syndicat et a accordé sur ces fonds
diverses pensions à différents fonctionnaires.
Mais, en définitive, la somme versée par le
gouvernement français dans la caisse du royaume des Pays-Bas était la propriété
des employés, puisqu’elle était le résultat de retenues faites sur leurs
appointements. C’était leur chose, leur propriété. Ce serait une souveraine
injustice que de les en dépouiller maintenant.
Quand on a demandé un supplément de crédit pour la
caisse de retraite, c’est parce que le gouvernement avait disposé des fonds de
cette caisse d’une manière arbitraire et qu’il s’était mis dans une position à
ne pas pouvoir représenter à la caisse de retraite les fonds qu’il en avait
reçus.
Le gouvernement ne faisait donc, en demandant un
supplément pour la caisse de retraite, que se mettre en mesure de rendre à
cette caisse ce qu’il en avait reçu, ce qu’il lui devait.
C’est dans cette position qu’on se trouve encore
aujourd’hui. Quand on dit que la question a été résolue, on se trompe. Elle ne
l’a été ni affirmativement ni négativement. Elle a été débattue comme
aujourd’hui, mais elle n’a pas été résolue. Elle est restée entière, et elle
restera ainsi aussi longtemps qu’on ne statuera pas sur les pensions par la loi
qui doit être soumise à la chambre.
En attendant cette loi, que reste-t-il à faire ? A
déterminer la quotité du subside nécessaire pour payer les pensions dues aux
titulaires. Le chiffre demandé par le ministre des finances ne me paraît être
que l’expression du besoin. Si ce subside est nécessaire pour que tous les
pensionnaires soient payés, je ne vois pas pourquoi, quand vous laissez les
choses entières, vous ne l’accorderiez pas. Car toutes les pensions sont dues
ou du moins censées dues jusqu’au moment où la révision sera faite.
Je vous prie de songer que si vous accordiez une
somme moindre que celle qui est nécessaire pour payer toutes les pensions, les
riches pensions seraient payées, tandis qu’une foule de petites pensions ne le
seraient pas. Je connais dans ma province d’anciens fonctionnaires, d’anciens
receveurs ayant des pensions de sept ou huit cents francs qui ne sont pas
payées. Depuis trois ans ces malheureux réclament inutilement. On a droit de
leur répondre ; L’allocation est insuffisante, il faut que le déficit tombe sur
quelqu’un.
Pour être juste, messieurs,
il faut accorder exactement la somme dont le gouvernement a besoin pour payer
toutes les pensions.
On s’est récrié contre les pensions accordées en
vertu de l’arrêté-loi de 1814. Elles sont toutes illégales, s’est écrié un
honorable membre. La constitution ne permet d’accorder aucune pension qu’en
vertu d’une loi. Argumentant des dispositions de la constitution, il prétend
que si ce n’est pas par une loi que des pensions ont été conférées à tel ou tel
fonctionnaire, les pensions sont illégales.
Je n’admets pas ce raisonnement.
Dès l’instant que vous admettez que l’arrêté de
En définitive, messieurs, je crois que jusqu’à la
révision des pensions, il est juste d’accorder les fonds nécessaires pour payer
celles qui jusqu’à présent ont été reconnues en vertu des lois existantes ; et
c’est aussi pour le chiffre demandé que je me réserve de voter.
M. Dubus. -
Cette question, s’il s’agit de la discuter à l’instant au fond, présente de
graves difficultés. Il me paraît certes à moi que le parti proposé par la
section centrale n’en devait pas présenter, puisqu’il écartait, quant à
présent, le subside supplémentaire réclamé par le ministre, et qu’elle lui
accordât le subside ordinaire de la caisse des retraites. Ce que la chambre
ferait de cette manière, elle l’a déjà fait, notamment dans la session de 1833.
Je rappelle cette époque, parce qu’alors la
question avait été examinée par une commission nommée spécialement par la chambre
; que cette commission avait fait un rapport par l’organe de M. Liedts ; et que
sur les conclusions de cette commission, la chambre a pris une décision dont
les conséquences nous conduiraient à écarter tout à fait la proposition
actuelle.
Alors on recommandait deux choses relativement à la
caisse des retraites pour l’exercice 1832. On demandait un supplément de
subsides, à peu près le même que celui qu’on demande aujourd’hui (185,000 fr.).
