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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du jeudi 24 décembre 1835
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre
2) Projet
de loi relatif au renouvellement des concessions de péages. Intervention de la
chambre dans la faculté de concéder des chemins de fer (projets de concession,
embranchement vers
3) Projet
de loi relatif aux droits sur les os (Gendebien)
4)
Fixation de l’ordre des travaux de la chambre (ajournement de la chambre) (F. de Mérode, Gendebien)
(Moniteur
belge n°364, du 30 décembre 1835)
(Présidence de M. Raikem.)
M. Dechamps fait
l’appel nominal à 11 heures.
Il donne ensuite lecture du procès-verbal de la séance
précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse
présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le
conseil de régence de la ville de Limbourg demande pour cette ville la
conservation de la justice de paix lors de la nouvelle circonscription
judiciaire. »
________________
« Les notaires de l’arrondissement de Diekirck adressent des observations en faveur du projet de
loi tendant à assimiler les notaires des justices de paix à ceux des tribunaux
de première instance. »
________________
« La
régence de Bree, demande la construction d’une route de Diest vers
Ruremonde. »
________________
« Plusieurs maîtres de forges du
Luxembourg, demandent que le charbon de bois soit imposé de 25 p. c. par corde
à la sortie au lieu du droit actuel de 6 p. c. »
________________
- La pétition des habitants de Bree est renvoyée à
la commission des travaux publies, les autres à la commission des pétitions
________________
M. de Renesse
donne lecture d’un message du sénat qui annonce à la chambre qu’il vient
d’adopter le projet de loi autorisant un transfert au budget du département de
la justice pour 1835.
- Pris pour notification.
PROJET DE LOI RELATIF AU RENOUVELLEMENT DES CONCESSIONS DE PEAGES
M. le président. -
La discussion continue sur l’article unique du projet et sur l’amendement de M.
Legrelle :
L’article unique du projet est ainsi conçu :
« La loi du 19 juillet 1832 sur les concessions
de péages est prorogée au 1er janvier 1839. »
L’amendement proposé hier par M. Legrelle est ainsi
conçu :
« La loi du 19 juillet 1832, sur les
concessions de péages, est prorogée au 1er janvier 1837.
« Néanmoins, jusqu’à ce
qu’il y soit autrement statué par la législature, toute concession de chemin de
fer devra faire l’objet d’une loi. »
A ce dernier paragraphe de son amendement, M.
Legrelle substitue maintenant celui-ci :
« Néanmoins les embranchements de chemins de
fer vers
M.
Legrelle. - D’après les observations dont a été l’objet l’amendement
que j’avais présenté dans la séance d’hier, je l’ai modifié de la manière qui
vient d’être indiquée par M. le
président. Mais si M. le ministre de l’intérieur voulait prendre
l’engagement de ne pas accorder de concession de chemin de fer vers
M.
de Puydt, rapporteur. - Je demande la question préalable sur
l’amendement de M. Legrelle, attendu que la loi du 1er mai 1834 pourvoit à ce
qu’il demande par cet amendement.
M. Meeus. - Je
viens appuyer la question préalable demandée par l’honorable M. de Puydt car,
bien que l’honorable M. Legrelle ait modifié l’amendement qu’il avait proposé
hier, il n’en est pas moins vrai que son amendement renferme tout ce qu’il avait
de mauvais dans le premier. En effet, il y a plusieurs demandes adressées au
gouvernement tendant à obtenir la concession de plusieurs embranchements de
chemins de fer vers
M.
Pirmez. - Je désirerais savoir ce que l’honorable M. Legrelle entend
par « les embranchements de chemins de fer vers
M.
Liedts. - C’est juste ; car tout chemin mène à Rome.
M. Legrelle. -
J’ai voulu parler de la grande voie vers
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Les explications que je pourrai donner seront, comme celles que j’ai données
dans la séance d’hier, conformes à la loi du 1er mai 1834. Cette loi, tant
qu’il n’y aura pas été admis de dérogation, sera toujours mon guide. Le
gouvernement ne pourra concéder aucune partie quelle qu’elle soit du système de
chemin de fer qui doit être exécuté aux frais du trésor, aux termes de la loi.
C’est ainsi que j’entends la loi. Mais je demanderai à présent si l’amendement
est proposé pour donner une sanction nouvelle ou une extension à la loi. Je
ferai remarquer, comme dans une précédente séance, que cet amendement a une
très grande portée. Ainsi, par exemple, il y a un projet de chemin de fer vers
M. Coghen - Il me
paraît impossible d’adopter l’amendement présenté par M. Legrelle ; cet
honorable membre veut interdire au gouvernement la faculté de des chemins de
fer allant vers
Il y a un chemin de fer de
Louvain vers Charleroy et Namur dont la concession est demandée, on pourra
encore dire que ce chemin qui va rejoindre celui entre
Si vous admettiez la proposition de M. Legrelle,
vous arrêteriez toutes ces belles entreprises qui doivent si puissamment
concourir au développement des richesses du pays.
Songez donc, messieurs, que si toutes les
concessions de chemins de fer doivent être autorisées par une loi, vous verrez
chaque fois en présence les intérêts et les rivalités de localités. Ainsi
s’agira-t-il de la communication dont j’ai parlé, laquelle sera intéressante
pour l’arrondissement de Charleroy et lui permettra de lutter avec avantage
avec la province de Liège sur les marchés d’Anvers et de Louvain. Cette
dernière province ne manquera pas d’élever de fortes réclamations.
J’appuie donc fortement la question préalable
proposée par l’honorable M. de Puydt, parce que je serais désolé de voir
arrêter l’élan du pays pour le développement de ses richesses élan qui doit
montrer à tous les peuples
M.
Dubus. - Il est fort à regretter que la discussion importante qui nous
occupe n’ait pas été précédée de l’examen de la question par les sections et la
section centrale, ou par une commission ; car il est dangereux de décider, sans
un examen préalable, des questions de cette importance.
L’amendement de M. Legrelle, maintenant en
discussion, a deux parties ; l’une ayant pour objet de réduire de quatre à une
année la durée de la loi. Je n’ai pas entendu jusqu’ici combattre cette partie
de l’article. Je pense donc qu’elle sera adoptée par la chambre. En effet, on
allègue l’urgence ; mais évidemment il n’y a urgence que pour une prorogation
d’une année. Quant à la deuxième partie de l’article, je suis persuadé que
personne n’insisterait pour son adoption si M. le ministre déclarait qu’il
n’accordera pas sans l’intervention de la législature la concession d’une
grande communication avec
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Il est évident qu’aux termes de la loi
du 1er mai 1834 le gouvernement ne doit faire qu’un embranchement par le
Hainaut vers
(Ici M. le
ministre de l’intérieur donne lecture de la loi précitée.)
Maintenant il est évident que l’embranchement à
travers le Hainaut vers
Il est évident aussi qu’en construisant une route
en fer de Gand à Lille on ne satisferait pas à la prescription de la loi, car
ce n’est pas en effleurant légèrement la frontière du Hainaut que l’on
contenterait cette province ; le but de la disposition de la loi a été de
favoriser le Hainaut autant que les autres provinces ; ce but ne serait pas
rempli.
On me demande ensuite si
j’ai l’intention de faire exécuter la route de Gand à Lille. A cet égard, je
dirai que mon opinion n’est pas suffisamment éclairée. Ce ne sera que quand
j’aurai reçu les propositions de la société générale que je pourrai fixer mon
opinion sur la question de l’utilité de cette communication. Mais si le
gouvernement était d’avis, après mûr examen, que les propositions de la société
générale doivent être accueillies, les projets d’exécution de routes en fer de
Bruxelles à
Si, au contraire, le projet n’avait pas de suite,
je ferais exécuter aux frais de l’Etat le chemin à travers le Hainaut. Quant à
l’embranchement de Gand vers Lille, je n’en ferais la proposition qu’autant que
je jugerais que l’exécution aux frais de l’Etat en serait plus utile qu’aux
frais d’une compagnie.
Si l’opinion du gouvernement était que
l’embranchement de Gand vers Lille doit être exécuté avec plus d’avantage par
une compagnie, je me croirais autorisé à en faire la
concession. C’est ainsi que l’on toujours considéré la loi et la marche
raisonnable du gouvernement vis-à-vis de cette loi. Voilà l’explication
complète et sans aucune espèce de restriction que j’avais à donner.
