Accueil
Séances
plénières
Tables
des matières
Biographies
Livres numérisés
Bibliographie
et liens
Note
d’intention
Séance précédente
Séance suivante
Chambre des représentants de Belgique
Séance
du mercredi 30 juillet 1834
Sommaire
1) Pièces adressées à la
chambre
2) Projet de loi tendant à augmenter le
personnel des cours et tribunaux (Jullien, d’Huart, Lebeau, de Brouckere, Raikem, Liedts, Raikem, de Brouckere, (+cours d’assises) Raikem,
Lebeau, de Theux, Pollénus)
3) Motion d’ordre relative à l’impression
des budgets de l’exercice 1835 (Dumortier, Duvivier, de Brouckere, Dumortier, Duvivier)
4) Projet de loi portant organisation des
communes. Discussion des articles.
a) Incompatibilité entre les fonctions de
bourgmestre et le service de la garde civique (Pollénus,
Dubus, Dumortier, Pollénus, Rogier) ;
incompatibilité entre conseillers pour liens de parenté (Doignon,
H. Dellafaille, Pollénus, H. Dellafaille, Dumortier, de Muelenaere, Jullien, Dubus, Jullien, Dumortier,
de Muelenaere, Milcamps, H. Dellafaille, Dumortier),
incompatibilités avec la fonction de receveur ou de secrétaire communal (Rogier, Doignon, de Muelenaere, H. Dellafaille,
Doignon)
b) Démission volontaire des conseillers,
des échevins ou du bourgmestre (Rogier, Dumortier, Jullien, (+affaire Dejaer) Dumortier, Jullien, Dubus, Jullien,
Dubus, Rogier, Dumortier, Rogier, Dubus, H. Dellafaille, Dubus, Jullien, Desmanet
de Biesme, de Muelenaere, Dubus,
Desmanet de Biesme, de Theux, de Muelenaere, Raikem, Verdussen, Desmanet de Biesme, Dubus, Rogier, Dubus,
Dumortier, de Theux, Verdussen, Rogier, Verdussen, Dubus, Rogier, de Theux, Dumortier, de Theux, Dubus, de Theux, Dubus,
Devaux, Dumortier, Rogier, Verdussen), pouvoirs
et/ou remplacement des membres sortants ou démissionnaires (Lebeau,
Dubus, de Theux, Verdussen, Rogier, Dumortier)
c) Droit pour le Roi de dissoudre les
conseils communaux (Rogier)
(Moniteur
belge n°212, du 31 juillet 1834)
(Présidence de M.
Raikem)
M. de Renesse
fait l’appel nominal à midi et demi.
M. H. Dellafaille donne lecture du procès-verbal de la
séance d’hier ; la rédaction en est adoptée.
M.
de Renesse fait connaître l’objet des pièces adressées à la
chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Wenmaekers
appelle l’attention de la chambre sur le projet de loi relatif aux pierres
calcaires et demande qu’il soit mis à l’ordre du jour. »
- Renvoi à la commission d’industrie.
_________________
« Les administrations communales de Welle et de Vieckem demandent qu’il
soit formé un arrondissement judiciaire dont la ville d’Alost serait le
chef-lieu. »
- Renvoi à la commission chargée de l’examen du
projet de loi présenté par MM. Dewitte et Desmet.
_________________
M. Dams
demande un congé.
- Accordé.
M. Liedts, rapporteur de la commission chargée de
l’examen du projet de loi relatif à l’augmentation du personnel des cours et
tribunaux, monte à la tribune.
- La chambre demande l’impression du rapport.
M. Jullien.
- Je propose de fixer la discussion du projet de loi sur l’augmentation du
personnel des cours et tribunaux après la discussion du projet de loi sur les crédits
demandé par M. le ministre de la guerre. Jusqu’à présent M. le ministre de la
justice et les membres qui ont parlé en faveur du projet se sont accordés à le
regarder comme très urgent. Si on ne donnait pas à cette discussion le rang que
je propose, il serait très possible qu’elle n’eût pas lieu dans cette session.
M. d’Huart. - Je ne sais pas si les nominations
qu’autoriserait la loi si elle était adoptée pourraient avoir lieu avant le
commencement de l’année prochaine. Je désirerais que M. le ministre de la
justice pût nous faire connaître son opinion à cet égard. Si cette supposition
était vraie, nous pourrions renvoyer à la session prochaine la discussion du
projet.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Messieurs, personne ne désire
plus sincèrement que moi que la discussion de la loi communale ne soit pas
légèrement entravée.
La chambre ne s’étonnera pas que j’insiste sur la
discussion prochaine d’un projet de loi dont je l’ai entretenue à plusieurs
reprises, et qui mérite toute sa sollicitude par des considérations d’utilité
générale. L’honorable M. d’Huart pense que les nominations des nouveaux membres
de l’ordre judiciaire ne pourront avoir lieu avant l’année prochaine. Il serait
à désirer que les nominations pussent être faites pour la rentrée des cours, en
supposant même qu’elles ne soient pas utiles pendant les vacances mêmes. Chacun
sait que dans cet intervalle l’administration de la justice n’est pas
suspendue, il y a alors des chambres de vacation. Je ne sais pas si, avec les
éléments insuffisants que possède actuellement l’ordre judiciaire, il serait
possible d’organiser les chambres de vacation, si la loi n’était pas votée.
Remarquez, messieurs, que les chambres se réunissent au mois de
novembre. Votre assemblée croira devoir s’occuper avant tout des lois
financières comme les plus urgentes. Il faudra en outre que la loi sur
l’augmentation du personnel de l’ordre judiciaire soit transmise au sénat, il
faudra qu’elle soit promulguée. Les nominations, si la proposition de M.
d’Huart était adoptée, ne pourraient donc avoir lieu vers le mois de février,
tandis que les cours et les tribunaux rentrent vers le mois d’octobre. Je crois
donc qu’il y a lieu de procéder immédiatement à la discussion du projet dont le
rapport vous sera incessamment distribué. Si la loi contenait des questions de
nature à soulever une discussion trop longue, le gouvernement, pour épargner
les moments de la chambre, les retirerait, sauf à les représenter plus tard.
M. de Brouckere.
- Je n’ai rien à ajouter à ce que vient de dire M. le ministre de la justice,
je voulais parler dans le même sens.
M. Raikem.
- Nous n’avons pas entendu la lecture du rapport. Je ne connais donc pas les
conclusions. Si c’est simplement une augmentation du personnel des cours et des
tribunaux que l’on nous propose, je ne vois aucun inconvénient à ce que la
discussion prochaine ait lieu. Mais je désirerais savoir si la discussion du
projet ne soulèvera pas l’examen de quelques questions de principes relatifs à
l’administration judiciaire. L’on sent qu’un semblable examen pourrait nous
mener très loin.
M. Liedts, rapporteur. - Le projet de loi dont je viens
de vous présenter le rapport ne se borne pas à augmenter le personnel des cours
et tribunaux ; il touche également à quelques questions de principes qui
exciteront une assez longue discussion. Il me semble que si l’on fixait
l’examen de ce projet immédiatement après le vote de la loi sur les crédits de
la guerre, ce délai serait trop court. Il faudrait accorder un intervalle qui
laissât à chaque membre le temps de mûrir ces questions. Je désirerais donc que
la discussion n’eût pas lieu avant mardi prochain.
M. Raikem. - Si, comme le fait pressentir
l’honorable rapporteur, il s’agit dans le projet de questions de principes, je
ne sais pas si le terme de mardi prochain ne serait pas trop rapproché. Il y a
une grande différence entre une simple augmentation de personnel et une
discussion de principes. L’augmentation du personnel peut-être discutée
immédiatement si l’on pose la question suivante : Y a-t-il lieu, oui ou non,
d’opérer cette augmentation ? Mais la discussion des principes pourra donner
lieu à de longs débats.
M. de Brouckere.
- Il est vrai que le rapport dont l’assemblée s’occupe en ce moment ne se borne
pas à établir une augmentation du personnel des cours et tribunaux, mais qu’il
touche également à des questions de principes en ce qu’il tend à modifier
certaines dispositions de la loi du 4 août 1832. Je conviens que la discussion
en pourra être assez longue. Mais si la chambre reconnaît l’urgence du projet
de loi en tant qu’il faut accorder au gouvernement la faculté de nommer
quelques membres de l’ordre judiciaire, il lui sera loisible, si elle le juge
convenable, d’ajourner jusqu’à une époque qu’elle déterminera la discussion des
principes.
Telle était l’opinion de quelques membres de la
commission spéciale, chargé de l’examen du projet de loi. Il s’en est trouvé
qui pensaient qu’il n’y avait pas lieu d’introduire des innovations partielles
à la législation existante. Telle n’est pas ma façon de penser. Mais si l’on
commençait par discuter la question de savoir s’il sera introduit quelques
innovations en ce qui regarde la compétence des corps judiciaires, la
composition des cours d’assises par exemple, la chambre pourrait résoudre cette
question négativement et se contenter d’augmenter le personnel des cours et
tribunaux.
La chambre, en accordant à M. le ministre de la
justice l’augmentation qu’il demande, fera une chose sage et rendra un service
véritable au pays, car la justice serait plus expéditive.
Il y a, messieurs, dans l’état actuel des
choses, comme j’entends d’honorables membres le dire autour de moi, un
véritable déni de justice dans certains cas, déni de justice involontaire, mais
qui est le résultat du petit nombre de membres qui composent la cour d’appel de
Bruxelles. Cette cour d’appel que je cite, parce que c’est celle où le manque
de conseillers se fait le plus vivement sentir, ne peut parvenir qu’à former
une seule chambre civile.
Or, tous les membres de cette cour
pourront vous le dire, il faut une chambre civile rien que pour l’expédition
des affaires de la province du Hainaut. J’en suis fâché pour les députés de
cette province, qui paraissent se récrier contre une allégation qui la
représente comme aimant les procès. Mais les choses sont ainsi. Il en résulte
que si la cour d’appel de Bruxelles s’occupait exclusivement des affaires de la provinces du Hainaut, il y aurait deux provinces,
celle d’Anvers et celle du Brabant, dont les affaires seraient complètement en
souffrance.
M. Raikem. - On
me permettra de faire observer que mes observations ne portaient en aucune
manière sur ce qui concerne l’augmentation du personnel des coups et tribunaux.
Je conçois qu’il puisse y avoir lieu d’adjoindre
des conseillers nouveaux à ceux qui composent actuellement la cour d’appel de
Bruxelles. Ce personnel peut être
insuffisant, notamment à cause des places maintenant vacantes, et qui ne sont
pas remplies.
Mes observations se rapportaient
uniquement à la question de principes qui pouvait se trouver dans la loi. On
sent bien qu’il ne s’agira pas pour les membres de cette assemblée de se
préparer longtemps d’avance à la discussion s’il n’y a qu’à voter sur une
augmentation de personnel. C’est là un simple fait à éclaircir. Mais la chose
serait bien différente, s’il s’agissait de changer la compétence qui existe
actuellement, s’il s’agissait de changer la composition des cours d’assises,
proposition qui a été faite par M. le ministre de la justice. Je crois donc
qu’il y a lieu de décider si l’on s’occupera simplement d’une augmentation de
personnel ou si l’on touchera en même temps les questions de principes.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - J’ai demandé la parole pour
abréger, s’il est possible, la discussion. Ne pourrait-on pas fixer l’examen du
projet de loi à lundi ? Il m’est impossible, comme je ne connais pas le travail
de la commission, de dire de quelle partie du rapport je pourrais consentir à
voir suspendre la discussion. Ce que je demande à la chambre c’est de fixer
pour la discussion une époque provisoire, qui, si le ministre se ralliait à
l’idée d’écarter l’examen des questions de principes, deviendrait définitive.
