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Chambre des représentants de Belgique
Séance du lundi 12 mai 1834
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2 Projet de loi relatif à l’organisation des provinces. Discussion des articles.
a) Dispositions financières. Dépenses à supporter par les provinces, notamment frais des indigents (Verdussen, Lebeau, de Muelenaere), frais des séances du conseil et/ou indemnités aux conseillers provinciaux (de Theux, Lebeau, Eloy de Burdinne, Ernst, Jullien, de Muelenaere, de Theux, Dumortier, Desmanet de Biesme, de Theux), instruction primaire et moyenne (de Robaulx, Lebeau), enfants trouvés (de Theux), grosses réparations aux églises cathédrales, aux palais épiscopaux et aux séminaires (de Theux, Pirson, Dumortier), traitements des commissaires d’arrondissement (Pirson, Lebeau, Pirson, Dumortier, de Brouckere), frais de casernement de la gendarmerie (d’Hoffschmidt, de Theux, Dumortier, Jullien, d’Hoffschmidt, Dumortier, de Robaulx, Fallon, A. Rodenbach, de Muelenaere, d’Hoffschmidt, de Theux, Dumortier, de Brouckere, Lebeau, d’Hoffschmidt, Smits, Dumortier, de Brouckere, Smits, Lardinois)
b) Autres compétences du conseil : Avis sur les travaux d’infrastructure publique de l’Etat (Jullien, de Theux, Jullien) et sur la classification des routes (Dumortier), répartition par le conseil de la part des communes dans les dépenses d’infrastructure publique (Dumortier, d’Huart, Dumortier, de Theux, Jullien, de Theux, Fallon, Dumortier, Desmanet de Biesme, de Theux, Lebeau, Jullien, Fallon, de Theux, Desmanet de Biesme, Milcamps, Lebeau, Milcamps, Dumortier, Fallon, de Theux, Dumortier, Jullien, Lebeau), avis sur les limites administratives des communes (Lebeau, Fallon, de Theux), droit de pétition (Fallon, Dumortier, d’Huart, de Theux, Fallon)
(Moniteur belge n°133, du 13 mai 1834)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à
midi et demi.
M. de Renesse fait
l’appel nominal.
M. H. Dellafaille
donne lecture du procès-verbal de la séance précédente.
- Le procès-verbal est
adopté.
M. de Renesse fait
savoir que les pièces suivantes ont été adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur C. de Leemans, notaire, signale les inconvénients qui
résulteraient de la compatibilité des fonctions de notaire et de bourgmestre ou
échevin, si elle était adoptée. »
- Renvoyée à la section centrale
chargée de l’examen du projet de loi communale.
_______________
« Plusieurs
propriétaires de la province de Liège s’élèvent contre les réclamations qui ont
été faites au sujet de la légalité des opérations cadastrales. »
- Renvoyée à la
commission chargée d’examiner la situation des opérations cadastrales.
_______________
« La régence de Bottelaere demande que cette commune soit érigée en
chef-lieu du canton d’Oosterzeele. »
- Renvoyée à la
commission chargée de l’examen du projet de loi sur la circonscription des
justices de paix.
_______________
« L’avocat van den Bosche, conseiller de régence à Alost, demande que, dans le
projet de circonscription judiciaire, cette ville soit érigée en chef-lieu
d’arrondissement judiciaire. »
- Renvoyée à la commission
chargée d’examiner les propositions de MM. Dewitte et Desmet.
PROJET DE LOI RELATIF A
L’ORGANISATION DES PROVINCES
Discussion des articles
Titre
VI. - Du conseil provincial
Chapitre
II - Des attributions du conseil
Article 66, § 11 à 13 (du projet du gouvernement)
M. le président
donne lecture du numéro 11 de l’article 66 du gouvernement.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - J’ai
l’honneur de prévenir la chambre que mon collègue, le ministre de l’intérieur,
est légèrement indisposé, et que je suis chargé de le remplacer dans cette
discussion. Comme je ne suis pas aussi bien préparé que lui, j’aurai besoin de
l’indulgence de la chambre.
M. le président. -
Le paragraphe en discussion est ainsi conçu :
« La moitié des
frais des tables décennales de l’état civil. »
- Ce numéro, ainsi que
les deux suivants, (12 et 13) sont adoptés sans donner lieu à aucun débat.
« Les dettes de la
province liquidées et exigibles, et celles résultant des condamnations judiciaires
à sa charge. »
« Les pensions aux
anciens employés de la province, conformément au règlement adopté par le
conseil. »
Article 66, § 14 (du projet du gouvernement)
M. le président. -
« 14° Le traitement des aliénés indigents et les frais d’entretien des
indigents retenus dans les dépôts de mendicité, lorsqu’il sera reconnu par le
conseil que les communes n’ont pas le moyen d’y pourvoir. »
M. Verdussen. - Il
faudrait faire concorder la loi d’août 1833 sur les dépôts de mendicité, avec
le paragraphe en discussion.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Je
crois que la disposition actuelle peut se concilier avec la loi d’août 1833 ;
cette disposition est fondamentale ; si des modifications doivent être faites à
la loi de 1833, la disposition dont il s’agit se trouvera naturellement
modifiée.
M. de Muelenaere. -
Le paragraphe est entièrement conforme à la loi de 1833. (Aux voix ! aux voix !)
- Le paragraphe est
adopté.
Article 66, § 16
(du projet du gouvernement)
M. le président. -
« 16° Les frais afférents aux séances. »
La section centrale
propose de mettre : « Les frais relatifs aux séances du conseil. »
M. de Theux, rapporteur.
- Messieurs, d’après la décision de la chambre qui a pensé qu’une indemnité
devait être accordée aux membres du conseil qui n’habitent pas le chef-lieu, je
crois qu’il conviendrait d’ajouter au paragraphe : « et l’indemnité
allouée aux conseillers. » (Appuyé ! appuyé !)
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Je
crois qu’il est d’autant plus nécessaire d’introduire dans la loi l’amendement
proposé par M. de Theux, que l’article tel qu’il est rédigé l’a été dans la
prévision qu’il ne serait pas alloué d’indemnité aux membres du conseil
provincial.
L’article du
gouvernement n’a reçu qu’une modification de rédaction. Je pense qu’il ne peut
exister aucune espèce de difficulté sur l’adoption de l’amendement que je me
proposais moi-même de soumettre à la chambre.
M. Eloy de Burdinne.
- Il me paraît que la dépense dont il est question devrait être mise à la
charge de l’Etat. (Non ! non !)
M. Ernst. - La
dépense est évidemment une charge de la province ; car elle varie suivant
l’intérêt de la province.
M. Jullien. - C’est
une chose déjà décidée.
M. de Muelenaere. -
D’après la loi, les séances du conseil provincial seront publiques ; or dans la
plupart des provinces il n’existe pas de local pour la publicité de ces
séances. Des frais seront indispensables pour en disposer.
Ces frais seront-ils à
la charge de la province ou de la commune ? Je crois que la chambre pensera que
ce sont des frais provinciaux, mais il faudrait en faire mention dans la loi.
M. de Theux, rapporteur.
- La section centrale a prévu cette difficulté. Elle a effectivement mis la
dépense à la charge de la province. D’après l’art. 67 amendé par la section
centrale, l’entretien de l’hôtel du conseil provincial sera mis à la charge de
la province ; d’après les numéros 7 et 8 de l’article en discussion présenté
par la section centrale, il ne peut rester aucun doute à cet égard.
M. Dumortier. - Le
numéro 7 de l’article porte comme une charge provinciale le loyer, les
contributions, l’entretien des édifices et bâtiments provinciaux, ou à l’usage
de la province ; il est incontestable que la salle des séances du conseil est
comprise dans cette disposition. Tout le monde comprend que les frais de
construction du local dans lequel siégera le conseil provincial sont des frais
à la charge de la province.
M. Desmanet de Biesme.
- Dans la loi, l’entretien de l’hôtel du gouverneur de la province est à la
charge de l’Etat ; la salle des séances du conseil peut faire partie de cet
hôtel ; il semblerait donc que les frais d’entretien devraient être également à
la charge de l’Etat.
M. de Theux, rapporteur.
- Lorsque le conseil provincial siégera dans une des salles de l’hôtel du
gouverneur, il n’y aura plus qu’à faire disposer cette salle pour la tenue du
conseil, et tout sera fini.
- L’amendement de M. de
Theux est mis aux voix et adopté.
Article 62, § 13
(du projet de la section centrale)
M. le président. -
« 13° (de la section centrale) Les secours à accorder aux communes pour
l’instruction primaire et moyenne, pour les grosses réparations des édifices
communaux. »
M. de Robaulx. - Je
demanderai si le gouvernement cessera d’accorder des secours aux communes pour
l’instruction primaire.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il n’est rien préjugé à cet égard
par la disposition de la section centrale.
- Le paragraphe est
adopté.
Article 62, § 14
(du projet de la section centrale)
M. le président. -
« 14°. Les frais d’entretien des enfants trouvés, conjointement avec les
établissements de bienfaisance et les communes, dans la proportion à déterminer
par la loi. »
M. de Theux, rapporteur.
- D’après la loi relative aux enfants trouvés, je crois qu’il faudrait rédiger
le paragraphe de la manière suivante : « Les frais d’entretien des enfants
trouvés, dans la proportion déterminée par la loi. » (Appuyé ! appuyé !)
- La nouvelle rédaction
proposée par M. de Theux est mise aux voix et adoptée ; elle remplace le n°14.
Article 66, § 17 et 18 (du projet du gouvernement)
- Les deux derniers
paragraphes suivants sont adoptés sans discussion :
« 17° Les frais des
collèges d’administration des prisons, autres que les grandes prisons de l’Etat
; »
« 18° Les fonds
destinés à faire face aux dépenses accidentelles ou imprévues de la
province. »
Article 66, § 9
(du projet du gouvernement)
M. le président
donne lecture de la nouvelle rédaction de la section centrale sur le paragraphe
relatif aux églises cathédrales.
Cette disposition est
ainsi conçue :
« Les dépenses
relatives aux églises cathédrales, aux palais épiscopaux et aux séminaires
diocésains, conformément aux décrets des 18 germinal an XI et 30 décembre
1809. »
M. de Theux a la parole
pour développer cette rédaction.
M. de Theux, rapporteur.
- Messieurs, la section centrale s’est occupée de l’examen de l’amendement qui
lui avait été renvoyé dans la dernière séance. Après avoir examiné toutes les
dispositions existantes sur la matière, la section centrale a pensé qu’elle ne
pouvait mieux faire que d’adopter la rédaction qui vous est soumise ; elle a
conservé par cette rédaction ce qui avait été consacré par l’usage, d’après les
décrets des 18 germinal an XI et 30 décembre 1809.