Au budget de 1832, il avait été voté par la chambre
environ 200,000 fr. ; on venait lui exposer que ce crédit avait été
insuffisant, parce qu’on n’avait pas pu élever les retenues au taux que l’on
avait présumé. On avait promis en effet que la retenue serait élevée de manière
qu’un subside de 200,000 fr. serait suffisant ; et la chambre confiante dans la
promesse du ministre, vota l’allocation. Mais il est arrivé que les
administrateurs n’ayant pas voulu élever la retenue, il y a eu déficit.
C’est pourquoi on a demandé 185,000 fr. de
supplément pour combler ce déficit en 1832.
Après examen approfondi, voici les conclusions de
la commission spéciale.
Elle proposait d’allouer les 185,000 fr., mais
seulement à titre d’avance, et d’en exiger le remboursement par cinquième,
d’année en année ; de sorte que bien loin d’avoir droit à un subside, la caisse
de retraite est débitrice.
Cette proposition a été convertie en loi, c’est la
loi du 10 juillet 1833. Et je crois que M. le ministre est tenu de la faire
exécuter, comme toutes les autres, et par conséquent de faire les retenues d’un
cinquième. Voilà la décision prise par la chambre dans sa session de 1833. Peu
après elle en a pris une autre. C’est la loi du 7 octobre 1833. Là il s’agit de
déterminer la subvention ou le subside pour l’année courante.
La chambre n’a accordé que, comme en 1832, une
subvention de 200,000 fr. ; et en les accordant, elle a ajouté cette condition,
que le gouvernement satisferait à tous les besoins de la caisse des retraites.
La condition est passée en loi.
Voilà donc les décisions de la chambre, assez
formelles, au moins pour les exercices 1832 et 1833.
Mais comme je le disais dans une occasion
précédente, il n’y a pas chose jugée lorsque la chambre rejette les
augmentations de crédit, et on revient incessamment à la charge. On était venu
deux fois à la charge dans la session de 1832 ; on est venu à la charge aussi
dans la session de
En 1835, on a remis la même proposition sur le
tapis ; elle a été rejetée par deux votes successifs ; on l’a reproduire une
troisième fois, en la modifiant en ce sens, que c’était à titre d’avance sur
les fonds de la caisse des retraites qui se trouvaient en Hollande.
Cette troisième fois, on a obtenu au budget de
1835, la subvention extraordinaire de 185,000 fr.
La section centrale propose maintenant d’écarter la
subvention jusqu’à plus ample informé. En effet, il y a deux ans que l’on est
en demeure de fournir à la chambre les documents indispensables pour apprécier
la question du chiffre. Cette considération seule doit déterminer la chambre à
adopter les conclusions de la section centrale.
Indépendamment de cette considération, il paraît
résulter des faits communiqués qu’il y a abus véritable dans la distribution
des pensions. Je ne reviendrai pas sur ces faits, ils ont été signalés tout à
l’heure par mon honorable ami.
Toutefois, je m’étonne que l’on présente come
incontestable l’arrêté-loi de 1814, comme étant la règle qu’il faut appliquer
relativement aux pensions : tout au moins cela fait question. Cette question a
été soulevée, elle a été débattue dans le rapport que j’ai cité il y a un
moment, et il ne faut pas s’empresser de la résoudre.
Comme on vous l’a dit, messieurs, l’institution de
la caisse des retraites est soumise à un mode tout spécial qui a été appliqué
aux finances, tandis que l’arrêté de
Faut-il, dans cette expression, « employés
civils, » comprendre les employés des finances ? Voilà une première
question. Quand à moi, j’ai tout au moins des doutes à cet égard, quand je
considère que le roi Guillaume a fait trois arrêtés différents ; l’un du mois
de septembre 1814, pour les pensions des employés civils ; un autre pour les
pensions militaires, un autre aussi pour la caisse des retraites, laquelle
caisse ne s’appliquait alors qu’aux employés des domaines ; ainsi, elle ne
rentre pas dans l’arrêté de 1814, et forme une institution tout à fait
différente.
Cette caisse des retraites a été étendue, par des
arrêtés subséquents de 1817 et 1822, à tous les employés des finances.