Je reconnais que dans le cas où le gouvernement persisterait à demander cet
examen, le délai fixé serait trop rapproché.
M. de Theux. - Il me semble que la
discussion serait singulièrement abrégée, si l’on attendait la distribution du
rapport. Chacun des membres de l’assemblée pourrait apprécier la portée des
questions qu’il soulève, et asseoir en connaissance de cause son opinion sur
l’époque à fixer pour la discussion.
Je demande donc d’ajourner toute décision sur
ce point, jusqu’à la distribution du rapport imprimé.
M. Pollénus.
- J’appuie la proposition de l’honorable M. de Theux ; j’y ajouterai cette
considération que les deux projets de loi se lient intimement. En effet, le
personnel qu’on devra attribuer à quelques cours judiciaires, dépend des
questions de principes et d’attributions. Par exemple, les changements proposés
par la commission pour la composition des cours d’assises et la diminution du
travail qui doit en résulter pour les cours d’appel, doivent nécessairement influer
sur le personnel qu’il s’agira de leur donner. Il est donc impossible de
séparer les deux projets.
- La chambre consultée décide qu’elle fixera
l’ordre du jour des projets de loi présentés par M. le ministre de la justice,
lorsque le rapport aura été distribué à l’assemblée.
M. Dumortier.
- Je demande la parole pour un fait personnel.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Je demande également la parole
pour un fait personnel.
M. le président.
- Lorsqu’un ministre demande la parole pour toute autre chose qu’un fait
personnel, il doit avoir la parole, parce que ce qu’il a à dire se rapporte aux
actes du gouvernement ; mais s’il la demande pour un fait personnel, ses
paroles doivent se rapporter à la personne. Dès lors, la question de priorité
me paraît douteuse ; je consulterai l’assemblée.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - C’est en qualité de ministre que
je demande la parole pour un fait personnel ; il s’agit d’un fait relatif à mes
fonctions de ministre.
M. Dumortier.
- Je ferai remarquer que j’ai été attaqué hier par M. le ministre des finances.
J’ai promis à la chambre des explications que je puis maintenant lui donner. On
ne peut, ce me semble, refuser de les entendre, avant que M. le ministre ait de
nouveau la parole.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - C’est en effet sur le même fait
dont j’ai entretenu la chambre hier que j’ai demandé la :parole
à titre de fait personnel. J’insiste pour avoir la priorité, parce que je pense
que ce que je dirai terminera la discussion :
M. de Brouckere.
- Je ne comprends pas l’importance que ces messieurs attachent à parler l’un
avant l’autre (on rit), mais il me
semble que la priorité doit être accordée à M. Duvivier puisqu’il annonce que,
d’après ce qu’il dira, toute discussion va cesser. Il est certain que s’il
annonce qu’il a eu tort, il n’y aura pas de discussion. Je conclus à ce que la
parole soit accordée à M. Duvivier.
M. le président. - Je vais mettre aux voix la
question de priorité.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - C’est inutile ; j’aime mieux
renoncer à la parole.
M. le président.
- M. le ministre renonçant à la parole, la parole est à M. Dumortier pour un
fait personnel.
M. Dumortier.
- Messieurs, dans la séance d’hier, M. le ministre des finances a accusé la
questure d’avoir manqué à ses devoirs en arrêtant la distribution du budget.
Sur l’interpellation de l’honorable M. Jullien,
M. le ministre des finances m’a indiqué comme ayant arrêté la distribution du
budget. J’ai déjà répondu à cet égard hier à M. le ministre des finances ; mais
j’ai promis à la chambre de prendre des informations sur le fait, je vais les
communiquer à l’assemblée.
Au sortir de la séance, je me suis rendu chez
M. Hayez, imprimeur qu’a désigné M. le ministre des
finances comme ayant été chargé de l’impression du budget ; j’étais accompagné
de trois honorables collègues, MM. d’Huart, Fleussu et Desmanet de Biesme.
Arrivés chez l’imprimeur, nous avons demandé s’il était vrai que l’ordre avait
été donné d’empêcher la distribution du budget. Oui, nous a-t-on répondu, cet
ordre a été donné. En quels termes, avons-nous dit ? On a donné l’ordre de ne
distribuer ni de donner le budget à qui que ce soit, pas même au ministre des
finances. Mais, avons-nous ajouté, quelle est la personne qui a donné cet ordre
? C’est, nous a répondu l’imprimeur, M. Dujardin, secrétaire-général du
ministère des finances. (On rit.)
Nous avons alors demandé à l’imprimeur quelle
était la personne qui avait envoyé le budget à l’impression. C’est, nous a-t-il
dit, M. Dujardin, secrétaire-général du ministère des finances. Enfin, nous
avons demandé qui avait corrigé les épreuves du budget, si c’étaient les
employés de la questure ou ceux du ministère des finances. On nous a répondu
que les épreuves avaient été corrigées par M. Dujardin, secrétaire-général du
ministère des finances. En effet, nous avons eu sous les yeux une feuille du
budget corrigée par lui.
Maintenant, l’honorable M. Fleussu a demandé si
la questure avait donné l’ordre de ne livrer le budget à personne. On a répondu
qu’aucun ordre n’était venu de la questure. Il a demandé si moi j’avais donné
de tels ordres. L’imprimeur a répondu que non. Cependant, avons-nous dit, M. le
ministre des finances a parlé d’ordres émanés de la questure. On nous a répondu
que c’était inexact et que M. le secrétaire-général du ministère des finances
seul avait défendu de donner un seul exemplaire du budget, fût-ce même à M. le
ministre des finances. (On rit.) Cela
est tellement vrai que M. le ministre de l’intérieur ayant eu besoin de revoir
son budget, il a fallu une autorisation de M. Dujardin pour qu’il puisse en
avoir un exemplaire. (Oh !)
Mes
collègues présents à ces explications peuvent déclarer si je me trompe ou si je
dis la vérité. (M. Fleussu fait un signe
d’assentiment.) Mais je vois qu’ils appuient ce que je dis et ce ne peut
être révoqué en doute.
Je n’en dirai pas davantage. Je laisse à
l’assemblée à juger l’attaque dont j’ai été l’objet, attaque faite tout au
moins avec beaucoup de légèreté. M. le ministre des finances m’accuse d’avoir
forfait à mes devoirs de questeur, et il est constant que ce qu’il m’impute est
le fait de M. le secrétaire-général du ministère des finances.
M. le ministre des finances (M. Duvivier) - Je ne dirai que quelques mots, et
je persiste à penser que si la chambre avait bien voulu m’accorder tout d’abord
la parole, il n’y aurait eu aucune discussion.
J’ai cru devoir prendre des renseignements sur
l’incident qui s’est élevé à la séance d’hier. Il en est résulté que ce
quiproquo est dû à la maladresse du prote. Il a appliqué au budget de cette
année et à la questure des ordres généraux donnés les années précédentes pour
que la publication du budget au-dehors et partiellement n’ait lieu qu’après
avoir été distribué à la chambre. On a voulu éviter qu’il fût rendu public
comme en 1833, où les journaux en donnèrent des extraits et plusieurs personnes
en eurent connaissance avant les députés et les ministres. On a considéré cela
à juste titre comme une inconvenance. J’ai fait donner des ordres pour qu’elle
n’eût pas lieu de nouveau ; ils ont été si bien exécutés que des moyens de
séduction ont été employés auprès des personnes attachées à l’imprimerie pour
obtenir des exemplaires du budget.
Mais je dois le dire, et je me plais à le
déclarer aucun ordre n’est émané cette année de M. Dumortier. Lorsqu’on a parlé de ses ordres, on a fait allusion
à ceux qu’il avait donnés les années antérieures pour éviter l’abus que j’ai
signalé.
M. Dumortier.
- Je ferai remarquer seulement que je n’ai donné aucun ordre pour empêcher la distribution
du budget ni cette année ni les autres. (L’ordre
du jour ! l’ordre du jour !)
PROJET DE LOI PORTANT ORGANISATION DES COMMUNES
Discussion des articles
Titre I. - Du corps
communal
Chapitre 1er. - De la
composition du corps communal et de la durée des fonctions de ses membres
Section 1ère. De la
composition du corps communal
M. le président.
- La chambre s’est arrêtée hier à l’article 11.
« Art. 11 (du projet du gouvernement). -
Il y a incompatibilité entre les fonctions de bourgmestre et le service de la
garde civique. »
« Art. 11 (du projet de la section
centrale). - Le bourgmestre, pendant la durée de ses fonctions, cesse de faire
partie de la garde civique. »
M. le président.
- M. le ministre de l'intérieur se rallie-t-il à la rédaction de la section
centrale ?
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - La rédaction de la section
centrale, malgré ce qui est dit dans le rapport, ne me semble pas préférable à
la rédaction du gouvernement.
M. Pollénus. - Je ne puis saisir le motif qui a porté la
section centrale et le gouvernement à établir dans l’article une disposition concernant
l’incompatibilité du service de la garde civique à l’égard des bourgmestres.
Lorsqu’il s’est agi de différentes autres lois, de la loi provinciale par
exemple, on n’a pas parlé de l’incompatibilité de ce service à l’égard du
gouverneur et des commissaires de district. Je ne vois pas de motif pour
admettre dans la loi communale une disposition particulière concernant le
bourgmestre.
Il me semble que cette disposition trouverait
bien mieux sa place dans la loi organique de la garde civique.
La section centrale donne pour motif
de l’incompatibilité qu’on établit dans l’article, que le bourgmestre aura le
droit de requérir la garde civique ; mais je ferai remarquer que, dans la loi
provinciale, nous avons attribué le même droit au gouverneur et aux
commissaires de district ; cependant, nous n’avons pas établi la même
incompatibilité à leur égard.
Il y a d’autant plus de raison de renvoyer la
disposition à la loi de la garde civique, qu’il y a nécessité de statuer à
l’égard des échevins qui, en remplaçant le bourgmestre, auront aussi le droit
de requérir la garde civique. Il y aurait également à statuer relativement à un
grand nombre de fonctionnaires. Je propose en conséquence d’ajourner l’art. 11.
M. Dubus. -
Je dirai quelques mots sur la question d’ajournement.
Je ne pense pas qu’il y ait lieu à adopter la
proposition de préopinant. Nous pouvons examiner maintenant si les motifs qui
ont fait proposer l’exemption temporaire dont il s’agit (car il ne s’agit que
d’une exemption temporaire) sont fondés.
Je crois que l’exemption du service de la garde
civique relativement au bourgmestre, résulte de la nature même des fonctions du
bourgmestre.
On a dit
que le bourgmestre est autorisé à requérir le service de la garde civique, de
là l’incompatibilité ; et l’honorable préopinant lui-même n’a pas prétendu que
ce ne fût pas un motif suffisant pour la prononcer.