Les dépenses dont il
s’agit étaient à la charge des provinces : toutefois, à diverses occasions, il
a été accordé des subsides pour ces sortes de dépenses. Le principe des
subsides n’a point été établi dans les décrets ; en conséquence la section
centrale n’a pas jugé à propos d’exprimer ce principe dans l’article. Les
choses restent dans le même état, et il n’est apporté aucune difficulté à ce
que le gouvernement accorde des subsides lorsqu’il y aura lien d’en accorder.
Le décret du 18 germinal
an XI porte :
« Les
conseils-généraux de département proposeront les sommes qu’ils croiront
convenable d’appliquer : 1° aux acquisitions, locations, réparations et
ameublement des maisons épiscopales ; 2° à l’entretien et réparation des
églises cathédrales ; 3°, etc. »
La loi du 30 décembre
1809 contient les dispositions suivantes :
« Art. 106. Les
départements compris dans un diocèse sont tenus, envers la fabrique de la
cathédrale, aux mêmes obligations que les communes envers leurs fabriques
paroissiales.
« Art. 107. Lorsqu’il
surviendra de grosses réparations ou des reconstructions à faire aux églises
cathédrales, aux palais épiscopaux et aux séminaires diocésains, l’évêque en
donnera l’avis officiel au préfet du département dans lequel est le chef-lieu
de l’évêché ; il donnera en même temps un état sommaire des revenus et des
dépenses de sa fabrique, en faisant sa déclaration des revenus qui restent
libres après la dépense ordinaire de la célébration du culte. »
L’art. 111 porte que le
département dans lequel l’édifice est situé doit payer un dixième en sus dans
la dépense.
Dans
la dernière séance, on a indiqué l’intention de mettre à la charge des communes
dans lesquelles les établissements dont il est question sont situés, une partie
des réparations de ces établissements. La section centrale a repoussé ce
système ; elle a pensé qu’il s’agissait de consacrer de nouveau le principe que
vous avez posé relativement aux dépenses des tribunaux.
Tels sont les motifs qui
ont détermine la section centrale dans la proposition dont vous êtes appelés à
vous occuper ; cette disposition a été adoptée à la grande majorité de ses
membres. (Très bien !)
M. Pirson. - Je
demande pourquoi on établit une différence entre les frais de réparation des
édifices épiscopaux, et les frais de réparation des cours ; ces derniers ont
été mis à la charge de l’Etat, et on s’est déterminé à cette mesure pour éviter
les difficultés qui pouvaient surgir entre les provinces ; je demande pourquoi
on a suivi un principe si différent ?
Il faut être conséquents
avec vous-mêmes : vous avez décidé que les frais de réparation des édifices qui
appartiennent aux cours sont mis à la charge de l’Etat. Il devait en être de
même à l’égard des édifices épiscopaux.
Les
frais du palais national sont payés par l’Etat ; cependant cet établissement
procure beaucoup d’avantages à la ville, et on aurait pu les faire payer par
Bruxelles et l’Etat ; cependant vous ne l’avez pas voulu, et vous n’avez établi
aucune base de proportion dans la dépense ; c’était le même principe qui devait
être suivi.
J’ajouterai une dernière
considération, c’est que d’après la constitution les frais du culte sont à la
charge de l’Etat, et que les frais de réparation des édifices épiscopaux
peuvent être considérés comme faisant partie des frais du culte.
M. Dumortier. -
Messieurs, il s’agit d’une question purement financière ; il s’agit de savoir
quel budget supportera la dépense relative aux réparations des édifices
épiscopaux.
Que ce soit l’Etat, la
province ou la commune, cela importe peu pour le contribuable ; car lorsque les
réparations seront nécessaires, il faudra qu’elles soient faites. Ce dont nous
devons nous occuper, c’est de coordonner les charges avec les ressources, c’est
de faire que le budget de l’Etat ne soit point trop chargé, qu’il ne soit point
impayable, alors que les provinces auraient pour ainsi dire leurs coudées
franches.
Dans la section centrale
j’ai voté pour le maintien de ce qui existe, c’est-à-dire, pour que la dépense
dont il s’agit soit exclusivement une charge provinciale.
Les provinces feront
faire les réparations d’une manière plus économique que l’Etat ; elles ne
feront rien exécuter avec luxe. Mais pour moi, je n’ai pas besoin de luxe ; je
veux seulement qu’on maintienne, qu’on conserve ce qui existe. Si des
événements particuliers nécessitaient des dépenses particulières qui seraient
au-dessus des ressources de la province, vous seriez les premiers, messieurs, à
voter l’allocation réclamée pour ne pas laisser détruire l’édifice qui aurait
besoin de réparations. (Assentiment.)
Les églises cathédrales font partie des beaux-arts, et elles sont la gloire de
notre pays. La cathédrale d’Anvers dans le genre gothique, la cathédrale de
Tournay dans le genre lombard, sont les plus beaux monuments qui existent ; ils
font l’objet de l’admiration de tous les étrangers.
Quant à la question de
savoir si les communes doivent intervenir dans la dépense, je réponds
négativement. Il y a peu de jours, vous avez grevé les communes d’une charge
très forte en établissant le principe que la dépense relative à l’entretien des
enfants trouvés serait supportée moitié par la province, moitié par la commune.
Vous avez dégrevé ainsi la province et grevé la commune : faut-il encore une
fois améliorer la situation de la province au détriment de la commune ? évidemment, il ne peut en être ainsi, car la commune serait
grevée au-dessus de ses ressources.
Les administrations
provinciales sont dans un état prospère. J’ai fait partie de ces
administrations ; j’ai siégé dans le conseil de la province du Hainaut ; je
puis vous donner l’assurance qu’il n’y a pas de budget qui puisse plus
facilement faire face aux dépenses que le budget provincial.
Le budget de l’Etat, au
contraire, est fortement chargé, surtout si les 24 articles sont mis à
exécution ; pour moi, je désire qu’il n’en soit pas ainsi et, à cet égard, mes
opinions sont bien connues. Quoi qu’il en soit enfin, nous devons considérer
les 24 articles comme devant être mis à exécution. Le budget de l’Etat
s’élèvera de 90 à 95 millions ; dans cette situation nous ne devons pas
dégrever les provinces pour augmenter les charges du trésor. (Adhésion.)
- L’amendement de M. de
Theux est mis aux voix et adopté.
L’ensemble de l’art. 66
est également adopté.
Article 63 (du projet de la section centrale) et 67
(du projet du gouvernement)
M. le président. -
La discussion est ouverte sur l’article 67 du projet du gouvernement qui
correspond à l’article 63 de la section centrale.
- La division par paragraphes
est demandée et accueillie.
Les numéros 1, 2, 3 et
4, sont successivement mis aux voix et adoptés. Ils sont ainsi conçus :
« Sont spécialement
à la charge de l’Etat :
« 1° Le traitement et
les frais de route du gouverneur et de la députation du conseil ; »
« 2° Le traitement
du greffier provincial ; »
« 3° Le traitement
des employés et les frais de bureau du gouvernement provincial ;
« 4° Le loyer et
l’entretien de l’hôtel du gouvernement provincial, l’entretien et le
renouvellement de son mobilier. »
M. le président. -
La discussion est ouverte sur le n°5, rédigé en ces termes :
« Les traitements
et abonnements des commissaires d’arrondissement. »
La discussion est
ouverte sur le paragraphe.
M. Pirson. - Je
crois qu’il serait plus convenable d’ajourner la discussion de ce paragraphe
jusqu’à ce que la chambre ait pris une décision à l’égard des commissaires
d’arrondissement. Je remarque en outre que, dans la loi que nous a présentée M.
le ministre sur la circonscription des justices de paix, il est question dans
ce projet de créer des commissaires de canton à la nomination du gouvernement.
Il est possible que cette innovation soit admise. N’y aura-t-il pas empiétement
sur les fonctions de commissaire de district ? Par qui ces commissaires
seront-ils rétribués ? Je voudrais bien que M. le ministre de la justice
s’expliquât à cet égard. Dans tous les cas, je conclus à l’ajournement de la
discussion du paragraphe 5.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) -
Quoique je pense que l’opinion de la chambre soit déjà formée à l’égard du
maintien des commissaires d’arrondissement, je ne vois aucun inconvénient à ce
que l’ajournement demandé par l’honorable M. Pirson soit accueilli.
Quant aux commissaires
auxquels l’honorable membre a fait allusion, ce ne sont pas des délégués de
l’administration, ce sont des commissaires de police. Il paraîtrait naturel
qu’ils fussent à la fois à la charge de l’Etat et de la commune. Le silence de
la loi ne préjuge en rien sur ce que vous déciderez dans les questions qui
pourraient se présenter ultérieurement. Les désignations portées dans l’article
63 ne sont pas exclusives. Si plus tard il vous semble convenable de porter à
la charge soit de l’Etat, soit de la commune, soit enfin de la province, une
dépense quelconque, les dispositions de la loi provinciale ne pourront y former
aucun obstacle. Il n’y a donc pas lieu de s’occuper actuellement des
commissaires. Pour ce qui regarde les commissaires d’arrondissement, je le
répète, bien que je croie l’opinion générale de la chambre favorable à leur
conservation, je ne m’oppose pas à ce que l’ajournement du paragraphe 5 soit
admis.
M. Pirson. -
Répondant à M. le ministre de la justice, je déclare savoir bien que les
commissaires de canton ne seront pas en effet les remplaçants des commissaires
de district. Mais il y a cette question à examiner. Les commissaires des
cantons feront auprès des juges de paix les réquisitions qui, actuellement,
sont dans les attributions des bourgmestres des communes. Ainsi un
fonctionnaire de l’ordre administratif, qui remplit aujourd’hui en certains cas
des fonctions judiciaires, résignera l’une de ses attributions
à un agent du gouvernement. Si M. le ministre de la justice n’a eu en vue que
de créer des substituts de procureurs du Roi, il est fort possible que son
projet échoue devant cette assemblée. Je prétends donc que puisque les
commissaires des cantons auront un pouvoir administratif conféré jusqu’à ce
jour aux bourgmestres, il y a analogie entre leurs fonctions et celles des
commissaires d’arrondissement, De cette manière il se présente une question
nouvelle à examiner, et nous ne pouvons voter un paragraphe qui consacre le
mode de paiement du traitement d’un ordre de fonctionnaires dont la
conservation est problématique.
M. Dumortier. - Il
me semble, messieurs, que nous pouvons voter le paragraphe actuellement en
discussion, sauf à laisser intacte la question du maintien des commissaires de
district, sans préjudice de la manière dont vous croirez devoir la résoudre.
M. de Brouckere. -
J’allais faire l’observation que vient de présenter l’honorable M.
Dumortier. Si plus tard nous n’admettions pas les fonctions de
commissaire d’arrondissement dans l’ordre administratif provincial, le
paragraphe 5 tomberait de lui-même.
-
Le paragraphe 5 est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe 6, ainsi
conçu : « Les frais concernant la milice et ceux des commissions
médicales », est mis aux voix et adopté.
Le paragraphe 7, ainsi
conçu : « Les frais de collèges d’administration des prisons, l’entretien
des bâtiments affectés aux prisons et maisons de dépôt, autres que les salles
de police municipale », devenant sans objet par suite d’une décision
antérieure de la chambre, est supprimé.
