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Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 6 juin
1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi relatif à l’impôt des
distilleries (A. Rodenbach, Delehaye,
Olislagers, H. de Brouckere,
Dumortier, Poschet)
3) Projet de loi portant organisation
judiciaire. Cour de cassation. Compétences de la cour de cassation, plus
particulièrement quant aux décisions des juges de paix (Gendebien,
Lebeau, Raikem, Gendebien, Raikem, Gendebien, Lebeau, Destouvelles, Liedts),
compétence générale sur les atteintes aux formalités substantielles (Jullien, Liedts, Jonet,
Destouvelles, Liedts, Raikem, Destouvelles, Jullien, Jonet, Fleussu,
H. de Brouckere, Leclercq,
Raikem, Destouvelles, Leclercq, Van Meenen, Barthélemy, Raikem, Fleussu,Van Meenen, Destouvelles, Van Meenen, Fleussu, Raikem, H. de Brouckere), création d’une chambre des requêtes
(Van Innis, de Gerlache, Helias d’Huddeghem)
(Moniteur belge n°160, du 6 juin 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
L’appel nominal
est fait à midi et demi.
M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal ; la rédaction en est
approuvée.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Jacques expose sommairement l’objet de plusieurs pétitions
adressées à la chambre.
- Ces pétitions sont
renvoyées à la commission spéciale.
PROJET DE LOI RELATIF A L’IMPOT DES DISTILLERIES
M. A. Rodenbach. - Je demande la parole pour une motion d’ordre. Il y
a déjà plusieurs jours que M. le ministre des finances a déposé sur le bureau
un projet de loi sur les distilleries ; je voudrais que M. le président
consultât l’assemblée pour savoir si on s’en occupera incessamment, si l’on
nommera une commission pour l’examiner et en faire un rapport à la chambre. La
loi est extrêmement urgente.
M. le président. - On pourra inviter les sections à se réunir dès
demain.
M. Delehaye. - Il vaudrait peut-être mieux nommer une commission que
réunir les sections ; peu de membres connaissent cette matière ; et il pourrait
se faire que dans une section on manquât des notions nécessaires pour l’examen
de la loi.
M. Olislagers. - Il y a peu de membres qui connaissent ce qui est
relatif aux distilleries.
M. H. de Brouckere. - Si la matière est peu connue, c’est une raison de
plus pour l’étudier dans les sections.
M. Dumortier. -
Si une commission a jamais été nécessaire, c’est pour les distilleries, matière
toute spéciale.
Dans une section
il pourra se trouver deux ou trois membres qui posséderont les matières
indispensables, et dans les autres sections il n’y en aura aucun qui connaisse
la partie. Dans une section où l’on n’entendra pas la matière, que verra-t-on ?
Du blanc sur du noir ; on ne comprendra rien. Il faut une commission.
M. Poschet. - J’ai souvent l’honneur de faire partie des commissions
et je puis vous assurer qu’elles ne font pas grand chose.
- La chambre est
consultée.
M. le président. - La majorité est pour le renvoi du projet sur les
distilleries aux sections.
PROJET DE LOI PORTANT ORGANISATION JUDICIAIRE
Discussion des
articles
L’ordre du jour
est la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’organisation
judiciaire.
Article 16
« Art. 16. Il
n’y a point ouverture à cassation contre les jugements rendus en dernier ressort
par les juges de paix dans les matières civiles, si ce n’est pour excès de
pouvoir, absence de publicité ou défaut de motifs. »
M. Gendebien. - Il existe dans la législation actuelle une
véritable anomalie que nous avons aujourd’hui l’occasion de faire disparaître.
D’après la loi de 1790, le pourvoi en cassation n’est pas admis contre les
jugements des justices de paix ; c’est la loi de l’an VIII qui a introduit le
pourvoi des jugements des tribunaux de paix pour cause d’incompétence ou pour
excès de pouvoir. L’article 456 du code de procédure a autorisé l’appel des
jugements des tribunaux de paix pour cause d’incompétence, sans parler de
l’excès de pouvoir.
De la combinaison
de ces diverses dispositions législatives il en résultait que le pourvoi en
cassation contre les jugements des justices de paix était inadmissible pour
excès de pouvoir et qu’on ne pouvait en appeler que pour cause d’incompétence.
Il me semble, messieurs, vu les dispositions économiques où nous sommes, que
nous pouvons ici diminuer la besogne de la cour de cassation et par conséquent
son personnel, en faisant disparaître l’anomalie. S’il peut y avoir recours en
cassation pour incompétence, à plus forte raison le recours doit être admis
pour excès de pouvoir. Un juge peut être compétent et commettre un excès de
pouvoir ; et le vice résultant de l’excès de pouvoir est aussi grand que celui
qui résulte de l’incompétence. Je pense qu’on pourrait remédier aux
inconvénients de la législation en supprimant une ligne et demie à l’article 16
et en le restreignant à ces mots :
« Il
n’y a point ouverture à cassation contre les jugements rendus en dernier
ressort par les juges de paix dans les matières civiles. » On décidera
ensuite ailleurs que l’appel sera également reçu, pour excès de pouvoir et pour
incompétence. Quand vous arriverez à l’organisation des cours d’appel, vous
compléterez la disposition de l’article 16. Cette modification me semble indispensable
dans l’intérêt de la justice et des justiciables.
M. Lebeau. - Je veux faire une simple observation. Il y aura au
moins pourvoi en cassation, contre les jugements des justices de paix dans
l’intérêt de la loi. J’ai peut-être mal compris les développements du
préopinant ; mais dans le doute, un scrupule m’empêcherait de voter l’adoption
de son amendement.
M. Gendebien. - C’est le ministère public qui se pourvoit en
cassation, dans l’intérêt de la loi ; le pourvoi du ministère public est
indépendant de celui des parties civiles ; il peut toujours se pourvoir dans
l’intérêt de la loi.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Messieurs, il m’a paru, et il a paru de même à
votre section centrale, que le recours en cassation contre les jugements en
dernier ressort des juges de paix, devait avoir lieu, et pour l’absence de
publicité et pour défaut de motifs. En effet, ces conditions sont des garanties
constitutionnelles et un juge de paix qui ne motiverait pas son jugement, ou
éviterait la publicité, manquerait essentiellement à son devoir. Ce seront des
cas extrêmement rares, mais au moins, à cet égard, faut-il une garantie dans la
loi, afin que les dispositions constitutionnelles soient exécutées.
Autoriser l’appel
dans ces circonstances, ne me paraîtrait pas tout à fait rationnel. La loi a
fixé tel taux où le juge de paix prononce en dernier ressort ; or, quand il
prononce en dernier ressort, il ne peut pas y avoir lieu à appel, car
autrement, il ne prononcerait pas en dernier ressort. Et s’il prononce en
dernier ressort, il faut bien autoriser le recours en cassation lorsque, dans
son jugement, il y a défaut de formalités essentielles et constitutionnelles.
Quant au point
d’incompétence, mon honorable préopinant vous a parfaitement exposé que les
jugements rendus par incompétence étaient sujets à appel. Mais indépendamment
de ces vices qui peuvent se trouver dans un jugement, il peut se trouver
d’autres vices provenant de l’excès de pouvoir. Un juge de paix peut empiéter
sur un autre pouvoir. Par exemple un juge de paix peut empiéter sur le pouvoir
législatif, et on l’a déjà vu. Eh bien, messieurs, dans ces cas, qui seront
très rares il me semble qu’il y a lieu à déférer la sentence à la cour de
cassation.
De
cette manière, ou ne distraira pas les justiciables de leurs juges ; on ne leur
causera pas grand dommage en portant devant la cour de cassation les pourvois,
lorsqu’il s’agira d’excès de pouvoir, d’absence de publicité et de défaut de
motifs. Et relativement aux questions de compétence qui sont les questions qui
se présentent le plus fréquemment, le code de procédure a satisfait aux
intérêts des parties, en déclarant que les parties seraient recevables en appel.
Il me semble donc,
messieurs, qu’il n’y a pas lieu à réformer l’article 16, ni même à déclarer
que, dans tous les cas, il y a recours en cassation contre les jugements des
juges de paix.
M. Gendebien. - Il me semble qu’on n’a nullement répondu aux
observations que j’ai présentées à la chambre, et que l’on a résolu la question
par la question.
J’ai dit qu’en
matière d’incompétence, on n’était pas obligé de recourir à la voie extrême de
la cassation, et que les juges suprêmes de cassation n’étaient pas obligés de
perdre leur temps à l’examen d’un objet aussi minime ; j’ai dit qu’il devait en
être de même pour excès de pouvoir, si on a autorisé l’appel et si on a exclu
la cassation pour le cas d’incompétence, je demande pourquoi il n’en serait pas
de même pour excès de pouvoir ; mais, dit-on, les parties n’en éprouveront pas
grand préjudice parce que les cas seront rares. Messieurs, l’incompétence d’un
juge s’aperçoit à la première vue, et il est bien peu d’hommes versés dans la
pratique, qui ne voient si un juge est compétent, oui ou non. Mais quand il
s’agit d’excès de pouvoir c’est tout autre chose.
Il
en résultera que vous allez multiplier les procédures par devant la cour de
cassation, que vous favoriserez la chicane, et que vous engagerez des hommes de
bonne foi à y aller.
Quel inconvénient
y a-t-il à interdire purement et simplement aux parties intéressées le recours
en cassation, et à renvoyer le tout en appel ? J’y vois bénéfice pour tout le
monde, pour les parties, pour le trésor, puisqu’en ne surchargeant pas la cour,
on peut diminuer le personnel ; et vous éviterez par là une anomalie dans la
loi.