M. Rogier. - La loi
que nous discutons ou plutôt l’amendement de l’honorable M. Legrelle se divise
en deux parties
Par la première on propose de donner à la loi
expirée une durée d’une année, c’est-à-dire, de la proroger jusqu’au 1er
janvier
Je ne vois aucun inconvénient à proroger
indéfiniment la loi des péages. Elle a été bien exécutée. Je crois que la
chambre a assez de lois utiles à voter, pour ne pas se lier à chaque instant
par des lois temporaires. Si l’on ne fixait pas de nouvelles limites à la loi,
je serai le premier à la voter de bon cœur ; car nous approuvons mes honorables
amis et moi les concessions faites à propos dans un but d’utilité générale.
Mais une partie de l’amendement que je regarde comme indispensable d’appuyer,
c’est celle qui apporte certaines restrictions au droit absolu donné au
gouvernement d’accorder certaines concessions. D’après les explications qui
viennent d’être données par M. le ministre de l’intérieur le gouvernement ne
refusera qu’une concession dans l’entreprise des chemins de fer, à savoir
l’embranchement par le Hainaut. Son intention serait de faire cet embranchement
vers Mons.
Encore dans le cas où la société ou toute autre
société viendrait à présenter un système de double embranchement, le
gouvernement se montrerait disposé à renoncer même à la faculté de faire toute
espèce d’embranchement par le Hainaut et accorderait à l’industrie particulière
toute communication de route en fer vers
J’ai très bien recueilli les paroles de M. le
ministre de l’intérieur. M. le ministre a dit que si la société générale
présentait un double système de route, l’un de Gand sur Lille, l’autre de
Bruxelles sur Mons, et qu’il vît dans ce système un avantage pour le pays, il
viendrait proposer à la chambre d’accorder la concession de ces embranchements.
Il renoncerait à l’exécution des travaux qu’elle ordonne au gouvernement.
Dans le cas où soit la société générale, soit toute
autre société ne demanderait pas un double embranchement, demanderait, comme le
fait existe, un embranchement de Gand sur Lille, M. le ministre de l’intérieur
se réserve d’exécuter par voie de concession cet embranchement sans passer par
la législature.
Je continue donc à penser qu’il est très important
que l’amendement de l’honorable M. Legrelle soit adopté par cela même que M. le
ministre de l’intérieur a déclaré avec franchise qu’il se considérait comme
autorisé à donner l’embranchement de Gand sur Lille.
Il faut nous reporter à la discussion sur la route
en fer. Je reconnais qu’il a été en général question d’un seul embranchement
vers
L’honorable M. Gendebien m’interpella à cette
occasion et demanda si le gouvernement se proposait de ne faire qu’un seul
embranchement par le Hainaut ; je lui répondis :
(Ici l’honorable orateur donne lecture d’un
passage du compte-rendu de la discussion de la loi du 31 mai 1834.)
Je dis donc que le gouvernement s’était donné la
faculté de faire plusieurs embranchements vers
Je suppose même que la loi ne lui laisse pas cette
faculté, que la loi ait interdit au gouvernement de construire une route par
Gand vers Lille. La loi serait mauvaise en ce point, et d’après les résultats
déjà obtenus de la route exécutée entre Bruxelles et Malines, d’après le grand
avantage qu’il a produit au trésor public, et qu’il produira lorsque la route
sera continuée, il serait aujourd’hui important de recourir à la législature
pour remplir cette lacune. Le gouvernement devrait d’autant plus prendre cette
résolution, c’est que l’embranchement de Gand vers Lille sera une des plus
productives du système général. Il vaut beaucoup mieux que ce produit reste
dans les caisses de l’Etat, que dans les caisses de la banque.
Il est impossible de méconnaître la grande utilité
entre deux contrées aussi importantes que Gand et Lille. Hier, l’honorable M.
Meeus a dit qu’il avait été le premier à découvrir qu’il fallait une
communication en fer de Bruxelles sur Paris. Je reconnais que l’honorable M.
Meeus réunit à une grande capacité beaucoup d’activité. Je crois que, quelque
soit la décision de la chambre, il faudra le remercier d’avoir porté l’attention
du pays sur ce point. Mais, rendons justice à qui de droit. J’ai trouvé cette
idée dans le mémoire de MM. Simons et de Ridder. Ils
ont traité la question du chemin de fer de Paris. Ils ont fait sentir la grande
utilité de cette route lorsqu’un embranchement aura mis en relation Gand avec
Lille, et Lille avec Paris. Ils ont très bien senti quel argument ils
trouveraient en faveur de la route vers Ostende dans l’embranchement de Gand
sur Lille.
Il est impossible que ces
faits soient ignorés du gouvernement. Le projet de MM. les ingénieurs n’a pu
échapper aux intéressés. Il a si peu échappé aux intéressés qu’à l’époque de la
publication du mémoire, deux sociétés se présentèrent pour construire
l’embranchement de Gand sur Lille, l’une par Audenarde et l’autre par Courtray.
Quant à l’embranchement passant par Audenarde et se
dirigeant sur Tournay, l’on ne pourrait l’annuler sans violer la loi. Quant à
l’autre embranchement, on pourrait l’accorder sans violer la loi, attendu qu’il
ne traverserait que
Comme je regarde l’embranchement de Bruxelles comme
utile, mais surtout l’embranchement vers Lille comme indispensable, parce qu’il
produira beaucoup, par ce motif j’adopterai l’amendement de l’honorable M.
Legrelle en ce qui concerne le Hainaut.
M. Gendebien. -
J’ai l’honneur de proposer l’amendement suivant : « Néanmoins on ne pourra
accorder de concessions de chemins de fer dans la direction du Hainaut et vers
Messieurs, j’ai cru devoir faire remarquer à la
chambre hier qu’il convenait de nous abstenir de toute discussion sur une loi
dont les dispositions ont une portée qu’il n’est pas facile de mesurer à
I’improviste.
Je croyais qu’il convenait d’ajourner toute
discussion jusqu’à notre retour. J’ai dit que je ne croyais pas qu’un ministre
osât faire ce que l’on paraît craindre et que l’on veut éviter par un
amendement.
On a jugé à propos
d’entamer la discussion, j’y entre donc malgré moi ; c’est dans ce but que j’ai
proposé mon amendement. Si l’on voulait retirer tous les amendements, je
retirerais le mien comme les autres. Les difficultés qui se présentent sont la
conséquence du système adopté par la loi des chemins de fer. J’ai eu l’honneur
de vous dire à cette époque que si le gouvernement voulait se borner à faire un
essai entre Bruxelles et Anvers, je n’y trouverais pas de difficultés ; que
j’approuverais son projet, parce qu’il n’avait pas d’influence sur la balance
commerciale, et parce que les calculs que cette première expérience permettrait
de faire, mettraient le gouvernement d’un côté et les concessionnaires de
l’autre en état d’établir les conditions de chaque concession ; l’on en a agi
autrement, et l’on a fini par comprendre cependant que l’on ne pouvait faire
contribuer le trésor au profit de telles localités. Après quinze jours de discussion,
ma proposition, appuyée de tous les députés du Hainaut, a été adoptée. Elle
stipulait que dans tous les cas les péages que l’on exigerait sur toutes les
routes du Hainaut, communiquant avec Bruxelles, seraient réduits dans la même
proportion que les péages de la route en fer de Liége. L’amendement que je
dépose en ce moment est une conséquence de cette stipulation.
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Messieurs, j’espère que la
chambre, avant d’adopter, l’amendement proposé par l’honorable M. Legrelle,
voudra bien en peser toutes les conséquences. En effet, cet amendement ne me
semble avoir pour effet que de priver pour bien longtemps les Flandres d’avoir
une communication de la nature de celles qu il s’agit d’ouvrir avec
Ce n’est pas d’après des paroles échappées à un
ministre que l’on interprétera la loi, mais bien d’après les termes dans
lesquels elle est conçue ; peut-être même que plus tard, quand les Flandres
viendraient réclamer l’exécution des chemins de fer aux frais de l’Etat, des
membres de cette assemblée leur opposeraient les dispositions mêmes de la loi.
