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Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 22 mars
1833
Sommaire
1) Vérification des pouvoirs d’un membre
nouvellement élu. Elections contestées (de Stambier) (Poschet)
2) Projet de loi relatif à la procédure en
naturalisation. Second vote des articles. Paiement d’un droit pour obtenir la
naturalisation (Legrelle, Fallon,
Lebeau, d’Elhoungne, Dubus, Angillis, Marcellis, de Brouckere, de Haerne, de Brouckere, Lebeau, Dubus, de
Brouckere, de Roo, d’Hoffschmidt,
d’Elhoungne, Legrelle, Fleussu, Dumortier, Dubus, Legrelle)
3) Rapports sur des pétitions relatives, notamment,
à la garde civique (de Roo)
(Moniteur belge
n°83, du 24 mars 1833)
(Présidence de M. Raikem.)
M. Dellafaille fait l’appel nominal à une heure et un quart.
Il donne ensuite lecture du procès-verbal
; la rédaction en est adoptée.
VERIFICATION DES POUVOIRS D’UN MEMBRE NOUVELLEMENT ELU
M. Poschet, rapporteur de la commission de vérification des pouvoirs, est appelé à la tribune.
Il s’exprime en ces termes. - Le 11 février dernier, les électeurs du district
de Hasselt se réunirent pour nommer un membre à la chambre des représentants,
en remplacement de M. de Woelmont, démissionnaire.
Il résulte du procès-verbal que le nombre des votants
était de 232, la majorité absolue 117. M. Etienne de Stambier de Videux, ayant
obtenu 121 suffrages, a été proclamé membre de la chambre des représentants.
Cette élection a été attaquée de trois points de
nullité. D’abord cinq personnes qui n’en avaient point le droit y ont pris
part, deux n’étaient pas inscrites sur la liste affichée dans la salle, trois y
assistaient munies des billets de convocation de leur père dont les décès
n’étaient pas connus. Si l’on ôte ces cinq votes des 121 obtenus par M. Etienne
de Stambier de Videux, il ne lui en reste que 116 : c’est une voix de moins que
la majorité absolue.
Mais les cinq voix ôtées à M. de Stambier doivent être
aussi tirées du nombre total des votants, ce qui, de 232 qu’il était, le réduit
à 227 ; alors la majorité absolue n’est que de 114. Comme vous l’avez vu, il
restait 116 voix à M de Stambier ; il a donc encore la majorité. Votre
commission a adopté ce calcul à l’unanimité.
Le second chef de nullité allégué est que le
procès-verbal n’avait pas été rédigé séance tenante, comme le dit l’article 37
de la loi électorale ; les réclamants se fondent sur ce qu’il n’avait été
présenté à signer que le 12 à M. Bamps, notaire à Hasselt, un des scrutateurs.
Le procès-verbal, signé par le président et les autres scrutateurs, porte qu’il
a été rédigé séance tenante, et que M. Bamps, en se retirant, avait déclaré ne
pas vouloir le signer à cause des nombreuses irrégularités dont, selon lui, il
était entaché.
Votre commission a pris des renseignements sur ce
point : il résulte d’une déclaration du président et des scrutateurs, qu’étant
réunis le lendemain 12 pour signer la copie du procès-verbal, M. le président
avait cru devoir faire proposer à M. Bamps de le signer, ce qu’il avait refusé.
Votre commission, au nombre de cinq voix contre une, n’a pu voir dans le fait
une preuve que le procès-verbal n’avait pas été signé le jouir de l’élection
comme il le porte.
Le troisième et dernier grief consiste en ce qu’un des
scrutateurs a été nommé secrétaire, tandis que l’article 20 de la loi
électorale dit que le secrétaire sera pris par les scrutateurs dans
l’assemblée. Les opposants prétendent que les scrutateurs sont censés ne plus
faire partie de l’assemblée, et qu’ainsi l’on ne peut prendre le secrétaire
parmi eux. Ils soutiennent que les deux emplois sont incompatibles, parce que
les scrutateurs et le secrétaire doivent mutuellement contrôler lents
opérations. Votre commission, à la majorité de quatre voix contre deux, n’a pu
voir que l’article 20 s’opposât formellement à ce qu’un des scrutateurs fût en
même temps secrétaire, surtout que le dernier n’ayant pas voix délibérative, le
nombre des membres du bureau reste complet.
En conséquence, votre commission, à la majorité de
quatre membres contre deux, m’a chargé de vous proposer l’admission de M. de
Stambier de Videux, comme membre de la chambre des représentants.
- Les conclusions de la commission sont adoptées sans
opposition, et M. de Stambier de Videux est proclamé membre de la chambre.
PROJET DE LOI RELATIF AUX NATURALISATIONS
Second vote des articles
L’ordre du jour est la suite de la discussion du
projet de loi sur les naturalisations.
M. le président.
- La chambre en est restée à l’article 5 nouveau par lequel on exige que le
naturalisé verse au trésor une somme de 600 fr. au moins et de 1,200 fr. au
plus, à fixer par le gouvernement.
M. Legrelle a demandé hier que le minimum de la
rétribution fût réduit à 200 fr.
M. Legrelle.
- Je crois avoir cité hier des faits, à l’appui de mon amendement, qui ont dû
faire impression sur l’assemblée. Le minimum de 600 fr. consacrerait deux injustices
: l’une à l’égard de celui que vous admettriez parmi les membres du peuple
belge, si cet homme, malgré son mérite, sa capacité, n’avait pas le moyen de
payer 600 fr. ; l’autre serait une injustice à l’égard du pays, que l’on
priverait des services utiles d’un homme sans fortune. Puisque l’assemblée veut
un minimum, je demande qu’il ne soit pas au-dessus de 200 fr.