D’après ces
considérations, je crois qu’il y a lieu de retrancher à l’article tous les mots
qui le terminent.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Messieurs, je ne crois pas qu’en attribuant aux
cours supérieures la connaissance des appels des jugements des tribunaux de
paix, on remédiât aux inconvénients que l’on a signalés. En effet, après qu’il
a été prononcé sur l’appel, les plaideurs ont toujours la faculté de recourir
en cassation, et l’on n’évitera ni les lenteurs, ni les frais.
On a dit,
messieurs, que les questions de compétence se pouvaient décider à la première
vue ; qu’il n’en est pas de même des questions d’excès de pouvoir ; je ne crois
pas qu’il en soit tout à fait ainsi. On
sait qu’à propos des procès de compétence, il s’est souvent présenté des
questions extrêmement ardues ; je pourrais citer telle question, sur la
compétence, qui a été décidée de deux manières opposées par la cour de
cassation de France ; ce qui fait voir que ces questions présentent certaines
difficultés. Les questions d’excès de pouvoir, au contraire, me paraissent plus
faciles à apercevoir. On a vu porter devant la cour de cassation de France des
cas où les juges de paix avaient fait des règlements contenant des dispositions
législatives, et ces dispositions réglementaires ont dû être cassées ; il y
avait alors excès de pouvoir. Dans un tel cas, je crois qu’il est plus
raisonnable que ce soit la cour de cassation qui en connaisse, que la cour
d’appel ; il s’agit d intérêt public, car il y a intérêt public, lorsqu’il y a
excès de pouvoir.
Vous avez déféré
les conflits d’attributions à la cour de cassation ; souvent dans ses cas il
s’agit d’excès de pouvoir, soit de la part du juge, soit de la part de
l’administration. L’analogie veut que toutes les questions relatives aux excès
de pouvoir soient dévolues à la cour suprême.
D’ailleurs si dans
les cas d’excès de pouvoir, on établissait l’appel, la décision ne serait pas
définitive ; il ne serait pas jugé en dernier ressort.
Quant
au défaut de publicité et de motifs, lorsqu’on annule le jugement du tribunal
de paix, on annule un jugement en dernier ressort, sur lequel il n’y a pas
d’appel. Si l’on déclarait que l’appel est recevable, comme le juge d’appel, en
réformant, doit prononcer sur le fond, ou renvoyer à une autre juridiction
égale à celle qui a prononcé primitivement, il s’ensuivrait que sur l’objet le
plus mince, la cour connaîtrait du fond, et alors il faudrait déclarer que les
juges de paix ne jugent pas en dernier ressort.
Il
me semble que dans l’article en discussion, la ligne est bien tracée. Les cas
soumis à la cassation seront les plus rares, ils intéressent la constitution,
ou ils sont d’un grand intérêt public, et dans tous ces cas il est juste
d’appeler la cour suprême à décider. Par son institution, cette cour s’occupe
plutôt des intérêt publics que de l’intérêt des parties ; elle prononce sur le
jugement en lui-même et ne juge pas le procès.
M. Gendebien. - Je retire mon amendement, l’anomalie existera
jusqu’à la révision du code de procédure. Je me réserve de reproduire alors mes
observations.
M. Lebeau. - Je ne sais si je me suis bien expliqué. Je persiste
à croire que l’article, rédigé comme il l’est, ne dit pas ce qu’on veut lui
faire dire. Je pense qu’il faudrait mettre, qu’il n’y a pas de recours en
cassation dans l’intérêt de la loi, si ce n’est pour excès de pouvoir. La
locution extrêmement générale qui commence l’article 16 paraît exclure cette
faculté.
M. Destouvelles. - D’après l’article, « il n’y a point ouverture
en cassation contre les jugements rendus en dernier ressort par les juges de
paix dans les matières civiles si ce n’est pour excès de pouvoir, absence de
publicité ou défaut de motifs. » Lorsqu’il s’agit du pourvoi interjeté
dans les intérêts de la loi, quand le jugement relativement aux parties
intéressées est coulé en force de chose jugée parce qu’elles ont laissé expirer
les délais, c’est l’article 28 qui règle ce pourvoi.
M. Lebeau. - Cela suffit.
M. Liedts. - L’article 28 suppose qu’il y a pourvoi.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Lors de la discussion de l’article 28, la question
sera soulevée.
M. Lebeau. - Que la
correction soit dans l’article 16 ou dans l’article 28, peu importe.
- L’article 16 est
mis aux voix et adopté.
Article 17
« Art. 17. La
cour de cassation ne connaît pas du fond des affaires.
« Elle casse les
arrêts et jugements rendus sur des procédures dans lesquelles les formes
substantielles ou prescrites à peine de nullité, ont été violées, ou qui
contiennent quelque contravention expresse à la loi, et elle renvoie le fond du
procès à la cour ou au tribunal qui doit en connaître. »
M. Jullien. - Messieurs, je ne puis donner mon assentiment à cet
article, ni en la forme ni au fond, parce que sa rédaction me paraît très
obscure, et ferait dire à la loi tout autre chose que ce qu’elle veut dire.
L’article ou s’exprime ainsi :
« La cour de
cassation ne connaît pas du fond des affaires.
« Elle casse les
arrêts et jugements rendus sur des procédures dans lesquelles les formes
substantielles ou prescrites à peine
de nullité, ont été violées, qui contiennent quelque contravention expresse à
la loi. »
Avec ces deux
disjonctives on en pourrait croire que les mots « ou qui contiennent
quelque contravention, etc. » s’appliquent aux actes de procédures dans
lesquelles les formes ont été violées, tandis que dans l’intention de la loi,
ils n’ont en vue que les jugements et arrêts qui contiennent quelque
contravention expresse à la loi.
On a copié la loi
française qui dit : « Le tribunal de cassation ne peut connaître du fond
des affaires, mais elle casse les jugements rendus sur des procédures dont les
formes ont été violées, ou qui contiennent quelque contravention expresse à la
loi. »
On voit qu’ici, la
phrase ne présente pas d’obscurité, parce qu’il n’est pas question de deux
espèces de formes violées, et que la disjonctive « ou », n’étant pas
répétée, le dernier membre de la phrase s’applique aux jugements. Voilà pour la
forme.
Au fond, je ne
comprends pas bien ce que la section centrale a voulu en donnant ouverture à la
cassation pour violation des formes substantielles des actes de procédures.
On a encore suivi
ici le texte des lois françaises des 1er décembre 1790 et germinal an II. Mais
ces lois ont été faites dans un temps où il existait autant de coutumes que de
provinces ; il fallait bien ouvrir une voie pour obtenir l’annulation des
jugement dans lesquels les formes de procéder, consacrées par l’usage, ou
prescrites à peine de nullité, auraient été violées, mais depuis la publication
du code de procédure, on ne connaît plus de nullités d’actes de procédures si
les formalités n’ont pas été prescrites à peine de nullité.
C’est la
disposition précise de l’article 1030 de ce code, qui porte : « Aucun
exploit ou acte de procédure ne pourra être déclaré nul, si la nullité n’en est
pas formellement prononcée par la loi. »
Il en résulte
évidemment que toute formalité qui n’est pas prescrite à peine de nullité ne
peut, si elle est violée, donner de plein droit ouverture à cassation.
Ce n’est pas sans
raison que le code de procédure a pris à tâche de déterminer toutes les formes
de procédures qui devaient être suivies à peine de nullité. Il a voulu mettre
fin à ces interminables chicanes au moyen desquelles on éternisait les procès
avant qu’on eût à peine abordé le fond.
Ce sont seulement
les actes de procédure dans lesquels ces formes ont été violées qui peuvent
être annulés, mais tous les autres sont valables, sauf à les régulariser s’il y
a lieu.
Si d’un côté le
code de procédure détermine ces nullités, de l’autre il indique les moyens de
les couvrir ; mais pourriez-vous me dire quand et comment on couvrirait ce que
le projet appelle une nullité de forme substantielle ?
A défaut de règle
sur ce point, tout jugement pourra donc être attaqué par la voie de cassation
sur le prétexte que dans les actes de procédure, des formes substantielles,
auxquelles on donnera toute élasticité qu’on voudra, auront été violées.
Je sais bien qu’un
acte peut être déclaré nul, si les formes substantielles y manquent, parce
qu’un acte quelconque ne peut pas exister sans substance, c’est un axiome de droit
que je comprends.
Dans un acte de
bail par, exemple, si vous ne stipulez ni le prix ni la durée, il n’y aura pas
de contrat de bail.
Si dans une
assignation, le jour de comparution n’est pas indiqué, il n’y a pas
d’assignation, voilà des formes substantielles, et dans tous les actes où ce
qui est de l’essence de l’acte manque, on peut dire raisonnablement qu’il n’y a
pas d’acte du tout.
Il
faut laisser à la jurisprudence le soin de distinguer ces nullité
extraordinaires de celles formellement prévues de peine de nullité. Mais il y a
danger à minorer ici et à consacrer d’une manière absolue le droit de se
pourvoir en cassation, pour violation de formes substantielles, qu’on ne peut
ni caractériser ni définir, et dont on ne connaît aucun moyen légal de couvrir
la nullité.
Ce n’est donc en
définitive qu’un nouvel appât pour la chicane, et un nouveau moyen de
multiplier les procès.
