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Chambre des représentants de Belgique
Séance
du samedi 14 février 1835
Sommaire
1) Pièces
adressées à la chambre
2) Rapports
sur des pétitions portant, notamment, sur l’exercice de la pêche nationale à
Anvers (Legrelle, Dechamps, A. Rodenbach, d’Huart, Smits, Jullien, d’Huart,
Pirson, Donny, de
Nef, Legrelle, de
Muelenaere, Verdussen, de
Brouckere, Gendebien, d’Huart,
Legrelle, Ernst, Dumont, Gendebien, d’Huart, Ernst, de Brouckere, Smits, d’Huart, Gendebien, Fallon, A. Rodenbach, Dumont, d’Huart, Gendebien, de Brouckere, Pirson, de Muelenaere, de Brouckere, d’Huart, Gendebien, de Brouckere, d’Huart, de Muelenaere, Duvivier, Jullien, Ernst, Gendebien), sur des indemnités pour pertes dues à l’agression hollandaise,
sur des mesures de protection de la marine
commerciale et sur les tarifs de douane (droits différentiels), sur un
traitement d’attente (Desmanet de Biesme, Jullien, Duvivier, d’Huart)
3) Projet
de loi portant le budget du département des finances pour l’exercice 1835
4)
Rapports sur des pétitions portant, notamment, sur des indemnités pour pertes
dues à l’agression hollandaise et sur l’exemption de droits d’entrée pour un Belge exploitant
des terres aux Pays-Bas (Van Hoobrouck, Gendebien), sur
les droits sur les moules, le canal d’écoulement dans les Flandres et les
polders (Gendebien, Van
Hoobrouck, Gendebien), sur les polders (Dumortier, Van Hoobrouck, Gendebien)
(Moniteur belge n°46, du 15 février 1835 et Moniteur belge n°47, du 16
février 1835)
(Présidence de M. Raikem.)
(Moniteur belge n°46, du 15 février 1835) M.
de Renesse procède à l’appel nominal à une heure.
M.
Brixhe lit le procès-verbal de la séance d’hier ; la rédaction en est
adoptée.
M.
de Renesse expose succinctement le but des pièces adressées à la
chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Plusieurs bourgmestres,
conseillers communaux et notables, du canton de Kerkraede, réclament contre le
projet conçu par le gouvernement de mettre en location les houillères de
Kerkraede. »
_______________
« Plusieurs sauniers belges
proposent diverses modifications à la loi sur les sels. »
- Ces mémoires sont renvoyés à
la commission des pétitions.
M.
de Renesse. - Plusieurs bourgmestres, conseillers communaux et notables
du canton de Kerkraede, district de Maestricht, rive droite de
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Je ne vois aucun inconvénient à
renvoyer la pétition à la commission spéciale ; mais il n’y a pas tellement
urgence qu’il soit nécessaire de lui demander un rapport sous huitaine. Il n’est
pas question de mettre si tôt en adjudication la houillère de Kerkraede, car
c’est une affaire qui s’instruit et qui n’est pas décidée.
M. Hye-Hoys, rapporteur, est appelé à la tribune et s’exprime en
ces termes. - Messieurs, la commission des pétitions a examiné la réclamation
d’un grand nombre de pêcheurs du port d’Anvers, par laquelle ils se plaignent
que par plusieurs décisions, le ministre des finances s’autorisant des lois qui
établissent des droits de douanes sur les poissons de mer de pêche étrangère,
veut assujettir les pêcheurs du port d’Anvers au paiement de ces droits pour
les poissons qu’ils introduisent dans le pays, sous prétexte que ce poisson
n’est pas pêché en mer par navire belge, mais acheté des pêcheurs étrangers.
Les pétitionnaires semblent
nier que le poisson ainsi introduit provienne de la pêche étrangère, et
prétendent qu’il provient de la pêche nationale.
D’après les décisions déposées
sur le bureau par M. le ministre, et imprimées au Moniteur, le poisson proviendrait de la pêche étrangère ; il serait
par conséquent soumis aux droits.
Comme il s’agit ici de faits,
sur lesquels les parties ne sont pas d’accord, votre commission n’a pu émettre
une opinion sur le point de droit ; en conséquence elle m’a chargé de vous
proposer le renvoi de la pétition au ministre des finances et au bureau des
renseignements. M. le ministre ayant déjà donné des explications sur cette
pétition, la chambre verra si ces explications sont suffisantes, et si elles ne
lui paraissent pas telles, elle est en droit d’en demander de plus amples.
M.
Legrelle. - Messieurs, la question que soulève l’interdiction du droit
de pêche pour les habitants riverains de l’Escaut est grave ; veuillez
m’accorder toute votre attention.
Dans un Etat bien organisé,
chez tous les peuples où la civilisation a porté d’heureux fruits, le premier
devoir du gouvernement est de favoriser le commerce et l’industrie, et de faire
jouir toutes les parties d’une même contrée d’une somme égale d’avantages et de
droits ; mais ce devoir devient plus impérieux encore, lorsqu’après une
révolution qui a dû ébranler un grand nombre de fortunes et déplacer plusieurs
branches d’industrie, il importe de relever le commerce de son abattement, et
de rendre au génie industrieux de l’homme toute son activité et son essor.
Le ministère actuel remplit-il
à cet égard la tâche bienfaisante que sa haute position lui impose ? A
n’envisager que le département de l’intérieur, dans les attributions duquel
l’agriculture, le commerce et l’industrie se trouvent spécialement placés, je
crois qu’il y a peu de reproches à faire au pouvoir, puisque par des mesures
journalières ce département tend à ouvrir de nouveaux débouches à nos produits,
à multiplier les communications entre tous les points du royaume, à construire
des routes qui vont rendre la fécondité à plusieurs de nos bruyères, et à
former enfin le vaste réseau de fer qui promet de changer bientôt la distance
de plusieurs jours en une distance de quelques heures ; je suis donc convaincu
que si le ministre de l’intérieur n’a pu satisfaire jusqu’ici à toutes les
justes exigences, il n’a du moins rien négligé pour y parvenir.
Mais à côté de ce ministère il
en est un autre auquel je regrette de n’avoir pas le même tribut d’éloges à
offrir. Celui-ci dans une louable sollicitude, il est vrai, pour les intérêts
du trésor, dont il est constitué le principal gardien, ne craint pas
quelquefois d’arrêter l’élan de l’industrie : loin de moi cependant de blâmer
le caractère personnel d’un ministre dont j’apprécie les bonnes intentions, la
droiture et les talents. Je sais même que c’est dans son administration que des
intérêts opposés viennent se heurter avec le plus de violence, et qu’indépendamment
de la probité et du savoir, il faut une plus longue pratique que celle du chef
actuel des finances pour pouvoir se dérober aux suggestions étrangères, aux
suggestions d’hommes dont le soin outré pour les revenus du fisc trompe la
religion de leur chef et l’expose à d’imprévoyantes et à de fausses démarches ;
c’est à ces suggestions étrangères que j’attribue les paroles imprudentes
prononcées naguère dans une autre enceinte, et qui eussent jeté le trouble et
la consternation dans une classe nombreuse d’industriels, éminemment utiles au
pays, et dont nous devons admirer les efforts et les progrès, si les intentions
bien connues des chambres, les promesses postérieures du ministre et surtout
des paroles émanées d’une autre source n’eussent rassuré ces estimables
fabricants contre les chances funeste d’un avenir perturbateur.
C’est encore sans doute à ces
mêmes suggestions que la décision malencontreuse et peu légale du 2 de ce mois,
qui frappe à mort, dans une grande localité, un autre genre d’industrie, doit
sa naissance ; et puisque, grâce à vos suffrages, cette décision qui semblait
destinée à devenir une arme d’autant plus terrible qu’elle aurait frappé sans
être vue, est condamnée à paraître au grand jour, puisqu’il est permis d’en
exposer aujourd’hui le défaut d’équité, je vais y porter sans aigreur, mais
aussi sans ménagement, le scalpel d’une juste censure.
Vous le savez, messieurs, le
ministre, après avoir avancé dans ses considérants qu’il n’y a pas de pêche
nationale à Anvers si ce n’est celle du poisson qui se pêche dans le bas
Escaut, a décidé, dans sa prétendue omnipotence, que le directeur des
contributions suspendrait l’effet de toutes les permissions qui auraient pu
être accordées à Anvers pour la pêche nationale en mer.
Rien à mes yeux n’est moins
logique que les considérants de cette décision, puisqu’on y résout, comme je
l’ai déjà dit, la question par la question même. Rien n’est moins équitable et
plus partial que son dispositif ; enfin rien n’est moins conforme au respect
que l’on doit aux jugements des tribunaux, puisque l’arrêté du 25 avril
dernier, dont les dispositions arbitraires ne sont cependant pas comparables à
celles du 2 février, ont déjà été flétries et déclarées illégales par arrêt de
tribunal.
Vous prétendez, M. le ministre,
qu’il n’y a pas de pèche nationale à Anvers, que cette pèche est impossible à
Anvers… Mais comment le savez-vous ? Par des dénonciations anonymes, par des
rapports inexacts, intéressés peut-être, reçus dans le cabinet et médités avec
prévention.
Il n’y a point de pêche
nationale, dites-vous ; mais comment concilier cette assertion hardie avec la
démarche faite le 7 de ce mois, cinq jours après votre quasi-arrêté, par six
pêcheurs, qui munis de filets, hameçons, réservoirs, rôle d’équipage, enfin de
tout le gréement et armement nécessaire pour exercer leur industrie, et
accomplissant les formalités voulues par les lois, font à la douane la
déclaration qu’elle exige, et protestant par exploit d’huissier contre le refus
qu’ils éprouvent ? Et ce refus, sur quelle disposition légale se fonde-t-il ?
Uniquement, messieurs, sur le bon vouloir du ministre ; et ce vouloir suffit-il
dans un pays où l’art. 112 de la constitution doit être à jamais une vérité ?
Mais ce qui réfute à mes yeux
victorieusement l’assertion du ministre, et démontre à l’évidence que la pêche
nationale existe à Anvers, c’est une déclaration que je tiens en main d’un
pilote et d’un employé du pilotage qui, se trouvant à Flessingue, le 11 de ce
mois, déclarent avoir vu arriver ledit jour, à 4 heures de relevée, venu de la
mer en relâche, avec le vent O. N. O., les ris dans les voiles, le navire de
pêche belge, le Bœuf d’Anvers,
commandé par le patron Servais.
Ce n’est pas tout : les
pêcheurs que vous mettez hors la loi commune, à qui vous interdisez la libre
navigation, puisque c’est l’interdire pour eux que de leur en ôter les
avantages et les effets, ces pêcheurs, dis-je, veulent se soumettre à toutes
les épreuves qu’il vous plaira leur imposer ; ils vous offre de vous recevoir
sans frais dans leurs embarcations, vous, ou des agents de votre choix ; ils
veulent vous démontrer à l’évidence que leurs filets, leurs hameçons et tout
leur gréement n’est pas un vain simulacre de pêche, que leur industrie enfin
n’est point une fraude, un mensonge. Je ne sais réellement si ces braves gens
peuvent vous offrir des preuves plus faciles et plus incontestables de leur
bonne foi, à moins d’élever la prétention ridicule, et que je ne vous suppose
pas, que les poissons pêchés devront porter comme marque distinctive sur leurs
écailles l’empreinte du filet hollandais ou de l’hameçon belge.
Si j’étais à la place du
ministre des finances et que j’eusse comme lui l’immuable conviction que la
pêche nationale est de toute impossibilité à Anvers, et que les propositions
des pêcheurs sont un leurre, voilant le projet d’un vil trafic, j’aurais hâte
d’accepter leurs propositions, non point pour augmenter ma conviction, ce qui,
j’en conviens, serait inutile, mais pour démentir l’assertion mensongère des
pêcheurs, et pouvoir prouver en même temps, aux tribunaux, à la chambre et au
pays, que ma décision, basée sûr l’exacte vérité, a été juste et légale.
M. le ministre nous a dit que les Hollandais ne permettraient pas aux
Anversois d’aller pêcher du poisson en mer. Je suis surpris messieurs,
d’entendre semblables paroles sortir, sans doute par erreur, de la bouche d’un
ministre belge, et si je les relève ici, c’est afin qu’elles n’aient pas un
fâcheux retentissement dans le public ; je les démens formellement et j’engage
aussi le ministre des relations extérieures à réfuter instantanément son
collègue comme il a démenti il y a quelques jours une assertion analogue qui ne
se rapportait néanmoins qu’à notre situation future : l’honorable M. de
Muelenaere disait à cette occasion : « Je désire qu’on sache bien que
jamais le gouvernement belge n’a reconnu au gouvernement hollandais ni le droit
de visite, ni le droit d’apporter des
entraves à notre navigation, et qu’il l’a toujours contesté de la manière
la plus positive et la plus formelle. »
Il serait difficile,
messieurs, de faire concorder ces nobles paroles avec telle autre citation que
je viens de faire, et qui, sans la connaissance que j’ai de l’énergie du
ministre des finances, me donnerait lieu de croire que, cédant avec légèreté à
de sinistres et trompeurs pressentiments, il craint de s’exposer à des embarras
extérieurs, en consentant à l’épreuve que les pêcheurs d’Anvers lui présentent.
Mais que deviendraient dans ce cas notre avenir, notre indépendance, notre
nationalité ? Notre avenir serait un problème, notre indépendance une erreur,
notre nationalité un non sens...
La chambre, plus d’une fois a
reconnu l’urgence de former des marins en Belgique ; divers orateurs ont
proposé à cet effet la création d’une marine marchande, sans reculer devant les
énormes dépenses qui devaient en résulter pour l’Etat ; le ministre de
l’intérieur lui-même avait porté, cette année, à son budget une somme assez
considérable pour encourager la pêche lointaine ; et, par une anomalie
inexplicable, un autre ministre veut ôter à une partie du pays tous les
avantages qui se rattachent à la pêche nationale, et empêcher ainsi l’éducation
de gens de mer, à laquelle cette pêche doit puissamment contribuer.
Par le motif que certains
hommes ont abusé du permis de pêcher, toute permission quelconque pour la pêche
nationale est refusée aux habitants de la seconde ville du royaume, et cette
incroyable interdiction, qui enveloppe, comme je l’ai déjà dit dans une autre
séance, dans une même proscription, ceux qui fraudent et ceux qui ne fraudent
pas, a lieu sous un gouvernement juste et paternel, et en présence d’une
chambre jalouse de veiller au maintien de tous les droits, sans distinction de
qualités et de personnes.