Il y a un autre motif d’admettre cette
incompatibilité, c’est que le bourgmestre a des fonctions de tous les instants,
de tous les jours qui ne lui rendraient pas possible une participation active
au service de la garde civique. Je ferai remarquer en outre que la même
exemption existé en France : les maires et mêmes les adjoints sont exempts du
service de la garde nationale.
M. Dumortier, rapporteur. - Si la proposition
de M. Pollénus était admise, il faudrait rejeter l’article tout entier, et le
renvoyer jusqu’à la discussion de la loi de la garde civique dans laquelle il
est reproduit. Ainsi c’est une motion de rejet dont il s’agit.
D’après les articles 87 et 88 de la loi qui
nous occupe, on a attribué au bourgmestre des pouvoirs d’exécution journalière
; il faut que la loi porte en même temps une exemption du service de la garde
civique en faveur du bourgmestre. Je ferai remarquer d’ailleurs, avec
l’honorable préopinant, qu’il ne s’agit que d’une exemption temporaire, et
qu’en France les maires et les adjoints sont dispensés du service de la garde
nationale.
M. Pollénus.
- Je m’oppose à l’ajournement ; je reconnais dans les attributions des
bourgmestres des motifs qui doivent les faire exempter du service de la garde
civique, mais je pense que puisqu’à l’égard du gouverneur et des commissaires
de districts on n’a pas établi la même incompatibilité, il n’y a pas lieu de
l’établir ici.
Les dispositions qui concernent la
même matière, doivent être portées dans une même loi, afin que les lois aient
plus d’ensemble et que les diverses dispositions puissent se coordonner entre
elles.
Il faudrait voir par exemple, si
l’incompatibilité qu’on établit pour le bourgmestre ne devrait pas également
être portée à l’égard des échevins qui remplacent le bourgmestre. La section
centrale n’a rien dit relativement aux échevins pour l’exemption du service de
la garde civique.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Il peut arriver que le
bourgmestre ait déjà cessé par son âge de faire partie de la garde civique ;
cependant la rédaction de la section centrale suppose que le bourgmestre fait
toujours partie de la garde civique. (Aux
voix ! aux voix !)
- L’article de la section centrale est mis aux
voix et adopté.
Article 12 (du projet de la section centrale)
« Art. 12 (du projet de la section
centrale). - Les membres du conseil ne peuvent être parents ou alliés jusqu’au
troisième degré inclusivement ; si des parents ou alliés à ce degré sont élus
au même tour de scrutin, celui qui a obtenu le plus de voix est seul admis ; en
cas de parité de suffrages, le plus âgé est préféré.
« L’alliance survenue ultérieurement entre les
membres du conseil n’emporte pas révocation de leur mandat.
« L’alliance est censée dissoute par le
décès de la femme du chef de laquelle elle provient.
« Dans les communes au-dessous de 1,200
habitants, la prohibition s’arrêtera au deuxième degré. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) déclare adhérer à cet article.
M. Doignon. - L’ancien règlement des villes
portait une disposition d’après laquelle le bourgmestre et les échevins ne
pouvaient être parents jusqu’au quatrième degré Cette disposition me paraît
sage et prudente ; il est au moins inconvenant d’admettre sans nécessité deux
cousins germains dans le collège du bourgmestre et des échevins.
Le collège est composé de 2 ou 3 membres ; il
en résultera qu’au lieu de représenter trois opinions il n’en représentera
qu’une. Il est bon d’éviter que l’intérêt d’une seule famille domine dans le
conseil.
M. H. Dellafaille - Si on augmente le
nombre des prohibitions il sera impossible dans certaines communes rurales de
composer le conseil municipal. Il a fallu combiner la loi de façon à pouvoir
s’appliquer à toutes les communes.
M. Pollénus. - Je donnerai mon approbation à
toutes les dispositions de l’article, excepté à la dernière qui établit une
prohibition dans les communes au-dessous de 1,200 habitants,
entre les parents au second degré. Les deux tiers au moins des communes rurales
comptant moins de 1,200 habitants, l’exception proposée par la section centrale
deviendra la règle générale. Je demanderai la division de l’article.
M. H.
Dellafaille - Si on prohibait à un degré plus élevé, il serait souvent
impossible de composer le conseil communal ; car, dans les communes au-dessous
de 1,200 habitants, il sera rare de trouver 40 ou 50 habitants aptes à faire
partie de l’administration communale.
M. Pollénus. - Avant tout il nous faut des
magistrats indépendants et non des magistrats occupés d’intérêts de famille et
point des intérêts de la commune. Il faut supprimer l’exception du dernier
paragraphe, et maintenir les prohibitions des paragraphes précédents.
- Les trois premiers paragraphes de l’article,
mis aux voix, sont adoptés.
Le dernier paragraphe est ensuite mis aux voix
; il est adopte après deux épreuves.
M. Dumortier,
rapporteur. - D’après le projet du gouvernement, il y a empêchement
entre les parents au troisième degré ; mais je demanderai si trois ou quatre
habitants d’une commune qui auraient épousé des sœurs peuvent siéger en même
temps dans le conseil ? Le mot allié s’applique-t-il à ces beaux-frères ?
M. le président.
fait un signe négatif.
M. Dumortier, rapporteur. - M. le président me
fait un signe négatif ; alors je demanderai la permission de rédiger une
disposition sur ce cas ; je prierai la chambre d’attendre jusqu’à demain.
M. le président.
- On ne devient pas allié pour avoir épousé deux sœurs.
M. Dumortier,
rapporteur. - Cependant les rapports d’intérêt sont les mêmes, soit que
deux habitants épousent deux sœurs, soit qu’ils épousent réciproquement la sœur
l’un de l’autre.
M. de Muelenaere.
- Je crois, que l’observation de M. Dumortier est fondée : les alliés sont
prohibés parce qu’ils ont des intérêts communs ; les mêmes intérêts existent
entre ceux qui épousent des sœurs ; ainsi la prohibition devrait les attendre.
Ceux-ci ne sont pas alliés aux termes de la loi ; mais le même motif
d’exclusion existe pour eux comme pour les alliés proprement dits.
M.
Dumortier, rapporteur. - Je proposerai la rédaction suivante :
« Il en sera de même de ceux dont les
épouses seraient parentes entre elles au degré indiqué par les dispositions
ci-dessus. »
M. Jullien.
- Je ne partage pas l’avis de M. de
Muelenaere. Ce n’est pas le motif d’intérêt privé, d’intérêt de famille,
qui fait exclure les parents, les alliés ; c’est parce que dans les familles
existent les affections ou les haines les plus vives : si l’intérêt était motif
d’exclusion, il faudrait exclure les associés. Comme l’a fait remarquer M. le
président, l’alliance n’engendre pas l’alliance ; l’affinité n’engendre pas
l’affinité. Je soumets ces observations à M. Dumortier qui s’occupe d’un
amendement.
M. Dubus. -
La loi ne reconnaît pas l’alliance des personnes étrangères l’une à l’autre qui
ont épousé des personnes parentes entre elles, parce que l’alliance n’engendre
pas l’alliance.
Cependant nous avons à examiner si
nous ne devons pas étendre la disposition aux cas où plusieurs membres du
conseil auraient épousé des femmes très étroitement parentes entre elles : si
le motif qui milite pour les incompatibilités que vous avez établies pour cause
de parenté n’existe pas ici dans toute sa force, je pense que l’objet principal
de la disposition est d’éviter, ce qui est à craindre surtout dans les petites
communes, de livrer presque entièrement l’administration de la commune à une
seule famille, de garantir autant que possible la commune de l’influence de
l’esprit de famille. Or, est-ce que cette influence ne sera pas la même quand
vous aurez, dans un même conseil, plusieurs personnes dont les épouses sont
sœurs que si vous aviez des beaux-frères ? Ces personnes appartiennent à
la même famille, elles introduiront dans le conseil l’influence de famille.
C’est pour éviter cet inconvénient que je voterai pour l’amendement.
M. Jullien. -
C’est sans doute un inconvénient que celui signalé par M. Dubus, de livrer une
commune entière à une seule famille. Mais si vous étendez les prohibitions,
vous allez tomber dans des inconvénients plus graves. Il y a des communes où
tous les individus sont parents, où les membres de familles très nombreuses
sont tous cousins par suite d’alliance. Je vous demande comment, dans ce cas,
vous parviendriez à composer le conseil municipal. Je ne pense pas qu’on puisse
étendre plus loin que la loi ne l’a fait les prohibitions. Si vous les étendiez
aux personnes dont les femmes sont alliées au troisième degré, parce qu’un
individu aurait épouse une femme cousine germaine avec la femme membre du
conseil communal, à cause de cette parenté, vous lui interdiriez l’entrée du
conseil, vous le priveriez d’un droit qu’il possède en sa qualité de citoyen et
d’électeur.
Quant à moi je m’en tiens à la rédaction soit
du gouvernement soit de la section centrale, il m’importe peu qu’on adopte
l’une ou l’autre.
Dans
l’avant-dernier paragraphe on dit que l’alliance est censée dissoute par le
décès de la femme du chef de laquelle elle provient. Ce qui est contraire aux
principes admis, car l’alliance n’est censée dissoute que quand il n’y pas
d’enfants du mariage. La question est à la vérité controversée, mais on prétend
plus généralement que dans ce cas l’alliance existe encore. Cependant vous
déclarez une alliance censée dissoute, quoiqu’il y ait des enfants de la femme
décédée, et vous écartez des personnes dont les femmes sont alliées au
troisième degré. Il y a là une sorte de contradiction que je ne puis admettre.
M. Dumortier,
rapporteur. - L’honorable préopinant s’est trompé sur la portée de mon
amendement et de l’article. Il a dit que si vous admettiez mon amendement, dans
certaines communes il serait impossible de composer le conseil, parce que dans
ces communes les membres de familles très nombreuses seraient tous cousins. Je
lui ferai observer que les cousins sont parents au quatrième degré. Ils peuvent
donc siéger ensemble au conseil communal. L’article 12 ne s’étend qu’au
troisième degré, ainsi l’exclusion ne s’applique pas
aux cousins. L’argument de l’honorable membre tombe dès lors de lui-même. Il
est indispensable d’adopter mon amendement. S’il ne l’était pas, deux
personnes, dont l’une aurait épousé une veuve, et l’autre la fille de cette
veuve, pourraient siéger en même temps au conseil ; le beau-père et le fils
pourraient siéger ensemble, et s’emparer de l’administration au grand détriment
des intérêts de la commune. Les incompatibilités établies dans l’article ont
pour but d’empêcher qu’une influence de famille ne s’empare de l’administration
de la commune. Ce que vous avez voulu éviter arriverait, si vous n’adoptiez pas
mon amendement.
Si on trouve des inconvénients à ce que l’incompatibilité
que je propose s’étende au troisième degré, je consens à ce qu’on la restreigne
au deuxième degré, afin qu’au moins ceux qui auraient épouse la même et la
fille, et ceux qui auraient épousé les deux sœurs, ne puissent pas siéger
ensemble.
M. de Muelenaere.
- Nous sommes généralement d’accord sur le principe qu’il n’existe pas de
parenté entre deux individus qui ont épousé deux sœurs. Mais je pense qu’on
sentira la nécessité de ne pas admettre dans le conseil un trop grand nombre
d’individus qui se trouveraient dans ce cas, car il arriverait souvent dans les
petites communes surtout que l’administration communale se trouverait livrée à
une coterie de famille.
