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Chambre des représentants de Belgique
Séance
du jeudi 20 novembre 1834
Sommaire
1)
Pièce adressée à la chambre
2)
Projet de loi portant organisation des communes. Discussion des articles. Du
conseil communal. Constitution d’un « comité de commune » composé des
contribuables les plus imposés (Dechamps, Dumortier, Pirson, Verdussen, Dubus, Legrelle, de Theux, Dechamps), approbation par le Roi, la province et/ou la
chambre des représentants, des délibérations du conseil communal quant à
l’administration des biens communaux (Dumortier, Gendebien, Dumortier, Gendebien, Milcamps, Gendebien, Dumortier) et
celles de la gestion des établissements communaux (Devaux,
de Theux, Dumortier, de Theux), publicité des délibérations des conseils
communaux (d’Hoffschmidt, Dubus,
Dumortier, Devaux, Dumortier, Gendebien, de Theux, d’Hoffschmidt, Fallon, Dumortier, Fallon, Dubus, H.
Dellafaille, Dumortier,
Lebeau, Dumortier, Dubus, Lebeau, Dumortier,
Gendebien, Legrelle, Gendebien, Fallon, Dumortier, Devaux)
(Moniteur belge n°325, du 21 novembre 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
M.
de Renesse procède à l’appel nominal.
M.
Brixhe donne lecture du procès-verbal de la présente séance. La
rédaction en est adoptée.
M.
de Renesse fait connaître l’objet des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
M.
Lardinois écrit pour demander un congé de huit jours.
- Accordé.
________________
M. Vanderheyden fait informer la chambre
qu’une indisposition grave qui l’oblige à garder le lit l’empêche de prendre
part à ses travaux.
________________
M.
Duvivier, retenu à Mons par une indisposition, annonce qu’il espère
pouvoir bientôt se rendre à son poste.
Discussion des articles
Titre
II. - Des attributions municipales.
Chapitre Ier. - Des attributions du
conseil municipal.
Article 74 (du projet de la
section centrale)
M.
le président. - Il nous reste à voter sur l’ensemble de l’article 74,
discuté dans la séance d’hier, à moins que la chambre ne veuille faire de l’amendement
de M. Dechamps un paragraphe nouveau à cet article.
M.
Dumortier, rapporteur. - La plupart des membres désirent que l’on fasse
de l’amendement un paragraphe, afin de ne pas changer les chiffres des
articles.
M.
le président. - Voici la proposition faite par M. Dechamps :
« Pour les
délibérations dont les objets sont mentionnés aux n°1 et 5° de l’article 74 du
projet de la section centrale :
« Le collège des bourgmestre
et échevins sera obligé de convoquer un comité de commune, composé des plus
forts contribuables domiciliés dans la commune, en nombre égal à celui des
membres du conseil, et choisis hors de ce conseil.
« Le comité et le
conseil délibèrent à part, et leurs délibérations sont soumises conjointement
aux autorités compétentes. »
M.
Dechamps expose ainsi les motifs de sa proposition. - Messieurs,
l’amendement que j’ai l’honneur de vous soumettre est, à mon avis, d’une assez
haute importance pour fixer toute l’attention de la chambre.
Vous savez qu’il existe
en France une loi du 15 mars 1818 qui veut que, toutes les fois qu’il s’agit de
délibérer sur les impositions extraordinaires, le conseil municipal soit doublé
par l’adjonction d’un nombre égal de notables, choisis par les plus imposés de
la commune.
Cette mesure est
nécessaire, afin que la petite propriété composant, dans beaucoup de localités,
le conseil municipal, ne puisse établir légèrement et sans examen des charges
qui ne l’atteignent que faiblement, et cela sans le contrôle de ceux à qui ces
charges pèsent le plus.
Cette institution me
paraît éminemment utile, et plus je l’ai examinée en détail, plus il m’a semblé
nécessaire de l’introduire dans notre loi, et même de l’étendre à quelques
autres délibérations graves soumises à la sanction royale, telles que celles
qui ont trait aux aliénations, échanges de biens immobiliers, emprunts, en un
mot aux objets d’importance majeure dont il est parlé au n°1 de l’article 74.
Ces objets, ainsi que
celui mentionné au n°5 du même article, et qui est relatif aux impositions
communales, forment les deux seuls cas pour lesquels le conseil de commune doit
être convoqué, selon mon amendement. Vous voyez, messieurs, que je ne me suis
pas aventuré trop loin sur la route des innovations, et que les plus timides ne
peuvent s’en effaroucher, surtout s’ils réfléchissent à quel petit nombre
d’actes cet amendement se rapporte, et combien rarement ils se présentent en
pratique.
Il m’a paru tout aussi
nécessaire d’appliquer le principe de la loi française du 15 mars 1818 à tout
ce qui regarde les aliénations et les emprunts, qu’aux impositions communales,
parce que ces actes sont si importants et entraînent un dommage si irréparable
qu’on ne peut les entourer d’un contrôle assez sévère.
L’avis de la députation
provinciale et la sanction du Roi n’empêchent pas toujours, messieurs, les abus
et les résultats mauvais, et cela parce que les autorités placées trop loin des
faits qui leur sont soumis, n’ont aucune source certaine où puiser les
informations nécessaires.
En effet, les
renseignements sur lesquels la députation provinciale et le Roi forment leur
approbation ou leur improbation, où les puisent-ils ? près
du commissaire de district.
Mais le commissaire de
district, qui n’habite pas les localités, qui ne peut donc pas juger par
lui-même les intérêts opposés et les objets des délibérations, se trouve dans
une position analogue à celle des autorités supérieures et doit aussi recourir
aux renseignements. Or, ces renseignements où peut-il les trouver ? Vous le
savez, messieurs, on ne peut les puiser que chez le conseil communal lui-même,
ou bien auprès des individus isolés de la commune. Dans le système actuel, il
n’y a que ces seuls moyens d’enquête. Or dans le premier cas, ces informations
sont nulles de droit, puisqu’elles émanent de ceux-là justement dont il faut
juger les délibérations ; et dans le second cas, elles ne le sont pas moins,
puisqu’elles manquent du caractère d’autorité et n’ont d’autre garantie que
celle d’un témoignage individuel.
Eh bien, messieurs, s’il
avait existé dans les communes un comité tel que je vous le propose, j’établis
en fait qu’aucun abus n’aurait eu lieu, parce que ce corps, cette autorité
placée au centre de la localité même, témoin oculaire des faits, aurait exercé
un contrôle puissant, et fourni des renseignements que le pouvoir supérieur
appelé à juger ne peut obtenir aujourd’hui que d’une manière très insuffisante.
Pour les emprunts, vous
le savez, messieurs, le danger est encore plus grand que pour les aliénations,
et je connais telle régence d’une ville considérable de ce royaume qui en a
contracté de ruineux, et cela pour fonder quelque monument qui lui rapportât de
la gloire, pour laisser, comme on l’a dit, des traces de son passage, chargeant
l’administration qui la suivra de payer les dettes qu’elle a contractées.
Tout ceci nous prouve, messieurs, qu’il manque
dans le système actuel des renseignements exacts sur lesquels le pouvoir
supérieur puisse asseoir un jugement équitable touchant ces graves
délibérations.
En effet, pour que l’autorité compétente fût
réellement juge dans les délibérations qui lui sont soumises, il faudrait que
les intérêts opposés des communes fussent débattus en sa présence, il faudrait
nécessairement qu’elle entendît deux voix plaider devant elle afin qu’elle pût
ainsi balancer le pour et le contre. Car si elle ne peut écouter qu’un seul
intérêt, un seul parti, la condition première et essentielle pour être juge lui
manque nécessairement Or, c’est là précisément le défaut qui entache nos lois
sur cette matière, c’est qu’il n’existe pas dans chaque commune deux autorités
pour établir le pour et le contre sur des objets d’un si haut intérêt.
Mais le comité de commune que je vous propose,
une fois établi, tous les inconvénients disparaissent et notre loi se complète
: le pouvoir supérieur ne sera plus dans la presque nécessité de prononcer un
peu au hasard et sans lumières suffisantes, puisqu’il pourra comparer les
délibérations de deux corps municipaux apportant ensemble des garanties
d’autorité que n’avaient pas les renseignements individuels, et les garanties
de vérité que ne possédait pas le conseil consulté seul et sans contrôle.
Si ces deux corps parviennent à s’accorder,
toute information ultérieure est presque inutile, et la députation provinciale
et le Roi se trouveront convenablement éclairés ; si cet accord n’existe pas,
eh bien, l’autorité compétente sera avertie par ce fait même qu’elle doit
apporter une plus scrupuleuse attention sur ces objets en litige, et cette
attention, jointe aux lumières fournies par la controverse, sera une garantie
de justice et de vérité.
Les considérations que je viens de vous
développer, messieurs, ne sont pas les seules qui m’ont poussé à vous présenter
cet amendement ; je me suis aperçu qu’il remédiait en partie à un vice qui
tient à l’essence même de toute élection et que j’avais cru longtemps une
triste nécessité.
Vous avez sans doute, messieurs, remarqué comme
moi que, dans toutes les élections municipales, il se forme deux partis
représentant deux opinions, deux intérêts ; chacun de ces partis forme sa liste
de candidats d’une manière exclusive, de sorte que les conseillers élus sont
tous ou presque tous les candidats de la liste qui a triomphé, à l’exception de
ceux de la minorité qui ne se trouve pas représenté dans le conseil.
Quand on réfléchit, messieurs, comment se
passent quelquefois les élections, combien l’intrigue y est puissante et
parvient à créer une majorité trompeuse et factice, on regretterait, n’est-il
pas vrai, qu’on fût dans l’impuissance de porter un remède à ce vice qui
corrompt ce que le principe électoral à de bon et de vrai ? Eh bien, messieurs,
ce vice vous pouvez le détruire à quelque degré en adoptant l’institution que je
vous propose. Effectivement, le comité composé des notables de la commune,
choisi en dehors du conseil, représentera plus ou moins complètement la
fraction écartée de l’administration, et dont les opinions et les intérêts se
trouvaient privés d’organe et de défenseurs ; car de toute probabilité les
membres que la minorité avait choisis pour ses représentants, et qui avaient
échoué au scrutin électoral, ces membres seront précisément ces notables les
plus imposés qui ne font pas partie du conseil communal.
Ce résultat que nous obtiendrons par la mesure
proposée, me semble bien important, messieurs ; il fera cesser l’espèce
d’ilotisme auquel est condamnée une partie des habitants dans notre système
actuel, et remédiera au vice inhérent à l’élection même, à ces majorités
souvent factices et qui ne représentent la commune que d’une manière fausse et
incomplète.
Il est, messieurs, un autre résultat bien
désirable auquel nous parviendrions par l’institution d’un comité de commune ;
résultat tout au profit de l’ordre et de l’union parmi les habitants.