Mais, en mettant une
population entière hors la loi commune, et en dotant ainsi, sous prétexte de
fraude, les ports d’Ostende, de Blankenberg et de Nieuport, d’un monopole que
nos lois ne peuvent admettre et que l’art. 112 de la constitution proscrit, le
ministre pense-t-il que ces ports privilégiés soient exempts du reproche qu’il
fait à celui d’Anvers ? A Dieu ne plaise, messieurs, que je veuille attirer les
rigueurs et l’arbitraire du pouvoir sur ces localités ! je sais trop comment
les mesures fiscales font souffrir ceux qu’elles poursuivent ; mais c’est une
vérité triviale que partout où il y a commerce, il y a fraude, et que telle
localité ne diffère à cet égard de telle autre que par le plus on le moins de
fraude qui s’y commet. Il est d’ailleurs de notoriété publique que le poisson
importe à Ostende est, si je puis m’exprimer ainsi de pêche croisée aussi bien
que celui qu’on débite à Anvers. A l’appui de cette vérité, la pétition dont
nous nous occupons nous signale le bateau pêcheur de Nieuport, capitaine
Cornie, qui dernièrement a péri sur les côtes hollandaises ; mais ce bateau,
que faisait-il dans ces parages ? Certes, il ne s’y livrait pas à la pêche
nationale....
Les poissons qu’on importe à
Ostende, à Blankenberg ou à Nieuport, ne sauraient avoir, plus que ceux
d’Anvers, des certificats d’origine belge, et personne n’ignore qu’en cas de
vents contraires, il est inutile de jeter les filets sur les côtes de Flandre ;
et force est alors aux pêcheurs de rentrer sans charge, à moins d’acheter,
comme ils le font sans aucun doute, du poisson à l’étranger, et de l’introduire
dans nos ports avec un brevet de naturalisation... Mais si ces poissons
pouvaient parler, comme ceux des fabulistes, vous reconnaîtriez bientôt à leur
accent anglais, français ou hollandais, beaucoup d’étrangers parmi eux.
Je me résume, messieurs, en
conjurant le ministre d’écouter les plaintes d’une ville si digne de ses
égards, et de révoquer sans délai une mesure que je ne puis m’abstenir de
regarder comme impolitique, arbitraire et vexatoire et qui compromettant
l’existence d’une classe nombreuse de citoyens dont la pêche et le commerce du
poisson alimentent les familles, peut avoir les plus funestes résultats.
Si, dans cette circonstance j’ai tenu un langage
sévère et qui n’entre point dans mes habitudes parlementaires, c’est que je
suis profondément pénétré, péniblement affecté du mécontentement que la
décision ministérielle a déjà produit parmi un grand nombre de mes commettants
; j’ai cru qu’il était préférable de dire ici toute ma pensée au ministre et de
recourir à votre justice, plutôt que d’avoir à déplorer peut-être dans la suite
avec vous des excès que je serais le premier à condamner, et au besoin le
premier à réprimer, mais que j’engage aussi de son côté le ministre à prévenir
par un prompt retour à l’ordre légal.
M.
Dechamps. - (Note du webmaster :
Le Moniteur du jour signalait que le discours de Dechamps serait publié dans un
prochain numéro. Ce discours n’a pas été retrouvé.)
M.
A. Rodenbach. - L’honorable député nous a cité un certificat de pilote
de Flessingue, par lequel on constate que des pêcheurs d’Anvers ont été en
pleine mer. Il est possible qu’un bateau ait été en pleine mer, mais cela ne
prouve rien. Moi, je viens de recevoir une lettre d’un capitaine de canonnière
qui prétend que c’est toujours dans l’Escaut que le transbordement a lieu.
Il n’y a
point de pêcheurs à Anvers, ou plutôt les soi-disant pêcheurs d’Anvers, au lieu
d’ustensiles de pêche, ont des sacs d’écus. Avec leur argent, ils vont près des
pêcheurs hollandais, achètent leur poisson, et alors le transbordement a lieu.
Cela se fait au détriment des pêcheurs de Blankenberg, de Nieuport et
d’Ostende. On a dit que les pêcheurs d’Ostende achetaient du poisson aux
Anglais. Ce sont au contraire les pêcheurs d’Ostende qui vendent à l’Angleterre
; car c’est à Ostende que les Anglais viennent acheter le poisson fin. Au
surplus, je dois aussi bien avoir confiance en un commandant de canonnière
qu’en un certificat de pilote de Flessingue, et je dois déclarer que la manière
d’agir des pêcheurs d’Anvers porte un grand préjudice aux pêcheurs de
Blankenberg,de Nieuport et d’Ostende.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - A l’occasion de la pétition qui
occupe en ce moment la chambre, l’honorable M. Legrelle a jugé à propos de
lancer contre moi des accusations extrêmement graves et qu’il ne m’est pas
possible de laisser passer sous silence. Il a dit que je faisais tous mes
efforts pour arrêter l’élan de l’industrie nationale, et que dans une autre
enceinte j’avais proféré des paroles imprudentes qui avaient jeté l’alarme la
plus vive dans cette même industrie. Je présume que l’orateur a voulu parler
des raffineries de sucre.
Interpellé au sénat par un
honorable membre sur l’élévation de la prime qui est réellement payée, en
grande partie, aux raffineurs sous le nom de restitution, j’ai dit que la prime
accordée aux raffineries était onéreuse au trésor et tout à l’avantage des
raffineurs ; mais que comme cette question était d’un grand intérêt pour le
pays, il fallait s’entourer de tous les documents possibles, provoquer tous les
renseignements avant de se prononcer définitivement sur cette question. Vous
jugerez, messieurs, si ce sont là des paroles imprudentes ; mais je ne crois
pas qu’on puisse les qualifier ainsi. (Non
! non !)
L’honorable M. Legrelle
persiste à prétendre que j’ai interdit la pêche nationale à Anvers. Je crois
avoir expliqué déjà, dans une séance précédente, qu’il n’en était rien. Je n’ai
nullement l’intention d’entraver la pêche nationale, je n’entends même que la
protéger. J’ai simplement déclaré que, comme il n’y avait pas de pêche
nationale à Anvers, le poisson de mer qui y était introduit devait provenir de
pêches étrangères, et à ce titre était astreint à payer le droit exigé. Je
répète qu’il n’y a aucune pêche nationale en mer à Anvers ; nulle disposition
législative antérieure ne l’a reconnu. Le décret du 25 avril
Il est à remarquer, messieurs,
que le décret de
Il en est de même du port de
Blankenberg et de Nieuport. On se trouve là aussi sur les côtes, on est bien
certain que les bâtiments se rendent en mer, et pourtant on ne reconnaîtrait
pas qu’il y ait pêche nationale, si les pêcheurs ne se soumettaient pas aux
conditions établies.
Si, avant le gouvernement
actuel, on n’a pu établir qu’il y eût une pêche nationale à Anvers, comment
peut-on espérer de le prouver aujourd’hui qu’on doit, pour exercer la pêche,
traverser le territoire hollandais, aujourd’hui qu’on est en quelque sorte
séparé de la mer par des localités étrangères. Pour pouvoir s’assurer que les
bateaux pêcheurs d’Anvers se rendent en mer, il faudrait avoir sur les côtes à
l’embouchure de l’Escaut un point de vérification qui permît de s’en assurer.
Les bateaux dans ce cas devraient donc aller jusque près de Blankenberg, et
l’on conçoit dès lors qu’ils ne sauraient soutenir la concurrence avec des
navires existants sur les lieux.
L’honorable M. Legrelle m’a
proposé, il est vrai, et c’est là son unique moyen, de monter moi-même sur un
bateau pêcheur, ou d’y envoyer des employés pour m’assurer qu’il y a réellement
pèche de mer à Anvers. Eh bien, c’est de cette proposition seule que je tire la
conclusion qu’il y a impossibilité d’avoir une pêche nationale de mer à Anvers,
puisque M. Legrelle n’a pu trouver aucun autre moyen plus efficace pour arriver
à nous convaincre qu’elle existait.
J’ai dit
dans une séance précédente, et le député d’Anvers m’en a fait un amère
reproche, que les Hollandais empêcheraient les bateaux pêcheurs d’Anvers de se
livrer à la pêche dans leurs parages ; mais je n’ai pas dit qu’ils en eussent
le droit. Je répète qu’en fait ils l’empêcheraient probablement. Au surplus, je
ne veux pas argumenter sur ce point. Je ne veux pas toucher ici le droit public
de
M. Legrelle a cité une espèce
de procès-verbal fait par un pilote de Flessingue : on a déjà répondu à cela ;
il est fort possible qu’on ait envoyé ce pilote en mer afin qu’il vînt déposer
dans le procès qui se soutient aujourd’hui devant la cour d’appel. Ce fait
isolé et combiné pour la circonstance ne prouve rien. J’attendrai la suite de
la discussion, pour me livrer à des observations ultérieures.
(Moniteur belge n°47, du 16 février 1835) M.
Smits. - Les tracasseries et les vexations dont les pêcheurs d’Anvers
ont eu à se plaindre ont obligé un grand nombre d’entre eux à se faire pêcheurs
et marchands. Ces tracasseries ont fait des progrès encore depuis la
proposition de l’honorable abbé de Foere ; et il ne s’agit de rien moins qu’à
confisquer au profit de
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Citez-les.
M.
Smits. - Je commence par dire que rien de ce que j’ai à dire n’est
personnel à M le ministre des finances : les choses se sont passées avant son
administration.
Le 19 juin 1832, un pêcheur
d’Anvers envoyait en destination de Bruxelles 5 esturgeons. Arrivée à … sa
chaloupe est abordée par une autre chaloupe montée par des hommes armés, on confisque
ses esturgeons, on les porte en ville et on les y vend. Le 4 juillet, même
année, on opère une saisie sur une cargaison entière de poisson. Cette saisie
se fait le matin et on ne rend le poisson qu’à midi après l’avoir exposé au
soleil et lorsque l’heure de la vente est passée. Le 25 septembre 1832, on
retient le navire le Bœuf, armé
expressément pour la pêche, et on laisse partir tous les autres. Le 20
septembre 1833, un autre, l’Ours sauvage,
revenait de la pêche. Il aborde à la première canonnière et continue son cours.
Ce navire rencontre un autre bâtiment. L’Ours
sauvage portait le pavillon belge. Arrivé à un second brigantin, on lui
crie d’aborder. Il croit qu’on s’adresse à l’autre navire parce qu’il n’avait
pas de pavillon ; il n’aborde pas, il reçoit un coup de feu, on tire sur lui.
Le 2 octobre 1834, un autre
capitaine, revenant de la mer, aborde à une des canonnières. Arrivé à bord, le
commandant lui demande : D’où venez-vous ? - De la mer. - On envoie bien en mer
des gens comme vous, lui répondit-on, il s’échange des paroles piquantes ; On
met le capitaine aux arrêts, on lui met les fers aux pieds.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Qu’a cela de commun avec la
douane ?
M. Smits.
- Je ne dis pas que ces actes aient été commis par la douane ; je répète encore
que je n’ai aucunement l’intention d’inculper M. le ministre des finances. Mais
je veux prouver qu’il y a réellement des vexations, et contre qui ces vexations
sont-elles exercées ? contre des navires parfaitement gréés pour la pêche.
L’honorable M. Dechamps a dit
que si on pouvait prouver qu’il existait une pêche nationale à Anvers tout
serait dit. C’est ce que je vais essayer de prouver ; mais avant tout, je dois
répondre à l’honorable M. Rodenbach qui a soutenu qu’il n’y avait pas de pêche
nationale à Anvers. C’est une grave erreur, et si, pour arriver à la preuve du
contraire, il me faut citer des noms, je citerai celui de M. Fleminex, qui arme
positivement pour la pêche.
Depuis, messieurs, il est
possible que le nombre de ces navires ait augmenté. Je ne pourrais pas indiquer
le nombre exact des navires de pêche qui existent en ce moment à Anvers.
Cependant, je trouve une lettre de la chambre de commerce d’Anvers du 25 août
1831. Je vous demanderai la permission de la lire ; vous verrez qu’en 1831 il
existait déjà des navires de pêche à Anvers.
« M. le gouverneur,
« Conformément aux désirs
exprimés dans votre lettre du 8 de ce mois, 1ère division, n°17, litt. U, nous
avons l’honneur de vous renvoyer ci-jointe, avec notre avis, la requête
présentée au gouvernement par le sieur P. Wattel, de cette ville, à l’effet
d’obtenir une prime, qu’il évalue pouvoir être fixée à fr. 1,069 pour chaque bateau
de 50 à 55 tonneaux qu’il ferait construire pour la pêche sur nos côtes et
celle de la morue dans le Nord.
« Comme cette pêche,
d’après le tonnage indiqué des navires, et le contexte même de la requête,
paraît devoir être semblable à celle qui se fait à Ostende, à Nieuport et à
Blankenberg. nous devons, tout en applaudissant à l’utile projet du sieur
Wattel, faire observer que la faveur spéciale qu’il sollicite ne pourrait lui
être accordée sans la rendre applicable à toutes les constructions du même
genre, puisqu’en matière de protection il importe de la rendre générale et non
isolée. »
Vous voyez, messieurs, que
déjà en 1831 on formait à Anvers un projet d’association pour l’exploitation de
la pêche. Vous voyez en outre qu’à Anvers on ne voulait pas de faveur spéciale
et que le premier corps commercial de cette ville demandait qu’il ne fût
accordé aucune exemption pour ce port, à moins qu’on ne l’étende aux ports
d’Ostende, de Blankenberg et de Nieuport.
Par une autre lettre sur le
même objet, voici ce que mande la chambre de commerce d’Anvers :
« M. le gouverneur,
« Répondant à la lettre que
vous nous avez bien voulu écrire le 14 de ce mois, 1ère division, n°545, litt.