Maintenant, si l’on venait dire : par ces arrêtés
de 1817 et 1822 le roi Guillaume m’a pas cru accorder aux employés es finances
des pensions plus fortes qu’ils n’auraient eu en vertu des arrêtés antérieurs à
la constitution, parce qu’il ne pouvait faire de sa propre autorité une loi sur
les pensions, je comprendrais l’argument. Mais lorsqu’on vient dire ; Nous,
employés des finances, nous avons droit de sortir de la pension que nous fait
l’arrêté de 1822 pour entrer dans la pension que nous fait l’arrêté de 1814,
parce que nous y trouvons profit, je crois que la question n’est plus la même
et qu’il y a lieu à examen.
Les employés des finances ont été revêtus de leurs
fonctions avec la perspective que leur faisait l’arrêté de 1822 ; ils savaient
qu’ils jouiraient comme employés des finances de traitements plus forts que
dans les autres administrations ; mais ils savaient aussi qu’ils devaient
alimenter une caisse de retraites pour servir leurs pensions ; ils savaient
encore que la subvention serait limitée à la somme de 30,000 francs. Ils
connaissaient donc l’institution de la caisse des retraites, ses ressources et
ses charges. Maintenant, c’est sur le trésor qu’on veut faire peser toutes les
charges de la caisse des retraites.
Au lieu d’une subvention, dont le maximum avait été
fixé par le règlement de 1832 à 30,000 florins, on vient nous demander une
subvention de 200,000 fr. Comparez cette somme à celle de 30,000 florins qui
avait été déterminée comme maximum par le règlement de 1822.
Il est impossible que le ministre soit admis à dire
: Nous voulons pour la caisse de retraite l’exécution de l’arrêté-loi de 1814.
On ne peut sauter ainsi à son gré d’une branche sur
une autre, d’un règlement à un autre, selon le profit qu’on y trouve : les
privilèges de la caisse de retraite sont d’ailleurs formulés dans une loi du 2
floréal an V, et d’après les principes qui étaient en vigueur sous les
gouvernement français, nulle pension de retraite ne pouvait excéder la moitié
du traitement ; en outre on attendait qu’une pension fût devenue vacance pour
en accorder une nouvelle, à moins que la situation de la caisse ne permît de
créer une nouvelle pension, parce qu’il était reçu que la caisse de retraite
devait se suffire à elle-même. Ces principes sont posés dans des lois
antérieures à 1814, et on les a rétablis dans le règlement de 1822 avec cette
seule modification que l’Etat pourrait subvenir jusqu’à concurrence de 30,000
florins.
Maintenant quels sont les
sacrifices que nous faisons à la caisse de retraite ? d’abord,
à titre de subventions à cette caisse, une somme de 200,000 fr. La section
centrale vous propose d’accorder ces 200,000 fr. indépendamment de ce s200,000 fr., la caisse des retraites reçoit d’autres produits
qui lui sont attribués par le règlement de 1822 et des règlements postérieurs,
et qui sans cela entreraient dans la caisse de l’Etat ; il y a notamment une
partie des amendes attribués à la caisse des retraites.
Souvenez-vous, messieurs, de l’argument qu’un
orateur a fait valoir : on disait que vous deviez consentir pour
l’administration des finances a des traitements plus élevés, attendu que les
retenues sur ces traitements alimentaient une caisse des retraites.
Eh bien ! il se trouve que
c’est le trésor de l’Etat qui alimente la caisse des retraites ; on vient vous
demander pour cette caisse 380,000 fr., indépendamment du produit des amendes
qui lui était attribué.
Quant aux chiffres que M. le ministre des finances
a présentés, je déclare qu’il m’a été impossible de les saisir, et par
conséquent je ne pourrai les rencontrer, mais je ferai une observation relative
à ce qu’a dit tout à l’heure un honorable préopinant député de Soignies ; selon
lui, la discussion actuelle est intempestive ; et il en a donné ce motif que la
chambre, pour se prononcer, a besoin d’être mise à même de lire le rapport de
la commission et d’examiner les considérations et les chiffres qui lui ont été
soumis par M. le ministre des finances. Mais si la discussion est intempestive,
la demande de crédit est intempestive, car si l’on ne peut pas discuter, à coup
sûr on ne peut pas allouer ; il est impossible d’accorder le crédit demandé
alors que l’on ne peut pas apprécier les raisons sur lesquelles est fondée
cette demande ; cela justifie la proposition de la section centrale d’écarter
le crédit, sauf à y revenir lorsque nous aurons pu apprécier les documents sur
lesquels est basée cette demande. Je crois donc pouvoir m’appuyer ici de l’argument
qu’a fait valoir l’honorable membre.