M. Fallon.
- Messieurs, la question de savoir s’il convenait de vous proposer d’assujettir
les naturalisations à des rétributions pécuniaires a été sérieusement discutée
dans votre section centrale.
En ce qui regarde la grande naturalisation, l’avis de
rejeter toute rétribution pécuniaire a été unanime.
En ce qui concerne la naturalisation ordinaire, la
même opinion a été adoptée à la majorité.
Je prends la parole pour vous rendre compte,
messieurs, des motifs qui ont dirigé votre section centrale dans cette question
de convenance.
Concéder à l’étranger l’exercice des droits
politiques, en tout ou en partie ; lui accorder, plus ou moins largement, la
faculté de concourir à l’exercice de la puissance et des fonctions publiques,
c’est un acte de libéralité nationale, c’est essentiellement une haute faveur ;
et il n’y a de faveur que là où le bienfait est gratuit.
Par conséquent, si on ne donne la naturalisation
ordinaire qu’à prix d’argent, il y aura contre-sens. Ce n’est plus une faveur
que l’on accorde, c’est un impôt que l’on crée ; ce n’est plus un acte de
générosité ; c’est une mesure fiscale que l’on exerce.
Je sais qu’en assujettissant à la mesure fiscale l’une
ou l’autre des naturalisations, ou même toutes deux, on ne fera rien de nouveau
puisqu’il existe un antécédent dans la loi du 31 mai 1824.
Mais, messieurs, notre position n’est plus la même.
Aujourd’hui, nous agissons sous le régime d’une
constitution qui ne permet pas de transiger sur les principes libéraux qu’elle
consacre, et alors on agissait sous l’influence d’un gouvernement marchand et
fiscal qui avait pour esprit de faire argent de tout ; et puisqu’alors la loi
fondamentale permettait de vendre des titres de noblesse, il n’y avait rien
d’étonnant de voir trafiquer même du nom néerlandais.
Je ne veux pas dire qu’il faut répudier tout ce que
nous a légué le gouvernement hollandais, mais il me semble qu’il faut tout au
moins mettre du discernement dans ce qu’il convient de conserver et n’accepter
que ce qui sympathise avec le nouvel ordre de choses.
Or, si dans sa nouvelle position la Belgique doit se
diriger par des exemples de délicatesse et de générosité, je ne vois pas
pourquoi nous ne les chercherions pas de préférence chez une nation avec
laquelle nous avons été plus longtemps associés.
Je veux parler de la législation française, que je
vais mettre en rapport avec le régime hollandais.
Là, en France, la naturalisation est ce qu’elle doit
être, c’est-à-dire une libéralité, une faveur purement gratuite.
Anciennement le roi seul l’accordait par des lettres
de grande chancellerie sans aucune rétribution pécuniaire.
La constitution du 3 septembre 1791 l’avait placée
dans les attributions du pouvoir législatif, qui l’accordait sans autre
condition que de fixer son domicile en France et d’y prêter le serment civique.
Ce mode de naturalisation ne se retrouve pas dans la
constitution du 5 fructidor an III, où il était dit seulement que l’étranger
devenait citoyens français, lorsqu’après avoir atteint l’âge de 21 ans et avoir
déclaré l’intention de se fixer en France, il y avait résidé pendant 7 années
consécutives, pourvu qu’il payât une contribution directe, et qu’en outre il y
possédât une propriété foncière ou un établissement d’agriculture on de
commerce, ou qu’il y eût épousé une Française.
Mais la constitution de l’an VIII qui nous régissait
encore lors des événements de 1814, n’était pas moins libérale, sauf qu’elle
exigeait 10 années de résidence, mais sans aucune autre condition.
Sur ce dernier point, il y eut toutefois dérogation
par le sénatus-consulte du 19 février 1808, qui, pour les cas spécifiés dans le
projet de la section centrale, attribua à l’empereur le droit de conférer la
naturalisation par un décret spécial, le conseil d’Etat entendu, sous la seule
condition d’une année de domicile.
Plus tard, une loi du 14 octobre 1814 confirma les
dispositions de la constitution de l’an VIII et attribua aux chambres le droit
de vérifier les lettres de naturalisation, et toujours sans aucune condition
fiscale.
De manière qu’en France l’étranger obtient la
naturalisation sans être astreint à aucune rétribution.
Voyons maintenant le régime hollandais.
Une subversion de principe lui importait peu
lorsqu’elle pouvait procurer de l’argent.
Par un premier arrêté du 22 septembre 1814, Guillaume,
alors prince souverain des Pays-Bas, débuta par ordonner que tout Français
remplissant des fonctions publiques cesserait de les occuper si, dans les deux
mois, il n’avait obtenu de lui des lettres de naturalisation.
Par un autre arrêté du 24 décembre suivant, il attacha
à ces lettres de naturalisation une rétribution fixe de 1,200 francs, qu’il
réduisit à 300 pour les personnes qui importeraient une fabrique ou autre
établissement d’industrie en se réservant toutefois de faire remise de tout ou
partie de ces rétributions en faveur des individus qui pourraient avoir des
titres à ce qu’il appelle cette faveur spéciale de sa munificence.
Les choses étaient dans cet état lorsque la loi
fondamentale fut publiée, et, comme l’on sait, elle n’avait attaché aucune
rétribution pécuniaire ni à la grande, ni à la petite naturalisation.
Advint alors la loi du 31 mai 1824.
Cette loi avait pour objet l’introduction d’un nouveau
système financier, et la fiscalité se saisit de l’occasion pour déterminer,
sans discernement, tout ce que l’acte de naturalisation avait de généreux.
Je dis sans discernement, et vous allez en juger,
messieurs.
Par cette loi les lettres de noblesse n’ont été
assujetties qu’à un droit de 100 florins, tandis que les lettres de
naturalisation y furent tarifées jusqu’à 600 florins.