Je viens de vous parler des deux partis qui, à
l’occasion des élections se forment dans chaque municipalité. Eh bien, la
minorité éloignée du conseil, et qui dans le système qui nous régit n’a nul
autre moyen de concourir à l’administration que celui de renverser le conseil
lui-même, en le minant par une opposition d’autant plus haineuse, plus sourde
et plus tracassière qu’elle a plus d’obstacles pour se faire jour, la minorité
aura dans le comité de commune un moyen légal de faire entendre sa voix et
d’exercer son influence.
Vous comprenez, messieurs, que par là son
opposition diminuera d’intensité, par cette raison bien simple que vous lui
aurez creusé un lit plus large au lieu de lui opposer une digue qui ne pouvait
que l’irriter vainement.
Certaine qu’un moyen légal lui est laissé
d’exercer un contrôle sur les délibérations les plus graves qui sont soumises
au conseil, la minorité renoncera à l’opposition anarchique qui court les rues
; elle sera calme comme tout ce qui est dans l’ordre, et sentira cette
influence qui fait qu’on ne devient pas ministre, par exemple, sans devenir ce
qu’on nomme ministériel ; cette influence qui a fait dire à un journal, sans
qu’il en ait peut-être compris la raison, que tous ceux qui parviennent au
pouvoir se laissent démonétiser.
Eh bien, messieurs, l’opposition de la minorité
dans les communes, en devenant un pouvoir, se laissera aussi démonétiser,
c’est-à-dire qu’elle s’anéantira ; et pour ma part, messieurs, je vous montre
ce résultat comme un bienfait inappréciable. Je vous ai prouvé, du moins je
l’espère, messieurs, combien grande sera l’utilité de la mesure proposée ;
d’abord comme source de lumières pour les autorités que la loi pose les juges
de ces délibérations ; puis comme garantie de justice et comme élément d’ordre
et d’union dans les communes.
Je vous ai dit aussi, messieurs, que le
reproche de nouveauté, cette fin de non-recevoir qu’on a coutume d’opposer aux
idées qu’on a peu comprises, ne pouvait être invoqué ici, puisque
Là, messieurs, l’institution de deux corps
municipaux distincts et délibérant à part forme la base de l’organisation des
communes. Les noms de ces deux autorités varient : c’est le magistrat d’un
côté, et de l’autre l’assemblée des députés, comme en Prusse, ou le comité de
commune, comme en Bavière. En cas de désaccord entre elles, le recours au
jugement de l’autorité supérieure a lieu ; lorsque l’accord existe, il n’est
pas besoin de l’approbation du gouvernement.
Ce système établi en 1808 ne comportait aucune
exception, et l’ordonnance du 17 mars 1831 ne l’a modifié que pour certaines
résolutions d’une importance majeure, et pour lesquelles l’autorisation du
gouvernement est requise ; encore cette ordonnance n’a obtenu force de loi que
dans quelques provinces. Si quelqu’un venait ici vous proposer un pareil projet
de loi, n’est-ce pas, messieurs, que vous le regarderez comme un rêveur, comme
un démocrate exagéré ? Et cependant c’est une institution qui a pris racine
dans le sol d’une monarchie absolue, et je ne sache pas qu’on y ait trouvé des
inconvénients.
Ainsi, messieurs, les élagures
que j’ai opérées à cette institution établissent, comme la lecture de mon
amendement vous en a convaincus, une différence telle entre le comité de
commune que je vous propose et celui existant en Allemagne, que les plus grands
ennemis des innovations en doivent être rassurés. D’abord, je ne fais pas de ce
comité un corps permanent, comme chez nos voisins ; il ne sera assemblée que
pour deux délibérations des plus graves, et qui ne se renouvellent dès lors que
très rarement.
En second lieu, l’accord entre les deux corps
municipaux ne dispensera jamais de recourir, quand il y a lieu, à l’approbation
du Roi et de la députation provinciale Je laisse donc notre projet de loi tout
à fait intact, et pas un iota n’y sera changé.
Vous voyez
messieurs, que je me suis placé dans un juste milieu entre l’Allemagne et
M. Dumortier,
rapporteur. - J’approuve fortement la proposition qui nous est faite
par l’honorable M. Dechamps.
Loin qu’elle puisse apporter des modifications fâcheuses au système de la
section centrale, elle l’améliorera sensiblement. Il s’agit, dans des cas très
graves, et par cela même très rares, de doubler le conseil communal afin de
prendre l’avis d’un plus grand nombre de personnes ; peut-on, en effet,
s’entourer de trop de lumières quand il est question de grever l’avenir de la
commune ? quand la régence peut compromettre l’état
financier de la cité ?
Dans ces cas, ou ne saurait trop prendre de
précaution, et j’appuie de tout mon cœur l’amendement ; s’il n’avait pas été
présenté, je me proposais d’en présenter un à peu près semblable dans les cas
où la commune contracte des emprunts, fait des aliénations de biens, ou
s’engage dans des dépenses qui excèdent ses revenus ; j’allais demander que
dans ces circonstances plusieurs personnes fussent appelées dans le sein du
conseil de régence.
Il n’y a rien de nouveau dans le système de
l’amendement, puisque, depuis des siècles, il est mis en pratique en Allemagne,
puisque en France sous la restauration et sous le gouvernement de juillet, on a
cru devoir l’appliquer.
Je pense même que dans
La disposition, il est vrai, n’a pas été
renouvelée, ou n’a pas été inscrite dans les règlements hollandais ; mais
remarquez qu’elle ne peut offrir aucune espèce d’inconvénients et qu’elle
présente au contraire de grands avantages. Mais comment ferez-vous dans les petites
communes, dit-on autour de moi ? Je ferai observer que les petites communes
n’ont pas d’emprunts à faire ; que si elles en font, ces cas sont très rares ;
qu’elles n’aliènent pas leurs propriétés, et qu’elles ne
font pas des dépenses excédant leurs revenus : cependant si ces cas se
réalisaient dans une petite commune, si elle voulait grever son avenir, vendre
ses propriétés, faire de grandes dépenses, quel mal y aurait-il à prendre
l’avis d’un plus grand nombre de notabilités ? On vous l’a dit, par suite des
élections, bien souvent il n’y a qu’une opinion de représentée dans le conseil
de régence ; la proposition remédie à ce mal, et je crois qu’on doit l’adopter.
Toutefois si on fait des objections contre la création d’un comité de commune,
je demanderai au moins que le conseil soit doublé dans les cas que nous avons
énoncés. Mais, je le répète, je pense qu’on ne peut faire rien de mieux que de
faire un comité à part pour donner son avis sur des questions qui intéressent
fortement les intérêts matériels de la commune, ou pour prendre des résolutions
qui recevraient leur exécution sauf l’approbation royale.
M.
Pirson. - La proposition de M. Deschamps, appuyée par le
rapporteur de la section centrale, et dictée par les meilleures intentions du
monde, pourrait être remplacée par une autre plus convenable. Je ne pense pas
qu’il soit bien prudent d’établir un comité à côté du conseil municipal ; ce
serait établir une lutte entre deux pouvoirs.
Dans la province de Namur, il y a beaucoup de
biens communaux, et il s’y passe souvent de grands abus aux dépens de la classe
pauvre.
Dans celles de ces communes qui ont les revenus
considérables, si l’administration se trouve entre les mains d’hommes fortunés,
ils prélèvent toutes les dépenses sur les revenus communaux, de manière que les
plus pauvres paient autant que les plus riches. Si, par exemple, la commune
veut avoir un ministre du culte, comme il lui faut des suppléments de traitement,
on les prend sur les revenus communaux, ce qui est une véritable iniquité
envers les pauvres. Dans d’autres circonstances, s’il s’agit d’établir un impôt
additionnel pour subvenir à des revenus insuffisants, on établit un impôt
personnel, et tout cela pèse encore sur le pauvre.
Quand
l’administration est entre les mains du pauvre, l’impôt extraordinaire tombe
sur la contribution foncière, ce qui est une autre injustice.
Je crois que pour prévenir une partie de ces
inconvénients, il suffirait de dire que les dispositions contenues dans l’art.
73, c’est-à-dire, que l’information
aura lieu dans les cas prévus par les paragraphes 1, 2, 4 et 5 de l’art. 74.
L’information peut toujours être utile ; mais
je voterai contre un comité, ou contre un doublement du conseil.
M. Verdussen.
- Je ne saurais juger l’amendement qui vous est présenté par l’honorable M.
Dechamps aussi favorablement que l’a fait M. le rapporteur de la section
centrale. Je crois au contraire qu’il est inadmissible. Il propose un
contrepoids au conseil communal. Et où le cherche-t-il ? dans
les plus forts contribuables de la commune ; et dans quels cas encore ? dans les questions financières. Dès lors je ne puis admettre
avec l’honorable député de Tournay que ce soit invoquer les lumières de
l’opinion publique ; car les personnes dont on demande l’avis sur ces questions
sont celles qui y sont le plus intéressées. S’agira-t-il de dégrever les
habitants de la commune, les plus forts contribuables seront toujours prêts à
dégrever. S’agira-t-il d’une dépense à faire, quelque nécessaire qu’elle soit à
la commune, ils y seront toujours opposants.
L’opinion publique s’est prononcée par
l’élection directe des membres du conseil communal. N’est-ce pas à ces hommes
désignés par l’opinion qu’il appartient de décider des intérêts de la commune
bien plutôt qu’à ceux désignés par le caprice du sort ? Je veux dire les
contribuables les plus imposés. Comment pourriez-vous rejeter l’avis des
organes naturels de la commune pour prendre de préférence celui d’hommes
qu’elle a repoussés en ne les appelant pas au conseil communal ? Comment
l’opinion de ces derniers pourrait-elle balancer celle du conseil communal ?
Je suppose que les deux collèges
sont en contradiction : auquel des deux devra être donnée la préférence par
l’autorité compétente, lorsqu’elle jugera cette dissidence ? Cette autorité
devra se défier de l’opinion des plus forts contribuables ; car ce ne sera
jamais que dans des questions financières que le deuxième collège sera
convoqué. Les membres de ce comité se plaindront de ce qu’on n’aura pas eu
égard à leur avis, de ce qu’on aura passé outre.
Pour moi, je pense que c’est beaucoup hasarder
que mettre sans cesse en contact les représentants de l’opinion publique
composant le conseil communal, et les représentants de l’intérêt privé,
c’est-à-dire les plus forts contribuables.
M. Dubus. -
Il ne me paraît pas que la proposition de M. Dechamps présente les
inconvénients qu’a cru y découvrir l’honorable préopinant. Ce n’est en
définitive qu’un mode d’enquête, dans les cas où les délibérations du conseil
communal pourraient compromettre les finances, les intérêts de la commune. Il
me semble que cette manière d’envisager l’amendement lui est toute favorable.
Car si l’on doit prendre un avis, c’est sans doute celui des intéressés. Or,
évidemment, les plus intéressés, ce sont les plus forts contribuables.