M. le président. -
La discussion est ouverte sur le paragraphe 8, ainsi conçu :
« Les frais de
casernement de la gendarmerie. »
M. d’Hoffschmidt. -
Je prierai M. le rapporteur de la section centrale de vouloir bien me donner
une explication sur ce paragraphe. Je lis dans le rapport de la section centrale
:
« La
section centrale l’a adopté provisoirement et renvoyé aux dispositions
transitoires, en attendant que la loi sur la gendarmerie y statue. »
En effet l’art. 127 porte :
« En attendant la
loi sur l’organisation de la gendarmerie, il n’est rien innové au mode de
supporter les frais de casernement. »
La section centrale n’a
donc pas adopté la proposition du gouvernement. Je désirerais dans ce cas
connaître les motifs qui ont déterminé cette divergence d’opinions.
M. de Theux, rapporteur.
- Il est évident que la section centrale n’a pas adopté l’opinion du
gouvernement, puisqu’elle n’a maintenu les choses sur le pied actuel que
transitoirement, c’est-à-dire, jusqu’à l’adoption de la loi sur l’organisation
de la gendarmerie.
M. d’Hoffschmidt. - Je demande que les frais de
casernement de la gendarmerie soient portés à la charge de l’Etat. L’expérience
a prouvé que depuis que le budget communal supporte cette dépense, le service
du matériel se fait très mal. Les bourgmestres des différentes communes d’un
canton devraient s’assembler au chef-lieu pour déterminer la quote-part de
chacune d’elles dans les frais de casernement. Cette réunion n’a presque jamais
lieu. C’est le bourgmestre du chef-lieu cantonal qui compose seul le budget
communal et plus tard les administrations réclament contre la distribution
qu’il a faite de son autorité privée. Les literies et autres objets de
casernement sont très mal entretenus. Il arrive sans cesse des plaintes à ce
sujet aux autorités.
Je
ne vois pas pourquoi tous les frais occasionnés par la gendarmerie ne seraient
pas mis à la charge de l’Etat. La gendarmerie est instituée pour veiller à la
sûreté du pays tout entier. Le seul motif que la section centrale nous donne
pour conserver la législation actuelle, c’est qu’il convient d’attendre la loi
sur l’organisation de la gendarmerie. Je ne sache pas qu’il se soit élevé,
jusqu’à ce jour, des plaintes sur cette partie de la force publique. Il me
semble que ce service marche très bien. La loi sur la gendarmerie est donc une
des moins pressantes. Elle ne doit venir qu’après qu’une multitude d’autres
beaucoup plus urgentes auront été discutées.
Tels sont les motifs qui
me font désirer que l’on statue immédiatement sur la question de savoir qui, de
la commune ou de l’Etat, devra payer les frais de casernement de la
gendarmerie.
M. Dumortier. -
L’honorable M. d’Hoffschmidt a demandé quels étaient les principes de la
section centrale pour faire du numéro en question un article transitoire. Il me
sera facile de lui répondre. Nous avons admis en principe de mettre à la charge
des communes toutes les dépenses qui sont du ressort de la famille politique ;
à la charge de la province, toutes celles qu’entraîne la réunion de ces
familles diverses ; enfin à la charge de l’Etat, les dépenses du gouvernement
proprement dit. Il s’est cependant trouvé certaines dépenses qui, réparties sur
ces différentes branches du corps politique, se feraient avec plus d’économie
si elles étaient particulièrement affectées à l’une d’elles ; et comme en
définitive elles produisent le même résultat, nous n’avons pas hésité à faire
de ces sortes de dépenses des charges spécialement provinciales on communales.
C’est ainsi que nous avons raisonné quand il s’est agi des menues réparations
des locaux occupés par les cours et tribunaux. La dépense actuelle rentre dans
la même catégorie. Qu’est-ce que la gendarmerie ? C’est un corps placé par le
gouvernement à la disposition des communes. Les communes peuvent donc
intervenir pour une quote-part plus ou moins grande dans les frais de leur
entretien. Si vous intervertissez ce système, il faudra que l’Etat achète ou
loue pour le casernement des gendarmes dans le royaume la multitude de locaux
possédés ou loués par les communes pour leur usage. Les
constructions à faire seront beaucoup plus frayeuses que si on en laissait le
soin à chaque localité. On pourrait citer des milliers d’exemples qui prouvent
que les provinces et les communes apportent dans leurs constructions une
économie évaluée à un tiers de la dépense que ferait le gouvernement. Si la
proposition de l’honorable M. d’Hoffschmidt était adoptée, il s’ensuivrait que
l’Etat devrait élever partout de petites casernes, tandis que l’on se contente
actuellement des bâtiments ne possèdent les différentes communes.
M. d’Hoffschmidt a dit
que nous pouvions nous passer d’une loi sur la gendarmerie. Mais il oublie que
l’obligation de réorganiser ce corps nous est imposé
par l’article 120 de la constitution. Vous voyez donc que la question n’est pas
sans difficulté, et la section centrale n’a pas cru pouvoir la trancher par un
article de la loi provinciale.
M. Jullien. -
Puisqu’il s’agissait de rendre à chacun les dépenses qu’il lui appartient de
faire, c’était le cas de mettre à la charge de l’Etat les dépenses de la
gendarmerie. On a toujours réclamé contre l’impôt supporté par les communes pour
le casernement de ce corps. La gendarmerie fait partie de la force publique.
Les individus qui la composent sont officiers de la police judiciaire comme les
juges de paix ; ils sont placés sur la même ligne que tous les agents qui
contribuent à la sûreté publique, et qui sont rétribués par l’Etat. Or, je vous
demande de quel droit mettrait-on à la charge des communes la dépense
qu’entraîne leur casernement. On dit qu’en définitive ce sont les contribuables
qui paient. Soit, mais il serait à désirer que les dépenses fussent classées
d’une manière rationnelle dans les divers budgets, selon que l’intérêt général
ou que les localités l’exigent. J’appuierai la proposition de l’honorable M.
d’Hoffschmidt.
M. d’Hoffschmidt. - L’honorable M. Dumortier a dit
que les dépenses de construction entreprises par les communes se font beaucoup
plus économiquement. Je crois qu’il se trompe. Depuis que le gouvernement a
admis le système des adjudications, il y de l’économie partout. Il mettrait en
adjudication le logement des gendarmes et le mobilier nécessaire pour ce
logement. Ces adjudications seraient faites par l’entremise de l’autorité
militaire avec la plus grande facilite.
Je le répète, les
gendarmes sont très mal dans leur casernement. On ne peut forcer les
administrations communales à réformer ce mauvais système. L’honorable M.
Dumortier a dit aussi que la gendarmerie faisait la police des communes ; mais,
messieurs, cette police ne se rattache-t-elle pas à l’intérêt général,
puisqu’elle est faite dans l’intérêt de tous, puisque sans elle l’ordre social
serait complètement troublé ?
L’honorable M. Dumortier
a dit de plus que l’organisation de la gendarmerie devait faire l’objet d’une
loi. Je sais que l’article 120 de la constitution nous en impose l’obligation.
Mais comme cette loi n’est nullement urgente et que par conséquent nous ne
l’aurons que dans 5 à 6 ans, il est nécessaire de déterminer dès à présent le
point sur lequel j’appelle l’attention de la chambre.
M. Dumortier. - Un
honorable préopinant a demandé de quel droit on ferait payer par les communes
les frais de casernement d’un corps employé par le gouvernement. La raison en
est simple. La gendarmerie n’est pas un corps exclusivement à la disposition de
l’administration centrale, c’est un corps mixte. Eh bien, il est de toute
justice que, servant à la fois au gouvernement et à la commune, il soit payé
par l’un et par l’autre. Que l’Etat paie le traitement des gendarmes, et que la
commune leur fournisse le logement. Qu’arrivera-t-il, si vous supprimez cette
dépense évidemment communale ? Il en résultera que vous grèverez inutilement le
budget. Il existe actuellement des bâtiments affectés au casernement de la
gendarmerie. Vous devez consacrer au budget de l’Etat, pour l’achat et la
location de ces bâtiments, des sommes considérables. Il est possible que les
gendarmes se plaignent. Leurs casernes ne sont pas meublées brillamment. J’en
sais quelque chose, car j’ai logé dans l’une d’elles sous le roi Guillaume. (On rit.) Mais enfin les locaux actuels
suffisent.
Il est inutile d’ajouter
au budget de l’Etat une dépense nouvelle dont il est difficile de calculer la
portée. Car enfin elle peut arriver à des millions.
Une voix. - Ah ! ah
!
M. Dumortier. - Ne
dites pas : Ah ! Songez qu’il faudra une caserne pour chacune des brigades
disséminées dans les cantons du royaume. Et je ne sais pas si les adversaires
du système pourraient nous présenter l’évaluation des frais qu’entraînerait
l’adoption du leur.
Je me résume : la
section centrale a pensé que dans une dépense mixte, comme l’est celle de la
gendarmerie, il convenait que le gouvernement payât les traitements de ce
corps, et que les communes pourvussent au casernement des brigades disséminées
dans tous les cantons du royaume.
M. de Robaulx. - Je
ne puis partager l’opinion émise par M. Dumortier en ce qui concerne la
gendarmerie. Il la considère comme une troupe mixte parce qu’elle est sujette
aux réquisitions des autorités locales ; mais je ne sache pas qu’il y ait une
seule troupe qui ne soit sujette à de tels réquisitoires. Ainsi la garnison de
Bruxelles peut être requise par l’autorité municipale, même avant la
réquisition de la gendarmerie ; cependant la garnison de Bruxelles n’est pas
formée par une troupe mixte. La gendarmerie est un corps d’élite qui a pour
mission spéciale de s’occuper plus particulièrement de la tranquillité
intérieure. Elle est l’auxiliaire du ministère public ; elle est répartie dans
les diverses localités pour être à la disposition de l’autorité judiciaire.
Elle est une troupe tout comme une autre, dont le gouvernement dispose : il
appartient à l’Etat de distribuer sa police ou ses moyens de police comme il
lui convient ; mais les gendarmes sont sous les ordres du ministre de la guerre
qui peut les employer à l’armée.
Quant à ce qui regarde
leur casernement, on a fait remarquer qu’une loi…
Une voix. - Une loi du 28 germinal de l’an
VI.
M. de Robaulx. - Je
n’aime pas à me rappeler les lois de l’an VI ; elles sont trop funestes.
Je disais qu’on avait
fait remarquer qu’une loi mettait les frais du casernement de la gendarmerie à
la charge des communes ; je crois, d’après les considérations que j’ai
exposées, qu’on peut mettre ces frais à la charge de l’Etat. J’appuie la
proposition de M. d’Hoffschmidt.