De manière que la libéralité qui ne devait s’exercer
qu’alors qu’elle pouvait être utile au pays, était considérée comme matière six
fois plus imposable que l’ambition et la vanité.
Tel est, messieurs, le tableau du régime français et
de la législation hollandaise sur les naturalisations.
Nous sommes libres de choisir, et le choix n’est pas
douteux si nous voulons rester à la hauteur de nos institutions, si nous
voulons que la qualité de Belge soit la récompense du mérite, et non le prix
d’une somme d’argent.
D’un côté, c’est un acte de générosité, et de l’autre
c’est un calcul sordide qui corrompt le bienfait et dégrade le bienfaiteur.
Notre constitution nous a déjà tracé d’ailleurs la
route que nous devons suivre en cette occasion.
L’article 133 a gratifié les étrangers établis en
Belgique avant le 1er janvier 1814 et n’a exigé d’eux aucune ni la moindre
rétribution.
Cependant des objections ont été faites, il faut y
répondre. La naturalisation ordinaire n’est pas, dit-on, comme la grande
naturalisation, une libéralité ; c’est un avantage que l’on accorde à
l’impétrant.
Oui, messieurs, c’est un avantage qu’on lui accorde,
et l’article premier du projet nous apprend que l’avantage accordé à la petite
naturalisation n’est guère moins étendu que celui qui est conféré à la grande.
Mais il ne faut pas, pour tâcher de se mettre à
l’aise, séparer l’effet de la cause ; car c’est précisément parce que, dans un
cas comme dans l’autre, c’est un avantage, que, dans un cas comme dans l’autre,
c’est une libéralité.
La distinction entre la grande naturalisation et la
naturalisation ordinaire, ou le plus ou moins d’avantages qu’elles confèrent à
l’impétrant, ne peut donc aider en rien à la solution de la question des
convenances, et si, dans un cas comme dans l’autre, c’est une libéralité, elle
doit être gratuite.
Mais il faut éviter les demandes indiscrètes il faut
empêcher que la chambre ne soit encombrée de demandes ?
La section centrale a été au-devant de cet
inconvénient, en faisant observer que le but pouvait être tout aussi facilement
atteint en n’accordant la naturalisation qu’avec circonspection et réserves.
Quant à moi, je persiste à croire qu’en attachant une
rétribution, qu’en en faisant l’objet d’un impôt, on marche en sens inverse du
but que l’on veut atteindre.
Il est bien plus facile d’obtenir ce que l’on paie que
ce que l’on ne peut obtenir qu’à titre gratuit, et c’est déjà une espèce de
titre que l’offre de payer ce que l’on demande.
D’un autre côté on est aussi toujours plus enclin à
donner ce qui se paie qu’à l’accorder gratuitement.
Enfin, si l’on fait marchandise de la naturalisation,
je crains bien que le nombre des impétrants n’augmente au lieu de diminuer, et
qu’au lieu d’être sobre on ne finisse par devenir prodigue.
Du reste, cet expédient est
encore vicieux sous un autre rapport puisqu’il peut avoir pour effet de fermer
la porte de la chambre et d’humilier l’honnête père de famille, dont les
ressources tout entières sont indispensables à l’entretien de ses enfants, en
le privant d’une récompense justement méritées ; et nous sommés déjà saisis de
plusieurs demandes de cette nature.
Par suite de ces considérations je voterai contre
l’article additionnel qui est proposé.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, je me suis déjà attaché dans une
précédente séance à faire ressortir la distinction qu’il ne faut pas perdre de
vue entre la grande naturalisation et la naturalisation ordinaire.
Il faut remarquer que le système de la section
centrale a subi une importante modification dans nos discussions : la grande
naturalisation est maintenant un acte rémunératoire ; la grande naturalisation
est la dette du pays envers l’étranger qui a rendu d’éminents services au pays.
Sous ce rapport ce n’est pas une libéralité ordinaire ; c’est la dette de la
reconnaissance pour prix de services rendus.
On conçoit qu’il y aurait contradiction à exiger de
celui qui obtient une pareille faveur une rétribution quelconque, et j’ai été
le premier à déclarer que je n’en sollicite pas pour la grande naturalisation.
Mais, dans mon opinion, la naturalisation ordinaire
est en tout, en très grande partie du moins, à l’avantage de l’impétrant. Ces
avantages sont de deux espèces : moraux et matériels.
On peut mettre au nombre des avantages moraux la
jouissance des institutions libérales de notre pays, d’une législation douce et
généreuse, l’adoption par un pays considéré, à bon droit, comme l’un des plus
hospitaliers de l’Europe.
A côté de ces avantages moraux se trouve, pour le
naturalisé, l’admissibilité aux emplois salariés : c’est là un avantage
matériel pour lequel il semble que nous ne nous montrons pas trop exigeants en
demandant la continuation de l’impôt, impôt dont le fisc ne s’est pas emparé
pour enrichir le trésor, car je ne sache pas qu’il ait été fait abus des
naturalisations sous le gouvernement déchu.
Vous avez, par un amendement
adopté hier sur la proposition de l’honorable M. de Nef, et qui m’a paru fondé
sur des motifs puissants, effacé encore une barrière qui s’opposait à la
facilité d’accorder des naturalisations. Craignez que, si vous les déclarez
exemptes de tout impôt, vous ouvrirez la porte à des demandes indiscrètes, à
des demandes irréfléchies, qu’il vous sera très difficile de rejeter. Ce n’est
pas sincèrement qu’on prétendra que la chambre, se transformant en une
institution fiscale, se plaira à spéculer sur l’impôt : la chambre ne se
laissera pas entraîner par de pareilles considérations ; elle pèsera les
titres, abstraction faite des conditions matérielles dont nous demandons le
maintien.