C, nous avons l’honneur de vous informer que la pêche maritime, nous entendons
la grande pêche au Doggersbank et sur les côtes de l’Islande, est absolument
nulle dans ce port. Elle fleurit à Ostende ; et quelques projets sont formés
pour l’établir à Anvers, qui manque encore de marins pêcheurs capables de la
bien diriger. Tout porte à croire que la paix nous donnera cette intéressante
branche d’industrie, et avec elle le développement de la petite pêche au
cabillaud et autres poisons frais, qui se fait à 8 ou 10 lieues en mer : deux
ou trois bateaux seulement s’y livrent aujourd’hui ; mais on peut être assuré
que ce nombre serait considérablement et instantanément augmenté dès que les
bases qui consacrent la liberté de la pêche et du commerce de la pêcherie
seraient irrévocablement adoptées. »
C’était le 29 mars 1832 que
cela s‘écrivait. Voilà une attestation que deux ou trois bateaux à Anvers se
livraient à la pêche du poisson frais et étaient convenablement équipés pour
cette pêche.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Combien y en
a-t-il maintenant ?
M.
Smits. - Je n’en sais rien.
M.
Legrelle. - Six se sont présentés.
M.
Smits. - Maintenant, voulez-vous une preuve plus évidente ? Voici le
jugement de première instance dans le procès entre l’administration des douanes
et les pêcheurs, procès qui est maintenant pendant devant la cour d’appel.
(L’honorable membre, après avoir donné lecture des considérants de ce
jugement qui donne gain de cause aux pêcheurs d’Anvers, continue :) Je puis
vous donner aussi connaissance du procès-verbal d’expertise dressé par les
agents mêmes de l’administration financière. Le voici :
« Sont ensuite intervenus
MM. Antoine de Sorgher, lieutenant de vaisseau, Gaspard Van den Broeck,
enseigne de vaisseau, Charles Closset, contrôleur du port d’Anvers, Brutus
Jenni, lieutenant principal à Anvers., qui de nouveau ont procédé de commun
accord avec nous à une nouvelle visite, tant du bâtiment que du poisson qu’il
contenait. Avons reconnu, que tous les ustensiles propres à la pêche en mer se
trouvaient à bord ; de plus MM. de Sorgher et Van den Broeck ont déclaré, après
inspection faite du poisson, qu’il avait été réellement pêché en mer, mais
qu’il était impossible de dire si c’étaient les hommes de l’équipage qui
avaient péché ce poisson, que peut être ils l’avaient acheté à des pêcheur
hollandais, que du reste le navire était convenablement équipé pour aller en
mer. »
Messieurs, que s’agissait-il
de constater ? Que des navires convenablement équipés pour la pêche allaient en
mer.
On me dit que ce procès verbal
ne prouve pas grand-chose. Je ais valors citer un fait qui prouve quelque
chose. Je vous citerai un événement arrivé l’année dernière. Le navire
américain, le Saarah, s’est perdu sur
les côtes ; ce navire a été relevé par un pêcheur d’Anvers qui lui a porté les
premiers secours et l’a aidé a se renflouer. Il fallait que ce pêcheur se
trouvât en mer pour pouvoir relever un navire américain échoué sur la côte.
L’administration persiste
toujours à dire qu’il n’y a pas de pêche nationale à Anvers. Cependant, par son
premier arrêté, elle admet une espèce de possibilité qu’il y ait une pèche
nationale à Anvers. Que fait-on alors pour empêcher l’exercice d’un droit
légitime, pour interdire aux armateurs d’Anvers de se livrer à l’industrie de
la pêche ? On prescrit que les navires sortant d’Anvers pour aller à la pêche
ne seront considérés comme emportant les produits de leur pêche qu’après un
intervalle de huit jours entre leur départ et leur retour.
Tous ceux qui connaissent les
marées savent qu’il est très facile d’aller d’Anvers à Flessingue en une marée
ou une marée et demie ; de sorte qu’un bateau pêcheur, qui part à 6 heures du
matin d’Anvers, peut se trouver à midi en mer, commencer sa pêche, l’avoir
terminée le lendemain et revenir pour le soir à Anvers. Mettez qu’il faille
trois ou quatre jours : quand la pêche se fait heureusement, le pauvre pêcheur
est obligé de rester à l’ancre quatre jours, de laisser pourrir son poisson et
de manger son capital. Voilà ce qu’on appelle protéger l’industrie ! Ce n’est
pas assez de gêner ainsi l’exercice de la pêche à Anvers, on crée un autre
arrêté par lequel on met entièrement les pêcheurs d’Anvers en dehors de la loi
Messieurs, remarquez les
considérants de cet arrêté :
« Considérant qu’il
résulte de renseignements nombreux et irrécusables que plusieurs pêcheurs
d’Anvers, sous prétexte d’aller pêcher en mer, introduisent dans le pays du
poisson acheté à des étrangers et cela en franchise de droits dus au
trésor. »
Mais, quand il résulte des
renseignements qu’on introduit du poisson étranger, dressez procès-verbal,
saisissez les fraudeurs, faites-leur un procès, mais n’interdisez pas aux
pêcheurs l’exercice de leur industrie.
Messieurs, toutes les
industries sont dans le même cas. Les brasseurs, les distillateurs contre
lesquels la loi a établi des mesures préventives, s’ils se livrent à la fraude,
on dresse procès-verbal et on les envoie devant les tribunaux qui prononcent ou
l’acquittement, ou la condamnation. Mais jamais on ne les empêche de continuer
leur industrie. C’est la même chose pour les pêcheurs.
« Considérant, continue
l’arrêté, que d’après la législation existante, mise en rapport avec la
position topographique de
J’avoue que je ne savais pas
qu’il y eût une législation qui défendît la pêche à Anvers. Il y en a une,
dit-on, c’est la loi de 1812 ; un décret de l’empire rendu alors que l’Escaut
était constamment bloqué par les escadres anglaises. Mais cette loi de l’an XII
a été évidemment annulée par la constitution qui nous régit ; car la
constitution consacre l’égalité de tous les citoyens et la liberté de
l’industrie ; dès lors, cette loi ne peut plus exister.
« Attendu, continue l’arrêté
du ministre, qu’il conste également à l’évidence des dépositions des divers
témoins entendus, dans une cause actuellement pendante devant la cour d’appel
de Bruxelles, que l’on abuse des permissions accordées à l’effet d’aller pêcher
en mer. »
Pourquoi
citer des témoins entendus dans une affaire encore pendante, sur laquelle il
n’y a pas de jugement ? Pourquoi les faire figurer dans un arrêté administratif
? Ou bien il fallait y mettre aussi la contrepartie, et vous seriez peut-être
arrivés à une conclusion inverse de celle que vous avez tirée, c’est-à-dire :
« Attendu qu’il résulte des dispositions des témoins qu’il existe
véritablement une pêche à Anvers, décide qu’il n’y a pas lieu de prendre des
meures à cet égard. »
Pour citer des témoins, il
fallait en citer de part et d’autre. Je bornerai là mes observations. Je crois
avoir prouvé qu’une pêche existe à Anvers et qu’on ne pouvait pas mettre cette
pêche hors de la loi, comment on l’a fait par l’arrêté dont il s’agit.
M.
Jullien. - Messieurs, les pêcheurs d’Anvers vous ont adressé une
pétition par laquelle ils réclament contre les décisions et arrêtés du ministre
des finances ; arrêtés et décisions qu’ils prétendent porter une grave atteinte
à leur industrie. Nous avons demandé, pour pouvoir nous éclairer sur ces
réclamations, que le ministre voulût bien déposer sur le bureau de la chambre
les arrêtés et décisions dont les pétitionnaires se plaignent.
Le ministre des finances l’a
fait.
Avant d’aborder la discussion,
puisqu’il s’agit d’arrêtés et de décisions, je demanderai d’abord qu’est-ce que
c’est que des arrêtés du ministre des finances et de tous les ministres en
général ; je demanderai quelle valeur ont ces arrêtés dans le commerce
gouvernemental ; car si j’interroge la constitution, je vois que le pouvoir
exécutif appartient au Roi, et je trouve dans l’art. 67 que le Roi fait les
règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir
jamais ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution.
Je trouve ensuite à l’art. 107
que les cours et tribunaux n’appliqueront les arrêtés et règlements généraux,
provinciaux et locaux, qu’autant qu’ils seront conformes aux lois.
Je recours ensuite au chapitre
de la constitution qui traite des ministres ; je ne vois en aucune manière
qu’il leur appartienne de prendre des arrêts. S’ils en prennent, ce ne peut
être que pour prescrire des instructions à leurs employés, à leurs subordonnés.
Mais vous ne pouvez pas concevoir qu’un ministre puisse prendre un arrêté qui
porte atteinte aux droits des citoyens, qui ait pour but de tenir lieu de lois
qui n’existent pas. C’est ce qu’il me paraît que les ministres des finances qui
se sont succédé ont voulu faire par les arrêtés qui vous sont dénoncés.
En effet, vous avez ces
arrêtés sous les yeux ; lisez les attendus de l’arrêté du 25 avril. Ils sont en
grand nombre. Je m’arrêterai à un seul qui prouvera quelle peut être la portée
de ces arrêtés et décisions de l’administration financière.
Le cinquième attendu est ainsi
conçu :
« Attendu que, pour jouir
légalement de l’exemption applicable à cette pêche, il faut prouver à
suffisance de droit que le poison présenté à l’importation provient directement
de la pêche nationale ; que cette preuve incombe nécessairement à celui qui
réclame l’exemption, et que des réclamations adressées à ce sujet au directeur
à Anvers contiennent l’aveu que les bateliers qui la sollicitent sont dans
l’usage d’acheter leur poisson des pêcheurs hollandais, ce qui n’entre
nullement dans l’esprit de la loi qui n’a point voulu favoriser la pêche
hollandaise au détriment de la véritable pêche nationale. »
Ainsi, dans cet attendu, il
plaît à M. le ministre des finances de déclarer que pour jouir de l’exemption
de droit accordée à la pêche nationale, il incombe à celui qui importe le
poisson de prouver que ce poisson provient de la pêche nationale. Que le
ministre des finances fasse l’application de ce principe à des bâtiments
étrangers apportant du poisson, je le conçois ; mais lorsque des pêcheurs qui
ont pris leur patente et armé en pêche, qui ont le nombre d’hommes d’équipage
et le gréement nécessaires, partent pour aller pêcher en mer, je vous demande
si on peut leur dire, quand ils rapportent du poisson, qu’il est de leur devoir
de prouver que ce poisson qu’ils rapportent provient de la pêche nationale, de
leur pêche. Ils ne peuvent que vous répondre : Ce poisson provient de la pêche
nationale parce que je suis pêcheur national, parce que j’ai une patente de
pêcheur, parce que je vais en mer, que je pêche sur les côtes, et dans les
fleuves.
Je le répète, que le ministre
applique aux étrangers le principe énoncé dans l’attendu que je viens de citer,
je le conçois ; mais je ne comprends pas qu’il l’applique à ceux qui exercent
cette branche d’industrie dans le pays.
Remarquez que cet attendu, tel
qu’il est conçu, peut s’appliquer tout aussi bien aux ports de Blankenberg et
d’Ostende qu’à celui d’Anvers, parce que si MM. les douaniers de ce ports
veulent s’en rapporter à l’arrêté du ministre, ils peuvent dire aux pêcheurs de
Blankenberg et d’Ostende : Vous êtes dans l’obligation de prouver que le
poisson que vous voulez importer provient directement de la pêche nationale ;
c’est à ce titre seulement que vous jouirez de l’exemption du droit. Est-il un
seul pêcheur, je le demande, qui soit capable d’administrer cette preuve ? Je
ne répéterai pas ce que vous a dit à cet égard l’honorable M. Legrelle, mais je
soutiendrai avec lui qu’il est impossible de prouver que du poisson provient de
la pêche nationale plutôt que de la pêche hollandaise.
La loi dit : Si le poisson ne
provient pas de nos pêcheurs, il paiera des droits ; s’il provient de leur
pêche, il n’en paiera pas.
Vous voyez donc que jusque-là
cet arrêté est en deçà de ce que peut faire un ministre, qui pose des règles
pour établir de quelle manière on doit faire ou on ne doit pas faire des
preuves.
On a fait une observation fort
judicieuse. Lorsqu’un bateau pêcheur, muni de filets, de hameçons, de
gréements, revient avec du poisson, on ne peut pas supposer que ceux qui
l’importent veuillent jouir en fraude du droit d’exemption. Quant à ceux qui
sortent avec des barques non armées en pêche, sans le gréement nécessaire, et
reviennent avec du poisson, leur poisson doit être assimilé au poisson
étranger, car quand ils feraient la pêche miraculeuse, encore faudrait-il des
filets ; sans hameçons et sans filets, il est impossible de pêcher. Dans ce
cas, que l’administration perçoive des droits, elle fait bien. Mais lorsqu’un
bateau pêcheur a à son bord un nombre d’hommes d’équipage voulu, ustensiles,
agrès, tout ce qui constitue l’armement de la pêche, je demande de quel droit
le ministre des finances pourrait empêcher le maître de ce bateau de jouir des
avantages accordés à la pêche nationale. Il le fait de son autorité privée.
Je déclare, dit-il, moi
ministre des finances, qu’il n’y a pas de pêche nationale à Anvers. Qui vous a
dit cela qu’il n’y avait pas de pêche nationale à Anvers, ou du moins qu’il ne
pouvait pas y en avoir ?
Anvers, dites-vous, n’est pas
un port de mer. Mais il n’en est pas moins ce qu’on appelle un port oblique. Il
a communication directe avec la mer. On vous a prouvé d’ailleurs qu’il existait
une pêcherie à Anvers ; que des raisons de crainte, de précaution avaient
empêché ce genre de se maintenir.
Mais aujourd’hui que
l’industrie est libre, que les pêcheurs d’Anvers ont des patentes et vont
pêcher, pourquoi voulez-vous les empêcher d’exercer leur industrie ? Que le
ministre juge à propos de décréter qu’il est impossible d’aller en une marée
avec un bateau dans la mer du Nord et s’y livrer à la pêche. Mais si la chose
est possible, si, au moyen d’une marée, un bateau pêcheur peut descendre dans
le bas Escaut ou dans la mer du Nord, je demande pourquoi ce pêcheur ne pourra
pas exercer son industrie avec les mêmes avantages que les pêcheurs des autres
ports.
Je trouve vexatoire, c’est le
mot, dans l’arrêté du ministre, l’obligation qu’il impose à ces pêcheurs de
rester au moins huit jours en mer pour être présumés rapporter du poisson
national. On dit aux pêcheurs : Vous serez huit jours en mer parce qu’on a
calculé dans les bureaux du ministre des finances que, pour aller d’Anvers
pêcher dans la mer du Nord, il faut huit jours.