Je proposerai, en
conséquence, de supprimer les mots « formes substantielles, » et
alors l’article sera clair et régulier dans la forme et au fond.
M. Liedts. - L’honorable préopinant a commencé par critiquer la
rédaction de l’article, qu’il trouve obscure et ambiguë ; je crois comme lui,
messieurs, qu’elle pourrait être plus claire et j’aurai l’honneur d’en
présenter une qui fera, je pense, disparaître tous les doutes.
Arrivant au fond
de l’article, l’honorable préopinant a dit qu’il ne comprend pas ce que l’on
entend par « formes substantielles, » et il a demandé le retranchement
de ces mots. Messieurs, il est vrai, comme l’a dit le préopinant que d’après un
article du code de procédure, les actes de procédure ne peuvent être annulés
que dans les cas où la nullité a été prononcée par la loi, mais le préopinant
ne peut pas ignorer que la jurisprudence a admis à cette disposition une
exception relativement aux formes qui tiennent à la substance d’un acte, aux
formes qui font que l’acte existe.
Si l’on veut
l’exemple d’une forme substantielle, je citerai celui d’un exploit
d’ajournement signifié par tout autre qu’un huissier. Cet acte étant
essentiellement du ministère des huissiers, s’il était signifié par un notaire,
l’acte serait nul, comme étant dénué des formes qui constituent l’essence de
l’acte.
Or,
dans tous les cas où de semblables formes ont été violées et non couvertes,
aussi bien que dans ceux où des formes prescrites à peine de nullité ont été
enfreintes, la cassation doit être admise ; telle est d’ailleurs la
jurisprudence constante ; je pense donc que l’article doit rester tel qu’il
est.
Il me reste une
autre observation à faire sur l’article 17.
La loi que nous
faisons est une loi d’application, les principes s’en trouvent consignés dans
la constitution : il est donc tout à fait inutile de répéter dans cet article
le principe que la cour de cassation ne connaît pas des affaires, principe
littéralement écrit dans l’article 95 de la constitution ; je demanderai en
conséquence le retranchement du paragraphe de l’article 17.
M.
Jonet. - Messieurs, je pense aussi que l’article n’est pas
assez clairement rédigé. Si je ne me trompe, l’article 17 a pour but les arrêts
et jugements en matière civile et en matière criminelle. En ce qui concerne les
jugements en matière criminelle, l’article me paraît juste, car les formes
doivent être rigoureusement observées, et rien n’en peut dispenser.
Mais, en est-il de
même en matière civile ? En matière civile, les formes sont établies dans
l’intérêt des parties ; il est libre aux parties de demander ou de ne pas
demander la nullité pour vice de forme. Si elles demandent la nullité, elles
peuvent se pourvoir en cassation. Je suppose qu’un exploit ne contienne ni le
nom de l’huissier, ni la date ; si les parties n’en demandent pas la nullité,
elles couvrent cette nullité, et elles ne peuvent ensuite demander, ni la
nullité de la procédure, ni celle du jugement.
Je le répète ; il
faut faire pour la procédure une distinction entre les affaires criminelles et
les affaires civiles. Dans les affaires criminelles, l’article est bon ; mais
pour les affaires civiles, sa rédaction me semble devoir donner lieu à de
grandes difficultés, et je crois qu’il serait à propos de le renvoyer à la
section centrale pour nous proposer une autre rédaction.
M. Destouvelles. - On a demandé la suppression du premier paragraphe
de l’article 17, parce qu’il est inutile d’insérer dans la loi ce qui est écrit
dans la constitution. Cette observation, messieurs, n’a pas échappé à la section
centrale, mais elle a considérer que ce premier paragraphe se lierait
parfaitement avec le second, et qu’après avoir déclaré que la cour de
cassation ne connaissait pas le fond des
affaires, on en venait mieux à dire ce qu’elle devait connaître. La loi de l’an
VIII porte la même disposition.
On dit que la
disjonctive « ou » jette de l’incertitude sur l’article et on
critique beaucoup les expressions de formes substantielles qui ne se trouvent
pas dans la législature française.
Pour remédier au
défaut de clarté, je suis loin de former aucune espèce d’opposition à toutes
les rectifications ; plus les lois sont claires et plus elles sont faciles pour
les juges à les appliquer, et pour les parties à les comprendre.
Quant aux formes
substantielles, ce sont celles qui, quoique non prescrites à peine de nullité,
sont cependant telles que sans leur accomplissement, l’acte ne peut exister. Il
en est de nombreux exemples, et si nous avions ici nos recueils de
jurisprudence, il ne faudrait pas nous livrer à de grandes recherches pour les
trouver.
Par exemple, le
code de procédure ne parle pas du nombre de juges qui doivent siéger pour
valider le jugement ; cependant un nombre insuffisant de juges est une cause de
nullité. Il existe d’autres exemples qu’il est inutile de chercher. C’est
d’après ces motifs qu’on se borne à dire : « formes substantielles. »
Il
y a dans le code de procédure une foule d’articles qui ne sont pas prescrits à
peine de nullité et qui cependant entraînent la nullité, et contre lesquels vient
échouer l’article 1030, qui veut qu’il n’y ait pas d’autre nullité que celles
prescrites par la loi.
Quant
à la distinction entre la procédure criminelle et la procédure civile, je crois
qu’elle est inutile. On a dit si une assignation n’est pas régulière, on peut
en demander la nullité, et, quand on ne la demande pas, la nullité est
couverte. Mais ce n’est pas de ces nullités que nous parlons ; nous entendons
celles qui ont survécu à tous les jugements. Au surplus, l’article, ainsi qu’il
est rédigé, est reproduit dans toutes les lois françaises, dans les lois de
1790, 1795, et, enfin, dans la loi de 1799. Depuis la rédaction de la loi
organique, de ventôse an VIII, qui régit encore la France, la question n’a
jamais été agitée devant la cour de cassation, du moins à ma connaissance.
M. le président. - M. Liedts
propose de supprimer le paragraphe premier.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Messieurs, quant à la rédaction de la disposition
qui est maintenant soumise à la délibération, tout le monde désire, sans doute,
que cette rédaction soit la plus claire possible. Je ne m’occuperai donc pas,
en ce moment, de ce qui la concerne, je ne parlerai que sur le fond même des
dispositions.
Cet article, comme
on l’a observé, est extrait de la constitution de l’an VIII, dont l’article 66
est relatif à la cour de cassation ; seulement l’article en discussion ajoute
l’expression « formes substantielles » aux formes prescrites à peine
de nullité. Aujourd’hui cette expression est nécessaire. La constitution de
l’an VIII a été rédigée sous l’empire de la loi du 4 germinal an II, qui
statuait que toutes les formes prescrites par les lois depuis 89 devaient être
observées, à peine de nullité. Il faut remarquer que cette loi de l’an II ne
s’appliquait pas aux lois antérieures et notamment à l’ordonnance de 1667 qui
traçait des règles de procédure. Sous l’empire de l’ordonnance, lorsque l’on
n’avait pas fait valoir une nullité quelconque qui pouvait se rencontrer dans
un acte de la procédure, la nullité était couverte et l’on ne pouvait plus
l’opposer.
L’expression qui
se trouve dans la constitution de l’an VIII a été insérée sous l’empire d’une
législation qui ne faisait aucun obstacle à ce que les nullités de forme
pussent être couvertes par le silence des parties, et par les actes de
procédure qu’elles faisaient ensuite. La distinction faite par l’honorable M.
Jonet, des matières civiles et des matières criminelles, ne me paraît pas
devoir fixer l’attention de la chambre ; les dispositions de la constitution de
l’an VIII ne donnent lieu à aucun doute à cet égard. On n’a jamais dit que les
nullités en matière criminelle pouvaient être couvertes ; on ne peut pas
l’induire de la législation actuelle.
Quant aux
formalités prescrites à peine de nullité, il ne peut y avoir aucun doute
qu’elles donnaient ouverture à cassation dès que les nullités n’avaient pas été
couvertes, et la législation détermine les termes dans lesquels les nullités
sont couvertes.
J’en viens aux formes substantielles. Cette expression s’applique aux
matières civiles et aux matières criminelles. La jurisprudence est maintenant
fixée en ce qui concerne les formes substantielles : ce sont les formes omises,
les. défauts pour lesquels on prononce la nullité quand la loi ne la prononce
pas. Les formes substantielles sont celles qui tiennent à la substance de
l’acte. Il peut se trouver des formes auxquelles la loi n’attache pas la peine
de nullité, et qui cependant entraînent la nullité des actes où elles se
trouvent omises.
Je
crois donc que cette expression de formes substantielles peut très bien être
conservée sauf rédaction ultérieure.
Le droit de
défense est substantiel, cependant la loi criminelle n’a pas prononcé la
nullité, quand il a été contrarié.
M. Destouvelles. - Messieurs, j’ai rédigé autrement l’article. Voici
ma rédaction : « Elle casse les arrêtés et jugements qui contiennent
quelque contravention expresse à la loi ou qui sont rendus sur des procédures,
sur lesquelles les formes soit substantielles, soit prescrites à peine de
nullité, ont été violées.