Je crois que l’on a assez fait, par l’amendement de M.
de Nef pour faciliter la voie des naturalisations ordinaires.
Un impôt qui est spontané, qui est purement
volontaire, ne mérite pas l’anathème que l’honorable préopinant a dirigé contre
cette partie de la loi. Les sentiments qui dominent dans la chambre et dans le
pays préviendront d’aussi méprisables résultats.
Je demanderai donc le maintien de l’article.
M. d’Elhoungne. - Je pense que dans cette discussion l’honorable M. Fallon, dont je
partage et adopte tous les principes, n’a encore envisagé la question que sous
un seul rapport. Il a représenté la naturalisation comme étant une faveur
accordée à l’étranger ; il me semble que du moment que nous voudrons conférer
la qualité de Belge avec discernement, et d’une manière telle que l’honneur de
ce nom le requiert, tel que l’intérêt de l’Etat le demande, il y aura
nécessairement réciprocité d’avantages, parce que l’Etat gagne nécessairement,
sans aucun doute, en acquérant un nouveau citoyen honorable, laborieux,
industrieux ou capitaliste : ce serait une mesure impolitique que celle qui
mettrait des entraves à une pareille réciprocité de services.
Mais, dit-on, on formera des demandes indiscrètes.
Messieurs, par cela même qu’on accordera la naturalisation gratuitement, on
acquerra le droit de se montrer d’autant plus difficile à la conférer ; mais du
moment que vous y attacherez une espèce de lucre, il serait à craindre que
l’intérêt fiscal ne prévalût, et ne parvînt à vous entraîner dans une prodigalité
qui tendrait à déconsidérer la nation et le nom qu’elle porte.
Dans d’autres temps, on a fait de la naturalisation
une matière imposable : c’est ainsi que sous le régime féodal, que j’ai eu le
bonheur de voir abolir, on m’avait tarifé la qualité d’homme de
« bote, » et que j’ai vu dans mon enfance encore conférer le droit de
bourgeoisie à prix d’argent sous le nom de poirter-schap de Louvain, d’Aerschot
et d’autres lieux.
Ce n’est plus sur cette échelle
qu’il faut envisager la chose : c’est de la qualité de Belge qu’il s’agit ; et
cette qualité, si nous savons l’apprécier à sa juste valeur, doit être un nom
d’honneur dont on ne trafique pas à prix d’argent. L’honneur ne peut être
tarifé. Quand vous voulez accorder une marque d’estime à quelqu’un, gardez-vous
de la lui vendre, ce serait l’avilir. Je craindrais de voir la qualité de
citoyen belge tomber dans le discrédit où nous voyons plusieurs ordres de
chevalerie, qui, tels que celui de l’Eperon d’Or, s’obtient en échange de
quelques écus romains dans la capitale du monde chrétien
Il me semble, d’après ces considérations, que la
chambre ne balancera pas à rejeter l’article en discussion : vous ne souffrirez
pas qu’on fasse trafic et marchandise du nom de nos pères.
M. Dubus.
- Il ne s’agit pas de mettre l’honneur belge dans le commerce ; il s’agit
d’examiner si vous repousserez toutes les garanties que vous aviez voulu introduire
dans la loi, et si vous voulez que les naturalisations puissent être accordées
sans précautions. Messieurs, on remet en question tout ce qui avait été décidé
par cette chambre, et à une grande majorité, à la suite d’une discussion longue
et approfondie. Vous avez restreint la grande naturalisation ; vous n’avez
voulu l’accorder qu’à ceux qui auraient rendu de grands services à l’Etat ;
vous n’exigez pas les mêmes conditions pour la naturalisation ordinaire ;
cependant elle est une grande faveur, puisqu’elle rend admissible à tous les
emplois : à l’exception des fonctions de ministre, de l’entrée dans les
chambres et des droits électoraux, elle accorde tous les autres droits ; il est
donc impossible de ne pas exiger des garanties de ceux qui seraient admis à en
jouir.
Par le domicile pendant cinq
années vous avez demandé une garantie d’attachement au pays ; vous avez rejeté
cette garantie ; on en demande une autre par la condition de l’impôt, et vous
voulez la rejeter en vous écriant que c’est une mesure fiscale. Messieurs, je
ne suis pas arrêté par la crainte qu’on veuille trafiquer de la naturalisation
ordinaire, car remarquez-le, vous ne chargez pas le pouvoir exécutif d’accorder
des lettres de naturalisation selon un tarif. Il n’y a personne ici qui
considère comme un moyen de vendre les naturalisations de mettre une
rétribution sur la délivrance des lettres à l’impétrant. Ce sont les trois
branches du pouvoir législatif qui accordent les naturalisations : comment
voulez-vous qu’elles en spéculent ?
Je sais bien que les discussions de personnes ne se
résolvent pas bien dans le sein d’une assemblée publique et par un vote à haute
voix ; mais il est impossible que des assemblées délibérantes fassent trafic de
leurs délibérations. Comme les discussions laisseront trop de facilité pour
accorder les naturalisations, il faut diminuer cette facilité en demandant des
garanties.
M. Angillis. - Je me repose sur la sagesse de cette chambre et
sur la sagesse des chambres à venir pour n’accorder les naturalisations qu’à
des sujets qui en seront dignes. Je pense, avec MM. Fallon et d Elhoungne qu’il
faut exempter la naturalisation ordinaire de l’impôt. Si elle est une faveur,
il ne faut pas la vendre, et c’est évidemment la vendre que de la faire payer.
Je ne crains pas qu’on fasse abus de la libéralité de
la loi, puisque la chambre sera toujours là pour accorder et refuser la
naturalisation. On ne sera disposé à l’accorder qu’à ceux qui la mériteront.