Voyons ce que dit cette loi : la loi du 1er mai a créé l’établissement d’un
chemin de fer, et elle a déterminé en même temps dans quelle direction seraient
ces chemins de fer. Par l’article 2, elle a décidé que l’exécution de ces
routes telles qu’elles étaient déterminées par l’article 1er aurait lieu à la
charge du trésor public ; l’article 1er est ainsi conçu : « il sera établi
dans le royaume un système de chemins de fer ayant pour point central Malines
et se dirigeant à l’est vers la frontière de Prusse par Louvain, Liége et
Verviers ; au nord par Anvers, à l’ouest par Ostende, par Termonde, Gand et
Bruges ; au midi sur Bruxelles et vers la frontière de France par le
Hainaut. » Vous voyez bien que l’on n’a pas imposé au gouvernement
l’obligation d’établir une communication par les Flandres avec
Non seulement la loi n’impose pas au gouvernement
l’obligation d’établir une communication par les Flandres avec
M. Rogier. - Par nous aussi.
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Ainsi tout le monde est du
même avis. Cependant je vous prie de remarquer que si dans cet état de choses,
lorsque le gouvernement n’a pas même la faculté d’établir une communication aux
frais du trésor, l’on veut faire décider qu’il ne pourra pas non plus faire
ouvrir cette route par voie de concession, vous consacrerez une véritable
injustice vis-à-vis des Flandres. Je conçois la loi comme M. le ministre de
l’intérieur. Je comprends que le gouvernement ne puisse accorder aucune des
parties dont la loi établit la construction aux frais du trésor.
Or, dit M. le ministre de l'intérieur, la loi lie
le gouvernement en ce sens qu’il lui est interdit de livrer à la concession
particulière l’exécution d’une partie quelconque du système décrété par l’art.
1er.
Mais lorsque la loi n’a pas
imposé au gouvernement l’obligation de faire une route en fer dans une
direction quelconque, irez-vous déclarer qu’il n’aura pas la faculté de la
laisser exécuter par une société particulière ? Ce serait dire que les Flandres
n’auront jamais de communication de ce genre avec
Quant à celui présenté par M. Gendebien, il
faudrait avoir le temps d’y réfléchir. Mon honorable collègue, le ministre de
l’intérieur, se propose de dire quelques mots sur cet objet. Je pense que c’est
dans ce sens que les concessions à l’avenir devront être accordées.
M. Devaux. - Député
des Flandres, je crois devoir répondre à l’espèce d’appel que M. le ministre
des affaires étrangères vient de faire à l’esprit de localité des Flandres.
Messieurs, je n’ai aucune inquiétude sur le sort de
la route de fer de Gand à Lille. Cette route est une affaire d’or, et si le
gouvernement était assez mal avisé, assez inerte, assez mal conseillé pour
négliger de la faire lui-même, nous n’aurions pas besoin de recourir aux
onéreuses conditions d’une concession. Les Flandres n’auraient pas besoin de
porter leurs deniers dans la caisse d’une compagnie financière, si le gouvernement
se refusait à cette bonne opération qui lui fournirait les moyens de faire
d’autres routes dans des parties du pays qui présenteraient moins d’avantage.
Rien ne serait plus facile que de le faire faire par ces provinces ; en faisant
l’affaire provincialement le bénéfice au moins
reviendrait aux provinces au lieu des compagnies financières.
Voila ce que j’ai répondu aux considérations
locales qu’a fait valoir M. le ministre des affaires étrangères. Mais les députés
des Flandres n’ont pas jusqu’ici envisagé avec des vues aussi étroites
l’établissement des chemins de fer en Belgique ; ce ne sont pas, je pense, de
mesquines considérations d’intérêt local qui doivent dominer les discussions
qui se rapportent à un ouvrage aussi immense.
Messieurs, les chemins de fer combinés avec la
machine à vapeur sont peut-être la plus grande découverte de l’esprit humain
depuis l’invention de l’imprimerie ; peut-être est-elle destinée à changer la
face de la société. Il y a évidemment là un immense intérêt d’avenir pour
J’ai entendu dire au ministre de l’intérieur que
nous voulions arrêter l’essor de l’industrie que, si on adoptait notre opinion,
elle deviendrait stationnaire. Ce serait la première fois que nous aurions
mérité ce reproche, nous qui, dans toutes les discussions, cherchons toujours à
aider aux véritables progrès du pays, à tous ses progrès de civilisation et de
bien-être. En vérité, les rôles seraient bien changés. Quels sont donc les
intérêts de l’industrie, et dans quel intérêt demandons-nous, non pas d’exclure
le système des concessions, mais de ne pas tout lui abandonner ? N’est-ce pas
dans l’intérêt des communications générales, dans l’intérêt du commerce et de
l’industrie, auxquels les concessions peuvent être si onéreuses ? Mais, dit-on,
tous les projets sont préparés ; ils ne pourront pas être exécutés sans délai, s’ils
ne le sont pas par des compagnies concessionnaires.
Messieurs, si l’industrie et le commerce avaient à
choisir entre un système de chemins de fer incomplet, onéreux, qui serait
exécuté ou plutôt commencé dans une année, et un système complet, favorable au
commerce général, mais dont l’exécution exigerait quelques mois ou même
quelques années de plus, je vous demande ce qu’ils préféreraient ?
Je ne vois pas d’ailleurs que les projets de loi se
rapportant aux intérêts de l’industrie, pour peu qu’ils soient appuyés par le
gouvernement, éprouvent de si grands retards dans cette enceinte. Vous en avez
encore un exemple aujourd’hui même. L’année dernière nous avons défait en
quelques séances, nous avons changé la législation douanière sur les os ; tout
à l’heure nous allons peut-être en voter encore une autre en une demi-séance.
Mais, dût-on éprouver quelque retard en soumettant
ces projets à la chambre, cela vaudrait encore mieux que de confisquer le pays
au profit d’intérêts privés, que de confisquer les parties les plus productives
de nos communications au profit de certains monopoliseurs
ou de compagnies, qui en tireraient d’immenses bénéfices au préjudice de
l’Etat. Si on s’était pressé de mettre en concession la route de Bruxelles à
Anvers et de l’accorder à la compagnie qui la demandait, il y a 2 ans, qu’en
serait-il arrivé ? Qu’on aurait eu la route quelques mois plus tôt peut-être,
mais que les transports se paieraient aux conditions de la concession, qui
étaient de cinq à dix fois plus chères que les prix de la route actuelle, et
que l’Etat aurait perdu tout le bénéfice qu’il fait aujourd’hui sur cette
route, et qui le met à même de couvrir les déficits qui pourraient se présenter
sur des parties moins productives.
Je trouve l’amendement de M. Legrelle meilleur que
la prorogation pure et simple de la loi ; mais je crois qu’il pèche encore par
insuffisance. Je crois qu’une matière aussi importante devrait être l’objet
d’une discussion approfondie : il faudrait examiner quels sont les chemins
qu’on peut concéder et quels sont ceux qu’on ne doit pas concéder ; voir s’il
n’y a pas moyen de trouver là une ligne de démarcation. En attendant, je ne
vois pas pourquoi, provisoirement et jusqu’à ce qu’on ait eu le temps de
rédiger des dispositions définitives, toute concession de chemin de fer ne
serait pas réservée à la loi. Il ne s’agirait pas d’exclure la concession, ni
d’arrêter l’essor de l’industrie ; mais on prendrait du temps,et ce temps
pourrait être favorable aux concessionnaires mêmes ; on empêcherait peut-être
ce genre de demandes de concession dont le principal objet est de vendre des
actions sur la place avec 30 ou 40 p. c. de prime. Personne, je n’ai pas besoin
de le dire, je crois, ne désire puis vivement que moi l’extension des chemins
de fer. Mais comme je crois que
Je conçois que le système que je combats est
infiniment plus commode ; le rôle pour
un gouvernement qui voudrait se laisser aller devient ainsi très facile ; on se
débarrasse par la concession de toute peine et de toute responsabilité ; un
ministre donne sa signature, et tout est fait. Si le travail est mal fait,
c’est l’affaire des concessionnaires ; si le taux du péage est trop élevé,
c’est l’affaire des concessionnaires.
C’est plus facile sans doute, mais c’est contraire
aux véritables intérêts du pays.