Les marins disent au contraire
qu’il suffit d’une marée pour descendre l’Escaut, et que dans deux ou trois
jours on peut avoir pêché devant Flessingue, ou dans la mer du Nord, et être
revenu à Anvers.
Ainsi, par une mesure qui est
une véritable interdiction, vous obligez ces pêcheurs à s’arrêter devant le
port de Flessingue pendant cinq jours pour pouvoir importer du poisson qui ne
vaut plus rien. Voilà, ainsi qu’on l’a déjà dit, ce qu’on appelle protéger
l’industrie dans le royaume de Belgique.
Faites attention, messieurs,
que plus vous accorderez de pouvoir à la fiscalité, plus elle en abusera. Il
n’y a pas au monde d’administration qui commette plus d’abus de pouvoir que
cette administration des finances : sous prétexte de veiller aux intérêts du
trésor, elle est constamment en guerre avec les particuliers et avec
l’industrie.
Je connais de gros bonnets de
cette administration qui ne voient que des fraudeurs partout, qui croient que
leurs employés n’ont jamais tort, et que quand ils font des procès-verbaux, ils
ont toujours raison, et ensuite qui plaident en première instance, en appel, en
cassation, pour avoir la solution d’une question mal à propos soulevée,
solution qui n’arrive quelquefois qu’au bout de sept, huit et dix ans, et après
que les contribuables ont été vexés, ruinés, obligés qu’ils sont de les suivre
devant toutes les instances où il plaît à l’administration de les traîner.
Le dernier arrêté, qui est du
mois de février dernier, a tout à fait aboli l’industrie de la pêche à Anvers,
toujours sous le prétexte qu’il n’existe pas de pêche à Anvers.
Si vous croyez que la loi qui
exempte du droit le poisson provenant de la pêche nationale ne peut pas
s’appliquer au port d’Anvers, sachez décider la question par une loi. Mais
qu’un ministre prenne un arrêté portant que le poisson apporte par un bateau
d’Anvers quoiqu’il soit armé en pêche et qu’une patente lui ait été délivrée,
sera considéré comme du poisson hollandais, parce qu’il a décidé dans sa
sagesse qu’il n’y avait pas de pêche nationale à Anvers, évidemment c’est là un
abus de pouvoir, et il n’est pas possible que la législature le tolère.
Il est assez singulier que cet
arrêté soit motivé sur des considérants qui auraient dû faire prendre une
décision, sinon contraire, du moins beaucoup plus modérée que celle dont il
s’agit.
Lisez le premier considérant :
« Considérant qu’il
résulte de renseignements nombreux et irrécusables que plusieurs pêcheurs
d’Anvers, sous prétexte d’aller pêcher en mer, introduisent dans le pays du
poisson acheté à des étrangers, et cela en franchise des droits dus au
trésor. »
Ces renseignements n’ont pas
manqué d’être donnés par la douane. Toutes les fois que l’administration fait
des rapports ce n’est pas au commerce qu’elle va demander des renseignements,
c’est à ses employés, à ceux qui ont une part dans les amendes qu’on prononce,
qui sont intéressés dans les prises et les condamnations, à ceux enfin qui
dressent les procès- verbaux et ont un intérêt dans leurs résultats.
Faites attention ensuite à
cette expression que plusieurs
pêcheurs…
Eh bien, vous avez acquis par
des renseignements nombreux la certitude, à ce que vous dites, que plusieurs
pêcheurs d’Anvers fraudaient véritablement le droit, parce qu’ils ne pêchaient
pas eux-mêmes le poisson qu’ils importaient. Mais parce que plusieurs pêcheurs
se livrent à la fraude, s’en suit-il qu’il faut frapper d’interdiction complète
tous les pêcheurs d’Anvers ? S’il y a des fraudeurs, prenez-les, vous en avez
le droit ; dressez des procès-verbaux quand vous avez des motifs de suspicion
sur la nationalité de la pêche, les tribunaux décideront.
Mais parce que plusieurs
pêcheurs auraient abusé de la permission et prétendu introduire comme produit
de la pêche nationale du poisson acheté à l’étranger, vous voulez détruire tout
le commerce de la pêcherie à Anvers. Cela appartient-il au ministre des
finances ? Peut-il prendre des arrêtés ? Non ; en le faisant, il usurpe sur le
pouvoir du Roi, à qui seul il appartient de faire des arrêtés, et encore ne
peut-il en faire que pour l’exécution des lois. S’ils sortaient de cette ligne
tracée par la constitution, les tribunaux pourraient, devraient n’y avoir aucun
égard. Mais vous, ministre, vous n’êtes qu’un petit degré, qu’un petit
démembrement du pouvoir exécutif à qui appartient le droit de faire des arrêtés
pour régler l’exécution des lois. Et quand les arrêtés font autre chose, quand
ils ressemblent à des lois, quand ils en bouleversent le sens, les atténuent ou
les modifient, c’est un abus de pouvoir.
Je crois que c’est dans de très bonnes intentions, que c’est dans
l’intention de faire recueillir le plus possible au trésor que le ministre a
agi ; mais il ne faut pas que ce soit aux dépens des contribuables, aux dépens
d’une classe de gens qu’il faudrait plutôt encourager que ruiner. Bien loin d’empêcher
cette industrie, il faut la stimuler ; plus il y aura d’industries dans le
royaume et plus le trésor prospérera. Ce n’est pas en détruisant les diverses
branches d’industrie que le trésor deviendra riche ; plus vous ferez de
vexations, et plus vous deviendrez pauvres ; plus vous demanderez et moins vous
recevrez car on n’aura rien à vous donner.
Je considère comme un abus de
pouvoir les arrêtes pris par M. le ministre des finances.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - En deux mots je vais répondre à
l’orateur qui vient de finir. Il critique les décisions ministérielles ; il dit
que les ministres n’ont pas le droit de prendre de semblables décisions, et il
s’attache surtout à la critique de la décision prise le 25 avril 1831. Eh bien,
qu’ai-je fait ? J’ai simplement rapporté cette décision.
M.
Pirson. - Il me semble que dans toute cette affaire il n’y a qu’une
seule question à résoudre : Avons-nous, pouvons-nous avoir une pêche nationale ?
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - A Anvers ?
M.
Pirson. - Je ne parle pas d’Anvers ; je pose une question générale.
Quant à Anvers, celle ville
est-elle sur la côte ? Ses pêcheurs doivent-ils traverser
Ceci, il
est vrai, serait une entrave pour les pêcheurs anversois ; ils n’auraient pas
les mêmes avantages que les pêcheurs de Blankenberg ; mais faut-il favoriser
les pêcheurs de manière à ce que la pêche de Blankenberg devienne nulle ? Si
les pêcheurs d’Anvers passent sans constatation, il faut déclarer que les
produits de la pêche nationale ou étrangère, ou plutôt que les produits de la
pêche étrangère, entreront librement ; et alors toute difficulté est levée.
Mais la véritable question est de savoir si, ayant une pêche nationale, il faut
la détruire. Si vous laissez frauder à Anvers, vous ruinez Ostende, Nieuport.
Encore un coup, faut- il déclarer que les produits de la pêche sont libres en
Belgique ? C’est là une grande question car il faut savoir si la pêche hollandaise
ne viendra pas détruire nos pêches nationales. Je crois que nous devons
renvoyer la pétition au ministre des finances ; il avisera aux moyens à prendre
pour résoudre la difficulté quand il nous présentera un tarif. La discussion
d’aujourd’hui aura un peu éclairé la matière ; chacun de nous s’est fait une
idée de ce qu’est une pêche nationale. Je demande le renvoi au ministre des
finances et à la commission d’industrie.
M. Donny. - Messieurs, je ne viens que d’entrer en séance,
ainsi je suis très peu au fait de la question qui se traite ; cependant je
crois pouvoir émettre quelques observations sur cette question.
Je viens d’entendre dire que
l’on doit protéger l’industrie ; ce principe est incontestable ; mais il faut
prendre garde que sous le prétexte de protéger une industrie, on n’en vienne à
protéger la fraude. Il y a dans cette affaire une question de fait qu’il faut
examiner avant de pouvoir se faire une opinion rationnelle sur ce qu’il
convient de faire ; c’est celle de savoir si ceux qui se prétendent pêcheurs à
Anvers sont des fraudeurs, ou des pêcheurs réels. Cette question de fait doit
être éclaircie, et je pense qu’il n’y a que le gouvernement qui puisse
l’éclaircir d’une manière satisfaisante. Cet examen est d’autant plus
nécessaire que si l’on prenait des mesures propres à protéger des fraudeurs, on
porterait un préjudice notable à l’industrie réelle, à la pêche qui existe sur
le littoral des Flandres, où la fraude est impossible. Je crois que l’avis de
renvoyer la pétition au ministre des finances est celui qui doit être suivi ;
c’est au gouvernement à examiner le véritable état des choses ; c’est à lui à
voir si l’on fraude à Anvers. Quant à moi, je ne discuterai pas cette question
de fait ; mais je dois dire qu’il n’existe dans mon esprit pas le moindre doute
sur ce point,
M. de Nef. - Avant 1830 les pêcheurs d’Anvers se
rendaient en mer ; supposons qu’ils ne s’y rendent plus : je ne vois pas qu’il
soit convenable d’empêcher à une ville commerçante, qui n’a pas gagné aux
changements survenus dans le pays, de se livrer à la pêche nationale. Je
voterai pour la proposition faite par M. Legrelle ; si elle n’est pas admise,
j’appuierai l’avis émis par M. Donny, de renvoyer la pétition au ministre des
finances.
M. Legrelle. - Je conjure le ministre de
révoquer une disposition qui est ruineuse pour Anvers.
M. le
président. - La commission propose le renvoi du mémoire au ministre des
finances et le dépôt au bureau des renseignements ; M. Pirson demande en outre
le renvoi à la commission d’industrie.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Messieurs,
vous êtes tous pénétrés d’une vérité, c’est que la pêche nationale,
convenablement protégée par nos lois, peut devenir une grande source de
prospérité pour le pays ; mais pour cela il faut qu’elle soit en effet
efficacement protégée ; il faut qu’il y ait une bonne loi sur la matière.
En 1831 une loi a été discutée
dans cette enceinte et adoptée à une très grande majorité ; par cette loi on a
établi des droits protecteurs.
Néanmoins nous avons encore
peut-être la loi la plus libérale qui existe, car vous n’ignorez pas,
messieurs, que dans la plupart des pays le produit de toute pêche étrangère est
prohibé. Vous n’ignorez pas non plus que depuis longtemps
Mais il ne suffit pas que la
loi existe, il faut qu’elle soit exécutée : Comme on l’a très bien dit,
l’écaille du poisson ne porte pas l’empreinte du filet qui l’a pris, et un
poisson n’a pas de certificat d’origine. C’est en pareille matière surtout qu’il
faut tenir compte de certaines circonstances ressortant des localités ; et
quand on vous a demandé pourquoi la ville de Bruxelles n’armerait pas en pêche,
je n’ai vu dans cette demande qu’une chose étrange, c’est quelle soit faite par
un homme qui, par ses relations, par ses habitudes, par ses connaissances, est
à même de connaître les besoins de la pêche, et appelé, par le poste qu’il
occupe, à aider à son développement. L’honorable membre sait d’ailleurs, aussi
bien que moi, que ce qui est le plus contraire à l’industrie de la pêche, que
ce qu’il y a de plus écrasant pour elle, c’est le trafic qui se fait en mer.
Rappelez-vous ce qui s’est passe en 1816. Alors, l’attention principale du
législateur paraissait dirigée vers le but d’empêcher ce trafic ; et l’on a
reconnu que, sous des peines sévères contre ceux qui s’y livrent, la pêche
nationale ne pouvait jamais jouir d’une prospérité réelle.
Comme la fraude de sa nature
est très active, comme notre situation prête à la fraude, et que
M. Smits a cité des vexations
exercées contre les pêcheurs d’Anvers ; c’est pour la première fois que j’en
entends parler. Si de telles vexations ont eu lieu, je les blâme hautement. Au
surplus je ne désire qu’une chose, c’est que la pèche acquière de l’extension,
des développements en Belgique. Il m’est indifférent que ce soit dans telle
localité ou dans telle autre, pourvu qu’elle prospère, et pourvu que son
développement tourne au profit du pays entier ; le but que nous devons chercher
sera atteint. Mais il faut empêcher que, sous le prétexte d’exercer la pêche,
on ne se livre à un trafic très défavorable à la pêche.
On vous a dit qu’avant la
révolution on avait pratiqué la pêche à Anvers ; c’est là un fait. Je crois
qu’il peut être contesté ; je ne me rappelle pas que, dans toutes les
discussions élevées sur cette industrie, et auxquelles les pécheurs de
Blankenberg, de Nieuport, d’Ostende ont pris une part si active, on ait jamais
eu à examiner une seule requête des pêcheurs d’Anvers. Je sais que depuis 1830
on a beaucoup parlé de la pêche de cette ville ; cependant, d’après M. Smits,
en 1832 il n’y avait que deux ou trois bateaux qui y fissent la pêche, et ce
nombre ne paraît pas augmenté. Je demanderai comment trois bateaux peuvent
fournir à la consommation d une grande partie du pays ; car c’est Anvers seul
qui lui fournit maintenant du poisson. La pêche du littoral des Flandres est
presque anéantie.
Dans la supposition même que
les pêcheurs d’Anvers fassent réellement la pêche, je demanderai, cependant,
s’il n’est pas de notoriété publique qu’il existe aujourd’hui un si petit
nombre de bateaux pêcheurs à Anvers que cette pêche ne pourrait nuire en rien à
la pêche qui se fait par tout le littoral des Flandres ? Or, comment se fait-il
que la pêche des Flandres soit presque anéantie si celle d’Anvers ne peut pas
lui être nuisible ? Je demanderai encore s’il est vrai que la plupart des
bateaux d’Anvers n’ont pas même de réservoirs et qu’ils sont dépourvus du
gréement et de l’équipage nécessaires à l’exercice d’une véritable pêche ?