Les mêmes haines et les mêmes affections
peuvent exister entre les individus qui ont épousé des sœurs, qu’entre ceux qui
sont alliés au deuxième degré aux termes de la loi. Mais il faut bien se fixer
sur la partie de l’amendement de M.
Dumortier. Il propose d’exclure ceux dont les femmes sont parentes au
troisième degré.
En excluant
les époux de deux femmes sœurs entre elles, vous étendez l’exception à ceux
dont les femmes sont parentes au troisième degré. La parenté au troisième degré
est celle de l’oncle à la nièce. Tout autre parent, même le cousin germain est
à un degré plus éloigné, au moins au quatrième degré. Je ne trouve pas
d’inconvénient à ce qu’on adopte l’amendement, en le bornant à ceux dont les
femmes sont parentes au deuxième degré seulement.
M. Milcamps. - J’ai vu plusieurs exemples
d’individus qui avaient épouse deux sœurs, siéger dans le même conseil, et je
n’ai jamais trouvé que cela présentât des inconvénients. Dans tous les cas, il
me paraît que la prohibition devrait s’arrêter au deuxième degré, d’autant plus
que c’est une restriction à la liberté des élections, qui n’existe dans la
législation d’aucun pays voisin et qui ne se trouve pas dans les anciens
règlements. Si donc je me détermine à voter pour l’amendement de M. Dumortier,
ce ne sera qu’autant qu’il n’ira pas plus loin que le deuxième degré.
M. H. Dellafaille - Comme l’a fait observer
l’honorable M. Jullien, l’amendement de M. Dumortier rétrécit le cercle de des
élections. La restriction que l’honorable membre vient d’apporter à son
amendement en diminue beaucoup les inconvénients. L’art. 48 des anciens
règlements renferme une disposition tout à fait contraire à cet amendement, et
il n’a donné lieu à aucune réclamation.
Si M. Dumortier restreignait l’incompatibilité
aux membres du collège électoral, je ne trouverais aucun inconvénient à
l’admettre.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je ne me rallie pas à l’amendement de M. Dellafaille.
J’ai réduit mon amendement à ceux dont les femmes sont parentes au second
degré. Je ne vois pas de motif pour le restreindre encore aux membres du
collège. Il n’est pas impossible qu’une famille qui aurait quatre ou cinq
filles mariées n’accapare tout le conseil. Si vous adoptez mon amendement pour
le conseil, l’inconvénient ne pourra pas se présenter dans le collège. Comme
l’a dit M. de Muelenaere, il faut prendre garde qu’une seule famille ne se crée
dans un conseil une majorité qui serait très dangereuse pour la bonne
administration de la commune.
- Le sous-amendement de M. Dellafaille, qui
consiste à restreindre au collège des bourgmestres et échevins
l’incompatibilité proposée par M. Dumortier, est mis aux voix et rejeté.
L’amendement de M. Dumortier, en restreignant
la parenté au deuxième degré inclusivement, est adopté.
L’article ainsi amendé est également adopté.
Article 13
L’article 13 ainsi conçu : « Art. 13. Il y
a dans chaque commune un secrétaire et un receveur. » est mis aux voix et
adopté.
M. le président.
- La discussion est ouverte sur l’article 14 ainsi conçu :
« Art. 14 (du projet du gouvernement). Il y a
incompatibilité entre les fonctions de receveur et de secrétaire ; il y a
également incompatibilité entre les fonctions de secrétaire ou de receveur et
celles de bourgmestre, d’échevin et de membre du conseil municipal ; néanmoins,
dans les communes de moins de 3,000 habitants, le Roi pourra, pour des motifs
graves, autoriser le cumul desdites fonctions, sauf celui des fonctions de
bourgmestre et de receveur, qui ne pourra avoir lieu en aucun cas. »
L’article de la section centrale est ainsi
conçu :
« Art. 14 (du projet de la section
centrale). «Il y a, dans la même commune, incompatibilité entre les fonctions
de receveur et de secrétaire ; il y a également incompatibilité entre les
fonctions de secrétaire ou de receveur et celles de bourgmestre, d’échevin ou
de membre du conseil municipal ; néanmoins, dans les communes de moins de 3,000
habitants, le Roi pourra, pour des motifs graves, autoriser le cumul desdites
fonctions, sauf celles de bourgmestre qui ne pourront, dans aucun cas, être
cumulées dans la même commune avec aucun desdits emplois. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - La différence qui existe
l’article du projet de la section centrale et celui du gouvernement, c’est que
dans celui-ci la faculté de laisser cumuler les fonctions de bourgmestre et de
secrétaire communal est laissée au Roi, tandis que la section centrale ne veut
pas que ce cumul ait jamais lieu. Je pense qu’il est indispensable que le
bourgmestre puisse être autorisé, pour motifs graves, à remplir en même temps
les fonctions de secrétaire communal. Il est certaines provinces où ce cumul a
été réclamé par la députation des états. Le gouvernement s’est vu souvent dans
l’obligation d’accorder cette autorisation sur sa demande. D’après un tableau
que j’ai sous les yeux, 158 cumuls de cette espèce ont été autorisés depuis le
1er janvier 1831 jusqu’au 30 juin 1834 Dans ce nombre, 38 cumuls ont été autorisés
dans la province de Liége, 36 dans celle du Limbourg, 55 dans celle du
Luxembourg et 22 dans celle de Namur.
Au contraire, on n’a jamais senti la nécessité
d’autoriser le cumul des fonctions de bourgmestre et de celles de receveur
communal. C’est en quoi le projet de la section centrale est d’accord avec le
projet du gouvernement.
M. Doignon. -
Je proposerai à cet article l’amendement que voici :
« Les employés de l’administration
provinciale ne peuvent être secrétaires ou receveurs communaux. »
Je pense, messieurs, que c’est ici le cas de
faire cesser un abus qui a existé jusqu’à ce jour. Les employés de
l’administration provinciale occupent fréquemment les fonctions de secrétaires
ou de receveurs communaux dans la province. Les rapports qui existent entre le
gouvernement provincial et les receveurs on les secrétaires s’opposent à ce que
les employés de l’administration provinciale puissent cumuler ces fonctions. Au
gouvernement provincial comme au ministère, ce sont les chefs de division, qui
instruisent les affaires et qui le plus souvent les dirigent. Si ces employés
sont en même temps secrétaires ou receveurs, ils seront appelés à se contrôler
eux-mêmes. Ils se trouvent ainsi juges et parties.
S’agit-il de régler les comptes de la recette communale ; ce sont eux-mêmes qui
les vérifient, ou qui les font vérifier par leurs collègues. Est-il question de
subsides, de secours ; ces employés ont ordinairement une prédilection pour les
communes dont ils sont secrétaires ou receveurs. Pour les affaires de la
milice, ces mêmes inconvénients existent. Il serait trop long de détailler tous
les abus qui résultent de ce cumul. L’assemblée appréciera les motifs de mon
amendement. Je signalerai un autre inconvénient : c’est que ces employés devant
se rendre souvent sur les lieux, il en résulte une négligence forcée dans leur
travail. L’Etat leur accorde un traitement pour qu’ils consacrent tous leur
temps aux affaires provinciales. Si la chambre adoptait mon amendement
j’engagerais M. le ministre de l’intérieur à veiller à son exécution.
Il serait possible d’éluder la défense du cumul
au moyen d’un prête-nom. Des employés de l’administration provinciale
pourraient continuer à remplir les fonctions de receveur ou de secrétaire
communal non par eux-mêmes mais par personnes interposées.
M. de Muelenaere. - Je pense que
l’amendement déposé par l’honorable M. Doignon trouvera place ailleurs que dans
l’article que nous discutons. En effet de quoi s’agit-il ? Il s’agit de la
composition du conseil communal et de l’incompatibilité qui existe entre les
fonctions de secrétaire ou de receveur et d’autres fonctions exercées dans la même commune. L’amendement de M.
Doignon pourrait être ajourné jusqu’à la discussion du chapitre IV où il est
question du secrétaire communal.
M. H.
Dellafaille - J’appuie la proposition de M. de Muelenaere. Je ferai seulement observer que les motifs
détaillés par M. Doignon à l’égard de l’incompatibilité des employés de
l’administration provinciale est applicable aux employés des commissariats de
district et de milice.
M. Doignon. -
Je ne vois pas d’inconvénient à ce que la proposition d’ajournement faite par
M. de Muelenaere soit admise.
- L’ajournement de l’amendement présenté par M.
Doignon est mis aux voix et adopté.
Article 15 (du projet du gouvernement)
M. le président.
- « Art. 15 (du projet du gouvernement). - Il est interdit aux membres des
conseils municipaux d’intervenir dans des procès dirigés contre la commune,
comme avocat, avoué, notaire ou homme d’affaire. Ils ne pourront, en la même
qualité, plaider, aviser ou suivre aucune affaire litigieuse quelconque dans
l’intérêt de la commune, si ce n’est gratuitement. »
- La section centrale propose le renvoi à
l’article 72 ; le ministre se rallie à cet ajournement ; il est adopté.
Titre I. - Du corps
communal
Chapitre 1er. - De la composition
du corps communal et de la durée des fonctions de ses membres
Section 1ère. De la durée
des fonction des membres du corps communal
Article 15 (du projet de la section centrale)
M. le président.
« Art. 15 (du projet de la section centrale). Les conseillers communaux
sont élus pour le terme de 6 ans ; ils sont toujours rééligibles.
« Les conseils sont renouvelés par moitié
tous les 3 ans.
« La première sortie sera réglée par le
sort, dans la séance prescrite à l’article 68, l’année qui précédera
l’expiration du premier terme.
« Les échevins appartiendront par moitié à
chaque série ; le bourgmestre est à la dernière. »
- Cet article, auquel le gouvernement se
rallie, est mis aux voix et adopté.
Article 16 (du projet de la section centrale)
M. le président.
« Art. 16 (du projet de la section centrale). Le bourgmestre et les
échevins sont également nommés pour le terme de 6 ans ; toutefois ils perdent
cette qualité si, dans l’intervalle, ils cessent de faire partie du conseil
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je me rallie à cet article comme
conséquence des articles précédemment adoptés.
- L’art. 16 du projet de la section centrale
est mis aux voix et adopté.
Article 18 (du projet du gouvernement) et article 17 (du projet de la
section centrale)
M. le président.
« Art. 18 (du projet du gouvernement). Les démissions des conseillers et
des échevins doivent être adressées au bourgmestre, qui en donne immédiatement
avis à l’autorité supérieure. »
« Art. 17. (du projet de la section
centrale). La démission des fonctions de conseiller ou échevin est adressée au
conseil communal qui soumet sa résolution à l’approbation de la députation
permanente du conseil provincial.
« La démission des fonctions de
bourgmestre doit être adressée au Roi et notifiée au conseil ; elle n’a d’effet
que lorsque le Roi l’a acceptée.
« Le bourgmestre qui désirera donner sa
démission comme conseiller ne pourra l’adresser au conseil communal qu’après
avoir préalablement obtenu du Roi sa démission comme bourgmestre. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - La rédaction de la section
centrale ne me paraît plus en rapport avec le reste du projet tel qu’il a été
adopté par la chambre. Vous avez décidé que les échevins seraient nommés par le
Roi comme les bourgmestres. Vous devez par conséquent mettre dans cet article
que les démissions des échevins seront adressées au Roi, comme vous l’avez
décidée pour celles des bourgmestres.