Dans quelques années nous aurions à nous repentir
de ce système, et alors sans doute les ministres viendraient faire un aveu
semblable à celui que fit, il y a quelque temps, M. le ministre des travaux
publics en France :
« Si en 1821, disait-il, l’Etat avait exécuté
lui-même, il ne se trouverait pas aujourd’hui dans la pénible situation
d’avoir, pour très peu de choses, aliéné pour 50 ou 90 ans la moitié des
revenus qui seront un jour très considérable et qui, partout où les canaux ont
été achevés, dépassent de beaucoup les prévisions. »
Heureux, messieurs, si alors l’Etat en est quitte
pour perdre les bénéfices qu’il aurait pu faire, et s’il n’est pas réduit, par
les plaintes de l’industrie, à racheter les concessions en indemnisant les
concessionnaires des bénéfices mêmes.
Le gouvernement, assurément, s’il était moins
pénétré de l’idée qu’il doit tout concéder, au lieu de mettre ses ingénieurs à
la disposition des compagnies, les chargerait d’examiner les besoins des
provinces sous le rapport de la constructions des chemins de fer ; il y ferait
faire des études, il organiserait le génie de toutes les provinces dans ce
sens, et il serait prêt à exécuter les projets utiles aux frais de l’Etat. Il
n’en coûterait pas beaucoup plus de temps alors d’adopter une loi présentée par
le gouvernement que de concéder un projet fait par des compagnies.
Messieurs, je le répète, la matière est très grave
; si l’on adhère à l’opinion émise par deux ministres dans cette chambre et
naguère au sénat, nous les encourageons à suivre une voie funeste tout à la fois aux intérêts du commerce et à ceux du
trésor ; nous risquons de voir aliéner les parties les plus productives des
routes en fer, et les péages pourront être deux, trois et quatre fois plus
élevés qu’ils ne devraient ; et plus tard nous serons forcés peut-être de
racheter ces concessions aux conditions les plus onéreuses pour le trésor.
L’honorable M. Coghen, qui
maintenant est aussi partisan des concessions, me dit de sa place que
l’amendement de M. Gendebien remédie à tout cela. Je rends hommage à
l’amendement de M. Gendebien. Si
on l’adopte, il remédie en effet à une partie des inconvénients que j’ai
signalés, mais il s’en faut qu’il les évite tous ; les péages seront moins
élevés mais ne restera-t-il pas toujours vrai que l’excédant des produits
entrera dans la bourse des capitalistes au lieu d’entrer dans les caisses de
l’Etat, qui pourrait l’employer à généraliser ce système de communications ou à
couvrir d’autres dépenses ?
Qu’on ne croie pas, comme M. le ministre me l’a
fait dire, que je veuille qu’on attende les excédants de produits d’une route
avant que l’Etat n’en puisse faire d’autres. Je n’ai pas besoin de le dire, je
crois ; ce n’est nullement là ni ma pensée ni ce que j’ai dit.
De tout ce que je viens de dire, messieurs, et de
la manière restreinte dont M. le ministre de l'intérieur a expliqué qu’il
entendait la loi de mai 1834, résulte pur moi l’utilité d’adopter un amendement
à la loi, qui pare aux dangers que j’ai signalés.
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - L’honorable députe de Bruges,
avec ce ton de supériorité que probablement sa longue habitude des affaires lui
permet d’apporter dans nos discussions, a dirigé contre moi une accusation très
grave ; il m’a reproche d’avoir fait un appel à l’esprit de localité. Pas plus
que l’honorable membre, je n’ai l’habitude de faire appel aux passions ni à
l’esprit de localité. Je me suis étonné, je crois avec raison, de voir faire
une motion qui avait pour but de défendre au gouvernement d’accorder la
concession d’une communication que le gouvernement n’est pas autorisé à faire
lui-même.
Mais, dit l’honorable membre, je ne vois pas la
nécessité de verser cet argent dans la caisse d’une société. Je dirai d’abord
que je n’ai entendu faire allusion à aucune société particulière, j’ai parlé en
termes généraux. Peu m’importe quels sont les concessionnaires de cette grande
communication, pourvu que la concession soit faite dans l’intérêt du pays.
Mais, après avoir critiqué
le système des concessions, l’honorable membre a dit : « Si le
gouvernement ne veut pas faire la route, les provinces pourront s’en
charger. » Et bien, qu’elles demandent la concession. Si les provinces se
présentaient en concurrence, je serais d’avis que la préférence devrait leur
être accordée. Mais je voudrais que l’honorable membre m’expliquât comment les
provinces pourraient faire cette communication ; il faudrait encore, me
semble-t-il, trouver des actionnaires des sociétés particulières. Je ne crois
pas que, dans l’état actuel des choses, les provinces puissent s’entendre pour
exécuter des travaux de cette nature. Mais je le répète, si la chose est
possible, pourquoi ne se présentent-elles pas ? Qu’elles fassent la demande,
j’insisterai, pour ma part, afin qu’on leur donne la préférence sur toutes
autres sociétés particulières.
Ce que je demande, c’est que la communication
s’exécute soit aux frais de l’Etat, soit aux risques et périls d’une société
particulière ; mais, comme l’a dit l’honorable M. Gendebien, de manière que
cette communication procure, et aux habitants de la province, et au pays en
général, les mêmes avantages, soit qu’elle se fasse par concession, soit
qu’elle s’exécute par le gouvernement. Pourvu qu’on arrive à ce résultat, mes
vœux sont remplis. Les habitants y trouveront le même avantage, c’est la seule
chose que j’ai en vue.
M.
Devaux. - Je demande la parole pour un fait personnel.
M. le ministre des affaires étrangères m’a reproché
d’avoir parlé avec cette supériorité que me donne la longue habitude des
affaires : ce sont ses expressions. Non, messieurs, en fait d’affaires, je
reconnais que mon habitude n’est ni grande, ni longue, et que M. le ministre
des affaires étrangères est infiniment plus homme d’affaires que moi. Mais il
est certains intérêts du pays, des intérêts qui se lient à tout son avenir et à
tous ses progrès, dans la discussion desquels il m’est difficile de ne pas
m’exprimer avec quelque chaleur. Je conviens que M. le ministre des affaires
étrangères a encore cette supériorité sur moi, qu’en présence de tels intérêts
et de telles questions il lui est donné de rester très calme et d’en parler
très froidement ; c’est encore un avantage qu’il doit sans doute à sa longue habitude
des affaires.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Hier, en voyant présenter l’amendement
de M. Legrelle, j’ai dit qu’il était éminemment anti-industriel,
anti-commercial, qu’autant vaudrait décréter dans la loi que le commerce et
l’industrie demeureront stationnaires en Belgique ; qu’ils seraient privés, par
décision de la chambre, des avantages que leur assurent les nouveaux moyens de
communication qui s’étendent rapidement dans toutes les contrées de l’Europe.
Ce que j’ai dit hier de l’amendement de M. Legrelle, je le dis à plus forte
raison aujourd’hui du discours que vient de prononcer l’honorable député de
Bruges, qui s’est cependant déclaré l’ami des progrès du commerce et de
l’industrie Auriez-vous jamais pu imaginer que cet honorable membre aurait tout
à la fois combattu l’établissement de sociétés pour concessions de routes, et
l’établissement de sociétés industrielles ? C’est ce qu’il vient de faire ; car
tout son discours est une attaque directe contre les sociétés qui se sont
formées cette année, et contre les nombreuses demandes de concessions qui se
font de jour en jour.
Je ne partage nullement l’opinion de cet honorable
membre. S’il est vrai de dire que le gouvernement a un doux penchant à se
laisser aller, j’admets volontiers cette observation, pour autant que la
chambre veuille bien l’entendre comme nous la pratiquons.
Nous nous laissons aller avec beaucoup de plaisir à
accorder l’approbation de sociétés commerciales et industrielles. Nous nous
laissons aller avec beaucoup de plaisir à encourager les sociétés qui se
forment pour l’ouverture de routes et de canaux ; pourquoi ? parce
que nous concilions dans ce système l’avantage commercial, industriel et
agricole de
Pour dire un mot, en passant, des sociétés qui
viennent de s’établir dans le courant de cette année, je ferai un appel à tous
vos souvenirs, et je vous demanderai si ces sociétés n’ont pas donné une
immense impulsion à notre industrie et à notre commerce, si on ne peut pas
entrevoir les immenses avantages qui pourront encore en résulter.