Voilà des faits à constater. S’ils sont établis d’après les recherches faites
par l’administration des douanes, s’ils sont de notoriété publique, il est
évident qu’à Anvers il ne se fait pas de véritable pêche nationale ; que le
poisson qui vient de ce port a été pris à une certaine distance de la ville aux
bateaux hollandais et transbordé ; que c’est ce poisson-là qui est envoyé à la
consommation de l’intérieur : si ces faits sont vrais, il était dans les
attributions du ministre des finances de réprimer un abus aussi scandaleux, la
loi lui en faisait un devoir impérieux.
On a soutenu qu’il n’était pas
permis au ministre des finances de prendre les arrêtés en question ; mais ces arrêtés
contre lesquels on s’élève ne sont que des instructions ; et ces instructions
ont pour but l’exécution franche de la loi, la répression de la fraude, et la
protection de la pêche nationale ; ainsi le ministre avait le droit de prendre
de telles mesures.
Je ne prétends pas décider
souverainement la question de savoir s’il existe ou non une pêche à Anvers ; ce
que je sais, c’est qu’à Anvers il se fait une fraude scandaleuse, et je ne
crois pas qu’aucun député de cette ville ose nier que depuis 1830 la fraude
n’ait pas été continuelle. Et en effet la pêche de Blankenberg, Ostende,
Nieuport, où elle se fait de temps immémorial, où l’on a les bateaux et tous
les instruments pour la faire, où les habitants y sont exercés, ne peut
soutenir la lutte avec Anvers, et cette pêche y va chaque jour en dépérissant.
De ce fait seul on peut tirer la conséquence que la fraude a lieu à Anvers, que
c’est réellement le poisson étranger qui est introduit en franchise de droits
et qui sert à la consommation intérieure.
Messieurs,
voilà une foule de faits qu’il faut scruter, qu’il faut établir ; mais il n’y a
que le gouvernement qui soit à même, pas sa position, de constater ce qui est,
et de faire exécuter franchement et loyalement la législation existante sur la
matière.
M. le ministre des finances a
pris une disposition dans un but louable ; on ne contestera pas qu’il ne l’ait
prise de bonne foi ; elle lui a été inspirée par cette pensée que la pêche
nationale n’existait pas à Anvers : on réclame contre la mesure ministérielle ;
on pose des faits qu’il est important de vérifier. Ce que l’on peut faire dans
de telles circonstances, c’est, ainsi que l’a proposé M. Pirson, de renvoyer la
pétition à M. le ministre des finances. Un objet d’une si haute importance
attirera toute son attention. S’il est vrai que la fraude s’exécute à Anvers
d’une manière scandaleuse, le ministre ne peut se dispenser d’exécuter la loi
et de réprimer un si révoltant abus. Si la ville d’Anvers au contraire exerce
réellement la pêche sans violation des lois existantes, tant mieux pour elle ;
mais il ne tant pas permettre qu’une industrie si intéressante soit sacrifiée à
l’avidité de quelques fraudeurs.
M.
Verdussen. - Je viens d’écouler attentivement le discours de M. le ministre
des affaires étrangères : il a cru sans doute plaider la cause de l’arrêté du 2
février ; mais je pense qu’il n’aurait pas mieux dit pour le combattre. Il a
assuré qu’il y avait beaucoup de fraudeurs à Anvers ; pour avancer une telle
assertion il faut avoir une conviction toute formée ; je demanderai alors
comment, avec une telle conviction, on n’a pas saisi les fraudeurs et dressé
des procès-verbaux ; et en supposant qu’il en soit aussi, le nombre plus ou
moins grand de fraudeurs peut-il rendre légale une décision ministérielle qui
viole une loi générale dont l’action doit être uniforme pour tout le royaume ?
La décision du 2 février 1835
est illégale ; pourquoi a-t-elle été prise ? C’est parce que les ministres qui
se sont succédé au département des finances ont pensé que la loi du 6 août 1822
avait été rapportée par la décision du congrès national, et par un arrêté du
gouvernement provisoire, c’est-à-dire que l’exemption des droits sur le poisson
introduit dans le pays par de navires nationaux et provenant de pêche nationale
était abolie.
Mais il faut remarquer que
dans la loi d’août 1822 il y a plusieurs dispositions, et que l’une d’elles est
relative à l’exemption des droits sur les produits de la pêche nationale. Il
faut remarquer encore que l’arrêté-loi du 7 novembre 1830, et que le décret du
congrès du 13 avril 1831, n’ont point détruit celte exemption de droit. De là
il s’ensuit qu’il y a une loi qui existe encore ; c’est la loi d’exemption ;
car l’arrêté de 1830 et le décret de 1831 n’ont atteint que le tarif qu’ils ont
modifié dans l’intérêt du fisc.
L’exemption existe donc pour
l’importation par navires nationaux des produits de la pêche nationale.
Toutefois, supposons qu’il n’en soit pas ainsi en droit, je dis qu’il en est
ainsi en fait ; car on a reconnu que, pour les ports d’Ostende, de Blankenberg,
de Nieuport, l’exemption existait. Mais, moi, je dis que puisqu’elle existe, il
faut qu’elle soit légale ; ainsi le veut la constitution.
Si l’exemption existe, elle
doit exister pour tout le monde ; aucun privilège ne peut exister ; elle doit
donc exister pour Anvers comme pour Nieuport, Blankenberg, Ostende, etc.
L’arrêté du 2 février a-t-il
eu le pouvoir d’anéantir une disposition législative ? Voilà le seul point à
examiner. Et comme nous sommes persuadés qu’il ne peut en être ainsi, voilà le
motif pour lequel nous attaquons la disposition ministérielle.
Le ministre des finances a
déclaré avoir retiré l’exemption de droits établie par la loi aux pécheurs
d’Anvers ; il y a donc là violation de la loi.
Les permis de pêche ont été
refusés parce que, et M. le ministre des finances l’a avoué dans son discours,
on voulait considérer toute la pêche d’Anvers comme pêche étrangère. C’était
mettre la ville d’Anvers hors la loi. C’était la placer dans une position
exceptionnelle.
Les principes doivent être
maintenus. Ils ne peuvent être violés par une simple décision ministérielle.
Que résulte-t-il de tout ceci ? que M. le ministre a reconnu qu’il y a fraude,
et pour réprimer la fraude il viole la loi. Il prend une décision qui anéantit
la loi. Qu’il atteigne les fraudeurs, nous ne demandons pas mieux. Loin de nous
la pensée de nous opposer à ce que l’on sévisse contre la fraude. Mais s’il y a
un seul innocent, qu’on ne l’enveloppe pas dans la proscription et que l’on
n’établisse pas à son détriment une exception à la loi dont il n’est pas au
pouvoir du ministre de suspendre l’exécution.
Il n’y a pas de pêche
nationale à Anvers, nous dit-on. Dans ce cas la décision du 2 février 1835
était inutile, et il eût suffi d’exécuter celle du 25 avril 1834. En effet, le
1er paragraphe de cet arrêté, signé par M. Duvivier, porte qu’en attendant que
la loi eût déterminé des conditions spéciales en faveur de la pêche nationale,
l’administration des douanes de la province d’Anvers n’accordera d’exemption de
droit sur le poisson de mer que quand il arrivera dans les bateaux reconnus
propres à la pêche, qui auront obtenu un permis de pêche, qui seront restés
huit fois vingt-quatre heures hors de
Toutes
ces décisions prouvent qu’il fallait prendre des précautions telles que la
fraude ne pût échapper à la vigilance de la douane. Mais ce que je viens de
citer ne prouve-t-il pas l’existence d’une pêche nationale à Anvers, puisque
l’on établit que les bateaux doivent être reconnus propres à la pêche ?
Que veut-on de plus ?
Mais,
dit-on, il y a des pêcheurs qui vont et reviennent en un jour ; n’est-ce pas
une preuve qu’ils ont acheté du poisson étranger et qu’ils veulent l’introduire
en fraude à Anvers. C’est là une preuve matérielle tellement palpable, qu’il
n’en faut pas d’autres pour démontrer que ces bâtiments sont en contravention.
Ceux-là évidemment sont des fraudeurs. Que l’administration sévisse contre eux.
C’est de toute justice, Mais que l’on vienne mettre hors la loi les personnes
qui se livrent loyalement à la pêche, c’est ce que je ne puis admettre.
M.
de Brouckere. - Je demande que l’on des honorables membres qui viennent
de parler, formule une proposition ; car nous sommes tous d’accord que la
discussion se prolonge inutilement pour n’aboutir à rien.
M. Gendebien. - L’honorable M. de Brouckere dit
que nous sommes d’accord. Sans doute personne ne s’oppose au renvoi au ministre
des finances. Mais tout le monde n’est pas d’accord sur une grave question qui
s’agite, ni sur la poignante injure qui a été adressée au commerce d’Anvers :
Les uns prétendent que les produits de la pêche nationale sont des produits
étrangers introduits en fraude ; d’autres membres, et ce sont principalement
ceux des Flandres, prétendent que la fraude est impossible dans les Flandres.
Il me semble que l’on n’est pas d’accord non plus sur la légalité ou sur
l’inégalité de l’arrêté ministériel. Je crois qu’il est important que la
chambre soit convaincue de l’illégalité de cette décision, afin que le ministre
lui-même sente la nécessité de revenir sur cette mesure, ou qu’un membre qui
userait de son droit d’initiative, proposât un projet de loi sur la matière.
Il me semble que ce n’est pas
perdre du temps que de chercher à s’éclairer. Je n’ai pas la prétention de rien
dire de neuf. Mais je crois que si l’on dit qu’il y a fraude à Anvers, l’on
peut prouver qu’il y a fraude partout, et que par conséquent il ne faut
prohiber la pêche nulle part mais la surveiller partout.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je ne
m’oppose pas à ce que la discussion continue. Je veux faire remarquer seulement
à l’honorable membre qui crie à l’illégalité de la décision que j’ai prise, que
cette mesure rapporte une décision précédente, qu’elle n’avance en rien,
qu’elle laisse les choses dans l’état où elles sont, que le ministre des
finances se borne à dire que le poisson de mer apporté à Anvers doit être
considéré comme étranger, à moins qu’il ne soit prouvé que ce poisson est le
résultat de la pêche faite par les nationaux. Il ne s’agit pas de faire rien de
contraire à la loi. C’est pourquoi elle a été rapportée.
M.
Legrelle. - Messieurs, M. le ministre des finances vient d’avancer un
fait qui est erroné pour ne pas employer un autre terme ; vous ne pouvez
empêcher, messieurs, les députés qui défendent les intérêts de leurs
commettants de prouver l’inexactitude des paroles d’un ministre. Je désire donc
que la discussion continue. D’ailleurs il ne suffit pas d’avoir démontre que la
mesure prise par le ministre des finances est illégale. Je désirerais que M. le
ministre s’expliquât sur ses intentions futures, sur la question de savoir si
cédant aux observations de la chambre, il consent à modifier son arrêté.
Quelques membres. - Il n’y a pas une proposition.
M.
Legrelle. - On me demande s’il y a une proposition. Il n’y a pas
d’autres propositions que celle du renvoi à M. le ministre des finances. Mais
il pourrait très bien arriver que la pétition fût oubliée dans les cartons du
ministère. S’il était possible de demander la révocation de l’arrêté j’en
ferais l’objet d’une proposition spéciale. Mais cela ne pouvant se faire, je
demande que la discussion continue.
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - Le gouvernement n’a aucun intérêt
à ce que la chambre ne soit pas éclairée sur la mesure qu’il a prise. Je suis
persuadé pour ma part que cette mesure est légale et utile. Elle est légale en
ce que M. le ministre a fait exécuter la loi, et il était de son devoir d’en
agir ainsi. Elle est utile en ce qu’elle est portée dans l’intérêt d’une
industrie nationale qu’il importe de protéger en réprimant une fraude que des
membres de cette chambre avaient à plusieurs reprises signalée au gouvernement.
Nous ne déclinons pas la discussion. Mais nous voulons qu’elle aboutisse à un
résultat, or personne ne conteste qu’elles ne peut avoir aucune issue.
Elle
recommencera du jour où l’on fera une proposition à la chambre sur le même
objet. Quant à moi, j’engage mon honorable collègue M. le ministre des finances
à persister dans le maintien de son arrêté jusqu’à ce que l’on substitue aux
dispositions existantes sur la pêche un autre moyen légal. Si un membre de
cette assemblée pense qu’il est des moyens meilleurs que ceux que fournit la
loi pour arriver à la distinction entre la fraude et la pêche véritablement
nationale, le gouvernement n’a aucun intérêt à ce que l’on n’arrive au même
résultat par une autre voie. La question actuelle se réduit à savoir si la
fraude se fait en général. Tout le monde est d’accord sur ce point. A Anvers la
présomption est pour la fraude. Sur le littoral des Flandres la présomption est
contre la fraude. Le ministre peut donc dire : je croirai que le poisson
importé dans cette ville est du poisson étranger, jusqu’à ce que vous, pêcheur,
me prouviez contraire.
M. Dumont. - La
discussion actuelle doit continuer. Elle peut être utile encore. Je désirerais
pouvoir être entendu. Car je me proposais de prouver à la chambre que l’état
actuel des choses ne peut subsister, parce qu’il prive un port de mer de pêche
nationale, Si la fraude existe, il faut l’attribuer à l’insuffisance des moyens
employés par la loi pour la réprimer. C’est sous ce point de vue que je voulais
envisager la question. J’aurais désiré être entendu et j’aurais conclu au
renvoi de la commission d’industrie, afin qu’elle nous proposât un projet de
loi sur la matière.
M.
Gendebien. - M. le ministre des finances a dit qu’il n’avait fait
qu’abroger l’arrêté de son prédécesseur. Je lui réponds : si en abrogeant
l’arrêté de votre prédécesseur, vous n’avez entendu que vous soumettre à la loi
préexistante, je n’ai plus rien à dire, que la loi s’exécute et que les
tribunaux la fassent respecter.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Je n’ai pas entendu autre chose.
M.
Gendebien. - Comprenons-nous bien ; ne faisons pas d’équivoque ; nous
voulons l’exécution de la loi, ni plus ni moins.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Nous aussi.
M. Gendebien. - C’est ce que vous ne vouliez
pas auparavant. Je prie la chambre de remarquer que la prétention de M. le
ministre se borne maintenant à avoir rapporté l’article de son prédécesseur qui
mettait des entraves à la pêche nationale. La conclusion qu’il faut tirer de
ses paroles c’est qu’il entend se conformer aux lois existantes. Ainsi il est
établi que les pêcheurs d’Anvers ont comme ceux de
Je dirai à M. le ministre de
la justice que jamais un tribunal n’admettra qu’il y a présomption de fraude.