Je voterai donc, en premier lieu, contre l’amendement
qui a été proposé dans le but de faire payer les naturalisations, car je désire
qu’on n’en pas fasse pas une question d’argent. Si la majorité de la chambre
décide qu’il faut payer un impôt quelconque, alors j’appuierai le sous-amendement
de M. Legrelle pour que le minimum soit de 200 fr., même à 100 fr. s’il est
possible. Il peut se présenter un sujet digne de la nationalité belge qui
n’aurait pas le moyen de payer le droit.
M. Marcellis.
- Je partage de tout point l’opinion de M. Dubus ; je crois qu’il faut
conserver la disposition qui impose une rétribution pécuniaire à ceux qui
demandent la naturalisation ordinaire. Comme l’honorable M. Dubus, j’aurais
voulu des conditions plus complètes pour obtenir la naturalisation. Il me
semble qu’en cela nous aurions été plus conséquents avec nous-mêmes. Il est
inutile de revenir sur ce qui a été dit hier. Je ferai seulement remarquer que
les savantes recherches de M. Fallon m’ont confirmé dans mon opinion : il
a prouvé que les nations les plus libérales, la France comme l’Amérique ont
attaché la condition de séjour à la naturalisation. Mais puisque les choses ne
sont plus entières à cet égard, je crois qu’il faut insister pour le maintien
de ce qui nous reste, et je suis peu frappé de l’idée que la naturalisation est
une libéralité.
Dans certaines circonstances elle pourra être une
libéralité ; les dispositions de l’article 6 de la constitution nous mettront à
même d’être libéraux quand nous le croirons convenable.
Quand une personne
nous présentera des avantages, pour jouir à son tour des avantages qu’offre
notre pays, elle nous adresse une demande, il s’agit là d’un acte politique,
d’une espèce de transaction entre nous d’une part et l’étranger de l’autre ; il
serait étonnant que nous ne pussions pas demander des garanties.
Je ne vois pas dans la mesure proposée une ressource
pour le trésor, mais je n’y vois qu’une garantie semblable à celle qu’exige la
législation française, qui veut que celui qui demande la naturalisation ait un
établissement en France.
Il me semble que le pouvoir législatif fait preuve de
sagesse en s’imposant des règles à lui-même. S’il fallait s’en fier entièrement
à ce pouvoir, il ne fallait pas établir de conditions pour la naturalisation
ordinaire, ni pour la grande naturalisation ; et même nous aurions bien fait de
ne pas non occuper de la loi.
M. de Brouckere. - Dans une séance précédente, la chambre a adopté la proposition de M.
le ministre de la justice, tendant à grever d’un droit l’octroi de la
naturalisation ordinaire. Il est probable que cette proposition aura
aujourd’hui la même approbation qu’elle a déjà reçue. C’est dans cette
prévision que je vais faire une observation. Je veux attirer votre attention vers
un point sur lequel il faut que nous nous entendions.
Si l’on se décide à contraindre l’étranger, tout
étranger, à payer un droit, je crois qu’il faut toujours que la législation se
réserve la faculté de dispenser pour des cas particuliers du paiement de cet
impôt. Si je me sers du mot impôt c’est à dessein, car quoi qu’en ait dit M. le
ministre de la justice, je ne vois qu’un impôt dans la rétribution exigée.
On vous a dit que parmi les
personnes qui demandent la naturalisation, il s’en trouve qui n’ont pas le
moyen de payer le minimum de 200 francs. D’après la disposition de l’article en
discussion, l’on n’accorde la grande naturalisation qu’à l’étranger qui a rendu
des services éminents ; mais il peut se présenter des étrangers qui, sans avoir
rendu des services éminents, auront cependant rendu des services réels : en
leur accordant la naturalisation ordinaire, ce sera un acte rémunératoire,
l’acquittement d’une dette ; il faut donc que le législateur se réserve
d’accorder la naturalisation ordinaire en dispensant de payer l’impôt.
Quelle que soit la loi que vous portiez, nous serons
toujours libres de nous affranchir des règles qu’elle trace ; telle est mon
opinion ; mais si cette opinion n’était pas partagée, je déposerais un
amendement qui laisserait la législature libre de dispenser du paiement de tout
impôt, quand elle croirait convenable d’agir ainsi.
Si cet amendement était rejeté, je supposerais que
vous estimez qu’il est inutile, et qu’alors même qu’il ne serait pas inséré
dans la loi, nous serions toujours libre de dire, dans les lettres de
naturalisation, que l’on dispense l’impétrant du droit.
M. de Haerne.
- L’honorable M. de Brouckere vient de répondre aux objections qui ont été
faites contre la suppression du droit ; il pense que le législateur doit se
réserver de faire des exceptions pour les personnes de mérite.
Je partage, sur ce point, l’avis de l’honorable
membre, et je crois qu’il entre dans la pensée de la majorité de la chambre que
l’on se réserve, en effet, de pouvoir faire des exemptions. Cette réserve me
paraît tout à fait juste ; car il est des personnes qui, sans avoir rendu de
grands services, peuvent en avoir rendu de tels qu’ils méritent la
naturalisation ordinaire.
Si ces observations sont justes, et si on les adopte,
c’est une raison pour nous de ne pas diminuer la somme inférieure portée à 600
fr. Si vous admettez les exceptions, il faut que la règle soit plus sévère. Je
penche donc au maintien de l’article voté dans une séance précédente et à fixer
le minimum à 600 fr.
Un
honorable préopinant vous a dit que dans les naturalisations, il y avait
réciprocité d’avantages pour la nation et pour l’étranger ; j’en conviens pour
quelques cas : quand des naturalisés ont des talents, une industrie, des capitaux,
soit. Mais ne vous figurez pas que tous ceux qui demanderont la naturalisation
seront dans le même cas. Une foule de personnes viendront nous assiéger qui ne
présenteront aucun avantage. Quand il y aura réciprocité d’avantages, on fera
exception à la règle que vous aurez tracée.