Mais, dit-on, il y a des spéculations de bourse.
Admettons que quelques auteurs de ces sociétés aient réalisé quelques p. c. de
bénéfice sur l’émission de leurs actions ; à qui la faute si les actions ont
été prises trop haut ? C’est aux preneurs ; personne
n’était obligé de les prendre ; c’est la confiance que l’entreprise inspire au
public qui détermine la valeur des actions ; si ces preneurs se sont trompés,
tant pis pour eux. Serait-il préférable qu’ils fissent des spéculations sur les
fonds grecs, espagnols ou autres de même nature ? N’est-il pas plus avantageux
que les fonds nationaux soient versés dans des entreprises qui se font en
Belgique et doivent procurer au commerce et à l’industrie un développement
immédiat, alors même que les actionnaires auraient payé leurs actions un peu
trop cher, ce qui n’est pas prouvé et ce que l’expérience apprendra ? l’expérience qui apprendra si les primes des actions émises
ont été trop élevées.
Ainsi, c’est bien à tort qu’on est venu critiquer
dans cette enceinte l’esprit d’association qui s’est développé dans le cours de
cette année.
Rien ne peut être plus utile au pays que d’encourager
l’esprit d’association pour l’ouverture des routes et des canaux. On sait que
c’est par ces moyens que l’Angleterre et l’Amérique se sont élevées à un degré
de prospérité extraordinaire. Il n’est pas douteux que c’est le seul moyen
d’entrer en concurrence avec l’industrie anglaise. L’honorable député de Mons
vous disait que sous peu de temps
Je répète que dans l’état actuel des travaux de la
chambre, ce serait décréter la suspension des travaux publics que de décider
qu’il faudrait des lois pour les concessions de chemins de fer. Puisque mes
observations paraissent avoir été oubliées, je les reproduirai en peu de mots.
Je dirai que la chambre aura à examiner la question de la banque, tous les
budgets, la loi communale, la loi du transit, celle sur les mines et plusieurs
autres lois de même importance, qui pourront à peine être terminées dans le
cours de cette session. Je parle seulement des lois les plus importantes ; car
tous les projets dont la chambre est saisie ne seront pas discutés d’ici a deux ou trois ans.
C’est, messieurs, au milieu d’un tel dédale de lois
que l’on vent saisir la chambre de toutes les demandes en concession ; vous
savez, combien ces demandes présenteront de difficultés lorsqu’on voudra, dans
cette enceinte, arrêter la direction d’une route, arrêter toutes les conditions
des concessions, Il est donc vrai de dire que c’est véritablement décréter un
état stationnaire que d’adopter l’amendement proposé.
Mais, dit cet honorable membre, en accordant les
concessions, vous allez abandonner aux particuliers tous les avantages que vous
pouvez vous-même réaliser ; ne semble-il pas que le gouvernement dise aux
compagnies : « Ouvrez une route, mettez-y le péage que vous voudrez,
exploitez la route à merci... » Messieurs, ce n’est pas ainsi que nous
entendons le système des concessions ; nous entendons que le péage soit
proportionné aux dépenses d’établissements, et aux produits présumés de la
route ; et à l’égard des produits présumés nous sommes dans cette heureuse
circonstance que la plupart des chemins de fer qui pourront être demandés sont
déjà projetés ; que le système des chemins de fer a été décrété par la loi, de
sorte qu’il est aisé de prévoir les avantages de chaque communication. Nous
avons les éléments d’appréciation ; l’expérience a éclairé le gouvernement pour
les frais de construction, pour les produits présumés ; une expérience de
plusieurs mois permet au gouvernement de prévoir ce qui peut avoir lieu
relativement à ces points importants ; ainsi c’est à tort que l’on dit que le
gouvernement veut livrer à des particuliers, à des sociétés, tous les immenses
avantages que le pays peut retirer des chemins de fer : ce n’est pas ainsi que
nous avons entendu le système des concessions ; nous ne l’entendons, ce
système, qu’avec des conditions convenablement stipulées, c’est-à-dire
stipulées de manière à garantir tous les intérêts.
Il faut observer encore qu’il y a une grande
concurrence pour obtenir des concessions de chemins de fer : par exemple, il
est telle route qui est demandée par trois compagnies ; indépendamment des
compagnies qui ont fait des demandes expresses, il est d’autres compagnies
riches dans le pays qui peuvent concourir pour les concessions. Il ne suffit
pas que ces compagnies fassent des offres ; elles n’obtiendraient rien, si
elles n’offraient pas des conditions avantageuses au pays.
Ceci me ramène à l’amendement de M. Gendebien. Il
veut établir dans la loi que les péages à fixer sur les chemins de fer à
travers le Hainaut ou à travers les Flandres ne pourront jamais excéder les
péages établis sur le chemin de fer de l’Etat ; je crois que cet amendement est
inutile, et que s’il était littéralement admis comme il est proposé, il
paralyserait plusieurs entreprises ; nous avons dans le Hainaut divers projets
de chemins de fer vers la frontière de France ; eh bien, son amendement
s’appliquerait à tous ces projets, et plusieurs ne pourraient pas être faits,
parce qu’ils n’ont pas tous la même destination ; par exemple il en est qui
sont destinés au transport de la houille et du minerai de fer, et ces chemins
ne peuvent pas supporter le même péage que ceux destinés au transport des
voyageurs. Mais veut-il restreindre son amendement au chemin de fer décrété par
la loi ? alors il est inutile, puisque la chambre sera
appelée à fixer elle-même les conditions de la concession. Et quant à cette
ligne vers
De cette manière, je crois avoir prouvé que
l’amendement de M. Gendebien serait inutile pour les chemins de fer de l’Etat
et qu’il serait funeste pour d’autres communications ; qu’il arrêterait l’essor
que lui-même a déchiré devoir être le résultat de la construction de certains
chemins de fer.
L’honorable député de Turnhout, ancien ministre de
l’intérieur, a rappelé la discussion qui a eu lieu sur la loi du 1er mai ; il a
soutenu que cette loi n’empêchait pas le gouvernement de faire d’autres routes
que celles qui étaient décrétées. Messieurs, jamais nous n’avons soutenu que le
gouvernement ne pourrait se faire autoriser par les chambres à exécuter
d’autres chemins que ceux qui ont été décrétés ; mais nous avons soutenu que le
gouvernement, sans avoir une autorisation, sans avoir obtenu de nous aucun
fonds, ne pouvait pourrait exécuter d’autres branches que celles qui ont été
décrétées dans cette loi.
Il est vrai que l’on a parlé dans cette discussion
d’autres chemins que l’on pourrait construire à travers le Hainaut ou à travers
les Flandres, et vous savez pourquoi l’on s’est occupé de ces branches du
chemin de fer : il fallait assurer à la loi une majorité imposante ; il fallait
donc faire concevoir de belles espérances aux députés qui se plaignaient que
leurs localités ne participeraient pas aux avantages des chemins compris dans
le projet de loi.
Il était d’autant plus utile de donner de telles
espérances que l’on ne prévoyait pas encore ce que l’esprit d’association veut
réaliser aujourd’hui.
Mais les représentants de ces localités n’ont
jamais émis l’opinion que le gouvernement ne devait pas accorder de ces
concessions, et qu’il dût reculer la construction de ce chemin jusqu’après
l’achèvement des lignes principales pour les entreprendre lui-même : une telle
opinion eût été diamétralement opposée au désir de participer aux avantages du
nouveau mode de communication qui eussent été par là même indéfiniment
ajournés.
Mais à cette époque le gouvernement ne voulait
exécuter qu’un chemin de fer de Bruxelles à Anvers et de Malines à la frontière
de Prusse, témoin le projet de loi qu’il a présenté. L’embranchement d’Ostende
lui a été imposé par les députés des Flandres, et celui vers
Aujourd’hui que par des circonstances heureuses le
pays voit concevoir tous les jours de nouveaux projets, voit se former des
compagnies puissantes capables de les exécuter, il est éminemment utile que le
gouvernement profile de ces bonnes dispositions. C’est ainsi que l’on pourra
réaliser tout ce que le pays peut espérer de prospérité ; c’est ainsi que notre
industrie pourra lutter avec quelque peuple que ce soit.