M. Jullien. - Messieurs, je crois toujours qu’en adoptant la
rédaction, telle qu’elle est, qu’en introduisant l’expression de formes
substantielles, vous allez donner ouverture à cassation, quand le code de
procédure la refuse, et mettre la loi en opposition avec le code de procédure,
en ce sens qu’on alléguera sans cesse qu’il y a manque de formes
substantielles. Pourquoi admet-on dans la jurisprudence des cours, la nullité
d’un acte où la substance manque ? Parce que sans la forme substantielle, il
n’y a point d’acte. Le code de procédure n’avait pas besoin de dire qu’on
annulerait un acte ou la forme substantielle manquerait, puisque, dans ce cas,
il n’y a pas d’acte.
Mais
le code de procédure avait besoin de déterminer, pour mettre fin aux chicanes,
en quoi consistaient les formes que l’on voulait requérir sous peine de
nullité. Eh bien les actes de procédure où ces formes ne manquent pas sont
valides.
Cependant vous
dites en général : les actes de procédure où les formes substantielles
manquent. Pour motiver cette addition on est venu nous citer l’exemple d’un
notaire qui ferait un exploit et l’on a dit qu’il ferait bien annuler
l’exploit. Je dis qu’il est inutile de l’annuler parce qu’il n’y a pas
réellement d’exploit. Un notaire ne peut pas plus faire un exploit, qu’un
huissier ne peut faire un testament. En jurisprudence il est reçu que tous les
actes sont nuls quand les formes substantielles n’existent pas ; c’est donner
lieu à beaucoup de procès.
M.
Jonet. - On a dit que les vices que j’avais signalés se
trouvaient dans la législation française antérieure à celle de l’an VIII ; cela
est vrai mais puisque cela se trouve dans la législation, s’ensuit-il que l’on
doive conserver la rédaction proposée, du moment que les vices existent ? Il
importe de les prévenir et il importe de rédiger l’article de manière à lever
toute difficulté à cet égard. Si la chambre adopte l’article 17, il est évident
qu’un individu se croira fondé à se pourvoir en cassation contre un arrêt rendu
dans lequel il croira trouver des formes de procédure vicieuses, même quand la
nullité sera couverte. Vous répondez qu’il ne sera pas recevable ; mais alors
vous l’avertissez trop tard ; il vaut bien mieux ne pas lui donner occasion de
se pourvoir en cassation.
L’article tel
qu’il est conçu autorise tout individu à se pourvoir en cassation contre tout
jugement rendu ; vous évitez cet inconvénient avec la distinction que je
demande.
Avec cette
distinction des matières en civiles et en criminelles, les recours en cassation
n’auront pas lieu uniquement parce qu’il manquera de formalité.
On n’aura recours
en cassation que contre les formes substantielles qui n’ont pas été observées,
ou dont le dispositif est contraire à la loi ; mais dans tout cas, en matière
civile, vous ne pouvez vous pourvoir en cassation.
Je
persiste dans mon observation, je pense qu’il faut renvoyer l’article à la
section centrale, ou bien je propose deux amendements, par lesquels l’article
17 se trouvera modifié de la manière suivante
Après le mot
« rendu, » qui se trouve à la première ligne du deuxième paragraphe,
ajoutez ceux-ci : « en matière criminelle, correctionnelle et de
police. »
Il faut dire
ensuite dans un troisième paragraphe :
« En matière
civile, elle casse les arrêts et jugements qui contiennent, soit dans leur
rédaction, soit dans leur dispositif, quelque contravention à la loi, et elle
renvoie le fond du procès à la cour ou au tribunal qui doit en
connaître. »
M. Fleussu. - On semble généralement d’accord, messieurs ; que la
rédaction de l’article 17 doit être rendue plus claire. Je suis aussi de cet
avis ; mais je pense qu’il faut y laisser subsister les mots « formalités
substantielles. » On a dit que cela était inutile, parce qu’un acte à qui
il manque quelque formalité substantielle n’existe pas. Je dis, moi, qu’il
existe tant que la nullité n’en a pas été prononcée ; il faut qu’une autorité
prononce cette nullité, pour enlever à cet acte son existence, et je suppose
que l’absence d’une formalité substantielle fût dans le jugement même, peut-on
dire que le jugement n’existerait pas ? Non sans doute, il faudrait bien qu’une
autorité supérieure à celle qui l’aurait rendu en prononçât la nullité ; jusque
là, il, conserverait tous les effets d’un jugement régulier. Un des préopinants
a toujours raisonné dans une seule supposition, celle où une nullité existant,
on n’en aurait pas cependant demandé la nullité.
Alors
il est vrai la nullité serait couverte ou pourrait l’avoir été, c’est un
principe reconnu, ; mais supposez au contraire que la nullité ait été demandée,
qu’un jugement soit intervenu sur cet incident, que méconnaissant le fait de la
nullité, en ait rejeté la demande, il faut bien que l’on puisse se pourvoir
contre un tel jugement pour le faire annuler. Vous voyez que quand on examine la
question dans un sens opposé à celui sous lequel l’a présentée l’honorable M.
Jullien, on voit qu’il n’y a pas lieu de retrancher de l’article les mots « formalités substantielles, » et
que la section centrale a eu raison de le rédiger ainsi.
M. H. de Brouckere. - La seule question qui se présente sur l’article 17
est celle de savoir s’il faut en retrancher les mots de « formalités
substantielles, » ou s’il faut les y maintenir. Je partage à cet égard
l’opinion émise par l’honorable M. Jullien.
Il est évident que
par cet article la section centrale n’a pas voulu prévoir de nouveaux cas, mais
qu’elle a voulu en rendre la rédaction plus claire en y ajoutant ces mots. Eh
bien, moi je crains que par eux la rédaction n’en devienne plus obscure. Ces
mots ne se trouvent pas dans la loi française, et cependant il est de
jurisprudence constante que là où il y a un acte dépourvu d’une formalité
substantielle, on en a prononcé l’annulation, et toujours on a décidé qu’il y
avait ouverture à cassation, par le défaut d’une formalité substantielle. Si
vous laissez aujourd’hui ces mots dans l’article, on en tirera la conséquence
qu’il y a d’après la loi nouvelle de nouveaux cas d’ouverture à cassation et à
tout propos vous verrez surgir des procès, où l’on soutiendra que des
formalités substantielles n’ont pas été observées, et toute formalité, quelque
insignifiante qu’elle puisse être, sera présentée comme substantielle.
Le
mot est assez vague par lui-même pour que la chicane puisse en abuser. Il est
d’autant plus essentiel de supprimer ces expressions que peut-être tout à
l’heure, vous allez décider qu’il n’y aura pas de chambre des requêtes à la
cour de cassation et qu’une foule de procès viendront encombrer les rôles de la
chambre civile. Je crois cependant que si la chambre se décidait à la
suppression de ces mots, il faudrait insérer dans le procès-verbal que c’est
parce qu’elle les a jugés inutiles ; sans cela on pourrait en induire qu’il n’y
a pas lieu à cassation pour le défaut de formalités substantielles.
M. Leclercq. - Messieurs, en rendant compte à la chambre de ce qui
s’est passé à la section centrale à propos de la rédaction de l’article 17, je
vous ferai comprendre mieux peut-être qu’on ne l’a fait jusqu’ici, que les mots
dont on demande le retranchement ne sont pas inutiles. Dans la section centrale
on s’est reporté au texte de la loi ancienne., où il est dit qu’il y a
ouverture à cassation, lorsqu’il y eu violation des formes. La loi ne disait pas
autre chose.
On sait que par
les mots « formes » en jurisprudence, on entend et les formalités
substantielles et celles qui sont prescrites à peine de nullité. Dans le
principe, cette interprétation donna lieu à beaucoup de débats ; mais enfin la
jurisprudence se fixa, et elle est restée invariable.
La section
centrale a pensé qu’il serait prudent de formuler en loi la jurisprudence
elle-même, pour éviter, à l’avenir, tout débat. D’abord on avait dit : elle
casse les arrêts et jugements rendus sur des procédures dans lesquelles les
formes prescrites à peine de nullité ont été violées ; mais on s’est aperçu
bientôt que cette rédaction n’était pas complète, et on ajouta les mots
« formalités substantielles. »
On
prendra ces mots non pas comme créant des nouveaux cas d’ouverture à cassation
. mais en leur donnant le sens que leur a donné la jurisprudence. Un préopinant
a dit : aujourd’hui, quoique la loi française ne porte pas ces mots, on casse,
quand il y a défaut de formalités substantielles.
C’est pour cela
que nous avons cru devoir le dire dans l’article, afin que les débats auxquels
la question a donné lieu sous l’ancienne loi ne se renouvellent plus. Cependant
la rédaction de l’article 17 ne paraît pas très claire, et j’adopterais
volontiers l’amendement de M. Jonet.
- L’orateur
termine en donnant lecture de cet amendement. (Voyez plus haut.)
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Je ferai une observation sur la distinction
introduite par l’amendement de M. Jonet, entre le pourvoi en matière civile, et
le pourvoi en matière criminelle. Il résulterait de sa distinction qu’en
matière civile on ne pourrait jamais casser pour violation de formalités
antérieures au jugement. Vous savez cependant qu’on peut se pourvoir en cassation
non seulement contre un arrêt contradictoire, mais même contre un arrêt par
défaut ; la seule différence qu’il y ait entre ces pourvois consiste dans
l’amende à payer, qui est moindre dans un cas que dans l’autre.