Si la naturalisation ordinaire est une faveur, il ne
faut pas la vendre, a dit un orateur. Cette objection ne me paraît pas fondée.
Une faveur n’est que relative, une faveur peut n’être pas considérée comme
telle par tout le monde ; celui qui ne regardera pas la naturalisation comme
une faveur avantageuse s’abstiendra de la demander.
M. le président.
- Voici l’amendement de M. de Brouckere.
L’article 5 serait terminé par ces mots :
« A moins qu’il n’en soit autrement disposé par
l’acte qui accorde la naturalisation ordinaire. »
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Messieurs, je dois m’opposer au sous-amendement,
par les motifs que j’ai eu l’honneur de soumettre à la chambre dans une
précédente séance. J’ai dit qu’il valait mieux garder le silence sur
l’exemption proposée, et s’en tenir aux droits qu’a la législature de modifier
ses actes, que de mettre dans la loi une disposition expresse.
Une disposition expresse est une invitation adressée à
ceux qui demandent les naturalisations, de solliciter l’exemption portée dans
la loi.
Voici, messieurs, un autre
inconvénient qui en résulte ; c’est qu’il est extrêmement fiscal, sans
compromettre la dignité d’une assemblée délibérante, et sans exposer un citoyen
à une investigation pénible, de discuter publiquement sur ses facultés
pécuniaires ; or, parmi les motifs invoqués à l’appui de la demande en
exemption, évidemment la position pécuniaire de l’impétrant sera présentée
comme circonstance à prendre en grande considération.
Je sais qu’il y sera exposé lui-même ; que cette
investigation a lieu et a quelque chose de pénible, lui qui en est le premier
coupable.
Mais il est peu
convenable de faire dans une assemblée le bilan d’un individu quel qu’il soit.
Ces considérations avaient paru assez puissantes pour déterminer à ne pas
formuler l’exemption, qui est sous-entendue. Je crois qu’il n’y a pas de raison
pour revenir sur l’opinion qui semblait être alors celle de la majorité de la
chambre.
M. Dubus.
- Je crois que la réserve proposée par M. de Brouckere serait inutile insérée
dans la loi, puisqu’elle est écrite dans l’article 112 de la constitution. Il
ne faut pas la mettre dans la loi, car ce serait provoquer à demander cette
dispense. Dans toutes les lois où on vote des impôts, nous ne mettons pas la
condition d’exemption quoique nous pussions l’accorder. Je m’opposerai donc à
l’amendement.
M. de Brouckere. - La chambre aura pu remarquer que j’ai dit moi-même
que je ne persisterais dans mon amendement qu’autant qu’on croirait la
législature libre d’exempter de tous droits les impétrants. Si la chambre est
de cet avis, je retire mon amendement et me contenterai de l’insertion au
procès-verbal de ce qui se passe, des déclarations qui sont faites de part et
d’autre.
Si l’on veut que le rédacteur du procès-verbal agisse
ainsi, je retire mon amendement.
Je ferai remarquer que mon amendement est extrait du
projet du gouvernement.
M. le ministre de la justice (M.
Lebeau). - Et j’ai déjà
fait remarquer que ce projet de loi n’avait pas été présenté par moi.
M. de Brouckere.- Si vous ne faites pas insertion au procès-verbal des opinions émises,
on opposera la question préalable aux demandes d’exemption ; on vous dira que
les propositions sont contraires à la loi.
M. de Roo. - La législature ne peut être enchaînée ; il faut
une loi pour accorder la naturalisation, par conséquent une loi postérieure
peut déroger aux lois antérieures.
M. d’Hoffschmidt. - Messieurs, un inconvénient fort grave, selon moi, qui
résulte nécessairement de l’adoption de l’article en discussion, est la
fixation du droit à payer, puisque vous avez fixé un maximum et un minimum : ce
qui me paraît prêter singulièrement à l’arbitraire ; car quelles seront les
bases que vous adopterez pour fixer ce droit ? Sera-ce le mérite ou la fortune,
ou l’un et l’autre ? Dans un cas comme dans l’autre, il est bien difficile
d’apprécier ces choses à leur juste valeur, et bien souvent l’intrigue s’empare
de ces circonstances en faveur du puissant, tandis que le faible doit subir
toutes les rigueurs de semblables dispositions. Evitons donc, messieurs, de
tomber dans les voies qui nous mèneraient inévitablement à l’arbitraire, ce que
nous pouvons faire en rejetant entièrement l’article en discussion, et en cela
nous suivrons, comme l’a dit notre honorable collègue M. Fallon, les vrais
principes politiques admis par tous les peuples libres.
M. d’Elhoungne. - En fixant un maximum et un minimum, vous
interdisez la faculté d’accorder l’exemption.
- La chambre clôt la discussion.
M. Legrelle
demande que le principe soit mis aux voix ; c’est-à-dire qu’on mette aux voix
la question de savoir s’il y aura impôt ou s’il n’y aura pas.
M. Fleussu
appuie la proposition de M. Legrelle, parce que son intention est de voter
contre tout droit.
M. Dumortier rappelle au règlement. - Il faut, dit-il, mettre aux
voix l’amendement adopté et le nouvel amendement, nous ne pouvons pas sortir de
là. On ne peut pas mettre aux voix un principe ; cette manière serait contraire
à notre règlement et aux intérêts du pays, si cela produisait la suppression du
droit. Nous devons exiger des garanties et ne pas rendre trop faciles les
demandes en naturalisation.
Je veux qu’une rétribution soit imposée, parce que
ceux qui demanderont la naturalisation n’auront qu’un but, celui d’exercer des
emplois en Belgique et d’y recevoir des traitements, au grand détriment des
Belges.