Si, en thèse générale, je suis favorable aux
associations pour leur donner l’exécution de ce que le gouvernement n’est pas à
même d’exécuter immédiatement, je m’en réfère à ce que j’ai dit en répondant à
l’honorable M. Dubus. En ce qui
concerne la section de Gand vers Lille, je n’ai pas encore d’opinion fondée sur
l’utilité de la concéder plutôt que de faire exécuter cette branche aux frais
de l’Etat ; mais, lorsque j’aurai examiné les diverses enquêtes qui sont faites
et les propositions que soumettra la société générale ; lorsque j’aurai pu
réunir tous les documents propres à établir ma conviction ; si je pensais alors
qu’il fût utile que le gouvernement se chargeât du chemin de fer de Gand sur
Lille, je n’hésiterais pas à venir demander des fonds à la législature pour
faire ces embranchements ; mais dans le moment je suis loin de pouvoir dire à
la chambre s’il sera utile de construire cette branche de Gand à Lille aux
frais du trésor.
Si c’est la société générale qui obtient cette
concession, ainsi que celle du Hainaut, elle ne les obtiendra l’une et l’autre
qu’en vertu d’une loi.
Par ces divers motifs, je demande que la chambre
veuille bien adopter le projet que je lui ai présenté.
Et que l’on ne dise pas que ce projet n’a pas été
mûri, qu’il ne favorise pas les intérêts généraux : rappelez-vous la longue
discussion à laquelle il a donné lieu en 1832 ; c’est moi qui ai eu l’honneur
de vous le soumettre, qui l’ai défendu ; et l’expérience est venue confirmer,
non seulement les dispositions de la loi, mais encore les dispositions
réglementaires que j’ai présentées au Roi pour l’exécution de la loi,
dispositions que j’ai fait connaître à la chambre. C’est à cette loi que l’on
doit l’esprit d’association, et que beaucoup de localités sont redevables des
communications qu’elles n’auraient pas obtenues du trésor ; c’est par cette loi
que d’autres localités auront des communications de la même manière. Sous ce
rapport, je me félicite de l’avoir présentée, sous ma responsabilité, à la
chambre.
Elle renfermait toutes les conditions raisonnables
qu’il faut mettre dans une loi de cette nature. Restreindre davantage
l’administration, c’est restreindre le nombre des projets de route ; car plus
il y aura d’entraves, et moins il y aura de concessions.
D’ailleurs, il serait inexcusable de dire qu’à
cette époque on ne prévoyait pas les chemins de fer : on savait bien à cette
époque et lors du renouvellement de la loi que ces chemins seraient accordés en
vertu de cette législation. On n’a voulu apporter à cette loi qu’une seule
restriction, c’est que la concession ne pût dépasser le terme de 90 ans.
On a limité également la
concession des rivières ; et cette limite a été provoquée par l’appréhension de
la concession de l’Escaut. On sait que les concessions des rivières peuvent
entraîner de grands inconvénients pour les établissements situés sur ces
rivières, et pour les propriétaires riverains et c’est pour cela que la chambre
a voulu intervenir dans ce qui est relatif aux rivières.
Ainsi la législature a pris une double garantie
dans la limite de la durée des concessions et dans la réserve pour l’état des
rivières, afin qu’il ne s’en défît pas sans nécessite absolue.
Toutes ces conditions de publicité sont garanties
dans la loi, quand il s’agit de concessions ; dès lors, je ne vois pas quelle
disposition utile on pourrait y insérer. Certainement on ne pourrait jamais
considérer comme étant une insertion utile celle qui est proposée par M.
Legrelle, laquelle ne tend véritablement qu’à empêcher la construction de
chemins de fer. (Aux voix ! aux voix !)
M. Verdussen. -
Messieurs, je ferai précéder les observations que je me propose de présenter à
la chambre des mêmes paroles dont s’est servi M. le ministre des affaires
étrangères la première fois qu’on s’est fait entendre dans cette discussion :
oui, la chambre y regardera à deux fois avant d’adopter l’amendement de M.
Legrelle, notamment la seconde partie de cet amendement, et elle en pèsera
toute la portée. J’espère, en effet, que la chambre verra qu’il ne suffit pas
de combattre l’amendement, ni de se retrancher derrière le sens littéral de la
loi du 1er mai 1834, mais qu’il faut en comprendre l’esprit. Que voyons-nous
dans cette loi ? Nous y voyons qu’une branche de chemin de fer dans la
direction est de Malines vers
Ce serait se faire illusion sur les vues des
sociétés particulières que de croire qu’elles proposeraient un chemin de Lille
vers Paris, si elles n’étaient pas sûres que ce chemin sera exploité
préférablement à tout autre.
Nos intérêts vers
Il faut que le gouvernement sache ce que
Les deux projets par le Hainaut et par Gand sont
donc absolument les mêmes, et laisser le gouvernement maître de décider si on
exécutera ces deux projets en même temps, c’est compromettre la chose.
M. Legrelle comprend toutes les routes dans sa
proposition, afin d’y comprendre la route de Lille : il est bien certain que de
petits embranchements de route seraient accordés par la législature, si on les
demandait ; on comprendra en effet que l’industrie peut réclamer un bout de
chemin de fer qui ne compromet pas l’existence des grandes sections de route en
fer.
On nous disait hier : Eh quoi ! vous
avez fait en 1832 une loi sur les concessions des péages fort libérale ; aucun
inconvénient grave ne s’est signalé depuis trois ans, et aujourd’hui que nous
faisons des progrès en libéralisme, vous voulez y apporter des restrictions :
depuis 1832, il y a eu une révolution remarquable dans l’industrie ou plutôt
dans l’esprit d’entreprise. Il y a quelques années, une défaveur était jetée
sur les projets de chemin de fer, et surtout quand nous discutions leur
établissement : l’esprit de routine repousse toutes les nouveautés : mais quand
on a vu l’importance d’une section de route, on a compris l’importance des
chemins de fer, et des sociétés se sont présentées. Aussi, je pense que vous
feriez une chose dangereuse que de proroger la loi pour trois années et même
pour une année, pour y apporter des restrictions.
Ne nous faisons pas
d’illusion, nous ne pouvons approfondir à la fin de cette année une telle
question : il nous faut donc, par une motion d’ordre, mettre fin à ce débat.
Nous pourrions encore y mettre fin si le ministre faisait la promesse formelle
de ne point accorder de concessions qui nuiraient au système du chemin de fer
décrété par la loi ; et, dans ce système, je comprends la partie de la route
qui irait de Bruxelles vers Lille, pour communiquer avec
M. le président. -
Voici un amendement que présente M. Dubus (aîné) :
« Jusqu’à disposition ultérieure, il ne pourra
être accordé de concession de chemin de fer, établissement, ou communication
des chemins de fer de l’Etat avec
M. Dubus. -
L’amendement que j’ai l’honneur de déposer sur le bureau, est la conséquence
nécessaire des explications données par le ministre. Mon but n’est pas de faire
décider à perpétuité qu’une loi sera nécessaire pour des concessions de la
nature de celles dont il s’agit dans l’amendement ; mais je veux que vous
réserviez cette question pour un plus ample informé ; la discussion actuelle
nous prend à l’improviste. Je crois que la plupart des membres conviendront que
lorsqu’ils ont concouru à fixer le jour de la discussion actuelle, ils ne
s’attendaient pas aux questions qui y seraient soulevées.
Je crois que tout le monde conviendra que les 8
lignes de l’exposé des motifs de M. le ministre de l’intérieur et les 17 lignes
du rapport de la commission ne jettent absolument aucun jour sur la question.
Voici donc une question soulevée et sur laquelle il nous faut nous prononcer
d’urgence, alors que les intérêts les plus graves s’y trouvent compromis. Car
ce que l’on vous demande c’est que l’on mette à la discrétion du ministère les
intérêts les plus graves et les plus chers du pays ; et cela alors que pour la
moindre dépense, fût-elle de 100 fr., il faut que l’on s’adresse à vous. Il y a
là une inconséquence que je ne puis qualifier.
Quel que soit le sort de mon amendement, je me
féliciterai de l’avoir proposé ; et comme député je proteste à la face du pays
contre les mesures proposées ; adopter ces mesures, ce serait abdiquer nos
fonctions de député.