Or, il peut arriver que la formalité essentielle, qui autorise le
pourvoi, ait été omise dans un acte de procédure antérieur au jugement, et
qu’elle n’ait pas été couverte : par exemple, on aurait surpris un jugement de
défaut contre une partie, parce que son avoué n’aurait pas été appelé à
l’audience, l’acte d’avenir ne lui ayant pas été notifié, ou l’ayant été de
manière à ce qu’il ne pût être connu de lui. Il en serait résulté une
condamnation contre une partie qui n’aurait pas été entendue. Je suppose que
par l’effet de telle ou telle circonstance, elle eût laissé passer les délais
de l’opposition, dans ce cas la partie condamnée pourrait assurément se
pourvoir en cassation, et il me semble qu’on ne pourrait se dispenser de casser
le jugement qui l’aurait condamnée sans l’entendre.
M. Destouvelles. - Je ne crois pas nécessaire d’introduire dans
l’article la distinction proposée par M. Jonet, et appuyée par M. Leclercq,
entre les nullités en matière criminelle et en matière civile ; lorsque la
jurisprudence suivie pendant un si grand nombre d’années a depuis longtemps été
invariable sur la question, je crois qu’il y aurait un grand inconvénient à
adopter une nouvelle rédaction qui pourrait donner lieu à de nouveaux doutes et
à de nouvelles procédures. L’article, sauf le passage qui a donné lieu à la
correction proposée par moi, est très clair et très précis, et quand il faudra
l’appliquer, ce sera d’autant plus facile qu’on aura pour cela l’expérience de
40 ans. Ce qui prouve au reste que les mots « formalités
substantielles » doivent être conservés, ce sont les observations de M.
Sirey sur l’article 1030 du code de procédure civile.
Ici
l’orateur lit un long passage de Sirey, et poursuit ainsi : M. Sirey cite
encore une foule d’exemples, où il prouve que bien que la nullité ne soit pas
prononcée par l’article 1030, il faut cependant la reconnaître, parce qu’elle
tient à la substance de l’acte. Ce ne sont pas là de ces nullités qui peuvent
être couvertes par l’article 173 du code de procédure civile. Je crois donc
qu’on ne doit pas adopter la nouvelle rédaction qui pourrait donner lieu à de
graves difficultés.
M. Leclercq. - Le cas que M. le ministre de la justice a cité, et
où il s’agit d’une nullité de forme antérieure au jugement, m’avait échappé, et
si celle-là m’avait échappé, il pourrait en être de même de beaucoup d’autres.
Je citerai par exemple le cas d’une commune qui n’aurait pas été autorisée à
plaider, et beaucoup d’autres qui ne se présentent pas maintenant à ma mémoire.
Cette considération m’engage à revenir sur ma première opinion, que je
reconnais mal fondée.
M. Van Meenen. - J’ai demandé la parole pour proposer la suppression
entière de l’article 17 où nous nous bornons à reproduire l’article 66 de la
constitution du 29 frimaire an VIII. Je pense que la discussion actuelle vous a
tous suffisamment convaincus du danger qu’il y aurait à toucher un texte qui,
depuis 40 ans, a été trituré, mûri, interprété, et sur lequel enfin il n’existe
plus de contestation. Voici ce que porte cet article 66 : « Le tribunal de
cassation ne connaît point du fond des affaires ; mais il casse les jugements
rendus sur des procédures dans lesquelles les formes ont été violées, ou qui
contiennent quelque contravention expresse à la loi ; et à renvoyer le fond du
procès au tribunal qui doit en connaître. » C’est ce texte qui a servi
lui-même de texte à toutes les décisions de la cour de cassation depuis 30 ou
40 ans. Tout le monde sait que l’article comprend les actes où ont été violées
les formes substantielles aussi bien que les formalités prescrites à peine de
nullité. Il n’est personne qui ne le sache. Pourquoi donc le répéter ? Est-ce
des attributions de la cour de cassation que nous nous occupons ici ? Non, mais
uniquement de l’organisation de la cour de cassation.
N’allons
pas nous occuper d’autre chose et remettons-nous en pour le reste à l’article
58, qui renvoie aux lois actuellement existantes. Je propose donc à l’assemblée
de supprimer l’article 17. Si toutefois on ne voulait pas de cette suppression,
je dirai que le premier paragraphe est inutile, puisque se trouve déjà dans la
constitution ; et quant au second, il n’est que la répétition de l’article 66
de la loi de frimaire an VIII. Ce texte existe depuis 30 ans, il a toujours été
entendu de la même manière ; j’aimerais mieux qu’on se référât à ses
dispositions que de les insérer dans notre loi.
M. Barthélemy. - Messieurs, nous ne faisons pas de la législation
nouvelle dans ce moment-ci ; nous ne faisons qu’organiser la cour de cassation
pour remplacer celles qui existent maintenant. Sous ce rapport, je crois qu’il
serait prudent de suivre l’avis de l’honorable M. Van Meenen, et de se borner,
en supprimant l’article 17, à s’en référer à la constitution de l’an VIII ;
mais si vous voulez faire quelque chose de plus, expliquez-vous bien. Alors, je
distinguerais les moyens de forme des moyens du fond. Entre les moyens de
forme, je distinguerais ceux résultant de la procédure antérieure au jugement,
de ceux qui se trouveraient dans le jugement même. Pour
ceux résultant de la procédure antérieure, le code en a prescrit plusieurs à
peine de nullité ; je m’en tiendrais là, en ajoutant « pourvu que la
nullité n’ait pas été couverte. » Car ces nullités peuvent être toutes
couvertes, même celle qui résulterait d’un exploit signifié par un simple
particulier. Il suffit pour cela que la partie ne veuille pas s’en prévaloir.
En effet, si sur un tel exploit d’assignation je veux comparaître devant le
juge, et être jugé par lui, qu’importe à la loi, et pourquoi serais-je forcé à
user d’un bénéfice qu’elle m’accorde, et dont je ne veux pas ? Je dirais donc,
dans l’article, que ces nullités donnent lieu à cassation, si elles n’ont pas
été couvertes. Quant à la nullité du jugement, elle peut venir, ou de ce que
tous les juges n’auront pas assisté au rapport ou n’auront pas entendu les
plaidoiries, ou de ce que le jugement n’aura pas été rendu en séance publique.
Ces nullités sont substantielles. Quant aux nullités de fond, elle proviennent
de la violation de la loi ; il faudrait donc distinguer très clairement tous
ces cas dans votre article ; sans cela vous allez donner lieu à d’inextricables
difficultés. Mon opinion, je le répète, est que nous ne faisons rien de neuf,
et que ce qu’il y aurait de mieux à faire, ce serait d’adopter la proposition
de M. Van Meenen. Si on ne veut pas, je serais d’avis que l’on renvoyât l’article
à la section centrale, pour le rédiger dans le sens des observations présentées
par M. Jonet.
M. le ministre de la justice (M. Raikem). - Un des honorables préopinants a demandé la
suppression d l’article 17 ; je ne pense pas qu’il y ait lieu à accueillir
cette proposition. L’article ne fait qu’’exprimer ce qui est maintenant de
jurisprudence constante. Déjà dans l’article 15, on a rappelé les dispositions
de l’article 65 de la constitution de l’an VIII, qui règle les matières sur
lesquelles prononcera la cour de cassation ; il n’y a pas de raison pour qu’on
n’en fasse pas autant de l’article 66. On a pensé, en rédigeant le projet,
qu’en s’occupant d’organiser la cour de cassation, nous devions rendre son
organisation complète ; c’est une institution nouvelle, et qui n’a jamais existé pour nous depuis notre séparation d’avec la
France ; c’est le moment de faire les choses aussi bien que possible. La
constitution de la Belgique porte : « La cour de cassation ne connaît pas
du fond des affaires. » La constitution de l’an VIII dit la même chose du
tribunal de cassation, puis elle ajoute : « Mais il casse les jugements
rendus sur des procédures dans lesquelles les formes ont été violées, etc. »
Il me semble que puisque notre constitution n’a pu contenir une semblable
disposition, il faut maintenant la compléter par une disposition additionnelle
; c’est tout ce qu’a fait la section centrale, en ajoutant les mots
« formalités substantielles, » qui ne sont que la concrétisation d’un
fait déjà consacré par une jurisprudence constante : par là toutes ces
difficultés seront levées.
M. Fleussu. - Messieurs, nous voulons le maintien de la
législation ancienne et le maintien de la jurisprudence qui s’est établie sur
cette législation. Il faut donc maintenir la rédaction de la section centrale.
Voyez la difficulté qui se présenterait si vous adoptiez la proposition de M.
Van Meenen. Il a fallu de longs débats, de longues et nombreuses discussions
sous l’ancienne loi pour que la jurisprudence fût fixée. Enfin elle l’a été.
Aujourd’hui que nous faisons une loi nouvelle, si nous ne fixons pas la
jurisprudence par une disposition formelle, de nouvelles discussions pourront
s’élever. Je dis plus, c’est que la discussion actuelle nous oblige à maintenir
dans l’article les mots qu’on en voudrait retrancher. On ne manquerait pas en
effet de s’emparer de cette discussion et de dire : Voyez, en faisant la loi et
nonobstant la demande qu’ont faite plusieurs membres, on s’est bien gardé d’y
introduire ce que la jurisprudence avait déjà décidé ; et, comme vous le voyez,
cette discussion même servirait d’arme à ceux qui auraient intérêt à ne pas se
conformer à la jurisprudence. Que voulons-nous, en un mot ? Que la loi nouvelle
soit conforme à la jurisprudence établie. L’article ne laisse pas de doute à
cet égard, il y a donc nécessité de l’adopter.