Si une mesure présente des inconvénients
graves, qui les signalera ? Ceux sans doute qui sont frappés par cette mesure,
qui souffrent de ces inconvénients graves. La raison donc vous dit de consulter
ici les plus imposés. Et les motifs qu’on a fait valoir contre l’amendement me
paraissent être ceux qui l’appuient le plus fortement.
Dans les cas où on ordonne une enquête de
commode et incommodo et où le premier venu a le droit
de donner son avis, quels sont ceux qui viennent le donner ? les
intéressés, ceux qui sont le plus intéressés dans l’enquête. Or, ici les plus
intéressés sont indiqués par les circonstances ; ce sont les plus forts
contribuables.
S’agit-il d’une taxe municipale, les plus
intéressés sont ceux qu’elle doit frapper le plus fortement. S’agit-il d’un
emprunt, les plus intéressés sont ceux qui doivent fournir plus pour former le
complément de la somme demandée par la voie de l’emprunt.
On a
demandé ce qui arriverait dans les cas de dissidence entre les délibérations du
conseil communal et celles du collège des plus forts contribuables. Je
répondrai que le conseil communal représente la commune, et que le collège des
plus forts contribuables ne fera que donner son avis qui sera annexé comme
information à la décision du conseil communal. Les deux pièces seront adressées
à l’autorité compétente, qui prendra en considération, s’il y a lieu, les
motifs d’opposition que le collège des plus forts contribuables aurait fait
valoir. L’autorité communale, si elle a des objections à faire contre l’avis
des plus forts contribuables, sera toujours maîtresse d’adresser ses
observations à l’autorité supérieure.
Je suis donc à deviner quels sont les
inconvénients de la proposition de M. Dechamps ; j’y trouve au contraire des
avantages évidents. Je me prononce donc pour l’adoption de cette proposition
additionnelle.
M. Legrelle.
- Quelque disposé que je sois à adopter toute proposition tendant à empêcher
l’aliénation des biens communaux et des transactions onéreuses à la commune, je
ne puis m’empêcher d’appuyer ce qu’a dit l’honorable M. Verdussen pour signaler
les inconvénients résultant de la disposition additionnelle proposée par M. Dechamps.
D’abord il est évident qu’elle crée dans la
commune deux corps distincts ; or, ce n’est pas un petit inconvénient. Ce nouveau
corps se trouvera en contradiction avec le conseil communal. C’est donc
engendrer un germe de division, une espèce de conflit entre le conseil communal
et les contribuables les plus imposés qui croiront que le conseil communal,
dans le cas où il aurait gain de cause, aura agi contre les intérêts de la
commune. Si, au contraire l’opinion des plus imposés prévaut sur celle des
conseillers communaux, ceux-ci, irrités, s’éloigneront de l’administration.
Voilà ce qui est à craindre.
Mais je suppose pour un moment décidée
l’existence de ce nouveau corps communal ; il faudra régler son organisation, déterminer qui le présidera ; comment il recueillera des
renseignements et où s’arrêtera la limite de ses exigences. Or, tout cela n’est
pas prévu dans l’amendement qui vous est proposé. Il faudrait qu’il eût de plus
grands développements, car ce n’est pas une petite chose que l’organisation de
ce nouveau pouvoir.
Si vous adoptez l’amendement de l’honorable M.
Dechamps, je proposerai une disposition additionnelle portant que le collège
des plus imposés sera présidé par le bourgmestre ou celui qui le remplace, sans
y avoir voix délibérative. Personne en effet ne sera plus que lui capable de le
mettre au fait des renseignements dont il aura besoin.
Il y a encore une réflexion à faire contre le
fond de la proposition de M. Deschamps.
Il soumet non seulement à des notables les
objets compris dans le n°1° : les aliénations, transactions, échanges de biens
ou droits immobiliers de la commune, les baux emphytéotiques, les emprunts et
les constitutions d’hypothèques, le partage des biens immobiliers indivis ;
mais il leur soumet encore le n°5° qui est relatif à l’établissement, au
changement ou suppression des impositions communales et des règlements qui y
sont relatifs.
Qu’il me soit permis de faire, à cet
égard, une observation dans l’intérêt des classes pauvres. Ne pensez pas que je
sois porté à la faire par une influence locale, car je suis au contraire
convaincu que le danger que je veux signaler ne serait pas à craindre dans ma
localité où les plus imposés seraient toujours disposés à faire le sacrifice de
leur propre intérêt en faveur des classes pauvres. Mais en sera-t-il partout
ainsi ? Je ne le pense pas ; et je crois qu’il sera toujours plus ou moins
dangereux de s’en rapporter aux plus imposés, quand il s’agira de changer un
impôt supporté par tous les habitants, pour le placer sur le riche, ou quand il
s’agira de diminuer une taxe reposant sur le luxe, pour la faire peser sur les
classes pauvres. Dans tous les cas, il me semble fâcheux de placer ainsi des
hommes entre leur intérêt et leur conscience. Il y a plus, c’est que les
intérêts du pauvre pourront être méconnus sans que pour cela ceux qui sont
appelés à décider prononcent contre leur conviction. Car, quand on a son
intérêt en cause, la conviction est promptement formée, et souvent on est
dominé par son intérêt, qu’on croit agir suivant la justice.
Ce sont ces considérations qui me déterminent à
voter contre le système proposé par L’honorable M. Dechamps. S’il prévalait, je demanderais que pour éclairer le
comité, on lui fît connaître les motifs qui ont déterminé le conseil.
M. le
ministre de l'intérieur (M. de Theux). - La proposition, de M. Dechamps
me paraît assez importante pour mériter un examen spécial de la section
centrale. Si on a signalé les avantages de cette proposition, on en a aussi
montré les inconvénients. Je crois d’ailleurs remarquer que la rédaction de
cette proposition n’a pas le degré de perfection nécessaire pour pouvoir être
mise à exécution.
Par ces
motifs, je demande qu’on renvoie cette proposition, ainsi que celle de M.
Pirson, à la section centrale, avec invitation de présenter un rapport spécial.
Je n’ai pas besoin de dire que je n’ai pas à
m’opposer à l’amendement sous le rapport de l’ordre public ; car, à mon avis,
l’ordre public n’est pas engagé dans cette question. Il est vrai que, dans
l’état actuel des choses, il y a un mode d’information d’après lequel tous les
intéressés sont appelés à soumettre leurs observations ; mais je conviens que
ce mode d’informations n’a pas les mêmes avantages qu’un comité qui serait
chargé de présenter un rapport sur les objets d’utilité publique.
M. Dechamps. - Je ne m’oppose pas à la motion de
M. le ministre de l’intérieur. Comme lui je pense que la question est assez
importante pour mériter un examen spécial de la part de la section centrale.
- Le
renvoi à la section centrale est ordonné.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je désirerais que, nonobstant le renvoi, on votât sur
l’ensemble des paragraphes adoptés. Si la section centrale propose une addition
à l’article, on la fera si la chambre le décide.
M. Gendebien.
- Je pense qu’il serait bon de retiré l’article, car il me semble qu’il s’est
glissé un paragraphe qui n’a rien de législatif. C’est au numéro 1°.
Vous dites : « Néanmoins sont soumises à l’avis
de la députation provinciale et à l’approbation du Roi ; 1° les aliénations,
les transactions, échanges de biens ou droits immobiliers de la commune, les
baux emphytéotiques, les emprunts et les constitutions d’hypothèques, le
partage des biens immobiliers indivis, à moins que ce partage ne soit ordonné
par l’autorité judiciaire conformément au code civil. »
Puis vous
ajoutez : « Les communes étant dans ce cas sont autorisées à y procéder
devant le juge compétent, sans être tenues à demander une autorisation
spéciale. »
Si je voyais figurer cela parmi les
considérants de l’article, je n’y trouverais pas d’inconvénient. Mais jamais on
ne donne la forme législative à des considérants. Le législateur ne met dans la
loi que des dispositions, mais non les motifs qui l’ont déterminé à les
adopter.
M. Dumortier, rapporteur. - Le paragraphe dont
parle M. Gendebien se trouvait dans le projet du gouvernement. Nous avons cru
devoir le maintenir, afin que dans le cas où le partage serait ordonné par
l’autorité judiciaire, la commune ne fût pas obligée de recourir à
l’approbation du Roi. On pourrait changer la rédaction et dire : « Les
communes sont dans ce cas autorisées, etc. »
Mais la disposition est indispensable ; car la
loi communale étant la seule loi qui détermine les cas dans lesquels
l’autorisation ne devra pas être demandée, si vous ne dites pas que dans
celui-ci elle ne sera pas nécessaire, la commune devra la demander.
M. Gendebien. - M. le rapporteur ne m’a pas
compris. Vous avez tout réglé, quand vous avez dit : « à moins que le
partage ne soit ordonné par l’autorité judiciaire conformément au code
civil. » Il n’y a pas un commis d’avoué qui ne sache ce que c’est qu’un
partage ordonné par justice. Les mots « conformément au code civil »
sont inutile comme le reste. Je dis plus, ils sont
dangereux car nous pouvons demain, dans un an, dans dix ans, vouloir modifier
les dispositions du code civil à cet égard. Ces mots sont donc non seulement un
non-sens, mais encore dangereux.
Je demande donc qu’on termine aux mots : autorité judiciaire, et qu’on supprime
le reste.
L’autorisation du Roi est inutile dès que
l’autorité judiciaire a ordonné. Aucun pouvoir ne peut aller contre une
décision de l’autorité judiciaire. Elle ne peut être réformée que par la cour
d’appel ou la cour de cassation. Il est impossible d’arrêter le cours de la
justice.
M. Milcamps. - Je conviens avec l’honorable M.
Gendebien que le paragraphe tel qu’il est conçu puisse être adopté, mais je
pense qu’il faut le modifier et non le rejeter. Car les communes peuvent avoir
à demander ou contester un partage devant un tribunal, et elles ne peuvent
plaider sans y être autorisées. Je pense que, dans le paragraphe dont il
s’agit, on a eu pour but de donner aux communes cette autorisation.
M. Gendebien. - Ce que vient de dire M.
Milcamps rentre dans les règles générales des autorisations dont les communes
ont besoin, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit.
M. Dumortier,
rapporteur. - Le cas dont a parlé M. Milcamps est prévu par les
dispositions de l’article 146, d’après lequel aucune commune ne peut ester en
justice sans autorisation. D’après l’article 74 dont nous nous occupons, il
n’est pas question d’ester en justice, mais de l’exécution d’un jugement.
Je trouve fondées les observations
de M. Gendebien sur les mots : « conformément au code civil » et
quant à la fin du paragraphe, si la chambre pense que ce qui précède suffit, je
n’insisterai pas pour le maintien.
- Les mots : conformément au code civil et suivants sont supprimés.