Mais
il y a danger, dit M. Dumortier, à mettre le casernement de la gendarmerie à la
charge de l’Etat ; la dépense sera considérable. Cependant si M. Dumortier a
éprouvé par lui-même combien étaient mauvais les logements des gendarmes, il
devrait chercher à les améliorer. Dans la position des choses, nous sommes tous
exposés à faire des visites forcées à la gendarmerie. Les améliorations sont
urgentes, soit dans l’intérêt des étrangers innocents ou coupables qui osent
venir chez nous, soit des régnicoles.
Vous devez ne pas
oublier que c’est avec peine que les communes paient les frais de casernement,
et c’est un des motifs principaux du mauvais état des casernes ; il est plus
naturel que le gouvernement se charge de cette dépense puisque la gendarmerie
est toujours aux ordres de l’Etat. La mauvaise organisation signalée par M.
Dumortier, et dont il a été victime, doit être réformée dans l’intérêt même de
cet honorable membre, s’il doit encore faire séjour dans les casernes des
gendarmes.
M. Fallon. - Je crois
qu’il serait imprudent d’improviser un service nouveau sur la gendarmerie. Je
craindrais qu’en voulant faire cesser des inconvénients, on n’augmentât
considérablement les dépenses.
Il existe au moins une
caserne par canton, et le nombre des cantons est assez élevé.
Je ne sais pas ce qui
s’est passé dans d’autres provinces, mais dans la province de Namur la
gendarmerie n’a pas à se plaindre de la manière dont elle est logée. Depuis
longtemps cette province s’est appliquée à acheter les locaux nécessaires au
logement des gendarmes et il faudrait que le gouvernement les rachetât à la
province ou aux communes.
Il peut exister, dans
d’autres provinces, des inconvénients très graves ; mais je ne puis en parler.
M. A. Rodenbach. -
Si vous ne voulez pas augmenter considérablement le budget de l’Etat, vous
devez faire contribuer les provinces et les communes pour subvenir aux frais de
casernement des gendarmes. Depuis la révolution ces frais ont été diminués
d’une manière notable ; pourquoi ne persisterait-on pas dans un système
économique ?
Comme on vous l’a fait
observer, lorsque nous aurons à payer la dette hollandaise et qu’il faudra
l’inscrire au budget, si vous enflez annuellement nos lois de finances, vous
finirez par avoir un budget énorme, et vous ferez dire que par suite de la
révolution on paie plus d’impôts que sous le gouvernement néerlandais.
M. de Muelenaere. -
Sur qui doivent tomber les frais de casernement de la gendarmerie ? sera-de sur
l’Etat, sur la province ou sur la commune ? On peut alléguer de fort bonnes
raisons en faveur de l’un et de l’autre système.
Ceux qui pensent que les
frais doivent être supportés par l’Etat disent que les gendarmes constituent
une partie de la force publique ; que, par conséquent, cette dépense doit être
assimilée aux dépenses des autres troupes de l’armée.
Il est également vrai de
dire, avec ces honorables membres, que la gendarmerie est chargée d’un service
spécial ; qu’elle est chargée d’un service de police : et, à cet égard, on a
fait observer que les officiers de gendarmerie étaient même des officiers de
police judiciaire ; qu’ils sont assimilés sous certains rapports aux procureurs
du Roi, aux juges de paix, lesquels sont payés par l’Etat : mais à cela on peut
répondre que les officiers de gendarmerie sont aussi payés par l’Etat, et
qu’ici il ne s’agit que des frais de casernement.
Les commissaires de
police sont payés par les villes et les communes où ils exercent leurs
fonctions ; ce sont cependant des officiers judiciaires.
Je crois que les
casernements seraient meilleurs si les frais en étaient à la charge de l’Etat.
Mais je suis retenu par la crainte manifestée par M. Dumortier : si les frais
sont à la charge de l’Etat, la dépense sera non seulement quadruplée, elle sera
centuplée. Si on écoute les plaintes des officiers de gendarmerie, je suis sûr
qu’une somme cent fois plus forte que celle qu’on emploie aujourd’hui sera
nécessaire.
La
section centrale n’a pas posé un principe utile en ajournant la décision de la
question. Dans plusieurs provinces, les casernes sont dans un mauvais état ;
elles réclament des réparations urgentes ; leur mobilier doit aussi être
renouvelé en grande partie ; quelle est la cause de cet état de choses ? C’est
qu’il y a incertitude sur la question de savoir par qui, dans la suite, les
frais de casernement seront supportés.
Les communes trouvent
toujours les moyens de différer les dépenses dans l’espoir que plus tard elles
seront déchargées de ces dépenses, et que l’Etat ou la province seront appelés
à les faire. Si la législation maintenait l’état de choses existant, les
inconvénients viendraient à cesser, et il ne faudrait pas des sommes très
élevées pour mettre les casernes dans un état convenable ; je ne dis pas dans
un état qui pût satisfaire les exigences des officiers de gendarmerie.
Il ne faut pas adopter
la proposition de la section centrale parce que toutes les difficultés que l’on
élève dans les communes continueront à être élevées. Il importe de décider la
question dans la loi même, et de maintenir le système actuellement existant.
M. d’Hoffschmidt. - Le principal argument que l’on a
fait valoir contre ma proposition est celui-ci : Si la dépense du casernement
de la gendarmerie est à la charge de l’Etat, on enflera le budget : mais
croit-on qu’en mettant la dépense à la charge des communes, on fera des
économies ? Est-ce qu’en définitive, comme on l’a très bien dit, les
contribuables ne paieront pas ? Dans l’un et l’autre système la dépense sera
faite par les contribuables, et il s’agit ici de savoir de quelle manière elle
sera mieux faite. Les casernes sont en mauvais état ; le mobilier ne vaut pas
mieux que les casernes ; il faut tout réparer : par qui l’amélioration
sera-t-elle exécutée ?
Je
vois de graves inconvénients à mettre la dépense à la charge des communes ; les
communes opèrent avec assez peu d’ordre. Dans chaque canton on dresse tous les
ans un inventaire des dépenses à faire ; puis on répartit cette dépense entre
les communes ; mais cette répartition se fait sans règle. L’Etat opérerait plus
régulièrement : il enverrait un inspecteur pour constater les améliorations
nécessaires aux bâtiments et au mobilier ; on mettrait les travaux ou les
fournitures en adjudication ; et ce mode, le plus rationnel, serait en même
temps le plus économique.
Les adversaires de ce
mode exagèrent les dépenses qu’il faudrait faire. Les communes, en grande
partie, possèdent les bâtiments qui servent de casernes ; ces bâtiments ne sont
propres qu’à l’emploi auquel ils sont consacrés ; les communes seraient très
aises de se débarrasser de ces bâtiments, et les céderaient à bas prix.
Les différentes parties
du mobilier des casernes seraient aussi cédées par elles à fort bon compte. Je
ne vois donc aucun inconvénient sérieux à mettre les dépenses à la charge de l’Etat
; je n’y vois que des avantages, et je persiste dans ma proposition.
M. de Theux, rapporteur.
- Il eût été à désirer, vient-on de dire, que la section centrale eût fait une
proposition formelle sur le casernement de la gendarmerie : la section centrale
a été arrêtée par deux considérations. Il lui a paru que le casernement de la
gendarmerie devait, en principe, être à la charge de l’Etat ; mais il lui a
paru impossible de prévoir à quelles dépenses on engagerait le gouvernement en
posant en principe que le trésor devait fournir à ces dépenses.
La section centrale
s’est rappelé qu’en exécution de la loi du 28 germinal an VI, beaucoup de
bâtiments servant aux casernes ont été abandonnés gratuitement par l’Etat aux
communes ; que d’autre part, en 1814 et 1815, le gouvernement a accordé des
subsides assez considérables pour remettre les bâtiments et leur mobilier en
bon état. C’est dans ces circonstances que la section centrale a cru prudent de
maintenir ce qui existe en attendant que la question soit éclaircie. Elle a
pensé que lorsque le gouvernement présenterait une nouvelle législation sur la
gendarmerie, il produirait les documents nécessaires pour statuer sur cet
objet.
M. Dumortier. - Je
présume que la question est suffisamment éclaircie. On veut mettre la dépense à
la charge de l’Etat ; on devrait bien nous faire connaître le montant de cette
dépense.
Je viens de faire un
calcul approximatif pour me donner une idée des frais qu’il y aurait à faire.
Il y a environ 200 cantons..
M. Dumortier. -
Supposons que les bâtiments à construire dans chaque canton coûtent 10 mille
francs ; pour 200 cantons, le chiffre s’élève à deux millions. Ce chiffre doit
suffire pour éloigner la pensée de mettre la charge sur l’Etat. Mais
indépendamment d’une première dépense, vous aurez annuellement les frais
d’entretien du mobilier et de réparation des bâtiments, ou 200 mille francs au
moins à porter au budget. D’après cet aperçu, ne vaut-il pas mieux continuer le
système établi ?
M. de Brouckere. -
Le paragraphe en discussion soulève une question difficile à résoudre.
On dit que les frais de
casernement de la gendarmerie doivent être à la charge de l’Etat : en effet,
cette arme fait partie de la force publique ; elle doit être mise sur la même
ligne que les autres troupes ; il y a de plus de graves inconvénients à laisser
les frais de casernement à la charge des cantons ; plusieurs faits le prouvent.
J’en citerai un :
Il existe un canton dont
le chef-lieu est une ville de six mille habitants, et dans laquelle il n’y a
pas de gendarmerie, parce que cette ville n’a pas voulu fournir un local ; elle
prétend que c’est à l’Etat à le fournir. L’absence de gendarmerie dans ce
canton y entrave le service public ; ce que la ville dont je parle vient de
faire, d’autres peuvent le faire, et l’inconvénient deviendra plus grave.
Cependant, changer tout
d’un coup le système qui existe aujourd’hui présente aussi des inconvénients,
La dépense ne s’élèverait sans doute pas à deux millions ; mais elle serait
assez forte pour qu’on fût obligé d’y regarder à deux fois avant de la mettre à
la charge de l’Etat. Il ne s’agirait pas de bâtir simultanément 216 casernes ;
il s’agirait seulement de mettre à la charge de l’Etat les loyers des casernes
qui sont actuellement à la charge des communes, ou de payer ces loyers aux
communes quand elles possèdent les bâtiments.
La section centrale
propose de remettre la solution de la question à un autre temps. M. de
Muelenaere a trouvé que ce serait par là donner naissance à de profonds abus.
Si vous annoncez au pays que la question ne sera décidée que dans deux ou trois
ans, je demande quelles seront les communes qui consentiront à faire des
dépenses pour l’amélioration des bâtiments et du mobilier des casernes ?
Aucune
commune, aucune province ne consentira à en faire, car elles craindront de
n’être pas remboursées. Le plus mauvais des expédients à prendre est celui
qu’indique la section centrale ; c’est celui de ne décider rien. Je demande le
renvoi de l’article à la section centrale, pour qu’elle nous fasse une
proposition formelle après mûr examen. Il est de l’intérêt de l’Etat, de
l’intérêt des communes, de l’intérêt de la gendarmerie que l’incertitude cesse.