La fraude ne se présume pas. C’est à celui qui prétend qu’elle existe à en
fournir la preuve. Je suis étonné d’entendre M. le ministre soutenir une
pareille thèse. Il a commis une grave erreur, Que le gouvernement se borne à
veiller à l’exécution des lois antérieures. Si la fraude existe, les tribunaux
sont là pour appliquer la loi.
M. le
ministre de la justice (M. Ernst). - L’honorable préopinant me fera
l’honneur de croire que je n’ignore pas que jamais la fraude ne se présume. Le
ministre des finances a fait son devoir en exigeant l’exécution de la loi qui
établit une différence entre le poisson national et le poisson étranger.
Si l’administration considère
la pêche d’Anvers comme pêche étrangère, c’est à celui qui prétendra à
l’exemption du droit à prouver qu’il y a des titres. Comment voulez-vous que
les employés eux-mêmes reconnaissent la provenance du poisson ? Exiger d’eux
qu’ils fassent eux- mêmes la distinction, c’est rendre la loi inutile. C’est
dans ce sens que j’ai dit que dans les Flandres, il y a présomption contre la
fraude, parce que là il y a des navires établis pour la pêche, parce qu’on a la
certitude qu’ils prennent la mer, tandis qu’à Anvers, port situé à 15 lieues de
la mer, où l’on comprend toutes les difficultés de se livrer à la pêche, d’où
les bâtiments sortent en général sans avoir le gréement
nécessaire pour la pêche, l’administration a le droit de dire, aussi longtemps
qu’il ne sera pas prouvé que les produits de la pêche qu’on y rapporte sont
nationaux, nous croirons qu’ils sont introduits en fraude. Le ministre aurait
encouragé la fraude en n’agissant pas ainsi : aurait-on mieux exécuté la loi si
on avait dit : le poisson introduit à Anvers sera considéré comme produit de la
pêche nationale, jusqu’à ce que l’on ait prouvé qu’il a été introduit en
fraude. Sous le principe de cette manière, c’eût été rendre la loi inutile, je
le répète,. On a demandé des explications à M. le ministre des finances. Je
dirai mon opinion. Le ministre des finances a pour ligne de conduite la loi de
1831. Il est de son devoir de la faire exécuter. Quand les employés auront la
conviction que le poisson introduit à Anvers est le produit de la pêche
nationale, ils l’exempteront du droit. Pour que le droit soit perçu, il faut
que le poisson soit considéré dans cette ville comme poisson étranger jusqu’à
preuve du contraire.
M.
de Brouckere. - Si la discussion pouvait avoir un résultat quelconque,
bien loin de demander qu’elle cessât, je serais le premier à en solliciter la
continuation parce que je tiendrais à exprimer mon opinion sur l’arrêté du
ministre des finances, arrêté que je regarde consume injuste et comme illégal.
Je me ferais fort de le prouver. Mais il n’y a aucune espèce de proposition, de
manière que la discussion aboutira après une journée entièrement perdue à ce
sur quoi nous sommes tous d’accord, à l’adoption des conclusions de la
commission. Qu’en résultera-t-il ? M. le ministre des finances déclare qu’il
persistera dans son arrêté, quand bien même on lui renverrait la pétition. Je
ne puis pas dire qu’il ait tort. Chaque membre a exprimé une opinion
personnelle. Il en est qui trouvent l’arrêté légal, d’autres qui le trouvent
illégal. Le ministre ne sait ce que pense la majorité. Il est libre de faire ce
qu’il veut. Il est donc inutile que nous prolongions une discussion sans but :
Qu’un député de la province d’Anvers formule une proposition.
Je déclare
que je demanderai la parole pour prouver que M. le ministre a commis une
injustice. Je ferai remarquer en passant que MM. les ministres ont abusé de
l’hyperbole pour justifier l’arrêté pris par un de leur collègue. En effet, M.
de Muelenaere a dit que la pêche nationale était nulle dans les Flandres.
Cependant il y a 60 à 80 bateaux pécheurs à Ostende, 30 à 40 à Blankenbergh. Je
veux bien que la pêche n’y soit plus aussi active. Mais si l’on prenait à la
lettre les assertions de M. de Muelenaere, il en résulterait, en supposant que
M. le ministre des finances n’admette plus le poisson étranger, que tout ceci
tendrait en définitive à nous priver complètement de poisson de mer, ce qui
serait fâcheux. (Hilarité.)
M. Smits. - M. le ministre des finances veut que
l’on prouve que le poisson pêché par les pêcheurs belges ne provient pas
l’étranger. Mais ceci ressemble assez à l’argumentation de M. de Foere...
Plusieurs membres. - Parlez sur la motion d’ordre.
M.
Smits. - Je me réserve de parler si la clôture n’est pas adoptée.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Dans l’état actuel des choses, il est impossible
de s’assurer qu’un bâtiment d’Anvers qui rentre dans le port a été en mer. Il
faudrait pour arriver à ce résultat que les papiers de bord fussent visés à
Blankenbergh, par exemple. Il faudrait en outre s’assurer qu’il est gréé pour
la pêche. Si l’honorable M. Legrelle trouve qu’il y a quelque chose de vicieux
dans la législation actuelle, qu’il présente un projet de loi au moyen duquel
les pêcheurs d’Anvers pourront constater qu’ils se livrent réellement à la
pêche. Que les députes qui croient qu’il peut y avoir une pêche nationale à
Anvers (ce que je ne pense pas) présentent un projet. Nous ne reculerons pas
devant la discussion.
M.
Gendebien. - Je demande qu’il soit acté au procès-verbal que M. le
ministre des finances a déclaré que son arrêté ne faisait qu’abroger celui de
son prédécesseur. Je demande que ces mots soient littéralement, textuellement
inséré au procès-verbal. Les tribunaux décideront dans les questions qui
s’élèveront entre l’administration et les pêcheurs d’Anvers. Mais je fais la
proposition formelle de l’insertion au procès-verbal des paroles de M. le
ministre des finances.
M. Fallon. - Dans la contestation dont il s’agit,
le commerce d’Anvers se plaint d’un arrêté pris par le ministre des finances,
prétendant que cet arrêté est illégal. Nous sommes informés que les tribunaux
sont saisis d’un procès sur l’exécution de cet arrêté. Aux termes de la
constitution, les tribunaux pourront déclarer si l’arrêté est illégal ou non. Quand
les tribunaux auront prononcé, nous saurons à quoi nous en tenir. Si le
commerce d’Anvers n’avait que la chambre pour lui rendre justice, je concevrais
qu’on insistât autant pour lui faire prendre une décision. Mais c’est aux
tribunaux devant qui l’affaire est portée, qu’il appartient de prononcer.
M. le
président. - La parole est à M. A. Rodenbach, sur la clôture. Je ferai
observer que déjà dix discours ont été prononcés sur la clôture.
M.
A. Rodenbach. - Personne n’a parlé sur la clôture, je remercie de la
préférence qu’on veut m’accorder.
Messieurs, je pense que cette
discussion ne finira pas : si les députés d’Anvers veulent faire quelque chose
dans l’intérêt du commerce de cette ville, en faveur des véritables pêcheurs
qui veulent exercer loyalement leur industrie (je n’y crois pas), ils n’ont
qu’à déposer une proposition de loi sur les formalités à remplir, nous la
sanctionnerons. Nous ne voulons pas empêcher les armateurs d’Anvers d’aller à
la pêche. Mais il est constant que, sur 20 bateaux qui descendent l’Escaut pour
aller à la pêche, un seul peut-être pêche pour la forme ; les 19 autres
achètent au Doel le poisson des Hollandais.
J’ai ici
une lettre signée par un capitaine qui commande une canonnière, il dit que
journellement on voit passer des bateaux d’Anvers qui vont chercher du poisson
et reviennent le même jour. C’est toujours par transbordement qu’ils se
procurent le poisson qu’ils apportent à Anvers. Ces soi-disant pêcheurs d’Anvers
fournissent la province d’Anvers, le Brabant, le pays de Liège et plusieurs
autres provinces. C’est depuis que cette fraude scandaleuse a lieu que la pêche
est en souffrance à Ostende. Parce qu’à Ostende la pêche était plus coûteuse
qu’en Hollande, les pêcheurs de ce port ne peuvent pas soutenir la concurrence
avec le poisson provenant de la pêche hollandaise.
Si la fraude est manifeste, il
est du devoir du ministre des finances de faire tous ses efforts pour
l’arrêter. Quant aux arrêtés, les tribunaux décideront s’ils sont ou non
illégaux.
M. le président. - Je vais mettre aux voix la
clôture de la discussion, je consulterai ensuite la chambre sur la proposition
faite par l’honorable M. Gendebien.
M. Dumont.
- Il me paraît que l’une de ces deux questions dépend de l’autre. Il me semble
que la clôture dépend de l’adoption ou du rejet de la proposition de M. Gendebien. Si la proposition de M.
Gendebien est adoptée, la demande de clôture tombe. Mais je ne puis me
prononcer sur la clôture sans savoir ce que deviendra la proposition de M.
Gendebien, Si M. le ministre des finances voulait, dès à présent, s’expliquer
sur cette proposition, nous pourrions peut-être arriver plus tôt à la fin de
cette discussion.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Je déclare que je n’ai aucune raison pour
rétracter ce que j’ai dit, que la seconde décision était le retrait de la
première.
J’ai retiré les effets de la première
décision, et je continuerai à exécuter les lois comme elles doivent l’être.
M.
Gendebien. - Je suis satisfait.
M.
de Brouckere. - Nous n’en demandons pas davantage.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Par la première décision on avait
accordé des permis d’après lesquels on devait rester huit jours pour être
présumé avoir été pêcher en mer. Un visa au départ et au retour constatait que
cette condition avait été remplie.
Mais on a remarqué que cette
précaution prise pour empêcher la fraude était éludée ; dès lors, j’ai retiré
la première décision. Je déclare, je le répète, que je ne considère la seconde
décision que comme le retrait des effets de la première, et que je tiendrai la
main à ce que les intérêts du trésor ne soient point lésés, et à ce que la
pêche nationale jouisse d’une protection efficace.
M. de Brouckere. - Il me semble que les
députés d’Anvers doivent être entièrement satisfaits. Je donnais à l’arrêté du
ministre un tout autre sens que celui dans lequel il vient de l’expliquer. Il
me semblait qu’il posait en fait qu’il ne pouvait pas y avoir de pêche
nationale à Anvers.
C’est comme cela que
l’entendaient MM. les députés d’Anvers ; et d’après les termes dans lesquels il
est conçu, je crois que personne ne l’eût entendu autrement. Mais puisque nous
nous sommes trompés, puisqu’il n’a eu pour but que de supprimer les permis
spéciaux, la loi reste dans son entier, elle ressortira son exécution. Je pense
que la déclaration arrivera aux organes de la justice, et qu’ils auront autant
d’égards que de droit à la décision du ministre,
M. Pirson. - M. le ministre des finances nous a
dit que son arrêté du 2 février rapportait celui de son prédécesseur. Pour moi,
je considérais les permis donnés d’après le précèdent arrêté comme les licences
que donnait Bonaparte, et qui étaient des licences en faveur des fraudeurs.
Sous ce rapport je trouve que
le ministre a parfaitement fait en supprimant un droit de licence, qui
n’appartenait ni au ministre, ni au gouvernement, ni même au Roi.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Il faut bien s’entendre sur le sens de l’insertion
demandée au procès-verbal. Pour mon compte, je ne m’y oppose pas. Mais vous ne
devez pas perdre de vue que le ministre précédent avait pris un arrêté, que par
cet arrêté il avait déterminé certaines formalités, et que, moyennant l’accomplissement
de ces formalités, le bateau qui entrait à Anvers avec du poisson était censé
avoir du poisson provenant de pêche nationale. C’était la présomption qui
résultait de l’arrêté antérieur, c’est que le poisson à bord des bateaux
d’Anvers qui avaient rempli les formalités prescrites par cet arrêté était
réputé le produit de la pêche nationale.
Eh bien, malgré ces
formalités, on s’est aperçu que la fraude continuait encore ; le ministre des
finances a retiré l’arrêté, c’est-à-dire qu’il n’y aura plus de présomption en
faveur du poisson qui entrera dans le port d’Anvers.
M.
de Brouckere. - Je demande l’insertion pure et simple de la déclaration
du ministre des finances. Peu importent les commentaires que cette déclaration
peut recevoir d’un autre ministre.
Mais voyez la portée des
paroles de l’honorable M. de Muelenaere. Il voudrait que quand des poissons
arrivent en Flandre, ils aient la présomption d’être le produit de la pêche
nationale, et que ceux qui arrivent à Anvers aient la présomption d’être le
produit de la pêche étrangère.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je n’ai pas
dit cela.
M. de Brouckere. - Voilà le sens clair de
vos paroles. Et je proteste de toutes mes forces contre une semblable
interprétation de la loi ; il est injuste d’interpréter une loi d’une manière
favorable pour les uns et d’une manière défavorable pour les autres.
L’honorable ministre des
finances a déclaré que sa décision du 2 février n’avait eu d’autre but et
d’autre portée que de retirer celle du 25 avril ; nous prenons acte de cette
déclaration. Quant aux commentaires de M. de Muelenaere, ils ne peuvent rien
changer à la déclaration de son collègue.
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - L’honorable M. de Brouckere interprétera ma
déclaration comme il voudra. De mon côté, je l’interpréterai aussi comme je voudrai
; je ne m’oppose pas à ce qu’elle soit insérée au procès-verbal. Mais je
proposerai d’insérer la disposition de la décision, qui est ainsi conçue :
« De charger M. le
directeur des contributions à Anvers de suspendre l’effet de tous les permis
qui auraient pu être accordés pour la prétendue pêche nationale en mer. »
M.
Gendebien. - Je vous remercie de la faveur.