M. Devaux.
- Il y a probablement quelque part une disposition qui m’échappe. Mais il me
semble qu’il y a dans le paragraphe 1er une omission. Je vois bien au n°4 que
les actes des établissements communaux seront soumis à l’approbation royale et
de la députation lorsqu’ils seront relatifs aux acquisitions d’immeubles. Mais
je ne vois pas dans le n°1 la même obligation pour les communes. Car évidemment
on n’a pas voulu entendre la commune par ces mots : établissements communaux. Il me semble qu’il faudrait réparer cette
omission.
M. le
ministre de l'intérieur (M. de Theux). - Il suffirait de supprimer ces
mots : par les mêmes établissements.
M. Devaux. - Si
on fait cette suppression, il arrivera un inconvénient opposé, c’est que le
paragraphe 4° ne s’appliquera plus qu’à la commune et non aux établissements
communaux.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - La difficulté soulevée par l’honorable
préopinant se trouve résolue par le paragraphe additionnel que j’ai eu
l’honneur de vous proposer.
M. Devaux. - Je suis fâché de prendre encore la
parole. Mais je vois dans l’article ces mots : la disposition des deux numéros précédents ; il ne s’agit pas du
n°4.
Plusieurs voix. - Si, si, des numéros 3° et 4°.
M. Dumortier,
rapporteur. - Il y a un moyen bien simple de lever toute espèce de
doute, c’est de nommer les numéros 3° et 4° dans l’article.
M. Lebeau. - Il
vaudrait mieux dire les paragraphes 3° et 4°
- Les mots par les mêmes établissements sont retranchés de l’article.
L’addition proposée par M. Dumortier est
acceptée.
M. Dumortier,
rapporteur. - Il est à remarquer que d’après l’amendement de M. le
ministre de l'intérieur, les communes ne pourraient aliéner leurs propriétés ou
faire des transactions tandis que les établissements de bienfaisance seraient
autorisés à le faire.
M. le
ministre de l'intérieur (M. de Theux). Il y a des dispositions
existantes relativement aux établissements communaux et de bienfaisance. Ils
n’auront pas la liberté d’aliéner leurs biens mais, comme la loi actuelle a
pour but de leur accorder une plus grande émancipation, il a fallu le
mentionner dans cet article.
- L’article 74 est mis aux voix et adopté. Il
est ainsi conçu :
« Néanmoins sont soumis à l’avis de la
députation provinciale et à l’approbation du Roi, les délibérations du conseil
sur les objets suivants :
« 1° les aliénations, transactions,
échanges de biens ou droits immobiliers de la commune ; les baux
emphytéotiques, les emprunts et les constitutions d’hypothèques, le partage des
biens immobiliers, à moins que ce partage ne soit ordonné par l’autorité
judiciaire.
« Toutefois, l’autorisation de la
députation permanente du conseil provincial est suffisante pour ces actes,
lorsque la valeur n’excède pas 1,000 francs ou le dixième du budget des voies
et moyens, à moins que ce dixième ne dépasse pas 20,000 fr.
« 2° Les péages et droits de passage à
établir dans la commune.
« 3° Les actes de donation et legs faits à
la commune ou aux établissements communaux, lorsque la valeur excède trois
mille francs.
« L’approbation de la députation
permanente du conseil provincial est suffisante lorsque la valeur des donations
ou legs n’excède pas cette somme.
« En cas de réclamation, il est toujours
statué par le Roi sur l’acceptation, la répudiation ou la réduction de la
donation ou du legs.
« 4° Les demandes en autorisation
d’acquérir des immeubles ou droits immobiliers.
« Néanmoins, l’approbation de la
députation permanente du conseil provincial suffira, lorsque la valeur
n’excédera pas la somme de 3,000 fr.
« 5° L’établissement, le changement ou la
suppression des impositions communales et des règlements y relatifs.
« 6° Le changement du mode de jouissance
de tout ou partie des biens communaux. »
Paragraphe additionnel.
« Les dispositions des deux numéros
précédents sont applicables aux établissements communaux qui ont une
administration spéciale.
« Les actes délibérés par ces
administrations sont en outre soumis à l’avis du conseil communal. »
Titre I. - Du corps municipal.
Chapitre III. - Des réunions et des
délibérations des conseils municipaux
Article 69 (du projet de la
section centrale)
M. le président.
- La discussion est ouverte sur l’art. 69.
M. d'Hoffschmidt.
- La section centrale a admis en partie dans sa nouvelle rédaction, les
modifications proposées à l’article qui nous occupe par notre honorable
collègue M. Devaux, à l’amendement duquel je me suis rallié parce qu’il rentre
dans les vues que j’ai soumises à la chambre tendant à former une exception
quant à la publicité des séances des conseils dans les petites communes rurales
; mais elle a changé entièrement le paragraphe de cet amendement relatif à cette
exception.
La section centrale n’admet d’exceptions que
pour les villages où il n’y a pas de maison communale sans avoir égard à leur
population, et range dans la catégorie générale ceux qui possèdent de ces
maisons de commune sans prendre davantage la population et l’importance de
ceux-ci pour base. C’est-à-dire qu’elle n’a puisé de motifs de publicité ou de
non-publicité, que dans l’existence ou le défaut de maisons communales, tandis
que tant d’autres raisons, bien plus plausibles, militent en faveur de cette
exception si importante. D’abord, messieurs, il est difficile de se rendre
compte des motifs de la section centrale ; car, par exemple, quelle est la
différence qu’elle trouve pour ce qui concerne la publicité, entre une maison
communale appartenant à la commune et une maison louée par la commune ? Et en
quoi la question de propriété peut-elle, je le demande, influer sur l’utilité
ou l’inutilité de la publicité ? A-t-elle bien réfléchi que, par suite de cette
disposition, une commune de 5 à 6 cents habitants qui posséderait par hasard un
vieux presbytère transformé en salle communale, jouirait, ou plutôt serait
astreinte à la publicité, tandis que de grandes communes de 7 à 8 mille
habitants, comme il s’en trouve dans les Flandres, seraient exceptées de cette
publicité, sous le prétexte frivole qu’elles ne possèdent aucune maison
communale ?
Ce serait là, messieurs, une anomalie qui
sauterait aux yeux, et que la précipitation avec laquelle la section nous a
présenté son travail peut seule expliquer.
Mais examinons maintenant les motifs qui lui
ont fait rejeter la rédaction de l’honorable M. Devaux, quant à l’exception à
formuler à l’égard des petites communes.
D’abord elle invoque l’esprit de la
constitution, objection que j’avais prévue lorsque j’ai présenté l’amendement
que j’ai abandonné pour me rallier à celui du député de Bruges, et certes je ne
trouve pas de meilleure réponse à opposer que les procès-verbaux des séances du
congrès dont l’honorable M. Dumortier nous a donné lecture, qui nous ont fait
connaître que ni la section centrale du congrès, ni l’assemblée générale de ce
corps constituant, n’ont entendu étendre la publicité aux petites communes
rurales ; et c’est là, messieurs, un point à ne pas perdre de vue, surtout si
vous vous reportez au temps où cette assemblée, animée du plus pur patriotisme,
a doté notre pays d’une constitution où elle a consacré toutes les libertés
compatibles avec l’ordre et le bonheur public.
J’admets cependant avec la section centrale que
l’intervention de la députation du conseil provincial dans la question de
savoir si les délibérations du conseil doivent être ou non publiques, n’est pas
très applicable dans le cas dont il s’agit. En effet, dans une foule de
circonstances, la publicité devient une espèce de mesure d’ordre intérieur, que
le conseil communal est plus à même d’apprécier que la députation, qui, par son
éloignement, ne peut juger de l’opportunité de ces mesures que sur des données
générales qui ne peuvent être applicables à toutes les localités.
Ce sont ces considérations, messieurs, qui
m’avaient porte à laisser les conseils des petites communes seuls juges de la
question d’utilité quant à la publicité de leurs séances, ne voulant les
soumettre à la tutelle de la députation que quant à leurs actes les plus
importants.
Mais notre honorable collègue, le judicieux M.
Dubus, a trouvé que je me défiais de l’intelligence des membres des conseils
communaux en réclamant l’unanimité pour obtenir la publicité, et cette manière
de voir, qu’il m’a prêtée bien gratuitement, au lieu de me réfuter par des
faits, ne m’étant pas même venue à la pensée, je suis tout disposé, pour lui
donner ses apaisements, à ne réclamer pour cette publicité que l’assentiment du
bourgmestre et des deux tiers du conseil ; s’il trouve que c’est encore une
trop forte majorité, j’aime à croire qu’il nous en expliquera les raisons sans
me prêter des motifs peu bienveillants pour des administrateurs élus par leurs
concitoyens.
Cet honorable collègue a aussi trouvé que le
chiffre de 3,000 habitants que j’avais proposé dans mon amendement tendant à
excepter les communes au-dessous de ce nombre de la publicité, était tellement
élevé, qu’il exclurait la plus forte partie de nos communes de cette
disposition ; et à cet égard, il a parlé de mon expérience que je n’ai
cependant nullement invoquée relativement à ce point, pour lequel j’ai pris
pour base le travail de la commission que le gouvernement a chargé de faire un
projet de loi communale, croyant par là donner plus de poids à ma proposition.
Maïs je conviens que l’on peut substituer comme l’a fait M. Devaux, le nombre de 2,000
habitants à celui de 3,000 ; et même, pour être plus certain qu’une exception
sera faite pour les petites communes, exception que je considère comme
absolument indispensable, je propose de réduire le chiffre de 2,000, proposé
par M. Devaux, à 1,500.
De sorte que, messieurs, il n’y aurait plus que
les petites communes, c’est-à-dire celles où les intérêts sont de peu
d’importance, où il n’y a pas de maisons communales et où en général les
conseils sont composés de cultivateurs peu instruits, que la publicité des
séances des conseils deviendrait facultative dans tous les cas.
J’ai déjà eu l’honneur de vous exposer les
motifs qui me font réclamer cette exception, motifs que plusieurs orateurs ont
fait ressortir victorieusement ; je n’y reviendrai donc plus de crainte de
fatiguer l’assemblée, qui doit désirer à la fin de terminer la discussion
relative à la question qui nous occupe.
Voici la disposition que je propose en
remplacement du dernier paragraphe de l’article nouveau de lu§ion
centrale :
« Dans les communes de moins de 1,500
âmes, les séances du conseil communal ne sont publiques qu’en vertu de la
décision du bourgmestre et des deux tiers du conseil. »
M. le
président. - L’amendement présenté par M. d’Hoffschmidt est conçu en
ces termes :
« Dans les communes de moins de 1,500
âmes, les séances du conseil communal ne sont publiques qu’en vertu de la
décision du bourgmestre et des deux tiers du conseil.
M. Dubus. -
Je ferai d’abord une observation sur la dernière disposition proposée par
l’honorable préopinant. Il pourra arriver que l’unanimité du conseil ne pourra
décréter la publicité. Car il suffit de la majorité absolue du conseil pour que
la séance soit ouverte, et chaque fois que le nombre des membres présents
n’atteindra pas les deux tiers du conseil, la publicité sera impossible.