Si la majorité de la
section centrale croit que les frais de casernement sont une dette de l’Etat,
alors on nous présentera un calcul des dépenses plus approximatif que celui que
nous a présenté M.
Dumortier.
Il faut le dire aussi,
cet honorable membre n’a guère eu que quelques secondes pour établir le sien.
Je demande donc
formellement le renvoi du paragraphe à la section centrale.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) -
Messieurs, vous ne vous étonnerez pas de voir le gouvernement déserter de temps
en temps la défense de quelques parties du projet sur lequel vous délibérez. La
chambre se rappelle la manière dont elle a été saisie de ce projet. Il était
l’œuvre d’une commission spéciale, et le gouvernement, pour accélérer la
discussion, l’a présenté comme il était sorti des mains de cette commission,
mais sans abdiquer le droit de réclamer quelques modifications. Il n’y a donc
rien d’extraordinaire à ce que le gouvernement se rapproche des dispositions
qui appartiennent à la section centrale. Cependant ici je me réunis à l’avis
émis par l’honorable préopinant.
Il faut remarquer que la
disposition finale de l’article transitoire proposé par la section centrale
laissera planer l’incertitude qui résulte de la législation actuelle sur les
obligations respectives de la commune, de la province et de l’Etat, sous le
rapport de la dépense du casernement de la gendarmerie.
La législation, sur
cette partie des dépenses publiques, n’est pas, en effet, très claire. La loi
du 28 messidor an IV contient une disposition ainsi conçue : « Les
dépenses du corps législatif et de la gendarmerie nationale seront acquittées
par le trésor public. »
D’autre part, la loi du
28 germinal de l’an VI contient, article 83 : « Le casernement (de la
gendarmerie) sera fourni par les soins des administrations centrales. » Et
pour ce qui concerne les simple brigades, il y a, si je ne me trompe, une
disposition analogue à l’égard des cantons ; elle porte : « Le casernement
sera fourni par les soins des administrations centrales et communales. »
De là un premier motif d’incertitude. Car il y a une expression tout à fait
semblable pour le transport des prisonniers ; il est dit aussi que ce transport
est fait par les soins de l’administration communale ; et cependant
l’administration communale n’en fait que l’avance ; c’est l’Etat qui, en
réalité, en fait la dépense. Il y a donc nécessité de faire cesser
l’incertitude, qui peut, jusqu’à un certain point, légitimer les résistances
des autorités provinciales et communales.
Bien que la constitution
dise que les attributions de la gendarmerie doivent être déterminées par la
loi, ce n’est pas là une invitation adressée à la législature de porter
immédiatement une loi ; c’est simplement la déclaration d’un principe, à savoir
: que les attributions de la gendarmerie ne peuvent être établies par le
pouvoir exécutif.
Je crois que c’est là le
véritable sens de la disposition citée par l’honorable député de Tournay ; car
je ne puis admettre la nécessité d’une loi relative à la gendarmerie, en
présence de la loi du 26 germinal an VI où le service et l’organisation de ce
corps sont clairement définis.
Je ne suis pas très
frappé des considérations que l’on a fait dériver de la nature de la dépense et
par lesquelles on a voulu établir qu’elle devait être une charge de l’Etat. La
chambre a déjà dévié de ces principes dans plusieurs dispositions de la loi
actuelle. Ainsi pour les menues dépenses des tribunaux de première instance, de
commerce, de justice de paix et de police, pour les réparations des maisons
d’arrêt et des prisons autres que les grandes prisons de l’Etat, bien
qu’évidemment ces dépenses fussent des dépenses d’intérêt général, cependant
vous avez décidé que c’était la province qui devait y faire face. On en a déjà
donné la raison : on a dit qu’une disposition de la loi du 12 juillet 1821,
disposition qui se trouvait déjà dans les lois antérieures sur les
contributions directes, a accordé aux provinces des centimes additionnels à
charge de supporter certaines dépenses qui, par leur nature, devaient être une
charge de l’Etat, et cela parce que ces dépenses pouvaient être surveillées par
l’administration provinciale avec plus de facilité et de soins que par l’Etat,
d’une manière plus économique, moins onéreuse pour les contribuables.
On a dit avec raison que
la dépense de la gendarmerie était une dépense mixte. Le gouvernement en
supporte peut-être les 9/10 ; car il paie les traitements ; ce qui peut compter
pour la plus grande partie de ces dépenses.
Veuillez remarquer,
messieurs, et déjà cette observation a été faite, que les commissaires de
police, les gardes-champêtres et les bourgmestres,,lorsqu’ils concourent à
l’exécution des lois générales, sont des agents du gouvernement ; eh bien, la
dépense de leur traitement est une charge des localités ; cependant les
commissaires de police et les gardes-champêtres sont chargés d’une partie de la
police judiciaire ; les bourgmestres sont dans le même cas ; ils sont aussi
fonctionnaires de l’Etat, agents du gouvernement dans une foule d’occasions.
Je crois que la section
centrale, si on lui renvoie la disposition sur laquelle nous délibérons, devra
tenir compte aussi des faits accomplis. Par exemple, ne croyez pas que toutes
les brigades de gendarmerie siègent dans tous les chefs-lieux de canton. Il est
plusieurs cantons où le chef-lieu n’est pas le siège de la brigade de
gendarmerie.
M. Fleussu. - Cela
est vrai.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Telle
commune plus populeuse que le chef-lieu a offert un local destiné à la
gendarmerie, parce qu’elle croyait y trouver un avantage quelconque, soit pour
sa sûreté, soit en raison de la dépense que fait toujours un corps tel qu’une
brigade de gendarmerie. Il est des espèces de contrats ainsi formés entre
l’administration générale et la commune. Les communes ne se bornent pas à
offrir des locaux pour la gendarmerie ; elles en offrent même pour le
casernement de l’armée. Plusieurs villes ont offert de construire à leurs frais
des casernes, uniquement pour avoir l’avantage de posséder une garnison. Des
offres de ce genre sont faites assez souvent à l’administration. La présence
d’une forte garnison est regardée par une ville comme un grand avantage, en
raison de ce qu’elle augmente considérablement la consommation. C’est ce qui
fait qu’en plusieurs occasions, la commune offre de faire tous les frais de
casernement ; j’entends parler des frais de logement.
C’est ce que la section
centrale devra considérer dans la proposition qu’elle aura à nous faire, afin
que nous suivions autant qu’il sera en notre pouvoir le système tel qu’il est
aujourd’hui, tout en faisant disparaître cependant les incertitudes résultant
de l’insuffisance de la législature.
Dans tous les cas, je crois que si l’article
transitoire proposé par la section centrale avait été mis en discussion, il
aurait dû être modifié en ce sens qu’au lieu de : « En attendant une loi sur la
gendarmerie, » on aurait dû dire : « En attendant la loi d’organisation
communale. » Mais je pense que le meilleur parti à prendre est d’adopter
la proposition de l’honorable M. de Brouckere, c’est-à-dire le renvoi à la
section centrale qui, en présence de textes divers et presque contradictoires
sur cette partie des dépenses publiques, comprendra la nécessité d’une
disposition formelle propre à lever tous les doutes.
M. d’Hoffschmidt. - Je me rallie à la proposition de
M.
de Brouckere.
M. Smits. -
J’appuie le renvoi à la section centrale. Je désire qu’elle examine si ne
pourrait pas mettre la gendarmerie dans la même catégorie que la cavalerie,
dont les frais de casernement, d’après le règlement de 1814, sont à la charge
des communes, sauf l’indemnité à laquelle ce règlement assujettit l’état envers
elle.
M. Dumortier. - Ce
serait créer un impôt au bénéfice des communes.
M. de Brouckere. -
Laissez faire la section centrale.
M. Smits. - Cette
indemnité serait accordée aux communes, sauf à elles à fournir le local
nécessaire au casernement. Je désire que la section centrale examine s’il n’y
aurait pas lieu à ce qu’il en fût ainsi pour la gendarmerie.
M. Lardinois. - Il
faut le demander an ministre de la guerre.
- Le renvoi à la section
centrale est mis aux voix et prononcé.
Article 64 à 70 (du projet de la section centrale)
Les articles de 64 à 70
du projet de la section centrale, auxquels se rallie le gouvernement, sont
adoptés en ces termes :
« Art. 64. Le
conseil fixe le taux des traitements et des pensions des employés salariés par
la province. »
« Art,. 65. Il décide de la création et de l’amélioration des
établissements publics aux frais de la province. »
« Art. 66. Il
autorise les emprunts, les acquisitions, aliénations et échanges de biens de la
province, et les transactions relatives aux mêmes biens. »
« Art. 67. Il
autorise les actions en justice relatives aux biens de la province, soit en
demandant, soit en défendant, sans préjudice de ce qui est statué à l’art. 96
de la présente loi. Les actions sont exercées conformément à l’article 111. »
« Art. 68. Le
conseil statue sur la construction des routes, canaux et autres ouvrages
publics à exécuter en tout ou en partie aux frais de la province. »
« Art. 69.
Lorsqu’il s’agit d’exécuter des ouvrages d’entretien ou de réparation, concernant
plusieurs provinces, chaque province est appelée à en délibérer ; en cas, de
contestation le gouvernement décide. »
« Art. 70. Le
conseil adopte les projets, plans el devis des travaux pour lesquels il vote
des fonds, à moins qu’il ne les renvoie à l’approbation de la députation
permanente. »
Article 75 (du
projet du gouvernement)
M. le président. -
La chambre passe à la discussion de l’article 75 du projet du gouvernement. Il
est ainsi conçu :
« Il (le conseil
provincial) donne son avis, et le gouvernement décide sur toute autre
construction de routes, canaux, écluses et travaux d’utilité publique qui
intéressent la province. »
La section centrale
propose la suppression de cet article. Le gouvernement y adhère.
M. Jullien. - Je ne
vois pas le motif de cette suppression. Je conçois que le conseil statue sur
des travaux à faire aux frais de la province, ce sont des affaires de ménage
provincial. Le conseil a seul le droit de prendre une décision à cet égard,
sauf les modifications qui peuvent y être apportées plus tard. Mais lorsqu’il
s’agit de travaux à exécuter aux frais de l’Etat, je ne vois pas pourquoi le
conseil provincial ne donnerait pas son avis : sans doute le gouvernement ne
serait pas lié par cet avis, mais cet avis pourrait être très utile, éclairer
le gouvernement sur la manière la plus économique de faire faire les travaux
sur l’emplacement où il serait le plus convenable de les exécuter. Car tout
travail fait dans une province dans l’intérêt général de l’Etat intéresse
toujours plus ou moins cette province. Il serait donc convenable, ce me semble,
que la province donnât son avis. Je m’opposerai donc à la suppression de
l’article ; ou au moins attendrai-je pour y adhérer que l’honorable rapporteur
de la section centrale en ait fait connaître les motifs.