Mais je n’ai qu’à me prévaloir, pour faire adopter
mon amendement, des explications de MM. les ministres. Ici je ferai remarquer
que les observations du ministre des affaires étrangères ont mis dans tout leur
jour celles de M. le ministre de l’intérieur. Je n’avais pas très bien compris
M. le ministre de l’intérieur ; mais j’ai extrêmement bien compris M. le
ministre des affaires étrangères.
Selon M. le ministre de l’intérieur, il examinera
s’il convient de concéder à la fois la communication avec
Mais que dit M. le ministre des affaires étrangères
? Il s’étonne que tandis qu’il est certain qu’en ce moment il n’existe pas de
loi qui autorise le gouvernement à exécuter aux frais de l’Etat une
communication avec
M. le ministre des affaires étrangères paraît
prendre un vif intérêt à ce qu’il y ait une communication avec
M. le ministre des affaires étrangères a réellement
eu l’air de faire un appel à des intérêts de localité. Il a semblé dire :
« Je suis ici ; je profiterai de ma position pour vous accorder une
communication avec
Mais il n’y a pas ici que
des intérêts de localité qui soient en jeu : il y a l’intérêt de l’Etat ; et
toutes les fois que les intérêts de l’Etat sont en jeu dans une question, votre
devoir est de ne déléguer à personne le droit d’en décider, et de vous réserver
ce droit par cela même que vous êtes les députés de la nation. La question
n’est plus entière. Il ne s’agit plus d’examiner s’il convient, en thèse
générale, que le gouvernement exécute ou non les travaux de routes en fer ;
vous avez décidé cette question ; une loi existe qui a créé, à cet égard, des
intérêts de l’Etat. Il existe un système de grandes communications de chemins
en fer, à établir par l’Etat ; donc l’Etat a ici un intérêt : personne n’osera
dire que la création d’une communication de chemins de fer avec
Je ne pense pas que
personne émette une telle assertion. Dès lors la question est jugée. Vous ne
devez pas, vous ne pouvez pas accorder au gouvernement le droit de prononcer
sur les intérêts de l’Etat. Est-ce que tout est perdu, dès qu’une loi doit être
portée ? Tout n’est-il pas sauf au contraire, puisque tous les véritables
intérêts sont défendus dans cette enceinte ?
Je pense donc que la chambre doit adopter
l’amendement que j’ai eu l’honneur de proposer.
M. Legrelle. -
Je me rallie entièrement à l’amendement de M. Dubus, qui est l’expression de ce
que je voulais dire.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne rentrerai pas dans la discussion, car je crois que l’honorable
préopinant n’a détruit aucune des considérations que j’avais fait valoir.
Vous vous apercevez très bien, quels que soient les
termes de l’amendement, qu’il vous réserve la concession de chemins de fer. Il
suffira, je pense, d’attirer votre attention sur ce point.
C’est à vous à décider s’il y a des motifs
suffisants de paralyser l’industrie en Belgique. Quant à moi, je crois
l’amendement proposé tout à fait opposé aux intérêts du pays.
- La clôture de la discussion est prononcée.
M. Gendebien. -
Mon amendement est subsidiaire à celui de M. Dubus, c’est-à-dire qu’il tombe si
l’amendement de M. Dubus est adopté ; mais s’il n’est pas adopté, je demande
que le mien soit mis aux voix.
- L’amendement de M. Dubus est mis aux voix par
appel nominal ; voici le résultat du vote :
57 membres sont présents.
1 (M. Milcamps) s’abstient.
24 membres votent pour l’adoption.
32 votent contre.
La chambre n’adopte pas.
Ont voté pour l’adoption : MM. Cornet de Grez,
Demonceau, Dequesne, de Sécus, Devaux, Doignon, Dubus, B. Dubus, Dumortier,
Duvivier, Gendebien, Jadot, Lardinois, Lebeau, Legrelle, Liedts, Mast de Vries,
Nothomb, Pirmez, Rogier, Trentesaux, Verdussen, H. Vilain XIIII, Zoude.
Ont voté contre
l’amendement : MM. Berger,
Bosquet, Coghen, Corbisier, Dechamps, de Jaegher, de Longrée, de Meer de
Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, de Muelenaere, de Nef, de Puydt, de
Renesse, Desmet, de Terbecq, de Theux, d’Hoffschmidt, Eloy de Burdinne, Ernst,
Frison, Lejeune, Meeus, Raikem, A. Rodenbach, Troye, Ullens, Vandenbossche,
Vandenhove, Vergauwen, C. Vuylsteke, L.
Vuylsteke.
M.
Milcamps. - Je me suis abstenu, parce que, contre mon habitude, je
n’avais pas examiné le projet de loi, et que je ne me sens pas en état
d’émettre un vote consciencieux, tant la question me paraît grave.
M.
le président. - Je vais mettre aux voix l’amendement de M. Gendebien.
M. Rogier. - Est-ce
que cet amendement comprend les Flandres ?
M. Gendebien. -
Oui sans doute.
M.
Legrelle. - Je crois que les intentions de l’honorable membre sont de
mettre les péages des chemins de fer concédés avec ceux des chemins de fer
exécutés par l’Etat. Alors il faut mettre dans l’article : « Les péages
fixes et à fixer, » parce qu’il est très possible que, dans la suite, les
péages sur les chemins faits par l’Etat soient encore diminués.
M. Gendebien. -
Mon amendement remplit ce but, tel qu’il est rédigé.
J’aurais bien des choses à répondre à M. le
ministre de l’intérieur qui a attaqué mon amendement ; mais, d’un autre côté,
M. le ministre des affaires l’a adopté et a trouvé fort juste le principe qu’il
consacre, ou plutôt il a reconnu qu’il n’était que la conséquence de la loi de
1834. Je ne veux pas et n’ai d’ailleurs pas de motifs de prolonger la
discussion.
M.
Devaux. - Je voudrais savoir s’il n’est pas dans l’intention de
l’honorable auteur de l’amendement de déroger à la loi du 1er mai et de la
restreindre.
M. Gendebien. -
Mon amendement n’est au contraire qu’une conséquence de cette loi.
M.
Legrelle. - Je prends acte de ce qui a été dit, que dans le cas où les
péages sur les routes de l’Etat viendraient à diminuer, la même baisse devrait
avoir lieu sur les chemins mis en concession.
M. Dumortier. -
Si je comprends bien l’article de la loi, l’amendement proposé en est une
dérogation. Cet amendement sous-entend la possibilité que le gouvernement
accorde sans loi une concession de chemin de fer par le Hainaut vers
M. Gendebien. -
Voilà ce que c’est que d’entamer intempestivement une discussion grave et de la
clôturer prématurément ; si la clôture n’avait pas été prononcée, j’aurais
répondu victorieusement, je pense, au ministre de l’intérieur ; je me bornerai
à faire remarquer qu’il a tenu le langage que, lors de la discussion du mois de
mai, je prédisais qu’il tiendrait.
Rappelez-vous, messieurs,
qu’après quinze jours de discussion, on a réuni à la section centrale 15 ou 20
membres, pour s’entendre sur la grave question de la garantie que je demandais
pour le Hainaut, de ne payer pour l’usage des routes et canaux que sur le même
pied et d’après le tarif qui serait établi pour les houilles de la province de
Liége. M. le ministre de l’intérieur consentit à l’insertion d’une disposition
dans ce sens, et il me proposa de présenter un amendement.
Je lui répondis : « Nous sommes d’accord ; je
n’ai plus rien à dire, pourvu que vous proposiez vous-même l’amendement, afin
d’éviter que plus tard, pour se soustraire à cet engagement, on ne dise qu’on
n’a fait que céder aux exigences du Hainaut, afin de se débarrasser de
l’opposition de ses représentants. » Eh bien, c’est ce qui vient
d’arriver, le ministre de l’intérieur vient de dire qu’on n’avait fait que
céder à des exigences pour avoir une majorité plus grande.
Je vous demande si, avec cette manière d’entendre
la loi, nous avons l’espoir d’avoir un chemin de fer dans le Hainaut construit
par le gouvernement ; je vous demande si quand nous le réclamerons, on ne nous
répondra pas en nous le promettant. On n’a fait que céder à des exigences.