M. d'Hoffschmidt.
- J’ai entendu parler des 2/3 des membres présents, cela va sans dire.
M. Dubus. -
N’en déplaise à l’honorable préopinant, s’il ne le disait pas, (erratum au Moniteur belge n°326, du 22
novembre 1834 :) cela n’irait pas sans dire.
Messieurs, la section centrale vous propose une
nouvelle rédaction. Elle a persisté dans le système de restriction qu’elle a
adoptée à l’égard du principe de publicité des séances communales. Selon ses
défenseurs, ce système de restriction est le seul qu’il faille adopter pour
éviter les inconvénients qui résulteraient de l’exécution large d’un principe
consacré par la constitution. Parmi ces inconvénients, celui qu’elle a surtout
signalé, c’est que la publicité ait lieu a priori, attendu que si le conseil communal
jugeait le huis-clos nécessaire, il se verrait obligé de renvoyer le public,
opération qui pourrait exciter du tumulte et de la résistance de sa part. Il me
semble qu’il faut que la section centrale n’ait point regardé cet inconvénient
comme bien grand, puisqu’elle-même a prévu ce cas et ne l’a pas évité. En
effet, je lis (art. 69) :
« Dès qu’une question de ce genre sera
soulevée, le président prononcera immédiatement le huis-clos, et la séance ne
pourra être reprise que lorsque cette question sera terminée. »
La section centrale n’a donc pas craint le
désordre qui résulterait de la faculté laissée ici au président de renvoyer
l’assemblée, et je vous prie de remarquer que l’exercice de cette faculté sera
fréquent. Si donc la section centrale a cru qu’il n’y aurait pas de danger à
renvoyer le public chaque fois que des questions de personnes seront soulevées
dans l’assemblée, comment a-t-elle pu supporter pour faire triompher le système
mixte de publicité qu’elle a adopté, que la décision d’un comité ne pourrait
jamais être une occasion de désordre ? Il me semble que pour combattre la
section centrale, il suffit de l’opposer à elle-même. Le système que j’avais
proposé était bien plus simple. Les bases étaient nettement posées.
Ce système-là rendrait hommage aux principes de
la constitution. Il était loin d’entraîner les inconvénients de rendre la
publicité trop facile. Il y a quelque chose à craindre, c’est que la majorité
des conseils ne soit trop portée à vouloir le huis-clos et à se débarrasser en
toute circonstance du contrôle de la publicité. C’est même ce que la section
centrale avait craint lors de son premier travail, puisqu’elle ne voulait pas
que le huis-clos eût lieu. Je ne m’en suis pas moins déterminé à appuyer la
proposition de M. Gendebien, parce que j’ai pensé que si, dans les
commencements les conseils se décident assez généralement pour le huis-clos,
avec le temps, et en suivant les exemples que pourront leur donner quelques
communes voisines, et en reconnaissant que cette publicité est ordinairement un
bien plutôt qu’un mal, ils se corrigeront de leurs préventions contre la
publicité ; que, sans secousses, on rendrait hommage aux principes de la
constitution et que la publicité s’étendrait peu à peu dans toutes les
communes.
Maintenant la section centrale admet que dans
tous les cas il pourra y avoir huis-clos. Il est vrai qu’elle veut que les deux
tiers des membres présents décident si la séance sera secrète. Mais lorsqu’il
s’agit de questions de personnes, comme elle les appelle, alors elle fait une
règle absolue qui ne peut fléchir devant aucune considération.
Il y a ici une sorte d’inconséquence dans le
système de la section centrale, inconséquence qui aurait besoin d’être
justifiée. Vous aimez donc bien le secret pour poser une règle invariable de
huis-clos en présence de la constitution qui pose en principe la publicité ! Ne
peut-il pas y avoir des motifs aussi puissants pour désirer la publicité dans
les cas ou les questions toucheront les personnes que pour désirer le secret ?
Avez-vous examiné tous les cas pour décider, dès aujourd’hui, et d’emblée, que
la règle ne fléchira devant aucune considération ? Sera-t-il-toujours bien
clair pour tout le monde que l’objet en discussion est ou n’est pas une
question de personne ? Un seul membre du conseil qui soutiendra que la question
intéresse des personnes exigera le huis-clos.
Mais, dit-on, nous entendons par questions de
personnes celles qui se rapportent à des intérêts
individuels. Hier, je lisais dans la
rédaction du la section centrale : « celles qui se rapportent à des
intérêts privés » ; la première expression n’est pas plus claire que la
seconde, et je crois qu’on aurait pu conserver les mots intérêts privés.
Le tour de phrase qu’on nous propose maintenant
conduira à considérer comme questions de personnes presque toutes les questions
qui s’agiteront devant les régences : pour vous en convaincre, je pourrais me
prévaloir de la déclaration d’un honorable membre, lequel fait partie d’une
régence, et qui vous a dit que les intérêts individuels étaient engagés de près
ou de loin dans les questions débattues dans les communes.
Ainsi, la publicité sera une exception
extrêmement rare, et le huis-clos sera presque toujours de rigueur. Voilà à
quoi nous arriverons avec la rédaction présentée par la section centrale.
Dans des cas bien rares la publicité serait
facultative ; elle aurait lieu quand la majorité du conseil le voudrait ; ainsi
partout le secret est la règle de la section centrale.
Vient enfin le paragraphe qui a donné lieu à
l’amendement présenté par M. d’Hoffschmidt. Dans ce paragraphe, on dit que dans
les villages où il n’y a pas de maison communale spécialement destinée à l’administration, les séances du conseil
communal ne sont publiques qu’en vertu d’une décision du conseil provincial.
Hier on parlait de villages qui n’avaient pas de maisons communales ; c’est
cette observation qui a donné naissance au paragraphe que je cite : si je
recherche de quels villages on veut parler, je suis fort embarrassé.
Je connais une commune, à la fois chef-lieu de
canton et de justice de paix ; elle a plus de six mille habitants, elle a
construit une maison qui est bien sa propriété, mais cette maison n’est pas
seulement et spécialement destinée à l’administration : il s’y trouve une salle
pour l’école, une salle pour les opérations de la milice, une salle pour les
audiences du juge de paix, une salle pour les séances du conseil communal.
En outre il y a au rez-de-chaussée, destiné au
concierge, un cabaret. Les communes rurales ne peuvent pas entretenir un
concierge qui ne ferait rien ; elles ne sont pas assez riches ; elles lui
donnent un logement et il faut qu’il ait un état ; au concierge dont je parle,
on permet de tenir un cabaret, Je le demande, une maison, ainsi occupée,
est-elle destinée principalement à l’administration ?
M. Dumortier,
rapporteur. - Oui ! évidemment, oui !
M. Dubus. -
On me répond oui ; c’est très bien ; voici un autre cas :
Je connais une commune qui a plus de trois
mille habitants ; elle loue une partie de maison, et le prix du loyer est porté
dans les comptes de cette commune. Elle loue cette partie de maison dans un
cabaret ; est-ce là encore une maison destinée spécialement à l’administration
?
J’ai
entendu dire que la section centrale avait à cœur qu’on ne délibérât pas dans
les conseils communaux entre les pots et les verres ; quant à moi, je ne
connais pas de communes où les délibérations se fassent ainsi. Que l’on
compulse les budgets des communes, et l’on verra toujours qu’une somme y est
portée pour une maison, ou plutôt pour une salle qui sert pour les séances. Le
plus souvent cette salle est dans la maison d’un cabaret, car il n’y a guère
que les cabarets qui aient des salles ; les maisons appartenant à des
cultivateurs présentent toujours des logements trop restreints. Quoi qu’il en
soit, cette salle n’en est pas moins destinée spécialement à l’administration
communale. Je le demande, est-ce parce que aurait loué dans la maison d’un
cabaret, au lieu de louer ailleurs, qu’il n’y aurait aucune publicité ? Si
c’est cela que l’on veut, je dirai que cela n’est fondé sur aucune bonne raison
; j’ai recherché cette raison et je l’ai recherchée vainement. Aussi j’attends
les explications de M. le rapporteur pour comprendre le paragraphe ;
actuellement, je ne le comprends pas du tout.
M. Dumortier,
rapporteur. - J’avoue, messieurs, que la proposition primitive de la
section centrale me parait préférable à tout ce que nous avons fait depuis ;
dans mon opinion ce serait cette rédaction qu’il faudrait maintenir.
Quant au dernier paragraphe, d’après les
propositions de MM. d’Hoffschmidt et Devaux, il devrait être rédigé de telle
sorte que les petites communes n’eussent aucune publicité sans l’avis de la
députation. Je ne comprends pas ce que la députation a à faire ici. Si les 2/3
du conseil communal veulent la publicité des séances, on aurait mauvaise grâces
à la refuser. Car les administrations communales seront plus portées à la
refuser qu’à l’admettre. Si donc les deux tiers du conseil communal y
consentent, c’est qu’assurément elle ne peut en rien nuire à la commune. Je
préférerais donc conserver la disposition telle qu’elle a été présentée ; je
pense qu’elle n’offrirait aucun inconvénient.
Quant à la rédaction de la section centrale, je
conviens que ces mots : « Les villages où il n’y a pas de maison
communale » demandent une explication. On pourrait même changer cette
rédaction. La section centrale a voulu parler des communes qui n’auraient pas
un local spécial pour les délibérations du conseil communal. Mais si la commune
a une maison dont une partie soit consacrée à la justice de paix, il est
incontestable qu’elle pourra en consacrer une autre partie aux séances du
conseil communal et qu’elles pourront être publiques. Si la commune loue un
local pour les délibérations du conseil, il devra aussi en être comme si elle
en avait fait l’acquisition.
Ce que la section centrale a voulu
éviter, c’est que, sans l’autorisation des états, les séances du conseil
communal aient lieu dans la maison du bourgmestre ou, comme l’a dit M.
d’Hoffschmidt, dans un trou. (On rit.)
Je conclus en proposant le maintien de la
rédaction primitive de la section centrale.
M. Devaux. -
L’honorable rapporteur de la section centrale ayant combattu les conclusions de
la section centrale plutôt qu’il ne les a appuyées, je crois nécessaire de dire
quelques mots à l’appui de l’amendement que j’ai eu l’honneur de proposer, et
que la section centrale avait en grande partie adopté.
Ainsi que je l’ai dit dans une précédente
séance, je crois la publicité des séances du conseil communal très utile dans
les grandes communes ; mais dans les petites communes, devant une assemblée peu
nombreuse, je considère cette publicité comme ayant des inconvénients réels.
Peut-être aurait-on pu suppléer à cette publicité en publiant les
procès-verbaux. Toutefois, pour ne pas compliquer la discussion, je n’insiste
pas sur cette opinion.