M. de Theux. -
Comme l’a dit l’honorable préopinant, l’avis du conseil provincial sera bon à
prendre pour les travaux qui devront être exécutes dans la province aux frais
de l’Etat. Mais il faut convenir que si la disposition de la loi était aussi
absolue que les termes de l’article 75, elle ne ferait qu’entraver l’exécution
des travaux publics. Sans doute, il faudra consulter le conseil provincial ;
mais il faudra à cet égard faire quelques distinctions selon la nature,
l’importance et l’urgence des travaux. Au reste, la section centrale a pensé
que cette disposition trouverait mieux sa place dans la loi des travaux publics
; elle ne propose donc que l’ajournement de l’article.
M. Jullien. - Dès
lors que ce n’est qu’un ajournement, je ne forme plus d’opposition.
- La suppression de
l’article est prononcée.
Article 76 (du
projet du gouvernement)
M. le président. -
Nous passons à l’art. 76 du projet du gouvernement ; il est ainsi conçu :
« Art. 76. Le
classement des routes provinciales et de l’Etat est réglé par la loi, sur
l’avis préalable des conseils provinciaux. »
La section centrale
propose le retranchement des mots : « sur l’avis préalable des conseils
provinciaux. » Le gouvernement adhère à cette modification.
M. Dumortier. - Du
moment que ces mots sont retranchés, l’article ne peut plus trouver sa place
dans le chapitre des attributions du conseil provincial ; car il est sans
rapport aucun avec le conseil provincial. Il faut, ou retrancher l’article, ou
le maintenir tel qu’il est dans le projet du gouvernement ; ce qui me paraît
préférable.
- L’art 76 du projet du
gouvernement est mis aux voix et adopté.
Article 77 (du projet du gouvernement)
M. le président. -
« Art. 77. (du gouvernement.) Aucun péage, droit de barrière, de passage
ou de navigation ne peut être établi que du consentement du conseil provincial
ou en vertu d’une loi, sans toutefois déroger aux contrats et aux concessions
antérieures à la présente loi. »
- Cet article est
supprimé par suite de l’adoption de la loi sur les péages.
Articles 78 et 79
(du projet du gouvernement)
M. le président. -
La section centrale propose également de supprimer les deux articles suivants :
« Art. 78. Le conseil
prononce sur la part que doivent respectivement supporter les diverses
localités, en proportion de leur intérêt, dans la construction et l’entretien
des routes provinciales, en prenant l’avis préalable des administrations
communales et sauf leur recours au Roi, dans le délai de 40 jours, à partir du
jour où la résolution leur a été notifiée.
« Il prononce également
sur les offres faites par les communes, par des associations ou des individus,
pour concourir aux dépenses susmentionnées. »
«
Art. 79. Le conseil prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la
fois plusieurs communes de la province et sur la part de la dépense afférente à
chacune, en prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le
délai de 40 jours, à partir de celui où la résolution leur a été notifiée. »
La discussion s’ouvre
sur l’art. 78.
M. Dumortier. - Je
demande le maintien de l’article.
M. d’Huart. - L’art. 72 de la section centrale
y supplée.
M. le président. donne lecture de l’art. 72, ainsi conçu :
« Art. 72. Le
conseil prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la fois
plusieurs communes de la province et sur la part de la dépense afférente à
chacune, en prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le
délai de 40 jours, à partir de celui où la résolution leur a été
notifiée. »
M. Dumortier. -
Messieurs, j’ai combattu dans la section centrale la suppression de l’art. 78,
je viens encore en demander le maintien. Je ne vois pas pourquoi on retranche
aux conseils provinciaux la faculté de prononcer sur la part que doit supporter
chaque commune dans la construction ou l’entretien des routes provinciales. Si
vous annulez cette faculté, vous diminuerez les attributions du conseil
provincial ; et en second lieu, vous accorderez par le fait de nouvelles
attributions à la députation du conseil.
Je propose de maintenir
la disposition en discussion, parce que dans une foule de cas je la crois
nécessaire. Je demande d’ailleurs qu’on justifie la suppression de la section
centrale.
M. de Theux, rapporteur.
- Il est une différence essentielle dans l’art. 78 du gouvernement et l’art. 72
de la section centrale. L’art. 72 ne s’occupe que des routes construites aux
frais de la province ; l’art. 78 accorde au conseil provincial la faculté
d’imposer les frais de construction, ou d’entretien à telles communes qu’il
juge devoir plus particulièrement profiter de la construction des routes. La
section centrale n’a pas cru devoir poser ce principe, elle a pensé qu’il
convenait mieux de renvoyer la matière de l’art. 78 à la loi sur les travaux
publics.
La
section centrale a vu des inconvénients dans les dispositions de l’article ; en
effet, dans plusieurs provinces, des routes ont été construites aux frais de la
province ; si des routes nouvelles devaient encore être établies, le conseil
pourrait imposer plus particulièrement les communes qui ont été jusqu’ici
privées des routes. Il y aurait alors injustice à l’égard de ces communes. Il
est juste que les communes qui les premières ont obtenu des routes contribuent
à confectionner les routes qui restent encore à établir.
Tels sont les motifs qui
ont déterminé la section centrale : du reste, les choses restent dans l’état où
elles ont toujours été ; les conseils provinciaux continueront à suivre la
marche tracée pour les routes provinciales.
Si, dans la loi sur les
travaux publics, on croit utile d’autoriser le conseil provincial d’imposer
telle ou telle commune, on pourra le faire en connaissance de cause.
M. Jullien. - Je
suis d’avis de maintenir l’article ; il me paraît que la suppression
emporterait avec elle une véritable amélioration qu’il introduit dans le
système des routes. Si je comprends bien l’article, il suppose le cas où une
province, sollicitée par l’intérêt de telle ou telle localité, voudrait faire
construire ou réparer une route provinciale. Dans ce cas on établit que le
conseil provincial aura le droit de déterminer la part des frais des communes
qui ont un intérêt particulier à cette construction ou à cette amélioration de
routes. Sous ce rapport, il n’y a rien que de juste dans l’article.
Mais, dit M. le rapporteur,
il y aurait injustice à l’égard des communes qui toutes ont contribué et qui
devront contribuer encore. Si les communes profitent de la route qu’on se
propose d’établir, il n’y aura plus d’injustice, le fait ancien ne préjuge
rien, c’est un fait conforme dans l’intérêt des provinces. Il s’agit ici d’un
système d’améliorations, chaque commune doit contribuer aux frais qui en
résulteront.
Voici
ce qui complète l’idée que je me suis faite de la disposition dont nous nous
occupons.
L’article porte dans sa
dernière partie : « que le conseil prononce également sur les offres
faites par les communes par des associations ou des individus, pour concourir
aux dépenses de construction et d’entretien de routes. » Ainsi, telle localité
s’adresse au conseil provincial et propose d’établir à ses frais une route dont
elle retirerait de grands avantages : rien n’empêche que la province ne
satisfasse à ce désir ; c’est ce que la disposition de l’article consacre.
Je vote avec l’honorable
M. Dumortier pour le maintien de l’article.
M. de Theux, rapporteur.
- La dernière partie de l’article 78 est tellement claire qu’elle ne peut
souffrir de difficulté, et qu’elle n’avait pas besoin d’être écrite dans la loi
; il est certain que si une commune offre de contribuer à la construction d’une
route, le conseil provincial peut accepter ses offres. La première partie de
l’article est très importante et elle mérite toute votre attention. La section
centrale ne l’a pas adoptée, parce qu’elle donne naissance à un nouveau système
relativement aux dépenses de construction des routes. La section a supposé un
arrondissement de chef-lieu bien partagé en routes construites sur les fonds généraux
de la province, et à côté un autre arrondissement qui en serait à peu prés
dépourvu. Elle a craint que dans ce cas, lorsqu’il s’agirait de construire des
routes dans cet arrondissement, le conseil ne fît contribuer spécialement les
communes de cet arrondissement. Evidemment, je le répète, il y aurait là
injustice.
M. Fallon. - Je ne
puis admettre le système ni de l’article 78, ni de l’article 72 ; il me semble
que dans l’un et dans l’autre, on donne ouverture à un arbitraire qui me
répugne. Dans l’art. 73, vous n’avez parlé que de l’entretien des ouvrages
concernant plusieurs provinces ; dans ce cas, les provinces sont entendues : il
me semble que dans le cas dont il s’agit, les communes doivent également être
entendues.
M. Dumortier. -
L’article 78 est entièrement dans l’intérêt de la construction des routes : il
est incontestable que lorsque vous ferez entrer chaque commune dans les frais
de construction, il sera plus facile de multiplier les moyens d’établir des
communications d’un point à l’autre.
Qui sera appelé à
décider la part de dépense que devra supporter la localité à laquelle on aura
procuré des avantages de communication ? sera-ce le
gouvernement ? évidemment non. Sera-ce la députation
provinciale ? quant à moi, je repousse ce système, c’est le conseil en entier
qui doit prononcer, parce que lui seul représente bien tous les intérêts des
localités, et que la députation peut être placée sous l’influence de
quelques-uns de ces intérêts particuliers.
Je ferai remarquer que
l’article stipule que les communes devront donner leur avis sur la construction
des routes ; voilà déjà un motif de lumière pour le conseil qui prononcera
ainsi, en consultant tous les intérêts locaux et communaux. Après cette
garantie, vous avez celle de la sanction du Roi ; pouvez-vous désirer d’autres
garanties dans l’intérêt des communes et dans l’intérêt général des localités ?
On
peut retrancher l’entretien des routes du projet provincial. Je ferai
remarquer, qu’une fois les routes construites, les frais de barrières suffisent
et même au-delà pour couvrir les frais d’entretien. C’est ainsi qu’on a
constaté 800,000 fr. d’excédant sur ces dépenses. Comme lorsqu’il y a excédant,
la province jouit des bénéfices, il est impossible de faire intervenir les
communes dans le paiement des frais d’entretien.
Je persiste à demander
le maintien de l’article.
M.
Desmanet de Biesme. - Je ne puis admettre l’article en discussion. Je conçois que les
communes doivent contribuer aux frais de construction des routes dont elles
retireront quelques avantages. Mais ainsi que l’a dit M. de Theux, il y a de
localités qui sont bien pourvues de routes, soit provinciales, soit de l’Etat,
et dont les frais avaient été supportés par la province ; si vous adoptez
l’article, les conseils provinciaux par égoïsme pourront se refuser de venir au
secours des localités qui seront privées de routes. Dans la province de Namur
et dans les communes qui avoisinent le grand-duché, il existe peu de routes ;
eh bien ! les cantons riches ne voudront pas aider les
cantons pauvres pour la construction de nouvelles routes. Je crois que ce
serait consacrer une injustice que d’adopter l’article.
M. de Theux. - Je
ne reviendrai pas sur les considérations que j’ai déjà présentées ; je
répondrai seulement aux observations de M. Fallon. Ces
observations ne me semblent pas fondées.