M. de Brouckere. - L’arrêté du ministre
porte dans un de ses considérants : « Attendu qu’il conste à l’évidence
des dépositions de divers témoins entendus dans une cause actuellement pendante
devant la cour de Bruxelles, que l’on abuse des permissions accordées à d’aller
pêcher en mer. »
Nous
nous sommes élevés contre cette décision parce que nous avons pensé en fait que
le ministre avait fait quelque chose d’illégal, qu’il entendait dire qu’il ne
pouvait y avoir de pêche nationale à Anvers. Maintenant qu’il modifie le sens
de sa décision, qu’il dit que ce n’est pas comme cela qu’il l’a entendu, qu’il
reconnaît qu’il peut y avoir une pêche nationale à Anvers aussi bien qu’à
Ostende et à Blankenberg (car le ministre vient de vous déclarer que par cet
arrêté il n’a pas voulu dire qu’il n’y avait pas de pêche nationale à Anvers),
il n’y a plus lieu à discuter.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - M. de Brouckere veut me faire
reconnaître qu’il y a une pêche nationale à Anvers, et je me suis toujours
élevé là contre. Je déclare de nouveau que dans mon opinion il n’y a pas de
pêche nationale à Anvers.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - L’honorable M. de Brouckere paraît prendre plaisir à
dénaturer non seulement les paroles, mais encore les intentions. M. le ministre
des finances a répondu pour ce qui le concerne : non seulement la mention au
procès-verbal ne le met pas en contradiction avec lui-même, mais ses paroles
prouvent qu’il est en rapport avec ce qu’il a toujours dit dans le but d’empêcher
la fraude. Quant à moi, je n’ai pas dit qu’il fallût favoriser plutôt le port
d’Ostende que celui d’Anvers ; j’ai dit que partout où existait la pêche
nationale, il fallait l’encourager, et que partout où existait la fraude, il
fallait la combattre.
M. Duvivier. - Lorsque j’ai pris l’arrêté dont
il est question, vous avez dû remarquer que je n’avais rien décidé en matière
de pêche nationale ; j’y dis seulement que la pêche nationale pourrait exister
à Anvers, comme ailleurs ; mais j’avais soumis cette possibilité à des
conditions qui constamment ont été éludées.
Je déclare aujourd’hui que
j’aurais pris la mesure qu’a prise mon successeur et que je me serais rapporté
moi-même.
M.
Jullien. - Voilà 2 ou 3 heures que vous discutez sur la pêche nationale
relativement Anvers ; vous allez clore la discussion, et je ne vois pas ce que
les pêcheurs d’Anvers retireront de votre discussion et de votre clôture.
Plusieurs voix. - Ils
pêcheront.
M.
Jullien. - C’est-à-dire qu’ils ne pêcheront pas. Vous avez entendu
l’honorable M. Duvivier se mettre en contradiction avec son successeur. Il a
cru la pêche nationale à Anvers, et c’est dans cet esprit qu’il a rendu cet
arrêté que son successeur a rapporté comme illégal ; les mesures qu’avait
prescrites M. Duvivier étaient exorbitantes de la part d’un ministre.
Maintenant M. d’Huart, dans son nouvel arrêté, tranche la question. Il n’y a
pas possibilité, dit-il, qu’il y ait une pêche nationale à Anvers. Si ce n’est
pas là du désaccord, je serai bien curieux de savoir comment on s’accorde. L’on
dit qu’une chose est possible, l’autre dit que non, et ensuite on vient nous
dire qu’il n’y a pas désaccord entre eux. Si l’honorable M. de Brouckere est
satisfait, moi je déclare que je ne le suis pas.
De la
doctrine de M. le ministre des finances que la pêche nationale est impossible à
Anvers va résulter qu’un bateau ne pourra plus pêcher, soit dans le bas Escaut,
soit dans la mer du Nord, sans que les employés de M. le ministre ne viennent
dresser des procès-verbaux contre lui.
Les tribunaux prononceront,
c’est vrai ; mais les vexations des pêcheurs seront interminables. Il n’y en
aura pas un seul qui n’aura à soutenir des procès en instance et en cassation.
C’est-à-dire que vous ruinez tous les pêcheurs. Si la chambre faisait ce
qu’elle doit faire, elle ordonnerait une enquête : la chose en vaut bien la
peine. Je crois que pour décider avec justice, il faut que le point de fait
soit clairement expliqué, soit par une enquête, soit par un rapport de la
commission d’industrie.
M. le ministre de la justice (M. Ernst). -
L’honorable député de Bruges n’est pas satisfait des paroles de M. le ministre
des finances, et dans son opinion il a raison. Mais c’est que l’honorable
député de Bruges s’est trompé quand il a cru que M. le ministre des finances se
trouvait en désaccord avec son prédécesseur.
L’honorable M. Duvivier a cru
quelque temps que la pêche nationale pouvait exister à Anvers ; il a été
désabusé ; et ce qu’il n’a pas fait, son successeur a cru devoir le faire. Le
fait aujourd’hui est que tant qu’il entrera des poissons à Anvers, ou fera
payer le droit jusqu’à ce qu’il soit reconnu qu’il y existe une pêche nationale.
Voilà ce qui est et ce qui sera.
M.
Gendebien. - Les pêcheurs d’Anvers savent maintenant qu’ils n’ont plus
qu’à remplir la loi. Si on les vexe, qu’ils viennent à la chambre, ils
trouveront des défenseurs.
Plusieurs membres. - La clôture
M. le
président. - Voilà la proposition de M. Gendebien : « Je demande
que la déclaration suivante faite par M. le ministre soit relatée au
procès-verbal :« Je déclare que mon arrêté ne fait pas autre chose que d’abroger
celui de mon prédécesseur. » »
- La clôture est mise aux voix
et adoptée.
En conséquence la pétition
sera envoyée à M. le ministre des finances et déposée au bureau des
renseignements.
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Quatre personnes nées
Anglaises, ayant essuyé des pertes par suite de l’invasion hollandaise en 1830,
renouvellent leur demande d’être indemnisées de ces pertes. »
Elles exposent que les
étrangers ont un droit plus positif aux indemnités que les régnicoles, étant
plus spécialement sous la protection des lois et des droits de l’hospitalité.
Votre commission propose le
renvoi à M. le ministre de l’intérieur, et à la section centrale, qui sera
chargée de faire le rapport sur la matière.
- Les conclusions de la
commission sont adoptées.
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Un grand nombre de
négociants-armateurs d’Anvers et de Bruxelles adressent des observations sur
l’état de leur industrie. »
Les pétitionnaires exposent
que le dépérissement progressif de notre marine marchande leur inspire les
craintes les plus vives, et qu’elle est menacée d’un anéantissement total, si
le législateur n’apporte un prompt remède aux entraves qu’elle éprouve.
Ils affirment qu’avant 1830 le
port d’Anvers comptait 120 navires ; qu’il ne lui en reste aujourd’hui
qu’environ 39, et que sur 78 navires qui y sont entrés en 1833, venant des
côtes de France, il ne s’en trouvait que 8 portant pavillon belge.
Ils attribuent ce
dépérissement au peu de protection qu’ils trouvent dans le tarif de douanes qui
nous régit, comparée à celle qu’accordent les tarifs français, anglais,
américains, russes et autres, à leur navigation nationale.
Ils demandent, comme remède au
mal qu’ils signalent qu’à l’exemple de
Favoriser les importations et
les exportations directe, (en tâchant de diminuer celles des ports européens ou
ports intermédiaires), uniquement par navires belges et par ceux qui
admettraient un système de réciprocité avec nous, tel est, en substance et en
résumé, le but auquel tendent les considérations présentées par les
pétitionnaires.
Ces considérations et les
renseignements et développements qui les accompagnent étant du plus haut
intérêt, votre commission, pénétrée de l’importance de la question et de
l’urgence d’adopter des moyens propres à raviver notre navigation nationale,
vous propose, messieurs, le renvoi de la pétition que je viens d’analyser, tant
à la commission d’industrie qu’à MM. les ministres de l’intérieur et des finances.
- Les conclusions de la
commission sont adoptées.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Le sieur Vranckx s’oppose à la
réclamation des brasseurs de Louvain pour obtenir une diminution d’impôt, et
demande que la chambre fasse une loi qui établisse le prix de la bière en
raison de celui du grain. »
Le pétitionnaire s’oppose à la
diminution du droit sur la bière, et dit qu’on prétend généralement que les
brasseurs de Louvain se sont coalisés pour vendre la leur à un prix convenu, et
ajoute que, depuis que les grains sont baissés de moitié, ils n’ont pas encore
diminué d’un cents la valeur de leur bière ; il voudrait une loi qui établît
tous les mois le prix de cette bière en proportion de la valeur des grains et
du houblon, et qui soumît aussi les brasseurs aux mènes règles de police que
les boulangers.
Votre commission propose le
renvoi de cette pétition au bureau des renseignements.
- La proposition de la
commission est adoptée.
M. Hye-Hoys,
rapporteur. -
« Le sieur Duray, ex-aide-huissier, à la secrétairerie d’Etat, sous
l’ancien gouvernement, demande que la chambre lui fasse obtenir un traitement
d’attente, en attendant qu’il soit placé.
Votre commission propose le
renvoi de cette pétition à M. le ministre des finances, pour qu’il prenne en
considération les anciens services du pétitionnaire.
M. Desmanet de Biesme. - En général,
sur les demandes de pension, la chambre passe à l’ordre du jour. Lorsque nous
renvoyons à un ministre une demande, c’est pour qu’il y soit fait droit.
M.
Jullien. - Parce qu’on aurait passé à l’ordre du jour sur quelques
pétitions, ce n’en est pas une pour passer à l’ordre du jour sur toutes. Il
faut donner un motif pour écarter ainsi une réclamation.
M. Duvivier. - J’appuie la proposition faite par
la commission des pétitions. Il n’y a aucun point de contact entre le ministre
des finances et le pétitionnaire.
M.
Jullien. - Si la demande ne regarde pas le ministre des finances, elle
regarde la chambre, et c’est à vous à savoir auquel ministre il faudra renvoyer
le mémoire.
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - Si la chambre était facile sur
ces renvois, elle deviendrait un bureau de transmission. Le pétitionnaire
réclame un emploi ou une pension ; dans l’intérêt de la chambre elle-même, je
crois qu’elle doit passer à l’ordre du jour.
- L’ordre du jour est mis aux
voix et adopté.
PROJET DE LOI PORTANT LE
BUDGET DU DEPARTEMENT DES FINANCES POUR L’EXERCICE 1835
M.
Donny, rapporteur de la section centrale qui a examiné le budget du
ministère des finances, dépose son travail sur le bureau.
- La chambre en ordonne
l’impression et la distribution.
RAPPORTS SUR DES PETITIONS
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Le sieur Louis-François-Robert,
né Français et habitant Tournay, demande la naturalisation. »
- Dépôt au bureau des
renseignement pour être remise à la commission qui sera chargée de faire
rapport sur les demandes de naturalisation.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Le sieur Hoffman, commis de
4ème classe de la douane, demande que la chambre lui fasse obtenir un emploi
d’un grade plus élevé. »
- Ordre du jour.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Scholastique Grégoire, veuve de
Raimond Lantain, en son vivant commis de 2ème classe dans les accises, demande
à obtenir la pension qui lui est due en vertu du règlement sur la matière. »
La pétitionnaire, veuve avec
sept enfants, d’un commis de 2ème classe des accises, expose que son mari mourut
par suite de mauvais traitements reçus dans l’exercice de ses fonctions, et que
comptant onze années et plusieurs mois de loyaux services, elle a droit à la
pension que lui garantit le règlement sur la caisse de retraite.
Il résulte de sa pétition et
de la lettre justificative y jointe de l’inspecteur à Louvain, du 9 juin 1832,
que celui-ci adressa le 28 octobre 1828, sous inventaire, au directeur à
Bruxelles, toutes les pièces que l’art. 67 du règlement prescrit pour
l’obtention de la pension, et qu’il lui envoya en outre le 4 mars suivant, deux
certificats que ce dernier lui avait réclamés.
La pétitionnaire défère en
même temps à la chambre une décision du conseil d’administration de la caisse
de retraite, du 9 novembre 1832, portant que ses titres sont insuffisants pour
avoir droit à la pension, et qu’il n’a pas de somme à sa disposition pour lui
accorder le secours qu’elle demande.
Sur quoi elle fait remarquer
que ce pas un secours qu’elle demandait, mais bien la pension qui lui est due,
et que le directeur prénommé, ministre des finances à la date de sa pétition,
ayant reconnu en 1828, que les pièces produites étaient en règle et
suffisantes, puisque toutes celles qu’il a réclamées lui ont été adressées, il
est étonnant que le conseil ait été ensuite d’un avis contraire.
La pétitionnaire, réduite avec
ses sept enfants à une extrême indigence, invoque la justice et l’humanité de
la chambre, pour qu’il soit fait droit, dit-elle, à ses justes réclamations.
Votre commission propose le
renvoi de cette pétition à M. le ministre des finances, président du conseil de
la caisse de retraite, avec demande d’explications.
- Les conclusions de la
commission sont adoptées.
_______________
M. Hye-Hoys, rapporteur. - « Le sieur Destaville, visiteur de la
douane, adresse des considérations sur l’exercice du droit de
préemption. »
Cette pétition contient sur le
droit de préemption en douanes des renseignements qui déterminent votre
commission à en proposer le renvoi à M. le ministre des finances.et à la
commission d’industrie et de commerce.
- La proposition de la
commission est adoptée.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur, monte à la tribune. - « Par
pétition du 15 juillet 1834, le sieur Vander Hasselt, rentier à Bruxelles, en
qualité de tuteur de sa sœur interdite, demande que la ville de Bruxelles soit
contrainte à restituer la partie des contributions foncières payées par le
fermier de sa sœur pour un pré situé à Montplaisir, qui a été exproprié pour
cause d’utilité publique et cédé à la ville de Bruxelles depuis 1830. »
Ordre du jour.
- Adopté.
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Par pétition sans date, le sieur
Dubosch adresse une réponse aux explications envoyées à la chambre sur sa
pétition du 4 janvier, par le ministre de la guerre, et demande qu’il lui soit
payé des indemnités pour les pertes qu’il a essuyées par suite des événements
de la guerre. »
Renvoi à la commission chargée
du projet d’indemnité pour pertes essuyées par suite des événements de la
guerre.