Je demande que l’on exécute le règlement, rien que le
règlement.
M. Dubus.
- Il me semble que le règlement a prévu tous les scrupules. Le sous-amendement
de M. Legrelle doit être mis aux voix le premier ; lors même qu’il serait
adopté, il faudra mettre aux voix l’article 5. Alors ceux qui ne voudront pas
de la rétribution voteront contre.
M. Legrelle.
- Conformément au règlement, il faut d’abord mettre aux voix le sous-amendement
qui s’écarte le plus de la proposition principale : ainsi il faut mettre aux
voix le minimum, zéro. (Non ! non !)
- L’amendement de M. Legrelle, par lequel le minimum
du droit se trouve posé à 200 fr., est mis aux voix et adopté.
L’article 5, sous-amendé, mis aux voix, est également
adopté.
_________________
Les autres articles de la loi sont adoptés sans
discussion.
Vote sur l’ensemble du projet
Le projet de loi est soumis, dans son ensemble, à
l’appel nominal.
64 membres sont présents.
50 votent l’adoption.
11 votent le rejet.
3 membres s’abstiennent de voter.
En conséquence, le projet est adopté et sera envoyé au
sénat.
Ont voté pour : MM. Angillis, Berger, Boucqueau de
Villeraie, Coppens, Coppieters, Davignon, de Bousies de Haerne, Dellafaille, F.
de Mérode, de Nef, de Robiano de Borsbeek, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de
Biesme, de Terbecq, de Theux, Dewitte, d’Hoffschmidt, Domis, Donny, Fallon,
Dumortier, Fleussu, Fortamps, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys, Lebeau, Legrelle,
Levae, Marcellis, Mary, Morel-Danheel, Olislagers, Os y, Pirson, Poschet,
Raymaeckers, A. Rodenbach, J. Vanderbelen, van Hoobrouck, Vergauwen, Vuylsteke
et Raikem.
Ont voté contre : MM. Dams. Desmet, d’Huart, Ernst, C.
Rodenbach, Speelmann, Thienpont, H. Vilain XIIII, Watlet, de Brouckere et
Nothomb.
M. le président.
- J’invite les membres qui se sont abstenus à en exposer les motifs.
M. d’Elhoungne. - Je sens la nécessité de la loi, dont j’approuve le fond et presque toutes
les dispositions. Je ne pourrais donc la rejeter. D’un autre côté, elle
renferme un article sur lequel j’ai le malheur de me trouver en dissentiment
avec la chambre.
J’ai une trop haute idée de la dignité de Belge pour
concourir à une loi qui semble mettre le nom belge à l’encan. Voilà les motifs
de mon abstention.
M. Verhagen.
- Je n’étais pas présent à la discussion.
M. Gendebien.
- Retenu chez moi par une indisposition, je n’ai pas assisté aux débats qui ont
eu lieu ; cependant j’en aurais assez entendu pour voter contre la loi, car je
ne puis souffrir, comme l’a très bien dit M. d’Elhoungne, que le nom belge soit
mis à l’encan.
RAPPORTS SUR DES PETITIONS
Deux objets sont à l’ordre du jour, le rapport de la
commission des pétitions et l’ouverture de la discussion du budget de la
guerre.
Sur la proposition de M. de Brouckere, la discussion du
budget de la guerre est remise à demain et la chambre entend des rapports de la
commission des pétitions.
_______________
M. Berger, rapporteur de la commission des pétitions, a la parole. - « Par pétition en
date du 29 janvier 1833, le sieur F. Depage, distillateur de 3ème classe, à
Bruxelles, présente des observations sur le projet de loi relatif aux
distilleries. »
Messieurs, il a été donné lecture de cette pétition,
ainsi que de la suivante, lors de la discussion du projet de loi sur les
distilleries ; en conséquence, votre commission vous propose purement et
simplement le dépôt au bureau des renseignements pour la pétition dont je viens
de parler et pour celle adressée, en date du 21 février 1833, par huit
distillateurs de Louvain, qui réclament contre le projet de loi sur les
distilleries.
- Les conclusions de la
commission sont adoptées.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Gand, le 26 janvier 1833, le sieur
Vestraste, incorporé dans le 1er ban de la garde civique de Gand, à Ostende, demande
à être exempté, aucun arrêté n’ayant mis ce ban en activité. »
Votre commission, messieurs, a l’honneur de vous
proposer le renvoi au ministre de la guerre.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition de Bruxelles, le 21 janvier 1833, la dame
Marie-Jos. Bourdin, veuve du sieur Denis Gérard, pensionné à la caisse de
retraite, demande que la gratification annuelle de 50 fl. qu’elle recevait de
l’ex-gouvernement lui soit continuée, et que, par une disposition législative,
un crédit soit ouvert au gouvernement pour le paiement des gratifications de
cette nature. »
Messieurs, comme la pétitionnaire demande une
disposition législative, tendante à accorder un fonds pour les gratifications
accordées par l’ancien gouvernement à plusieurs personnes, votre commission,
messieurs, a l’honneur de vous proposer le renvoi au ministre de la guerre et
le dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Termonde le 28 janvier 1833, le sieur
J. Antheunis, volontaire dans la garde civique mobilisée de Gand, demande son
exemption de service en vertu de deux motifs sanctionnés par la loi. »
Votre commission a pensé que, si le pétitionnaire
avait des droits à l’exemption, c’est au ministre de la guerre qu’il aurait dû
s’adresser, en conséquence elle vous propose l’ordre du jour.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Bruxelles le 28 février 1833, le sieur
F.-B. Bouvard, Français, proteste contre tout ce qui pourrait être fait contre
lui en violation de la constitution. »
Il paraît, messieurs, que le pétitionnaire a fait
faillite dans sa patrie il craint d’être poursuivi en Belgique par ses
créanciers, et il vous demande de le prendre sous votre sauvegarde, afin de lui
éviter les atteintes qu’on pourrait diriger contre lui. Comme vous ne pouvez
intervenir dans ces affaires, votre commission vous propose l’ordre du jour.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Ligny le 3 mars 1833, le sieur J.-B.