L’article 79 qui
reproduit pour les communes le principe adopté dans l’art. 72 pour des travaux qui
intéressent plusieurs provinces, répond aux objections faites par l’honorable
membre : il porte que les communes doivent être consultées sur les travaux à
exécuter.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Je
pense que vous pouvez, sans inconvénient, adopter l’art. 78. Je m’empare de la
réflexion faite par l’honorable préopinant ; si l’article 72 renferme une
garantie pour les communes contre les décisions du conseil central, il me
semble que cette disposition, reproduite dans l’article précédent, doit
dissiper toutes les craintes.
Remarquez qu’un pouvoir
supérieur, nécessairement impartial, devra plutôt prononcer avec justice qu’une
administration locale qui peut méconnaître les droits des autres communes et
ses propres intérêts. L’art. 78 présente toutes les garanties que l’on peut
demander : une première garantie résulte de ce que le conseil provincial devra
consulter les administrations communales ; s’il y a opposition de la part de
ces administrations, elles en exposeront les motifs et un pouvoir supérieur
statuera en dernier ressort ; remarquez en effet que le conseil provincial ne
prononce pas d’une manière définitive. Une seconde garantie existe en ce que le
conseil provincial, intervenant dans des questions de localité, sans aucun
intérêt de position, pourra agir selon les règles les plus sévères de
l’impartialité ; cette intervention est d’ailleurs consacrée dans d’autres
dispositions de la loi.
On
a parlé de l’égoïsme provincial ; il faut aussi se mettre en garde contre
l’ignorance locale qui peut se refuser à reconnaître l’utilité des routes qu’on
proposerait de construire. Je pense que lorsqu’un pouvoir supérieur comme le
conseil provincial aura jugé nécessaire d’établir des routes dans des localités
isolées, et privées de communications, on devra plutôt en croire le conseil
provincial, représentant ce qu’il y a de plus éclairé dans la province, que
l’intérêt local, qui en matière de communications, manque parfois, je le
crains, de connaissances suffisantes et peut céder à des préventions étroites.
Si le conseil commettait
une injustice, si telle ou telle localité était sacrifiée à d’autres localités,
alors évidemment, le gouvernement interviendrait, et il opposerait son veto ;
il exercerait le droit d’intervention consacré par les articles 78 et 79.
Je pense que les
craintes que l’on a élevées sur l’arbitraire des conseils provinciaux sont
exagérées ; les provinces sentiront qu’en présence de la sanction nécessaire du
gouvernement, ils ne peuvent impunément porter atteinte aux droits des
communes.
M. Jullien. - Deux
opinions différentes sont en présence. D’un côté on soutient que l’art. 78
consacrerait une injustice, tandis que de l’autre je soutiens que l’article
consacre un rappel à la justice distributive.
Il faut bien se pénétrer
de l’intention de l’article : on y suppose le cas où le conseil provincial juge
la nécessité de constructions nouvelles ou bien de simples réparations ; dans
quelles circonstances ce cas se présentera-t-il ? C’est lorsque des localités
dépourvues de routes en demanderont l’établissement ; quelles sont les communes
qui s’opposeront aux vœux de ces localités ? ce sont
celles qui jouiront des avantages des communications ; alors le conseil
provincial aura recours à l’approbation du gouvernement. Ainsi personne ne sera
lésé ; on fait un rappel à la justice distributive ; on distribue en effet des
avantages à toutes les communes.
L’article
dit que chaque commune sera consultée et qu’elle pourra donner son avis sur les
constructions à entreprendre : si les communes se croient lésées, elles auront
le recours au Roi ; alors le gouvernement pourra juger d’une part si les
communes se montrent trop récalcitrantes, et de l’autre, si les conseils ont
prononcé dans un esprit d’égoïsme.
Evidemment il y a
quelqu’un qui se trompe.
Les adversaires de notre
système prétendent qu’il y a injustice ; nous, au contraire, nous soutenons
qu’il y a justice à conserver l’article 78. Je persiste à en demander le
maintien. Que la chambre juge entre nous.
M. Fallon. - Ce
n’est pas parce qu’il pourrait résulter une injustice du maintien de l’article
78 que j’en demande la suppression, c’est parce qu’il consacre l’arbitraire.
Quand vous avez admis le principe d’un système de chemins de fer, qu’avez-vous
fait ? Vous n’avez pas imposé aux villes de Louvain, de Liége et d’Anvers,
l’obligation d’en payer les frais. Non, c’est sur la masse des contribuables
que ces dépenses retomberont.
Pourquoi en serait-il
autrement pour les routes ordinaires ? Si vous exigez de chaque commune par
laquelle passera une route qu’elle se cotise pour sa construction, évidemment
vous consacrerez l’arbitraire.
M. de Theux, rapporteur.
- J’ajouterai une réflexion à ce que viennent de dire d’honorables préopinants,
que si vous poussez jusque dans ses conséquences le système consacré par
l’article 78, vous devrez imposer également les propriétaires. Il existe une
loi du 16 septembre 1807 par laquelle, après avoir fixé la plus-value des
propriétés particulières, (erratum au
Moniteur belge n°136, du 16 mai 1834) qu’on pouvait les imposer jusqu’à
concurrence de la moitié de la plus-value. Je sais que cette loi n’a jamais été
mise à exécution par suite de la presqu’impossibilité que cette exécution
présentait.
Je
pense que le moment n’est pas venu de consacrer le principe, qu’il vaut mieux
attendre la discussion de la loi sur les travaux publics pour introduire un
système nouveau. Si vous adoptez l’art. 78, vous arrêteriez immédiatement la
construction des routes, comme l’a fait observer judicieusement M.
Desmanet de Biesme. Les conseils provinciaux voudront imposer aux
arrondissements l’exécution des routes projetées, et ceux-ci s’y refuseront,
parce qu’ils ne trouveront pas juste de payer intégralement les voies de
communication dont ils auront besoin, tandis qu’ils auront contribué pour les
autres routes provinciales.
Je terminerai en
répondant à l’accusation d’inconséquence que l’on pourrait m’adresser en
m’entendant repousser l’article 78 et admettre l’article 79. C’est que
l’article 79 établit la solidarité des dépenses entre plusieurs communes. En
suivant ce principe, qui a dicté l’article 73 du projet de la section centrale,
il y a une différence essentielle entre les deux systèmes.
M. Desmanet de Biesme.
- Dans le système de nos adversaires, l’article 78 doit avoir pour but d’activer
la construction des routes. Je prétends qu’il l’arrêtera totalement. Il en
résultera que toute amélioration des voies de communication se réduira à une
espèce de marché.
On dira aux communes :
Vous voulez une route. Combien donnerez-vous ? Je sais bien que le conseil
provincial ne les forcera pas à apporter leur quote-part, mais le refus que
feront les localités d’y contribuer paralysera tout progrès, et le résultat
sera tout autre que celui que les partisans du système que je combats s’en
promettent.
M. Milcamps. -
L’article 78 peut cependant présenter quelques avantages. Je citerai ta route
de Nivelles à Ath dont la députation du Brabant a reconnu la nécessité. L’on
s’attend, pour la mettre à exécution, que le moment où les communes voudront
contribuer aux dépenses qu’elle entraînera. Si l’article était adopté, ce
retard serait bientôt levé.
- L’art. 78 est mis aux
voix, il n’est pas adopté.
La chambre adopte l’art.
79 (72 de la section centrale) ainsi conçu :
« Le conseil
prononce sur l’exécution des travaux qui intéressent à la fois plusieurs
communes de la province et sur la part de dépense afférente à chacune, en
prenant leur avis préalable et sauf leur recours au Roi dans le délai de 40
jours, à partir de celui où la résolution aura été notifiée. »
Article 81 (du
projet du gouvernement)
M. le président. -
La discussion est ouverte sur l’art. 81 du projet du gouvernement :
« Art. 81. Il
répartit entre les communes, conformément aux lois, le contingent de
contributions directes assigné à la province.
« Il prononce sur
les réclamations et demandes en réduction qui lui sont adressées par les
communes.
« Néanmoins,
lorsque le conseil n’est pas assemblé, la députation permanente fait cette
répartition et prononce sur les réclamations, sauf recours au conseil. »
La section centrale
propose la rédaction suivante
« Art. 74. Il répartit
entre les communes, conformément aux lois, le contingent des contributions
directes assigné la province ; en cas que la répartition même ne puisse avoir
lieu, il en détermine les bases.
«
Il prononce sur les réclamations et demandes en réduction qui lui sont
adressées par les communes.
« Lorsque le conseil
n’est pas assemblé, la députation permanente fait la répartition d’après les
bases fixées par le conseil et prononce sur les réclamations, sauf recours au
conseil. »
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - La
rédaction de l’article présenté par la section centrale me paraît peu claire.
Je désirerais qu’elle fût modifiée.
M. Milcamps. - Je
préférerais la rédaction du projet du gouvernement quant au dernier paragraphe.
La députation permanente devra fixer la répartition d’après les bases établies
par le conseil. Il se pourrait que ces bases n’eussent pas été établies. Si
donc le conseil n’est pas assemblé, la répartition ne pourra avoir lieu. Il
vaut donc mieux laisser à la députation permanente de fixer elle-même les bases
de la répartition ; et en supposant que cette fixation donnât lieu à des
réclamations, le recours au conseil existe et permet de réparer les abus qui
pourraient s’être commis.
M. Dumortier. -
Vous comprenez tous que cet article est très obscur. Rapporteur de la 5ème
section, j’avas proposé une rédaction, selon moi, infiniment plus simple.
J’aurai l’honneur de faire remarquer à la chambre que la répartition des
contributions et les bases sur lesquelles elles seront assises, ne doivent,
dans aucun cas, être laissées à la députation permanente. C’est un objet d’une
trop haute importance pour que le conseil puisse abdiquer ses droits à cet
égard. Si la députation permanente en était saisie, les députés d’une ville pourraient
régler selon leur bon plaisir, la répartition des contributions de toute une
province. C’est ce qui est arrivé depuis vingt ans dans le Hainaut.
L’arrondissement de Tournay a toujours été sacrifié par celui de Mons. Un tel
état de choses pourrait durer cent ans encore. Ce qu’il y aurait à faire,
serait que le conseil provincial arrêtât les bases de la répartition, et
déclarât que telle commune serait imposée pour autant. Ce qui resterait à faire
ne serait que la conséquence des travaux du conseil, et les injustices que j’ai
signalées ne pourraient se renouveler.
Au
surplus, je vous prie de remarquer que cet article est absolument inutile. Le
conseil provincial s’assemble au mois de juillet. A cette époque la répartition
de l’impôt est fixée. Que vient donc faire cet article ? Il ne signifie rien.
Il n’y a plus de bases d’impôts à asseoir ; elles sont faites pour tout le
royaume.
Dans tous les cas, il
faut en principe que l’on fasse en sorte qu’il y ait lieu de déterminer les
bases de répartition, que le travail soit laissé au conseil et que la
députation permanente se borne à en faire l’application. De cette manière vous
ne consacrerez pas une injustice.