M. Van Meenen. - Messieurs, on vient de vous dire qu’il y avait
nécessité d’adopter l’article du projet, par la raison que la discussion
actuelle pourrait donner lieu à soulever les questions qui, déjà, ont causé de
vifs débats sous l’ancienne loi. Si, d’après la proposition que je fais,
l’assemblée se détermine à supprimer l’article 17, il sera bien entendu que
c’est parce que déjà les attributions de la cour de cassation sont fixées par
une loi antérieure, dont on maintient les dispositions, sur le sens desquelles,
d’ailleurs, la jurisprudence est fixée depuis longtemps. On saura que c’est
l’extrême danger de toucher à une loi, dès longtemps bien établie et bien
exécutée, qui nous a fait reculer devant la disposition nouvelle qu’on nous
proposait. (Aux voix ! aux voix !)
M. Destouvelles. - Je ne ferai qu’une seule observation. Nous créons
une nouvelle cour de cassation. Que pour les cours de cassation qui existent
actuellement nous nous en rapportions à la loi actuellement en vigueur, je le
conçois ; mais quand nous faisons une loi nouvelle pour une cour nouvelle, nous
devons entourer cette dernière de toutes les précautions possibles. Il faut, en
lui donnant le pouvoir de casser les actes dans lesquels auraient été omises
des formalités prescrites à peine de nullité, lui donner aussi celui de casser
pour l’omission de formalités substantielles.
En résumé, et ceci
est décisif, il n’y a pas d’inconvénient à conserver l’article tel qu’il est
rédigé, et il y en aurait à le supprimer, ou à n’y pas insérer les mots dont la
suppression est demandée. Il n’y a donc pas à balancer. (La clôture ! la clôture !)
- La clôture est mise aux voix et prononcée.
M. le président. - Il y a trois amendements, celui de M. Van Meenen…
M. Van Meenen. - Ma proposition n’est pas un amendement, c’est
plutôt la question préalable sur l’article.
M. Fleussu
et M. le ministre de la justice (M. Raikem). - La suppression d’un article n’est pas la question
préalable.
- La suppression
de l’article est mise aux voix et rejetée.
Les amendements de
M. Jonet sont pareillement rejetés.
M. H. de Brouckere. - J’ai proposé la suppression des mots
« formalités substantielles. »
- Cette
suppression est mise aux voix et rejetée, ainsi que la suppression du premier
paragraphe, demandée par M. Liedts.
M. le président. - Il ne reste plus que l’amendement de M.
Destouvelles.
- Cet amendement
est mis aux voix et adopté. On passe à la discussion de l’article 18.
(Ici M. de
Gerlache cède le fauteuil à M. Destouvelles.)
Article 18
« Art. 18. La
cour de cassation se divise en deux chambres, dont l’une porte le titre de
chambre des requêtes, l’autre celui de chambre civile et criminelle. »
M. Van Innis. - Messieurs, j’ai demandé la parole contre
l’institution d’une section des requêtes. Quand on a examiné les lois et
règlements sur la matière, on s’est convaincu qu’en France la chambre des
requêtes a été introduite pour empêcher l’encombrement qu’il y aurait eu à la
chambre civile de la cour de cassation. En France, où la cour est placée à la
tête de 26 à 28 cours royales, et d’un nombre infini de tribunaux inférieurs,
la chose est concevable, et peut-être aussi peut-on ajouter à cela la
superstition pour un usage ancien. Mais en Belgique, où la cour ne se trouvera
qu’à la tête de trois cours d’appel et d’un nombre comparativement inférieur de
tribunaux, je ne crois pas qu’il soit besoin d’une chambre des requêtes. Ainsi
la question de l’institution de cette chambre se présente à votre examen pure
et simple et dégagée de toute influence extérieure. Je vais examiner la
question, et vous connaîtrez par les développements où je vais entrer les
motifs qui m’ont fait voter contre la chambre des requêtes dans ma section, et
également les motifs qui me feront voter contre, à moins que les orateurs qui
parleront après moi ne me fassent reconnaître que je suis dans l’erreur.
La cour de
cassation est établie, a-t-on dit, et je l’ai encore entendu répéter
aujourd’hui, dans l’intérêt de la loi, et on semble dire que l’intérêt de la
loi absorbe l’intérêt des justiciables ; en séparant la question de fait de la
question de droit, je le conçois. Toutefois, il me semble que la cour est
destinée éminemment pour faire droit aux parties, pour compléter
l’administration de la justice. En effet, pour mettre un terme aux procès, la
loi s’est trouvée dans la nécessité de poser deux degrés de juridiction, et
pour certaines affaires d’un intérêt minime, elle s’est contentée d’un seul
degré ; elle oblige les justiciables à se soumettre aux décisions de ces cours
et tribunaux. Mais ces décisions sotn portées par des hommes faibles. Ces décisions
sont comptées, non selon le poids des opinions, mais par le nombre. C’est une
fatalité dans l’administration de la justice, mais elle est inévitable. Ces
décisions peuvent même être portées à la majorité d’une voix. Mais, messieurs,
quand ces décisions violent les formes constitutionnelles, lorsque ces cours et
tribunaux excèdent leur pouvoir, lorsque ces cours et tribunaux, au lieu de
juger « secundum leges, » jugent « de legibus, » et ainsi
ne remplissent pas l’office de juges, mais s’érigent en législateurs, sans
doute la présomption de légalité ne peut s’attacher à des jugements qui ne
méritent pas ce nom ; car, dans le fait, ce ne sont que des actes arbitraires,
qui doivent être annulés. C’est ainsi que les lois romaines prononçaient la
nullité de plein droit contre de pareilles décisions, « ipso jure nullae
sunt sententiae litae contra leges, contra constitutiones. »
La législation
moderne n’a pas admis cette nullité de plein droit, mais elle a institué la
cour de cassation pour en juger. Le pourvoi en cassation est donc plus
important qu’un acte ordinaire ; car, quoique la cour de cassation ne juge que
le droit, par sa décision, si elle casse, tout en remis en discussion, et le
droit et le fait, et la forme et le fond. Comment donc concevoir que vous soyez
plus sévères pour l’exercice de ce droit que pour les affaires ordinaires, par
l’institution d’une chambre qui tend à consacrer l’injustice, comme j’aurai
l’honneur de le prouver tout à l’heure ?
D’abord la bonne
administration de la justice exige que la partie soit égale entre le demandeur
et le défenseur ; tous deux doivent être également entendus. Or, l’institution
de la section des requêtes pèche par là. En effet, le demandeur en cassation
est seul admis à se défendre. Le ministère public donne ses conclusions ; enfin
la cour rend son arrêt toujours en l’absence du défenseur. Il en résultera
souvent peut-être que le ministère public fera valoir des moyens en faveur du
demandeur, auxquels ni lui ni son avocat n’aurait peut-être pas songé. La cour,
de même, dans ses considérations et d’après le principe « supplent judex
quoe desunt advocatis, » pourra consigner des moyens auxquels le demandeur
n’aurait pas plus songé que son avocat ; et en tout cas, messieurs, il en
résultera toujours que cet arrêté motivé portera un préjudice qui, quoi qu’on
en dise, sera préjudiciable au défendeur. En sorte qu’on pourra toujours dire
de votre chambre des requêtes ce que disait Sénèque de l’empereur Claude :
« Quod nullus citius causas dicebat, saepe una tantum audita parte, saepe
neutra. »
Mais, messieurs,
que dit-on ? La section des requêtes n’écartera que les pourvois évidemment mal
fondés. Mais on ne remarque pas que si elle n’écarte que les pourvois
évidemment mal fondés, la loi ne borne pas, ne limite pas son pouvoir ; car ce
qui est clair pour moi est obscur pour un autre, ce qui est clair pour un autre
est obscur pour moi, chacun voit les choses à sa manière et toute évidence est
relative. Il n’y aurait donc rien de fixe, rien de déterminé.
Mais si elle n’écarte
que les pourvois évidemment mal fondés, pourquoi n’exigez-vous pas l’unanimité
des voix ? Des magistrats doués de lumières supérieures, des jurisconsultes
profonds, doivent voir tous avec une égale facilité ce qui est évidemment mal
fondé. Vous placez donc la section des requêtes dans une fausse position. Mais
la section des requêtes ne fût-elle pas contraire à la bonne administration de
la justice, elle serait contraire à l’institution de la cour de cassation
elle-même, car elle peut y causer une diversité de jurisprudence ; elle
admettra un pourvoi par un arrêt motivé où l’on verra qu’elle a interprété la
loi dans le sens du demandeur, et ce même arrêt pourra être écarté, ou plutôt
le pourvoi pourra être rejeté par la section civile par des motifs tout
contraires. Voilà donc deux arrêts contradictoires, et de cette manière
s’établit une diversité de jurisprudence d’autant plus scandaleuse que la
contradiction se trouve précisément dans la même affaire.
Mais, dit-on, le
roulement pourrait amener de même cette diversité de jurisprudence. Cela est
vrai. La cour de cassation n’en atteindrait pas pour cela mieux son but. Mais
puisque vous me dites que cette diversité est possible par le roulement,
faut-il la multiplier encore, par l’institution de la section des requêtes ?
Ainsi la cour, que vous placez à la tête du corps judiciaire pour ramener
l’unité dans la jurisprudence, donnera elle-même le scandale de la diversité,
et le scandale produit par elle sera d’autant plus déplorable que les parties y
trouveront un encouragement pour plaider ; ce sera une incitation donnée aux
plaideurs, et souvent cela fera une bonne partie du procès. Ainsi voilà encore
un vice dans votre section des requêtes.