Evetard, bourgmestre de Ligny (Namur), signale un vice, selon lui, existant
dans la loi sur la garde civique, par l’inégale répartition des hommes appelés
au service du premier ban mobilisé. »
Messieurs, c’est une de ces pétitions comme déjà il
nous en est parvenu un grand nombre, signalant les vices dont la loi actuelle
sur la milice est entachée et sur lesquelles on vous a proposé et vous avez
adopté le dépôt au bureau des renseignements et le renvoi au ministre de la
guerre ; votre commission a l’honneur de vous faire la même proposition pour
celle-ci.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Lierre le 1er mars 1833, le sieur G.
Denef réclame le paiement de la somme de 150 fr., qui lui revient encore du
chef de fournitures faites à l’armée française en 1814. »
Messieurs, si le pétitionnaire a des réclamations à
faire de ce chef, c’est au ministre de la guerre ou au gouvernement qu’il doit
s’adresser ; en conséquence la commission vous propose l’ordre du jour.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Steyn-Erckersal le 5 mars 1833, le
bourgmestre de cette commune adresse à la chambre, en faveur d’un de ses
administrés, une demande d’exemption de la milice, en vertu de l’artice 16 de
la loi du 27 avril 1820. »
Le pétitionnaire, à ce qu’il paraît, s’est adressé au
ministre de la guerre, à l’effet à d’obtenir l’exemption ; le ministre n’a pu
prononcer sur cette exemption, par défaut de production de pièces. Le
pétitionnaire s’adresse à vous, messieurs, pour que vous lui accordiez son exemption.
Comme il ne vous appartient pas de décider sur cette exemption, votre
commission a pensé qu’elle pouvait cependant vous proposer le renvoi au
ministre de la guerre.
- Adopté.
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Thielt, le 6 mars 1833, le sieur F-A.
de Lodder, sacristain, réclame son exemption du service de la garde civique,
comme soutien de ses parents. »
Messieurs, le pétitionnaire dit qu’il est le soutien
de ses parents, et de ce chef il demande l’exemption ; comme cette demande du
pétitionnaire ne rentre dans aucune catégorie d’exemptés, et sa pétition
n’étant pas fondée en droit, votre commission a l’honneur de vous proposer
l’ordre du jour.
M. de Roo.
- Je crois que l’on pourrait, comme pour la pétition précédente, renvoyer au
ministre de la guerre, qui statuerait.
M. Berger, rapporteur. - Si la pétition était fondée sur une disposition quelconque, s’il
était fils unique, votre commission eût proposé le renvoi au ministre ; mais le
pétitionnaire déclare qu’il a plusieurs autres frères et sœurs : il demande
seulement l’exemption comme soutien de ses parents, et ne produit même aucune
pièce légale, aucun certificat qui constate ce fait.
M. le président.
- M. de Roo retirant sa proposition, s’il n’y a pas d’opposition les
conclusions de la commission sont adoptées.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Liége le 31 janvier 1833, le sieur J.
Claude Bidaut, habitant Liége depuis 27 ans, demande la naturalisation. »
Votre commission vous propose le renvoi à la
commission ad hoc.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - Par pétition datée de Sevenum (Ruremonde), le 8 mars 1833, le sieur
P. Kersten, cultivateur, ayant deux fils au service demande que l’un d’eux lui
soit renvoyé. »
Messieurs, il paraît que le pétitionnaire s’est déjà
adressé au ministre de la guerre, à l’effet de demander le renvoi d’un de ses
fils, et il paraît aussi que sa demande n’a pu être accordée parce que des
pièces n’ont pu être produites en temps utile. Le pétitionnaire prétend que
différentes circonstances qu’il énumère l’ont empêché de faire cette production
de pièces ; mais comme vous ne pouvez vous constituer juge de ces
circonstances, ni savoir à quel point elles peuvent influer sur la décision, à
intervenir, dans cet état de choses votre commission vous propose le renvoi au
ministre de la guerre.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Herst le 8 mars 1833, le sieur Z.
Reynen, cultivateur, dont deux fils, sur trois, sont au service, demande que
celui qui est illégalement désigné lui soit renvoyé. »
C’est sur des motifs semblables à la précédente que
cette pétition est basée, et les mêmes considérations ont engagé votre
commission à vous proposer le renvoi au ministre de la guerre.
- Adopté.
________________
M. Berger, rapporteur. - « Par pétition datée de Roux, le 6 mars 1833, la dame Angélique
Mignon épouse Goffin, demande le paiement d’une somme d’argent qui lui est due
par le gouvernement, en vertu d’un arrêt passé en force de chose jugée. »
Votre commission a pensé que, si la pétitionnaire a un
arrêt qui condamne le gouvernement, elle n’a qu’à le faire exécuter, mais que
l’assemblée n’a pas à s’en occuper. Par ces motifs, elle a l’honneur de vous
proposer l’ordre du jour.
- Adopté.
________________
M. le président.-
Je vous ferai une observation, messieurs, c’est que dans la loi sur les
naturalisations vous avez oublié de voter le considérant.
M. de Brouckere. - Il en résultera qu’il n’y aura pas de considérant.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Il n’est pas nécessaire.
M. le président.
- S’il n’y a pas d’opposition, la loi sera envoyée au sénat sans considérant. Nous
n’avons plus rien à l’ordre du jour.
La séance est levée à 3 heures et quart.