Tout au moins la chambre devrait-elle se réserver
d’examiner d’ici au second vote les chiffres qu’a présentés M. le ministre des
finances et que nous trouverons demain dans le Moniteur. Dans cette position, je ne puis qu’appuyer la proposition
d’ajournement faite par la section centrale ; c’est dans ce sens que je
voterai.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - L’honorable M. - Dubus a principalement basé son
argumentation sur deux points. D’abord il pense que l’ajournement est la chose
la plus utile et la plus convenable que nous puissions faire. Il nous renvoie
ensuite à ce qui a été inséré au budget de 1833, loi par laquelle il était
prêté à la caisse des retraites une somme qui devrait être remboursée
maintenant par cette caisse au trésor public.
En ce qui concerne l’ajournement, si je ne suis pas
d’accord avec le préopinant dans ce sens que c’est la chose la plus utile, je
conviens au moins que c’est la chose la plus commode. Mais ce système commode
que nous suivons peut-être trop fréquemment laisse une foule de questions à
résoudre ; nous accumulons ainsi toutes les difficultés ou plutôt nous reculons
devant elles, au lieu de les trancher immédiatement.
Je comprendrais la proposition d’ajournement, si le
crédit demandé pouvait être abusivement employé. Mais il n’en est pas ainsi.
Permettez-moi un simple rapprochement de chiffres,
et vous serez convaincus que bien loin que le chiffre des pensions du département
des finances soit exorbitant, il est moins élevé que le chiffre des pensions
des autres services publics, et que bien loi par conséquent d’avoir à vous
élever contre le chiffre de ces pensions, vous devez applaudir à la situation
des choses relativement aux pensions du département des finances.
Ainsi les pensions ecclésiastiques s’élèvent à la
somme de 854,000 fr.
M. Desmet. - Ce ne
sont pas des pensions, ce sont des indemnités.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je vous demande pardon ; s’il y a dans le
nombre des pensions tiercées, il y en a aussi d’autres qui ont été conférées
sous le titre de pensions de retraite.
Au reste, parce que je cite ce chiffre, je suis
loin de dire qu’il est trop élevé, qu’il est injustement accordé. Mais je puis
bien sans doute comparer entre eux le chiffre des diverses natures de pensions
qui sont également accordées équitablement.
Les pensions civiles s’élèvent à 526,000 fr.
Les pensions civiques s’élèvent à 225,000 fr.
Je ne veux établir dans ce dernier chiffre aucune
comparaison. Ces pensions sont dans une catégorie à part ; elles sont accordées
par la reconnaissance nationale pour services spéciaux rendus au pays, services
qui, dans mon opinion, ne peuvent entrer en comparaison avec aucun autre.
Les pensions militaires s’élèvent à 1,520,000 fr.
Et que vous demande-t-on après cela pour le
département des finances ? 380,000 fr. ! pour une administration dont le
personnel comprend 7,000 individus et dépasse par conséquent de beaucoup celui
de toutes les autres administrations civiques réunies, personnel à l’égard
duquel il y a en outre une distinction importante à faire, en ce que la majeure
partie des fonctionnaires qui le composent sont assujettis à un service actif,
fatigant, à des fonctions pénibles qui souvent détruisent leur santé au bout de
quelques années ; ce qui obligé d’admettre plus tôt ces fonctionnaires à la
retraite que ceux d’autres administrations, où les devoirs sont physiquement
plus faciles à remplir.
En présence de semblables considérations que l’on
ne saurait méconnaître, loin de se récrier contre la quotité de la somme
demandée, on devrait en vérité se féliciter d’avoir une caisse des retraites
provenant des retenues faites sur les traitements des fonctionnaires des
finances, au profit de leurs veuves et orphelins, et surtout l’on devrait faire
attention que les participants aux avantages de cette caisse versent
annuellement à ce titre dans la caisse des pensions une somme de 377,603 fr.
En parlant des revenus de la caisse de retraite, on
a cité celui provenant de la part des amendes ; mais la somme est très minime,
comparativement aux sacrifices annuels des employés puisqu’elle ne s’élève qu’à
30,000 fr. et en effet qu’est-ce que cela en comparaison de 377,605 fr. retenus
sur leurs appointements ?