Mais il y a plus,
je la trouve même inutile. En effet, si la section des requêtes est destinée,
comme vous voulez le faire croire, à ne rejeter que les pourvois évidemment mal
fondés, ils seront en petit nombre. Mais ce petit nombre sera réduit à peu de
chose si vous, attachez à la cour un corps d’avocats qui se respectent et qui
refuseront l’appui de leur talent et de leur plume à ces pourvois mal fondés.
Voilà donc une
section sans travail. Mais craignez-vous tant les pourvois témérairement faits ?
Mais n’avez-vous pas une amende à infliger aux demandeurs ? n’avez-vous pas un
minimum et un maximum ? et ne pouvez-vous permettre de graduer l’amende, ou
même d’accorder des dommages-intérêts au profit du défendeur ? Ainsi je trouve
que la section des requêtes est absolument inutile et que le peu de pourvois
évidemment mal fondés seraient vidés tout de même en infligeant une amende aux
demandeurs téméraires.
Maintenant
on objectera l’expérience de quarante ans. Je désirerais de savoir ce que cette
expérience peut avoir prouvé. D’abord elle a fait que plusieurs jurisconsultes
se sont élevés contre la section des requêtes, tandis que pas un seul ne l’a
défendue. Ainsi pour ce qui regarde l’expérience de 40 ans, elle ne plaide pas
en faveur de la section des requêtes. Chez nous, depuis assez longtemps les
fonctions de la cour de cassation sont remplies par les deux cours d’appel du
royaume. Cette institution monstrueuse a été attaquée sous tous les rapports,
mais vous remarquerez que personne n’a regretté l’absence de la section des
requêtes. Vous remarquerez maintenant l’avis de vos sections, qui presque
toutes se sont prononcées. La cour d’appel de Bruxelles et le barreau se sont
prononcés contre, le tribunal de Huy et le tribunal de Bruges se sont aussi prononcés
contre.
Ainsi donc,
messieurs, je crois en avoir assez dit pour vous convaincre que cette
institution est inutile, ne remplit pas son but, et est contraire à la bonne
administration de la justice. Je permettrai qu’on qualifie cette institution de
bureau de passeport de pourvois, d’antichambre ; pour moi, je la qualifierai
d’institution monstrueuse.
M. de Gerlache. - Messieurs, avant-hier un de nos honorables collègues
a très vivement attaqué la chambre des requêtes, en ajoutant qu’il y
reviendrait aujourd’hui avec de nouvelles autorités et de nouveaux arguments,
qu’il vous prouverait que cette chambre était repoussée en France par tout le
monde comme une superfétation, et que ce n’était pas le moment de l’admettre
chez nous.
J’attendrai ces
arguments et ces autorités pour me décider ; mais dans tout ce que j’ai lu ou
entendu jusqu’ici, je l’avoue, rien n’a pu me faire revenir encore de l’idée
qu’une chambre des requêtes est de nécessité absolue, et que si vous la
supprimez, vous mutilez l’institution, et vous la dégradez. Vous aurez moins de
garanties que n’en offrait le conseil des parties, dont on vous a parlé, et
vous n’aurez point une véritable cour de cassation. On vous a dit que d’après
l’ordonnance de 1738, qui établissait un simple bureau préparatoire chargé
d’examiner les procès, sans pouvoir prendre aucune décision, chaque pourvoi en
cassation était soumis à une double épreuve ; tandis que la chambre des
requêtes, qui a succédé à ce bureau préparatoires a le droit de rejeter, et
rejette en effet, sans avoir entendu contradictoirement les parties ; on a
prétendu que c’était là un pouvoir énorme et dangereux.
Je sais que MM.
Isambert et Carré ont soutenu cela, et que ce sont des hommes d’un grand mérite
; cependant ils ne m’ont point convaincu : il me semble même qu’ils ont tout à
fait perdu de vue le véritable but de l’institution.
Il y a une grande
différence entre l’ancien conseil des parties, qui cassait, non seulement pour
violation de la loi, mais « pour injustice évidente, » et qui
connaissait de fond des affaires en définitif, et la cour de cassation
actuelle, qui annule les arrêts et jugements rendus en dernier ressort, dans
les cas seulement où ils contiennent une infraction manifeste à la loi et qui
renvoie pour le fond à une autre cour ou tribunal. L’ancien conseil des parties
offrait dans bien des occasions, un troisième degré de juridiction aux
plaideurs ; la cour de cassation, jamais. Vos cours d’appel sont cours
souveraines.
Dans quel but est
donc instituée la cour de cassation ? D’abord et avant tout, pour juger les
procès (non pas entre les parties intéressées, l’une à soutenir un arrêt,
l’autre à ce qu’il soit annulé) mais les procès entre la loi d’une part, et
l’arrêt ou le jugement attaqué de l’autre. Cela est si vrai que, lorsqu’un
arrêt, lorsqu’un jugement passé en force de chose jugée, n’a point été dénoncé
par la partie lésée, s’il est contraire à la loi, le ministère public en poursuit
l’annulation dans l’intérêt de la société, et la cour de cassation est tenue de
la prononcer.
Et si maintenant
vous considérez l’intérêt privé, l’intérêt bien entendu des plaideurs, quelle
est la nécessité, je vous prie, d’attraire en cassation, de forcer à se
défendre, à achever de se ruiner peut-être, celui qui a triomphé en dernier
ressort, celui contre lequel on aura en vain épuisé tous les degrés de
juridiction, tous les détours de la chicane ? Il connaît la justice de sa cause
; il veut tout attendre de la sagesse de la cour suprême, qui ne venge que les
infractions formelles à la loi, et vous ne voulez point qu’il s’y confie !
Messieurs, un des grand principes de la société moderne, c’est d’abroger les
procès, c’est de mettre un terme à l’incertitude des jugements. Je le dis par
expérience, les trois quarts des pourvois sont si évidemment mal fondés, qu’il
ne faut souvent pas une heure d’examen à un véritable jurisconsulte pour en
faire justice.
Certes, on
conviendra que la présomption doit être en faveur de la chose définitivement
jugée. Que la partie qui l’attaque, qui est mécontente, présente son mémoire de
griefs et fasse plaider son avocat pour en obtenir l’annulation, rien de plus
juste ; mais quelle est la nécessité de mettre deux avocats en mouvement,
lorsqu’une seule partie se plaint ? Ce n’est pas sans doute aux avocats que je
fais cette question ; c’est à vous, messieurs, qui êtes législateurs ! Il
résulte de ces plaidoiries contradictoires sans nécessité, pour la cour, une
perte de temps énorme, et pour les défenseurs, un surcroît d’embarras et de
frais.
C’est par erreur
que l’honorable et savant rapporteur de la section centrale vous a dit que la
chambre des requêtes n’existait que depuis l’an VIII ; elle est presque
contemporaine de la cour de cassation. Par la loi de 90, le bureau des
requêtes, qui avait succédé à l’ancien bureau des commissaires, avait le droit
d’admettre ou de rejeter les requêtes. A la vérité, il ne pouvait le rejeter
qu’aux trois quarts des voix. Mais la loi du 2 brumaire an IV, si je la
comprends bien, organisait le tribunal de cassation en trois sections, et
attribuait à la section des requêtes le droit d’admettre ou de rejeter les
pouvoirs, après avoir entendu le demandeur, tout comme elle le fait
aujourd’hui.
Ainsi, messieurs,
ce que l’on vous propose, c’est de mutiler une institution éprouvée par
quarante années d’expérience. Elle est inutile et dangereuse, assure-t-on,
parce qu’on n’y appelle qu’une des parties intéressées ! Mais encore une fois,
n’oublions pas que vous n’avez point trois degrés de juridiction ; que celui
qui a triomphé en dernier ressort a le droit incontestable de s’arrêter là,
puisqu’il a tout obtenu, même l’exécution du jugement ; qu’un procès en
cassation se plaide entre la loi que l’on dit violée et le jugement qui la
viole, que les particuliers n’y figurent qu’accessoirement, et que c’est bien
assez enfin de forcer celui qui a obtenu gain de cause, à paraître dans
l’arène, lorsqu’il est menacé par contrecoup, et qu’il y aurait danger pour lui
à ne point se présenter. Le recours en cassation est un moyen extrême ; il faut
le rendre difficile. Il ne faut pas qu’un plaideur obstiné, qui est riche,
puisse effrayer son adversaire, dont le droit a été reconnu, mais qui est
pauvre, par la perspective d’une suite de procédures sans fin, et le
contraindre ainsi à des transactions souvent iniques. C’est là un inconvénient
auquel vous ne sauriez parer en augmentant les amendes contre le demandeur en
cassation qui est obstiné ou de mauvaise foi.
Or, le jugement
attaqué est sous les yeux de la chambre des requêtes ; un des conseillers est
chargé d’examiner les pièces avec le soin le plus minutieux ; son rapport
détaillé est fait en séance publique ; le demandeur en cassation développe les
moyens exposés dans sa requête et dans ses mémoires imprimées, le ministère
public prend ses conclusions, et la cour décide. Il est, je crois, très inexact
de soutenir, comme le prétend M. Godard dans son Manuel de la cour de
cassation, que la chambre des requêtes n’admette pour l’ordinaire un pourvoi
que lorsque les moyens de cassation lui paraissent si évidents qu’elle eût
cassé d’emblée sans hésitation, si elle avait dû prononcer comme chambre
civile. Ayant suivi la cour de cassation pendant quatre années (depuis 1810 jusqu’à
1814), je puis attester qu’alors du moins, la chambre des requêtes admettait
toujours les pourvois dès qu’il y avait doute. Il est arrivé, messieurs, qu’on
se pourvoyait en même temps contre deux arrêts rendus en même temps contre deux
cours, qui avaient jugé en sens contraire sur une question identique, et la
chambre des requêtes accueillait les deux pourvois.