J’avais fait d’un côté une large part aux
grandes communes ; mais d’un autre côté, dans les petites communes où les
délibérations du conseil communal seront moins une discussion qu’une espèce de
conversation, dans ces communes où tous les habitants sont en quelque sorte
intimes, camarades, amis, j’ai restreint la publicité.
Ainsi j’ai fait aux grandes communes la part
plus grande que la section centrale et le ministre de l’intérieur. La section
centrale, dans les cas où la publicité doit être facultative, voulait qu’elle
fût ordonnée par les 2/3 des membres ; moi je la propose à la simple majorité.
M. le ministre de l’intérieur proposait, lui, que la publicité n’eût lieu que
par exception et dans certains cas spéciaux.
Je vais plus loin que l’honorable M. Gendebien,
puisque je demandais que la publicité fût dans certains cas obligatoire pour
les grandes communes.
Mais si je crois la publicité possible,
avantageuse dans les grandes communes, elle me paraît rencontrer dans les
petites communes des obstacles matériels vraiment insurmontables.
Là, la présence du public ne me semble pas
supportable ; ce sera un véritable scandale ; quoique ce soit dans une petits
sphère, on doit chercher à l’éviter. Il arrivera souvent qu’il sera impossible
de décider si une délibération est l’ouvrage du conseil ou des habitants de la
commune.
L’honorable M. Dumortier vous a dit que d’après
le projet de la section centrale jamais les séances ne seraient publiques dans
les petites communes, lorsque les 2/3 des membres du conseil communal s’y
opposeraient. Je suis étonné que l’honorable rapporteur, qui d’ordinaire
possède si bien son projet, soit ici en contradiction avec l’article de la
section centrale, lequel détermine une suite de cas où les séances seront
forcément publiques. Quel que soit le local des séances, se tinssent-elles même
dans un cabaret, il faudrait d’après le projet qu’elles fussent publiques dans
certains cas, et ce alors même que les 2/3 des membres ou l’unanimité du
conseil s’y opposerait.
En ce qui
concerne les maisons communales, je partage l’opinion de l’honorable M. Dubus.
Il y a des communes importantes qui n’ont pas de maison communale. C’est là une
mauvaise ligne de démarcation ; Telle commune peut avoir un local propre aux
délibérations du conseil, convenable pour que les conseillers viennent y
converser autour d’une table et néanmoins nullement propre à recevoir le
public.
La population est sans doute la ligne de
démarcation la plus claire ; elle me paraît devoir être adoptée. Si cette ligne
de démarcation présente quelques inconvénients, ils disparaissent devant la
garantie qu’on trouve dans l’avis de la députation. Je persiste dans ma
proposition.
M. Dumortier,
rapporteur. - Comme me l’a fait remarquer l’honorable préopinant,
j’avais omis de faire observer à la chambre que d’après le système de la
section centrale, il est des cas où la publicité est garantie dans les plus
petites communes.
Si vous adoptez l’amendement de M. Devaux, la
députation pourra priver de la publicité l’immense majorité des communes. Les
intérêts communaux sont-ils donc moins chers aux petites communes qu’aux
grandes ? C’est au contraire là qu’ils sont, je crois, le plus précieux. Car
c’est dans les petites communes que l’aliénation des biens communaux se
rattache le plus aux intérêts particuliers.
Nous avons en Belgique 2,738 communes. Sur ce
nombre 238 seulement ont une population supérieure à 3,000 habitants. Si donc
vous adoptiez la proposition qu’avait d’abord faite l’honorable M.
d’Hoffschmidt, il y aurait 2,500 communes qui n’auraient la publicité des
séances que sous le bon plaisir de la députation, il n’y en a que 238
auxquelles cette publicité serait garantie par la loi.
Je n’ai point sous les yeux le chiffre des
communes d’une population de 1,500 ou 2,000 habitants. Je sais que le nombre
des communes dont la population est inférieure à 1,000 est de 1,381, Si on
considère d’un autre côté que le nombre des communes dont la population est
au-dessous de 3,000 habitants est de 2,500 on peut supposer que les communes
dont la population n’est de 1,500 à 2,000 habitants est d’environ 2,000. Ainsi
les 4/5 des communes de
Maintenant,
je ferai une dernière observation. Si vous laissez cela à l’appréciation des
états députés, c’est comme si vous l’abandonniez aux commissaires de district
et par contre au gouverneur. Vous lui donneriez une influence immense sur les
décisions du conseil. Je ne veux pas laisser un point aussi important que la
publicité des séances des conseils, à la discrétion des agents du gouvernement.
Quand les deux tiers des membres d’un conseil communal désireraient rendre leurs
délibérations publiques, nous aurions fort mauvaise grâce, nous élus de la
nation, à nous y opposer. Si on veut que ce soit simplement la majorité qui
décide, je ne m’y opposerai pas, mais je ne vois pas ce que viendrait faire
dans cette question la députation des états.
Je persiste à dire que la disposition primitive
de la section centrale me paraît préférable à la seconde et à tous les
amendements proposés ; en conséquence, je demande qu’elle soit mise aux voix.
M. Gendebien.
- Vous voyez, messieurs, qu’après trois jours de discussion, nous sommes, je ne
dirai pas aussi avancés, mais plus éloignés du terme que le premier jour, car
il serait difficile de déterminer maintenant sur quel objet nous discutons,
tant il s’est présenté d’amendements et de rédactions différentes dans tous les
sens. Mon intention n’est pas de prolonger la discussion, je voudrais au
contraire la rendre la plus courte possible.
Je ferai observer à M. d’Hoffschmidt
qu’indépendamment des inconvénients que M. Dubus a signalés comme résultant de
son amendement, il en est un qu’on n’a pas remarqué ; c’est qu’il veut dire que
les communes au-dessous de 1,500 habitants ne puissent délibérer en public
qu’autant que le bourgmestre et les deux tiers des membres soient de cet avis ;
cumulativement le bourgmestre et les deux tiers des membres présents.
De sorte que toutes les fois que le bourgmestre
seul ne voudra pas de publicité, le conseil à l’unanimité fût-il d’une opinion
contraire, il n’y aura pas de délibération publique. Si vous ajoutez cette
autre observation, que le bourgmestre est nommé par le gouvernement, il n’y
aura de publicité dans ces communes qu’autant que le gouvernement le voudra
bien. Je ne sais si telle était l’intention de l’honorable membre, mais c’est
ce qui résulte du texte de son amendement. Je le prie de bien remarquer que
c’est cumulativement qu’il exige l’avis du bourgmestre et des deux tiers des
membres du conseil pour que les délibérations soient publiques.
Maintenant, je me bornerai à faire observer que
mon amendement tend à maintenir le principe de la publicité consacré par la
constitution. Je ne m’occuperai pas de toutes les observations contradictoires
auxquelles mon amendement a donné lieu. Les uns disent que si on laisse aux
conseils la faculté de décider si leurs séances seront publiques ou secrètes,
ils délibèreront toujours en secret ; d’autres prétendent qu’ils feront tout en
public. Je ne comprends pas que le même principe puisse amener des conséquences
aussi opposées, et appuyées par les uns et les autres de raisons aussi bonnes.
Un même principe ne peut pas avoir des conséquences aussi contradictoires.
Je répondrai à ceux qui ont combattu mon
amendement, que je ne veux pas plus imposer la publicité aux conseils
communaux, que je n’ai voulu à une autre époque imposer une forme de
gouvernement à mon pays, quoique je fusse bien prononcé dans une opinion qui
n’a pas prévalu au congrès.
Une fois le principe de la publicité posé, il
acquerra des développements. En attendant, je trouverai tout simple que dans
les communes qui ne veulent pas de publicité, les conseils communaux se
prononcent contre ; et quant aux communes qui veulent de la publicité, je ne
crains pas que les conseils n’en veuillent pas, car les électeurs seront là
pour chasser les conseillers de leurs fauteuils à la première élection, s’ils
ne remplissent pas bien leur mandat.
Songez que nous ne faisons pas une loi pour un
jour, pour un an, que cette loi doit durer plusieurs années, et vous voulez la
faire avec toutes les précautions que l’état actuel tel que vous le voyez, à
tort ou raison, vous suggère. Mais qui vous dit que dans un an, deux ans la
publicité présentera encore les inconvénients que vous signalez et n’offrira
pas au contraire de grands avantages ? Eh bien, la loi sera là avec les
restrictions dont vous l’aurez entourée ? Croyez-vous que vous serez maîtres de
revenir sur vos décisions. Non, il faudra de longues années avant de pouvoir
faire revenir les deux autres branches du pouvoir législatif sur une loi restrictive.
Plus nous nous éloignerons de la révolution,
moins on sera disposé à accorder des libertés aux communes. Il faut poser le
principe et le laisser se développer.
Comme je le disais tout à l’heure, je ne veux
pas plus imposer que refuser la publicité des délibérations aux communes. Je ne
veux pas l’imposer parce que sous un régime constitutionnel on n’impose jamais
rien. Je ne veux pas l’ôter, parce que c’est un principe consacré par la
constitution et que je regarde comme un devoir de le maintenir.
Voilà les raisons qui m’ont déterminé à
proposer mon amendement.
Je n’avais pas compris le dernier paragraphe de
l’amendement de M. Devaux qui est ainsi conçu :
« Dans les communes de moins de 2,000
âmes, les séances du conseil communal ne sont publiques qu’en vertu de la
décision des états députés, qui peut toujours être révoquée par la même
autorité. »
Mais je lui ai demandé s’il entendait cette
disposition d’une manière absolue, de telle manière que jamais la publicité ne
pourrait avoir lieu dans ces communes, même pour les objets pour lesquels
l’art. 69 la déclare de droit. Sa réponse ayant été affirmative, je dois dire
que dans mon opinion ce ne peut pas être mis en délibération, parce qu’il est
contraire à la constitution. La constitution a décrété le principe de la
publicité ; vous ne pouvez pas dépouiller 2,500 communes, comme l’a dit M.
Dumortier, du droit de tenir leurs séances publiques, pour ne la laisser qu’à
238 communes. De quelque façon qu’on entende la constitution, il est impossible
de l’appliquer à un nombre aussi petit, et d’en priver un nombre aussi grand
comparativement. Dans aucun cas, l’amendement de M. Devaux ne peut être admis.
Messieurs, je ne puis finir que comme j’ai
commencé. Si vous persistez dans la même voie dans laquelle vous ont fait
entrer et le gouvernement et la section centrale, vous ne ferez qu’une loi
complètement imparfaite, même pour le moment actuel et qui liera l’avenir pour
bien longtemps.
Un législateur doit avoir pour but
de faire la loi la plus parfaite possible.
Il est notoire, il est de principe en
législation, qu’une loi ne peut être parfaite dés qu’elle renferme des
catégories, des énumérations. La loi ne doit renfermer que des principes, et au
lieu de principes vous ne placez dans votre disposition que deux exceptions,
avec énumération des deux côtés.