M. Dumortier,
rapporteur. - Je ferai remarquer que pour ce qui est relatif à la
nomination des bourgmestres et échevins, les dispositions adoptées par la
chambre sont conformes aux propositions de la section centrale. Le système de
cet article n’a donc pas besoin d’être coordonné avec celui que vous avez
adopté dans les précédents articles.
Le Roi nomme le bourgmestre dans le sein du
conseil, mais sans qu’il y ait aucune présentation de candidats. Dès lors,
c’est au Roi que doit être adressée la démission du bourgmestre. Pour les
échevins, ils sont à la vérité nommés par le Roi, mais sur une liste de
présentation triple ou double formée par le conseil et dans son sein. Ainsi
l’initiative n’appartient pas au Roi, elle appartient au conseil. Or le contrat
doit être délié comme il a été lié. Si donc le conseil communal a eu
l’initiative pour la nomination, il doit également l’avoir pour la démission.
Voilà quels sont les motifs sur lesquels s’est fondée la section centrale dans
cet article. Je pense que ces explications satisferont M. le ministre de
l’intérieur.
Il va sans dire que la délibération
du conseil communal sera soumise à l’approbation de la députation permanente.
Ainsi, le gouvernement aura tout ce qu’il peut désirer pour connaître la
démission. Nous avons soumis la démission des échevins à des formalités
différentes de celles des bourgmestres, et nous y avons fait intervenir la
députation provinciale, parce que si le Roi nomme les bourgmestres, les
échevins seront nommés par le gouverneur qui préside la députation provinciale.
C’est une facilité que nous avons cru utile d’accorder au gouvernement,
facilité dont il usera toujours, ne pouvant nommer par lui-même tous les
échevins.
M. Jullien. - La rédaction de cet article me
paraît assez louche ; j’y lis : « La démission des fonctions de conseiller
ou d’échevin est adressée au conseil communal qui soumet sa résolution à l’approbation,
etc. »
De quelle résolution parle-t-on ? Est-ce la
résolution du fonctionnaire qui donne sa démission, ou bien la décision du
conseil communal. Il y a là amphibologie. Je voudrais avoir une explication de l’honorable
rapporteur sur le sens de cette expression.
M.
Dumortier, rapporteur. - Nous avons introduit cette disposition pour
empêcher que l’abus qui a eu lieu à Liége ne se reproduise. Nous ne voulons pas
que le conseil démissionne un membre dont la démission serait équivoque,
élastique. Nous voulons une démission formelle C’est dans ce but, et parce que
nous avions sous les yeux l’affaire de M. Dejaer, que
nous avons inséré dans la loi le paragraphe premier de l’article en discussion,
paragraphe que nous avons emprunté aux anciens règlements (article 57).
M. Jullien.
- Je crois que la rédaction de l’article serait beaucoup plus claire si on
disait : « la démission du conseiller est adressée au conseil de régence
qui en délibère et soumet sa résolution à l’approbation de la députation
permanente du conseil provincial. » (Appuyé
! appuyé !)
M. Dubus.
- Je lis dans les motifs de la section centrale : « En règle générale, nous
admettons que les membres du conseil peuvent toujours donner leur démission. »
J’admets cela, mais l’article de la section centrale et la rédaction de M.
Jullien ne rendent pas cette idée ; au contraire, elles impliquent une idée
toute différente, celle que le conseil peut refuser la démission. Tout le monde
est d’accord qu’un membre du conseil élu par le peuple peut toujours donner sa
démission car il serait étrange que tandis qu’il tient son mandat du peuple, un
autre pouvoir pût l’obliger à garder son mandat.
Je demande que le principe que le membre du
conseil peut toujours donner sa démission, soit mis aux voix, et que l’article
soit renvoyé à la section centrale pour le soumettre à une nouvelle rédaction.
M. Jullien.
- Je ne sais si on peut mettre aux voix ce que propose M. Dubus, il faudrait au
moins qu’il formulât un amendement ; quant à moi je crois que la disposition de
la section centrale modifiée par mon amendement répond au but que l’on s’est
proposé.
M. Dubus.
- D’après l’article de M. Jullien, il n’est pas établi en principe que le
conseil devra toujours accepter la démission ; il semble que le conseil pourra
délibérer sur la démission.
- La
première partie de l’article de la section centrale, amendée par M. Jullien,
est mise aux voix et adoptée sauf rédaction.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) demande que la démission des
échevins soit adressée à l’autorité supérieure.
M.
Dumortier, rapporteur. - Nous pensons, messieurs, que les députations
provinciales dans l’espèce, sont l’autorité supérieure. Les députations
provinciales sont le pouvoir modérateur des intérêts locaux ; elles ont aussi
une responsabilité, et comme on a parlé ici de la responsabilité ministérielle,
il ne fait pas non plus oublier la responsabilité des députations provinciales.
Je demande que la démission des échevins soit
adressée à cette autorité.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je ne vois pas la grande
importance qu’on attache à ce que la démission des échevins soit adressée à la
députation des états qui ne nomme pas les échevins. Il me semble que la
démission des échevins doit être adressée au pouvoir qui les nomme, et c’est le
gouverneur de la province, au nom du Roi, ou le Roi lui-même, qui fait cette
nomination.
La section centrale elle-même s’exprime ainsi :
« Le bourgmestre étant nommé directement
par le pouvoir exécutif, devra obtenir du Roi la démission de ses fonctions,
avant que de pouvoir se démettre de celles de conseiller ; il en est de même
des fonctions d’échevin, relativement au conseil.
« En règle générale nous admettons que les
membres du conseil peuvent toujours donner leur démission, mais que les membres
du collège, tenant un mandat actif d’un ordre supérieur doivent préalablement
obtenir la résiliation de ce mandat. »
Il me semble, messieurs que puisque
les échevins sont nommés par le Roi sur la présentation du conseil, il faut que
le pouvoir qui nomme soit informé de la démission du fonctionnaire nommé.
Quelques voix. - Il faut d’abord statuer sur la démission du
bourgmestre.
- La discussion s’engage sur le second
paragraphe de l’article de la section centrale.
M. Dubus. - La règle générale est qu’on
obtient la résiliation d’un mandat du moment qu’on y renonce. Je concevrais que
deux personnes pussent être engagées l’une envers l’autre pour un terme sans
pouvoir se délier ; mais ici ce n’est pas le cas, c’est le gouvernement qui
nomme le bourgmestre, et le gouvernement casse le bourgmestre quand il veut,
dès le lendemain du jour de la nomination s’il le juge convenable : je ne vois
pas pourquoi le bourgmestre n’aurait pas le droit de refuser un mandat dès le
lendemain du jour où il l’a reçu. Pourquoi voulez-vous que le bourgmestre soit
agent du gouvernement malgré lui ? Il peut quelquefois y avoir inconvénient à
renoncer à son mandat ; mais ici où est l’inconvénient ? Quand le bourgmestre
manque, soit pour cause d’absence, soit pour cause de décès, c’est un échevin
qui le remplace ; il y a dans la commune plusieurs personnes que la loi désigne
pour remplir les fonctions de bourgmestre. Il a donc raison de donner à ce
fonctionnaire le droit de renoncer à son mandat quand il le juge convenable.
M. H.
Dellafaille - Nous avons cru, dans la section centrale que le
bourgmestre ne pouvait déserter ses fonctions, qu’il fallait qu’il donnât sa
démission, et qu’il attendit qu’elle fût admise. Un gouverneur, un membre du
parquet, un officier de l’armée ne peuvent cesser leurs fonctions sans en avoir
reçu l’autorisation ; nous avons cru qu’il fallait prendre les mêmes
précautions envers les bourgmestres. En pratique, jamais les démissions n’ont
été refusées ; il peut cependant arriver que le gouvernement différât de donner
la démission pour des motifs d’intérêt public ; mais là il n’y a pas encore
d’inconvénient.
M. Dubus.
- Je suis étonné que l’on compare les fonctions de bourgmestre à celles d’un
officier de l’armée. Tous les engagements militaires sont pour un terme avant
lequel on ne peut pas donner sa démission ; le soldat engagé ne peut se retirer
avant l’expiration du temps de son engagement ; pour l’officier, c’est une
question d’honneur ; il ne peut se retirer que quand il en reçu l’autorisation
; il pourrait se retirer la veille d’une bataille. On ne peut imposer au
bourgmestre un mandat malgré lui ; pourquoi le dire dans la loi ? Je demande le
retranchement des mots : « Elle n’aura d’effet (la démission) que lorsque
le Roi l’a acceptée. »
M. Jullien. - Messieurs, j’ai demandé la parole
pour appuyer l’opinion de l’honorable préopinant. Si la démission du
bourgmestre pouvait compromettre le service public, je serais tout à fait
d’avis de maintenir la disposition de la section centrale. On sait que les
magistrats ne peuvent déserter leurs sièges à moins que leur démission ne soit
acceptée ; c’est que par ce moyen on n’interrompt pas le cours de la justice :
quand les juges ont accepté leurs fonctions, ils ont pris l’engagement de les
remplir loyalement ; mais il n’en est pas de même pour le bourgmestre, qui est
remplacé de suite par un échevin ou par les conseillers municipaux. Il n’y a donc
aucune raison pour forcer le bourgmestre à continuer ses fonctions jusqu’à ce
qu’il plaise au Roi de prononcer sur sa démission. Le motif qu’il a pour donner
sa démission peut être tel qu’il ne peut continuer ses fonctions sans
compromettre le service public. Devant l’intérêt public, toutes ces
considérations privées doivent cesser ; mais là où l’intérêt public n’est pas
compromis, tous les motifs privés doivent prévaloir. J’appuie la proposition de
M. Dubus.
M. Desmanet de Biesme. - On ne peut
pas retenir un bourgmestre malgré lui. Il me semble qu’on pourrait dire :
« La démission est acceptée un mois après qu’elle a été donnée. » Ce
délai me paraît suffisant pour tout concilier.
M. de Muelenaere.
- Si les mots : « Elle n’a d’effet que lorsque le Roi l’a acceptée, ne
s’étaient pas trouvés dans la rédaction de la section centrale, je n’aurais pas
fait la proposition de les introduire dans l’article ; toutefois je crois qu’il
y aurait danger à les supprimer. Il faut que le bourgmestre se trouve dans la
même position que tous les autres fonctionnaires révocables. Quand on accepte
des fonctions publiques, c’est avec la condition de les remplir ; on ne peut
pas, sous prétexte de démission, se dispenser de remplir les devoirs de sa
charge. Il est de principe incontestable que la démission n’a d’effet que quand
elle est acceptée et lorsque le fonctionnaire a été remplacé. Dans un pays
voisin vous avez pu voir, par les journaux, que l’on va plus loin. La démission
n’a été considérée comme valable, dans une circonstance remarquable, que
lorsque le fonctionnaire a été remplacé. Ainsi les ministres du Roi ne cessent
leurs fonctions en Angleterre que lorsque leurs successeurs sont nommés.