M . Van
Hoobrouck. -
J’appelle l’attention de la chambre sur la nécessité qu’il y a d’engager la
section centrale chargée de l’examen de la loi sur les indemnités à accorder
aux victimes des événements de la révolution et de la guerre, à hâter son
travail. Voilà quatre ans que les malheureuses victimes de nos dissensions
politiques attendent, quatre ans ! Ce terme est bien long quand on le passe
dans la misère. L’on pourrait taxer la chambre de négligence pour ne pas me
servir d’une expression plus forte si elle tardait plus longtemps à faire un
acte de justice en indemnisant les personnes qui ont supporté à elles seules
les charges de la révolution.
M.
Gendebien. - Il me semble qu’il est presque temps de prendre un parti
au sujet de ces malheureux habitants des Flandres. Depuis quatre ans ils sont
dans un véritable état d’interdit. Ils sont dans une situation tellement
miséreuse que je doute qu’on puisse en trouver un autre exemple. Lors de la
suspension d’armes, au mois de novembre 1830, il a été tracé une limite à la
frontière des Flandres. Par le traité des 24 articles, une seconde limite a été
donnée et il y a un espace entre ces deux limites dans lequel sont enclavées
les propriétés des malheureux sur lesquels j’appelle l’attention de la chambre.
Ce sont de véritables ilotes ;
ils ne peuvent envoyer leurs produits en Hollande ; les inondations les
empêchent, et on ne les admet pas en Belgique. Cependant, sous le canon même de
nos batteries, les Hollandais exigent d’eux le payement des contributions. Je
demande s’il existe une anomalie plus intolérable. Voilà l’œuvre de nos grands
politiques. Voilà le résultat de ce fameux statu quo, qui devait faire de
Je ne parle pas de l’industrie
inhérente au sol de
Je reviens au pétitionnaire.
M. Dubosch a une propriété qui a d’abord souffert des abattis que la défense de
la frontière, en avril 1831, rendit nécessaires. Depuis lors, elle a été
occupée par les Hollandais. Il a demandé sans cesse l’autorisation de la
cultiver, on lui en a refusé la faculté. Voilà huit mois que les Hollandais ont
évacué le territoire. Cependant toute culture est impossible, attendu qu’ils
menacent encore de repousser brusquement quiconque tenterait une démonstration
semblable ; la correspondance qui a eu lieu à cet égard avec l’honorable M.
Dubosch prouve qu’on exerce envers lui une véritable confiscation. Cette
correspondance, est entre vos mains ; lisez, et jugez de la position de cet
excellent citoyen.
Voulez-vous prolonger votre
statu quo ? Libre à vous, tant que la nation le souffre. Mais au moins que des
tiers ne soient pas les victimes de votre système bon ou mauvais. Que la
généralité en supporte les conséquences ; mais que celles-ci ne retombent pas
sur tel individu plutôt que sur tel autre. C’est pourtant ce qui a lieu ; M.
Dubosch a beau adresser pétitions sur pétitions, frapper à toutes les portes ;
il ne peut obtenir justice.
J’ai
reçu de cette partie des Flandres une longue lettre dont je ne donnerai pas
lecture pour ne pas abuser des moments de la chambre, mais que je m’engage de
communiquer à ceux des membres de cette assemblée qui me témoigneront le désir
d’en prendre connaissance. Il n’y a pas une âme qui ne se sente portée à tous
les actes d’impatience (impatience : le terme est modéré) à la lecture de cette
lettre. Il n’est personne qui ne se sente indigné de la conduite du
gouvernement.
Quoique nous n’en soyons plus
à la discussion sur la pêche nationale, il n’est pas hors de propos de citer un
fait que me signale cette lettre. Sous la protection des bâtiments du fort
Isabelle, des Belges vont pêcher des moules…
M. le
ministre des finances (M. d'Huart). - On n’exige pas de droits sur les
moules.
M.
Gendebien. - Eh bien, vos ordres ne sont pas plus exécutés que sous le
précédent ministère. Je vais en donner la preuve.
Des malheureux vont pêcher des
moules. Cette industrie, c’est leur existence tout entière. Ils arrivent sous
la protection de nos batteries. Lorsque leur pêche est finie, ils en rapportent
le produit sur le territoire belge, et c’est alors qu’on leur fait payer un
droit. Le droit tout injuste qu’il est ne serait rien, mais on exige qu’ils
aillent le payer à un bureau, situé à trois quarts de lieue ou à une lieue de
là où l’on ne peut y parvenir que sur des chemins impraticables. Les malheureux
tombent sous leur charge avant d’arriver au bureau, les chevaux plient ; les
charrettes se brisent, et tout cela pour faire payer un droit de quelques
centimes illégalement perçu.
M.
Jullien. - C’est bien là la fiscalité.
M.
Gendebien. - Un tel état de choses ne peut durer. Ce n’est pas en
permettant aux Hollandais de nous insulter, de nous molester partout et tous
les jours, ce n’est pas en montrant autant d’indifférence pour les malheureux,
que vous ferez aimer le gouvernement.
Je demande que la pétition de
M. Dubosch soit renvoyée au ministre que la chose concerne, avec demande
d’explications. Il résultera la conviction pour vous de faire une proposition
ou d’accorder une consolation à ce citoyen qui a souffert depuis 4 ans et qui
n’a cessé d’adresser des réclamations.
Puisque
je suis sur le chapitre des Flandres, je dirai que ce malheureux arrondissement
d’Eecloo semble ne contenir que des parias. Ils sont accablés d’impositions de
toute espèce. Ils n’ont pas de débouchés pour leurs denrées et personne ne
songe à leur donner un bout de pavé. L’on a voté largement dans cette assemblée
un chemin de fer d’Anvers à Ostende, chemin bien inutile puisque les Flandres
ont des canaux sur lesquels on ne perçoit pas de droits. Lorsque l’on pourrait
donner des routes de communications véritablement nécessaires, l’on ne fait
rien.
Je le dis sans détour afin que
le gouvernement ouvre enfin les yeux. Le bon peuple d’Eccloo, ce bon peuple
flamand finira par regretter le joug du roi Guillaume. Il est temps enfin de
lui rendre la justice à laquelle il a droit. Il n’est pas exigeant. Il ne
demande que de la justice. J’insiste donc sur le renvoi de la pétition à M. le
ministre de l’intérieur avec demande d’explications.
M . Van Hoobrouck. En ma qualité de représentant du
district d’Eccloo, je répondrai à quelques observations faites par l’honorable
M, Gendebien.
Sur toute la lisière de
Je connais particulièrement
cet arrondissement que j’ai l’honneur de représenter. Deux choses sont
nécessaires aux habitants de cet arrondissement, comme l’a dit l’honorable M.
Gendebien ; d’abord une route. Cette route je l’ai réclamée et elle a été
comprise dans le plan général. Ainsi, à cet égard, droit a été fait à leur
réclamation. Quand au second grief, j’espère que M. Gendebien voudra bien
concourir à le redresser. Ce sont les inondations qui désolent ce pays. Il
dépend de nous, messieurs, de rendre à cet arrondissement toute sa prospérité,
c’est de décréter le canal de Zelzaete. Si vous décrétez cette construction, je
suis persuadé qu’au lien de malédictions, vous recueillerez des bénédictions de
tous les habitants.
J’ai
quelques mots à ajouter relativement au pétitionnaire. Je conviens que la
position de M. Dubosch est pénible. Ses propriétés ne sont pas sur le
territoire hollandais, mais sont comprises entre les deux lignes. j’ai déjà eu
l’honneur d’appeler l’attention de la chambre sur le sort de ceux qui se
trouvent dans cette position. Il se trouve des fermes placées de manière à
n’avoir aucune espèce de rapport avec
Je crois que cette position
exceptionnelle mérite de fixer l’attention du ministre des finances et je suis
persuadé qu’il fera droit à la réclamation de ceux qui s’y trouvent.
M.
Gendebien. - Je répète que les habitants de l’arrondissement d’Ecloo
sont de véritables parias. Et je ne modifie en rien mes expressions à cet
égard, je laisse à ceux qui ont envoyé ici l’honorable préopinant juger qui de
nous deux a tort ou raison. Quant au canal de Zelzaete son exécution ne
remédierait pas à tous les maux des habitants de ce pays, je ne parle ici que
des maux produits par les inondations. Je demande qu’on imprime les
observations des quatre wateringues et on verra si près leur avis il n’y aurait
rien de mieux à faire que ce canal de Zelzaete. Il y avait autre chose si le
gouvernement avait eu quelque courage, mais il en a toujours manqué. C’était de
garder les écluses du Capitalen-Dam lâchement abandonnées au mois d’août 1831.
Oui lâchement abandonnées, car nous les possédions à cette époque : Vous
n’oseriez pas le nier, M. le ministre des affaires étrangères.
Je le
répète, avant le mois d’août 1831, nous occupions les écluses du Capitalen-Dam.
Eh bien ces écluses assuraient un écoulement toujours certain. Vous avez eu la
lâcheté de les abandonner ; quoique le roi de Hollande ait été condamné par les
puissances à se retirer dans la position qu’il occupait avant l’attaque du mois
d’août, vous n’avez pas eu le courage de revendiquer cette position si
importante, vous avez voulu trouver un moyen de forcer par la misère ces
habitants des Flandres à accepter tous les traités honteux qui sont advenus et
qui pourront advenir encore. Réclamez donc vos droits, des deux écluses vous
pouvez encore vous en faire restituer une, car l’autre est détruite, et si vous
ne vous hâtez, la dernière aura bientôt subi le même sort que l’autre.
Il n’existait de radier que du
côté de la mer. Les Hollandais pour inonder le pays, ont fait couler l’eau de
l’autre côté, et l’eau battant l’écluse du côté où il n’y avait pas de radier
l’a détruite. L’autre écluse qui a toujours manœuvré en sens inverse du but
dans lequel elle avait été faite s’écroulera également si on n’y prend pas garde.
Ne venez donc pas parler de votre canal de Zelzaete, il ne remplira jamais
l’office des écluses du Capitalen-Dam. Ayez le courage de réclamer la
possession de ces écluses, vous satisferez à la fois tous les intérêts, et
l’intérêt du trésor et l’intérêt de l’honneur du pays dont vous ne vous souciez
guère.
M. Dumortier. - J’ai demandé la parole pour
répondre à l’étonnante sortie de l’honorable membre qui à propos du Clara
polder est venu demander que
M . Van
Hoobrouck. - Il ne
s’agit pas ici de Clara polder. Il ne fait pas partie du district d’Oost
Eccloo, il est en dehors de nos limites, d’après le tracé fait actuellement. Si
l’écluse Isabelle a rendu des services, c’est uniquement pour l’écoulement des
eaux du polder. Mais il reste encore tout un littoral de vingt lieues dont les
eaux sont sans écoulement.
Je reconnais que les écluses
du Capitalen-Dam auraient suffi à cet écoulement ; si le gouvernement a le
courage de les réclamer, qu’il le fasse. Mais leur perte est tout à fait
consommée. Nous avons été en présence d’une circonstance qui ne se reproduira
plus. Les écluses du Capitalen-Dam sont perdues pour nous. Ainsi en demandant
le canal de Blankerbergh, je réclame non seulement en faveur d’un district,
mais de tout le pays qui se trouve entre Zelzaete et Blankerbergh.
M.
Gendebien. - Je dois une réponse au préopinant et lui faire remarquer
ce qu’il y a de contradictoire dans ce qu’il dit. C’est en vertu du traité du
15 novembre que le roi Guillaume perçoit les contributions dans ce pays, dans
le rayon des limites tracées par ce traité. Or, en vertu de ce même traité,
nous avons le droit d’écoulement de nos eaux, et le roi Guillaume refuse à
exécuter le traité sous ce rapport, et nous le souffrons et nous nous laissons
maltraiter ; nous payons et on ne laisse pas passer nos eaux. Voilà donc quelle
position odieuse on nous laisse depuis quatre ans.
M . Van Hoobrouck. -
Je ne suis pas en contradiction avec moi-même. Si nous avions l’exécution du
traité du 15 novembre, nous aurions l’écluse réclamée. Je blâme le gouvernement
de laisser percevoir des contributions sur un territoire que nos troupes
occupent encore maintenant.
M.
Gendebien. - Nous sommes d’accord.
- Les conclusions de la
commission et la proposition de M. Gendebien sont adoptées.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Le sieur Luycks, docteur en médecine
à Heyst-op-den-Berg, demande que dans la nouvelle loi communale, l’on établisse
l’incompatibilité des fonctions de bourgmestre et de docteur en
médecine. »
- Renvoyé au bureau des
renseignements.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Le sieur Laurent Desmet, membre
de la légion d’honneur, demeurant à Ostende, réclame le paiement de sa
pension. »
- Renvoyé à la commission
chargée de la proposition de M. Corbisier.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Le sieur Jean Wilkens-Remy, ancien
professeur au grand collège à Gand, sous le régime autrichien et français,
demande une pension. »
- Cette pétition est sans
objet parce que le pétitionnaire a reçu une pension du ministre de l’intérieur.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Cinq propriétaires de moulins à
scier le bois, à Anvers, demandent qu’il soit établi un droit de 30 p. c. sur
les bois sciés venant de l’étranger. »
- Renvoyé au ministre des
finances et à la commission d’industrie.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Les administrateurs du polder
de Lillo demandent que la chambre ouvre un crédit au budget de l’intérieur pour
les rembourser des avances faites par eux pour l’établissement d’une digue
intérieure, s’élevant à la somme de 23,670 fl. 22 c. »
- Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Le sieur Louvrex, ancien-receveur
des taxes municipales à Liége, demande une pension. »
- Ordre du jour attendu que
c’est aux communes à pensionner leurs employés.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Le sieur Demulder à Bruges,
milicien de 1827, demande le renvoi dans leurs foyers des miliciens de 1826 et
1827. »
- Ordre du jour attendu que la
pétition est devenu sans objet.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « La régence de Steene-Mariakerke
renouvelle sa demande d’indemnité en faveur de ses habitants, qui ont été
inondes en 1815, par suite des travaux opérés pour la défense du pays devant
Ostende. »
- Renvoyé à M. le ministre de
l’intérieur.
_______________
M. de Man d’Attenrode, rapporteur. - « Les administrations communales
d’un grand nombre de communes usagères de la forêt de Chiny (Luxembourg)
réclament contre l’administration de cette forêt gérée par le sieur de Geloès
d’Eisden, auquel elle a été vendue pour un tiers en 1829, par le syndicat
d’amortissement. »
- Renvoyé à M. le ministre des
finances avec demande d’explications.
La séance est levée à cinq
heures.