L’honorable M. Dubus, en nous renvoyant à la loi de
1833 qui a fait un prêt à la caisse des retraites, a réclamé l’exécution de
cette loi quant au remboursement de la somme prêtée. Messieurs, reportons-nous
à cette époque. Alors on supposait que bientôt la caisse des retraites
obtiendrait la rentrée des fonds dont a parlé l’honorable député de Bruges, et
qu’elle avait par là quelque chose de pouvoir restituer. Aujourd’hui, quelques
mesures que vous preniez, ce remboursement serait impossible, à moins que l’on
n’applique une retenue de 15 à 20 p. c. sur les traitements des employés, ce
qui désorganiserait le service à moins qu’en retranchant ainsi une forte part
des appointements d’un côté, l’on augmente immédiatement d’un autre côté le
montant actuel des traitements ; or cette manière de procéder ne modifierait en
rien le chiffre global du budget.
Les retenues opérées sur les traitements des
employés des finances me fournissent l’occasion de dire que ce département est
à l’abri du reproche qui lui a été mal à propos adressé en d’autres occasions
au sujet de la manière favorable dont les employés les mieux rétribués sont
traités comparativement aux petits employés.
En ce qui concerne la contribution à la caisse de
retraite, les fonctionnaires jouissant d’un traitement de plus de 1,200 fr. la
supportent à raison de 5 p. c. de leur traitement, tandis que ceux qui ont des
appointements au-dessous de 1,200 fr. ne paient que 3 p. c.
Cette distinction vous prouvera, messieurs, la
louable équité qui dirige sous ce rapport l’administration des finances.
Comment ! s’est-on bien
souvent récrié dans cette enceinte, on donne dans le département des finances
des pensions de plus de 10,000 fr. ! n’est-ce pas là
une véritable dilapidation ? Une seule pension de plus de 10,000 fr.,
puisqu’elle s’élève à 10,300 fr., a été accordée depuis la révolution à un
fonctionnaire des finances ; cela est vrai. Mais réfléchit-on bien à quel
fonctionnaire et pourquoi cette pension a été accordée ? Oublie-t-on qu’elle
est attribuée à un homme de 64 ans d’âge qui a 37 ans de service dans les
grades supérieures de l’administration ; qui, il y a près de 30 ans,
remplissait déjà une mission de confiance que lui avait donné le gouvernement d’alors
pour aller en Espagne organiser un service au péril de sa vie ; un homme qui
depuis 37 ans, je le répète, a rempli des fonctions supérieures dans
l’administration des finances, et qui en dernier lieu occupait un des premiers
emplois de l’Etat ?
Lorsqu’à son âge, en quittant ses fonctions
publiques, il jouit d’une pension de 10,300 fr., peut-on dire que cette pension
est trop élevée ? N’est-elle pas très faible au contraire, lorsqu’on considère
qu’elle est le prix de longs services rendus au pays, la récompense d’une vie
entière consacrée au service de la
patrie ?
Messieurs, l’honorable M. Dubus s’est emparé d’un
argument de l’honorable M. Duvivier, et il a cru le rétorquer victorieusement
contre le vote immédiat du crédit de 380,000 fr. Il faut, disait M. Duvivier,
l’examen des pièces pour se fixer définitivement sur la question, pour accorder
non seulement les 380,000 fr. demandés, lesquels restent en dessous des
besoins, mais pour accorder toute la somme nécessaire. M. Duvivier avait raison
; et si je demandais que l’on modifiât le chiffre de l’année précédente, je
comprendrais la proposition d’ajournement. Mais je ne demande que le chiffre
provisoire voté l’an dernier ; les choses restent dans le même état que l’année
dernière, et dès lors il n’est pas besoin de renseignements nouveaux pour voter
un chiffre que vous pourriez au surplus rejeter au second vote, si vous
remarquiez des erreurs graves dans les renseignements que j’ai fournis.
M. d'Hoffschmidt,
rapporteur, renonce à la parole.
M. le président. -
« Art. 4. Subvention à la caisse de retraite : fr. 200,000. »
- Adopté.
La proposition d’ajournement de l’article 5,
« crédit supplémentaire, remboursable sur le fonds de la caisse de retraite
des employés des finances, retenue en Hollande : fr. 180,000. » est mise
aux voix par assis et levé. Une première épreuve est douteuse. L’épreuve est
renouvelée ; l’ajournement est prononcé.
M. le ministre des finances
(M. d'Huart). - J’y reviendrai au deuxième vote.
- La séance est levée à 4 heures 3/4.