On vous a dit que les membres de l’ordre
judiciaire étaient obligés de continuer leurs fonctions parce que sans cela le
cours de la justice serait interrompu ; c’est une erreur : il y a plusieurs
magistrats, et l’absence de l’un d’eux dans une cour ou dans un tribunal
n’empêche pas de rendre la justice. Le magistrat doit continuer ses fonctions
après avoir donné sa démission, afin que le gouvernement puisse pourvoir à son
remplacement. La démission d’un bourgmestre pourrait amener les résultats les
plus désastreux ; il y a telle commune où le bourgmestre fait tout, et où les
autres ne peuvent remplir que des fonctions nominales ; s’il lui prenait envie
de cesser sur-le-champ ses fonctions, la commune serait sans administration
pendant un certain temps.
Toutefois, je ne m’opposerais pas à
un amendement qui serait proposé dans le sens indiqué par M. Desmanet de
Biesme, à ce qu’on fixe un délai dans lequel la démission devra être acceptée
et après lequel le bourgmestre pourra cesser ses fonctions s’il n’est pas
remplacé. Ce délai doit être tel que le gouvernement soit supposé avoir eu le
temps nécessaire pour pourvoir à son remplacement, pour prendre des mesures
afin que les intérêts de la commune ne pâtissent pas de l’absence du
bourgmestre. Il faut admettre en principe que la démission du bourgmestre ne le
dispense de remplir les devoirs à sa charge que quand il aura obtenu son congé,
ou au moins après certain délai déterminé par la loi, afin que le gouvernement
puisse pourvoir aux intérêts de la commune qui étaient confiés à
l’administrateur démissionnaire.
M. Dubus. -
L’honorable préopinant a fait une comparaison qui n’est pas applicable à la
question qui nous occupe. Il a dit que les ministres anglais ne s’étaient pas
considérés comme déchargés des obligations que leurs fonctions leur imposaient,
tant qu’une nouvelle administration n’avait pas été formée et qu’ils n’avaient
pas reçu congé de leur souverain. Mais il y a ici une énorme différence, c’est
qu’en se retirant les ministres laissaient le pays sans administration, Il n’y
a pas derrière les ministres une échelle de dix degrés de suppléants, qui
peuvent chacun à leur tour remplir les fonctions à la place de ceux qui se
seraient retirés. Ces ministres, en restant au pouvoir jusqu’à ce qu’une
nouvelle administration fût formée, faisaient acte de bons citoyens qui ne
voulaient pas laisser le pays sans administration. Mais ce cas n’est pas
identique avec celui qui nous occupe. Quant au bourgmestre il peut se retirer
dès le lendemain du jour où il a donné sa démission, il peut être remplacé de
suite par l’échevin comme s’il s’absentait sans donner sa démission. Et cela ne
peut donner lieu à aucun inconvénient. Mais j’irai plus loin.
Je vous ferai remarquer que sous le régime
actuel, qui dure depuis le mois d’octobre 1830, la démission a son effet du
jour où elle a été donnée. D’après l’arrêté du 8 octobre 1830, le bourgmestre
qui donne sa démission au conseil n’attend pas que le peuple de qui il tient sa
nomination ait accepté sa démission ; dès le moment que la démission est
donnée, il cesse ses fonctions ; on convoque les électeurs pour nommer un
nouveau bourgmestre, et le bourgmestre démissionnaire ne continue pas ses
fonctions jusqu’à ce que son successeur ait été nommé. En attendant que le
peuple ait procédé à l’élection, c’est le premier ou le second échevin qui
remplace le bourgmestre. Voilà l’état actuel des choses.
Je vous demande s’il a présenté des
inconvénients. Par des motifs bons ou mauvais, vous avez voulu que le bourgmestre
fût nommé par le gouvernement, Je demande si ce nouveau mode de nomination
introduit des inconvénients qu’on n’avait pas remarqués depuis trois ans ?
Le bourgmestre peut avoir le plus grand intérêt
à cesser ses fonctions immédiatement. Sa démission peut être le résultat de ses
scrupules, il peut tenir à honneur de donner sa démission plutôt que d’exécuter
telle mesure qui répugne à sa conscience. Vous l’obligeriez donc à rester à son
poste et à exécuter cette mesure qui lui répugne. il
ne pourrait, sans manquer à son devoir, sans se rendre coupable devant la loi,
se dispenser d’exécuter des mesures à l’exécution desquelles il voulait se
soustraire en donnant sa démission. Je vous demande si vous pensez placer un
bourgmestre dans une telle position ?
Si vous n’admettez pas mon amendement, au moins fixez un terme après
lequel le bourgmestre démissionnaire pourra cesser ses fonctions. Cependant je
ne puis pas admettre ce terme, si l’honneur et la conscience lui ont fait un
devoir de donner sa démission, car il faut qu’il puisse éviter de donner son
concours à l’exécution de mesures qui lui répugnent.
M. le président.
- M. Desmanet de Biesme propose un
amendement qui consiste à dire que la démission est censée acceptée deux mois
après qu’elle aura été adressée au Roi.
M. de Theux. - Je viens appuyer
l’amendement de M. Desmanet de Biesme.
La démission du bourgmestre peut être isolée, et alors il n’y aurait pas
d’inconvénient à ce qu’il pût cesser ses fonctions. Mais il peut arriver que la
démission d’un bourgmestre jette la perturbation dans l’administration de la
commune, il peut arriver que cette démission ne soit pas isolée. Les échevins
peuvent donner en même temps leur démission. Il peut même arriver qu’un conseil
en masse donne sa démission. Il faut dans ces circonstances que la loi pourvoie
à l’administration de la commune. Par ces divers motifs, je pense que
l’amendement de M. Desmanet de Biesme doit être adopté.
M. de Muelenaere.
- Je n’ai pas cité ce qui s’était passé dans un pays voisin comme étant
identique avec le cas qui nous occupe, mais seulement pour faire sentir que ce principe
était reçu partout, qu’un fonctionnaire n’était pas déchargé des devoirs
inhérents à ses fonctions par le seul motif qu’il avait donné sa démission.
L’honorable auteur de l’amendement a dit que sa proposition ne faisait que
maintenir l’état de choses actuel qui n’a jusqu’à présent donné lieu à aucun
inconvénient. C’est là une erreur grave. Il ne pouvait pas en être autrement
quand la nomination était faite directement par les électeurs. Mais il n’est
pas moins vrai que l’arrêté du mois d’octobre 1830 contient une lacune en
permettant que le bourgmestre cesse ses fonctions dès le jour qu’il donne sa
démission.
On aurait dû insérer cette clause qu’il n’était
déchargé des devoirs que lui imposaient ses fonctions que quand, dans un délai
déterminé, les notables auraient été convoqués pour le remplacer. Il est
résulté des inconvénients graves de cette lacune. Il y a des communes qui se
sont trouvées sans administration communale jusqu’à ce qu’on ait pu rassembler
les électeurs pour faire de nouvelles nominations. Si on ne veut pas qu’il
puisse dépendre du gouvernement de ne pas accepter la démission d’un
bourgmestre, ce qu’il ne s’empresserait pas de faire, parce que le
démissionnaire pourrait avoir rendu des services, il faut au moins lui donner
la faculté de laisser au démissionnaire un certain temps pendant lequel il
puisse examiner plus mûrement s’il lui convient ou non de persister dans sa
démission.
Il faut aussi laisser au gouvernement un délai
pour pourvoir au remplacement du démissionnaire. J’appuierai l’amendement de M.
Desmanet, soit qu’on accorde un délai de deux mois on d’un mois. Un mois
suffirait pour la plupart des provinces du royaume. Mais je persiste à croire
qu’il faut au moins un délai.
M. Dubus nous a dit : Il faut que la
démission puisse produire ses effets immédiatement, car il peut arriver qu’elle
repose sur des motifs d’honneur et de conscience ; vous ne pouvez pas forcer un
bourgmestre à exécuter un acte pour lequel il a donné sa démission. Personne
n’exigerait dans ce cas qu’il exécutât. Il y aurait absurdité à exiger son
concours.
Le
gouvernement ferait exécuter la mesure par un des échevins. Cela n’empêcherait
pas le bourgmestre de remplir les autres devoirs de sa charge auxquels sa
conscience ne répugnerait pas.
M. le président (M. Raikem) propose le
sous-amendement suivant : « Elle (la démission) n’aura d’effet que 30
jours après qu’elle aura été notifiée au conseil, à moins que le Roi ne l’ait
acceptée auparavant. »
M. Verdussen
propose un délai de 30 jours.
M.
Desmanet de Biesme en propose un de deux mois. - Je me rallie, dit-il,
à l’amendement de M. Verdussen pour le délai ; mais il me semble que la
notification au conseil ne suffit pas, il faudrait qu’elle fût faite au Roi.
M. Verdussen.
- J’ai proposé la notification au conseil, parce que c’est un acte public.
M. Dubus.
- J’avais expliqué les motifs pour lesquels je pensais que la démission devait
avoir un effet immédiat ; mais d’après ce que vient de dire M. de Muelenaere,
qu’il serait absurde de forcer un bourgmestre à exécuter une mesure qui aurait
motivé sa démission, mon observation tombe.
J’examinerai cela de plus près et je formulerai
une disposition qui rentre dans l’idée de M. de Muelenaere.
M. Verdussen.
- Il me semble que l’on ne peut notifier qu’un acte qui a eu lieu.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - La rédaction de la section
centrale me paraît beaucoup plus claire. Je crois que les trois premières
lignes devraient rester telles qu’elles sont.
- L’amendement de M. Verdussen est mis aux voix
et adopté.
La partie de l’article 17 qui a rapport à la démission
du bourgmestre est adoptée dans le sens de la modification proposée par M. Verdussen.
M. le
président. - La discussion continue sur la partie de l’article 17 qui a
rapport à la démission des échevins.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - J’ai demandé que la démission des
échevins soit adressée à l’autorité supérieure, soit au gouverneur, soit à la
députation des états, et notifiée au conseil communal.
M. Dubus. -
J’ai demandé la parole pour faire remarquer qu’il n’existe aucune comparaison à
faire entre les démissions des bourgmestres et des échevins. Il est vrai que le
Roi nomme les uns et les autres, mais ce n’est pas de la même manière. Tandis
que nous réservons au pouvoir royal la faculté de révoquer le bourgmestre, nous
avons voulu que les échevins fussent démis de leurs fonctions par la députation
provinciale. La proposition faite par M. le ministre de l’intérieur
actuellement me paraît plus rationnelle qu’elle ne l’était d’abord. Je ne sais
pas même s’il serait nécessaire que la démission des échevins fût adressée à la
députation provinciale, s’il ne serait pas plus simple qu’elle fût adressée au
conseil communal, puisqu’après tout c’est le conseil qui fait la présentation.
On
conçoit qu’il soit nécessaire que le gouvernement connaisse la démission du
bourgmestre, puisqu’il est obligé de choisir son remplaçant dans le conseil,
tandis que le fait seul de la présentation de candidats en remplacement de l’échevin
démissionnaire notifiera au gouvernement qu’il y a eu démission.
M. le président.
- M. le ministre de l’intérieur vient de présenter l’amendement suivant :
« La démission des échevins est adressée à
l’autorité supérieure et notifiée au conseil communal. »
M. Dumortier,
rapporteur. - Ce mot « l’autorité supérieure » est bien vague. Il
faut que l’on désigne quelle sera cette autorité supérieure. Il ne faut pas en
laisser le choix au gouvernement. Il pourrait ainsi fixer telle ou telle
autorité selon son caprice.