Quant à moi, il ne me reste plus qu’une seule
chose à faire, c’est de protester de toutes mes forces contre la violation de
la constitution, et si la chambre ne veut pas m’entendre, j’espère que dans un
avenir qui n’est pas loin, et on sera forcé d’y revenir. Mais prenez garde
qu’une réaction n’amène des exigences qui n’ont pas été consacrées par la
constitution de 1831. J’ai dit.
M. le
ministre de l'intérieur (M. de Theux). Je crois qu’il faut en revenir à
la proposition que j’avais faite à la chambre de se prononcer sur le principe :
savoir si la publicité sera de droit, sauf au conseil à prononcer le huis-clos,
ou bien comme le propose la section centrale, si le comité secret sera de droit
excepté dans les cas prévus par la loi, où la publicité sera obligatoire. Je
crois qu’il faut se prononcer entre ces deux systèmes avant de discuter les
amendements présentés.
Je ferai remarquer que quand le projet de loi de
la section centrale serait adopté, si tant est que la chambre l’adopte, on
pourrait y adopter tels amendements qu’on jugerait nécessaires.
J’ai
cru devoir me prononcer en faveur du système de la section centrale, et je
persiste dans cette opinion, parce que je pense qu’en établissant la publicité
comme règle générale, sauf à décider ultérieurement qu’il y aura comité secret,
ou éloignerait des conseils communaux une foule d’hommes honorables qui ne
voudraient pas se trouver discutant, face à face avec les administrés, les
intérêts qui leur sont commis. Si ce malheur arrivait, à la première élection
le système serait vicié. Les institutions sans les hommes ne sont rien. Un
système qui aurait pour résultat d’éloigner des administrations communales les
hommes les plus calmes, les plus moraux, serai un système absolument vicieux.
Toutefois je ne veux refuser la publicité dans aucun des cas énumérés par la
section centrale, parce que les objets qui y sont spécifiés sont d’une grande
importance pour la commune, et qu’il est bon qu’elle connaisse l’opinion de ses
mandataires ; mais pour cela il faut qu’elle ait des locaux où les séances
puissent se tenir convenablement.
M. d'Hoffschmidt.
- Je commencerai par répondre à M. Dubus qui a signalé une lacune à mon
amendement avec un ton qui lui est particulier et que je ne lui envie pas.
En effet, dans la précipitation avec laquelle
j’ai rédigé mon amendement, j’avais oublié les mots « membres présents. »
Je les ai rétablis. Ainsi l’objection est levée, j’espère qu’on n’y reviendra
plus.
Je répondrai aussi en peu de mots à l’objection
de l’honorable M. Gendebien. Cet
honorable membre a fait remarquer que, dans ma proposition, il ne suffisait pas
que les deux tiers des membres présents demandassent le huis-clos, il fallait
encore que le bourgmestre y joignît sa voix. Je l’ai fait avec intention. Je ne
partage pas l’opinion de M. Gendebien et de beaucoup des membres de cette
assemblée sur l’efficacité de la publicité des séances des conseils communaux.
Selon moi, cette publicité sera une vraie calamité, une source de désordre.
Elle amènera la perturbation dans les villages, je vous le prédis d’avance. Si
j’ai invoqué mon expérience, ce n’est pas seulement comme commissaire de
district, mais c’est parce que j’ai exercé dans ma province les fonctions de
membre du conseil municipal, d’échevin et de bourgmestre, et que j’ai fait des
observations non seulement dans le Luxembourg, mais dans d’autres provinces du
royaume. Si vous dégoûtez les administrations, et ce sera les dégoûter
qu’admettre le public aux séances du conseil, une foule d’administrateurs
donneront leur démission. Vous ne trouverez pour les remplacer que des hommes
ambitieux qui seraient portés à sacrifier l’intérêt public au leur. Je suis
tellement persuadé de ce que j’avance, que j’ai cru devoir revenir à la charge
aujourd’hui sur cette même question. C’est en acquit de ma conscience, de mon
devoir que je l’ai fait.
Nous ne différons, l’honorable M. Devaux et
moi, que sur un point. Il voudrait que ce fût la députation du conseil
provincial qui déterminât la question de savoir si la publicité aura lieu ou
non.
J’ai dit que je pensais que ce corps
n’était pas aussi à portée que le conseil communal de juger de l’opportunité ou
de la convenance de la publicité. Il est trop éloigné du centre pour décider en
parfaite connaissance de cause. Il pourrait être influencé par des personnes
intermédiaires, par un commissaire de district, par exemple, puisque l’on a
cité ces fonctionnaires. C’est au conseil à déterminer s’il y aura publicité ou
non. Il est intéressé à ce que cette publicité n’entraîne pas de résultats
graves. Certainement les conseils ne seront pas ennemis de la publicité, chaque
fois qu’elle pourra concourir au bien public. Lorsqu’il s’agira d’un avis qui
intéresse toute la commune, du vote de fonds pour l’érection ou l’entretien
d’une maison d’école, ce sera en présence des habitants qu’il discutera. Mais
dans toutes les questions dont vous avez donné le détail dans l’article qui traite
de la formation du budget communal, le huis-clos sera d’une nécessite absolue.
Si le public y assiste, il n’y aura plus de liberté de discussion. Je crois
m’apercevoir que la majorité de l’assemblée erratum au Moniteur belge n°326, du 22 novembre 1834 :) penche en
faveur de mon amendement. J’en suis fâché. Mais j’ai la persuasion que les
résultats de la publicité dans les petites communes seront tels que je les ai
signalés.
M. Fallon. - Je pense, messieurs, que nous ne
pouvons accueillir les amendements présentés par MM. d’Hoffschmidt et Devaux ;
ce serait par trop nous écarter, je ne dis pas de la (erratum au Moniteur belge n°326, du 22 novembre 1834 :) lettre,
mais de l’esprit de la constitution. La constitution consacre la publicité des
séances des conseils communaux partout où elle peut avoir lieu sans
inconvénients. Quel est le principal inconvénient signalé par les honorables
membres que je combats ; c’est que les membres des conseils soient confondus
avec les auditeurs. Il me semble que nous pouvons parer à cet
inconvénients sans adopter les mêmes prohibitions de toute publicité proposées
par MM. d’Hoffschmidt et Devaux. J’adopterai la proposition de la
section centrale en y faisant toutefois une modification pour répondre aux
exigences des membres de cette assemblée qui craignent les résultats (erratum au Moniteur belge n°326, du 22
novembre 1834 :) du mélange des auditeurs et des membres du conseils. Voici
comment mon amendement serait rédigé :
« Dans les villages où il n’y a pas de
maison communale spécialement destinée à l’administration et disposée de
manière à ce que le public soit séparé de l’enceinte réservée aux membres de
l’administration… »
M. Dumortier,
rapporteur. - Je ferai une simple observation relative à l’amendement
présenté par l’honorable préopinant, c’est que toutes les communes dont les
deux tiers des conseillers voudront jouir du bienfait de la publicité, seront
pourvues de locaux où le public sera séparé du conseil.
La proposition de l’honorable M. Fallon devient
donc inutile et rentre dans celle que vous a présentée la section centrale,
dont le système est beaucoup plus rationnel. Dès l’instant que la majorité du
conseil communal voudra de la publicité, elle le pourra.
L’honorable M. d’Hoffschmidt a mis en avant des
difficultés sans nombre, qui résulteraient de la publicité des séances des
conseils communaux. Mais en Angleterre, depuis un temps immémorial, cette
publicité existe, et je ne sache pas qu’elle ait jamais entraîné les
inconvénients signalés par l’honorable membre. Remarquez, messieurs, que dans
les amendements qui vous ont été proposés, la publicité est plutôt regardée
comme exceptionnelle que comme obligatoire, comme l’un des principes
fondamentaux, comme l’un des meilleurs de la loi communale. Nous la regardons
comme un bienfait. Il ne faut donc pas, sous prétexte que le public n’est pas
en tel endroit séparé du conseil communal par une corde, que ce conseil
communal puisse éternellement discuter à huis-clos.
M. d'Hoffschmidt.
- Vous pensiez différemment le premier jour de la discussion.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je voudrais que mon honorable interrupteur m’expliquât
comment il se fait que je sois en contradiction avec mes propres paroles, comme
il le prétend. Je me souviens très bien avoir dit, le premier jour de la
discussion, que je défendrais d’autant plus volontiers la rédaction de la
section centrale que sa pensée représentait complètement la mienne. Je pourrais
renvoyer à M. d’Hoffschmidt son accusation. Je n’ai pas changé comme lui, qui a
flotté entre le nombre de 3,000, 1,200 et 1,500 habitants dans son amendement.
M. d'Hoffschmidt.
- Vous me prêtez une intention que je n’ai pas eue.
M.
Dumortier, rapporteur. - Vous auriez évité ce reproche si vous ne
m’aviez pas interrompu.
Je crois, messieurs, que la discussion tend à
sa fin. Il faut enfin en venir à une solution. (Oui, oui.)
Je demande donc que l’on veuille mettre aux
voix la rédaction de la section centrale, qui est le fruit d’un long examen. Si
l’on admet cette rédaction, la question se trouvera tranchée, et il n’y aura
plus de discussion. Si elle est rejetée, vous pourrez examiner alors ce que
vous aurez à faire.
M. Fallon. -
L’honorable rapporteur de la section centrale reproche à mon amendement de
s’écarter de l’esprit de la constitution en ce que selon lui, la publicité ne
serait plus obligatoire.
Je partage cette opinion. Aussi, d’après mon
sous-amendement, elle aura lieu partout où elle pourra avoir lieu sans
inconvénient ; ce qui est bien dans l’esprit de la constitution, et même dans
ce cas la députation des états pourra décider si le huis-clos devra être levée
ou non.
Quant à moi, l’inconvénient qui m’a
touché le plus est le mélange du public avec les membres du conseil.
Pour mieux faire comprendre combien les
amendements de MM. d’Hoffschmidt et Devaux sont prohibitifs de la publicité, je
vous ferai part de l’application que j’en viens de faire à l’égard de ma
province au moyen du tableau de population publié par M. Quetelet
que j’ai sous les yeux. D’après M. d’Hoffschmidt, neuf communes rurales
seulement jouiraient du bienfait de la publicité ; et d’après M. Devaux, il n’y
en aurait que deux. Nous ne pouvons admettre leur système sans tuer le principe
consacré par la constitution.
M. Dubus. - Je remarque que l’on a déjà
préjugé la question de priorité. L’honorable rapporteur de la section centrale
l’a déjà demandée en faveur de la proposition de cette section. Dans le cas où
la chambre adopterait la demande de mon honorable ami, je ferai remarquer que
la section centrale elle-même a modifié sa première rédaction où il est
question de la publicité facultative. Elle avait proposé que les deux tiers des
voix en décidassent ; depuis elle a reconnu que la majorité des membres
suffirait.