La chambre des
requêtes a pour but d’empêcher que les affaires ne s’encombrent à la chambre
civile. C’est une procédure sommaire qui suffit pour distinguer les pourvois
bien fondés de ceux qui ne le sont pas. Elle fait gagner beaucoup de temps aux
magistrats et aux plaideurs. Elle fait l’office de la chambre de mise en
accusation en matière criminelle, de la prise en considération ou de la première
lecture dans nos assemblées délibérantes.
Or, si au lieu de
ne distribuer à la chambre civile que les affaires qui ont déjà subi une
première épreuve à la chambre des requêtes, vous les répartissez toutes, dès
l’abord, entre deux chambres civiles, vous supprimez réellement une garantie,
un examen, au détriment de celles qui, seules, méritent une discussion
sérieuse, et qui, seules, offrent des chances de cassation en définitif.
M. Godard a vanté
le système introduit en Belgique par les arrêtés de 1815, qui suppriment la
section des requêtes, et simplifient beaucoup, dit-il, l’institution.
Mais si M. Godard
aime l’institution d’une cour néerlandaise dans toute sa pureté, nous la lui
céderions volontiers telle que Van Maanen nous l’avait faite, une haute cour
jugeant le fond des affaires, et constituant une troisième et dernier degré de
juridictions. Je ne crains pas de dire, messieurs, que c’était là le plus
monstrueux abus qui ait jamais existé ; et que si tous les autres corps
judiciaires eussent été indépendants, ce qui est douteux, celui-là seul eût
suffi pour fonder le despotisme le plus intolérable sur la nation tout
entière. C’est ce que j’ai démontré, je
pense, assez fortement, lors de la discussion de la loi du 27 avril 1827. Il
paraît qu’on n’est jamais admirateur que de ce qu’on n’a point. Mais,
messieurs, ne vous laissez pas ébranler trop facilement par des autorités ;
comme il n’y a rien de nouveau sous le soleil, chacun aujourd’hui, veut se
faire remarquer par le paradoxe.
Ce qui caractérise
le projet qui vous est soumis, c’est l’esprit de conservation. Il tend à
maintenir tout ce qui existe, non seulement en fait d’institutions et
d’attributions, mais encore tout le personnel des cours et des tribunaux.
Il propose
seulement de combler une double lacune pour obéir à la constitution. Si, au
lieu de calquer tout simplement votre cour de cassation sur celle de France,
vous innovez, sous prétexte d’améliorer, vous abandonnez l’esprit du projet, et
cela pourra vous entraîner fort loin.
On a dit qu’à la prochaine
session des chambres en France, ou s’empresserait infailliblement de présenter
un projet de loi pour supprimer la chambre des requêtes. Je suis fort d’avis,
messieurs, que nous attendions que cette loi soit présentée.
Je vous avoue que
si j’entendais dire que M. Merlin réprouve la chambre des requêtes ; si
j’entendais attester, par des témoins sûrs, que MM. Daniel et Henrion de Ponsey
en avaient reconnu l’abus ; si, enfin, la cour de cassation consultée,
elle-même, se levait en masse pour demander la suppression de ce rouage
inutile, je dirais : hâtons-nous d’imiter la France ! Car, alors, je n’aurais
plus devant moi une expérience de 40 ans ; et, j’ose vous le dire, messieurs,
un fait de 40 ans, par le temps qui court, c’est quelque chose de rare. C’est
bien dommage que nos voisins n’en puissent compter autant pour aucune de leurs
chartes.
Quant
à la dépense, la suppression de la chambre des requêtes n’y ajoute rien,
puisque alors on établirait deux chambres civiles de cassation.
Je dirai, en terminant,,
que je ne suis nullement d’avis de faire juger à sept conseillers, comme le
propose mon honorable ami M. Raikem. Neuf conseillers ne sont pas trop : en
France, il en faut onze, cela coûtera un peu plus. Je ne dirai pas que la
justice est une si belle chose qu’on ne peut trop la payer : mais je dirai que
les corps un peu nombreux, s’observant mieux, ont mieux le sentiment de leur
dignité, et ils offrent aussi plus de chances pour le talent.
M. Helias
d’Huddeghem. - La loi du 1er
octobre 1790 n’avait point attribué à une section particulière, une compétence
exclusive pour statuer sur l’admission des pourvois en matière civile ; elle se
bornait à déclarer qu’avant que la demande en cassation ou en prise à partie fût
portée en jugement, il serait préalablement examiné et décidé si la requête
devait être admise et la permission accordée (Art. 6).
A cet effet, tous
les six mois, le tribunal de cassation avait à nommer vingt de ses membres,
pour former un bureau qui, sous le titre de bureau des requêtes en cassation ou
en prise à partie, jugeait celles qui devaient être admises ou rejetées, ce
bureau ne pouvait juger qu’au nombre de douze membres au moins. (Art. 6).
Si dans ce bureau,
les trois quarts des voix se réunissaient pour rejeter une requête en cassation
ou en prise à partie, elle était définitivement rejetée ; si les trois quarts
se réunissaient pour admettre la requête, elle était définitivement admise,
l’affaire mise en jugement, et le demandeur autorisé à assigner (Art. 7).
Lorsque le nombre
de voix ne se réunissait pas pour rejeter ou admettre, la question était portée
à tout le tribunal assemblé, et la simple majorité faisait décision (Art. 8 et
10).
Le demandeur en cassation
avait alors deux chances d’admission contre une seule de rejet ; depuis
l’introduction de la chambre des requêtes, qui doit son origine à la loi
organique du 27 ventôse an VIII, l’on court une double chance de perdre son
procès, contre une simple chance de le gagner. .
Avant de combattre
le système de ceux qui se prononcent pour le maintien de la section des
requêtes, dont je crois la suppression nécessaire, il est utile de rappeler que
des jurisconsultes du premier ordre, tout en se déclarant contre le maintien de
la chambre des requêtes, soutiennent néanmoins, pour le cas qu’on ne
supprimerait pas entièrement l’admission préalable de la requête en cassation,
qu’il conviendrait alors de rétablir le bureau des requêtes institué par la loi
du 1er décembre 1790.
Les avantages du
bureau des requêtes sur la section des requêtes, se résument en peu de mots par
les partisans du bureau des requêtes. Ils disent : « La partie
demanderesse, dans ce cas, avait le double avantage de voir son affaire
examinée deux fois par les mêmes juges : ceux-ci, si les moyens de cassation
invoqués étaient sans réplique, cassaient l’arrêt attaqué sur le champ ; si
l’affaire méritait un examen contradictoire, ils ordonnaient le « soit
communiqué. » Dans tous les cas, la partie ne voyait point son affaire
décidée par le bureau préparatoire, elle avait toujours la totalité de ses
juges ; si le bureau d’examen était pour elle, son influence la favorisait
encore dans le sein du tribunal assemblé ; s’il était contre elle, l’opinion du
tribunal assemblé pouvait être différente de celle du bureau et ordonner
l’admission de la requête et le « soit communiqué » contre l’avis du
bureau des commissaires. D’ailleurs les mêmes juges qui statuaient sur
l’admission d’un pourvoi, devant ensuite statuer définitivement sur l’affaire
instruite contradictoirement, à la moindre nuance de difficulté qui se
présentait, croyaient qu’il était de leur devoir et de leur impartialité de
juger l’affaire contradictoirement, Ainsi, les parties avaient la certitude que
leurs intérêts étaient examinés avec une attention scrupuleuse. »
Aucune de ces
garanties ne se trouve dans la section des requêtes établie par la loi citée du
27 ventôse an VIII, comme je vais avoir l’honneur de le démontrer.
Après avoir
mûrement examiné la question de l’opportunité du maintien de la section des
requêtes, je dois le dire franchement, je crois que le législateur a manqué le
but qu’il s’était proposé, qui ne peut avoir été de refuser l’accès de la
justice, ou de rendre cet accès difficile ; c’est cependant, messieurs, ce qui
arrive. Car d’après l’autorité d’un écrivain recommandable, l’on attend souvent
un an au moins pour l’admission des requêtes, ce qui est très nuisible aux
intérêts de la partie qui a obtenu le jugement attaqué puisque le pourvoi n’est
pas suspensif. « Chose incroyable (disait M. Isambert sur le projet de loi
du 18 novembre 1814) un arrêt d’admission, qui est au moins une présomption que
l’arrêt attaqué a violé la loi, n’en suspend pas l’exécution, et il faut encore
une année pour obtenir la cassation. Pendant ce temps, croit-on que la partie
qui a obtenu l’arrêt vicieux néglige de l’exécuter et de se soustraire d’avance
aux chances de la cassation en dissipant ou détournant les capitaux ? Mille,
deux mille arrêts, peut-être, échappent par année à la cassation. On préfère
les exécuter plutôt que d’exercer un recours inutile. »
M. le président. - La parole est à M. Leclercq. (A demain ! à demain ! Non ! non ! il est de bonne heure encore !)
M. Leclercq
se dispose à parler ; mais sur la demande de plusieurs membres, la suite de la
discussion est remise à demain,
- La séance est
levée à quatre heures moins un quart.