Je représenterai en peu de mots ce que j’ai
déjà dit sur le caractère de la nomination des échevins. De qui ces
fonctionnaires municipaux tiennent-ils leur mandat ? De deux ordres de personnes.
Du conseil communal qui les présente, et du Roi qui les nomme.
La nomination royale n’arrive pour ainsi dire
qu’en seconde ligne, parce qu’il se présentera beaucoup de cas où le Roi n’aura
à arrêter son choix que sur une liste composée de deux personnes.
Nous avons dit qu’il était
convenable que la démission des échevins fût adressée au conseil communal, qui
enverra à la députation des états une liste de présentation de candidats pour
la place vacante. De cette manière le gouvernement connaîtra la démission
donnée par l’un des échevins d’une régence. Y a-t-il rien de plus simple que ce
que nous proposons ? La proposition de M. le ministre de l’intérieur aurait
pour but de créer une centralisation tout à fait inutile. Je m’étonne que les
ministres tendent toujours à accroître de plus en plus cette centralisation,
tandis qu’ils viennent chaque jour nous dire qu’ils sont surchargés de besogne,
qu’il serait nécessaire de créer de nouveaux ministères, et que le ministère de
l’intérieur en particulier est assez surchargé de travaux pour que l’on puisse
le diviser en deux départements. Pourquoi venir nous demander d’augmenter
inutilement la masse de vos travaux ? Laissez aux députations des états ceux
qui ressortissent mieux de leurs attributions.
M. de Theux. - L’amendement de M. le
ministre de l’intérieur dit que la démission des échevins doit être acceptée
par l’autorité supérieure, et cependant je lis dans le premier paragraphe que
les conseillers communaux et les échevins se trouvent sur la même ligne. Il y a
contradiction évidente entre l’art. 17 et l’amendement qui vous est proposé.
Il semble résulter du paragraphe premier que
dans tous les cas la démission doit être approuvée par la députation des états.
Il semble donc que la députation des états pourrait refuser son approbation. La
section centrale ne me semble pas avoir atteint ce but.
M.
Verdussen. - Je ne puis assimiler les échevins aux conseillers
communaux. Ceux-là ont, comme les bourgmestres, accepté un mandat du
gouvernement. Il pourrait arriver que la démission simultanée de tous les
échevins désorganisât complètement une municipalité. Il faut que le
gouvernement puisse par la connaissance de ces démissions parer aux
inconvénients qui en résulteraient.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - En présentant l’expression. « l’autorité supérieure, » je n’ai que suivi la rédaction
dia projet du gouvernement. Les échevins ressortissent du pouvoir exécutif et
du conseil communal ; il leur sera libre d’adresser leur démission, soit au
gouverneur, soit à la députation des états. Il est tout simple que celui qui
nomme soit informé que celui qu’il a nommé se retire.
On nous a accusés d’avoir des vues de
centralisation. Nous ne demandons pas que la démission d’un échevin soit
adressée directement au ministre. Tout ce que nous voulons, c’est que le
gouverneur en ait connaissance, et la notification qu’il en fera ne lui donnera
ni plus ni moins de besogne. Ce sont donc véritablement de très petits motifs
que l’on a mis en avant pour s’opposer à une marche rationnelle et régulière.
Je sais bien qu’il ne plaît pas à l’honorable
M. Dumortier que les échevins soient nommés par le gouverneur.
M. Dumortier,
rapporteur. - Ils ne sont pas nommés par le gouverneur.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Mais la chambre en a décidé
ainsi. Nous demandons simplement que celui qui a nommé reçoive notification de
la démission du titulaire. Si l’on trouve l’expression d’autorité supérieure
trop vague, je consens à ce qu’elle soit remplacée par celle-ci : « au
gouverneur ou à la députation provinciale. »
M. le président.
- Voici l’amendement proposé par M.
Verdussen :
« La démission des fonctions d’échevin
doit être adressée à la députation permanente du conseil provincial, et
notifiée au conseil communal ; elle n’a d’effet que 30 jours après cette
notification, à moins que l’acceptation n’ait eu lieu auparavant. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je ne conçois pas cet amendement
; il pourrait donner lieu à de singuliers conflits. Si le gouvernement est
d’accord avec un échevin pour lui donner sa démission, est-ce que la députation
permanente maintiendra cet échevin, malgré le gouvernement et l’échevin
lui-même ? Voilà cependant la portée de cet amendement. Le mien pare à cet inconvénient,
et donne tout pouvoir nécessaire à la députation provinciale.
M. Dubus. -
Je crois avoir bien compris l’amendement de l’honorable M. Verdussen ; mais M.
le ministre de l’intérieur ne me paraît pas l’avoir bien saisi. Vous allez,
dit-il, donner à la députation provinciale le droit de maintenir un échevin
malgré lui, et alors qu’il aura donné sa démission. La disposition proposée par
M. Verdussen est, au contraire, une précaution prise pour empêcher qu’il n’en
soit ainsi. M. le ministre trouve plus rationnel que l’autorité qui a le droit
de nommer, ait celui de donner la démission. Alors, son amendement n’est pas
rationnel. Il propose que le droit de démissionner appartienne tantôt au
gouverneur, tantôt à la députation provinciale. Or, ni l’un ni l’autre n’ont le
droit de nommer les échevins.
Mais M. le ministre propose une autre règle ;
il demande que la démission soit adressée à celui qui a le droit de révoquer
des fonctions d’échevin. En effet, la députation et le gouverneur ont le droit
de démissionner les échevins pour cause déterminée. Mais je ne vois pas le
motif de laisser à l’échevin le choix de deux autorités ; il me paraît, au
contraire, rationnel de prescrire que la démission soit adressée toujours a la
même autorité.
Sous ce rapport l’amendement de,
l’honorable M. Verdussen est préférable ; remarquez que le gouverneur serait
informé de la démission en même temps que la députation, puisqu’il en est le
président, puisque à ce titre il reçoit tous les paquets qui lui sont adressés.
L’amendement de M. Verdussen a cet avantage aussi
qu’il fixe le terme au bout duquel la démission doit être considérée comme
acceptée. Cette disposition est tout en faveur du fonctionnaire qui donne sa
démission et qui ne peut être obligé à continuer ses fonctions indéfiniment
contre son gré.
Il avait d’abord paru plus simple que la
démission fût adressée au conseil communal qui la ferait parvenir à la
députation. Mais les choses marcheront tout aussi vite de la manière proposée.
Dès que le conseil communal aura été informé de la démission d’un échevin, il
procèdera immédiatement à la présentation de candidats parmi lesquels le nouvel
échevin devra être nommé.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - On ne conçois
pas pourquoi j’insiste pour que la démission des échevins soit adressée à tel
fonctionnaire ; je ne conçois pas à mon tour pourquoi on insiste pour qu’il en
soit autrement. Mon amendement concilie évidemment les deux opinions opposées
que l’on a soutenues. Je ne comprends rien, je l’avoue, aux défiances dont il
est l’objet.
M. de Theux. - Je dois rectifier une
erreur échappée à l’honorable M. Dubus.
Il a dit que le droit de donner la démission à un échevin dans des cas
déterminés appartenait au gouverneur. Le gouverneur a seulement le droit de
suspendre. Le droit de démission dans des cas déterminés n’appartient qu’à la
députation provinciale. Au reste ceci n’est pas relatif à la question que nous
traitons ; car là il s’agit de démissions forcées, et dans l’article en
discussion il ne s’agit que de démissions volontaires. Or, les démissions
volontaires doivent être évidemment adressées à l’autorité qui aura nommé.
Je proposerai donc de sous-amender ainsi la proposition
de M. Verdussen :
« La démission des fonctions d’échevin
doit être adressée à l’autorité qui l’aura nommé, et notifiée, etc. »
M.
Dumortier, rapporteur. - Si l’honorable préopinant pense que la
démission volontaire doit être accordée par l’autorité qui a nommé, comment
a-t-il dans la séance d’hier propose un amendement que la chambre a adopté et
d’après lequel la démission forcée dans des cas déterminés est donnée par la
députation provinciale ? Si la députation provinciale peut seule prononcer une
démission forcée, seule aussi, elle peut recevoir une démission volontaire. Je
crois que ceci répond à tout argument. La proposition que l’on fait établirait
dans la loi une véritable confusion d’idées.
M.
de Theux. - Il ne faut pas, comme je l’ai dit, confondre la démission
forcée avec la démission volontaire. Que la démission volontaire soit offerte
par les échevins à l’autorité qui les a nommés, rien n’est plus rationnel, et
il n’y a pas de raison pour qu’elle soit adressée aux autorités auxquelles vous
avez dans des cas déterminés donné le droit de suspension et de démission
forcée à l’égard de ces fonctionnaires.
Plusieurs membres. - La clôture.
M. Dubus.
- L’amendement de M de Theux a été présenté à la fin de la discussion ; il faut
au moins qu’on puise comparer le texte avec les dispositions de la loi déjà
votées. La clôture serait donc prématurée.
- La clôture est mise aux voix et rejetée.
M. de
Theux. - L’honorable M. Dubus a demandé quelle était l’autorité qui
nommait les échevins, et s’il n’y avait pas deux autorités qui feraient cette nomination.
Cela me paraît évident d’après le changement proposé par la section centrale et
adopté par la chambre. Dans le projet du gouvernement il était dit que le Roi
nomme les échevins dans telles communes et le gouverneur dans telles autres ;
la section centrale a modifié cette proposition et a adopté que les échevins
sont nommés par le pouvoir exécutif. Dès lors, la chambre a eu évidemment en
vue d’autoriser la loi à déléguer au gouverneur le droit de nommer des échevins
dans certaines communes, ainsi que cela s’est pratiqué jusqu’à présent.
Il ne faut pas, en effet, messieurs,
que la nomination des échevins soit centralisée ; dans beaucoup de petites
communes, il est important que le gouverneur puisse nommer les échevins ;
c’est- pourquoi je pense qu’il doit y avoir deux nominations, les unes qui
émaneront du Roi, les autres qui émaneront du gouverneur.
M. Dubus. -
L’article 8 porte que les échevins sont nommés par le pouvoir exécutif, de sorte
que cet article laisse dans l’incertitude quelle est l’autorité qui nommera les
échevins. S’il en est ainsi, c’est un nouveau motif qui se joint à ceux qui ont
été invoqués contre l’article. Il faut que la loi détermine quelle est
l’autorité qui nommera les échevins.
Par le pouvoir exécutif, tout le monde, je
crois, a compris que c’était le Roi ; ainsi il ne résulte pas de la disposition
que vous avez adoptée, que le Roi puisse déléguer ce que la loi n’autorise pas
à déléguer. On a dit : Telle attribution appartient au pouvoir exécutif ;
c’est-à-dire telle attribution appartient au gouvernement du Roi. S’il s’agit
d’une nomination, il faut que le gouvernement fasse cette nomination, et je
crois que, d’après l’article que vous avez voté, le Roi devra nommer tous les
échevins. On dit qu’il y a des inconvénients à cela ; j’en vois aussi beaucoup,
mais enfin c’est ce que la chambre a adopté.