M. H. Dellafaille. - D’après les théories
des orateurs deux systèmes sont en délibération ; je pense qu’il faudrait
premièrement prendre une décision sur celui qui détermine les cas où la
publicité des séances des conseils communaux est obligatoire et les cas où elle
est interdite. J’en fais la proposition formelle.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je ne crois pas que cette manière de voter soit bien
utile ; nous n’en finirions pas en procédant ainsi ; je pense qu’il faut donner
la priorité à la première proposition de la section centrale. Si elle était
adoptée, les amendements de MM. Gendebien et Devaux seraient écartés.
Quant à la proposition de M. Dubus, par
laquelle il demande que la majorité qui voudrait le secret soit composée des
deux tiers des membres présents, elle est inadmissible dans tous les systèmes ;
car il n’y a guère que 7 membres dans chaque conseil communal ; et vouloir les
deux tiers, c’est vouloir les trois quarts au moins de tout le conseil.
Je demande la priorité pour la proposition
primitive de la section centrale.
M. le président.
- Fau- il mettre aux voix d’abord la proposition de M. Dellafaille ? (Oui ! oui !)
M. Dumortier,
rapporteur. - Je me réunis à l’avis de mettre aux voix d’abord la motion
de M. Dellafaille.
- La chambre consultée décide qu’elle
délibérera en premier lieu sur le système par lequel on détermine les cas où la
publicité sera obligatoire ou interdite.
- Ce système mis aux voix est rejeté.
M. le président.
- Maintenant quelle proposition faut-il mettre aux voix ?
M. Dumortier,
rapporteur. - La proposition primitive de la section centrale.
M. Dubus. -
Je demande la priorité pour la proposition de M. Verdussen.
M. Devaux. - Il
faut convenir que nous adoptons les 5 premiers numéros de la proposition de la
section centrale.
M. Dumortier,
rapporteur. - Il y a cependant quelques changements de rédaction à y
faire.
M. Devaux. - On
peut les adopter sauf rédaction.
M. le président.
- Ces cinq numéros sont ainsi conçus :
« Art. 69. La publicité des séances du
conseil est de droit lorsque les délibérations ont pour objet :
« 1° Les budgets, à l’exception du
chapitre des traitements, et les comptes ;
« Le principe de toute dépense qui ne peut
être couverte par les revenus de l’année ou le solde en caisse de la commune,
ainsi que les moyens d’y faire face ;
« 3° L’ouverture des emprunts ;
« 4° L’aliénation totale ou partielle des
biens ou droits immobiliers de la commune, les échanges et transactions
relatives à ces biens ou droits, les baux emphytéotiques, les constitutions
d’hypothèques, les partages des biens indivis ;
« 5° La démolition des édifices publics ou des
monuments anciens. »
- Ces numéros mis aux voix sont
adoptés.
M. le président.
- Le reste de l’article présenté primitivement par la commission est ainsi
conçu :
« Elle est interdite dans tous les cas
quelconques où il s’agit de questions de personnes, même aux termes des
paragraphes précédents. Dès qu’une question de ce genre sera soulevée, le
président prononcera immédiatement le huis-clos, et la séance ne pourra être
reprise que lorsque cette question sera terminée.
« Dans tous les autres cas, la publicité est
facultative ; elle aura lorsqu’elle sera demandée par les deux tiers des
membres présent à la séance.
M. Lebeau. - Il y a dans les communes des
chapelains, des vicaires, des instituteurs particuliers, qui reçoivent parfois
ce que l’on appelle dans les budgets un subside. Je demande que dans le premier
des cinq numéros que nous venons d’adopter, on mette : « à l’exception du
chapitre des traitements, subsides et des comptes. » Il n’y aura pas double
emploi avec l’avant-dernier paragraphe, car alors le mot traitements formerait aussi un pléonasme.
M. Dumortier,
rapporteur. - La section centrale a cru parer à tous les inconvénients
en garantissant le secret des délibérations sur les traitements et les
questions de personnes. Un subside en effet n’est point comme un traitement ;
il est accordé des établissements, tandis que le mot traitement s’applique
toujours aux personnes.
M. Lebeau.
- Je crois qu’il y a plus d’avantages que d’inconvénients à introduire la
modification que j’ai eu l’honneur de proposer. Il est impossible de traiter la
convenance de certains subsides et surtout de leur retrait, sans discuter sur
le personnel de l’administration intéressée, sans rechercher s’il est bon ou
mauvais. C’est en quelque sorte une question de traitement. Or sans nul doute
il n’y a rien de plus personnel que les questions de traitements. C’est au
reste uniquement dans l’intérêt de la commune et de sa bonne administration que
j’ai présenté mon amendement.
M. Dubus.
- Je ne crois pas qu’en stipulant le secret des délibérations du conseil
communal on stipule les intérêts de la commune. On veut faire ajouter dans la
disposition en discussion le mot de « subsides. » Des subsides, dit-on, ne
sont pas des traitements. Evidemment non. Mais, dit-on, ils peuvent intéresser
les personnes. La section centrale a pourvu à ce cas, en prescrivant le
huis-clos pour les questions de personnes. Le huis-clos sera-t-il donc
nécessaire aussi pour les subsides à accorder aux établissements communaux, aux
hospices, aux bureaux de bienfaisance ? Rien n’est plus simple que ces sortes
de questions. Ces subsides s’accordent après qu’on a constaté que les charges
excèdent les revenus, et qu’il y a un déficit à combler. Il n’y a pas là de
questions de personnes. Pour les questions de personnes, l’exception, je le
répète, a été prévue par la section centrale ; et le huis-clos a été ordonné.
M. Lebeau. -
L’honorable préopinant voit des inconvénients et, à ce qu’il paraît, des
arrière-pensées, dans ma proposition. Je ne ferai pas comme lui. S’il a
interprété mon opinion avec peu de bienveillance, s’il m’a prêté des motifs
autres que ceux qui m’ont déterminé ; je ne suis pas le seul à me plaindre de
ses interprétations, j’en prends mon parti, et je n’insiste pas sur ce point.
M. le président.
- Ainsi M. Lebeau retire sa proposition.
M. Lebeau. - Permettez ; je la maintiens au
contraire, et je crois avoir eu raison de la faire ; car on pourrait encore
éluder la disposition de la loi : une majorité pourrait vouloir soumettre à la
discussion publique la proposition d’accorder on de retirer le traitement à tel
instituteur, et pour cela, convertirait son traitement en subside, c’est-à-dire
qu’elle en changerait seulement la dénomination. La minorité, gênée par la
publicité de la discussion, ne voulant pas se faire un ennemi de l’intéressé se
trouverait comprimée. Je proposerai donc de dire : « subsides
personnels. » Je crois ainsi éviter les inconvénients signalés par
l’honorable préopinant. On objecte que le paragraphe avant-dernier obvie à
l’inconvénient ; mais pourquoi alors le mot traitements se trouve-t-il dans le
paragraphe en discussion ?
M. Dumortier, rapporteur. - Je ferai remarquer
qu’il y a déjà dans le projet deux dispositions rentrant dans l’esprit de celle
que propose l’honorable M. Lebeau : la première stipulant que les questions de
traitements seront traitées à huis-clos ; or, si les subsides sont personnels,
ils rentrent évidemment dans les traitements ; la deuxième portant que les
questions de personnes seront aussi traitées en séance secrète. Ainsi la
question est déjà résolue deux fois par la loi.
M. Gendebien. - Vous voyez bien l’inconvénient qu’il
y a à faire vos lois comme vous les faites. Après trois jours de discussion et
au moment où l’on croit qu’on va aller aux voix, voilà qu’il s’élève une grande
difficulté au sujet de la proposition qu’on fait d’introduire dans la loi le
mot « subside. »
Qu’est-ce donc qu’un subside personnel ? Nous
voilà vraiment retombés dans les catégories de pensions et de petits cadeaux à
n’en plus finir, comme au temps des Hollandais. Il faut comme alors soustraire
à l’investigation du public toutes ces prodigalités.
Pour moi,
si on insiste sur l’amendement, je demanderai son renvoi à la section centrale.
(Non ! non !)
Je vois l’honorable M. Legrelle qui s’oppose à
ce qu’on dise « subsides personnels. » Qu’il veuille bien nous dire l’acception
de ces mots. Quand à moi je ne puis pas voter en connaissance de cause.
M. Legrelle.
- Le renvoi à la section centrale est inutile ; des subsides personnels ne sont
évidemment autre chose que des traitements.
M. Gendebien.
- Ce serait un pléonasme ; s’il n’y avait que cela.
- L’amendement de M. Lebeau est mis aux voix ;
il n’est pas adopté.
Le changement de rédaction proposé par M.
Dumortier, consistant à dire, « les monuments de l’antiquité, » est adopté.
Les 5 premiers numéros de l’article 69 de la
section centrale sont mis aux voix est adoptés.
M.
Dumortier, rapporteur. - M. le président, j’ai demandé que pour le
paragraphe suivant, on mît aux voix la rédaction primitive de la section
centrale.
M. le président.
- S’il n’y a pas d’opposition, je vais mettre ce paragraphe aux voix, Il est
ainsi conçu :
« La publicité est interdite dans
tous les cas quelconques où il s’agit de questions de personnes, même aux
termes des paragraphes précédents. Dès qu’une question de ce genre sera
soulevée, le président prononcera immédiatement le huis-clos, et la séance ne
pourra être reprise en public que lorsque cette question sera terminée. »
M. Gendebien.
- Je ne sais pas ce que fait là le mot quelconque.
C’est une cheville, et comme il ne vaut pas les chevilles de maître Adam, j’en
demande la suppression.
M. Fallon. - Je
crois qu’on a oublié le mot discussion
à la fin du paragraphe. II faudra dire : « lorsque la discussion de cette
question sera terminée.»
- Le paragraphe est adopté avec ces deux
modifications.
M. le président. - Au dernier
paragraphe, M. le ministre propose l’amendement suivant : « Hors les cas
prévus par la loi, la publicité est interdite. »
M. Devaux a proposé deux dispositions.
La section centrale a proposé une nouvelle
rédaction.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je demande qu’on prenne la rédaction primitive de la
section centrale, en substituant la majorité aux deux tiers des membres
présents.
M. Devaux. - On
ne peut pas passer comme cela d’un texte à un autre. C’est moi qui avais
proposé de rendre la publicité facultative à la simple majorité, pour tous les
cas non déterminés par la loi, mais seulement pour les grandes communes et à
condition qu’elle serait interdite aux petites communes Si on ne veut pas faire
la distinction que j’ai proposée, j’exige les 2/3 des membres présents pour les
cas de publicité facultative. Je préférerais avoir la garantie de la députation
des états pour les petites communes et laisser le champ libre aux grandes. (A demain ! à demain !)
- La discussion est renvoyée à demain à une
heure.
La séance est levée à 4 heures trois quarts.