M. Fallon. - Je partage l’opinion de
l’honorable M.
Dumortier. Il est certain que si vous n’obligez pas le conseil à
déterminer les bases de répartition de l’impôt, vous pouvez supprimer
l’article, jamais l’assemblée des états de la province de Namur ne s’est réunie
à une époque où la répartition était possible. Il faut donc adopter le système
de M.
Dumortier. Mais je ne partage pas son opinion quand il attaque la
rédaction de la section centrale. Il me semble que le premier paragraphe doit
répondre au vœu qu’il a exprime au nom de la 6ème section, ce paragraphe porte
que : « en cas que la répartition même ne puisse avoir lieu, le conseil
provincial en détermine les bases. »
M. de Theux, rapporteur.
- Vous voyez que la section centrale a fait droit aux réclamations de la 5ème
section. Tout en admettant que la députation permanente pourrait fixer la
répartition des contributions d’après les bases arrêtées par le conseil, elle a
voulu laisser intactes les prérogatives du conseil provincial en lui réservant
le droit de faire lui-même cette répartition, ce qui pourrait avoir lieu si une
loi financière qui exigeât une répartition était votée avant la réunion des
conseils provinciaux, ou si ces conseils étaient convoqués extraordinairement à
l’époque du voie des impôts ; la section centrale devait donc agir dans les
deux hypothèses. C’est ce qu’elle a fait. Je pense donc que sa rédaction doit
être conservée.
M. Dumortier. - Je
ne puis partager l’opinion de l’honorable rapporteur de la section centrale. On
établit l’époque de la répartition quand elle ne pourra plus avoir lieu. Jamais
dans aucun cas le conseil provincial ne pourra fixer la répartition, cela lui
sera physiquement impossible. Il ne lui sera possible que d’en asseoir les
bases. C’est donc dans ce sens qu’il faut modifier l’article, si vous voulez
qu’il soit intelligible.
M. Jullien. - Le
premier devoir du conseil provincial est de fixer le contingent des
contributions directes imposées à la province. Si vous lui ôtez la plus notable
de ses attributions, mieux vaut supprimer l’institution elle-même. Car c’est
dans ce but seul qu’ont été créés les conseils. C’est ce que la section
centrale a très bien senti.
Les
conseils s’assemblant au mois de juillet, il est très possible que la
répartition des contributions directes ne puisse avoir lieu. Mais, comme l’a
très bien fait observer l’honorable M. de Theux, il serait très possible qu’une
nouvelle loi financière harmonisât l’époque de la répartition avec celle de la
convocation des conseils. Il faut donc formuler dans la loi un droit qui leur
appartient et prévoir l’éventualité où ils en pourront faire usage.
Ainsi l’article de la
section centrale est infiniment clair. Il prévoit également le cas, qui dans la
législation actuelle se présentera presque toujours le seul, où les conseils
n’auront qu’à déterminer les bases de l’année suivante. Ces bases une fois
arrêtées, les députations permanentes suivront la ligne qui leur aura été
tracée, et il restera dans tous les cas la ressource du recours au conseil. Je
ne vois donc pas qu’il y ait lieu de changer l’article de la section centrale.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Je
persiste à trouver la rédaction de la section centrale obscure, et mon opinion en
cela est partagée par un grand nombre de membres. Je proposerais de mettre, à
la place des mots : « en cas que la répartition même ne puisse avoir
lieu, » ceux-ci : « s’il n’a pu opérer cette répartition. »
Cette rédaction nouvelle, outre qu’elle prévient toute autre interprétation de
la loi, présenterait, sous le rapport de l’euphonie, l’avantage de la
suppression d’une locution aussi disgracieuse qu’est ce mot : « en cas
que. » Elle conserverait également les prérogatives du conseil, qui, à cet
égard, ont paru si importantes en France, que la répartition des impôts directs
figure en tête des attributions des conseils généraux dans la loi
départementale.
- L’art. 81 est mis aux
voix et adopté, sauf rédaction ultérieure.
Article 75 (du projet de la section centrale) et 82
(du projet du gouvernement)
M. le président.
« Art. 82 (du projet du gouvernement) et 75 (de la section centrale). Le
conseil prononce sur la demandes des conseils communaux, ayant pour objet
l’établissement, la suppression, les changements des foires et marchés dans la
province.
« Il veille à ce
qu’il ne soit mis à l’importation, à l’exportation et au transit des denrées et
marchandises, d’autres restrictions que celles établies en vertu des
lois. »
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Nous
adhérons à la rédaction de la section centrale.
- L’art. 75 est adopte
sans discussion.
Article 83 (du
projet du gouvernement)
M. le président. -
L’art. 83 du projet du gouvernement est ainsi conçu :
« Art. 83. Le conseil donne
son avis sur les changements proposés pour la circonscription de la province,
des arrondissements, cantons et communes, et pour la désignation des
chefs-lieux. «
La section centrale
propose la suppression de cet article.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Il me
semble que la prérogative du gouvernement n’est pas ici contestée de présenter
des projets de loi sur ces circonscriptions ; on l’oblige à prendre un avis :
qu’on formule ou qu’on ne formule pas l’obligation, il prendra toujours cet
avis ; cependant je ne comprends pas les motifs de la suppression demandée. La
disposition est une garantie de plus qu’on donne aux localités.
M. Fallon. - Je
voterai pour le maintien de l’article 83 par les motifs qui m’ont déterminé à
adopter l’article 76. L’article 83 est une garantie de plus pour les intérêts
provinciaux.
M. de Theux, rapporteur.
- Je n’attache pas d’importance à ce que l’article soit supprimé. Mais voici ce
qui a porté la section centrale à demander ce retranchement.
L’année dernière une
proposition semblable avait été faite par le gouvernement. Il demandait l’avis
des conseils provinciaux sur la confection des routes ; la chambre a cru
l’article inutile parce que la législature ne pouvait être liée par aucun avis.
Conséquente avec les antécédents de la chambre, la section centrale a cru
devoir proposer la suppression de l’article en délibération.
- L’article mis aux voix
est adopté.
Article 84 (du projet de la section centrale) et 76
(du projet du gouvernement)
M. le président. -
« Art. 84 (du projet du gouvernement) et 76 (du projet de la section
centrale). Le conseil peut charger un ou plusieurs de ses membres de la mission
de recueillir sur les lieux les renseignements dont il a besoin dans le cercle
de ses attributions. Il peut correspondre avec les autorités constituées et les
fonctionnaires publics, à l’effet d’obtenir les mêmes renseignements.
« Si, malgré deux
avertissements consécutifs constatés par la correspondance, des autorités
administratives subordonnées sont en retard de donner les renseignements
demandés, le conseil peut déléguer un de ses membres, aux frais personnels
desdites autorités, à l’effet de prendre les renseignements sur les
lieux. »
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) - Il y
a dans la rédaction de la section centrale un changement qui rend mieux la
pensée du gouvernement ; j’adhère au changement.
- L’article est adopté
sans discussion.
Article 77 (du
projet de la section centrale) et 85 (du projet du gouvernement)
M. le président. -
« Art. 85 (du projet du gouvernement) et 77 (de la section centrale). Le
conseil peut appuyer les intérêts de la province et des administrés près du Roi
et des chambres. »
M. Fallon. - Je
demanderai la suppression de cet article parce que je le crois tout à fait
inutile. Si je ne me trompe il est la répétition d’un article de l’ancienne loi
fondamentale des Pays-Bas ; mais, d’après notre constitution les conseils
provinciaux jouissent du droit de pétition, et peuvent appuyer par conséquent
les intérêts de l’administration et de la province près du Roi et des chambres,
M. Dumortier. -
L’article 161 de l’ancienne loi fondamentale du royaume des Pays-Bas consacrait
le droit de pétition aux particuliers individuellement, et collectivement aux
corps constitués légalement et reconnus comme tels ; cependant quand les
conseils provinciaux s’adressaient à l’Etat, on leur contestait ce droit,
attendu, disait-on, qu’ils ne pouvaient faire de doléances que relativement aux
intérêts provinciaux. Messieurs, le droit de pétition, c’est le droit de
plainte, c’est le plus sacré des droits, et nous devons par tous les moyens en
assurer l’exercice ; mais nous devons nous garder d’en restreindre l’usage,
même involontairement.
L’article
en délibération est inutile parce que l’article 21 de notre constitution a
pourvu à tout ce qui concerne le droit de pétition.
Si on admettait la
disposition de l’article en délibération, ne pourrait-on pas dire aux conseils
: « Vous pouvez faire des pétitions, mais dans la sphère de vos
attributions ; vous nous direz, par exemple, si telle route doit passer ici ou
là ; mais n’allez pas plus loin. » Je demande le rejet de l’article qui
est contraire à l’un des principe sacrés pour lesquels
nous avons fait notre révolution.
M. d’Huart. - L’article 21 de la constitution
est bien plus formel que celui sur lequel nous discutons ; cet article en
délibération pourrait être interprété dans un sens restrictif ; écartons-le donc
et conservons les dispositions de notre pacte fondamental, dispositions bien
plus simples et qui nous conservent dans toute son étendue le droit sacré de
pétition.
M. de Theux, rapporteur.
- L’article 161 de l’ancienne loi fondamentale était conçu à peu près dans les
mêmes termes que l’article 22 de notre constitution, mais l’article 151 relatif
aux attributions des états provinciaux contenait cette disposition : « Ils
pensent appuyer les intérêts de leurs provinces et de leurs administrés près du
roi et des états-généraux » C’est cette disposition qui est reproduite dans le
projet du gouvernement et que la section centrale a adopté.
M. Fallon. - Le
droit de pétition résulte de notre constitution ; il est indéfini. Je crains
qu’avec l’article en discussion on ne puisse dire aux conseils : « Vous ne
pouvez vous occuper que des intérêts de vos provinces et de vos
administrés. » C’est ce qu’on leur a dit sous la loi fondamentale, et je
ne veux pas qu’on leur répète la même chose sous la constitution.
- L’article 85 mis aux
voix est rejeté.
Article 78 (du projet de la section centrale) et 86
(du projet du gouvernement)
M. le président. -
« Art 86 (du projet du gouvernement) et 78 (de la section centrale). Il
peut faire des règlements provinciaux d’administration intérieure et des
ordonnances de police.
« Ces règlements et
ordonnances ne peuvent porter sur des objets régis par des lois ou par des
règlements d’administration générale.
« Ils sont abrogés de
plein droit si, dans la suite, il est statué sur les mêmes objets par des lois
ou règlements d’administration générale.
« Le conseil peut
établir pour leur exécution des peines qui n’excèdent pas 8 jours
d’emprisonnement et 200 francs d’amende.
« Ils sont publiés dans
la forme déterminée aux articles 105 et 106 de la présente loi. »
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau) -
J’adhère à cette rédaction présentée par la section centrale.
- L’article mis aux voix
est adopté sans discussion.
Il est quatre heures et
demie. La séance est levée.