Je conçois l’opinion de ceux qui veulent faire
intervenir l’influence du pouvoir exécutif dans une nomination ; mais peut-il
exister une telle centralisation pour une simple acceptation de démission ? Il
s’agit ici uniquement d’une vérification de la part du pouvoir qui reçoit la
démission ; la démission reçue, on n’a qu’à examiner si elle est donnée en
termes clairs, précis, ou en termes ambigus ; si vous centralisez aussi cette
démission, vous faites une chose exorbitante, vous renchérissez sur le système
français en fait de centralisation.
On fait une distinction entre les
petites et les grandes communes, mais dans l’un et l’autre cas la démission est
toujours dans les mêmes termes ; l’autorité qui reçoit la démission n’a qu’à
voir si elle est conçue en des termes assez clairs pour qu’elle doive être
acceptée.
Je vois des garanties suffisantes dans la
députation provinciale pour l’acceptation de la
démission : dès qu’il s’agira de grandes communes, ce pouvoir serait-il
incompétent ? N’entrons point, messieurs, dans un système aussi déraisonnable ;
pour moi, j’appuie la proposition de M.
Verdussen.
M. Devaux. - Je
ne conçois pas véritablement la longueur de la discussion qui depuis des heures
entières se traîne sur ce misérable article.
De quoi s’agit-il ? A entendre les orateurs qui
ont pris la parole 7 ou 8 fois sur l’article, il semblerait qu’il s’agit d’un
pouvoir exorbitant ; eh bien, il ne s’agit que du pouvoir d’accepter une
démission qu’on n’a pas la faculté de refuser.
On a donné à un pouvoir la faculté de nommer le
bourgmestre et les échevins ; une conséquence toute naturelle devrait être de
lui donner aussi la faculté de recevoir la démission des échevins ; cependant
on n’a pas assez de confiance dans ce pouvoir pour adopter ce principe si
simple : que celui qui nomme accepte la démission. On paraît croire qu’il
abuserait de la confiance qu’on lui accorderait, qu’il se rendrait coupable
d’un faux. Car enfin, pour qu’il trahisse cette confiance, il faut qu’il se
rende coupable d’un faux.
Celui qui nomme accepte la démission ; si on a
fait une exception à ce principe à l’égard des membres du conseil, c’est qu’on
ne pouvait assembler les électeurs pour leur faire accepter la démission du
conseiller ; mais à cela près, le principe existe dans toute sa force, et le
Roi qui nomme les échevins doit avoir la faculté de recevoir leur démission.
Je ferai une autre observation. En faisant
ainsi traîner la discussion, outre la perte de temps qui en résulte, il arrive
qu’on introduise des amendements qui disent tout le contraire de ce que doit
porter la loi dans ses dispositions, et qu’ils s’éloignent totalement de son
esprit.
Ainsi
l’esprit de l’article dont nous nous occupons, était de prévenir à l’avenir ce
qui s’est passé à Liège ; maintenant on propose un amendement qui établit la
démission de fait après trente jours de son envoi, de sorte que s’il se
présente une démission telle que celle du sieur Dejaer,
au bout de 30 jours, le conseil de régence pourra dire : La démission est
acceptée, il y a lieu de procéder à une réélection.
Voilà, messieurs, où conduisent ces longues
discussions. Il me semble qu’on doit compter un peu sur le bon sens de la
chambre, et qu’il n’est pas nécessaire de tout dire, d’entrer dans tous les
détails.
M. Dumortier,
rapporteur. - On parle d’éternelles
discussions, on dit qu’on ne conçoit pas qu’on vienne discuter pour si
peu de chose. Il y a pour cela une raison très simple ; c’est que le ministre
ne veut pas démordre de ses propositions. (Je ne discute pas s’il a tort ou
raison.) C’est qu’il s’obstine à ne pas se rallier aux propositions de la
section centrale : si le ministre s’y ralliait les longues discussions dont on
parle n’auraient pas lieu, et tout serait bientôt terminé.
On dit que dans le système que nous défendons,
il y a manque de confiance pour le pouvoir exécutif ; mais je pourrais dire
aussi qu’il y a manque de confiance à l’égard des députations provinciales.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Eh bien, jugeons par le vote.
M.
Dumortier, rapporteur. - Je pourrais dire tout aussi bien que la
députation provinciale mérite toute notre confiance. Ainsi confiance pour
confiance, on n’a pas répondu à la question.
M. Devaux se plaint que les dispositions de la
loi ne se coordonnent pas entre elles. Je répondrai que ce défaut existera
surtout si vous adoptez l’amendement de M. de Theux, qui est en contradiction
avec celui que vous avez adopté hier.
Il s’agit de savoir quel est le pouvoir qui
acceptera la démission des échevins. Hier vous avez admis par un amendement de
M. de Theux que la députation provinciale aurait le choix de révoquer les
échevins : dans le premier cas et dans le second, il y a toujours jugement :
celui qui juge que l’échevin doit être révoqué, doit juger aussi s’il y a lieu
à accepter sa démission.
S’il en est autrement, vous faites en quelque
sorte un habit d’arlequin (Aux voix ! aux
voix !)
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je me rallie au sous-amendement
de M. de Theux pour abréger la discussion.
- Le sous-amendement de M. de Theux est adopté
ainsi que l’amendement de M. Verdussen.
M. Verdussen
propose d’ajouter dans l’article le mot échevin au mot bourgmestre.
- Adopté.
L’article est adopté.
Article 19 (du projet du gouvernement) et article 18 (du projet de la
section centrale)
M. le président.
- « Art. 19 (du projet du gouvernement). - Les membres sortants lors du
renouvellement triennal, ou les démissionnaires, restent en fonctions jusqu’à ce
que les pouvoirs de leurs successeurs aient été vérifiés. »
« Art. 18 (du projet de la section
centrale). - Les membres sortants ou démissionnaires continuent leurs fonctions
jusqu’à ce que les pouvoirs de leurs successeurs aient été vérifiés. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je demanderai si on peut
appliquer l’expression de sortant à un homme qui serait frappé de la perte des
droits civiques. Il est évident que l’article 18 de la section centrale ne peut
être admis. La rédaction proposée par le gouvernement vaut mieux. Un homme
dépouillé de ses droits par un jugement correctionnel ou par un arrêt de cour
d’assises ne peut continuer provisoirement ses fonctions.
M. Dubus.
- L’observation faite par le ministre est juste ; mais moi je vais plus loin
encore. Je crois que l’art. 18 tout entier doit être supprimé ; en conséquence
du vote émis sur l’article précédent, vous venez de décider que la démission
aura ses effets un mois après qu’elle aura été donnée ; pouvez-vous dire
maintenant qu’elle n’aura ses effets que lorsque les pouvoirs du remplaçant
auront été vérifiés ? Il faudrait que l’article 18 fût rédigé autrement pour
être admis ; il faudrait par exemple dire : « Les membres sortants lors du
renouvellement triennal ou les démissionnaires continuent leurs fonctions
jusqu’à ce que les pouvoirs de leurs successeurs aient été vérifiés. »
M. de Theux. - Pour éviter
l’inconvénient signalé par M. Dubus, il faudrait commencer l’article de cette
manière :
« Les conseillers sortants lors du
renouvellement triennal… »
M. Verdussen.
- Le mot démissionnaire s’applique aux conseillers et aux échevins.
- La proposition de M. de Theux est adoptée.
Les mots : « lors du renouvellement
triennal » sont admis.
L’article ainsi modifié est adopté.
Articles 20 et 21(du projet du gouvernement) et article 19 (du projet de
la section centrale)
M. le président.
- « Art. 21 (du projet du gouvernement).
En cas de remplacement avant l’époque de l’élection triennale, les
conseillers élus prennent au tableau le rang de ceux qu’ils remplacent, et ne
peuvent rester en fonctions que jusqu’à l’époque de la dite élection. »
« Art. 20 (du projet du gouvernement). -
Lorsqu’une place de conseiller vient à vaquer par décès, démission, perte de
qualités requises ou autre cause, il est pourvu à son remplacement à la plus
prochaine réunion des électeurs. »
La section centrale prépose de réunir ces deux
articles en un seul de la manière suivante :
« Art. 19
(du projet de la section centrale). Lorsqu’une place de membre du conseil vient
à vaquer, il y est pourvu à la plus prochaine réunion des électeurs.
« Le bourgmestre, l’échevin ou le
conseiller nommé ou élu en remplacement, achève le terme de celui qu’il
remplace. »
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je préfère la rédaction du projet
du gouvernement. L’art. 21 est très clair ; il faut d’ailleurs mettre le mot
conseiller.
M. Dumortier,
rapporteur. - Nous avons introduit dans le second paragraphe de
l’article 19 une disposition importante. L’article du gouvernement ne stipulait
que pour les conseillers élus hors du renouvellement triennal ; il ne stipulait
rien pour les bourgmestres et échevins : comme ceux-ci sont nommés pour 6
années, il en serait résulté que celui qui serait appelé à ces fonctions un an
après les élections générales resterait 6 années à dater de l’époque de sa
nomination, ce qui occasionnerait des élections partielles après des élections
générales. Il ne faut pas qu’il y ait des élections tous les ans ; il faut
qu’il y en ait autant que possible à des époques fixes, et cela dans l’intérêt
du gouvernement et dans l’intérêt des électeurs.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je ne m’oppose pas à l’adoption
de la disposition de la section centrale, mais sauf rédaction.
- La disposition est adoptée sauf rédaction.
Article 22 (du projet du gouvernement)
M. le président.
- « Art. 22 (du projet du gouvernement). La dissolution des conseils
municipaux peut être prononcée par le Roi.
« L’arrêté de dissolution est motivé et
contient l’époque de la réélection qui doit avoir lieu dans les trois mois.
« Le Roi, ou le gouverneur en son nom,
désigne sur la liste des électeurs de la commune les citoyens qui exercent
provisoirement les fonctions d’échevin. »
La section centrale propose la suppression.
Plusieurs membres. - A demain ! à
demain ! La question est sérieuse.
M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Je ne sais pas si quelques
membres se proposent de prendre la parole en faveur de l’article du gouvernement,
mais je dois déclarer que l’intention du gouvernement n’est pas de soutenir cet
article dans la discussion, bien qu’il ait de puissants motifs pour en demander
l’adoption. Nous pensons qu’à une époque encore si rapprochée de celle où le
ministre a vu échouer devant la chambre une proposition semblable, il y avait
présomption de sa part à vouloir lutter contre l’opinion de la majorité de
l’assemblée. Sous ce rapport, et sans approuver la proposition de la section
centrale, nous ne combattrons pas cette proposition.
- La suppression de l’article 22, mise aux
voix, est adoptée.
Articles 23 et 24 (du projet du gouvernement)
M. le président.
- « Art. 23. Si la dissolution du conseil est prononcée, et si dans le nombre
de ses actes, il s’en trouve qui soient punissables d’après les lois en
vigueur, ceux des membres du conseil qui y auront participé sciemment pourront
être poursuivis.
« Art. 24. Immédiatement après
l’installation des conseils, ou lorsqu’en vertu de la dissolution prononcée par
le Roi, un conseil aura été renouvelé en entier, il sera décidé par la voie du
sort à laquelle des séries appartiendra chaque membre ; la série la moins forte
sortira la première. »
- Sur la proposition de la section centrale ces
deux articles sont supprimés en conséquence du vote sur l’art. 22.
La discussion est ensuite renvoyée à demain.
La séance est levée à quatre heures et demie.