C’est dans la conviction où je suis qu’on n’exécutera pas cette promesse, que
je demande une garantie d’exécution du principe posé dans la loi de 1834,
garantie que M. le ministre des affaires étrangères a adoptée, a trouvée juste,
et que je déclare rigoureusement indispensable ; sans cela vous ne pouvez
autoriser le gouvernement à faire une concession quelconque de chemin de fer
dans la direction du Hainaut.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’honorable préopinant ne m’a pas compris. J’ai dit que la concession de la
route par le Hainaut n’aurait lieu que par une loi spéciale. Il pourra proposer
dans cette loi les garanties qu’il croira nécessaires lors qu’il sera appelé à
la discuter. Mais l’amendement qu’il propose a une autre portée ; il y a une
foule d’autres chemins qui pourront être faits dans la direction de
Je ne sais en vérité où l’honorable membre a trouvé
à s’alarmer de ce que j’ai rappelé qu’on n’avait fait que céder aux exigences
du Hainaut en lui promettant un chemin de fer lors de la loi du 1er mai.
Je n’ai rappelé ces faits
que pour répondre au député de Turnhout.
M.
de Puydt, rapporteur. - La rédaction de l’amendement de l’honorable M.
Gendebien me paraît très vague. Son intention, je crois, est de n’appliquer son
amendement qu’aux chemins qui viendraient aboutir à celui de l’Etat.
Il faudrait exprimer cette intention dans
l’article, sans cela il s’appliquerait à des chemins de fer qui vont de
certains points du Hainaut vers
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - On ne pare à aucun inconvénient par
cette modification, car plusieurs chemins particuliers destinés à l’exportation
de nos marchandises viendront s’embrancher au chemin de l’Etat. Cet amendement
ne peut avoir qu’une portée, c’est que le Hainaut ne sera pas, quant au chemin
principal, soumis à des conditions plus dures que le reste du pays. Cette
garantie est suffisamment établie dans la loi du mois de mai 1834.
M.
Gendebien. - J’ai dit que je ne voulais poser dans la loi actuelle que
la conséquence du principe établi dans la loi de 1834. Le ministre vient de
vous dire qu’il y a d’autres chemins de fer qui iront vers
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Non !
M. Gendebien. - Vous
l’avez formellement promis dans la loi. C’est après 15 jours de discussion que
cela a été arrêté positivement. Il y a promesse formelle par la loi que les
péages, pour les produits du Hainaut, seront établis par kilomètre et au poids
par un même tarif.
Maintenant, pour entrer
dans les idées émises par l’honorable M. de Puydt, je modifierai mon amendement
de la manière suivante :
« Néanmoins, le gouvernement ne pourra
accorder des concessions de chemin de fer s’embranchant avec ceux de l’Etat,
dans la direction du Hainaut et vers la frontière, sans stipuler expressément,
etc. »
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Je n’ai qu’une seule observation à
faire, c’est que cet amendement est impraticable.
M. Dumortier. -
Je ne comprends pas la question dont il s’agit : nous votons sur les matières
les plus graves relatives à l’industrie, sans nous comprendre ; ce n’est pas
ainsi qu’on vote dans notre pays. (Bruit.)
- L’amendement de M. Gendebien, mis aux voix, n’est
pas admis.
L’amendement de M. Legrelle, tendant à proroger la
loi jusqu’en 1837, est mis en délibération.
M. Dumortier. -
Je demande la parole.
De
toutes parts. - Il y a clôture ! il y
a clôture !
- Après deux épreuves par assis et levé,
l’amendement de M Legrelle est adopté.
Le projet de loi est conçu
dans l’article unique suivant :
« La loi du 19 juillet 1832, sur les
concessions de péages, est prorogée au 1er janvier 1837. »
- Cet article est adopté.
Sur la demande de M. le ministre de l’intérieur, la
chambre décide qu’il y a urgence de voter la loi.
M. Dumortier. -
J’écris un article additionnel à la loi : n’allez pas si vite, n’allez pas si
rapidement.
M. le président. -
La chambre a voté la clôture, et je n’agis pas rapidement.
M. Dumortier. -
Je n’adresse pas des reproches au président, je dis simplement qu’on va
rapidement.
Messieurs, je voulais proposer un amendement
tendant à ne pas accorder à la société générale la concession d’un chemin de
fer avant qu’elle n’ait liquidé ses comptes avec l’Etat. (Bruit.)
- On procède à l’appel nominal pour le vote
définitif du projet de loi.
56 membres sont présents.
50 votent l’adoption.
6 votent le rejet
En conséquence, la loi est adoptée et sera
transmise au sénat.
Ont voté l’adoption : MM. Jadot, Lardinois, Lebeau,
Legrelle, Lejeune, Liedts Mast de Vries, Meeus, Nothomb, Pirmez, Raikem,
Raymaeckers, A. Rodenbach, Rogier, Trentesaux, Troye, Ullens, Vandenbossche,
Vandenhove, Verdussen, Vergauwen, C. Vuylsteke, L. Vuylsteke et Zoude.
Ont voté le rejet : MM. Demonceau, Dequesne, Dubus
aîné, Dumortier, Gendebien, H. Vilain XIIII.
PROJET DE LOI RELATIF AUX
DROITS SUR LES OS
M. le président. -
M. Gendebien propose de remplacer la loi par la disposition suivante :
« La loi du 25 mars 1834 portant des
modifications aux droits d’entrée, de sortie et de transit des os, conservera
force obligatoire jusqu’à disposition ultérieure. »
M. Legrelle. -
Il faut que nous votions immédiatement, si nous voulons obtenir un résultat. En
tardant une demi-heure seulement, nous ne serons plus en nombre suffisant pour
délibérer.
M. Gendebien. -
Mon amendement ne tend qu’à éviter une discussion très longue ; la chambre
pourra lors de sa rentrée discuter le projet tel qu’il a été présenté. Nous ne
préjugerons rien.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - Pour ne pas donner lieu à des
discussions, je me rallie à l’amendement de M. Gendebien ; mais je persiste à
penser que la loi a été faite dans l’intérêt de l’industrie.
- L’amendement de M. Gendebien est mis aux voix et
adopté.
Le projet de loi ainsi amendé est mis aux voix par
appel nominal.
Il est adopté par les 55 membres présents qui
répondent à l’appel.
FIXATION DE L’ORDRE DES
TRAVAUX DE
M. le président. -
Il s’agit maintenant de fixer l’époque de la rentrée de la chambre.
Plusieurs
membres. - Au deuxième mardi du mois de janvier.
M.
F. de Mérode. - Vous ne pouvez prendre un congé aussi long ; ajournez-vous
pour 5 ou 6 jours, à la bonne heure. Il y a à peine 6 semaines que nous avons
eu deux mois de congé. Il n’y a pas d’exemples dans aucun pays que l’on prenne
des congés aussi longs.
M. le président. -
Je prierai la chambre de vouloir bien fixer le jour où elle est réellement
décidée à revenir. Il est fort désagréable pour ceux qui sont à leur poste
d’attendre que les autres arrivent. L’année passée nous avons été 8 jours sans
pouvoir ouvrir la séance.
M. F. de Mérode.
- Je propose de fixer la rentrée au 5 ou au 6 de janvier.
M. Gendebien. -
L’année passée la rentrée avait été fixée au huit et la chambre a été fort longtemps avant de se trouver en nombre. Je suis prêt à
rentrer le deux janvier si l’on veut, mais je n’aime pas à faire des corvées.
C’est pourquoi je ne m’oppose pas au terme du douze janvier, pourvu que tout le
monde revienne au jour fixé.
M. F. de Mérode.
- Si vous prenez constamment des congés, jamais les lois urgentes ne seront
votées : il vous faudra un congé au carnaval, il vous en faudra un autre à
Pâques ; toutes ces interruptions sont contraires à l’esprit de la
constitution. Qu’il soit convenu au moins qu’on ne prendra pas de congé au
carnaval.
- La chambre adopte le terme du 12 janvier.
M. le président. -
Je prie chacun des membres de se trouver à son poste ce jour-là.
M. Gendebien. - Je
fais la motion que l’on écrive aux députés absents pour les informer de la
résolution de la chambre.
- La séance en levée à 3 heures et demie.